/ 3046
732. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Le Comte Léon Tolstoï »

Et si l’on passe de cet arrangement purement formel des mots au détaillement même de la description, au développement des situations ou des idées, au narré des événements, on est en présence d’une série de longueurs et d’écourtements, d’omissions et d’insistances sans cause visible, semblable à l’application d’une main faiblissante, puis fiévreuse, puis fléchissant de nouveau sous l’immense tâche et l’abandonnant. […] Sur la foule de nos frères et de nos ennemis, Tolstoï a attaché le regard limpide et tranquille le plus aigûment pénétrant qu’ils aient souffert, et y portant ses larges et calmes mains, il a jeté dans son œuvre le groupe d’êtres d’âmes et de chairs dont elles étaient pleines, un morceau de création soustrait en sa forme mentale à la ruine du transitoire, tel quel, moite encore de la vie surprise, mou, ductile, coloré et bruissant ; tendrement saisie, conservée toute comme le commandait son prix, et laissée emmêlée comme le commandait sa mollesse, cette pêche miraculeuse d’êtres vivants a déterminé la beauté même et la forme de l’œuvre dans laquelle expire leur souple animation. […] L’œuvre s’étage péniblement, elle pousse ça et là ses murs bas, gris, et à demi dressés ; elle est conduite telle qu’elle à sa fin et enserre en ses linéaments confus un immense domaine et une énorme foule ; on y entre fatalement, on y erre, on y reste, et ce n’est point une émotion rassérénante que l’on éprouve à pénétrer dans ce lieu d’ombres ; attiré d’abord et retenu comme par un enchantement, on sent se relâcher la forte main du magicien lui-même, et c’est abandonné, doutant, percevant la vague et menaçante présence d’un nihilisme transcendant, que l’on parcourt l’immense palais peuplé de souffles, déserté, désolé, assombri, et d’où se retire peu à peu l’esprit du maître vers de lointaines retraites d’indifférence. Il s’acquitte de sa tâche, sans plaisir et sans ardeur, avec de lents mouvements de ses puissantes et débiles mains, il assemble les matériaux de son œuvre, où la foule grise de ses âmes, dispose la terre où elles vivent, entrelace le cours des événements, et cette tâche de géant imparfaitement, lentement achevée, mais imposante de grandeur et de vérité, il s’assied et la contemple avec des yeux distraits, distants et songeurs, comme absent de ce monde et de l’image qu’il est parvenu à en donner, comme détaché déjà de tous deux et entrevoyant quelque réalité dernière plus auguste et plus vénérée. […] Il fallut que, se soustrayant en réfractaire à tout ce qu’enseignent de seconde main sur notre entourage les livres et les on-dit, il reçut par des sens naturellement aigus des impressions vraiment personnelles et propres à lui, de l’immense spectacle ambiant, que, coordonnées par une mémoire étonnamment continue, les diverses images des objets et des hommes, non pas agglomérées en idées générales, mais mises bout à bout en séries, lui apparussent en leur évolution aussi bien qu’en leur nature.

733. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — II » pp. 39-56

Quel rapport y a-t-il entre ce qui se pratique et ce qui est établi par vos constitutions que j’ai entre les mains ? […] En l’envoyant au docteur Arnauld, depuis longtemps réfugié dans les Pays-Bas, et alors près de mourir, il présentait ce volume profane comme lui ayant été arraché par l’imprimeur, qui s’était emparé des pièces volantes ou copies échappées de ses mains, et qui l’allait publier sans sa permission ; moyennant ce tour, il espérait que la sévérité du docteur se laisserait fléchir. […] Quelle est cette main si barbare ? […] Santeul les attendait au passage, et, se jetant à la traverse, les poursuivait son apologie à la main jusqu’à la porte du collège exclusivement ; car je ne sais quelle terreur panique l’empêchait de passer outre. […] Arnauld plus que personne au monde, qu’il portait toujours sur lui, comme une relique, une lettre que cet incomparable docteur lui avait autrefois fait l’honneur de lui écrire » ; et la réponse allait non aux mains du digne curé de Saint-Jacques qui ne savait mot de ce manège, mais droit au collège Louis-le-Grand, où c’était la gaieté des récréations.

734. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Méditations sur l’essence de la religion chrétienne, par M. Guizot. »

En même temps qu’il vaque à l’achèvement de ses Mémoires, à son apologie politique et à la défense de la cause moyenne et restreinte qu’il a si éloquemment soutenue, il revient sur les points essentiels de son dogme en religion, en morale, et les voyant ébranlés par des attaques nouvelles, multipliées, audacieuses ou masquées, ouvertes ou sourdes, il y remet la main pour en raffermir l’idée et la certitude dans les esprits. […] le peut-elle en vertu d’une soudaine retouche, et sous la main même qui l’avait primordialement réglée ? […] si la personne atteinte d’un mal lent et mortel lui est particulièrement chère, il suit la mort dans ses progrès, il la voit venir à coup sûr, fatale, irrémédiable ; il sait le néant des illusions, des espérances ; il ne manque cependant à aucun des soins, à aucune des sollicitudes, tout en sachant et en se prédisant presque à heure fixe, et montre en main, le terme funèbre que tous ses soins ne reculeront pas. […] Au lieu de vainqueurs qui courent le flambeau à la main, je ne vois que des naufragés qui se succèdent ; quelques-uns, en nageant, portent et soutiennent le plus loin qu’ils peuvent les survivants du précédent naufrage ; mais eux-mêmes, après un certain temps d’effort, ils s’engloutissent et disparaissent avec leur fardeau. […] Tout protestant est pape, une bible à la main.

735. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. PROSPER MÉRIMÉE (Essai sur la Guerre sociale. — Colomba.) » pp. 470-492

C’est alors, vers l’an de Rome 617, qu’un jeune homme d’une famille plébéienne, mais illustre, un élève formé de la main des philosophes grecs, Tibérius Sempronius Gracchus, « dont le caractère bon et humain n’avait pu être corrompu par l’orgueil exclusif de sa nation, » comme il traversait l’Étrurie pour aller servir en qualité de questeur dans l’armée qui s’assemblait contre Numance, fut frappé de l’aspect désolé de ce pays, célèbre autrefois par sa richesse ; il s’en demanda les causes, il songea aux grands remèdes : de là plus tard ses tentatives de tribun et sa catastrophe. […] Cela se passait vers 630, » c’est-à-dire un peu plus de trente ans avant les représailles à main armée d’un autre Marius sous ces murs de Téanum. […] Mais ici on ne s’y est pas mépris, on a senti au début que c’était vrai, que c’était amusant, que ces singularités énergiques jouaient dans leur cadre, qu’un guide aisé et sûr, et pas dupe le moins du monde, tenait la main. […] Et cet autre refrain, qu’à l’oreille d’Orso tous les échos murmurent, ne le cède à rien en opiniâtre et fixe clameur : « A mon fils, mon fils en lointain pays, — gardez ma croix et ma chemise sanglante… — Il me faut la main qui a tiré, — l’œil qui a visé, — le cœur qui a pensé… » La scène avec les Barricini autour de la bière du pauvre Pietri ne ferait pas un indigne pendant, pour le tragique, à ce qui se passe là-bas au pied du tombeau d’Agamemnon. […] Toutes les Électres de théâtre, les Orestes à la suite, les Clytemnestres de seconde et de troisième main (et combien n’y en a-t-il pas !)

736. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1853 » pp. 31-55

D’une main il nous eût confié sa montre, de l’autre main il nous l’eût retirée. […] Sur le banc, dans des poses ratatinées, sept à huit vieillardes, de vraies sibylles, et mises avec des loques de spectres, les genoux ramassés sous les corps voûtés, et sur les genoux un gueux au-dessus duquel se croisent leurs deux mains, comme les deux mains qui sont sur les tombeaux. […] Céleste était déjà assise, les mains enfoncées au fond de son manchon, l’œil dur, et raidie dans une pose de pierre.

737. (1911) Études pp. 9-261

Sans bouger il la poursuit, il cherche à se rendre maître de sa fuite en l’imitant avec les mains. […] Elles reçoivent leur sens d’en haut comme si on leur imposait les mains. […] j’agite ces mains meurtrières ! […] Je possède tout sous mes mains ! […] (rien que la petite pression de la main pour gouverner.)

738. (1866) Dante et Goethe. Dialogues

Prenant des mains de son frère un épais manteau qu’elle roula en coussin, elle s’assit auprès de Diotime. […] Une couronne, des belles mains de la fée Viviane ! […] Sans se parler, elles avaient enlacé leurs bras, et la main dans la main, émues d’une même pensée, elles s’appuyaient l’une à l’autre. […] Diotime tendit la main à Élie en s’excusant à son tour de sa vivacité. […] comme il tient le scalpel d’une main maîtresse !

739. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE CHARRIÈRE » pp. 411-457

J’ai eu entre les mains nombre de lettres d’elle à sa mère et à une tante, dans l’intervalle des années 1760-1767. […] Elle m’a présenté sa main avec une grâce charmante, et nous avons pris notre place. […] … a-t-il repris en me prenant la main. […] il eût couru, le livre en main, chez Sedaine. […] Hier, vous méditiez une vie pure, dévouée, honorée de toutes les vertus, semant de chaque main les bienfaits.

740. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (3e partie) » pp. 5-96

Knebel, qui déjà alors ne laissait pas refroidir sa pipe, était assis auprès du feu, et amusait la société avec toute sorte de plaisanteries dites de son ton tranquille, pendant que la bouteille passait de mains en mains. […] Je saisis les mains de Goethe ; mais je ne sais ni ce que je lui dis ni ce qu’il me répondit. […] Après quelques heures de sommeil calme, Goethe vers minuit se réveilla et sentit de minute en minute un froid qui, de ses mains, étendues nues sur son lit, gagnait tout le corps. […] Le nom d’Ottilie revenait souvent sur ses lèvres ; il la pria de s’asseoir auprès de lui et tint longtemps sa main dans les siennes. […] Je mis la main sur le cœur, je ne trouvai qu’un silence profond ; j’avais pu jusqu’à ce moment me contenir, mais alors je me détournai et laissai un libre cours à mes larmes.

741. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Shakespeare »

François Hugo a la fantaisie d’appeler cette langue la langue révolutionnaire, mais les révolutions qui nous ramènent au passé, sachant où elles vont, ne doivent pas porter le même nom que celles-là qui nous poussent vers l’avenir avec des mains d’aveugles. […] » Que Cuvier, dont l’idée nous porte à la tête et nous grise, ait retrouvé des espèces perdues, cela se conçoit : il allait du connu à l’inconnu, du même au même, — non au différent, — et il tenait dans deux doigts de sa main un petit os, base de ses inductions sublimes. […] Eux, qu’est-ce que cela leur fait qu’on protège de la main et du respect cette petite fleur de leur tombeau qu’on appelle la gloire ? […] François Hugo qui dans ses précédentes préfaces, a joué aux petits ronds dans le puits de Shakespeare, a fini ce jeu et met la main sur une idée juste. […] Eh bien, la Fonction, la Responsabilité, l’ont saisi, ce fou, par ses cheveux d’Absalon, de leurs mains d’une froideur toute-puissante, et lui ont appliqué ce bandeau qui calme le front à force d’y peser : — une couronne !

742. (1927) Les écrivains. Deuxième série (1895-1910)

Dès l’instant où le gendarme lui a mis la main à l’épaule, il est, irrémédiablement, par ce geste, séparé du monde. […] On croyait avoir mis la main sur un autre Ibsen. […] De la main gauche, il tenait son questionnaire… de la main droite, il ajustait le mentaloscope sur le crâne du citoyen Faberot, étonné et sérieux. […] Sa misère, il l’a forgée de ses propres mains. […] … Certes, en tout ceci, mes mains sont nettes… Je n’ai rien à craindre… et personne ne m’accuse !

743. (1894) La bataille littéraire. Septième série (1893) pp. -307

Et je m’apercevais qu’elle lui tendait le mouchoir de la nuit, plein de sang, et que ses maigres mains cherchaient à cacher. […] Il lui prit la main. […] Il a tordu et retordu, d’une main cruelle ? […] Ici, c’était un jeune aveugle dont le père, pour plaisanter, dirigeait sur un fer rougi les mains tâtonnantes. […] Il voulait qu’on le condamnât à être assommé par la main du bourreau. — C’est odieux et idiot, mais ce n’est pas une raison pour que ce soit impossible.

744. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Figure de missel, qui entre en scène un missel à la main, et qui meurt dans l’église des remords de son péché… Pauvre sainte qui n’a pas abouti, coupée, souillée et ensanglantée dans sa fleur… En elle-même, Marguerite est pourtant peu de chose. […] Goetz de Berlichingen, le héros de Gœthe, n’est rien de plus qu’un Don Quichotte féodal, d’une chevaleresque bonhomie, rond de cordialité militaire et généreuse, à la main ouverte encore plus qu’à la main de fer. […] C’était un vieux peintre de beaucoup d’esprit et de talent, lequel gouvernait un musée : « Voyez-vous, — disait-il, tout pâle d’émotion, tremblant, chevrotant, mais sublime, parce qu’il était ému et vrai, — voyez-vous cette vieille main ? […] » Et il la baisait, cette vieille main ridée et sèche, comme un vieillard amoureux eût baisé la main rose de la jeune maîtresse qui l’aurait rendu insensé. […] Prudent, comme un serpent qui craint pour sa queue, il fermait la main sur la vérité quand parfois il en attrapait une, — espèce de Fontenelle, moins la grâce, avec un air de charlatan majestueux que le bonhomme Fontenelle n’avait pas.

745. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre second » pp. 200-409

La plupart des hommes meurent le hochet à la main. […] — Je mis ma main dans l’eau, et je la trouvai trop froide. […] Un autre, paralysé d’une main, également inspiré par le dieu, lui demandait de la presser de son pied.. […] Il donnera… Vous ouvrez les oreilles, vous tendez la main ! […] Voyez dans quelles mains vous allez déposer l’autorité souveraine !

746. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CLe entretien. Molière »

Mais cet éclaircissement causa un vacarme terrible ; la mère donna des marques de fureur et de désespoir, comme si Molière avait épousé sa rivale, ou comme si sa fille fût tombée entre les mains d’un malheureux. […] Tout cela était un rêve pour un enfant de douze ans, qui était depuis longtemps entre les mains de gens durs, avec lesquels il avait souffert ; et il était dangereux et triste qu’avec les favorables dispositions qu’il avait pour le théâtre, il restât en de si mauvaises mains. […] TARTUFFE, prenant la main d’Elmire et lui serrant les doigts. […] De vous faire aucun mal je n’eus jamais dessein, Et j’aurais bien plutôt… (Il met la main sur les genoux d’Elmire.) […] Et j’aurais bien plutôt…Que fait là votre main ?

747. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « La poésie »

Les traductions du grec, celles d’Homère en particulier, plus loin celles de Pindare et de Sophocle, y sont de première main fidèles dans la lettre et dans l’esprit, également loin du parti pris d’étrangeté et de la fausse politesse. […] Le tombeau de Jésus-Christ retombera entre les mains des infidèles, mais les membres de Jésus-Christ seront libres. » Et c’est ainsi que renseignement secondaire initie les jeunes filles au sentiment vrai de nos origines modernes, et les émancipe, les aguerrit par degrés en leur donnant sous cette forme agréable la clef des vicissitudes et des révolutions de l’histoire générale : c’est quelque chose déjà que de les guérir d’un convenu dans le jugement des œuvres de l’esprit et de l’imagination. […] Ses moindres touches sont d’une main sûre.

748. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre III. Paradis perdu. »

Milton ne vous entretient ni de batailles, ni de jeux funèbres, ni de camps, ni de villes assiégées ; il retrace la première pensée de Dieu, manifestée dans la création du monde, et les premières pensées de l’homme au sortir des mains du Créateur. […] Au lieu d’accabler son épouse de reproches, Adam la console et prend de sa main la pomme fatale. […] Homère, dans ce morceau, a quelque chose de plus naïf que Virgile auquel il a fourni d’ailleurs tous les traits frappants, tels que l’ouvrage échappant des mains d’Andromaque, l’évanouissement, etc.

749. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre VII. Des ouvrages périodiques. » pp. 229-243

Cet ouvrage est aujourd’hui entre les mains d’une société de gens de lettres, aussi estimables par leur érudition que par leur politesse. […] Ce Journal est aujourdhui entre les mains de M. l’Abbé Aubert & de M. […] Il est entre les mains d’une société de gens de lettres de beaucoup de mérite, à la tête desquels est M.

750. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « J.-K. Huysmans »

Nous n’en sommes plus, il est vrai, à l’homme plante de La Mettrie ou à la main bête d’Helvétius. […] Il tomberait des mains. […] Le misérable château de cartes — cette petite Babel de carton — élevé contre le monde de Dieu, s’est écroulé et lui est retombé sur les mains.

751. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome I pp. 5-537

Aussi le sacerdoce ne méprisa pas l’art oratoire : cet art, qui soutint longtemps la politique républicaine, lui servit à propager les dogmes et la suprématie des états de l’église, en lui assujettissant les nations, les potentats, par l’empire de la parole, qui lui mit dans les mains leur or et leurs armées. […] « Phaëton à ces mots prend les rênes en main ; « De ses chevaux ailés il bat les flancs agiles. […] Comme Quintilien, il conduit son disciple par la main à travers des sentiers riants et ornés, dans les beaux champs de l’éloquence, ouverts à l’orateur. […] Si quelque amant, épris d’un amour ordinaire, regrette la main de sa maîtresse ou gémit d’une infidélité, accident assez commun dans le monde, ses peines toucheront peu, et ce sont là des chagrins de comédie. […] La scène s’ouvre par les consolations du roi, qui suspend les lugubres plaintes des vieillards suppliants, et des enfants en pleurs, tenant en leurs mains les rameaux et les bandelettes, symboles de la prière.

752. (1926) La poésie de Stéphane Mallarmé. Étude littéraire

Mais pourquoi supposer lorsque j’ai sous la main ce texte où M.  […] Rien, à sa main simplement la mousse du vin blond, le vers qui est là sans prétexte autre que la coupe levée. […] Mais pour lui, dans chacune de ses mains, de ses mains presque vides, la destinée avait mis la même valeur en deux gemmes non classées, et sans prix courant. […] Son Occident réel et vivant ce sont les désirs de la main, les désirs pour la déployer toute, flottant déjà dans les regards. […] Il ne figure dans le vers que si Orgon le garde dans sa main.

753. (1864) Histoire anecdotique de l’ancien théâtre en France. Tome I pp. 3-343

Comme la nuit était close quand l’audacieux équilibriste exécuta ce tour périlleux, il prit à la main un flambeau allumé, afin qu’on le pût bien apercevoir. […] A ce souvenir, le sabre tombe des mains du mari offensé, qui s’écrie : « Ah ! […] Le grand Baron n’eût pas manqué de tuer Camille tombée à ses pieds, dût-il ensuite lui offrir la main une fois la toile abaissée. […] Une main qui nous fut chère… Madame, est-ce la vôtre ou celle de ma mère ? […] Le conseil fut suivi, mais aussitôt l’image d’Achille apparut en casque et en cuirasse un rabot à la main.

754. (1848) Études critiques (1844-1848) pp. 8-146

Les volumes rassemblés sous la main, nous hésitons à saisir l’un plutôt que l’autre, car rien n’établit, entre eux, la moindre différence. […] Le ventre a trop longtemps dévoré paresseusement ce que les mains laborieuses lui transmettent. […] Il ne trouve pas d’image qui en rende mieux l’idée qu’un caniche échappé des mains du tondeur avant la fin de sa toilette. […] Peut-être ce critique n’est-il pas, ne peut-il pas être le chef apparent du culte, mais il en est certainement en secret le plus puissant promoteur ; toutes les affaires de la secte lui passent par les mains. […] Il lit bien certainement ses auteurs une loupe à la main, car rien ne lui échappe.

755. (1888) Impressions de théâtre. Deuxième série

Brutus, fort embarrassé, se dérobe, s’efface, et passe la main à Cassius. […] Ce serait une petite famille de Labdacides — par la main gauche. […] Il offre de l’argent : on accepte ; il demande la main d’Iza : on ne dit pas non. […] Toute la salle était dans sa main. […] Grévin par la main innocente d’une de ses petites femmes.

756. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome I pp. 1-402

Le caractère de Frétillon est tracé de main de maître. […] Ces mains jointes pour la prière et qui s’ouvrent pour étreindre une main ardente n’offrent à l’esprit rien de vraiment poétique. […] Toussaint essaie en vain de mourir les armes à la main, il est forcé de se rendre. […] Il escalade les murs hérissés de fer, il met ses mains en lambeaux. […] Hugo, donne la main gauche à Corneille et la main droite à Molière.

757. (1803) Littérature et critique pp. 133-288

Celui qui, jeune encore, te surpassa dans les batailles, fermera, comme toi, de ses mains triomphantes, les blessures de la patrie. […] Les anciennes relations les représentent un bréviaire sous le bras gauche, une grande croix à la main droite, et sans autre provision que leur confiance en Dieu. […] Mettez la main sur ma cuisse, dit le vieil Isaac à son serviteur, et jurez d’aller en Mésopotamie. […] « À Fribourg, je l’ai vu qui, le fer à la main, « Chez nos vieux ennemis se frayait un chemin. […] L’héritage de leur gloire n’a point dégénéré dans ses mains, car il nous a transmis fidèlement leurs préceptes et leurs exemples.

758. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre X. Machines poétiques. — Vénus dans les bois de Carthage, Raphaël au berceau d’Éden. »

Plusieurs fois les dieux en viennent aux mains dans Homère ; mais, comme nous l’avons déjà remarqué, on ne trouve rien dans l’Iliade qui soit supérieur au combat que Satan s’apprête à livrer à Michel dans le Paradis terrestre, ni à la déroute des légions foudroyées par Emmanuel : plusieurs fois les divinités païennes sauvent leurs héros favoris en les couvrant d’une nuée ; mais cette machine a été très heureusement transportée par le Tasse à la poésie chrétienne, lorsqu’il introduit Soliman dans Jérusalem. […] Dirons-nous qu’elle est sans charmes, lorsque, penchée sur le front de Renaud endormi, le poignard échappe à sa main, et que sa haine se change en amour ?

759. (1884) La légende du Parnasse contemporain

Plus imprudent et plus familier, Théodore de Banville jetait sur tous à pleines mains ses resplendissantes pierreries. […] Il a gravi les Alpes, changeant contre un bâton de touriste la branche d’aubépine que l’on porte à la main au retour de Clamart. […] Et toute la franche jeunesse qui était là battit des mains avec fureur. […] Et c’était de toutes parts des poignées de mains heureuses. […] Devant ce beau résultat, il y a des gens qui se frottent les mains.

760. (1896) Études et portraits littéraires

Il nous explique que ces mains-là ne sentent pas les étreintes ordinaires. […] De qui accepterait-on la main ? […] Un bonheur fortuit lui a mis la plume à la main. […] Il a certes l’outil bien en main ; il s’en sert avec aisance, avec force, avec art. […] Pourtant, où qu’il vous tombe sous la main, ouvrez-le.

761. (1890) Derniers essais de littérature et d’esthétique

Les autres pièces ne sortent pas moins malmenées des mains de M.  […] Les mains du modèle anglais sont presque toujours grossières et rouges. […] En tout cas, il est malaisé, sinon impossible, de mettre la main sur lui. […] Ses mains vigoureuses lui ont fermé les yeux. […] Entre les mains de M. 

762. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

Il pose sur sa hanche sa belle main aux doigts intelligents. […] Il est vrai qu’il ajoutait : « Je la lave, comme saint Bonaventure, avec des mains de cardinal !  […] à travers les doigts de la main de l’homme, également partout… » Cette page est de 1863. […] Tout d’un coup, cette aventure, entre vos mains de poète, s’amplifie, elle se creuse. […] Faute d’argent, il doit utiliser dans ses rares travaux les vieilles mains de l’aïeul et les jeunes mains du petit garçon.

763. (1874) Histoire du romantisme pp. -399

Asselineau nous tombent sous la main, de quels amers regrets ne sommes-nous pas saisi ? […] lui dîmes-nous en nous rapprochant de lui et lui secouant la main, à quand le second volume de vers ? […] Le prologue est de notre main, mais cela ne fait pas disparate. […] De quelle main légère elle tâchait de panser les plaies de cet orgueil souffrant ! […] Son idée, sinon sa main, a mis un cachet sur toutes ses œuvres.

764. (1905) Propos de théâtre. Deuxième série

C’est une main de fer Qui me tient. […] On ne peut pas applaudir des deux mains au public sur ces constatations-là. […] Voilà pourquoi, dur envers tous, il est d’argile aux mains de Tartuffe. […] Il avait en main de quoi faire un gros volume très intéressant, très substantiel. […] Les plus gros et les plus infimes lui ont passé par les mains et sous les yeux.

765. (1890) Dramaturges et romanciers

Il n’y a plus trace de souvenirs ni d’hésitation : la main est plus sûre d’elle-même. […] Tout le drame est exécuté d’une main ferme, virilement, sans que le cœur ait tremblé. […] Toute cette partie est irréprochable, et porte la marque d’une main sûre d’elle-même. […] Chaque explication, au lieu de réconcilier les adversaires et de leur mettre la main dans la main, ne fait que les séparer plus profondément et les éloigner davantage l’un de l’autre. […] Je veux pouvoir le mesurer de mon regard, le toucher de ma main, le nommer par son nom.

766. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Saint-Arnaud. Ses lettres publiées par sa famille, et autres lettres inédites » pp. 412-452

Courage surnaturel, mais auquel il s’était par avance essayé de longue main et presque accoutumé avant le dernier jour ! […] Si cet homme-là tenait par métier une plume entre les mains comme Charles Nodier ou Alexandre Dumas (qu’il aimait tous deux), il n’en serait pas plus embarrassé que de son épée ; mais l’épée lui va encore mieux que tout. […] » Il mérite que le colonel Combes, qui va tout à l’heure être frappé, lui serre affectueusement la main en lui disant : « Bravo, capitaine !  […] Avec les Arabes, c’est à recommencer toujours : « Cette nation-là naît un fusil à la main et un cheval entre les jambes. » Au point où il est arrivé, Saint-Arnaud sent ses vues s’agrandir, et se multiplier les occasions d’agir comme il l’entend. […] La main de Dieu brise souvent les projets des hommes.

767. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIe entretien. Balzac et ses œuvres (2e partie) » pp. 353-431

il écoutait froidement, se tenait le menton dans la main droite en appuyant son coude droit sur le revers de la main gauche, et se formait en toute affaire des opinions desquelles il ne revenait point. […] Juge de la force corporelle en sa qualité de tonnelier, il devina le parti qu’on pouvait tirer d’une créature femelle taillée en Hercule, plantée sur ses pieds comme un chêne de soixante ans sur ses racines, forte des hanches, carrée du dos, ayant des mains de charretier et une probité vigoureuse comme l’était son intacte vertu. […] En se lavant plusieurs fois les mains dans de l’eau pure qui lui durcissait et rougissait la peau, elle regarda ses beaux bras ronds, et se demanda ce que faisait son cousin pour avoir les mains si mollement blanches, les ongles si bien façonnés. […] Elles tenaient en main le portrait : « “C’est tout à fait son front et sa bouche ! […] Allons, la mère, dit-il en baisant la main de sa femme, ce n’est rien, va : nous avons fait la paix.

768. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIIe entretien. Madame de Staël. Suite. »

Un quart d’heure après, j’eus entre mes mains ce Moniteur du 21 mars (30 pluviôse), qui contenait un arrêt de mort, prononcé par la commission militaire séant à Vincennes contre le nommé Louis d’Enghien ! […] Corbigny de tenir la main à l’exécution de l’ordre que je lui ai donné, lorsque le délai que je vous accorde sera expiré. […] Ils y cédaient, elle lui résistait, et sa résistance est d’autant plus belle qu’on ne lui demandait qu’une ligne de sa main pour prix de la faveur et de la liberté. […] Ces hypocrisies de sentiment ne siéent pas au véritable génie ; le captif ne maudit pas sincèrement la main qui brise ses chaînes. […] Mais bientôt, réprimant mes larmes, j’élèverai vers le ciel mes mains suppliantes, et je me prosternerai devant la volonté de Dieu qui commande à la femme de quitter sa mère et son père pour suivre son époux.

769. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1886 » pp. 101-162

Mme Strauss était encore une fillette de quinze ans, s’apprêtant à prendre sa première leçon de piano, avec lui, quand il lui dit : « Faites votre archet, et donnez une note lilas, dans laquelle je puisse me laver les mains. » C’est encore Gounod, qui, à la représentation de Manon, terminait l’éloge d’un morceau par cette phrase abracadabrante : « … Enfin je le trouve octogone ! […] Le médecin, s’apercevant de l’obstination de son regard sur le secrétaire, apportait une feuille de papier, et une plume trempée d’encre, qu’il lui mettait dans la main, et que Baschet saisissait avidement, mais au moment où il allait écrire, la plume lui tombait des mains, la paralysie avait gagné le bras. […] Le frère de Robert me dit que, ce matin, on lui a ouvert le côté, que le chirurgien y a introduit sa main, qu’il a manié le foie de tous côtés… et qu’il n’y a rien trouvé. […] Dimanche 2 mai L’ennui des yeux, avec une bouche qui dit les phrases les plus stupidement admiratives, et avec des mains, — des mains de jolie femme, s’il vous plaît — qui ont des maladresses et des lourdeurs de patte de rustre : c’est à quoi l’on reconnaît chez les femmes de la société, la prétention de paraître aimer l’objet d’art, sans en avoir la moindre connaissance, même la moindre curiosité. […] Mon manuscrit, je vous le donne… Faites-en ce que vous voudrez. » C’est ainsi que l’exaspération du cocuage, chez un mari bonasse, mit, aux mains de Louis Blanc, ce précieux document.

770. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre neuvième. Les idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Les successeurs d’Hugo »

Car le mot, qu’on le sache, est un être vivant ; La main du songeur vibre et tremble en l’écrivant. […] Dans la grande nature ils entraient éblouis, Avec ferveur, sans choix, sans art ; leur premier songé Errait émerveillé, comme la main qui plonge Dans les trésors confus par l’avare enfouis ! […] Voilà ce que j’ai vu par-delà les années, Moi, Skulda, dont la main grave les destinées, Et ma parole est vraie ! […] Du gros cocher, ce sera toujours »  d’une main bien gantée ». […] Je poserai ma main hardie Sur les grands soleils étonnés Et j’éteindrai leur incendie Splendide en leur crachant au nez.

771. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Robert » pp. 222-249

Et puis sa main docile à la variété, à la rapidité de son imagination, vous dérobe toujours la fatigue. […] Vers les bords de ce bassin, sur le fond, femme avec une cruche à la main, une corbeille de linges mouillés sur sa tête et s’en allant vers une arcade qui s’ouvre sur la scène et l’éclaire. […] Sur celle qui précède, il n’y a personne qui n’accordât plusieurs pieds en quarré à une petite ruine grande comme la main. […] Des sauvages se précipitèrent sur la proue d’un vaisseau et furent bien surpris de ne trouver sous leurs mains qu’une surface plate, au lieu d’une gorge bien ronde et bien ferme. […] Il a tué Machy par la main de Robert.

772. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviie entretien. Un intérieur ou les pèlerines de Renève »

Nous n’étions pas assez riches pour nous les donner, mais de temps en temps il nous en tombait quelques volumes dans les mains, et c’est alors qu’un voyageur, passant par Renève, auprès de Mirebeau, dans la Côte-d’Or, voyant notre enthousiasme, nous en laissa un volume intitulé : les Confidences, où nous lûmes toutes sortes de détails sur votre famille, et votre histoire si touchante de Graziella que ces demoiselles savent par cœur. […] Aglaé tenait la bourse, Mathilde portait son volume des Confidences, et chacune de nous portait son petit paquet à la main, dans un foulard. » J’étais pénétré d’étonnement et de sensibilité : cela était dit si naturellement et si simplement qu’on n’y sentait pas l’ombre d’intention. […] La charité même, on ne la voyait jamais sans quelque chose à la main pour ses vignerons ou pour les malades, ou pour les pauvres. […] Nous sommes trois sœurs sous l’inspection du vénérable curé qui nous acquittons de ces devoirs, et quelle que soit la distance, une d’entre nous va toujours au sommet des montagnes porter la main de Dieu aux maladies humaines. […] Elles reprirent leur foulard dans la main, nous les accompagnâmes par l’avenue jusqu’à la grande route de Mâcon.

773. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre premier »

Une estampe y représentait Homère conduit par Mercure, et mettant sa lyre aux mains de Lamotte. […] « Il y a quelques jours, disait le sculpteur Bouchardon, qu’il m’est tombé entre les mains un vieux livre français que je ne connaissais point : cela s’appelle l’Iliade d’Homère. […] Il est vrai qu’il n’a pas en vue ceux de Théocrite, trop grossiers selon lui et sentant le fumier ; ses bergers sont habillés de neuf, et ont passé par les mains du costumier de l’Opéra. […] Je fais cas de l’une et l’autre main. […] Ce n’est pas de la tempête qu’il a peur, c’est de la main qui la déchaîne.

774. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DÉSAUGIERS. » pp. 39-77

C’est elle qui, me tendant une main secourable sous un autre hémisphère, adoucit pour moi les périls et les horreurs d’une guerre dont l’histoire n’of Frira jamais d’exemple ; c’est elle qui me consola dans les fers où me retenait la férocité d’une caste sauvage ; c’est elle enfin qui ; m’environnant de tous les prestiges de l’illusion, me fit envisager d’un œil calme le moment où, pris les armes à la main par ces cannibales, condamné par un conseil de guerre, agenouillé devant mes juges, les yeux couverts d’un bandeau qui semblait me présager la nuit où j’allais descendre, j’attendais le coup fatal… auquel j’échappai par miracle, ou plutôt par la protection d’un Dieu qui n’a cessé de veiller sur moi pendant le cours de cette horrible guerre. […] J’allais périr,… quand la Gaieté, mon inséparable compagne, soulevant d’une main le voile de l’avenir, me montra de l’autre le beau ciel de ma patrie, où le bonheur semblait m’appeler. » Et voilà sa barque remise à flot, aventureuse et légère ; le voilà plus en humeur, plus en veine que jamais, se croyant quitte une bonne fois avec le malheur, et n’invoquant pour tous patrons à l’avenir que Momus (comme on disait alors) et que Thalie : Naturam expellas furca, tamen usque recurret. […] Des personnages que nous avons connus très-graves et même moroses (Eusèbe Salverte, par exemple) avaient débuté, grelots en main, sous ce masque de gaieté. […] Il a, du premier jour et sans y songer, effacé le pâle Laujon, redonné la main aux maîtres gaulois de vieille race, et n’a pas été détrôné à cet endroit, même par Béranger. […] Il est tombé aux mains des élégiaques, mais non pas tout à fait des profanes, et nous avons fait de notre mieux pour l’honorer à notre manière, pour arroser de lait et de miel, et même d’un peu de vin, son tombeau.

775. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre II. Principale cause de la misère : l’impôt. »

« Un jour, j’ouvris sa porte, qui n’avait qu’un loquet ; la chambre n’offrait que la muraille et un étau ; cet homme, en sortant de dessous sa cheminée, à moitié malade, me dit : « Je croyais que c’était garnison pour la capitation ». » — Ainsi, quelle que soit la condition du taillable, si dégarni et si dénué qu’il puisse être, la main crochue du fisc est sur son dos. […] En tout pays, le fisc a deux mains, l’une apparente, qui directement fouille dans le coffre des contribuables, l’autre qui se dissimule et emploie la main d’un intermédiaire, pour ne pas se donner l’odieux d’une nouvelle extorsion. […] Bien mieux, en vertu de l’ordonnance de 1680, chaque personne au-dessus de sept ans est tenue d’en acheter sept livres par an ; à quatre personnes par famille, cela fait chaque année plus de dix-huit francs, dix-neuf journées de travail : nouvel impôt direct, qui, comme la taille, met la main du fisc dans la poche des contribuables et les oblige, comme la taille, à se tourmenter mutuellement. […] Entre ces mains ignorantes et partiales, ce n’est pas l’équité qui tient la balance, c’est l’intérêt privé, la haine locale, le désir de vengeance, le besoin de ménager un ami, un parent, un voisin, un protecteur, un patron, un homme puissant, un homme dangereux. […] « Fasse le ciel, dit un village de Normandie726, que le monarque prenne entre ses mains la défense du misérable citoyen lapidé et tyrannisé par les commis, les seigneurs, la justice et le clergé. » — « Sire, écrit un village de Champagne727, tout ce qu’on nous envoyait de votre part c’était toujours pour avoir de l’argent.

776. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (3e partie) » pp. 161-219

Le 19 mai 1814, le Pape rappelait Consalvi au ministère par le décret suivant daté de Foligno, écrit de sa propre main et qui respire l’amitié autant que l’estime : « Ayant dû céder aux impérieuses circonstances dans lesquelles nous nous trouvions, et mû par le seul espoir d’amoindrir les maux qui nous menaçaient, nous avions été obligé de subir la volonté du gouvernement français déchu, qui ne voulait pas souffrir, dans la charge de notre secrétaire d’État, le cardinal Hercule Consalvi. […] Me prévalant donc du privilège que je possède, en qualité de cardinal de la sainte Église romaine, de pouvoir tester sur simple feuille, profitant aussi de l’indult que Sa Sainteté le pape Pie VII m’a communiqué par bref, maintenant que je suis sain d’esprit et de corps, je fais mon dernier testament (à moins que je ne me décide à le changer en un autre postérieur, dans le courant de la vie qu’il plaira encore à Dieu de m’accorder), avec l’expresse déclaration que toutes les autres feuilles de même date ou de date postérieure au testament, écrites de ma main et signées par moi, et contenant une disposition quelconque à exécuter après ma mort, font partie intégrante de mon testament. […] « J’entends, je veux, je déclare que, tant que vivra un seul de mes serviteurs gratifiés par mon testament, ou de ceux qui ont reçu un legs annuel à vie, la Sacrée Congrégation ci-dessus nommée ne puisse jouir (excepté de ce qui sera indiqué plus bas) de mon héritage, ni en prendre en aucune manière l’administration, voulant que cette administration soit laissée entière et libre aux mains de mon héritier fiduciaire, Mgr Alexandre Buttaoni (ainsi qu’aux mains de celui ou de ceux qui lui succéderont dans son administration). […] On peut même entrevoir, d’après un passage de ses mémoires relatifs à son affection intime pour les familles Patrizzi et Giustiniani, dans sa jeunesse, que la mort prématurée d’une jeune princesse de dix-huit ans, à la main de laquelle il aurait pu peut-être prétendre, et dont l’amitié lui laissa d’éternels regrets, fut un coup déchirant porté à son cœur. […] Il était impossible de le voir sans attrait ; le son de sa voix avait toute la délicatesse de son âme ; il n’y avait jamais eu ni un geste faux dans sa main féminine, ni un ton affecté dans sa voix.

777. (1841) Matinées littéraires pp. 3-32

Quels amis valent ces livres qui sont là toujours prêts à répondre à notre appel, et qui ne nous abandonnent ni dans le malheur, ni dans la prospérité Nous n’avons qu’à tendre la main, et aussitôt Homère, Virgile, Horace, Corneille, Molière, Racine, nous enivrent tour à tour des parfums de leur poésie. […] Nous chercherons, son flambeau à la main, à distinguer ce qui est digne de blâme ou d’admiration parmi les travaux de l’esprit humain. […] Chacun ici-bas a sa route tracée de la main de Dieu. […] Ils ont leur mission providentielle ; ils sont autant de fanaux que la main de Dieu place çà et là parmi les hommes pour les éclairer. […] Aussitôt qu’un geste de sa main avait réclamé le silence, le silence se faisait comme par enchantement, non ce silence de théâtre, entremêlé de chuchotements et de ces mille petits bruits qui se perdent dans l’étendue d’une salle de spectacle, mais ce silence qu’on ne trouve guère que parmi les figures de cire de Curtius.

778. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VII. Repos »

Je ne puis résister au plaisir égoïste de briser quelques thyrses et de les porter dépaysés et tristes, effeuillés et qui se fanent, en mes mains sacrilèges : Ces gens avaient perdu, l’une après l’autre, leurs espérances et, « comme dans une cathédrale, quand on a éteint tous les cierges, la nuit noyait leur pensée ». — Entendez, résonnement fait de souvenir, la voix tue du rossignol : « Les dernières notes de son chant étaient tombées, rebondissantes en écho, comme des perles jetées de très haut dans un bassin de fabuleux cristal. » — Un être lucide jusqu’ici devient fou. […] Il lui voit, parmi d’autres noblesses étranges, des « mains de séraphin, toujours levées en haut comme des colombes enchaînées mais qui aspirent à l’azur ». […] Ses mains étaient dures comme un métal et éloquemment ciselées par le travail. […] ……………………………………………… Ils étaient ignorants de la Vie et des livres, Ceux-là qui cheminaient, solitaires et doux, Avec, dans leur main pâle, un fier rameau de houx. […] Elle sentait bien, la pauvrette, que, malgré la main de pitié vague qui caressait sa main peureuse, le poète n’était plus là.

779. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres de Virgile »

S’il en mène Pune abonne fin, il laissera l’autre à moitié boiteuse ; pour moi, je vais à sa rencontre, dussent ses mains cire comme la flamme, — oui, dussent ses mains cire comme la flamme, et dût sa force égaler l’acier. »52 isolez ici la répétition et la reprise : dussent ses mains être comme la flamme, qui est à la fin d’un vers et au commencement du vers suivant. — Et c’est alors qu’Apollon s’approchant d’Hector et lui conseillant au contraire d’éviter Achille, Hector se replonge au milieu des guerriers, un peu effrayé de l’avis mystérieux qui a résonné à son oreille. […] Ce je ne sais quoi de mélancolique que le poète veut imprimer à la physionomie de son guerrier, il le grave et le condense dans cette répétition du domus alia qui fait la note fondamentale, et il prend l’idée de cette particularité rythmique, de cette répétition à effet, non dans le passage même d’Homère sur le guerrier mort, mais dix-huit vers plus haut, à l’endroit où Hector, se faisant fort de braver Achille, répétait coup sur coup à la fin et au commencement du vers les mêmes mots : « Dussent ses mains être comme la flamme… » Évidemment le voisinage des deux passages saillants lui a donné l’idée de les unir, de les combiner. […] Est-ce donc que nous ne saurions plus en France la valeur des termes, et que les à peu près suffisent désormais à ceux qui devraient tenir d’une main légère la balance des esprits ? […] Pitt, abandonné par Temple, céda, mais à son très grand regret, et c’est alors qu’il dit à lord Temple en levant la main et d’un ton mélancoliquement solennel : Extincli te meque, soror, populumque patresque Sidouios urbemque tuam………….

780. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre I »

Aux environs de Toul, le cultivateur, après avoir payé l’impôt, la dîme et les redevances, reste les mains vides. « L’agriculture est un état d’angoisses et de privations continuelles où des milliers d’hommes sont obligés de végéter péniblement629. […] En guenilles, pieds nus, ne mangeant que du pain noir, mais couvant dans son cœur le petit trésor sur lequel il fondait tant d’espérances, il guettait l’occasion, et l’occasion ne manquait pas. « Malgré tous ses privilèges, écrit un gentilhomme en 1755651, la noblesse se ruine et s’anéantit tous les jours, le Tiers-état s’empare des fortunes. » Nombre de domaines passent ainsi, par vente forcée ou volontaire, entre les mains des financiers, des gens de plume, des négociants, des gros bourgeois. […] Pour les remettre en valeur, il faut en céder la propriété ; nul autre moyen de rattacher l’homme à la terre  Et le gouvernement aide à l’opération : ne percevant plus rien sur le sol abandonné, il consent à retirer provisoirement sa main trop pesante. […] Vers 1760, un quart du sol dit-on, avait déjà passé aux mains des travailleurs agricoles. […] En vain il a travaillé avec une âpreté nouvelle, ses mains restent aussi vides, et, au bout de l’année, il découvre que son champ n’a rien produit pour lui.

781. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’expression de l’amour chez les poètes symbolistes » pp. 57-90

Donne-moi la main. […] Ses disciples pullulent et se jettent sur le vieux monde, les armes à la main. […] Elle m’élude, ne laissant que le corps entre mes mains. — Confus et lassé, je retombe — comment pourrait le corps toucher la fleur que l’âme seule peut toucher14 ?  […] Pourtant, René Ghil sait que l’homme n’a pas reçu sa loi des mains du créateur. […] Les poètes symbolistes, pour n’avoir pas su tresser d’une main tranquille et décidée, l’apothéose du Neutre, peuvent donc supporter d’un cœur léger la réprobation de M. 

782. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Chateaubriand homme d’État et politique. » pp. 539-564

Il entra dans cette carrière nouvelle l’épée à la main comme un vainqueur forcené, et du premier jour il embrassa la Restauration, de toute sa haine contre le régime qui tombait. […] Par exemple, dans ses Mémoires, il a l’air de dire qu’il ne comptait pas en 1814 sur l’étranger ; qu’il espérait toujours en un mouvement national qui eût dispensé les Alliés d’entrer à Paris et qui eût délivré les Français par leurs propres mains. […] L’homme politique, l’homme d’État supérieur est patient : il ne met pas du premier jour le marché à la main à la fortune : il attend, il se plie, il sait être le second et même le troisième avant d’arriver à être le premier. […] Tant que Louis XVIII vivrait, il était douteux pourtant qu’il réussît, lui et les siens, à envahir le pouvoir, lorsque l’assassinat du duc de Berry vint lui mettre en main à l’improviste un argument dont il s’arma sans pitié. […] Elle se fût brisée sans lui très probablement, mais plus que personne il peut se vanter d’y avoir mis la main.

783. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — I. (Dialogues inédits.) » pp. 1-28

Lucas-Montigny, a publié huit volumes de mémoires qu’il a eu le droit d’intituler Mémoires de Mirabeau, tant les sources en sont de première main, continuellement authentiques et domestiques. […] Il avait une main des plus belles. […] Mais ce portrait, que je n’ai pas craint de confier à des mains si perfides, peut me perdre et me perdra. […] Ici Mirabeau se lève et l’interrompt : Madame, je ne puis plus respirer… vos alarmes sont trop vives… M. de Monnier ne saura rien : votre portrait, vos lettres vous seront rendus ; elles ne resteront point dans des mains infâmes qui les souillent. […] Je vais en Suisse, madame : il faut que j’y finisse une affaire qui me lie les mains.

784. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « André Chénier, homme politique. » pp. 144-169

Il tâche d’élever les âmes, de les animer au bien par la grandeur des circonstances : « La France n’est point dans ce moment chargée de ses seuls intérêts ; la cause de l’Europe entière est déposée dans ses mains… On peut dire que la race humaine est maintenant occupée à faire sur nos têtes une grande expérience. » À côté de l’honneur insigne de la réussite, il déroule les suites incalculables d’un revers. […] Ce qui l’anime et le dirige, ce n’est pas la pensée d’un politique supérieur, ambitieux et généreux, qui veut arriver au pouvoir et l’arracher des mains d’indignes adversaires. […] (André Chénier) fut un des cinq ou six que ni la frénésie générale, ni l’avidité, ni la crainte, ne purent engager à ployer le genou devant des assassins couronnés, à toucher des mains souillées de meurtres, et à s’asseoir à la table où l’on boit le sang des hommes. […] J’ai depuis longtemps entre les mains (et je me reproche de n’en avoir pas fait usage jusqu’ici) une pièce singulière et hideuse dont je dois communication à l’amitié de M.  […] Voilà en quelles mains ce charmant génie (comme toute la France) était tombé, voilà à quels hommes il eut affaire.

785. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — II. (Suite.) » pp. 434-453

Assistant à la conception des plans les plus étendus et les mieux enchaînés, les écrivant le premier de sa main au moment où ils se produisaient au jour, les recueillant dans l’impétuosité du premier jet, devant à l’instant les embrasser avec développement et les saisir, s’associer en tout à la pensée qui les avait conçus et pourvoir sur les moindres points à l’exécution, M.  […] Nul mieux que lui, en effet, n’a compris, en mettant la main aux grandes choses, la réserve imposée aux témoins contemporains et la dignité de l’histoire. […] Daru prescrivait aux intendants sous ses ordres d’envoyer au Jardin des plantes de Paris les catalogues du Jardin de Berlin et des plantes de la Poméranie, avec des échantillons de graines ; il en adressait aussi qui lui avaient été demandés pour le parc de la Malmaison, et, dans une lettre à l’impératrice Joséphine, il terminait cet envoi par des vers gracieux :         L’humble ruisseau de Malmaison Roulait paisiblement ses ondes fortunées, Lorsque de belles mains, au sceptre destinées, Prirent soin d’embellir son modeste vallon, etc. […] Daru écrivait à Picard sur sa comédie et dans lesquelles il lui faisait les vraies objections dont l’auteur, malgré son effort, n’a pu triompher, ont à mes yeux une valeur morale et plus que littéraire, si l’on songe qu’elles sont du même homme qui, vers le même temps, disait dans une lettre de Berlin adressée à Mme Daru : « Je t’écris d’une main fatiguée de vingt-sept heures de travail. » On le comprend, c’est moins le détail des conseils et ce qu’ils pouvaient avoir de plus ou moins motivé, que le sentiment même qui les inspire, cet amour et ce culte des lettres, tendre, délicat, fidèle, élevé, que je me plais à observer et à poursuivre en M.  […] Sages paroles, et qui peuvent se lire dans le même moment qu’on a entre les mains les Épîtres d’Horace.

786. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Les quatre moments religieux au XIXe siècle, (suite et fin.) »

Ce fut un beau moment dont rien ne saurait effacer l’éclat dans cette première splendeur de l’inauguration du siècle : « Ils ne sont pas encore assez loin pour être oubliés, s’écriait en 1818 un des témoins émus, ces jours alors si nouveaux et si sereins, si inattendus et si consolants, dans lesquels, après tant d’années d’interruption et d’outrages, on vit le culte catholique ramené en pompe dans le même temple où il avait reçu les plus graves insultes, — ramené par la main d’un jeune guerrier qui semblait jusque-là aussi étranger aux choses religieuses qu’il était familiarisé avec la victoire. […] On s’était aperçu que l’Église faisait partie du rempart, et chacun alors s’empressait de mettre la main au rempart pour le réparer et le fortifier. […] La concurrence parut surtout inégale, lorsque l’instruction publique officielle, aux mains d’un des hommes les plus habiles du parti93, reçut la même impulsion religieuse. […] D’une part, je vois chaque année des milliers de jeunes gens qui sortent d’entre des mains ecclésiastiques, élevés avec soin et pourvus d’instruction sans doute, munis d’instruments précieux pour leur carrière, mais dénués aussi, je le crains, du sentiment fondamental de patrie et de nationalité, étrangers à toutes les notions et traditions qui faisaient depuis 89 ou même auparavant la force et la vigueur de nos pères, habitués par leurs maîtres à l’indifférence pour tout régime qui n’est pas le leur et dans leur sens ; car ce parti a une maxime commode, invariable : il adopte tout ce qui le sert et tant qu’on le sert, pas au-delà. […] Puissent ces études littéraires se rasseoir solidement et se fortifier, sous une impulsion tutélaire, et aussi (autre vœu non moins essentiel et nullement contradictoire) les études scientifiques, cette clef de la nature, gagner chaque jour, se répandre en plus de mains et se propager !

787. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

— « Voyons, Talleyrand, la main sur la conscience, combien avez-vous gagné avec moi ?  […] Le ministre des États-Unis à Paris, Gouverneur Morris, témoin aussi impartial que bien informé, et qui est fort à consulter sur l’évêque d’Autun en 89, nous a montré ces trois jeunes gens, Narbonne, Choiseul et l’abbé de Périgord, formant une sorte de triumvirat à la mode, et se donnant la main pour arriver : « Ce sont trois jeunes gens de famille, hommes d’esprit et de plaisir. […] Une somme de quatre millions de florins, offerte à Varsovie par les magnats pour obtenir son suffrage en faveur du rétablissement de leur pays, leur fut restituée après être restée déposée pendant plusieurs jours entre les mains du baron de Dalberg. […] Il eut même un retour marqué de faveur lors du voyage d’Erfurt, où il fut appelé et très employé sous main par Napoléon auprès de l’empereur Alexandre (septembre-octobre 1808). […] Ainsi l’abbé de Pradt était un ennemi de Napoléon, et, certes, piqué au jeu autant que M. de Talleyrand ; il était actif, délié, infiniment spirituel en conversation ; et, la plume à la main, un écrivain de verve et pittoresque ; mais que dire de lui plus à sa charge que ce qu’on va lire, et qui le classe de son aveu à je ne sais combien de crans au-dessous de M. de Talleyrand ?

788. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre II. Les privilèges. »

La souveraineté l’avait faite ; séparée de la souveraineté, elle est restée aux mains jadis souveraines. […] Des traités, des précédents, une coutume immémoriale, le souvenir du droit antique retiennent encore la main du fisc. […] Bien mieux, il suffit qu’il exploite lui-même ou par un régisseur, pour que son indépendance originelle se communique à sa terre ; dès qu’il touche le sol, par lui-même ou par son commis, il en abrite quatre charrues, trois cents arpents, qui, dans les mains d’un autre, payeraient deux mille francs d’impôt, et en outre « les bois, les prairies, les vignes, les étangs, les terres encloses qui tiennent au château, de quelque étendue qu’elles soient ». […] Rien d’étonnant, si, rapprochés de la condition souveraine, ils ont, comme les souverains, un conseil, un chancelier, une dette constituée, une cour39, un cérémonial domestique, et si l’édifice féodal revêt entre leurs mains le décor luxueux et compassé qu’il a pris aux mains du roi.

789. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IV. Des figures : métaphores, métonymies, périphrases »

On devra seulement remarquer qu’il ne faut, quand on les emploie, ni les modifier ni les développer : il y faut du moins beaucoup de précaution et une grande légèreté de main. […] Hugo, montrant l’armée de Sennachérib miraculeusement anéantie, écrit : Mais le ciel eut pitié de vingt peuples tremblants, Dieu souffla sur cet astre aux crins étincelants, Et soudain s’éteignit l’effrayante merveille, Comme une lampe aux mains d’une veuve qui veille. […] Quand l’enfant de cet homme Eut reçu pour hochet la couronne de Rome ; Lorsqu’on l’eut revêtu d’un nom qui retentit ; Lorsqu’on eut bien montré son front royal qui tremble Au peuple émerveillé qu’on puisse tout ensemble           Être si grand et si petit ; Quand son père eut pour lui gagné bien des batailles, Lorsqu’il eut épaissi de vivantes murailles Autour du nouveau-né riant sur son chevet ; Quand ce grand ouvrier, qui savait comme on fonde, Eut, à coups de cognée, à peu près fait le monde           Selon le songe qu’il rêvait ; Quand tout fut préparé par les mains paternelles Pour doter l’humble enfant des splendeurs éternelles ; Lorsqu’on eut de sa vie assuré les relais ; Quand, pour loger un jour ce maître héréditaire, On eût enraciné bien avant dans la terre           Les pieds de marbre des palais ; Lorsqu’on eut pour sa soif posé devant la France Un vase tout rempli du vin de l’espérance ; Avant qu’il eût goûté de ce poison doré, Avant que de sa lèvre il eût touché la coupe, Un cosaque survint qui prit l’enfant en croupe,           Et l’emporta tout effaré. […] Tout nous appelle à la mort ; la nature, comme si elle était presque envieuse du bien qu’elle nous a fait, nous déclare souvent et nous fait signifier qu’elle ne peut pas nous laisser longtemps ce peu de matière qu’elle nous prête, qui ne doit pas demeurer dans les mêmes mains, et qui doit être éternellement dans le commerce ; elle en a besoin pour d’autres formes, elle la redemande pour d’autres ouvrages. […] Et de même dans la fameuse période par où Bossuet commence l’oraison funèbre de la reine d’Angleterre, la périphrase par laquelle il désigne Dieu rend tout croyable de sa puissance, et dispose à voir sa main dans les malheurs des rois.

790. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IV. Précieuses et pédantes »

Ses pages sont des tapisseries hâtives où l’on sent, non coordonné, le travail de mille mains fortuites. […] Et, sous les intempéries, parmi le sifflement des vipères et le coassement des crapauds qui semblent naître de ses mains de lucre, voici que l’enchevêtrement des fleurs tout à l’heure odorantes et des herbes de plus en plus puantes n’est qu’un tas grouillant de fumier. […] Tout est bon à cet entasseur, qui se croit un constructeur ; et la guerre de 1870 devient, entre ses mains, une « utilité ». […] [Albert Boissière] La main, lourde, gauche, ne déplairait pas en plein air, au rythme des besognes rurales ; elle amuserait quand, à la veillée, son geste franc et qui s’ignore accompagnerait quelques massives plaisanteries ballotées aux vagues du rire. […] J’en sais un qui tient à la main « l’inexpérience d’un petit instrument ».

791. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Frédéric le Grand littérateur. » pp. 185-205

Cette nation qu’avait ébauchée avant lui le Grand Électeur, il acheva de la former, de lui donner un corps, de lui imprimer l’unité d’esprit : la Prusse n’exista réellement qu’au sortir de ses mains. […] Il dira par exemple sans difficulté : Les myrtes, les lauriers, soignés dans ces cantons, Attendent que, cueillis par les mains d’Émilie… ou bien encore : Que vous dirai-je, ô tendre Ovide ? […] Quand on a lu certain portrait de Voltaire par Frédéric (1756), portrait tracé de main de maître en toute sûreté de coup d’œil et en toute nudité, on entre mieux encore dans le sens de cette phrase où il vient de dire que ce génie de séduction a de telles grâces, qu’il ressaisit bientôt ceux-là même qu’il a offensés et qui le connaissent23. […] Les plus spirituels de ces plats courtisans et de ces faux amis, tels que l’abbé Bastiani, se vengeaient sous main du roi en le dénigrant auprès des étrangers. […] [NdA] Il paraît prouvé aujourd’hui que ce remarquable portrait de Voltaire, trouvé dans les papiers de Frédéric, n’est pas de lui : il se borna, en le copiant de sa main, à en ratifier la justesse.

792. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — I. » pp. 322-340

Il les aura sans doute retirées des mains de ceux à qui il les avait écrites pour en faire ainsi collection, ou bien il les a refaites et corrigées à loisir, d’après ses propres brouillons conservés. […] Vénus de la villa Borghèse a été blessée à la main par quelque descendant de Diomède, et l’Hermaphrodite (immane nefas ! […] Ce qu’il y a de piquant en ces années, ce sont ses lettres avec tout le sel qu’il y a sous main répandu depuis. […] Le fameux pâté se voit encore et se montre à Florence avec une attestation de la main de Courier, qui déclare l’avoir fait par étourderie. […] [NdA] Le Déiphobe, fils de Priam, qu’Énée retrouve aux enfers tout mutilé du sac de Troie, sans mains, sans oreilles, sans nez (et truncas inhonesto vulnere nares).

793. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1880 » pp. 100-128

Il ne dit qu’une chose juste : c’est que l’illustration n’est amusante pour un artiste, qu’avec les génies du passé, qui écrivent : « Il entra dans un bois sombre, où il arriva devant un palais, dont les murs semblaient de diamant. » * * * — Quelle diablesse de lettre peut écrire au restaurant, une femme honnête flanquée de son mari, — et une lettre de huit pages, tracée d’une main gantée, avec sa voilette sur les yeux. […] Aujourd’hui, je suivais d’un œil charmé, les mouvements de chatte paresseuse, avec lesquels Mme *** pêchait, au fond d’une vitrine, ses porcelaines et ses laques, pour me les mettre dans la main. […] » Ce matin, Pouchet m’entraîne dans une allée écartée, et me dit : « Il n’est pas mort d’un coup de sang, il est mort d’une attaque d’épilepsie… Dans sa jeunesse, oui, vous le savez, il avait eu des attaques… Le voyage d’Orient l’avait, pour ainsi dire, guéri… Il a été seize ans, sans plus en avoir… mais les ennuis des affaires de sa nièce, lui en ont redonné… et samedi, il est mort d’une attaque d’épilepsie congestive… oui avec tous les symptômes, avec de l’écume à la bouche… Tenez, sa nièce désirait qu’on moulât sa main… on ne l’a pas pu… elle avait gardé une si terrible contracture… Peut-être, si j’avais été là, en le faisant respirer une demi-heure, j’aurais pu le sauver… » Ça été tout de même une sacrée impression d’entrer dans le cabinet du mort… son mouchoir sur la table, à côté de ses papiers, sa pipette avec sa cendre sur la cheminée, le volume de Corneille, dont il avait lu des passages la veille, mal repoussé sur les rayons de la bibliothèque. […] C’est exaspérant dans ces enterrements, la présence de tout ce monde du reportage, avec ses petits papiers dans le creux de la main, où il jette des noms de gens et de localités, qu’il entend de travers. […] En me mettant l’album dans les mains, elle m’a dit gentiment : « Tenez, je me porte très bien, je vous ferai attendre trop longtemps… Je ne sais quelle idée m’avait pris de les vendre cet hiver, comme ça je ne pourrai plus. » Jeudi 24 juin Je dîne aujourd’hui chez Francis Magnard, établi dans 2 500 mètres de terre, à Passy.

794. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VI. Daniel Stern »

Au moins, quand un homme cesse d’être un homme, on sait ce qu’il devient, et, parfois encore, c’est Narsès, Abeilard, Origène ; mais quand une femme cesse d’être femme et que dans l’impiété d’un travail terrible et la folie d’une ambition, elle porte sur elle-même des mains suicides, ce qu’elle devient n’a plus de nom que celui qu’elle se donne, et voilà pourquoi, hors la mascarade, ce n’est pas vraiment plus madame Daniel Stern qu’il faut dire aujourd’hui que monsieur ! […] mais patricien au fond, et patricien involontaire, — elle était faite pour mieux que pour vouloir être l’entremetteuse politique d’un sexe qui sait bien, d’ailleurs, faire ses affaires tout seul. — Pendant le bon temps, quand elles sont jeunes, les émancipées le sont de fait et n’en demandent pas plus ; et lorsque la vieillesse et la laideur fondent sur elles, c’est en vain qu’elles mendient le suffrage des portefaix et des prolétaires, à la porte des mairies, une sébile électorale à la main ! […] Elles sont des hommes par la pensée » ; mais le temps, qui est un galant homme aussi, et plus homme qu’elles, les a prises sous son bras et, comme on fait à l’enfant qu’on va fouetter, il leur a, d’une main patiente et douce, mais irrésistible, ôté simplement leurs culottes. […] Les femmes ont la tête et la main trop petites pour cela. […] … Les femmes seules ne peuvent y atteindre que par le petit bout, — le bout des Mémoires, des commérages, des anecdotes, des choses, personnelles, charmantes souvent sous leurs plumes ; mais pour l’histoire en elle-même, la grande Histoire, interdite même aux poëtes, aux imaginations de trop de flamme, aux génies inventifs, tant elle exige un regard calme et clair pour discerner les choses, et une main juste et ferme pour n’en pas manquer les proportions !

795. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « J. de Maistre » pp. 81-108

ce sont les mains pieuses du petit-fils de l’Auteur du Pape qui ont écarté ces pierres-là. […] et qui déchira les entrailles de l’Europe après se les être déchirées à elle-même de ses propres mains, ni les conséquences de ce Protestantisme pulvérisateur qu’il détestait, et qui fait lever maintenant des atomes de poussière là où il y avait autrefois du ciment, n’arrachèrent à Joseph de Maistre, tout le temps qu’il vécut, sa foi profonde en une unité supérieure, qui, tôt ou tard, devait se reconstituer. […] Les dissertations qui forment l’ensemble de ce volume n’ont pas, il est vrai, le même mérite et la même importance, mais toutes ont l’empreinte de la robuste main qui a équarri et taillé leurs quelques blocs. […] Seulement, la couronne que ces Bélisaires de rembarras tiennent à la main n’est pas faite pour retenir le don du génie. […] Nous voulons seulement prouver que le comte de Maistre n’est pas plus un utopiste en arrière qu’il n’est un utopiste en avant et que sa rigueur politique, dont on a tant parlé et dont tant de gens parlent encore, n’est pas plus inflexible que celle de Dieu et de l’Histoire, des mains desquels il prend pieusement tous les faits, sans leur demander rien de plus que ce que l’ordre de la Providence et la conduite de l’homme y ont mis ou en ont ôté.

796. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Brizeux. Œuvres Complètes »

Il vint à Paris, Paris lui passa la main sur la tête, lissa les derniers grains de son granit et lui donna le poli qu’il aime. […] Désormais, au lieu de ces poëmes flottants, rattachés les uns aux autres sous l’agrafe d’un même nom et d’une même pensée, paysages bretons, peints à la sépia, un peu tremblés par la main du peintre, mais qui nous pénètrent pourtant de leur touchante couleur brune, Brizeux publiera des vers ouvragés et creux, sous des titres tout à la fois ambitieux et vulgaires. […] Brizeux avait enlevé celle de ce poème, avec une grande légèreté de main, au monde du sentiment et au monde de la sensation, mais ni l’un ni l’autre de ces deux mondes n’y avaient été exprimés de manière à porter dans les esprits, où il éveille d’immortels échos, ce violent coup de l’originalité qui est comme la détonation du génie ! […] Brizeux avait la main trop rêveuse et trop caressante pour bien manier ce dard de la pensée. […] Rappelez-vous les marais salins du Croisic évoqués par Balzac dans un de ses romans, et la terrible histoire de Cambremer ; puis à côté de cette image naïve du Bon Jésus qui va sur l’eau, mettez encore Jésus-Christ en Flandre et demandez-vous si cette toute-puissante main-là, qui n’écrit cependant qu’en prose, ne casse pas toutes les amusettes du petit pâtre, dans Brizeux !

797. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — II. (Suite.) » pp. 147-161

Tandis que le propre de l’homme poétique et du poursuivant de l’idéal est à tout moment de mettre le marché à la main aux choses, et de dire : Tout ou rien ! […] On voit dans les Mémoires de Sully comment ce traité de la Ligue avec l’Espagne, écrit de la main du président et contenant les conditions arrêtées, fut un jour pris sur des coureurs du côté du village de Marolles et tomba aux mains de Sully, qui en fit fête à Henri IV. […] Le docteur Boucher, curé de Saint-Benoît, et deux autres députés de sa couleur arrivèrent auprès du duc de Mayenne à Rethel, porteurs de cahiers et de demandes au nom de la faction ; ils accusaient sous main le duc de Mayenne de leur avoir retiré leurs moyens d’action et de pouvoir, « et publiquement ils blâmaient ceux qui l’assistaient, au nombre desquels je n’étais épargné, dit Villeroi, ni ledit sieur président Jeannin, qui eut de grandes paroles avec eux » En s’en prenant à Villeroi et à Jeannin, ils s’attaquaient, en effet, aux deux meilleures têtes du conseil de Mayenne, et, dans la personne de Jeannin, à la plus brave et à la plus courageuse.

798. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’impératrice Catherine II. Écrits par elle-même, (suite.) »

Ce malheureux homme, au milieu de ses extravagances, avait un vague instinct et un pressentiment de la destinée funeste qu’il se tramait de ses propres mains : il répétait souvent, parlant à la grande-duchesse elle-même, quand elle essayait encore de le ramener à l’idée du rôle qu’il aurait à remplir, « qu’il sentait qu’il n’était pas né pour la Russie, que ni lui ne convenait aux Russes, ni les Russes à lui, et qu’il était persuadé qu’il périrait en Russie. » Les Anciens avaient personnifié l’imprudence et l’aveuglement des hommes sous la figure d’une déesse aussi terrible que Némésis, aussi inévitable que la Destinée elle-même : Atè, c’était son nom. […] Quand il nous vit, il voulut nous esquiver, mais nous lui donnâmes tant de coups avec nos verges et nos orties qu’il en eut les mains, les jambes et le visage enflés pendant deux ou trois jours, de telle façon qu’il ne put pas aller le lendemain à Péterhof avec nous au jour de Cour, mais fut obligé de rester dans sa chambre. […] La disgrâce de Bestoucheff, avec qui elle se trouvait, à quelque degré en liaison et en intelligence, fit redoubler autour d’elle les précautions, les entraves, et la porta un moment à un parti qui semblait désespéré : c’était de demander tout net à l’Impératrice son renvoi de Russie et de mettre en quelque sorte le marché à la main à ceux qui la persécutaient. […] Tout ce qu’on vous dira à la place de ceci ne sera que des propos de pruderie non calqués sur le cœur humain, et personne ne tient son cœur dans sa main, et ne le resserre ou le relâche à poing fermé ou ouvert à volonté. » On ne peut mieux indiquer, par cette digression même presque involontaire et où la femme revient et se trahit, que, tout en cédant volontiers de son côté à la tentation et à l’attrait, elle se prévalait aussi à son tour de cet attrait et de cet ascendant aimable, de sa séduction irrésistible et de sa certitude de plaire, pour se faire, à la Cour et dans tous les rangs, nombre d’amis dévoués, inféodés, résolue à tout pour la servir, et qui, le jour et le moment venus, la firent ce que de tout temps elle avait rêvé d’être, afin de pouvoir ensuite donner sa mesure au monde et marquer son rang dans l’histoire.

799. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gautier, Théophile (1811-1872) »

Emmanuel Des Essarts Qu’on proclame l’Aède éternisé parmi Les maîtres du grand Art radieux et prospère, J’adorerai Celui dont il fut dit : « le Père » Et dont nous disions, fils respectueux : « l’Ami », Mâle raison, courage ardemment affermi, Qui, de rares vertus immuable exemplaire, Vint embrasser Paris dans la chance contraire, Et ne sut ni vouloir ni souffrir à demi ; Être indulgent et bon, soulevant les poètes, Tel qu’on voit Apollon sur un socle romain Tenir un petit dieu d’ivoire dans sa main, Et qui, plein de pudeur en ses fiertés muettes, Voilait discrètement, hormis pour notre chœur, Le plus beau, le plus pur des diamants, son cœur ! […] Car ses mains oui dressé le monument superbe À l’abri de la foudre, à l’abri du canon : Il l’a taillé dans l’or harmonieux du Verbe. […] Swinburne Pour mettre une couronne au front d’une chanson, Il semblait qu’en passant son pied semât des roses, Et que sa main cueillît comme des fleurs écloses Les étoiles au fond du ciel en floraison. […] « Sa belle main pâle ne laissa tomber l’encensoir que glacée. » Cette phrase, la dernière que sa plume ait tracée, était dite à propos de Delphine de Girardin ; mais, comme elle s’applique bien à lui-même !

800. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Verlaine, Paul (1844-1896) »

Quelle que soit donc la valeur de Banville et de Leconte de Lisle, ils apparaissent tributaires ; ils ne brillent point suffisamment d’un feu personnel ; ils sont soit les pairs, soit les vassaux magnifiques de celui qui fut l’énorme poète de notre siècle et qui tint aussi, comme Charlemagne, l’image d’un monde entre ses mains. […] Il lui prit la main, la conduisit vers son œuvre et la mêla aux personnages de ses drames et de ses romans. […] Elle fut bientôt la seule voix qu’il écouta, et, les jours qu’il appareillait vers son rêve d’égalité et de fraternité, elle se penchait comme une chimère à l’avant de son navire, le corps hardi, les yeux fixes, la voix grande, les mains et les seins levés vers les fêtes humaines de l’avenir. […] Parfois, elles contenaient uniquement le geste souple de deux mains qui se joignent.

801. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre III. La commedia dell’arte en France » pp. 31-58

Toujours est-il que la troupe dut subir une captivité très pénible aux mains des parpaillots. […] Quand je m’aperçois de leur intention, la colère gronde en moi ; ma chair, mes nerfs, mes os se tendent ; mon sang tourbillonne dans les veines ; mon visage s’obscurcit comme le ciel en temps d’orage ; mon poil, mes cils se dressent comme des piques ; mes yeux roulent dans leurs gonds sous les arcades sourcilières ; mon nez se méduse ; ma bouche se cerbérise ; mon cou se lestrigonne ; ma main se panthérise ; toute la machine enfin se gonfle, écume, fait un bruit terrible, retentissant de caverne en caverne… LE PÉDANT. […] Je pris de la main gauche le trésorier et m’en servis comme d’un bouclier ; et, tirant Durandal du fourreau, je la dirigeai vers le roi qui s’avançait pour me frapper ; d’un coup, je fendis le pavé, j’ouvris la terre jusqu’aux abîmes où Neptune fut frappé de stupeur. […] Nous donnons ci-contre le capitaine Cerimonia : il est représenté une main sur sa rapière, dont la pointe soulève son manteau tout entier, et l’autre tenant sa loque tailladée ; il est en train de saluer très poliment la signora Lavinia (voyez plus loin ce personnage) qui se trouve en face de lui.

802. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Chefs-d’œuvre de la littérature française (Collection Didot). Hamilton. » pp. 92-107

En attendant, c’est profit de se remettre en goût de temps en temps avec ces auteurs faciles qu’on a sous la main, et qui n’ont rien de vieux. […] La première perte de jeu à Lyon avec le marchand de chevaux, la revanche du chevalier au siège de Turin, cette partie avec le comte de Caméran, où le prévoyant tricheur se fait appuyer sous main d’un détachement d’infanterie, ce sont des scènes de comédie toutes faites. […] J’ai sous les yeux la magnifique édition exécutée à Londres en 1792, avec les nombreux portraits gravés ; je vois défiler ces beautés diverses, l’escadron des filles d’honneur de la duchesse d’York et de la reine ; je relis le texte en regard, et je trouve que c’est encore l’écrivain avec sa plume qui est le plus peintre : Cette dame, dit-il d’une Mme de Wetenhall, était ce qu’on appelle proprement une beauté tout anglaise ; pétrie de lis et de roses, de neige et de lait quant aux couleurs ; faite de cire à l’égard des bras et des mains, de la gorge et des pieds ; mais tout cela sans âme et sans air. […] Hamilton ne se joue, du moins plume en main, que sur des choses légères, et n’est moqueur qu’à demi-voix.

803. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « De la tragédie chez les Anciens. » pp. 2-20

Sophocle et Euripide coururent après lui la même carrière ; et en moins d’un siècle, la tragédie grecque, qui avait pris forme tout d’un coup entre les mains d’Eschyle, arriva au point où les Grecs nous l’ont laissée : car, quoique les poètes dont je viens de parler, eussent des rivaux d’un très grand mérite, qui même l’emportèrent souvent sur eux dans les jeux publics, les suffrages des contemporains et de la postérité se sont néanmoins réunis en leur faveur. […] Un monstre horrible nous ferait sécher de frayeur ; un misérable que nous ne pourrions soulager, nous déchirerait les entrailles : mais ce monstre et ce malheureux, en peinture, l’un fût-il plus effrayant que l’hydre de Lerne, et l’autre plus à plaindre que Bélisaire, ne sauraient manquer de faire un plaisir très grand aux spectateurs, s’ils sont tracés par une main habile ; et voilà pourquoi Boileau a si bien dit après Aristote : Il n’est point de serpent ni de monstre odieux, Qui, par l’art imité, ne puisse plaire aux yeux. […] Il s’est représenté l’épopée comme une reine auguste assise sur un trône, et dont le front chargé de nuages laisse entrevoir de vastes projets et d’étranges révolutions : au lieu qu’il s’est figuré la tragédie, éplorée et le poignard en main, telle qu’on la présente, accompagnée de la terreur et de la compassion, précédée par le désespoir, et bientôt suivie de la tristesse et du deuil. […] Piqué par le concours de différents projets et de diverses passions dont on a mêlé le jeu, il attend la main qui doit délier le nœud gordien.

804. (1912) L’art de lire « Chapitre IX. La lecture des critiques »

Il faut, à mon avis, mettre entre les mains des écoliers les historiens littéraires, ceux des historiens littéraires qui ne font pas de critique — puisque tous en font, ceux, jusqu’à nouvel ordre, qui en font le moins — et les leur faire lire avant les auteurs ; ou il faut faire aux écoliers un cours d’histoire littéraire, comme on leur fait un cours d’histoire et les prier de ne lire que les auteurs dont, dans ce cours d’histoire littéraire, il leur aura déjà été parlé. […] Mais la majorité des écoliers lira naturellement les auteurs vers lesquels le cours d’histoire littéraire ou les historiens littéraires mis entre leurs mains auront dirigé leur attention. […] Du temps où j’ai fait mes études, on ne mettait entre nos mains aucun critique. […] On reconnut, vers 1880, l’inanité de cette méthode et de ses résultats ; on mit entre les mains des écoliers des critiques ; on leur fit des cours de littérature très mêlés et même chargés de critique ; on leur fit faire des dissertations sur le stoïcisme dans Montaigne et l’atticisme dans Molière ; — et alors ce fut bien pis.

805. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Jules Janin » pp. 137-154

Je ne m’occupe pas le moins du monde de savoir si les Planche, les Chasles et les Sainte-Beuve, qui furent les contemporains de Janin et qui ne furent non plus que des critiques à l’état fragmentaire, l’auraient docilement accepté pour leur Roi de la main fort peu consacrée de M.  […] Cet homme de sourire et de rire épanoui, de rondeur, de bonhomie, d’enfance de caractère, de pleine main, cet aimable et gai garçon n’eut jamais un seul grain de fatuité dans sa personne. […] Il n’eut jamais la grande folie de la croix romantique, et il se moqua même du romantisme (comme dans L’Âne mort) dès qu’il eut une plume à la main. […] Un jour, comme Hylas, mais il était moins jeune, il s’en alla, l’amphore à la main, puiser à la source d’Horace, et il y tomba avec sa cruche.

806. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XV. M. Dargaud » pp. 323-339

Dargaud, lui, ne parchemine pas l’histoire, il la prend par ses mains de cadavre, la met debout, lui dit de marcher ! […] On ne l’expédie pas d’un coup d’œil et d’un tour de main ! […] La beauté et la laideur morale tiennent une telle place dans les hommes, même les plus éclatants par le génie et par la gloire, que toutes ces figures qui passent rayonnantes, ténébreuses ou indécises, dans cette étendue du xvie  siècle, lequel semble plus grand par l’effet de tout ce qu’il contient dans sa longueur encombrée, paraissent, sous la main de ce grand connaisseur en beauté morale, avoir des lumières ou des ombres de plus ! […] Il y a bien partout en elle, il est vrai, et il devait y avoir, la négation de ce pouvoir religieux qui, au xvie  siècle, était la base de la constitution de l’État, mais est-ce que l’honneur et l’obligation n’étaient pas alors de le défendre contre l’irruption des idées nouvelles qui l’attaquaient, le fer aux mains ?

807. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — V » pp. 123-131

Il paraissait confus quand il n’avait pas l’action en main pour s’éclaircir. […] Voltaire lui avait adressé une pièce de vers pour s’excuser de ne pouvoir aller à Villars au printemps de 1722 ; sa mauvaise santé l’avait engagé à se mettre dans les remèdes, entre les mains d’un empirique appelé Vinache : Je me flattais de l’espérance D’aller goûter quelque repos Dans votre maison de plaisance ; Mais Vinache a ma confiance, Et j’ai donné la préférence Sur le plus grand de nos héros Au plus grand charlatan de France. […] Voltaire voulut mettre l’épée à la main.

808. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la Révolution française — II. La Convention après le 1er prairal. — Le commencement du Directoire. »

il était sur l’heure anéanti, et ceux qui, comme les mystérieux agents dont nous parlons, essayaient de porter la main aux rouages pour les accélérer, ceux-là couraient risque aussi de se briser avec toute leur malice, sans hâter d’une seule ligne le mouvement qui s’accomplissait sous une loi plus haute. […] Le vaisseau de l’État vogua quelque temps avec bonheur sous l’impulsion de la main puissante, qui l’avait reconstruit et lancé. […] Le commerce et les finances sortaient d’une crise épouvantable ; le sol entier, restitué à des mains industrielles, allait être fécondé.

809. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les petites revues » pp. 48-62

En ses yeux le reflet d’une tristesse dort, Et sur sa robe où sont des fleurs bizarres d’or, Elle laisse dormir son autre main si froide Que dans un sombre jour de chapelle qui dort De moins rigides mains portent la palme roide. […] Ô crépuscule, dans ta grande somnolence, Un bois à l’horizon s’étage noir et bleu ; Haut, le croissant émerge et s’argente en silence, L’Hippogriffe attendait dans le couchant de feu ; Et la Reine, égarant son regard noir et bleu, Maudit l’heure qui coule ainsi qu’une eau trop lente, Et, sous le dur brocart, sentant sa gorge en feu, Mord son exsangue main de sa bouche sanglante !

810. (1767) Salon de 1767 « Les deux académies » pp. 340-345

Sur le devant, une autre danseuse qui tient son enfant par la main ; l’enfant danse aussi, mais il a les yeux attachés sur l’horrible tête, et son action est mêlée de terreur et de joie. […] Le Moine lève les mains au ciel, et s’écrie : la providence ! […] Son père le prit par la main, le conduisit au sallon, et lui dit : tiens, vois, et juge-toi toi-même… l’enfant avait la tête baissée et restait immobile.

811. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Notre critique et la leur »

Est-il autre chose qu’un brillant qui badine au doigt d’une main familière et potelée ? […] IV Sera-t-elle possible en nos mains, à nous ? […] Mais enfin nous ne nous fondons pas aujourd’hui pour faire des madrigaux aux imbéciles et de très humbles baise mains à l’erreur.

812. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lessing »

Elle les retouchait d’une main… manchotte. […] Prendre une pièce de théâtre, comme Rodogune, par exemple, comme la plus touffue, la plus crépue, la plus emmêlée des pièces de théâtre, et la faire passer, d’une main adextre et leste, à travers un démêloir d’acier assez souple pour ne se briser jamais, voilà la critique de Lessing ! […] Rappelez-vous cette analyse perçante de la Mérope de Maffei, qui équivaut à une main saisie dans une poche !

813. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Paul Bourget »

Venu après de Musset et le grand Lamartine, traités si haut la main de négligés et d’incorrects par les brosseurs de rimes de ce temps, M.  […] Il n’a cueilli que cette rose pâle dans la gerbe des roses noires ensanglantées de lord Byron· Il n’a pas osé, tout hardi qu’il est, mettre la main dans le buisson terrible. […] Il nous a rappelé cette torture sublime… Il ne l’aurait pas eue que sa Vie inquiète n’aurait plus été la Vie inquiète, au même degré du moins, et que sa poésie aurait manqué de ce qui touche le plus en elle : Heureux l’homme qui, jeune et le cœur plein de songes Meurt sans avoir douté de son cher Idéal, À l’âge où les deux mains n’ayant pas fait de mal Nos remords les plus vrais sont de pieux mensonges.

814. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXII. Des panégyriques latins de Théodose ; d’Ausone, panégyriste de Gratien. »

L’orateur parle avec éloquence de tous les maux que nos ancêtres ont soufferts sous ce tyran ; il peint les brigandages et les rapines, les riches citoyens proscrits, leurs maisons pillées, leurs biens vendus, l’or et les pierreries arrachées aux femmes ; les vieillards survivant à leur fortune ; les enfants mis à l’enchère avec l’héritage de leurs pères ; le meurtre employé comme les formes de justice, pour s’enrichir ; l’homme riche invoquant l’indigence, pour échapper au bourreau ; la fuite, la désolation ; les villes devenues désertes et les déserts peuplés ; le palais impérial, où l’on portait de toutes parts les trésors des exilés et le fruit du carnage ; mille mains occupées jour et nuit à compter de l’argent, à entasser des métaux, à mutiler des vases ; l’or teint de sang, posé dans les balances, sous les yeux du tyran ; l’avarice insatiable engloutissant tout, sans jamais rendre, et ces richesses immenses perdues pour le ravisseur même qui, dans son économie sombre et sauvage, ne savait ni en user, ni en abuser ; au milieu de tant de maux, l’affreuse nécessité de paraître encore se réjouir ; le délateur errant, pour calomnier les regards et les visages, le citoyen qui de riche est devenu pauvre, n’osant paraître triste, parce que la vie lui restait encore, et le frère, dont on avait assassiné le frère, n’osant sortir en habit de deuil, parce qu’il avait un fils. On trouve encore dans ce discours un morceau plein de force sur la lâcheté du tyran, qui, vaincu et sans ressource, n’avait pas eu, dit l’orateur, assez de courage pour ne pas tomber entre les mains du vainqueur. […] On le voit exerçant la main de ses fils, encore jeunes, à écrire les grâces qu’il accordait aux criminels : on le voit ouvrant les prisons, et se plaignant au ciel de ce qu’il ne peut ouvrir les tombeaux.

815. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Si nous nous tendions la main ? […] Il tient les rênes de la main gauche, et, dans sa main droite, un fouet dont il les fustige. […] La fable lui a été fournie par une main étrangère. […] Ce n’est qu’une main, mais une main que dirige presque toujours un profond sentiment de la grâce. […] Henriette a refusé sa main à Charmeretz.

816. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de mademoiselle Bertin sur la reine Marie-Antoinette »

Que les hommes qui vivent dans une révolution, et qui en sont ou spectateurs éclairés ou acteurs principaux, lèguent à la postérité le dépôt fidèle de leurs souvenirs, c’est un devoir que nous réclamons d’eux ; que ceux mêmes qui, dans une situation secondaire, n’ont vu qu’un coin du vaste tableau et n’en ont observé que quelques scènes, nous apportent leur petit tribut de révélations, il sera encore reçu avec bienveillance ; et si surtout l’auteur nous peint l’intérieur d’une cour dans un temps où les affaires publiques n’étaient guère que des affaires privées, s’il nous montre au naturel d’augustes personnages dans cette transition cruelle de l’extrême fortune à l’extrême misère, notre curiosité avide pardonnera, agrandira les moindres détails ; impunément l’auteur nous entretiendra de lui, pourvu qu’il nous parle des autres ; à la faveur d’un mot heureux, on passera à madame Campan tous les riens de l’antichambre et du boudoir : mais que s’en vienne à nous d’un pas délibéré, force rubans et papiers à la main, mademoiselle Rose Bertin, modiste de la reine, enseigne du Trait galant, adressant ses Mémoires aux siècles à venir, la gravité du lecteur n’y tiendra pas ; et, pour mon compte, je suis tenté d’abord de demander le montant du mémoire. […] Une autre fois qu’elle allait aussi chez la reine, c’était dans des jours moins heureux, la princesse lui dit : « J’ai rêvé de vous cette nuit, ma chère Rose ; il me semblait que vous m’apportiez une quantité de rubans de toutes couleurs, et que j’en choisissais plusieurs ; mais, dès qu’ils se trouvaient dans mes mains, ils devenaient noirs… » L’éditeur a compris qu’il n’y avait pas là de quoi faire un volume : il a donc grossi le sien de notes sur le comte de Charolais, le duc d’Orléans, MM. de Choiseul et de Maurepas, qui ne se rattachent aucunement au texte ; ils sont à peine nommés dans l’ouvrage, et voilà qu’on nous donne en notes toute leur vie privée et publique.

817. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mikhaël, Éphraïm (1866-1890) »

Pierre Quillard Écarter le voile d’ombre, rompre par des paroles de gloire le sépulcral silence où dort celui qui jugeait également futiles, en présence de l’éternité, l’ostentation de l’orgueil et la plainte lâche de l’ennui, quelle main l’oserait, et quelle voix profanatrice ? […] Henri de Régnier Sur un vers d’Éphraïm Mikhaël Vers le marbre funèbre où ta cendre repose, Ton ombre transparente et divine revient Voir le sombre laurier survivre aux rouges roses Dont la jeunesse ardente embauma ses deux mains.

818. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Pierre Mancel de Bacilly »

Chez lui, le chrétien double les forces du penseur, et sur la notion du pouvoir telle qu’il la conçoit et l’explique resplendit toujours cette main divine qui jette la lumière à tout, comme la main de l’homme y jette l’ombre.

819. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

J’ai un petit démon familier qui m’a dit tout bas à l’oreille qu’en humiliant d’une main l’orgueil ottoman, vous pacifieriez la Pologne de l’autre. […] Ces trois pouvoirs peuvent être dans les mêmes mains ; ils peuvent être dans des mains différentes. […] Le moyen, pour ce qui est des pouvoirs de commandement, c’est de ne pas les concentrer dans les mêmes mains. […] Elle souffrait d’une centralisation politique absolue, tous les pouvoirs politiques étant réunis dans la même main ou dans les mains d’un conseil des ministres très restreint et très irresponsable. […] Les femmes mangeront-elles leurs enfants, qui ne sont pas plus grands que la main ? 

820. (1903) La vie et les livres. Sixième série pp. 1-297

Je remets mon sort entre les mains de la divine Providence. […] Il leur sera délivré des brevets signés de notre main. […] Le pouvoir vacillait aux mains d’un rêveur malade. […] Le salpêtre d’Iquique, l’argent de Huanchaca vont dans des mains étrangères. […] Elles ont des bagues à tous les doigts des mains et aux orteils.

/ 3046