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1013. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — III — Toujours Vauvenargues et Mirabeau — De l’ambition. — De la rigidité » pp. 38-55

Elle n’est pas également sensible à tous les hommes ; il faut qu’elle trouve certaines dispositions dans leur cœur : la musique et la poésie ne flattent pas tous les goûts, ni la gloire ; mais cela n’empêche pas qu’elle ne soit réelle… Je crains que le goût de la littérature n’arrête trop vos pensées. […] Ce jeune homme, et très jeune homme au temps où il servait avec Vauvenargues, avait le trait caractéristique de sa famille : « Je lui trouve dans l’humeur quelque chose des Riquetti, qui n’est point conciliant. » Vauvenargues, qui jugeait ainsi le petit chevalier, essayait de lui insinuer un peu de douceur, de politesse de ton et de mœurs, de l’assouplir. « Quant au genre de persuasion que vous soufflez au chevalier, lui disait Mirabeau, vous ne réussirez pas, s’il est du même sang que nous ; votre système est d’arriver aux bonnes fins par la souplesse ; le mien est d’arriver au bien, droit devant moi, ou par la violence ; de fondre sur le mal décidé, de l’épouvanter, et enfin de m’éloigner de ce qui n’a la force d’être ni l’un ni l’autre. » Ce système à outrance et que Vauvenargues a décrit dans un de ses caractères intitulé Masis (évidemment d’après Mirabeau), est le contraire de sa science à lui, de sa tactique dans le maniement des esprits, qui va à les gagner par où ils y prêtent, et à en tirer le parti le meilleur : Où Masis a vu de mauvaises qualités, jamais il ne veut en reconnaître d’estimables ; ce mélange de faiblesse et de force, de grandeur et de petitesse, si naturel aux hommes, ne l’arrête pas ; il ne sait rien concilier, et l’humanité, cette belle vertu, qui pardonne tout parce qu’elle voit tout en grand, n’est pas la sienne… Je veux une humeur plus commode et plus traitable, un homme humain, qui ne prétendant point à être meilleur que les autres hommes, s’étonne et s’afflige de les trouver plus fous encore ou plus faibles que lui ; qui connaît leur malice, mais qui la souffre ; qui sait encore aimer un ami ingrat ou une maîtresse infidèle ; à qui, enfin, il en coûte moins de supporter les vices que de craindre ou de haïr ses semblables, et de troubler le repos du monde par d’injustes et inutiles sévérités.

1014. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — II » pp. 18-34

On dirait, tant elles sont étrangement posées et inclinées vers la chute, qu’un géant s’est amusé un jour à les faire rouler du haut de la côte, et qu’elles se sont arrêtées là où elles ont rencontré un obstacle, les unes à quelques pas du point de départ, les autres à mi-côte ; mais ces obstacles semblent les avoir plutôt suspendues qu’arrêtées dans leur course, car elles paraissent toujours prêtes à rouler.

1015. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Charles-Quint après son abdication, au monastère de Saint-Just »

Quand tout fut disposé ou à peu près, Charles, qui s’était arrêté à Valladolid, franchit la chaîne de l’Estramadure. […] Quand il croit voir des fautes, des lenteurs préjudiciables dans la conduite de quelque affaire importante, il ne se contient plus et donne des avis : il se montre surtout pressant dans l’affaire des Luthériens qu’on a découverts et arrêtés dans la Vieille-Castille, et lui qui a éprouvé les inconvénients de n’avoir pas étouffé en Allemagne le Luthéranisme au berceau, il n’a de cesse qu’on ne fasse leur procès aux hérétiques d’Espagne et qu’on ne les brûle.

1016. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Les quatre moments religieux au XIXe siècle, (suite et fin.) »

Émery86, de ce prêtre si vénéré et si sage, de ce second fondateur de Saint-Sulpice, et j’y ai vu à quel point, malgré toute sa tolérance personnelle et ses ménagements envers les hommes, il était arrêté sur les principes, penchant sans contre-poids du côté de Rome, et combien ce qu’on appelait autrefois gallicanisme était absent ou infiniment peu représenté dès l’origine dans cette reconstitution du Clergé de France. […] Mais que chez tous du moins, chez ceux qui survivent, toutes les fois que la pensée se reporte en arrière, il y ait quelque chose qui arrête sur le penchant de l’entière rupture et qui tempère les luttes présentes.

1017. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Le maréchal de Villars. »

Selon Montesquiou40 qui, non content de tirer tout de son côté, accuse Villars d’incertitude pendant l’opération même, ce maréchal aurait eu l’idée de s’arrêter lorsqu’il apprit de M. de Vieuxpont, à cinq heures du matin, qu’on ne pouvait être à l’Escaut avant huit heures : « Comme il était grand jour, M. le maréchal de Villars crut que, le prince Eugène pouvant voir notre marche, c’était un obstacle invincible à notre entreprise ; en conséquence, il ordonna aux officiers du campement d’arrêter l’armée et de la faire camper où elle se trouvait ; ce qu’ayant appris, j’allai joindre M. le maréchal de Villars, à qui je dis que l’armée des ennemis ne pouvant marcher à Denain qu’à notre vue par la hauteur de Quérénaing, sur laquelle on ne voyait personne, je le priais de vouloir bien toujours marcher sur l’Escaut ; qu’y étant arrivés nous verrions si les ennemis marchaient à Denain ; que si on apercevait leur armée marcher et être à portée de secourir ce poste, nous serions toujours les maîtres de ne point passer l’Escaut et de camper, moyennant quoi il n’y avait nul risque à courir.

1018. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Le mariage du duc Pompée : par M. le comte d’Alton-Shée »

Herman, en présence du baron Fritz, ce beau-frère entiché de sa noblesse et des vieux préjugés germaniques, maintient lui-même le rôle du noble moderne converti aux idées du siècle : il répond à l’accusation banale d’être un déserteur de sa caste et de n’avoir ni foi ni principes : « Croyez plutôt, dit-il en parlant des Biron, des Custine, des La Fayette, qu’il a fallu une foi bien ferme à ces déserteurs qui, dans la solitude de leur conscience, se sont voués à la haine de ceux qu’ils abandonnaient, à la méfiance de ceux qu’ils voulaient servir, sans autre espoir que la justice tardive de la postérité. » Mais ce commencement de discussion entre Herman et Fritz est arrêté à temps par un-geste d’Emma qui n’entend pas que ses deux adorateurs, comme elle dit, combattent sur ce terrain, et qui les rappelle à l’ordre. […] Noirmont cependant a tout vu et tout deviné ; avant de laisser son ami, il le gronde et lui fait honte de toutes ces duplicités ; et quand Herman s’étonne de cette sévérité de langage à laquelle un tel mentor ne l’avait pas accoutumé jusque-là, Noirmont lui explique ses principes, car il en a, et qui se réduisent presque à un seul sentiment bien arrêté, la haine de l’hypocrisie : « Il est vrai, lui dit-il, je suis en guerre ouverte avec les salons ; je scandalise un monde corrompu à qui je refuse la satisfaction des apparences.

1019. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite et fin.) »

La nuit du 4 août racontée par elle est d’une vivacité pittoresque ; quelques jours après, elle écrit ; « Samedi au soir, il a été décidé que l’on porterait au roi l’arrêté du 4 août, pour qu’il y campât sa sanction. » Les journées des 5 et 6 octobre sous sa plume se dessinent en traits d’une exacte et parlante réalité : ce qu’elles ont d’atroce y est montré, mais sans rien de chargé ; ce qu’il y a eu de bien s’y entremêle ; tout se succède et court. […] Telle était Marie-Antoinette dans les mois qui précédèrent la fuite de Varennes et lorsque le projet de cette évasion était déjà arrêté en idée.

1020. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat. »

Je vous dirai cependant que j’espère que vous réussirez mieux au voyage que vous ferez ensuite, que vous n’avez fait au précédent. » Pour mieux déguiser son arrivée à Pignerol, Catinat en approchant, avertit M. de Saint-Mars, qui en était gouverneur, de le faire arrêter la nuit par la compagnie franche de la place et conduire incontinent à la citadelle. […] Je m’y fais appeler Guibert, et j’y suis comme ingénieur qui a été arrêté par ordre du roi, parce que je me retirais avec quantité de plans des places de la frontière de Flandre.

1021. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Mlle Eugénie de Guérin et madame de Gasparin, (Suite et fin.) »

Sur la montagne, la verdoyante ramée des hêtres triomphait si bien du feuillage noir des sapins, elle s’étendait si lustrée, si criante, elle montait si vaillamment jusqu’à la région des pâturages, et ceux-ci commençaient à verdoyer si ferme, qu’à part la coupole de neige qui couvrait le fin sommet, on ne voyait que ce vert terrible qui semblait refouler la pensée en soi-même. » En allant chez la vieille, il y a un endroit plus élevé, un col à passer, et, si l’on s’y arrête pour jouir du spectacle, on voit en bas cette vallée se déroulant au plus loin dans sa moire verte et « d’un vert criard », mais de l’autre côté, du côté du village, au-dessus et par-delà, on voit la montagne et ses dernières pentes, mouchetées de sapins, semées de hêtres et offrant aussi des places plus riantes, car la saison y est retardée, et quand le vallon est en mai, on n’est là-haut qu’en avril : « Les vergers croissaient parmi, et comme j’avais monté pour arriver au col, je retrouvais fleuris les arbres qui, dans le vallon, avaient passé fleur. » Voilà des expressions charmantes et neuves, nées de l’observation même. […] L’autre s’avoisine tout à fait ; elle est simple et grave ; il ne reste pas, on le dirait, une parcelle de sang dans les fibres de sa peau mate ; ses grands yeux s’arrêtent sur nous, amortis par le verre de ses lunettes ; ses manches, larges et pendantes, couvrent presque entièrement la main ; elle parle d’une voix égale, et nous montre, l’un après l’autre, par les trous de ta grille, les souris en pelote, les porte-montre brodés de perles, les coques d’œufs remplies de fleurs microscopiques, les coquilles d’escargots avec des saintes dedans, ces mille prodiges d’adresse et de laideur par quoi de pauvres recluses trompent leur ennui.

1022. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre (suite et fin) »

Il s’agissait de montrer à l’Europe, dans la guerre inégale où l’on s’était engagé sur le pied d’auxiliaires et sans volonté ni plan arrêté au début, que la France avait décidément un roi, et de porter Louis XV à faire comme ses glorieux et redoutés prédécesseurs, à paraître à la tête de ses armées. […] Les princes et les officiers s’étaient fort vaillamment conduits, mais le régiment des Gardes avait lâché pied tout d’abord, et, aux premières décharges de l’ennemi, s’était jeté dans le Mein sans que rien pût l’arrêter.

1023. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Saint-Simon considéré comme historien de Louis XIV, par M. A. Chéruel »

Oui, j’en conviens, on ne peut méconnaître que, malgré ses taches et ses nuages, le soleil luit… On ne saurait méconnaître que, malgré quantité de tragédies détestables et ennuyeuses, Corneille ne soit sublime quelquefois… On ne saurait méconnaître que, malgré des fadeurs, des concessions au goût du jour, Racine ne soit souverainement pathétique et touchant…, que Molière… Je m’arrête. […] Au sortir, les princes et princesses allèrent à une grande collation qui leur avait été préparée à l’Hôtel de ville ; elle fut suivie d’un grand bal et d’un beau feu d’artifice qui finit toute cette fête, qui n’aura, je crois, de longtemps sa pareille. » C’est au sortir de cette cérémonie qu’un des ancêtres de Mirabeau qui servait dans le régiment des gardes, passant sur le Pont-Neuf à la tête de ses hommes, fit arrêter devant la statue d’Henri IV et saluant le premier de la pique, il s’écria : « Mes amis, saluons celui-ci, il en vaut bien un autre ! 

1024. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE SOUZA » pp. 42-61

A force d’or et de diamants, prodigués par la famille et les amis du dehors à l’un des geôliers, il était parvenu à s’évader et vivait dans une cachette sûre ; mais quelqu’un raconta devant lui que son avocat venait d’être arrêté comme soupçonné de lui donner asile : M. de Flahaut, pour justifier l’innocent, quitta sa retraite dès six heures du matin, et se rendit à la Commune où il se dénonça lui-même ; il fut peu de jours après guillotiné. […] Ne possédant rien à eux, ils apprirent, comme le pauvre, à faire leur délassement d’une promenade, leur récompense d’un beau jour, enfin à jouir des biens accordés à tous. » Mme de Souza d’ordinaire s’arrête peu à décrire la nature ; si elle le fait ici avec plus de complaisance, c’est qu’un souvenir profond et consolateur s’y est mêlé.

1025. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « CHRISTEL » pp. 515-533

Un livre alors tout nouveau, et qu’il leur avait apporté, enchanta fréquemment les heures : c’étaient les Méditations poétiques ; plus d’une fois, en lisant ces élégies d’un deuil si mélodieux, il dut s’arrêter par le trop d’émotions et comme sous l’éclair soudain d’une allusion douloureuse. […] Un soir qu’on avait plus longuement causé de guérison et d’espérance, qu’on avait projeté pour Christel des promenades à cheval au printemps, qu’on s’était promis de se diriger sur les domaines d’Hervé, vers un bois surtout de hêtres séculaires qu’avaient habité les fées de son enfance, et dont il aimait à vanter la royale beauté, il crut le moment propice, et, après quelques mots sur sa mère, à laquelle il avait parlé, disait-il, de cette visite désirée : « Il est temps, ajouta-t-il d’un ton marqué, qu’elle connaisse celle qui lui vient. » Christel tressaillit et l’arrêta ; ce fut un simple geste, un signe de tête accompagné d’un coup d’œil au ciel, le tout si résigné, si reconnaissant, si négatif à la fois, avec un sourire si pâli, et dans un sentiment si profond et si manifeste du néant de pareils projets à l’égard d’une malade comme elle, que la mère navrée ne put qu’échanger avec Hervé un lent regard noyé de larmes.

1026. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre III. Comédie et drame »

Mais il ne produit pas une œuvre où il y ait lieu de s’arrêter aujourd’hui. […] Il y eut encore certaines tentatives intéressantes, sur lesquelles je ne m’arrêterai pas, parce qu’elles ont trop complètement avorté.

1027. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Alphonse Daudet, l’Immortel. »

Je ne veux plus citer, car où m’arrêterais-je ? […] Et notez que l’effort s’arrête toujours au point extrême par-delà lequel il s’en irait tomber dans le précieux ou dans le charabia impressionniste.

1028. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Discours sur l’histoire de la révolution d’Angleterre, par M. Guizot (1850) » pp. 311-331

Il n’est pas d’esprit à qui l’on puisse moins appliquer ce mot de coquette dont usait Napoléon ; c’est l’esprit qui, en tout, s’arrête le moins à la forme, à la façon. […] Je m’arrête en le louant.

1029. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Charles Perrault. (Les Contes des fées, édition illustrée.) » pp. 255-274

C’est sur ce dernier point qu’on pourrait surtout le prendre et l’arrêter net. […] Il faut s’arrêter là avec Perrault, car c’est sa gloire.

1030. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre deuxième. La force d’association des idées »

Tout mouvement produit tend à se dépenser d’une manière ou d’une autre ; il ne peut donc s’arrêter dans un groupe de cellules cérébrales, il passe nécessairement aux groupes voisins pour retentir de proche en proche jusqu’à des groupes plus éloignés. […] Cela tient à ce que, la première fois que j’ai vu cette personne, j’ai vu en même temps la rue de Lyon, et tel magasin devant lequel j’étais arrêté, tel jour, à telle heure.

1031. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1880 » pp. 100-128

Aujourd’hui il est entré chez moi, en disant : « C’est curieux maintenant, quand une affaire est faite avec un banquier, ce n’est pas fait avec son argent, mais avec l’argent d’un autre, qu’il se met à chercher… » Et le voilà, sauf le temps d’un rapide dîner, jusqu’à onze heures, toujours en marche, parlant de la puissance intelligentielle des gens qui ne savent ni lire ni écrire ; parlant de la virtualité des révolutionnaires espagnols, complètement détruite par les cabinets des restaurants de Paris, et qu’il compare aux sauvages, ne prenant des civilisés que l’eau-de-vie ; parlant du travail idéologiste des socialistes, complètement arrêté en 1848, par la bêtise des radicaux, dont toute la politique est rapetissée à manger du prêtre, etc., etc. Il s’arrête un moment, et avec un petit rire sarcastique, qui a l’air de moquer tout ce qui sort d’original de sa bouche, il s’écrie : « Oui cela, je veux le dire dans un livre, qui, sur la constitution des sociétés, serait, toute distance gardée, ce qu’est le livre de Laplace, sur la constitution du ciel ! 

1032. (1767) Salon de 1767 « Adressé à mon ami Mr Grimm » pp. 52-65

L’homme habile à qui l’homme riche demande un morceau qu’il puisse laisser à son enfant, à son héritier, comme un effet prétieux, ne sera plus arrêté par mon jugement, par le vôtre, par le respect qu’il se portera à lui-même, par la crainte de perdre sa réputation : ce n’est plus pour la nation, c’est pour un particulier qu’il travaillera, et vous n’en obtiendrez qu’un ouvrage médiocre, et de nulle valeur. […] Convenez donc que ce modèle est purement idéal, et qu’il n’est emprunté directement d’aucune image individuelle de nature dont la copie vous soit restée dans l’imagination, et que vous puissiez appeller derechef, arrêter sous vos yeux et recopier servilement, à moins que vous ne veuillez vous faire portraitiste.

1033. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « IX. Mémoires de Saint-Simon » pp. 213-237

… Après les désastres du xvie  siècle, les fautes politiques d’Henri IV et les luttes jusqu’au sang de Richelieu pour les réparer, après l’anarchie des Parlements et de la Fronde qui remuèrent Saint-Simon dans son berceau, Louis XIV soutint au milieu de la France en poudre le poids de l’écroulement universel et l’arrêta par son prestige personnel… plus d’un siècle ! […] Une fois seulement avant cette ambassade d’Espagne, vide d’affaires et d’hommes à manier, on l’avait vu arrêter sa pensée sur Saint-Simon et le désigner au Conseil pour l’ambassade de Rome, mais ce choix, qui avait étonné tout le monde, et Saint-Simon lui-même, ne fut jamais officiellement confirmé.

1034. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Xavier Aubryet » pp. 117-145

Il ne fallait pas s’arrêter à l’idée générale, qui est déjà un progrès. […] Malheureusement, Aubryet s’arrête à cette nuance.

1035. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « J. de Maistre » pp. 81-108

… » Mais ici s’arrêtent les ressemblances. […] Aujourd’hui, ces velléités sont devenues, dans le gouvernement de Saint-Pétersbourg, des volontés arrêtées et traduites en faits positifs.

1036. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome II pp. 1-419

Pour n’avoir pas su s’arrêter à temps dans le développement de sa pensée, le poète n’obtient qu’un demi-succès. […] Mais là s’arrête la ressemblance, et M.  […] Je ne veux pas m’arrêter à discuter le témoignage des biographes, sur les années passées à Genève par M.  […] Assurément non ; il serait donc absolument inutile de nous arrêter à caractériser ces deux livres. […] Le lecteur qui prend au sérieux le récit commencé ne s’arrête pas volontiers en chemin.

1037. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Laurent (de l’Ardèche) : Réputation de l’histoire de France de l’abbé de Montgaillard  »

Sans nous arrêter à ces conjectures assurément fort impertinentes, et sans prétendre le moins du monde leur donner crédit, nous ne pouvons que partager l’étonnement de l’auteur de la Réfutation et abonder dans son jugement sur l’ouvrage.

1038. (1874) Premiers lundis. Tome I « Deux révolutions — I. L’Angleterre en 1688 et la France en 1830 »

Cromwell arrêta les excès et rétablit l’ordre ; mais l’espèce d’égalité religieuse contrainte qui subsista sous sa dictature n’est nullement comparable à notre égalité civile sous Napoléon, et ne porta d’ailleurs aucun fruit de tolérance.

1039. (1874) Premiers lundis. Tome I « Hoffmann : Contes nocturnes »

De là vient qu’il court des journées entières après des inconnus qui ont quelque chose de singulier dans leur marche, dans leur costume, dans leur ton et dans leur regard ; qu’il réfléchit avec profondeur sur une circonstance contée légèrement et que personne ne trouve digne d’attention ; qu’il rapproche des choses complètement antipodiques et qu’il en tire des comparaisons extravagantes et inouïes. » « Lélio s’écria à haute voix : « Arrêtez, c’est là notre Théodore.

1040. (1874) Premiers lundis. Tome II « Mort de sir Walter Scott »

Les grands hommes ne leur manqueront pas, elles peuvent le croire ; l’âge brillant des poëtes n’est peut-être pas fermé encore ; l’infatigable humanité n’a peut-être pas épuisé tous ses génies ; mais, en laissant à la Providence le soin de susciter les génies en leur temps, les générations nouvelles, en présence de ces tombes glorieuses dont elles sont appelées à sceller les pierres, doivent y contracter le saint engagement de ne pas s’arrêter dans la route de la civilisation et des lumières bienfaisantes, de rester probes, sincères, amies de tout progrès, de toute liberté, de toute justice.

1041. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Le Comte Walewski. L’École du Monde »

Mais, dès le premier mot à dire, nous nous sentons arrêtés par un scrupule.

1042. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIX. De la littérature pendant le siècle de Louis XIV » pp. 379-388

Enfin le code de la féodalité donnant pour base à toutes les institutions, à tous les pouvoirs, les droits antérieurs consacrés par le temps, il n’était pas permis de dire la vérité sur le passé, quelque ancien qu’il pût être ; les autorités présentes en dépendaient : des erreurs de tous les genres arrêtaient les historiens sur tous les sujets, ou, ce qui était plus fâcheux encore, les historiens adoptaient sincèrement ces erreurs mêmes.

1043. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VI. De l’envie et de la vengeance. »

Quand on est criminel de sang-froid, comme on calcule toujours, tels périls, tels obstacles de plus peuvent arrêter ; mais les hommes passionnés, qui se précipitent dans les révolutions, sont irrités par la crainte même si l’on parvient à la leur faire éprouver ; la peur excite les caractères impétueux au lieu de les contenir.

1044. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre V. Résumé. »

Madame de Gramont, pour dissiper le nuage, n’insista pas sur cette dernière réponse et se contenta de dire de son ton le plus léger : Vous verrez qu’il ne me laissera seulement pas un confesseur  Non, madame, vous n’en aurez pas, ni vous, ni personne ; le dernier supplicié qui en aura un par grâce, sera… » Il s’arrêta un moment : « Eh bien, quel est donc l’heureux mortel qui aura cette prérogative   C’est la seule qui lui restera, et ce sera le roi de France. »

1045. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre XI. De l’ignorance de la langue. — Nécessité d’étendre le vocabulaire dont on dispose. — Constructions insolites et néologismes »

On croit trop aisément qu’une incorrection est expressive, parce qu’elle surprend, qu’un barbarisme est pittoresque, parce qu’il arrête l’œil.

1046. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Et Lamartine ? »

Le jour où, acculé contre une petite porte de l’Hôtel-de-Ville, monté sur une chaise de paille, visé par des canons de fusils, la pointe des sabres lui piquant les mains et le forçant à relever le menton, gesticulant d’un bras tandis que de l’autre il serrait sur sa poitrine un homme du peuple, un loqueteux qui fondait en larmes  le jour où, tenant seul tête à la populace aveugle et irrésistible comme un élément, il l’arrêta — avec des mots — et fit tomber le drapeau rouge des mains de l’émeute  la fable d’Orphée devint une réalité, et Lamartine fut aussi grand qu’il ait jamais été donné à un homme de l’être en ses jours périssables.

1047. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Choses d’autrefois »

» Après le vœu d’obéissance, quand elle en vient au vœu de chasteté, elle s’arrête, et alors les petites coquines, qui pleuraient jusque-là, étouffent une grosse envie de rire.

1048. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Pour encourager les riches. » pp. 168-175

Au reste ce détail, et aussi le formidable total de sa fortune, ont été connus trop tard pour arrêter les premières manifestations de l’admiration et du deuil publics.

1049. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Bilan des dernières divulgations littéraires. » pp. 191-199

Au moins, que l’indiscrétion et la badauderie de l’interview s’arrêtent devant ces tombes !

1050. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XII » pp. 100-108

La cour fit arrêter les magistrats les plus ardents de l’opposition ; le peuple se souleva.

1051. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXX » pp. 330-337

Ce ne fut pas seulement la mort de Molière qui marqua un terme à la protection que les lettres donnaient à la société licencieuse contre la société d’élite ; l’esprit satirique de Boileau, la courtoisie de Racine, la licence de La Fontaine, s’arrêtèrent en même temps devant les progrès de cette société : comme ces progrès atteignaient la cour elle-même, nos poètes virent que le temps était venu de prendre un autre ton, une autre direction, et ils furent plusieurs années à contempler en silence le changement qui s’opérait.

1052. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Démosthéne, et Eschine. » pp. 42-52

Arrêté par Archias, il feignit d’avoir à écrire à un de ses parens, & suça le poison qu’il avoit mis dans sa plume.

1053. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — L’Empereur Néron, et les trois plus grands poëtes de son siècle, Lucain, Perse & Juvénal. » pp. 69-78

Au premier soupçon qu’on eut de cette conjuration, on arrêta Lucain.

1054. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre quatrième. »

Il fallait s’arrêter à ces deux vers faits pour devenir proverbe.

1055. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Lettre, à Madame la comtesse de Forbach, sur l’Éducation des enfants. » pp. 544-544

Les bons maîtres sont rares, parce qu’ils traînent leurs élèves pied à pied ; et qu’on fait avec eux une route immense, sans qu’ils s’avisent d’arrêter leurs élèves sur les sommités, et de promener leurs regards autour de l’horizon.

1056. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Conclusion »

Mais, par cela même qu’ils ne se présentent à elle qu’à ce moment, que, par suite, ils se dégagent des faits et non des passions, on peut prévoir qu’ils doivent se poser pour le sociologue dans de tout autres termes que pour la foule, et que les solutions, d’ailleurs partielles, qu’il y peut apporter ne sauraient coïncider exactement avec aucune de celles auxquelles s’arrêtent les partis.

1057. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XVI »

Quand une langue s’arrête de vivre, quand son pouvoir d’assimilation diminue et qu’elle se laisse envahir par les broussailles étrangères du pédantisme et du cosmopolitisme, c’est que la force d’expansion de la race a baissé dans la même proportion.

1058. (1818) Essai sur les institutions sociales « Préface » pp. 5-12

Vico, que je ne connaissais point alors, n’a pas été arrêté par cet obstacle.

1059. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paria Korigan » pp. 341-349

C’est à propos de ces Récits qu’on a récemment rapproché leur auteur de madame Sand, et l’erreur de ce rapprochement pourrait avoir cours si on ne l’arrêtait au passage, parce qu’elle semble être un éloge pour l’une et pour l’autre.

1060. (1920) Impressions de théâtre. Onzième série

Car Agnès m’arrêta plus longuement. […] que j’aurais bonne envie d’arrêter ici M.  […] Tartufe est arrêté et la famille d’Orgon sauvée, etc. […] Ceux qui s’arrêtent à ces chicanes se font une singulière idée de l’invention dramatique. […] Peut-être… Mais à quoi bon énumérer des doutes et des scrupules auxquels je ne veux pas m’arrêter.

1061. (1927) Approximations. Deuxième série

le mot de beauté, si on le leur applique, prend aussitôt des contours trop arrêtés : subitement s’y accusent le grain de la matière, le ciseau du sculpteur. […] Rien ne s’arrête pour nous. […] Nul dessein arrêté ; simplement une pente que l’on suit et au sujet de laquelle, ainsi qu’il advient dans Le Camarade infidèle, on se donne dès le départ les motifs les plus spécieux. […] Mais Rivière ne s’arrête pas à connaître ces dangers : il les surmonte. […] La faculté héroïque, sans prix, qu’il reconnaît à Marthe « de ne point s’arrêter aux petits accidents de son cœur, aux anicroches de sa sensibilitéhq » lui est déniée.

1062. (1864) Histoire anecdotique de l’ancien théâtre en France. Tome I pp. 3-343

Arrêtez tous ceux qui passent. […] Cette arrestation tourna au tragique, Garguille et Turlupin s’évadèrent ; mais Gros-Guillaume fut arrêté, mis au cachot. […] On l’arrêta, on le conduisit en prison. […] Il s’arrêta court dans sa brillante carrière dramatique, abreuvé de dégoût, et résistant à toutes les supplications de ses meilleurs amis. […] On donna l’ordre de l’arrêter ; il fut assez heureux pour échapper aux poursuites et se réfugia chez M. de Gonteris, archevêque et vice-légat d’Avignon.

1063. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

Moréas nous devança tous d’un bon lustre), trop forte pour qu’on s’arrêtât longtemps à des misères de publicité. […] La mienne eut trente et un numéros, et puis s’arrêta. […] Il a vu des mendiants demander avec précaution l’aumône ; ils feignent saluer ; si on s’arrête, ils tendent la main, sinon ils passent en continuant quelque geste machinal et indifférent ; tandis que son attention est sollicitée par ce manège, il en voit qu’on saisit et qu’on arrête. À sa question, « pourquoi arrête-t-on ceux qui demandent au nom du Christ ?  […] Il y a un poème : Quatre-vingt-neuf, couronné par un jury à propos de l’Exposition de 1889, et sur lequel il vaut mieux ne pas s’arrêter ; la cantate, c’en est une, n’était pas de son ressort.

1064. (1922) Gustave Flaubert

En 1871, après la mort de son mari, ayant affaire à Trouville où l’hôtel Bellevue appartient à la succession, elle s’arrête à Croisset, le 8 novembre 1871. […] voyager, voyager, ne jamais s’arrêter ! […] Si je marche, c’est qu’elle s’avance ; quand je m’arrête, elle se repose ! […] Malgré son aspect dur, plastique, arrêté, elle nous apparaît parfois chargée d’une signification mystérieuse, dégage des puissances indéfinies de suggestion. […] Le bateau pouvait s’arrêter, ils n’avaient qu’à descendre ; et cette chose bien simple n’était pas plus facile, cependant, que de remuer le soleil.

1065. (1938) Réflexions sur le roman pp. 9-257

Je m’arrêtais à tous les étalages. […] Mais là s’arrête à peu près l’analogie. […] Même si — ce qui serait dommage — la collection devait s’arrêter là, on pourrait trouver un sens à la réunion de ces trois volumes et les arrêter en un tout significatif. […] Mais précisément elles ne seraient justifiées que parce qu’on se serait arrêté. […] Estaunié ne s’arrête pas à accabler, et qui a rempli, dans un terrain favorable, sa fonction de taupe.

1066. (1903) Légendes du Moyen Âge pp. -291

Notre voiture contourne les bâtiments de l’hospice (Real Casa de Roncesvalles), — qui servent encore de résidence à douze chanoines augustins, — puis l’église collégiale, passe devant la chapelle funéraire et la petite église dont je parlerai tout à l’heure, et s’arrête devant la posada du village : l’aspect n’en est pas fort engageant, si bien que nous poussons jusqu’à Burguete, où s’arrête le courrier, et où nous espérons être un peu mieux logés. […] Le rédacteur du faux Turpin, qui avait, lui, du pays une connaissance personnelle, a corrigé la faute, assez peu heureusement, en racontant que Dieu arrêta le soleil pendant trois jours ! […] Quand Christ, portant sa lourde croix, arriva là, il s’appuya pour se reposer à la maison du cordonnier et s’y arrêta quelque peu, mais lui, par colère et mauvais vouloir et pour s’en faire gloire auprès des autres Juifs, chassa le Seigneur Christ et lui dit de s’en aller où il devait aller, sur quoi Jésus le regarda fixement et lui adressa ces paroles : Je m’arrêterai et me reposerai, mais toi tu marcheras jusqu’au jugement dernier. […] Mais partout ailleurs, c’est le nouveau type, le vrai Juif Errant, l’éternel marcheur, qui passe sans s’arrêter devant les peuples ébahis. […] On trouve probablement une trace d’une forme plus ancienne, analogue à celle de Turpin, au v. 714, où il est dit que les païens se sont arrêtés dans un bois au sommet des montagnes, attendant le jour.

1067. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre II. Les couples de caractères généraux et les propositions générales » pp. 297-385

Par exemple, étant donné le son continu produit par un diapason vibrant, on touche légèrement les petites lames, ce qui arrête leur vibration ; aussitôt le son cesse. […] Quand les frottements du point d’attache sont aussi faibles que possible, et quand l’air environnant est aussi rare que possible, il met trente heures, et non plus quelques minutes, à s’arrêter. […] Dans ce cas, la suppression totale des obstacles ne ferait que diminuer encore le ralentissement, sans le supprimer tout à fait ; le pendule oscillerait soixante heures et davantage, mais à la fin il s’arrêterait. — Il faut donc prouver que le ralentissement diminue du même pas que la résistance, et qu’à tout degré ôté ou ajouté à la résistance correspond un degré égal ôté ou ajouté au ralentissement. […] Une pierre lancée, un pendule qui oscille finissent par s’arrêter, et on est tenté de croire qu’ils s’arrêtent d’eux-mêmes ; un mélange détone, une pomme tombe de son arbre, sans que nos sens démêlent la circonstance nouvelle qui, s’ajoutant à l’ancien état, a provoqué le nouveau. […] À quoi l’on pourvoit en supposant que la troisième fraction de durée et d’espace répète la seconde absolument et à tous égards ; que, nul caractère perturbateur ne s’étant rencontré dans la seconde, nul caractère perturbateur ne se rencontrera dans la troisième ; que dans le troisième lieu et le troisième instant, comme dans le second lieu et le second instant, nulle circonstance étrangère et influente ne s’est adjointe pour arrêter, dévier, presser ou ralentir le mouvement ; que, le petit espace d’abord parcouru étant vide, l’espace infini qui reste à parcourir est vide aussi ; que, la courte durée d’abord employée n’ayant présenté aucun événement modificateur, la durée infinie qui reste à employer n’en présentera non plus aucun.

1068. (1846) Études de littérature ancienne et étrangère

Cicéron vit la faute du sénat ; mais, seul, il ne pouvait pas arrêter Antoine. […] Le plaisant est arrêté, conduit à Tibère, qui lui fait donner aussitôt sa part du legs, et ordonne qu’il soit pendu, afin d’aller avertir Auguste. […] Ce que l’on poursuit avec ardeur, on le conduit bientôt à la perfection : c’est un point où l’on peut difficilement s’arrêter ; et, par un effet naturel, ce qui n’avance plus rétrograde. […] Arrêtez-vous, sphères toujours mouvantes du ciel ; arrêtez-vous, afin que le temps puisse cesser, et que minuit n’arrive jamais ! […] Il fut arrêté, le 13 septembre, par ordre extraordinaire de la chambre des communes.

1069. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

Bientôt, de ces profonds silences qui vous effrayaient tout d’abord, s’élèvent des bruits confus ; ce sont des voix aimées qui vous parlent toutes à la fois ; bientôt encore on dirait que la confusion s’arrête et que chaque voix veut parler à son tour. […] Alors Molière, qui aimait à haranguer, arrêté tout à coup par cette défense inattendue, et voyant remettre en question cette question tant débattue, vint annoncer sa défaite à cette foule inquiète et attentive. […] La seule chose que j’admire dans Le Barbier de Séville, c’est que Beaumarchais ait trouvé le moyen d’avoir un amoureux dont les poches sont pleines d’or, et cependant cet amoureux est arrêté à chaque pas. […] Dorimène, au contraire, est plus que sûre d’épouser Sganarelle, et quand Lycaste, l’amant, se met en frais pour ce pauvre époux, Dorimène l’arrête court dans ses politesses : —  C’est trop d’honneur que vous nous faites à tous deux ! […] Philinte sera jeté en prison s’il ne donne caution ; — Alceste répond pour Philinte, en présence d’un agent et cet agent l’arrête, quand il entend le nom d’Alceste.

1070. (1864) Cours familier de littérature. XVII « Ce entretien. Benvenuto Cellini (2e partie) » pp. 233-311

Quatre de mes gens accoururent avec des piques, et voulurent poursuivre ces coupe-jarrets ; mais je les arrêtai, en leur disant : Laissez-moi déposer cet argent qui m’arrache le bras, et nous donnerons ensuite sur ces quatre poltrons qui n’ont pu me voler. […] Combien de fois, avant de connaître la vie et les procédés de Benvenuto Cellini, ne nous sommes-nous pas arrêté à Florence devant la Logia dei Servi pour contempler ce miracle du génie humain ! […] Je pris le plan, et je retournai à Florence le plus vite possible ; et, sans m’arrêter, je courus au palais. […] Moi, qui croyais avoir non seulement gagné, mais mérité toute la faveur du duc par mes travaux désintéressés, j’entrai, aux paroles insolentes de ce vilain homme, dans une si grande colère, que je lui dis que, quand le duc me donnerait dix mille écus, il ne me payerait pas trop, et que je ne me serais pas arrêté à Florence, si je ne m’étais attendu qu’à ce prix.

1071. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (3e partie) » pp. 5-96

. — Si cette âme est d’une nature inférieure, elle sera peu souveraine pendant son obscurcissement corporel, et même le corps la dominera ; elle ne saura pas, quand il vieillira, le maintenir et l’arrêter. — Mais si, au contraire, elle est d’une nature puissante, comme c’est le cas chez tous les êtres de génie, non seulement, en se mêlant intimement au corps qu’elle anime, elle fortifiera et ennoblira son organisme, mais encore, usant de la prééminence qu’elle a comme esprit, elle cherchera à faire valoir toujours son privilège d’éternelle jeunesse. […] Mais nous autres, nous avons toujours quelque chose qui nous arrête ; les personnes, les objets qui nous entourent, exercent sur nous leur influence ; la cuiller à thé nous gêne, si elle est d’or, et que nous croyions la trouver d’argent, et c’est ainsi que, paralysés par mille considérations, nous n’arrivons pas à exprimer librement ce qu’il y a peut-être de grand en nous-même. […] « Mais, dit-il, j’ai eu la précaution de m’arrêter lorsque j’étais encore bien en train, et à un passage pour lequel j’ai encore bien des matériaux tout prêts. De cette façon, je me remettrai à l’œuvre bien plus aisément que si je ne m’étais arrêté qu’au bout d’un développement épuisé. » Nous avions le projet de faire une promenade avant dîner, mais nous nous trouvions si bien tous deux à la maison, que Goethe fit dételer.

1072. (1910) Études littéraires : dix-huitième siècle

Ses idées sur ce point sont très arrêtées. […] Montesquieu s’arrête à la monarchie aristocratique entourée de quelques institutions démocratiques. […] Ce domaine réservé des droits individuels devant lequel doit s’arrêter même la loi, il ne me paraît pas qu’il le connaisse. […] Il s’arrête au milieu de son long travail pour s’écrier : « Vierges du mont Piérie, entendez-vous le nom dont je vous nomme ? […] Il n’a pas le positivisme sérieux et réfléchi qui s’arrête au seuil du mystère, mais précisément parce qu’il y est arrivé.

1073. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De l’état de la France sous Louis XV (1757-1758). » pp. 23-43

Rendons-lui toutefois la justice qu’il ne paraît pas s’être arrêté longtemps sur cette idée qu’il serait lui-même Premier ministre. […] Ce n’est plus un ministre ni un homme d’État, c’est un malade qui écrit et qui nous énumère les symptômes dont il est atteint : coliques d’estomac qui durent dix heures, étourdissements fréquents et qui augmentent, insomnies opiniâtres : « Mon visage est quelquefois comme celui d’un lépreux, parce que la bile arrêtée s’est portée à la peau. » Son cri perpétuel est qu’il n’en peut plus, et que son moral même est ébranlé : Je vous en avertis, ma tête est malade (septembre 1758) : avec du repos et l’espérance de ne me pas déshonorer, je me rétablirai ; sans cela, je tomberai dans un état où il ne me sera plus possible de faire aucun travail… Mais qu’on me sauve du déshonneur si on veut conserver ma tête et ma vie !

1074. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire de la maison royale de Saint-Cyr, par M. Théophile Lavallée. » pp. 473-494

Mme de Maintenon lui en faisait la guerre dans des lettres très belles et qui ne la convainquaient pas : Comment surmonterez-vous, lui écrivait-elle, les croix que Dieu vous enverra dans le cours de votre vie, si un accent normand ou picard vous arrête, ou si vous vous dégoûtez d’un homme, parce qu’il n’est pas aussi sublime que Racine ? […] En ce qui est des femmes, elle n’avait aussi sur elles que des idées très arrêtées et médiocrement flatteuses : « Les femmes, disait-elle, ne savent jamais qu’à demi, et le peu qu’elles savent les rend communément fières, dédaigneuses, causeuses, et dégoûtées des choses solides. » L’éducation de Saint-Cyr, après la réforme, et dans le plein et véritable esprit de Mme de Maintenon s’il avait été constamment suivi, n’eût donc point péché par trop de timidité, de faiblesse et de grâce tendre ; l’austérité seulement en était voilée.

1075. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — I. » pp. 301-321

L’Italie n’a point de Collé et n’a rien qui approche de la délicieuse gaieté de La Vérité dans le vin. » J’arrête ici Beyle et je me permets de remarquer que je ne comprends pas très bien la suite et la liaison de ses idées. […] Il faudrait d’ailleurs l’arrêter à chaque pas si l’on voulait des explications.

1076. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — I. » pp. 413-433

Daru fut donc arrêté comme suspect, jeté dans la prison de Rennes, qu’on appelle la Tour-le-Bat, puis, de là, malgré l’intervention amicale et courageuse de M.  […] Dans ce travail dont les éléments étaient si compliqués, et dont la netteté et la franchise allaient faire scandale en sens inverse parmi ceux dont il contrariait les désordres, on reconnaît la présence et la collaboration de Daru, cette ardeur d’investigation qu’aucune difficulté n’arrêtera.

1077. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Le président Hénault. Ses Mémoires écrits par lui-même, recueillis et mis en ordre par son arrière-neveu M. le baron de Vigan. » pp. 215-235

On sait que dans les dernières années de Louis XIV, à l’instant le plus critique de la guerre de la succession (1709), le duc d’Orléans noua en Espagne une intrigue politique restée assez obscure, et qu’un homme de sa confiance, Flotte, fut arrêté porteur de papiers. Dans les Mémoires actuels on fait dire au président Hénault voulant justifier le duc d’Orléans à ce sujet (p. 64) : « Qu’est-ce que cette affaire de flotte arrêtée en Espagne ? 

1078. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Une petite guerre sur la tombe de Voitture, (pour faire suite à l’article précédent) » pp. 210-230

Rose, alors premier secrétaire du cardinal Mazarin, en ayant lu des passages à Son Éminence, Costar reçut, sans savoir à qui il était redevable de ce bon office, une gratification de cinq cents écus ; il faisait bon en ce temps-là de défendre la mémoire de Voiture, cet auteur chéri dont Sorbière disait : « On est forcé de louer Hobbes, Descartes, Balzac, mais on est bien aise de louer Voiture. » Coslar ne se tenait pas de joie ; une fois en veine, il ne crut pas devoir s’arrêter, il ouvrit et desserra tous ses lieux communs et publia en 1654, sous ce titre un peu prétentieux : Les Entretiens de M. de Voiture et de M.  […] Costar répliqua par deux nouveaux in-quarto (1655 et 1657), et Girac par un seul qui fut arrêté à l’impression et ne parut qu’assez longtemps après35.

1079. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — I » pp. 432-453

Celui-ci lui envoie en manière d’hommage les livres qu’il publie, même quand ils sont pleins de chiffres : « Ce qui est à ma portée, dit-elle, me paraît dolent et plein de désir. » Là s’arrête son épigramme. […] Il est arrêté comme une fausse patrouille qui ne savait pas le mot d’ordre, et qui s’est livrée elle-même en prenant l’ami pour l’ennemi.

1080. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

Mais vous me flattez, cela suffit pour m’arrêter sur vos louanges ; et puis, je ne fais point une épître dédicatoire. […] Il était bien le fils de l’homme qui, revenant à la tête de sa compagnie le jour de l’inauguration de la statue érigée à Louis XIV par le duc de La Feuillade sur la place des Victoires, s’arrêta au Pont-Neuf devant la statue de Henri IV, et dit en se retournant vers sa troupe : « Mes amis, saluons celui-ci ; il en vaut bien un autre ! 

1081. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — II » pp. 126-147

Il croit entendre ce qui arrête les plus habiles. […] Le Tourneux, on n’avait jamais trouvé à redire à la traduction du même bréviaire faite autrefois par Marolles ; mais la raison en était simple, c’est que le travail de celui-ci n’avait pas mérité qu’on s’y arrêtât : « Car il faut l’avouer à la honte de ce siècle, disait Arnauld, quand les livres ne sont pas assez bien faits pour exciter la jalousie de certaines gens, ils sont hors d’atteinte à la censure. » De ce côté aussi, avec plus de modération dans les termes, nous rencontrons le même fonds de mésestime.

1082. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de l’Académie française, par Pellisson et d’Olivet, avec introduction et notes, par Ch.-L. Livet. » pp. 195-217

Il est fâcheux que l’on n’ait pas continué l’histoire de l’Académie sur le plan et dans le détail de Pellisson : il s’est arrêté après l’exposé de ce qui arriva pour le jugement du Cid. […] Il se fait une loi, dans les biographies d’académiciens, de s’arrêter à 1700 sans aller même jusqu’en 1745, jusqu’à la mort de Fénelon et de Louis XIV.

1083. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite.) »

Nul scrupule ne doit vous arrêter avec une personne capable de sentir le prix de cette faveur et qui croit à la vertu. » Se peut-il une manière de sentir et de dire, une façon de comprendre le bienfait, plus délicate et plus élevée ? […] Hume n’est pas le meilleur des hommes, il est le plus noir. » Enfin, et presque aussitôt, il passa outre et tira la fameuse conclusion à laquelle il s’arrêta et qu’il bombarda à l’adresse de la postérité : « David Hume est un scélérat ! 

1084. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance »

Voici le premier de ces morceaux, sur les Champs ou les plaines ; après avoir montré les avantages que présente le val de Nievole pour tout ce qui est des terres arrosables et des potagers, l’auteur ajoute : « Le reste de la plaine du val de Nievole mérite encore d’être compté parmi les sols les plus fertiles de la Toscane ; l’œil du cultivateur est cependant étonné, en la parcourant, de n’y voir ni prés ni pâturages, ni presque aucune récolte destinée à la nourriture du bétail. » « Mais il ne peut s’arrêter sur cette idée ; son attention est entraînée, son admiration est commandée par le tableau d’abondance que la campagne étale autour de lui, par l’étonnante variété de productions et de récoltes, qui frappe ses yeux de toutes parts. En quelque lieu qu’il s’arrête, sur quelque métairie qu’il porte ses regards, il voit tout ensemble devant lui, la vigne qui, élégamment suspendue en contre-espalier autour de chaque champ, l’environne de ses festons ; les peupliers, rapprochés les uns des autres, qui lui prêtent l’appui de leur tronc, et dont les cimes s’élèvent au-dessus d’elles ; l’herbe, qui croît au pied de ces élégants contre-espaliers et qui gazonne les bords des nombreux fossés, destinés à l’écoulement des eaux ; les mûriers qui, plantés sur deux lignes au milieu des champs, et à une distance assez grande pour ne pas les offusquer de leur ombre, dominent les moissons ; les arbres fruitiers qui, çà et là, sont entremêlés aux peupliers et à la vigne ; les blés de Turquie qui, s’élevant à six ou huit pieds au-dessus de terre, entourent leurs magnifiques épis de la plus riche verdure ; les trèfles annuels dont les fleurs incarnates se penchent sur leur épais feuillage ; les lupins dont le coup d’œil noirâtre et l’abondante végétation contraste avec la souplesse, l’élégance et la légèreté des seigles non moins vigoureux qu’eux et qui s’élèvent au-dessus de la tête des moissonneurs ; enfin, les blés dont les longs épis dorés sont agités par les vents et rappellent par leurs ondulations le doux mouvement des vagues d’un beau lac. » Le second morceau consacré aux Collines est comme un pendant au tableau des plaines ; celles-ci, dans aucun pays, ne peuvent plaire aux yeux que par l’abondance et la fertilité qui les caractérise.

1085. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

Coulmann, je désire que votre absence ne se prolonge pas trop et que vous me trouviez encore sous ces ombrages où je touche de nouveau la lyre. » J’étais attiré, j’allais vers la femme, et voilà la pose de muse, le geste théâtral qui m’arrête et me fait fuir. […] Elle prétendait avoir pour lui une antipathie physique… » Béranger, une fois lancé, ne s’arrête pas en si beau train ; il parle du monde de Mme de Staël comme s’il y avait vécu ; il tire à droite et à gauche.

1086. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par. M. le Chevalier Alfred d’Arneth »

Le comte d’Artois, lui, le futur Charles X, n’est qu’étourdi, pétulant, imprudent, tête vive et légère : « Il est vrai que le comte d’Artois est turbulent et n’a pas toujours la contenance qu’il faudrait ; mais ma chère maman peut être assurée que je sais l’arrêter dès qu’il commence ses polissonneries, et, loin de me prêter à des familiarités, je lui ai fait plus d’une fois des leçons mortifiantes en présence de ses frères et de ses sœurs. (16 novembre 1774.) » Quant au comte de Provence, il y a d’autres précautions à prendre avec lui ; ce n’est pas de ses familiarités en public et de ses gestes légers qu’on a à se méfier, c’est plutôt de ses coups fourrés ainsi que de ceux de sa digne épouse, qui est bien appareillée avec lui : « Ils sont l’un et l’autre fort réservés et fort tranquilles, au moins en apparence. […] Cela vaut bien la peine de s’y arrêter.

1087. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. (Les Pleurs, poésies nouvelles. — Une Raillerie de l’Amour, roman.) » pp. 91-114

j’aurais dû crier : C’est moi… je l’aime… arrête ! […] Je déferais sans pouvoir réparer, et je n’ai jamais eu la force de m’arrêter longtemps sur ces espèces de notes des impressions que je voulais oublier, — j’en ai tant d’autres à subir !

1088. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « QUELQUES VÉRITÉS SUR LA SITUATION EN LITTÉRATURE. » pp. 415-441

. — Il y a une jolie épigramme de Paul le Silentiaire, qui confine d’assez près à la pensée de La Bruyère, la voici : c’est sur un bain public où il y avait séparément le côté des hommes et le côté des femmes : « Tout proche est l’espérance de l’amour, mais il n’y a pas moyen de le satisfaire : une toute petite porte suffit pour arrêter la grande Vénus. Et pourtant cela ne laisse pas d’être agréable ; car, en ces choses d’amoureux désir, l’espérance a plus de douceur encore que la réalité. » Mais comme ces Grecs, dans leur malice même, s’arrêtent naturellement à la grâce !

1089. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre I. La littérature sous Henri IV »

Je ne m’arrêterai pas aux controversistes : leur genre aura plus tard des chefs-d’œuvre, il n’en est qu’à se discipliner. […] Il n’est pas de qualité, du reste, à nous arrêter : d’autant que derrière lui nous découvrons Régnier254.

1090. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XII »

Parcourons le champ de bataille : les rêves abattus, les illusions mortes, les sentiments blessés et atteints au cœur nous arrêteront à chaque pas. […] L’art raffiné de cette comédie est, nous l’avons dit, de se corriger elle-même lorsqu’elle va trop loin, par un mot vif et cinglant qui l’arrête net, au bord du péril.

1091. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome IXe. » pp. 138-158

Thiers, en possession de pièces confidentielles dont nul autre que lui n’avait eu jusqu’ici connaissance, et y appliquant sa merveilleuse faculté d’éclaircissement, s’est attaché à fixer avec la dernière précision l’instant où ce projet d’usurpation fatale entra dans la tête de Napoléon et y prit le caractère d’une résolution arrêtée ; car pour l’idée vague, elle avait dû lui traverser depuis longtemps la pensée. Les scrupules de justice ordinaire ne sont pas, en général, ce qui arrête les hommes de la portée des Frédéric et des Napoléon, qu’il s’agisse de la Silésie ou de l’Espagne.

1092. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Adrienne Le Couvreur. » pp. 199-220

Ravenel, et en me souvenant du drame intéressant qu’on applaudit encore, il me sera donc permis de m’arrêter un instant sur ce sujet d’Adrienne Le Couvreur comme pour un à-propos. […] L’abbé Bouret fut arrêté dans le premier moment, les pastilles analysées.

1093. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Œuvres de Barnave, publiées par M. Bérenger (de la Drôme). (4 volumes.) » pp. 22-43

La popularité de Barnave n’était encore qu’à demi entamée, quand il fut choisi avec La Tour-Maubourg et Pétion, en qualité de commissaire de l’Assemblée, pour ramener à Paris Louis XVI fugitif, qu’on venait d’arrêter à Varennes. […] L’honneur domestique et la religion de la famille respirent dans ces recommandations affectueuses à ses sœurs : Avant tout, n’épousez que des hommes dont la conduite et les sentiments puissent aller avec les vôtres ; eussent-ils peu de fortune, pourvu qu’ils y suppléent par un état ou une capacité de travail, ne vous arrêtez pas à cet obstacle.

1094. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mlle de Lespinasse. » pp. 121-142

Elle croit qu’elle aime encore M. de Mora, et qu’elle peut arrêter, immoler à volonté le nouveau sentiment qui la détache et l’entraîne loin de lui. […] L’esprit d’une femme, si grand qu’il soit, a-t-il jamais arrêté son cœur ?

1095. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Mémoires de Saint-Simon. » pp. 270-292

Cela dit, et se croyant en mesure de prendre tout son plaisir sans trop de péché, il se lance dans sa voie, et définit admirablement l’histoire telle qu’il la conçoit, dans toute son étendue, ses embranchements, ses dépendances, et avec la moralité finale qu’on en peut tirer, si après tout un véritable esprit religieux s’y mêle ; car, de cette multitude de gens qui en sont les acteurs, remarque-t-il, « s’ils eussent pu lire dans l’avenir le succès de leurs peines, de leurs sueurs, de leurs soins et de leurs intrigues, tous, à une douzaine près tout au plus, se seraient arrêtés tout court dès l’entrée de leur vie, et auraient abandonné leurs vues et leurs plus chères prétentions », reconnaissant qu’il n’y a ici-bas rien que néant et que vanité. […] Son histoire est une fresque à la Rubens, jetée avec une fougue de pinceau qui ne lui permet pas de dessiner soigneusement et d’arrêter sa ligne avant de peindre : mais les physionomies, tant il en est plein, n’en ressortent que plus chaudement.

1096. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Diderot. (Étude sur Diderot, par M. Bersot, 1851. — Œuvres choisies de Diderot, avec Notice, par M. Génin, 1847.) » pp. 293-313

La tête d’un Langrois est sur ses épaules comme un coq d’église au haut d’un clocher ; elle n’est jamais fixe dans un point ; et si elle revient à celui qu’elle a quitté, ce n’est pas pour s’y arrêter. […] S’il y a dans un ouvrage, dans un caractère, dans un tableau, dans une statue, un bel endroit, c’est là que mes yeux s’arrêtent ; je ne vois que cela, je ne me souviens que de cela, le reste est presque oublié.

1097. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Saint-Évremond et Ninon. » pp. 170-191

Cette Ninon, rivale et héritière de Marion Delorme, ne nous arrêtera pas. […] L’ayant, une fois, rencontrée comme elle était dans son carrosse, il fit arrêter le sien, en descendit, et alla chapeau bas la saluer en présence de la foule étonnée.

1098. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Jasmin. (Troisième volume de ses Poésies.) (1851.) » pp. 309-329

Jacques a l’air en peine, il a vu Marthe… Tremblant, honteux, il s’est arrêté… Le prêtre n’y tient plus : de sa voix forte, pleine, qui épouvante le péché : « Jacques, quelle est cette femme ?  […] Les tournées de Jasmin sont assez marquées, on peut le croire, d’incidents gais, fous, enthousiastes, d’incidents tout gascons : ceux-là sautent aux yeux d’eux-mêmes ; j’ai mieux aimé m’arrêter sur les autres.

1099. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Madame de Motteville. » pp. 168-188

Son tempérament était tourné du côté de la gaieté ; et parmi les larmes, s’il arrivait de dire quelque chose de plaisant, elle les arrêtait en quelque façon pour divertir la compagnie. […] N’ayant pu suivre dans les premiers jours de 1649 la reine fugitive à Saint-Germain et l’ayant voulu rejoindre ensuite, elle fut arrêtée avec sa sœur à la porte Saint-Honoré par une populace furieuse, et elle dut se réfugier au pied du maître-autel à Saint-Roch, où il fallut que quelques-uns de ses amis, avertis au plus tôt, vinssent la délivrer.

1100. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — I. » pp. 1-22

Quand celui-ci est arraché à l’armée des Alpes et se voit à regret nommé au commandement de l’artillerie dans l’armée de l’Ouest, il emmène avec lui Junot et Marmont : « Quoique je ne fusse retenu auprès de lui qu’extraordinairement sur sa demande, dit Marmont, il me proposa de le suivre, et je me décidai à l’accompagner sans autre ordre que le sien. » En passant par la Bourgogne, Bonaparte s’arrête dans la famille de Marmont. […] Il fut convenu que les troupes se retireraient dans les barrières, et que les arrangements seraient pris et arrêtés pour l’évacuation de la capitale.

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