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1240. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1882 » pp. 174-231

Mercredi 4 janvier Aujourd’hui la princesse est allée voir un peintre de ma connaissance… Tout à coup, elle s’est mise à pleurer, et a dit « qu’elle ne savait que faire de ses journées… qu’elle voulait voir des choses qui la sortent un peu de son chagrin », ajoutant « qu’elle a besoin que ses amis l’adoptent un peu. » Il y a vraiment de grandes qualités de cœur chez cette Altesse. […] Oui, huit mois pendant lesquels il faut soulever tout un monde… puis au bout de cela, ne pas savoir, si ça y est ou si ça n’y est pas… Ne pas le savoir pendant bien longtemps… car il faut cinq ou six ans, pour avoir la certitude que le volume sorti de vous, prend décidément sa place dans votre œuvre. » Mercredi 19 avril Ce soir, au fumoir de la princesse, Augier raconte ceci : Il se trouvait à l’Académie, à côté de Villemain, son ennemi personnel. […] Il était le correspondant d’un étudiant en médecine de sa province, qui venait passer le dimanche avec lui, et amenait, tous les mois, une sœur qu’il faisait sortir d’un couvent de Paris. […] Et la fillette passait des demi-journées dans un coin de la chambre à rêvasser, se refusant de sortir, quand il lui proposait. […] Mais au bout de sa confession, que dans son innocence, le romancier croyait effroyable, le confesseur des chenapans sortit de son confessionnal, l’embrassa, lui dit : « Je t’administrerai le coup de torchon (l’absolution) samedi, et nous mangerons ensemble le bon Dieu, dimanche. » On lui prête, à ce confesseur, une agonie épouvantable, une agonie délirante, où il confessait des criminels imaginaires, encore plus terribles que le romancier.

1241. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre III. Poëtes françois. » pp. 142-215

Ses recherches sont curieuses ; ses réfléxions judicieuses ; ses anecdotes bien choisies, & le style a ces graces fines & piquantes qui brillent dans tout ce qui est sorti de la plume de cet illustre centenaire. […] les Grecs & les Latins sortirent, pour ainsi dire, de leurs tombeaux & revinrent nous donner des leçons. […] Il a un genre d’ironie & de plaisanterie qui n’est qu’à lui ; mais il sort souvent de ce genre. […] Son Vertvert est le plus enjoué de tous ceux qui sont sortis de sa plume. […] Les talens d’Ovide & peut-être ses défauts se font sentir dans tout ce qui est sorti de la plume féconde de M.

1242. (1855) Préface des Chants modernes pp. 1-39

Une bonne partie de cette société française qui pleure le passé en arrosant des lis et qui tient M. de Vigny en singulière aversion, parce qu’il est un libre penseur, et qu’il sort par son talent de la médiocrité désolante de son monde, fut ravie, sauta de joie, et proclama l’ex-ministre un grand homme. […] Ils muselèrent la presse par des lois oppressives, ils arrêtèrent la représentation des pièces de théâtre, ils jetèrent bas de leur chaire des professeurs savants, sages et aimés. — Ceux-là, qui furent de petits journalistes parvenus, qui sortirent de je ne sais quel salon guindé où l’on avait applaudi leurs vaudevilles et leurs égrillardes chansonnettes, ceux-là qui, grimpant d’épaules en épaules et de méprises en méprises, en étaient arrivés à être tout-puissants sur les choses dramatiques, osèrent porter la main sur Balzac ; ils prirent le géant au collet, mirent son drame dans leur souricière, et, sans reconnaissance des gloires nationales, sans foi artistique, sans pudeur littéraire, ils ruinèrent et mirent à néant l’administrateur courageux qui avait le plus aidé à l’éclosion de toute une vaillante génération de poëtes. — D’autres ont fait pis encore. […] Heureusement que Dieu ne se lasse pas de faire sortir le bien des désastres les plus grands. […] Pour les savants, le Cosmos est insuffisant ; il s’arrête à des descriptions inutiles, il substitue parfois la poésie à la science ; il oublie souvent la formule pour parler un langage humain ; il cherche à intéresser et sort volontiers du tabernacle où seuls les élus peuvent pénétrer ; au lieu de cacher son Dieu, il le montre. […] Un jour peut-être cette robuste Amérique qui s’établit maintenant entre des monceaux de charbon de terre et des piles de dollars, sera lasse de son matérialisme, et, pour se relever d’un seul bond aux yeux du monde qui la regarde, elle remettra son sort entre les mains d’un de ces hommes rares que Dieu suscite pour illuminer les esprits et rasséréner les âmes.

1243. (1890) La vie littéraire. Deuxième série pp. -366

Leurs aveux, quand nous les écoutons, nous semblent sortir de nous-mêmes. […] On dirait que Laute est sorti de cette pierre-là. […] Mais le sort en a disposé autrement. […] La marionnette est auguste : elle sort du sanctuaire. […] La vérité est qu’on ne sort jamais de soi-même.

1244. (1858) Du vrai, du beau et du bien (7e éd.) pp. -492

Kant s’était si bien établi dans le sujet de la connaissance qu’il avait eu de la peine à en sortir, et qu’il n’en sortit même jamais légitimement. […] Les principes universels et nécessaires sont sortis entiers de notre analyse. […] L’homme, pour communiquer avec l’être absolu, doit sortir de lui-même. […] Il naît à Paris vers 1617, et il n’en sort jamais. […] Tout acte est de soi indifférent, et c’est le sort qui le qualifie.

1245. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mestrallet, Jean-Marie »

Elle sort plus belle du creuset terrible ; elle rend maintenant un son de métal, affreusement triste, mais singulièrement pur ; elle s’exprime avec candeur, franchise et simplicité.

1246. (1915) Les idées et les hommes. Deuxième série pp. -341

On est sorti de bonne heure, encore un peu engourdi de sommeil et douillet de la tiédeur du lit. […] Cette poésie intime ne sort pas de chez elle et n’a pas besoin de ces élégances. […] Mais nous autres, il faut bien que nous habillions un peu le nôtre, pour sortir. […] Un dimanche matin, de noir vêtue, Yvonne va sortir ; elle descend au jardin. […] » Enchanté de sa bourde et furieux, il sort.

1247. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1894 » pp. 185-293

J’allais sortir, quand il arrive. […] Le chemin du local de la fête à mon hôtel est tout droit et tout court, et depuis que je suis dans cette ville, je l’ai fait tous les jours, mais je sors par une autre porte, et je m’égare dans un lacis de petites rues, au moment où la nuit commence à tomber. […] Je demande alors que quelqu’un veuille bien, en le payant, me ramener à la fête, dont je sors. […] J. ciselé sur la tranche, qui est l’ex libris original, que nous avions inventé, pour les livres sortis de notre collaboration. […] Frantz Jourdain, peint, dans un lavis d’encre de Chine, par Besnard (1890), sur un exemplaire de : À la côte, un lavis dont la pochade sort de dessous le pinceau d’un maître.

1248. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 401-402

Né de parens pauvres & obscurs, doué d’une ame fiere, incapable des bassesses qui procurent des protecteurs, il fut presque toujours aux prises avec le besoin & le désespoir, & auroit peut-être succombé à ce dernier, si des gens de Lettres que son courage & les talens qu’il annonçoit avoient intéressés à son sort, n’eussent attiré sur lui les bienfaits de quelques Grands.

1249. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 183-184

Votre noblesse est mince, Car ce n’est pas d’un Prince, Daphnis, que vous sortez.

1250. (1759) Salon de 1759 « Salon de 1759 — Carle Van Loo » pp. 92-93

C’est un autre tableau oit l’on voit deux femmes nues, au sortir du bain.

1251. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Madame Vien » p. 173

des serins, dont l’un sort de sa cage pour attraper des papillons. la poule hupée ne permet pas de regarder cela.

1252. (1866) Dante et Goethe. Dialogues

Il n’était pas possible que de toutes ces notions fausses sortît spontanément un art pur. […] Lorsqu’il sort de sa défaillance, Dante est entouré de nouveaux tourments et de nouveaux tourmentés. […] Et instantanément de son cœur prosterné sort un hymne d’amour et de reconnaissance. […] Il avait été choisi sans doute par la triste Cornélie pour l’aider à sortir moins brusquement d’elle-même et de son passé. […] Qu’entendez-vous par consulter le sort ?

1253. (1891) Esquisses contemporaines

Pour sortir vainqueur de ces angoisses un seul moyen se présente : les activités morales. […] Bourget est un psychologue, il opère sur le terrain qui lui est propre et ne sort pas de ses aptitudes. […] Claude Larcher, son ami, et l’abbé Taconet, son oncle, sortent d’auprès de lui. […] Ceux d’entre ses premiers adhérents qui restèrent chrétiens furent contraints d’en sortir. […] En s’attaquant au péché, il anéantit un fait au nom d’une idée et sort de la science parce qu’il est sorti de la morale.

1254. (1874) Premiers lundis. Tome II « X. Marmier. Esquisses poétiques »

Au lieu d’envier le sort et de flatter par ses désirs la molle existence des oisifs, ne serait-il pas temps pour le poète de tourner la tête vers l’avenir, et de regarder, au sein de l’ardeur et des mouvements du siècle, l’enfantement merveilleux de ce qui va devenir l’espérance, la foi et l’amour du monde ?

1255. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Du Plessys, Maurice (1864-1924) »

Il a sorti des ruines d’

1256. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Tellier, Jules (1863-1889) »

Les grands poètes sont pour tout le monde, les petits poètes jouissent d’un sort bien enviable encore : ils sont destinés au plaisir des délicats.

1257. (1761) Salon de 1761 « Gravure —  Casanove  » pp. 163-164

Il le tient d’une main ; de l’autre il menace d’un revers de sabre celui qui lui appuie un coup de pistolet ; pendant qu’un autre lui saisit le bras ; comment sortira-t-il de danger.

1258. (1881) Études sur la littérature française moderne et contemporaine

Et nous sommes sortis du même flanc profond ! […] De leur union sortit l’Intelligence, qui eut pour compagne la Vérité. […] Ce qu’il y a de plus divin dans le cœur de l’homme n’en sort jamais. […] Je pense que les beaux ouvrages sont en puissance dans l’âme, et que peu importe qu’ils en sortent ou n’en sortent pas. […] » — Le même soir, il sortit à la nuit tombante, et vendit un diamant que lui avait donné sa mère.

1259. (1864) Histoire anecdotique de l’ancien théâtre en France. Tome I pp. 3-343

Ce n’était pas cher ; on s’empressa d’accepter, il sortit de prison, et la pièce eut un succès tel que les acteurs lui firent un beau présent. […] Tout ce qui sort de la coulisse n’est-il pas à l’état de pastel vivant ? […] puis on sort en levant les épaules, bien décidé à laisser voler les autres comme on a été volé soi-même. […] A quatorze ans, Lagrange-Chancel sortit du collège pour se rendre à Paris, où, piqué par la muse poétique, il s’empressa de composer une tragédie. […] il fut traîné devant l’Inquisition d’Avignon, sa patrie, et eut beaucoup de peine à sortir de ce mauvais pas.

1260. (1904) En lisant Nietzsche pp. 1-362

Jusqu’à présent nous ne sommes pas sortis de nous. […] Nous ne sommes pas encore sortis de nous, nous avons développé notre moi, mais sans en sortir ; nous l’avons poussé plus loin, mais sans sauter hors de lui, ce qui est impossible. […] Il consiste à sortir peu à peu de l’ignorance au sujet des antécédents et des circonstances de l’acte. […] Il semble bien que « nous tous, nous ne sommes plus des matériaux pour une société. » Cependant, de cela même peut sortir quelque chose et précisément ce que nous rêvons, non pas comme de l’excès du mal sort le bien, pensée qui n’a aucun sens, mais comme de l’action sort la réaction, et surtout comme de la stagnation sort, dans tout le domaine de l’histoire naturelle, un sourd et profond désir de relèvement et d’ascension. […] Car j’agis avec les problèmes profonds comme avec un bain froid — y entrer vite, en sortir vite.

1261. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome IV pp. -328

Le bénédictin, Gerberon, & le prêtre, Brigode, eurent le même sort. […] Je vous ordonne d’en sortir ; &, si je vous traite avec quelque rigueur, c’est à vous qu’il faut s’en prendre ». […] L’épigraphe étoit autour de l’estampe en forme de médaillon, où l’on voyoit un bras sortir d’une nuée, la main armée d’un fouet. […] S’il sortit de Genève, c’est parce qu’il fut appellé à Turin par des amis intimes. […] L’abbé de la Trappe l’avoit faite lui-même ; mais son ouvrage ne sortit point de son cloître.

1262. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) «  Chapitre treizième.  »

La discussion d’où sortit cette constitution fut ouverte par un sermon, le plus beau peut-être qu’ait prononcé Bossuet, le Sermon sur l’unité de l’Eglise. […] L’autorité, la beauté de ces ouvrages sortent si naturellement du fond qu’on ne peut pas y trouver de plaisir sans s’engager dans le débat. […] C’était le détail authentiqué et le résumé de tout ce qui avait été dit dans les conférences d’où ce formulaire était sorti. […] Il voulait faire sortir du concours de certains esprits de choix, s’appliquant à revoir et à refondre toutes les doctrines, une certitude nouvelle. […] Voilà quarante volumes sortis de la plume de Bossuet, et pas un seul qui ne soit ou quelque exposé du dogme, catholique, ou quelque historique de sa tradition.

1263. (1923) L’art du théâtre pp. 5-212

Si l’œuvre d’art ne sort pas de l’esprit pour prendre une forme sensible, elle demeure aux yeux de tous une simple velléité. […] Il était incapable de sortir de lui-même et de créer des personnages. […] Ses défauts, ses lacunes furent celles de l’autodidacte qui, grisé de ses découvertes, leur fait un sort hors de proportion avec leur réelle valeur. […] Il est sorti du Théâtre de l’Œuvre ; mais il s’est vite acclimaté au milieu où il devait faire sa carrière. […] Le voici rejeté et isolé dans le cénacle : il aura le sort de Musset.

1264. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE CHARRIÈRE » pp. 411-457

« Nous sommes sortis. […] Un jour, travaillant chez Mlle de La Prise qui a eu des bontés pour elle, et qui, la voyant pâle, triste et tremblante, l’a pressée de questions affectueuses, ce soir-là, avant de sortir, les sanglots éclatent : elle lui confesse tout ! […] Meyer a demandé un moment pour se remettre du coup ; il sort de la salle, agitant en lui la douleur, la honte, et même, faut-il le dire ? […] Il se plaignait que les lettres qu’il recevait d’elle étaient pleines d’errata sur les ouvrages qu’elle avait publiés, et semblait croire que l’infidélité des imprimeurs l’occupait encore plus que la sienne. « Voilà le sort qui menace les femmes auteurs : on croit toujours que les affections tiennent chez elles la seconde place. » C’est un moraliste profond et femme qui a dit cela. […] Des accents douloureux en sortiraient.

1265. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre III. — Du drame comique. Méditation d’un philosophe hégélien ou Voyage pittoresque à travers l’Esthétique de Hegel » pp. 111-177

Le tragique, ce n’est pas le sort des personnages, le châtiment effroyable du crime ou le malheur attendrissant de l’innocence ; c’est la contradiction accidentelle des différentes phases de la Vérité morale, formant pour l’imagination poétique le cercle des Dieux190 et leur retour nécessaire à l’identité. […] Or la tragédie sort par là de sa véritable nature, et touche aux confins du comique. […] La vanité de la lutte ne sera-t-elle donc sensible qu’aux spectateurs, qui, voyant la contradiction que la démocratie renferme en elle-même, voyant dans ce père insulté la destruction du caractère paternel, comprennent que rien n’est sérieux dans l’action qui se passe sous leurs yeux, et que d’un drame où rien n’est sérieux rien de redoutable pour la morale ne pourra sortir ? […] On pressent seulement que du milieu des décombres entassés joyeusement par sa verve insouciante, doivent sortir de nouvelles mœurs, une nouvelle religion, un nouvel ordre de choses210. […] Monsieur Jourdain retombe dans le rang de la Société, d’où sa bourgeoisie ambitieuse a tenté de sortir.

1266. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

Elle est bonne et modeste jusqu’à ce qu’elle soit surprenante d’énergie, de tragique grandeur et d’inspirations imprévues, quand l’effroi fait enfin sortir au dehors tout le cœur d’une femme et d’une amante. […] « — Ne dirait-on pas que les yeux lui sortent de la tête ? […] « Elle cacha sa tête un moment dans le hamac ; et moi d’en haut je vis qu’elle pleurait ; mais lui d’en bas ne voyait pas son visage ; et quand elle le sortit de la toile, c’était en souriant pour lui donner de la gaieté. […] « — C’est une espèce de terrasse de poutres qui sort de l’avant du navire, et d’où l’on jette l’ancre en mer. […] Son front était rouge ; ses joues creuses et blanches avaient des pommettes bleuâtres ; elle était accroupie au milieu de la paille, si bien qu’on en voyait à peine sortir ses deux genoux, sur lesquels elle jouait aux dominos toute seule.

1267. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (2e partie) » pp. 315-400

Les idées sur l’immortalité sont bonnes aussi pour ceux qui n’ont pas été très bien partagés ici-bas pour le bonheur, et je parierais que, si le bon Tiedge avait eu un meilleur sort, il aurait eu aussi de meilleures idées. » L’insensé ! […] Tout va très vite avec eux, mais tout sort d’eux. […] Le lien le plus intime m’attache depuis un demi-siècle au grand-duc, avec lui j’ai pendant un demi-siècle lutté et travaillé, et je mentirais si je disais que je sais un seul jour où le grand-duc n’a pas pensé à faire, à exécuter quelque chose qui ne serve pas au bien du pays, et qui ne soit pas calculé pour améliorer le sort de chaque individu. […] La rue n’était éclairée que par les lueurs qui sortaient çà et là des fenêtres, et, comme déjà des apparences de ressemblance m’avaient trompé dans cette soirée, je n’osai pas arrêter cette personne. […] Le jour suivant, on m’apporta deux jeunes rossignols déjà sortis du nid, que je mis aussi avec la fauvette et qui furent adoptés et nourris par elle.

1268. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVe entretien. Ossian fils de Fingal »

Elle tombe, et les boucles de sa belle chevelure sont éparses sur la terre : son sang sort en bouillonnant de sa blessure et rougit l’albâtre de son bras. […] Sa robe entr’ouverte laissait voir son beau sein, comme on voit la lune sortir à demi des nuages de la nuit. […] Je m’attendris sur son sort. […] Ogar songe à son poignard ; c’est l’arme qu’il affectionne : il l’enfonça neuf fois dans les flancs de Dala ; le sort du combat est changé : trois fois je perçai de ma lance le bouclier de Cormac ; trois fois sa lance se rompit sur le mien. […] vois, je l’arrache de mon sein et le jette aux vents. » « Son sang noir sort à gros bouillons de ses flancs.

1269. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Féval » pp. 107-174

Il a l’intérêt d’un labyrinthe, lequel n’existe plus une fois que l’on en est sorti. […] Et si celui-là continue son livre comme il l’a commencé, il fera un délicieux roman, et probablement le plus délicieux qui soit jamais sorti de sa plume. […] semble sorti des flancs de la grande histoire de Crétineau, ou, pour mieux parler, c’est l’histoire de Crétineau, citée à beaucoup de pages, refaite, mais condensée, mais affinée, mais couronnée de la flamme légère d’une âme et d’un esprit charmants que n’avait pas ce violent brûle-tout de Crétineau. […] Une circonstance inouïe dans ces Merveilles du Mont Saint-Michel, c’est que les prêtres du Dieu qui y apparaît tant n’y sont que des néants de prêtres, et l’historien le voit, et il le dit, malgré ses tempes brûlantes et l’illusion qui pour lui devait sortir du sacerdoce. […] Jamais ou n’a fait sortir d’une clef d’acier plus dur plus cruel sifflet contre le dévouement sans borne de l’amour.

1270. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Bossuet et la France moderne »

Il est clair que Louvois, cette froide canaille, ce ministre à la Canovas, la Maintenon fourbe et cruelle, Le Tellier, dont le comte de Grammont disait, en le voyant sortir du cabinet du roi : « Je crois voir sortir une fouine qui vient d’égorger des poulets en se léchant le museau plein de sang » ; le jésuite La Chaise, confesseur du roi, l’archevêque de Paris Harlai, le secrétaire d’État Chateauneuf, les intendants Marillac, Foucault, Basville, prirent une part active aux massacres et à l’iniquité, et que Louis XIV, le médiocre infatué, encourt, de par le fait même de son autorité, une responsabilité terrible. […] Brunetière lui-même, le chantre attitré de Bossuet, est contraint à cet aveu : « … De n’avoir point senti ce qu’il y avait de force ou de vertu morale dans le protestantisme, d’avoir sacrifié, si je puis ainsi dire, au rêve d’une unité toute extérieure, purement apparente et décorative, la plus substantielle des réalités, voilà ce que l’on ne saurait trop reprocher à Louis XIV…88 » Alors que les protestants, poursuivis l’épée dans les reins, s’enfuient par toutes les frontières, pour échapper au sort commun, Louis XIV écrit en Hollande et en Angleterre « qu’il n’y à point de persécution, que les protestants émigrent par caprice d’une imagination blessée 89. » La Maintenon spécule sur les terrains que les persécutés étaient contraints, pour s’enfuir plus vite, de vendre à vil prix. […] Tantôt ils confiaient leur sort à quelque frêle barque qui, par une nuit d’orage, lorsque la surveillance des sentinelles postées sur les côtes, pouvait être plus facilement trompée, les portait en Angleterre. […] A la Révocation de l’édit de Nantes il répondit, le même mois, par l’édit de Postdam où il disait notamment :‌ « Comme les persécutions et les rigoureuses procédures qu’on exerce depuis quelque temps en France contre ceux de la religion réformée ont obligé plusieurs familles de sortir de ce royaume et de chercher à s’établir dans les pays étrangers, nous avons bien voulu, touché de la juste compassion que nous devons avoir pour ceux qui souffrent pour l’Évangile et pour la pureté de la foi que nous confessons avec eux, par le présent édit, signé de notre main, offrir aux dits Français une retraite sûre et libre dans toutes les terres et provinces de notre domination ; et leur déclarer en même temps de quels droits, franchises et avantages, nous prétendons les y faire jouir, pour les soulager, et pour subvenir en quelque manière aux calamités avec lesquelles la Providence divine a trouvé bon de frapper une partie si considérable de son église. »‌ La réponse à cet appel ne se fit pas longtemps attendre. […] Le sort de la Pologne, de l’Arménie et de l’Irlande, n’est pas sans signification à ce point de vue.

1271. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « Remarques finales. Mécanique et mystique »

Telle est la société humaine quand elle sort des mains de la nature. […] Maintenant, quel est le régime d’une société qui sort des mains de la nature ? […] De tout cela peut sortir la guerre. […] Elle en donnera surtout envie à des générations nouvelles, qui n’auront pas fait l’expérience des anciens maux, et qui n’auront pas eu à peiner pour en sortir. […] Ainsi se développera le contenu de la tendance originelle, si toutefois on peut parler de contenu alors que personne, pas même la tendance elle-même devenue consciente, ne saurait dire ce qui sortira d’elle.

1272. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Discours sur le système et la vie de Vico » pp. -

Ainsi toutes les découvertes des anciens Égyptiens appartiennent à un Hermès ; la première constitution de Rome, même dans cette partie morale qui semble le produit des habitudes, sort tout armée de la tête de Romulus ; tous les exploits, tous les travaux de la Grèce héroïque composent la vie d’Hercule ; Homère enfin nous apparaît seul sur le passage des temps héroïques à ceux de l’histoire, comme le représentant d’une civilisation tout entière. […] La poésie elle-même, quoiqu’elle sortît alors de l’usage vulgaire, reçut aussi les expressions générales ; aux noms propres, qui, dans l’indigence des langues, lui avaient servi à désigner les caractères, elle substitua des noms imaginaires, et conçut des caractères purement idéaux ; ce fut là le commencement de son troisième âge, de l’âge humain de la poésie. […] Répétons donc ici le premier principe de la Science nouvelle : les hommes ont fait eux-mêmes le monde social, tel qu’il est ; mais ce monde n’en est pas moins sorti d’une intelligence, souvent contraire, et toujours supérieure aux fins particulières que les hommes s’étaient proposées. […] Nous ajouterons seulement quelques mots pour faire connaître quel fut le sort de l’auteur et de l’ouvrage. […] Il ne sortit de cet état que pour s’apercevoir de sa mort prochaine, et, après avoir rempli le devoir d’un chrétien, il expira en récitant les psaumes de David, le 20 janvier 1744.

1273. (1848) Études sur la littérature française au XIXe siècle. Tome III. Sainte-Beuve, Edgar Quinet, Michelet, etc.

Quel contraste au sortir des pompes du Vatican, à moins de huit jours de distance ! […] qu’ils sont heureux ceux que tu as sortis de ces cavernes56 ! […] Traversez, même à pas rapides, ce recueil de poésies : avez-vous le sentiment d’en sortir comme vous y êtes entré ? […] On ne rentre pas en soi-même, on en sort plutôt. […] Tout est acceptable ou insupportable, tout est mal ou tout est bien, selon ce que nous sommes, et selon le sort définitif qui nous est réservé.

1274. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite et fin.) »

La difficulté est d’en sortir heureusement et à propos. […] Elle en sortit, ayant obtenu ce qu’elle seule avait pu lui arracher. […] Il est vrai que Sieyès s’était éteint dans une sorte d’obscurité, qu’il était avant tout philosophe, et, par l’esprit du moins, demeuré fidèle à ce grand tiers état du sein duquel il était sorti et dont il avait été l’annonciateur. […] Mais heureusement qu’il sort de votre studieuse prison des morceaux littéraires que recherchent tous les gens de goût.

1275. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. VILLEMAIN. » pp. 358-396

Victorin Fabre est exactement sorti du xviiie  siècle ; il en a les convictions (en tant que déisme), l’inspiration politique, les habitudes d’analyse, les procédés d’écrire laborieux, fermes et raisonnés. […] Au sortir donc des gorges et des rampes étroites où nous avons gravi longtemps, où nous avons fini par triompher et nous acquérir quelque nom, nous nous trouvons, grâce à notre succès même, portés sur le plateau, dans la plaine ; il s’agit de faire bonne figure au soleil et devant tous dans cette nouvelle position, et de tenir décemment la campagne. […] Villemain sortit des affaires avec son patron et donna des preuves alors de cette honorable fidélité à des amitiés politiques, qui est devenue bientôt de la fidélité à des principes115. […] Il nous en a donné un extrait précieux dans d’éloquentes pages sur les Pères du Christianisme ; mais en ne cessant de les relire et de les étudier, il y découvrait chaque jour davantage, et peut-être une histoire des premières sociétes chrétiennes en pourra plus tard sortir.

1276. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE KRÜDNER » pp. 382-410

Il sortait de l’Élysée-Bourbon par une porte de jardin pour aller, tout auprès, chez elle, plusieurs fois le jour, et là ils priaient ensemble, invoquant les lumières de l’Esprit. […] Quand elle sortit, les portes étaient assiégées, les corridors remplis d’une double haie. […] Un jour, en 1815, à quelqu’un qui la venait voir dans la soirée à l’heure de sa prière elle disait : « De grandes œuvres s’accomplissent ; tout Paris jeûne… » Et cet ami, qui sortait du Palais-Royal où il avait vu tout le monde dîner, ne put la détromper comme il aurait voulu. […] Il écrivait : « Je me dis qu’il faut que je sois ainsi pour vous ramener à la sphère d’idées dans laquelle je n’ai pas le bonheur d’être tout à fait moi-même ; mais la lampe ne voit pas sa propre lumière et la répand pourtant autour d’elle… J’avais passé ma journée tout seul, et je n’étais sorti que pour aller voir Mme de Krüdner.

1277. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIe entretien. Poésie lyrique » pp. 161-223

Sortez un beau jour de printemps de l’enceinte fangeuse et enfumée des villes, égarez vos pas dans la campagne, au bord du fleuve, au bord des ruisseaux, au bord de la mer calme, au bord des bois retentissants ; un chant sort du calice de chaque fleur sous vos pas, du dôme de chaque arbre dans la forêt, du creux de chaque sillon dans les blés en herbe ; l’insecte ivre dans sa coupe de parfum, la caille dans le chaume, le merle dans le buisson, le rossignol sur la branche morte, la cigale elle-même dans la poudre ardente du champ labouré, tout chante devant le soleil. […] Au lever de la lune, il sortit de la maison pour revenir au château ; la Jumelle, avec la permission de son père, l’accompagna jusqu’à la croix de pierre qui marque la place où finit le village et où commencent les bois. […] Semblable à ces drapeaux sacrés suspendus aux voûtes des temples et qu’on n’en sort qu’à certains jours, on garde le chant national comme une arme extrême pour les grandes nécessités de la patrie.

1278. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIe entretien. Trois heureuses journées littéraires » pp. 161-221

Tous mes fruits ont germé sur tes douces collines ; Ma sève ne sort pas d’une immonde cité ; Si je fleuris au sol où je fus transplanté, C’est que je garde encor ta terre à mes racines. […] Quand ces poètes politiques, fussent-ils, comme Juvénal ou Gilbert, les suprêmes satiristes, passent du beau idéal au laid idéal, objet de leur satire, ils sortent de leur vraie nature et faillissent à leur vraie mission. […] Le soir, lorsque je sors de la chambre d’étude, Quand je reviens des bois, rapportant des moissons De rameaux ou de vers cueillis sur les buissons, Devant l’âtre joyeux où le sarment pétille, Près de l’auguste aïeul se groupe la famille ; Non loin de ses genoux chargés de mes enfants, S’assied la jeune mère aux regards triomphants ; Tandis qu’avec les fleurs, butin de la journée, Ma sœur comme un autel orne la cheminée. […] De telles familles il ne peut sortir que des saints, des héros ou des poètes.

1279. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXIXe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin (2e partie) » pp. 321-384

Ses mains jointes sont tellement éloquentes par la pression des doigts contre les doigts et par les veines à travers lesquelles on voit circuler le sang brûlant de se répandre pour l’homme, son frère, que, lors même qu’on ne verrait ni le corps, ni les jambes, ni le buste, ni la tête divine, mais que ces mains seules sortiraient de l’ombre, le tableau aurait suffisamment parlé au cœur ; on aurait pleuré, on aurait compris que ces deux mains tendues par l’enthousiasme de l’agonie triomphante étaient assez fortes pour arracher l’aiguillon à la mort et le salut de l’humanité au ciel. — La passion de ces mains est égale à l’objet. […] Quel sera le premier cercueil qui sortira par ces portes neuves ? […] Tout verdit, tout fleurit, tout chante, tout l’air est embaumé comme s’il sortait d’une fleur. […] Nous sortons, nous courons. » XXX Elle va à Paris ; elle assiste à tout ; elle soulage tout. — Avant de retourner au Cayla rejoindre son père, elle va passer quelques semaines en Nivernais chez une charmante amie digne d’elle, jeune, belle, lettrée, Mme de Maistre.

1280. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (3e partie) » pp. 365-427

Pour me convaincre qu’il n’y avait point d’illusion, et pour recueillir le témoignage d’autres personnes, je fis sortir les ouvriers occupés dans mon laboratoire, et je leur demandai, ainsi qu’à tous les passants, s’ils voyaient, comme moi, l’étoile qui venait d’apparaître tout à coup. […] un être sorti d’un autre être, qui lui-même était sorti d’un autre, et ainsi de suite jusqu’à l’origine de cette espèce d’êtres appelés hommes. — Mais le premier de cette famille humaine, l’ancêtre de l’univers, vivant, pensant, aimant, qui lui avait donné la vie ? […] Les feuilles pinnées, comme dans le reste de la famille, que cette forme caractérise, sortent du stipe à de grands intervalles, au lieu de se réunir en couronne, et portent, à la pointe terminale, de longues et nombreuses épines courbes.

1281. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série «  Leconte de Lisle  »

Voilà qu’un ange, un cavalier, sort des ténèbres, traînant après lui et ameutant toutes les bêtes de la terre, et charge d’imprécations, au nom du Seigneur, le rebelle et ses fils. […] Jamais blasphème n’est sorti d’une bouche d’homme, plus tragique depuis Eschyle, ni plus triomphant depuis Lucrèce. […] Au sortir des lourdes somnolences bouddhiques, il dit les tristesses viriles de la muse grecque. […] A vrai dire, ils semblaient peu certains, à cette heure, De sortir promptement de leur noire demeure.

1282. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Division dramatique. » pp. 64-109

Corneille lui-même ne s’est pas trop élevé au-dessus de ces usages dans l’exposition de Rodogune, où, par un acteur désintéressé, il fait faire à un autre qui ne l’est pas moins, toute l’histoire nécessaire à l’intelligence de la tragédie ; et l’histoire est si longue qu’il a fallu la couper en deux scènes, ou l’interrompre, pour laisser parler les deux princes qui arrivent : et on la reprend dès qu’ils sont sortis. […] Les anciens tragiques ne pouvaient faire ces monologues, à cause des chœurs qui ne sortaient point du théâtre ; et si ma mémoire ne me trompe, hors celui qu’Ajax (dans Sophocle) fait sur le point de mourir au coin d’un bois pendant que le chœur est sorti pour le chercher, je ne crois pas qu’il s’en trouve un dans les trente-cinq tragédies qui restent. […] C’est encore, ce me semble, une manière indirecte de manquer au dialogue, que de faire sortir des personnages qui devraient attendre qu’on leur répondît, ou de faire rester ceux qui devraient répondre.

1283. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XIII] »

Dans ce cas, la censure n’était donc qu’une mesure dérisoire, puisqu’elle n’a jamais pu empêcher un livre de paraître, ni un auteur d’écrire librement sa pensée sur toute espèce de sujets : après tout, le plus grand mal qui pouvait arriver à un écrivain, était d’aller passer quelques mois à la Bastille, d’où il sortait bientôt avec les honneurs d’une persécution, qui quelquefois était son seul titre à célébrité. […]       Et comme il peint cette princesse,       Riche de grâce et de jeunesse, Tout à coup arrêtée au sein du plus beau sort, Et des sommets riants d’une gloire croissante,       Et d’une santé florissante,       Tombant dans les bras de la mort ! […] Mais quelques jours après, ayant eu l’imprudence de sortir de l’Église pour se sauver, il fut pris, et banni en Cypre, d’où on le tira dans la suite pour lui faire son procès à Chalcédoine, et il y fut décapité. […] Il n’y a point de discours qui puisse représenter le trouble et l’orage où se voit une jeune femme qui ne vient que de sortir de la maison de son père, qui ne sait point les affaires, et qui, étant plongée dans l’affliction, doit prendre de nouveaux soins, dont la faiblesse de son âge, et celle de son sexe, sont peu capables.

1284. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Villemain » pp. 1-41

Villemain, qui s’est fait grec le plus qu’il a pu pour admirer sans honte cette vaine poésie qui ne parle pas plus à notre pensée qu’à nos cœurs, prétend que de toute cette poussière, mêlée de sueur, foulée par la muse de Pindare, sortirent tous ces héros, beaux comme des demi-dieux, qui sauvèrent la Grèce et suivirent en Asie Alexandre. […] Le bataillon des hommes de gloire n’est jamais sorti de ces enfants ! […] Ce n’est pas l’éloquence des rhéteurs ; c’est l’éloquence vraie, spontanée, naturelle, qui sort à tout propos du cœur comme le sang jaillit de la veine ! […] n’apprennent rien à personne et ne sortent, par aucun côté, de la médiocrité la plus accomplie.

1285. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 298-300

L’exposition des évenemens est simple, naturelle, & attachante ; presque tous les Episodes sont liés au sujet, & sortent de l’action principale.

1286. (1913) Le bovarysme « Deuxième partie : Le Bovarysme de la vérité — I »

C’est l’impuissance à faire sortir d’elle-même cette illusion qui doit être envisagée dorénavant, en toute entité, comme une tare et comme le symptôme d’un déclin.

1287. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 32, de l’importance des fautes que les peintres et les poëtes peuvent faire contre leurs regles » pp. 273-274

Il n’en est pas de même d’un poëme, ses fautes réelles comme une scene qui sort de la vrai-semblance, ou des sentimens qui ne conviennent point à la situation dans laquelle un personnage est supposé, ne nous dégoutent que de la partie d’un bon poëme où elles se trouvent.

1288. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « L’abbé de Bernis. » pp. 1-22

Des documents récents, sortis des Archives du Vatican, viennent de jeter du jour sur la seconde moitié de sa carrière, lorsqu’il était ambassadeur de France à Rome. […] Un jour que Bernis sortait de chez Mme de Pompadour, emportant sous son bras une toile de perse qu’elle lui avait donnée pour meubler son nouvel appartement, le roi le rencontra dans l’escalier, et voulut absolument savoir ce qu’il portait ; il fallut le montrer et expliquer le pourquoi : « Eh bien, dit Louis XV en lui mettant dans la main un rouleau de louis, elle vous a donné la tapisserie, voilà pour les clous. » Pourtant l’impatience vint à Bernis, et, suivant la spirituelle remarque de Duclos, voyant qu’il avait tant de peine à faire une petite fortune, il résolut d’en tenter une grande : cela lui fut plus facile. […] Le sort ne lui a pas laissé le temps de réparer ses fautes ni de corriger ses hasardeuses entreprises ; mais Bernis sera un excellent ambassadeur : il a l’insinuation, la conciliation, la politesse ; il représente avec goût et magnificence ; il sera le modèle d’un ambassadeur de France à Rome pendant plus de vingt ans.

1289. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De l’état de la France sous Louis XV (1757-1758). » pp. 23-43

Votre sort est assuré ; qu’avez-vous à craindre que le malheur de l’État, et à désirer que sa conservation et celle de vos amis ? […] Nous agirons dans le plus grand concert et, Dieu merci, sans jalousie de métier ; nous assurerons le sort de notre amie. […] Et en même temps on sort de cette lecture plus disposé à rendre justice à M. de Choiseul qui, d’une situation si compromise et si perdue en réalité, sut tirer des résultats assez spécieux, assez brillants, pour jeter un voile sur la décadence et pour relever la nation à ses propres yeux, en attendant qu’elle se régénérât décidément à travers les orages et qu’elle entrât, désormais vaillante et rajeunie (mais toujours selon l’esprit des chefs qui la guident), dans l’ordre de ses destinées nouvelles.

1290. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — I. » pp. 413-433

Il paye tribut au goût du moment, à la mode des Almanachs des Muses et des Athénées ; il fait de petits vers, mais il ne s’y tient pas, et il sort bientôt du frivole. […] Daru, dans une longue lettre motivée qu’il adressa à l’auteur de L’Année littéraire, et qui, je crois, n’a pas été publiée, conteste avec politesse la prompte conclusion du critique ; il insiste sur un point, c’est que, pour traduire fidèlement, il ne suffit pas de bien rendre le sens de l’original, mais qu’il faut encore s’appliquer à modeler la forme de l’expression : « Pour ne pas sortir de notre sujet, dit-il, un traducteur de Cicéron qui aurait un style sautillant serait-il un traducteur fidèle ?  […] Bérenger (celui des Soirées provençales), qui ne ressemblait pas à notre célèbre chansonnier et qui se hâtait trop de produire : « Tout ce qui sort de sa plume, il le publie ; ce sont des enfants morts qu’on n’a pas le temps d’ondoyer et qui ne feront jamais un article dans les registres du Parnasse.

1291. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Le président Hénault. Ses Mémoires écrits par lui-même, recueillis et mis en ordre par son arrière-neveu M. le baron de Vigan. » pp. 215-235

Puis il en sortit avec autant de facilité qu’il y était entré. […] Il ne se pique ni de naissance ni de titres illustres ; mais il est assez riche pour n’avoir besoin de personne… On trouve dans ce portrait sorti d’une plume amie tout ce qui peut expliquer les succès et la réputation du président dans le monde et en son bon temps. […] Je regrettais de temps en temps le sort de cette orpheline qui ne trouvait pas d’établissement… Mais ce qui procurait au président plus de réputation que cette Cornélie aussitôt oubliée, c’étaient des couplets dans le genre de ceux qui commencent ainsi, et qui ont en effet moins de fadeur qu’ils n’en promettent : Il faut, quand on s’aime une fois, S’aimer toute la vie, etc.

1292. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — II » pp. 316-336

Sentant que La Rochelle, ce boulevard des protestants, était de plus en plus bloquée par le fort Louis et du côté des îles de Ré et d’Oléron, et qu’elle étouffait si l’on n’avait la libre communication de la mer, Soubise alla se saisir à Blavet (ou Port-Louis) de vaisseaux de haut bord qui s’y équipaient, et, après des hasards divers, il parvint à sortir avec sa prise. […] En revanche, Rohan se plaît fort à célébrer une action héroïque de sept soldats de Foix qui, s’enfermant dans une bicoque auprès de Carlat, arrêtèrent le maréchal et toute son armée deux jours entiers, et, après lui avoir tué plus de quarante hommes, se sauvèrent au nombre de quatre ; trois sur les sept, trois proches parents, voulurent demeurer et se sacrifier, parce que l’un était blessé et hors d’état de sortir : « Ainsi les quatre autres, dit Rohan, à la sollicitation de ceux-ci et à la faveur de la nuit, après s’être embrassés, se sauvent, et ces trois-ci se mettent à la porte, chargent leurs arquebuses, attendent patiemment la venue du jour, et reçoivent courageusement les ennemis, desquels en ayant tué plusieurs, meurent libres. » Ce sont là les seuls éclairs du récit chez Rohan, qui voudrait bien assurer aux noms de ces braves soldats une immortalité dont il n’est pas le dispensateur : il fallait de certains échos particuliers, et qui ne se retrouvent pas deux fois, pour nous renvoyer les glorieux noms qui ont illustré les Thermopyles. […] Ce double sentiment contraire qui animait l’assiégeant et l’assiégé se peint avec fidélité dans les pages tant de Richelieu que de Rohan ; ce dernier, qui, pendant ce temps-là, tenait la campagne dans le Midi et se bornait à occuper les troupes du roi par une suite d’escarmouches et de petites affaires, sentait bien que le fort de l’action se passait là où il n’était pas, et que le sort de la cause se décidait ailleurs.

1293. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — I » pp. 432-453

Elle les visite quelquefois, — rarement —, car elle sort peu. […] Elle compatit aux pauvres gens et aux affligés que frappe cette banqueroute ; elle en donne les détails et les chiffres précis à Senac de Meilhan, son correspondant très cher ; et, voyant la superbe famille de Rohan si humiliée et par cette catastrophe et par d’autres accidents qui bientôt suivirent, elle en revient aux réflexions morales ; elle se félicite au moins de ne tenir à rien, et de ne point prêter à ces revers subits du faste et à ces chutes de l’ambition ; elle se rejette dans la médiocrité, comme disait La Bruyère : Ô obscurité, s’écrie-t-elle avec un sentiment moral qui ferait honneur à toutes les conditions, tu es la sauvegarde du repos, et par conséquent du bonheur ; car qui peut dire ce qu’on serait en voulant des places, des biens, des titres, des rangs au-dessus des autres, où on arrive par l’intrigue, où on se maintient par la bassesse, et dont on sort avec confusion souvent, et toujours avec douleur ? […] Elle a le bon sens, un certain bon sens âcre en qui se résume une expérience consommée, « un fonds de caustique qui ne demande qu’à sortir », et que sa charité, plus de principes que de nature, ne suffit pas à contenir au dedans.

1294. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

Faire après Louis XIV quelque chose de ce que Henri IV aurait aimé à voir s’accomplir s’il avait vécu, affranchir la noblesse des servitudes de cour et des usurpations de la roture, la rendre plus sédentaire et attachée à son ménage des champs, rendre le peuple content de son sort et assuré de son bien-être, supprimer les sangsues publiques et l’appareil intermédiaire de finances entre le roi et son peuple, asseoir l’impôt moyennant des assemblées provinciales, de grands Conseils généraux répartiteurs des charges, c’est ce que Mirabeau aurait voulu et ce qui aurait renouvelé en effet l’ancienne monarchie ainsi reprise en sous-œuvre. […] Pour moi, plus fondé dans mes principes, quoique aussi détraqué dans mes actions, je suis mes plaisirs, je les cours, je me livre à leur léthargie et en sors par le mouvement. […] Il nous reste à les voir avec le détail qu’elles méritent, paraissant aujourd’hui pour la première fois. — Heureux âge de vingt-cinq ans qui permet et sollicite de tels épanchements entre égaux, qui ouvre un infini de perspective dans toutes les carrières, les montre plus simples et plus droites qu’elles ne sauraient jamais l’être à les parcourir en réalité ; qui, des oppositions même et des contrariétés du sort, sait tirer des combinaisons nouvelles, et se fraye en idée, par-delà l’obstacle, de plus belles routes inconnues !

1295. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. De Pontmartin. Causeries littéraires, causeries du samedi, les semaines littéraires, etc. »

Voyez un peu comment et dans quel jargon métaphorique il retrace l’état des esprits au sortir du régime de la Terreur, qu’il impute à la philosophie : « Cette philosophie à la fois si destructive et si stérile, cette révolution si radicale et si impuissante, avaient, dit-il, montré l’homme réduit à lui-même dans un état de misère, de crime et de nudité ; il ramenait sur sa poitrine les lambeaux de ces croyances, déchirées à tous les angles du chemin qui l’avait conduit des bosquets du paganisme-Pompadour aux marches de l’échafaud. […] C’est une remarque que d’autres que moi ont faite depuis longtemps : comment se peut-il que ces gens du monde qui se piquent des politesses, ces gentilshommes qui se flattent de sortir de bon lieu, dès qu’ils se mettent à écrire et qu’ils font de la critique ou de la politique, enveniment si aisément leur plume et en viennent, dès les premiers mots, à dire des choses auxquelles les écrivains bourgeois ne descendent qu’à la dernière extrémité ? […] Ma conclusion bien sincère sur l’ensemble du talent de M. de Pontmartin, et malgré toutes ces critiques auxquelles je me suis vu forcé, ayant à combattre avec lui pied à pied et me trouvant réduit à la défensive, est qu’il y a de la distinction, de l’élégance, que c’est un homme d’esprit et d’un esprit délicat, auquel il n’a manqué qu’une meilleure école, et plus de fermeté dans le jugement et dans le caractère, pour sortir de la morale de convention et pour atteindre à la vraie mesure humaine, sans laquelle il n’est pas de grand goût, de goût véritable.

1296. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite.) »

« H. de Saujon de Boufflers. » Lorsque Rousseau, après la publication de l’Émile, se vit obligé de s’enfuir précipitamment de Montmorency et de sortir du royaume, Mme de Roufilers partagea toutes ses transes ; elle était présente au départ et aux derniers embrassements ; les jours suivants elle n’était occupée que de lui, et de lui ménager, par ses nombreux amis à l’étranger, un asile sûr et à son choix, soit en Allemagne, soit en Angleterre. Elle vit Thérèse restée d’abord à Paris et s’intéressa vivement à son sort. […] Le très-sage Hume nous en est la preuve : au reçu de la lettre insensée de Jean-Jacques, écrite de Wootton le 23 juin 1766, et dans laquelle celui-ci l’accusait de ne l’avoir amené en Angleterre et de ne lui avoir procuré en apparence un asile sûr que pour mieux le déshonorer, il eut un premier mouvement d’indignation et de colère ; il dérogea à sa philosophie, à son tempérament même, et sortit de son indifférence ; il ne put s’empêcher, lui aussi, de s’écrier : « Rousseau est un scélérat. » Par malheur, il eut l’idée d’écrire sur ce ton à ses amis de Paris, et non pas d’abord à Mme de Boufflers qui lui eût donné un bon conseil, mais au baron d’Holbach, le coryphée et la trompette des Encyclopédistes : la trompette sonna.

1297. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Lettres inédites de Michel de Montaigne, et de quelques autres personnages du XVIe siècle »

Il en était sorti en 1570, à l’âge de trente-sept ans, et avait déposé sans regret la robe pour reprendre l’épée de ses pères. […] Et pour preuve que c’était sérieux, il fit venir à l’instant Le Londel, capitaine de ses gardes, et lui ordonna de désarmer Vaillac : « Il s’adressa ensuite à M. de Montaigne, maire, et lui commanda de faire savoir dans toute la ville les intentions du roi et celles de son lieutenant général, afin de disposer les bourgeois, bons et fidèles serviteurs du roi, à se joindre à ses troupes pour forcer la garnison du château à se rendre, si la punition de Vaillac ne les décidait pas à se soumettre. » Vaillac, pressé de toutes parts, se soumit et commanda lui-même à ses gens de sortir et de rendre le château. […] Ici, on va le voir, finit son beau rôle, et il est à regretter pour lui que son temps de mairie n’ait pas expiré en cet été de 1585, vers ce mois de juin : il sortait de l’exercice de sa charge avec tous les honneurs de la guerre.

1298. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Collé. »

Collé inspirait la gaîté et la sentait ; c’était de son propre fonds que sortaient les idées gaies qu’il manifestait avec tant d’abondance ; et c’était pour son propre divertissement qu’il les mettait à exécution.  […] Mais tandis que Béranger, l’œil et le cœur aux choses nationales, n’a garde de se confiner dans le genre érotique et bachique, la chanson de Collé ne fait que tourner et retourner à satiété la gaudriole et n’en sort pas. […] Le bonhomme a toujours manqué d’une élévation d’âme, même commune ; pour peu qu’il en eût eu, il aurait été le plus malheureux des hommes. » Collé donc, à la différence de Panard, avait de l’élévation d’âme : il voyait les grands, les gens riches, les amusait, leur plaisait, mais ne se donnait pas ; il restait lui ; il se défendait de leur trop de familiarité par le respect ; il gardait de sa dignité hors de sa gaîté ; il savait que, si bon prince qu’on fût avec lui, on ne l’était pas autant à Villers-Cotterets qu’à Bagnolet ; assez chatouilleux de sa nature, il allait au-devant des dégoûts par sa discrétion, et se tenait sur une sorte de réserve, même quand il avait l’air de s’abandonner : quand il sortait ces jours-là de sa maison bourgeoise, il disait qu’il allait s’enducailler, comme d’autres auraient dit s’encanailler ; puis, son rôle joué, sa partie faite, il revenait ayant observé, noté les ridicules, et connaissant mieux son monde, plus maître et plus content à son coin du feu que le meunier Michau en son logis.

1299. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

Nous savons l’histoire anecdotique du xviiie  siècle et celle même du xviie comme si nous y avions vécu ; nous en connaissons les intrigues, les rivalités, les galanteries, de manière à en discourir pertinemment et impertinemment, à tort et à travers ; le temps a tout fait sortir, les vérités et les méchants propos : du xixe  siècle, du nôtre, nous savons beaucoup moins à certains égards ; nous savons ce que nous en avons vu directement ; mais des Mémoires familiers, intimes, véridiques, il n’en a point encore paru ; ils dorment en portefeuille, ils attendent. […] Une femme d’esprit disait en parlant d’un ancien amant qui avait pris toute sa jeunesse : « Il m’a laissée là quand il m’a vue flétrie ; mais je me suis dit : Je vais me venger et lui jouer un bon tour, je resterai son amie. » Mme Dufrenoy avait pensé à peu près la même chose, mais elle l’avait dit sans un malin sourire et d’un ton plus élégiaque et tout sentimental : Amour, redonnez-lui le dessein de me plaire ; Mais, quoi que l’ingrat puisse faire, Ne sortez jamais de mon cœur ! […] La maladie avait donné à son esprit une agitation, une irritabilité toute fiévreuse qui le faisait sortir de sa sagesse habituelle, qui le liait avec des hommes dont il ne partageait pas les opinions contre ceux dont il était habituellement plus rapproché.

1300. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite.) »

» A ce mot de propositions articulé d’un certain ton, Mirabeau bondit, et toisant son interlocuteur : « Ma proposition, dit-il, est de vous souhaiter le bonjour » ; et il sortit. […] Né en 1713 dans le Rouergue, élevé chez les Jésuites et engagé lui-même dans la Société, l’abbé Raynal n’en était sorti que vers 1748, à l’âge de trente-cinq ans93. […] Voici la page : « Mirabeau était harassé : il avait déjà le germe de la maladie dont il est mort ; ses yeux enflammés et couverts de sang sortaient de leur orbite ; il était horrible ; mais jamais je ne lui ai vu plus d’énergie, plus d’éloquence : « Il n’est plus temps, me dit-il, de calculer les inconvénients.

1301. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de La Mennais »

Le plus clair, c’est qu’il n’est pas content de son sort. […] Hors du catholicisme, — car il en est sorti, — il n’a pas ce qu’il faut pour s’orienter. […] « J’ai peu de talent, écrit-il (26 octobre 1814), et pourtant en regardant dans ma tête il me semble qu’il y a là quelque chose qui ne demande qu’à sortir. » Les événements politiques pourront encore retarder La Mennais un ou deux ans ; l’écrivain dès lors se sentait prêt, en mesure et de force pour le combat.

1302. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

Le résultat atteint, et à peine sorti d’un régime d’ambition et de conquête, il put vite s’apercevoir qu’il allait avoir affaire à des opposants d’un autre genre, et non pas les moins opiniâtres ni les moins dangereux : il retrouvait sur son chemin, après vingt-cinq ans, comme au premier jour, l’entêtement dans le passé, les préventions personnelles et l’humeur, l’ornière de la routine, les hauteurs du droit divin, un favoritisme exclusif et inintelligent, la méconnaissance de l’esprit d’un siècle. […] — Il sort de ma chambre un buveur d’eau abîmé de rhumatismes et qui en conséquence voit tout en noir : le présent et l’avenir lui fournissent un beau champ qu’il exploite toute la journée. […] Des yeux gris sous des sourcils touffus44, une face morte plaquée de taches, un petit visage qui diminuait encore sous son immense chevelure, le menton noyé dans une large cravate molle remontante, qui rappelait celle des incroyables et le négligé du Directoire, le nez en pointe insolemment retroussé, une lèvre inférieure avançant et débordant sur la supérieure, avec je ne sais quelle expression méprisante indéfinissable, fixée aux deux coins de la bouche et découlant de la commissure des lèvres45 ; un silence fréquent d’où sortaient d’un ton guttural quelques paroles d’oracle ; il y avait là de quoi faire, en causant, un vis-à-vis de première force à Royer-Collard, bien que celui-ci eût plus de sève et de verdeur.

1303. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. (Les Pleurs, poésies nouvelles. — Une Raillerie de l’Amour, roman.) » pp. 91-114

… Ainsi le cœur n’a de murmures Que brisé sous les pieds du sort ! […] « C’est alors que le théâtre offrit, pour eux et pour moi, une sorte de refuge ; — on m’apprit à chanter, — je tâchai de devenir gaie, — mais j’étais mieux dans les rôles de mélancolie et de passion. — C’est tout à peu près de mon sort. […] Elle attribue beaucoup, pour l’inspiration élégiaque des Latins, aux obstacles que rencontrait l’amant dans la situation sociale de la femme, obstacles qui ne pouvaient être écartés que par elle ; elle ajoutaït en finissant : « S’il se trouvait donc un individu dont le sort, en aimant, dépendit absolument de la volonté, des désirs, des penchants d’un autre, sans qu’il lui fût permis de rien faire pour se le rendre favorable ; dont tous les sentiments éternellement réprimés se consumassent en souhaits inutiles, n’aurait-il pas un grand avantage pour la peinture des agitations du cœur ?

1304. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre V. Des ouvrages d’imagination » pp. 480-512

Quand le despotisme existe, il faut consoler les esclaves, en flétrissant à leurs yeux le sort de tous les hommes ; mais l’exaltation nécessaire à la liberté républicaine doit inspirer de l’éloignement pour tout ce qui peut tendre à dégrader la nature humaine. […] Il en doit sortir de très inattendus de ce nouveau genre. […] Les sujets antiques et leurs imitateurs produisent moins d’effet dans la république que dans la monarchie : les distinctions de rang rendaient encore plus sensibles les peines attachées aux revers du sort, elles mettaient entre l’infortune et le trône un immense intervalle que la pensée ne pouvait franchir qu’en frémissant.

1305. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIIIe entretien. Chateaubriand, (suite) »

Il doit donc éviter les jardins publics, le fracas, le grand jour ; le plus souvent même il ne sortira que la nuit. […] Le malheur nous est utile, sans lui les facultés aimantes de notre âme resteraient inactives : il la rend un instrument tout harmonie, dont, au moindre souffle, il sort des murmures inexprimables. […] « Cependant l’homme, sorti de ses forêts, s’était associé à ses semblables.

1306. (1887) Discours et conférences « Réponse au discours de M. Louis Pasteur »

Et voyez, Monsieur, combien notre sort est étrange et quelle ironie supérieure semble s’attacher à nos pauvres efforts ! […] Il est prudent de n’associer le sort des croyances morales à aucun système. […] Il leur exposa son état et leur demanda la permission de sortir d’une vie qui allait finir bientôt, et d’abréger ainsi la durée de ses souffrances… Cette véridique histoire m’est revenue bien souvent en l’esprit, sans que je prémédite rien de semblable à la résolution d’Atticus, sachant qu’aucune permission ne me serait donnée !

1307. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre IV »

Au sortir du collège, la Nécessité passe à l’enfant sa robe virile, l’uniforme d’un métier ou d’une profession, et elle le pousse dans la mêlée humaine, comme les soldats orientaux qu’on chassait au combat, à coups de fouet. […] Voici l’heure du Palais ; il cherche sa serviette et ne la trouve pas ; il crie, sonne, tempête ; puis, tout d’un coup, s’apaise, se ravise, et sort. […] Le soir venu, il se réfugie dans le seul asile qui lui reste, il entre chez Thérèse, tombe sur un fauteuil, brisé, glacé, mortellement malade ; et, là, entre sa fille adoptive et celui qu’il appelle son fils, ouvre son cœur gonflé et en laisse sortir tout ce qu’il tient de fiel et de larmes.

1308. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Procès de Jeanne d’arc, publiés pour la première fois par M. J. Quicherat. (6 vol. in-8º.) » pp. 399-420

Sans sortir du cercle de l’horizon littéraire, que de retours soudains, que de mésaventures ! […] Plus loin encore, était le Bois-Chesnu, le bois des chênes, d’où, suivant la tradition, devait sortir une femme qui sauverait le royaume perdu par une femme (par Isabeau de Bavière). […] Quand cette enfant de seize ans sortit de son village, déterminée à faire sa conquête de France, elle était d’une vigueur et d’une audace tant de parole que d’action, qu’elle-même avait déjà un peu perdue et oubliée dans les longs mois de sa prison de Rouen.

1309. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Théodore Leclercq. » pp. 526-547

C’est seulement à cette date que son talent, jusqu’alors borné au cercle du salon et de la société, put sortir au-dehors et se donner un but, qu’il put véritablement entrer dans le public, et devenir à son moment, et sans se dénaturer, une des armes de la France. […] Leclercq, cette finesse si fréquente a le mérite d’être rapide, légère, naturelle ; elle échappe et sort à ses personnages comme une naïveté. […] Il n’a jamais connu cet effort combiné qui consiste à monter une pièce, à la construire, à la faire sortir plus ou moins sauve de toutes les embûches des coulisses, à la faire marcher droit et haut devant la rampe redoutable ; il n’a jamais eu à consommer, comme dit Voltaire, cette œuvre du démon.

1310. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Le duc de Lauzun. » pp. 287-308

Mais on se lasse de voir Lauzun, à peine sorti d’une passion et d’un malheur, recourir si vite à une distraction quelconque. […] Compromis à tort, à la suite du duc d’Orléans, dans le torrent d’accusations que soulevèrent les journées des 5 et 6 octobre, on voulait le faire partir comme ce prince pour l’Angleterre : « M. de Biron sort de chez moi, écrivait Mirabeau au comte de La Marck ; il ne part point : il l’a refusé, parce qu’il a de l’honneur. » Devenu général de la République française37, tour à tour employé à l’armée du Nord, puis en chef à celle d’Italie, puis en Vendée, Biron désirait et appelait une occasion de se signaler qui recula toujours, et dont peut-être il n’était pas homme à profiter. […] L’ancienne société a abusé ; elle a été punie et détruite, et cette punition, cette ruine se justifie aujourd’hui même avec éclat par les aveux successifs qui sortent de son propre sein.

1311. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Essai sur Amyot, par M. A. de Blignières. (1 vol. — 1851.) » pp. 450-470

Ajoutons toutefois, pour aider à l’explication, qu’au xvie  siècle le culte de l’Antiquité était tel, qu’il purifiait au premier moment tout ce qui en sortait. […] Dans sa dédicace des Vies de Plutarque à Henri II, il parle de lui humblement, plus humblement même qu’on ne le voudrait : « Non que j’eusse opinion qu’il pût issir (sortir) de moi, dit-il, personne si basse et si petite en toute qualité, chose qui méritât d’être mise devant les yeux de Votre Majesté. » Au concile de Trente, en septembre 1551, ayant eu à présenter les lettres de protestation du roi aux Pères du Concile et trouvant l’assemblée peu disposée à les recevoir : « Je filais le plus doux que je pouvois, écrit-il à son ambassadeur, me sentant si mal, et assez pour me faire mettre en prison si j’eusse un peu trop avant parlé. » Certes, un simple secrétaire, mais qui eût été de l’étoffe d’un Mazarin ou d’un D’Ossat, ou même d’un Fleury, se serait exprimé et se serait présenté autrement. […] Il est difficile d’essayer un jugement sur les ouvrages d’Amyot et de les apprécier au vrai sans avoir à la fois sous les yeux les textes et les traductions : mais non, prenons celles-ci, comme on l’a fait presque toujours, comme des écrits originaux d’un style coulant, vif, abondant, familier et naïf, qui se font lire comme s’ils sortaient d’une seule et unique veine.

1312. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Mémoires du cardinal de Retz. (Collection Michaud et Poujoulat, édition Champollion.) 1837 » pp. 40-61

Retz appartient à cette grande et forte génération d’avant Louis XIV, dont étaient plus ou moins, à quelques années près, La Rochefoucauld, Molière, Pascal lui-même, génération que le régime de Richelieu avait trouvée trop jeune pour la réduire, qui se releva ou se leva le lendemain de la mort du ministre, et se signala dans la pensée et dans le langage (quand l’action lui fit défaut) par un jet libre et hardi, dont se déshabituèrent trop les hommes distingués sortis du long régime de Louis XIV. […] Ce fut là la première pensée sérieuse d’où sortit la Fronde, pensée qui ne se produisit dans le Parlement qu’à l’occasion de griefs particuliers, et qui, lorsque les troubles éclatèrent, fut bien vite emportée dans le tourbillon des intrigues et des ambitions personnelles, mais que Retz exprime nettement au début, que le Parlement ne consacra pas moins formellement dans sa déclaration du 24 octobre 1648 (une vraie Charte en germe), et qu’il y aurait de la légèreté à méconnaître. […] C’est à ce moment aussi qu’en artiste qu’il est la plume à la main, se considérant comme sorti du préambule et du vestibule de son sujet, il se donne carrière, et, tandis qu’il n’avait dessiné jusque-là les personnages que de profil, il les montre en face et en pied, comme dans une galerie ; il ne fait pas moins de dix-sept portraits de suite, tous admirables de vie, d’éclat, de finesse, de ressemblance, car l’impartialité s’y trouve même quand il peint des ennemis.

1313. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — I. » pp. 1-22

moi, je vais m’enfoncer avec des armées nombreuses au milieu d’un grand pays qui ne produit rien. » Et puis, après une pause et un silence de quelques minutes, il s’écria comme au sortir d’une grande méditation : « Mais comment tout ceci finira-t-il ?  […] Il le lui devait ; car, par un retour singulier du sort, ce fut Marmont, si maltraité finalement par Napoléon, qui, le seul de ses maréchaux, eut pour mission comme spéciale de voir son fils, de lui parler de son père, de lui démontrer, cartes en main, cette gloire militaire qui jusque-là n’était, pour l’enfant de Vienne, qu’un culte et qu’une religion. Ce sont là de ces jeux du sort, lequel, au milieu de ses rigueurs, a aussi ses réparations et presque ses piétés, et qui semble ici avoir voulu apprendre la réconciliation et la clémence aux hommes.

1314. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Michaud, de l’Académie française. » pp. 20-40

Quoi qu’il en soit, il en sortit résolu d’être plus prudent désormais et de jouir au moins des bienfaits de la civilisation renaissante. […] Les plus éloquents avaient à profiter de ses aperçus, et l’on sortait d’auprès de lui plus aiguisé chaque fois et plus fin. […] Au point où en étaient les choses, il lui devenait également pénible, il lui semblait également périlleux d’appuyer ou de combattre. — La plupart des jeunes rédacteurs politiques que j’ai nommés sortirent de La Quotidienne à ce moment, et se rallièrent, eux, au ministère Martignac, qui exprimait alors le vœu de la France modérée.

1315. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — I. » pp. 41-62

Le peu de notes qu’on a publiées de lui, et où il fait son portrait, ont donné à sa physionomie une vie et un naturel qui est mieux que de la majesté : « Plutarque me charme toujours, disait-il ; il y a des circonstances attachées aux personnes qui font grand plaisir. » Né le 18 janvier ‌1689, au château de La Brède, près de Bordeaux, il sortait d’une famille de robe et d’épée, de bonne noblesse de Guyenne : « Quoique mon nom ne soit ni bon ni mauvais, disait-il, n’ayant guère que deux cent cinquante ans de noblesse prouvée, cependant j’y suis attaché. » Son père, qui avait servi, après s’être retiré de bonne heure, soigna fort son éducation ; le jeune Montesquieu fut destiné à la magistrature. […] Il lisait plume en main et en réfléchissant : « Au sortir du collège, on me mit dans les mains des livres de droit ; j’en cherchai l’esprit. » Cet esprit des choses du droit et de l’histoire fut la recherche de toute sa vie : il ne se reposa que quand il crut l’avoir trouvé. […] Il était plein de l’Angleterre en arrivant, et il dut repousser et ajourner l’idée de publier d’abord un livre sur ce gouvernement original et si peu semblable au nôtre, qui le tentait : il donna de préférence ses Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence (1734), qui sont restées le plus classique et le plus parfait de ses ouvrages, le seul même qui nous paraisse aujourd’hui sorti tout d’un jet comme une statue.

1316. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — II. (Fin.) » pp. 308-328

Sa Constitution, à lui, était toute dans les vers de Pope : « Laissez les fous combattre pour les formes de gouvernement ; celui, quel qu’il soit, qui est le mieux administré, est le meilleur. » Les événements qui suivirent ne furent que trop propres à le confirmer, sans doute dans cette pensée favorite, que« la cause du genre humain était désespérée », et que la seule ressource était tout au plus, çà et là, dans quelque grand et bon prince que le sort accorde à la terre, dans « une de ces âmes privilégiées » qui réparent pour un temps les maux du monde. Il y avait des années qu’écrivant à Mlle Volland, l’amie de Diderot, et lui parlant de la vérité et de la vertu comme de deux grandes statues que Diderot se plaisait à voir élevées sur la surface de la terre et immobiles au milieu des ravages et des ruines : « Et moi je les vois aussi, s’écriait-il ; … mais qu’importe que ces deux statues soient éternelles et immobiles s’il n’existe personne pour les contempler, ou si le sort de celui qui les aperçoit ne diffère point du sort de l’aveugle qui marche dans les ténèbres ! 

1317. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — I. » pp. 455-475

On le trouve en 1732, au sortir du fort de Custrin, âgé de vingt ans, mûri déjà par le malheur, maître de lui-même et de ses passions, avide de réparer par l’étude les dissipations premières. […] L’esprit humain, pour sortir de la routine où il est sujet à s’endormir et à se rouiller, a de temps en temps besoin d’un précepteur philosophique nouveau : ce précepteur excitateur, qui doit quelque peu se mettre à la portée des gens du monde, varie beaucoup selon les pays et selon les temps : tantôt ce sera La Sagesse de Charron, tantôt La Logique de Port-Royal ou même Malebranche en ses Entretiens, tantôt Locke qui, pour la France, fut toujours trop long. […] Aussi suis-je, après ce dernier et pénible acte de mes faibles et tremblantes mains, tout aussi tranquille sur le sort de ma famille que je le suis par rapport au mien propre, dans ce moment où je viens de remettre mon âme entre les mains de l’Être infiniment bon par qui elle existe, et qui ne l’a sans doute appelée à l’existence que pour la félicité.

1318. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ernest Hello » pp. 207-235

Il a souvent cet esprit terrible, comme s’il ne sortait pas de la cellule apaisante d’Angèle, comme s’il ne sentait pas à pleine haleine sa rose de mysticité ! […] Il a su braver également le rire édenté des vieux voltairiens et le scepticisme, sans rire, des libres penseurs qui sont sortis de Voltaire. […] Ce n’est pas, assurément, un mystique à la manière de plusieurs des Saints qu’il décrit ; chez lui, l’esprit ne sort pas de sa sphère par un de ces ravissements, par une de de ces irruptions et de ces trouées en Dieu qu’eurent, par exemple, sainte Thérèse ou Catherine de Sienne.

1319. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre v »

Léon Sommer ; « Actuellement, dit-il, je tiens ma vie comme entièrement sacrifiée, mais si le sort veut bien me la laisser, à la fin de la guerre je la considérerai comme ne m’appartenant plus, et, après avoir fait mon devoir envers la France, je me dévouerai au beau et malheureux peuple d’Israël dont je suis issu. […] Roger Cahen, sorti depuis peu de l’école normale supérieure, âgé de moins de vingt-cinq ans, est sous-lieutenant dans les bois de l’Argonne. […] Toute chaude, toute noble, profondément douloureuse pour ceux qui l’écoutent avec une parfaite sympathie, mais pour lui nuancée de paix joyeuse :‌ Je me suis interdit de porter des jugements de valeur sur les événements de ma vie ; je les accepte tous comme des occasions que m’offre le sort pour mieux me connaître et m’améliorer.‌

1320. (1868) Curiosités esthétiques « VI. De l’essence du rire » pp. 359-387

Faut-il répondre par une démonstration en règle à une espèce de question préalable que voudraient sans doute malicieusement soulever certains professeurs jurés de sérieux, charlatans de la gravité, cadavres pédantesques sortis des froids hypogées de l’Institut, et revenus sur la terre des vivants, comme certains fantômes avares, pour arracher quelques sous à de complaisants ministères ? […] En vérité, faut-il donc démontrer que rien de ce qui sort de l’homme n’est frivole aux yeux du philosophe ? […] Il est sorti des conditions fondamentales de la vie ; ses organes ne supportent plus sa pensée.

1321. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « À M. le directeur gérant du Moniteur » pp. 345-355

Dans mes leçons, — dans les écrits qui sont sortis ou qui sortiront de mes leçons —, on a pu voir et l’on verra que je m’acquitte de ma fonction non seulement avec conscience, mais de tout cœur, avec zèle et sincérité.

1322. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, romans (1832) »

Quand son entretien solitaire, ses chants dans les bois, ses confidences d’ami à ami, sa misanthropie ou sa folle gaîté d’amant ne lui suffisent pas ; quand il veut sortir de lui-même, du pur lyrisme, du monologue ou du dithyrambe ; quand il a le don des combinaisons singulières, des nœuds de forte étreinte et des péripéties surprenantes, eh bien ! […] Puis, lorsque plus tard encore il vit sans doute qu’illusions pour illusions il ne fallait pas être trop dédaigneux des premières, il revint à Bug, le remania, conserva le cadre, mais le redora en mille manières, enrichit le paysage de ces couleurs où la Muse lui avait récemment appris à puiser, compliqua les événements, introduisit entre ses personnages le seul sentiment qui ait un attrait souverain pour la jeunesse, et d’où sortent les rivalités, les perfidies, les sacrifices, les incurables blessures ; il mit l’amour, il montra la douce Marie.

1323. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « FLÉCHIER (Mémoires sur les Grands-Jours tenus à Clermont en 1665-1666, publiés par M. Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont.) » pp. 104-118

Fléchier a repris exactement l’œuvre de prose de Balzac, un peu du côté de l’hôtel Rambouillet, et sans entrer dans le mouvement de Boileau ; il a rendu ce service dans sa propre ligne, directement, ayant reçu la tradition et la culture par ce coin un peu précieux du monde ; sorti de là, et sur les pas de Montausier, il s’est bientôt associé et assorti avec gravité à la décoration auguste du grand règne. […] L’Auvergne, ce pays de montagnes où la féodalité était comme retranchée, nous représente en abrégé et dans un échantillon plus marquant l’état d’une grande partie de la France, au sortir des guerres civiles ; il fallut, pour asseoir bien incomplétement encore l’ordre administratif, que la souveraineté toute-puissante de Louis XIV passât là-dessus avec vigueur et rasât bien des châteaux.

1324. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres publiées par M. J. Sabbatier. Tome Ier, 1845. » pp. 154-168

Victorin Fabre s’était arrêté et comme figé en 1811 ; son biographe se rabat de plus près à 1804 ; il n’en sort point, il a posé son dieu Terme à cette date-là. […] Victorin Fabre, battu dans le concours de 1812, et perdant la belle génisse, c’est-à-dire le prix de l’Académie, ne fit pas autrement que le vaincu de Virgile, et sortit de l’arène avec la rancune superbe du taureau blessé ; mais il ne revint pas avec la même allure, et à le voir reparaître, quelques années après, tout ralenti et tout empesé, on put lui appliquer ce vers assez imitatif d’un moderne : Taurus abit mœrens e regnis : ecce redit bos.

1325. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. Vitet à l’Académie française. »

Empêché par les lois mêmes de la célébration et de la transformation académique de serrer son sujet de trop près, l’ayant toujours en présence, mais à distance, il s’est élevé sans en sortir. […] Manzoni le savait bien, lorsqu’il rappelait ce mot à Fauriel : « L’imagination, quand elle s’applique aux idées morales, se fortifie et redouble d’énergie avec l’âge au lieu de se refroidir. » Racine, après des années de silence, en sort un jour pour écrire Athalie.

1326. (1874) Premiers lundis. Tome I « Walter Scott : Vie de Napoléon Bonaparte — I »

Quand sir Walter Scott en viendra à la campagne d’Italie et à la correspondance de Bonaparte avec Joséphine, il comparera le style étincelant de ces lettres au langage d’un berger arcadien, et il ajoutera ces singulières paroles qu’on croirait entendre sortir des lèvres froncées d’une milady autour d’une table à thé : « Nous ne pouvons nous dispenser de dire que dans certains passages, qu’assurément nous ne citerons pas, cette correspondance offre un ton d’indélicatesse (indelicacy) que, malgré l’intimité du lien conjugal, un mari anglais n’emploierait pas, et qu’une femme anglaise ne regarderait pas comme l’expression convenable de l’affection conjugale. » Risum teneatis… Maintenat que nous avons un échantillon du XVIIIe selon sir Walter Scott, prenons une idée du tableau qu’il trace de la révolution francaise : « La définition du tiers état par Sieyes fit fortune, au point que les notables demandèrent que les députés du tiers fussent égaux en nombre aux députés de la  noblesse et du clergé réunis, et formassent ainsi la moitié numérique des délégués aux États généraux. » Mais on sait que l’Assemblée des notables se prononça contre le doublement du tiers, et que le bureau présidé par Monsieur fut le seul qui vota pour cette mesure. […] Lorsqu’il fut sorti de la caverne après avoir crevé l’œil unique du cyclope, celui-ci répondait à ceux qui, accourus à ses cris, lui demandaient de qui il avait tant à se plaindre, — de Oύτις ; (de Personne).

1327. (1874) Premiers lundis. Tome I « Alexandre Duval de l’Académie Française : Charles II, ou le Labyrinthe de Woodstock »

La semence a fructifié ; d’imberbes professeurs, sortis du salon de madame de Staël, en ont propagé les doctrines, et, depuis que le Globe a paru, le mal est devenu effrayant. […] Le triomphe pouvait durer, dans les salons, quelques années ; mais à la fin la représentation, venant confirmer ou contrarier le jugement des amateurs, fixait pour jamais le sort de l’auteur.

1328. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — III »

Ils se figurent bien, il est vrai, que cet abîme qui sépare la pensée et le désir spirituel d’avec l’acte matériel est traversé, cette vie durant, par une espèce de pont-levis moyennant lequel le moi peut sortir au dehors ; mais c’est là, selon eux, une puissance viagère et fortuite à laquelle il ne faut pas trop s’habituer, et dont il convient d’user avec discrétion et seulement pour les besoins indispensables. […] Il est associé intérieurement à la force vitale qui lui est étrangère ; il tient extérieurement aux organes de relation qui ne lui sont pas moins étrangers ; il vit pourtant ; il vit en lui-même par la pensée, comme si la pensée pouvait dans la réalité se séparer jamais d’un mouvement et d’un sentiment ; il vit quoique frappé de mort dans sa sensibilité intestine et dans son expansion rayonnante ; il vit comme un arbre qu’on aurait séché dans ses racines ; et qu’on mutilerait ensuite dans ses ramures ; il vit dans le château fort de l’âme, comme une garnison assiégée à qui l’assiégeant aurait coupé la source intérieure, le puits profond d’eau vive, et qui, n’osant sortir de la poterne pour descendre au fleuve, n’aurait plus d’espoir qu’en la manne mystique et céleste.

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