L’esprit sauvage lutte contre la philosophie, se défie de l’éducation, et se montre plus indulgent pour les vices du cœur que pour les talents de l’esprit. […] Dans la langue adoptée par la coalition de certains hommes, connaître le cœur humain, c’est ne se laisser jamais guider dans son aversion ni dans ses choix par l’indignation du vice, ni par l’enthousiasme de la vertu ; posséder la science des affaires, c’est ne jamais faire entrer dans ses décisions aucun motif généreux ou philosophique.
Vos sentiments ne sont pas quelque chose de matériel que je puisse extraire de votre propre cœur, et mettre sous vos yeux pour vous confondre. […] Le Romantique était poli ; il ne voulait pas pousser l’aimable académicien, beaucoup plus âgé que lui ; autrement il aurait ajouté : Pour pouvoir encore lire dans son propre cœur, pour que le voile de l’habitude puisse se déchirer, pour pouvoir se mettre en expérience pour les moments d’illusion parfaite dont nous parlons, il faut encore avoir l’âme susceptible d’impressions vives, il faut n’avoir pas quarante ans.
Le même conteur gambade parmi les drôleries irrévérencieuses, et peint en vers magnifiques la majesté des dieux dont le regard perce en un éclair tous les abîmes du coeur. […] Pascal et Saint-Simon seuls au dix-septième siècle, et encore dans des écrits secrets qui sont des confidences, ont traversé la froide et brillante enveloppe des mots pour aller troubler le coeur.
La mélancolie des Nuits d’Young, les effrénées et vagues effusions de YOssian de Macpherson donnent à la loi une satisfaction et un stimulant aux besoins intimes qui portent les cœurs vers les nobles rêveries et les ardents enthousiasmes. […] Paris leur faisait fête au reste : un large cosmopolitisme que ne troublaient pas les conflits des gouvernements, ouvrait les portes et les cœurs.
J’ouvre les deux petits recueils de « Pensées » de Baudelaire, Fusées et Mon cœur mis à nu. […] Chose inattendue : vers la fin de sa vie, de sa pauvre vie si sombre où la débauche morne et appliquée, puis l’opium, le haschich, et, enfin, l’alcool, avaient fait tant de ravages, son catholicisme si peu chrétien, son catholicisme impie et sensuel, celui des Fleurs du mal, semble s’épurer et s’attendrir, et lui descendre ou lui remonter dans le cœur.
Car, Monsieur, et ce point me tient trop à cœur pour que je néglige de le préciser d’abord, si j’esthétise, comme vous me le reprochez un peu, ce n’est du moins pas d’une sorte byzantine et désintéressée. […] S’ils cherchent par-delà tout Évangile précis à cette heure où tous lès Évangiles tombent en ruines une religion qui satisfasse à la fois leur cœur et leur raison dans le fonds commun de toutes les religions et de toutes les métaphysiques, dans le frisson de mystère dont certaines questions ont toujours fait frémir toute l’humanité, dans les hiéroglyphes de l’ancienne Egypte, dans les grimoires de Paracelse et dans les méditations de Spinoza ne les condamnez pas si vite : êtes-vous bien sûr qu’ils aient tort ?
Une très belle anecdote, lentement développée, souligne par l’opposition de ses deux héros l’infranchissable distance de deux civilisations, celle de la mère-patrie et de la colonie : l’aventure se poursuit, sentimentale, de la sous-préfète Clotilde Hardigny, femme d’esprit et de cœur, et du riche interprète arabe, Saïd-bel-hadj-Ali. […] Des aventures, des hommes, des princes, des caractères, des héros, des femmes merveilleuses et d’émotion, des âmes qui s’exaltent et crient et s’acharnent et s’apaisent, du malheur qui s’obstine, et du lyrisme, et du cœur, et des larmes.
Le cœur humain est en état de guerre avec lui-même. […] Notre cœur est troublé par nos mille naissances, par nos mille hérédités animales et humaines ; par notre obscure descendance animale qui nous a fait sortir sans doute d’une espèce très médiocrement socialisée.
Il se félicitait encore d’être protégé contre ses propres faiblesses de malheureux à qui il faut des joies quelles qu’elles soient ; contre les faiblesses de son cœur affamé qui cherchait partout, même dans le ruisseau, l’indispensable pain d’amour. […] Il a réussi surtout dans le premier genre, si l’on veut bien y comprendre à la fois les inquiétudes du cœur et celles de l’esprit ; les « vaines tendresses » pour ce qui passe et pour la vérité éternelle.
Le cœur de l’homme a plus gagné dans ce travail que son imagination n’a perdu ; Grégoire de Nazianze en est la preuve. […] Cousin a pris à cœur de recueillir les moindres opuscules de ces femmes plus ou moins célèbres, leurs petits romans ou nouvelles, leurs lettres publiées ou inédites.
Chaque cellule est déjà un petit animal ; les grands organes, comme le cœur, l’estomac, le cerveau, sont des associations particulières en vue de besoins particuliers, au sein de l’association générale. […] Pourtant la vie propre des parties se manifeste encore, même chez les animaux supérieurs : le cœur enlevé à un éléphant peut continuer assez longtemps de battre ; l’homme décapité dont on blesse la poitrine peut, dans certaines conditions, faire avec le bras un mouvement de défense et porter la main à l’endroit menacé, — mouvement accompagné sans doute de vagues sensations douloureuses dans la moelle épinière.
« Il n’y a que le corps qui prêche ; la mémoire seule dirige la langue, les yeux, les bras : l’esprit & le cœur semblent absens. […] « Il semble le voir, disent ses admirateurs, dans nos chaires avec cet air simple, ce maintien modeste, ces yeux humblement baissés, ce geste négligé, ce ton affectueux, cette contenance d’un homme pénétré, portant dans les esprits les plus brillantes lumières, & dans les cœurs les mouvemens les plus tendres. » Baron l’ayant rencontré dans une maison ouverte aux gens de lettres, le lendemain d’un jour qu’il avoit été l’entendre, lui fit ce compliment : « Continuez, mon pere, à débiter comme vous faites : vous avez une manière qui vous est propre, & laissez aux autres les règles. » Cet avis se ressent du caractère de Baron, le plus fier des hommes.
Nulle comparaison entre nos saints, nos apôtres et nos vierges tristement extasiés, et ces banquets de l’Olympe où le nerveux Hercule appuyé sur sa massue regarde amoureusement la délicate Hébé, où Apollon avec sa tête divine et sa longue chevelure tient par ses accords les convives enchantés ; où le Maître des dieux s’enivrant d’un nectar versé à pleine coupe de la main d’un jeune garçon à épaules d’ivoire et à cuisses d’albâtre, fait gonfler de dépit le cœur de sa femme jalouse. […] On ne peut pas dire que sa cuisse soit découverte ; mais il y a une telle magie dans ce linge léger qui la cache, ou plutôt qui la montre qu’il n’est point de femme qui n’en rougisse, point d’homme à qui le cœur n’en palpite.
Son cœur et son esprit étaient remplis de sentiments républicains ; il applaudissait au décret qui supprimait les pensions ; et pourtant toute sa fortune était en pensions, il les remplaça par le travail ; et le Mercure de France s’enrichit de la nécessité dans laquelle on le mettait encore une fois, de se faire une ressource de sa plume. […] Étonné de vivre et résolu de mourir, il saisit un rasoir, essaie de se couper la gorge, y revient à plusieurs reprises, et se met les chairs en lambeaux ; l’impuissance de sa main ne change rien aux résolutions de son âme ; il se porte plusieurs coups vers le cœur, et commençant à défaillir, il tâche par un dernier effort de se couper les deux jarrets, et de s’ouvrir les veines.
Elle était, autant par la pensée que par le cœur, la bonté, la générosité et la pitié humaines infinies, la pitié jusque dans ses faiblesses ! […] C’est la femme enfin qu’il faudrait montrer, parce qu’on l’a trop cachée, dans tout ce qui fut la tête, le cœur, la personne entière de Mme de Staël !
Dans un de ses romans (l’un des plus longs et des plus travaillés), elle a montré cette volonté, continue et indépendante, en se séparant bravement des frères et amis, ces enchaînés d’opinion qui voudraient enchaîner tout le monde au nom de la liberté, sur une des questions qui tiennent le plus au cœur de la Démocratie, et que cette recommenceuse éternelle de révolutions et de questions révolutionnaires a recommencé d’agiter ! […] Avec cette air vieille fille que le bas-bleuisme endoctrineur lui a donné, Mme André Léo croit, comme les vieilles filles, à l’amour qu’elle confond avec le mariage, dans sa théorie ; menée, malgré elle, à cette conclusion que le but de la vie, c’est le bonheur du cœur, — la grande idée, hélas !
Que Tocqueville voie le caractère essentiel de la Révolution française dans le changement administratif, qu’il phrase tant qu’il pourra sur la taille, la corvée, l’exemption d’impôts pour les nobles et la liberté politique, si chère à son cœur, il ne nous donne que les anciennes vues de détail de l’école philosophique et physiocratique dont il est le disciple attardé, et il répond à la question par la question même. […] Il entre de « lui-même dans les grands cœurs que Dieu a préparés « pour le recevoir.
La grandeur absolue, en effet, qu’elle soit intellectuelle ou morale, implique dans ceux qui l’ont une largeur, une chaleur centrifuge et — j’ai l’air de faire une tautologie, — une magnanimité dans le cœur ou dans la pensée que Montesquieu ne connut jamais. […] Il ne les prit pas, comme si le Christianisme, qui a dit que la main gauche doit ignorer ce que donne la droite, avait exigé cette ignorance du cœur de l’homme pour le bien qu’il a reçu ou qu’il a fait !
Ou bien encore : « Shakespeare est un grand psychologue, et l’on apprend dans ses pièces à connaître le cœur humain (page 89). » Quelle nouveauté et quel renseignement ! […] la véritable et la seule originalité de Gœthe, de cet Allemand qui, comme les autres Allemands, était idéaliste et poète, c’est d’avoir, Ixion infidèle, quitté la nuée pour embrasser la terre ; c’est d’avoir fait de la vie un art, bien plus qu’il n’a fait de l’art une vie ; c’est de s’être préoccupé, jusqu’à nous en faire mal au cœur, de l’utilité et de la pratique ; de jouer, enfin, au petit Machiavel, même littéraire, en n’étant qu’un petit Jérémie Bentham.
— abrutis et démoralisés, tombaient la face dans la neige, la boue et les excréments de toute une armée sans avoir le cœur de se relever, il était un diplomate : il faisait de la diplomatie contre le désespoir ! […] Pour se faire bien comprendre, il faut en revenir sans cesse à l’image de la glace, de cette glace d’une si belle eau et dont le seul enchantement — comme pour les cœurs — est d’être très pure et très fidèle.
La Misère, cette sœur de la Douleur, que nous ne voulons pas, nous, chasser du monde, ni dans les intérêts du cœur ni dans les intérêts de la pensée, la Misère étendait sa main de Muse sur le front du pauvre secrétaire de Florence, délaissé des hommes, et y versait les fleurs de flamme de l’inspiration qui console. […] Pas un seul mot n’y dépasse l’autre, — pas un mot, et les déclamateurs en ont parfois, n’y est chauffé à la flamme du cœur ou de la tête de cet utopiste de l’argent, qui se croit, sans viser, un Aristophane !
Ce grand de Maistre, qui passa sa vie dans la société des empereurs et des rois sans y rabaisser son génie ; qui commença en la société intellectuelle par les Considérations sur la France, et ne trouva pas, après trente ans de services de génie, un prêtre ou un évêque pour rendre compte du livre du Pape, ce chef-d’œuvre consacré à Rome, et qui mourut, frappé au cœur, de l’ingratitude du sacerdoce, aussi grande alors que celle des gouvernements ; ce grand de Maistre a été vengé de tout cela par sa gloire… Crétineau, moins grand et moins infortuné, eut tout de suite ce qui lui revenait. […] L’abbé Maynard est un abbé très littéraire, qui a écrit déjà la Vie de saint Vincent de Paul, et qui, ce jour-là, a montré du talent en parlant de cet homme adorable pour lequel un navet trouverait du cœur.
… mais la Correspondance est là… une malingre chose humaine, apte aux tendresses du cœur et enfermant sa vie entre deux ou trois amitiés d’hommes et de femmes, qui le consolèrent toujours de tout dans les afflictions de sa gloire. […] Resté un enfant dans la vie, comme, du reste, cette promptitude à la colère le prouve bien, car il n’y a d’hommes forts que les sangs-froids ou les sangs-froidis, — à qui le monde appartient, disait Machiavel, — resté un enfant, comme un poète de métaphysique, par l’esprit, et un prêtre par le cœur et les habitudes (les prêtres sont toujours des enfants quand ils sont descendus de l’autel), Lamennais n’avait pas grand goût pour la réalité qui le blessait souvent, qui le faisait bondir de souffrance, cette sauvage hermine de Bretagne, et il s’en détournait, se retirant violemment en lui-même, les yeux retournés en dedans et attachés sur une idée, — une idée qui fut la vérité pendant une moitié de sa vie et une erreur pendant l’autre moitié, — mais qui, dans tous les temps, a suffi aux ardeurs et aux aspirations de cette âme désintéressée !
Si le livre où le Réalisme le plus dénué d’invention, et qui s’en vante, peint toujours la réalité la plus terne, la plus sotte ou la plus abjecte ; si ce livre inouï a le malheur d’être vrai, c’est la plus terrible, et pour un homme de cœur la plus douloureuse accusation qui puisse être jamais lancée contre ce colosse sans âme qu’on appelle, avec une ironie dont on ne se doute pas : « la sainte Russie », dans les ukases impériaux ! […] Rien n’entre mieux dans le cœur des hommes que leur propre image qu’on leur rapporte ; car jamais ils ne pourront croire que les réfléchir, ce ne soit pas les admirer !
La forme de son exposition se recommande aux esprits modérés par je ne sais quelle fausse bonhomie, et jusqu’à son talent d’écrivain, trop empâté pour être mordant, — trop mollusque pour être serpent, — rien n’avertit, et tout l’assure, quand il se dit chrétien, comme la plupart des hérétiques, du reste, qui n’ont jamais manqué de se dire chrétiens pour mieux atteindre le christianisme en plein cœur ! […] Nous savons bien, — et lui aussi, probablement — ce qui resterait du christianisme, après cet élargissement à la Diderot ; mais pour les simples de cœur et d’esprit qui se laissent pétrir par la main de toutes les propagandes, un tel langage a sa séduction.
D’un bien autre génie que Silvio Pellico, mais d’une humilité non moins touchante, le marquis de Valdegamas avait plus de confiance dans une dizaine de chapelet, dite d’un cœur fervent, que dans tous les étalages de la pensée. […] Ils savent que Dieu, pour traverser les cœurs, met dans nos carquois toutes sortes de flèches, et que la flèche du Talent pénètre encore, après les plus perçantes, — celles de la Prière et de la Charité !
Indépendamment de sa justesse, nous, chez qui bat le cœur de l’artiste, nous ne savons rien de plus beau que cette définition de la Raison, qui a les proportions d’une analyse. […] Certes, s’il fut jamais des hommes dignes de porter dans leurs saintes mains le cœur et le cerveau de l’enfant, ces délicats et purs calices que la vérité doit remplir et qui restent fêlés ou ternis pour toujours, dès qu’un peu de poison de l’erreur y coule, ne sont-ce pas les Jésuites, les pères de la foi, les pères aussi de la pensée, ces premiers éducateurs du monde ?
On fit mettre dans un reliquaire d’or « le chef qui représentait par excellence le cœur de la sainte ! » Un chef qui représente un cœur.
C’est Lemierre, Delille ou Palissot De Cygne de la mer Égée, il devient une fourmi d’érudit et de travailleur, tirant perpétuellement et péniblement son petit brin de paille, et c’est à navrer le cœur de tous ceux qui aiment les poètes, cela ! […] La guillotine qui lui coupa la tête brisa le carquois de colère qu’il allait vider dans les cœurs maudits qui envoyaient la France entière à l’échafaud.
Stendhal raconte, dans son livre de l’Amour, qu’il a tué l’amour dans le cœur d’une femme qui commençait d’en avoir pour un homme, en lui disant seulement qu’il faisait avec sa cravate ce qu’on appelle la lessive du Gascon, ce qui, d’ailleurs, était parfaitement faux. […] C’est un crime bas, en effet, comme on n’en commet qu’à Paris, que l’inscription sur tous les murs, pour la déshonorer, du nom de la comtesse Alice et de celui de son amant entrelacés et accompagnés de cœurs percés de flèches.
Leur main d’ouvriers (ils l’avaient été) avait reposé longtemps sur le cœur qu’ils voulaient scruter. […] Brucker n’a pas fait l’Encyclopédie, et nous l’en félicitons de tout notre cœur, mais c’est un esprit encyclopédique et qui a encyclopédiquement écrit.
Je le sais, et je ne m’en étonne pas ; mais qu’aujourd’hui, en plein dix-neuvième siècle, quand les passions et leur étude, et leurs beautés, et leurs laideurs, et jusqu’à leurs folies, ont pris dans la préoccupation générale la place qu’elles doivent occuper ; quand la littérature est devenue presque un art plastique, sans cesser d’être pour cela le grand art spirituel ; quand nous avons eu des creuseurs d’âme, des analyseurs de fibre humaine, des chirurgiens de cœur et de société, enfin qu’après Chateaubriand, Stendhal, Mérimée et Balzac, Balzac, le Christophe Colomb du roman, qui a découvert de nouveaux mondes, la vieille mystification continue et que la réputation de Gil Blas soit encore et toujours à l’état d’indéracinable préjugé classique, voilà ce qui doit étonner ! […] Paul Féval, s’il la développait dans des sujets de cœur, un romancier d’un comique amer, de la plus poignante originalité.
Prosper Mérimée, l’auteur de Clara Gazul, de Colomba et de Carmen (ses meilleurs titres, dit-on, à la renommée), avait eu la grande vocation, cette vocation dominatrice et enflammée qu’on pourrait appeler l’idée fixe sans folie, on ne l’eût pas vu, au milieu de sa vie, je ne dis pas de romancier devenir historien, par la raison très-simple que, qui sait raconter le cœur de l’homme peut bien raconter le cœur des peuples, mais de romancier devenir archéologue, philologue, antiquaire, et finir en Raoul-Rochette après avoir commencé en Stendhal… M.
Vous en voyez plusieurs passionnés pour l’étude, et indifférents pour la gloire ; éloignés de cette ostentation, qui est toujours faiblesse ; ne s’apercevant pas même de ce qu’ils sont, ce qui est la vraie modestie ; honorant leurs bienfaiteurs, louant leurs rivaux, assez fiers pour faire du bien à leurs ennemis ; vous en voyez quelques-uns, ornés des grâces, qui, dans le monde, font pardonner les vertus ; mais ce qui fait le caractère du plus grand nombre, ce sont toutes les qualités que donne l’habitude de vivre plus avec les livres qu’avec les hommes : je veux dire des mœurs, les sentiments de la nature ; cette candeur si éloignée de toute espèce d’art ; Cette bonne foi de caractère qui agit d’après les choses, non d’après les conventions, et ne songe jamais à prendre son avantage avec les hommes ; une simplicité qui contraste si bien avec le désir éternel d’occuper de soi, vice des cœurs froids et des âmes vides ; l’ignorance de presque tout, hors des choses utiles et grandes ; une politesse qui quelquefois néglige les dehors, mais qui, au lieu d’être ou un calcul fin d’amour-propre, ou une vanité puérile, ou une fausseté barbare, est tout simplement de l’humanité ; enfin cette tranquillité d’âme, qui, ayant apprécié tout, et n’estimant dans ce songe de la vie que ce qui mérite de l’être, c’est-à-dire, bien peu de choses, ne se passionne pour rien, et se trouve au-dessus des agitations et des faiblesses. […] Je ne puis finir cet article sur les éloges des gens de lettres et des savants, sans parler encore d’un ouvrage de ce genre, qui porte à la fois l’empreinte d’une imagination forte et d’un cœur sensible ; ouvrage plein de chaleur et de désordre, d’enthousiasme et d’idées, qui tantôt respire une mélancolie tendre, et tantôt un sentiment énergique et profond ; ouvrage qui doit révolter certaines âmes et en passionner d’autres, et qui ne peut être médiocrement ni critiqué ni senti : c’est l’éloge de Richardson, ou plutôt, ce n’est point un éloge, c’est un hymne.
De même qu’il est des hommes submergés par le flot bruyant de la mer, ainsi nous sentons notre cœur noyé sous le chagrin. […] Sur le sommet des mâts un nuage s’est arrêté tout droit, signe de la tempête ; puis vient la terreur qui suit un danger subit. » Quelquefois encore, ces restes brisés de la couronne du poëte grec ne sont que des traits rapides et simples, une parole délicate et passionnée, un coup de pinceau qui ne s’oublie pas52 : La jeune fille triomphait, tenant à la main une branche de myrte et une fleur de rosier ; et ses cheveux épars lui couvraient le visage et le col » ; ou bien encore, avec moins de simplicité, cette autre peinture qui rappelle celle de Sapho : « Semblable passion d’amour, pénétrant au cœur, répandit un nuage épais sur les yeux et déroba l’âme attendrie. » Horace, dans sa vive étude des Grecs, avait sans doute gardé bien d’autres souvenirs d’Archiloque ; et quelques-unes de ses odes, son dithyrambe à Bacchus et d’autres, ne doivent être qu’une étude d’art et de goût substituée au tumulte des anciennes orgies, où le poëte de Paros se mêlait, en chantant : « Le cerveau foudroyé par le vin, je sais combien il est beau d’entonner le dithyrambe, mélodie du roi Bacchus. » Archiloque, s’il faisait des hymnes, devait être, ce semble, le poëte lyrique des Furies et non des Dieux.
La reconnaissance vous fuit un cœur de roi, et l’insuffisance vous réduit à l’ingratitude de l’éloge 32.
Les Pleureuses viennent l’une après l’autre ; tous leurs yeux n’ont pas les mêmes larmes, mais c’est le même convoi qu’elles suivent, le convoi, dirait-on, d’une âme morte avant de naître… C’est bien une âme, oui, plutôt même qu’un cœur, qui se désole en ce poème, tant tous les sentiments, l’amour, les désespoirs, et les haines aussi, s’y font rêve… Les Pleureuses pleurent en des limbes, limbes de souvenance où se serait reflété le futur.
Boschot s’y révèle poète philosophe, et l’on voit bien, d’abord, qu’il a beaucoup lu Sully Prudhomme et Alfred de Vigny, ensuite et surtout qu’il est capable par lui-même d’une pensée forte, pénétrante et triste… Mais ce n’en est pas moins un poète cher au cœur et d’une singulière puissance d’émotion.
Sainte-Beuve Chênedollé a de l’haleine ; il a plus de grandiose que Delille ; il fait ses vers avec son cœur.
. — Ce qui est dans le cœur des femmes (1852). — Poème de la femme (1853-1856).
André Rivoire Voilà un poète, un très jeune poète, parfois négligé, — mais, chez lui, c’est un charme, car son cœur est ardent, spontané, curieux de toutes choses et plus particulièrement de l’amour et du plaisir.
J’avais entendu parler ainsi sur la place de Nohant… Tous ces échos-là chantaient encore plus près de mon cœur que de mon oreille.
Trop heureux serais-je si, une seule fois, dans une pauvre maison, mes vers portaient quelque douceur à un cœur simple. » [Poètes d’aujourd’hui (1900).]
L’éveil peureux d’un cœur vierge aux premiers émois de l’amour, à l’amour de l’amour, le culte enfantin et noble de « la petite Elle », la floraison puérile du printemps autour de l’éclosion printanière d’une âme, tels sont les principaux motifs sur lesquels M.
Les années qu’il m’est donné de vivre encore ne me réservent pas d’aussi douces heures que celles que j’ai passées au milieu d’eux, au sein de devoirs aimés, surprenant ou veillant dans de jeunes cœurs ouverts à toute parole sincère ces secrètes conformités de l’écrivain et du lecteur qui font la vie des ouvrages d’esprit.
Fénelon lui-même n’a pas pu me faire aimer l’esprit de chimère, quoique chez lui le rêve de la perfection vienne du cœur plutôt que de la tête, et que sa vie ait été aussi pure que son idéal.
Avant de s’attacher au même genre, il eût fallu être doué, comme lui, de ce coup d’œil perçant, qui pénétroit dans les plus profonds replis du cœur, de cette vigoureuse subtilité qui en saisissoit les mouvemens dans leur source, de cette énergie supérieure qui les a si profondément tracés, de ce génie enfin qui ne sauroit être que le résultat de la force des idées, & de la chaleur du sentiment.
Il rétracta, long-temps avant sa mort, les égaremens de sa jeunesse, & sur-tout ces Productions malignes & licencieuses, où l’esprit se pare des vices du cœur, comme dit M. le Duc de Nivernois.
Nous n’avons sçu que trop souvent Tout ce que peut un beau visage ; Mais par un tel apprentissage, Notre cœur, devenu savant, En est aussi devenu sage.
Si jamais la Religion s’éteignoit parmi nous, le Recueil de ces Lettres, parvenu au trente-deuxieme volume, suffiroit pour en faire déplorer la perte, & même y ramener les esprits raisonnables & les cœurs droits.
S'il s'est échappé quelquefois, on doit plutôt attribuer ses écarts à de certaines séductions momentanées, qui agissent plus sur le cœur que sur l'esprit.
L’activité des centres cérébraux qui contrôlent les mouvements du cœur et des organes respiratoires est abaissée ; aussi la respiration et la circulation deviennent-elles plus lentes. […] Chez certains hommes, les battements du cœur sont encore soumis à la volonté et peuvent être suspendus. […] Nous ne remarquons point les sensations produites par les battements normaux du cœur et par la respiration normale ; mais ces sensations, aujourd’hui affaiblies, n’en existent pas moins dans la conscience générale, confondues avec la masse des autres sensations. […] Notre cœur n’est pas seulement dans notre poitrine, il est aussi dans notre tête, par l’idée même que nous en avons, par les cellules cérébrales avec lesquelles l’innervation nerveuse le met en rapport. […] De même, en tout phénomène physiologique et psychologique, il y a la direction vers le dehors et la direction vers le dedans, qui se manifestent par l’attraction et la répulsion, par le désir et l’aversion, ces deux pulsations de tout cœur qui vit.
Une religion spiritualiste, supplantant le paganisme matériel et extérieur, se glisse au cœur de la société antique, la tue, et dans ce cadavre d’une civilisation décrépite dépose le germe de la civilisation moderne. […] Jusqu’alors les catastrophes des empires avaient été rarement jusqu’au cœur des populations ; c’étaient des rois qui tombaient, des majestés qui s’évanouissaient, rien de plus. […] Il se faisait tant de bruit sur la terre, qu’il était impossible que quelque chose de ce tumulte n’arrivât pas jusqu’au cœur des peuples. […] Elle a encore sur le cœur son : Tout beau, monsieur ! […] Certes, de plus habiles en auraient pu tirer une haute et profonde harmonie, non de ces harmonies qui ne flattent que l’oreille, mais de ces harmonies intimes qui remuent tout l’homme, comme si chaque corde du clavier se nouait à une fibre du cœur.
. — Un Amant de Cœur, roman, Simonis Empis, in-18, 1903 […] 1901. — Le Cœur des Pauvres, (nouvelles), id. […] Œuvres. — Odes et Poèmes, Mercure de France, in-18, 1899. — Le Cœur Errant, id. […] du Mercure de France, 1902, in-18. — Le Cœur Solitaire, nouv. édition refondue, Soc. du Mercure de France, in-18. — L’Homme Intérieur, poèmes, Soc. du Mercure de France, in-18, 1905. […] Œuvres. — Le Cœur Innombrable, poésie (cour. par l’Ac.
Il a préféré, avec raison, en consacrer deux à Percy Shelley, ce révolté au cœur d’ange et de martyr, le plus pur des poètes modernes. […] Elle avait un cœur brillant et frivole, tel était son cœur. […] Lady Lilian meurt d’une maladie de cœur, brisée par la chute de son idole. […] C’est un style tissé de lumière chatoyante, quelque chose comme un arc-en-ciel vivant qui se déploie : On le sent tout frémissant des vibrations d’un cœur enthousiaste. […] Car si les cieux sont vides, l’aspiration demeure au cœur des hommes.
Voici la suite : « Enfant par la foi, vieillard par l’expérience, homme par le cerveau, femme par le cœur, géant par l’espérance, mère par la douleur et poëte par les rêves ; à toi qui es encore la Beauté, cet ouvrage où ton amour et ta fantaisie, ta foi, ton expérience, ta douleur, ton espoir et tes rêves sont comme les chaînes qui soutiennent une trame moins brillante que la poésie de la pensée, que le poëme gardé dans ton âme, semblable à l’hymne d’un langage perdu dont les caractères irritent la curiosité des savants. »
Ce qui le préserve parfois de cette peste du siècle, et ce qui, par moments, le rend enchanteur, c’est la puissance d’artiste consommé qui lui fait tout à coup retrouver son cœur sous les vapeurs noires de son esprit.
Camille Doucet À côté de la corde lyrique, la corde patriotique est celle qui vibre le plus sur cette Lyre d’airain dont les mâles accents sont faits pour remuer les cœurs.
Cependant, en considérant la position de Molière, et le plaisir que le roi prenait à diriger son talent, on se persuaderait sans peine qu’en approchant l’oreille des rideaux du roi, on sur prendrait quelques paroles dites à demi-voix, pour désigner à Molière ce caractère qui, bien que respecté au fond du cœur, avait quelque chose d’importun pour les maîtresses et pour les femmes qui aspiraient à le devenir.
Par mes bienfaits, j’enchaînerai leurs cœurs ; par tes leçons sublimes, tu les épureras ; par mes soins, je contiendrai les vices ; par ta force divine, tu feras germer les vertus ; j’encouragerai les arts, tu formeras les mœurs ; je ferai respecter la justice, tu en inspireras l’amour ; tu parleras quand les Loix se tairont ; & si jamais l’oubli des saints devoirs, si l’ivresse de la puissance pouvoit jamais m’égarer moi-même, alors tonne du haut des Cieux, remplis mon ame d’un effroi salutaire, rappelle-moi à mes sermens ; & que, traîné devant ton Tribunal, je reconnoisse qu’en toi seule les Princes ont un Juge, & les Peuples un vengeur ».
Les Réflexions ne paroissent pas le traiter assez favorablement, en le mettant trop au dessous du Favori de Mécene, & pour les talens & pour le cœur.
Et pour cela, il faut en revenir à la nature du cœur humain : la gaieté le captive, la malignité a toujours su lui plaire, & la licence n’est pas toujours propre à le révolter, parce qu’elle flatte en quelque maniere un fond de corruption qui en est inséparable.
La vie, en filtrant goutte à goutte à travers les événements et les souffrances, l’a déposé dans son cœur.
Toutes les sortes de goût, un cœur sensible à tous les charmes, une âme susceptible d’une infinité d’enthousiasmes différents, une variété de style qui répondît à la variété des pinceaux ; pouvoir être grand ou voluptueux avec Deshays, simple et vrai avec Chardin, délicat avec Vien, pathétique avec Greuze, produire toutes les illusions possibles avec Vernet.
La tragédie de cette mort, que Bossuet raconte avec des éclats de tonnerre, madame de La Fayette nous la dit avec cette émotion contenue de grande dame de son temps, où le cœur ne rompait pas le busc, et où la Convenance, sœur de l’Opinion et reine comme elle, n’empêchait pas les larmes de naître, mais les empêchait de tomber.
Puis ce sont les malades qui n’étaient pas malades de cœur, c’est-à-dire ceux qui avaient faim, et parmi lesquels il figurait au premier rang ; et il raconte les séances diplomatiques, où il décousait les anneaux des rideaux pour la lessive, au moyen de quoi, il obtenait de la sœur une côtelette, et encore toutes sortes de détails précieux. […] On ne fait une humanité défunte, qu’en lui mettant sous sa chlamyde ou son pourpoint, un cœur et un cerveau modernes ; et tout ce qu’on peut reconstituer, ce sont les milieux de cette humanité ! […] j’ai eu peur… c’est que vous savez, un moment le médecin d’ici ne savait pas, si je n’avais pas toutes les maladies… il croyait à une maladie de la moelle épinière, rapport à mes yeux… enfin ces jours-ci, il m’a rassuré, il pense qu’il n’y a que la chose du cœur. » Comme je disais, quelques instants après, à de Nittis : — Vous qui aviez une santé dont j’étais jaloux… c’est cette bronchite d’il y a deux ans ? […] Lundi 8 novembre Ces jours-ci, j’ai eu vraiment une jouissance d’esprit et de cœur, à me plonger dans un paquet de lettres de mon frère, retrouvé chez Louis Passy, un paquet de lettres de sa jeunesse, et qui me remontrent, en pleine lumière, des morceaux de notre vie, à demi effacés, et comme sortant tout à coup du brouillard, qu’apportent les années aux souvenirs d’un vieux passé. […] Car il sort de chez Hardy, qui lui a dit que ses maux d’estomac avaient amené chez lui un gonflement, lui ayant fait remonter le cœur, et lui donnaient le sentiment d’un asthme.
Emma serrait son châle contre ses épaules et se levait. » Pénétrant davantage la sourde éclosion de ses sentiments, d’incessantes métaphores matérielles disent le néant de son existence à Tostes, son intime rage de femme laissée vertueuse, par le départ de Léon et son exultation aux atteintes d’un plus mâle amant : « C’était la première fois qu’Emma s’entendait dire ces choses ; et son orgueil, comme quelqu’un qui se délasse dans une étuve, s’étirait mollement et tout entier à la chaleur de ce langage. » Et encore la contrition grave de sa première douleur d’amour : « Quant au souvenir de Rodolphe, elle l’avait descendu tout au fond de son cœur ; et il restait là plus solennel et plus immobile qu’une momie de roi dans un souterrain. […] Dans les deux premiers des Trois Contes, dont l’un, Un cœur simple, décrit l’humble vie de sacrifices d’une servante, et l’autre, la Légende de saint Julien l’hospitalier raconte la dure destinée d’un innocent parricide, l’écrivain paraît compatir aux maux qu’il montre, et peut-être est-il juste de croire qu’aux abords de la veillesse, Flaubert a senti qu’il ne convenait pas de séparer la cause des grands de celle des petits, qui, victimes autant que bourreaux, prennent sans doute leur part des souffrances qu’ils contribuent à aigrir. […] La tendresse des anciens jours leur revenait au cœur, abondante et silencieuse, comme la rivière qui coulait, avec autant de noblesse qu’en apportait le parfum des syringas, et projetait dans leurs souvenirs des ombres plus démesurées et plus mélancoliques que celles des saules immobiles qui s’allongeaient sur l’herbe. […] Sous les platanes, dans un jardin diapré de lis et de roses, les mercenaires célébrant leur festin ; la lente apparition de Salammbô descendue les apaiser, à la fois peureuse et divine, l’expédition nocturne de Mathô et Spendius dans le temple de Tanit, l’horreur de ces voûtes et le charme du passage du chef par la chambre alanguie où Salammbô dort entre la délicatesse des choses ; le retour d’Hamilcar, son recueillement dans la maison du Suffète-de-la-Mer ; Salammbô partant racheter de son corps le voile de la déesse, son accoutrement d’idole et ses râles mesurés, quand le chef des barbares rompt la chaînette de ses pieds ; puis le siège énorme de Carthage, la foule des peuplades accourues, l’écrasement des cadavres, l’horreur des blessures, et sur ce carnage rouge, l’implacable resplendissement de Moloch ; l’agonie de toute une ville, puis par un revers l’agonie de toute une armée, les dernières batailles, et, entre celles-ci, l’entrevue si curieusement mièvre et grave, où Salammbô voilée et parlant à peine reçoit le prince son fiancé en un jardin peu fleuri que passent des biches traînant à leurs sabots pointus, des plumes de paons éparses ; enfin le supplice de Mathô et les joies nuptiales, mêlant des chocs de verres et des odeurs de mets au déchirement d’un homme par un peuple, jusqu’à ce qu’aux yeux de Salammbô défaillante en l’agitation secrète de ses sens, Schahabarim arraché au supplicié son cœur et le tende tout rouge au rouge soleil, final tonnant dans lequel se mêlent le beau, l’horrible, le mystérieux et l’effréné en un suprême éclat. […] Voici qui montre son obséquiosité et son impersonnalité devant la nature : « Je me suis mal exprimé en vous disant qu’il ne fallait pas écrire avec son cœur ; j’ai voulu dire, ne pas mettre sa personnalité en scène.
L’un nous livre le secret de son cœur, l’autre nous apporte le détail de sa vie ! […] La comtesse de la Baume possédait toutes les distinctions du cœur et de l’esprit. […] Et toujours ma pensée allait vers l’amie disparue dont le souvenir est précieux à mon cœur. […] Barrès eut avec le poète mourant, où ils causèrent « de ce qui leur tenait le plus au cœur, de littérature », Moréas dit à son ami : « Il n’y a pas de classiques ni de romantiques », et M. […] Vénitien de cœur et d’esprit, fixé depuis longtemps à Venise, le prince Frédéric de Hohenlohe en sait tous les secrets.
» Quand la loyauté demeure si profondément enracinée dans le cœur de l’homme qui s’est exposé à de tels maux pour la liberté, il faut qu’en général la liberté ne croie pas avoir beaucoup à se plaindre. […] Qui ne se sentira le cœur assailli de toutes les émotions pleines d’angoisse que peut inspirer l’enfance, en voyant la scène où Hubert, selon sa promesse au roi Jean, veut faire brûler les yeux du jeune Arthur ? […] Dans le cœur seul de l’homme peut se passer le fait dramatique ; l’évènement qui en est l’occasion ne le constitue point. […] Une conception pareille peut amener d’admirables développements des affections passives du cœur, mais elle ne constitue pas une action tragique ; et dans les développements qui ne conduisent pas immédiatement à l’action, l’intérêt court risque de s’égarer et de rentrer ensuite avec peine dans la seule direction où il se puisse maintenir. […] Nos poëtes ont employé toutes les forces du génie à mettre en valeur cet étroit espace ; les abîmes du cœur ont été sondés dans toute leur profondeur, mais non dans toutes leurs dimensions.
Le roman, pour eux, n’était qu’un véhicule commode pour porter leurs idées plus loin, pour les faire entrer plus avant dans les esprits et dans les cœurs. […] On connaît un peu mieux la personnalité de Molière, parce qu’il est moins grand ; cependant lui aussi a la faculté de l’effacement, lui aussi a le pouvoir impersonnel de rire quand son cœur est brisé, et de donner le change à ses larmes. […] Il eut même les deux anarchies, celle du cerveau et celle du cœur. […] Cet homme qui a banni le cœur de ses œuvres et qui ne se l’est pas arraché pour cela, qui a écrit, dans un jargon insultant pour l’âme humaine, « cette maudite tendance morale qui déflore la pureté de l’art », passe à l’heure qu’il est pour un plus grand poète que Byron. […] La salamandre qui s’appelait Diderot, et qui vivait dans le feu de l’esprit, dans le feu du cœur, dans le feu des sens, dans le feu de l’enthousiasme, dans le feu de la gaîté et dans le feu des larmes, dans tous les feux que l’homme, d’essence immortelle, puisse allumer sur la terre avec la torche sublime de ses facultés, s’y est consumée… Et Gœthe, cette gélatine figée, vit toujours.
Il résiste de tout son cœur et de tous les points de son corps. […] Vous vivrez dans mon cœur. » On lui répondit par des applaudissements et la foule se précipita sur ses pas. […] Lafargue vit dans son cœur. […] La multiplicité des expériences sentimentales ne dessèche pas le cœur seul. […] La paix du cœur pour chacun, la paix matérielle pour tous est à ce prix.
Ce cri cesse-t-il de retentir un moment au fond du cœur de tout être vivant ? […] Je rougirais de nommer les affranchis plus riches que vous : c’est à ma honte, si celui qui occupe la première place dans mon cœur, n’est pas le plus opulent des Romains. […] Pourquoi les tyrans n’ordonnaient-ils pas la blessure au cœur ou là section des artères, dont on périt si rapidement ? […] donc ils avaient des cœurs de bronze ; la générosité ? […] Si l’on désire connaître la règle de nos devoirs, et le code auquel nous sommes soumis de cœur et d’esprit, il y a quelques années qu’il a paru sous ce titre.
Seigneur qui voyez leurs cœurs, accueillez dans votre puissance les biens de ces pauvres, qui sont plus démunis que les bergers et qui viennent vers vous de plus loin que les mages ! […] Cette évidence du désastre que sera le lendemain de toute cette existence de luxe et de délicatesse, donne un pathétique singulier à ces drames de cœur racontés par Feuillet. […] La désertion de 1918 n’eût jamais eu lieu si le fuyard avait eu le cœur d’un souverain qui ne se reconnaît pas le droit de démissionner et d’un militaire résolu à mourir plutôt qu’à reculer. […] Il était juste que la statue de ce vainqueur de la Marne fût dressée dans la ville où repose le cœur de Condé. […] mon cœur, loin de ces grèves Fuis et te plonge, insensé, Dans tout ce gouffre de rêve Que nous nommons le passé.
Nos yeux lisent, nos oreilles écoutent : nous pensons les formes et les sons des mots ; rien ne va à l’imagination ni au cœur, et rien par conséquent n’en sortira, si nous n’insistons et ne forçons le mot à céder sa place à la sensation même de l’objet, réveillée et rafraîchie.
Paul Laur Je mets au défi tout cœur de vingt ans que la vie n’a pas encore racorni de lire la Cithare sans une émotion profonde.
Chaque mère dans l’Amour maternel ne croit-elle pas entendre le cri de son propre cœur !
Sainte-Beuve Si l’on considère aujourd’hui le talent et les poésies d’Hégésippe Moreau de sang-froid et sans autre préoccupation que celle de l’art et de la vérité, voici ce qu’on trouvera, ce me semble : Moreau est un poète ; il l’est par le cœur, par l’imagination, par le style, mais, chez lui, rien de tout cela, lorsqu’il mourut, n’était tout à fait achevé et accompli.
Corneille avoit élevé le cœur de l’homme, Racine l’avoit attendri, Crébillon y a répandu cette terreur, un des plus grands & peut-être le premier ressort de l’art de Melpomene.
Ses Pensées, nous le répétons, étonnent l’imagination & remuent le cœur.
Dans ces tableaux secs & arides qu'on nous présentoit, l'Abbé Vély a senti, plus que tout autre, que l'Histoire doit être un cours d'instruction, où les plus petits détails ne sont point déplacés, quand ils peuvent contribuer à intéresser le cœur & à augmenter les connoissances.
L’auteur est fort loin de croire que toutes les parties de celui-ci en particulier puissent jamais être considérées comme matériaux positifs pour l’histoire d’un cœur humain quelconque.
Elle sera seule dans les ténèbres ; elle entendra autour d’elle les soupirs de cent amans heureux, son cœur et ses sens s’enflammeront des plus ardens désirs, elle appellera les malheureux à qui elle a fait concevoir tant de fausses espérances ; aucun d’eux ne viendra, et elle aura les mains liées sur le dos.
Cela fait frissonner d’horreur ou soulever le cœur de dégoût à celui qui a le moindre sentiment de l’élégance, de la noblesse, de la grâce.
L’esprit ne sçauroit joüir deux fois du plaisir d’apprendre la même chose, comme le coeur peut joüir deux fois du plaisir de sentir la même émotion.
Ainsi comme nous l’avons dit plus haut, la phrase héroïque, le sang me bout dans le cœur, fut résumée dans la langue vulgaire par ce mot abstrait et général, je suis en colère.
Chez Saint-Réal, l’amour de la reine Elisabeth pour le jeune prince son beau-fils, et de celui-ci pour elle, faisait la donnée principale et charmait les cœurs tendres ; le marquis de Posa, cet ami généreux de don Carlos, n’était qu’indique. […] Ce contraste du roi le plus sombre et le plus despotique, maître de tant de royaumes, et du cœur républicain le plus brûlant, le plus épanoui, le plus vaste, battant pour toute l’humanité et enveloppant dans son amour le monde entier, avec toutes les races futures, visant à réaliser au plus tôt le bonheur de l’espèce ou par le fils, le royal héritier de tant de sceptres, ou directement par le père même dès qu’il se flatte d’avoir action et prise sur lui, ce contraste une fois admis amenait des scènes d’un grand effet et d’une beauté morale saisissante, toujours à la condition de se laisser enfermer dans le cercle magique du poète. […] C’est bien peu après ce dernier et court moment d’illusion que la conduite de don Carlos vint derechef affliger son père, et lui mettre au cœur une de ces épines que les pères ambitieux ressentent peut-être encore plus vivement que les autres.
C’est au retour de ce voyage de Varennes qu’il reçut un de ces témoignages touchants qui se gravent dans le cœur comme la seule digne récompense du dévouement désintéressé. […] La Constituante close et dissoute sans réélection possible de ses membres, Malouet, « la tête épuisée de travaux, dit-il, et le cœur flétri », assiste en spectateur du dehors à la Législative. […] » — « Certainement, je le servirai de tout mon cœur ; il me connaît, il sait que je suis incapable de lui manquer de parole.
Ou bien c’est le roman qui nous séduit et nous appelle ; on veut se loger dans les plus tendres cœurs et être lu des plus beaux yeux. […] Cela est difficile à trouver178. » Il ajoute encore : « Les artistes sont les juges compétents de l’art, il est vrai ; mais ces juges compétents sont presque tous corrompus… Il y a environ trois mille ans qu’Hésiode a dit : Le potier porte envie au potier, le forgeron au forgeron, le musicien au musicien. » Sans doute un artiste, sur l’objet qui l’occupe et qu’il possède, aura des vues, perçantes, des remarques précises et décisives, et avec une autorité égale à son talent ; mais cette envie, qui est un bien vilain mot à prononcer, et que chacun à l’instant repousse du geste loin de soi comme le plus bas des vices, il l’évitera difficilement s’il juge ses rivaux ; sa noble jalousie (appelons ainsi la chose) le tiendra éveillé aux moindres défauts, et il sera prompt à voir et à noter ce qu’involontairement il désire ; ou bien, si la générosité du cœur s’en mêle, il ira au-devant du défaut, il passera outre et tombera alors dans des indulgences extrêmes, dans des libéralités qui ne sont plus d’un juge. […] lecteur, j’aurais pu affiler ma bonne lame, donner de la pointe à ce Scythe, à ce barbare, et lui rendre blessure pour blessure. — Mais nous autres, Grecs d’Athènes, si nous avons du sel aux lèvres, nous n’avons pas de fiel dans le cœur, etc., etc. » J’abrége la parodie : il ne manque à ce choc, à ce cahotage de tous les styles, que d’y avoir fait entrer plus au long ma bonne lame de Tolède ; l’amalgame eût été complet.
Son esprit n’avait jamais plus de vivacité que quand il servait son cœur. […] Nous partageons de grand cœur cette prédilection. […] Sa bonté de cœur attentive et délicate ne se démentit pas un seul jour au milieu des souffrances souvent très-vives qui précédèrent sa fin.
… soyez enthousiastes, soyez romanesques tout à votre aise… Et, comme je serais flatté que les anges enviassent mes larmes, j’approuve tout à fait ces lignes du Journal d’une femme : Mais tu me restes, ma fille… J’écris ces dernières lignes auprès de ton berceau… J’espère mettre un jour ces pages dans ta corbeille de jeune femme, mon enfant ; elles te feront peut-être aimer ta pauvre mère romanesque… Tu apprendras peut-être d’elle que la passion et le roman sont bons quelquefois avec l’aide de Dieu, qu’ils élèvent les cœurs, qu’ils leur enseignent les devoirs supérieurs, les grands sacrifices, les hautes joies de la vie.. […] Et cela est doux comme un rêve blanc de première communiante ; et ce roman pieux est un roman troublant ; Sibylle est une folle adorable qu’on voudrait rencontrer sur son chemin ; et comme on mentirait pour lui prendre son cœur ! […] Elles éprouvent d’abord à son endroit une sorte d’antipathie et de peur physique, comme si elle pressentaient vaguement qu’elles lui appartiendront tout entières et qu’elles souffriront par lui dans leur chair et dans leur coeur.
Les hommes tout à fait médiocres de cœur et d’esprit y sont, je crois, l’exception ; et les moins doués ont encore un orgueil du sang, un sentiment de la tradition, qui leur permettent de garder quelque tenue. […] On voit ainsi la vie à nu et l’on se fait un cœur compatissant. […] A quinze ans, le duc d’Anguien n’avait pour ainsi dire pas vu son père ni sa mère. « En apprenant, en imposant le respect à son fils, dit M. le duc d’Aumale, Henri de Bourbon négligea de faire naître, de développer dans cette jeune âme certains sentiments délicats, de toucher certaines cordes qui n’ont jamais vibré dans le grand cœur de Condé. » A la bonne heure !
La graisse m’en fige encore sur le cœur. » Ces parades, analogues à celles des tréteaux du Pont-Neuf, supposaient évidemment plus ou moins d’impromptu. […] La même phrase sert de conclusion aux deux œuvres ; voyez pourtant quel contraste : Et, pour tout dire enfin, jaloux ou non jaloux, Mon roi, sans me gêner, peut me donner à vous, dit Done Elvire, et Dom Garcie s’écrie : Ciel, dans l’excès des biens que cet aveu m’octroie, Rends capable mon cœur de supporter sa joie… ! […] — Ô mon cœur !
Cela entraine des conséquences graves : d’abord un dédain profond des classes subalternes, un parti pris d’écarter ce qui peut rappeler les vulgarités de la vie domestique ou populaire ; puis, entre les privilégiés admis sur un terrain de choix, un code très sévère de bienséances : peu parler de soi ; épargner l’amour-propre d’autrui ; flatter ou ménager les travers des gens en leur présence, ce qui n’interdit pas — au contraire — de les railler en leur absence ; beaucoup de tact et de circonspection ; adoucir les angles de son caractère ; mettre une sourdine aux émotions trop vives, aux convictions trop fortes ; laisser entendre ce qu’on ne peut pas dire tout haut ; s’habituer ainsi à une fine analyse des sentiments, à une psychologie déliée qui permet de reconnaître à un froncement de sourcils, à un regard, à une inflexion de voix les plus subtils mouvements du cœur. […] Faut-il rappeler ces traductions qu’on appelait « les belles infidèles » ; la Bible pomponnée, attifée, presque enrubannée ; les formules superbes prêtées aux orateurs des républiques antiques : Messieurs les Athéniens, j’ai l’honneur de vous proposer telle mesure. ; les hommes des siècles passés, qu’ils s’appelassent Achille ou Pharamond, dotés de cette majesté dont Louis XIV ne se départait pas, « même en jouant au billard » ; tel poète d’autrefois, à commencer par Homère, honni par les uns, parce qu’il a manqué aux convenances, en mettant aux prises des héros qui se traitent de cœur de cerf et d’œil de chien, défendu par les autres, au nombre desquels est Boileau, sous prétexte que le mot âne, trivial en français, est parfaitement noble en grec. […] Il ne sait que s’affliger, la bonne âme ; son plus grand effort va jusqu’à nommer ingrate celle qui lui perce le cœur.
Boutarel, qui est sincère, et ne se peut reprocher que d’avoir dit de surabondantes énormités sur la question — exècrent du meilleur cœur la musique de Berlioz ! […] S’il vous plaît de taire poursuivre cette enquête par un tribunal arbitral et si les journaux qui m’ont profondément blessé dans mon patriotisme et dans mon honneur consentent à en enregistrer les résultats, je renoncerai de tout cœur, par déférence et reconnaissance pour la presse parisienne, à l’action que j’ai intentée contre eux » Le président du Syndicat de la presse a répondu le 20 mai : « Monsieur, J’ai communiqué au Syndicat de la presse parisienne la lettre que vous lui avez fait l’honneur de lui adresser. […] La chose n’aboutit pas, et la Société se contenta de manifester son wagnérisme en introduisant dans la revue du duc de Massa qu’elle fit jouer à l’Opéra-Comique, le Cœur de Paris, la Valkyrie personnifiée par Mlle Desclauzas.
Un jour, à l’Opéra, il se trouvait dans la loge du jeune Dauphin, fils de Louis XIV, quand M. de Montausier entra : « J’étais à la joie de mon cœur, dit-il ; Rabat-Joie arriva. » Le chancelier de L’Hôpital en personne, voyant en cet état son indigne descendant, n’aurait pas ressenti plus de mépris : Madame ou mademoiselle, car je ne sais comment vous appeler, lui dit M. de Montausier en le saluant ironiquement, J’avoue que vous êtes belle, mais, en vérité, n’avez-vous point de honte de porter un pareil habillement, et de faire la femme, puisque vous êtes assez heureux pour ne l’être pas ? […] Une application infinie et un désir insatiable d’apprendre lui tenaient lieu de science ; plus il était ignorant, plus il affectait de paraître savant, citant quelquefois hors de propos des passages latins qu’il avait appris par cœur, et que ses docteurs à gages lui avaient expliqués. […] Il en a fait un délicieux de Mme de La Vallière, qu’il est juste de mettre en regard de celui de Colbert, où l’on vient de voir les plis du front : Elle avait le teint beau, les cheveux blonds, le sourire agréable, les yeux bleus, et le regard si tendre et en même temps si modeste, qu’il gagnait le cœur et l’estime au même moment : au reste, assez peu d’esprit, qu’elle ne laissait pas d’orner tous les jours par une lecture continuelle.
On cite de son enfance des réparties heureuses et des traits d’une prodigieuse mémoire : il retint un jour par cœur un sermon de l’abbé Poulle, pour l’avoir entendu une fois, et il l’écrivit au sortir de l’église. […] On y voit tout d’abord que la vie de l’archevêque de Cambrai réunit tout ce qui peut intéresser un « cœur sensible », des talents, des vertus et des « malheurs » ! […] Maury s’excuse encore de quelques conseils qu’il donne sur le propos des enfants gâtés : « Ne rendez pas ce mauvais service à votre aîné, et excusez le prêcheur Ragotin, prédicateur de grand chemin, qui se permet de vous ouvrir ainsi son cœur sans aucune réserve. » Cet abbé de Boismont, qu’était allé voir l’abbé Maury en Normandie, était riche bénéficier et de plus académicien.
Un écrivain justement célèbre par ses ouvrages, mais modèle quelquefois dangereux et juge quelquefois suspect en matière de goût, donne des éloges à cette phrase de La Rochefoucault, l’esprit a été en moi la dupe du cœur , pour dire, j’ai cru ma maîtresse fidèle, parce que je le souhaitais . […] On l’appellerait avec bien plus de raison style de la chaire ; c’est en effet celui de la plupart de nos prédicateurs modernes ; il fait ressembler leurs sermons, non à l’épanchement d’un cœur pénétré des vérités qu’il doit persuader aux autres, mais à une espèce de représentation ennuyeuse et monotone, ou l’acteur s’applaudit sans être écouté. […] La logique de l’Évangile est dans nos cœurs ; c’est là qu’on doit la chercher ; les raisonnements les plus pressants sur le devoir indispensable d’assister les malheureux, ne toucheront guère celui qui a pu voir souffrir son semblable sans en être ému ; une âme insensible est un clavecin sans touches, dont on chercherait en vain à tirer des sons.
Il y a ici, ce n’est pas contestable, une primogéniture dans le talent, un droit d’aînesse de toute évidence dont le très noble cœur de M. […] Comme toujours, quand ils sont remués dans les cœurs, les sentiments l’emportèrent, et ce qui entraîne les juges entraîna la Critique. […] … Pourquoi voir dans le Mystique et dans le Saint « seulement un pauvre moine grand par le cœur et par son dévouement à la patrie », et parler, avec l’embarras du rationalisme, cette lâcheté de la raison, du génie héroïque presque divin du grand homme dont oh extrait doucement Dieu pour le faire humainement plus grand.
Esprits qui s’entendent comme des cœurs ! […] Trop de cœur, messieurs ! […] À part ce trop de cœur, aux rares pages où il ne prêche ni ne gémit, l’auteur de la Psychologie se retrouve excellent, intéressant, animé.
Un théorème peut être émouvant et, résolu, faire battre le cœur. […] C’est dans ses phrases qu’il met son coeur. […] Ne fallait-il pas savoir par cœur les Orientales pour écrire les Occidentales ? […] Vielé-Griffin l’est aussi d’intelligence et de cœur. […] Il y a des circonstances où il vaut mieux consulter le dictionnaire que son cœur.
Il peut être considéré comme le cœur de l’ouvrage. […] Que son chant élève les âmes ou émeuve les cœurs, contribue à la paix ou gagne des batailles, c’est par-delà sa volonté. […] Il est au point où les idées vont prendre vie et remplacer les sentiments, où la pensée, cessant de s’abstraire, va battre de la pulsation même du cœur. […] et ceci : Il vient de se former de son cœur à mon cœur, Un pont délicieux dont je sens trembler l’arche. […] Anna de Noailles (1876-1933), poétesse et romancière, est notamment l’auteur de Le Cœur innombrable (1901).
Les morts qu’ont enlevés les maladies de cœur et de nerfs sont les victimes de la civilisation. Cœur et système nerveux s’écroulent tout d’abord sous le surmenage. […] » dans le troisième vers, cette fin : « désir du cœur », et après le quatrième vers, ceci : « Oh ! […] Douleur de cœur pour la fille du roi. […] Mon cœur pris en vos réseaux !
S’il avait un peu de tendresse dans le cœur, c’était plutôt pour une jeune et belle fille de Frascati.
Rallié de cœur aux principes de cette philosophie catholique, dont MM. de La Mennais et Gerbet sont les principaux organes, M. d’Ault ne conçoit Alger tout à fait bien colonisé que lorsqu’il sera aussi un peu évangélisé.
On arrête les battements de son cœur, pour mieux l’écouter, et on s’étonne de ne pas l’entendre.
Il se livre vraiment aux dieux qu’il ne connaît pas et qui sont les dieux de son cœur ; le Dieu qu’il connaît n’est que le dieu de sa raison.
Que ne laisse-t-il toujours son cœur souffrir simplement, sincèrement, comme il fit une fois sur la Jolie Morte ?
Remy de Gourmont Quand elles savent par cœur ce qu’il y a de pur dans Verlaine, les jeunes femmes d’aujourd’hui et de demain s’en vont rêver Au jardin de l’Infante.
C’est une belle chose d’avoir, par l’attrait de l’amour, forcé le cœur de l’homme à la vertu, et de penser que le même denier qui donne le pain du moment au misérable, donne peut-être à une âme délivrée une place éternelle à la table du Seigneur.
Et le singe, en le voyant pouffer, rit aussi de tout son cœur.
Malheureusement l’apparent et le matériel nous distraient de l’âme humaine : à trop partager son cœur, on abaisse l’idée que l’on se faisait de l’amitié. […] Ce n’est pas la musique qui fait couler nos larmes, ce sont celles qui tombent goutte à goutte des yeux et du cœur de la reine. […] Au son de cette musique guerrière, tous les courages s’affermissent ; les cœurs se haussent et volent au-devant de ce roi qui s’apprête à tirer l’épée pour ressaisir sa couronne. […] Ce n’est pas l’eau qui suggère au rabbin l’idée de sonder le cœur de la jeune fille ; elle ne lui offre que le moyen immédiat d’y parvenir. […] — Depuis que la lune est dans le ciel… Viens sur mon cœur ; que le tien le sente battre, et que ce beau ciel les emporte à Dieu… Voyons, savez-vous ce que c’est que cela ?
Oui, je dormais, oui, d’un doux songe Mon cœur se berçait enchanté. […] Que Caroline me réponde : Dites, vous la première amour De ce cœur qui devait un jour Battre pour l’empire du monde, Dites, n’a-t-il jamais dormi Sous les cerisiers de Valence, Aux temps d’ivresse et d’innocence Où vous l’appeliez votre ami, Quand le héros à son aurore, Si loin du zénith radieux, Brillait seulement à vos yeux D’une épaulette neuve encore ? […] En vain le soin des Dieux et l’amour des Déesses Environna son cœur des plus douces promesses ; A l’offre du Ciel même et des divins honneurs, Il fixait sur la mer un œil mouillé de pleurs. […] Mais non : tant qu’il trouve un voisin, Tout homme a le cœur d’Alexandre, Et, prince ou bourgeois, veut étendre Ou son royaume ou son jardin.
Voltaire, Diderot, Rousseau, qu’il exagère énormément en les décrivant, lui passent moins près du cœur que Condillac et Montesquieu, et on le comprend : Condillac est pour lui le matérialisme de la source, — les premières gouttelettes du fleuve immense ; Montesquieu, le ton de la bonne compagnie dans l’impiété, — si opposé aux engueulades athées et compromettantes de Diderot, — la haute discrétion dans l’audace dangereuse, extrêmement chère aux héros intellectuels d’à présent, et que M. […] À Paris, on met, il est vrai, les cœurs de Berthier et de Foulon dans des bouquets d’œillets blancs pour les présenter à la reine, et c’est une plaisanterie de ces délicieux Parisiens qui savent si joliment plaisanter. Mais en province, on mange les cœurs ; on est sérieux. […] Lorsque, dans une nation, le cœur est si haut, elle se sauve malgré ses gouvernants, quelles que soient leurs extravagances et quels que soient leurs crimes ; car elle rachète leur ineptie par son courage et couvre leurs forfaits par ses exploits !
Pour arriver plus tard jusqu’à Rome, on devait d’abord passer sur le cœur des enfants de Loyola ; on devait diminuer Rome partout où elle était, et elle existait partout où il y avait des Jésuites. […] En vain Clément invoquait Louis XV, ce roi sans cœur et sans mains, à qui il ne restait qu’un œil clairvoyant pour voir l’abîme dans lequel il tombait : « Je ne puis pas — dit le Pape dans ses lettres — condamner un Ordre exalté par dix-neuf de mes prédécesseurs. […] Des cœurs respectueux et affligés, des hommes comme Vincent Bolgeni, comme le cardinal Simone, en ont conservé le souvenir pour l’éternelle et consternante édification des pouvoirs qui ne savent pas résister. […] Elle purifie le regard comme elle purifie le cœur, elle donne une forte assiette à tout l’être.
Balzac a dit suprêmement bien que, pour lire son livre, il fallait de la pureté de cœur, et c’est peut-être ce qu’il y a de mieux à dire de tous les livres où la passion est vivement montrée, cette passion d’ailleurs inévitable, car sans elle l’art, qui prend son point d’appui et son assise dans la nature humaine, n’existerait plus. […] Les deux quartiers de cet homme, ainsi fendu par une blessure si longue et si béante, sont debout, quoique séparés, et son cœur, jaillissant de sa poitrine, saute, fusée sanglante, sur les genoux de sa maîtresse évanouie, comme s’il la connaissait encore ! Les détails de cette scène épouvantable sont traités avec une brutalité de vérité et une grandeur de nature physique qui rappelle les tragédies et les exploits d’un temps où les hommes envoyaient leur cœur à leurs maîtresses, où les maris le faisaient manger à leurs femmes, et où Godefroi de Bouillon partageait, d’un revers d’épée, un Sarrasin jusqu’à la ceinture, en entamant le garrot du cheval ! […] C’est ainsi que, dans ce roman sublime, Le Succube, quand il veut exprimer la dévorante séduction de cette Goule des cœurs, qui les suçait avec un simple regard jusque dans le fond de la poitrine, il figure cette puissance du regard par un rayon qui ressemble à un effet de soleil entrant par une porte ouverte et terminé par une griffe énorme… Un tel symbolisme est grossier et parfaitement indigne de l’artiste qui, dans Le Frère d’armes, a trouvé les deux yeux vivants du portrait, luisant si bien dans les ténèbres, et tirant, de leur expression seule, tout ce qu’ils ont de terrible et de merveilleux !
Il est vrai qu’il s’agit dans le cas présent de Montbrun, un des vaillants selon le cœur de d’Aubigné, un de ceux qui honorent le plus l’idéal qu’il a en vue, c’est-à-dire la chevalerie des guerres civiles. […] … Oui, le roi de Navarre, comme vous dites, a souffert de grandes misères et ne s’y est pas étonné : peut-il dépouiller l’âme et le cœur à l’entrée de la royauté ?
Vous voulez devenir esclave et avec cela demeurer roi dans mon cœur, cela n’est pas possible ; car, quel rapport y a-t-il de la lumière avec les ténèbres, et de Jésus-Christ avec Bélial ? […] Au petit rayon de clarté qui me paraît maintenant, mon esprit se développe et se met en devoir d’expliquer vos paroles, et de regarder d’un meilleur œil cette excellente fille qui a ravi votre cœur.
Après avoir marqué le caractère singulier de la bienfaisance constamment prêchée et pratiquée par l’abbé, qui n’était point celle d’un cœur sensible et tendre, mais qui procédait avec méthode au nom d’une raison sincère et convaincue : « Il avait aimé pourtant, ajoute-t-il : c’est un tribut que l’on doit payer une fois à la folie ou à la nature ; mais quoique cette folie n’eût point porté d’atteinte à sa raison universelle, sa raison particulière en avait tellement souffert, qu’il fut obligé d’aller dans sa province réparer, durant quelques années, les brèches que ses erreurs avaient faites à sa fortune. » On n’en sait pas plus long sur les fredaines de l’abbé de Saint-Pierre, et sans Rousseau on n’en aurait rien soupçonné. […] Lui, il raisonne, il moralise et abonde à cœur joie en son sens unique.
Au nord, l’Océan bat les falaises blanchâtres ou noie les terres plates ; les coups de ce bélier monotone qui heurte obstinément la grève, l’entassement de ces eaux stériles qui assiègent l’embouchure des fleuves, la joie des vagues indomptées qui s’entre-choquent follement sur la plaine sans limites, font descendre au fond du coeur des émotions tragiques ; la mer est un hôte disproportionné et sauvage dont le voisinage laisse toujours dans l’homme un fond d’inquiétude et d’accablement. — En avançant vers l’est, vous rencontrez la grasse Flandre, antique nourrice de la vie corporelle, ses plaines immenses toutes regorgeantes d’une abondance grossière, ses prairies peuplées de troupeaux couchés qui ruminent, ses larges fleuves qui tournoient paisiblement à pleins bords sous les bateaux chargés, ses nuages noirâtres tachés de blancheurs éclatantes qui abattent incessamment leurs averses sur la verdure, son ciel changeant, plein de violents contrastes, et qui répand une beauté poétique sur sa lourde fécondité. — Au sortir de ce grand potager, le Rhin apparaît, et l’on remonte vers la France. […] Ils ne sont point frappés par la magnificence de la nature ; ils n’en voient guère que les jolis aspects ; ils peignent la beauté d’une femme d’un seul trait, qui n’est qu’aimable, en disant « qu’elle est plus gracieuse que la rose en mai. » Ils ne ressentent pas ce trouble terrible, ce ravissement, ce soudain accablement du coeur que montrent les poésies voisines ; ils disent discrètement « qu’elle se mit à sourire, ce qui moult lui avenoit. » Ils ajoutent, quand ils sont en humeur descriptive, qu’elle eut « douce haleine nette et savourée », et le corps aussi blanc « comme est la neige sur la branche quand il a fraîchement neigé. » Ils s’en tiennent là ; la beauté leur plaît, mais elle ne les transporte pas ; ils goûtent les émotions agréables, ils ne sont pas propres aux sensations violentes.
Nos enfants l’apprennent par coeur, comme jadis ceux d’Athènes récitaient Homère ; ils n’entendent pas tout, ni jusqu’au fond, non plus que ceux d’Athènes, mais ils saisissent l’ensemble et surtout l’intérêt ; ce sont de petits contes d’enfants, comme l’Iliade et l’Odyssée, qui sont de grands contes de nourrice. […] Ce conseil-là vient si bien du coeur, que La Fontaine, l’homme insouciant, indifférent, s’indigne sérieusement contre le convoiteux et l’avare.
Nous avons une armée en Chine, nous avons une expédition en Cochinchine ; nous portons une escadre d’observation sur les côtes septentrionales des États-Unis d’Amérique, nous avons une colonie militaire en Afrique, nous avons une armée en Syrie, nous en avons une au cœur de l’Italie, à Rome ; nous avons une expédition française à Taïti, route égarée où ne passe aucune voile et qui ne mène à aucun but français sur l’immensité de ces mers futures ; nous avons un établissement armé dans un coin des Indes orientales, triste et impuissant mémento d’un empire qui n’est plus qu’un comptoir. […] Avec du cœur on fait de nobles imprudences ; avec des mots on soulève des peuples, c’est vrai ; mais avec des mots on ne refait pas des frontières !
Il n’est pas de ceux qui, sous prétexte de cœur, de sincérité et de passion, se confient à ce qu’ils appellent l’inspiration, et arrivent trop souvent au délire, n’étant pas doublés d’un critique. […] Plus d’émotion, plus d’idéal ; plus de sentiment, plus de foi ; plus de battements de cœur, plus de larmes.
598 Son spiritualisme absolu et son opinion arrêtée que la figure du vieux monde allait passer ne lui laissaient de goût que pour les choses du cœur. […] La religion de l’humanité, établie non sur le sang, mais sur le cœur, est fondée.
à tous les artistes, lorsqu’il s’écrie12 : Quand je vous livre mon poème, Mon cœur ne le reconnaît plus. […] Ce fut là le germe de cette haine inextinguible qui se développa depuis dans mon cœur contre les vexations qu’éprouve le malheureux peuple et contre ses oppresseurs.
Faut-il croire qu’il y a chez les philosophes une certaine tendance à négliger les phénomènes affectifs, et à s’inquiéter de la psychologie de l’esprit plus que de celle du cœur ? […] Mais si vous venez à mieux connaître cet homme ; que son commerce, son esprit, son cœur, ses relations, soient pour vous la cause d’autant de plaisirs, et qu’ils soient répétés pendant de longues années, il se produira une affection solide, résultant d’une masse de sentiments d’affection résultant eux-mêmes d’une masse de sentiments de plaisirs.
Et qui ne sait par cœur ces autres vers de la même pièce, La mort a des rigueurs à nulle autre pareilles, ………………………………………………… Le pauvre en sa cabane où le chaume le couvre Est sujet à ses lois, Et la garde qui veille aux barrières du Louvre N’en défend pas nos rois ? […] « Vous voulez, disait-elle au roi avant le mariage, la marier à votre fils (car vous m’avez dit qu’il l’était), pour la lui enlever. » Après le mariage, elle disait : « Le roi a voulu abaisser le cœur au prince de Condé et lui élever la tête. » (Mémoires de Sully, t.
Gouverner les nations, c’est assumer une responsabilité ; parler aux esprits, c’est en assumer une autre ; et l’homme de cœur, si chétif qu’il soit, dès qu’il s’est donné une fonction, la prend au sérieux. […] Cet ami, qui, depuis leur jeunesse à tous les deux, veut bien s’associer de cœur à tout ce qu’il fait, à tout ce qu’il entreprend et à tout ce qu’il rêve, réclame de longues lettres de son ami absent, et ces lettres, l’ami absent les écrit.
Le cœur humain fait son œuvre sur la terre, cela émeut les profondeurs. […] De toutes ces questions, celle entre toutes qui nous obsède l’intelligence, celle entre toutes qui nous serre le cœur, c’est la question de l’âme.
Suffit-il de s’asseoir sur un banc de mousse, au bord d’un ruisseau, et de mettre la main sur son cœur, en regardant la lune ou quelque étoile favorite ; d’évoquer la maison blanche aux volets verts, pour se dire l’annonciateur des fraternités et des bonheurs futurs ? […] Et n’est-ce pas à ces fins que nous ont préparés tous nos glorieux devanciers, grands initiés de tous les âges, prophètes et voyants, grands émancipateurs de la conscience humaine, dont nous ne pouvons évoquer le souvenir sans une étreinte au cœur, mais dont le verbe puissant sonne si haut tout au fond de notre rêve, que nous levons la tête pour les suivre ?
Ainsi le plus grand mérite d’un poëme nous échappe quand nous n’entendons pas les mots choisis par le poëte même, et quand nous ne les voïons point dans l’ordre où il les avoit arrangez pour plaire à l’oreille, et pour former des images capables de remuer le coeur. […] Dès qu’on ne retrouve plus dans une traduction les mots choisis par l’auteur, ni l’arrangement où il les avoit placez pour plaire à l’oreille et pour émouvoir le coeur, on peut dire que juger d’un poëme en general sur sa version, c’est vouloir juger du tableau d’un grand maître, vanté principalement pour son coloris, sur une estampe où le trait de son dessein seroit encore corrompu.
Entrés Barbares au cœur de l’Empire, ils y restaient ou ils en ressortaient Romains. […] Ce jour-là, il se frappa dans le cœur, dans le principe même de sa constitution.
Ce n’en est pas moins toujours, quel qu’en soit l’instrument, le parricide de l’idée chrétienne dont nous sommes tous les fils et qu’on frappe au cœur ! […] Le cœur de l’orgueilleux et voluptueux genre humain cloué avec amour à la croix des esclaves sur laquelle meurt un Dieu, les douze bateliers de Judée prenant la terre entière dans leur miraculeux filet, cette histoire, qui n’avait besoin que d’être racontée, depuis saint Paul jusqu’à Bossuet, pour que ceux qui n’étaient pas chrétiens le devinssent, — Credo quia absurdum et impossibile !
Nous l’affirmons avec une joie qu’un regret tempère : un catholique qui se serait plus hautement avoué dans un tel livre, et qui y aurait mis bravement le crucifix sur son cœur, aurait dit davantage ; mais, sur la limite où M. […] En les lisant, on est surtout frappé de cette idée que le dix-huitième siècle, dans sa haine contre le catholicisme, n’a pas seulement trouvé, pour la servir, des raisonneurs et des impies, comme l’affreuse société qui soupait contre Dieu chez d’Holbach, mais aussi des âmes d’élite, des cœurs tendres, aux intentions pures, de nobles esprits qui croyaient au ciel.
Ouvrez au hasard ce charmant petit livre, à l’encre rouge, et voyez si à toute page vous ne trouvez pas cet amour sensuel de la forme, cette exagération violente du pittoresque, ce mépris du bourgeois qui appartient à Gautier comme le mépris du philistin appartient à Heine, ce mutisme religieux, cette sombre et voluptueuse étreinte des choses finies, cette conception brute et blême de l’amour sans idéal et de la mort sans immortalité, et enfin, pour parachever le tout, l’éternelle assomption des Clorindes du bal Mabille et de la Maison-d’Or, qui meurent, dit le poète (dans Les Vignes du Seigneur) : L’estomac ruiné de champagne Et le cœur abîmé d’amour ! […] … Mais jusqu’à ce coup de foudre qui allume la poussière d’un homme et en fait un poète, et sur lequel il n’est permis à personne, si optimiste soit-on, de compter, que Monselet aille dans sa voie vraie, indiquée par la nature de ses facultés, et s’il fait des vers encore, que ce soit seulement pour ce public de cœur qui prend tout de nous avec ivresse, — nos rimes, nos cheveux et nos portraits !
Ces tambourineurs, même sur un tombeau, battront la caisse sur le sien, et si le cœur leur en dit, de cette fois ils peuvent frapper ferme… Le tombeau d’un homme de talent est toujours le meilleur tambour de sa gloire. […] De Balzac comme de Shakespeare, comme de tous les artistes plus grands qu’eux, s’il y en avait, rien un jour pourrait ne rester, si ce n’est l’observation qui transperce tout, les cris de nature bravement rugis et qui trouvent toujours le même écho dans les cœurs semblables, et enfin les vues inattendues de l’esprit, incarnées en des mots qui les rendent plus spirituelles encore.
. — Voici ce passage : « Moi aussi, j’aimerais de grand cœur à croire à un XVIIe siècle futur plutôt qu’à un Du Bartas, mais il n’est pas en nous que cela finisse de telle ou telle manière.
Letronne sur le cœur de saint Louis ; cette réponse, très-modérée et qui contient quelques considérations générales fort judicieuses à propos de la méthode critique exclusive de M.
Il est bien, en effet, un poète de transition et de l’époque intermédiaire, en ce sens qu’il unit en lui plus d’un ton de l’ancienne école et déjà de la nouvelle ; mais, ce que je prétends, c’est que ce n’est nullement par un procédé d’imitation ou par un goût de fusion qu’il nous offre de tels produits de son talent, car il est, il a été poète, sincèrement poète, de son cru et pour son propre compte ; il en porte la marque, le signe, au cœur et au front : il a la verve.
Est-ce en s’accommodant au ton du monde & de la société, qui n’est que l’image des travers qui nous déshonorent, qu’on pourra frapper les esprits & changer les cœurs corrompus ?
La Chasse d’Henri IV auroit été accueillie avec enthousiasme, quand elle n’auroit eu d’autre effet que de rappeler un trait intéressant de la vie d’un Monarque, dont le nom seul suffit pour attendrir les cœurs ; mais M.
Iraïl prend la peine de lui souhaiter, sans s’appercevoir qu’il avoit la véritable, celle du cœur.
La plupart, avec un esprit peu élevé, un cœur froid & stérile, une imagination pauvre & dénuée de vigueur, ont besoin d’entasser incident sur incident, d’avoir recours aux épisodes, de prodiguer les sentences, de multiplier les coups de Théatre, pour parvenir jusqu’au dernier acte ; encore finissent-ils le plus souvent par ennuyer le Spectateur, qui ne tolere le commencement, que dans l’espérance d’une fin plus heureuse, M. de Morand avoit assez de talent pour se dispenser de ces pitoyables ressources.
Nous renvoyons les Lecteurs de bonne foi à l’Ouvrage même : ils verront combien l’Auteur est éloigné de favoriser l’autorité arbitraire & le gouvernement despotique ; ils verront avec quelle force il défend les droits des Sujets, avec quel noble courage il présente au Prince, non seulement le tableau des devoirs de la Royauté, mais une infinité de principes & de vérités propres à écarter du cœur des Souverains, l’orgueil qui cherche sans cesse à les séduire & à leur faire oublier qu’ils ne sont sur le Trône, que pour rendre leurs Peuples heureux.
Le cœur est faux chez Amarante, Vesta nous montre un faux maintien, Lise est une fausse ignorante, Clindor est faux homme de bien.
Les Réflexions morales sur les Evangiles, l’Abrégé des obligations chrétiennes, ses Lettres spirituelles respirent une éloquence noble, vive & touchante, qui prend sa source dans un cœur fortement pénétré des vérités qu’il y expose.
L’estime de son peuple lui restait, mais le cœur de l’Italie était aliéné de lui. […] Les Vénitiens, comme les Toscans, restent les alliés de cœur de la France pendant les guerres de la révolution française en Italie. […] Ils avaient deux religions dans leur cœur, leurs princes et leurs prêtres ; superstitieux chez eux, héroïques dehors, bons et honnêtes partout, aussi propres à subir le joug de la conquête sans le secouer qu’à imposer ce joug à leurs voisins, quand l’inquiétude de la maison de Savoie les mettait à la solde des grands alliés auxquels on inféodait leur sang pour des causes toutes personnelles à ces princes. […] Il n’est pas permis à l’histoire sommaire et rapide d’entrer dans le secret des cœurs et dans la controverse des faits, plus ou moins authentiques, qui accusent ou disculpent le prince de Carignan d’initiative et de complicité avec le carbonarisme de Turin. […] Nous sommes en paix avec l’Allemagne, nous avons déclaré inviolabilité et respect aux Allemands au-delà du Rhin ; nous voulons d’abord, par une éclatante répudiation de l’esprit de conquête, effacer du cœur des peuples germaniques ces ressentiments (p. 406) funestes laissés en Allemagne par les conquêtes, les ravages, les humiliations du premier empire.
« Je quittai Cacault l’esprit plein de doutes et d’appréhensions, et le cœur agité en prévision de ce que le Pape résoudrait. […] Je devais affronter en public le premier choc de l’impétueuse colère qu’allait soulever dans le cœur du général Bonaparte l’annonce de la rupture que son frère devait lui communiquer. […] Bonaparte sentit l’utilité pour lui d’avoir le cœur du pape dans les mains d’un tel homme. […] Il en coûta beaucoup à mon cœur à cause des circonstances, et aussi parce qu’il fallait quitter celui que je vénérais et chérissais tant. […] Les convenances leur imposèrent cette réserve, et l’on s’imaginera facilement qu’ils eurent alors le cœur tourné vers d’autres pensées.
Et cependant, c’est tout un passé qui se prolonge et retentit en elle : le battement de son cœur est la continuation du battement de cœur universel ; la rougeur de ses joues est le signe visible d’une infinité d’émotions intérieures où se résument les émotions de toute une race ; ce n’est pas elle seulement qui aime, c’est l’humanité et même la nature entière qui aime en elle. […] La parfaite indifférence n’est qu’un instant de transition plus idéal que réel ; là où elle existe, elle révèle l’habitude prise et transmise héréditairement, l’organisation devenue automatique, comme pour les battements du cœur. […] Vous pouvez peu de chose sur vos organes intérieurs ; vous ne pouvez, par exemple, placer votre estomac ou votre cœur dans l’attitude active de l’attention, tandis que vous pouvez volontairement regarder, écouter, flairer, savourer, palper. […] La grâce est produite par une surabondance qui a pour résultat l’affranchissement du rude « combat pour l’existence », la liberté et l’aisance des mouvements, le jeu facile de la pensée, l’expansion du cœur et la générosité du vouloir : le vrai plaisir est la grâce de la vie.
Le monde qui apparaît de près, d’une démonstration immédiate qui dresse aussi merveilleusement les lieux qu’elle ouvre les cœurs. […] Dans ce monde récrié, incolore et mugissant des pages de jeunesse mais arrêté en ses lignes menues, vivent des hommes et des femmes à l’âme exquise, ardente ou grosse, mais montrés face à face et connus soudain en un geste, un mot, un accent, comme on connaît son propre cœur. […] Que l’on rapproche ce salut par la simplification de l’esprit et par l’innocence de la vie, de la conversion do Lévine, à ces pauvres paroles d’un paysan, qu’il faut vivre pour autrui ; que l’on relise la série de récits moraux, publiés sous le titre : La Recherche du Bonheur, Les Trois Morts, La Mort d’Ivan Iliitch, La Puissance des Ténèbres, Ivan l’Imbécile, ce sera encore l’humilité d’esprit, la pureté de cœur, la frugalité et la pauvreté que les œuvres de Tolstoï paraîtront recommander et suggérer avec une onction communicative et une insistance ouverte qui sont le fait, non plus d’un artiste, mais d’un prédicant. […] Comme Lévine, il a rencontré sur sa route un pauvre d’esprit dont les paroles ont retenti dans son cœur, comme une voix intérieure, et ce Slave dont l’âme violentée et repoussée par les durs dogmes de la science occidentale, demandait au monde plus de bonté qu’il n’en contient, cet aristocrate, cet homme de fortune, ce grand écrivain s’est retiré à la campagne, écrit des contes pour les moujiks, s’adonne à des travaux manuels, fait des souliers et raccommode des poêles, donne son bien en aumône, prêche la vie populaire, le refus du serment, le pardon des injures, l’union avec une seule femme, interdit le divorce, le service militaire, la violence, la résistance aux méchants, les injures et menace de fonder une nouvelle secte de gens scrupuleux et troublés dont il sera le patriarche, devenu aujourd’hui un grand vieillard de soixante ans, les cheveux longs rejetés en arrière du front creusé de profondes rides, au-dessus des yeux plus caves, mais fermes, inébranlablement fermes, les joues creuses autour du large nez et ployant sur de massives pommettes, la bouche droite, saillante et close, au milieu d’une longue barbe blanche tombant sur de larges épaules, l’air vénérable et sûr, de la certitude de ceux qui ont cru à jamais ; l’air noble et d’une joie austère, de la joie de ceux qui sont affermis dans leur foi. […] Pour remonter enfin de cette connaissance des dehors essentiels et subjectifs, de cette connaissance des corps, des physionomies, des actes, des situations, des conditions, à la sorte de mouvements psychiques qu’ils causent ou dont ils sont causés, Tolstoï dut posséder tout d’abord une notion absolument exacte du seul rapport d’homme à âme qui lui était accessible, du sien, — et compléter cette intuition par des aptitudes miraculeuses au raisonnement par analogie pour autrui, par la divination des variations de la relation entre le monde et les êtres selon la variété de ces derniers, par d’audacieuses, sagaces et instinctives hypothèses, par une souveraine imagination psychologique qui lui ouvrit le cœur des simples et des femmes, comme l’esprit des méchants et des penseurs.
Le vrai est que Malherbe était sincèrement monarchique, admirateur passionné du grand roi et sentant qu’il pouvait lui rendre en louanges ce qu’il en recevrait en bienfaits : « Il me semble que ce qu’il eût eu de moi valait bien ce que j’eusse reçu de lui. » Il avait, malgré son souci du positif, le cœur haut placé, celui qui a dit : Les Muses hautaines et braves Tiennent le flatter odieux, Et, comme parentes des Dieux, Ne parlent jamais en esclaves. […] Malherbe y est engagé par le cœur autant qu’aucun Français, autant que Richelieu lui-même. […] Courage, cœur. […] « A vous de cœur, « Béranger. » 18 janvier 1845. […] Allons-nous vers elles, elles font aussitôt la moitié du chemin ; leur disons-nous, « mon cœur », elles nous répondent, « mon âme »… Si après cela il y a malheur égal à celui de ne pouvoir plus avoir de part en leurs bonnes grâces, je vous en fais juge, et m’assure que vous aurez de la peine à me condamner. » 151.
A cet effet, il étudia attentivement des ouvrages de piété tels que : le Catéchisme, l’Abrégé du Catéchisme de persévérance, le Rosaire de Mai, et surtout l’Imitation : ce livre si intime et si puissant devait, mieux qu’aucun autre, lui apprendre à connaître la passion contenue qui gronde au fond du cœur de tout anachorète, et qui cherche son assouvissement dans un amour en quelque sorte matériel des mystères du christianisme, M. […] Parmi les nombreuses questions qu’il souleva, il en est deux que nous avons particulièrement à cœur d’élucider : Les uns accusaient M. […] A un moment où les misères du peuple émeuvent tous les cœurs généreux, où l’on cherche sérieusement un moyen d’y remédier, il serait criminel de calomnier ce peuple, d’exagérer ses vices ; mais il est honnête, utile et moral de le montrer tel qu’il est. […] Y en a-t-il trop pour faire saigner le cœur ? […] Elle résiste à son cœur qui la donnerait à Goujet ; elle résiste aux circonstances qui semblent conjurées pour la jeter dans les bras de Lantier.
J’étudie une leçon, et pour l’apprendre par cœur je la lis d’abord en scandant chaque vers ; je la répète ensuite un certain nombre de fois. […] A ce moment précis je sais ma leçon par cœur ; on dit qu’elle est devenue souvenir, qu’elle s’est imprimée dans ma mémoire. […] Le souvenir de la leçon, en tant qu’apprise par cœur, a tous les caractères d’une habitude. […] Et comme l’acquisition de ces souvenirs par la répétition du même effort ressemble au processus déjà connu de l’habitude, on aime mieux pousser ce genre de souvenir au premier plan, l’ériger en souvenir modèle, et ne plus voir dans le souvenir spontané que ce même phénomène à l’état naissant, le commencement d’une leçon apprise par cœur. […] Il est vrai que l’exemple d’une leçon apprise par cœur est assez artificiel.
J’aurais couru, aujourd’hui même, vous dire tout cela et bien d’autres pensées encore, que les vôtres ont réveillées en moi et ont fait naître ; mais je suis comme vous, j’ai cet honneur, et je suis de corvée tous ces jours-ci : je ne pourrai aller rue de la Ville-l’Évêque que vers la fin de la semaine, et je n’ai pu attendre jusque-là pour vous envoyer les remerciements d’un cœur comblé, pardonné et récompensé à jamais par vous.
Or il n’en est pas résulté que les gens du peuple en France aient su par cœur les vers de Malherbe et les aient pu comprendre.
A côté des scènes plaisantes d’hôtel garni et d’atelier, d’étudiants en droit et d’artistes, l’auteur sait introduire de fraîches descriptions de la nature, et même de touchantes situations de cœur.
Pour ceux qui connaissent son caractère de droiture, d’énergie et de franchise, ou qui ont apprécié la haute portée de son talent, c’était un besoin de manifester les sentiments d’estime et d’affection qu’ils lui portent : ceux qui partagent ses principes politiques ont dû lui savoir gré de cette généreuse ardeur toujours prompte à relever les provocations ou à venger les injures qui s’adressent à la cause de Juillet ; les hommes de cœur, enfin, qui, sans être attirés vers lui par une communauté d’opinion aussi étroite, ont pris en dégoût les honteuses palinodies qui font le scandale de notre temps, n’ont pu refuser quelque marque de sympathie à un écrivain dont la foi politique, éclairée et persévérante, va jusqu’au sacrifice de la vie.
L’indulgence du lecteur admettra facilement que de brèves allocutions, parties du cœur sans nul apprêt, à peu d’intervalle les unes des autres offrent des pensées qui se ressemblent.
Expressions parfaites d’un idéal où la raison, la vertu et la beauté sont inséparables, les littératures antiques, soit sous leur forme profane, soit sous leur forme chrétienne, étaient pour lui une révélation lumineuse, où il trouvait à toute heure ce qui nourrit l’esprit et réchauffe le cœur.
« Ensuite, si vous lisez ce petit Ouvrage, vous serez étonné de n’y trouver qu’un homme raisonnable, humain, philosophe même, qui combat un préjugé, qui pourroit avoir tort dans le fond, sans qu’il fût possible de lui faire le moindre reproche dans la forme ; enfin, qui n’a point cherché à justifier cette abominable catastrophe dont on le suppose le panégyriste, qui a tenu, à ce sujet, le langage d’un cœur compatissant & d’un esprit éclairé.
Jamais l’Athéisme ne parut plus réduit en principe, quoiqu’adroitement enveloppé, que dans cette Production, qui annonce par-tout l’esprit dur & le cœur corrompu.
Je contemplois déjà les miseres humaines, Et j’en accusois plus nos plaisirs que nos peines, J’en accusois sur-tout nos plaisirs amoureux, Comme les plus légers & les plus dangereux ; Je voyois qu’à la fin tous les cœurs s’en dégoûtent, Ou par les maux qu’ils font, ou par les biens qu’ils coutent ; Et me ressouvenant de ce qu’ils m’ont couté, Je m’en croyois aussi pour jamais dégoûté ; Mais j’osai voir Olympe, &c.
Des bacchanales, des fêtes de Vénus, des rapts, des métamorphoses, peuvent-ils toucher le cœur, comme les tableaux tirés de l’Écriture ?
Dira-t-on qu’ils ne connoissoient pas le coeur humain et les tempêtes que toutes les passions amoureuses y sçavent exciter ?
Lundi 19 janvier C’est typique, ces femmes scandinaves, ces femmes d’Ibsen, c’est un mélange de naïveté de nature, de sophistique de l’esprit, et de perversité du cœur. […] Lundi 1er juin J’ai eu du plaisir à retrouver dans une interview d’Hervieu, une idée de mon Journal sur l’avenir du roman, à la date du 6 juillet 1856 et qui dit : « … Enfin le roman de l’avenir est appelé à faire plus l’histoire des choses qui se passent dans la cervelle que des choses qui se passent dans le cœur. » Il me semble que c’est là, où va décidément le roman dans ce moment. […] Oui, c’est tout le long de cet escalier, exposée sur ces fragments de papyrus, toute la vie civile du peuple du rez-de-chaussée, ce sont ses contrats de vente (ses écrits d’oui), ses donations avec la formule : Tu as donné et mon cœur est satisfait, ses partages, ses prêts, ses inventaires, ses réclamations, etc., etc. […] Il disait être monté, rue du Bac, chez une ouvrière contrefaite, ayant une maladie du cœur, très avancée, et autour du lit, où elle était couchée, une vieille folle, qui était sa mère, dansait. […] » Il trouva une autre fois, une ouvrière, également contrefaite, également malade du cœur, dont la petite vierge était tout entourée de fleurs, et qui lui disait avec passion : « Oui, c’est mon aide, mon secours en ce bas monde !
Ministre de paix, de clémence et de charité, la douceur respirera sur mon front ; toutes les vertus paisibles seront dans mon cœur ; chargé de réconcilier le ciel et la terre, jamais je n’avilirai ces fonctions. […] Quelle digue opposer à une doctrine qui s’adressa d’abord aux passions les plus chères du cœur humain, et qui, avant les dures leçons de l’expérience, n’avait contre elle que les sages ? […] Son enthousiasme religieux effraya celle qui vous remplaçait auprès de votre fils (une belle-sœur de Mme de Costa) ; elle pria l’anachorète exalté de diriger ailleurs ses pensées et de ne former aucun vœu dans son cœur, de peur que son désir ne fût une prière : beau mouvement de tendresse, et bien digne d’un cœur parent de celui d’Eugène ! […] Au cœur de l’hiver, ils arrivèrent en foule et reprirent domicile dans le délai qui s’était prolongé jusqu’au 27 janvier 93 ; mais, au lieu de la tranquillité qu’ils avaient droit d’attendre, ils ne trouvèrent qu’une persécution cruelle. […] La foudre a tout frappé ; il ne me reste que des cœurs ; c’est une grande propriété quand ils sont pétris comme le vôtre.
Une action où la plastique, la musique et la poésie, également et harmonieusement, concourraient à ravir les yeux et les oreilles en même temps que le cœur, voilà certes un maximum dont le théâtre, et seul le théâtre, est capable. […] Cet art, si cher à notre cœur, allons-nous l’opposer à tout ce qui le précède ? […] Il y va de tout cœur, dans une entière certitude. […] D’une part celle du Moyen-Âge qui nous revient par l’étranger, spécialement par l’Angleterre ; de l’autre celle du xviie qu’il n’aurait pas le cœur de renier. […] Personne n’eut pu tarir en lui ce don du mouvement, cette divination du cœur humain et ce lyrisme actif qu’à un moindre degré il partageait avec Shakespeare, et la scène les eut servis.
En entrant dans cette partie, mon cœur est plein d’une joie sereine, et je choisis à dessein mes plumes les plus neuves, tant je veux être clair et limpide, et tant je me sens aise d’aborder mon sujet le plus cher et le plus sympathique. […] Decamps, armé d’un crayon, voulut lutter avec Raphaël et Poussin, — les flâneurs enthousiastes de la plaine et de la montagne, ceux-là qui ont un cœur grand comme le monde, mais qui ne veulent pas pendre les citrouilles aux branches des chênes, et qui adoraient tous M. […] Quand un chanteur met la main sur son cœur, cela veut dire d’ordinaire : je l’aimerai toujours ! […] J’ai entendu dire à un poëte ordinaire de la Comédie-Française que les romans de Balzac lui serraient le cœur et lui inspiraient du dégoût ; que, pour son compte, il ne concevait pas que des amoureux vécussent d’autre chose que du parfum des fleurs et des pleurs de l’aurore. […] Et comme moi, vous avez dit dans votre cœur : « Crosse, crosse un peu plus fort, crosse encore, municipal de mon cœur ; car en ce crossement suprême, je t’adore, et je te juge semblable à Jupiter, le grand justicier.
Il n’y a point de préceptes pour expliquer ces grâces secrètes, ces charmes imperceptibles, et tous ces agréments cachés de la poésie, qui vont au cœur. » qu’il est encore loin de nous et qu’il en est près ! […] Dès ce jour, du fond de mon cœur, je l’ai salué poète, et avec quelle joie ! […] jamais, dans ce temps-là, je n’ai cherché le sens des chants que tu chantais pour moi ; ma voix se contentait d’en saisir l’air, et mon cœur de danser sur la même cadence. […] Tout poète a dans son cœur un classiciste qui sommeille, toujours près de se réveiller ; tout critique, un Paul Souday ; tout philosophe, un rationaliste ; tout religieux, un faux dévot. […] Mais deux communications doivent particulièrement nous retenir au cœur du problème.
Vous y trouverez, sertissant des sentiments tour à tour frais à l’extrême et raffinés presque trop, des bijoux tour à tour délicats, barbares, bizarres, riches et simples comme un cœur d’enfant et qui sont des vers, des vers ni classiques, ni romantiques, ni décadents, bien qu’avec une pente à être décadents, s’il fallait absolument mettre un semblant d’étiquette sur de la littérature aussi indépendante et primesautière.
Mais il y a quelque chose de plus en elles : ce quelque chose qui révèle le pur poète sous la grimace du bouffon, — le cœur du bon et subtil
Soulary possède à merveille la langue poétique de la Renaissance, et, grâce à l’emploi d’un vocabulaire très large, mais toujours choisi, il a trouvé moyen de dire, en cette gêne du sonnet, tout ce qu’il sent, ce qu’il aime ou ce qu’il n’aime pas, tout ce qui lui passe par le cœur, l’esprit ou l’humeur, son impression de chaque jour, de chaque instant.
Assurément, chaque individu est un clavecin, tintant des cantiques ou des gavottes, — selon son cœur, ou selon l’heure.
Tantôt vous auriez entendu traiter les sujets les plus relevés, et tantôt vous auriez entendu rire de grand cœur à l’occasion de quelque conte exquis.
Pour revenir au roman dont on publie ici une nouvelle édition, tel qu’il est, avec son action saccadée et haletante, avec ses personnages tout d’une pièce, avec ses gaucheries sauvages, avec son allure hautaine et maladroite, avec ses candides accès de rêverie, avec ses couleurs de toute sorte juxtaposées sans précaution pour l’œil, avec son style cru, choquant et âpre, sans nuances et sans habiletés, avec les mille excès de tout genre qu’il commet presque à son insu chemin faisant, ce livre représente assez bien l’époque de la vie à laquelle il a été écrit, et l’état particulier de l’âme, de l’imagination et du cœur dans l’adolescence, quand on est amoureux de son premier amour, quand on convertit en obstacles grandioses et poétiques les empêchements bourgeois de la vie, quand on a la tête pleine de fantaisies héroïques qui vous grandissent à vos propres yeux, quand on est déjà un homme par deux ou trois côtés et encore un enfant par vingt autres, quand on a lu Ducray-Duminil à onze ans, Auguste Lafontaine à treize, Shakespeare à seize, échelle étrange et rapide qui vous a fait passer brusquement, dans vos affections littéraires, du niais au sentimental, et du sentimental au sublime.
Ceux qui gardent bien leur misère en leur cœur verront un jour leur ennui les quitter.
De même que l’Epoux de Hèrè lance la foudre, ce grand brui précurseur des batailles amères, ou de la pluie abondante, ou de la grêle pressée, ou de la neige qui blanchit les campagnes ; de même Agamemnôn poussait de nombreux soupirs du fond de sa poitrine, et tout son coeur tremblait quand il contemplait le camp des Troiens (sic) et la multitude des feux qui brûlaient devant Ilios, etc.
Et, pour tout dire enfin, ajoutons à ces qualités substantielles d’un ouvrage qui n’a pas la prétention d’en dire plus long qu’il n’est gros, quoiqu’il en dise beaucoup, que l’esprit qui l’anime est ce qu’il doit être, et qu’on y sent vibrer sympathiquement une âme à tous les coups qui frappent sur le grand cœur du Sacerdoce.
nous n’avons donc plus de têtes, de cœur, de passions, d’existence enfin ? […] On me dit que le mot Poète signifie », selon eux, organisation parfaite, cœur, esprit, imagination complète. […] Certes, j’aimerais mieux qu’il y eût cent écrivains de cœur, au lieu de quatre ou cinq, de même que j’aime à sentir autour de moi beaucoup d’amis. […] mais combien savent voir comme les gens de cœur ? […] Ceux qui échappent à la spontanéité du cœur sont plus beaux, plus cruels que ceux qu’ils trouvent en les secouant les uns contre les autres.
Voilà qui doit rassurer les cœurs sensibles sur la pérennité de la comédie humaine, écrite par le Bon Dieu avant celle de Balzac. […] Elle ne laisse debout que la pitié, et encore amoindrie et rapetissée au cloisonnement des cœurs défaillants, pour lesquels elle est une excuse. […] Il s’attache aux tempéraments violents, aux cœurs indomptables, aux âmes de tempête, aux esprits d’orgueil. […] On imagina de le porter, en grande pompe, ce cœur, d’abord au Panthéon, directement, puis au Panthéon, en passant par l’Arc de Triomphe ! […] Il remue le cœur, ainsi qu’un deuil immense et latent.
Elle n’offre pas précisément le spectacle de l’harmonie des vœux et des cœurs. […] » S’il était parti de l’idée de satisfaire à la fois toutes les chimères discordantes et inconciliables du cœur de l’homme, il n’aurait pas fait une autre combinaison que celle qu’il a faite. […] Il n’aurait pas de fondement, ou un fondement extrêmement incertain, dans le cœur de l’homme. […] Il ne suffit pas d’être en soi la vérité, pour agir efficacement sur l’esprit et le cœur des hommes. […] Poètes, de Maurice Scève à Laprade, ils sont symbolistes ; penseurs, d’Antoine Favre à Edgar Quinet, ils sont abstraits de tout leur cœur, amoureux des mythes et des figures.
Les Mémoires, on ne les connaît pas encore ; les Fables, on les sait par cœur.
De pures images pour les yeux, une délicieuse musique pour l’oreille et des notes émues pour le cœur, tout y est.
Schwob, Marcel (1867-1905) [Bibliographie] Cœur double (1892). — Le Roi au masque d’or (1893). — Mimes (1894). — Le Livre de Monelle (1894). — Annabella et Giovanni, conférence (1895). — La Croisade des enfants (1896) — Spicilège (1896). — Moll Flanders, traduit de Daniel de Foë (1896). — Les Vies imaginaires (1897). — Hamlet, traduit de Shakespeare avec Eug.
Le mérite qui distingue éminemment les Sermons de Massillon de tous les autres, est la connoissance du cœur humain qu’ils annoncent ; connoissance aussi délicate, que juste & profonde.
Pourquoi ne pas mettre son cœur dans un ouvrage sérieux, comme dans un livre purement agréable ?
Ils ont confisqué à leur profit une appellation qui convient à tout homme doué, quel que soit son genre de talent et de langage, de la puissance d’exalter la vie et d’élargir les battements du cœur.
Celle-ci a fourni le platonisme pour subtiliser la galanterie, et la forme de la pastorale pour isoler dans leur pureté tous les sentiments que la lutte ou l’accord des cœurs peut produire, abstraction faite des autres affaires et des autres intérêts du monde. […] Elle ne comporte ni la bonté du cœur, ni la force de l’intelligence, mais elle indique certaines manières d’avoir, ou de n’avoir pas, du cœur ou de l’intelligence. […] Ils sont les langues de la pensée, toujours promptes et adroites, les messagers parleurs du muet désir, hiéroglyphes et livres où l’on peut déchiffrer les secrets du cœur, — vifs et purs miroirs où transparaît tout ce qu’enferment les profondeurs de la poitrine275 », etc., etc.
Une bonne chose pourtant nous en resta, Richter ; et dès lors Richter a plus fait pour la cause Wagnérienne que tous les auteurs qui ont écrit sur le sujet, Richter fut le premier qui nous apprît que la question importante, à part même tout Wagnérisme. était le Style, et que, si nous désirions comprendre nos bien aimés Mendelssohn et Weber que nous croyions connaître par cœur, nous avions intérêt à nous tourner vers Wagner. […] Par un seul mot, mais par un de ces mots qui suffisent pour revêtir la Poésie de toute la majesté de la Vérité, sa sœur, Wagner révèle la grandeur des âmes insatisfaites au sein des plus suaves paresses, lorsque Tannhaeuser s’écrie : « Les jouissances » ne comblent pas mon cœur ! […] Le Ciel me sourit … la Nature me répond … et mon cœur crie hautement : Vers Elle ! […] Avec le pas léger et le sourire heureux de la première jeunesse qui n’a point encore perdu les gestes de l’enfance, elle accourt dans cette vaste salle, où elle avait entendu les chants qui s’étaient si profondément gravés dans son cœur, et où depuis la disparition de son poète elle n’était plus revenue.
Il caresse le lion apaisé, qui boit à sa coupe, et dit au pilote, resté seul avec lui à bord du vaisseau : « Rassure-toi, pilote cher à mon cœur ; je suis le bruyant Dionysos qu’a enfanté Sémélé, s’étant unie d’amour à Zeus. » Magie riante, sorcellerie lumineuse ! […] Il s’enfonce au cœur de l’Asie, et il en revient monté sur le chameau à deux bosses de la Bactriane, entouré de cymbalistes, de joueuses de flûtes et de bateleurs. […] Mais Pallas a recueilli le cœur encore chaud du petit martyr ; elle le porte à Zeus, qui en tire un nouveau Bacchus. […] Et, comme dit Homère : « Il gémissait et s’attristait dans son cœur. » Une légende musulmane raconte que Moïse, chassé par une peuplade sauvage de la citerne où il menait boire ses chameaux, changea en singes ces hommes inhospitaliers.
Il s’arrête à l’écorce des œuvres, et son analyse souvent éloquente ne pénètre jamais jusqu’au cœur de l’homme et de la société. […] Progrès accomplis Deux grands esprits, deux talents plutôt égaux que semblables présidèrent à cette restauration de l’intelligence, Chateaubriande et Germaine de Staël ; l’un catholique et royaliste de cœur et d’imagination, défenseur du passé, doué de toutes les aspirations de l’avenir ; noble courtisan de toutes les disgrâces, avocat chevaleresque de toutes les grandeurs malheureuses ; l’autre, fille de la Réforme, élève de la philosophie et de la liberté, mais de la philosophie sans irréligion, et de la liberté sans souillure ; passionnée pour toutes les grandes choses, et apportant au culte des lettres la délicatesse d’une femme et la haute raison d’un homme de génie ; tous deux partis des points les plus divers de l’horizon, et réunis ou du moins rapprochés à la fin de leur carrière par la pression des temps et la pente naturelle de la pensée. […] Dans toute œuvre d’art il y a donc deux parties, l’une toujours vivante, impérissable, parce qu’elle reproduit ce qu’il y a d’éternellement vrai dans la nature et dans le cœur humain ; l’autre sujette à l’instabilité des goûts et de la mode, parce qu’elle s’appuie sur des mœurs et des opinions qui se renouvellent sans cesse. […] Soldats intrépides ils couraient avec Cléon à Pylos, avec Nicias à Syracuse ; ce qui ne les empêchait pas de savoir par cœur les vers d’Euripide. — Mais ces vers étaient d’Euripide !
Charles-Quint y met des centaines de vers à s’éteindre le cœur ! […] … a trouvé de l’écho dans nos cœurs. […] Quoi qu’il en soit, du reste, la maternité, voilà le sentiment humain, à hauteur des cœurs de la foule, — car les sentiments qui font agir les hommes comme Lantenac ne sont qu’à hauteur de cœur de quelques-uns dans l’humanité, — la maternité, voilà le sentiment dont Victor Hugo, qui, pour le moment, crée des héros vieux et ne met plus d’amour dans ses livres, a voulu tirer des effets dramatiques et touchants… Mais en la peignant avec son matérialisme ordinaire, en l’expliquant avec ce matérialisme qui n’est plus uniquement poétique, mais philosophique par-dessus le marché, cette notion, il l’a déshonorée !
Bientôt cependant elle s’adoucit, ayant le cœur généreux et pitoyable ; de nouveau elle fait bonne mine au jeune homme, et, par une compensation logique, efface d’un baiser qu’elle se laisse prendre le souvenir de sa dureté. […] Que plus sage et plus vertueux est celui qui, en simplicité de cœur, suit l’instinct de la nature ! […] Il est croyant et pieux, comme Rutebeuf : si l’on ne regardait que l’élan du cœur, je dirais presque qu’il l’est comme Joinville.
Tant qu’il resta près d’elle, l’épouse résista aux désirs d’Égisthe : la chaste lyre était là pour chasser de son cœur les pensées mauvaises. […] Certes tu t’es trouvé souvent au milieu du carnage, entouré de morts, dans la terrible mêlée, mais tu aurais gémi dans ton cœur de voir cela. […] Ceux-là disaient à voix basse, en la voyant monter à la tour de Scée : « Certes, ce n’est pas sans raison que les Troyens et les Achéens aux belles cnémides endurent pour une telle femme des maux si affreux, car elle ressemble par sa beauté aux Déesses immortelles. » Ceux-ci l’appellent, en la maudissant, des noms qu’on donne aux enchanteresses : « Ame sereine comme la mer tranquille… parure de la richesse… trait charmant des yeux… fleur du désir enivrant le cœur. » — Plus tard, dans l’Oreste d’Euripide, Electre insulte d’abord Hélène, lorsqu’elle rentre de nuit dans Argos, « craignant les pères de ceux qui sont morts sous les murs d’Ilion ».
Bossuet écrit sans sourciller, tout en palliant les faits çà et là, là légende effroyable de ces vieux trônes antiques couverts de crimes, et, appliquant à la surface des choses sa vague déclamation théocratique, il se satisfait par cette formule : Dieu tient dans sa main le cœur des rois. Cela n’est pas, pour deux raisons : Dieu n’a pas de main, et les rois n’ont pas de cœur. […] Cette histoire-là, on l’enseigne, on l’impose, on la commande et on la recommande, toutes les jeunes intelligences en sont plus ou moins infiltrées, la marque leur en reste, leur pensée en souffre et ne s’en relève que difficilement, on la fait apprendre par cœur aux écoliers, et moi qui parle, enfant, j’ai été sa victime.
et la revoyant quelquefois ; et là, dans la paix, dans le silence, mûrissant quelques beaux fruits préférés, résumant dans quelque livre choisi, et qu’on ne recommence pas, les trésors de son imagination ou de son cœur, ou, comme Montaigne, le suc le plus exquis de ses lectures et de son étude ! […] Elle renferme dans son sein toute vérité connue de l’homme ; toutes les découvertes de la science, tous les faits constatés par l’observation des sens ou par l’instinct du cœur, tous les axiomes de la raison et de la morale sont les dogmes bienfaisants qu’elle nous propose. […] Je sais bien que, de nos jours, on a fait grand bruit de nos poètes tailleurs, menuisiers, forgerons : je respecte ces messieurs, et voudrais de grand cœur les admirer ; mais je sais aussi quelles sont les exigences de l’industrie.
Ménard, nous livre le secret de leurs cœurs, la nature et la forme de leurs espérances. […] Le cœur en trouve quelquefois de victorieuses, même contre l’esprit.
On nous apprend à aimer le beau, l’agréable, à avoir de la gentillesse en vers latins, en compositions latines et françaises, à priser avant tout le style, le talent, l’esprit frappé en médailles, en beaux mots, ou jaillissant en traits vifs, la passion s’épanchant du cœur en accents brûlants ou se retraçant en de nobles peintures ; et l’on veut qu’au sortir de ce régime excitant, après des succès flatteurs pour l’amour-propre et qui nous ont mis en vue entre tous nos condisciples, après nous être longtemps nourris de la fleur des choses, nous allions, du jour au lendemain, renoncer à ces charmants exercices et nous confiner à des titres de Code, à des dossiers, à des discussions d’intérêt ou d’affaires, ou nous livrer à de longues études anatomiques, à l’autopsie cadavérique ou à l’autopsie physiologique (comme l’appelle l’illustre Claude Bernard) ! […] Un cœur éminent (Enfantin), qui vient de s’éteindre, y avait songé ; d’autres depuis y ont songé encore.
La Harpe, qui avait grand cœur dans un petit corps, et qui soutenait si rude guerre contre Dorat et les petits poëtes de son temps (cela nous fait maintenant l’effet de l’histoire des pygmées, tant nous sommes devenus des géants), La Harpe, dis-je, n’avait point cette modération de laquelle la vivacité même du critique ne devrait jamais se séparer. […] Mais, pour cela, une certaine générosité de cœur ne suffit pas, c’est une générosité civilisée qui y prépare… » Et encore, pour exprimer le regret et le dégoût d’avoir à s’occuper de ce qui est si loin et de ce qu’on rencontre si près des muses, j’ajoutais en terminant : « Bien mieux vaudrait ignorer.
Le Ciel connoît le fond de mon cœur, c’en est assez pour me rendre tranquille. […] « Je vous souhaite, mon Révérend Père, une parfaite santé et beaucoup de contentement, et je forme ce souhait avec la même sincérité de cœur que vous m’avez connue lorsque nous demeurions sous le même toit.
La privation absolue d’une telle affection se fait apercevoir, non seulement dans la peinture de l’amour, mais dans tout ce qui tient à la délicatesse du cœur. […] Les Grecs honoraient les morts ; les dogmes de leur religion ordonnaient expressément de veiller sur la pompe des funérailles ; mais la mélancolie, les regrets sensibles et durables ne sont point dans leur nature ; c’est dans le cœur des femmes qu’habitent les longs souvenirs.
C’est dans ce monde doux et divin que se réfugie le cœur attristé, affamé de mansuétude et de tendresse. […] Pour faire cet office, il n’a pas besoin d’ancêtres, ne lui faut que du cœur, il est lui-même un ancêtre ; on est trop heureux du salut présent qu’il apporte pour le chicaner sur son titre. — Enfin, après tant de siècles, voici dans chaque canton des bras armés, une troupe sédentaire, capable de résister à l’invasion nomade ; on ne sera plus en proie à l’étranger ; au bout d’un siècle, cette Europe que saccageaient des flottilles de barques à deux voiles, va jeter deux cent mille hommes armés sur l’Asie, et désormais, au Nord, au Midi, en face des Musulmans, en face des païens, au lieu d’être conquise, elle conquiert.
Que valent ces traits : Rodrigue, as-tu du cœur ? […] Voltaire, imitant Shakespeare, a tout réduit, sous prétexte de régularité et de correction, à une précaution oratoire d’Antoine prend une fois pour toutes : Contre ses meurtriers je n’ai rien à vous dire ; C’est à servir l’État que leur grand cœur aspire…… Sans doute il fallait bien que César fût coupable.
Bonhomme au reste, obligeant, généreux, tout plein de bons sentiments, bon fils, bon frère, bon père, bon mari même, à la fidélité près, bon ami, chaud de cœur, enthousiaste, toujours prêt à se donner et se dévouer : à condition seulement qu’il puisse s’épancher librement, toujours heureux de se mettre en avant, d’être d’une négociation, d’une affaire où il y ait à brûler de l’activité, à évaporer de la pensée en paroles. […] « Le premier serment que se firent deux êtres de chair, ce fut au pied d’un rocher qui tombait en poussière ; ils attestèrent de leur constance un ciel qui n’est pas un instant le même ; tout passait en eux, autour d’eux, et ils croyaient leurs cœurs affranchis de vicissitudes.
D’autres appellent « lecture » leur habitude de rêver sur les pages d’un livre, où ils s’imaginent parfois avoir trouvé, comme Diderot, ce qui n’a jamais été que le jeu de leur fantaisie ou l’émotion de leur cœur. […] Les élèves n’en retiraient rien que l’habitude d’appliquer des formules apprises par cœur à des ouvrages qu’ils n’avaient pas lus : acquisition utilisable au baccalauréat, pernicieuse d’ailleurs pour l’esprit.
Jacquinet oublie de nous dire ce que cette aimable femme tenait de son mari et transmit à son amant, et quel clou chassait l’autre dans le cœur de Mme du Châtelet. […] Mais pourquoi, si quelques-unes ont été, par l’imagination et surtout par le cœur, de grands poètes, n’en voyons-nous point qui l’aient été par la forme ?
(le Cœur me fait mal). […] Au bout de ce temps, une autre dame de la cour d’Auguste, qui, à cette époque, avait du crédit sur le cœur et l’esprit du roi de Pologne, engagea ce prince à visiter sa prison d’État.
Souvent il déclare que le royaume de Dieu est déjà commencé, que tout homme le porte en soi et peut, s’il en est digne, en jouir, que ce royaume chacun le crée sans bruit par la vraie conversion du cœur 813. […] Ceux qui ne se plient pas à concevoir l’homme comme un composé de deux substances, et qui trouvent le dogme déiste de l’immortalité de l’âme en contradiction avec la physiologie, aiment à se reposer dans l’espérance d’une réparation finale, qui sous une forme inconnue satisfera aux besoins du cœur de l’homme.
Au sein de cette vie troublée, le cœur sensible et bon de Jésus réussit à se créer un asile où il jouit de beaucoup de douceur. […] » Jésus perça au cœur l’hypocrisie, et du même coup signa son arrêt de mort.
Une étincelle lui traversa-t-elle le cœur ? […] Sa fille hérita de toutes les épargnes de ce cœur si riche et si sensible, et qui avait dit jusqu’à ce jour : J’attends.
L’homme passe, ce drame reste, ayant pour fond éternel la vie, le cœur, le monde, et pour surface le seizième siècle. […] Tends-lui l’oreille, la main, les bras, le cœur.
Mais heureusement pour nous, et j’ose dire heureusement pour elle, — car l’âme des saints doit être avide, même dans le ciel, de faire, par leur exemple, d’autres saints sur la terre, — il y eut dans sa vie, toujours cachée ou empêchée, le hasard providentiel de la rencontre d’un poëte et d’un cœur religieux, sans lequel nous n’aurions aujourd’hui ni l’immense poëte qu’elle fut, elle, ni la sainte aux grâces transcendantes, que M. […] Oui, pour rester inconnue, excepté de Dieu, il ne s’en est fallu que de la mince épaisseur de l’homme qui admira, sans réserve et sans peur, le spectacle qu’elle faisait à elle seule et qui était d’une sublimité si déconcertante que les cœurs les plus forts en tremblaient, et que les esprits les plus ouverts aux choses de la foi se fermaient presque au témoignage de leurs yeux qui le contemplaient.
Toutes célèbres à des titres divers, cette cargaison de nièces, venues d’Italie par le coche, étaient et furent les crampons à l’aide desquels l’officier de fortune, devenu cardinal et ministre d’État, entra dans le cœur des plus grandes familles de son temps. […] Louis XIV n’est encore le soleil (nec pluribus impar) que dans les ballets et dans le cœur des filles d’honneur de la reine sa mère.
Et cette raison que je dirai, cette raison plus profonde que le talent, plus involontaire que la conviction dans l’auteur de l’Histoire de la Liberté religieuse, c’est son âme même, son instinct de cœur le plus vrai, c’est ce que les hommes et lui-même n’ont pas mis en lui et ce qui, pour cette raison, y est davantage ! […] Michelet, ce haïsseur d’imagination, cette grêle couleuvre après tous ces boas, qui a dans la tête un venin qui peut-être ne descend pas jusqu’à son cœur !
Le second acte a des parties énergiques dans le rôle du ministre ; il en est partout de délicates et de fines dans le rôle de Cécile, surtout au moment où, forcée par la calomnie, elle ose regarder en elle-même et s’avouer son amour pour son tuteur : ce revirement de cœur est traité à merveille.
Viollet-Le-Duc ne manque pas : Semblables au François qui, durant son jeune aage, Et du Tibre et du Pô fraye le beau rivage : Car, bien que nuict et jour ses esprits soyent flattez Du pipeur escadron des douces voluptez, Il ne peut oublier le lieu de sa naissance ; Ains, chasque heure du jour, il tourne vers la France Et son cœur et son œil, se faschant qu’il ne voit La fumée à flots gris voltiger sur son toict.
Telle est la première règle, et Molière est le poète comique qui a porté le regard le plus pénétrant et le plus ferme dans les ténèbres intimes du cœur humain247.
Jules Lemaître Ce Louis Bouilhet, c’était pourtant un très brave homme, et que Flaubert aimait de tout son cœur.
Au seuil de l’antre, paré d’acanthes et de roses, les flûtes douces des pasteurs charment les vierges à l’œil bleu ; mais, au dedans, la sombre nuit règne comme au cœur vaste et profond des hommes.
Dès la dédicace : Tous les baisers, etc…, j’ai vu ce qu’était votre livre et mon cœur a reconnu la poésie et, tendrement, à vous lire, il fleurissait.
Raymond de La Tailhède, sitôt après le Tombeau de Jules Tellier, changea non seulement d’inspiration, mais de cœur, pourrait-on dire.
Le fruit sec, le cœur sec n’aime pas et n’entend pas : quand il répète, il joue faux.
Il veut trouver un sage, & ne voit que des fous ; Déjà son front se ride, & son cœur se consterne.
que le style, en un mot, n’en soit brusque, tranchant, sans aucune liaison, & par-là, d’une aridité qui fatigue, & démontre combien l’affectation d’esprit & de philosophie desseche le cœur & les Lettres ?
Et veux-tu de son cœur qu’étouffant le murmure, Il ajoute à l’impôt qu’il paye à la Nature ?
Horace a-t-il mis plus d’énergie dans sa fameuse Strophe du Pallida mors aquo pulsat pede, que Malherbe dans sa riche Imitation, que tout le monde sait par cœur ?
Les Essais de Morale & de Littérature de cet Auteur sont remplis de réflexions vraies, solides, instructives, profondes, & toujours bien exprimées ; il en est un très-grand nombre de fines & de délicates qui annoncent un bon Littérateur, un Critique habile, & un ingénieux Interprete du cœur humain.
Théophraste conjecture, La Rochefoucault devine, et La Bruyère montre ce qui se passe au fond des cœurs.
Cicéron défend un client ; Démosthène combat un adversaire, ou tâche de rallumer l’amour de la patrie chez un peuple dégénéré : l’un et l’autre ne savent que remuer les passions, et fondent leur espérance de succès sur le trouble qu’ils jettent dans les cœurs.
On y voit un homme qui forcé d’habiter une retraite & d’avoir un correspondant à Paris, donne à ce correspondant des éloges que le cœur ne paroît pas dicter.
S’il ne fallait, pour être artiste, que sentir vivement les beautés de la nature et de l’art, porter dans son sein un cœur tendre, avoir reçu une âme mobile au souffle le plus léger, être né celui que la vue ou la lecture d’une belle chose enivre, transporte, rend souverainement heureux, je m’écrierais en vous embrassant, en jetant mes bras autour du cou de Loutherbourg ou de Greuze : Mes amis, son pittor anch’io.
Nibelle, comme inspiration et comme forme, a goûté à cette candide coupe de lait écumant dans laquelle buvait Yorick… Lorsque la visée commune est la force, soit dans l’expression des caractères ou des passions, soit dans les situations dramatiques, à une époque de corruption et de décadence où l’on a transporté dans le langage, cette forme rationnelle de la pensée, la couleur torrentielle des peintres les plus éclatants, il faut savoir bon gré à un jeune homme d’avoir, dans ses premiers récits, été sobre et simple comme s’il avait eu l’expérience, et de ne s’être adressé qu’aux saintes naïvetés du cœur pour plaire et pour intéresser.
Ce cœur brûlant a cessé de battre. […] Française de cœur et d’esprit, elle a aimé tendrement et uniquement cette France à qui elle s’était donnée et à qui elle a fait le don royal de sa mémoire et de son œuvre. […] Cernuschi, aux accents de la Marseillaise et de l’hymne italien, serrait sur son cœur les drapeaux fraternels. […] Il avait horreur de l’injustice pour l’avoir subie plus d’une fois et parce qu’il avait le cœur généreux. […] Aussi lui passait-on ses boutades et même ses insolences, parce qu’elles n’étaient que le masque de ses secrètes qualités de cœur.
On n’est pas obligé de savoir tout par cœur. […] Jamais le cœur humain n’a tenu moins de place. […] Non pas que je m’attendisse à un éloge selon mon cœur, et les bruits avant-coureurs étaient des plus pessimistes. […] Stendhal et ses héros favoris ne visent jamais qu’aux plaisirs les plus raffinés de l’esprit et du cœur. […] Charmante jeune fille en fleur, mais avec un cœur d’artichaut, si j’ose m’exprimer ainsi.
Un « acteur au cœur de tigre » : ce n’est pas notre affaire. « Plagiaire éhonté » : plagiaire de qui ? […] La véritable Manon, c’est dans le cœur de l’abbé Prévost qu’elle a vécu et puis est morte. […] Et je disais que, Manon, c’était dans le cœur de des Grieux ou de l’abbé Prévost pareils qu’elle vivait et puis mourait. […] Madame, quelle corruption il faut avoir dans l’esprit et dans le cœur pour être capable d’imaginer tout cela ! […] Toute parole tombait lourdement sur mon cœur.
Et d’abord, il s’est présenté lui-même, tel qu’il est, avec son propre accent, avec ses sentiments et ses doctrines ; il n’a pas emprunté aux traditions académiques les exordes tant de fois renouvelés : il a parlé à sa manière, modestement, honnêtement, traçant de l’homme de lettres et du poète le caractère et le rôle qu’il conçoit, et s’y peignant lui-même avec cette sincérité élevée qui vient du cœur : on a senti dès ses premières paroles quelqu’un qui ne se mettait ni au-dessus ni au-dessous de ce qu’il devait être.
Plus d’une m’a remis la clef d’or de son âme ; Plus d’une m’a nommé son maître et son vainqueur ; J'aime, et parfois un ange avec un corps de femme Le soir descend du ciel pour dormir sur mon cœur.
Même en énumérant les qualités des talents amis, il y a un mot qu’il ne faudrait jamais perdre de vue, le circum prœcordia ludit, qu’un satirique accorde à l’aimable Horace : se jouer autour du cœur de ceux même qu’on caresse, et montrer qu’on sait les endroits où l’on ne veut pas appuyer.
« Enfin, nous avoue-t-elle ingénument, je n’ai été étrangère à rien, j’ai pu parler passablement de tout ; mais je n’ai su parfaitement que ce qui se rapporte aux beaux-arts, à la littérature et à l’étude du cœur humain. » Je ne m’arrête pas à des anecdotes bien longues dont madame de Genlis nourrit habilement son récit : comment dans ses retraites au couvent elle barbouillait la nuit les vieilles religieuses, comment elle mystifiait le chevalier Tirtame, ou frappait aux vitres des paysans du village.
Tout ce qu’il y a de sang gaulois dans le cœur du petit livre de M.
Ses amis pouvaient à leur aise réaliser avec l’art secondaire de la peinture ; lui se contentait de presser doucement son cœur pour en faire jaillir de tendres souvenirs.
Il a écrit à la loupe, il a rendu visibles des mondes sur un brin d’herbe, il a miniaturé le cœur humain ; il a été le Rembrandt des demi-jours et des demi-nuances, li a efféminé le style à force d’analyser la sensation.
. — Cœurs meurtris (1896). — Fleur de Nice (1896). — Josette (1896). — Poésies (1896). — Boisfleury (1897)
Une grande agrégation d’hommes, saine d’esprit et chaude de cœur, crée une conscience morale qui s’appelle une nation.
Un ton noble & mesuré dans l’exorde, des gradations bien amenées dans le cours du discours, une chaleur qui naît de la force des raisons, des réflexions vives & pénétrantes, un pathétique qui acheve, dans la péroraison, de subjuguer le cœur, après avoir captivé l’esprit, sont des ressorts qu’il manie toujours avec un succès, fruit du génie, de l’art de le modérer & de lui donner l’essor à propos.
On ne goûte, en ce genre, que ce qui part du cœur & de la raison.
Nous aimons mieux croire qu’il les devoit à son mérite & à ses manieres, que d’aller chercher dans le fond de son cœur un vice qui déprécieroit tous ses talens.
On chercheroit en vain, dans ses Epîtres & dans ses Discours philosophiques, ce ton d’aigreur & de cynisme, qu’un coloris séduisant n’est pas capable d’adoucir ; ces maximes hardies qui défigurent toutes notions ; cet appareil de sentiment qui n’échauffe que l’imagination & laisse le cœur froid.
Mettre en présence, dans une action toute résultante du cœur, deux graves et douloureuses figures, la femme dans la société, la femme hors de la société ; c’est-à-dire, en deux types vivants, toutes les femmes, toute la femme.
Mais le trait, lancé contre l’auteur des Entretiens, étoit entré trop avant dans son cœur pour l’en arracher.
Mais le Tasse est presque toujours faux quand il fait parler le cœur ; et comme les traits de l’âme sont les véritables beautés, il demeure nécessairement au-dessous de Virgile.
Le Dieu qui régit les mondes, qui crée l’univers et la lumière, qui embrasse et comprend tous les temps, qui lit dans les plus secrets replis du cœur humain : ce Dieu peut-il être comparé à un dieu qui se promène sur un char, qui habite un palais d’or sur une montagne, et qui ne prévoit pas même clairement l’avenir ?
Et sans doute ce sont des héros, ces martyrs, qui, domptant les passions de leur cœur et bravant la méchanceté des hommes, ont mérité par ces travaux de monter au rang des puissances célestes.
Il y a des vérités qui sont la source des plus grands désordres, parce qu’elles remuent les passions ; et cependant, à moins qu’une juste autorité ne nous ferme la bouche, ce sont celles-là même que nous nous plaisons à révéler, parce qu’elles satisfont à la fois et la malignité de nos cœurs corrompus par la chute, et notre penchant primitif à la vérité.
Un autre homme, dont les yeux ne sont point conformez aussi heureusement, mais dont le coeur est plus sensible que celui du premier, trouve dans les expressions touchantes un attrait superieur au plaisir que lui donnent l’harmonie et la verité des couleurs locales.
Le moraliste, que j’ai vu aussi dans ces Propos littéraires et pittoresques, où l’auteur tire les petits ridicules comme les bécassines, et en entretiendrait la cuisine du Nain Jaune s’il lui plaisait, le moraliste doublera parfaitement le peintre quand Dusolier voudra sérieusement être romancier et regarder dans les cœurs et dans le sien comme il sait regarder dans les choses extérieures, — les paysages de ses campagnes ou les êtres de son logis !
Jeune de cœur, chaud d’espérance, il cherchait le beau avec la tenace candeur d’un homme qui croit que le beau peut encore se trouver. […] Ton indignation ne l’épouvante guère ; Crois-moi donc ; laisse en paix, jeune homme au noble cœur, Ce Zoïle à l’œil faux, ce malheureux moqueur. […] Je ne parle plus du style : à part quelques passages, où le cœur rencontre par hasard, et comme de lui-même, la belle et pure langue d’autrefois, tout le reste est prétentieux ou hérissé d’incorrections ; on sent à chaque phrase un anneau qui manque à la chaîne des idées. […] « À vous de cœur, A. […] « Quant à la façon leste et pédante avec laquelle M…… traite les hommes de talent et de cœur, qui valent mieux que lui, nous croirions faire injure à ces hommes en prenant leur défense.
C’est la raison pour laquelle cet art de Molière nous tient tant au cœur, à nous, les Français de 1922. […] Les paroles qu’ils ont prononcées, parce qu’ils étaient avec moi en ouverture de cœur, je les consigne scrupuleusement. […] » Le meilleur moyen d’empêcher cet attentat, qui serait un suicide, c’est, pour sauver le cœur du pays, de défendre d’abord son cerveau. […] Il suffit qu’ils la saisissent, cette Société, sous cette forme immédiate et accessible à toutes les intelligences parce qu’elle l’est à tous les cœurs, qui est la Nation. […] C’est encore une influence à signaler que celle de ce sentiment si peu généreux, mais si fréquent, qui crispe de haine le cœur de l’homme dénué devant le bonheur de l’homme comblé.
Le cœur humain de qui ? Le cœur humain de quoi ? Quand le diable y serait, j’ai mon « cœur humain » moi ! […] Qu’est-ce que c’est que l’art sans les cœurs ou les esprits où on le verse ? […] 2º Deux pièces de théâtre : Le Candidat, 1874 ; — et Le Château des cœurs, 1879.
Tous les partis ont leurs bons et leurs méchants, et ne diffèrent que par le but ; mais vous conviendrez qu’entre un Bailly mourant la tête et le cœur pleins de vérité, et un d’Éprémesnil mourant plein d’entêtement, quoique le sacrifice soit le même, le mérite ne l’est pas. […] Mais il avait, il a ce que j’aime à nommer le sentiment consulaire, c’est-à-dire un sentiment assez conforme à cette belle époque, généreux, enthousiaste, rapide, qui conçoit les grandes choses aussi par le cœur et qui fait entrer l’idée de postérité dans les entreprises ; ce qui le porte à s’enflammer tout d’abord pour certains mots immortels, à s’éprendre pour certaines conjonctures mémorables et à souhaiter, par quelque côté, de les ressaisir ; ce qui lui faisait dire, par exemple, à M. de Rémusat, vers ce temps des nobles luttes commençantes : « Nous sommes la jeune garde23. » Cette étincelle sacrée, qui l’anime comme historien, ne lui a fait défaut en aucune autre application de sa pensée, et, tout pratique qu’il est et qu’il se pique d’être, je ne répondrais pas qu’elle ne l’ait embarrassé plus d’une fois comme politique. […] Thiers, placé tout à côté de lui et au cœur de la machine, complétera en grand ces fortes études financières si bien commencées. […] » Malheur à qui, jeune et né dans les rangs nouveaux, n’a pas senti un jour, en lisant cette page, un battement de cœur et une larme ! […] Ces grands sujets le ravissent tout naturellement et lui saisissent le cœur.
Aussi rien n’a-t-il égalé leur reconnaissance pour ce monarque ; les gens de lettres comme le peuple, tiennent compte aux princes des moindres bienfaits ; et, ce qui est assez remarquable dans l’histoire de l’esprit et du cœur humain, le titre de père des lettres semble avoir plus contribué à faire oublier les fautes innombrables de François Ier, que le nom bien plus respectable de père du peuple n’a servi à effacer celles de Louis XII. […] Le penchant naturel des courtisans pour l’ignorance se trouva beaucoup plus à son aise sous les rois qui suivirent, et qui furent tous protecteurs peu zélés des lettres ; je n’en excepte ni Charles IX, auteur de quelques vers, dont on n’aurait peut-être jamais parlé s’ils n’eussent été d’un souverain ; ni même d’Henri IV, qui faisait, dit-on, assez d’accueil aux savants, mais qui traitait à peu près aussi bien tous ses sujets ; parce qu’après avoir conquis son royaume, il lui restait à s’assurer le cœur de ses peuples, et que des distinctions trop marquées pour un petit nombre d’hommes rares n’eussent peut-être servi qu’à éloigner la multitude. […] Je m’écarte en cela d’autant moins de mon sujet, qu’étant aujourd’hui bien reçus partout, principalement lorsqu’ils sont riches et d’un grand nom, ils forment dans le monde comme une classe particulière qui mérite d’être observée, et dont les gens de lettres cherchent aussi à tirer parti pour cette réputation qu’ils ont si fort à cœur. […] Je vous présente donc ces Recherches comme à un géomètre profond, qui a su » joindre aux agréments de l’esprit les plus sublimes connaissances, et dont je distingue le suffrage parmi le petit nombre de ceux qui peuvent véritablement me flatter. » S’il est permis de joindre à l’éloge des étrangers celui des morts, qui ne saurait blesser les vivants, l’auteur oserait encore rappeler ici, comme un témoignage des sentiments de son cœur, ce qu’il écrivait en 1752 à un homme dont la mémoire doit être précieuse à tous les gens de lettres qui l’ont connu, à feu M. le marquis d’Argenson, en lui dédiant (après sa retraite du ministère) l’Essai d’une nouvelle théorie de la résistance des fluides. […] Moins j’ai cherché les bienfaiteurs, moins je dois oublier ceux qui ont voulu être les miens ; et les grâces dont sa majesté m’a honoré, toujours présentes à mon cœur, me rappelleront sans cesse ce que je dois au ministre qui me les a obtenues.
Je ne parle ni des grenadiers (melagrani), des colombes et des parfums divers dont le bon roi Salomon réjouit le cœur des vierges folles, ni des emprunts faits à d’autres livres ; je ne cite que les passages relevés au cours d’une causerie. […] Saint Antoine en est un autre… Comme je choisissais avec cœur les perles de mon collier ! […] Confondant dans une même admiration Sénèque avec Sophocle, elle a érigé cette confusion en dogme ; elle a trouvé la formule de la tragédie ; elle l’impose à tous les poètes des temps nouveaux… De là ces tragédies sans réalité vécue, sans conviction ; les poètes s’y sont épuisés en vains efforts ; ils y ont dépensé toute leur érudition, ils y ont entassé l’horrible sur le tragique, ils y ont condensé dans les chœurs tous les lieux communs de la philosophie ; ils n’y ont pas mis leur cœur. […] Là vraiment dans le cœur d’une Hermione, d’une Phèdre ou d’une Roxane, — là surtout, — l’amour exerce ses fureurs, et va pour ainsi dire d’une course ininterrompue jusqu’au bout de ses ravages. […] Au joujou articulé qui dit papa et maman, la fillette préfère, dans son cœur déjà maternel, la simple poupée de bois dont son imagination fait un être vivant.
Sans doute, j’avais dépensé trop d’amour dans ma première enfance ; mon cœur, resté exclusif, n’avait plus rien à donner. […] J’avais le cœur et la gorge serrés. […] je la connaissais, je la savais même par cœur, et elle m’avait fait bien souvent rêver. […] Il est contraint de donner son cœur en gage, à l’Amour, qui l’enferme dans un coffre, à triple tour de clef. […] Au lieu d’apprendre la leçon donnée, je l’avais lu, tout de suite, d’un bout a l’autre, puis relu, et bientôt su par cœur.
Lorsque les Francs pénétrèrent au cœur du pays saxon, à la poursuite des Barbares, ils trouvèrent au fond d’une forêt, dressée comme en un sanctuaire, la statue d’Hermann, le héros germain presque divinisé. […] Le scepticisme et le détachement, la philosophie du « cœur léger », ont leur place dans l’existence : mais est-ce là toute l’existence ? […] Ce sont les pulsations du cœur du monde qu’y marque son existence. […] Ce serait comme le cœur de la communauté, le centre de son existence morale, la conscience du groupe. […] Entreprendre de gaité de cœur une aussi rude opération, c’est avoir recours à un remède désespéré.
« 10 décembre 1513. » II Quel est le cœur qui ne soit pas ému de l’accent à la fois naïf, simple et pathétique de cette lettre, la plus belle protestation contre le sort que nous connaissions parmi toutes les lettres des grands hommes anciens et modernes retrouvées dans les archives du genre humain ? […] « Malgré mon âge, qui touche à cinquante ans, écrit-il à Vettori, je vais chaque jour visiter celle qui captive mon cœur ; je ne me laisse ni rebuter par les ardeurs de l’été, ni arrêter par la longueur et les difficultés du chemin, ni effrayer par l’obscurité des nuits. » Tant que dura ce violent amour qui lui faisait tout oublier, même la dignité de son nom, même sa misère, même la décence de son âge, il n’écrivit plus rien que des lettres amoureuses ou que les confidences de son bonheur. […] Les premiers, il leur arrive toujours malheur ; les seconds ne succombent presque jamais : c’est pour cela qu’on a vu réussir tous les prophètes armés, les prophètes désarmés finir misérablement. » On voit qu’à l’inverse du sophisme de ce temps-ci, qui attribue plus de force à la parole qu’au glaive, il donne à la force le rôle si vrai que Dieu lui a donné, grâce à la lâcheté du cœur humain. […] Un empire ne survit pas à une religion ; une nation qui n’a plus de capitale n’a plus de tête, plus de cœur, plus de nom, plus de langue, plus de vie. » Il trace à grands coups de plume les invasions des peuplades du Danube : Hérules, Thuringiens, Lombards, Ostrogoths, Visigoths, Allobroges ; il montre du doigt les haltes de ces peuplades campées d’abord, colonisant ensuite, se distribuant, au gré de chefs plus ou moins héroïques, sur les différentes provinces dépecées de l’antique Italie.
Quelques jours après il se confessa, ceignit l’écharpe et le bourdon de pèlerin, fit un pèlerinage pieds nus aux églises voisines et quand il fallut repasser devant le château de Joinville où il laissait sa femme et ses enfants, « Je ne vox (voulus), dit-il, onques retourner mes yex vers Joinville, pourceque le cuer ne me attendrist dubiau chastel que je lessoie, et de mes deux enfants. » Cette tendresse paternelle, ce regret pour le biau chastel, sont plus d’un homme pacifique que d’un guerrier ; voilà des sentiments délicats qu’il ne faut pas chercher dans les mémoires ni sous l’armure de fer, qui recouvrait le cœur de Villehardouin. […] Cette demoiselle n’est-elle pas une dame de ses pensées, comme la Béatrix de Dante, comme la Laure de Pétrarque, lesquelles n’empêchèrent pas Dante de se marier, ni Pétrarque d’avoir des enfants, de même que la demoiselle de Froissart ne l’empêcha pas de laisser quelque peu de son cœur banal sur tous les grands chemins ? […] Il n’y a pas place pour la critique là où il n’y a pas un historien qui recherche à la fois le vraisemblable et le vrai ; qui non-seulement raconte les événements, mais qui les explique ; qui pénètre les causes et prévoit les effets ; qui raisonne sur les intérêts des peuples, sur les caractères sur les mœurs ; qui discerne le bien du mal, et qui approuve ou blâme ; qui, pour tout dire, sent en homme de cœur, examine en philosophe et décidé en juge. […] On peut bien en croire Geoffroy, le maréchal, l’auteur de cet ouvrage, qui à son escient n’y a rien mis de contraire à la vérité, comme il appartenait à celui qui fut de tous les conseils : jamais on ne vit si grande flotte ; une flotte à conquérir le monde, ce semble ; car, tant que la vue pouvait s’étendre, on n’apercevait que voiles de nefs et de vaisseaux, si bien que le coeur de chacun en ressentait une forte joie. » 2.
Telles devaient être l’insinuation, la clarté, la douceur des leçons que Nicole donnait à Racine, et par lesquelles il initiait ce grand poète à la connaissance du cœur humain. […] On n’y peut pas apprendre à penser sans apprendre à bien penser, tant les auteurs nous font voir avec évidence par quels détours insensibles le meilleur raisonnement nous peut, mener à une mauvaise conclusion, et comment cette corruption de l’esprit peut se glisser dans le cœur. C’est principalement à ces deux ouvrages que Saint-Simon fait allusion, à l’endroit de ses Mémoires où, parlant de la dispersion de Port-Royal par l’influence des jésuites, il loue ces « saints solitaires illustres que l’étude et la pénitence avaient assemblée à Port-Royal, qui firent de si grands disciples, et à qui les chrétiens seront à jamais redevables de ces ouvrages fameux qui ont répandu une si vive et solide lumière pour discerner la vérité des apparences, le nécessaire de l’écorce, en faire toucher au doigt l’étendue si peu connue, si obscurcie, et d’ailleurs si déguisée ; pour développer le cœur de l’homme, régler ses mœurs…74 » Cet éloge comprend tout en quelques paroles, le mérite des personnes, celui de la communauté, les grands exemples qu’ils ont donnés, les traditions qu’ils ont laissées, ce qu’ils ont réglé, ce qu’ils ont inventé. Développer le cœur a été l’invention de Port-Royal, et la gloire en est d’autant plus pure, que ce n’est point par esprit de curiosité qu’ils y ont pénétré si avant, mais par l’ardeur du médecin qui veut atteindre le mal dans sa racine, et par la charité qui veut le guérir.
Il faut que la France porte en son cœur une force vitale très-singulière pour qu’elle n’ait pas encore été tuée par cette gérontocratie qui la dévore. […] Le jour où un gouvernement décrétera la dissolution de cette fade compagnie de bavards qui n’a même pas la force de porter le poids de son Dictionnaire, il aura bien mérité de tout ce qui tient à cœur les gloires immortelles des arts et des lettres. […] Nul ne dit mot ; l’angoisse serre les cœurs, car un faux mouvement, un signe mal interprété peut faire voler en éclats le colosse de fer rouge qui pèse peut-être quarante mille livres. […] Resterons-nous comme d’impassibles spectateurs, commodément assis derrière la barrière et jugeant les coups, sans nous jeter, en gens de cœur, à travers la bataille ?
Voltaire avait beau lui écrire, toujours en cette même année 1760 : « Vous êtes ferme et actif, vous aimez le bien public ; vous êtes mon homme, et je vous aime de tout mon cœur. […] Il est un degré d’intimité au-delà duquel il n’est pas permis à l’homme de prétendre dans l’étude de son semblable : c’est un secret que s’est réservé le grand Anatomiste des cœurs.
Montluc, qui nous a conservé ses paroles, sentit là ce premier et poignant aiguillon de la louange qui, parti de haut, fait faire ensuite l’impossible aux gens de cœur. […] S’il a le cœur en bon lieu, il estime plus cela que tout le bien du monde, et à la première rencontre il tâchera encore de mieux faire. » Les Commentaires de Montluc offrent ainsi mille conseils, non seulement d’une bonne tactique, mais aussi d’une bonne rhétorique de guerre.
Toute la diatribe contre l’Académie est de ce ton-là : « Aussi nous l’avouons sans pâlir, dit l’auteur en parlant de quelques académiciens qu’il désigne sans les nommer, nous les haïssons de toute la force de notre amour pour les lettres et de notre respect pour les grandeurs de l’esprit humain. » Non, tout cela n’est pas juste, et M. du Camp, qui, malgré ses violences de parole, a de la générosité dans le talent et dans le cœur, ne saurait nourrir de ces haines contre des gens qu’il ne connaît pas. […] Dans ses vers à Aimée sa vieille servante, dans la pièce sur La Maison démolie, M. du Camp exprime avec cœur des sentiments affectueux ; il y porte toutefois la marque de l’imitation.
Si je ne me trompe pas, les cœurs honnêtes et les esprits sensés me doivent quelque estime, même quelque encouragement et quelque appui. […] À ceux qui sont faits comme moi, j’indiquerai pour lecture et correctif utile, en regard de ce Tocqueville au cœur oppressé et frémissant, une notice historique sur le grand mathématicien Lagrange, qui se trouve au tome iii, page 117, des Mélanges scientifiques et littéraires de M.
Il ne vous est arrivé, en fait de désagréments, que ce que vous vous êtes attiré de gaieté, de cœur, et en le voulant bien. — Oh ! […] Biot, visiblement ému, le saisit par le bras et lui dit : « Mon cher enfant, j’ai tant aimé les sciences dans ma vie que cela me fait battre le cœur. » C’est en vertu de l’observation de M.
Tous ces miracles tiennent plus de la bonté que de la puissance, et ne surprennent pas tant les spectateurs qu’ils les touchent dans le fond du cœur. » Quant à la doctrine, il la montre également humaine, appropriée, et tempérant la hauteur par la condescendance : « C’est du lait pour les enfants et tout ensemble du pain pour les forts. […] Ici nous sommes au cœur en même temps qu’au sommet de l’œuvre de Bossuet.
Il a pénétré dans l’esprit et le cœur de ses auditeurs de tout ordre. […] Il a jeté un bon germe dans les cœurs.
Des hommes courageux, tels que M. de Morangiès, gouverneur de Minden, laissé sans secours, se rendaient avec le poignard dans le cœur, mais avec une tache à leur nom. […] Il lui arriva de dire un peu plus spirituellement, en se désolant avec son neveu le prince de Condé : « Ce n’était pas la peine à M. de Belle-Isle de m’envoyer un tuteur ; j’en aurais bien fait autant tout seul. » Ce prince, quand il parlait ainsi, n’avait plus rien de cet aiguillon de la gloire qui prend au cœur les nobles natures et les laisse dévorées de douleur après un affront.
Le cœur, pour peu qu’il y soit disposé, y contracte une corruption profonde. […] Tout le vice du XVIIIe siècle est là ; il y avait dès le premier jour un ver au cœur du fruit.
L’esprit de parti unit les hommes entre eux par l’intérêt d’une haine commune, mais non par l’estime ou l’attrait du cœur ; il anéantit les affections qui existent dans l’âme, pour y substituer des liens formés seulement par les rapports d’opinion : l’on sait moins de gré à un homme de ce qu’il fait pour vous que pour votre cause ; vous avoir sauvé la vie est un mérite beaucoup moins grand à vos yeux que de penser comme vous ; et, par un code singulier, l’on n’établit les relations d’attachement et de reconnaissance qu’entre les personnes du même avis : la limite de son opinion est aussi celle de ses devoirs ; et si l’on reçoit, dans quelques circonstances, des secours d’un homme qui suit un parti contraire au sien, il semble que la confraternité humaine n’existe plus avec lui, et que le service qu’il vous a rendu est un hasard qu’on doit totalement séparer de celui qui l’a fait naître. […] Mais si cette passion borne la pensée, quelle influence n’a-t-elle pas sur le cœur !
Il faut convenir aussi que cet excellent acteur possédait à un si haut degré de perfection ce merveilleux talent, qu’il touchait plus de cœurs par les seules simplicités d’une pure nature que n’en touchent d’ordinaire les orateurs les plus habiles par les charmes de la rhétorique la plus persuasive. […] Après, poussant plus loin cette triste figure, D’un cocu, d’un jaloux, il en fait la peinture ; Tantôt à pas comptés vous le voyez chercher Ce qu’on voit par ses yeux, qu’il craint de rencontrer ; Puis, s’arrêtant tout court, écumant de colère, Vous diriez qu’il surprend une femme adultère, Et l’on croit, tant ses yeux peignent bien cet affront, Qu’il a la rage au cœur et les cornes au front.
Tant que des cœurs sensibles et délicats se heurteront à la femme et à la vie, le poète de Dalila et de La Maison du Berger aura ses fidèles. […] Déjà la plume de Baudelaire ne tremblait pas quand il lamentait les accords mourants du Portrait : La maladie et la mort font des cendres De tout le feu qui pour nous flamboya, De ces grands yeux si fervents et si tendres, De cette bouche où mon cœur se noya… Ainsi c’était trouvé avant Leconte de Lisle l’art d’être ému et d’émouvoir sans geste.
Il n’y a là rien à apprendre en fait de vues et d’idées philosophiques et je ne conçois guère, je l’avoue, que le résultat d’une éducation complète soit de savoir par cœur La Bruyère, Massillon, Jean-Baptiste Rousseau, Boileau, qui n’ont plus grand-chose à faire avec nous, et qu’un jeune homme puisse avoir terminé ses classes sans connaître Villemain, Guizot, Thiers, Cousin, Quinet, Michelet, Lamartine, Sainte-Beuve. […] C’est un usage en Bretagne de renfermer les têtes de morts dans une boîte de bois en forme de petite chapelle, au-devant de laquelle est une ouverture en forme de cœur, et c’est par là que la tête voit le jour.
« Le reste (l’intimité de sa maîtresse), par quelque raison que ce puisse être, ne lui tenait plus au cœur. […] Madame de Montespan fut au-devant de ce joli prince avec la bonne abbesse de Fontevrault et madame de Thianges : je crois qu’un si heureux voyage réchauffera le cœur des deux amies. » 10 novembre.
Les Tallemant des Réaux de notre âge parleront — comme elle en a parlé elle-même, — des passions posthumes qu’elle inspira à Villemain, — cette colonne vertébrale, infortunée, — et au cœur philosophique de Cousin, le testamentaire, qui lui légua, avec la grandeur d’un Harpagon amoureux, une somme qu’il ne pouvait pas emporter… Villemain et Cousin ne furent pas les seuls, d’ailleurs, que l’on vit, chez elle, dans des positions compromises… Elle pêcha toujours aux académiciens, même quand elle ne pouvait pas les faire pécher… Son salon était le parc aux huîtres de l’Académie. […] Le bas-bleu qui gâte tout, jusqu’à la femme passionnée, le bas-bleu qui pue éternellement les livres qu’il a lus, n’a pas plus la vérité du cœur que de la pensée et manque autant d’originalité dans la passion que dans le talent.
Horace, par l’ordre d’Auguste, va grandir cet exploit pour en faire un titre à la famille impériale : « Les barbares ont compris ce que pouvait une âme, fi une nature nourrie dans un fortuné sanctuaire, et le pouvoir du cœur paternel d’Auguste sur les jeunes Nérons. […] Il a touché le fond du cœur de l’homme, non par les plus grands côtés, il est vrai, mais par des points sensibles qui ne peuvent s’effacer.
Je n’ai de cœur à rien, de courage à rien. […] À voir sous la cognée tomber ces grands arbres, avec des vacillements de blessés à mort, à voir là, où c’était un rideau de verdure, ce champ de pieux aigus, luisant blanc, cette herse sinistre, il vous monte de la haine au cœur pour ces Prussiens, qui sont cause de ces assassinats de la nature. […] Mlle de Montijo aurait répondu : « Je vous tromperais, Sire, si je ne vous avouais pas que mon cœur a parlé, et même plusieurs fois, mais ce que je puis vous assurer, c’est que je suis toujours Mlle de Montijo ! […] Au Palais de l’Industrie, un cercle de femmes et d’hommes, rangés autour de la petite porte de gauche, attendant, dans l’attente d’un cœur serré, les voitures qui doivent ramener les blessés. […] Il y a tout un canapé de femmes, dont l’une qui fait les honneurs du salon, est une vieille femme, aux cheveux d’argent, dans une robe feuille morte, et qui montre, par un cœur très évasé, un grand morceau de sa vieille peau : une femme qui a de la marquise d’autrefois et de la cabotine d’aujourd’hui.
Héloïse y est proclamée et démontrée bien supérieure à lui de caractère et de cœur, et au moins son égale pour l’esprit, — peut-être la première des femmes.
Que cette infortunée, qui n’est ni femme ni vierge, et qui pourtant n’est point coupable, soit la véritable Agnès, qui a trouvé moyen de courir les champs en laissant à sa place dans le donjon quelque amie complaisante, c’est ce que devine tout d’abord le lecteur qui sait tant soit peu son d’Arlincourt : mais c’est ce qu’Arthur ne saurait deviner ; et pourtant son cœur à tout hasard n’en préfère pas moins la proscrite de la vallée à l’héritière du château.
Ainsi Lamartine, quand une dame lui présente un album pour y écrire des vers, s’inspire de la circonstance, de l’objet qu’il a sous les yeux, et improvise cette belle comparaison : Sur cette page blanche où mes vers vont éclore, Qu’un souvenir parfois ramène votre cœur.
Que de cœur, de naïveté et de grâce !
Henri Mercier Si la joie d’être débordait dans les Chansons joyeuses, les Poèmes de l’Amour et de la Mer, qui vinrent ensuite, révélèrent en Maurice Bouchor un autre poète, un poète du cœur, plein de tendresse pour la nature, de délicatesse en sa conception de la femme et de douce mélancolie.
Nous y voyons Malherbe, honoré, fêté, chéri, y finir sa carrière ; le grand Corneille, distingué, encouragé, soutenu, y commencer la sienne ; et le sage, le vertueux, le sévère Montausier y fixer les vœux de la mère pour sa fille, et devenir maître de l’esprit et du cœur de Julie.
Les cœurs sensibles ne peuvent que le plaindre & s’intéresser à ses disgraces.
« Que ceux qui ont une idée médiocre ou pauvre et qui ont besoin d’être en face de grands hommes pour s’apercevoir de la grandeur de l’homme, s’adressent à nos de Lesseps, à nos Edison, à nos Pasteur ou bien à nos politiques, aux généraux, aux écrivains, aux artistes, aux grands commerçants, aux industriels fameux, aux philosophes ; mais que ceux qui se sentent l’âme élevée et le cœur vibrant pour la suprême beauté de leur race prennent les plus humbles, les va-nu-pieds et les derniers pauvres gens.
Mais qui croirait qu’un jésuite espagnol du dix-septième siècle, Jean Carthagena mort à Naples en 1617, ait débité dans un livre intitulé Josephi Mysteria, que saint Joseph peut tenir rang parmi les martyrs, à cause de la jalousie qui lui déchirait le cœur, quand il s’aperçut de jour en jour de la grossesse de son épouse ?
Trop loin de la nature et de la religion sous tous les rapports, on ne peut représenter fidèlement l’intérieur de nos ménages, et moins encore le fond de nos cœurs.
Nous pouvions trancher la question d’une manière simple et péremptoire ; car, fût-il certain, comme il est douteux, que le christianisme ne pût fournir un merveilleux aussi riche que celui de la fable, encore est-il vrai qu’il y a une certaine poésie de l’âme, une sorte d’imagination du cœur, dont on ne trouve aucune trace dans la mythologie.
Apage, Sophista : Tu ne persuaderas jamais à mon cœur qu’il a tort de frémir, à mes entrailles, qu’elles ont tort de s’émouvoir.
Il faut convenir que rendre l’idée de la première guirlande, du premier sacrifice, du premier soupir amoureux, du premier désir d’un cœur jusqu’alors innocent, n’était pas une chose facile.
De tels crimes repugnent tellement aux coeurs qui ne sont pas entierement dépravez, qu’il ne suffit point d’avoir perdu quelque chose de la liberté de son esprit pour les commettre, sans devenir un scelerat odieux.
Certes, je t’aime, tu es le plus cher à mon cœur parmi tous les plus chers ; mais, dussent tes muscles sécher sous toi et se racornir comme de vieilles cordes de violon, — tu n’auras point ta chaise ; tu demeureras, jusqu’au dernier jour, accroupi dans la posture sacrée de nos pères.
Échappant aux règles du goût par l’excentricité même de sa nature intellectuelle, — car c’est un excentrique que Mercier, et il a je ne sais quoi dans l’esprit qui rappelle la bizarrerie de certaines imaginations anglaises, — méconnaissant l’autre règle de la vie, plus importante que le goût, c’est-à-dire la religion, qui, en nous éclairant le cœur, fait monter la lumière jusqu’à la pensée, Mercier s’adapte exactement à l’époque qu’il a plutôt inventoriée que peinte.
… Où qu’on prît ces héroïnes, qui ne forment pas un bataillon, mais toute une armée dans l’histoire ; qu’on les prît sur notre terre de France, que ce fût sainte Radegonde, sainte Geneviève, sainte Clotilde, et tous ces cœurs vaillants de la vaillance de Dieu jusqu’à Jeanne d’Arc et depuis elle, n’importe où l’historien allât les choisir, elles étaient dignes de s’aligner en face des plus grandes (s’il y en avait) de la Révolution française, et de faire baisser les yeux à leurs portraits, plier le genou à leurs cadavres.
De la morale poétique, et de l’origine des vertus vulgaires qui résultèrent de l’institution de la religion et des mariages La métaphysique des philosophes commence par éclairer l’âme humaine, en y plaçant l’idée d’un Dieu, afin qu’ensuite la logique, la trouvant préparée à mieux distinguer ses idées, lui enseigne les méthodes de raisonnement, par le secours desquelles la morale purifie le cœur de l’homme.
Ils savent par cœur Racine, Corneille et Voltaire, ils accourent au théâtre pour y retrouver éternellement les mêmes jouissances ; et cependant, déjà si restreint par le bon plaisir des comédiens, le répertoire l’est bien plus encore par une autre autorité. […] Emporté dans ses désirs, violent dans ses projets, implacable dans ses haines, il régit tous les sentiments du cœur qu’il possède, en occupe tous les replis et n’y laisse aucun vide. […] On a rayé dans la même tragédie cet autre vers : Il faut gagner les cœurs et non pas les contraindre.
La tendresse (une tendresse sèche, toute de tête, sans un sentiment du cœur), la tendresse règne sans partage, moins empanachée et sonore, moins subtile et chercheuse du fin du fin, que l’amour précieux ; elle s’étale, fluide, intarissable, désespérante de monotone douceur. […] Il suivit la cour en divers voyages, pendant plusieurs campagnes, jusqu’en 1695. il avait pris sa tâche à cœur, et s’instruisait avec soin : mais était-il possible de faire histoire de Louis XIV pour Louis XIV ? […] Racine ne s’est pas borné à l’amour, où il voyait, non sans raison, « la route la plus sûre pour aller au cœur ».
. — Alors, plus de ces discussions d’école, mais une impression grandiose et austère, une foi contagieuse, une soudaine simplicité de cœur, une absorption spirituelle de la vision poétique, dont l’âme reste bouleversée, et des jeunes filles qui, devant le prêtre du Graal élevant la coupe de vie, fondent en larmes comme au jour de leur première communion » (p. […] Oui… » ou bien, à propos de Tristan : « Peu me soucie que Wagner, philosophe, ait songé à l’anéantissement, à l’effacement de la personnalité dans l’inconscience infinie ; en dépit de tout, et de l’auteur lui-même s’il le faut, le chant final d’Iseult est le chant de l’amour immortel, l’hymne des âmes réunies à jamais. » Il est bien étonnant que ceux-là même qui définissent ainsi l’artiste, aient fait de Wagner leur maître de prédilection, quand ils avaient à portée de leur esprit Berlioz, qui n’avait pas de théories arrêtées, qui produisait suivant son inspiration, tantôt bien, tantôt mal, mais sans savoir pourquoi : celui-là est le véritable artiste selon leur cœur. […] Lorsque Lohengrin s’est offert à combattre pour la jeune fille accusée, il lui a posé une condition, une seule : « Jamais tu ne me demanderas qui je suis, ni d’où je viens. » Elsa accepte sans hésitation : mais bientôt les paroles empoisonnées d’Ortrude portent le trouble dans son cœur ; la curiosité féminine s’éveille en elle, un violent désir lui vient de mieux connaître le mystérieux étranger, de savoir le nom, l’origine du héros dont elle va être l’épouse.
Il nous aurait fait sentir que ce génie-femme ne l’est pas seulement par les formes de sa beauté, par la placidité, par la tendresse, par la rêverie, par le rythme du sein sous le mouvement du cœur, mais qu’il l’est encore par son amour pour le vieil Homère et par tout ce qu’une longue intimité laisse après elle, par la pudeur discrète des plaisirs qu’il en a reçus. […] Montez-les, redescendez-les, vous trouverez presque toujours le génie des grands poètes plus ou moins imbibé d’histoire, comme notre cœur est imbibé de sang. […] L’article, son article a concentré tous ses efforts, toutes ses heures ; j’allais dire tout son cœur, mais je me suis arrêté à temps.
Il y a fourré le sentiment, le genre de sentiment avec lequel il s’était fait, depuis quelques années et depuis certains livres, une influence sur le cœur des femmes et des hommes qui sont aussi des femmes, et acquis ainsi une espéciale popularité. […] Comme nous, qui n’avons pas attendu en vain notre Messie, il attend, dit-il, « le cœur puissant, la force solitaire, qui enlèvera un matin le vieux monde, d’un souffle de dieu ». […] Guenille de chrétien, ne l’est-il pas, par exemple, quand il dit, comme nous, que les nations ne sont divisées que parce qu’elles sont l’image de nos âmes, divisées comme elles, et que l’anarchie de tout un peuple n’est que l’anarchie de chacun de nos cœurs ?
Elles entrent au cloître comme dans le refuge des cœurs navrés. […] Les jeunes filles qui se font religieuses n’ont presque jamais eu d’aventure de cœur. […] La nourrice, c’est une Bretonne, petite avec des sabots à talons hauts, coiffée d’une coiffe à deux ailes rondes et plissées comme un cyclamen, une de ces filles des côtes qui ont le sang léger et le cœur aussi.
Les paroles qu’il a prononcées sur l’exécrable forfait du 1456, sur ces tentatives sauvages « et d’autant plus irritées et féroces que la main qui les réprime est plus puissante et qu’elle présente plus de garanties à l’ordre français et européen », paroles qui correspondaient à d’autres, non moins énergiques, sorties du cœur de M.
Juste Olivier la recette de la cigarette de camphre : « Les cigarettes de camphre peuvent être très-bonnes dans le cas d’asthme, si cet asthme tient aux poumons et non au cœur.
Mais jamais cette expression même n’eût été prononcée par un cœur passionné.
Il faut que le cœur seul parle dans l’élégie.
Quand Massillon, entamant l’oraison funèbre de Louis le Grand, nous dit : « Dieu seul est grandi mes frères », alors le nom de Dieu dresse l’idée même de Dieu dans nos cœurs.
Gaston Deschamps L’auteur de la Vie des chambres , du Cœur de l’eau, des Cloches du dimanche et de Au fil de l’âme murmure si bas, si bas, ses chansons tristes, que souvent sa voix hésite, s’éteint et que sa pensée fuit, dans un clair-obscur de limbes.
Il lui suffit du bavardage d’un doux idiot et d’une heure de chapelle pour devenir une femme du cœur le plus tendre et le plus délicat. — Richard Fénigan a seize ans et habite la campagne avec sa mère.
Nulle autre cause de cette étonnante supériorité, que la connoissance profonde du cœur humain, qu’une observation subtile qui saisissoit avec justesse les vices & les ridicules par-tout où ils se trouvoient, qu’une délicatesse de tact qui discernoit, à coup sûr, ce qu’il y avoit de plus saillant dans les travers de la Société, que l’art enfin de les présenter sous un jour propre à les rendre sensibles, & à les corriger par une plaisanterie sans aigreur, sans apprêt, & toujours si naturelle, que l’effet en étoit immanquable.
Les vains simulacres attachés aux êtres insensibles s’évanouirent, et les rochers furent bien plus réellement animés, les chênes rendirent des oracles bien plus certains, les vents et les ondes élevèrent des voix bien plus touchantes, quand l’homme eut puisé dans son propre cœur la vie, les oracles et les voix de la nature.
Qui ne croirait sur le sujet qu’il est rempli de variété et de mouvement ; que des Amours les uns s’exercent à percer un cœur de flèches, les autres à s’élancer comme des traits, à voler avec vitesse et légèreté, à dérober un baiser, à déranger un mouchoir, à relever un jupon, à donner le croc-en-jambe à une bergère, à tromper un mari jaloux[,] à rendre adroitement un billet, à grimper à des fenêtres, à séduire une surveillante, etc. ?
Pour moi, qui ne règne par bonheur que sur le cœur de Sophie, si elle se présentait à fines yeux dans cet état, que ne deviendrais-je pas ?
Mais vous devriez bien conseiller à ces souverains avec lesquels vous avez l’honneur de correspondre, et qui ont à cœur la naissance et le progrès des beaux-arts dans leur empire, de fonder une école à Paris d’où les élèves passeraient ensuite à une seconde école fondée à Rome.
Car, comme le dit Quintilien, des phrases qui débutent par blesser l’oreille en la heurtant trop rudement, des phrases, qui, pour ainsi dire, se présentent de mauvaise grace, trouvent la porte du coeur fermée.
Cela est très visible dans les formules telles que ; le sein de l’Académie, l’activité dévorante, ouvrir son cœur, la tristesse était peinte sur son visage, rompre la monotonie, embrasser des principes.
comme si la poésie sous toutes ses formes et l’éloquence elle-même n’étaient pas la volupté de l’oreille en même temps que de l’esprit et du cœur ! […] Je voudrais, lorsque Sganarelle, dans le Médecin malgré lui, place le cœur à droite et le foie à gauche, qu’une note nous rappelât que, précisément vers cette date, la Faculté dissertait à grand bruit sur un monstre par inversion, comme on en connaît plusieurs dans l’histoire de la tératologie, dont le cœur était à droite et le foie à gauche. […] Phèdre se jettera demain dans la Seine ; et tous les jours, sous toutes les latitudes, il y a quelque Titus qui brise et broie le cœur de quelque Bérénice. […] Voltaire signa, la rage au cœur ; et comment ne pas signer ? […] Nul siècle n’a été plus complètement dénué de poésie : dans Voltaire lui-même, combien trouvera-t-on de vers qui partent du cœur, combien d’émotions vraiment vécues ?
Le vieux poëte rit de tout son cœur, & l’on se quitta de part & d’autre, avec beaucoup de regrets. […] Le cœur est bien corrompu quand on ose avoir de la vanité dans le sein du déshonneur. […] Il lui rendit tous les respects imaginables, & c’est dans son cœur qu’ils trouvoient leur source. […] D’ailleurs les chansons ne valent rien, si le cœur n’est de la partie, & ceux qui crurent l’approfondir, prétendoient qu’il étoit sec. […] Dans ce moment tous les cœurs ont senti le bienfait qui alloit résulter d’une pareille institution.
Le langage des fleurs encore populaire, et dont ne manquent pas d’user les cœurs très simples, est le dernier résidu de la vieille symbolique. […] C’est que, là, on rencontre le cœur même de la vie, sa cause et sa fin, entrelacées comme un chiffre indéchiffrable. […] Gardez soigneusement cette parole dans votre cœur ; elle peut vous éviter bien des ennuis et vous sauver du naufrage auquel sont sujets même des gens de votre sorte. […] Ainsi vous aurez montré à la fois l’indépendance de votre jugement et la tendresse de votre cœur. […] Malebranche, étant oratorien, se croyait chrétien et ne l’était que de cœur.
En d’autres endroits, il dit : « Les oreilles du cœur sont des avant-portes qui reçoivent le sang s’échappant du ventricule, du début à la fin du resserrement, car si un tel sang ne s’échappait en partie, le cœur ne pourrait pas se serrer. » — « Le sang, qui tourne en arrière, quand le cœur se rouvre, n’est pas celui qui ferme les portes du cœur. » — Et : « Le sang des animaux toujours se meut partant de la mer du cœur et s’élevant jusqu’au sommet de la tête. » Il ne faut se faire aucune illusion sur la valeur de ces termes. […] Il nous est impossible d’empêcher notre cœur de battre ; nous est-il possible d’empêcher nos doigts de remuer, et, si c’est possible, pendant combien de temps ? […] Elle a des curiosités, et ne peut céder ; elle a des désirs, et ces désirs lui restent sur le cœur. […] Cette casuistique permet à la courtisane amoureuse de ne pas considérer comme des infidélités les liaisons fugitives où elle n’a rien mis de son cœur. […] C’est l’amour de la vie tel que l’éprouve un homme qui ne sépare pas dans ses préoccupations la science, l’art, l’humanité et la noble tendresse qui gonfle les cœurs sains.
De l’écriture d’une grande distinction et d’une tendresse de cœur, qui me remplit d’émotion. […] Et aujourd’hui mes moqueries, à propos des imaginations inquiètes de la triste et maladive fillette, je me les reproche comme des manques de cœur, et le souvenir m’en est douloureux. […] J’avais craint d’aller de gaîté de cœur au choléra, dans l’état où se trouvent mon estomac et mes entrailles, mais vraiment Mme Daudet et Mme Parrocel m’ont écrit des lettres si affectueuses, que, ma foi, je me risque. […] Il y en a, un blanc d’un chiffonnage soyeux extraordinaire, un rose d’un violacé maladif tout à fait charmant, un d’un rouge capucine au cœur de vieil or. […] Mardi 17 novembre Le dernier mot de Robin, qui s’attendait à mourir d’une maladie de cœur, et qui a été surpris de s’en aller de la vie par une autre maladie, a été : « Apoplexie… curieux !
Elle, ma mère, un livre ou une tapisserie à la main, les laissant bientôt tomber sur ses genoux, demeurait dans une contemplation rêveuse, devant son bel enfant, devant son petit lauréat du grand Concours, devant le cher adoré, qui était la gaîté et l’esprit des maisons amies, où elle le menait, — et l’orgueil de son cœur. […] « S’asseoir au bon endroit, ainsi que l’enseignait son maître Bertin — établir ses grandes lignes — chercher ses valeurs — et se touchant tour à tour la tête et la place de son cœur, mettre sur sa toile, ce qu’on sent, là et là. […] — Oui, me répondit-il, je sens que je ne suis pas un peintre, je peins avec mon cerveau, pas avec mon cœur… Je ne sais, si vous l’avez connu, Couture… C’était un petit ratatiné frileux, ayant toujours sur le dos un collet de manteau, et Diaz, qui était plein d’esprit, plein d’une imagination drolatique, disait, en le voyant déboucher : « Voici le champignon vénéneux ! […] L’enfant tendre, à l’intelligence paresseuse, que j’ai peint sous le nom de Pierre-Charles, était mort d’une méningite, avant le départ de sa mère pour l’Italie, et sur ce pauvre et intéressant enfant, présentant un sujet neuf, sous la plume d’un romancier, j’ai fait peser le brisement de cœur et les souffrances morales de son frère cadet, pendant la folie religieuse de sa mère. […] La collation des rôles commencée, Koning est, tout le temps, avec une obstination qui porte sur les nerfs, à trouver le mari, trop dur, trop mal élevé, laissant clairement voir son intention de chercher par des atténuations imbéciles, à faire de cette femme sans cœur et sans esprit, un rôle sympathique.
Ce qui doit lui faire pardonner ses défauts, est son amour pour la vertu & son respect pour la Religion qui animoient son cœur & sa plume. […] Il n’y a proprement que lui, parmi les historiens qui ayent éminemment l’art d’exciter les passions & de remuer les ressorts du cœur les plus cachés. […] Il creuse avec une rare sagacité jusqu’au fond du cœur humain ; il saisit les moindres nuances des passions, les petits ressorts des grands desseins, le manége sourd des Cours, & le véritable objet de leurs démarches. […] Cet auteur qui avoit le génie de la Cour, s’est plus à peindre les hommes avec ces traits qui attachent l’esprit & remuent le cœur. […] On prétend qu’elle n’a pas dit tout ce qui regardoit les passions de son cœur.
Un phénomène analogue à l’extension du sens du mot logos s’était produit chez les Egyptiens : pour exprimer l’idée de penser, ils employaient un terme composé qui signifie parler avec son cœur 10. […] On en vient donc jusqu’à parler le pur langage du cœur. […] Sans doute, l’âme s’est habituée à penser avec l’aide des mots, parce que cette manière de penser lui a semblé la plus commode ; mais, l’habitude une fois prise et invétérée, l’âme continue à parler, malgré elle, sans but et contre toute raison ; elle ne peut plus se taire, alors même que la parole intérieure n’est plus pour elle qu’un bruit inutile ou importun auquel le cœur et la pensée préféreraient des séries d’images visuelles ou la suspension momentanée de toute imagination. […] [Les deux vers cités proviennent du poème liminaire « Au lecteur » des Poésies (1865-1866), Stances et Poèmes de Sully-Prudhomme (Paris, Alphonse Lemerre, p. 5-6) qui commence ainsi : « Quand je vous livre mon poème, / Mon cœur ne le reconnaît plus : / Le meilleur demeure en moi-même,/Mes vrais vers ne seront pas lus . »] 3. […] Ailleurs (Instr., VII, 16), Bossuet admet une « oraison passive » ; alors, dit-il, « Dieu tient l’école du cœur, où il se fait écouter en grande tranquillité et en grand silence » ; ce sont là des métaphores ; sauf que la quiétude remplace l’élan, Bossuet décrit toujours le même état ; il ne prétend pas qu’un discours de Dieu remplace la parole intérieure personnelle.
Il m’est resté de cette affaire un sentiment pénible à tout cœur délicat, et plus de crainte que jamais de recevoir rien qui ressemblât à un service de la part de ceux qui ne sont pas dignes en tout de vous le rendre et de vous tenir obligés pour la vie. […] généreux, dévoués, se chargeant eux-mêmes, s’accusant de tout : Bories le premier, Bories, jeune martyr au front calme, au cœur résigné, plein de vertu et de génie, confondant ses juges, consolant et relevant ses compagnons ; les soutenant sur la charrette du supplice contre l’horreur d’une mort méconnue ; les faisant monter avant lui sur l’échafaud pour les affermir jusqu’au bout de son regard et de sa voix ; Bories, figure mélancolique et sans tache, luttant contre l’oubli ; nom sublime à inscrire dans la mémoire publique à côté des Roland, des Vergniaud, des Oudet, des Hoche et des Manuel ! […] — Le poète élégiaque et attendri en Sainte-Beuve aima toujours à se redire ces beaux vers, qui avaient fait battre son cœur aux premières années d’adolescence. — « Ah ! […] Je trouverai quelque douceur à vous les redire au premier jour où il me sera donné de vous rencontrer. — Tout à vous et de tout cœur, Pasquier. »
Dieu me garde de prétendre qu’il n’y ait eu parmi les plus sincères croyants des hommes qui ont rendu à la science d’éminents services ; et, pour ne parler que des contemporains, c’est parmi les catholiques sincères que je trouverais peut-être le plus d’hommes sympathiques à mon esprit et à mon cœur. […] Cela démonte fort les petits esprits, qui n’aiment que des formules de deux ou trois lignes, afin de les apprendre par cœur. […] Nous croyons à la raison, et vous l’insultez ; nous croyons à l’humanité, à ses divines destinées, à son impérissable avenir, et vous en riez ; nous croyons à la dignité de l’homme, à la bonté de sa nature, à la rectitude de son cœur, au droit qu’il a d’arriver au parfait, et vous secouez la tête sur ces consolantes vérités, et vous vous appesantissez complaisamment sur le mal, et les plus saintes aspirations au céleste idéal, vous les appelez œuvres de Satan, et vous parlez de rébellion, de péché, de châtiment, d’expiation, d’humiliation, de pénitence, de bourreau à celui à qui il ne faudrait parler que d’expansion et de déification. […] Notre rationalisme n’est donc pas cette morgue analytique, sèche, négative, incapable de comprendre les choses du cœur et de l’imagination, qu’inaugura le XVIIIe siècle ; ce n’est pas l’emploi exclusif de ce que l’on a appelé « l’acide du raisonnement » ; ce n’est pas la philosophie positive de M.
Des auditions plus variées, plus fréquentes, de fragments Wagnériens, quelques correspondances « transrhénanes » (des échos de Représentations Solennelles dans la ville de Bayreuth, de Cycles Wagnériens à Munich, à Vienne, à Berlin) découvrirent, ensuite, un génie musical, acceptable… Des insultes de Wagner à la France, on sut ce qu’il fallait penser : et, quant à cette fameuse haine contre la France, nul n’en trouva la marque, ni dans les livres, ni dans les lettres, ni dans les paroles de Richard Wagner ; Richard Wagner avait combattu, dans ses écrits, l’influence de l’esprit français ; mais c’était là tout une autre affaire ; et quiconque avait lu ses lettres et ses livres, quiconque l’avait entendu causer, rapportait aux Parisiens ébahis, que Wagner aimait la France, et Paris, et ses vieux souvenirs de 1842, et ceux, aussi, de 1860, ses amis Français, les compagnies qu’il avait traversées, les rues, les maisons même, où s’était traînée sa misère ; et l’on connut, dans le cœur du rude Ennemi, de délicieuses tendresses, pour le pays qui l’avait bafoué. […] Cet interlocuteur de hasard n’était autre — (la destinée offre de ces contrastes) — que notre grand Épicier, celui dont le seul nom fait battre tant de cœurs, en France. […] Voyant que sa suggestion n’était accueillie que par un doux sourire, il bondit, selon son devoir, hors de la chambre, (le cœur gros), et courut, à toutes jambes, requérir quelques médecins-aliénistes pour fourrer à Bicêtre, le soir même, vu l’urgence, son malheureux protégé. […] Le Voyageur — Ô Mère, je ne te laisse pas aller, — puisque je suis maître du Charme. — Première-Sachante, — tu as piqué, jadis, — la pointe du souci — dans le hardi cœur de Wotan : — la crainte de la honteuse Fin ennemie — lui a été donnée par ta Science, — pour que l’inquiétude enchaînât son esprit. — Si tu es de la Terre — la plus sage Femme, — dis moi donc — comment le Dieu peut vaincre le souci.
Pickwick, qu’il écrase de son impudence une chambrée de guindés valets de chambre à Bath, ou qu’il entreprenne de détruire le prestige du bizarre puritain qui a su gagner le cœur de Mme Weller et s’installer à demeure dans son auberge, l’amusement est constant, vif et franc, sans dérision ni amertume. […] Bounderby et Thomas Gradgrind, sont d’insignes caricatures de l’esprit de positivisme, de la grossièreté de cœur des gens pratiques. […] Faits avec une outrance égale sont les épisodes où Dombev s’attache à manifester à sa fille qu’il déteste un intraitable orgueil et la sécheresse de son cœur. […] Ce sont là des rouages inutiles et mauvais ; ils ne servent en rien à soulager les infortunes de la foule des misérables, dont les maux s’aigrissent encore par suite de la dureté de cœur qu’engendrent chez les riches et les puissants leur situation même, et leur avidité de richesse et de pouvoir.
Il n’est pas exact non plus de dire que, vers la fin de ces leçons à huis clos, quand le professeur, qui était lent à s’animer, venait à déployer toute son étendue d’inspiration et toute sa veine, « il courût des frissons, comme il en descendait autrefois de la tribune politique dans la vaste assemblée où s’entretenait l’intelligence et où battait le cœur du pays ». […] Homme de cœur et d’une grande bonté morale, il était supérieur lorsque, triomphant de ses airs d’aristocratie intellectuelle et de ses assertions absolues auxquelles il s’abandonnait quelquefois, il retrouvait l’onction.
J’ai senti, au contraire, qu’ayant eu le malheur de déplaire à la Cour, je devais expier l’imprudence de ma conduite par ma patience et ma soumission ; et, quoique le ciel me soit témoin que je n’ai effectivement que de l’imprudence à me reprocher, je me suis condamné moi-même sur les apparences sans penser à faire valoir la simplicité de mes intentions et l’innocence de mon cœur. […] Homme bon, entraînant, fragile, cœur tendre, esprit facile, talent naturel, langue excellente, plume intarissable, inventeur invraisemblable et hasardeux, qui sut être une fois, comme par miracle, le copiste inimitable de la passion, tel fut l’abbé Prévost, qu’il ne faut point juger, mais qu’on relit par son meilleur endroit et qu’on aime.
Quoi qu’il en soit, il demeure constant que la corruption de ce siècle et de cette cour l’avait atteint au cœur : la nature de son esprit s’en ressentit. […] On peut appliquer à M. de Meilhan ce que lui-même a dit quelque part de La Rochefoucauld et de ce besoin de tout expliquer par l’amour-propre : M. de La Rochefoucauld est peut-être un peu suspect ; il est comme ces médecins qui, dans toutes les maladies, voient celle qu’ils ont le plus particulièrement étudiée ; mais enfin il a des traits de lumière qui pénètrent jusqu’au fond du cœur, et je lui dois en partie de me connaître.
Les Gessner, les Florian n’opéraient qu’en petit pour les imaginations de femmes et d’enfants, pour les amoureux, les cœurs tendres et les têtes légères ; ils faisaient un âge d’or de petits bergers. […] Cette maison était environnée d’un air plus pur, le soleil y était ardent comme l’amitié, le ciel aussi tranquille que le fond des cœurs.
On y voit Ney, « à qui la présence de l’ennemi rendait ses éminentes qualités » ; le plus habile manœuvrier de l’armée ; « héros au cœur infaillible, à la raison quelquefois flottante, inébranlable sur un terrain qu’il pouvait embrasser de ses yeux, moins sûr de lui-même sur un terrain plus vaste qu’il ne pouvait embrasser qu’avec son esprit ». […] Il y a en moi deux hommes distincts, l’homme de tête et l’homme de cœur.
Les imaginations et les âmes, une fois atteintes du Rousseau, eurent peine à s’en débarrasser ensuite, et à rejeter cet élément fiévreux tant de leur cœur que de leur parole. […] Ce n’est plus Rousseau qui vient, c’est Chateaubriand : il étonne, il trouble et bouleverse à son tour et les jeunes cœurs et les vieilles formes de langage ; il frappe les têtes, il séduit à tort et à travers, à droite et à gauche, et projette jusque dans les rangs de ses adversaires ses fascinations éclatantes.
Il n’y a pas de traductions, trahisons et crimes envers les anciens qu’on ne passe de grand cœur au bon abbé, s’il n’y avait pas d’autre chemin pour en venir à ses mémoires. […] Il savait par cœur les aventures de L’Odyssée, et goûtait fort les Amadis.
Ce pauvre Don Quichotte, répétant les exploits des anciens chevaliers avec une si parfaite bonne foi et une candeur si unique, donne jour à une telle variété de rencontres et d’aventures, — l’écuyer Sancho, dès la seconde sortie, accompagne et double si grotesquement son maître, avec ce perpétuel contraste de demi-bon sens et de demi-bêtise qui ne feront que s’accroître et se solidifier en avançant, — l’auteur, par des stations ménagées à propos, sait si naturellement entremêler d’autres récits et nous intéresser, chemin faisant, par les côtés passionnés et romanesques de notre nature, — il profite si justement et avec une si légitime hardiesse des instants lucides de son héros qui n’extravague que sur un point, pour le faire noblement et fermement discourir des matières que lui-même avait le plus à cœur de traiter, — tout cet ensemble vit, marche, se déduit si aisément, d’un cours si large, si abondant, et avec une telle richesse de développements imprévus et d’embranchements inépuisables, qu’on est bien réellement en plein monde, en plein spectacle, en plein air sous le ciel, qu’on nage dans un courant de curiosité humaine de tous côtés excitée et satisfaite, et que rien ne sent ni ne rappelle l’application critique et satirique née dans le cabinet. […] Reconnaissons enfin, après plus de deux siècles d’injustice et d’erreur, dans toutes les proportions de sa gloire un grand homme qui fut un martyr ; qui tout le temps qu’il traversa cette terre resta étranger au bonheur ; dont le cœur fut pur de toute tache, à l’abri de ces petitesses dont souvent ne sont point exempts les grands écrivains ; dont le chef-d’œuvre porte à un si haut degré l’empreinte d’une nature si noble, si élevée et si humaine, et qui de tous les hommes est celui dont l’âme se montrerait le plus sensible à une réparation pour l’outrage fait à la portée de son génie. » Et moi je dis : Ainsi est fait l’esprit humain ; il a soif d’une légende morale ; il a un besoin perpétuel de refonte et de remaniement pour toutes ses figures.
Quand leur raison essaye de la franchir, leur imagination et leur cœur les y ramènent ; leur sensibilité les y attache ; ils sont religieux par leur instinct le plus sincère : toute poésie croit en Dieu. » — Il y a bien du vrai dans cette remarque, et l’étape des poètes est bien trouvée. […] Mais, pour Charles Loyson, il n’en était pas ainsi : cette étape des poètes était pour lui la région fixe et définitive, celle où sa raison comme son cœur se reposait.
J’ai eu entre les mains, sous le titre de Première Babylone, un poëme tout à fait bizarre, par un homme de cœur, M. […] Et nous, dans notre nuit, grand Dieu, Dieu des armées, Nous bénirons ton sceau sur nos lèvres fermées, Et ta blessure dans nos cœurs. » Enfin, comme autre exemple heureux et large de la poésie de M.
Sa vertu avait la virilité d’un homme ; elle s’était réservé son cœur pour aimer le roi et pour détester ses ennemis, mais elle laissait la vengeance à Dieu. […] Quand je passais quelques jours sans la voir, elle prenait la peine de venir elle-même chez moi pour s’informer de ce qui me retenait ; elle gardait mon argent de réserve avec le sien dans son tiroir ; elle me préparait, si j’étais malade, au coin de mon feu, les tisanes commandées par le médecin ; elle écrivait à ma mère des nouvelles de mon cœur et de mon âme ; elle aurait remplacé la Providence, si la Providence s’était éclipsée pour moi ; elle prenait à mes poésies, qui n’avaient pas encore paru, un intérêt partial, passionné, que je n’y prenais pas moi-même ; elle me comparait à Racine enfant ; elle était fière de préparer aux Bourbons un poëte encore inconnu, mais qu’elle rendrait royaliste et religieux comme elle.
« La langue d’Amphitryon est la plus souple, la plus épanouie, la plus polie, la plus savoureuse, la plus riante, la plus pure qu’on ait écrite. » Quand il nous parle de Labiche, il n’y a plus que Labiche et son rire épique ; et quand il nous parle d’Octave Feuillet, il n’y a plus qu’Octave Feuillet et son délicieux romanesque, consolateur de l’homme dont le cœur est supérieur à sa fortune. […] Écoute ceci, et dis-moi si l’esprit, le pur esprit, l’esprit tempéré et fin, l’esprit qui se contient et se gouverne, la plus intime essence de nous-mêmes enfin, gens de Paris, de Gascogne et de Champagne, ne peut pas être une source de poésie tout aussi bien que l’imagination exaltée, les passions furieuses, le cœur qui se ronge et l’hypocondrie !
Que de fois le voyait-on, au comptoir, déplier avec orgueil, aux yeux ébaubis ou indifférents de ses collègues, une lettre de félicitations anciennement reçue de Victor Hugo et qu’il épelait avec emphase bien qu’il la sût par cœur ! […] Je ne suis réellement moi qu’au milieu des foules élégantes, dans la griserie des capitales, au cœur des quartiers riches ou dans le décor somptueux des palaces-hôtels, rendez-vous de l’élite cosmopolite, assiégé de toutes les commodités désirables et d’une armée de serviteurs, la caresse chaude d’un tapis sous les pieds.
Un vrai classique, comme j’aimerais à l’entendre définir, c’est un auteur qui a enrichi l’esprit humain, qui en a réellement augmenté le trésor, qui lui a fait faire un pas de plus, qui a découvert quelque vérité morale non équivoque, ou ressaisi quelque passion éternelle dans ce cœur où tout semblait connu et exploré ; qui a rendu sa pensée, son observation ou son invention, sous une forme n’importe laquelle, mais large et grande, fine et sensée, saine et belle en soi ; qui a parlé à tous dans un style à lui et qui se trouve aussi celui de tout le monde, dans un style nouveau sans néologisme, nouveau et antique, aisément contemporain de tous les âges. […] Il vient une saison dans la vie, où, tous les voyages étant faits, toutes les expériences achevées, on n’a pas de plus vives jouissances que d’étudier et d’approfondir les choses qu’on sait, de savourer ce qu’on sent, comme de voir et de revoir les gens qu’on aime : pures délices du cœur et du goût dans la maturité.
Encore une fois, je reconnais que ce droit de promenade buissonnière, qui est celui de toute littérature un peu vive et libre, et pas trop prosaïque, est suspendu dans les jours d’orage, de tempête civile, dans ces affreux moments où la lutte est engagée comme nous l’avons trop vu ; mais, le lendemain, le soleil se lève, le nuage s’entrouvre ; les cœurs restent encore émus et attristés, pourtant le droit que j’appelle le droit littéraire recommence. […] Et pourtant je ne veux pas te maudire, mon pauvre enfant : ton esprit était bon, ton cœur était sans fiel ; tu as été affable comme moi, amoureux plus que moi ; tu n’as jamais aimé la vengeance, et le pardon s’est rencontré toujours dans ton sourire et dans tes yeux.
Hommes de la génération de 1830, tombés en 1848, désormais évincés et très ajournés, vous qui vous êtes toujours piqués de tout comprendre dans l’histoire, et qui, par l’étude, par les idées, par une habituelle et libre ouverture de l’intelligence, vous êtes crus et êtes, en effet, si supérieurs aux plus hommes d’esprit de cette race de 1815, n’admettez en vous trop longtemps aucun grain d’aigreur et d’amertume, aucun levain pareil au leur et qui est de nature à se loger si aisément au cœur de l’homme. […] Mais, cela dit, n’entrons pas dans le domaine du cœur ; ne touchons pas trop la corde du sentimental.
Il n’est rien de plus haut, de scène écrite en phrases plus nobles, plus pénétrantes en tout cœur, que cet incident final d’Humiliés, où Natacha, ayant consommé son martyre et consenti à ce que son faible amant la quittât, succombe enfin à ses forces brisées, et cependant encore éprise, dit amèrement et comme en rêve, la honte et la délicieuse humiliation de son attachement. […] Le lent et sourd accroissement de l’angoisse morale de Raskolnikoff, le vertige et l’oppression de son projet, qu’il apercevait vague et cependant fatal dans le délabrement de ses forces, son sourd malaise une fois le sang versé, et l’étrange sensation de retranchement qui le prend, le lâche et le tient quand il revoit sa mère et sa sœur, la cruauté de se sentir interdit à leurs caresses et de ne pouvoir leur parler que les yeux détournés vers l’ombre ; puis la terreur croissante et une sorte d’ironique rudesse s’installant dans son âme, qui l’introduisent à revisiter le lieu du crime, et à machiner de singulières mystifications qui le terrifient tout à coup lui-même — ces choses lacèrent son âme et rompent sa volonté ; ainsi abattu et ulcéré, il est amené d’instinct à visiter Sonia, et à s’entretenir avec elle en phrases dures, qu’arrête tout à coup le sanglot de sa pitié pour elle, pour lui et pour tous, en une crise où il sent à la fois l’effondrement de son orgueil et la douceur de n’être plus hostile ; des retours de dureté, la sombre rage de ses premières années de bague, l’angoisse amère d’un cœur vide et murmurant, conduisent à la fin de ce sombre livre, jusqu’à ce qu’en une matinée de printemps, au bord des eaux passantes d’un fleuve, que continue au loin la fuite indécise de la steppe, il sente, avec la force d’eaux jaillissantes, l’amour sourdre en lui, et l’abattre aux pieds de celle qui l’avait soulagé du faix de sa haine.
C’est, dans la Chambre des Belles Saintes, dom Bazin et sa sœur Bénigne, ce dom Bazin qui était bénédictin et que l’on n’appelle plus que le Malédictin, par risée, parce qu’il est de ces mauvais qu’on adore, une de ces combinaisons, délicieuses et contrastées, de la bonté du cœur et de la malice de l’esprit. […] C’est un voltairien qui, sur bien des points, vaut mieux que Voltaire et a l’air d’en descendre… par les femmes ; car il n’a pas la fibre si sèche, et son cœur ne bat pas, dru comme une chiquenaude, dans une enveloppe de parchemin !
Et ceux qui l’ont connu de près ajouteront : c’était un cœur droit, orné des plus douces vertus.
Ces lettres se distinguent par une parfaite élégance de diction et une douceur de ton exquise ; il y avait du Fénelon dans le style de Rabaut comme dans son cœur.
était-ce qu’un trait malin de la pièce avait été au cœur de la femme adultère et homicide ?
J’admire de bon coeur la majesté d’une telle critique.
Il fut le premier triomphe de la révolution, la victoire du sentiment populaire, l’avènement des simples de cœur, l’inauguration du beau comme le peuple l’entend.
C’était l’ennemi du faux en toutes choses, du faux goût, du faux savoir ; du faux en morale, en politique, en littérature, en conversation ; l’ennemi des esprits faux et des cœurs faux.
Le respect du roi très chrétien pour la religion et le soin de sa gloire que Bossuet avait réveillés, s’accroissaient à mesure que l’ardeur de l’amant satisfait diminuait ; et ce qu’écrit à ce sujet madame Scarron à madame de Saint-Géran, indique qu’elle connaissait le point par où le crédit de son ennemie était attaquable et peut-être le cœur du roi accessible.
Il possédoit sur-tout ces ressorts puissans qui attachent le cœur & l’esprit par de grands intérêts.
La plus grande partie de ses Ouvrages annonce un esprit cultivé, solide, un Ecrivain consommé dans la connoissance du monde & du cœur humain.
L’étrange héros de la Course à la Mort n’aime pas, on doute du moins qu’il aime et se sent douter, interroge sans cesse son pâle cœur, ne sait que résoudre et se résigne à son atonie.
Le mot de paix est dans la bouche & dans le cœur de tout le monde.
sont pleines de chaleur ; autant elles remuent le cœur, autant elles rendent déchirantes les paroles qui suivent.
Notre coeur exige de la verité dans la fiction même, et quand on lui présente une action allegorique, il ne peut se résoudre, pour parler ainsi, à entrer dans les sentimens de ces personnages chimeriques.
Malgré la joie qu’elle ressentait d’être mère, la yébem n’avait pas le cœur satisfait.
Le livre tient dans ce repli magnifique du cœur de l’homme.
Si tu as les vertus dont il te loue, ton cœur doit te suffire ; si tu ne les as point, il t’encourage.
Stead, vrai cri du cœur d’une Bonaparte : a Pourquoi ne se fait-il pas consul ? […] Le cœur battit à gauche. […] Jaurès n’a pas seulement occupe le cœur du parti socialiste, il a compris le cœur du public socialiste. […] Relisons la Révolte des Anges et redisons-en le dernier mot : « C’est dans le cœur de chacun de nous que nous devons détruire Ialdabaoth. » Il ne nous paraît pas que dans le cœur de M. […] Surtout elle instituait au cœur de la civilisation un dualisme bienfaisant et fécond, une harmonie vivante.
Jules Sandeau a eu bien des succès : celui de l’autre jour les lui résumait tous, ce nous semble, et les lui réfléchissait d’une manière sensible et bien touchante, qui a dû lui aller au cœur.
M. de Ravignan était d’abord un homme du monde, un magistrat, avocat général sous la Restauration ; il s’est converti à la suite d’un chagrin de cœur.
Ce fut là tout son art, toute sa préoccupation ; elle était grande : « Ma vie s’écriait-elle, est comme celle du chrétien, un combat perpétuel. » La petite maréchale de Mirepoix lui disait : « C’est votre escalier que le roi aime, il est habitué à le monter et à le descendre ; mais s’il trouvait une autre femme à qui il parlerait de sa chasse et de ses affaires, cela lui serait égal au « bout de trois jours. » Aussi, quand l’éclat de ses charmes baissa et que l’âge commença de les glacer, quand on en fut réduit aux pauvres expédients, au chocolat à triple vanille et au régime du docteur Quesnay, quand enfin il fallut opter entre des rivales ou des suppléantes, la noble amante n’hésita pas : sa tendresse désintéressée n’en voulait qu’au cœur du roi ; en le conservant, elle lui remit tout le reste ; elle fit mieux, et, dans son abnégation platonique, elle ne dédaigna pas de condescendre aux soins les plus prévoyants et les plus intimes.
Élégant et facile, il semblait fait pour donner à son sexe d’utiles préceptes et d’agréables délassements, pour saisir quelques sentiments fugitifs du cœur, pour retracer quelques souvenirs d’une société évanouie.
Les provocations intéressées de Catherine et de ses successeurs, l’opulence des îles due au transport des blés de Crimée dans les ports de France, l’éducation libérale de quelques Grecs élevés dans nos écoles et dans les universités d’Allemagne, tout cela a pu préparer et hâter l’insurrection, mais non la produire ni la soutenir : c’est au cœur même de la Grèce, sur ses monts et ses rochers, par ses Klephtes et ses Maïnotes, qu’en était le germe et qu’il mûrissait en silence.
La peur du diable qui guette, la crainte de Dieu qui punit, la vision hallucinante de l’enfer qui s’ouvre, il ne fallait pas moins que cela pour brider la violence des passions, et mettre un peu de bonté dans les actes, sinon encore dans les cœurs.
Francis Jammes, dans une petite chambre ancienne, par des soirs de septembre lent et pur, devant un horizon de métairies et de campagnes, en compagnie du silence et de son seul cœur.
Mais il y a une chose qu’on peut affirmer ; c’est la sincérité du cœur, c’est le dévouement au vrai et le sentiment des sacrifices qu’on a faits pour lui.
Les principes du Christianisme, bien gravés dans le cœur, seroient infiniment plus forts que ce faux honneur des Monarchies, ces vertus humaines des Républiques, & cette crainte servile des Etats despotiques… Chose admirable, dit-il ailleurs, la Religion Chretienne, qui ne semble avoir d’objet que la félicité de l’autre vie, fait encore notre bonheur dans celle-ci ».
Il touche, il intéresse ; il parle continuellement au cœur, & le gagne.
Milton, à l’exemple du poète de Mantoue, a placé la Mort à l’entrée de son enfer (Lethum), et le Péché, qui n’est que le mala mentis gaudia, les joies coupables du cœur .
Ceux qui disent qu’après avoir lû cette oraison, ils cherchent encore l’endroit qui fut capable de frapper si vivement un homme tel que Cesar, parlent en grammairiens qui n’ont jamais étudié que la langue des hommes, et qui n’ont point acquis la connoissance des mouvemens de leur coeur.
Tout livre est l’homme qui l’a écrit, tête, cœur, foie et entrailles.
Dans son livre de l’Avenir de la Science, livre admirable où bout toute sa jeunesse et notre cœur avec, on voit bien que Renan partait à vingt-huit ans pour modifier notre état mental tout entier.
Or l’homme, en tant qu’homme, a deux parties constituantes, l’esprit et le cœur, ou si l’on veut, l’intelligence et la volonté.
Magnin était fort favorable au divorce pour des motifs philosophiques qui étonneront ceux qui ne l’ont vu que dans les dernières années, et encore peut-être pour d’autres motifs plus secrets et plus particuliers, qui n’étonneraient personne parmi ceux qui savent les mobiles habituels du cœur humain. […] Un jour, dix ans environ avant sa fin, lui, l’esprit de tout temps le plus net et le moins mystique, il revint de Franche-Comté, — de Besançon, je crois, — tout modifié de cœur et de pensée. […] Magnin : c’était son cadre, c’était sa patrie ; il dut en porter le deuil dans son cœur quand elle changea et se transforma en vue du mieux, jusqu’à se défigurer.
Racine, dans la prairie de Port-Royal, lisait et savait par cœur Théagène en grec, comme nous écoliers, aux heures printanières, nous lisions Estelle et Numa ; mais, le livre jeté ou confisqué, il lui restait de plus le grec qu’il savait à toujours, l’accès direct et perpétuel d’Euripide et de Pindare. […] Dans sa belle et récente biographie de Byron, il a évité de sonder chez le poëte la corruption du cœur et s’est rejeté vite sur la licence d’imagination, quand cette corruption trop certaine, plus approfondie, eût mieux donné à connaître, ce semble, l’abîme mystérieux du génie et les alliances contradictoires de la nature humaine. […] Villemain se porta au cœur du moyen âge par ses études sur Grégoire VII.
« La Muse, pour se confier, veut une oreille apaisée, un esprit fin et un cœur délicat. » Cela est vrai et le sera toujours des muses discrètes, tendres ou sévères. […] Car il ne me semble pas vivre, il ne connaît pas la consolation de la vie, le mortel qui, éloignant son cœur du vin, boit quelque autre boisson d’invention nouvelle15. […] On a vu quelquefois, au plus fort des calamités et des fléaux, le cœur humain réagir bizarrement et prendre sa revanche par une sorte d’étourdissement et d’ivresse.
Il n’y va pas pour le même intérêt que Racine : nulle fougue des sens, nulle ivresse du cœur ne l’entraîne, et l’on ne saisit même pas dans son œuvre, comme dans un coin du livre de La Bruyère, la trace d’une joie ou d’une souffrance qui lui soit venue par la femme. […] Ils n’ont pas la désinvolture du courtisan, homme de cheval et homme d’épée, même quand il n’a pas le cœur d’un soldat. […] Et vous, au contraire, allez au diable, et en enfer, vous les maudits de mon Père, parce que vous m’avez aimé de tout votre cœur, et que vous avez sollicité et pressé tout le monde de m’aimer.” » Cette prosopopée, sous laquelle le Père demeura comme étourdi, devint un des beaux morceaux de l’Épître sur l’Amour de Dieu.
Puis la vue de George Sand s’élargit : un peu apaisée par sa liberté reconquise, elle regarde hors d’elle-même, et sa sympathie cherche d’autres objets que les affaires ou les états de son propre cœur. […] Elle s’unit à la nature par une sympathie profonde, elle aime partout la vie, elle mêle son âme aux choses : sa description, pittoresque et poétique tout à la fois, emplit l’œil et le cœur, nous livre à la fois l’objet et le sujet, le peintre ajouté et comme fondu dans son modèle. […] Tout ce qui est peinture extérieure, description physique, paysage, ne tient guère de place dans les romans de Stendhal : sa profession, c’est d’être « observateur du cœur humain » ; et il est en effet de première force dans l’observation, dans l’imagination psychologique.
Un sot en peut et un sage homme avoir ; Un ignorant et un de bon savoir, Ainsi qu’il plaist au sort les départir Et je voudrois pour heureux me sentir Qu’il plust à Dieu, d’où les vrais biens procedent, M’en octroyer de ceux que ne possedent Nuls vicieux, ny ne sont dispensés A cœurs malins, ni cerveaux insensés, Et sans lesquels d’hommes n’avons que l’ombre. […] Où le poète futur devra-t-il chercher le secret de cette poésie du cœur et de la raison ? […] Il se fait illusion quand, pour donner des exemples du style noble, il oppose à ces deux vers, qu’il méprise avec raison, comme étant du style bas, Madame en bonne foi, je vous donne mon coeur N’usez point envers moi, s’il vous plaist, de rigueur… ceux-ci, qu’il présente pour modèle de la noblesse du langage Son harnois il endosse ; et, furieux aux armes, Porfendit par le fer un scadron de gendarmes.
. — Cette rencontre parmi le silence épouvanté de l’orchestre, silence interrompu par de sourds battements de cœurs oppressés, est si puissamment pathétique que l’on sent, immobile comme Senta elle-même, des larmes d’angoisse vous venir aux yeux. — Eh bien, elle ne renoncera pas à son dessein. […] (probablement en contraste au « chatouillement des yeux », qui nous est causé par la lecture de mainte partition de nouveaux opéras allemands) ; mais que même l’amateur de musique allemand enlève les lunettes de ses yeux fatigués et pour une fois se donne sans réserve à la joie d’un beau chant, cela nous montre plus profondément son cœur et nous fait connaître un profond et ardent désir de respirer de nouveau pleinement et fortement pour se faire le cœur libre tout à coup, jeter loin de lui tout le bagage de préjugés et de méchantes pédanteries qui le força si longtemps à être un amateur de musique allemande, et, au lieu de cela, devenir enfin un homme heureux, libre et doué pleinement de cette admirable conception de tout ce qui est beau, sous quelle forme que cela se montre.
Villemain, qui s’est fait grec le plus qu’il a pu pour admirer sans honte cette vaine poésie qui ne parle pas plus à notre pensée qu’à nos cœurs, prétend que de toute cette poussière, mêlée de sueur, foulée par la muse de Pindare, sortirent tous ces héros, beaux comme des demi-dieux, qui sauvèrent la Grèce et suivirent en Asie Alexandre. […] Ce n’est pas l’éloquence des rhéteurs ; c’est l’éloquence vraie, spontanée, naturelle, qui sort à tout propos du cœur comme le sang jaillit de la veine ! […] Le général Foy, leur contemporain, aurait pu rappeler les orateurs anglais davantage, mais il manque aussi au livre honteusement surprenant de Villemain… Certes, s’il y a quelque chose qui puisse étonner après l’oubli incompréhensible qu’il a fait de Mirabeau, c’est l’oubli qu’il y ajoute du général Foy, l’honneur de la tribune française sous la Restauration, le plus vivant et le plus palpitant des orateurs que leur cœur a tués, car cet impassible au canon est mort des émotions de la tribune.
Ainsi tête, pour cime, ou commencement, bouche pour toute ouverture, dents d’une charrue, d’un râteau, d’une scie, d’un peigne, langue de terre, gorge d’une montagne, une poignée pour un petit nombre, bras d’un fleuve, cœur pour le milieu, veine d’une mine, entrailles de la terre, côte de la mer, chair d’un fruit ; le vent siffle, l’onde murmure, un corps gémit sous un grand poids. […] Homme est une abstraction qui comprend génériquement le corps et toutes ses parties, l’intelligence et toutes les facultés intellectuelles, le cœur et toutes les habitudes morales. […] Ainsi cette phrase poétique usitée chez toutes les nations, le sang me bout dans le cœur, fut exprimée par un seul mot, στόμαχος, ira, colère.
Il se plaint de « l’hiver moral » et des cœurs glacés dans son siècle, en qui la religion avait dévoré le génie (259). […] Les battements du cœur la mesurent et on peut les compter. […] Le cœur s’était transformé, l’imagination restait la même et le langage aussi. […] Cœur qui s’éveille. — Boismont. […] La logique du cœur. — La Baumelle.
En Italie, sous de petits princes despotes et la plupart étrangers, le danger continu et la défiance héréditaire, après avoir lié les langues, tournent les cœurs vers les jouissances intimes de l’amour ou vers les jouissances muettes des beaux-arts. […] Quand on les a connus, on ne les quitte plus, ou, si on est obligé de les quitter, on les regrette toujours. « Rien n’est comparable260, dit Voltaire, à la douce vie qu’on y mène au sein des arts et d’une volupté tranquille et délicate ; des étrangers, des rois ont préféré ce repos si agréablement occupé et si enchanteur à leur patrie et à leur trône… Le cœur s’y amollit et s’y dissout, comme les aromates se fondent doucement à un feu modéré et s’exhalent en parfums délicieux. » Gustave III, battu par les Russes, dit qu’il ira passer ses vieux jours à Paris dans un hôtel sur les boulevards ; et ce n’est pas là une simple politesse ; il se fait envoyer des plans et des devis261. […] madame, répondit le duc de Nivernais, quand le roi a dit cela, il vous regardait ». — « Mon cher Fontenelle », lui disait une de ses amies en lui mettant la main sur le cœur, « c’est aussi de la cervelle que vous ayez là. » Fontenelle souriait et ne disait pas non : voilà comment, même à un académicien, on faisait avaler ses vérités, une goutte d’acide dans un bonbon, le tout si bien fondu que la saveur piquante ne faisait que relever la saveur sucrée. […] Les femmes avaient de l’importance, même aux yeux de la vieillesse et du clergé ; elles étaient familiarisées d’une manière étonnante avec la marche des affaires ; elles savaient par cœur le caractère et les habitudes des ministres et des amis du roi.
Je souhaite à tous mes frères restés dans l’orthodoxie une paix comparable à celle où je vis depuis que ma lutte a pris fin et que la tempête apaisée m’a laissé au milieu de ce grand océan pacifique, mer sans vagues et sans rivages, où l’on n’a d’autre étoile que la raison, ni d’autre boussole que son cœur. […] Je n’imagine pas comment l’opulent peut jouir de plein cœur de son opulence, tandis qu’il est obligé de se voiler la face devant la misère d’une portion de ses semblables. […] On plante une croix à l’endroit, et les bons cœurs viennent y pleurer. […] Pour moi, je déclare que, quand je fais bien, je n’obéis à personne, je ne livre aucune bataille et ne remporte aucune victoire, que je fais un acte aussi indépendant et aussi spontané que celui de l’artiste qui tire du fond de son âme la beauté pour la réaliser au dehors, que je n’ai qu’à suivre avec ravissement et parfait acquiescement l’inspiration morale qui sort du fond de mon cœur.
. — « Je pleure, leur dit-il, parce que mon cœur s’est ému de pitié, en pensant combien est brève toute vie humaine, puisque de tous ceux qui sont là, si nombreux qu’ils sont innombrables, nul ne vivra encore dans cent ans. » C’est ce qu’aurait pu dire le Bouddha indien, s’il avait vu défiler l’armée d’Alexandre, assis au pied du figuier sauvage sous lequel il méditait le Néant divin. […] Aucune défaillance ne devant souiller ce grand sacrifice, les Trois Cents renvoyèrent leurs alliés douteux, pensant que les cœurs débiles étaient aussi dangereux dans une lutte extrême, que les bouches inutiles dans une place assiégée. […] A l’instant, toutes les hésitations cessèrent et tous les cœurs s’affermirent. […] Un appel fraternel n’aurait jamais ému ces cœurs secs, le raisonnement de l’intérêt frappa ces têtes dures.
Théo, qui est monté l’escalier, une main sur son cœur douloureux, les yeux vagues, la face blanche comme un masque de pierrot, absorbé, muet, sourd, mange et boit automatiquement, ainsi qu’un blême somnambule dînant à un clair de lune. […] Théo me dit, ce soir, avec le ton doucement splénétique qui est un charme tout particulier chez lui : « Ricord croit que c’est la valvule mitrale du cœur qui ne va pas : ou elle se relâche ou elle se resserre. […] » Et il me parle d’une maladie de cœur en germe, d’un commencement de maladie de vessie, d’une menace de rhumatisme articulaire. […] Autrefois ça m’aurait été égal, je me serais dit : je m’arrangerai pour être dans un autre compartiment, puis à la rigueur si je n’avais pu éviter mon monsieur désagréable, je me serais soulagé en l’engueulant, maintenant ce n’est plus cela, rien que l’appréhension de la chose, ça me donne un battement de cœur… Tenez, entrons dans un café, je vais écrire à mon domestique, que je reviens demain. » Et là, devant la paille d’un Soyer : « Non, je ne suis plus susceptible de supporter un embêtement quelconque… Les notaires de Rouen me regardent comme un toqué… vous concevez, pour les affaires de partage, je leur disais : Qu’ils prennent tout ce qu’ils veulent ; mais qu’on ne me parle de rien, j’aime mieux être volé qu’être agacé, et c’est comme cela pour tout, pour les éditeurs… L’action, maintenant, j’ai pour l’action une paresse qui n’a pas de nom, il n’y a absolument que l’action du travail qui me reste. » La lettre écrite et cachetée, il s’écrie : « Je suis heureux comme un homme qui a fait une couillonnade !
Ces chants, ces modulations, ces plaintes musicales avaient fait, tout à coup, remonter à la surface de nos cœurs saignants et vides, des douleurs enterrées, — lui, son Armand, moi, mon Jules, — et tous deux, nous repleurions nos bien-aimés. […] Mlle Abbatucci qui a voulu faire des papiers granités, à souffler de l’encre verte dans un pulvérisateur, prise de mal de cœur, a été se coucher. […] Lundi 16 novembre La princesse a une qualité charmante, une certaine grâce de cœur à regretter les amis qui partent. […] » J’étais élève de l’École, elle était élève de la Danse, j’avais seize ans, elle en avait peut-être dix-huit, vous voyez ça d’ici… À l’Opéra elle faisait de la pantomime avec un maître de ballet… Ne s’amusa-t-elle pas à vouloir se faire mon professeur dans cet art… Moi, qui étais mime dès l’enfance, vous pensez si ça m’allait, et me voilà, le portrait abandonné, à tourner autour d’elle avec des ronds de jambe, et des mains sur le cœur, me voilà à m’agenouiller, en simulacre de déclaration… Elle trouvait ça très drôle, et moi en arlequinant, vous vous doutez que je pelotais fort… Un jour, que nous arlequinions ainsi, le père entre tout à coup, et me voit serrer sa fille de très près.
Sur mes regrets, Porel nous offrait galamment son théâtre, et instantanément nous improvisions à nous trois la représentation annoncée dans les journaux, et que je trouve pour ma part joliment imaginée comme représentation d’amitié et de cœur, et dont l’argent n’avait rien à mes yeux de plus blessant pour la mémoire de Flaubert, que l’argent d’une souscription du public. […] Jeudi 10 mars Les quelques femmes, que j’ai hautement aimées, aimées avec un peu de ma cervelle mêlée à mon cœur, je ne les ai pas eues — et cependant j’ai la croyance que, si j’avais voulu absolument les avoir, elles auraient été à moi. […] Dimanche de Pâques, 10 avril Au fond c’est dur de n’avoir pas une oreille, un cœur de femme intelligente, pour y déposer ses souffrances d’orgueil et de vanité littéraire… Tout manque, tout casse, tout croule. […] En tout cas, je crois pouvoir vous assurer que dans vos biographies passées, présentes, futures, on ne trouvera pas un hommage plus éclatant, rendu à votre cœur et à votre intelligence.
Fils d’un chirurgien, il avait pour frère aîné Jean Eudes qui fut de l’Oratoire et en sortit pour fonder la congrégation des Eudistes, homme d’une piété vive et zélée, qui excellait à enfoncer l’aiguillon de l’amour divin, même au cœur des tièdes. […] En ce temps, monseigneur, qu’elle est comblée de tant de merveilles, de prospérités et de victoires, c’est un trop bel avantage d’être Français pour n’avoir pas du cœur et de l’ambition.
Il a beaucoup d’expressions de cette sorte, fraîches ou fortes, et presque toujours vives, dont il nourrit et anime sa diction ; il dira, parlant des enfants : « Il faut leur grossir le cœur d’ingénuité, de franchise, d’amour, de vertu et d’honneur. » Il dira, parlant de la ditférence trop souvent profonde et de l’abîme qu’il y a, — qu’il y avait alors, — entre le sage et le savant : « Qui est fort savant n’est guère sage, et qui est sage n’est pas savant. […] Il y en a eu en l’Antiquité, mais il ne s’en trouve presque plus. » Il dira de Scipion accusé et dédaignant de se défendre : « Il avait le cœur trop gros de nature pour se savoir être criminel, etc. » Que ces expressions soient à lui ou primitivement à Montaigne, il a le talent de les poursuivre et de les continuer ; il est homme à en trouver à son tour de pareilles, et qui ne déparent pas celles qu’il tient de l’original.
Ce qui aide à persuader de la délicatesse de son esprit, c’est qu’il n’a jamais donné son cœur qu’à des personnes qui en eussent infiniment. […] Bientôt se déclare la première atteinte d’un mal singulier qui tourmenta Louis XIV toute sa vie, le tint perpétuellement en échec, et qu’il ne parvint à dissimuler qu’à force de bonne contenance et d’empire sur lui-même, devant sa Cour et aux yeux de son entourage : ce sont des vapeurs, « une douleur de tête sourde et pesante, avec quelques ressentiments de vertiges, maux de cœur, faiblesse et abattement. » C’est en 1662 que les premiers signes de cette indisposition inquiétante apparaissent.
A ces odieux, procédés, il mêle parfois des airs d’honnête homme, des semblants de sentiment ; il joue le bon apôtre : « Le sieur d’Audrehon, ministre de Lembeye, m’étant venu voir ; me dit qu’il sentait de grands mouvements dans son cœur pour embrasser la religion catholique ; mais qu’il avait encore besoin d’un, mois pour prendre sa résolution ; sur quoi, l’ayant fait entrer dans la chapelle du château de Pau, où M. l’évêque d’Oléron recevait l’abjuration d’un ancien avocat de Pau et où il y avait beaucoup de monde, je lui demandai s’il ne sentait rien dans son cœur qui le sollicitât, à la vue de son véritable pasteur, de s’aller jeter entre ses bras.
Il est bon qu’il fasse retirer ces billets — là tout doucement des corps de garde sans faire de bruit. » (Et au sujet des visites dans les hôpitaux) : « Elle est fort louable de faire cela, et si elle y trouve quelque chose de mal, elle me fera plaisir de m’en avertir ; mais il ne faut voir que l’hôpital du roi et n’aller que rarement dans celui de la ville, à moins qu’elle ne sût qu’il y eût quelque catholique auquel on refusât de donner les assistances spirituelles, auquel cas il serait fort à propos d’en avertir. » Louvois, l’approbateur, sinon l’inventeur des dragonnades, qui, dans les années suivantes, allait être si dur et si impitoyable pour les Protestants du cœur du royaume, anciens et bons Français, se montrait ici prudent et politique à l’égard d’une cité luthérienne, nouvellement française. […] Noble cité qui n’a gardé de l’Allemagne que la science et la bonté, et devenue toute guerrière et toute française par le cœur !
Ne sait-il pas aussi la loi des cœurs ? […] Il sait que le cœur humain est un labyrinthe ainsi fait, et avec un écho si bien ménagé, qu’une seule et même voix peut se faire à elle-même la demande et la réponse.
La Coalition a poussé sa trame jusqu’au cœur de son système fédératif : il est décidé à ne plus tolérer dans sa sphère d’action que des souverains dévoués. […] Cette affaire à recommencer, elle était commencée, entamée et nouée depuis 1812 et dès auparavant ; elle était écrite au cœur des souverains avant d’être réglée et formulée dans leurs stipulations.
Maurice prit aussitôt l’affaire à cœur. […] Dans une lettre toute familière, le maréchal, pour lui prouver qu’il ne le boude pas, lui parle à cœur ouvert de la Cour de France et des intrigues en jeu.
Recevez-en mon compliment de cœur, mon général ; les expressions manquent pour vous dire tout ce qu’on voudrait en ce moment. […] Et qu’on lise aussi dans le Bibliophile français (n° du 1er août 1868) deux lettres de Talleyrand dans sa jeunesse, du Talleyrand d’avant la Révolution, d’avant l’épiscopat adressées en 1787 à son ami Choiseul-Goufïier, ambassadeur à Constantinople : c’est vif, court, agréable, aimable, en même temps qu’on y sent un premier souffle de libéralisme sincère, un souci des intérêts populaires qui semble, en vérité, venir du cœur autant que de l’esprit.
D’autre part, Marivaux a été chez nous un des fondateurs de la sensibilité littéraire : la satire se retire devant l’attendrissement ; surtout dans la Vie de Marianne, le touchant, le pathétique abondent ; l’héroïne est un cœur sensible, et toutes les pages importantes de sa vie sont trempées de larmes. […] Le Paysan perverti, 4 vol. in-12, 1776 ; Monsieur Nicolas, ou le Cœur humain dévoilé, 16 vol. in-12, 1796-1797.
Des raisons d’ordre intellectuel ont éloigné Renan de l’Église : mais il est parti sans colère, sans rancune, le cœur tout pénétré au contraire et parfumé pour la vie de la vertu fortifiante, consolante, ennoblissante du catholicisme, reconnaissant de tout ce qu’il lui avait dû de pures joies et de bonnes directions, tant que son progrès intellectuel n’en avait pas détruit l’efficacité ! […] Il a radicalement détruit ce que Voltaire avait ébranlé, mais il a aussi radicalement détruit l’esprit voltairien : il a affranchi de l’anticléricalisme les cœurs qu’il a retirés pour jamais au christianisme.
Mais voilà que, dans un banquet, quelqu’un des convives s’avise de chanter un des plus beaux chœurs d’Euripide, et aussitôt tous ces vainqueurs farouches se sentent le cœur brisé, et il leur parut que ce serait un crime d’exterminer une cité qui avait produit de tels hommes. » Voilà ce qu’on trouverait à chaque page dans Plutarque, et il fournirait, à lui seul, de quoi rendre vivante et sensible par des exemples toute l’Antiquité dont on aurait besoin. […] Souvestre est mort depuis, prématurément enlevé à la littérature et à ses amis, le 6 juillet 1854, d’une maladie du cœur.
Joseph Droz, né à Besançon, le 31 octobre 1773, d’une famille de magistrats et de jurisconsultes honorablement connue dans la province, avait reçu de ses pères comme par héritage la droiture de l’esprit, la douceur du cœur et la disposition au bien. […] Son esprit comme son cœur porta toujours l’empreinte de ces deux moments.
Son honneur à lui, c’est de n’avoir jamais, même aux moments les plus désespérés et les plus amers, cédé d’un point sur les conditions qu’il jugeait essentielles au rétablissement de la monarchie en France : « Il est aussi impossible de refaire l’Ancien Régime, pensait-il, que de bâtir Saint-Pierre de Rome avec la poussière des chemins. » Consulté de Vérone par Louis XVIII, et d’Édimbourg par le comte d’Artois, dans leurs projets excentriques de restauration, il ne cesse de leur redire : « Il faut écouter l’intérieur si l’on veut entreprendre quelque chose de solide… Ce n’est pas à nous à diriger l’intérieur, c’est lui qui doit nous diriger. » Dans une note écrite pour Louis XVIII en juillet 1795, Mallet du Pan lui pose les vrais termes de la question, que ce roi ne paraissait pas comprendre entièrement alors, et qu’il fallut une plus longue adversité pour lui expliquer et lui démontrer : La grande pluralité des Français ayant participé à la Révolution par des erreurs de conduite ou par des erreurs d’opinion, écrivait Mallet, il n’est que trop vrai qu’elle ne se rendra jamais à discrétion à l’ancienne autorité et à ses dépositaires ; il suffit de descendre dans le cœur humain pour se convaincre de cette vérité. […] Cette épidémie de constitutions politiques, « qui succéda alors en France et en Europe aux pantins et aux aérostats » (deux modes du jour), date de lui : Pas un commis-marchand formé par la lecture de l’Héloïse, dit Mallet du Pan, point de maître d’école ayant traduit dix pages de Tite-Live, point d’artiste ayant feuilleté Rollin, pas un bel esprit devenu publiciste en apprenant par cœur les logogriphes du Contrat social, qui ne fasse aujourd’hui une constitution… Cependant la société s’écroule durant la recherche de cette pierre philosophale de la politique spéculative ; elle reste en cendres au fond du creuset.
Ce n’est pas que je n’eusse la tête encore passablement garnie ; mais la garniture paraissait un peu trop antique, et je craignais qu’elle ne blessât enfin les yeux d’Amarante ; c’est comme je nomme la belle qui maintenant tient mon cœur. […] J’aime la gloire, à la vérité, mais je l’aime d’amitié et non pas d’amour ; et je préfère le cœur d’Amarante à toutes les langues de la renommée.
Comme toute ma vie, j’obéis à mes passions et me livre du meilleur cœur du monde à tout ce qu’on en peut penser. […] Nous avons vécu ensemble à cœur découvert.
son cœur. […] Mais il y a tel instant où, du fond de cette vanité, de cet égoïsme, de cette petitesse, de ces misères, de cette boue dont nous sommes faits, sort tout à coup un je ne sais quoi, un cri du cœur, un mouvement instinctif et irréfléchi, quelquefois même une résolution, qui ne se rapporte pas à nous, mais à un autre, mais à une idée, à notre père et à notre mère, à notre ami, à la patrie, à Dieu, à l’humanité malheureuse, et cela seul trahit en nous quelque chose de désintéressé, un reste ou un commencement de grandeur, qui, bien cultivé, peut se répandre dans l’âme et dans la vie tout entière, soutenir ou réparer nos défaillances, et protester du moins contre les vices qui nous entraînent et contre les fautes qui nous échappent.
À cette époque, écrit-il d’un ton hiératique, tout à la fois mystique et mystérieux, beaucoup d’âmes « se révélèrent à moi, ne craignirent pas de montrer des blessures cachées, apportèrent leurs cœurs saignants. […] Michelet a bien son âge ici, et plus jeune il n’eût pas écrit cela… Il fallait les meurtrissures du temps qui meurtrit le cœur comme le front, il fallait bien des fermentations, gardées en soi, pour écrire, sous le nom de l’Amour, un livre hideux de physique et que la critique ne peut pas même analyser, et, que disons-nous ?
Il n’a qu’une allure et qu’une faculté ; ni les choses ni les idées ne semblent le toucher, à moins qu’il n’y trouve une vue d’ensemble ; alors elles le touchent jusqu’au cœur. […] Le sang circule par des vaisseaux chez les vertébrés, par des lacunes chez les insectes, ici par un cœur simple, double ou triple, muni ou privé de valvules, là par les parois contractiles des vaisseaux.
La Musique, au contraire, nous donne le noyau générateur de toutes choses, elle en est le cœur même. […] Le drame naît de la musique parce que celle-ci est le cœur même de ce drame ; elle est l’expression générale de toutes les apparences dont se compose le drame. […] La musique lui tenait au cœur. […] Wagner a vu la seule solution du problème ; il a traduit ses sujets sous une triple forme : parole, mimique, musique ; et c’est à la musique qu’il a confié le soin de transporter directement la passion du cœur du héros dans celui du public. […] Il le dépensa d’une manière prodigue et par bonté de cœur ; si bien que, pendant des siècles, les musiciens pourront encore se nourrir de ses pensées et de ses idées.
Ce que la volonté, la détermination d’un homme de tête et de cœur, aux instants les plus critiques, si cet homme est le point de mire de tous, peut jeter d’imprévu dans la balance des événements, est incalculable.
Insulté un jour par les orgueilleux insulaires, son cœur ulcéré ne bat plus que pour la vengeance.
Au lieu que ces bons vieux mots qu’on connaît depuis l’enfance, et qui font encore leur service tous les jours, ces mots nous vont au cœur, trouvent de l’écho dans notre plus intime expérience.
Il était tout naturel que nous fussions de cœur avec les Grecs.
Et il faudrait être sans pitié aussi pour toute une catégorie des clientes de ces gens-là, pour leurs clientes riches, pour les perruches et les poupées sans cœur qui ne veulent pas être mères, parce que cela gâte la taille et interrompt le plaisir.
Elle contente assez ma raison : Et mon cœur en secret me dit qu’il y consent.
Tu pars, âme chrétienne, on m’a dit résignée, Parce que tu savais que ton Dieu préparait Une fête enfin claire à ton cœur sans secret, Une amour toute flamme à ton amour ignée.
Nous en savions la leçon par cœur : « Cette table, mesdames et messieurs, est faite d’un seul morceau… Cette coupe de malachite fut offerte à Napoléon Ier par l’empereur Alexandre… Admirez la soie toujours fraîche de ces rideaux… » Je me souviens qu’un jour de visite, deux dames en deuil nous avisèrent près de l’orangerie.
Quoique ces deux ouvrages rentrent l’un dans l’autre, on les a lus avec plaisir, parce que les anecdotes dont ils sont semés servent à faire connoître le cœur humain.
Le coeur contracte un calus de la même maniere que les pieds et les mains en contractent.
Je sais, continue-t-elle, ce qui se passe dans ton cœur.
L’éloquence prodiguée en pure perte se glace sur les lèvres, et retombe avec amertume sur le cœur.
Au nord »,… Circuit, le mot n’est pas de moi, le mot est de Taine ; cette méthode est proprement la méthode de la grande ceinture ; si vous voulez connaître Paris, commencez par tourner ; circulez de Chartres sur Montargis, et retour ; c’est la méthode des vibrations concentriques, en commençant par la vibration la plus circonférentielle, la plus éloignée du centre, la plus étrangère ; en admettant qu’on puisse obtenir jamais, pour commencer, cette vibration la plus circonférentielle ; car on voit bien comment des vibrations partent d’un centre, connu ; on ne voit pas comment obtenir la vibration la plus circonférentielle, ni même comment se la représenter, si le centre est par définition non connu, et si un cercle ne se conçoit point sans un centre connu ; pétition de principe ; c’est le contraire de ce qui se passe pour les ondes sonores, électriques, optiques, pour toutes les ondes qui se meuvent partant de leur point d’émission ; c’est le contraire de ce qui se passe quand on jette une pierre dans l’eau ; c’est une spirale commencée par le bout le plus éloigné du centre ; à condition qu’on tienne ce bout ; ce sont les vastes tournoiements plans de l’aigle, moins l’acuité du regard, et le coup de sonde, et, au centre, la saisie ; je découpe ici mon exemplaire, et je cite au long, pour que l’on voie, pour que l’on mesure, sur cet exemple éminent, toute la longueur du circuit : « Au nord, l’Océan bat les falaises blanchâtres ou noie les terres plates ; les coups de ce bélier monotone qui heurte obstinément la grève, l’entassement de ces eaux stériles qui assiègent l’embouchure des fleuves, la joie des vagues indomptées qui s’entre-choquent follement sur la plaine sans limites, font descendre au fond du cœur des émotions tragiques ; la mer est un hôte disproportionné et sauvage dont le voisinage laisse toujours dans l’homme un fond d’inquiétude et d’accablement. — En avançant vers l’est, vous rencontrez la grasse Flandre, antique nourrice de la vie corporelle, ses plaines immenses toutes regorgeantes d’une abondance grossière, ses prairies peuplées de troupeaux couchés qui ruminent, ses larges fleuves qui tournoient paisiblement à pleins bords sous les bateaux chargés, ses nuages noirâtres tachés de blancheurs éclatantes qui abattent incessamment leurs averses sur la verdure, son ciel changeant, plein de violents contrastes, et qui répand une beauté poétique sur sa lourde fécondité. — Au sortir de ce grand potager, le Rhin apparaît, et l’on remonte vers la France. […] Il ne faut pas trop se hasarder en conjectures, mais enfin c’est parce qu’il y a une France, ce me semble, qu’il y a eu un La Fontaine et des Français. » Mon Dieu oui ; seulement il y a une France pour tout le monde, la France luit pour tout le monde, et tous les Français, s’ils seront toujours français, ne sont pas La Fontaine ; je n’insiste pas sur toutes ces difficultés, sur toutes ces contrariétés ; je m’en tiens pour aujourd’hui à la forme même du connaissement ; la méthode ne se révèle pas dans toutes les œuvres modernes partout avec une aussi haute audace ; elle ne fait pas dans toutes les œuvres modernes partout l’objet d’une aussi manifeste déclaration que dans cet éminent La Fontaine ; elle est ailleurs plus ou moins dissimulée, plus ou moins implicite ; mais c’est essentiellement, éminemment, la méthode historique moderne, obtenue par le transport, par le transfert direct, en bloc, des méthodes scientifiques modernes dans le domaine de l’histoire ; l’auteur, en bon compagnon, commence par faire son tour de France ; il ferait son tour du monde, s’il était meilleur compagnon ; et quand il a fini son tour du pays, il commence l’autre tour, afin de ne point tomber par mégarde au cœur de son sujet, il commence le tour le plus cher à tout historien bien né, le tour des livres et des bibliothèques ; avec ce tour commencera le paragraphe deux. […] Tel innommé a été peut-être plus grand qu’Alexandre ; tel cœur de femme qui n’a dit mot de sa vie a mieux senti que le poëte le plus harmonieux. — Je parle de la vie par influence, ou, selon l’expression des mystiques, de la vie en Dieu. […] Nous sommes ainsi conduits au seuil du plus grand débat de toute la pensée moderne ; au cœur de la plus grande contrariété moderne ; et c’est sur ce seuil que nous nous arrêterons, pour aujourd’hui, car il est évident que ce simple avant-propos ne peut devenir ni un traité, ni même un essai de la manière d’écrire l’histoire ; c’est déjà beaucoup, peut-être, que d’avoir commencé de contribuer à la position du débat ; et nous reconnaissons ici que ce débat n’est autre que le vieux débat de la science et de l’art ; mais c’est un cas nouveau, et particulièrement éminent, de ce vieux débat général ; d’un côté ceux que nous avons nommés les historiens modernes, c’est-à-dire, exactement, ceux qui ont voulu transporter, en bloc, les méthodes scientifiques modernes dans le domaine de l’histoire et de l’humanité ; nous avons aujourd’hui recherché leurs intentions, mesuré leur présomption, non pas seulement sur des exemples éminents, sur deux exemples capitaux, mais sur les deux exemples qui commandent tout le mouvement, étant à l’origine, au commencement, au moment de la franchise enfantine, et le dominant tout ; de l’autre côté, en face des historiens modernes, et non pas contre eux sans doute, car il s’agit d’un débat, et non pas d’un combat sans doute, en face des historiens modernes tous ceux de nous qui ne transportons point en bloc les méthodes scientifiques modernes au domaine de l’histoire et de l’humanité, qui ne transmutons point servilement les méthodes scientifiques modernes en méthodes historiques ; tous ceux de nous qui croyons qu’il y a, pour le domaine de l’histoire et de l’humanité, des méthodes historiques et humaines propres ; des méthodes humainement historiques ; nous nous arrêterons, pour aujourd’hui, au seuil de ce débat ; c’est assez écrit pour un cahier, pour l’avant-propos d’un cahier ; gardons-nous quelque travail pour les veillées de cet hiver ; en outre, je parviens au point de nos recherches où il me serait presque impossible de continuer sans commencer à parler de Chad Gadya ! […] Charles Péguy Nous n’avons pas coutume ici de remercier nos collaborateurs, puisque nous travaillons tous d’un même cœur à la croissance et à la prospérité de ces cahiers ; on me permettra de faire une exception, pour ce cahier exceptionnel, et de dire combien nous sommes obligés au traducteur qui, ayant en mains, ayant traduit d’enthousiasme ce beau poëme, totalement inconnu de nous, d’enthousiasme nous l’apporta.
L’éternité ne dresse point devant eux sa pyramide de milliards de siècles comme une monstrueuse montagne auprès de laquelle notre petite vie est une taupinée, un pli de sable ; ils ne se préoccupent pas, comme d’autres, Indiens, Egyptiens, Sémites, Germains, du cercle sans cesse renaissant des métempsycoses, ni du sommeil éternel et silencieux du tombeau, ni de l’abîme sans forme et sans fond d’où les créatures sortent comme des vapeurs éphémères, ni du Dieu unique, absorbant et terrible, en qui se concentrent toutes les forces de la nature et pour qui le ciel et la terre ne sont qu’une tente et un marchepied, ni de cette puissance auguste, mystérieuse, invisible, que la vénération du cœur découvre à travers et au-delà des choses 19. […] Enfant, apportes-en trois pour nous et donnes-en un à mon père ; demande à Æchinadès des myrtes avec leurs fruits ; et qu’en même temps quelqu’un aille crier de la route à Charinadès de venir boire avec nous pendant que le dieu nous aide et fait pousser nos récoltes… Ô vénérable et royale déesse, ô Paix, souveraine des cœurs, souveraine des noces, reçois notre sacrifice… fais abonder toutes les bonnes choses sur notre marché, les belles têtes d’ail, les concombres précoces, les pommes, les grenades ; qu’on y voie affluer les Béotiens chargés d’oies, de canards, de pigeons, de mauviettes ; que les anguilles du lac Copaïs y viennent par paniers, et qu’empressés, serrés à l’envi pour les acheter, tout autour d’elles, nous luttions avec Morychos, Téléas et les autres gourmands.. […] Selon d’autres, il est le plus jeune des dieux, car la vieillesse exclut l’amour ; il est le plus délicat, car il marche et se repose sur les choses les plus tendres, les cœurs, et seulement sur ceux qui sont tendres ; il est d’une essence liquide et subtile, car il entre dans les âmes et en sort sans qu’on s’en doute ; il a le teint d’une fleur, car il vil parmi les parfums et les fleurs. […] Au fond, comme tous les dieux, il est multiple, attaché aux divers endroits dans lesquels le cœur de l’homme a le mieux senti sa présence, aux diverses cités et même aux diverses familles qui, l’ayant reconnu dans leurs horizons, se le sont approprié et lui ont sacrifié. « Je t’en conjure, dit Tecmesse, par le Zeus de ton foyer. » Pour se représenter exactement le sentiment religieux d’un Grec, il faut se figurer une vallée, une côte, tout le paysage primitif dans lequel une peuplade s’est fixée ; ce n’est pas le ciel en général, ni la terre universelle qu’elle a sentis comme des êtres divins, c’est son ciel avec son horizon de montagnes onduleuses, c’est cette terre qu’elle habite, ce sont ces bois, ces eaux courantes parmi lesquelles elle vit ; elle a son Zeus, son Poséidon, son Héré, son Apollon, comme ses nymphes bocagères ou fluviales. […] Peut-être avait-il entendu résonner dans son cœur l’écho de la physique et de la philosophie nouvelles, qui, confondant encore l’esprit et la matière, considéraient la pensée comme la plus « légère et la plus pure des substances », sorte d’éther subtil répandu partout pour produire et maintenir l’ordre du monde67 ; ainsi s’était formée en lui une idée plus haute encore que l’idée populaire ; sa Pallas dépassait celle d’Egine, déjà si grave, de toute la majesté des choses éternelles. — Par un long détour et des cercles de plus en plus rapprochés, nous avons suivi toutes les origines de la statue, et nous voici arrivés à la place vide que l’on reconnaît encore, où s’élevait son piédestal et d’où sa forme auguste a disparu.
Pour notre part, nous renonçons de grand cœur à prolonger cette discussion, et nous acceptons volontiers Latréaumont comme un roman. […] Cette multiple agonie, partagée en chapitres dialogues, soulève le cœur, et n’ajoute rien à la vraisemblance du récit. […] Il célèbre en toute occasion l’intérêt victorieux et la passion humiliée, et jamais il ne trouve une larme de sympathie pour les souffrances du cœur. […] Après avoir caché l’âme de Socrate dans le corps d’un valet, il a jeté l’amour maternel dans le cœur d’une femme adultère, incestueuse, qui partage son lit entre son père et ses frères. […] Émouvoir et charmer, réveiller au fond des cœurs les passions endormies, amener sur les paupières brûlantes des flots de larmes, n’est plus pour lui qu’une gloire secondaire.
Dans l’un des chœurs, au moment où Hémon sort désespéré et furieux contre son père, et va rejoindre sa fiancée Antigone, déjà condamnée, la troupe des Thébains entonne naturellement un hymne à l’Amour, à l’invincible Amour qui règne sur toutes choses et à l’abri duquel n’est aucun des dieux ni des mortels ; et celui qui l’a au cœur est insensé.
Un sentiment élevé d’intelligence et d’impartialité circule à travers l’ouvrage et fait honneur au cœur aussi bien qu’à l’esprit de M.
Ses œuvres dernières, La légende de saint Julien l’hospitalier, et surtout Un cœur simple, sont toutes de pitié et miséricorde.
Si l’avare, si l’égoïste sont incapables de ces retours sensibles, il est un malheur particulier à de tels caractères auquel ils ne peuvent jamais échapper ; ils craignent la mort, comme s’ils avaient su jouir de la vie : après avoir sacrifié leurs jours présents à leurs jours avenir, ils éprouvent une sorte de rage, en voyant s’approcher le terme de l’existence ; les affections du cœur augmentent le prix de la vie en diminuant l’amertume de la mort : tout ce qui est aride fait mal vivre et mal mourir : enfin, les passions personnelles sont de l’esclavage autant que celles qui mettent dans la dépendance des autres ; elles rendent également impossible l’empire sur soi-même, et c’est dans le libre et constant exercice de cette puissance qu’est le repos et ce qu’il y a de bonheur.
La langue française a le mérite de distinguer les synonymes avec une lumineuse précision : elle le doit en grande partie à ces précieux et à ces premiers académiciens, dont se moquait un peu légèrement Saint-Ëvremond, et aussi à ce goût d’analyse morale qui a poussé tant d’écrivains, tant de gens du monde même, à étudier le cœur humain dans ses plus délicats mouvements et ses plus imperceptibles ressorts.
Cela ne jaillit pas ou, ce qui revient au même pour nous, ne paraît pas jaillir du cœur.
Car nous avons beau savoir que les fauteurs de révolte ont toujours participé largement de l’égoïsme contre lequel ils s’insurgeaient ; que, si la justice et la charité appellent quelquefois les révolutions, c’est la haine et l’envie qui les accomplissent, et que, par exemple, ce sont les meneurs de grèves qui, nés capitalistes, eussent été les plus durs patrons : il semble parfois que, les révolutions faites, il en revienne tout de même quelque chose, au bout d’un certain temps, aux résignés, aux humbles de cœur, bien qu’elles n’aient été faites ni par eux ni même, au fond, pour eux ; et il arrive ainsi que les violents et les féroces paraissent finalement avoir travaillé pour la justice… Ou peut-être que je m’abuse, et que le bénéfice humain acquis par des moyens révolutionnaires eût pu l’être, et mieux, par un progrès uniquement légal et pacifique.
Édouard Fournier Tandis qu’il multipliait au grand jour, en s’en faisant gloire, les éditions de ses Messéniennes, si peu lisibles aujourd’hui, avec leur versification de l’Empire, où la phraséologie du rhéteur parle plus haut que le cœur du patriote, il cachait obscurément dans un recueil son admirable ballade l’Âme du Purgatoire ; dans le coin d’une note, sa romance de la Brigantine où Mme Pauline Duchambge la découvrit pour la mettre en musique ; et je ne sais où, son adorable pièce de Néra, que Scudo ramassait de même pour y appliquer une de ses plus pures mélodies.
Mais telle était la trace qu’il avait laissée dans le cœur de ses disciples et de quelques amies dévouées que, durant des semaines encore, il fut pour eux vivant et consolateur.
Les mouvements automatiques, qui répondent à peu près à ceux que, de nos jours, on appelle réflexes (mouvements du cœur, des poumons, etc.), dépendent, suivant Hartley, de vibrations qui viennent du cerveau.
Il était célèbre dans le monde galant par sa beauté, ses grâces, son esprit et son tendre cœur.
Il ne doit pas écrire avec ce qui a été écrit, mais avec son âme et avec son cœur.
Voilà qui nous passe près du cœur !
est-ce que le labeur de notre grand siècle se trouve dans ces puérilités du cœur ? […] Et voilà tout, cela suffit à serrer les cœurs d’une profonde émotion. […] Alors, nous serions parfaitement d’accord, ce que je désire de tout mon cœur. […] Cela prend les spectateurs par les nerfs et par le cœur. […] Nous rions et nous pleurons où est notre cœur.
de nous donner pour des « impressions » des jugements que l’on entend bien, dans le fond de son cœur, qui soient pris comme tels ? […] C’était l’enthousiasme de la pitié, la passion de la bonté que je sentais en mon cœur. […] il faut aimer ; et, au lieu de l’esprit ou des sens, c’est le cœur qu’il faut écouter et apprendre à entendre. […] Notre cœur ne doit être bon qu’à sentir celui des autres. […] On ne prouve pas la nécessité d’obéir, ni celle de vaincre ses passions, ni celle de se sacrifier : mais on y incline les cœurs.
Et puis, où peut mener leur défaut de passion et de cœur ? […] Je les sais toutes par cœur et M. […] si c’est là ce qu’on appelle connaître « les rouages du cœur humain », ça n’est vraiment pas fort ! […] — N’oubliez pas, s’écria-t-il, les coups de pied au cœur de Jeantrou ! […] Deux de ses romans déjà, dans un style de belle race, ont confessé des dandysmes du cœur, des cas de conscience singuliers.
On ne s’étonnera pas qu’ayant rencontré un contradicteur aussi éminent, nous tenions compte de toutes ses paroles : aussi bien sommes-nous ici dans le cœur de notre sujet. […] Il consacre quelques pages de cette préface à l’une des questions qui lui tiennent le plus à cœur, ainsi qu’à nous, la question des causes finales. […] De ces deux ordres de faits, en supposant qu’ils fussent égaux en nombre et en autorité (ce qui n’est pas à beaucoup près), que devrait conclure le vrai positiviste, celui qui serait vraiment dégagé de toute prévention métaphysique, celui qui n’aurait pas déjà un parti pris dans son cœur ? […] Seraient-ce seulement sa conscience et son cœur qui se soulèvent en cette occasion ? […] Il faudrait faire ici, d’ailleurs, une distinction importante : il faut distinguer, ce nous semble, l’idée d’un être parfait tel qu’il est en soi et l’idée des diverses perfections que nous lui supposons pour le rendre accessible à notre raison et à notre cœur.
Et avant d’aller prendre notre leçon d’armes, au premier café borgne, sur le marbre taché de roupies de café, nous voilà à nous plonger dans cette cervelle et ce cœur, tout ouverts. […] Il a le secret de parler à son public, à ce public des premières ; il en est le poète, et sert aux hommes et aux femmes de ce monde, dans une langue à leur portée, l’idéal des lieux communs de leur cœur. […] * * * — Se jeter, en se levant, dans l’étude courante et passegiante de quelque église, de quelque ruine, déjeuner sur une table boiteuse du café Greco, dans l’ombre de son chez soi, fumer des cigares en écrivant des notes, devant un bouquet de roses blanches au cœur de soufre ; puis, vers quatre ou cinq heures, faire une promenade, en voiture, dans les environs de Rome : c’est là notre vie de tous les jours. […] Mariette, qui s’est emparé de la petite plaque d’or, dit que c’est une prière de cette femme, pour la réunion de son cœur et de ses entrailles à son corps, au Jour éternel. […] Et maintenant lui écrivant, et ne lui parlant que des souvenirs de son cœur de douze ans, il ne vivait plus que de cette flamme passée !
Il ne pouvait tolérer longtemps une forme littéraire restrictive de l’action et du fol instinct, et qui, en régularisant avec rigueur l’expression de l’idée, arrête l’élan du cœur pour le discipliner à de traditionnels mouvements. […] Printanière, dans l’aube éternelle du rêve Et dans l’aurore assise, Elle tisse en rêvant Des choses qu’Elle sait, et sourit ; et, devant Elle, au gré de sa main agile, court sans trêve La navette laborieuse, et le doux vent D’avril emmêle ses cheveux qu’Elle soulève Et rejette sur son épaule ; et, relevant La tête, Elle fredonne un air qu’Elle n’achève… De l’ombre, Elle apparaît, comme en un cadre d’or : Derrière Elle l’azur et des plaines qu’arrose Un fleuve ; et, sur sa tête, un rameau de laurose Étend ses fleurs contre l’azur clair ; — et l’effort Du métier, comme un chant monotone et morose Se plaint très doucement : — on envierait le sort De celui qui baiserait la main qu’Elle pose Négligemment, parfois, et lasse de l’effort… Mais moi, la voyant rire en rappelant sans doute Quelque doux jour mort de sa joie un soir de mai, Je songeai que, peut-être, pour avoir aimé Son rire, d’autres ont repris la lente route Tristes d’un souvenir et le cœur affamé D’un mets où nulle lèvre impunément ne goûte. […] On en trouve des exemples typiques : Voici ma pensée : Si la flèche Que mon arc lance aux étoiles Retombe et blesse Ma main qui l’a lancée Vers les étoiles ; Et si le cri d’opprobre Que je jette à l’écho des bois — Bavard ou de réponse sobre, Selon ma voix- Se retourne comme une insulte Qui brûle mon cœur en moi ; Ainsi tout vieux rêve vers toi, Tout vieil émoi (Qu’un nouveau rire, croit-il, achève) Surgit encore comme un tumulte, Hélène, Et tout vieux rêve Me pèse jour et nuit en honte vaine Comme un remords : Tel l’espoir d’une aube qui jamais ne se lève, Tel que mon jour est las de porter mes jours morts.
Victor Hugo a non seulement composé un grand nombre de magnifiques odes, mais on peut dire qu’il a créé l’ode moderne ; cette ode, d’où il a banni les faux ornements, les froides exclamations, l’enthousiasme symétrique, et où il fait entrer, comme dans un moule sonore, tous les secrets du cœur, tous les rêves de l’imagination, et toutes les sublimités de la philosophie. […] Or, la poésie n’est pas seulement un genre de littérature, elle est aussi un art, par son harmonie ses couleurs et ses images, et comme telle c’est sur les sens et l’imagination qu’elle doit d’abord agir, c’est par cette double route qu’elle doit arriver au cœur et à l’entendement. […] Cependant, philosophes, poètes, historiens, vraiment dignes de ces noms, unissez-vous de cœur et d’action, au lieu de vous diviser par de vaines théories et de discuter pour de vaines préséances ; vous tenez les trois sceptres de la pensée, ne vous en faites point des armes les uns contre les autres, mais joignez-les en faisceau, et vous serez invincibles.
Or, c’était la colère du roi, et la colère du roi est terrible, comme dira La Fontaine plus tard, et surtout celle du roi-lion, mais c’était surtout la colère de Colbert qu’il s’agissait d’affronter, et il l’a affrontée de tout son cœur. […] Remarquez que la première œuvre belle de La Fontaine, c’est l’Elégie aux Nymphes de Vaux, et je pense qu’il y a là plus qu’une coïncidence, car je ne suis pas de ceux qui croient que l’esprit peut suppléer au cœur. […] Songez que ces mêmes paroles que vous venez de prononcer et que nous insérerons dans nos registres, plus vous aurez pris de peine à les peser et à les choisir, plus elles vous condamneraient un jour si vos actions s’y trouvaient contraires, si vous ne preniez à tâche de joindre la pureté des mœurs et de la doctrine, la pureté du cœur et de l’esprit, à la pureté de style et du langage, qui ne sont rien, à bien prendre, sans l’autre. » Voilà le ton de M. de La Chambre parlant à La Fontaine.
Un jour, l’empereur Napoléon, qui voyait le fond des têtes comme il voyait le fond des cœurs, écrivait en Espagne à son frère Joseph, dont il était mécontent : « Vous avez un défaut terrible qui empêche toute action, toute décision et tout courage, c’est ce genre d’imagination qui, surtout, se fait des tableaux. […] Fatigué, blasé, flétri, vieilli, éreinté de cœur, de corps et d’esprit, Frédéric Moreau, qui a demandé le bonheur de sa vie à l’amour, comme son meilleur ami l’a demandé à l’ambition, repasse un jour avec cet ami leurs deux vies d’hommes à sentiment, et après avoir fait le compte de leurs illusions, souillées dans les malpropretés de l’ambition et de l’amour, ils avisent tout à coup dans leurs souvenirs le petit tableautin du lupanar (pardon !) […] Pourquoi pas la vie entière de saint Antoine, qui ne fut pas qu’un homme tenté, mais un des plus grands hommes du christianisme naissant, un de ces puissants contemplateurs qui, du désert ou du ciel qu’ils portaient dans leur cœur, regardaient le monde et l’ont quelquefois gouverné ?
En général, quand nous apprenons une leçon par cœur ou quand nous cherchons à fixer dans notre mémoire un groupe d’impressions, notre unique objet est de bien retenir ce que nous apprenons. […] Comment apprendre par cœur, quand ce n’est pas en vue d’un rappel instantané ? […] James mettait d’abord trois ou quatre jours à apprendre un sermon par cœur.
D’ailleurs aucun Anglais n’était moins disposé que lui, même dans la solitude de sa jeunesse, à l’ennui, au vague du cœur et au spleen. […] Sa voix, qui n’avait que des accents aigus, ne pouvait avoir d’autre moyen d’arriver au cœur que de percer les oreilles.
Daru qu’un visage immuable, averti par un ami de ce dernier, se mit tout d’un coup à lui parler d’Horace, d’une traduction dont il était curieux et qu’il n’avait pu se procurer encore : ici l’administrateur général ne put s’empêcher de sourire ; il ne s’attendait pas à ce mot sur Horace, qui était la clef du cœur, et il redevint un moment ce qu’il était toujours et si aisément quand l’absolu devoir ne l’enchaînait pas. […] Daru succédait à Collin d’Harleville, à ce talent bienveillant et aimable qu’on citera toujours pour avoir fait L’Optimiste, Les Châteaux en Espagne et Le Vieux Célibataire ; auteur comique d’un genre tout particulier, qui avait ses comédies dans le cœur encore plus que dans la tête.
Saint-Marc Girardin défendait les études classiques avec l’autorité qu’il a et la grâce qu’il y savait mettre : notre cœur à nous qui sommes plutôt du vieux monde, était pour lui ; et pourtant notre raison, notre bon sens reconnaissait qu’il y avait du vrai dans les assertions positives du savant qui voulait faire brèche, et qui représentait toute une race vigoureuse d’esprits. […] Il acquiert pour toute la vie l’habitude de raisonner en chimiste, au lieu de se borner à savoir par cœur, pour quelques mois, le texte de son cours… Aussi, pour la parfaite exécution du nouveau plan d’études, les professeurs trouveront-ils bien plus de profit à préparer leur leçon dans le laboratoire même, au milieu des appareils, en prenant part à la disposition matérielle des expériences, qu’à l’étudier dans leur cabinet, abstraction faite des objets qu’ils vont avoir à manier et à faire passer sous les yeux des élèves.
Quelles furent les causes qui amenèrent un politique si profond, si ambitieux, si habile, émancipé et souverain depuis l’âge de quinze ans, initié dès lors aux plus grandes affaires, qui avait reçu coup sur coup en héritage des royaumes et des mondes, avait brigué et obtenu l’Empire, qui défendait, la Catholicité et aux frontières contre les mécréants, et au cœur contre les hérétiques, qui avec toutes ses couronnes recommençait presque la grandeur et l’universalité de la puissance de Charlemagne (moins, il est vrai, ce quartier du milieu qu’on appelle la France), — quelles raisons, dis-je, quels motifs véritables ramenèrent un jour à renoncer à tout cela en plein démêlé, en plein écheveau d’affaires, à se démettre à l’âge de cinquante-cinq ans, à se confiner dans un cloître, à vouloir y mourir ? […] Pour nous, les témoins de cette scène, ce fut un spectacle bien imposant et bien nouveau que des funérailles faites ainsi pour un personnage qui vivait encore, et j’assure que le cœur nous fendait de voir qu’un homme voulût en quelque sorte s’enterrer vivant et faire ses obsèques avant de mourir.
On a là un Anatole, un Chérubin, un Antony, un Werther, un ci-devant Joconde, un M. le chevalier de Faublas vieilli, un autre de ces beaux d’autrefois, assis à table sans oser manger, faisant triste mine à son assiette, et se disant d’un air de Tantale : « Le cœur m’a ruiné l’estomac ! […] Sa nomination, proclamée avec d’autres en séance solennelle au Louvre, fut accueillie par une double salve d’applaudissements, Quelque temps après, Gavarni, qui s’entend peu aux compliments, alla chez M. de Nieuwerkerke : « J’ai voulu voir, lui dit-il, celui qui a eu l’idée de décorer Gavarni. » Arrivé à la plénitude de la vie, à la conscience du talent satisfait qui désormais peut indifféremment continuer ou se reposer, et qui a fait sa course, — après bien des traverses et une de ces douleurs cruelles qui éprouvent à fond le cœur de l’homme35, — Gavarni ne formait plus qu’un souhait : rêver, travailler encore, et trouver son dernier bonheur, comme Candide, à cultiver son jardin.
Lui il tint à marcher en plaine à l’ennemi par manière de défi et pour rendre le cœur aux troupes ; mais, cette démonstration faite, il n’eut garde de se risquer à attaquer. […] Cependant le prince Eugène, n’ayant pu déterminer le duc d’Ormond à un engagement général, se résolut à faire un siège ; il assiégea d’abord Le Quesnoi qui se rendit le 3 juillet après douze jours de tranchée ouverte et d’une défense jugée insuffisante ; puis il porta ses vues sur Landrecies qu’il investit avec le gros de ses forces, et dont la prise lui eût ouvert le Soissonnais : il se passait ainsi d’Arras et de Cambrai, et forçait par une autre clef le cœur de la France.
De toutes ses manières, de toutes ses notes poétiques, les Émaux et Camées sont la dernière, la plus marquée, et je ne serais pas étonné si l’on me disait que c’est celle qui lui tient le plus à cœur et qui lui est la plus chère. […] ô stoïcien de l’art, qui affectez parfois plus d’impassibilité que vous n’en avez ; ne vous repentez pas d’avoir obéi un moment à la nature et d’avoir trahi cette source du cœur qui est en vous !
Nous savons, tous, par cœur les vers des Femmes savantes dans lesquels il est question de lui. […] Faites comme les autres, surtout quand les autres font bien ; ne vous opiniâtrez pas de gaieté de cœur à quelques fautes qui paraissent comme une tache sur de beaux visages.
Après tout, même dans ses malheurs et ses guignons récents, s’il se reportait en esprit à ses anciennes infortunes et à cette horrible captivité en Alger, Cervantes avait la ressource de se dire comme Ulysse : « Courage, mon cœur, tu en as vu de pires, le jour où l’infâme Cyclope te dévorait tous tes braves compagnons, et où, la prudence et l’audace aidant, tu l’échappas belle… » J’ai connu des cœurs philosophes auxquels le souvenir des maux et des périls passés ne laissait pas d’être une consolation dans les ennuis du présent.
Le poète critique attribue même un peu trop à Homère quand, se souvenant à son sujet d’un mot d’Horace pour le réfuter, il dit que là où nous voyons une faute et une négligence, il n’y a peut-être qu’une ruse et un stratagème de l’art : « Ce n’est point Homère qui s’endort, comme on le croit, c’est nous qui rêvons. » Le beau rôle du vrai critique, Pope l’a défini et retracé en divers endroits pleins de noblesse et de feu, et que je rougis de n’offrir ici que dépolis et dévernis en quelque sorte, dépouillés de leur nette et juste élégance : « Un juge parfait lira chaque œuvre de talent avec le même esprit dans lequel l’auteur l’a composée : il embrassera le tout et ne cherchera pas à trouver de légères fautes là où la nature s’émeut, où le cœur est ravi et transporté : il ne perdra point, pour la sotte jouissance de dénigrer, le généreux plaisir d’être charmé par l’esprit. » Et ce beau portrait, l’idéal du genre, et que chaque critique de profession devrait avoir encadré dans son cabinet : « Mais où est-il Celui qui peut donner un conseil, toujours heureux d’instruire et jamais enorgueilli de son savoir ; que n’influencent ni la faveur ni la rancune ; qui ne se laisse point sottement prévenir, et ne va point tout droit en aveugle ; savant à la fois et bien élevé, et quoique bien, élevé, sincère ; modeste jusque dans sa hardiesse, et humainement sévère ; qui est capable de montrer librement à un ami ses fautes, et de louer avec plaisir le mérite d’un ennemi ; doué d’un goût exact et large à la fois, de la double connaissance des livres et des hommes ; d’un généreux commerce ; une âme exempte d’orgueil, et qui se plaît à louer, avec la raison de son côté ? […] Taine nous entretenait l’autre jour27, — occupés, dis-je, à rechercher uniquement et scrupuleusement la vérité dans de vieux livres, dans des textes ingrats ou par des expériences difficiles ; des hommes qui voués à la culture de leur entendement, se sevrant de toute autre passion, attentifs aux lois générales du monde et de l’univers, et puisque dans cet univers la nature est vivante aussi bien que l’histoire, attentifs nécessairement dès lors à écouter et à étudier dans les parties par où elle se manifeste à eux la pensée et l’âme du monde ; des hommes qui sont stoïciens par le cœur, qui cherchent à pratiquer le bien, à faire et à penser le mieux et le plus exactement qu’ils peuvent, même sans l’attrait futur d’une récompense individuelle, mais qui se trouvent satisfaits et contents de se sentir en règle avec eux-mêmes, en accord et en harmonie avec l’ordre général, comme l’a si bien exprimé le divin Marc-Aurèle en son temps et comme le sentait Spinosa aussi ; — ces hommes-là, je vous le demande (et en dehors de tout symbole particulier, de toute profession de foi philosophique), convient-il donc de les flétrir au préalable d’une appellation odieuse, de les écarter à ce titre, ou du moins de ne les tolérer que comme on tolère et l’on amnistie par grâce des errants et des coupables reconnus ; n’ont-ils pas enfin gagné chez nous leur place et leur coin au soleil ; n’ont-ils pas droit, ô généreux Éclectiques que je me plais à comparer avec eux, vous dont tout le monde sait le parfait désintéressement moral habituel et la perpétuelle grandeur d’âme sous l’œil de Dieu, d’être traités au moins sur le même pied que vous et honorés à l’égal des vôtres pour la pureté de leur doctrine, pour la droiture de leurs intentions et l’innocence de leur vie ?
Un de nos généraux, disciple à la fois de Xénophon et de Virgile, M. de Fezensac, a une mémoire telle qu’il récitait au bivouac en Russie, aux officiers de son régiment, un sermon de Massillon qu’il avait retenu dès l’enfance ; et comme il racontait un jour l’anecdote dans un salon, on lui demanda s’il pourrait le réciter encore ; il assura qu’il le savait toujours par cœur : on alla immédiatement chercher le volume de Massillon dans la bibliothèque, et le guerrier lettré se mit à réciter cette prose harmonieuse, mais un peu flottante, sans faire une faute. […] Déjà, avant Pisistrate, Solon, se préoccupant de cette immense richesse poétique flottante et de sa conservation chère à tous les cœurs grecs, avait imposé un ordre fixe de récitation aux rhapsodes de l’Iliade, pour la fête des Panathénées.
Il a lu, — ce qui s’appelle lu, — les savants ouvrages des La Place et des La Grange, les mémoires des Clairaut, des d’Alembert, des Poinsot ; il y a ajouté peut-être sur quelques points, et il sait par cœur Voltaire et Alfred de Musset. […] A partir de cet endroit l’auteur, l’orateur éloquent qui plaide pour sa cause, combine et entrelace sans scrupule et avec beaucoup d’habileté les deux ordres de raisonnement, les possibilités indiquées par la science, les désirs conçus par le cœur, les conceptions imaginées par la philosophie.
» Avant que la critique allemande ait protesté contre de pareilles plaisanteries mises sur le compte d’un des souverains qui ont eu le plus à cœur leur métier de roi, il y avait longtemps que la critique française, dans une vue de simple bon sens, avait dit : « Nous ignorons si Frédéric était capable de se servir des moyens indiqués ici ; mais nous croyons pouvoir affirmer que, s’il avait assez d’immoralité pour employer des médecins et des serruriers politiques, il avait en même temps trop d’adresse pour l’avouer à qui que ce soit, même à son successeur75. » Il y avait peut-être à introduire Frédéric dans cette Étude où Louis XV tient le premier rôle, mais c’aurait dû être alors pour opposer les deux esprits, la mollesse et la force, l’abandon et l’infatigable vigilance, le laisser aller de tout, après quelque velléité d’action passagère, et l’héroïque et constant labeur, tant civil que guerrier, qui occupa toutes les heures d’une longue vie. […] Il a de l’élévation dans l’esprit et des sentiments dans le cœur… » Et l’on peut remarquer, à ce propos, que le maréchal de Noailles avait le talent de ne pas choisir trop mal ses amis : sous la Régence, il avait adopté le chancelier d’Aguesseau et se l’était étroitement attaché et acquis ; en 1743, il poussait le comte de Saxe.
Toute raison m’éloigne d’ici ; mon cœur m’y ramènera quelquefois, tant que je n’en serai pas exclu. […] Plus de Marie-Antoinette dauphine, toute ravissante, toute sentimentale aussi et pastorale, une merveille accomplie, réunissant tous les dons, traînant après soi tous les cœurs : M. d’Arneth, ses lettres en main, s’y oppose.
Et puisque j’y suis, je ne me refuserai pas de couler à fond cet article de cupidité honteuse dont le personnage politique en lui a tant souffert, et s’est trouvé si atteint, si gâté au cœur et véritablement avili. […] Cette tragédie, si je ne me trompe, est au cinquième acte : le dénouement va paraître. » Il ne se serait point ouvert à lui, comme à un confident, sur le misérable caractère de cette royale famille espagnole, de ce brave homme ou benêt de roi, du prince des Asturies, de la reine, de ce méprisable et inséparable prince de la Paix qui, disait-il, avait l’air d’un taureau : « Le prince des Asturies est très-bête, très-méchant, très-ennemi de la France… La reine a son cœur et son histoire sur sa physionomie, c’est vous en dire assez. » Il ne lui eût pas confié ces princes en personne et ne les lui eût pas donnés tout d’abord pour hôtes à Valençay pour « les bien traiter et leur faire passer agréablement le temps », tout en lui recommandant de les isoler et « de faire surveiller autour d’eux. » Notez bien que cette année 1808, celle de la fourberie de Bayonne, ne fut point du tout une année de disgrâce pour Talleyrand.
Mais, laissant encore une fois ces préambules, abordons, sans plus tarder, ce qui est le cœur même du sujet et la matière favorite de l’auteur, je veux dire la tentative de réhabilitation de Théophile et de Saint-Amant. […] Gautier a pu arriver de gaieté de cœur à ce degré d’injustice.
Il faudrait, par-dessous les statistiques, pouvoir pénétrer dans l’intimité des consciences, ouvrir les cerveaux et les cœurs. […] Ils sentent parfois vaguement qu’ils sont des avocats qui plaident une cause ; qu’ils parlent, non en individus pensant chacun à part soi, mais comme professeurs, membres d’un parti, d’une école, etc. ; qu’ils énoncent des lèvres des vérités auxquelles ils ne croient pas très fortement au fond du cœur.
N’est-elle pas la fille des humbles de cœur, des hommes de bonne volonté ? […] Il retournait alors dans sa chère Galilée, et retrouvait son Père céleste, au milieu des vertes collines et des claires fontaines, parmi les troupes d’enfants et de femmes qui, l’âme joyeuse et le cantique des anges dans le cœur, attendaient le salut d’Israël.
Il prolonge à plaisir un tableau qui, du technique, s’élève bientôt au moral dans des proportions gigantesques, et qui se couronne par la conquête de l’Hindoustan et la civilisation du cœur de l’Afrique. […] Mais saint Louis eut besoin de tous ses malheurs pour être grand, et c’est dans l’ordre des choses du cœur qu’il a sa couronne.
Cette aune, reprochée ainsi publiquement, lui resta longtemps sur le cœur ; pourtant la phrase de début du général d’Albignac : « C’est dommage que vous ne soyez pas né vingt-cinq ans plus tôt », réparait un peu l’impression en lui ; l’à-propos de sa propre réponse était fait aussi pour le réconcilier avec ce souvenir, et il aimait plus tard à raconter l’anecdote à ses heures de bonne humeur et de gaieté, en imitant le ton de voix et les gestes du général11. […] À l’instant, me dit un des convives, l’esprit de la réunion changea et s’épura, les cœurs s’élevèrent ; il avait obtenu ce qu’il désirait.
… » Le dîner a commencé gaiement, mais voici que Tourguéneff parle d’une constriction du cœur, survenue la nuit, il y a quelques jours, constriction mêlée à une grande tache brune, sur le mur en face de son lit, et qui dans un cauchemar, où il se trouvait moitié éveillé, moitié dormant, était la Mort. […] Il s’échoue dans un fauteuil, en se plaignant geignardement, et un peu à la manière d’un enfant, de maux de reins, de gravelle, de palpitations de cœur, puis il parle de la mort de sa mère, du trou que cela fait dans leur intérieur, et il en parle avec un attendrissement concentré.
Ce qu’elle avait de cœur n’était pas aux Rochers : il était en Provence près de madame de Grignan, ou à Versailles près du roi. […] marquise, quel dommage que vous ayez employé l’épithète qui ne veut rien dire : « beauté surprenante », ou plutôt l’épithète qui montre jusqu’à l’évidence que c’était là un amour de littérature, qui reste dans l’esprit et ne passe pas dans le cœur !
Courons chez les savants, et que votre autorité les arrête sur le bord des funestes doctrines qui, insensiblement, goutte à goutte, vont faire couler la corruption dans le cœur humain. […] On vit un jour un cheval plein de feu, d’orgueil et de courage, le cœur aussi grand que la force, généreux, capable de durer et de s’user à la peine.
C’est qu’en effet le cœur de l’homme est ainsi fait que souvent la vérité, par cela seul qu’elle est la vérité, l’indispose et l’offense.
Mais, dans les premières années du règne de Louis XVI, à l’aurore des améliorations lentes tentées par Malesherbes et Turgot, le jeune ami des Trudaine avait conçu un rôle littéraire plus calme, plus recueilli, plus d’accord avec un loisir d’ailleurs assez voluptueux, une régénération de la poésie énervée du xviiie siècle par l’étude approfondie de l’antique, un embellissement ferme et gracieux de la langue, et une peinture naïve des passions et des faiblesses du cœur dans des cadres nouveaux.
Là, autant qu’il est possible de lire dans des cœurs d’homme en ces temps d’orages, on devra distinguer quels furent les fanatiques, les sanguinaires, les systématiques, les lâches, et, — s’il en fut, comme on n’en saurait douter, — les héros et les vertueux.
N’allons donc pas le grever de gaieté de cœur par des systèmes ; ne retombons pas, en politique, dans notre péché, si familier en toutes choses, d’imitation étrangère : profitons des exemples sans croire aux identités ; ne concluons pas d’une Révolution spéciale et tout insulaire à une Révolution véritablement européenne et humaine : n’introduisons pas dans les pouvoirs de l’État des proportions de forces peu en harmonie avec nos futures destinées, ne recomposons pas de toutes pièces des difficultés évanouies.
Le portrait, la description de la personne et de la vie de la Torpille (c’est l’odieux nom de la pauvre fille perdue) accusent ces observations profondes et fines particulières à l’auteur, et respirent une complaisance amollie qui s’insinue bientôt au lecteur, si elle ne le rebute tout d’abord : c’est là un secret et comme un maléfice de ce talent, quelque peu suborneur, qui pénètre furtivement, même au cœur des femmes honnêtes, comme un docteur à privautés par l’alcôve.
Il manquait quelque chose, même à Racine, dans la connaissance du cœur humain, sous les rapports que la philosophie seule peut faire découvrir.
Mais qu’on s’en tienne là, et qu’on ne trouve pas mauvais que nous dressions à quelques autres d’immatériels Panthéons dans nos cœurs.
Theuriet, mais je sais que nul n’aime les champs d’un meilleur cœur ; qu’il y a, dans un très grand nombre de ses pages, une douceur qui s’insinue en moi, et qu’il me fait adorer la terre natale.
Le cœur de ces petites est condamné à ne parler qu’après le mariage.
Il s’est échappé de la royauté, comme un moine incroyant de son monastère, pour retourner à la nature, pour vivre vraiment selon sa pensée et selon son cœur, pour jouir librement du vaste monde, sans avoir à rendre des comptes spéciaux, à Dieu et aux hommes, d’une tâche à la légitimité de laquelle il ne croyait plus… Partout l’ordre ancien chancelle.
* * * Et cependant, telle humble femme du peuple donne non seulement le peu de pauvre argent qu’elle gagne à la sueur de son front, mais tout son temps, et toutes ses forces, et tout son cœur, bref, se « sacrifie » à des enfants abandonnés, à des filles sans asile, à des malades, à des vieillards.
C’est qu’en cette poésie vibrent des accents d’un charme triste, auquel il faut être initié de naissance pour les comprendre et pour les aimer ; c’est que, sous ses rythmes en cristal de roche, ce rare poète, si peu soucieux de réclame et de « succès », connaît l’art de serrer le cœur ; c’est qu’il y a, chez lui, quelque chose d’attardé, de mélancolique et de vague, dont le secret n’importe pas aux passants.
Mais des ambitions, des vanités de cour et des intérêts de cœur, si l’on peut donner ce nom à des relations de galanterie, se saisirent des griefs populaires.
Mais il était ami plus fidèle que courtisan habile, quand il écrivait son élégie Aux Nymphes de Vaux, en faveur de Fouquet, il implorait pour lui la clémence de Louis XIV, sachant très bien, et son élégie même en contient la preuve, qu’il avait à défendre, non, comme le croyait le public, le ministre prévaricateur, mais le galant magnifique et téméraire, qui avait osé prétendre au cœur de la maîtresse du monarque et essayé de la séduire.
Vespasiano, [c’est l’Italien dont nous avons parlé] que je vous prie d’embrasser pour moi de tout mon cœur.
Contre l’avis des autres stratèges, qui voulaient retrancher la défense au cœur de la ville, la circonscrire au rocher sacré, il soutint que le salut était dans l’attaque, qu’il fallait marcher sur l’ennemi au lieu de l’attendre, le frapper sur le rivage même de la mer, au seuil bruyant de la patrie grecque.
Mais ores, Mellin, que tu nies En tant d’honnêtes compagnies N’avoir médit de mon labeur, Et que ta bouche le confesse Devant moi-même, je délaisse Ce dépit qui m’ardoit le cœur.
Son cœur avec…. n’est ni harmonieux ni élégant ; mais est d’une vivacité et d’une précision qui plaisent.
Ainsi qu’il est plusieurs personnes, qui pour être trop sensibles à la musique, s’en tiennent aux agrémens du chant, comme à la richesse des accords, et qui éxigent d’un compositeur qu’il sacrifie tout à ces beautez, il est aussi des hommes tellement insensibles à la musique, et dont l’oreille, pour me servir de cette expression, est tellement éloignée du coeur, que les chants les plus naturels ne les touchent pas.
Je parle de cette hauteur qui consiste dans la noblesse des sentimens du coeur, et dans une élevation d’esprit, et qui fait mettre un juste prix aux avancemens où l’on peut aspirer, comme à la peine qu’il faut prendre pour y parvenir, sur tout quand il est question de les solliciter auprès de personnes qu’on ne croit pas être des juges compétens du mérite.
Si Martial ne nous avoit laissé que les cent épigrammes, que les gens de lettres de toutes nations sçavent communément par coeur, si son livre n’en contenoit pas un plus grand nombre que le livre de Catulle, on ne trouveroit plus une si grande difference entre cet ingénieux chevalier romain et Martial.
Quoique nous ne ressemblions guères aux hommes qui vivaient vers 1550 et que nous n’ayons pas dans nos chétives poitrines les gerbes de flamme qui brûlaient alors tous les esprits et tous les cœurs, nous sommes les enfants du xvie siècle bien plus qu’on ne le croit, de ce siècle de la discussion, de l’émancipation de l’esprit humain, de sa réaction indignée contre la tradition de l’autorité, toutes choses, hélas !
L’auteur du Blessé de Novare, qui croit à son héros, qui le choie, qui le berce sur son cœur et a pour lui toutes les tendresses de la maternité littéraire (la seule maternité qui ne soit pas touchante), n’a pas beaucoup remué les ornières du grand chemin de tout le monde dans lequel il a continué de marcher.
Assurément, la pâle et délicate Mme de La Fayette, cette fille d’une société factice et qui n’a appris ce qu’elle sait de la nature humaine qu’en écoutant à travers les draperies des convenances à la porte de quelques cœurs, semble une bien grêle observatrice, quand on la compare à des esprits comme Defoë et Richardson, ces génies énergiques qui plongent, eux, dans l’humanité à une si grande profondeur, et qui la brassent comme on brasse un bain.
Le baptême de sang des journées de juin, les réactions qui suivirent nous serrèrent le cœur ; il était clair que l’âme et l’esprit de la France couraient un véritable péril. […] Oves non habentes pastorem, telle était la France : un feu sans flamme ni lumière ; un cœur sans chaleur ; un peuple sans prophètes sachant dire ce qu’il sent ; une planète morte, parcourant son orbite d’un mouvement machinal. […] Quelques hommes d’esprit et de cœur, qui donnaient d’utiles conseils, étaient impuissants. […] Il y a en France autant de gens de cœur et de gens d’esprit que dans aucun autre pays ; mais tout cela n’est pas mis en valeur. […] Les revanches de 1814 et de 1815 n’avaient pas satisfait l’énorme haine que les guerres funestes de l’Empire avaient allumée dans le cœur de l’Allemagne.
La gloire et la vertu consistent dans la puissance ; les scrupules sont faits pour les âmes viles ; le propre d’un cœur haut est de tout désirer et de tout oser. « Ici, la conscience est une souillure, la fortune tient lieu de vertu, la passion de loi, la complaisance de talent, le gain de gloire, et tout le reste est vain. » Ravi de cette grandeur d’âme, Séjan s’écrie : Royale princesse ; À présent que je vois votre sagesse ; votre jugement ; votre énergie, Votre décision et votre promptitude à saisir les moyens De votre bien et de votre grandeur, je proteste Que je me sens tout enflammé et tout brûlé D’amour pour vous125. […] Une dame ne peut être trop soigneuse de sa beauté, quand elle veut garder le cœur d’un personnage comme celui que vous avez conquis126. » Quand voulez-vous prendre médecine, madame ? […] Mon cœur, je te traînerai hors d’ici, jusque chez moi, par les cheveux. […] Volpone sort déguisé, s’attache tour à tour à chacun d’eux, et achève de leur briser le cœur.
Adorant et superbe, mâle et probe, il déduit l’épouvantable fatigue du Pêcheur descendu dans les caves de sa conscience, l’inaltérable dégoût du Voyant spirituel mis en face des iniquités et des fautes accumulées dans ces redoutes et il affirme aussi, après le cri de foi dans la rédemption, le bonheur surhumain d’une vie nouvelle, l’indicible allégresse d’un cœur neuf éclairé, tel qu’un Thabor, par les divins rayons de la mystique Supéressence. […] Alors la Musique sera l’art divin : les dernières symphonies de Beethoven, aujourd’hui mystérieuses aux cœurs endurcis, seront enfin comprises, manifestation suprême de la Pensée religieuse chrétienne. […] « Un objet triple, idéal, fut à Richard Wagner : l’œuvre d’art, réalisée (Tristan, la Tétralogie, Parsifal) ; — le théâtre, réalisé, aussi (le théâtre de Bayreuth) ; — le public, expliqué dans les œuvres théoriques, non encore achevé le 13 février 1883… Le public du théâtre idéal, écoutant l’œuvre d’art idéale, — le public idéal sera, comme le Rédempteur, pur de cœur et d’esprit… il sera idéal, intellectuellement, et pratiquement. […] Non seulement il n’y a pas au monde d’absurdité dont on ne l’ait rendu responsable, mais encore ceux-là même qui le prônent du meilleur cœur n’entrevoient souvent qu’un seul aspect de cet immense génie.
C’est le Poëte des cœurs tendres & sensibles. […] Ce Poëte connoissoit le cœur humain. […] Les autres chefs-d’œuvre de l’antiquité, peu lus par le commun des lecteurs, se sentent un peu du chagrin qu’on a eu en les apprenant par cœur. […] cher lecteur, si tu sçavois comment ce tout trouva me tient au cœur, tu plaindrois ma destinée ; j’en suis inconsolable & je ne puis revenir de ma pamoison, principalement quand je pense qu’au préjudice de mes titres, dans ce vers qui me tient lieu d’un Arrêt de la Cour du Parlement, je me vois déchu de tous mes honneurs, & que ce Charles d’Assouci, d’Empereur du burlesque qu’il étoit, premier de ce nom, n’est aujourdhui, si on le veut croire, que le dernier reptile du Parnasse, & le marmiton des Muses.
Il y a là un sentiment de dignité avant tout et de haute convenance nationale, d’honneur de couronne, comme on disait alors, lequel sentiment est au cœur de Marie-Thérèse et que Bernis n’a pas : il raisonne dans toutes ses lettres à peu près comme Mme de Maintenon dans celles qu’elle écrivait à la princesse des Ursins, et où le mot de paix revient à chaque page. […] Je vous remercie des nouvelles marques d’amitié et d’intérêt que vous voulez bien me donner… Dans les lettres suivantes adressées à Choiseul, Bernis le remercie de certaines formes qu’il a apportées en annonçant sa disgrâce à la cour de Rome ; il lui parle ensuite de quelques affaires particulières qu’il a à cœur, et pour lesquelles M. de Choiseul se montre empressé à l’obliger.
Aura-t-il été, ce monument, même dans le cœur de ceux à qui il a sauvé la fortune ? […] Je vis cette ombre s’étendre au loin autour de moi et marquer partout mon néant 49 … Ici un découragement moral s’empara de lui et le fit peu à peu déchoir de cette hauteur vertueuse où il n’est pas donné à la jeunesse stoïque de se maintenir : Il n’y a qu’un principe de vices pour un homme bien né et à qui la raison a parlé, disait-il à ceux de sa famille avec qui il s’épanchait, c’est l’ennui, le dégoût des circonstances auxquelles il est soumis, c’est le néant du cœur ; au nom de Dieu, ne me laissez pas plus longtemps exposé à cet état.
douce, simple, m’aimant uniquement, crédule sur ma conduite qui était un peu irrégulière, mais dont la crédulité était aidée par le soin extrême que je prenais à l’entretenir, et par l’amitié tendre et véritable que je lui portais. » Mme Du Deffand est très bien traitée dans ces Mémoires, et s’y montre presque sans ombre, sous ses premières et charmantes couleurs ; mais la personne évidemment que le président a le plus aimée est Mme de Castelmoron, « qui a été pendant quarante ans, dit-il, l’objet principal de sa vie. » La page qui lui est consacrée est dictée par le cœur ; il y règne un ton d’affection profonde, et même d’affection pure : « Tout est fini pour moi, écrit le vieillard après nous avoir fait assister à la mort de cette amie ; il ne me reste plus qu’à mourir. » On raconte que dans les derniers instants de la vie du président et lorsqu’il n’avait plus bien sa tête, Mme Du Deffand, qui était dans sa chambre avec quelques amis, lui demanda, pour le tirer de son assoupissement, s’il se souvenait de Mme de Castelmoron : Ce nom réveilla le président, qui répondit qu’il se la rappelait fort bien. […] … Sans doute Voltaire data du jour où il avait reçu cette lettre l’affaiblissement de tête du président, et quand celui-ci fut mort (24 novembre 1770), il écrivit à Mme Du Deffand, moins d’un mois après : Je m’en étais douté il y a trente ans, que son âme n’était que molle, et point du tout sensible ; qu’il concentrait tout dans sa petite vanité ; qu’il avait l’esprit faible et le cœur dur ; qu’il était content pourvu que la reine trouvât son style meilleur que celui de Moncrif, et que deux femmes se le disputassent ; mais je ne le disais à personne.
» Dans les lettres badines même il trouvait trop de familiarité et de sans-gêne, et du mauvais goût à plaisanter sur certains sujets, comme lorsque Voiture parle de ses clous à Mme la princesse et à Chapelain, et qu’il nomme de vilains petits insectes qui font mal au cœur. […] Ici, en portant la guerre au cœur du pays ennemi, il touchait le côté faible, le point vulnérable et irritable de Costar.
Mais, comme la reconnaissance des infidèles est aussi infidèle qu’eux, ces grâces descendirent si peu avant dans son cœur, que, ne lui en demeurant aucun sentiment ni mémoire, sa rébellion, aussi féconde que l’hydre, renaît de nouveau. […] Le cardinal, au contraire, regardant d’un cœur assuré toute cette tempête, dit au roi : […] On a, en cet endroit, un de ces discours indirects, développés, comme le cardinal aime à les coucher sur le papier, où il déroule toutes les considérations en divers sens, non sans quelque complaisance et en s’écoutant un peu, mais avec tant de clarté, d’élévation, d’étendue et de justesse, qu’on lui sait gré de sa disposition communicative et qu’on l’en admire davantage.
Ce n’est là qu’une note officielle et mesurée : pour avoir le fond du cœur de Chapelain sur Marolles, il faut lire ses lettres. […] J’y opposerai seulement une certaine page des mémoires de Marolles où il se représente, sans y être obligé, comme singulièrement attaché à la pudeur, et n’ayant jamais manqué en rien d’essentiel aux devoirs de sa condition, et aussi cette autre page où, déplorant en 1650 la mort d’une petite fille née en son logis et sœur des deux autres personnes dont parle Jean Rou, il la regrette en des termes si touchants, si expressifs et si publics, que véritablement il ne semble pas soupçonner qu’on puisse attribuer sa douleur à un sentiment plus personnel : « Cela fait bien voir, dit-il simplement, ce que peut quelquefois la tendresse de l’innocence sur le cœur d’un philosophe quand il ne s’est pas dépouillé de toute humanité. » — Cette remarque faite pour l’acquit de ma conscience, chacun en croira pourtant ce qu’il voudra.
Celui-ci, dès qu’il en fut, par son assiduité, sa politesse, son aimable esprit de société, devint aussitôt un académicien des plus essentiels et des plus chers au cœur de la compagnie. […] On ne se met pas de gaieté de cœur dans cette mêlée des discussions contemporaines, dût-on se flatter de la dominer.
La solution mixte improvisée à cette révolution pouvait déplaire à une portion notable des esprits et des cœurs : on pouvait désirer, concevoir du moins une autre issue, un autre cours donné aux choses, un autre lit au torrent ; mais tous, et ceux même qui se prononçaient pour la solution mixte, étaient très-persuadés qu’il allait y avoir pour bien des années dans le corps social une plénitude de séve, une provision, une infusion d’ardeurs et de doctrines, une matière enfin plus que suffisante aux prises de l’esprit. […] Le vers se sent toujours des bassesses du cœur ; le vers plus que la prose, mais la prose elle-même aussi.
Il est vrai qu’il a reçu l’instruction des événements : il a vu s’achever le long et lourd règne de Louis XIV, il écrit dans le fort de la réaction qui suivit la mort du grand roi ; et il y aide, pour son compte, de tout son cœur. […] Une voix grave, modérée et forte, dénonçait les abus de la monarchie française, les taches de la civilisation : elle indiquait un idéal, qui apparaissait comme absolument pratique, de gouvernement libéral et bienfaisant ; elle traduisait le sentiment de tous les cœurs en protestant contre les autodafés et contre l’esclavage des nègres.
En réalité, l’étincelle jaillit de Jean-Jacques Rousseau ; puis la flamme grandit, attisée par Bernardin de Saint-Pierre, par Chateaubriand, par Lamartine, par George Sand, par Michelet, et aujourd’hui elle consume délicieusement les tendres coeurs de faunes et de sylvains d’ailleurs très civilisés. […] C’est ainsi que l’Idéal, qui est un livre tout plein de bons sentiments et où même les sermons abondent, lu à la campagne, dans un milieu paisible et patriarcal, m’a fait passer d’agréables heures. — M. d’Artannes, un gentilhomme qui a toutes les vertus et beaucoup d’expérience et d’esprit, se fait le mentor d’une fillette et s’applique à former son esprit et son cœur.
« Mon cher enfant, vous dit-il, en serrant votre bras, j’ai tant aimé les sciences dans ma vie que cela me fait battre le cœur. » Toutes vos découvertes ultérieures sont sorties de celle-là par une sorte de développement naturel. […] Déjà, du sein de la vie individuelle, il est permis de s’associer à cet avenir, de travailler à le préparer, de devenir ainsi, par la pensée et par le cœur, membre de la société éternelle, et de trouver en cette association profonde, malgré les anarchies contemporaines et les découragements, la foi qui soutient, l’ardeur qui vivifie, et l’intime satisfaction de se confondre sciemment avec cette grande existence, satisfaction qui est le terme de la béatitude humaine. » Votre dévouement absolu à la science vous donnait le droit, Monsieur, de succéder à un tel homme et de rappeler ici cette grande et sainte mémoire.
Telle œuvre est supérieure, parce qu’elle exprime et éveille beaucoup de sentiments tempérés (Gil Blas) ; telle autre, parce qu’elle peint une passion déchaînée dans toute sa violence (Manon Lescaut, le Père Goriot) ; celle-ci, parce qu’elle suscite des émotions nobles, comme la pitié pour les faibles, l’amour de la justice, la sympathie pour la vie universelle (les Misérables) ; celle-là, parce qu’elle va toucher au fond du cœur des fibres secrètes, rarement ou jamais atteintes jusque-là, parce qu’elle donne, comme on l’a dit, un nouveau frisson (les Fleurs du mal). […] Mais Guyau a raison en partie, et c’est pourquoi il ne faut jamais oublier ce mot d’Augustin Thierry : ― « La sympathie est l’âme de l’histoire. » ― Oui, l’historien de la littérature comme le critique devrait avoir un cœur assez sensible pour vibrer sous le choc de toutes les variétés du beau.
Ainsi la Chine idyllique, telle que les écrivains de notre xviiie siècle la dépeignent souvent, pourrait bien, comme leur fameux état de nature, n’avoir été qu’une aimable création de leur fantaisie ; ainsi, pour quantité de Français, la Suisse demeure aujourd’hui un pays simple et patriarcal où l’on fabrique des montres et des fromages ; ainsi encore, avant 1870, la France croyait à l’existence d’une Allemagne sentimentale, rêveuse, pacifique, où la petite fleur bleue de l’idéal fleurissait dans les cœurs comme le myosotis au bord des ruisseaux. […] Il faut donc plonger au cœur des écrits de tout genre, pour y saisir le genre étranger qui a pu les vivifier ou les gâter ; après quoi, l’attention doit se porter sur les formes dont les écrivains ont revêtu leurs sentiments et leurs pensées.
» — Une autre fois, un de ses prêtres reconnaît qu’il porte en lui le même feu divin que sa main vient d’allumer sur l’autel, et il s’écrie dans un saint transport : — « Lorsque je pense que cet être lumineux est dans mon cœur, les oreilles me tintent, mon œil se voile, mon âme s’égare. […] Cette fois, Zeus « fut mordu au fond de son cœur ».
Il disait de Louis XVI au Temple, et en le dévouant à l’échafaud du 21 janvier : Il pouvait régner sur les cœurs, Ce monarque faible… et parjure ! […] Cette élévation qu’il n’avait ni dans le cœur ni dans le caractère, il faut bien pourtant reconnaître qu’elle s’était par moments réfugiée dans son imagination.
Tel il parut encore à la mort de M. de La Rochefoucauld, son premier patron, et qui l’avait mis en circulation dans le monde : « Jamais un homme n’a été si bien pleuré, écrit Mme de Sévigné à sa fille (26 mars 1680) : Gourville a couronné tous ses fidèles services dans cette occasion ; il est estimable et adorable par ce côté de son cœur, au-delà de ce que j’ai jamais vu ; il faut m’en croire. » Dans cette relation finale avec M. de La Rochefoucauld, Gourville se trouvait un peu en rivalité et en délicatesse intestine avec Mme de La Fayette, dont il a laissé un portrait plus malicieux qu’on ne voudrait. […] La race des gens d’affaires est immortelle : puisse-t-il s’en trouver beaucoup qui soit aussi habiles, et à la fois aussi honnêtes en définitive, aussi généreux, et doués d’autant de cœur que Gourville !
Si Dieu m’a créé bourru, bourru je dois vivre et mourir… Les gens d’esprit sont souvent très singuliers ; ils croient connaître le cœur humain mieux que d’autres, et, parce qu’ils ont fait du grec avec le père et qu’ils ne sont pas tout à fait aussi vieux que lui, ils croient que c’est une raison pour être aimés de la fille, d’une toute jeune fille, et cela sans faire de frais, sans rien retrancher à leur humeur, à leur procédé rude, à leur extérieur inculte, et en se conduisant, dès le lendemain de leurs noces, comme de vieux maris. […] Rappelez-vous La Fontaine et ces gens du bourg dont il a dit : Ô gens durs, vous n’ouvrez vos logis ni vos cœurs !
Combattant, ainsi que nous avons vu faire aux Portalis et aux Rivarol, avec moins de vigueur qu’eux, mais dans le même sens, les philosophes et les sophistes qui avaient décomposé le cœur humain comme le corps social et voulu disséquer toutes choses, il disait : « La société doit avoir son côté mystérieux comme la religion, et j’ai toujours pensé qu’il fallait quelquefois croire aux lois de la patrie comme on croit aux préceptes de Dieu. » Il remarquait que « dans le cours ordinaire de la vie, et même sur la scène politique, il est des choses qu’on fait mieux lorsqu’on ne songe point à la cause qui nous fait agir : l’homme est souvent porté à la vertu et à l’héroïsme par un mouvement irréfléchi […] Insistant sur les ressorts inexpliqués du cœur humain, sur ces mobiles d’amour-propre et d’honneur ou même de vanité, que l’orgueil de la raison s’attacha à détruire, mais que les hommes d’État savent créer et faire mouvoir, il les montrait en action sous Louis XIV, et regrettait que le temps fût passé où le grand roi, pour récompenser les services d’un maréchal de Villars, n’avait qu’à lui permettre simplement de paraître à son lever demi-heure avant les autres.
Ses goûts étaient ceux d’un honnête homme qui avait du mouvement dans l’imagination, du trait dans l’esprit, et de bons sentiments dans le cœur. […] Pourtant le germe tant méprisé, Le germe, au fond du cœur Chêne dès sa naissance, demande grâce et indulgence pour sa jeunesse ; il demande du temps pour croître et grandir ; le temps lui vient en aide : Les Buissons, indignés qu’en une année ou deux Un Chêne devînt grand comme eux, Se récriaient contre l’audace De cet aventurieur qui, comme un champignon, Né d’hier, et de quoi ?
Il sait du reste cautériser son cœur à temps par un départ brusque et non sans dignité. […] Quand Litvinoff quitte, le cœur meurtri, la ville où son ancien amour renaquit et s’évanouit une seconde fois, c’est la philosophie même du romancier qu’il formule : « Fumée, fumée, répéta-t-il, et subitement tout lui sembla fumée, sa vie, la vie russe, tout ce qui est humain et principalement ce qui est russe.
Toute la première partie de l’Œuvre, cette histoire lentement développée de l’affection de Christine et de Claude, les magnifiques scènes où elle se résout à être le modèle de son amant, ou elle se livre à lui, revenu croulant sous les huées, leur idylle de Bennecourt, sont de grands et vrais tableaux où la vie frémit, où la sympathie jaillit du cœur du lecteur. Et cette lamentable fin encore du ménage artistique, cette noire existence misérable et débraillée dans l’atelier du haut de Montmartre, Claude se brutalisant, s’exaltant et s’affolant à l’impossible labeur de s’extorquer un chef d’œuvre, tandis que Christine s’attache à son amour tari, lutte contre le desséchement de cœur de son mari, finit par l’arracher à l’art auquel il tenait de toutes ses fibres, mais l’abîme et le lue du coup ; toute cette tragédie humaine donnant à toucher de pauvres chairs frissonnantes, à voir des larmes dans des orbites creux, et des mâchoires serrées, et des poings abandonnés, nous a enthousiasmé et ému.
On songe, le cœur serré, aux vieilles baraques paysannes de France, en bois, joyeuses et noires, avec des vignes. […] Shakespeare, persécuté comme plus tard Molière, cherchait comme Molière à s’appuyer sur le maître, Shakespeare et Molière auraient aujourd’hui le cœur plus haut.
Et remarquez que c’est aussi avec les larmes que l’homme lave les peines de l’homme, que c’est avec le rire qu’il adoucit quelquefois son cœur et l’attire ; car les phénomènes engendrés par la chute deviendront les moyens du rachat. […] C’est en pleine Italie, au cœur du carnaval méridional, au milieu du turbulent Corso, que Théodore Hoffmann a judicieusement placé le drame excentrique de la Princesse Brambilla.
Il n’y a toujours que peu ou pas de publications : on a donné, dans la Collection des Documents du Gouvernement, les Lettres de Henri IV (un ou deux volumes pour commencer) ; on en a cité une charmante à Marie de Médicis sur Plutarque : Qui l’aime, m’aime, charmante épigraphe à mettre à un petit nombre de ces livres selon le cœur.
La France entière regretta Cinq-Mars ; sa jeunesse, sa bonne mine, son ambition si naturelle à cet âge et dans cette position, l’amour caché qu’on lui supposait pour une grande princesse (Marie de Gonzague), et qui conviait son cœur à de vastes desseins, tout répandait sur lui un charme que relevait encore l’atrocité du vieux prêtre moribond.
J’examinerai dans un des chapitres suivants par quelles raisons les Français pouvaient seuls atteindre à cette perfection de goût, de grâce, de finesse et d’observation du cœur humain, qui nous a valu les chefs-d’œuvre de Molière.
Mais le manque d’amour fait le manque de cœur.
Il nous dit, se peignant sous le nom de Saint-Clair : « Il était né avec un cœur tendre et aimant ; mais, à un âge où l’on prend trop facilement des impressions qui durent toute la vie, sa sensibilité trop expansive lui avait attiré les railleries de ses camarades.
Le désir de la femme les mordra au cœur ; et la femme, introduite dans la place, les trahira, livrera au peuple les secrets des savants et les machines par lesquelles ils terrorisaient la multitude.
Renan paraît tout à fait sec et affligeant à ces tendres cœurs.
Une douceur en émerge, c’est le lied : restitution d’humanité, définitive en sa musique suave et brève, où chante l’âme de banales et divines aventures plébéiennes ou de ces souvenirs que les héroïsmes, les joies ouïes malheurs séculaires incrustent en le cœur des races ; le lied, dont l’adaptation au verbe français est le bien évident de M.
Écrivain savant, il eût pu, par des histoires sur le cœur des femmes adultères, se saisir de la faveur publique, de l’argent, de la renommée.
On exalte, sans y regarder, la Fille Élisa, roman écrit, selon la déclaration de l’auteur, pour « parler au cœur et à l’émotion de nos législateurs » et auquel, en effet, les parlementaires ont pu s’intéresser sans effort, roman dont l’émotion demeure à la préface, livre pauvre d’humanité et mince de littérature, bien loin, ce me semble, des chefs-d’œuvre que fabriquait, avec son frère, M.
Il faut des qualités solides de cœur pour entretenir autour de soi un tel concert de sympathies.
Merci, cher Ilémon ; merci, cher Luzel, de cette fête qui m’a touché profondément au cœur.
Un mauvais cœur, un esprit caustique, une mémoire chargée d’anecdotes scandaleuses contre les auteurs morts & vivans ; ses épigrammes & sa réputation d’homme à bons mots ; son avarice sordide, quoiqu’il eut amassé, par toutes sortes de voies, des biens considérables ; sa fureur de primer partout ; sa profession de parasite : voilà ce qui le rendit l’objet de la haine, ou le sujet des plaisanteries des auteurs.
Aussi fut-ce une des choses qu’il eut principalement à cœur dans ce renversement inconcevable de toutes les loix.
Dès sa tendre enfance, Erasme s’étoit familiarisé avec tous les bons écrivains du siècle d’Auguste ; il avoit appris par cœur Térence & Horace.
Enfin, à son départ, on lui fait de riches présents, si mince qu’ait paru d’abord son équipage ; car on suppose que c’est un dieu qui vient, ainsi déguisé, surprendre le cœur des rois, ou un homme tombé dans l’infortune, et par conséquent le favori de Jupiter.
Une obligation que je vous aurai toujours, à vous et à M. le baron d’Holbach, une marque signalée de votre estime, c’est de m’avoir proposé une tâche qui plaisait infiniment à mon cœur : : plût à Dieu qu’elle eût été moins disproportionnée à mes forces, et que vous vous fussiez rappelé, l’un et l’autre, le Quid ferre recusent, Quid valeant humeri !
Les bras étendus vers son gendre, il lui parle avec une effusion de cœur qui enchante.
Il rêve, il se promène, il se rappelle ou les modèles qu’il a vus, ou les phénomènes de la nature, ou les passions du cœur humain, en un mot les expériences qu’il a faites, c’est-à-dire qu’il devient savant.
Un mouvement que la raison réprime mal, fait courir bien des personnes après les objets les plus propres à déchirer le coeur.
Enfin le monde sçait par coeur les vers dans lesquels Despreaux fils, frere, oncle et cousin de greffier, rend compte de la vocation qui l’appella de la poudre du greffe au Parnasse.
Le poëte tragique doit atteindre le dégré de perfection où il est capable de monter, de meilleure heure que le poëte comique, le génie et une connoissance generale du coeur humain, telle que la donnent les premieres études, suffisent pour faire une tragédie excellente.
Généralement ces bonnes farces se terminent tragiquement pour la bête couarde féroce et stupide qui en est l’objet, mais la bassesse de son caractère nous l’a rendue, par avance, si antipathique et ridicule qu’on applaudit de tout cœur à la victoire du kékouma (le rusé compère).
« Il s’agit tout le temps, dit-il, d’orages, de ruines qui croulent, de parvis, de feuilles sèches, que disperse le vent de la mort ; de la colombe qui construit son nid solitaire (pour dire le célibat) ; de volcans à peine fermés (pour dire les passions apaisées) ; du forum, pour dire, comme les avocats, la vie publique ; de l’ange de la destinée, de la lampe de la foi, de la coupe de miel offerte aux lèvres pures (pour dire une vie heureuse, bien qu’on ne mette guère maintenant du miel dans les coupes) ; des anneaux rattachés de la chaîne brisée ; du fait de la richesse, du règne de la vérité qui s’annonce à l’horizon ; du volcan, de l’éternel volcan qui vomit par ses mille cratères de la fange et de la lave, et enfin du bouclier, pour dire : le sentiment qui défend son cœur !
» Et tout ce train de poste et de course vers quelque chose qu’on n’atteint jamais, leur donnera peut-être, intellectuellement toujours, à nos descendants, le mal de cœur que donnent certains véhicules, et aussi l’envie de s’asseoir dans quelque doctrine fixe et reposante et de n’en plus bouger !
La modération et la douceur rendent la vieillesse agréable ; les défauts contraires font le malheur de l’homme âgé, comme ils feraient celui de l’homme jeune. » Il cite ces vers de Pindare à l’appui de son opinion, sur le bonheur de vieillir dans l’honneur et dans l’aisance : « L’espérance l’accompagne en berçant doucement son cœur et allaitant sa vieillesse, l’espérance, qui gouverne à son gré l’esprit flottant des mortels, etc. […] Il bouleverse à l’instant ce divin poème de la maternité ; il défend à la mère de connaître son enfant, à l’enfant de se suspendre à la mamelle de sa mère ; il condamne celle-ci à subir les souffrances de la gestation et de l’enfantement, à faire tarir dans son sein le lait providentiel qui demande à couler ou qui reflue avec fièvre et danger de mort au cœur de la mère. […] XXX Un livre où le traducteur cite ces pages, qui font rougir la pudeur et refluer tout instinct de famille jusqu’au fond du cœur scandalisé : « Partout où il arrivera que les femmes soient communes, les enfants communs, les biens de toutes espèces communs, et où l’on aura retranché des relations de la vie jusqu’au nom même de propriété… on peut assurer que là est le comble de la vertu… Un tel État, qu’il ait pour habitants les dieux ou des enfants des dieux, est l’asile du bonheur parfait ; il faut en approcher le plus possible !
Louis Ulbach L’anniversaire de Victor Hugo, en remuant les cœurs, les unit. […] « Je les ai sus par cœur, je les ai jetés jadis aux échos des coins de Provence où j’ai grandi. […] Émile Verhaeren Beau chevalier cuirassé de grands vers, Serrés autour du cœur comme une armure.
Que chercheront les grands prosateurs et les grands poètes de cette époque favorisée, si ce n’est la vérité universelle, celui-ci des passions, celui-là des vices, cet autre des faiblesses de notre nature, la vérité des caractères, la vérité des esprits, la vérité des cœurs ? […] Nous ne le disons pas seulement de ceux qui exposent dogmatiquement la vérité ; le mot s’applique à tous sans exception ; car, soit qu’ils tirent ou nous laissent tirer la morale des peintures qu’ils nous font de la vie, leur dessein d’exprimer la vérité et d’en persuader les autres hommes est si manifeste, qu’à moins d’une grande médiocrité d’esprit et de cœur, on éprouve les effets de cette autorité, et l’on fait le ferme propos d’y obtempérer. […] Qui ne sait par cœur l’enthousiaste déclaration de foi de La Fontaine sur Descartes : Descartes, ce mortel dont on eût fait un dieu Chez les païens, et qui tient le milieu Entre l’homme et l’esprit…28 D’autres fables, parmi ses plus belles, portent la marque des idées philosophiques de Descartes.
Donnez à tous ces personnages un cœur si tendre, si tendre qu’ils tombent en pâmoison à la première émotion vive ; prêtez-leur avec prodigalité un talent merveilleux pour jouer de la flûte, composer de petits vers galants et débiter des madrigaux comme celui-ci : Si je dis qu’elle est la plus belle Des bergères de ce hameau, Je n’aurai rien dit de nouveau : Ce n’est un secret que pour elle. […] Que l’amant meure d’amour… plusieurs fois et envoie à son amante ces adieux éplorés : « Dites-lui que mon dernier soupir sera pour elle, qu’en expirant je prononcerai son nom, que son image adorée me suivra jusque dans la tombe. », ce qui n’est pas trop mal rédigé pour un berger : Que des torrents de larmes arrosent les prairies et gonflent les ruisseaux ; car, comme le dit un poète compatissant : Ainsi toujours les cœurs sensibles Sont nés pour être malheureux. […] Plaire à ceux qui tiennent les cordons de la bourse est, sinon une nécessité vitale, du moins une chance de succès et de vie aisée qu’on ne s’interdit pas de gaité de cœur.
Mais ce qui soulève le cœur de dégoût, ce qui met aux yeux des larmes de colère, c’est le blasphème prononcé, le drapeau souillé par des mains indignes, toutes les choses nobles et grandes profanées par une poignée d’agitateurs. […] La gloire de l’intelligence n’est pas celle du cœur, et les insultes de notre ennemi national n’ont rien à voir dans l’hommage que méritent ses œuvres. […] De grâce, laissons un entrepreneur de spectacles jouer Lohengrin si le cœur lui en dit !
» n’est-ce pas là le langage des vrais amants, n’est-ce pas là un cri sorti du cœur de la plus aimante des femmes ? […] Combien nos cœurs seront-ils plus grands, plus tendres et plus généreux ! Nous n’aimerons plus en faibles créatures et d’un cœur resserré dans d’étroites bornes : l’amour infini aimera en nous, notre amour portera le caractère de Dieu même41. » Le philosophe religieux, Maine de Biran, n’a point une autre manière d’entendre l’union mystique de l’âme avec Dieu, sauf les exagérations de langage qu’il laisse aux théologiens.
Deux mois après parut mon livre, qui me valut de passer son seuil avec quel cœur oppressé ! […] Et là, prêt à sonner, quelle était mon angoisse soudaine où ne semblaient plus vivre que les heurts de mon cœur ! […] Un énorme intérêt m’attache à ce livre que je veux savoir par cœur. […] que c’est d’un rire dont se casse, contre notre cœur qui comprend, le sanglot. […] Duhamel, l’enseignement de la Poésie scientifique mais amputé des préoccupations cosmiques, transposé dans le domaine du cœur, et par là plus accessible. » Transposition dans le domaine du cœur : termes que nous appliquerons par excellence et plus amplement à l’œuvre d’Alexandre Mercereau80, et surtout à ses surhaussantes Paroles devant la vie lui, demeuré en prose un poète et que sacre une ardeur tendre et droite d’apostolat de vie en universelle Beauté.
L’épopée nationale fut, pendant deux siècles, le « grand succès » ; chantée par les jongleurs jusque sur le champ de bataille, et lue aussi par les lettrés, elle fit battre les cœurs des héros et des rustres ; expression d’une unité grandissante, elle contribue à cette unité. […] Mais à revivre ces œuvres par la sympathie qui devine, comme l’apôtre Jean, autant que par la science qui demande à toucher, comme Thomas, on y découvre une beauté nouvelle, et l’on revoit le poète, penché sur l’œuvre aimée qu’il sait incomplète et dont il dit lui-même : Quand je vous livre mon poème, Mon cœur ne le reconnaît plus : Le meilleur demeure en moi-même, Mes vrais vers ne seront pas lus. […] C’est dans tous les cœurs une exubérance d’énergies, de foi, d’amour ; un grand élan vers une nature que l’orage a ressuscitée ; et comme la réalité politique refoule ces énergies et que d’aucuns s’imaginent reconstruire la Bastille, toutes les forces affluent à l’art, à la poésie, au lyrisme. […] Les poètes lyriques de cette période sont encore dans toutes les mémoires et dans bien des cœurs. […] Au Palais-Royal, Tais-toi, mon cœur de Hennequin et Veber est la contre-thèse de La Dame aux camélias et du Ruisseau.
Brouillé avec sa mère pour ce refus plus qu’avec son père, qui sentait du moins le prix de sa franchise, il eut quelques années pénibles durant lesquelles il se tourna vers la médecine et s’y appliqua de grand cœur. […] Gui Patin plaida sa propre cause aux Requêtes de l’Hôtel (14 août 1612), en présence, dit-il, de quatre mille personnes : Je n’avais rien écrit de mon plaidoyer et parlai sur-le-champ par cœur près de sept quarts d’heure : j’avais depuis commencé à le réduire par écrit, mais tant d’autres empêchements me sont intervenus que j’ai été obligé de l’abandonner.
Ce régime de Robespierre lui arrache quelques-unes de ces paroles d’indignation comme nous les désirons de lui et de tout homme de cœur. […] De telles expressions, si on les isolait, donneraient de Saint-Martin une idée fausse, et calomnieraient son cœur.
Il n’obtint rien de M. de Vendôme ; il ne put déterminer l’électeur à un grand parti, et ne put lui persuader que le meilleur moyen de défendre ses états était de faire trembler l’adversaire au cœur des siens. […] On l’envoya, tout maréchal de France qu’il était, dans les Cévennes pour avoir raison des fanatiques révoltés, et pour extirper du cœur du royaume cette guerre civile religieuse qui devenait une complication fort maligne à cette heure d’une guerre générale extérieure
Que serait-il arrivé si, dans ces premiers instants, Henri IV avait été relégué au bout du royaume, cantonné en sa Rochelle, au cœur de son refuge de calvinisme ? […] Le royaume de tous côtés fut en proie, et le cœur de la patrie entamé.
Ces légions romaines « que vous avez quelquefois imitées, mais pas encore égalées » (paroles de la première proclamation), le préoccupent beaucoup, lui et ses camarades ; il les a sur le cœur. […] Tout en regrettant un peu le Consulat « dont les formes austères et grandes allaient beaucoup plus, dit-il, à sa manière d’être que les pompes de l’Empire », il salue et acclame de grand cœur ce dernier régime comme la consécration et le couronnement de l’ère militaire.
Ce noble cœur, ce grand talent, un peu dévoyé vers la fin et rejeté hors de l’arène, alla mourir, comme on sait, à Naples, en 1824, d’une maladie au foie, dans l’ennui de l’ambassade inactive où on l’avait confiné. […] Il eut plus qu’eux aussi, plus que tous ces hommes distingués et raisonneurs du premier et du second groupe doctrinaire, le sentiment patriotique proprement dit, celui même qui animait le noble duc de Richelieu, et qui fait qu’on souffre tout naturellement et qu’on a le cœur qui saigne à voir l’étranger fouler le sol de la patrie.
La critique qui, par un reste de préjugé ou de routine, se priverait de toute ouverture de ce côté, se retrancherait, de gaîté de cœur, bien des lumières et beaucoup de plaisir. […] Gavarni excelle à ces légendes qui, en deux mots, vous mettent au cœur du sujet, de l’intrigue ou de la situation, et vous disent tout.
Ô la plus belle des filles de Jupiter, Diane, place sur ton cœur, agrée ce tissu, cette triple émulation de zèle. » Sans doute Léonidas ne faisait pas payer cher ses épigrammes : aussi les pauvres gens s’adressaient volontiers à lui, comme à un bon faiseur et à bon compte ; je suis sûr qu’il en faisait même quelquefois pour rien. […] C’est ce que je te recommande, moi, Priape, le gardien des ports, pour que tu ailles partout où le commerce t’appelle. » Léonidas n’eut pas seulement affaire aux pauvres gens et à ceux du commun ; nul n’a exprimé mieux que lui la délicatesse de cœur et d’esprit du parfait galant homme ; lisez plutôt cette Épitaphe d’Aristocratès, de l’homme aimable par excellence : « Ô Tombeau, de quel mortel tu couvres ici les ossements dans ta nuit !
Je ne réponds point toutefois qu’il soit allé jusqu’au bout dans cet examen de conscience, car rien ne l’indique, et le cœur humain est bizarre et peu logique en soi ; il a des habiletés et des adresses sans pareilles pour oublier ou pour sembler ignorer ce qui l’importune. […] La difficulté d’y trouver un maire tient à plusieurs causes : d’abord à ce qu’ici comme partout ailleurs les anciens fonctionnaires capables d’administrer ont passé en Allemagne, à la suite de la conquête ; — en second lieu, parce que Worms est une ville de plaisir, où, hors les affaires personnelles de commerce ou de propriété, on se soucie fort peu de se donner d’autres occupations ; — en troisième lieu, parce que les idées et même les prétentions de l’ancienne ville libre et impériale y existent encore, avec plus ou moins de force, dans l’esprit et le cœur de ses habitants ; — 4°, parce que les soins d’un maire sur cette frontière sont pénibles et même dispendieux pour un homme qui a de l’honnêteté, et qui pourtant a un peu de cette avarice, laquelle est aussi un des principaux traits du caractère des habitants… » À Spire, c’était bien pis ; en 1813, le maire qu’on avait cru bon était décidément hostile à la France ; ses sentiments équivoques commencèrent à se démasquer avec nos revers : « Un reste de pudeur, écrivait Jean-Bon (28 mars 1843), lui fait sans doute garder encore une sorte de réserve, mais seulement ce qu’il en faut pour ne pouvoir pas être convaincu légalement de son aversion pour le gouvernement qui l’a cru digne de sa confiance.
Lorsqu’il y a tout à l’heure dix ans une brusque révolution vint rompre la série d’études et d’idées qui étaient en plein développement, une première et longue anarchie s’ensuivit ; dans cette confusion inévitable, du moins de nouveaux talents se produisirent ; les anciens n’avaient pas péri ; on pouvait espérer dans un ordre renaissant une marche littéraire satisfaisante au cœur et glorieuse. […] « Certes, si la France exerce une prépondérance si incontestable et si transcendante en Europe, elle le doit à dix ou douze hommes éminents, hommes d’art, d’intelligence, de poésie et de cœur…, parmi lesquels je suis. » Voilà le début nouveau de toute complainte : c’est à son de trompe qu’on entonne désormais sa pétition ; j’aimais mieux le flageolet de Marot.
Dès ce jour, le jeune homme se trouva l’un de ceux qui ne devaient pas continuer purement et simplement le xviiie siècle ; il appartenait déjà d’esprit et de cœur au groupe qui allait avec mesure, mais non sans éclat, s’en séparer. […] Nous noterons pourtant une charmante petite nouvelle de la famille d’Ourika et du Lépreux, intitulée Sœur Marguerite ; échappée à la plume de notre ambassadeur à Turin, en 1834, elle a témoigné de cette délicate variété de goût qu’on lui connaissait, et de cette jeunesse conservée de cœur.
Imaginez un Diderot qui avait de la pureté antique et de la chasteté pythagoricienne, un Platon à cœur de La Fontaine, a dit M. de Chateaubriand. […] Les consolations sont un secours qu’on se prête et dont tôt ou tard chaque homme a besoin à son tour. » Il revient de là à sa difficulté d’écrire, à ses ennuis, à sa santé, à se peindre lui-même selon ce faible aimable et qu’on lui pardonne ; car, si occupé qu’il soit de lui, il a toujours un coin à loger les autres : c’est l’esprit et le cœur le plus hospitaliers.
Personne n’a plus contribué que Voltaire à mettre au cœur des particuliers l’incurable défiance du gouvernement, à leur donner l’esprit de critique et d’opposition quand même. […] Son Dieu philosophique était un postulat que son esprit acceptait, et qui n’intéressait pas son cœur.
Eschyle était né à Éleusis, dans l’aire des deux Grandes Déesses, au cœur de leur culte et de leurs Mystères. […] Même pendant le sommeil, le souvenir amer des maux pleut autour de nos cœurs ; et, même malgré nous, la sagesse arrive, présent du Dieu assis sur les hauteurs vénérables. » De cette foi profonde jaillit la sève vertueuse qui circule partout chez Eschyle, sa flamme morale, son souffre sublime, son zèle de la justice, sa haine ardente de l’iniquité.
Pourtant il n’y a pas à se le dissimuler, c’est afin sans doute de mieux se tenir au niveau de l’humaine nature que Gil Blas n’a pas le cœur très haut placé : il est bon à tout, médiocrement délicat selon les occurrences, valet avant d’être maître, et un peu de la race des Figaro. […] Loin de s’améliorer, il arrive, en ce moment d’ivresse, au pire degré de faute où il soit tombé, à l’insensibilité du cœur, à la méconnaissance de sa famille et de ses premiers amis.
À l’arrivée du premier brigand, j’ai senti battre mon cœur avec force. […] Beaumarchais y allait plus à cœur ouvert ; et, en même temps, il avait le genre de plaisanterie moderne, ce tour et ce trait aiguisé qu’on aimait à la pensée depuis Voltaire ; il avait la saillie, le pétillement continuel.
Je voudrais seulement que vous missiez dans votre cœur le demi-quart de la morale et de la philosophie qu’ils contiennent. […] En vérité, je gémis pour l’humanité de voir un si grand génie avec un cœur si petit, sans cesse tiraillé par des misères de jalousie ou de lésine.
* * * — Une femme du monde disait d’un amoureux ridicule : « Je ne supposais pas que ce monsieur eût un cœur ! […] Alors Asseline, qui avait un coup de cœur pour l’actrice, et qui se trouvait lui dire bonsoir de la rue avec nous, très pâle, me prenant le bras, me disait : « Vous n’avez pas envie de dormir, venez avec moi », et me ramenant à l’endroit, au bord de la mer, où nous avions tous passé la soirée, il se mettait à me crier, dans la belle nuit amoureuse, son amour pour cette femme : un débordement de passion magnifique, que j’ai cherché à transposer dans mon livre.
Il s’éloigna, la tête basse et le cœur gros, se disant que : “ Après tout, le baron de Filouze a son rang à garder ». […] L’aspect de tes montagnes fait tressaillir mon cœur, mais il altère terriblement. » Et le bon montagnard me versa un verre de la boisson virgilienne : « Bon montagnard, combien te dois-je ?
Rien ne berce mon cœur oppressé ni l’abri presque inespéré de ce manoir de Brestenbergw qui vous accueille avec ses fenêtres d’idylle et ses délicatesses de boiseries anciennes, ni au bout du lac cet antique fief prodigieux qui sommeille sur les eaux comme la Silhouette intacte d’un Géant-Chevalier ni tout près de moi la présence d’une amie attentive, née au pays des tulipes et qui portant au bout d’une longue tige un peu raide le délicieux calice de son visage, semble la sœur même de ces fleurs maladroites et belles. […] Le cruel et fin André Breton médite-t-il déjà la mort de son Maître — cœur singulier qui doit se chercher des chagrins et des remords pour cesser d’être, en la prison de cristal, le mystificateur ailé et l’elfe stérile ?
Il pouvait donc dans un livre, cette œuvre personnelle, secouer le joug des petites réserves que les partis imposent à leurs serviteurs, et il était tenu plus que personne de nous donner sur la Restauration ce jugement qui nous manque encore, un de ces jugements qui peuvent déchirer le cœur de l’homme, mais qui sont la gloire de l’esprit dont ils confessent la mâle vigueur. […] On n’y trouve pas, sur son caractère et sur son génie, dont les diverses influences s’exercèrent en sens si contraires, l’opinion définitive que tout homme qui écrit l’histoire a pour prétention de faire accepter à l’avenir ; et cette faillance de cœur contre Châteaubriand n’est pas la seule qu’on puisse reprocher à l’auteur.
Puisqu’il s’emparait de l’idée chrétienne, de cette donnée qu’il faut accepter toute ou rejeter toute, car, si on est chrétien, il n’est pas permis de manquer à sa foi, et, si on est vraiment un homme, d’affaiblir par des arrangements de fantaisie, l’Évangile, l’Apocalypse, les Mystiques, la Légende et la Tradition, — puisque, ravi par la sombre splendeur du dogme de l’Enfer, il foulait d’un pied libre le cadavre de Voltaire, se souciant peu des rires que cet autre démon a semés sur les lèvres humaines, et se dévouant à chanter les supplices qui répugnent tant pour l’heure à notre spiritualisme épouvanté, il fallait qu’il allât jusqu’au cœur de l’idée chrétienne, il fallait qu’il la creusât dans tous les sens pour lui arracher toutes ses beautés ! […] Il montrera qu’il y a toujours, quand on est né poète, un bout de cœur à donner à l’éternel vautour.
. — Prétendue découverte du cœur de saint Louis. — Polémique entre MM.
Si les faiseurs d’ordre public essayaient d’une exécution politique, et que quatre hommes de cœur voulussent faire une émeute pour sauver les victimes, je serais le cinquième.
Mais certes, ils ne sauraient nous reprocher d’avoir longuement fixé leur attention sur un de ces hommes si rares de nos jours, purs d’ambition et d’intrigues, voués pour la vie à la science et à l’enseignement, participant de cœur et d’âme aux progrès, aux vœux d’une jeunesse qu’ils ont formée et qui les révère, et s’étonnant ensuite avec une véritable candeur quand la réputation qu’ils méritent vient couronner leurs solides et précieux travaux.
La philosophie de Sénèque pénètre plus avant dans le cœur de l’homme.
Cette ferveur mystique qui nous anime à l’égard de la divine et maternelle matière, notre religion de la vie quotidienne, des Travaux et des Jours, nous en investirons le cœur des Humbles.
Le cerveau est un second cœur.
Rousseau conta les amours de Julie, dans le but unique de tromper son cœur et d’utiliser les flammes de sa passion, la plupart des auteurs ne composent des odes et des tragédies que par une sorte de subterfuge à l’aide duquel ils oublient leur fortune, les voluptés que leur refusent d’exquises amantes et les guerrières expéditions à quoi semblaient les destiner leurs mérites et leurs sentiments.
Le roseau, dans sa réponse, rend d’abord justice à la bonté du cœur que le chêne a montrée.
Y reste celui qui peut voir avec patience un peuple qui se prétend civilisé, et le plus civilisé de la terre, mettre à l’encan l’exercice des fonctions civiles ; mon cœur se gonfle, et un jour de ma vie, non, un jour de ma vie, je ne le passe pas sans charger d’imprécations celui qui rendit les charges vénales.
On peut s’en rapporter aux lumieres et à l’expérience des hommes dont la subsistance dépend des aumônes de leurs concitoïens, sur les voïes les plus propres, sur les moïens les plus efficaces d’attendrir le coeur humain.
Sommes-nous donc placés pour porter sur l’ordre social un de ces regards à la Burke, qui plongent jusqu’au cœur des choses et font dire le mot : Où en sommes-nous ?
Pour mon cœur, la religion a-t-elle encore des raisons que ma raison ne connaît pas ?
Que l’intérêt et la crainte prodiguent l’éloge, c’est le contrat éternel du faible avec le puissant ; mais la postérité, sans espérance comme sans crainte, doit être plus libre ; elle peut aimer ou haïr, approuver ou flétrir d’après la justice et son cœur.
Seigneur, donnez-moi la force et le courage de contempler mon corps et mon cœur sans dégoût, dans cette phrase ; être un saint et un grand homme pour soi-même. […] Or, étudier les phénomènes de conscience comme en William Wilson, le Cœur révélateur, l’Homme des foules, la Double Boîte, etc…, c’est faire œuvre de moralité. […] L’église se vide de gens pressés, qui viennent de se confesser, et ont hâte d’aller restaurer leur cœur allégé ; le curé, aussi, craint que son déjeuner ne brûle ; mauvaise disposition pour convoquer une âme vers Dieu ! […] Parfois rêveuse, à sa fenêtre, elle se penche, Elle a l’air de chercher et d’appeler son cœur. […] Opposons-lui les tentatives récentes de Paul Adam, le Mystère des Foules ou les Cœurs nouveaux.
Ceci convient mieux à la philosophie, ou aux religions peu mystiques, qui, parlant au cœur humain avec moins de force et moins d’autorité, ont besoin de se montrer en quelques points plus accommodantes ou plus souples. […] Le cœur doit envoyer du sang noir aux poumons, le poumon doit faire oxygéner ce sang, le cœur a le droit de recevoir, pour son propre entretien, du sang-oxygéné qui lui permettra de continuer à vivre et à remplir son office.
La raison est la seule loi du monde ; il est aussi impossible de réduire en formules les lois des choses que de réduire à un nombre déterminé de schèmes les tours de l’orateur, que d’énumérer les préceptes sur lesquels l’homme moral dirige sa conduite vers le bien. « Sois beau 97, et alors fais à chaque instant ce que t’inspirera ton cœur », voilà toute la morale. […] Indépendamment de tout système, excepté celui qui prêche dogmatiquement le néant, le tombeau a sa poésie, et peut-être cette poésie n’est-elle jamais plus touchante que quand un doute involontaire vient se mêler à la certitude que le cœur porte en lui-même, comme pour tempérer ce que l’affirmation dogmatique peut avoir de trop prosaïque. […] Leur gloire est d’être en sympathie si profonde avec l’âme incessamment créatrice que tous les battements du grand cœur ont un retentissement sous leur plume.
Comme on croyait encore le monde près de finir, on se souciait peu de composer des livres pour l’avenir ; il s’agissait seulement de garder en son cœur l’image vive de celui qu’on espérait bientôt revoir dans les nues. […] Le pauvre homme qui n’a qu’un livre veut qu’il contienne tout ce qui lui va au cœur. […] Il est l’honneur commun de ce qui porte un cœur d’homme.
Quand on a une passion d’art chevillée au cœur, on est forcément téméraire lorsqu’il s’agit de la faire triompher. […] Paris se compose de vingt ou trente mille personnes désireuses d’entendre Lohengrin, d’un million neuf cent mille indifférents qui se moquent de Wagner et de ses œuvres, et de soixante-dix mille habitants de tout âge, imaginations ardentes, cœurs inflammables, cerveaux affolés, que dix bons meneurs soutenus par beaucoup de braillards conduisent où ils veulent. […] Dans une tout autre mesure, en Allemagne et en France, les problématiques liées aux questions idéologiques sont au cœur des mises en scène.
Le mérite des historiens de notre révolution n’est point d’avoir compris les nécessités politiques ou économiques évidentes qui pèsent sur le développement de ce grand drame, telles que la guerre étrangère, la guerre civile, la disette, la détresse des populations de Paris et des grandes villes ; c’est surtout d’avoir senti l’âme de cette révolution, avec ses passions bonnes et mauvaises, palpiter dans le cœur de tous les hommes qui ont été chargés de la diriger ou de la déchaîner. […] Les étrangers présents à la séance étaient muets d’étonnement ; pour la première fois ils avaient vu la France, toute sa richesse de cœur. […] Il ne faut pas se le dissimuler, cette école ne répond que trop aujourd’hui à un sentiment profond et général de nos sociétés actuelles, où l’expérience de tant d’événements historiques contraires à la sagesse et à la conscience a glissé le doute dans les esprits et l’apathie dans les cœurs.
La première question à étudier est donc celle-ci : comment Montesquieu, Rousseau, Voltaire concevaient-ils la patrie ; comment l’aimaient-ils ; qu’est-ce qu’elle était pour leur intelligence, pour leur raison et pour leur cœur ? […] Voltaire est un peu naïf de s’étonner de la froideur subite de Choiseul à son endroit dans un temps où il était de tout son cœur, d’une part pour Maupeou, et de l’autre pour Catherine. […] En vérité, Madame, vous voilà la première personne de l’Univers… » Il revient sur ces deux idées la même année, un peu plus tard : « J’ai le cœur navré de douleur de voir qu’il il y a de mes compatriotes parmi ces fous de Confédérés. […] il sera dans la nature de l’homme de revoir avec plaisir une maison où l’on est né, un village où l’on a été nourri par une femme mercenaire, et il ne serait pas dans notre cœur d’aimer ceux qui ont pris un soin généreux de nos premières années ? […] Je souhaiterais passionnément que vous voulussiez entreprendre cet ouvrage et l’embellir de votre poésie, afin que, chacun pouvant l’apprendre aisément, il portât dès l’enfance dans les cœurs ces sentiments de douceur et d’humanité qui brillent dans vos écrits et qui manquèrent toujours aux dévots.
Les Français apparemment considèrent une pièce de théâtre comme une sorte de morale en action ; ils veulent se former l’esprit et le cœur au spectacle ; et, en effet, une comédie de caractère est une chose éminemment instructive. […] Lorsqu’un médecin vous parle d’aider, de secourir, de soulager la nature, de lui ôter ce qui lui nuit, et lui donner ce qui lui manque, de la rétablir et de la remettre dans une pleine facilité de ses fonctions ; lorsqu’il vous parle de rectifier le sang, de tempérer les entrailles et le cerveau, de dégonfler la rate, de raccommoder la poitrine, de réparer le foie, de fortifier le cœur, de rétablir et conserver la chaleur naturelle, et d’avoir des secrets pour étendre la vie à de longues années, il vous dit justement le roman de la médecine. […] Sauf la gaieté obligée de la soubrette, tous les personnages sont sérieux, la mère et le fils par leur bigoterie, le reste de la famille par sa haine pour l’imposteur, et le beau-frère par ses sermons, où il prêche avec tant d’onction que les dévots de cœurs ne doivent Jamais contre un pécheur avoir d’acharnement, Mais attacher leur haine au péché seulement91. […] Mais nous comptions sans le beau-frère qui nous interdit toute joie profane, et nous ramène à des sentiments sérieux par cette exhortation finale tout à fait pathétique : Souhaitez que son cœur en ce jour Au sein de la vertu fasse un heureux retour ; Qu’il corrige sa vie en détestant son vice, Et puisse du grand prince adoucir la justice92.
Nous savons par cœur Le Lac, cette divine plainte de ce qu’il y a de fugitif et de passager dans l’amour : Denne-Baron, dans une pièce lyrique qui semble avoir été composée avant Le Lac, a rendu à sa manière un soupir né du même sentiment.
Cet homme impitoyable, qui ne descendait de son nid de vautour que pour dépouiller ses vassaux, les arma lui-même, les emmena, vécut avec eux, souffrit avec eux ; la communauté de misères amollit son cœur.
N’y avait-il donc pas assez d’émotions à recueillir du tableau naïf de ce noble cœur brisé par l’amour, qui va par-delà l’Océan se distraire dans les combats ou se consoler dans la nature ?
Tous ces exemples historiques au reste, ces interprétations diverses d’un passé que la doctrine nouvelle embrasse et domine, ne sont, sous la plume du jeune apôtre, que des lumières qui sillonnent pour lui le chemin de la foi, des rayons qui ramènent au foyer dont ils émanent, des excitations fécondes pour passer outre et entraîner ceux que le grand développement providentiel saisit au cœur, et qui, à l’aspect des antiques traditions enfin comprises, se sentent le désir de travailler, pour leur part, à en continuer l’enchaînement éternel.
La justice des hommes se promettait par avance une de ces satisfactions d’amour-propre qu’au dire des comptes rendus elle éprouve chaque fois qu’il lui est donné de présider à une cérémonie de cet ordre, et le tout-Paris des dernières, friand de tout bruit de coulisse et notamment de celui que fait le sinistre couperet en glissant dans sa rainure retenait déjà ses places, etc… » Ne croyez pas, je vous en supplie, que ces lignes soient l’indice d’un mauvais cœur.
Parce qu’il avait dans sa jeunesse contemplé de près la splendeur des montagnes et des lacs, vécu dans leur, intimité, respiré dans l’air pur l’âme des paysages alpestres ; parce qu’il avait parcouru à pied la Suisse et la Savoie, deux pays où des contrastes grandioses et charmants parlaient plus qu’ailleurs aux yeux et aux cœurs, où les fêtes, les usages, la vie de tous les jours avaient encore la saveur d’une agreste simplicité ; parce qu’enfin cet être si sensible, écrivant en un moment où la sensibilité se réveillait en France, rencontrait des lecteurs préparés aux émotions qu’il allait leur communiquer.
Que si elles avaient le défaut de faire de l’amour un délire de l’imagination, elles eurent aussi le mérite d’élever les esprits et les âmes au-dessus de l’amour d’instinct, et de préparer cet amour du cœur, ce doux accord des sympathies morales si fécond en délices inconnues à l’incontinence grossière, cet amour qui donne tant d’heureuses années à la vie humaine, appelée seulement à d’heureux moments par l’amour d’instinct.
L’un n’a pu s’empêcher de s’écrier au sujet de l’autre(**) : Deux cœurs faits pour s’unir d’un lien éternel, Dieux !
Ce qu’il y a de certain, c’est que la méchanceté de son cœur & la vénalité qu’on reprochoit à sa plume, ont fait souvent appeler de ses prétendus arrêts.
Tous ceux qui aiment les vers de La Fontaine, le savent presque par cœur.
Quel dommage, dit ce peintre, par une de ces saillies qui font avec un trait la peinture du fond du coeur, qu’un ultramontain nous ait prévenu dans cette invention.
marche si vite entre ses deux filles qui l’entraînent, la Fausseté de l’esprit et l’Ingratitude du cœur !
Est-il possible d’être moins homme que cet homme, qui a été chaste dans sa jeunesse, la force des forces pour qui connaît le cœur humain, et qui, après avoir été trompé, berné, humilié, trahi et raillé par sa femme, dont il se sépare, en redevient l’amant une dernière fois, et, pour s’achever, se cocufie lui-même ; car de telles bassesses, de telles abjections, rappellent les vieux mots bannis qui ne faisaient pas peur à nos ancêtres !
Dès l’apparition du Don Quichotte, en 1605, sous Philippe III, l’Espagne fut atteinte au milieu du cœur par le chef-d’œuvre, et toutes les fibres de cette nation spirituelle et passionnée tressaillirent.
Toutes ces constructions de sensations, toutes ces reviviscences d’images, toutes ces études d’hallucination, toutes ces dentelles d’analyses physiologiques faites au microscope, tous ces fils de la Vierge qu’on nous montre entre l’index et le pouce, toutes ces bluettes, en fin, qu’on veut nous donner et qu’on nous donne, c’est pour que nous ne puissions apercevoir du premier regard le but où l’on veut nous conduire, et ce but, c’est de réduire les plus grandes et les plus vivantes choses qu’il y ait dans le cœur et la tête de l’homme : Dieu, l’âme et le devoir, à n’être qu’une vile sensation, un ridicule bruit de sonnette dont on tire le cordon, en attendant qu’avec ce cordon on puisse les étrangler.
Césara donc, Césara, cet idéal de grandeur et de génie, dont le romancier n’entend pas nous faire voir la faiblesse, mais la force, n’est plus qu’un homme qui a vautré son cœur dans un concubinage vulgaire.
. — Nous, cœur d’honnête homme, nous croyions naïvement que si MM. les commissaires n’avaient pas associé le chef de l’école actuelle à cette fête artistique, c’est que ne comprenant pas la parenté mystérieuse qui l’unit à l’école révolutionnaire dont il sort, ils voulaient surtout de l’unité et un aspect uniforme dans leur œuvre ; et nous jugions cela, sinon louable, du moins excusable.
Qu’on me pardonne de m’être arrêté un moment sur le spectacle d’une amitié si touchante ; il est doux, même en écrivant, de pouvoir se livrer quelquefois aux mouvements de son cœur : et j’aime encore mieux un sentiment qui me console, qu’une vérité qui m’éclaire.
Il n’est pas sans intérêt cependant de le voir jeter encore quelque éclat poétique, quand il se reprend aux grands souvenirs qui avaient autrefois fait battre de nobles cœurs.
Et le chef-d’œuvre du Greco selon mon cœur, la fleur de sa vie surnaturelle, c’est justement le dernier tableau qu’il a peint, sa Pentecôte que l’on voit au musée de Madrid. » (Page 154.) […] De telles descriptions, Chateaubriand sait les esquiver, et ramener les siennes à leur cœur, à un sentiment humain ; et toujours on trouvera la phrase qui met sous cette croûte extérieure de peinture une délicate, indéfinie, cloche d’argent. […] Il est juste que nous ne la jugions que sur ses franches et pleines parties, sur les lettres adressées par Flaubert à des correspondants auxquels il ouvre largement sa pensée et son cœur. […] Le Flaubert d’intelligence et d’idées, c’est Flaubert parlant du cœur humain et surtout parlant de l’art, le Flaubert de ces admirables lettres à Louise Colet, écrites pendant qu’il composait Madame Bovary, si pleines, si vibrantes, si nombreuses. […] À cette prise de la société contemporaine par le dedans, par le cœur, par le courant d’énergie, répond la politique de Balzac, ramenée par Curtius à une énergétique sociale.
Elle se bornait à faire apprendre par cœur une quantité formidable de dogmes qu’il fallait commenter à perpétuité. […] Chacun sait comment le pauvre Gargantua commença par être mis aux mains d’un « sophiste ès lettres latines », lequel lui faisait apprendre par cœur, puis redire à l’envers une grammaire et une logique, si bien que le jour où on voulut l’examiner, « il se print à plorer comme une vache, et se cachoit le visage de son bonnet, et ne fut possible de tirer de lui une parole. » Son père, Grandgousier, qui voit alerte, dispos, maître de sa langue et de ses idées, un garçonnet de douze ans élevé de façon moins surannée, entre dans une colère terrible contre les pédants dont « le sçavoir n’est que besterie abastardissant les bons et nobles esprits. » On décide alors de refaire l’éducation du géant, fils de prince, et son nouveau précepteur lui apprend tant et de si belles choses que l’élève devient habile, non seulement à sauter, lutter, nager, botteler du foin, mais encore à sculpter, peindre, jouer du luth, faire des vers, et qu’il peut deviser avec les docteurs comme avec les artisans. […] Elles entretiennent le cœur dans une noble haine de la tyrannie. « Et ce n’est pas assez que les jeunes gens apprennent à vivre avec le vieux Caton, à mourir avec Socrate ou Léonidas.
À quelques jours de là, Hetzel lui faisait dire de passer chez lui, et dans une entrevue féroce, lui déclarait qu’il n’avait aucun talent, n’en aurait jamais, que c’était écrit d’une manière exécrable, qu’il recommençait la Commune de Paris dans la langue française, qu’il était un détraqué de croire, qu’un mot valait plus qu’un autre, de croire qu’il y avait des épithètes supérieures… Et Huysmans me peignait l’anxiété que cette scène avait mise dans le cœur de sa mère, pleine de confiance dans le jugement de l’éditeur, en même temps, que la douloureuse méfiance qui lui était venue à lui, de son talent. […] Mardi 6 juillet Spuller, ce gros homme matériel, quand il parle de Gambetta, c’est avec une tendresse touchante, et cette tendresse apporte à ce qu’il dit, une éloquence de cœur, pleine d’intérêt. […] Samedi 11 septembre Dans L’Éducation sentimentale, une merveilleuse scène que la visite de Mme Arnoux à Frédéric, — et la sublime scène que ce serait, si au lieu des phrases très joliment faites, mais des phrases de livres, comme celle-ci : « Mon cœur, comme de la poussière, se soulevait derrière vos pas !
Le christianisme, avec son culte et ses pratiques de sacrifice et d’amour, gagna ces grands cœurs barbares, et repassant successivement toutes les barrières que les vainqueurs avaient eux-mêmes franchies, il pénétra jusqu’au sein de la Germanie. […] Les peuples avaient eux-mêmes des droits défendus par les princes contre les usurpations du pouvoir impérial, et garantis contre les princes eux-mêmes par des institutions qui n’ont jamais été entièrement détruites : civilisation rude encore, il est vrai, mais pleine de force ; la liberté germanique, appuyée sur une unité religieuse qui trouvait dans tous les cœurs et dans tous les esprits une croyance absolue, fait alors de l’Allemagne une nation vraiment grande, respectée et redoutée de l’Europe entière. […] La littérature tout entière entra dans la route que le génie de Klopstock lui avait ouverte, et, même avant la mort de Frédéric, on vit éclore un certain nombre de poésies nationales que tout le monde apprit par cœur.
Si l’on croit que l’étude des mathématiques dessèche le cœur et l’esprit, cela ne peut être vrai que d’une étude habituelle ; encore cela est-il vrai ? […] Qu’on l’apprenne par cœur, j’y consens, mais à l’âge de Marc-Aurèle. […] — Par antithèse, un des professeurs de D’Alembert lui interdit la poésie, « parce que, disait-il (et il avait raison dans un certain sens), la poésie dessèche le cœur. » 20.
Toutes les nations qui se sont détachées successivement du point central, du cœur de l’Asie, sont reconnues aujourd’hui pour des frères et sœurs de la même famille, et d’une famille empreinte au front d’un air de noblesse ; mais, dans cette famille nombreuse, il y a eu un front choisi entre tous, une vierge de prédilection sur laquelle la grâce incomparable a été versée, qui avait reçu, dès le berceau, le don du chant, de l’harmonie, de la mesure, de la perfection (Nausicaa, Hélène, Antigone, Électre, Iphigénie, toutes les nobles Vénus) ; et cette charmante enfant de génie, cette muse de la noble maison, si on la suppose retranchée et immolée avant l’âge, n’est-il pas vrai ? […] Sans doute Isocrate, en son célèbre Panégyrique, avait raison de dire à sa date, à la veille d’Alexandre : « Notre ville a laissé si loin derrière elle, en pensée et en éloquence, les autres hommes, que ses élèves sont devenus les maîtres des autres, et elle a fait si bien que le nom de Grecs ne semble plus être la désignation d’une race, mais celle de l’intelligence même, et qu’on appelle Grecs ceux qui ont part plutôt encore à notre culture qu’à notre nature. » Périclès, avec plus d’autorité, disait la même chose dans cet admirable panégyrique d’Athènes qu’il fit magnifiquement entrer au cœur de son éloge funèbre des guerriers morts pour la patrie.
A propos de l’Électre de Sophocle, il rencontre un vers qui est tout entier ou presque tout entier en monosyllabes : sur ce, il remarque et note tous les vers qu’il connaît, composés également de monosyllabes : « Racine, dans Phèdre : Le jour n’est pas plus pur que le fond de mon cœur. […] Hase osait ouvrir le fond du cœur et décharger ses pensées à huis clos.
Virgile est un doux nom, cher à l’oreille et au cœur de tous : il est devenu tel à travers les âges ; il s’est francisé sous cette forme, et nul ne peut songer à nous le ravir : mais en latin il est bien certain que le nom est P. […] Voici le cas, qui ne laisse pas d’être intéressant pour tous les lecteurs de Virgile et pour ceux qui savent encore par cœur les vers appris dès l’enfance.
Il avait communiqué à Mme de Sablé sa maxime sur l’amitié : « L’amitié157 la plus désintéressée n’est qu’un trafic où notre amour-propre se propose toujours quelque chose à gagner. » Loin d’effacer cette triste maxime, deux ans avant sa mort, il l’étendit de la façon suivante : « Ce que les hommes ont nommé amitié158 n’est qu’une société, qu’un ménagement réciproque d’intérêts, et qu’un échange de bons offices ; ce n’est enfin qu’un commerce où l’amour-propre se propose toujours quelque chose à gagner. » Le cœur de Mme de Sablé lui fournit des pensées d’un ordre bien différent. […] Il comprenait l’amitié de l’esprit comme celle du cœur ; les deux n’étaient pas séparables chez lui.
adressé à son livre, ou plutôt au critique des âges futurs, m’aurait été au cœur (à la place de M. […] Le petit envoi qui termine, et qui nous apprend que la pièce a été composée pour le jour de naissance de son ami, nous rend de véritables accents de cœur : Hæc tibi, parva quidem, genitali luce paramus Dona, sed ingenti forsan victura sub ævo, Tu cujus placido posuere in pectore sedem Blandus honos, hilarisque (tamen cum pondere) virtus : Cui nec pigra quies, nec iniqua potentia, nec spes Improba, sed medius per honesta et dulcia limes : Incorrupte fidem, nullosque experte tumultus, Et secrete palam : qui digeris ordine vitam ; Idem auri facilis contemptor, et optimus idem Comere divitias, opibusque immitter e lucem… Si Stace a eu tant de vogue en son temps, si l’on a trouvé à sa voix de la douceur, c’est aussi, apparemment, pour quelques-unes de ces notes aimables : il y avait lieu de le dire.
C’est cet Art poétique, bien entendu, qu’il faut prendre pour base en essayant de dégager le véritable caractère de la théorie de Boileau ; mais comme il s’agit moins d’analyser un ouvrage que tout le monde à peu près sait par cœur, que d’en indiquer l’esprit et la portée, je mettrai à profit dans cette exposition toutes les indications, parfois d’une importance capitale, que nous fournissent les autres ouvrages de notre critique, comme la Satire II et l’Épître IX, la Dissertation sur Joconde et le Dialogue des héros de roman, enfin les Réflexions sur Longin, surtout la septième, dont l’intérêt est tout particulier. […] Le fond de la poésie lyrique, étant ainsi ce qu’il y a de plus universel dans les idées de l’humanité, la vibration personnelle du poète qui contemple ces hautes vérités ne sert qu’à leur donner une plus grande force de pénétration pour aller au fond des cœurs.
Au sacrifice près, qui, en quelque mesure que ce soit, n’est pas la pente de sa nature, c’est un excellent et aimable homme, de charmant commerce, ami exquis et vrai, d’autant que le libre choix, dans l’amitié, assure son ombrageuse indépendance : on sait sa liaison de quatre années avec La Boétie, et la chaleur qui lui en resta toujours au cœur. […] Par elles, il est arrivé à cette grande vérité, qui, si l’on y regarde bien, est la conclusion de toute son argumentation prétendue sceptique : c’est que l’homme, en haut-de-chausses, en toge, ou dans sa nudité naturelle, assis dans un trône ou courbé sur la terre ingrate, est toujours l’homme, « ondoyant et divers » sans doute, mais identique à lui-même dans cette ondoyante diversité, portant partout dans le cœur les mêmes instincts plantés par la commune mère nature, et les mêmes notions essentielles dans la conscience et la raison.
Tournant son goût de fine subtilité vers les solides réalités du cœur, elle se plaisait, et l’on aimait autour d’elle à faire des sentences ou maximes. […] Elle n’eut de passion que pour sa fille, un peu aussi pour Marie Blanche, une affection calme pour son fils ; en dehors de cela, quelques amitiés solides et sereines, où son esprit prenait autant que son cœur : Fouquet, Retz, Mme de la Fayette.
S’il est d’un cœur tendre et ardent, il peut se sacrifier, mais non pas sans réserve, et il ne sacrifie pas les autres. […] Certes, l’abbé Courbezon se dépouille souvent sans arrière-pensée, par le mouvement irrésistible de son grand cœur ; mais cependant c’est surtout de fondations religieuses qu’il rêve.
À cela, monsieur, voulez-vous que je vous réponde avec une confiance entière et que je vous ouvre mon cœur ? […] Sur la fin, sa chaleur de cœur s’exhalait souvent par des bouffées d’indignation et par de saintes colères d’honnête homme.
Réciter intérieurement ce que l’on sait par cœur est un fait analogue à l’audition et à la lecture. Seulement, comme d’ordinaire on ne sait par cœur que ce que l’on a étudié, il est rare qu’un effort intellectuel soit nécessaire pour interpréter les mots qui se succèdent dans l’esprit ; l’effort mental se concentre sur la remémoration, et nous comprenons à mesure sans intervalle appréciable.
L’âne est, lui aussi, puni de son mauvais cœur. […] Que voulez-vous qu’il comprît à cette morale toute ménagère, à cette morale des humbles et à cette morale qui n’ouvre pas d’une façon très vaste les abîmes ni même les sources du cœur ?
Devant une destinée si noblement, si heureusement remplie, une destinée bénie par la nature et menée à bonne fin par la plus admirable volonté, je sens flotter incessamment dans mon esprit les vers du grand poëte : Il naît sous le soleil de nobles créatures Unissant ici-bas tout ce qu’on peut rêver : Corps de fer, cœurs de flamme, admirables natures ! […] Qu’elles se distinguent par le charme du crime ou par l’odeur de la sainteté, que leurs gestes soient alanguis ou violents, ces femmes malades du cœur ou de l’esprit ont dans les yeux le plombé de la fièvre ou la nitescence anormale et bizarre de leur mal, dans le regard, l’intensité du surnaturalisme.
J’ai senti remonter à mon cœur cette effluve rougeâtre qui, dégouttant jusqu’à terre le long du fil de la lance, emporte avec elle le rayon de la vie qui s’éteint. […] « Aussitôt nous courûmes, avec la lance, avec le bouclier, pour le combattre, le cœur gonflé de fureur, hommes contre hommes, les rangs serrés, et nous mordant la lèvre de colère, alors que, sous l’amas pressé des dards, on ne pouvait voir le ciel.
Il est vrai qu’il en a donné une légère parodie dans cet autre poème qu’on ne nomme pas, en disant : L’heureux Villars, fanfaron plein de cœur… Nous avons fini.
À un très bel esprit il joignait un cœur excellent.
Et pourtant de tels motifs de garantie future que j’embrassais de grand cœur, et auxquels je ne cessais de croire dans mon songe (car vous n’oubliez pas que c’en est un), ne le rendaient pas moins mélancolique et moins sombre ; mon pauvre Euphorion, avec la foule innombrable et confusément plaintive de ces poëtes déshérités, déchus, ensevelis, ne se laissait pas oublier, et ils faisaient tous la ronde autour de moi, tellement que mes idées commençaient à vaciller un peu.
Dans une lettre à madame Cosway, qui est un ingénieux et délicat dialogue entre la tête et le cœur, à la manière de Sterne ou du Socrate de Philadelphie déjà tant de fois cité, notre philosophe balance les prérogatives des deux puissances rivales qui se partagent notre être, et il ne donne pas le dessous à la plus tendre.
Nous n’avons jamais mieux compris qu’en lisant ces pages en quels abîmes, au sommet du pouvoir absolu, le moindre faux pas, le moindre bouillonnement de tête, peut à chaque instant précipiter les plus grands cœurs.
Lerminier, doué comme il l’est d’une intelligence vaste et progressive, tendant, comme il le fait, à une œuvre d’avenir où un si beau rang l’attend et où il convie en toute occasion avec tant d’ouverture de cœur ses contemporains amis et les générations plus jeunes dont il est un des maîtres, M.
Homme de guerre, d’escarmouche rapide, archer fuyant et un peu cruel, il s’est jeté parmi nous, sur notre rive du Rhin, et de là, il nous a montré comment il savait décocher l’ironie et frapper au cœur des siens quand les siens n’étaient pas des nôtres.
Si vous dites, pour citer une théorie qui jouit aujourd’hui d’une faveur incroyable, non seulement parmi les pauvres sols tout éplorés qu’Alfred de Musset traîne à ses talons, mais auprès des esprits les plus graves de notre époque, si vous dites que le vrai poète doit être une espèce de don Juan fatal, victime prédestinée de cet insatiable besoin d’aimer qu’on appelle le génie, et semblable au pélican qui donne à ses petits son propre cœur en pâture, s’il vous plaît de répéter cette déclamation, nous vous laisserons faire, et, quand vous aurez fini, nous vous rappellerons simplement l’admirable possession de soi d’un Cervantes et surtout d’un Shakespeare, qui dans la force de l’âge et du talent, cesse tout à coup d’écrire et se met à cultiver son jardin, comme Candide, après avoir eu la tête traversée par un effroyable torrent d’idées et d’images, dont quelques flots auraient suffi pour faire perdre l’équilibre à la plus ferme de nos cervelles.
Ici l’auteur se laissera aller sans nécessité, et même à contretemps, à développer quelque idée favorite ; il s’épanchera sur ce qui lui tient au cœur, sans trop regarder si c’est de son sujet.
Pujalet, le plus affable et le plus cordial des hommes, instruit de la vulnérabilité des cœurs et qui sait y compatir.
Puis, c’est la vie du cœur : amour, amitié, haine, la vie politique avec ces grands événements où l’individu est enveloppé et roulé comme une goutte d’eau dans un fleuve.
L’indigne prussienne… a la tête folle et le cœur dépravé.
Un grand ressort des temps anciens, qui fut nécessaire à l’organisation primitive de la société, et qui ne peut plus être pour nous qu’une grande erreur, le sentiment exclusif de la nationalité doit disparaître : il ne peut tenir devant les hauts sentiments de l’humanité ; il restera l’amour du sol natal et l’attachement aux institutions de la patrie, seuls sentiments vrais, naturels, indestructibles comme le cœur de l’homme.
Rhéteur, déclamateur, et par-dessus imitateur, — imitateur avec bassesse, — n’ayant ni une idée supérieure, ni entrailles, ni sincérité d’aucune sorte, il ne fut pas même à la rigueur un honnête homme pour ceux-là qui pensent que les grandes pensées viennent du cœur.
Ils sont tous comme lui, élevés dans l’amour du roi, — ce sentiment qui était de France, — dans ce feu sacré de l’amour du roi que soufflaient alors toutes les mères au cœur de leurs fils, et que, plus religieuses que les Vestales, elles ne laissèrent éteindre jamais !
à quelle loi supérieure remontait-il pour reconnaître toujours, à coup sûr, la beauté dégradée de ce monde, cet art puisqu’il a parlé des choses de l’art encore plus que des choses littéraires — qui se rêve dans le cerveau grec, mais qui se sent dans le cœur chrétien ?
Excepté son livre, rien ne reste de cet homme, qui eut un cœur pourtant, une humeur, un tempérament, une existence à la façon des autres hommes, et qui n’apparaît dans l’histoire que comme un grand esprit impersonnel, un observateur qui s’efface dans l’intérêt de son observation, et qui provoque d’autant plus la curiosité qu’il la désespère.
Mauvais mari comme le fut Byron, il n’eut pas beaucoup plus que Byron des mœurs réglées, ce sinistre… De cœur, de cette fidélité ordinaire aux âmes fortes, il fut moins vaillant que Pétrarque, et sa Béatrix a besoin d’être transfigurée dans ses chants pour n’être pas un enfantillage ou un mensonge.
Dans ses autres écrits de polémique, il montra, dit passionnément Heine, « à l’admiration de ses amis, l’empennure bigarrée de ses ailes quand la flèche était déjà dans le cœur de ses ennemis !
Gervinus, il n’ose pas s’inscrire en faux contre cet Allemand qui lui impose comme tout Allemand, mais ailleurs, quand il a besoin de flétrir, je crois, les vieux catholiques intolérants, il oublie que Machiavel « est un grand cœur pur de citoyen », finement ironique seulement quand il est atroce, et il se permet une tournure hautaine.
la destinée des plus grands cœurs, je puis ne pas m’en soucier, — pas plus que je ne me soucie des grands hommes oubliés du cimetière de Gray, — mais je ne puis pas ne point me soucier de la grandeur ou de la profondeur de ce Goujet et de ce Rochereuil, qui, vrais ou faux, vous appartiennent, et que vous me donnez hardiment et voulez me faire prendre pour des grands hommes inconnus.
Il y a les vérificateurs de bâtiment, qui logent à l’auberge, et les moralistes, qui logent dans les familles, au cœur même du foyer domestique et des institutions.
« Et moi aussi, dit Socrate, j’ai une famille, j’ai trois fils, dont l’un est sorti de l’enfance et les deux autres ont encore besoin des secours de leur père ; je n’en ferai cependant paraître aucun pour vous attendrir, et ce n’est ni par mépris ni par orgueil, ces sentiments ne peuvent entrer dans le cœur de Socrate ; mais la gloire de ses juges, la sienne, celle de la république lui défendent de donner un tel exemple, à son âge surtout, et avec le nom qu’il porte ; car, dit-il, que ce nom soit mérité ou ne le soit pas, on est persuadé que Socrate est au-dessus des hommes ordinaires.
Les parties du corps qui sont regardées come le siège des passions et des sentimens intérieurs, se prènent pour les sentimens mêmes : c’est ainsi qu’on dit il a du coeur, c’est-à-dire, du courage. Observez que les anciens regardoient le coeur come le siège de la sagesse, de l’esprit, de l’adresse : ainsi (…) dans Plaute, ne veut pas dire come parmi nous, elle a du courage, mais elle a de l’esprit ; etc. […] Il est vrai que nous avons plusieurs exemples d’une semblable prosopopée ; mais il est mieux de n’en faire usage que dans les ocasions où il ne s’agit que d’amuser l’imagination, et non quand il faut toucher le coeur. […] Job dit dans le même sens, peut-être que mes enfans ont péché, et qu’ils ont beni Dieu dans leur coeur. […] Un mot est équivoque, lorsqu’il signifie des choses diférentes : come choeur, assemblée de plusieurs persones qui chantent ; coeur, partie intérieure des animaux : autel, table sur quoi l’on fait des sacrifices aux dieux ; hôtel, grande maison.
Lundi 14 janvier L’émotion de la bataille théâtrale, je la supporte très bien, excepté au théâtre ; là, mon moral n’est pas maître de mon organisme, je sentais hier à l’Odéon, mon cœur battre plus vite sous un plus gros volume. […] Je suis là-dedans avec le sentiment d’un cœur non douloureux, mais plus gros qu’ailleurs. […] Ils ont eu l’idée de me donner un dîner, de m’entourer un peu de la chaleur de leur affection, et ça m’a été une jouissance de cœur, de savoir que c’était Geffroy qui avait eu cette idée. […] Vendredi 12 avril Ce soir, je brûle les cheveux blancs de ma mère, des cheveux blonds de ma petite sœur Lili, des cheveux d’un blond d’ange… Oui, il faut songer à la profanation qui attend les reliques de cœur, laissées derrière eux par les célibataires. […] l’intéressante chasse à l’homme que doit être la guerre, pour un monsieur qui n’est pas un couillon, et qui n’a ni la colique, ni la migraine, ni le rhume, pour un monsieur bien portant… Et je pensais au milieu du nuage grisant, et de la canonnade vous faisant bravement battre le cœur, que la fumée qu’on est en train de détruire avec la nouvelle poudre, sera bientôt suivie par une découverte quelconque qui détruira le bruit excitant du canon, et qu’alors ce sera bien froid, et qu’il faudra être bien enragé pour se tuer, non seulement sans se voir, ce qui arrive aujourd’hui, mais encore sans s’entendre.
Il nous peignait aujourd’hui Fénéon, cet original né en Italie, et ayant l’aspect d’un Américain, un être intelligent, travaillant à se faire une tête, cherchant l’étonnement des gens par une parole axiomatique, une comédie de concentration intérieure, une série de petites actions et manifestations mystificatrices, — mais un homme de cœur, bon, sensible, appartenant tout entier aux excentriques, aux disgraciés, aux miséreux. […] Il laisse percer le désir de retourner en Orient, au Japon, me peignant le soulèvement de cœur qu’il a, en entrant dans une gare d’Europe devant les affiches Bobœuf, etc. […] Lui, il déclare avoir, à chaque concert qu’il donne, l’émotion anxieuse, maladive, de son tout premier concert, avec la préoccupation d’empêchements apportés à son exécution — et jusqu’à la dernière note — par les palpitations de son cœur, les contractions nerveuses de son avant-bras, la chaleur de la salle qui peut rendre les touches du piano humides, une raie du parquet, où peut glisser le pied de sa chaise. […] Mardi 11 décembre Dans un salon, ce qui donne de la vie, de la chaleur à une société, à défaut d’affections de cœur entre les gens, ce sont les affections cérébrales, nouées entre les communiants d’une même pensée, d’une même élaboration intellectuelle . […] La cheminée porte, entre deux flambeaux d’émail de Saxe, une petite pendule du xviiie siècle, et se trouve surmontée d’une glace dans un cadre en bois doré du plus riche contournement, terminé par un cœur flamboyant, traversé de deux flèches enguirlandées de fleurettes.
Dans ces derniers cas, comme, en français, pour les mots tête et cœur [ch. […] Chacun sait que les prières trop souvent récitées finissent par n’avoir plus aucun sens pour celui qui les prononce soit à haute voix, soit tout bas, soit mentalement ; il en est de même de tout ce que l’on sait trop bien par cœur : la plupart des lettrés ne sauraient réciter les débuts de l’Iliade, de l’Enéide, des Bucoliques, de certaines tragédies françaises, en leur donnant le sens qu’enfants ils ont eu tant de peine à découvrir et qu’ensuite ils possédaient si pleinement. […] C’est que la poésie est avant tout une œuvre sensible et une œuvre émouvante ; elle parle à l’oreille et au cœur plus qu’elle ne parle à l’esprit ; la part de conscience qui revient à la pensée est alors plus faible que jamais, et le contraste entre les mots qui signifient quelque chose et ceux qui ne signifient rien passe facilement inaperçu ; si le mot inconnu est un son brillant, si par sa sonorité propre il contribue pour sa part à renforcer le sentiment qu’éveille l’ensemble du morceau, l’esprit ne lui demande pas autre chose : les heures consacrées à la poésie ne sont pas des heures de réflexion. […] Phrèn, le diaphragme (la membrane qui sépare le cœur des poumons) peut en poésie être un équivalent du « cœur » ou au pluriel, le siège de l’intelligence, le cerveau, puis l’intelligence ; thumos désigne ce qui se trouve dans la poitrine, à la fois le siège des émotions et ces émotions violentes mêmes, qu’il s’agisse de l’ardeur, du courage, de la colère.
Il en dut coûter à son cœur généreux, mais ces tristes ombres le hantent. […] Son âme, en sa fleur, eut ses racines au cœur même du peuple et de la patrie. […] L’histoire avait pris pour elle, intactes, toutes les forces de ce cœur et de cet esprit. […] Une grande âme y souffre, un vigoureux et subtil esprit s’y affirme, un cœur délicat et attentif s’y révèle. […] Madame Sand, dans les siennes, explique son cœur et ses sens.
Les mémoires qu’on m’avait donnés étaient fort différents sur cela ; mais ils étaient assez semblables sur le nombre des édifices, qu’ils faisaient monter à trente-huit mille deux à trois cents ; savoir: vingt-neuf mille quatre cent soixante-neuf dans l’enceinte de la ville, et huit mille sept cent quatre-vingts au dehors, tout compris, les palais, les mosquées, les bains, les bazars, les caravansérais et les boutiques ; car les boutiques, surtout les grandes et bien fournies, sont au cœur de la ville, séparées des maisons où l’on demeure. […] Aussi n’avait-il témoigné, pendant tout le cours de sa maladie, qu’il s’y attendît ni qu’il en eût la moindre pensée ; et cette dernière nuit, il n’avait même rien ordonné touchant sa personne, sa maison ni son successeur: seulement, dans la force de son dernier accès, un peu avant d’expirer, se tournant du côté de l’appartement public, il avait prononcé avec quelque fureur ces paroles: « Je sais bien que vous m’avez empoisonné ; mais vous boirez votre bonne part du poison, puisque je laisse un fils qui, après ma mort, vous mangera à tous le cœur ! » Les médecins allèrent donc rendre visite au premier ministre ; et, sous prétexte de lui donner avis de la mort du roi et de lui déclarer la qualité des deux derniers médicaments qu’ils lui avaient fait prendre, ils entrèrent dans des matières plus importantes: ils parlèrent de l’élection, et lui remontrèrent que lui et tous les grands du conseil avaient bien sujet de prendre garde à eux ; que le prince, quelques moments avant sa mort, s’était plaint à haute voix que ses ministres lui avaient fait donner du poison ; mais qu’il laissait un fils qui leur mangerait le cœur ; que ces paroles ni ces plaintes ne pouvaient demeurer cachées au successeur ; que si l’on donnait la couronne à l’aîné, qui était déjà dans un âge assez avancé pour se rendre indépendant, et qui d’ailleurs avait l’esprit fort fier, il ne manquerait jamais de se servir de ce prétexte pour se défaire de tous les grands et de tous les ministres, dans la pensée de se rendre absolu par ce moyen et se mettre en état de faire de nouvelles créatures, vu principalement qu’il devait se ressentir du mauvais traitement que son père lui avait fait depuis deux ans, qu’il attribuerait toujours au conseil de ses ministres. […] Enfin, le premier ministre, soit qu’il fût plus ami de l’équité que les autres, comme cette manière d’agir noble et désintéressée qu’il avait toujours fait paraître auparavant le donnait à conjecturer, soit qu’il craignît qu’à son défaut quelque autre prît la parole, ce qui l’eût rendu criminel, puisqu’il lui appartenait de parler le premier, et qu’il le venait de faire lorsqu’il avait opiné si fort au désavantage de Sefie-Mirza ; ce premier ministre, dis-je, rompit le silence et commença à dire: « que véritablement, sur l’assurance infaillible que l’on aurait que le fils aîné d’Abas II ne serait plus en état de recevoir la couronne, l’assemblée pourrait, sans injustice, passer à l’élection du second fils ; mais, puisque maintenant Aga-Mubarik les assurait fortement que Sefie-Mirza n’avait perdu ni la vie, ni la vue, sans délibérer davantage, il le fallait élire: c’est pourquoi il lui donnait de tout son cœur sa voix et ses vœux, et protestait qu’il fallait tout de ce pas lui aller présenter le diadème et l’empire. » Les autres seigneurs, à ces paroles, perdirent courage, et n’eurent plus la force de soutenir bien ce qu’ils avaient commencé mal.
quelle vue sympathique, non systématique, sur tout ce qui tient au cœur de la nation et s’y rattache par quelque fibre profonde !
Ces races héroïques et musicales qui faisaient de si grandes choses, restaient sensibles jusqu’au plus fort de leurs passions publiques à la moindre note du poëte ou de l’orateur, et l’applaudissement soudain n’éclatait que là où la pensée tombait d’accord avec le nombre, là où l’oreille était satisfaite comme le cœur.
Toutefois, dans le développement de l’humanité, il a su voir la philosophie répondant à tous les doutes, résolvant toutes les questions contenues dans le grand problème de la destinée de l’homme, apaisant les tourments excités dans son cœur par l’incertitude sur son passé et son avenir.
En causant quelquefois avec des étrangers d’esprit nouvellement débarqués et tout affamés de nos illustres, cela va assez bien d’abord… Lamartine, Béranger… ce n’est pas trop de confusion… allons… Puis, tout d’un coup, à la troisième ou quatrième question, l’auteur chéri qu’ils ont au fond du cœur échappe… « Et Paul de Kock !
Les anciens sont plus forts en morale qu’en métaphysique ; l’étude des sciences exactes est nécessaire pour rectifier la métaphysique, tandis que la nature a placé dans le cœur de l’homme tout ce qui peut le conduire à la vertu.
S’il vous est arrivé jamais de concevoir l’idée d’un enfantillage, d’une équipée, d’une folie, pure fantaisie de l’esprit inquiet et désœuvré, et de passer à l’exécution sans autre raison que l’idée conçue, sans entraînement, sans plaisir, mais fatalement, sans pouvoir résister ; — si vous avez repoussé parfois de toutes les forces de votre volonté une tentation vive, si vous en avez triomphé, et si vous avez succombé à l’instant précis où la tentation semblait s’évanouir de l’âme, où l’apaisement des désirs tumultueux se faisait, où la volonté, sans ennemi, désarmait ; — si vous avez cru, après une émotion vive, ou un acte important, être transformé, régénéré, naître à une vie nouvelle, et si vous vous êtes attristé bientôt de vous sentir le même et de continuer l’ancienne vie ; — si par un mouvement de générosité spontanée ou d’affection vous avez pardonné une offense, et si vous avez par orgueil persisté dans le pardon en vous efforçant de l’exercer comme une vengeance ; — si vous avez pu remarquer que les bonnes actions dont on vous louait n’avaient pas toujours de très louables motifs, que la médiocrité continue dans le bien est moins aisée que la perfection d’un moment, et qu’un grand sacrifice s’accomplit mieux par orgueil qu’un petit devoir par conscience, qu’il coûte moins de donner que de rendre, qu’on aime mieux ses obligés que ses bienfaiteurs, et ses protégés que ses protecteurs ; — si vous avez trouvé que dans toute amitié il y a celle qui aime et celle qui est aimée, et que la réciprocité parfaite est rare, que beaucoup d’amitiés ont de tout autres causes que l’amitié, et sont des ligues d’intérêts, de vanité, d’antipathie, de coquetterie ; que les ressemblances d’humeur facilitent la camaraderie, et les différences l’intimité ; — si vous avez senti qu’un grand désir n’est guère satisfait sans désenchantement, et que le plaisir possédé n’atteint jamais le plaisir rêvé ; — si vous avez parfois, dans les plus vives émotions, au milieu des plus sincères douleurs, senti le plaisir d’être un personnage et de soutenir tous les regards du public ; — si vous avez parfois brouillé votre existence pour la conformer à un rêve, si vous avez souffert d’avoir voulu jouer dans la réalité le personnage que vous désiriez être, si vous avez voulu dramatiser vos affections, et mettre dans la paisible égalité de votre cœur les agitations des livres, si vous avez agrandi votre geste, mouillé votre voix, concerté vos attitudes, débité des phrases livresques, faussé votre sentiment, votre volonté, vos actes par l’imitation d’un idéal étranger et déraisonnable ; — si enfin vous avez pu noter que vous étiez parfois content de vous, indulgent aux autres, affectueux, gai, ou rude, sévère, jaloux, colère, mélancolique, sans savoir pourquoi, sans autre cause que l’état du temps et la hauteur du baromètre ; — si tout cela, et que d’autres choses encore !
Il sait les affinités mystérieuses par où lu nature éternelle répond à notre cœur fragile.
Et très longuement j’envisage, Pour savoir si j’ai le cœur fort, Pour m’assurer de mon courage, La tristesse de votre sort.
Quelques pages de vers écrites à l’instant du doute, nous révèlent le drame de son cœur et de son cerveau, et ce drame a été joué en chacun de nous par des acteurs muets qui sont la Crainte et l’Espoir, le généreux désir qui veut, la lâcheté qui hésite devant la vie, et notre faiblesse qui écoute et regarde.
Il y avait la délicate Sophie Harlay et Rachilde, déjà célèbre par son génie et ses légendes et qui cachait un cœur d’or et une sensibilité exquise sous des allures cinglantes et cavalières.
« Montrons, dans un prince admiré de tout l’univers, que ce qui fait les héros, ce qui porte la gloire du monde jusqu’au comble : valeur, magnanimité, bonté naturelle, voilà pour le cœur ; vivacité, pénétration, grandeur et sublimité de génie, voilà pour l’esprit ; ne seraient qu’une illusion, si la piété ne s’y était jointe, et enfin que la piété est le tout de l’homme. » 10.
Il convint donc à Molière de supposer que des femmes, qui joignaient à quelque instruction la pureté et la décence des mœurs, étaient nécessairement une transformation de ces précieuses qui professaient l’amour platonique, où l’on tient la pensée Du commerce les sens nette et débarrassée, Cette union des cœurs où les corps n’entrent pas.
Aussi, par les fruits de cette désolante doctrine, voit-on presque partout une dégradation générale ; les esprits retrécis, abattus ; les cœurs resserrés, desséchés, languissans ; les mœurs corrompues, dégradées, ou plutôt entiérement anéanties ; le génie national totalement défiguré & perverti.
De nos amours passés, de notre vive ardeur La tendre impression règne encore dans mon cœur.
On y trouve un écrivain dont les grands talens doivent faire oublier ses Lettres du chevalier d’Her… ses comédies peu théâtrales, son Apologie des tourbillons de Descartes & les Essais informes qu’il a faits dans les genres de Lucien & de Théocrite ; plus heureux dans ceux de Quinault & de Bacon, & surtout dans la géométrie ; faisant aimer les sciences les plus abstraites ; réunissant la subtilité du raisonnement à un stile qui lui est particulier & qui a fait beaucoup de mauvais imitateurs ; ayant plus d’esprit que de génie, & plus de délicatesse que d’invention ; placé sous deux règnes pour mériter l’estime de deux siècles, & par la variété de ses connoissances, & par la singularité de son ame toujours paisible, modérée, égale, inaccessible aux mouvemens inquiets ou violens, qui rendent les autres hommes malheureux ; fait, en un mot, pour les agrémens & les délices de la société, mais non pour être l’exemple des belles ames, des cœurs sensibles & reconnoissans.
Le systême de M. de Montcrif est opposé à celui de Despréaux, qui n’avoit rien tant à cœur que de voir ériger en auteurs classiques nos meilleurs écrivains, & qui vouloit que l’académie Françoise travaillât en conséquence, & s’occupât à les épurer de toutes les fautes de langage, à leur donner force de loi, à les empêcher de vieillir & de tomber journellement.
La fin de cet Apologue est au-dessus de tout éloge, tout le monde le sait par cœur.
Ils ont du moins quelque lueur de ce qu’ils peuvent valoir au juste, et ils s’apprétient eux-mêmes dans le fond de leur coeur, à peu près à la valeur qu’ils ont dans le monde.
Blessée dans la fibre de l’intérêt matériel, la seule fibre qui soit sensible et puisse jeter du sang chez les peuples quand ils sont gangrenés jusqu’au cœur, d’indifférente elle passe ennemie, et sa haine contre nous est aussi grande que la peur que nous lui faisons.
Au fond, nous ne croyons pas beaucoup plus aux hypocrisies de la pensée qu’aux hypocrisies du cœur.
il rit parfois d’elle sur son cœur.
Quand Hildebrand faisait tout trembler, quand on avait peur de son génie, Voigt publiait un livre courageux qui donnait du cœur aux poltrons.
Moraliste, d’ailleurs, parce qu’il était historien, et précisément parce qu’il était l’un et l’autre, il écrivit des romans, des histoires de cœur, un genre d’histoire pour lequel il n’y a pas d’École des Chartes, mais beaucoup d’autres écoles, dont l’enseignement est plus dur et qui n’ont pas été fondées par Guizot.
C’est celui où Julien se dit en parlant de la femme qu’il aime et en mettant un pistolet chargé dans sa poche : « Je la presserai dans mes bras ce soir, ou je me brûlerai la cervelle. » À chaque péril qui peut le démoraliser, à chaque fatigue qui tombe sur son âme, Vaublanc a mieux que le pistolet de Julien ; il a son mépris qu’il se parle et qu’il se tient toujours chargé sur le cœur. « Tu es un lâche si tu fais cela », dit-il, et il ne le fait pas, le noble homme ; et il continue de vivre dans des conditions d’existence intolérables, traqué, mourant de faim, persécuté de gîte en gîte, mais ne voulant pas émigrer et ne voulant pas que ses ennemis qui le poursuivent pour le jeter à l’échafaud, aient plus d’esprit que lui en le prenant !
Le descendant des fidèles husbands anglais devait se révolter contre les inventions de l’Allemand sans cœur, qui avait, comme Rousseau, épousé sa servante.
Il est comme Alceste : Et je ne cache point ce que j’ai sur le cœur !
Avant de créer sa gazette, il avait innové en médecine au point de s’attirer déjà beaucoup d’inimitiés, qui éclatèrent plus tard, après son succès comme gazetier, et parmi lesquelles brille au premier rang celle du fameux et violent Guy Patin, doué plus que personne de cette force de haine corporative qui semble avoir plusieurs cœurs pour mieux détester… Renaudot, qui était chimiste, avait introduit la chimie en médecine, et peut-être ceux qui sont friands de ces rapprochements historiques en feront-ils un jour comme un précurseur de Hahnemann.
L’Ange prisonnier de la poésie, la sainte Hostie du Spielberg, toutes ces vignettes idolâtres, tous ces romanesques culs-de-lampe qui font rêver les cœurs candides, n’existeront plus, et qui sait ?
L’abbé Galiani fit les délices d’une société charmante qui les lui rendit, et quand, par suite d’une indiscrétion diplomatique, car ce pétulant intellectuel, cette tête à feu et à fusées, ne pouvait pas être la tirelire à serrure des petits secrets politiques qu’il faut garder, il fut forcé de quitter cette société qui était devenue la patrie de son esprit, il la quitta comme on quitte une maîtresse aimée, et la Correspondance que voici atteste à chaque page ce sentiment presque élégiaque dans une nature si peu tournée à l’élégie, mais dont l’esprit souffre de regret comme un cœur !
Or c’est précisément ce détachement, cet isolement de tout système de philosophie, qui fait le danger de cette morale, écrite seulement dans nos cœurs, et peu importe par quelle main !
L’Ange prisonnier de la poésie, la sainte Hostie du Spielberg, toutes ces vignettes idolâtres, tous ces romanesques culs-de-lampe qui font rêver les cœurs candides, n’existeront plus, et qui sait ?
ou cela tient-il à l’essence éternelle des choses, qui ferait de l’Arabie une terre condamnée et donnerait ce déshonorant soufflet au Christianisme de n’avoir pas la force de sa vérité et de se vanter, comme l’erreur se vante, quand il affirme que, de toutes les religions de la terre, il est, en raison de sa vérité même, incomparablement la plus puissante sur les esprits et sur les cœurs ?
Et à quels spectacles inférieurs faut-il désormais nous attendre, car il n’y a que des spectacles dans ces vers sans pensée et sans cœur ?
Et ailleurs dans la même pièce : Ton amour inconstant flotte sans préférence Du brun valet de pique au blond valet de cœur !
Seulement l’originalité et le sens de ce petit roman, digne d’être publié à part, ne sont pas dans la passion criminelle du pasteur protestant et dans les détails de sa chute ; ils sont dans la situation de cet homme supérieur, dont le cœur est dévoré, les sens enivrés, mais dont, malgré ces tumultes, la haute raison touche au génie, et qui succombe, entraîné par la nature humaine, parce que son Église, à lui, ne l’a pas gardé, en faisant descendre dans sa vie la force de l’irrévocable !
On sait combien ce projet était à cœur au roi et à son ministre Sully.
C’est lui qui fit cette fameuse réponse aux chefs de la ligue : Mon âme est à Dieu, mon cœur est au roi, mon corps au pouvoir des méchants.
Aristote comprit la justice, reine des vertus, qui habite dans le cœur du héros, parce qu’il avait vu la justice légale, qui habite dans l’âme du législateur et de l’homme d’état, commander à la prudence dans le sénat, au courage dans les armées, à la tempérance dans les fêtes, à la justice particulière, tantôt commutative, comme au forum, tantôt distributive, comme au trésor public, ærarium [où les impôts répartis équitablement donnent des droits proportionnels aux honneurs].
Cependant il étoit plein de vertus & de religion : Mon dieu, s’écrioit-il quelquefois, on a beau dire que je ne crois rien : je vous aime de tout mon cœur. […] Les dominicains surtout avoient à cœur de mettre à profit la dispersion des membres de l’université. […] Aussitôt, des cinq cicatrices de ses sacrées plaies, j’ai vu tomber sur moi cinq rayons de sang, qui tendoient à mes mains, à mes pieds & à mon cœur ». […] Réunis dans cette solitude à la voix de la grace efficace, ils n’eurent qu’un cœur & qu’une ame, qu’un cri contre les jésuites. […] Le cœur en saignoit à des femmes de la première distinction.
Ou bien, dans une situation moins marquée, la mention d’un mot, ou d’un nom, fait naître des émotions vives ou flottantes dans le cœur d’un personnage (souvenirs, espoirs, craintes) ; et de nouveau c’est la musique qui nous révèle ces émotions passagères. […] L’amour a fiancé leurs cœurs, Au souffle des zéphyrs vainqueurs. (90) Alors adieu Walhall, délices infinies, Adieu vous tous, héros, tombés dans les combats, Adieu vierges du ciel, divines Valkyries, Auprès des Dieux, je ne te suivrai pas ! […] Le Christ est rétabli symboliquement en son intégrité au cœur d’Amfortas et des chevaliers du Graal.
Que ce large état de paix soit le partage de quelques rares et gigantesques penseurs, on peut l’affirmer encore, en entendant l’immense lamentation qu’exhale le chœur des beaux livres « Pour les délicatesses, les mélancolies exquises d’une œuvre, dit M. de Goncourt, les fantaisies rares et délicieuses sur la corde vibrante de l’Aine et du cœur, faut-il un coin maladif dans l’artiste ? […] La littérature parut se faire immorale en ce qu’elle exalta les actes et les conduites où la raison et les convenances cédaient aux inspirations de la sensibilité, en ce qu’elle plaça le mérite non plus dans la condition sociale acquise ou maintenue, dans le tact, dans l’honnêteté, dans l’honneur commercial ou mondain, mais dans la pureté et la noblesse du cœur, en ce qu’elle revendiqua pour les simples, pour les pauvres, pour les souillés la gloire de pouvoir être grands, bons dévoués, ardents et purs. […] La vie de société, telle qu’on l’entend aujourd’hui, développe simultanément, à mesure quelle avance, ces deux conditions, unissant les hommes par leurs intérêts seuls et les risques qu’ils courent, les dispensant de s’unir de cœur, par suite même de la perfection actuelle des institutions légales, policières, de politesse, qui, permettant de vivre sans que l’on se heurte, empêchent aussi que l’on se touche.
Le mot, dans ses diverses acceptions, ne s’est vu accueilli que plus tard ; il n’est entré au cœur de la langue que par voie un peu détournée et sous le couvert de la peinture. […] Ce grand orateur, en son temps, savait fort bien se moquer de ces petites bouches et de ces esprits pusillanimes qui, à force de craindre la moindre ambiguïté dans le langage, en venaient à ne plus même oser articuler leur nom ; et M. de La Mothe ajoute dans un sentiment vigoureux et mâle : « Ceux dont le génie n’a rien de plus à cœur que cet examen scrupuleux de paroles, et j’ose dire de syllabes, ne sont pas pour réussir noblement aux choses sérieuses, ni pour arriver jamais à la magnificence des pensées.
Devoir de cette trinité humaine : le père, la mère, les enfants, de se grouper dans une unité défensive de tendresse et de mutualité sainte qu’on appelle famille, première patrie des cœurs qui impose le premier patriotisme du sang, et qui sanctifie la source de l’âme comme la source de la population. […] Elle entreprenait donc, conformément à cette idée, de faire luire de nouveau cette sainteté primitive et naturelle dans les cœurs de tous les hommes.
. — Le Chemin du cœur, contes (1895) […] … tu n’as pas le cœur d’une épouse chrétienne, Tu ne sais pas aimer comme aime une Silva.
Ouvriers habiles, gens de cœur, ces écrivains n’expriment rien mollement ; tous savent donner à leurs pensées un tour vif et hardi, ceux qui ont éprouvé les passions de leur époque, comme ceux qui n’en ont senti que la curiosité ardente pour tous les objets de la connaissance humaine. […] Chemin faisant il parle à chacun selon ses besoins, s’aidant pour les persuader de tout ce qu’ils voient et de tout ce qu’ils aiment, tirant ses comparaisons des usages de leur vie, de leurs habitudes domestiques, de leurs souvenirs, rendant les enseignements sensibles en y intéressant leur imagination et leur cœur.
Le train fila longuement à travers un paysage de plaine qu’ensoleillait une magnifique journée de printemps et qui me parut délicieux — car depuis cinq mois je n’avais pas quitté les rues grises de Berlin, et je sentais mon cœur se dilater dans le libre horizon. […] Sens ma poitrine, aussi, comme elle brûle ; le clair Feu me prend le cœur : l’enlacer, être par lui embrassée, dans la très puissante Volupté être à lui mariée… Heiaïaho !
Le métaphysicien dira : cela s’explique par un principe vital : le battement du pendule ressemble à celui du cœur, les aiguilles marchent comme des antennes, l’heure qui sonne ressemble à un cri de colère et de douleur ; et il se perdra en explications ingénieuses de cette sorte. […] Il est de cœur avec les hommes de ces vieux âges, il les admire, il ne pense pas sans émotion à cet essor de la curiosité humaine, hardie, infatigable, libre pour la première fois.
Après tant de grâces maigres, tant de petites figures tristes, préoccupées, avec des nuages de saisie sur le front, toujours songeuses et enfoncées dans l’enfantement de la carotte ; après tous ces bagous de seconde main, ces chanterelles de perroquets, cette pauvre misérable langue argotique et malsaine, piquée dans les miettes de l’atelier et du Tintamarre ; après ces petites créatures grinchues et susceptibles, cette santé de peuple, cette bonne humeur de peuple, cette langue de peuple, cette force, cette cordialité, cette exubérance de contentement épanoui et dru, ce cœur qui apparaît là-dedans, avec de grosses formes et une brutalité attendrie : tout en cette femme m’agrée comme une solide et simple nourriture de ferme, après les dîners de gargotes à trente-deux sous. […] * * * — La compagne, dans l’antiquité, n’était ni une mère, ni une sœur, ni une consolation, ni une amie de cœur.
La science, dit un écrivain déjà cité, peut bien éclairer le monde, mais elle laisse la nuit dans les cœurs ; c’est au cœur lui-même à se faire sa propre lumière.
La bouche garde le silence Pour écouter parler le cœur34 ; sa parole intérieure reste calme ; elle ne peut s’élever jusqu’à l’inspiration ; si, dans cet état, il se souvient de la Muse et de leurs amours d’autrefois, son esprit lui représente en vain tous les motifs poétiques qui devraient éveiller son génie ; aucun n’a le pouvoir de l’arracher à lui-même ; il ne ressent ni colère durable ni enthousiasme profond ; la Muse est pourtant descendue du ciel ; elle lui a parlé ; mais il a eu peine à la reconnaître ; ni son appel ni son baiser n’ont pu réchauffer un cœur glacé ; il refuse de s’envoler avec elle dans les « mondes inconnus » qu’en des temps plus heureux ils ont tant de fois parcourus ensemble. […] /La bouche garde le silence/ Pour écouter parler le cœur. » 35.
La Fontaine n’a pas beaucoup aimé le chien ; en général, il lui donne un rôle de serviteur zélé, un peu servile, un peu courtisan et pas trop sympathique ; mais la tendresse de La Fontaine pour les animaux s’est étendue, en quelque sorte, et a dépassé les limites qu’il observait lui-même, et peut-être que Lamartine, malgré tout son génie et tout son cœur, n’aurait pas fait, sans La Fontaine, ces admirables vers sur le chien, compagnon et seul ami de l’homme : Ô mon pauvre Fido, quand, mes yeux sur les tiens, Le silence comprend nos muets entretiens. […] Ce qui fait notre infériorité, apparente sans doute, vis-à-vis des animaux, c’est que nous avons la parole, et dès lors toutes les sottises que nous pensons, nous les disons de tout notre cœur et elles paraissent.
L’artiste n’est pas un savant qui recherche les causes ; sa tâche à lui c’est de peindre les effets, de faire jaillir de son œuvre l’émotion, douce ou terrible, qui tour à tour nous prend en face de la vie elle-même, de remuer nos cœurs, de nous attendrir, de nous faire sourire ou frémir. […] Delaplanche, je sens qu’il y a là une façon saine et robuste de regarder la nature ; il me semble pressentir là comme un art nouveau, plein d’espérances et de promesses, original sans renier les traditions, déjà grand et qui doit grandir encore ; celui-là fortifie les cœurs et les intelligences.
Les vagues émotions religieuses et les rêveries de cœur qu’ils savaient communiquer aux âmes, et qui étaient comme une maladie sociale de ces dernières années, leur conciliaient bien des suffrages de jeunes gens et de femmes que la couleur féodale ou monarchique, isolée du reste, n’aurait pu séduire.
Je crois que la morale est tantôt l’amour et tantôt l’acceptation des liens parfois délicieux et parfois gênants qui nous enchaînent, soit par le cœur, soit par un intérêt supérieur où le nôtre se confond, à d’autres que nous et aux groupes de plus en plus larges dont nous faisons partie.
Ils y renonceraient, de gaîté de cœur ?
Balzac pense qu’à l’aménité, ils joignaient cette grandeur « dont il leur était impossible de se défaire, parce qu’elle tenait à leur cœur et à leur esprit, parce qu’elle avait racine en eux et n’était pas appliquée sur leur fortune.
Puisqu'il paroît si disposé à profiter des leçons qu'on lui donne, nous l'inviterons à porter les derniers coups au vice radical, qui sera toujours l'ennemi de ses talens, c'est-à-dire, à se défaire de cette morgue philosophique dont il ne paroît pas encore sentir assez les travers ; à se persuader qu'il ne saura jamais bien écrire, que quand sa diction sera pleinement modeste & naturelle ; que ce n'est pas être lumineux, que de s'attacher à des pensées plus compliquées que nettes & animées ; que ce n'est pas être élégant, que d'employer des tours pénibles & des expressions étrangeres aux idées ; que c'est être bien loin de l'éloquence, que de n'avoir que cette espece de sentiment qui naît de l'imagination, & non celui dont la source est dans le cœur.
Elle n’a pas le regard qu’on rabat du ciel sur les choses de la vie et qui, tombant de si haut, va au fond… C’est une femme du monde, qui peint une société dont les surfaces l’attirent, bien plus qu’un romancier moraliste qui prend les passions et les jauge partout où elles sont… Mais, si elle n’est pas, si elle ne peut pas être le moraliste à la façon des grands romanciers qui savent l’ordre le cœur humain pour tirer la morale du sang, des larmes et de la fange qu’ils en font sortir, elle est toujours et partout la plume pure que j’ai dit qu’elle était.
Un écrivain sérieux aurait d’abord examiné ce qu’il y a de semblable et de différent entre Paris, ce caravansérail du monde et de la province, ce home de la France, — comme diraient les Anglais, — entre Paris, le vaste déversoir de toutes les vagues sociales qui viennent s’y engloutir avec leurs impuretés et leurs écumes, et la province, cette multitude de baies où le flot se circonscrit et séjourne ; — Paris, patrie anonyme de tous les hommes qui ont brisé le lien de la famille et qui ont quitté la province pour en éviter le regard qui tombait de trop près sur eux, et la province, cette vraie patrie de la famille française qui en garde plus austèrement l’honneur et les traditions ; — entre Paris enfin, spirituel, mobile, éloquent, au cœur un peu trop tendre aux révolutions, qui s’habille, babille, se déshabille et brille… de cet éclat de strass qui exagère les feux du diamant, et la province, perle sans rayon, mais d’un bon sens si tranquille et pourtant d’une action si puissante quand il s’agit de dire des mots décisifs, la province, qui a toujours répondu par des empires — parfaitement français — aux républiques parisiennes.
Cela n’a point cette note insupportable de l’originalité qui déchire l’oreille de l’amour-propre, — cette oreille, délicate et longue, qu’il faut ménager, — et cela ne tire pas non plus brusquement les gens qui les aiment de la béatitude des idées communes… Prévost-Paradol ne sonne point du cor de Roland, en littérature ; de ce cor qu’on n’entend pas toujours, malgré sa puissance, qui meurt sans écho et qui brise les cœurs épuisés… Il joue, lui, d’un instrument plus commode.
Taine, que le critique ajoute à son âme naturelle et nationale cinq à six âmes artificielles ou acquises, et que sa sympathie flexible… (rappelez-vous le fameux vers d’Auguste Barbier, qui ne le disait pas de la Critique) : Ouvrant à tout venant et sa jambe et son cœur, l’introduise en des sentiments éteints ou étrangers… « Le meilleur fruit de la Critique — dit encore l’auteur du Carlyle — est de nous déprendre de nous-mêmes, de nous contraindre à faire la part du milieu où nous sommes plongés, de nous enseigner à démêler les objets eux-mêmes à travers les apparences passagères dont notre caractère et notre siècle ne manquent jamais de les revêtir… » Telles sont les propres paroles de M.
Les uns, par exemple, à la langue, que Villon a maniée en maître créateur, car il la créait en la maniant, cette langue qui n’était qu’à l’état de larve quand il écrivait ; les autres, à telle ou telle spéciale inspiration qui prend le cœur ou la pensée.
Les favoris ou les favorites ont un règne qui dure davantage, parce qu’ils établissent leur empire non sur les fougues éphémères des sens ou du cœur, mais sur les faiblesses, à poste fixe, de l’esprit ou du caractère.
Qui n’est qu’une mère n’est qu’une sentimentalité sublime, et il faut plus que des sentiments et des instincts pour élever un homme ; il faut de ces toutes-puissantes notions que nous ne trouvons pas uniquement dans les divinations de nos cœurs.
Le Christianisme avait pris le monde par la tête et par le cœur !
Pour moi, cet esprit qui ne s’est jamais interrompu dans ses destructions depuis qu’il a paru dans l’Histoire de France, s’y est glissé le jour où le principe religieux sur lequel était fondée une monarchie séculaire, a laissé s’introduire en elle l’effroyable termite qui n’a terminé sa besogne qu’en 1789, et qui n’a troué la cale du navire qu’après avoir troué le cœur de ceux qui auraient dû la préserver et la défendre.
Cela n’est pas rare chez ces bouffons quand ils ont du cœur, et il voulait l’apprendre à son fils d’adoption pour lui en ôter l’horrible surprise.
Mais elles doivent l’être comme l’expression d’un homme qui a une âme charmante, capable de faire oublier, en lisant ses lettres, les erreurs et les débilités de son esprit, — et c’est ici que la Critique va prendre son cœur à deux mains pour dire toute la vérité sur un livre qui lui a donné tant de plaisir… Doudan est, en effet, sur bien des points, un débile et un erroné.
Les honnêtes gens ont eu horreur et dégoût, mais l’horreur n’a pas monté plus haut que le cœur.
En 1810, le général Lamarre fut tué en défendant le Môle contre Christophe, et Soulouque, qui était déjà devenu quelque chose comme l’aide de camp de son maître, fut chargé de porter son cœur à Pétion.
… Il a été, je le reconnais, plus explicite sur la question des enterrements vivants, qu’il a exposée et qu’il a cherché à résoudre ; mais, franchement, était-ce un rapport, limpide comme l’eau, je le veux bien, mais froid comme elle, qui pouvait suffire pour traiter cette effrayante question qui convulse jusqu’à la pensée, et qu’à force de talent, d’émotion, d’éloquence, de griffe de feu dans l’éloquence, il faudrait, dans l’intérêt de sa solution absolue, attacher, comme une flamme, à nos esprits et à nos cœurs !!
Seulement, elle ne fut pas de force à monter avec le poète jusqu’à la hauteur de ses Harmonies, et comme, plus tard, il devait rester au plafond où il avait voulu siéger seul, le poète resta seul aussi dans son ciel… Ce qu’il y avait d’amour humain dans ses Méditations avait saisi toutes les âmes et touché tous les cœurs, mais l’amour de Dieu est d’une grandeur et d’une beauté plus incompréhensibles à la majorité des hommes.
Il n’a point, lui, l’immoralité de ces réalistes impassibles, sans tête et sans cœur, qui se font une gloire de ne rien sentir de ce qu’ils décrivent, et, qu’on me pardonne un tel mot qui dit exactement l’abjection de leur procédé, qui ne sont rien de plus que les mouchards de la nature et de toute réalité, quelle qu’elle soit… Devant les monstruosités en ronde-bosse si extraordinairement entassées dans son ouvrage, M.
Cet homme est mort le cœur brisé par l’angoisse, comme Lamennais.
On a bientôt fait cette analyse : un moraliste, un romancier, une tête d’observateur, qui épouse une actrice comme un Jocrisse amoureux, et qui, fou d’ennui, le devient positivement et physiologiquement, parce qu’un de ses amis en journalisme, traître et voleur, fait autographier les lettres confidentielles qu’il écrivait à sa femme avant de l’épouser, et dans lesquelles il se lâchait de plaisanteries contre les hommes qu’il estimait le plus et pressait le plus sur son cœur, — c’est là tout le roman, étreint en quelques mots, de ces Hommes de Lettres, qu’il vaudrait mieux appeler Les Intimes littéraires.
Et si ce n’était pas une vraie femme de chambre (comme je le voudrais) qui eût écrit ces Mémoires, timbrés de sa qualité, de son impayable qualité, et qui, pour cela, semblaient nous promettre des révélations auxquelles le génie lui-même ne pourrait pas se substituer, je me disais que c’était au moins un esprit hardi, pénétrant, riche en expériences de tout genre, amères ou bouffonnes, consommé dans l’observation de la vie, cette étude qui nous mange le cœur, pour vouloir jouer ce difficile rôle de femme de chambre qui veut tout dire dans un livre, que ce livre soit, d’ailleurs, d’un moraliste de fonction, ou d’un romancier !
misérables intérêts, sources de tant de querelles entre des héros, vous ne prévalûtes jamais dans le cœur de celui-ci aux mouvements de son zèle ; il promit son bras, ses conseils, sa vie, s’il était besoin, mais sous le même général qui commandait déjà l’armée ; il eut beau cependant se dépouiller de ses titres, il les retrouva dans l’estime du général, dans le respect des officiers, et dans l’affection des soldats.
L’homme, esclave pour le présent, est du moins libre pour le passé ; il peut aimer ou haïr, approuver ou flétrir d’après les lois et son cœur.
Ce n’est pas à trente ans qu’il faut commencer à l’apprendre, à moins que ce ne soit pour la simple curiosité ; parce qu’à trente ans l’esprit et le cœur sont ce qu’ils seront pour toute la vie. […] Ce style académique ou prétendu tel est encore celui de la plupart de nos prédicateurs, du moins de plusieurs de ceux qui ont quelque réputation ; n’ayant pas assez de génie pour présenter d’une manière frappante, et cependant naturelle, les vérités connues qu’ils doivent annoncer, ils croient les orner par un style affecté et ridicule, qui fait ressembler leurs sermons, non à l’épanchement d’un cœur pénétré de ce qu’il doit inspirer aux autres, mais à une espèce de représentation ennuyeuse et monotone, où l’acteur s’applaudit sans être écouté. Ces fades harangueurs peuvent se convaincre par la lecture réfléchie des sermons de Massillon, surtout de ceux qu’on appelle le Petit-Carême, combien la véritable éloquence de la chaire est opposée à l’affectation du style ; nous ne citerons ici que le sermon qui a pour titre de l’Humanité des Grands, modèle le plus parfait que nous connaissions en ce genre ; discours plein de vérité, de simplicité et de noblesse, que les princes devraient lire sans cesse pour se former le cœur, et les orateurs chrétiens pour se former le goût. […] Dans ce discours oratoire, on se borne à louer en général les talents, l’esprit, et même, si on le juge à propos, les qualités du cœur de celui à qui l’on succède, sans entrer dans aucun détail sur les circonstances de sa vie. […] Ces réflexions, séparées des faits ou entremêlées avec eux, auront pour objet le caractère d’esprit de l’auteur, l’espèce et le degré de ses talents, de ses lumières et de ses connaissances, le contraste ou l’accord de ses écrits et de ses mœurs, de son cœur et de son esprit, et surtout le caractère de ses ouvrages, leur degré de mérite, ce qu’ils renferment de neuf ou de singulier, le point de perfection ou l’académicien avait trouvé la matière qu’il a traitée, et le point de perfection où il l’a laissée ; en un mot, l’analyse raisonnée des écrits ; car c’est aux ouvrages qu’il faut principalement s’attacher dans un éloge académique : se borner à peindre la personne, même avec les couleurs les plus avantageuses, ce serait faire une satire indirecte de l’auteur et de sa compagnie ; ce serait supposer que l’académicien était sans talents, et qu’il n’a été reçu qu’à titre d’honnête homme, titre très estimable pour la société, mais insuffisant pour une compagnie littéraire.
« Pour le bien comprendre et pour deviner dans le poëte tout l’homme qui en est sorti, il faut lire le passage de Novissima verba : Aux faux biens d’ici-bas nous dévouons nos cœurs,… et les Préludes : Non, non, brise à jamais cette corde amollie… Ce qu’il disait là et ce qu’il chantait encore, il l’a fait depuis. » « — J’ai fait autrefois ce vers que je crois très-juste : Lamartine ignorant, qui ne sait que son âme.
Il me semble qu’il introduirait fort bien le livre dans le monde, et qu’il ne ressemblerait point du tout à ces fades avis d’éditeur fabriqués par l’auteur même, et qui font mal au cœur.
Pensées d’un humoriste ou Mosaïque extraite de la Poétique de Jean-Paul Or, ces vapeurs dont je vous parle, venant à passer du côté gauche où est le foie, au côté droit où est le cœur, il se trouve que le poumon, que nous appelons en latin armyan, ayant communication avec le cerveau, que nous nommons en grec nasmus, par le moyen de la veine cave que nous appelons en hébreu cubile, rencontre en son chemin lesdites vapeurs qui remplissent les ventricules de l’omoplate ; et, parce que lesdites vapeurs ont une certaine malignité, qui est causée par l’âcreté des humeurs engendrées dans la concavité du diaphragme, il arrive que ces vapeurs… ossabandus, nequeis, nequer, potarinum, quipsa milus.
Lettre du comte de Saint-Germain (pendant la guerre de Sept Ans). « La misère du soldat est si grande, qu’elle fait saigner le cœur ; il passe ses jours dans un état abject et méprisé, il vit comme un chien enchaîné qu’on destine au combat. » 783.
S’il suit la réalité, il risque d’être insignifiant, plat, superficiel : s’il tire les idées et les sentiments du fond des cœurs, il devient symbolique, froid, invraisemblable.
Il chante la paix rendue à la France, l’ordre restauré avec la monarchie, la haine de la guerre religieuse et civile : choses qui lui tiennent au cœur, mais à tout le monde avec lui.
Et ce n’est point là, comme vous le pourriez croire, un simple accès de fièvre : car, d’abord, il appelle couramment son père dans le reste du journal : « mon bâtard de père » ; puis, relisant vingt ans après la page que j’ai citée, il ajoute en marge : « Ne rougis-tu point, au fond du cœur, en lisant ceci en 1835 ?
Rabelais, cet impitoyable génie du rire à outrance, qui aurait eu tout s’il avait eu du cœur !
Il me semble souvent que j’ai au fond du cœur une ville d’Is qui sonne encore des cloches obstinées à convoquer aux offices sacrés des fidèles qui n’entendent plus.
Cette circonstance ne fait aucun tort à l’historien, à ce peintre du cœur humain ; elle ajoute à l’horreur du tableau que forment tant d’innocences victimes & l’ame attroce du tyran qui les voit expirer.
Cette femme, qui n’était pas un bas-bleu, quoiqu’elle ait écrit, cette femme qui heureusement pour elle n’était qu’une femme et non pas un homme, comme le disaient les hommes, lesquels en disant cette sottise, croyaient lui faire un compliment, et à eux aussi, cette vraie femme de Mme de Staël, d’un cœur si passionné et si sincère et d’une sagacité si enflammée, est morte sans avoir révélé tout ce qu’elle avait, sans doute, vu dans l’âme et dans l’esprit de lord Byron.
C’est le mutisme du cœur.
Mais cette vue, qui lui communiquerait de sa grandeur et l’envelopperait d’innocence, cette vue qui, du moins, serait une excuse à balbutier pour lui devant l’Histoire, on est obligé d’y renoncer dès qu’on étudie sérieusement le règne de ce malheureux prince, dont le pouvoir était construit sur la plus forte et la plus pure notion que les hommes aient eue jamais d’un roi, et qui aurait tout pu, jusqu’au dernier moment, s’il n’avait pas eu, dans le fond du cœur même, le honteux petit grain de sable qui, placé ailleurs, tua Cromwell.
Il y a, parmi ceux qui écrivent l’Histoire, des imaginations qui vont de préférence aux désastres, aux revers, à tout ce pathétique qui éveille plus que la pensée dans la tête, mais la pitié, c’est-à-dire une vertu, dans les cœurs.
Une leçon donnée en termes nets, qui pourraient bien faire lever de dégoût, dans sa poitrine virginale, ce jeune cœur divin de fille innocente.
Plus heureux que le conquérant par les armes, le conquérant par la plume s’était établi, fortifié et étendu dans sa conquête… Et encore à cette mauvaise heure, quand nous avons l’épée de l’Allemagne à moitié dans le cœur, d’où nous ne pouvons l’arracher, Gœthe reste triomphant dans nos esprits, dont nous ne pouvons l’arracher davantage.
Le côté sérieux et terrible de cet entassement de babioles, de sottises et d’inanités, c’est l’intense mépris qu’il fait jaillir des cœurs et dont tout le monde est éclaboussé !
Et cela est si vrai, que, sans ce bonapartisme de conscience qu’il ne put s’arracher du cœur, on pourrait défier d’expliquer sa vie.
Excepté l’affection maternelle, dont elle fut victime, elle n’eut jamais que deux sentiments, et les plus mâles que pût éprouver un cœur de femme, deux amitiés pour deux hommes avancés dans la vie : l’une pour son oncle, le bailly de Fronlay, et l’autre pour Sénac de Meilhan, à qui sont adressées les Lettres.
Comme tous les ouvrages qui doivent nous montrer en dedans et sous la peau, intus et in cute, un homme célèbre, comme tout ce qui nous entr’ouvre son cœur et son cerveau et nous livre ses procédés, c’est-à-dire les points d’appui et les leviers de sa vie intellectuelle, cette publication est en soi très intéressante et très utile.
Ce drame, où, sous l’idolâtrie de l’or, Dieu lui-même est en cause et remplacé dans le cœur de l’homme par du métal, est, d’effet, beau et pathétique comme la Bible, et, d’analyse, — car la Bible n’analyse pas, — jamais livre moderne n’est allé aussi loin.
Ici je viens pleurer sur la roche d’Onelle De mon premier amour l’illusion cruelle ; Ici mon cœur souffrant en pleurs vient s’épancher… Mes pleurs vont s’amasser dans le creux du rocher… Si vous passez ici, colombes passagères, Gardez-vous de ces eaux : les larmes sont amères ; parce que de Guérin a quelques-uns de ces vers finis parmi les vers non finis, mais charmants dans leur ébauche, qu’il nous a laissés, il n’est pas pour cela le jumeau posthume d’André Chénier dans un genre différent, et l’appeler l’André Chénier du panthéisme est même une expression contradictoire.
Telle n’était pas la coutume de nos pères, qui mettaient le cœur à gauche et les Introductions à leur place.
Excepté le bohème (Nargaud), qui est le justicier en ce roman, moral à sa manière ; excepté ce paroxyste, comme il l’appelle, dont la prose est… les vers de Richepin auxquels il a enlevé la rime ; excepté deux ou trois scènes d’amour où se retrouve un peu de l’ancien Richepin des Caresses, le roman de Madame André n’a que le spiritualisme de l’analyse, qui regarde surtout dans le cœur et qui en épingle les ténuités.
Alexandre Sévère chanta les vertus qu’il avait dans son cœur, et célébra en vers les empereurs les plus humains qui l’avaient précédé sur le trône.
Ne pouvant encore s’autoriser contre l’usage, il fit connaître à ses amis qu’il allait à l’armée faire sa cour qu’il lui coûtait moins d’exposer sa vie que de dissimuler ses sentiments, et qu’il n’achèterait jamais ni de faveurs, ni de fortune aux dépens de sa probité. » Je pourrais encore citer d’autres endroits qui ont une beauté réelle ; mais le discours en général est au-dessous de son sujet ; on y trouve plus d’esprit que de force et de mouvement ; on s’attendait du moins à trouver quelques idées vraiment éloquentes sur l’éducation d’un dauphin, sur la nécessité de former une âme d’où peut naître un jour le bonheur et la gloire d’une nation ; sur l’art d’y faire germer les passions utiles, d’y étouffer les passions dangereuses, de lui inspirer de la sensibilité sans faiblesse, de la justice sans dureté, de l’élévation sans orgueil, de tirer parti de l’orgueil même quand il est né, et d’en faire un instrument de grandeur ; sur l’art de créer une morale à un jeune prince et de lui apprendre à rougir ; sur l’art de graver dans son cœur ces trois mots, Dieu, l’univers et la postérité, pour que ces mots lui servent de frein quand il aura le malheur de pouvoir tout ; sur l’art de faire disparaître l’intervalle qui est entre les hommes ; de lui montrer à côté de l’inégalité de pouvoir, l’humiliante égalité d’imperfection et de faiblesse ; de l’instruire par ses erreurs, par ses besoins, par ses douleurs même ; de lui faire sentir la main de la nature qui le rabaisse et le tire vers les autres hommes, tandis que l’orgueil fait effort pour le relever et l’agrandir ; sur l’art de le rendre compatissant au milieu de tout ce qui étouffe la pitié, de transporter dans son âme des maux que ses sens n’éprouveront point, de suppléer au malheur qu’il aura de ne jamais sentir l’infortune ; de l’accoutumer à lier toujours ensemble l’idée du faste qui se montre, avec l’idée de la misère et de la honte qui sont au-delà et qui se cachent ; enfin, sur l’art plus difficile encore de fortifier toutes ces leçons contre le spectacle habituel de la grandeur, contre les hommages et des serviteurs et des courtisans, c’est-à-dire contre la bassesse muette et la bassesse plus dangereuse encore qui flatte.
« Mon cœur rempli de toi, dit-il, a cherché cette consolation, sans prévoir comment ce discours sera reçu par la malignité humaine, qui, à la vérité, épargne d’ordinaire les morts, mais qui quelquefois aussi insulte à leurs cendres, quand c’est un prétexte de plus de déchirer les vivants. » Cet éloge funèbre doit être mis au rang des ouvrages éloquents de notre langue.
La noblesse a été frappée au cœur. […] Il ne s’agit plus de grammaire, de rhétorique, et on n’a plus seulement sous les yeux un paquet de papier imprimé ; un homme est là, un homme dont on entend battre le cerveau et le cœur à chaque mot. […] Une femme voilée passe ; le cœur bat, on la suit ; mon Dieu ! […] Cela lui fait sauter le cœur. […] Je n’en connais pas de plus poignante, remuant plus à fond le cœur humain.
L’esprit peut critiquer un rhéteur subtil ; mais le coeur seul peut juger un philosophe éloquent. […] La crainte, la fierté, la pudeur, le dépit, retiennent quelquefois la passion : mais sans la cacher, tout doit trahir un coeur sensible. […] Là chacun des connoisseurs est comme double, & son coeur a dans son esprit un incommode voisin. […] c’est ainsi que les bergers doivent développer tout leur coeur & tout leur esprit sur la passion qui les occupe davantage. […] Le coeur plein de son amour, elle en laisse échapper quelques marques.
Brunot, quand il conclut que, « nulle part peut-être, on n’eut ainsi abandonné de gaieté de cœur et sans pensée de retour, une voie où des Ronsard, des Du Bartas, et des Desportes étaient allés déjà si loin » ? […] Je vous le dis sans avoir rien sur le cœur qui diminue la cordialité et le respect avec lequel je suis, etc. […] Pour achever donc de déterminer le caractère original et personnel de la philosophie de Bossuet, c’est au cœur du christianisme qu’il faut l’aller étudier ; c’est dans la nature aussi du génie de Bossuet ; et c’est enfin ou peut-être surtout dans les circonstances qui l’ont obligé lui-même à se la définir. On ne tarde pas alors à s’apercevoir qu’entre tous les dogmes de la religion, s’il en est un qu’il ait pris à cœur d’établir et de fortifier, c’est celui de la Providence. […] Meurtriers ou voleurs, ils continuaient donc de croire, du meilleur de leur cœur, aux mystères et aux observances d’une religion que leur conduite profanait tous les jours !
Et peut-on refuser son coeur A de beaux yeux qui le demandent ? […] Peut-on refuser son coeur à ces yeux, qui sont de la classe des beaux yeux. […] Ce n’est que quand les noms masculins commencent par une consonne ou une voyelle aspirée, que l’on se sert de au au lieu de à le ; car si le nom masculin commence par une voyelle, alors on ne fait point de contraction, la préposition à & l’article le demeurent chacun dans leur entier : ainsi quoiqu’on dise le coeur, au coeur, on dit l’esprit, à l’esprit, le pere, au pere ; & on dit l’enfant, à l’enfant ; on dit le plomb, au plomb ; & on dit l’or, à l’or, l’argent, à l’argent ; car quand le substantif commence par une voyelle, l’e muet de le s’élide avec cette voyelle, ainsi la raison qui a donné lieu à la contraction au, ne subsiste plus ; & d’ailleurs, il se feroit un bâillement desagréable si l’on disoit au esprit, au argent, au enfant, &c. […] A est aussi une préposition qui, entre autres usages, marque un rapport d’attribution, donner son coeur à Dieu, parler à quelqu’un, dire sa pensée à son ami. […] Le, la, les, indiquent que l’on parle 1°. ou d’un tel individu réel que l’on tire de son espece, comme quand on dit le roi, la reine, le soleil, la lune ; 2°. ou d’un individu métaphysique & par imitation ou analogie ; la vérité, le mensonge ; l’esprit, c’est-à-dire le génie ; le coeur, c’est-à-dire la sensibilité ; l’entendement, la volonté, la vie, la mort, la nature, le mouvement, le repos, l’être en général, la substance, le néant, &c.
C’était le moment de l’invoquer ; l’hymne de la prière sortait du cœur de l’homme. […] Il peut exister au fond des cœurs, il n’est rien dans le droit. […] Chacun de ces dieux, comme la Junon de Virgile, avait à cœur la grandeur de sa cité. […] Il fallait donc, pour rassurer le cœur de l’homme, un sacrifice expiatoire. […] Mais en tombant elle ne laissa aucune haine dans le cœur des hommes.
J’en fus accueilli avec beaucoup de bonté ; je le remerciai de m’avoir fait sortir de prison, en lui disant qu’il était digne d’un grand monarque comme lui de protéger l’innocence, et que ses bienfaits étaient écrits au ciel et dans le cœur de tous les gens de bien. […] « Cet homme, lui dit le roi, est vraiment selon mon cœur ! […] elle me suffit, et j’en rends grâces de tout mon cœur à Votre Excellence. — Vous croyez donc, me repartit le duc, que je ne puis la payer ?
Que saurais-je moi-même sur les plantes, sur les couleurs, si j’avais reçu ma science toute faite et si je l’avais apprise par cœur ? […] Mais comme au parlement il a à peine parlé, il a conservé en lui tout ce qu’il avait sur le cœur contre sa nation, et pour s’en délivrer il ne lui est resté d’autre moyen que de le convertir et de l’exprimer en poésie. […] « Pendant que son cœur s’épanchait ainsi, nos mains restaient l’une dans l’autre, nous nous les serrions, et nous nous montrions mutuellement que l’absence n’avait pas refroidi notre amour.
Darwin a remarquablement décrit les symptômes physiologiques de la fureur. « Les battements du cœur s’accélèrent : la face rougit ou prend une pâleur cadavérique ; la respiration est laborieuse ; la poitrine se soulève ; les narines frémissantes se dilatent. […] Il y a aussi une acuité de joie et de douleur, de désir, d’aversion et même de honte, dont on trouverait la raison d’être dans les mouvements de réaction automatique que l’organisme commence, et que la conscience perçoit. « L’amour, dit Darwin, fait battre le cœur, accélérer la respiration, rougir le visage 10. » L’aversion se marque par des mouvements de dégoût que l’on répète, sans y prendre garde, quand on pense à l’objet détesté. […] La face pâlit, les muscles lisses de la peau se contractent, la peau se couvre d’une sueur froide, le cœur suspend ses battements : en un mot, il y a perturbation organique générale consécutive à l’excitation de la moelle allongée, et cette perturbation est l’expression suprême du dégoût 13. » — Mais n’en est-elle que l’expression ?
Il est trop question avec lui, au point de vue où il se place, de se croiser les bras et de regarder, — avec lui qui, à l’heure la plus ardente de sa jeunesse, peignant la noble élite dont il faisait partie, écrivait : « L’espérance des nouveaux jours est en eux ; ils en sont les apôtres prédestinés, et c’est dans leurs mains qu’est le salut du monde… Ils ont foi à la vérité et à la vertu, ou plutôt, par une providence conservatrice qu’on appelle aussi la force des choses, ces deux images impérissables de la Divinité, sans lesquelles le monde ne saurait aller longtemps, se sont emparées de leurs cœurs pour revivre par eux et pour rajeunir l’humanité. » Et c’est ici, peut-être, que s’explique un coin de l’énigme que nous nous posions plus haut, au sujet de ces intelligences si supérieures à leur action et à leur œuvre. […] Je la vois d’ici d’avance, cette histoire du cœur, ce Woldemar non subtil, bien supérieur à l’autre de Jacobi.
» XII Quelle langue et quelle pénétration dans le cœur des choses et des hommes ! […] Mais là, les tendres caresses de son fils, qui l’avait reçue avec tant d’empressement et qui l’avait fait asseoir au-dessus de lui-même dans la salle du festin, avaient dissipé de son cœur toute inquiétude : car, par d’intarissables discours, tantôt empreints d’une familiarité puérile, tantôt mêlés de ces retours de gravité qui semblent associer les choses sérieuses aux badinages, Néron prolongea le festin.
On travaille aujourd’hui non pour produire une œuvre selon son cœur, mais pour entrer dans tel ou tel mouvement, plaire à tel ou tel maître et, par-dessus le marché, la bonté des chers maîtres s’en mêle, cette sorte de trémolo social qu’on emploie pour accompagner le geste élégant de protection qu’il convient d’étendre sur la tête du candidat. […] Robert Scheffer Voici mon opinion féroce et sincère : Ce vampire de lettres, le vieux et ridicule Goncourt, qui institua le fameux prix par vanité et pour sauver son nom d’un oubli certain, on devrait, selon l’usage rituel, lui percer le cœur d’un pieu bien aigu afin qu’il cesse ses exploits.
Enfin, cette voix de l’oiseau, c’est l’écho même de nos pensées ; c’est de notre désir qu’elle parle, elle ne nous annonce que nos propres rêves : « Joyeuse dans la peine, ma chanson chante l’amour … les cœurs seuls la comprennent, qui désirent ! […] Le ton de la critique dut aussi paraître doux à celui dont le cœur était déjà blessé par de multiples avanies.
Cependant le cristal n’est pas moins mystérieux que la plante ; le flux et le reflux des mers ne sont pas moins solennels que le battement du cœur humain. […] Le lecteur peut rejeter cette opinion ; mais elle lui est soumise après bien des années de méditation, et avec cette hésitation naturelle à produire tout ce qui n’est pas susceptible de preuve265. » Si nous cherchons maintenant266 sous quelles divisions principales peuvent se grouper les phénomènes psychiques, nous trouverons que la classification populaire en sentir et penser, ou esprit et cœur, indique en gros les premiers groupes.
Le secret y allait jusqu’à l’abstrait… Dans son impassibilité peut-être seulement apparente, étaient empreintes les deux pétrifications, la pétrification du cœur propre au bourreau, et la pétrification du cerveau propre au mandarin. […] Que l’on rapproche de ces grands nocturnes, la descente de Gilliatt dans la caverne sous-marine dont la mer a fait un écrin et un antre, cette voûte, aux lobes presque cérébraux, éclairée d’une lumière d’émeraude, tapissée d’herbes déliées, mouvantes et molles, où roulent des coquillages roses, que frôle le gonflement des vagues, venant polir un noir piédestal où s’évoque « quelque nudité céleste, éternellement pensive, un ruissellement de lumière chaste sur des épaules à peine entrevues, un front baigné d’aube, un ovale de visage olympien, des rondeurs de seins mystérieux, des bras pudiques, une chevelure dénouée dans de l’aurore, des hanches ineffables modelées en pâleur » ; la description des halliers sombres, ces « lieux scélérats » d’où les chouans fusillaient les bleus », et dans l’Homme qui rit, ce merveilleux tableau de la baie de Portland par un crépuscule d’hiver, où les côtes blafardes se profilent en contours linéaires, puis encore l’enterrement de Hardquannone, emporté silencieusement à la brune, le glas toquant à coups espacés et discords, et cette molle nuit grise où Gwynplaine, dans l’amertume de son cœur, suit les quais gluants de la Tamise, portant le sourd désir de se suicider ; M.
Ceux qui se servent de ces avantages pour enseigner la vertu, lui gagnent plus sûrement les coeurs, à la faveur du plaisir ; comme ceux qui s’en servent pour le vice, en augmentent encore la contagion par l’agrément du discours. […] Au lieu de sentimens naturels, ils n’employoient que des pensées subtiles et tirées qui n’éffleuroient pas seulement le coeur.
Il y a, dit-on, des cœurs de toute part ouverts : la science, avant Auguste Comte, était comme un système de tous côtés fermé. […] Et, enfin, puisque nous ne pouvons nous tenir pour certains de l’objectivité de la science qu’autant que nous le sommes de l’objectivité du monde extérieur, le fondement de la science est donc « métaphysique » ; et voilà, sans grand effort de réflexion ni de raisonnement, mais surtout sans contradiction, la métaphysique rétablie, si je puis ainsi dire, au cœur même du positivisme.
Elle s’échappe d’un cœur ulcéré. […] Je conviens cependant qu’il y a dans le viol et la prostitution un grand motif de curiosité pour le parterre et la certitude de toucher bien vivement le cœur des femmes sensibles.
» L’enfant, d’un air enjoué, Ayant un peu secoué Les pièces de son armure Et sa blonde chevelure, Prend un trait, un trait vainqueur, Qu’il me lance au fond du cœur. […] » Amour fit une gambade, Et le petit scélérat Me dit : « Pauvre camarade, Mon arc est en bon état, Mais ton cœur est bien malade. » Quelle incroyable virtuosité chez cet homme qui fait un conte si rapide, si concis, si aisé, sans qu’on puisse y sentir absolument le moindre effort, sans qu’on y sente la moindre méditation ni le moindre apprêt !
De tempérament bien plus artiste que philosophe, comme la plupart des intelligences de son pays, à l’exception de saint Thomas d’Aquin, l’Aristote monacal, l’auteur des Révolutions d’Italie n’en a pas moins ce genre de bon sens italien, perçant, allongé, souple comme un glaive, qui entre dans le cœur des faits, quitte à s’y briser, si l’esprit ne mesure pas de loin où il frappe. […] Il ne se pose qu’après, comme le poignard dans le cœur.
… La Haine est une fière Muse, quand on l’a vraiment dans le cœur ! […] Mais la vouloir chrétiennement pour le salut et l’honneur du Christianisme, la vouloir pour sa résurrection, venir, le cœur attendri et les yeux en larmes, présenter à la Papauté le sabre japonais en l’engageant avec suavité à s’ouvrir elle-même le ventre, ceci est une manière de vouloir la mort de la Papauté qui appartient en propre à Victor Hugo, et si, dans le cours de son poème, il n’a pas la moindre originalité d’idées, il a du moins eu celle-là, dans son hypocrite ou son ironique conception !
Pour achever le contraste, tandis que les génies poétiques de ce temps trahissent, presque tous, en leurs vers une allure plus ou moins aristocratique, soit par culte de l’art, soit par prédilection du passé féodal, soit par mystérieuse chasteté d’idéal dans les sentiments du cœur, Béranger est le seul poëte qui, indépendamment même du choix des sujets, ait gardé la rondeur bourgeoise, l’accent familier, la tournure d’idées ouverte et plébéienne ; par où encore il semble descendre en droite ligne de cette forte lignée à tempérament républicain, qu’on suit, sans hésiter, dans les trois derniers siècles, et de laquelle étaient Étienne de La Boëtie, les auteurs de la Ménippèe, Gassendi, Guy Patin, Alceste un peu je le crois, et beaucoup d’autres.
Entre les illustres professeurs qui, dans les jours laborieux d’alors, maintinrent à eux trois, au cœur des écoles, l’indépendance et la dignité de la pensée, il en est un autre que personne assurément n’oublie et qu’il m’est inutile de nommer264.
si dur et si mortel au cœur du vieil athlète.
La même attraction se voit encore quand on récite un morceau par cœur, et que soudain la mémoire déraille sur un mot, qui, du groupe où il figurait et qui l’a amené, la lance dans un autre où il figure encore et qu’il amène.
Mon coeur, lassé de tout, même de l’espérance, N’ira plus de ses vœux importuner le sort.
Ils s’aiment plus voracement sur la cendre des morts, plus harmonieusement parmi les images fanées de la beauté parfaite, plus solennellement parmi les témoignages de l’éternelle et divine inquiétude des cœurs.
Il est dans la logique de cette morale de vouloir pénétrer malgré tout jusque dans l’intimité des esprits et des cœurs.
Ainsi a pu s’accomplir l’opération la plus hardie qui ait été pratiquée dans l’histoire, opération que l’on peut comparer à ce que serait, en physiologie, la tentative de faire vivre en son identité première un corps à qui l’on aurait enlevé le cerveau et le cœur.
L’idée qu’on est tout-puissant par la souffrance et la résignation, qu’on triomphe de la force par la pureté du cœur, est bien une idée propre de Jésus.
Dans sa lettre à Gobelin, elle dit : « Il se passe ici des choses terribles entre madame de Montespan et moi, le roi en fut hier témoin ; et ces procédés, joints aux maladies de ses enfants, me mettent dans un état que je ne peux soutenir. » Dans la seconde, à madame de Saint-Géran, se lisent ces mots : « Tout ce que je souhaiterais serrait de voir à madame de Montespan un cœur fait comme le vôtre.
Dans la grande rixe olympienne qui éclate au vingt et unième chant de l’Iliade, Héra l’appelle « chienne hargneuse », et lui reproche « son cœur de lionne pour les femmes que Zens lui permet de tuer à son gré ».
Après chaque étreinte amoureuse, son cœur faisait toc toc, comme un coucou d’auberge de village : un bruit funèbre.
L’auteur, au lieu d’y présenter la sagesse sous les traits de l’agrément & de la simplicité, donne dans une ridicule métaphysique de cœur & de sentimens.
Sollicité continuellement de retourner à celle de Berlin, il se contente de répondre au monarque, pour lequel son cœur n’a point changé : Je ne puis vivre avec vous ni sans vous.
La mémoire des mots consiste à apprendre facilement par cœur, et à retenir plus ou moins longtemps ce qu’on a appris ; le sens du langage est le talent de la philologie, l’habileté à apprendre et à comprendre les langues.
La nature contient un élément poétique, puisque l’âme est remuée, puisque notre cœur se trouble, puisque notre esprit devient songeur aux spectacles qu’elle nous offre.
L’un est le poète du cœur, l’autre est celui de l’esprit et de la raison.
Les personnages de son drame de cœur, comme dans la plupart des romans écrits par des femmes, n’ont ni physionomies, ni visages.
Et, du même coup, le Christianisme a grandi le cœur et le génie des hommes.
Il est vrai qu’elle en avait un avec toute l’Europe, et qu’entre ses batailles à la frontière et ses échafauds dans le cœur du pays elle était trop occupée pour penser au duel d’homme à homme, grêle chose pour elle qui tuait en masse !
Mais la tristesse a dû tomber sur ce cœur de soldat, droit et ferme, en le prévoyant !
Seul, le sublime écolier d’Harrow, dont la violente fantaisie avait bu l’ennui dans cette coupe correcte, et gardé en sa nature profonde l’impression et le ressentiment de cet ennui, puisé dans cette poésie sans âme, a osé dire le secret de beaucoup d’esprits qui se taisaient, — lâches comme toujours, devant deux mille ans de gloire consacrée et d’idolâtrie, — et sa vérité à lui, sur un poète, au fond, médiocre d’inspiration et de génie, mais adoré et gardé par tous les médiocres de la terre : et les médiocres d’imagination, et les médiocres de passion, et les médiocres de cœur.
Quoi qu’il en soit, après Fénelon, contre lequel le cœur lui a manqué un peu, Lerminier retrouve toute l’indépendance de sa pensée ; et, suivant l’erreur qui tombe, d’esprit en esprit, toujours plus bas et toujours plus large, de Fénelon en Montesquieu, de Montesquieu en Mably, de Mably en Barthélemy, de Barthélemy en Saint-Just et en Robespierre, et de ces derniers en toute cette plèbe de démocrates timbrés encore de République, il dresse admirablement le compte de cette longue lignée d’adorateurs de la Grèce, qui l’aiment, il est vrai, à la manière grecque, avec un bandeau sur les yeux, et qui ont cru, soit dans leurs livres, soit dans leurs essais d’organisation politique, qu’on pouvait détremper et pétrir les cendres des civilisations consumées pour en faire le ciment des institutions des peuples vivants !
Les choses en étaient arrivées, entre les Stuarts et l’Angleterre, à cette redoutable extrémité qu’il n’y avait plus entre eux que le choc des deux plus inflexibles et saintes choses qu’il y ait dans le cœur des hommes, — le choc de deux consciences qui, ni l’une ni l’autre, ne pouvaient céder… Lorsque les questions sont posées à cette profondeur d’âme, on n’attend pas longtemps le résultat.
Il nous donne les femmes et la société du temps d’Auguste, et pour commencer ses impertinences de dandy, que je ne hais pas, il place Cléopâtre sous Auguste, quoiqu’elle fût à côté, et quoique, des femmes sous Auguste, il n’y en ait dans son livre que deux : Livie et Julie, — plus Horace, qui, selon moi, n’était d’aucun sexe, lui, mais un impuissant de tête et de cœur, habile seulement dans l’art physique de faire des vers.
Martin — Abailard, tout grand qu’il est, est bien petit par le cœur auprès de la sublime enfant qu’il enchaîne à sa destinée… L’importance du personnage d’Héloïse, c’est qu’elle ne change pas intérieurement, qu’elle ne subit pas la mort mystique du cloître, c’est qu’elle ne se repent jamais (tiens !
Mais le Royalisme, ce sentiment inouï du Royalisme, qui est de France, et qui balançait le Catholicisme dans les cœurs, l’aurait probablement empêché, s’il n’avait pas été assassiné, de porter la main sur cet être sacré et presque divin : le Roi !
Il avait, lui, quelque chose de trop tempéré, de trop harmonieux, pour se mutiler ainsi le cœur, pour être un si cruel ascète de la science !
Nous n’avons point à faire un travail d’Hercule en sondant les reins ou le cœur des philosophes, ces étables d’Augias humaines.
Ribot, était un fort commerçant, qui voulait faire de son fils un marchand comme lui, et sa mère, un bas-bleu, sans cœur et sans bon sens comme tous les bas-bleus, qui voulut peut-être qu’il fût un homme de lettres… comme elle !
Cela serre le cœur.
disait-il, je t’invoque ; parmi toutes les divinités, nulle ne parle plus puissamment au cœur de l’homme que toi. » Un autre, qui conseillait de fuir les villes et sentait que la situation des lieux influe sur l’âme : « Habite et parcours les montagnes, disait-il, le soleil les frappe de ses premiers rayons ; les derniers rayons du soleil reposent sur elles ; élève-toi vers les cieux, sors de l’ombre, et respire la lumière et la pureté du jour » ; un autre, après la mort de son épouse, ramasse tous les ornements qui servaient à sa parure, et les suspend dans un temple pour les consacrer à la divinité du lieu.
où retentit comme un éclat de tonnerre, cette étonnante nouvelle : Madame se meurt, Madame est morte. » Et quelques moments après, ayant parlé de la grandeur d’âme de cette princesse, tout à coup il s’arrête ; et montrant la tombe où elle était renfermée : « La voilà, malgré son grand cœur, cette princesse si admirée et si chérie ; la voilà telle que la mort nous l’a faite !
Et notez qu’il est brave et patient ; ce n’est pas le manque de cœur, c’est le tour d’esprit qui en fait un mauvais officier. […] Par son éloquence imagée, pathétique, abondante en grands mouvements, il remuait de forts et vagues sentiments au fond des cœurs : ses sermons faisaient des effets analogues à ceux que produisaient nos grands lyriques, lorsqu’ils entreprirent d’agiter, à l’aide de la poésie et du roman, les inquiétudes morales et sociales de leurs contemporains.
Il faut qu’il renonce à faire de la psychologie, en quelque sorte, le centre de ses opérations, le point d’où doivent partir et où doivent le ramener les incursions qu’il risque dans le monde social, et qu’il s’établisse au cœur même des faits sociaux, pour les observer de front et sans intermédiaire, en ne demandant à la science de l’individu qu’une préparation générale et, au besoin, d’utiles suggestions77. […] Mais, tandis que ceux-là ne la concevaient que comme un arrangement conventionnel qu’aucun lien ne rattache à la réalité et qui se tient en l’air, pour ainsi dire, ils lui donnent pour assises les instincts fondamentaux du cœur humain.
La correspondance est très riche, pleine de cœur et de pensée.
On est au cœur de l’hiver ; l’opération peut rencontrer des difficultés très grandes, et Joubert n’est pas homme à se les dissimuler : elles sont présentées avec des alternatives de crainte, même d’accablement, puis tout à coup des reprises d’ardeur et d’espérance, dans des lettres charmantes et naïves (sauf quelques lauriers qu’il craint de voir changer en cyprès ; c’était le style du temps).
Il saisit de toute son intelligence, de tout son cœur le rôle qui lui était présenté ; et tout en lui, défauts et qualités, y servit.
Trop heureux serai-je, si, une seule fois, dans une pauvre maison, mes vers portaient quelque douceur à un cœur simple », est-il possible de ne point sentir quelle passion anime ces phrases ?
De ce que nous avons fait bien des fautes en politique, ce n’est pas une raison non plus d’y ajouter ; un gouvernement qui, de gaieté de cœur, se dessaisirait de ce qu’il peut conserver de force et d’initiative avec l’assentiment public, raisonnerait moins bien que Mme de Montespan.
Que son chant élève les âmes ou émeuve les cœurs, contribue à la paix ou gagne des batailles, c’est par-delà sa volonté.
Ces nobles cœurs font plaisir à voir, et on aime leurs écrits malgré la singularité de leurs pensées.
Il y voit avec son cœur ; sa vérité n’est pas celle du statisticien ni celle du photographe ; sa préoccupation du détail ne nuit pas aux effets de l’ensemble, le Masque, Maman Colibri, la Marche Nuptiale réalisent le théâtre d’aujourd’hui le plus intense, le plus sobre, le plus vrai que nous ayons eu depuis Amoureuse, depuis Porto-Riche et depuis Jules Renard.
se dit-il, chers gages… Voilà encore un de ces morceaux où il semble que le cœur de La Fontaine prenne plaisir à s’épancher.
Il n’entre qu’une supposition dans ce raisonnement, c’est que les hommes de tous les temps et de tous les païs soient semblables par le coeur.
Si tous les cœurs vibrent à l’unisson, ce n’est pas par suite d’une concordance spontanée et préétablie ; c’est qu’une même force les meut dans le même sens.
L’âpre Chamfort, s’il revenait, n’écrirait plus que la femme a de moins que l’homme un tiroir dans la tête et une fibre de plus dans le cœur.
Quand on fit le procès à ce chef-d’œuvre, qu’on lira encore quand on saura la Russie par cœur, personne ne se dit que Custine était de cette famille de jugeurs dont madame de Staël se vantait d’être, — madame de Staël, qu’il rappelle d’ailleurs pour le style et pour sa manière habituelle et soudaine de faire partir l’étincelle de l’aperçu. « Je serais conduite à l’échafaud, — disait un jour madame de Staël, — qu’en chemin, je crois, je voudrais juger le bourreau. » Custine avait plus difficile à faire : il avait à juger ceux qui voulaient le séduire, et il a été plus fort que ses séducteurs.
I C’est une des plus désagréables puissances de ce temps-ci ; mais, il faut bien en convenir, quoique le cœur en saigne pour l’honneur de l’esprit français, c’est une puissance.
C’est ce visage, qui n’est pas un masque, mais qui est maître de soi, comme la force, que Louis Teste a entrepris d’éclairer pour remuer et raviver un peu d’espérance dans les cœurs chrétiens désespérés.
Elle les arracha même de son cœur !
Alors il s’échauffe pour une métaphysique laïque de tout son cœur ou plutôt de toute son humeur antireligieuse. […] Eux-mêmes semblent en avoir eu besoin pour leurs œuvres et non pour leurs cœurs. […] Leur génie fut plus religieux que leur cœur, et même ce fut leur art qui fut plus religieux que leur génie. […] Le Français s’admire en soi, de tout son cœur. […] Nous nous sommes attachés de tout notre cœur à la perdre moralement, à nous l’aliéner.
J’ai fait, pour m’en assurer, l’expérience suivante : On plonge dans de l’eau tiède une patte de grenouille engourdie, dont le cœur a été mis à découvert. […] Le cœur reprend ses battements plus rapides et tous les appareils se réveillent successivement. […] Le sang revenant plus chaud de la patte a ravivé les battements du cœur et c’est le cœur excité qui a dégourdi l’animal. […] Qu’importe qu’un être vivant ait des organes ou des appareils plus ou moins variés et complexes, des poumons, un cœur, un cerveau, des glandes, etc., etc. […] Il le regarde comme un organe de nutrition, une sorte de cœur.
En tout cas sa méthode, ou plutôt le fond de sa méthode, s’accorde avec le cœur même de la critique professionnelle. […] La critique d’atelier c’est la critique des partis littéraires ; la République des Lettres implique du côté du cœur la rive gauche, et du côté de la main la rive droite ; le cœur est chaud, la main est leste ; vue de la rive droite la rive gauche c’est l’Odéon, et vue de la rive gauche la rive droite c’est la Foire sur la place. […] L’impérialiste didactique qui sommeille au cœur de tout écrivain s’en donne à cœur joie. […] Le Port-Royal de Sainte-Beuve isole, suit, développe un morceau caractéristique de durée française, pris au cœur du grand siècle. […] Ceux-ci ne se servent de l’analyse que provisoirement, en vue de leur opération principale qui est de créer des cœurs humains, vivants, synthétiques.
La foi est un moyen supérieur de connaissance : elle s’exerce au-delà des limites où la raison s’arrête (distinction de la raison et du sentiment ou du cœur). […] Je ne sais trop, mais assurément Pascal a touché plus juste, quand il a saisi ensuite le fondement naturel et psychologique de la foi, ce désir du bonheur que l’homme ne peut retrancher de son cœur et qui, sans cesse déçu par la réalité, se recule toujours plus loin, jusqu’à ce qu’il ne trouve plus d’autre moyen de subsister que de s’élancer hardiment dans l’inconnaissable, plaçant son espérance en sûreté hors de la vie et du temps.
La pièce a du fond et elle enseigne les cœurs Sous une richissime Américaine qui cherche le bonheur. […] Romulus Coucou souscrira de son cœur d’homme, parce qu’il aime, il souscrira des mille douleurs dont un nègre, dans une société d’esclavage peut endurer le déchirement.
Le comique exige donc enfin, pour produire tout son effet, quelque chose comme une anesthésie momentanée du cœur. […] On se rappelle la réponse de Sganarelle à Géronte quand celui-ci lui fait observer que le cœur est du côté gauche et le foie du côté droit : « Oui, cela était autrefois ainsi, mais nous avons changé tout cela, et nous faisons maintenant la médecine d’une méthode toute nouvelle. » Et la consultation des deux médecins de M. de Pourceaugnac : « Le raisonnement que vous en avez fait est si docte et si beau qu’il est impossible que le malade ne soit pas mélancolique hypocondriaque ; et quand il ne le serait pas, il faudrait qu’il le devint, pour la beauté des choses que vous avez dites et la justesse du raisonnement que vous avez fait. » Nous pourrions multiplier les exemples ; nous n’aurions qu’à faire défiler devant nous, l’un après l’autre, tous les médecins de Molière.
Et puis son cœur de Breton était tendre aussi et ne pouvait rester tout à fait insensible dans ce divorce lentement amené, mais décisif et sans retour, avec des croyances du berceau et de l’enfance qui lui échappaient.
Ce que j’ai le plus à cœur de signaler comme fruit à recueillir dans le commerce familier avec le plus héroïque des génies, c’est l’impression morale, à entendre ce mot largement.
Il a décrit en des termes d’une saisissante vérité ces commencements presque imperceptibles, cette lueur, cette étincelle, ce premier signe de vie, ce pouls qui se remet à battre, ce sang qui afflue tout d’un coup au cœur ; et aussitôt que s’entendit le murmure et que le tintement se fit,« tout le monde, s’écrie-t-il, s’éveilla : on chercha en s’éveillant comme à tâtons les lois, on ne les trouva plus, l’on s’effara, l’on cria, l’on se les demanda… » Cet admirable exorde des Mémoires politiques de Retz pourrait s’intituler : Comment les révolutions commencent : ayons le présent à la pensée pour apprendre comment elles s’évitent. — Mais ici ce n’est pas au point de vue du public, c’est au point de vue du gouvernement que je me place, et c’est le gouvernement qui a dû s’effarer tout le premier et se tâter pour savoir s’il était bien le même ; c’est lui qui a dû s’étonner de ne plus trouver un matin autour de lui ce qui y était la veille et se demander à son tour : Comment se fait-il que cette opinion qu’il y a quelques mois encore on supposait disciplinée et soumise, et quelque peu sommeillante, se soit tout d’un coup réveillée ?
« Après les cauchemars, les hallucinations de l’odorat, les troubles de la vue, la toux sèche, réglée de même qu’une horloge, les bruits des artères et du cœur et les suées froides ; surgirent les illusions de l’ouïe, ces altérations qui ne se produisent que dans la dernière période du mal. » La déchéance s’accentue.
Si l’on accuse certaines personnes, et les femmes surtout, de manquer de logique, c’est que, dans leurs raisonnements, les images viennent brusquement expulser les idées, et introduire des objets concrets qui intéressent la sensibilité : l’argumentation commencée selon l’ordre de la raison se poursuit selon l’ordre du cœur ; la conclusion n’a plus la valeur d’une nécessité universelle, mais d’une volonté individuelle.
Le hasard l’ouvre à la page 70 : Le matin toujours recommence Et les soirs cadencent leur cours, Les battements du cœur immense Nous rythment des nuits et des jours !
Il associait à son dogme du « royaume de Dieu », tout ce qui échauffait les cœurs et les imaginations.
La douleur trouble la digestion, la joie l’active, la peur dessèche la langue et cause une sueur froide ; le cœur, les poumons, la glande lactée chez les femmes ressentent le contre-coup des émotions ; la glande lacrymale qui secrète constamment son liquide, le laisse échapper avec plus d’abondance, sous l’action des émotions tendres.
Quand la connexion entre une fonction organique et les organes volontaires manque ou est très éloignée, alors l’influence volontaire n’est plus possible, comme dans le mouvement du cœur, la sécrétion du suc gastrique, l’acte de rougir ; ou, quand elle s’exerce comme chez les fakirs hindous et les faux épileptiques, on la regarde comme exceptionnelle.
Sur Triboulet qui est homme, qui est père, qui a un cœur, qui a une fille.
Elle est tantôt celui des foux ; rarement celui d’un honnête-homme. » Si l’on remonte des particuliers aux princes, on verra que bien des souverains ont pensé de même ; qu’ils n’ont rien eu tant à cœur que de tenir la poësie éloignée de leurs états, comme un de ces maux contagieux qui portent la désolation & la mort partout où ils se glissent.
Il y a beaucoup de vrai dans ces observations et, je le dirai en passant, c’est bien pour cela que moi, très partisan de la lecture des auteurs eux-mêmes, j’ai souvent applaudi de tout mon cœur aux critiques prolixes. « Comment !
L’Amour, descendu sur la terre pour fuir une correction maternelle, s’attache successivement à différents types, destinés, dans la pensée de l’auteur, à attester la dépravation des sentiments et l’avilissement des cœurs de son siècle : une pédante, Polymathie-Armande ; une prude, Archelaïde-Arsinoë ; une coquette, Polyphile-Célimène ; Landore, une sotte ; Polione, une courtisane, etc., etc.
Et quitte, quand on sera de retour, à repasser, lécher et pointiller tout cela, à y mettre le chaud, et le vert, et le sec, et à faire enfin, avec des mots, de petites aquarelles ou de petites gouaches, on obtient à peu près un livre, — un livre qui n’a ouvert ni le cœur ni la tête à son auteur !
Ces passages et beaucoup d’autres semblables, tirés de Condillac lui-même, le consolèrent un peu : « Car enfin, se disait-il, il est clair que mes philosophes admettent toutes ces sages et honnêtes doctrines, non par pudeur, complaisance ou bonté de cœur, mais par démonstration.
tandis qu’avec la nation tu pleures un ami et un père, permets à ma muse de verser sur la tombe de Talbot des vers sortis de mon cœur et dictés par la vérité.
Le style en est simple, mais la poésie nouvelle, même après Homère : « Les cavales87 qui m’entraînent se sont élancées aussi loin que le cœur me poussait, puisqu’elles m’ont porté sur la voie glorieuse de la divinité, qui place l’homme éclairé au milieu de tous les mystères.
Mais à Dieu ne plaise que jamais il soit entré dans mon esprit et dans mon cœur la pensée vulgaire et coupable de rendre au christianisme le mal qu’on m’avait fait en son nom ! […] Un dieu sans monde serait pour l’homme comme s’il n’était pas ; un monde sans dieu est une énigme incompréhensible à sa pensée et pour son cœur un poids accablant. […] Que mille cœurs qui battaient tout à l’heure cessent de battre, c’est un fait bien triste ; mais qu’une goutte de sang innocent soit versée, c’est plus qu’un fait pénible, c’est un mal et un mal horrible. […] Je les connais, mais une tendresse invincible est pour cet homme au fond de mon cœur. […] Aussi d’un bout de l’Europe à l’autre cette Charte fixe tous les regards, fait battre tous les cœurs, rallie tous les vœux et toutes les espérances.
& qui vient probablement du mot grec ἅμα, una, simul ; racine qui exprime assez bien l’affinité de deux coeurs réunis par une bienveillance mutuelle. […] C’est à la Logique à decider du choix & de la force des raisons que l’on doit employer pour éclairer l’esprit : c’est à la Rhetorique à régler les tours, les figures, le style dont on doit se servir pour émouvoir le coeur par le sentiment, ou pour le gagner par l’agrément. […] « Il en est des peuples entiers comme d’un homme particulier, dit du Tremblay, traité des langues, chap. 22 ; leur langage est la vive expression de leurs moeurs, de leur génie & de leurs inclinations ; & il ne faudroit que bien examiner ce langage pour pénétrer toutes les pensées de leur ame & tous les mouvemens de leur coeur.
sans doute, l’auteur des Liaisons dangereuses ni celui des Égarements du cœur et de l’esprit ne nous ont transmis aucun renseignement sur « les droits féodaux » ou sur « les douanes de province » ; mais aussi pourquoi M. […] Le cœur humain de qui ? Le cœur humain de quoi ? Quand le diable y serait, j’ai mon cœur humain, moi ! […] Mais déjà, cependant, les Poèmes antiques, les Poèmes barbares avaient paru, dont la hautaine impersonnalité ne fait pas le moindre mérite : Promène qui voudra son cœur ensanglanté Sur ton pavé cynique, ô plèbe carnassière, Je ne livrerai pas mon cœur à tes huées, … Je ne danserai pas sur ton tréteau banal, Avec tes histrions et tes prostituées… et ces vers énergiques avaient été entendus.
Sont égaux de cœur, pour ainsi parler, et se sentent égaux de cœur les citoyens, les concitoyens, les compatriotes qui s’aiment. […] Voilà ce que les Nietzsche d’Athènes ne cessent le répéter plus ou moins clairement aux jeunes gens, et de là « l’impiété qui se glisse aux cœurs les jeunes gens lorsqu’ils viennent à se persuader que ces dieux, tels que la loi prescrit d’en reconnaître, n’existent point ». […] Elle élève l’humanité ; mais surtout elle s’élève au-dessus de l’humanité et rompt presque les liens avec elle ; en tout cas, elle est très loin de s’établir au centre même et comme au cœur de l’humanité. […] Et que je sois égoïste, il n’est pas douteux, étant homme ; mais je voudrais que tu te fisses cette question, en homme très habile à démêler les secrets du cœur, si un philosophe qui ne laisserait pas de te ressembler un peu et qui ne mettrait aucune philanthropie dans sa doctrine, ne serait pas égoïste autant que moi et peut-être un peu davantage. […] — Sauf besoin pressant, pour quoi il faut toujours avoir, non approbation, mais indulgence, je lui donne tort de tout mon cœur, mon ami.