Les Décadents, imitant leur exemple, ne s’embarrassaient guère de scrupules et tombèrent à bras raccourcis sur les réputations les mieux établies.
La plupart tombent d’elles-mêmes après une étude attentive de ces admirables et difficiles chefs-d’œuvre.
Le vulgaire aussi se figure que la rosée tombe du ciel et croit à peine le savant qui l’assure qu’elle sort des plantes.
Puis un évêque monte en chaire, et dans un discours d’apparat célèbre les vertus du mort, qui fut souvent un piètre sire, exalte l’esprit de la princesse défunte, qui fut peut-être un modèle d’insignifiance, et ne manque pas de placer l’un et l’autre à la droite du Tout-puissant, attendu qu’un grand de la terre ne saurait être confondu, même dans la tombe, avec le troupeau de la vile multitude.
Un soir, à la tombée du crépuscule, assis dans le salon déjà sombre, devant le jardin, — comme de rares paroles, entre de longs silences, venaient d’être échangées, sans avoir troublé le recueillement où nous nous plaisions, — je demandai, sans vains préambules, à Wagner, si c’était pour ainsi dire, artificiellement — (à force de science et de puissance intellectuelle, en un mot) — qu’il était parvenu à pénétrer son œuvre, Rienzi, Tannhæuser, Lohengrin, le Vaisseau Fantôme, les Maîtres Chanteurs même — et le Parsifal auquel il songeait déjà — de cette si haute impression de mysticité qui en émanait, — bref, si, en dehors de toute croyance personnelle, il s’était trouvé assez libre-penseur, assez indépendant de conscience, pour n’être chrétien qu’autant que les sujets de ses drames-lyriques le nécessitaient ; s’il regardait, enfin, le Christianisme, du même regard que ces mythes scandinaves dont il avait si magnifiquement fait revivre le symbolisme en ses Niebelungen.
J’ai vu les lettres décliner et tomber enfin dans une décadence presque entière ; car je ne connais presque personne aujourd’hui que l’on puisse appeler véritablement savant.
Pour Manzoni, par exemple, qu’il ne connaissait nullement, quand Le Comte de Carmagnola lui tomba entre les mains, le voilà qui s’éprend, qui s’enfonce dans l’étude de cette pièce, y découvrant mille intentions, mille beautés, et un jour, dans son recueil périodique (Sur l’art et l’Antiquité), où il déversait le trop-plein de ses pensées, il annonce Manzoni à l’Europe.
Loin de s’améliorer, il arrive, en ce moment d’ivresse, au pire degré de faute où il soit tombé, à l’insensibilité du cœur, à la méconnaissance de sa famille et de ses premiers amis.
La Liberté, c’est le bonheur, c’est la raison… Voulez-vous que je la reconnaisse, que je tombe à ses pieds, que je verse tout mon sang pour elle ?
En un mot, pour reprendre une comparaison précédente, elle ressembla à une personne qui est tombée un jour par mégarde du premier étage sans trop se faire mal, mais qui pour cela n’a pas mis et ne mettra jamais la tête à la fenêtre.
Ces diverses inexactitudes de détail m’ont mis en doute sur l’ensemble du travail, et, reprenant moi-même l’étude de Condorcet dans les parties qui me sont accessibles ainsi qu’à tout le monde, je suis arrivé à une tout autre appréciation de l’homme et du caractère ; et, comme Condorcet a été un personnage politique des plus considérables, un de ceux qui font les révolutions, qui y poussent, qui en espèrent tout, qui ne s’arrêtent qu’au dernier moment, au bord extrême du précipice, et qui y tombent, j’ai cru utile de dégager mon point de vue avec franchise et hardiesse.
Le 3 août 1683, il tomba malade à la place Royale, où il demeurait alors.
Il me tira à part dans une embrasure de fenêtre ; je crus qu’il voulait me communiquer quelque chose qu’il avait imaginé pour me tirer de l’abîme où je suis tombé. — Il sortit de sa poche trois pommes qu’on venait de lui donner, et dont il me fit présent pour mes enfants.
Il connaissait le diacre Pâris qui mourut en mai 1727 ; il ne l’estimait pas seulement, il en vint à le vénérer comme un saint, et à ajouter toute confiance aux prétendus miracles qui se faisaient sur sa tombe dans le cimetière de Saint-Médard.
Il est d’une conversation charmante, d’une inquiétude qui fait plaisir à ceux qui ne font que l’observer et qui n’ont point affaire à lui. » Maintenant, voici les Mémoires mêmes qui sortent de l’oubli où ils étaient tombés.
Volney, de peur d’y tomber, s’est rangé plutôt à l’excès contraire ; il affecterait au besoin l’aridité.
C’est, nous venons de le voir, qu’au lieu de tomber en nous à notre grande surprise et de pénétrer du dehors au dedans, elles se développent du dedans au dehors : elles sont pressenties dans leurs motifs et mobiles, elles sortent du groupe antérieur de représentations et d’impulsions.
Il faut une grande force de réaction personnelle, une grande énergie cellulaire pour résister à la douce facilité d’ouvrir la main sous le fruit qui tombe : il est si agréable et si naturel à l’homme de se nourrir du jardin qu’il n’a bêché, ni semé, ni planté.
Son œuvre de sociologue sera éclipsée par celle de l’école durkheimienne, puis tombera dans l’oubli, avant de connaître une deuxième heure de gloire internationale depuis quelques décennies, en particulier, dans le cas de la France, à cause de Gilles Deleuze.
Et c’est pendant cette agonie de supplicié qu’il écrivait avec sa gaieté à’ rebours : « Je suis heureusement de fort bonne humeur ; dans mes nuits d’insomnie, ma fantaisie me joue les plus belles comédies et les plus jolies farces du monde. » Et ailleurs : « On m’a pris mesure pour mon cercueil et mon nécrologe ; mais je meurs si lentement que cela devient fastidieux pour mes amis et pour moi-même. » Heine a mis toute une coquetterie d’ancien à tomber correctement, un joli sourire sur ses lèvres blanches.
Parce qu’il craint de tomber dans la sensiblerie, il manque, parfois de sensibilité, mais il est d’autre part, un des rares hommes qui sachent raisonner aujourd’hui.
M. l’Abbé de Wailli, auteur de la meilleure Grammaire françoise que nous connoissions, n’est tombé dans aucun des défauts de l’Abbé Girard.
L’esprit humain semble avoir jeté sa gourme ; la futilité des études scolastiques est reconnue ; la fureur systématique est tombée ; il n’est plus question d’aristotélisme, ni de cartésianisme, ni de malebranchisme, ni de leibnitzianisme ; le goût de la vraie science règne de toutes parts ; les connaissances en tout genre ont été portées à un très-haut degré de perfection.
J’en tomberai d’accord, et qu’il faut encore être né poete pour les concilier.
Si Bernardin de Saint-Pierre — et tout le monde un peu — n’avaient pas écrit les Études de la nature, ce serait ici le lieu de vous décrire les cascades d’Oo s’épanouissant — à leur tombée — en lacs transparents, et la vallée de Litz, remarquable par beaucoup de choses… et encore par l’Album des touristes : un registre, où l’aubergiste de l’endroit collectionne les autographes des commis-voyageurs en villégiature.
L’homme de génie ne doit craindre de tomber dans un style faible et négligé, que lorsqu’il n’est point soutenu par sa matière ; c’est alors qu’il doit songer à l’élocution et s’en occuper ; dès qu’il aura de grandes choses à dire, son élocution sera telle qu’elle doit être sans qu’il y pense.
… Byron a attendu trente ans dans sa tombe un biographe qui dévoilât au monde une misère de corps qui n’exista pas.
Il a touché naturellement à plusieurs grandes questions, et il a fini par tomber dans le vide, n’étant tout à fait ni philosophe ni artiste.
Voyez agir — ou plutôt non agir — et se mouvoir ce fantastique personnage qui, mis en présence de n’importe quel aspect de notre monde, semble être tombé subitement d’une planète en décomposition.
Nous ne serions pas le même homme si tel livre à une telle heure n’était tombé sous nos yeux. […] Et si elle était tombée si bas dans les derniers temps, et si elle est morte, c’est deux fois la faute de Loti. […] Qui redira encore leurs noms, à ceux qui sont tombés au pays de Diambour, dans les champs de Dialakar ? […] La romanesque, éprise d’un faux idéal, le plus souvent fabriqué d’après les livres, et à qui toute sa littérature est tombée de la cervelle dans le cœur. […] Il est également convenu entre romanciers que c’est pour être incapable de faire des romans qu’on tombe dans la critique ; en sorte que le signe qui caractérise tout critique et le mot qui le définit, c’est l’impuissance.
Personne, sur la terre, plus vite que le Français, ne dit : « Il est évident que »… et : « cela tombe sous le sens. » Les métaphysiques et les religions lui sont donc des ennemies naturelles, puisqu’elles essayent de sonder les grands mystères, c’est-à-dire tout simplement les questions les plus générales, et d’en donner ou une explication ou une vue. […] Non, ce n’est point les vices que la comédie poursuit, c’est les défauts, et elle met surtout en lumière ceci que par leurs défauts les honnêtes gens ou demi-honnêtes gens sont à la merci et tombent sous la prise des criminels ou des intrigants. […] Et pourquoi l’a-t-il fait tomber dans des malheurs ou l’a-t-il amené au seuil de malheurs plus grands que ceux où tombent ou que ceux dont approchent tous les autres ? […] Les communications du Saint-Siège à l’Église de France, sous le régime nouveau, ne tombent plus que sous l’article 34 de la loi de séparation : comme tous les autres « discours prononcés, lectures faites, écrits distribués, affiches apposées », elles ne sont poursuivies que si elles outragent ou diffament un citoyen chargé d’un service public, ou si elles constituent une provocation directe à résister à l’exécution des lois, ou si elles tendent à soulever ou armer une partie des citoyens contre les autres. […] Le temps n’est plus où, confondant « Rome et la France », selon l’esprit bismarckien, un inspecteur prussien disait aux instituteurs : « On fêtera l’anniversaire de Sedan en souvenir de ceux qui sont tombés pour l’unité allemande ; on le fêtera pour rappeler que l’empire a devant lui dans la Papauté un second ennemi héréditaire » (1882).
Et les derniers fuyards tombent sous une chiquenaude : mais ou chercher les vainqueurs ? […] Bourget, qui, avec beaucoup de talent, a le parti-pris de ne s’inquiéter que des mobiles intérieurs de l’être, et qui tombe, de cette façon, dans l’excès contraire au naturalisme. […] Des rougeurs flamboient derrière les arbres et incendient les haies qui bordent la route ; le petit vent de ce matin est tombé, le silence se fait plus profond. […] On nous accusa de vouloir nous faire un peu de réclame sur le dos de Zola ; à présent tout le monde tombe d’accord que le règne du torchon est passé, tout le monde, le Pontife lui-même ! […] Mais il y a là une erreur, un malentendu évident où les jeunes gens sont tombés et qu’il est peut-être bon d’éclaircir.
Les poèmes de chevalerie tombent peu à peu dans le mépris ; bientôt on les mettra en prose, on mettra les chevaliers à pied. […] Mais pour en revenir à ces Larmes de saint Pierre et à ce qu’elles ont de meilleur, le saint, dans son désespoir, s’en prend à la vie, à la déloyale vie, qu’il apostrophe comme une personne distincte ; il lui dit des injures, l’accusant de mensonge et d’iniquité : On voit par ta rigueur tant de blondes jeunesses, Tant de riches grandeurs, tant d’heureuses vieillesses, En fuyant le trépas au trépas arriver ; Et celui qui, chétif, aux misères succombe, Sans vouloir autre bien que celui de la tombe, N’ayant qu’un jour à vivre, il ne peut l’achever !
Les paroles que le comédien prononce en aparté sont toujours faites pour être dites intérieurement ou murmurées à l’oreille d’un ami sur, et non pour être lancées à pleine voix, au risque de tomber dans des oreilles malveillantes ou indiscrètes. […] De fait, il retourne auprès de son ami et tombe sur un verset de Saint Paul appelant à renoncer à la chair : « A l’instant, en effet, avec les derniers mots de cette pensée, ce fut comme une lumière de sécurité déversée dans mon cœur, et toutes les ténèbres de l’hésitation se dissipèrent » (p. 69)] 171.
Mais le plus souvent cette impression, au lieu d’ébranler ma conscience entière comme une pierre qui tombe dans l’eau d’un bassin, se borne à remuer une idée pour ainsi dire solidifiée à la surface, l’idée de me lever et de vaquer à mes occupations habituelles. […] Il était réservé à Leibnitz de faire tomber cette contradiction, et de montrer que si l’on entend la succession des qualités ou phénomènes externes comme la succession de nos propres idées, on doit faire de ces qualités des états simples ou perceptions, et de la matière qui les supporte une monade inétendue, analogue à notre âme.
Plus de distance, sans doute, entre la pensée et l’objet de la pensée, puisque les problèmes sont tombés qui mesuraient et même constituaient l’écart. […] Quand ce sentiment a grandi au point d’occuper toute la place, l’extase est tombée, l’âme se retrouve seule et parfois se désole.
Elle me fait tomber dans une profonde rêverie, et j’entends alors comme dans le lointain les sons graves et profonds du hautbois8. » On demande souvent si le même homme peut être à la fois grand coloriste et grand dessinateur. […] Il tomba dans une disgrâce complète, et fut pendant sept ans sevré de toute espèce de travaux. […] Tassaert Vous est-il arrivé, comme à moi, de tomber dans de grandes mélancolies, après avoir passé de longues heures à feuilleter des estampes libertines ?
Oui, Balzac, Il faut bien le dire, est un assez mauvais écrivain, trop souvent gauche, diffus, prolixe, incorrect, à moins qu’il ne tombe dans le faux brillant et dans le pathos. […] Les feuilles tombées des marronniers seront toujours d’un jaune presque rose. […] L’un d’eux a, au-dessus de la porte, un auvent en bois délicatement travaillé qui semble prêt à tomber en poudre. […] La coupole est ouverte au sommet pour que la pluie du ciel puisse arroser la tombe, formée d’une longue caisse de marbre rectangulaire pleine de terre, d’une terre aussi desséchée que celle que nous foulons en sortant et sur laquelle nos pas résonnent durement, tandis qu’au ciel durement bleu les dômes surchauffés des turbés voisins se gonflent comme s’ils allaient éclater dans la chaleur silencieuse. […] Merveilleuse chambre qu’une haute et magique porte en miroirs semble faire communiquer avec les régions du songe et qui semble abriter la sultane marine des Mille et une Nuits vénitiennes, dont la gondole, désemparée et à sec dans le misérable jardin où elle achève de pourrir, a l’air d’un noir quartier d’astre tombé !
» Il reprend du moins cette tournure tombée en désuétude : « Que trouvera-t-on que de logique à voir ériger le réalisme en principe suprême de l’art ? […] Il faut citer et je cite : « Je crois qu’ordinairement on pose mal cette question de l’immoralité dans l’art ; mais il me suffit ici que ce que l’on craint, ce n’est évidemment pas que les œuvres tombent dans l’indifférence, puisque c’est au contraire qu’elles ne risquent, en égarant les sympathies, de nous faire perdre, avec les vrais noms, les justes notions des choses20. » Ouf ! […] J’essaierais bien de lui prouver que la critique peut et doit être à la fois science et art, objective et subjective, comme on dit en jargon philosophique ; que la question de goût, matière à controverse, se complique d’une question de fait, matière à constatations scientifiques ; que, si l’appréciation d’un ouvrage varie nécessairement avec les individus, l’analyse bien faite du même ouvrage et des conditions où il est né aboutit à des résultats constants et vérifiables sur lesquels tout le monde peut et doit tomber d’accord : que les procédés d’un auteur, les qualités distinctives de sa langue et de son style, certains facteurs de son talent peuvent être déterminés d’une façon aussi nette et aussi précise que la structure d’une plante ou les propriétés d’un métal. […] Casimir Delavigne, cet honnête homme de talent honnête, lui paraît jouir dans sa tombe d’un sommeil si tranquille et si bien mérité qu’on est presque inexcusable de troubler ce repos. […] Il ne court pas risque d’être incompris, raillé ou, qui pis est, étouffé en silence ; il n’a pas, comme Stendhal, un demi-siècle à attendre pour que sa voix vienne du fond de la tombe éveiller dans les âmes un écho tardif ; il est admiré, célébré, porté aux nues ; il est salué et sacré grand homme de son vivant.
De faits qui ne tombent point sous les sens, mais nous sont connus par une sorte de sens intime qu’on nomme conscience. […] C’est une vérité presque universellement admise que les corps tombent suivant la verticale. […] L’argument kantien tombe. […] Exemple : Tous les corps tombent selon la verticale. — Cette propriété est quelque chose de plus que ce qui est compris dans le sujet. […] Ce système aujourd’hui est à peu près tombé.
S’ils ont mal commandé, l’homicide commis Tombera sur leur tête, et nous sera remis7. […] L’onde se fait une route En s’efforçant d’en chercher : L’eau qui tombe goutte à goutte Perce le plus dur rocher. […] Elle était tombée dans une léthargie profonde ; son âme, usée par la douleur, n’avait plus la force que donne le désespoir ; dans l’excès de son abattement, son poignard était échappé de ses mains. […] Elle nous est indifférente, en somme, et notre intérêt pour elle tombe en nous séparant, avec les derniers vers de son féroce beau-père96.
Je répondis par les mots suivants que je me suis souvent dits à moi-même : « Je le loue publiquement de ce qu’il a fait de bien, d’abord afin qu’on l’aime et qu’on le connaisse ; ensuite pour qu’il sache quels sont les motifs de l’attachement qu’on a pour lui ; en troisième lieu pour avoir le droit de lui parler franchement et avec fermeté dans son Conseil ou en particulier. » — Il arriva sous son gouvernement une chose assez extraordinaire entre les hommes qui travaillaient avec lui : la médiocrité se sentit du talent, le talent se crut tombé dans la médiocrité ; tant il éclairait l’une, tant il étonnait l’autre !
À quatre-vingt-six ans, arrivé au terme, il écrivait : « Je sens que je suis usé : je tombe avec le soleil ; le soir je me trouve dans un état misérable ; le sommeil me redonne des forces, et le matin, en m’éveillant, je me porte bien. » — M. de Lassay mourut à Paris, le 21 février 1738.
Dès qu’on parle de Catinat, il y a à prendre garde : si le xviiie siècle, en le célébrant et en cherchant à préconiser en lui un de ses précurseurs, une des victimes du grand roi, a raisonné un peu à l’aveugle de ses talents militaires et les a exaltés académiquement, il ne faut pas tomber dans l’excès contraire ni trancher au détriment d’un homme qui eut ses jours brillants, dont l’expérience et la science étaient grandes, et dont le caractère moral soutenu, élevé, est devenu l’un des beaux exemplaires de la nature humaine.
Savons-nous ce que nous aurions fait, si les faveurs fussent tombées sur nous ?
Là, comme presque partout ailleurs, le démembrement du Califat avait amené l’anarchie, la lutte et l’instabilité ; dans ce morcellement où était tombée la puissance des Arabes, chacun se disputant un débris, il y avait alors à Valence un roi Câdir imposé par les Castillans et détesté de ses sujets ; dans un péril pressant, il s’adressa au roi de Saragosse, lequel s’entendit avec le Cid pour lui prêter un secours intéressé ; tous deux comptaient s’accommoder bientôt de sa dépouille.
Mlle Le Couvreur tombe évanouie ; on la secourt ; la querelle cesse.
Plus d’une fois elle a porté la peine de son zèle et de ses pieux excès : après s’être dévouée à soigner des familles entières dans une épidémie de fièvre typhoïde qui sévit dans la contrée en 1839, elle tomba malade elle-même et faillit succomber : D’autres fois, après avoir surmonté toutes ses nausées auprès de certains malades, après avoir fait l’impossible en constance, en patience, en refoulement de toutes les délicatesses, la nature à la fin se révolte et se revanche ; il y a un lendemain ; et le devoir accompli, le malade soigné, le mort enseveli, la courageuse infirmière est demeurée des huit jours entiers le cœur soulevé, rassasié, sans pouvoir prendre presque aucune nourriture : elle a eu le contrecoup de son dévouement.
Je dois, au reste, vous dire, pour l’explication du fait, que nous profitons d’une erreur très-naturelle dans laquelle tombent tous les Américains.
Je suis l’homme du monde le moins propre à remonter avec quelque avantage contre le courant de mon esprit et de mon goût ; et je tombe bien au-dessous du médiocre, du moment où je ne trouve pas un plaisir passionné à ce que je fais.
Il semble approuver complètement une brochure de M. de Bonald, de la Royauté en France, laquelle ne concluait à rien moins qu’au rétablissement de l’ancien régime autant que faire se pouvait : « Point de Constitution écrite, point de Chambres, le rétablissement des Parlements tels qu’ils existaient autrefois, sans quoi la France tombera rapidement au dernier degré de la faiblesse et du malheur et sera, avant un siècle, le théâtre d’une nouvelle révolution, semblable à la révolution d’Angleterre de 1688.
Le jour même de la bataille, sans avoir autorité pour rien, mais sur la simple vue des choses et après une reconnaissance qu’il avait faite de son côté comme Moreau du sien, Jomini ouvrit un seul avis, qui était de prendre toutes les masses accumulées au centre, de leur faire changer de front pour les faire tomber de concert avec la droite sur la gauche de Napoléon, qui s’aventurait vers Grima et Reick entre l’Elbe et une masse de forces supérieures.
Il a fallu que j’arrivasse à trente ans, que mes observations se soient mûries et condensées, qu’un jet de lumière les ait même encore éclairées, pour que je pusse comprendre toute la portée des phénomènes dont j’ai été le témoin ignorant. » Il fallut peut-être à M. de Balzac, pour éveiller et ressusciter cet ancien Lambert enseveli en lui, qu’un éclair lui vînt, tombé du front d’Hébal, ce noble frère de la même famille.
Il faut donc qu’ils aient une bonté médiocre, c’est-à-dire une vertu capable de faiblesse, et qu’ils tombent dans le malheur par quelque faute qui les fasse plaindre sans les faire détester. » J’insiste sur ce point, parce que la grande innovation de Racine et sa plus incontestable originalité dramatique consistent précisément dans cette réduction des personnages héroïques à des proportions plus humaines, plus naturelles, et dans cette analyse délicate des plus secrètes nuances du sentiment et de la passion.
Dans quel découragement l’esprit ne tomberait-il pas, s’il cessait d’espérer que chaque jour ajoute à la masse des lumières, que chaque jour des vérités philosophiques acquièrent un développement nouveau !
Est-ce dans un temps où il suffit de vivre pour être entraîné par le mouvement universel, où jusqu’au sein même de la tombe le repos peut être troublé, les morts jugés de nouveau, et leurs urnes populaires tour à tour admises ou rejetées dans le temple où les factions croyaient donner l’immortalité ?
Le paysan, qui a graissé la patte du régisseur, se trouve là avec son magot. « Mauvaise terre, Monseigneur, et qui vous coûte plus qu’elle ne vous rapporte. » Il s’agit d’un lopin isolé, d’un bout de champ ou de pré, parfois d’une ferme dont le fermier ne paye plus, plus souvent d’une métairie dont les métayers besogneux et paresseux tombent chaque année à la charge du maître.
Ce n’était pas tout encore : selon le hasard qui présidait à la vie des écrivains, selon le livre qui leur tombait entre les mains, le voyageur ou le croisé qu’ils avaient entendu, selon enfin qu’eux-mêmes avaient été promener leur curiosité en telle province ou en tel pays, une incroyable diversité de récits réclamait tour à tour l’attention du public : romans grecs et byzantins, contes orientaux, traditions anglo-saxonnes, légendes locales de Normandie ou du Poitou, fables incroyables, anecdotes vraies ou vraisemblables, sujets pathétiques, comiques, féeriques, historiques, et même réalistes.
Toujours nasardes coups, tombent sur ces pauvres diables : ils sont bernés ; ils sont nigauds ; ils sont vulgaires.
Il ne s’obstina pas : il ne chercha qu’à tomber avec grâce — en se faisant le moins de mal possible.
Il n’est guère possible à un honnête homme de lui en vouloir : lui n’en veut jamais aux autres, pas même à ceux qu’il a « tombés ».
La preuve — qu’avec une ingéniosité pareille déployée dans la fabrication du livre, l’affaire tombe à un rapport moindre, si la réimpression est celle de Pradon.
En effet, passez cinq ans, dix ans, à faire une œuvre pensée, méditée, intensément sentie, où vous aurez mis tout votre cœur, toute votre flamme, tout votre art, et vous aurez dix-neuf chances sur vingt de voir cette œuvre tomber dans un monde sourd et muet.
Il frémit des éclairs, il s’épouvante du souffle tout-puissant qui passe, contemple avec chagrin les arbres terrassés raidissant sur le sol leur stature vaincue, lorsque voici tomber enfin l’eau lustrale dans la fuite des tonnerres lointains et la lumière peu à peu, comme sur l’étendue des bois tout entiers, est redescendu en lui. — Alors il réfléchit et s’en retourne la tête penchée, cherchant la raison de ce qu’il a aperçu, songeant à la vie dure et belle, à la lutte ; mais longuement attristé par sa rêverie, il relève pourtant le front, s’exalte de la joie d’être et dit ce qu’il a vu et compris.
Sa théorie du goût85 menait là un public tombé de cette hauteur d’attention ou les sévères méthodes littéraires du dix-septième siècle avaient élevé les contemporains.
Vous rappelez-vous comme Scapin tombe à genoux à la vue de cet instrument trop aigu ?
Saint-Évremond avait le droit d’être sévère ; car, placé dans la même condition que Bussy et tombé dans une pareille disgrâce, il résista à la tentation d’un retour ; il vécut et mourut en philosophe.
Pourtant, quand on suit Sophie dans ses lettres manuscrites, on croit apercevoir qu’elle n’était guère au moral que ce que Mirabeau l’avait faite ; il l’avait élevée, il l’avait exaltée : lui s’éloignant, elle baisse, elle se rapetisse, elle tombe dans les misères et les mesquineries de ses alentours.
Au reste, cette critique n’est que secondaire et ne tombe pas précisément sur le fond des choses, car M. de Tocqueville ne méconnaît et n’ignore aucune des différences qui distinguent l’Europe de l’Amérique, et il est toujours possible, quoique avec un peu d’effort, de faire, en le lisant, le partage qu’il n’a pas fait ; mais voici une observation d’un ordre bien plus important.
— que la nécessité, dis-je, aiguillonne et arrache à la douce paresse, que l’occasion encourage et multiplie, et qui, une fois voué à cette vie de labeur et de publicité incessante, ne déroge point pour cela, ne tombe point par là même en décadence, mais a chance de se varier, de s’élever, de se perfectionner parfois.
Si le grand orateur que nous venons de citer, avait fait un livre de synonymes latins, comme l’abbé Girard en a fait un de synonymes français, et que cet ouvrage vînt à tomber tout à coup au milieu d’un cercle de latinistes modernes, j’imagine qu’il les rendrait un peu confus sur ce qu’ils croyaient si bien savoir.
Mais si l’on assimile ces Temps à l’autre, on tombe dans des paradoxes qui ont certainement nui à la théorie de la Relativité, encore qu’ils aient contribué à la rendre populaire.
Plus on descend dans la série animale, plus les centres nerveux se simplifient et se séparent les uns des autres ; finalement, les éléments nerveux disparaissent, noyés dans la masse d’un organisme moins différencié : ne devons-nous pas supposer que si, au sommet de l’échelle des êtres vivants, la conscience se fixait sur des centres nerveux très compliqués, elle accompagne le système nerveux tout le long de la descente, et que lorsque la substance nerveuse vient enfin se fondre dans une matière vivante encore indifférenciée, la conscience s’y éparpille elle-même, diffuse et confuse, réduite à peu de chose, mais non pas tombée à rien ?
Toutes les puissances souveraines reconnaissent la Providence, et ajoutent à leurs titres de majesté, par la grâce de Dieu ; elles doivent en effet avouer publiquement que c’est de lui qu’elles tiennent leur autorité, puisque, si elles défendaient de l’adorer, elles tomberaient infailliblement.
Ils sont à côté de lui, il vient de les quitter dans la rue, il les désigne du doigt : Je connais maint detteur qui n’est ni souris chauve, Ni buisson, ni plongeon dans un tel cas tombé, Mais simple grand seigneur, qui tous les jours se sauve Par un escalier dérobé. […] Mais aussitôt que don Coursier se dit malade, il tombe en puissance de médecin, et l’Hippocrate improvisé l’endoctrine en l’appelant « mon fils. » Ce ton paternel et magistral n’empêche pas la servilité des manières ni l’emphase du programme.
À bien des égards, par l’enthousiasme et la hauteur de la pensée, cette page rappelle l’hymne de Shelley à la Beauté intellectuelle : « J’ai gravi sur mes genoux la montée qui conduit à Dieu : je suis tombé, me suis relevé, je suis retombé encore ; je me suis abattu si fort que je restai sur le chemin, statue gisante, pâle, et comme prêt pour le sommeil suprême ; mais c’est là période accomplie. […] Mais comment alors poser le problème de la littérature et de l’art des vers, dans la réalité, sans tomber dans un empirisme grossier, qui ne mènerait à rien ?
À peine pourrait-on dire qu’il tombe parfois dans un travers commun aux virtuoses et qu’il ne semble pas toujours exempt d’une certaine sécheresse. […] L’épisode plaisant survient à point nommé pour combler un léger vide, et le rideau tombe, comme il s’était levé, sur un effet parfois un peu gros, mais toujours certain. […] Qu’alors viennent en question les choses les plus ordinaires, des choses triviales, — qu’un prolétaire à ceinture de flanelle rouge exprime grossièrement des revendications, qu’une petite femme tombe d’un omnibus81, ces événements se dépourvoient de leur vulgarité, et même de leur sens naturel. […] La première fois que je lui prêtais une sérieuse attention, Nane était en l’air, et tombait d’un omnibus.
Il veut parler, interroger sa maîtresse, un baiser lui ferme la bouche, et il maudit la jalousie comme une injure faite à son idole ; s’il pouvait croire que Manon eût deviné son inquiétude, il tomberait à ses genoux pour implorer son pardon. […] Hugo est aujourd’hui tombé. […] Hugo, en maniant le vocabulaire, a mis en lumière plusieurs faces de notre langue qui jusqu’ici étaient demeurées dans l’ombre, ou qui, après avoir brillé quelque temps, étaient tombées en oubli. […] Tombé de l’ode à l’antithèse, de l’antithèse au spectacle, M.
Mais le prisonnier, sous l’influence d’idées nouvelles, voit ses chaînes tomber. […] C’est un semeur, qui jette sa semence au hasard, sans s’inquiéter du grain qui tombe sur la pierre. » Ces êtres innombrables tendent à vivre : mais les moyens de vivre étant limités, et la production des êtres illimitée, naît la lutte. […] Et, lorsque je vois tomber, incessante et sale, cette pluie d’hiver mêlée de neige, il me semble que, après tout, Jules Laforgue a eu raison de s’en être allé. […] Mais voici que, fatigué de ses veilles et de ses angoisses, le vieux roi tomba malade à son tour. […] Et, comme mon vénérable conseiller ajoutait, en façon d’argument a posteriori, que son crayon tomberait à terre, s’il l’en laissait libre, et comme effectivement son crayon tomba, je reconnus avec certitude que l’ordre des choses dans l’univers devait être immuable, pour rendre possibles, à chaque moment, de telles prévisions.
» La raison en est bien simple : ils haïssent les Mercenaires ; ceux-là leur tombent sous la main ; ils sont les plus forts et ils les tuent.
Homère a comparé les générations humaines, — Horace a comparé la succession des mots et vocables à la frondaison des bois, aux feuilles passagères qui verdissent, gardent leur fraîcheur plus ou moins de temps, puis jaunissent et tombent.
On avait leur cime, on jouissait de leur ombre, on recevait les fruits tombés des altiers rameaux ; mais l’arbre sacré était de l’autre côté du mur, dans un verger plus ou moins inconnu, et dont la superstition pouvait faire un Éden privilégié.
Pour couronner le tableau des qualités domestiques chez Mme Roland, il ne faut plus que rappeler le début de cette autre lettre écrite à Bosc, de Villefranche : « Assise au coin du feu, mais à onze heures du matin, après une nuit paisible et les soins divers de la matinée, mon ami à son bureau, ma petite à tricoter, et moi causant avec l’un, veillant l’ouvrage de l’autre, savourant le bonheur d’être bien chaudement au sein de ma petite et chère famille, écrivant à un ami tandis que la neige tombe, etc. » A côté de ces façons d’antique aloi, de ces qualités saines et bonnement bourgeoises, osons noter l’inconvénient ; à défaut du chatouillement aristocratique, la jactance plébéienne et philosophique ne perce-t-elle pas quelquefois ?
Vous voyez donc que le livre n’échappe pas à la loi et qu’il tombera, lui aussi, presque toujours sous son application.
Cet acte est vide ; d’où il arrive que nous l’estimons pur, simple, spirituel : l’erreur est justement celle où nous tombions tout à l’heure à propos de la perception extérieure et de la mémoire. — En somme, ici comme ailleurs, l’événement intérieur se réduit à la conception, représentation ou fantôme actuel intérieur ; la connaissance qu’il est tel, c’est-à-dire actuel, interne et fantôme, n’est pas autre que la rectification ou négation par laquelle il est exclu du dehors, du futur et du passé.
Puis Boileau, qui n’avait pas du tout l’imagination dramatique, est tombé dans la même erreur que La Bruyère, qui oppose son Onuphre à Tartufe, sans s’apercevoir que la vérité théâtrale n’est pas celle du livre, et que la scène a ses conditions et comme son optique particulières, qui obligent à faire une copie inexacte de la nature pour en donner la sensation vraie.
Des embarras d’argent inquiétèrent sa vieillesse, et il fut obligé, comme il dit, d’hypothéquer sa tombe, c-à-d. de vendre à une société la propriété de ses Mémoires qui ne devaient paraître qu’après sa mort.Éditions : Atala, 1801, in-12 ; Génie du Christianisme, 1802, 5 vol. in-12 ; Atala et René, 1805, in-12 ; les Martyrs, 1809, 2 vol. in-12 ; Itinéraire, 1811, 3 vol. in-8 ; Œuvres complètes (contenant la 1re éd. des Natchez), 1826-1831, 31 vol. in-8 ; éd.