Mais, quoique je ne sois point heureux, j’aime mes inclinations, et je n’y saurais renoncer ; je me fais un point d’honneur de protéger leur faiblesse ; je ne consulte que mon cœur ; je ne veux point qu’il soit esclave des maximes des philosophes, ni de ma situation ; je ne fais pas d’inutiles efforts pour le régler sur ma fortune, je veux former ma fortune sur lui. […] Il n’est nullement en moi d’avoir à ma portée les objets que vous donnez à mon cœur ; je ne manque pas cependant de principes de conduite, et je les suis exactement ; mais, comme ils ne sont pas les mêmes que les vôtres, vous croyez que je n’en ai point, et vous vous trompez en cela, comme lorsque vous croyez que mon âme est inactive, quoiqu’elle soit sensible et présente, qu’elle ne supporte la solitude que par là, et qu’elle aime à se tourner sur ce qui peut la former et lui être utile, quand ma santé le permet. […] Ce passage où il les caractérise tous les trois est d’une belle touche et d’une peinture morale excellente : L’exemple de M. de Saint-Georges, dit-il, n’est fait ni pour vous, ni pour moi ; c’est un homme trop accompli ; il est gai, modéré, facile, sans orgueil et sans humeur ; il a une santé robuste ; il aime les sciences et la paix ; il est formé pour la vertu ; sa famille et ses affaires lui font un intérêt et une occupation ; son esprit déborde son cœur, le fixe et le rassasie ; il a le goût de la raison et de la simplicité, tout cela se trouve en lui, sans qu’il lui en coûte ; ce sont des dons de la nature ; il est formé pour les biens qu’elle a mis autour de sa vie ; les autres le toucheraient moins ; il a le bonheur, si rare, de jouir de tout ce qu’il aime, parce qu’il n’aime rien que ce dont il jouit. […] Semblables à des somnambules qui parlent et qui marchent en dormant, ces derniers ne connaissent point cette suite impétueuse et féconde de pensées, qui forment un si vif sentiment dans le cœur des hommes profonds. […] Ils sortent l’un et l’autre de ce conflit amical sans s’être convaincus, l’un décidé à se montrer plus absolu et plus bourru que jamais, l’autre n’aspirant qu’à être étendu et conciliant : Vous croyez qu’il dépend de nous de nous former un caractère, et vous ne donnez qu’une route et qu’un objet à tous les esprits ; moi, je voudrais que chacun se mesurât à ses forces, que l’on consultât son génie, qu’on s’étudiât à l’étendre, à l’orner, à l’embellir, bien loin de le contraindre ou de l’abandonner.
Welcker traite avec beaucoup de mépris, et les œuvres de second ordre des littératures classiques, si elles servent moins à former le goût, offrent quelquefois plus d’intérêt philosophique et nous en apprennent plus sur l’histoire de l’esprit humain que les monuments accomplis des époques de perfection. […] Ce fait d’une langue ancienne, choisie pour servir de base à l’éducation et concentrant autour d’elle les efforts littéraires d’une nation qui s’est depuis longtemps formé un nouvel idiome, n’est pas, comme on voudrait trop souvent le faire croire, l’effet d’un choix arbitraire, mais bien une des lois les plus générales de l’histoire des langues, loi qui ne tient en rien au caprice ou aux opinions littéraires de telle ou telle époque. […] Dans la région de l’Inde au Caucase, le zend, avec ses mots longs et compliqués, son manque de prépositions et sa manière d’y suppléer au moyen de cas formés par flexion, le perse des inscriptions cunéiformes, si parfait de structure, sont remplacés par le persan moderne, presque aussi décrépit que l’anglais, arrivé au dernier terme de l’érosion. […] Formée, d’ailleurs, par dissolution, la langue moderne ne saurait donner quelque vie aux lambeaux qu’elle essaie d’assimiler, sans revenir à l’ancienne synthèse pour y chercher le cachet qui doit imprimer à ces éléments épars une nouvelle unité.
Elles forment, à l’avantage de Balzac, contraste avec la sécheresse des lettres écrites de Rome et d’Italie par Montaigne, resté froid parmi ces grandeurs passées, qui remplissent l’imagination de Balzac. […] On a vu, dans les premières années du dix-septième, Charron tenter d’y arriver, former un plan, couper et diviser sa matière. […] C’est à la faveur de ces préoccupations du jour ou simplement des idées à la mode, que s’introduisait la réforme littéraire ; et le goût se formait par ce qui d’ordinaire le corrompt. […] De tels écrits ne pouvaient contenter longtemps un public assez formé déjà pour demander aux écrivains la première condition de l’art d’écrire, c’est à savoir un sujet. […] Mais Balzac avait formé des lecteurs pour les Lettres provinciales.
Pour les former, il faut qu’elle réunisse tous les talens & toutes les vertus, un esprit capable de toutes les connoissances, un cœur rempli de tous les sentimens. […] Ses Instructions pour les Magistrats, son Essai sur le Droit public, ses Ecrits sur les Belles-Lettres, ses Instructions pour l’éducation de son fils, sont autant de monumens qui renferment, chacun en particulier, une raison supérieure, des traits brillans dont se forment un grand corps de lumiere qui éclaire l’esprit autant qu’il échauffe le cœur. […] Quelque heureusement qu’on soit né, l’étude de soi-même, celle des hommes, l’attention à se former sur de bons modeles, sont absolument nécessaires pour se mettre en état de devenir un modele à son tour.
R ien n’est plus louable, Monseigneur, que le projet que vous formez. […] Le dessein qu’il avoit formé de faire connoître généralement tous les Livres écrits en François, a donné à sa Bibliothèque une étendue immense. […] Formei, qui a publié avant moi des Conseils pour former une Bibliothèque, c’est plus resserré que M. l’Abbé Goujet.
On formait ainsi de formidables disputeurs, des parleurs intarissables capables d’argumenter des journées et des semaines entières, comme ceux que Rabelais a si joliment raillés et parodiés. […] Si l’on veut se l’expliquer, il faut pénétrer dans les collèges où se sont formées les générations d’alors. […] L’Académie à son origine est formée des écrivains qui figuraient avec honneur à l’hôtel de Rambouillet et dans les cercles du même genre. […] Les Académies sont formées d’écrivains arrivés ou parvenus ; elles représentent l’âge mûr et la vieillesse. […] Les talents peuvent s’y déformer aussi bien que s’y former.
Car il a des sens comme nous, et les sensations rappelées, combinées, notées par des signes, suffisent pour former « non seulement toutes nos idées, mais encore toutes nos facultés430 ». […] Formées par un lent et délicat tissage, à travers un long appareil de signes, parmi les tiraillements de l’orgueil, de l’enthousiasme et de l’entêtement dogmatique, combien de chances pour que, dans la meilleure tête, ces idées correspondent mal aux choses ! […] Si l’une de ces conditions manque, la raison, surtout la raison politique, est absente. — Chez le paysan, chez le villageois, chez l’homme appliqué dès son enfance au travail manuel, non seulement le réseau des conceptions supérieures fait défaut, mais encore les instruments internes qui pourraient le tisser ne sont pas formés. […] Le nouveau contrat n’est point un pacte historique, comme la Déclaration des Droits de 1688 en Angleterre, comme la Fédération de 1579 en Hollande, conclu entre des hommes réels et vivants, admettant des situations acquises, des groupes formés et des institutions établies, rédigé pour reconnaître, préciser, garantir et compléter un droit antérieur. […] Le premier intérêt de l’État sera toujours de former les volontés par lesquelles il dure, de préparer les votes qui le maintiendront, de déraciner dans les âmes les passions qui lui seraient contraires, d’implanter dans les âmes des passions qui lui seront favorables, d’établir à demeure, dans ses citoyens futurs, les sentiments et les préjugés dont il aura besoin448.
Origine des premières républiques, dans la forme la plus rigoureusement aristocratique Les familles se formèrent donc de ces serviteurs (famuli) reçus sous la protection des héros. […] Les pères de famille avaient reçu les terres de la divine Providence, comme une sorte de fiefs divins ; souverains dans l’état de famille, ils formèrent par leur réunion les ordres régnants dans l’état de cités. […] Depuis que Fabius Maximus eut distribué les citoyens selon leurs biens, en trois classes, sénateurs, chevaliers, et plébéiens, les nobles ne formèrent plus un ordre dans la cité, et se partagèrent, selon leur fortune, entre les trois classes. […] C’est encore la religion qui les détermina à former une union régulière et aussi durable que la vie, celle du mariage, d’où nous avons vu dériver le pouvoir paternel, et par suite tous les pouvoirs. […] Partant de ces trois erreurs, ils ont cru que les rois et autres grands personnages des temps anciens s’étaient consacrés, eux, leurs familles, et tout ce qui leur appartenait, à adoucir le sort des malheureux qui forment la majorité dans toutes les sociétés du monde.
Il y a des noms étrangers qui, à quelques égards, appartiennent ou du moins touchent de près à la France, Le xviiie siècle en a plusieurs qui ont été, à certains moments, accueillis et presque adoptés par nous ; on en formerait toute une liste depuis Bolingbroke jusqu’à Franklin. […] Il acheta quelques livres de voyages ; un peu plus tard, un volume dépareillé du Spectateur d’Addison lui tomba sous la main et lui servit à se former au style. […] J’ai formé ici une nouvelle connexion qui durera à l’éternité. — Mécontent de ce refus de mon Eurydice, j’ai pris tout de suite la résolution de quitter ces ombres ingrates, et de revenir en ce bon monde revoir le soleil et vous. […] En même temps, Franklin formait un club composé des jeunes gens instruits de sa connaissance, pour s’entretenir et s’avancer dans la culture de l’esprit et la recherche de la vérité. […] Il nous est difficile de ne pas sourire en voyant cet art de vertu, ainsi dressé par lui pour son usage individuel, et en l’entendant nous dire que de plus, à cette même époque, il avait conçu le plan de former, parmi les hommes de toutes les nations, un parti uni pour la vertu.
Celui qu’une longue expérience a formé, l’emporte sans doute par la précision des idées ; il a rassemblé plus de faits, et la vérité lui est mieux connue : on y parvient plus difficilement avec l’autre, mais on la désire plus vivement, et il sait mieux la faire aimer. […] il n’a plus de souhait à former. […] On nomma des commissaires, on fit des démarches auprès de M. de Lassone, qui éluda poliment leurs demandes, et la Faculté se décida alors, par l’organe de son doyen, à présenter une requête au roi contre l’établissement nouveau, et à former opposition auprès du Parlement à l’enregistrement de toutes lettres patentes tendant à légitimer une institution quelconque de ce genre, avant d’avoir été elle-même entendue. […] Dans le fond du puits qui était transparent, on apercevait le Bouc de la fable, dont les cornes très prolongées formaient une échelle, au haut de laquelle était une Fortune que le Renard poursuivait : chaque échelon portait une légende. […] Dans l’Éloge de M. de Lassone, il indiquera plus directement encore, et par une exacte définition, le caractère qui doit distinguer les académies d’avec les facultés ou collèges : Les académies, disait-il en parlant des sociétés médicales de Londres et d’Édimbourg, les académies de ce genre et les facultés ou collèges de médecine ont toujours formé des corps distincts.
Le personnage se concevait autre qu’il n’était, mais il ne réussissait pas à réaliser la conception nouvelle qu’il s’était formée de lui-même. […] Grâce à ce pouvoir d’enfermer les résultats de l’effort individuel dans cette forme transmissible, les générations peuvent ajouter bout à bout la suite de leurs efforts et en former une somme qui va toujours grossissant. […] Il suffit surtout de considérer que sans l’existence de ce pouvoir, les découvertes individuelles ne se seraient pas transmises en sorte que le savoir humain serait demeuré à l’état embryonnaire, qu’il n’aurait point formé une somme, qu’il n’y aurait pas à vrai dire de savoir humain. […] De la sorte le Bovarysme est le mode même de la croissance, un mode qui associe le changement avec l’identique dans les proportions qu’il faut pour former une réalité et la développer. […] Cette fausse conception d’elles-mêmes, leur a donc été utile à se former en nations ; mais on voit s’inscrire la réaction de ces jeunes énergies aux différences qu’elles imposent jusqu’à la Réforme, au gré de leurs convenances et de nécessités particulières, à la règle identique à laquelle elles avaient fait appel pour prendre forme sociale.
Évidemment l’idéal de la psychologie, ce serait de pouvoir expliquer tous les sentiments par une double méthode d’analyse et de synthèse ; d’être en état de ramener une émotion très complexe à une émotion plus simple, et de remonter ainsi graduellement jusqu’à un fait irréductible ; ou bien au contraire de partir des phénomènes affectifs les plus simples, et de montrer comment, par addition, se forment des agrégats d’émotions de plus en plus complexes, et de reconstituer ainsi théoriquement la réalité. […] Nous avons vu que celles de la première classe peuvent se former en groupes plus ou moins complexes et qu’elles, se succèdent suivant certaines lois. Celles de la deuxième classe sont également aptes à se former en groupes et à se succéder suivant certaines lois. […] Son analyse a pour objet de montrer que nos sentiments les plus forts sont des agrégats, et que c’est de là qu’ils tirent leur force ; qu’ils sont formés par la juxtaposition, ou pour mieux dire, par la fusion des sentiments simples ; que l’affection étant le résultat d’un plaisir, une affection profonde résulte d’une grande somme de plaisirs ressentis. […] L’idée de ces individus, unie à celle des plaisirs que nous ressentons, forment une idée composée, une affection.
Ces vérités ont été le lieu où, en concevant la nature des choses autre qu’elle n’est, l’esprit humain est parvenu à se former quelque image de la réalité phénoménale. […] Ce sont ces unités qui, se retrouvant combinées entre elles selon les assemblages, il est vrai, le plus divers, en des systèmes de connaissance plus complexes, réussissent à former par leur fixité un lien entre ces divers systèmes et les maintiennent tous sur un même plan de connaissance. […] Il semblerait permis, d’après les uns et les autres, de supposer qu’une conception du réel, différente du tout au tout de celle que nous avons formée, fût possible, fondée sur une conception différente du temps, de l’espace ou de la cause, ou inventée peut-être avec d’autres artifices, d’autres points de repère, d’autres conventions arbitraires, d’autres moyens de connaissance. […] L’utilité qui les a formées les laisse sans force dès qu’elle cesse de les vivifier. […] C’est pourquoi les vérités, au gré de l’utilité humaine, se forment et périssent, voient s’associer et se dissocier les éléments qui les composent.
Section 35, de l’idée que ceux qui n’entendent point les écrits des anciens dans les originaux, s’en doivent former Quant à ceux qui n’entendent point les langues dans lesquelles les poëtes, les orateurs et même les historiens de l’antiquité ont écrit, ils sont incapables de juger par eux-mêmes de leur excellence, et s’ils veulent avoir une juste idée du mérite de ces ouvrages, il faut qu’ils la prennent sur le rapport des personnes qui entendent ces langues et qui les ont entendues. […] Rien ne sçauroit suppléer le rapport du sens destiné à juger de la chose dont il s’agit, et les idées que nous pouvons nous en former sur les discours et sur les raisonnemens des autres, ressemblent aux idées qu’un aveugle né, peut s’être formées des couleurs. […] Le mérite principal de l’histoire est d’enrichir notre mémoire, et de former notre jugement. […] Ainsi le plus grand mérite d’un poëme nous échappe quand nous n’entendons pas les mots choisis par le poëte même, et quand nous ne les voïons point dans l’ordre où il les avoit arrangez pour plaire à l’oreille, et pour former des images capables de remuer le coeur.
Presque tous les écrivains d’un pays et d’un siècle, poètes, orateurs, philosophes même, sont entraînés et formés par ce qui les entoure. […] Des milliers d’hommes ne forment qu’un seul homme. […] Ainsi, c’est au pied du Caucase, et dans l’ancienne patrie de Médée, que se forma l’orateur qui devait un jour étonner la Grèce. […] Dans ce moment, l’orateur se peint vieux, accablé d’infirmités et de faiblesse, courbé sous le poids des ans, mais ranimant ses forces languissantes, pour former ce prince destiné à commander un jour au monde : « Viens mon fils, dit-il, viens sur les genoux d’un faible vieillard, recevoir les leçons que la sagesse destine aux princes ; ce sont celles que reçut Antonin, Numa, Marc-Aurèle et Titus. À ma voix se joindront, pour te former, celle de Platon et celle du précepteur d’Alexandre ; à l’école des sages, deviens le bienfaiteur du monde. » Je finirai cet extrait, déjà peut-être trop long, en citant encore un morceau où Thémiste implore la grâce, d’un philosophe, dont le crime était d’avoir été le favori de Julien ; il ne le nomme pas, mais c’était probablement Maxime.
Les lettres sont des signes qui en se réunissant et en se combinant de diverses manières, d’après les règles convenues de la grammaire, forment des mots. […] Les idées contenues dans les mots s’enchaînent d’après les règles d’une logique intérieure, et forment des phrases ou des sens plus complets. […] Les langues, comme des urnes brisées dont on transvase la liqueur pour la verser dans d’autres urnes, se transmettent de l’une à l’autre une faible partie de la littérature sacrée ou profane qu’elles contenaient ; elles en laissent fuir la plus grande partie dans l’oubli ; puis naissent, de la décomposition de ces langues mortes, d’autres langues formées de leurs débris. […] Ces livres forment avec le temps d’autres dépôts de l’expression humaine, destinés à périr à leur tour.
Traitée par la chaleur ou par l’acide nitrique, il se formait un coagulum assez abondant, ayant toutes les apparences d’un précipité albumineux. […] Les alcalis, au contraire, empêchent la précipitation du suc pancréatique et redissolvent le précipité lorsqu’il a été formé. […] Au moment de l’agitation, l’huile se mélangea mécaniquement avec la bile, de manière à former un liquide jaune et opaque ; mais, une demi-heure après, par suite du repos, l’huile, séparée, était revenue à la surface, tandis que la bile formait une couche parfaitement distincte dans la partie inférieure du tube. […] La graisse s’est constamment tenue séparée sans former d’émulsion. […] Pour isoler le sel ainsi formé, on a jeté aussitôt sur un filtre la liqueur avec le précipité, et l’on a épuisé à froid par l’eau, l’alcool, puis l’éther.
Ces remarques formaient déjà comme un embryon de système encore vague et confus. […] Souvent on voit le désir intellectuel, l’idée incomplète se former non en un seul individu, mais à travers plusieurs générations. […] Peut-être l’imaginatif amoureux a-t-il une tendance à voir les femmes à travers les créations de son esprit, à les trouver semblables au type idéal qu’il s’est formé. […] Chez d’autres on voit la tendance dominante se former peu à peu, au fur et à mesure des inventions, ou du moins se modifier et se transformer. […] La synthèse ainsi formée un peu au hasard des rencontres grandit par d’autres accidents semblables.
Ils sont formés d’un nombre fini de forces élémentaires. […] Le jugement formé est dit alors nécessaire. […] Ces qualités communes forment alors une idée générale. […] Ainsi les signes des sourds-muets forment une langue. […] Ainsi peu à peu s’est formé un système de signes.
D’autre part, il est prouvé que la variabilité, une fois qu’elle a commencé à se manifester, ne cesse pas totalement d’agir ; car de nouvelles variétés se forment encore de temps à autre parmi nos produits domestiques les plus anciens. […] C’est une difficulté semblable qui arrêta tant de géologues, lorsque Lyell affirma le premier que de longues lignes d’escarpements rocheux aujourd’hui situés au milieu des terres, avaient été formés et que de grandes vallées avaient été creusées par l’action lente des vagues côtières. […] Ce serait donc bien d’un type, d’une forme d’une espèce unique, mais non d’un seul individu que tous les organismes seraient successivement formés. […] On peut dire que jamais dicotylédone ou polycotylédone ne s’est formée d’une monocotylédone, et vice versa, bien qu’on ne puisse affirmer aussi catégoriquement que ces trois groupes ne se soient pas développés presque parallèlement aux dépens de quelque classe antérieure de cryptogames. Chez les cryptogames eux-mêmes, les différentes classes se sont probablement formées suivant la loi de divergence de quelque type plus ancien et inférieur.
Ses chapitres font autant de petits corps de lumiere, qui, réunis ensemble, forment un Tout, dont l’effet est d’éclairer & de diriger l’esprit du Lecteur sur les objets qu’il doit appercevoir & sentir. […] Les loix des Romains, les ressorts de leur gouvernement, leurs mœurs, les principes vivisians ou destructeurs qui ont contribué, soit à former, à agrandir, soit à ébranler, à ruiner leur Empire, tout est développé avec une sagacité étonnante pour quiconque est en état de sentir combien il est difficile de ne présenter que la substance des choses, sans nuire à l’effet qui en doit résulter. Les causes de la grandeur & de l’abaissement des Romains se trouvent dans leur Histoire ; mais il n’y avoit qu’un homme de génie consommé dans la politique & la connoissance de l’esprit humain, qui pût les y découvrir, les lier ensemble, en former un tissu historique, qui prouve, d’une maniere lumineuse, ce qu’on s’est proposé de montrer.
Comment il est formé par la Renaissance. — § IV. […] Ainsi, la Renaissance toute seule forma l’esprit et le talent d’Amyot. […] Comment il est formé par la Renaissance. […] Des deux antiquités, la chrétienne et la païenne, la seconde forma seule Montaigne. […] Plutarque n’était-il pas un Grec formé par les écrivains de la décadence latine, une sorte de Sénèque grec ?
Ses Ouvrages, presque tous en Latin, forment une immensité de volumes in-folio. […] Peut-être a-t-il trop écrit, pour se former à bien écrire.
Lorsque les hommes ont formé ces sons artificiels, toutes les fois qu’ils ont fait une nouvelle langue, ils ont dû, suivant l’instinct de la nature, faire ce que font encore aujourdhui les hommes qui ne sçauroient trouver le mot dont ils ont besoin pour exprimer quelque chose. Ils se donnent à entendre en contrefaisant le bruit que fait la chose, ou en mettant dans le son imparfait qu’ils forment, quelque ton qui ait le rapport le plus marqué qu’il soit possible, avec la chose qu’ils veulent donner à comprendre sans pouvoir la nommer. […] C’est apparemment ainsi que les anciens gaulois avoient formé le nom de cocq, dont nous nous servons aujourd’hui dans la même signification qu’eux, en imitant dans le son du mot le son du bruit que cet oiseau fait par intervalles. C’est encore ainsi qu’ils ont formé le mot de becq qui signifioit la même chose chez eux que chez nous. […] Voilà pourquoi nous sommes choquez machinalement par la prononciation d’un homme qui profere avec peine certains mots d’une langue étrangere, et qui est obligé à forcer souvent ses organes pour en arracher des sons qu’ils ne sont point en habitude de former.
On le comprend assez, cette grande colère du dehors ne s’est pas formée en un jour, et le mal vient de plus loin. […] Dans ces premières années de tâtonnements, le corps de doctrines critiques n’était pas encore formé ni dégagé ; la Revue avait plutôt le caractère d’un magazine. […] Voilà le vrai ; et de plus, il est résulté de ces années d’expérience et de pratique commune que cette doctrine critique, qu’on cherchait à introduire dès l’abord, s’est formée de la manière dont ces sortes de choses se forment le mieux, c’est-à-dire lentement, insensiblement, comme il sied à des hommes d’âge déjà mûr, qui ont passé par les diverses épreuves de leur temps, et qui sont guéris des excès. […] Ce lien qui, disait-on, avait quelquefois manqué aux divers travaux critiques de la Revue, ce lien dont nous avons trop senti nous-même, à de certains jours, le relâchement, et que nous nous sommes efforcé bien souvent de rattacher, il existe désormais, il est formé manifestement ; les attaques mêmes du dehors et l’union des agresseurs nous le démontrent.
. — Qu’un nouvel objet semblable aux précédents se rencontre après que nous avons prononcé le mot quatre, il formera avec le mot un groupe nouveau, et il naîtra en nous une tendance analogue à celle qui nous a fait prononcer le mot deux, tendance semblable à la première, en ce qu’il s’agit aussi d’une addition, tendance différente de la première, en ce que, au lieu d’ajouter un objet à un objet, on ajoute ici un objet à un groupe de quatre objets réunis. […] Nous atteignons celui-ci par contrecoup, comme un arpenteur qui, voulant mesurer la distance d’un objet inaccessible, mesure une base et deux angles, et connaît la première quantité par les trois secondes. — Toutes les conceptions mathématiques sont formées par cette voie. […] Nous combinons ces termes entre eux et nous formons d’abord des composés peu complexes, ceux de deux, trois, quatre et des premiers nombres, ceux de plus et de moins, de plus grand et de moins grand, de ligne plus grande et de ligne moins grande, par suite ceux de ligne droite ou courbe, de triangle, de cercle, par suite encore ceux de sphère, cône, cylindre, et le reste. La complication des composés va croissant ; elle est indéfinie ; tous ensemble, ils forment un royaume à part d’objets qui ne sont pas réels, mais qui sont distribuables, comme les objets réels, en familles, genres, espèces, et dont nous découvrons les propriétés en considérant à côté d’eux les propriétés des formules qui sont leurs substituts. Par une continuation étrange, le procédé qui a formé ces objets est encore celui qui établit leurs rapports.
Il est certain qu'il y a des longueurs assommantes dans ses Romans, qui forment une quarantaine de volumes énormes. Si on considere cependant que le goût n'étoit pas encore formé lorsqu'elle écrivoit ; que tel de ses Romans annonce lui seul plus d'esprit, d'imagination, & de connoissances, que le très-grand nombre de ceux dont on a inondé le Public depuis quelques années ; qu'on trouve dans Clelie & dans Artamene des traits d'une délicatesse & d'une supériorité qui feroient honneur à nos plus sensibles Ecrivains : on conviendra que les défauts ne doivent pas rendre aveugle sur les bonnes qualités.
Il convient d’en compléter l’explication par l’examen des procédés qui permettront, après analyse, de restaurer l’œuvre et les hommes dans leur unité totale, dans le jeu des forces naturelles et sociales qui les forment, les meuvent et les heurtent. […] L’on aura atteint au bout de ces travaux le résultat le plus haut auquel tend tout l’embranchement des sciences organiques : la connaissance d’un homme analyse et reconstitué, de ses fibres intérieures, des délicates agrégations de cellules cérébrales traversées par le jeu infiniment mouvant et complexe des ondes récurrentes, de ce centre de la trame intime de vibrations qui, phénomène physiologique pour l’observateur idéal placé au dehors et percevant son envers, est, pour ces cellules mêmes, immatérielles ou s’ignorant matière, de la pensée, des émotions, des douleurs, des joies, des souvenirs d’êtres et de choses, — jusqu’à l’aboutissement même des nerfs infiniment déliés, infiniment ramifiés, qui par des voies encore inconnues, à travers l’encéphale, le cervelet, la moelle allongée et la moelle épinière, recevant les répercussions actives de tout ce travail intérieur, conduiront aux muscles, à l’épiderme, à cette surface de l’homme colorée et conformée, — jusqu’aux êtres qui forment les antécédents de ce corps, — jusqu’à ceux qui le touchèrent ou dont les actes, par des manifestations proches ou lointaines, l’affectèrent, le réjouirent ou le contristèrent, — jusqu’aux cieux qui se reflétèrent dans ses yeux, — jusqu’au sol qu’il foula de sa marche, — jusqu’aux cités ou aux campagnes dont la terre souilla ses pieds et résorba sa chairec. […] Mais ce groupe a réellement existé dans le temps ou dans l’espace ; il existe parfois encore ; il forme ou a formé un milieu particulier, sur lequel le plus souvent l’histoire ou le journal ajoutent des renseignements à ceux plus exacts et plus intimes que procure l’examen de leur centre de ralliement, l’œuvre ou l’ensemble d’œuvres, dans lesquelles ils se reconnaissent et se désignent. […] Les contemporains, les auteurs de mémoires, les comiques et les moralistes du temps, les représentations graphiques, des tableaux aux caricatures, les mille faits épars de la vie de tous les jours, la reconstitution architecturale et géographique des lieux, des monuments et des villes, tous les départements de la vie publique, de la politique à la théologie, seront mis à contribution, fouillés en quête de détails typiques et significatifs ; ces notions sur le vêtement, la demeure, le séjour, sur les habitudes intimes et sociales, sur le type ethnique, sur les relations célestes et humaines, sur toute la vie en somme du groupe formé autour d’une œuvre ou autour d’une famille d’œuvres, groupe qui comprendra tantôt tout ce qui est notable d’une nation, tantôt toute une classe, tantôt enfin un nombre épars d’individus dont il faudra rechercher les points d’union, — seront dégagés, fondus ensemble, ordonnés, et plaqués enfin sur la sorte de squelette psychologique que l’on aura obtenu antérieurement par l’ordre de recherches que nous avons exposé au précèdent chapitré.
Tous égaux, trop orgueilleux pour céder l’un à l’autre, ils ne se soumirent qu’à l’empire souverain des corps aristocratiques dont ils étaient membres ; leur domaine privé, jusque-là éminent, forma en se réunissant le domaine public également éminent du sénat qui gouvernait, de même que la réunion de leurs souverainetés privées composa la souveraineté publique des ordres auxquels ils appartenaient. […] on ne savait ce que c’était que richesses, dans un tel état de simplicité. — La difficulté devient plus grande encore, lorsqu’on songe que dans la haute antiquité il n’y avait point de forteresse, et que les cités héroïques formées par la réunion des familles n’eurent point de murs pendant longtemps, comme nous le certifie Thucydide105. […] C’est dans ce sens que l’on peut dire, comme lui, que les républiques se sont formées d’hommes libres et d’un caractère sévère.
Comment, d’après l’idée de notre esprit, nous nous formons l’idée des autres esprits. — Analogie des autres corps vivants et du nôtre. — Cette analogie nous suggère par association l’idée d’un esprit semblable au nôtre. — Vérifications diverses, nombreuses et constantes de cette induction spontanée. […] Par conséquent, mes événements passés, comme mes événements présents, ont tous ce caractère qu’ils apparaissent comme internes. — À ce titre, ils forment une chaîne dont les chaînons, tous du même métal, apparaissent à la fois comme unis et comme distincts. […] Elle a des précédents, des éléments, une histoire, et l’on peut compter tous les pas de l’opération involontaire qui aboutit à la former. […] Ainsi se sont formés le démon de Socrate et le génie familier du Tasse. — D’ordinaire, au bout d’un temps, l’hallucination sensorielle vient compléter l’hallucination psychique. […] Mais, pour les objets usuels, le désaccord est rare, et, si l’expérience préalable a été suffisante, il disparaît entièrement. — Il y a donc une quantité prodigieuse de cas où l’événement justifie la prévision, et, dans tous ces cas, le couple que forment nos pensées est la contre-épreuve exacte du couple que forment les faits.
Bien différent d’un grand nombre de ses Confreres, plus occupés à former leur style sur les froides Productions du jour, & à en transporter le ton dans la Chaire, qu’à se former sur les grands Maîtres, il s’étoit nourri de la lecture des Saints Peres, & sur-tout de celle de S.
Nous ne parlons que de ce qu’il a fait dans le genre littéraire ; & l’on peut dire que ses Entretiens sur les Sciences & la maniere d’étudier, forment une composition estimable, dont la lecture seroit très-utile aux jeunes gens assez sages pour vouloir s’instruire, avant d’exercer leur plume au hasard & sans principes. […] Sa Rhétorique, ou l’Art de parler, sans être le meilleur Ouvrage que nous ayons dans cette partie, est néanmoins très-propre, par l’érudition & la profondeur des réflexions qui y dominent, à former l’esprit, & à lui faire contracter l’heureuse habitude de juger des choses sur des principes clairs & solides.
Quiconque ambitionne des succès durables, doit, avant toutes choses, nourrir son esprit par de bonnes lectures, le former par la réflexion, lui donner le temps de se fortifier & de mûrir, & ne point s’élancer dans la carriere, avant de la bien connoître & d’être en état de la parcourir. […] N’eût-il pas mieux valu pour sa gloire, nous le répétons, qu’il se fût borné à un seul genre, & eût employé, pour s’y former, tout le temps qu’il a perdu à composer des Brochures éphémeres ?
Bruys, [François] né à Serrieres dans le Mâconnois, en 1708, mort à Dijon en 1738, Auteur qui a beaucoup écrit, mais qui, pour avoir écrit avant de former son esprit & son style, n’a rien laissé que de médiocre. […] Cette Traduction & ces Notes, qui forment 6 vol.
Il admet, il est vrai, que, une fois formée, la société réagit sur les individus72. […] Mais, dira-t-on, puisque les seuls éléments dont est formée la société sont des individus, l’origine première des phénomènes sociologiques ne peut être que psychologique. […] En vertu de ce principe, la société n’est pas une simple somme d’individus, mais le système formé par leur association représente une réalité spécifique qui a ses caractères propres. […] Nous avons vu que, même quand la société se réduit à une foule inorganisée, les sentiments collectifs qui s’y forment peuvent, non seulement ne pas ressembler, mais être opposés à la moyenne des sentiments individuels. […] Cette spécificité leur vient de ce qu’ils ne sont pas formés des mêmes éléments.
Nous avons eu plus d’une fois occasion de montrer en quelles circonstances favorables, et par quelle combinaison de sentiments divers, put se former cette école de poésie et d’art, fruit propre des dernières années de la Restauration, et qui, à ne la prendre que dans son origine, indépendamment de ce que fourniront désormais les principaux membres dispersés, ne restera pas sans honneur. […] Ç’a été une des productions naturelles de la Restauration, comme ces îles de fleurs formées un moment sur la surface d’un lac, aux endroits où aboutissent, sans trop se heurter, des courants contraires. […] Cependant les plus nobles et les plus glorieuses amitiés se formaient autour d’elle. […] L’auteur de ces touchants récits aime à exprimer l’impossible et à y briser les cœurs qu’il préfère, les êtres chéris qu’il a formés : le ciel seulement s’ouvre à la fin pour verser quelque rosée qui rafraîchit. […] La scène se passe vers le même temps que pour Eugène de Rothelin ; les personnages sont également simples, purs, d’une compagnie parfaitement élégante, et du plus gracieux type d’amants qu’on ait formé ; mais ici ce n’est plus, comme dans la charmante production de Mme de Souza, un idéal de conduite et de bonheur, et, ainsi que je crois l’avoir dit, une espèce de petit Jehan de Saintré ou de Galaor du dix-huitième siècle : il y a souffrance, désaccord ; le sentiment d’inégalité sociale est introduit.
Depuis que les morceaux, recueillis dans le premier volume de cet ouvrage23, ont paru en 1832, l’auteur s’est trouvé insensiblement engagé à en composer dans le même genre un plus grand nombre qu’il n’avait projeté d’abord, et il n’a pas tardé à concevoir la réunion de ces divers Portraits ou articles critiques comme pouvant former une galerie un peu irrégulière, assez complète toutefois, et propre à donner une idée animée de la poésie et de la littérature contemporaine. S’il se permet donc aujourd’hui de réimprimer ces morceaux en les recueillant, c’est qu’il les a conçus au moment où il les écrivait comme devant former une espèce de tout, et comme ayant peut-être à gagner à ce rapprochement. […] Quérard, l’auteur insère ici, faute d’autre lieu, le renseignement qui suit : Les Critiques et Portraits, auxquels se rattache ce petit volume, forment, à cette date de 1842, cinq volumes in 8° : le premier volume publié en 1832, les second et troisième en 1830, les quatrième et cinquième en 1839.
Le sel domine dans la terre de la Pologne, et l’on en trouve des mines toutes formées dans plusieurs endroits de ce roïaume. […] La couleur du vague de l’air, celles des nuages qui font un horrison colorié au coucher comme au lever du soleil, dépendent de la nature des exhalaisons qui remplissent l’air et qui se mêlent avec les vapeurs dont ces nuages sont formez. […] Ou ces sucs montent dans les tuyaux des plantes, ou bien ils s’élevent dans l’air après s’être exténuez et filtrez à travers la premiere enveloppe de la terre, et ils y forment ce nître aërien qui retombant ensuite sur la terre dont il est sorti, aide tant à sa fertilité.
« Le style, dit-il, c’est la partie vivante de nous-mêmes qui consent à former la chair impalpable des idées ; suivant la qualité de cette atmosphère de notre âme, à quoi s’emprunte le mystère de l’expression par la parole, varie la qualité de cette expression même. […] Cela reste vrai même avec notre enseignement, même pour travailler, même pour raturer, même pour s’assimiler et se former. […] Lebesgue exige des conditions compliquées : « Cela, d’ailleurs, ne suffit pas absolument à former l’écrivain ; il faut également savoir écouter, car c’est par l’harmonie, qualité rare, que les images s’évoquent, intégrales, dans le trame des phrases.
Cela trouvé, il n’y aura point de difficulté à comprendre comment se forment les deux prémisses où elle entre et la conclusion qui en jaillit. […] Par exemple, il s’agit pour l’astronome de chercher comment se sont formées les diverses planètes, pour le géologue de montrer comment se sont formées les couches étagées de l’écorce terrestre, pour le minéralogiste de découvrir comment se sont formées les différentes roches, pour le naturaliste de savoir comment se sont formées nos espèces végétales et animales, pour l’historien de démêler comment se sont formées les époques successives d’une même société humaine et les différents traits d’un caractère national. […] Ces images, ayant la propriété de ressusciter spontanément, s’associent et s’évoquent entre elles, selon leur tendance plus ou moins grande à renaître, et forment ainsi des groupes. […] Enfin les signes qui les résument et les remplacent forment des idées générales et, par suite, des jugements généraux. — Tels sont les matériaux de notre esprit, et telle est la façon dont ils s’ajustent ensemble. […] On a trouvé à Plombières, dans le béton sur lequel les Romains avaient bâti, des aiguilles de granit que depuis dix-huit cents ans l’infiltration des eaux y avaient formées. — M.
Cet Auteur est présentement occupé d'une énorme compilation sous le titre de Dictionnaire universel des Sciences, Morale, Œconomique, Politique, & Diplomatique, dont les trois premieres Lettres forment 12 volumes in-4°. Ce Recueil, formé de beaucoup d'autres, offre un grand nombre d'articles intéressans, qui prouvent que si le Compilateur n'est pas en état de produire par lui-même de bonnes choses, il a du moins le mérite de les distinguer dans les Productions d'autrui.
On peut y reconnoître tout au plus un esprit disposé à la réflexion, capable de se former par l'étude, mais qui avoit besoin de plus de maturité pour rectifier ses idées & fortifier son style. En effet, il faudroit être bien aveugle, pour ne pas s'apercevoir que la répétition des jugemens portés cent fois sur nos plus grands Poëtes, les critiques minutieuses qu'il se permet sur les Ouvrages de Corneille & de Rousseau, l'appareil qu'il s'efforce de donner à des vérités connues de tout le monde, l'air d'importance qu'il attache aux plus petits objets, les détails mesquins auxquels il s'abandonne dans sa Préface, sont des preuves très-certaines que son mérite n'étoit rien moins que formé & supérieur, & que son Panégy riste [comme nous l'avons remarqué ailleurs* à ce même sujet] est aussi partial & aussi peu modéré dans ses éloges, qu'il est injuste & outré dans ses critiques.
L’histoire expose de même qu’il n’est pas de nations formées d’une seule race. […] Que l’on considère que les sociétés primitives, en vertu des lois du progrès, tendront à devenir plus hétérogènes, à s’agréger à d’autres pour former une confédération supérieure d’États, à se diviser et à s’assembler en nations, en vastes empires. […] Ce manque d’universalité dans les goûts est d’autant plus accusé que les admirations sont plus vives, fait dont le contraire paraîtrait à première vue plus vraisemblable, et qui s’explique seulement si l’on considère l’admiration comme formée par une sorte d’adhésion, de dévouement, par la reconnaissance de soi-même en autrui. […] Le milieu, au point de vue littéraire, à Rome, à l’époque, mettons, du sac de Corinthe, était formé par une élite d’aristocrates et de parvenus. […] En effet, il est évident que ces milieux, loin d’avoir formé les artistes, puisqu’ils n’ont pas d’existence antérieure connue, ont été formés par eux, à l’occasion de la production de leurs œuvres.
de la Baumelle, encore chaque morceau étant isolé, on ne peut se former une juste idée de son éloquence. […] Il la faisoit toujours en deux parties, qui finissoient par des syllabes de même son, pour former une espêce de cadence. […] Il est certain que le Jésuite créa, pour ainsi dire, le vrai goût de la chaire, il forma ses rivaux ; il leur donna l’exemple de cette solidité, de cette force de raison qui caractérisent ses discours. […] Griffet, formé sur celui du P. […] On ne peut nier, que ce recueil ne renferme beaucoup d’instructions utiles ; mais on a prétendu qu’il étoit plus propre à favoriser la négligence des jeunes Prédicateurs qu’à les former à la véritable éloquence.
Pourquoi vit une nation ou un siècle, sinon pour les former ? […] Ils ne le sont pas, puisqu’on peut les former de tête et sans expérience. […] Laissons donc ces illusions psychologiques, et cherchons simplement, sous le nom d’effet et de cause, les phénomènes, qui forment des couples sans exception ni condition. […] The attribute which causes a person to be termed generous, is ascribed to him on the ground of states of his mind, and particulars of his conduct : both are phenomena ; the former are facts of internal consciousness, the latter, so far as distinct from the former, are physical facts, or perceptions of the senses. […] The former of these propositions is not a definition at all ; the latter is a mere nominal definition, or explanation of the use and application of a term.
Pourquoi vit une nation ou un siècle, sinon pour les former ? […] Ils ne le sont pas, puisqu’on peut les former de tête et sans expérience. […] Laissons donc ces illusions psychologiques, et cherchons simplement, sous le nom d’effet et de cause, les phénomènes qui forment des couples sans exception ni condition. […] The attribute which causes a person to be termed generous, is ascribed to him on the ground of states of his mind, and particulars of his conduct : both are phenomena ; the former are facts of internal consciousness, the latter, so far as distinct from the former, are physical facts, or perceptions of the senses. […] The former of these propositions is not a definition at all ; the latter is a mere nominal defition, or explanation of the use and application of a term.
La chanson à danser, comme aussi la chanson de toile, se composait essentiellement de couplets et de refrains : selon l’agencement de ces deux parties, la reprise plus ou moins fréquente du refrain, et la distribution des vers qu’il enferme, il se forma différents genres, rondets, ballettes, virelis 68, d’où sortiront à la fin les poèmes à forme fixe du xive siècle, rondeaux, ballades et virelais. Il se forma d’autres genres selon la forme choisie, et selon la nature des accessoires employés pour particulariser le thème général : la séparation des amants, avertis du lever du jour par l’alouette, et plus tard parle veilleur, constitua l’aube, la rencontre d’un chevalier et d’une bergère, qui souvent le refuse et parfois l’accepte, forma la pastourelle, dont les rythmes furent particulièrement vifs et gracieux. […] À la fin du xie siècle se forma l’art des troubadours70 : art subtil et savant, plus charmant que fort, plus personnel et plus passionné au début, plus large aussi et embrassant dans la variété de ses genres la diversité des objets de l’activité et des passions humaines, puis de plus en plus restreint au culte de la femme, à l’expression de l’amour, et dans l’amour de plus en plus affranchi des particularités du tempérament individuel, soustrait aux violences de la passion, aux inégalités du cœur, de plus en plus soumis à l’intelligence fine et raisonneuse, et encadrant dans des rythmes toujours divers des lieux communs toujours les mêmes. […] On ne saurait faire abstraction de l’opération intellectuelle, qui les a formés : c’est à elle que va l’estime ou l’admiration.
Le chyle, par suite d’une altération des sucs intestinaux, au lieu de se former comme à l’ordinaire, se confectionnait sans azote, et dès lors, au lieu de se trouver constitué par des matières animalisées, il était formé par un principe moins bien élaboré, qui était la matière sucrée impropre à entretenir complétement la nutrition. […] Quelques années plus tard, vers 1825, Tiedemann et Gmelin firent voir que dans la digestion de la fécule il se formait normalement du sucre dans l’intestin. […] Le système afférent est donc formé par la veine porte, et le système efférent par les veines sus-hépatiques. […] Les fibres musculaires sont surtout longitudinales, et elles forment des faisceaux rougeâtres, placés parallèlement les uns aux autres. […] Ce sont en effet ces mucosités formées dans le poumon qui contiennent la matière sucrée.
Il en est résulté un beau livre, accompagné de tout ce qui peut le faire valoir, plan, vues, gravures, et surtout formé et nourri à chaque page de cette excellente langue du xviie siècle, que Mme de Maintenon avait amenée à sa perfection et que parlaient les premières élèves de Saint-Cyr. […] Les détails de la composition de cette adorable pièce et des représentations qu’on en fit sont trop connus pour y revenir : ils forment un des plus gracieux épisodes, et le plus virginal assurément, de notre littérature dramatique. […] En présence de ce monde qu’elle connaissait si bien, ne croyez pas que Mme de Maintenon voulût former des plantes trop tendres, des femmes frêles, ingénument ignorantes et d’une morale de novices, elle avait plus que personne un sentiment profond de la réalité. […] Mme de Maintenon comptait beaucoup sur les récréations pour former agréablement les élèves, pour les avertir de leurs défauts et gagner leur confiance sans paraître la rechercher. […] Elle demande partout aux Dames qu’elle a formées le talent de la récréation autant que celui de la classe : « Rendez vos récréations gaies et libres ; on y viendra. » Louis XIV, à Saint-Cyr, apparaît plein de charme, de noblesse toujours, et parfois d’une certaine bonhomie qu’il n’eut que là.
Considérons ces deux monuments qui, comme deux colonnes solitaires, sont placés à la porte du temple du Génie, et en forment le simple péristyle. […] L’hébreu veut-il composer un verbe, il n’a besoin que de connaître les trois lettres radicales qui forment au singulier la troisième personne du prétérit. […] Ces deux conjugaisons hébraïque et grecque, l’une si simple et si courte, l’autre si composée et si longue, semblent porter l’empreinte de l’esprit et des mœurs des peuples qui les ont formées : la première retrace le langage concis du patriarche qui va seul visiter son voisin au puits du palmier ; la seconde rappelle la prolixe éloquence du Pélasge qui se présente à la porte de son hôte.
Mais les retours que les interlocuteurs font sur leurs sentimens et sur ceux des autres, les reflexions du poëte, les recits, les descriptions, en un mot tout ce qui n’est pas sentiment, veut autant que la nature du poëme et la vrai-semblance le permettent, nous être répresenté sous des images qui forment des tableaux dans notre imagination. […] Telles sont, par exemple, les figures que met en oeuvre le carme auteur du poëme de la Magdelaine, qui forment souvent des images grotesques, où le poëte ne devroit nous offrir que des images serieuses. […] Il peut tout au plus lui aider à se former.
Les livres se multiplièrent, & déjà leur nombre étoit assez considérable au seizième siècle, pour faire naître l’idée de former, du nom seul des Auteurs & du titre de leurs Ecrits, un ouvrage non moins utile qu’intéressant. […] Les dépouilles des vaincus, partagées entre les familles de l’Etat & le Trésor public, n’eurent pas plutôt formé un patrimoine aux particuliers, & assuré un fonds à la République, qu’il fallut des Loix. […] Il se forma particulièrement sur les Grecs qu’il aimoit, qu’il avoit étudiés & approfondis ; il semble sur-tout qu’il ait pris Eschyle & Sophocle pour modèles & pour maîtres. […] Ce n’est point au sein des richesses & de l’abondance que se forment les Héros & les grands hommes. […] Ils formèrent alors un Grec mêlé d’Hébraïsmes, qu’on appelle le langage Hellenistique :la version des Septante est en ce langage.
Il faut donc faire là comme en tant d’autres points de l’histoire : étudier, creuser, recourir aux sources, se former une opinion directe ; après quoi l’on se trouvera revenu, par bien des détours et avec des motifs plus approfondis, à ce que les contemporains judicieux et vifs avaient exprimé d’une manière plus légère. […] M. de La Chapelle (l’auteur des Amours de Catulle), qui était chargé de lui répondre, lui dit : « Il manque quelque chose à votre gloire et à celle de l’Académie : la fortune devait mettre en ma place Cicéron pour répondre à César. » — « Nous avons vu des lettres de vous, disait-il encore, que les Sarazin et les Voiture n’eussent pas désavouées. » Je n’ai pas vu de ces lettres, mais les dépêches de Villars, et les pièces dont les extraits forment le tissu de ses Mémoires, justifient pour nous suffisamment cette ambition qu’il eut de vouloir joindre à tant de palmes les titres de l’esprit6. […] Et certainement rien n’est plus propre à former un véritable homme de guerre qu’un métier qui apprend à attaquer hardiment, à se retirer avec ordre et avec sagesse, et enfin qui accoutume à voir souvent l’ennemi de fort près. […] Voir le grand Condé un jour de bataille l’épée à la main, qui de nous (chacun dans son art) n’a point formé tout haut ou tout bas un pareil vœu ? […] Son gouvernement de Fribourg lui donne occasion d’aller visiter les entrées des montagnes Noires : « Il ne les trouva pas d’un accès si difficile que l’on le publiait, et dès ce temps-là il prit des connaissances qui lui furent utiles dans la suite. » Le roi lui demande même des mémoires sur les projets de guerre qu’on peut former : Villars les lui remet en audience particulière ; le roi les lit et l’assure que c’est avec plaisir, et qu’il en comprend les conséquences et l’utilité : mais comme celui qui pensait n’était pas à portée d’être chargé de l’exécution, qu’il y avait trois maréchaux de France destinés au commandement de l’armée d’Allemagne, et que, d’ailleurs, le ministre de la guerre (c’était alors Barbesieux) était ennemi déclaré du marquis de Villars, ses idées ne furent point suivies.
Cependant son coup d’œil militaire se formait à un tel spectacle et acquérait toute son Rendue, toute sa sûreté et sa justesse. […] Cependant une nouvelle coalition s’était formée : l’armée de Boulogne faisant volte-face devenait soudainement, en quelques jours, et par une évolution savante, l’armée du Danube. […] Il faut être consommé pour les entendre ; et il est impossible de se former le jugement sur les historiens qui ne parlent de la guerre que selon qu’elle se peint à leur imagination… — Gustave-Adolphe a créé une méthode que ses disciples ont suivie, et tous ont fait de grandes choses. […] Cette forme définitive, Jomini ne l’a donnée à son Traité qu’à la quatrième édition en trois volumes (1847) ; mais la première édition, commencée en 1805, continuée en 1806 et les années suivantes, était compléte en 1809 ; elle renfermait tout ce qu’il y avait d’original y compris le premier volume des Campagnes des Français depuis 1792, que l’auteur a bien fait de détacher ensuite pour en former une série à part, tout historique, l’Histoire critique et militaire des guerres de la Révolution (15 vol.). […] Ainsi Jomini aurait voulu qu’au début de la campagne de 1756 Frédéric portât à la coalition formée contre lui un coup terrible ; qu’entre les trois lignes possibles d’opérations il choisît l’offensive, celle de Moravie, où une grande bataille gagnée lui eût permis de pousser jusqu’à Vienne.
. — On objectera que, comme ils sont notre œuvre, nous n’avons qu’à prendre conscience de nous-mêmes pour savoir ce que nous y avons mis et comment nous les avons formés. […] Toutes les fois que des éléments quelconques, en se combinant, dégagent, par le fait de leur combinaison, des phénomènes nouveaux, il faut bien concevoir que ces phénomènes sont situés, non dans les éléments, mais dans le tout formé par leur union. […] La dureté du bronze n’est ni dans le cuivre ni dans l’étain ni dans le plomb qui ont servi à le former et qui sont des corps mous ou flexibles ; elle est dans leur mélange. La fluidité de l’eau, ses propriétés alimentaires et autres ne sont pas dans les deux gaz dont elle est composée, mais dans la substance complexe qu’ils forment par leur association. […] L’individu les trouve toutes formées et il ne peut pas faire qu’elles ne soient pas ou qu’elles soient autrement qu’elles ne sont ; il est donc bien obligé d’en tenir compte et il lui est d’autant plus difficile (nous ne disons pas impossible) de les modifier que, à des degrés divers, elles participent de la suprématie matérielle et morale que la société a sur ses membres.
Telle est l’idée qu’ils pourraient se former de l’influence des hommes de lettres. […] Leurs méditations étaient continuelles, et la fréquentation du vulgaire ne faisait pas évaporer des réflexions à demi formées. […] Ainsi se formaient des corps de doctrine construits avec conséquence et méthode, et textuellement exposés. […] Leur vanité, leur amour du succès les empêchaient, plus encore que le genre de leurs études, de former une secte. […] Le travail, la réflexion, l’étude, ne peuvent, à eux seuls, former le véritable caractère du poète dramatique.
La société, telle qu’elle se formait alors, toute féodale et religieuse, demandait aux constructeurs d’élever force monastères, force églises, des palais aussi, des châteaux surtout et des remparts. […] Ils se formèrent sous le maître des maîtres, la pratique et l’expérience. […] Monteil avait ouvert la voie, dans son Histoire des Français des divers états aux cinq derniers siècles ; on avait alors pour source presque unique d’informations le musée des Petits-Augustins formé à si grand’peine par Alexandre Lenoir et trop brusquement dissipé, le musée de Cluny fondé par feu Dusommerard, et si augmenté depuis, si bien dirigé par son fils. […] Il s’est formé à la longue une compagnie privilégiée qui a fini par ne plus permettre qu’une seule coupe d’habit, quel que fût le corps à vêtir : cela évitait la difficulté de chercher des combinaisons nouvelles, et celle, non moins grande, d’étudier les diverses formes adoptées chez nous dans les siècles antérieurs et d’y recourir au besoin. » Voilà le grief. […] C’est ainsi que ce bon et digne homme, très classique, très entiché d’un beau de convention et fort médiocre en tant qu’artiste, a cependant réussi à former un artiste excellent et ne lui ressemblant en rien.
Distinguons maintenant quelques-uns des éléments de C qui pourront ou bien être tous discernables les uns des autres, ou former eux-mêmes un ou plusieurs continus. L’ensemble des éléments ainsi choisis arbitrairement parmi tous ceux de C formera ce que j’appellerai la ou les coupures. […] Un objet s’est déplacé devant mon œil, son image se formait d’abord au centre de la rétine ; elle se forme ensuite au bord ; la sensation ancienne m’était apportée par une fibre nerveuse aboutissant au centre de la rétine ; la sensation nouvelle m’est apportée par une autre fibre nerveuse partant du bord de la rétine ; ces deux sensations sont qualitativement différentes ; et sans cela comment pourrais-je les distinguer ? […] L’ensemble de ces sensations formera une sorte de coupure que j’appellerai C, et il est clair que cette coupure suffit pour diviser l’ensemble des sensations rouges possibles, et que si je prends deux sensations rouges affectant deux points situés de part et d’autre de la ligne, je ne pourrai passer de l’une de ces sensations à l’autre d’une manière continue sans passer à un certain moment par une sensation appartenant à la coupure. […] L’ensemble de ces sensations formera une nouvelle coupure C′.
Ainsi se forma, dans l’effroi de ce père farouche, dans l’ennui de cette vie vide, dans l’amitié de cette sœur mal équilibrée, ainsi se forma le Chateaubriand qui séduisit le monde : incapable de choisir une action limitée, mais aspirant à tous les modes de l’action en vue d’obtenir tous les modes de la sensation, fuyant le réel mesquin ou blessant pour s’enchanter de rêves grandioses et doucement amers, évitant surtout d’approfondir, d’analyser, ne demandant à la nature que des apparences où il pût loger ses fantaisies, timide, orgueilleux, mélancolique, éternellement inassouvi et las. […] Des sermons de Massillon même, il tirait des troubles et des plaisirs sensuels ; d’un amalgame de souvenirs littéraires et de visages entrevus, il forma son idée de la femme, un « fantôme d’amour » qu’il devait exprimer dans tous ses livres, chercher en toutes ses amies. […] Le duc d’Enghien est fusillé : il envoie sa démission le 20 mars 1804 ; et bientôt, ayant formé le dessein des Martyrs, il part pour l’Orient (1806), il visite la Grèce, Jérusalem, il revient par Carthage et Grenade ; il rentre à Paris le 5 juin 1807. […] Il nous paraît doué d’une singulière inaptitude à saisir les idées, à former des raisonnements. […] L’ennui, la mélancolie, tout le vague de l’âme de Chateaubriand, séparé de sa puissance pittoresque, formera le courant lamartinien665.À chaque instant, dans une lecture rapide, se notent les thèmes auxquels il ne manque que le vers de Lamartine.
Il est bien plus noble d’imiter ces Fondeurs habiles, qui, sachant conserver l’attitude & les principaux traits d’une Statue, forment un nouveau moule pour la rendre avec les beautés qu’elle avoit déjà, lui donner celles qui lui manquoient, & la corriger des défauts qui en rendoient l’exécution moins heureuse. […] Virgile a imité Homere ; Horace s’est formé sur Pindare & sur Anacréon ; Boileau avoit pris Horace pour modele, avant de tirer des chef-d’œuvres de son propre fonds.
Le temple, du reste, formait un ensemble merveilleusement imposant, dont le haram actuel 602, malgré sa beauté, peut à peine donner une idée. […] Opposés aux pharisiens, zélateurs laïques très exaltés, les prêtres étaient presque tous des sadducéens, c’est-à-dire des membres de cette aristocratie incrédule qui s’était formée autour du temple, vivait de l’autel, mais en voyait la vanité 616. […] Sous le nom de Boëthusim 618, se forma ainsi une nouvelle noblesse sacerdotale, très mondaine, très peu dévote, qui se fondit à peu près avec les Sadokites. […] C’était un esprit libéral et un homme du monde, ouvert aux études profanes, formé à la tolérance par son commerce avec la haute société 624.
Elle se propose, soit d’analyser les faits complexes, soit de montrer comment ils se forment par une synthèse de faits simples. […] Ces sensations, d’un caractère très général et les premières dans l’ordre chronologique, forment comme un genre à part ; 2° sensations organiques qui nous révèlent le bon ou le mauvais état de nos organes internes ; 3° goût ; 4° odorat ; 5° toucher ; 6° ouïe ; 7° vue. […] Les objets que nous appelons externes (un homme, une maison), sont des agrégats formés par association simultanée. […] Par l’accumulation des vérités particulières se forment les propositions générales : le raisonnement s’appelle alors induction.
Chacun porte un suffrage qu’il a formé sur sa propre expérience. Il l’a formé sur ce qu’il a senti en lisant, et l’on ne s’abuse point sur les veritez qui tombent sous le sentiment, comme on se trompe sur les veritez où l’on ne sçauroit aller que par voïe du raisonnement. […] Or, non-seulement nous admirons autant l’éneïde quand nous sommes des hommes faits, que nous l’admirions durant l’enfance, et quand l’autorité de ceux qui nous enseignoient pouvoit en imposer à une raison qui n’étoit pas encore formée ; mais notre admiration pour ce poëte va en augmentant à mesure que notre goût se perfectionne et que nos lumieres s’étendent. […] Enfin tous les peuples nouveaux qui se sont formez en Europe après la destruction de l’empire romain par les barbares, ont pris leur estime pour Virgile de la même maniere que les contemporains de ce poëte l’avoient prise.
Passant ensuite au concept de la multiplicité, nous avons vu que la construction d’un nombre exigeait d’abord l’intuition d’un milieu homogène, l’espace, où pussent s’aligner des termes distincts les uns des autres, et en second lieu un processus de pénétration et d’organisation, par lequel ces unités s’ajoutent dynamiquement et forment ce que nous avons appelé une multiplicité qualitative. […] Car si, par hasard, les moments de la durée réelle, aperçus par une conscience attentive, se pénétraient au lieu de se juxtaposer, et si ces moments formaient par rapport les uns aux autres une hétérogénéité au sein de laquelle l’idée de détermination nécessaire perdît toute espèce de signification, alors le moi saisi par la conscience serait une cause libre, nous nous connaîtrions absolument nous-mêmes, et d’autre part, précisément parce que cet absolu se mêle sans cesse aux phénomènes et, en s’imprégnant d’eux, les pénètre, ces phénomènes ne seraient pas aussi accessibles qu’on le prétend au raisonnement mathématique. […] Au lieu d’une vie intérieure dont les phases successives, chacune unique en son genre, sont incommensurables avec le langage, nous obtiendrons un moi recomposable artificiellement, et des états psychiques simples qui s’agrègent et se désagrègent comme font, pour former des mots, les lettres de l’alphabet. […] Nos états psychiques, en se détachant alors les uns des autres, se solidifieront ; entre nos idées ainsi cristallisées et nos mouvements extérieurs des associations stables se formeront ; et peu à peu, notre conscience imitant le processus par lequel la matière nerveuse obtient des actions réflexes, l’automatisme recouvrira la liberté 40.
Une légende se forma peu à peu. […] La religion qui l’a formée exige impérieusement qu’elle ne périsse pas. […] Les Lakiades formaient un γένος ; comme les Cornelii une gens. […] Plusieurs curies ou phratries se groupèrent et formèrent une tribu. […] La Grèce n’a jamais réussi à former un seul État ; ni les villes latines, ni les villes étrusques, ni les tribus samnites, n’ont jamais pu former un corps compact.
Car il ne faut pas oublier que les produits de ces croisements ont certainement dû y gagner une grande vigueur, de sorte qu’un croisement de temps à autre avec la souche mère aura eu sur la forme locale en train de se former des effets beaucoup plus puissants qu’on ne saurait le prévoir. […] Comme cette espèce possède un épais opercule calcaire, je l’enlevai, et, dès qu’elle en eut formé un autre membraneux, je l’immergeai encore dans l’eau de mer pendant quatorze jours, et cependant elle en revint de même et se remit à ramper. […] Le fait réellement surprenant qu’on observe dans les îles Galapagos, et à un moindre degré en quelques autres cas analogues, c’est que les nouvelles espèces formées dans chacune des diverses îles de cet archipel ne se soient pas rapidement répandues dans les autres. […] Mais nous nous formons souvent une opinion fort erronée, lorsque nous supposons que des espèces proche-alliées envahissent nécessairement le territoire l’une de l’autre dès que de libres communications s’établissent entre elles. […] De même, la disparition d’un continent, entièrement ou en majeure partie formé de plaines, s’explique plus aisément et peut s’accomplir plus rapidement que celle d’îlots montagneux.
Son gouvernement formé de royauté et d’aristocratie, sa religion moins pompeuse que la catholique, et plus brillante que la luthérienne, son militaire à la fois lourd et actif, sa littérature et ses arts, chez lui enfin le langage, les traits même, et jusqu’aux formes du corps, tout participe des deux sources dont il découle. […] Inquiets et volages dans le bonheur, constants et invincibles dans l’adversité, formés pour les arts, civilisés jusqu’à l’excès, durant le calme de l’État ; grossiers et sauvages dans les troubles politiques, flottants comme des vaisseaux sans lest au gré des passions ; à présent dans les cieux, l’instant d’après dans les abîmes enthousiastes et du bien et du mal, faisant le premier sans en exiger de reconnaissance, et le second sans en sentir de remords ; ne se souvenant ni de leurs crimes, ni de leurs vertus ; amants pusillanimes de la vie pendant la paix ; prodigues de leurs jours dans les batailles ; vains, railleurs, ambitieux, à la fois routiniers et novateurs, méprisant tout ce qui n’est pas eux ; individuellement les plus aimables des hommes, en corps les plus désagréables de tous ; charmants dans leur propre pays, insupportables chez l’étranger ; tour à tour plus doux, plus innocents que l’agneau, et plus impitoyables, plus féroces que le tigre : tels furent les Athéniens d’autrefois, et tels sont les Français d’aujourd’hui.
Avant notre histoire, quelle longue histoire animale et végétale, quelle succession de flores et de faunes, que de générations d’animaux marins pour former les terrains de sédiment, que de générations de plantes pour former les dépôts de houille, quels changements de climat pour chasser du pôle les grands pachydermes Enfin voici l’homme, le dernier venu, éclos comme un bourgeon terminal à la cime d’un grand arbre antique, pour y végéter pendant quelques saisons, mais destiné comme l’arbre à périr après quelques saisons, lorsque le refroidissement croissant et prévu qui a permis à l’arbre de vivre forcera l’arbre à mourir. […] Des deux anneaux qui forment le couple, le premier entraîne toujours après soi le second. […] C’est un des ressorts de la nature qui reprend toujours sa force ; c’est lui qui a formé le code des nations, c’est par lui qu’on révère la loi et les ministres de la loi dans le Tunquin et dans l’île Formose comme à Rome. » Ainsi il y a dans l’homme « un principe de raison », c’est-à-dire un « instinct de mécanique » qui lui suggère les idées utiles343, et un instinct de justice qui lui suggère les idées morales. […] Ainsi les sensations sont la substance de l’intelligence humaine comme de l’intelligence animale ; mais la première dépasse infiniment la seconde, en ceci que, par la création des signes, elle parvient à isoler, extraire et noter des fragments de ses sensations, c’est-à-dire à former, combiner et manier des notions générales Cela posé, nous pouvons vérifier toutes nos idées ; car nous pouvons toutes les refaire, et reconstruire avec réflexion ce que sans réflexion nous avions construit.
Serait-ce assez, pour former une armée, de changer en soldats des cadres vides, et d’augmenter à l’infini le nombre de ces soldats ? […] Vérifions de la même façon que la première cette seconde hypothèse formée de la même façon que la première, et nous arriverons à la même conclusion. […] Le corps vivant est formé de substances très-complexes, ayant pour élément principal la protéine, matière très-peu stable et capable de se décomposer très-aisément. […] Nous nous sommes tenus dans la région des faits ; nous n’avons évoqué aucun être métaphysique, nous n’avons songé qu’à former des groupes. […] Un groupe formé, nous en dégageons par abstraction quelque fait général.
Quoique peu convaincu de l’efficacité de ce mode d’étude, il obéit et fit un nombre très-considérable de croquis de cette espèce, dont le recueil formait cinq grands volumes in-folio. […] Que les débris tronqués de leurs statues forment un monument durable de la gloire du peuple et de leur avilissement. […] Quelques représentants républicains dits terroristes, à la tête desquels était Romme, formèrent une espèce de conspiration qu’ils firent exécuter par la populace. […] Ainsi réunis, ces savants formèrent une commission des monuments. […] Les Suisses du pape avaient formé le projet de mettre le feu à l’Académie et de massacrer les pensionnaires.
Santeuil étoit né Poëte, & ce fut sous le célebre Jésuite Cossart qu’il acheva de se former le goût. […] On n’a qu’à lire ses Lettres, pour se former l’idée la plus avantageuse de sa Religion & de sa piété.
Il ne dut ses progrès dans la Poésie qu’à l’étude des Auteurs Grecs & Latins, qu’il commença par traduire & apprendre par cœur, afin de se former le goût en se nourrissant de leur substance. D’un autre côté son attention à ne choisir pour modeles que nos meilleurs Ecrivains, forma dans lui cette diction pure, élégante, correcte, harmonieuse, qui le rend le plus exact & le plus agréable de tous ceux qui ont écrit dans notre Langue. […] C’est ainsi que les vrais Grands Hommes ont la gloire de se former des successeurs, au lieu que tant de louanges prodiguées si mal à propos aux jeunes gens qui commencent, & dont on veut se faire des Panégyristes, ne sont propres qu’à produire des hommes vains & médiocres.
Ses Ouvrages forment une époque dans le développement des connoissances de l’esprit humain. […] Est-ce sur de pareils sentimens qu’ont pris soin de se former ceux qui, avec des lumieres bien plus foibles, prétendent courir, peut-être avec plus de succès, la même carriere ?
Le récitatif de l’historien, les cris de la populace juive, la noblesse des réponses de Jésus, forment un drame pathétique. […] Au reste, en ne parlant que des chants grecs de l’Église, on sent que nous n’employons pas tous nos moyens, puisque nous pourrions montrer les Ambroise, les Damase, les Léon, les Grégoire, travaillant eux-mêmes au rétablissement de l’art musical ; nous pourrions citer ces chefs-d’œuvre de la musique moderne, composés pour les fêtes chrétiennes, et tous ces grands maîtres enfin, les Vinci, les Leo, les Hasse, les Galuppi, les Durante, élevés, formés, ou protégés dans les oratoires de Venise, de Naples, de Rome, et à la cour des souverains pontifes.
Un corps de savants qui se forme de lui-même, ainsi que la société des hommes s’est formée, celle-ci pour lutter avec plus d’avantage contre la nature, celui-là par le même instinct ou le même besoin : la supériorité avouée des efforts réunis contre l’ignorance. […] Appeler des étrangers pour former une académie de savants, c’est négliger la culture de sa terre et acheter des grains chez ses voisins.
Il est aussi impossible de faire de l’or par un moyen diférent de celui dont la nature se sert pour former l’or, qu’il est impossible de faire un grain de blé d’une manière diférente de celle qu’elle emploie pour produire le blé. […] Il n’y a point dans la nature une matière générale dont l’art puisse faire tout ce qu’il veut : c’est ainsi qu’il n’y a point une blancheur générale d’où l’on puisse former des objets blancs. […] Si l’on veut former le gout des jeunes gens, on doit leur faire remarquer les défauts, aussi bien que les beautés des auteurs qu’on leur fait lire. […] L’idée de cet original et l’aplication qu’on en fait à un sujet d’un ordre moins sérieux, forment dans l’imagination un contraste qui la surprend, et c’est en cela que consiste la plaisanterie de la parodie. […] Je suis persuadé que c’est se conduire avec beaucoup plus de méthode, de comencer par mètre, pour ainsi dire, devant les yeux quelques-unes des pensées particulières qui ont doné lieu de former chacune de ces idées abstraites.
Les yeux ne se sont pas formés pour contempler, mais pour avertir d’un danger et pour faciliter la prise d’une proie ; on ne peut même pas dire qu’ils se soient formés pour voir, mais plutôt pour pressentir la peine ou la jouissance, et pour agir. […] Par exemple, du côté tourné vers la lumière, il pourra se former un organe spécialement sensible aux ondes lumineuses. […] Ainsi se formerait dans la lyre une proportion et une harmonie représentatives des proportions et des harmonies du dehors. […] Aujourd’hui nous croyons aux entrées ex abrupto de sensations nouvelles, parce que nous naissons avec des organes tout formés, avec un cerveau garni de cinq fenêtres sur le dehors, dont on n’a plus qu’à ouvrir les volets. […] Quoi qu’il en soit du passage à l’objectif, la sensation ne peut être formée d’éléments inconscients, même combinés avec des éléments conscients, ni consister dans de simples rapports.
C’était l’odeur de quelques maïs dorés qui formaient le plancher supérieur de la chambre et de quelques corbeilles de raisins aussi qui étaient sur la couverture des deux lits de la double alcôve. […] Ce paysage était formé, d’abord, par les trois mamelons de Fuissé, Solutré et Vergisson qui s’élèvent comme des coins dans le ciel. […] Ces trois plateaux élevés qui les séparent, forment trois vallées hautes qui forcent à lever la tête pour les regarder ; on s’imagine voir les flots de la Méditerranée. […] Un clocher gris aussi formait une espèce de pyramide au milieu d’un groupe de maisonnettes et d’écuries. […] Les sapins et les hêtres qui croissent à d’immenses profondeurs dans le lit d’un torrent s’élèvent et forment des berceaux sombres dans les airs comme pour chercher le soleil.
Il disait à Bourdoise : « Après avoir travaillé pendant dix-sept ans à former seulement trois prêtres tels que je les souhaitais pour m’aider à réformer le clergé de mon diocèse, je n’ai réussi à en former qu’un seul et demi. » Alors apparaissent les hommes d’une piété grave et raisonnable que je nommais tout à l’heure. Par des congrégations d’un type nouveau, distinct des anciennes règles monacales et imité en quelques points des jésuites, ils créent le séminaire, c’est-à-dire la pépinière soigneusement murée où se forment les jeunes clercs. […] Ces saints personnages réunirent leurs prêtres en communautés et ces communautés devinrent des écoles de cléricature, des espèces de pensions où se formèrent à la piété des jeunes gens qui se préparaient à l’état ecclésiastique. […] Sa jolie petite figure, maigre et fine, son corps fluet, remplissant mal les plis de sa soutane, sa propreté raffinée, fruit d’une éducation datant de l’enfance, le creux de ses tempes se dessinant agréablement sous la petite calotte de soie flottante qu’il portait toujours, formaient un ensemble très distingué. […] Dans son cours, son vieux manteau et les manches de sa soutane servaient à essuyer les instruments et en général à tous les usages du torchon ; sa calotte, rembourrée pour préserver son vieux crâne des névralgies, formait autour de sa tête un bourrelet hideux.
« Quand la terre forma les espèces animales, plusieurs périrent par plusieurs causes à développer. […] Ils dissèquent et étalent toutes les moindres de nos pensées, comme un prisme fait les couleurs. » Mais les beautés d’idées ici se multiplient ; le moraliste profond se déclare et se termine souvent en poëte : « Les mêmes passions générales forment la constitution générale des hommes. […] qu’avez-vous fait des maximes austères De ce berger sacré que Minerve autrefois Daignait former en songe à vous donner des lois ? […] Les perles de la poésie Forment, sous leurs doigts d’ambroisie, D’un collier le brillant contour. […] Voilà pour les préliminaires ; mais le principal, ce qui devrait former le corps même de l’édition désirée, ce qui, par la difficulté d’exécution, la fera, je le crains, longtemps attendre, je veux dire le commentaire courant qui y serait nécessaire, l’indication complète des diverses et multiples imitations, qui donc l’exécutera ?
Ainsi fut accompli, pour la seconde fois, le souhait que John Michell formait dès 1787. […] océan sans rivage et sans fond, qui, dans ton flux et reflux éternel, laisse écouler, sans jamais t’épuiser, ces myriades de mondes grands ou petits les uns vis-à-vis des autres, mais qui, par rapport à toi, sont tous également grands, — depuis le soleil qui arpente d’un pas l’incommensurable étendue, jusqu’aux animalcules impalpables dont l’univers est composé, qu’on ne distingue qu’au télescope, et dont les corps organisés et couchés par la mort dans leur sépulcre commun ne formeraient pas l’ongle du doigt d’un enfant avec deux cent millions de leurs cadavres en poussière ! […] Qu’en ajoutant un poids de plus à ces milliers de poids, à ces univers, on arriverait à les former comme à les comprendre ? Une année ou un jour de plus ajouté et surajouté à leur durée formerait leur durée éternelle, car l’éternité n’est qu’un jour éternellement ajouté à un jour. […] Les vides compris entre les contreforts, qui sont généralement des cloisons ligneuses, forment des chambres spacieuses que l’on peut comparer aux stalles d’une écurie ; quelques-unes sont assez grandes pour contenir une demi-douzaine de personnes.
À cette fécondité contribuent trois ou quatre générations d’écrivains : et l’on aperçoit parmi les jeunes génies qui surgissent des esprits mûrs, lentement formés et fortifiés dans les troubles efforts de l’âge précédent. On peut partager le siècle en quatre ou cinq générations : la première, de Richelieu (1583) à Corneille (1606), a disparu, ou vieilli en 1660 ; la suivante, de La Rochefoucauld (1613) à Bossuet (1627), a sa pleine vigueur, alors que la troisième, celle de Boileau, de Louis XIV et de Racine (1636-1639), entre seulement dans la vie, dans l’activité indépendante et consciente ; la quatrième, de La Bruyère (1643) à Regnard (1633), ne s’avancera au premier plan que dans les dernières années du siècle, tandis que la suivante, avec La Motte (1672), formée avant 1713, inaugurera en sa maturité le xviiie siècle intellectuel auquel les Montesquieu (1689) et les Voltaire ( 169 î) appartiendront tout entiers, gardant seulement en leurs esprits quelques reflets de ce xviie siècle, dont les dernières lueurs auront éclairé leur enfance. […] Pour étudier le grand ensemble que forment les œuvres de la seconde partie du xviie siècle, il conviendra de porter d’abord notre attention sur celles qui, appartenant plutôt à des mondains qu’à des artistes, nous font ainsi connaître à la fois le milieu où se formèrent et le public auquel s’adressèrent les artistes. […] Il a une propriété, une vivacité singulières d’expression : plus de corps et de couleur que de délicate élégance, de la vigueur même dans la finesse ; de longues périodes chargées d’incidentes et de participes, un large emploi des pronoms, souvent bien éloignés du nom qu’ils ont charge de suggérer, des archaïsmes, de libres tournures : à ces dernières marques surtout, on reconnaît un style formé avant les Provinciales. […] Elle écrit cette langue riche, pittoresque et savoureuse, que parleront tous ceux qui auront formé leur esprit dans la première moitié du siècle, et sans quitter jamais le simple ton de la causerie, elle y mêlera les mots puissants, qui évoquent les grandes idées ou les visions saisissantes.
Sous la grande nappe sillonnée de terribles remous, des milliers de petites îles de corail se rejoignent, se soudent et c’est une terre nouvelle en train de se former. […] On dirait que tous les pauvres de toutes les rues et de toutes les routes, que tous les misérables se sont formés en cortège ; mais leur moral est si beau que nous avons toujours envie de les acclamer… … Je fais mon apprentissage de sergent. […] Quel besoin de former, à travers le temps et l’espace, une unité indissoluble avec les êtres capables de construire ! […] Jean Rival se connaît comme un chef à qui il appartient de former l’outil de la victoire, en créant chez ses hommes un état d’esprit. […] Chez Rival et chez tous ses frères n’apparaît jamais aucun souci de la gloire : nul désir que de bien faire ; ils exhalent leur parfum intérieur, sans aucun souci de l’effet à produire, mais ils forment la parure de la France et nous les mettons en vue, non pour eux, que l’on ne peut payer, mais pour la gloire de la France.
Un nombre considérable d’individus peuvent vivre ensemble sur un même territoire, et agir de façons très diverses les uns sur les autres, sans former, forcément, une société unifiée. […] Lavisse 189, est un être politique organisé, et il n’y aura pas d’États à proprement parler (de grands États au moins) qu’à la fin du moyen âge. — Une nation est une personne formée, consciente et responsable ; il n’y aura pas de véritable nation sur le continent avant notre temps. » Ainsi États et nations n’apparaissent que dans certains temps et dans certains pays ; et il est facile de voir que ce sont aussi les temps et les pays où l’idée de l’égalité s’est montrée. […] Les grandes villes, foyers désignés des idées démocratiques, y sont, nous l’avons vu, plus rares que dans le reste de l’Europe. — Il est vrai que, sous nos yeux, de jour en jour, des centres populeux se forment jusque dans l’Empire des tsars ; toutes les industries russes, et en particulier celle des transports, se perfectionnent peu à peu207. […] On oublie, au profit de l’autorité centrale, les clauses de ce traité entre États qui formait la constitution américaine. […] Si donc la constitution des États modernes devait y entraîner la suppression de toute espèce d’association partielle, il est vraisemblable qu’ils formeraient en effet des sociétés exclusives et oppressives.
Les œuvres fines, nuancées, complexes, où l’on apprend à corriger les vérités absolues par des vérités contraires, qui forment le sens du relatif, si rare chez tous les hommes, devront venir ensuite. […] Et puis il n’est pas question de reformer les pensées d’autrui : il est question de former les vôtres, et dans l’étoffe commune il faut tailler à votre mesure. […] Dans cette continuelle opposition, votre personnalité se formera, se reconnaîtra, votre esprit s’habituera à tenir tête aux pensées d’autrui, à chercher les raisons de ses jugements, à débrouiller la masse confuse de ses sentiments, à secouer le joug de la chose écrite. […] Vous vous formerez ainsi un jugement personnel sur le Misanthrope, vous accorderez à Rousseau qu’Alceste est ridicule avec sa vertu, et par sa vertu.
Ce nom, ce serment, les souvenirs de persécution religieuse attachés à ces circonstances avaient tait sur l’âme du jeune Agrippa une de ces impressions qui dans les familles se transmettent de général ton en génération, forment dans l’esprit des enfants qui se succèdent une idée fixe autour de laquelle les premières notions et les premiers sentiments de morale se rangent et s’impriment en caractères ineffaçables75. […] L’orgueil étant désintéressé, elle se laissa aller à ce que pensait et pratiquait le couvent, soit par cette disposition à sympathiser avec des opinions générales, disposition qui formait un des traits de son caractère, soit par cette ambition d’estime, d’affection, de considération qui lui était propre aussi, et qui commençait à se développer en elle. […] Ce fut alors que le désir de la conserver et de retendre devint en elle une passion qui a formé le trait saillant de son caractère. […] Ce n’est pas tout : plusieurs lettres sont décomposées, et les retranchements qu’on leur a fait subir forment des additions à des lettres d’un autre temps, qui se rapportent à de faits d’une autre nature.
Que dirait-on d’un architecte qui ne sentirait aucune différence entre un grand palais dont tous les bâtiments seraient proportionnés pour former un tout dans le même dessein, et un amas confus de petits édifices, qui ne feraient point un vrai but, quoiqu’ils fussent les uns auprès des autres ? […] « J’aimerais autant qu’on me dît que je me suis servi de mots anciens ; et comme si les mêmes pensées ne formaient pas un autre corps de discours par une disposition différente, aussi bien que les mêmes mots forment d’autres pensées par leur différente disposition. » Ainsi pensait Pascal, et tout son siècle avec lui.
Ainsi se forma une première société que j’appellerai monastique dans le sens de l’étymologie, parce qu’elle était en effet composée de souverains solitaires sous le gouvernement d’un être très bon et très puissant, optimus maximus. […] Lorsque par la suite des temps, l’intelligence des plébéiens se développa, ils revinrent de l’opinion qu’ils s’étaient formée de l’héroïsme et de la noblesse, et comprirent qu’ils étaient hommes aussi bien que les nobles. […] Si donc, comme le dit Aristote, de bonnes lois sont des volontés sans passion, en d’autres termes, des volontés dignes du sage, du héros de la morale qui commande aux passions, c’est dans les républiques populaires que naquit la philosophie ; la nature même de ces républiques conduisait la philosophie à former le sage, et dans ce but à chercher la vérité.