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758. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Le cardinal Ximénès »

Depuis le premier quart du xixe  siècle, toute protestante qu’elle est, on l’a vue rendre hommage au catholicisme, et, cela, dans la personne d’hommes discutés ou suspectés par l’opinion au sein des nations catholiques. […] III Il le leur montra, mais Isabelle le vit avant personne. […] Indépendamment de ce déchet, de cette absence de relief dans la personne, qu’il faut ressusciter, puisqu’elle est le sujet du livre même, on ne trouve dans l’histoire en question aucune trace de composition, aucune architecture régulière dans la distribution des détails que l’auteur a recueillis sur l’un des plus grands hommes de l’Espagne.

759. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Laïs de Corinthe et Ninon de Lenclos » pp. 123-135

Debay n’est point un moraliste, et, comme on ne se fait pas, à soi-même, ses propres facultés, nous n’avons pas plus à l’en blâmer qu’à l’en absoudre ; mais nous avons cherché vainement dans son livre le sentiment moral dont personne n’est dispensé. […] Ce précieux papyrus, qui était signé par Aristophane de Bysance, affirme bien une fois de plus une influence que personne ne conteste, mais il ne l’explique pas, et, nous disons plus, il ne pouvait pas l’expliquer. […] Elle était l’amie de Saint-Évremond, exilé qui remplissait tout de sa personne absente, philosophe qui prenait son égoïsme pour de la sagesse, et qui était bien digne de s’accointer à Ninon, plus égoïste que lui encore, espèce de Fontenelle en femme, qui cachait sa monstruosité morale sous cette beauté sans grandeur qui conseille aux hommes l’insolence.

760. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Marie-Antoinette » pp. 171-184

Depuis Henri IV et Louis XIV, qui reconnaissaient leurs bâtards et leur donnaient des maisons princières, jusqu’à Louis XV, qui éleva l’adultère à la Fonction dans la personne de madame de Pompadour et de madame du Barry, des générations successives de maîtresses avaient suivi des générations successives de Bourbons sur le trône, en sorte que l’on aurait pu croire que, si le Roi ne mourait pas en France, la Maîtresse du Roi ne mourait pas non plus… Nous ne craignons pas de le dire : c’est là le grand crime des Bourbons, la tache indélébile qu’on ne lavera point dans toute leur gloire. […]personne en Europe ne le prévoyait mieux que la sage et pieuse Marie-Thérèse. […] Plus fine que tous ces Français, cette Allemande, qui semblait naïve quand elle faisait dire à ce vieux campagnard de génie, Mirabeau l’Ancien, père de Mirabeau le Superbe, quand elle lui faisait dire, dans son style magnifiquement bourru : « Je me suis dit que Louis XIV serait un peu étonné s’il voyait la femme de son arrière-successeur en habit de paysanne et tablier, sans suite, ni page, ni personne, courant le palais et les terrasses, demandant au premier polisson de lui donner la main, que celui-ci lui prête seulement jusqu’au bas de l’escalier.

761. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XII. Marie-Antoinette, par MM. Jules et Edmond de Goncourt » pp. 283-295

Depuis Henri IV et Louis XIV, qui reconnaissaient leurs bâtards et leur donnaient des maisons princières, jusqu’à Louis XV, qui éleva l’adultère à la Fonction, dans la personne de Mme de Pompadour et de Mme Du Barry, des générations successives de maîtresses avaient suivi des générations successives de Bourbons sur le trône, en sorte que l’on aurait pu croire que si le Roi ne mourait pas en France, la Maîtresse du Roi ne mourait pas non plus… Nous ne craignons pas de le dire, c’est là le grand crime des Bourbons, la tache indélébile qu’on ne lavera point dans toute leur gloire. […] Or, cet affaiblissement par les Bourbons de la monarchie en France et dans le monde, cet affaiblissement qui nous faisait tomber dans le mépris d’un roi de Prusse, — car Dieu, qui s’entend au mépris, sait choisir la coupe d’où il le verse, — personne en Europe ne le prévoyait mieux que la sage et pieuse Marie-Thérèse. […] Plus fine que tous ces Français, cette Allemande, qui semblait naïve quand elle faisait dire à ce vieux campagnard de génie, Mirabeau l’Ancien, père de Mirabeau le Superbe, quand elle lui faisait dire dans son style, magnifiquement bourru : « Je me suis dit que Louis XIV serait un peu étonné, s’il voyait la femme de son arrière-successeur en habit de paysanne et tablier, sans suite, ni page, ni personne, courant le palais et les terrasses, demandant au premier polisson de lui donner la main, que celui-ci lui prête seulement jusqu’au bas de l’escalier.

762. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Le docteur Revelière » pp. 381-394

Il n’a pas écrit sur sa personne, quand tout le monde écrivaille sur la sienne. […] Et c’est immédiatement et la fin du règne de Louis XIV, — le dernier roi qui ait incarné purement et intégralement dans sa personne le principe qui a fait vivre, pour la première fois dans les annales du monde, pendant huit cents ans, une Monarchie, — qu’il date l’avènement, dans les doctrines et dans les faits, de cette Révolution, rapide comme tous les fléaux, qui a déjà tout envahi, et dont l’ambition est de détruire l’organisation séculaire des gouvernements et des États. […] Mauvais moment — je le dis avec tristesse — pour un livre qui, malgré la force de ses démonstrations, ne peut plus être un enseignement pour personne !

763. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Μ. Eugène Hatin » pp. 1-14

Nous n’avons aucun renseignement, aucune donnée sur la personne de Μ.  […] Avant de créer sa gazette, il avait innové en médecine au point de s’attirer déjà beaucoup d’inimitiés, qui éclatèrent plus tard, après son succès comme gazetier, et parmi lesquelles brille au premier rang celle du fameux et violent Guy Patin, doué plus que personne de cette force de haine corporative qui semble avoir plusieurs cœurs pour mieux détester… Renaudot, qui était chimiste, avait introduit la chimie en médecine, et peut-être ceux qui sont friands de ces rapprochements historiques en feront-ils un jour comme un précurseur de Hahnemann. […] Dynastie de gazetiers, dynastie de médecins, dans la personne de ses deux fils, Eusèbe et Isaac Renaudot, et dans celle de son petit-fils Eusèbe, deuxième du nom, connu, au temps de Louis XIV, sous le nom d’abbé Renaudot.

764. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Camille Desmoulins » pp. 31-44

Ici et là, la même insurrection, à laquelle personne n’échappait ! […] Armé, il l’était comme personne ne le fut peut-être par la nature de son esprit étincelant, acéré et rapide ; mais il ne l’était pas par le caractère, les principes, la conviction réfléchie et la dernière ressource de la vie, — une profonde moralité. […] », Camille avait pourtant, au fond, du Trissotin dans sa personne.

765. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Émile Augier, Louis Bouilhet, Reboul »

C’est de l’Alfred de Musset sans la grâce de ses éperons d’or ; de l’Alfred de Musset mis à pied et au niveau de la bassesse générale des imaginations, ne choquant plus personne par sa supériorité même. […] , porte, il est vrai, une préface en vers de 1852 ; mais nous n’acceptons pas plus pour ces Poésies complètes d’Augier que pour les Odes funambulesques dont nous parlions récemment, la fin de non-recevoir tirée de la longueur du temps qui s’est écoulé depuis qu’un livre a été produit, et que certaines personnes trop indulgentes invoquent au bénéfice de l’écrivain. […] IV Cette imitation des deux à trois grands poètes du siècle, qui résume, en ces derniers temps, le stérile mouvement des imaginations poétiques, Reboul, plus que personne peut-être, était né pour y échapper.

766. (1866) Dante et Goethe. Dialogues

Plus que personne, Dante avait droit de se réjouir. […] Mais aujourd’hui personne ne prend plus cette peine. Personne ne croit à l’enfer. […] J’ai dit que, aujourd’hui, personne ne croyait plus aux flammes éternelles. […] Qu’est devenue cette étrange personne ?

767. (1858) Cours familier de littérature. V « XXIXe entretien. La musique de Mozart » pp. 281-360

On admet toutes les personnes de distinction. […] Glatz, d’Augsbourg, et nous sommes convenus que vous deviez descendre à Augsbourg chez Lamb, dans la rue Sainte-Croix, où vous dînerez à 1 f. par personne, où vous trouverez de belles chambres, et où descendent des personnes fort distinguées, des Anglais, des Français, etc. […] D’abord, personne n’ira dès ton arrivée renvoyer son maître pour te prendre. En second lieu, personne ne te prendra, si ce n’est peut-être quelques dames qui jouent déjà bien, qui veulent perfectionner leur goût, et, dans ce cas, elles payeront bien. […] Il n’y avait personne auprès d’elle que moi, un de nos bons amis, que mon père connaît, M. 

768. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

Mais il sent avec désespoir que plus il déchire ses habits plus il ressemble à Pierre, « car de loin, dit Swift, dans l’obscurité, ou pour les personnes qui ont la vue basse, rien de plus semblable à des parures que des haillons ». […] Swift, qui ne vit jamais dans la religion qu’une partie importante de la politique, était porté à oublier qu’elle était considérée par un grand nombre de personnes comme une institution divine, en dehors et au-dessus de la politique. […] On sent combien des ministres, si peu maîtres de la reine sur les questions générales, étaient impuissants sur les questions de personnes. […] Il restait souvent longtemps sans aller la voir, et les lettres de Vanessa nous apprennent combien ses visites étaient souvent cruelles : « Je vous prie de me voir et de me parler avec douceur, car vous ne condamneriez personne à souffrir ce que j’endure ; puissiez-vous seulement le savoir. […] Après l’universelle clameur de l’Irlande, personne n’avait osé comparaître pour une pareille cause, quoique le gouvernement offrît les frais du voyage et les indemnités des témoins.

769. (1903) La pensée et le mouvant

Tout ce qu’on me raconte de la personne me fournit autant de points de vue sur elle. […] Seule, la coïncidence avec la personne même me donnerait l’absolu. […] C’est notre propre personne dans son écoulement à travers le temps. […] Personne ne contestera que ce soit un travail fort bien fait. […] Toute sa personne respirait cette discrétion extrême qui est la suprême distinction.

770. (1925) Promenades philosophiques. Troisième série

Il hausse les épaules, en la personne de M.  […] Presque personne ne conteste plus cela maintenant, mais presque personne ne sait encore le mettre en pratique. […] Elle ne se plaisait que seule et n’aima jamais rien ni personne. […] Personne n’a presque échappé à la contagion. […] Ceci ne fait honneur à personne.

771. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — II. (Fin.) » pp. 452-472

Mirabeau était à Londres en 1785 ; il dînait chez le marquis de Lansdowne avec plusieurs Anglais de distinction, et, par un singulier quiproquo, il crut y voir et y entendre Gibbon en personne, lequel en ce moment habitait la Suisse. […] Mirabeau s’emporte contre la personne qu’il suppose être Gibbon, et contre les discours qu’il dit avoir entendus de sa bouche. […] Son visage n’est pas beau, mais sa personne avec tout ce qui l’entoure est d’une grâce et d’une beauté admirables. […] Chaque place, chaque allée, chaque banc lui rappelaient les douces heures passées dans l’entretien de celui qui n’était plus : « Depuis que j’ai perdu ce pauvre Deyverdun, s’écriait-il, je suisseul, et, même dans le paradis, la solitude est pénible à une âme faite pour la société. » Vers ce temps, il songea assez sérieusement ou au mariage, ou du moins à adopter quelqu’une de ses jeunes parentes, une jeune Charlotte Porten (sa cousine germaine, je crois) : « Combien je m’estimerais heureux, écrivait-il à la mère de cette jeune personne, si j’avais une fille de son âge et de son caractère, qui serait avant peu de temps en état de gouverner ma maison, et d’être ma compagne et ma consolation au déclin de ma vie !  […] « Gibbon n’écrivait à personne et ne sacrifiait ni à l’amitié ni aux convenances aucun des moments destinés à l’étude. » (Notice de la vie et des écrits de Le Sage, de Genève, p. 120.)

772. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — II » pp. 316-336

Quand il n’y aurait que deux personnes de la religion, je serai un des deux. » Il a tenu cette parole dans toute la suite des guerres, et il n’a renoncé que lorsque tout lui a manqué. […] Le maréchal de Thémines commandait l’armée que le roi opposa à Rohan ; il se présenta devant Castres, où la duchesse de Rohan, qui avait laissé son mari, avec un conseil ou abrégé d’assemblée, dut prendre sur elle, dans l’embarras de ses conseillers, de donner des ordres ; et la circonstance l’élevant au-dessus d’elle-même, cette personne mondaine, mais de courage, sut pourvoir à tout. […] À Ré, au moment le plus décisif de l’effort contre les troupes du roi qui y avaient opéré une descente, Soubise ne parut point faire de sa personne et de son bras tout ce qu’il aurait pu ; et à Viane, pendant que le maréchal Thémînes attaquait et brûlait un faubourg enchâssant vivement les troupes qu’on lui opposait, M. de Rohan fut remarqué sur un bastion de la ville, « d’où il considérait l’action une canne à la main ». […] Durant la paix son esprit est aussi peu en repos, comme durant la guerre il hasarde peu sa personne. […] Quelque chose de ce sentiment austère et contristé se réfléchit dans la page suivante, où M. de Rohan, après avoir raconté la reddition de La Rochelle le 28 octobre (1628), ajoute du ton de fermeté et de fierté qui lui est propre : La mère du duc de Rohan et sa sœur4 ne voulurent point être nommées particulièrement dans la capitulation, afin que l’on n’attribuât cette reddition à leur persuasion et pour leur respect, croyant néanmoins qu’elles en jouiraient comme tous les autres ; mais comme l’interprétation des capitulations se fait par le victorieux, aussi le conseil du roi jugea qu’elles n’y étaient point comprises, puisqu’elles n’y étaient point nommées : rigueur hors d’exemple, qu’une personne de cette qualité, en l’âge de soixante-dix ans (et plus), sortant d’un siège où elle et sa fille avaient vécu trois mois durant de chair de cheval et de quatre ou cinq onces de pain par jour, soient retenues captives sans exercice de leur religion, et si étroitement qu’elles n’avaient qu’un domestique pour les servir, ce qui, néanmoins, ne leur ôta ni le courage ni le zèle accoutumé au bien de leur parti ; et la mère manda au duc de Rohan, son fils, qu’il n’ajoutât aucune foi à ses lettres, pource que l’on pourrait les lui faire écrire par force, et que la considération de sa misérable condition ne le fît relâcher au préjudice de son parti, quelque mal qu’on lui fît souffrir.

773. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Mémoires ou journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guetté. Tomes iii et iv· » pp. 285-303

Mais le journal que l’abbé Le Dieu s’est avisé de tenir durant des années, et qu’il a commencé quatre ans environ avant la mort de Bossuet pour le poursuivre presque jusqu’à l’époque de sa propre mort (1699-1713), est d’un caractère tout différent, et j’ai peine à ne pas regretter qu’il ait été publié in extenso : car il ne fait honneur à personne. […] Tous les convives l’attendaient à la salle à manger, et personne n’était venu à sa chambre, où l’on savait que j’étais enfermé avec lui. […] L’entretien fut aussi très aisé, doux et même gai : le prélat parlait à son tour, et laissait à chacun une honnête liberté ; je remarquai que ses aumôniers, secrétaires et son écuyer parlèrent comme les autres, fort librement, sans que personne osât ni railler ni épiloguer. Les jeunes neveux ne parlaient pas : l’abbé de Beaumont soutenait la conversation, qui roula fort sur le voyage de M. de Cambrai ; mais cet abbé était très honnête, et je n’aperçus rien, ni envers personne de ces airs hautains et méprisants que j’ai tant de fois éprouvés ailleurs47 : j’y ai trouvé en vérité plus de modestie et de pudeur qu’ailleurs, tant dans la personne du maître que dans les neveux et autres.

774. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Lettres inédites de Michel de Montaigne, et de quelques autres personnages du XVIe siècle »

Il faudrait relire ici le chapitre tout entier de ses Essais (le Xe du livre III) qui lui a été inspiré par les souvenirs de sa mairie ; c’est encore lui qui nous en dit plus que personne sur sa gestion publique et sur l’esprit qu’il y apporta. […] Le maréchal de Matignon, au lieu d’écrire, aima mieux communiquer verbalement les nouvelles, et Montaigne fut chargé de les porter en personne à Bergerac où se trouvait alors Henri. […] Mais la suite et la fin sont un peu moins belles, quoique je ne voie pas que personne, en ce temps-là, lui en ait fait un sujet formel de reproche. […] En 1585, la maladie fut d’une intensité extraordinaire ; de juin jusqu’à décembre, il ne mourut pas moins de quatorze mille personnes. […] J’entre autant que personne dans l’esprit de ces raisons, et je reconnais même dans cette conduite le véritable Montaigne tel que je me le suis toujours représenté, avec toutes ses qualités de bon esprit, de modération, de prudence, de philosophie et de parfaite sagesse ; à quoi il ne manque que ce qui n’est plus en effet de la philosophie et de la sagesse, ce qui est de la sainte folie, de la flamme et du dévouement.

775. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.). Guerre des Barbets. — Horreurs. — Iniquités. — Impuissance. »

Les ambassadeurs suisses firent alors un dernier et suprême effort de médiation ; dans une lettre des plus pressantes qui fut lue en chaire par toutes les paroisses vaudoises, ils disaient81 : « Nous avons vu que vous avez beaucoup de peine à vous résoudre de quitter votre patrie, qui vous est d’autant plus chère que vos ancêtres l’ont possédée par plusieurs siècles et défendue valeureusement avec la perte de leur sang ; que vous vous confiez que Dieu, qui les a soutenus plusieurs fois, vous assistera aussi et que vous appréhendez même qu’une déclaration pour la sortie ne soit qu’un piège pour vous surprendre et accabler : nous vous dirons pour réponse que nous convenons avec vous que la loi qui oblige à quitter une chère patrie est fort dure ; vous avouerez que celle qui oblige à quitter l’Éternel et son culte est encore plus rude, et que de pouvoir faire le choix de l’un avec l’autre est un bonheur qui, en France, est refusé à des personnes de haute naissance et d’un éminent mérite, et qui s’estimeraient heureuses si elles pouvaient préférer une retraite à l’idolâtrie. » Quelle tache et quelle honte pour la France de Louis le Grand qu’une atroce injustice comme celle-ci trouve presque à se glorifier et à s’absoudre par l’exemple d’une injustice plus abominable encore, dont elle offrait alors au monde l’odieux et parfait modèle ! […] Il est vrai que le bras de Dieu, qui vous a soutenus dans les guerres passées, n’est pas encore raccourci ; mais si vous faites réflexion qu’un puissant roi s’est joint aux forces de votre prince, que les provisions, les officiers et l’union vous manquent, et que même vos obstinations vous feront abandonner de tous les princes et des États protestants…, vous ne pouvez pas espérer que la Providence divine, qui n’agit pas miraculeusement comme autrefois parmi les Israélites, veuille faire de vos ennemis ce qu’elle fit de Sennacherib ; et la parole de Dieu vous apprend que de se jeter dans les dangers sans prévoir humainement aucun moyen d’en sortir, c’est tenter Dieu qui laisse périr ceux qui aiment témérairement le danger… » On peut se figurer l’effet que dut produire la lecture d’une telle épître sur un auditoire mêlé de personnes timides, de vieillards, de femmes et d’enfants. […] Enfin il s’est mis sur son trône, et commence à se conduire comme un maître qui a la force à main. » Victor-Amédée donc, en personne, et Catinat général, son allié, s’avancèrent en forces pour tout réduire, pour nettoyer ces vallées de leurs habitants et les purger d’un des cultes les plus sincères et les plus innocents qui aient jamais été adressés à l’Éternel. […] Les cruautés ici et les horreurs furent bientôt réciproques, et personne ne fut en reste. […] Il y entra, dit-on, le 8 février (1687) à pied, couvert de son manteau sans que personne l’attendît, pour éviter toutes les cérémonies qui n’étaient pas de son goût et pour épargner les dépenses vaines.

776. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [III] »

— avait naturellement identifié l’idée de tactique et la personne de Jomini. […] Le maréchal s’élançait comme moi volontairement à une brèche où personne ne l’envoyait, et voulait vaincre toute l’armée du prince de Hohenlohe avec les quatre mille hommes seulement qui le suivaient : la moitié de ces braves paya de la vie une téméraire intrépidité, et trois de ses aides de camp y furent grièvement blessés. […] Après avoir suivi le plus grand des capitaines pendant plusieurs campagnes, personne ne doit regretter plus que moi de ne pouvoir plus servir dans ses armées. […] Berthier retint Jomini dans son état-major pour l’inutiliser, et dans le même temps Jomini recevait de l’empereur de Russie, par suite de sa première démarche, un brevet de général-major attaché à sa personne. […] Les hommes qui en valent la peine ne se jugent point d’un coup d’œil ni en un instant ; et, comme l’a dit le grand poète persan Sadi : « Ce n’est qu’en laissant s’écouler un long espace de temps que l’on arrive à connaître à fond la personne qu’on étudie. » Ce devrait être la devise de toute biographie sérieuse.

777. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre III »

Mais leur effet d’ensemble est plus pernicieux encore ; car, de tant de travailleurs qu’elles ruinent, elles font des mendiants qui ne veulent plus travailler, des fainéants dangereux qui vont quêtant ou extorquant leur pain chez des paysans qui n’en ont pas trop peur pour eux-mêmes. « Les vagabonds, dit Letrosne759, sont pour la campagne le fléau le plus terrible ; ce sont des troupes ennemies qui, répandues sur le territoire, y vivent à discrétion et y lèvent des contributions véritables… Ils rôdent continuellement dans les campagnes, ils examinent les approches des maisons et s’informent des personnes qui les habitent et des facultés du maître  Malheur à ceux qui ont la réputation d’avoir quelque argent ! […] » Vingt-cinq ans avant la Révolution, il n’était pas rare d’en voir quinze ou vingt « tomber dans une ferme pour y coucher, intimider les fermiers, et en exiger tout ce qu’il leur plaisait »  En 1764, le gouvernement prend contre eux des mesures qui témoignent de l’excès du mal760 : « Sont réputés vagabonds et gens sans aveu, et condamnés comme tels, ceux qui, depuis six mois révolus, n’auront exercé ni profession ni métier, et qui, n’ayant aucun état ni aucun bien pour subsister, ne pourront être avoués ni faire certifier de leurs bonnes vies et mœurs par personnes dignes de foi… L’intention de Sa Majesté n’est pas seulement qu’on arrête les vagabonds qui courent les campagnes, mais encore tous les mendiants, lesquels, n’ayant point de profession, peuvent être regardés comme suspects de vagabondage. » Pour les valides, trois ans de galères ; en cas de récidive, neuf ans ; à la seconde récidive, les galères à perpétuité. […] Au-dessous de seize ans, les enfants iront à l’hôpital. « Un mendiant qui s’est exposé à être arrêté par la maréchaussée, dit la circulaire, ne doit être relâché qu’avec la plus grande certitude qu’il ne mendiera plus ; on ne s’y déterminera donc que dans le cas où des personnes dignes de foi et solvables répondraient du mendiant, s’engageraient à lui donner de l’occupation ou à le nourrir, et indiqueraient les moyens qu’elles ont pour l’empêcher de mendier. » Tout cela fourni, il faut encore, par surcroît, l’autorisation spéciale de l’intendant. […] Par l’ordonnance de 1778, écrit un intendant762, « les cavaliers de la maréchaussée doivent arrêter, non seulement les mendiants et vagabonds qu’ils rencontrent, mais encore ceux qu’on leur dénonce comme tels ou comme personnes suspectes. […] En Normandie, d’après les déclarations des curés, « sur 900 paroissiens de Saint-Malo, les trois quarts peuvent vivre, le reste est malheureux »  « Sur 1 500 habitants de Saint-Patrice, 400 sont à l’aumône ; sur 500 habitants de Saint-Laurent, les trois quarts sont à l’aumône. » À Marbœuf, dit le cahier, « sur 500 personnes qui habitent notre paroisse, 100 sont réduites à la mendicité, et en outre nous voyons venir des paroisses voisines 30 ou 40 pauvres par jour768 ».

778. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Paul Bourget  »

Paul Bourget 70 I Je ne me souviens pas d’avoir jamais senti d’embarras comparable à celui que j’éprouve au moment de parler de l’œuvre et de la personne littéraire de M.  […] La femme qui se déshabille pour se donner à un homme dépouille avec ses vêtements toute sa personne sociale ; elle redevient pour celui qu’elle aime ce qu’il redevient, lui aussi, pour elle : la créature naturelle et solitaire dont aucune protection ne garantit le bonheur, dont aucun édit ne saurait écarter le malheur. » Je suis ravi de cette beauté de pensée et de forme ; mais je tourne la page et j’y trouve une « floraison » ou un « avortement » qui « dérive » d’une certaine qualité d’amour. […] Au reste, il isole ces œuvres, néglige le plus souvent la personne même des écrivains ; ou, s’il en parle, c’est pour leur attribuer, au nom du libre arbitre, le mérite ou le déshonneur d’avoir servi ou trahi l’idéal littéraire dont il a posé au commencement la définition. […] Et pourtant son Histoire se déroule suivant un plan inexorable et l’esprit français ressemble chez lui à une personne morale qui se développerait, puis déclinerait à travers les âges. […] Nul, je crois, depuis Mme de La Fayette, depuis Racine, depuis Marivaux, depuis Laclos, depuis Benjamin Constant, depuis Stendhal, n’a induit avec plus de bonheur, décrit avec plus de justesse, enchaîné avec plus de vraisemblance ni exposé dans un plus grand détail les sentiments que doit éprouver telle personne dans telle situation morale.

779. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Michaud, de l’Académie française. » pp. 20-40

Michaud, de ceux-là dont il a accueilli l’un des premiers et favorisé la jeunesse, et que moi-même je l’ai assez de fois écouté et vu pour pouvoir ressaisir et définir avec sûreté le genre de distinction de sa personne et le grain de son esprit. […] Michaud, aussi dégagé de fanatisme pour les choses et de prévention contre les personnes, était extrêmement piquante dans un camp violent et enflammé tel qu’était alors l’opinion royaliste extrême. […] Il s’était logé à Passy dans une maison agréable, entourée d’un jardin ; il s’était uni depuis des années à une jeune, à une belle et aimable personne qui animait son intérieur et réjouissait son regard. […] Il était ce qu’on aurait nommé autrefois un gentil esprit, narquois, un peu risqué et pourtant de très bonne compagnie, d’une élégance naturelle, bien que très négligé sur sa personne ; il avait beau se couvrir de tabac et garder au doigt sa tache d’encre, on le sentait essentiellement distingué, fait pour plaire, et ayant tout le meilleur goût de l’ancienne société. […] Michaud se rencontra avec elle chez Mme Suard qui, en bonne personne qu’elle était, se disposait à jouir de l’embarras ; M. 

780. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — I. » pp. 287-307

Ainsi maître de la langue, lancé dans les meilleures compagnies, armé d’un bon esprit et muni de points de comparaison très divers, il se trouvait aussitôt plus en mesure que personne pour bien juger de la France. […] En parlant mal, personne ne se fait mieux écouter ; il me semble qu’en matière de goût nul n’a le tact plus délicat, plus fin, ni plus sûr. […] Meister parle des agréments de sa figure, de sa physionomie pleine de finesse et d’expression, et en même temps il ne nous dissimule pas ce que l’ensemble de sa personne avait d’irrégulier : Il portait, dit-il, la hanche et l’épaule un peu de travers, mais sans mauvaise grâce. […] J’y ai des connaissances, mais je n’y suis lié intimement avec personne. […] Assurément, pour faire ainsi une pension aux personnes qui étaient près de lui, il fallait être un grand conspirateur.

781. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — II. (Fin.) » pp. 308-328

Au début de ses feuilles de correspondance, il continue d’être dans les mêmes sentiments ; son ton et son intention ne sont rien moins que frivoles ; il ne voit, dans le secret qu’on lui promet, qu’une raison de plus d’exercer une franchise sans bornes : L’amour de la vérité, dit-il, exige cette justice sévère comme un devoir indispensable, et nos amis même n’auront pas à s’en plaindre, parce que la critique qui n’a pour objet que la justice et la vérité, et qui n’est point animée par le désir funeste de trouver mauvais ce qui est bon, peut bien être erronée et sujette à se rétracter quelquefois, mais ne peut jamais offenser personne. […] Son Jules César est aussi plein de Plutarque que Britannicus l’est de Tacite ; et, s’il n’a pas appris l’histoire mieux que personne, il faut dire qu’il l’a devinée, au moins quant aux caractères, mieux que personne ne l’a jamais sue. […] Des relations si intimes avec les puissances le mirent à même d’être souvent utile au mérite, et, si on le trouve parfois rigoureux ou quelque peu satirique dans ses jugements, les personnes qui l’ont le mieux connu assurent qu’il sut être bienveillant en secret ; il se plaisait à attirer l’attention de ses augustes correspondants sur les talents d’hommes de lettres et d’artistes à honorer ou à protéger. […] Il y avait des années qu’écrivant à Mlle Volland, l’amie de Diderot, et lui parlant de la vérité et de la vertu comme de deux grandes statues que Diderot se plaisait à voir élevées sur la surface de la terre et immobiles au milieu des ravages et des ruines : « Et moi je les vois aussi, s’écriait-il ; … mais qu’importe que ces deux statues soient éternelles et immobiles s’il n’existe personne pour les contempler, ou si le sort de celui qui les aperçoit ne diffère point du sort de l’aveugle qui marche dans les ténèbres ! 

782. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — I. » pp. 455-475

On a déjà cinq volumes des lettres de Frédéric, groupées par séries et rangées selon les personnes avec lesquelles il correspond et dont on publie également les lettres. […] Mon cher Diaphane, faites bien vos réflexions, je vous en prie, et, pour une vaine ombre d’établissement, n’allez pas commettre un meurtre en votre propre personne. […] Galonnier (le tailleur) et Mme Adam (la sellière) viennent lui rendre visite… Enfin onze ou douze personnes sont entêtées de la Vie du prince Eugène, ils la veulent avoir à quelque prix que ce soit ; jugez de ma situation. […] Je vous avoue que je suis de ces personnes qui aiment à partager la gloire des autres, et que, sans la philosophie, je verrais avec inquiétude tant de grandes actions sans y assister. […] Rendre quelqu’un heureux est une grande satisfaction ; mais faire le bonheur d’une personne qui nous est chère, c’est le plus haut point où puisse atteindre la félicité humaine.

783. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Émile Zola » pp. 70-104

Zola les ensembles où les personnes agissent dans des lieux. […] En ce sens, que des personnes peu habituées à l’analyse trouveront subtil, les romans de. […] Son Excellence et la Curée renseignent sur le Paris des démolitions, contiennent des scènes et des gens d’une admirable variété, des officieux, du ministre aux convives de Saccard ; à travers une promenade au Bois et une séance du Corps Législatif, le baptême d’un prince, un bal de filles, une fête de bienfaisance, un Compiègne, circule une foule de personnes en chair, marquées, caractéristiques et agissantes, Mme Bouchard, Maxime, Suzanne Haffner, du Poizat, qui entourent ce colosse et ce gnome Eugène Rougon et Aristide Saccard. […] Zola veut dire qu’il ne faut jamais oublier dans une œuvre d’imagination que les personnages, sont des êtres physiques en chair et en os et qu’en une certaine mesure et sauf de nombreuses exceptions (Louis Lambert, Spinoza) le fonctionnement de leurs cerveaux s’influe du cours du sang et de l’activité des viscères, personne n’y contredira. […] Il a encore ce que personne n’a eu avant lui, le don d’animer ainsi, d’une vie puissante, les êtres moyens, ordinaires, sans traits exceptionnels, et sans autres qualités qu’une grande bonté et une forte volonté.

784. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre III. “ Fantômes de vivants ” et “ recherche psychique ” »

Ce qui compte et ce qui demeure, c’est ce qu’on a apporté de vérité positive . l’affirmation vraie se substitue à l’idée fausse en vertu de sa force intrinsèque et se trouve être, sans qu’on ait pris la peine de réfuter personne, la meilleure des réfutations. […] Pour ma part, quand je repasse dans ma mémoire les résultats de l’admirable enquête poursuivie inlassablement par vous pendant plus de trente ans, quand je pense aux précautions que vous avez prises pour éviter l’erreur, quand je vois comment, dans la plupart des cas que vous avez retenus, le récit de l’hallucination avait été fait à une ou plusieurs personnes, souvent même noté par écrit, avant que l’hallucination eût été reconnue véridique, quand je tiens compte du nombre énorme des faits et surtout de leur ressemblance entre eux, de leur air de famille, de la concordance de tant de témoignages indépendants les uns des autres, tous analysés, contrôlés, soumis à la critique — je suis porté à croire à la télépathie de même que je crois, par exemple, à la défaite de l’Invincible Armada. […] Il raisonnait ainsi : « Quand un rêve, quand une hallucination nous avertit qu’un parent est mort ou mourant, ou c’est vrai ou c’est faux, ou la personne meurt ou elle ne meurt pas. […] La supputation des probabilités, à laquelle on fait appel, nous montrerait que c’est impossible, parce qu’une scène où des personnes déterminées prennent des attitudes déterminées est chose unique en son genre, parce que les lignes d’un visage humain sont déjà uniques en leur genre, et que par conséquent chaque personnage — à plus forte raison la scène qui les réunit — est décomposable en une infinité d’éléments indépendants pour nous les uns des autres : de sorte qu’il faudrait un nombre de coïncidences infini pour que le hasard fît de la scène de fantaisie la reproduction d’une scène réelle 7 : en d’autres termes, il est mathématiquement impossible qu’un tableau sorti de l’imagination du peintre dessine, tel qu’il a eu lieu, un incident de la bataille. […] Il se trouverait, vis-à-vis des pensées et des sentiments qui se déroulent à l’intérieur de la conscience, dans la situation du spectateur qui voit distinctement tout ce que les acteurs font sur la scène, mais n’entend pas un mot de ce qu’ils disent. » Ou bien encore il serait comme la personne qui ne perçoit, d’une symphonie, que les mouvements du bâton du chef d’orchestre.

785. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

Ainsi sont traités par vous tous ceux qui écrivent : vous ne donnez de trêve à personne, vous ne faites de quartier à personne. […] Victor Hugo n’a personne derrière lui, Alexandre Dumas personne. […] Personne, au contraire, plus que celui-là, personne n’est capable de ressentir une de ces indignations vigoureuses qui produisent les colères durables. […] Elle était l’économie en personne. […] Certes, voilà ce que personne au monde n’oserait affirmer.

786. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier. — Correspondance de Chateaubriand (3e partie) » pp. 161-240

La duchesse avait été remarquablement belle ; en dépit d’une maigreur qui donnait à sa personne un faux air d’apparition, elle conservait des traces d’une régularité fine et noble, des yeux magnifiques et pleins de feu. […] Dévouée au pape, habile et intrépide dans son dévouement, elle contribua de sa personne à accomplir l’évasion de ce pontife de Rome après l’assassinat du ministre constitutionnel, l’infortuné Rossi. […] Le système politique que j’ai adopté est tel que personne n’en voudrait peut-être, et que d’ailleurs on ne me mettrait pas à même de l’exécuter. […] Je regarde et j’écoute si personne ne monte ou ne descend encore les marches de cet escalier. […] Madame de Beaumont était cette personne qu’il avait aimée d’une si poétique affection dans ses années de sève, et dont il avait déposé le cercueil et illustré le nom dans un monument de marbre, à Rome, sous les voûtes de l’église Saint-Louis.

787. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre sixième »

Personne après Molière n’était de force à l’oser. […] Avec Destouches, on ne désespère de l’amendement de personne. […] De cet honnête combat entre les incitations de la mode et les scrupules de son goût, il résulta un travail sans vérité, qui finit par ne plus faire rire ni pleurer personne, même de son vivant. […] Tout le monde est méchant, et personne ne l’est ; On reçoit et l’on rend ; on est à peu près quitte. […] Diderot, l’auteur des Salons, devait le savoir mieux que personne.

788. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1887 » pp. 165-228

Elle dit que c’est presque une réunion de famille, que les cinq cents personnes, qu’on rencontre partout à Paris, se donnent rendez-vous là, et qu’entre ce monde, il s’établit des courants curieux sur les choses qui se disent, sur les jugements qui se produisent. […] Avec cela une détente de l’activité, une paresse du corps à bouger de chez moi, quand il n’y a pas là, où je dois aller, l’attrait de retrouver des personnes tout à fait aimées. […] Et le relisant tous deux, nous trouvons le manifeste mal fait, d’une écriture renfermant trop de termes scientifiques, et s’attaquant trop outrageusement à la personne physique de l’auteur. […] J’ai cherché à vous peindre, avec le mélange de grandeur et de féminilité qui est en vous, et même avec un peu de votre langue à la Napoléon ; enfin j’ai cherché à vous peindre en historien, qui aime votre personne et votre mémoire, dans les siècles à venir. […] Il aurait désiré me voir, mais le médecin qui le soigne, a déclaré qu’il valait mieux qu’il ne vît personne, et qu’il avait besoin d’être traité tout autant par le silence que par le bromure de potassium.

789. (1908) Jean Racine pp. 1-325

Quelques vers que j’avais faits alors tombèrent par hasard entre les mains de quelques personnes d’esprit. […] Dans la bataille, il donne de sa personne, il se bat au premier rang, comme un héros d’Homère. […] Cézy, nous dit Racine, avait raconté la chose « à quantité de personnes ». […] Personne, sauf Roxane et Acomat, ne circule librement. […] Au moins, personne ne l’aura !

790. (1891) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Quatrième série

« Au milieu du théâtre — lisons-nous dans un manuscrit dont personne encore n’avait tiré parti plus ingénieusement que M.  […] Car, à Dieu ne plaise que nous invitions personne à relire le Cyrus ou l’Astrée même ! […] Indépendant d’humeur, et même un peu farouche, libre de sa personne, maître de ses loisirs, il avait beaucoup vu et beaucoup médité : il avait aussi beaucoup retenu. […] Personne, assurément. […] S’il y avait un parti du « libertinage » et de « l’irréligion », personne ne doutait donc que l’auteur de Tartufe en eût été ; personne de ses contemporains ne se méprenait sur le caractère de son œuvre ; et personne, enfin, n’aurait alors osé prétendre que les coups qu’il avait adressés aux « bigots » n’eussent atteint, en même temps qu’eux, les « dévots » et la « religion ».

791. (1914) Boulevard et coulisses

Car, je m’en rends très bien compte aujourd’hui, nous fûmes une génération timide, et nous entrâmes dans la vie comme sur la pointe des pieds, afin de ne déranger personne. […] Car on avait découvert les lois du théâtre et on ne reconnaissait à personne le droit de s’en écarter. […] Personne ne conteste cette situation, et il n’y a d’ailleurs qu’à traverser nos endroits de plaisir (je sais faire les exceptions qui conviennent). […] Il est interwievé mille fois ; on se jette sur sa personne. […] encore est-ce un de ces points sur lesquels on peut ergoter sans convaincre jamais personne ; ?

792. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Fanny. Étude, par M. Ernest Feydeau » pp. 163-178

Je vous recevrai demain, me dit-elle, mais je vous conjure… — Beaucoup de personnes nous suivaient ; elle ne put achever sa phrase ; je pressai sa main de mon bras ; nous nous mîmes à table. […] Et Roger que ce nous négligemment jeté a déjà mordu au cœur, et que bouleverse la seule attente, se met à décrire le conflit fiévreux de sentiments contraires, de terreurs, d’espoirs confus et d’amertumes qui lui bouillonnaient dans le cerveau : Mais ce n’était rien auprès de ce que je devais éprouver à cette table trop étroite où, sous les nappes de clarté qui s’échappaient des globes des lampes, nul convive ne pouvait dérober à personne les pensées qui plissaient son front. […] Je lui adressai un regard pour la remercier, et me renversant alors sur le dossier de ma chaise, je contemplai longuement celui qui ne se doutait pas de l’intérêt puissant qu’allait faire naître en moi l’étude de sa personne. […] N’est-ce pas aussi un prétexte qu’il se donne à son insu, et parce qu’il aura découvert un matin chez cette belle personne de dix ou onze ans plus âgée que lui une première pâleur fanée, un premier pli à la tempe, une première ride ?

793. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Souvenirs et correspondance tirés des papiers de Mme Récamier » pp. 303-319

Il est impossible après cela de ne pas être persuadé que Mme Récamier était une personne distinguée par l’esprit presque autant que par le cœur. […] Mme Récamier était, en 1823-1824, leur confidente à tous deux ; elle entrait bien pour quelque chose dans leur jalousie, dans leur rivalité déguisée ; elle penchait d’inclination, je le crains, pour le moins sage (les meilleures même des femmes sont ainsi) ; pourtant elle savait tenir la balance assez indécise encore : chacun était écouté, chacun lui parlait de l’autre ; tout le monde était content, personne n’était trahi. […] C’était donc un homme d’esprit, mais qui, à première vue, payait peu de sa personne : un peu bègue, très myope, toujours questionnant comme s’il n’était pas au fait, il lui fallait quelque temps avant d’être apprécié à sa valeur. […] Un art et une grâce de Mme Récamier, c’était de faire valoir la personne avec qui elle causait ; elle s’y appliquait, en s’effaçant volontiers ; elle n’était occupée que de donner des occasions à l’esprit des autres, et on lui savait gré même de ses demi-mots, de ses silences intelligents.

794. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers (tome xviie ) » pp. 338-354

Napoléon, qui découvre des ressources là où les autres n’en soupçonnent pas, n’a rien perdu de sa confiante certitude pendant les jours suivants. « Point troublé, point déconcerté, point amolli surtout, supportant les fatigues, les angoisses, avec une force bien supérieure à sa santé, toujours au feu de sa personne, l’œil assuré, la voix brusque et vibrante », il porte fièrement son fardeau ; il attend, il espère une faute des ennemis qui ne peuvent manquer d’en faire. […] Dans une telle situation, là où personne autre n’entrevoyait de ressources possibles que dans le résultat des négociations engagées, Napoléon, lui, ne cherchait et ne voyait d’issue que par quelqu’un de ces grands coups comme il en avait tant de fois frappé, et comme le jeu de la guerre en offre volontiers aux grands capitaines. […] Mais, apprenant que Blucher en personne s’avance pour avoir raison de l’affront de ses lieutenants, il revient sur Montmirail ; le 14 au matin, rejoignant Marmont qui tient tête à Blucher, il prend à l’instant l’offensive et fait perdre au généralissime prussien de 9 à 10000 hommes ; c’est la journée dite de Vauchamps. […] Thiers, qui les sent autant que personne, n’a nulle part négligé de faire ressortir.

795. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Lettres d’Eugénie de Guérin, publiées par M. Trébutien. »

Trébutien, à redoubler de zèle, à compléter son œuvre commémorative et à donner tout ce qu’il a pu depuis retrouver et rassembler encore de la correspondance de cette personne rare. […] mais Eugénie surtout l’a séduit, l’a enlevé, pauvre savant solitaire, comme ces nobles figures idéales, ces apparitions de vierges et de saintes qui se révélaient dans une vision manifeste à leurs fervents serviteurs ; il l’a aimée, il l’a adorée, il a poursuivi avec une passion obstinée et persévérante les moindres vestiges, les moindres reliques qu’elle avait laissées d’elle : il les a arrachées aux jaloux, aux indifférents, aux timides ; il a copié et recopié de sa main religieusement, comme si c’étaient d’antiques manuscrits, ces pages rapides, décousues, envolées au hasard, parfois illisibles, et qui n’étaient pas faites pour l’impression, il les a rendues nettes et claires pour tous : le jour l’a souvent surpris près de sa lampe, appliqué qu’il était à cette tâche de dévouement et de tendresse pour une personne qu’il n’a jamais vue ; et si l’on oublie aujourd’hui son nom, si quand on couronne publiquement sa sainte44, il n’est pas même remercié ni mentionné, il ne s’en étonne pas, il ne s’en plaint pas, car il est de ceux qui croient à l’invisible, et il sait que les meilleurs de cet âge de foi dont il a pénétré les grandeurs mystiques et les ravissements n’ont pas légué leur nom et ont enterré leur peine : heureux d’espérer habiter un jour dans la gloire immense et d’être un des innombrables yeux de cet aigle mystique dont Dante a parlé ! […] Je le trouve dans une personne qui, sans être Française de nation, Test par la langue, dans une Genevoise qui a publié, depuis bien des années, quantité d’écrits remarquables, saisissants, éloquents avec une pointe d’étrangeté : il me faut bien la nommer, quoiqu’elle n’ait point inscrit son nom en tête de tous ses nombreux et piquants ouvrages ; elle voudra bien m’excuser de cette liberté, car je ne suis pas comme M. de Rémusat qui, dans la Revue des Deux Mondes, a pu parler d’elle hier à merveille et à fond, en toute discrétion cependant, pour des lecteurs déjà au fait et initiés aux sous-entendus. […] Là-dessus un critique ami, un étranger qui nous connaît mieux que personne, M. 

796. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 13, qu’il est des sujets propres specialement pour la poësie, et d’autres specialement propres pour la peinture. Moïens de les reconnoître » pp. 81-107

Il est quelquefois pour eux une belle personne qui plaît, mais qui parle une langue qu’ils n’entendent point : on s’ennuïe bientôt de la regarder, parce que la durée des plaisirs, où l’esprit ne prend point de part, est bien courte. […] Les passions sont variées, même dans les personnes qui, suivant la supposition de l’artisan, doivent prendre un égal interêt à l’action principale du tableau. […] La premiere scene entre Rodrigue et Chimene nous émeut plus que le recit de la mort du pere de Chimene qu’elle fait au roi, bien que ce recit se fasse par une personne qui prend à l’évenement un si grand interêt. […] Les sujets, dont la beauté consiste principalement dans l’élevation d’esprit que font voir des acteurs, dans la noblesse de leurs sentimens, comme dans des situations qui doivent agiter violemment et sans relâche les personnes interessées et qui doivent ainsi donner lieu à divers sentimens très-vifs et à des entretiens animez, sont plus heureux pour le poëte tragique.

797. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 16, des pantomimes ou des acteurs qui joüoient sans parler » pp. 265-295

En effet, il semble en lisant Lucien, qu’on chantât quelquefois le sujet que le pantomime executoit, mais il est aussi constant par plusieurs passages que je citerai plus bas, que le pantomime représentoit souvent sans que personne chantât ni prononçât les vers des scénes qu’il déclamoit dans son jeu muet. […] Parlons de la personne des pantomimes. […] Nous trouvons même dans l’ouvrage de Lucien, qui vient d’être cité, qu’un étranger voïant cinq habits préparez pour un même pantomime qui devoit joüer successivement cinq rolles differens, demanda si la même personne les porteroit tous cinq. […] Il me semble néanmoins que les personnes qui se plaisent à voir la comédie italienne, et principalement celles qui ont vû joüer le vieil Octave, le vieil Scaramouche et leurs camarades Arlequin et Trivelin, sont persuadées que l’on peut bien executer plusieurs scénes sans parler.

798. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Les œuvres que tout le monde admire sont celles que personne n’examine. […] Est-ce en lui le don naturel, instinctif, d’une personne oratoire ? […] Personne ne blâmera le père Didon de l’avoir tenu. […] Maurice Barrès a plus d’une fois fait froncer le sourcil aux personnes graves. […] D’ailleurs, personne n’invente jamais rien.

799. (1903) Hommes et idées du XIXe siècle

Il étale sa personne avec une indiscrétion où il entre bien autant de candeur que de vanité. […] Personne n’a été un plus grand trouveur de mots, et sur personne les mots n’ont exercé un pouvoir plus absolu. […] Hommes et idées ne changent-ils pas de valeur suivant qu’ils s’accordent ou s’opposent à sa personne ? […] Les rapports sont établis et il n’appartient à personne de les briser. […] Pour la constituer, est-il besoin d’un grand nombre de personnes et suffit-il que ces personnes se trouvent ensemble ?

800. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 348-354

Seroit-on bien reçu à dire que personne n’étoit plus capable de remplacer l’Abbé Desfontaines ; que, né avec autant d’esprit que son prédécesseur, il l’a emporté sur lui du côté du talent de la Poésie, & qu’on peut en juger par son Ode sur la Journée de Fontenoy, & par d’autres Pieces connues ; que les Auteurs Grecs & Latins lui étoient aussi familiers que ceux du siecle de Louis XIV ; qu’il a réuni la connoissance de plusieurs Langues étrangeres au mérite de bien écrire dans la sienne ; qu’il s’est montré supérieur dans l’art de faire l’analyse d’un Ouvrage, & sur-tout d’une Piece de Théatre, quand il a voulu s’en donner la peine ? […] Freron nous apprend, il est vrai, « qu’il avoit à craindre le mécontentement de plusieurs puissans Mécènes pleins d’entrailles pour leurs chers petits Rimailleurs, ou leurs insipides Romanciers ; que ses amis ont été cent fois le trouver lorsqu’il paroissoit un Ouvrage nouveau, pour l’engager à n’en pas dire du mal, parce que l’Auteur étoit vivement protégé par tel Prince, ou tel Duc, ou telle Dame, qui ne manqueroit pas d’employer contre sa personne & son Journal toutes les ressources du crédit* ».

801. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre VIII. Bossuet historien. »

» Sous ce nom de liberté, les Romains se figuraient, avec les Grecs, un état où personne ne fût sujet que de la loi, et où la loi fût plus puissante que personne. » À nous entendre déclamer contre la religion, on croirait qu’un prêtre est nécessairement un esclave, et que nul, avant nous, n’a su raisonner dignement sur la liberté : qu’on lise donc Bossuet à l’article des Grecs et des Romains.

802. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Lundberg » pp. 169-170

Le savant, l’ignorant, les admire sans avoir jamais vu les personnes, c’est que la chair et la vie y sont. […] Le portrait ressemblant du barbouilleur meurt avec la personne, celui de l’habile homme reste à jamais.

803. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Eugène Chapus »

Personne n’était plus digne qu’Eugène Chapus de l’écrire. […] Dans la littérature contemporaine, qui cherche des cadres et des fonds pour repousser tous les sujets et toutes les idées qui manquent de saillie, personne n’avait encore eu cette idée-là.

804. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Mercier » pp. 1-6

Seulement, ce qui fit trembler pour Clarisse ne pouvait troubler personne pour le Tableau de Paris, œuvre informe à peu près oubliée, et sur laquelle Desnoiresterres a pu pratiquer tous les arrangements et retranchements jugés nécessaires dans l’intérêt de l’ensemble. […] Les moralistes de l’avenir qui voudront faire poser devant eux la première moitié du xixe  siècle iront la chercher dans les dix-sept volumes de La Comédie humaine, et ce Tableau-là, personne n’oserait et ne pourrait l’abréger !

805. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « L’abbé Fléchier » pp. 383-416

La nature de ces controverses avait même été telle, et l’on s’était attaqué si vivement à la personne de M.  […] » mais chaque soir Mme de Caumartin et d’autres personnes de ce cercle intime le lui rappelaient ; en écrivant il n’était que leur secrétaire. […] Lorsque des personnes de qualité, d’esprit et de fort bonnes mœurs, qui ne craignaient point la plus sévère justice, et qui s’étaient acquis la bienveillance des peuples, venaient à Clermont, ces bonnes gens les assuraient de leur protection, et leur présentaient des attestations de vie et mœurs, croyant que c’était unes dépendance nécessaire, et qu’ils étaient devenus seigneurs, par privilège, de leurs seigneurs mêmes. […] Il a introduit habilement et ménagé, à travers son récit, quatre ou cinq de ces entretiens développés, dans lesquels les personnes du lieu lui racontent, sur l’histoire et les événements du pays, ce qu’il n’a pu savoir directement de lui-même. […] Jugez si je recule pour personne quand il s’agit du service du roi.

806. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXVIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 385-448

Aidez-moi donc, ma tante ; je ne sais pas dire, je m’embrouille dans lui et dans moi sans pouvoir les démêler dans mes paroles, comme je n’aurais pas su les démêler dans notre inclination l’un pour l’autre ; enfin, c’est comme si mon cœur avait battu dans son sein, et comme si son cœur avait battu dans ma poitrine, ou plutôt, non, ce n’étaient pas deux cœurs, c’était un seul cœur en deux personnes. […] Là, sans pouvoir être vue de personne, j’essuyai mon front tout mouillé de sueur, mes yeux obscurcis de larmes ; je repris mon haleine essoufflée et je me mis à réfléchir, trop tard, hélas ! […] Mais la foule d’une ville où tout le monde vous regarde, où personne ne vous connaît, où l’œil du bon Dieu lui-même semble vous perdre de vue dans la confusion de la multitude, les bruits confus et tumultueux qui sortent, comme des chocs des feuilles ou des vagues, des hommes rassemblés, allant çà et là, sans se parler, où leur pensée inconnue les mène. […] C’était l’heure de midi : personne ne passait en ce moment sur la route, à cause du grand soleil et de la grande poussière. […] Je me sentis inspirée de tomber à genoux devant elle et de lui jouer un air de montagne, afin de l’attendrir sur mon sort, mais surtout sur celui d’Hyeronimo ; je me dis : Personne ne me voit ni ne m’entend qu’elle, personne ne me donnera un pauvre baïoque ou un pauvre carlin (autre pièce de monnaie populaire dans cette partie de l’Italie) ; ce n’est donc pas pour le monde, c’est bien pour elle toute seule que je vais jouer, elle m’en saura plus gré que si c’était par vanité ou par intérêt ; elle ne pourra pas dire que c’est pour le monde.

807. (1857) Articles justificatifs pour Charles Baudelaire, auteur des « Fleurs du mal » pp. 1-33

Personne, non plus que moi, ne pouvait supposer qu’un livre empreint d’une spiritualité aussi ardente, aussi éclatante que les Fleurs du mal, dût être l’objet d’une poursuite, ou plutôt l’occasion d’un malentendu. […] Dans un temps où la littérature indiscrète a raconté au public les mœurs de la vie de bohème, les aventures de la baronne d’Ange et celles de Marguerite Gautier, il est venu après les amusants conteurs dire à son tour l’idylle à travers champs, l’églogue à côté d’une bête morte, le boudoir de la courtisane assassinée, et personne ne viendra plus après lui Il a écrit la vérité dernière. […] Il n’a menti à personne. […] Il n’y aura donc bientôt plus de demoiselles ; et c’est pour cela sans doute que depuis quelque temps on emploie le terme de jeune personne, car on prévoit que, dans vingt ou trente ans, le mot demoiselle fera frémir notre pudique postérité. Malheureusement, l’expression de jeune personne est une sottise, car le mot personne s’appliquant aux deux genres, un jeune garçon est aussi une jeune personne.

808. (1828) Préface des Études françaises et étrangères pp. -

On convient généralement de la supériorité de notre jeune école philosophique et historique ; notre siècle est déjà si bon juge en fait de prose, que personne ne songe à nier l’immense talent de M. l’abbé de la Mennais, quoique ses systèmes soient combattus de toutes parts. […] Beaucoup de personnes s’imaginent que hors de la facture de Racine, il n’y a point de salut. […] Les personnes peu familiarisées avec la versification d’André Chénier et de nos jeunes poètes, se perdent dans les déplacements de césure et dans les enjambements, et crient à la barbarie et à la prose ; ce sont elles qui sont prosaïques et barbares. […] Nous pouvons nous tromper, mais du moins nous ne voulons tromper personne. […] Ainsi, nous dirons avec peu de personnes que la Panhypocrisiade de M. 

809. (1913) La Fontaine « VIII. Ses fables — conclusions. »

Mais aussi, si l’on rectifie L’image de l’objet sur son éloignement, Sur le milieu qui l’environne, Sur l’organe et sur l’instrument, Les sens ne tromperont personne. […] Je ne crois point que la Nature Se soit lié les mains, et nous les lie encor Jusqu’au point de marquer dans les cieux notre sort : Il dépend d’une conjoncture De lieux, de personnes, de temps, Non des conjonctions de tous ces charlatans. […] c’est à cette heure… — Non, mes enfants, dormez en paix : Ne bougeons de notre demeure. » L’alouette eut raison, car personne ne vint. […] Il nous faudrait mille personnes Pour éplucher tout ce canton. » La chanvre étant tout à fait crue… Environ deux mois après. […] Il y a encore une raison : c’est que Lessing faisait tous ses efforts et, il faut le reconnaître, il avait raison, pour déshabituer les Allemands de l’idolâtrie de la littérature française, et, fondant la littérature allemande, il disait que, dans tout pays, il faut vouloir être soi-même et donner sa mesure, et ne jamais imiter personne, surtout ne jamais être engoué de personne.

810. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Balzac » pp. 17-61

Il y a plus : sans les exprimer, nulle plume tenue par une main anglaise ne les a fait pressentir, et la cause de cela n’est dans le génie individuel de personne. […] Au moment où Balzac écrivait son Traité de la vie élégante, un homme qui n’est pas son égal, à coup sûr, mais qui n’a pas non plus d’égaux, Stendhal, venait, dans son Rouge et Noir, de révéler des facultés puissantes d’observation créatrice et un style de génie ; car il ne ressemble au style de personne. […] À cette heure, le génie de Balzac n’est discuté par personne. […] personne plus que moi ne désire voir ces promesses de MM.  […] Personne ne s’en félicitera et ne les en félicitera, eux, plus cordialement que moi.

811. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre II. Axiomes » pp. 24-74

. — Il est ordinaire aux enfants de prendre dans leurs jeux les choses inanimées, et de leur parler comme à des personnes vivantes. — Les hommes du monde enfant durent être naturellement des poètes sublimes. […] Il est naturel aux enfants de transporter l’idée et le nom des premières personnes, des premières choses qu’ils ont vues, à toutes les personnes, à toutes les choses qui ont avec elles quelque ressemblance, quelque rapport. […] Dans la personne des premiers pères se trouvèrent donc réunis la sagesse, le sacerdoce et la royauté. […] Dans l’état de famille, les pères durent exercer un pouvoir monarchique, dépendant de Dieu seul, sur la personne et sur les biens de leurs fils, et, à plus forte raison, sur ceux des hommes qui s’étaient réfugiés sur leurs terres, et qui étaient devenus leurs serviteurs. […] Plus les biens sont attachés à la personne, au corps du possesseur, plus la liberté naturelle conserve sa fierté ; c’est avec le superflu que la servitude enchaîne les hommes.

812. (1856) À travers la critique. Figaro pp. 4-2

Je ne sais personne qui soit joli avec plus de fadeur, ni contrefait avec plus de grâce personne qui ait perfectionné à ce point le mauvais goût et donné aux délicatesses du langage la transparence diaphane de l’étisie. […] Cependant, une personne à laquelle je faisais part de mes impressions de lecture en lui recommandant l’Histoire de la société française, me répondit : — Bah ! […] Théophile Gautier, Paul de Saint-Victor et Busquet, représentent en ce moment la presse française en Allemagne : qu’il me soit donc permis de m’occuper en passant du feuilleton d’Outre-Rhin, dans la personne du plus populaire des trois. […] Scudo, sans y être contraint par personne, écrit-il : « Les parques inflexibles », en commençant un article consacré au Trovatore ? […] La fortune peut prêter aux gens de lettres, sans inconvénient sérieux : l’émulation ne gagnera personne !

813. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome I

Une jeune fille ne doit demander le sang de personne : cela répugne au caractère de son sexe ; la nature ne lui a point donné une voix douce pour faire entendre des cris de mort. […] Personne ne s’est avisé de craindre qu’Horace fût tué en combattant pour son pays ; mais on craint qu’il soit conduit au supplice. […] Aujourd’hui la chance est tournée : il n’y a presque personne à quelques pièces de Voltaire, médiocrement à quelques autres ; Œdipe est la seule qui soit suivie, à cause des acteurs. […] Quel beau privilège pour Calderon d’avoir été imité lui-même sans imiter personne ! Quel honneur pour le poète espagnol d’avoir fait mentir le proverbe, qui dit que celui qui n’imite personne ne sera jamais imité !

814. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

Personne n’avait à déchoir, aucune vanité n’avait à souffrir. […] On avait de la vanité pour ses ouvrages, on n’en avait pas encore pour sa personne. […] Alors il s’est résigné à en posséder une faible part, où personne ne pût venir le troubler. […] Retenues dans le juste et dans l’honnête, elles ne blessent personne, et nul ne doit les attaquer. […] Aucune des distinctions qui relevèrent aux premiers rangs de l’État n’étonna personne.

815. (1885) L’Art romantique

Il faut vraiment que de certaines personnes regorgent de passion pour la pouvoir ainsi mettre partout. […] Sa poésie, à la fois majestueuse et précieuse, marche magnifiquement, comme les personnes de cour en grande toilette. […] Non ; mais cependant, si votre roman, si votre drame est bien fait, il ne prendra envie à personne de violer les lois de la nature. […] Émile Augier et tant d’autres personnes honorables, c’est tout un. […] Il ne coûtera à personne d’avouer tout cela, excepté à ceux pour qui la justice n’est pas une volupté.

816. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — I. » pp. 166-193

A moins d’avoir quelques traits originaux à ajouter aux siens, comme ont fait Lemontey et divers autres contemporains qui l’avaient vue, on n’a qu’à renvoyer, pour l’essentiel de sa personne, à ses délicieux et indispensables Mémoires. […] La Révolution et le mouvement expansif qu’elle communiquait à toutes les âmes patriotiques les mirent naturellement en correspondance avec diverses personnes actives de Paris, en particulier avec Brissot, dont M. […] Necker, nous saisissons la dissidence à l’origine, le divorce à sa naissance ; mais les partis, ou du moins les familles politiques auxquelles ils se rattachent l’un et l’autre, se sont assez perpétuées ensuite, pour qu’on puisse en généraliser les caractères hors de leurs personnes. […] Né dans un pays où Brissot séjourna d’abord, à Boulogne-sur-mer où il travailla avec Swinton, où il se maria, parent des personnes qui l’accueillirent alors et de cette famille Cavilliers qui l’a précisément connu en ces années calomniées, je n’ai jamais ouï un mot de doute sur son intégrité constante et sa pauvreté en tout temps vertueuse. […] A ceux qui citeraient Mme Roland pour exemple, nous rappellerons qu’elle ne négligeait pas d’ordinaire ces formes, ces grâces qui lui étaient un empire commun avec les personnes de son sexe ; et que ce génie qui perçait malgré tout et s’imposait souvent, n’appartenant qu’à elle seule, ne saurait, sans une étrange illusion, faire autorité pour d’autres.

817. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Ce ne fut qu’après sa mort que l’abbé Antonio de Sangullo révéla confidentiellement à Laurent l’existence d’un enfant né, un an auparavant, des amours de Julien avec mademoiselle Irma, personne de la famille des Goxini. […] « N’oubliez pas que nous ne sommes que des citoyens de Florence ; mais son chef-d’œuvre de sagesse est la lettre pleine de conseils paternels qu’il écrit au jeune cardinal de Suza, se rendant alors à Rome ; la voici : « Nous avons, ainsi que vous, de grandes grâces à rendre à la Providence, non seulement pour les honneurs et les bienfaits sans nombre qu’elle a répandus sur notre maison, mais plus particulièrement encore à cause qu’elle nous fait jouir, dans votre personne, de la plus éminente dignité qui ait jamais été accordée à notre famille. […] Il serait trop difficile de vous donner des instructions précises sur ce qui regarde votre conduite et vos conversations ; je me bornerai donc à vous recommander d’avoir avec les cardinaux et les autres personnes élevées en dignité le langage du respect et de la déférence, sans néanmoins renoncer à vous servir de votre propre raison, et vous laisser entraîner par les passions des autres, qui peuvent être égarés par des motifs peu estimables. Soyez toujours en état de vous rendre à vous-même ce témoignage, que jamais vous n’avez l’intention d’offenser personne dans vos discours ; et si l’impétuosité du caractère vous porte à faire à quelqu’un une offense involontaire, comme son inimitié sera sans fondement légitime, elle ne saurait être de longue durée. […] Les bijoux et la soie sont rarement bienséants aux personnes de votre état.

818. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Chamfort. » pp. 539-566

Il en a subi et prouvé l’inconvénient plus que personne. […] »), lui exprimait quelques idées très aristocratiques, qui lui étaient si familières : La nation, lui disait-il, n’est sortie de la barbarie que parce qu’il s’est trouvé trois ou quatre personnes à qui la nature avait donné du génie et du goût, qu’elle refusait à tout le reste… Notre nation n’a de goût que par accident. […] Mais comme le hasard a fait que ma société est recherchée par plusieurs personnes d’une fortune beaucoup plus considérable, il est arrivé que mon aisance est devenue une véritable détresse par une suite des devoirs que m’imposait la fréquentation d’un monde que je n’avais pas recherché. […] Oui, il est très vrai, monsieur, qu’à un certain jour j’ai pu m’assurer que le public et le peuple ne font qu’un, et sont parfois une personne ou plutôt une chose aveugle, brutale et déraisonnable ; il est très vrai que… Mais un ami me tire par l’oreille et m’avertit : « Que vous êtes bon de répondre avec autant de sérieux à un républicain pour rire !  […] On voudrait un cabriolet pour soi en 1782, et, ne l’ayant pas eu, on ne veut de cabriolet pour personne en 92.

819. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’impératrice Catherine II. Écrits par elle-même, (suite et fin.) »

« L’horreur que me cause cette mort est inexprimable, dit-elle en propres termes le lendemain à la princesse Daschkoff ; c’est un coup qui me renverse. » Mais le personnage politique en elle reprit aussitôt le dessus : elle comprit que désavouer hautement le crime et parler de le punir ferait l’effet d’une comédie jouée ; qu’elle ne persuaderait personne ; que ce meurtre lui profitait trop pour qu’on ne le crût pas commandé ou tout au moins désiré par elle ; elle dissimula donc, et faisant son deuil en secret, — un deuil au reste qui dut être court, — elle se contenta, pour la satisfaction et le soulagement des siens et de son fils, de conserver dans une cassette la lettre écrite à elle par Orlof, après l’acte funeste, et qui témoignait de l’entière vérité. […] Elle était incomparablement supérieure à ce monarque par l’esprit et de sa personne. […] Cette femme philosophe, et mieux que philosophe, cette femme souveraine, la plus faite de son sexe pour donner un démenti en sa personne à cette parole d’un grand mathématicien : « Le cerveau des femmes est une éponge à préjugés », s’est retrouvée femme et faible, précisément en ne voulant tenir compte que de ses goûts et en se mettant au-dessus de tout préjugé.

820. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre III. Du récit des faits. — Antécédents et conséquents. — Causes et effets »

Ou lui faisait le dernier outrage, on lui tuait son connétable, et personne ne remuait ; un simple gentilhomme en pareil cas aurait eu vingt amis pour lui offrir leur épée. […] Il était seul parmi des traîtres… Qu’avait-il fait pourtant, pour être ainsi haï de tous, lui qui ne haïssait personne, qui plutôt aimait tout le monde ? […] Les yeux lui roulaient étrangement dans la tête ; il ne connaissait personne, et ne disait mot.

821. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre I. Les origines du dix-huitième siècle — Chapitre I. Vue générale »

Aucun mysticisme politique ne se mêle dans le culte de la personne royale : chez tous les penseurs du temps, la royauté est reçue comme garante et protectrice de l’ordre. […] Il n’y a personne, pas même Rousseau, qui puisse pressentir la puissance de ces explosifs qu’on s’amuse à fabriquer et à manier ; personne ne se doute du ravage qu’ils feront, lorsqu’on les mettra en contact avec la réalité vivante.

822. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre IX. L’antinomie politique » pp. 193-207

« Il y a, dit Benjamin Constant, une partie de la personne humaine qui, de nécessité, reste individuelle et indépendante… Quand elle franchit cette ligne, la société est usurpatrice ; la majorité est factieuse. […] C’est l’indépendance de l’individu dans sa vie privée ; c’est la libre disposition de sa personne et de ses biens ; c’est la liberté des relations, des faits et gestes de chaque jour : c’est le pouvoir de vivre et d’agir à sa guise sans être en butte à une inquisition perpétuelle, à une police minutieuse et tyrannique de la part de l’autorité publique. […] C’est quand personne ne voit plus goutte dans la discussion qu’on met la question aux voix95.

823. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 326-344

Personne n'ignore qu'il est nécessaire de plaire, afin de persuader ; mais cet Ecrivain ne semble vouloir persuader que pour avoir lieu de plaire. […] Notre Orateur semble, au contraire, prendre plaisir à embrouiller les choses, sous prétexte de les rendre plus claires : d'une obscurité, il jette dans une autre, & personne n'a mieux vérifié le proverbe de l'Ecole, obscurum per obscurius. […] A quoi bon se tant tourmenter pour se donner un air de supériorité qui n'en impose à personne, quand il n'est pas le fruit de la vigueur de l'esprit & de l'élévation de l'ame ?

824. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre II. Mme Le Normand »

L’auteur de Coppet et Weymar est la même personne qui publiait, il y a trois ans, une correspondance de Mme Récamier, dont nous n’avons point à parler ici, et cette personne, on la connaît, malgré sa voilette. […] Quand, en 1812, on cria contre les Français au théâtre de Moscou et qu’on la fit, comme Française, sortir de sa loge, elle se mit à pleurer à sanglots, comme une petite fille, cette forte personne taillée dans ce marbre bistré qu’on reprochait à son teint !

825. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Taine » pp. 231-243

Taine avait, à ce qu’il semblait, des facultés trop vives et trop indisciplinables pour qu’il put jamais emboîter le pas derrière personne. […] « Il y a peut-être moins de génie — dit-il — dans Macaulay que dans Carlyle, mais quand on s’est nourri pendant quelque temps de ce style exagéré et démoniaque, de cette philosophie extraordinaire et maladive, de cette histoire grimaçante et prophétique, de cette politique sinistre et forcenée, on revient volontiers à l’éloquence continue, à la raison vigoureuse, aux prévisions modérées, aux théories prouvées du généreux et solide esprit que l’Europe vient de perdre, qui honorait l’Angleterre et que personne ne remplacera. » Certes, je n’accepte nullement, pour mon compte, ce jugement sur Macaulay, qui tient probablement à une idée préconçue que M.  […] Et c’est l’idéalisme, c’est-à-dire le spiritualisme, c’est l’idée du devoir dans sa conception biblique et chrétienne, qui ont été bombardés dans la personne de Carlyle.

826. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La révocation de l’Édit de Nantes »

Personne n’en sourira, soyez-en sûr ! […] À plus d’une place de son récit, et quand il rapporte les excès que personne, du reste, ne cherche à justifier, et qui accompagnèrent l’exécution de la mesure prise contre les protestants, l’historien des Réfugiés innocente entièrement le roi et affirme que ces excès auraient été réprimés s’il avait pu en être instruit, et cette noble justice venant d’un protestant de nom et d’un philosophe de fait honore infiniment l’écrivain. […] Enfin, il aurait peut-être prouvé ce que nous disions tout à l’heure sur les formes diverses qu’a revêtues souvent en France une politique unitaire : c’est que, bon pour pacifier le pays, l’Édit de Nantes, qui avait rapproché deux partis sans les fondre, présentait des inconvénients et des dangers alors que, défatigués des événements qui avaient longtemps pesé sur eux, ils se retrouvaient avec leurs vieilles haines augmentées de prétentions nouvelles… Si, après un tel examen, l’écrivain qui l’aurait tenté eût condamné comme une faute radicale, une faute politique et à tout point de vue, la révocation de l’Édit de Nantes, personne, du moins parmi ceux qui ont le sentiment de la dignité de l’Histoire, ne l’eût accusé de superficialité ou de mauvaise foi.

827. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Félix Rocquain » pp. 229-242

Ils sont rares comme la tranquille conscience du talent qu’on a et de la fierté de l’esprit qu’on se sent… Avec l’effroyable prurit de vanité littéraire qu’ont les moins littéraires de ce temps, et qui fait d’eux des mendiants de publicité se trémoussant comiquement autour du moindre article pour qu’on leur en fasse la charité, un écrivain qui publie son livre et le met tout simplement sous la vitrine de l’éditeur, sans importuner personne de son importance et sans viser à la pétarade des journaux, m’est, par cela seul, plus sympathique que les autres, et je suis très disposé à aller vers lui, parce qu’il ne vient pas vers moi avec ces torsions de croupe respectueuses qu’ont les quêteurs d’articles qui veulent qu’on en mette dans leur chapeau… C’est précisément ce qui m’a fait aller à M.  […] Il ressemble à une personne qui mettrait un masque, et qui écrirait loyalement au front de ce masque : « Ne vous y méprenez pas ! […] L’auteur de L’Esprit révolutionnaire avant la Révolution l’est, lui, à force de n’être pas… Il y a dans son livre quelques personnes : Barbier, Mathieu Marais, Buvat, Joseph Languet, d’Argenson, Isambert, Bachaumont, Hardy, Bezenval, Ségur, Mirabeau, Lafayette, et les philosophes Diderot, Grimm, Morellet et Voltaire, — Voltaire, qui emplit tout son siècle et toutes nos bibliothèques !

828. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame Du Deffand »

Personne dans son temps, dans aucun temps, personne, fût-ce Voltaire, qui ne s’ennuya jamais, lui, ne fut plus intéressant et plus charmant que cette vieille, son égale en esprit et en grâce, dont l’ennui si intéressant pour nous fut si cruel et si tenace pour elle ; et ces deux volumes, en attendant ceux qui viendront encore, sont de nature à confirmer sur cette femme, la plus singulière de son siècle, ce que les volumes précédemment publiés nous avaient appris. […] Une des reines du xviiie  siècle, douée de tous les dons aimables par lesquels on était reine alors, une Titus femelle, les délices du genre humain, comme disait d’elle une de ses amies, une des plus éblouissantes soupeuses de cette époque où le souper était « une des quatre fins de l’homme et où l’on oubliait les trois autres », un des esprits les plus teintés de ce rouge audacieux que les femmes mettaient sur leurs joues pour qu’on vint l’essuyer, se plaint, à travers les rires de tout le monde et même des siens, d’un ennui que ne connaît personne, de cet inexorable ennui dont parle quelque part Bossuet, que certainement elle ne lisait pas !

829. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Collé »

Parce qu’il était gai, comme tous les esprits vigoureux qui se portent bien, il se crut la vocation du chansonnier quand, au fond, il en avait une autre, qu’il a prouvée, et dont personne ne parle comme il faudrait, même M.  […] Honoré Bonhomme ne l’a point découvert pour nous l’apprendre, nous ne savons pas ce qui a pu nous priver d’un La Bruyère quelconque ; car Collé avait trop de santé d’esprit, de naturel et de droiture, pour imiter personne, même ceux-là qu’il admirait le plus. […] Il l’est tellement qu’il fait ce que personne ne faisait dans cette société : il aime sa femme !

830. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XI. Gorini »

Il fut incroyable d’adresse, de sagacité et d’acharnement, mais il respecta les personnes, et pour nous, qui n’avons pas ses vertus, il les respecta trop. […] Les hommes sont si petits ; ils tiennent si peu à la vérité et tant à leur personne, que, pour peu que vous leur disiez qu’ils ont du talent, ils vous pardonneront d’avoir dit qu’ils en ont mal usé, et pourtant, si on comprenait, c’est la chose mortelle ! […] Personne n’aura donc plus amoindri ou ruiné l’histoire de la première moitié du dix-neuvième siècle que M. l’abbé Gorini, qui rappelle la fronde du berger victorieux, car c’est un curé de bergers !

831. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « L’Abbé *** »

Les gens à qui on en avait parlé se sont mis à lire le fatras de ces trois volumes, mais personne n’y a trouvé ce qu’il y cherchait. […] Franchement, je ne sais trop comment m’y prendre pour vous parler convenablement d’un livre dont le caractère est la platitude, — une platitude comme je n’en ai jamais vu, — une platitude ineffable, qui ne ressort ni de la critique sérieuse ni même de la plaisanterie, et dans lequel, si par hasard le Diable y était pour quelque chose, je le tiendrais, lui qu’on a toujours regardé comme une personne d’esprit, pour complètement déshonoré ! […] Pour personne donc, ni en bas ni en haut, le Maudit ne peut avoir, comme je l’ai dit déjà, le funeste honneur d’être dangereux.

832. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre IX. Suite des éloges chez les Grecs. De Xénophon, de Plutarque et de Lucien. »

Il y a sûrement du rapport entre le Télémaque et la Cyropédie ou l’Institution de Cyrus ; enfin, si on voulait, on en trouverait peut-être entre les personnes mêmes ; il est vrai que l’archevêque de Cambrai ne commanda point les armées comme le philosophe athénien, mais l’un fut le conseil et l’ami d’un roi de Sparte vertueux et austère : le duc de Bourgogne, l’ami et l’élève de l’autre, eut à peu près le même caractère. […] Il ne fait donc point de ces portraits brillants dont Salluste le premier donna des modèles, et que le cardinal de Retz, par ses mémoires, mit si fort à la mode parmi nous ; il fait mieux, il peint en action ; on croit voir tous ses grands hommes agir et converser ; toutes ses figures sont vraies et ont les proportions exactes de la nature ; quelques personnes prétendent que c’est dans ce genre qu’on devrait écrire tous les éloges : on éblouirait peut-être moins, disent-elles, mais on satisferait plus ; et il faut savoir quelquefois renoncer à l’admiration pour l’estime. […] Parmi la foule de ses ouvrages, on a de lui un éloge de Démosthène, qui mérite d’être distingué ; Lucien y est original et piquant comme partout ailleurs ; il ne s’astreint pas à la forme des éloges ; sa devise, comme il le dit lui-même, est de n’imiter personne.

833. (1891) La vie littéraire. Troisième série pp. -396

Nous sommes enfermés dans notre personne comme dans une prison perpétuelle. […] J’étais content seulement qu’il y eût des personnes aisément reconnaissables. […] Il laissa la petite personne chez lui et sortit comme il avait coutume. […] Personne n’avait moins que lui le sens de l’ineffable. […] Je l’ai demandé à plusieurs personnes qui n’ont pas su me le dire.

834. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

Alfred de Musset avait vingt personnes à son enterrement. […] Seulement personne n’est plus la dupe de cette phraséologie. […] Si toute œuvre de littérature est la révélation d’une personne, toute personne est la révélation d’une époque. […] Tout dans sa personne, regard, gestes, parole, disait la supériorité de l’intelligence. […] Personne n’a proclamé plus fermement que lui la dignité de la Pensée.

835. (1890) Les princes de la jeune critique pp. -299

Lemaître aurait mérité plus que personne d’être excommunié. […] Quelques personnes, frappées de l’habitude qu’a M.  […] Vous est-il arrivé d’aller voir une personne à qui vous aviez un renseignement à demander ? […] Tantôt il arrange les proverbes comme Basile en personne. […] Bourget et les siens, a le privilège d’exaspérer d’autres personnes.

836. (1888) Impressions de théâtre. Deuxième série

Par là il plaît aux personnes pieuses, presque autant qu’aux amoureux. […] Denise, cette personne parfaite, a commis une faute. […] Dumas trop de la personne même de M.  […] Personne ne soupçonne rien. […] Personne.

837. (1892) Impressions de théâtre. Sixième série

Il empoche l’argent sans dire à personne que l’oncle est mort et sans prendre le deuil. […] Ce souci peut mener loin les personnes bornées et vaniteuses qui n’ont pas d’autres principes de vie morale. […] … » Ce qui est terrible, c’est que personne, personne ne dit ce dont tout le monde est sûr. […] La marquise n’aime personne ; seulement, elle a de l’amitié pour son mari, qui est un homme très bien, dont elle est fort contente de porter le nom et dont la personne même ne lui déplaît pas. […] Personne, je vous le dis, n’est méchant dans cette pièce.

838. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

Sa seule rencontre effective, pendant ces dix-huit mois, est avec une personne qu’on appelait la Padoana. […] J’aimai mieux être moins disculpé d’un blâme aussi grave et ménager la famille d’une personne que j’aimais. […] Réaumur, malgré les demandes, n’avait invité presque personne à la séance où il leva le premier appareil. […] Je ne sais, personne ne sait. […] Et il part avec son élève à la recherche de la jeune personne qui ressemblera le mieux à cette Sophie de ses rêves.

839. (1890) Nouvelles questions de critique

Mais c’est ce qu’on ne peut pas faire aussi personne ne l’a-t-il fait. […] Munier-Jolain, que le sujet n’ait encore tenté personne, ou du moins qu’à peine en ait-on tracé quelques rares chapitres. […] Cela est vrai même des questions de personnes : on n’a jamais tenté, depuis cent cinquante ans qu’il est mort, de réhabiliter Campistron. […] Tout en s’abstenant de mêler sa personne dans ses œuvres, il ne s’est point piqué d’impassibilité. […] Dirai-je enfin que personne, plus que M. 

840. (1864) Physiologie des écrivains et des artistes ou Essai de critique naturelle

Mais la personne de l’auteur ne se révèle pas autrement dans une œuvre scientifique. […] Personne ne dit plus vite, ni mieux, sur tout sujet, ce qui importe. […] Nous devons regarder du bon côté chaque personne et chaque chose. […] La solution, d’ailleurs, d’une minute à l’autre, varie avec l’état de la personne. […] C’était apparemment par des personnes qui n’aiment pas la démocratie.

841. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — I. » pp. 235-256

Voici un homme des plus singuliers dans la littérature et la philosophie du xviiie  siècle ; il a publié ses ouvrages sans nom d’auteur ou sous le seul titre de Philosophe inconnu, d’Amateur des choses sacrées ; ses livres ont été peu lus, mais sa personne et sa parole ont été fort goûtées de quelques-uns ; il a eu son influence vers la fin : pour nous aujourd’hui il a surtout une signification de contraste, d’opposition, de protestation dans le courant d’idées alors régnantes. […] Imprimé en grande partie dans le premier volume des Œuvres posthumes de Saint-Martin (1807), ce manuscrit renferme pourtant de nombreux articles encore inédits, la plupart concernant des personnes alors vivantes ; l’éditeur, par cette raison, avait dû les supprimer. […] La personne qui était en tiers avec nous ne me laissait pas assez libre sur mon vrai sérieux pour que je le fusse aussi sur ma vraie gaieté ; mais cela n’est point une excuse. […] Lorsque arrive la Révolution avec ses rigueurs et ses spoliations fatales, persuadé de l’idée que c’est une expiation divine, il a une pitié médiocre pour les personnes. […] C’est dans les années qui suivirent la Terreur et dans le triomphe des institutions idéologiques dites de l’an III que Saint-Martin eut son jour et son heure d’utilité publique, et, si l’on peut dire, sa fonction sociale, lorsque âgé de cinquante-deux ans, élève aux Écoles normales, il engagea son duel avec la philosophie régnante dans la personne de Garat, et que l’homme modeste atteignit le brillant sophiste au front.

842. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. (suite et fin.) »

Présenté au premier Consul, il lui agréa aussitôt : sa captivité, les souvenirs de ses services militaires et maritimes parlaient pour lui et lui créaient des titres ; sa personne les justifia, et le 20 décembre 1801 il fut nommé commissaire général dans les quatre départements de la rive gauche du Rhin. […] L’inscription qu’on y pourrait graver et qui se rapporte bien aux deux moitiés de sa carrière, qui les rejoint et les relie entre elles, c’est ce mot qu’il prononçait à la Convention dans les derniers temps : « Le mal en France, — un mal contagieux, — c’est que tout le monde veut gouverner et que personne ne veut obéir. » Quand on a si fort le sentiment de cette vérité sous la République, on est fait pour être un homme de gouvernement sous le Consulat et sous l’Empire. […] Personne ne voulait l’être ; il en fallait qui ne fussent pas hostiles à la France ; il en fallait qui sussent le français. […] Personne n’en veut, et pourtant cette ville, la seconde du département, est en elle-même très importante. […] Le chiffre de la mortalité à Mayence en ce mois de novembre avait été de 465 habitants et de 3,514 militaires, en tout près de 4,000 personnes.

843. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.) »

Catinat prit en mai Veillane qu’on avait manquée en janvier ; il s’y exposa tellement de sa personne qu’il en reçut des réprimandes du roi, de Louvois, de sa famille ; il promit de se corriger, mais il n’y réussit qu’imparfaitement ; tout général en chef qu’il était, les jours d’action il aimait à être au feu. […] Catinat, en apprenant la perte soudaine de l’homme qui l’avait toujours apprécié, poussé, protégé et aimé jusque dans les rudesses et brusqueries qu’il ne ménageait à personne, écrivait à Barbezieux, son fils et son successeur (20 juillet) : « Je suis dans une situation où je me fais de grandes violences pour ne me point laisser aller à la vive douleur que je ressens de la grande perte que vient de faire le roi, l’État, et moi de mon protecteur, dont l’affection m’a toujours cent fois plus touché que tous les biens qu’il pouvait me faire. » Louvois de moins, tout changeait ; Catinat perdait un point d’appui solide et puissant ; il dut être porté à en devenir plus circonspect encore. […] Louis XIV, qui devait savoir mieux que personne à quoi s’en tenir, était content de Catinat et mettait cette fin de campagne au nombre de ses bons services. […] Bouchu se trouvait dans la chambre du roi au moment où Louis XIV, dans son cabinet, déclara les nouveaux maréchaux, et les personnes qui étaient dans la chambre, c’est-à-dire dans la pièce voisine, en eurent la première nouvelle : ce fut l’archevêque de Paris, M. de Harlay, qui, sortant du cabinet, le dit à Bouchu, et le pria de mander à Catinat cette circonstance que le roi, en lisant au Père de La Chaise et à lui archevêque la liste des sept nouveaux maréchaux, avait dit, en répétant le nom de Catinat : « C’est bien la vertu couronnée !  […] Mais, ce qui était pis, Vauban, l’autorité même, Vauban semblait croire que Catinat aurait pu agir autrement et tenir le poste de La Pérouse ; il le disait à qui voulait l’entendre : « Je t’assure, écrivait Catinat à son frère, qu’il n’y a ombre de raison à ce dire, et qu’il aurait de la confusion de l’avoir avancé s’il était sur les lieux et qu’on lui dît de disposer ce poste pour être soutenu contre une armée qui a du canon… Je suis assurément rempli d’un grand fonds d’estime et d’affection pour M. de Vauban ; mais je voudrais bien voir jusqu’où iraient ses lumières et la tranquillité de son esprit, s’il était chargé en chef des affaires de ce pays-ci : je crois qu’il y serait pour le moins aussi fécond en inquiétudes qu’il l’était à Namur, où il était demeuré après la prise. » Catinat d’ailleurs n’en veut point à Vauban, et il trouve, pour l’excuser de ce léger tort à son égard, une belle explication amicale : « M. de Vauban est de mes amis ; sa franchise naturelle l’a surpris et l’a fait parler d’une chose qu’il a pensée et qu’il ne sait point, et avec peu de ménagement pour un homme qu’il aime ou qui est en droit de le croire. » Bien qu’endurci par l’expérience à tous les propos, Catinat était donc en ce moment fort fécond en soucis et des plus travaillés d’esprit ; toutes ses lettres adressées du camp de Fénestrelles à son frère nous ouvrent le fond de son âme : « Personne n’est à l’abri du discours, c’est un mal commun à tous ceux qui sont honorés du commandement : il faudrait que je fusse bien abîmé dans un esprit de présomption pour que je pusse imaginer que cela fût autrement à mon égard.

844. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LE COMTE XAVIER DE MAISTRE. » pp. 33-63

Sa destinée avec son cœur acheva de s’y fixer, lorsqu’il eut épousé une personne douée selon l’âme et portant au front le grand type de beauté slave ; il avait trouvé le bonheur. […] Il le fit avec assez de chaleur pour intéresser ses auditeurs et pour s’intéresser lui-même à cette histoire, dont il n’avait jusque-là rien dit à personne. […] Quelques personnes ont copie de son épitaphe, qui rappelle un peu celle de La Fontaine42. […] En parcourant les ouvrages à la mode, il s’est effrayé d’abord, il s’est demandé si notre langue n’avait pas changé durant ce long espace de temps qu’il avait vécu à l’étranger : « Pourtant ce qui me tranquillise un peu, ajoutait-il, c’est que, si l’on écrit tout autrement, la plupart des personnes que je rencontre parlent encore la même langue que moi. » En assistant à quelques séances de nos Chambres, il s’est trouvé bien dérouté de tant de paroles ; au sortir du silence des villas et du calme des monarchies absolues, il comprenait peu l’utilité de tout ce bruit, et l’on aurait eu peine, je l’avoue, à la lui démontrer pour le moment. […] Cette femme d’un esprit si rare augurait mal, il faut le dire, de la publication : elle trouvait, par exemple, que Prascovie arrivée à Pétersbourg perdait du temps, qu’elle n’entendait rien aux affaires ; elle avait horreur de cet homme (Ivan) qui tue une femme, etc., etc. ; son opinion était partagée par plusieurs personnes de sa société.

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