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844. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la révolution française — I. La Convention après le 9 thermidor. »

D’abord, les héros du jour, les thermidoriens, Tallien à leur tête, la plupart anciens amis de Danton, gens sans principes, sans considération personnelle, voulant au fond la république, mais capables de trop d’indulgence par faiblesse, de trop de rigueur par mauvaises passions ; en face d’eux, les Montagnards décidés, la plupart républicains convaincus, austères et fanatiques, les uns croyant encore à la vertu de Robespierre, les autres n’y croyant plus, mais n’en tenant pas moins au système qu’il avait fondé ; enfin, entre ces deux côtés ennemis, les hommes du Marais, qui commençaient à lever la tête, à demander des garanties et des amnisties, gens longtemps inertes et muets par peur, mais qu’on allait voir se ranimer, grandir de jour en jour, et expier leur nullité coupable par des services éminents, par du génie et même par de l’héroïsme : Sieyès et Boissy d’Anglas en étaient.

845. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre IV. La langue française au xviie  »

Si l’on parcourt la liste des quarante membres298 qui composèrent la Compagnie à l’origine, on verra aisément que tous ne sont pas des écrivains, et que la primitive Académie est peut-être moins une institution destinée à honorer le mérite littéraire qu’une sélection de gens d’esprit, amateurs de bonne langue et de bons ouvrages. […] Les gens d’imagination, tels que Fénelon, pourront regretter la langue du xvie  siècle, si riche.

846. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XV. Les jeunes maîtres du roman : Paul Hervieu, Alfred Capus, Jules Renard » pp. 181-195

Camille Lemonnier, dans L’Arche, avait déjà écrit le roman de braves gens heurtés par la vie. […] Vous savez, pour avoir dîné auprès de gens spirituels, que le procédé des amuseurs est de ne jamais rire.

847. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIII » pp. 109-125

Madame de Caylus parle aussi de l’hôtel de Richelieu : « Monsieur et madame de Richelieu avaient l’un et l’autre du goût pour les gens d’esprit. Ils rassemblaient, dit-elle, chez eux, comme le maréchal d’Albret, ce qu’il y avait de meilleur à Paris en hommes et en femmes ; et c’étaient à peu près les mêmes gens, excepté que l’abbé Testu, intime ami de madame de Richelieu, dominait à l’hôtel de Richelieu et s’en croyait le Voiture, Madame de Scarron y allait souvent, désirée partout également.

848. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VIII »

Cette filiation est reconnue par tous les critiques » — « Tous les critiques, réplique-t-on, cela veut dire un critique copié par un autre. » J’admire ce dédain, M. de Gourmont pense-t-il qu’une opinion soit moins bonne parce que des gens compétents la partagent, et qu’on a plus de chance d’avoir raison lorsqu’on n’est d’accord avec personne ? […] Pour finir de réhabiliter Télémaque, on prétend que Fénelon a écrit comme on écrivait de son temps. « En prose et en vers, dit-on, les écrivains du dix-septième siècle évitaient soigneusement l’éclat, la violence, tout excès d’imagination. » Ceci est peut-être vrai en général, et encore pourrait-on discuter ; mais la preuve que tous les écrivains de son époque n’écrivaient pas comme Fénelon, c’est qu’il y a eu des gens comme Bossuet, qui incarne précisément la violence, l’éclat, l’imagination, qui ne recule devant aucune audace, crée son style et donne à sa langue l’originalité de la Bible et des meilleurs Pères de l’Eglise.

849. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Byron »

Est-ce qu’on n’étonnerait pas beaucoup de gens, et même des personnes instruites, en disant que ce romantique est le plus pur classique dans le sens le plus rigoureux et le plus élevé du mot ? […] Pour qu’il naquît, il fallait que son génie rencontrât le génie grec qu’il n’avait pas trouvé à Harrow, où il n’étudia point, par cet esprit de contradiction et de paresse qui est souvent l’esprit des gens de génie.

850. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Matter. Swedenborg » pp. 265-280

Il m’a été impossible de voir dans les œuvres de cet esprit, puissant par d’autres côtés, ce que beaucoup de gens sont accoutumés d’y admirer, sur la foi de certains mirages. […] Comme aux gens de son temps, le rationalisme ne cessa pas d’être sa marotte.

851. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « La Fontaine »

Il était, lui, le pauvre, le luxe de ces gens riches ; car, dans ce temps-là, les gens riches faisaient cas du génie, et personne ne fut plus peut-être agréé et aimé des femmes que cet homme qui mettait ses bas à l’envers… Les témoignages sur ce point abondent, et le pudibond Walckenaer en a des rougeurs qui surprennent de traverser ainsi son vieux maroquin.

852. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Auguste Barbier »

Il nous suffira, pour en donner une idée, de citer des vers comme ceux-ci, que nous trouvons dans sa traduction du Jules César de Shakespeare : Octave a devant moi dit tout haut à Lépide Que, tels que des gens fous, troublés, anéantis, Brutus et Cassius de Rome étaient sortis. Il est bien évident que l’homme qui a écrit : Que tels que des gens fous, troublés, anéantis, ne s’est pas entendu en écrivant, et que le métier ne l’a pas averti, ce bouché d’oreilles, ce sourd-muet d’une organisation qui n’est plus rien une fois qu’elle n’est plus inspirée !

853. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Ch. Bataille et M. E. Rasetti » pp. 281-294

Dans ces gens-là, il y a toujours de la ressource. […] Bataille et Basetti ; je les prendrai et je le raconterai en quelques mots… Il faut bien que les pauvres gens qui ne demandent qu’à lire sachent de quoi il s’agit dans un livre dont on leur parlera certainement, parce qu’il est sur un sujet scabreux et scandaleux.

854. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

C’était un égorgement, un massacre, toute la critique hurlant à ses trousses, une bordée d’imprécations, comme s’il eût assassiné les gens, à la corne d’un bois. […] Touché terre, l’idylle agonise dans une mutuelle indifférence ; les deux amoureux ont un peu cette stupeur des gens réveillés à qui l’on raconte ce qu’ils ont dit en dormant. […] Mais, comme il est vrai qu’on ne combat bien les gens qu’avec leurs propres armes et quand on a déjà un peu couché sous leur tente, j’avancerai de la nouvelle symboliste de M.  […] Cela reste véniel et nos gens se font plus mauvais qu’ils ne sont. […] Il se forme une société composée de gens intelligents de tous les mondes.

855. (1929) Les livres du Temps. Deuxième série pp. 2-509

Va pour escroc et pour aliéné, mais pourtant autour de ce Vintras, les gens s’amassent. […] Que pour les gens de l’Institut, des salons et de sa famille, M.  […] Le sage dit, selon les gens : Vive le roi ! […] Contre de telles gens, quant à moi, je réclame. […] « Singulière minute pour parler de Claudel que celle-là où les gens qui lisent semblent avoir pris parti.

856. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XLVII » pp. 186-187

A propos de la brochure de M. de Ravignan, un homme d’esprit et de doctrine, connu par ses prédilections gallicanes et son opposition aux jésuites, disait : « Je ne l’ai pas lue encore, mais je lui accorderai tout ce qu’il voudra individuellement ; j’accorderai qu’il y a eu, qu’il y a des individus jésuites honnêtes gens, gens aimables, grands prédicateurs, grands mathématiciens, etc., etc. ; mais, comme association, comme Ordre, ils n’ont eu que ce qu’ils méritent, car les meilleurs peuvent à l’instant devenir mauvais et funestes par leur loi d’obéissance : c’est toujours le bâton dans la main de l’aveugle.

857. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 490-491

Il est fâcheux, pour la gloire de ce Poëte ingénieux, que la Jeunesse ne puisse lire ses Ouvrages sans danger, & les gens sages sans indignation.

858. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 120-121

Quand on a consacré ses travaux à l'instruction de la Jeunesse, formé des Disciples à l'amour de l'étude, de la Religion & de la Patrie, on a des droits assurés à la reconnoissance des Gens de Lettres & des bons Citoyens.

859. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XVIII » pp. 74-75

— Si vous, qui lisez les journaux, n’y trouvez aucune protestation ni attaque contre mon article de la Revue, vous eu pourrez conclure et faire remarquer que c’est là une grande confirmation, et un grand aveu que ce silence : car depuis quand peut-on dire aux gens, au beau milieu de la foule, de telles vérités, sans qu’aucun témoin relève le gant ?

860. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXII » pp. 131-132

Vivent les gens d’esprit pour suffire à tout !

861. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XLIX » pp. 193-194

Je crains, en nommant les gens, d’être ingrat s’ils sont bien pour moi, d’être vindicatif s’ils sont mal.

862. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 385-387

Par le moyen de ces secours, réunis à la critique exercée, précise & toujours munie d’autorités ou de preuves, il est parvenu à purger le texte de l’Auteur d’environ deux milles fautes, & de le rendre le plus exact & le plus pur de tous ceux qu’on a donnés jusqu’à présent ; ce qui n’est pas d’un prix médiocre pour les véritables Gens de Lettres.

863. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 102-104

Si les Littérateurs exacts ne sont pas obligés d’avoir une grande estime pour ses talens, les gens sages doivent au moins rendre justice à l’honnêteté de ses sentimens.

864. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 401-402

Né de parens pauvres & obscurs, doué d’une ame fiere, incapable des bassesses qui procurent des protecteurs, il fut presque toujours aux prises avec le besoin & le désespoir, & auroit peut-être succombé à ce dernier, si des gens de Lettres que son courage & les talens qu’il annonçoit avoient intéressés à son sort, n’eussent attiré sur lui les bienfaits de quelques Grands.

865. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 433-434

« Si ce Livre me survit, dit-elle, je défends à toute personne, telle qu’elle soit, d’y ajouter, ni diminuer, ni changer jamais aucune chose, soit aux mots ou en la substance, sous peine à ceux qui l’entreprendront, d’être tenu pour détestables aux yeux des Gens d’honneur, comme violateurs d’un sépulcre innocent….

866. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 214-215

Il assure, avec un grand sang froid, qu'il n'y a qu'à ne rien désirer ici bas, & que tous les désirs seront remplis ; que l'aigreur de la prononciation annonce un esprit obscur & embarrassé ; que tous les gens brusques n'ont pas des idées nettes.

867. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 316-318

Sa maison fut constamment le rendez-vous des Gens de Lettres, qui, à ce titre, étoient assurés d'être bien accueillis.

868. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Amand » p. 279

Si vous ne m’en croyez pas sur les dessins d’Amand, celui où au bas d’une fabrique à droite il y a un groupe de gens qui concertent ; à gauche une statue de Flore sur son piédestal ; à droite un escalier ; au-dessus de l’escalier une fabrique ; plus vers la gauche, sur une partie du massif commun de la fabrique, une cuvette soutenue par des figures, et au-dessous de la cuvette, un bassin qui reçoit les eaux ; revoyez cela, et jugez si j’ai tort de dire que rien n’est plus bizarre, plus dur et plus mauvais.

869. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 36, des erreurs où tombent ceux qui jugent d’un poëme sur une traduction et sur les remarques des critiques » pp. 534-536

Ils nous traiteront de gens esclaves des préjugez, parce que nous ne nous rendrons pas à leur décision.

870. (1902) La formation du style par l’assimilation des auteurs

Il y a des gens qui tranchent, rejettent et condamnent sans avoir lu. […] Le procédé me paraît bon et bien des gens n’en ont pas d’autres. […] Il y a des gens qui aiment la brièveté dans les œuvres. […] Ils mettent leur amour-propre à passer pour ridicules, et les gens d’esprit seraient malheureux de ce qui fait leur bonheur. […] Pour beaucoup de gens, c’est du métier, un simple « truc ».

871. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXV » pp. 254-255

La situation était délicate sans doute, mais il y avait de fins joueurs qui, de part et d’autre, ne voulaient rien brouiller, et la crise n’était pas de cette violence aveugle et populaire qui entraîne malgré eux les gens sages.

872. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — J — Joncières, Léonce de »

C’est dire qu’on n’y trouve aucune des recherches nouvelles de rythmes et de consonances auxquelles force nous est de nous intéresser, puisque les gens de grand talent s’y emploient.

873. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 374-376

Les Gens de Lettres ne sauroient-ils donc jamais employer une juste mesure, dans les jugemens qu’ils portent sur certains Ouvrages ?

874. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — III. La tête de mort »

Les gens ont rapporté cette conversation au chef qui a dit : « Il faut laisser libre le nouveau venu ».

875. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Argument » pp. 249-250

On doit trouver dans les poèmes d’Homère les deux principales sources des faits relatifs au droit naturel des gens, considéré chez les Grecs.

876. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

Et les plus gens de bien peuvent avoir dans l’esprit de la bizarrerie. […] Les gens du pays la disaient un peu « bestiote ». […] Nous autres, gens de qualité, nous savons tout et jugeons de tout sans avoir rien appris ! […] Que de complaisances pour les gens puissants ! […] Mais le bétail y passe la nuit pêle-mêle avec les gens.

877. (1923) Critique et conférences (Œuvres posthumes II)

Et, sur le début suivant, après passablement d’autres choses d’autres gens, On dirait des soldats d’Agrippa d’Aubigné Alignés au cordeau par Philibert Delorme... […] Les gens furent stupéfaits de tant de jeunesse et de talent mêlés à tant de sauvagerie et de positive lycanthropie. […] Je sais, comme la majorité des gens un peu pensifs et dégagés de l’immédiat, ce que ces grandes manifestations modernes couvrent et parfois cachent de vilain et de mesquin. […] Shakespeare, à première vue de gens de vue courte, l’antithèse de Racine, ce Shakespeare tant vilipendé de Voltaire, qui l’avait nommé de tous les noms, « sauvage ivre », « ignorant », etc. […] Chateaubriand, bien avant de traduire si littéralement Milton et de commenter Shakespeare d’une façon si informée, n’avait-il pas rapporté, de ses longs exils en Angleterre, leur connaissance approfondis et confirmée par l’usage des gens et de la langue de leur pays ?

878. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (2e partie) » pp. 97-191

Ainsi, avant Aristote, bien des gens d’esprit avaient émis sur les œuvres des poètes les opinions les plus justes et les plus graves ; mais personne avant lui n’avait essayé de faire de ces opinions un corps de doctrine, et de les approfondir en remontant jusqu’aux principes sur lesquels elles s’appuient. […] Le caractère ou les mœurs, c’est ce qui distingue les gens qui agissent et permet de les qualifier ; et l’esprit, c’est l’ensemble des discours par lesquels on exprime quelque chose, ou même on découvre le fond de sa pensée. […] « Il faut de toute nécessité que les actions capables de les produire se passent, ou entre des amis, les uns à l’égard des autres, ou entre des ennemis, ou enfin entre des gens qui ne sont ni l’un ni l’autre. […] « Quand on suppose que les gens ne vous comprendront pas, si l’on ne prend la peine de leur tout expliquer, on se donne beaucoup de mouvement, comme ces mauvais mimes qui pirouettent sur eux-mêmes pour imiter un disque qui tourne, ou qui tirent à eux le Coryphée quand ils jouent, aux sons de la flûte, la Scylla attirant les navires sur l’écueil. […] L’épopée s’adresse aux esprits distingués qui n’ont aucun besoin de tout cet attirail extérieur, tandis que l’art tragique ne s’adresse qu’à des gens d’un goût vulgaire.

879. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite et fin.) »

Ce qu’il y a de certain, c’est que, la croyant plus mal, M. de Talleyrand était accouru, et il avait paru étonné de la trouver passablement : « Que voulez-vous, dit-elle, c’est d’un bon effet pour les gens. »  M. de Talleyrand, après un moment de réflexion, reprit : « Il est vrai qu’il n’y a pas de sentiment moins aristocratique que l’incrédulité52. » La duchesse avait donné à sa fille, pour lui enseigner la religion, un jeune abbé, homme d’esprit et dont la réputation commençait à s’étendre. […] D’un côté, des hommes politiques vieux et jeunes, des hommes d’État aux cheveux gris, se pressaient autour du foyer et causaient avec animation ; de l’autre, on remarquait un groupe de jeunes gens et de jeunes dames, dont les œillades et les gracieux murmures échangés à voix basse formaient un triste contraste avec les gémissements suprêmes du mourant. » La bibliothèque, dont la porte donnait dans la chambre mortuaire, était remplie également des gens de la maison et de domestiques aux aguets : de temps en temps la portière s’entrouvrait, une tête s’avançait à la découverte, et l’on aurait pu entendre chuchoter ces mots : « Voyons, a-t-il signé ? […] Des gens d’esprit comme lui ne mettent jamais le pire de leur pensée ou de leur vie dans des papiers écrits. […] Mais heureusement qu’il sort de votre studieuse prison des morceaux littéraires que recherchent tous les gens de goût.

880. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LOUISE LABÉ. » pp. 1-38

L’Académie de Fourvière, espèce de société de gens doctes et considérables, d’érudits et même d’artistes, dans le goût des académies d’Italie, et qui devançait la plupart des fondations de ce genre, date du commencement du xvie  siècle. […] Les sonnets amoureux de Louise Labé mirent en veine bien des beaux esprits du temps, et ils commencèrent à lui parler en français, en latin, en grec, en toutes langues, de ses gracieusetés et de ses baisers (de Aloysiæ Labææ osculis), comme des gens qui avaient le droit d’exprimer un avis là-dessus. […] Et puis elle ne recevait pas seulement dans sa maison des poëtes, mais aussi de braves capitaines, gens qui se repaissent moins de fumée. […] Quelles gens ont esté, pour un temps, en plus grande réputation que les philosophes ?

881. (1914) Enquête : Les prix littéraires (Les Marges)

Il n’y aurait plus alors que les gens qui pensent et écrivent d’une certaine façon pour être avantagés. […] Les nouvelles couches de romanciers et d’écrivains ont trop en vue les billets de mille des fondations charitables pour gens de lettres. […] Que tant de gens qui écrivent se mettent donc à travailler comme tout le monde, à travailler consciencieusement dans les métiers, les industries, le commerce, les administrations. […] Tous les gens de bonne foi reconnaissent que les prix littéraires sont funestes à la littérature.

882. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre sixième. »

Il attire les gens par cette devise séduisante : « Que sais-je ?  […] Et qu’y a-t-il d’étonnant qu’un juge si facile, toujours prêt à se récuser pour n’avoir pas à condamner, soit du goût de plus de gens qu’un juge qui condamne au nom, d’une règle établie ? […] Il y a des gens qui ont toujours lu Montaigne, et qui ne l’ont jamais fini. […] Ainsi en usent les hommes de génie avec des langues qui ne sont pas encore formées ; ils imitent les gens du peuple, toujours enfants même au sein des langues perfectionnées, lesquels, ayant plus d’idées que de mots pour les rendre, courent aux équivalents, aux comparaisons, aux figures, s’aidant de tout pour parler comme ils sentent, et se faisant dans la chaleur du moment une langue incorrecte mais vive expressive et colorée.

883. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Romans et nouvelles » pp. 3-80

Cet affreux déchirement du voile que nous avions devant les yeux, c’est comme l’autopsie d’une poche pleine d’horribles choses dans une morte tout à coup ouverte… Par ce qui nous est dit, j’entrevois soudainement tout ce qu’elle a dû souffrir depuis dix ans : et les craintes près de nous d’une lettre anonyme, d’une dénonciation de fournisseur, et la trépidation continuelle à propos de l’argent qu’on lui réclamait et qu’elle ne pouvait rendre, et la honte éprouvée par l’orgueilleuse créature pervertie, en cet abominable quartier Saint-Georges, à la suite de ses fréquentations avec de basses gens qu’elle méprisait, et la vue douloureuse de la sénilité prématurée que lui apportait l’ivrognerie, et les exigences et les duretés inhumaines des maquereaux du ruisseau, et les tentations de suicide qui me la faisaient un jour retirer d’une fenêtre, où elle était complètement penchée en dehors… et enfin toutes ces larmes que nous croyions sans causes ; — cela mêlé à une tendresse d’entrailles très profonde pour nous, à un dévouement, comme pris de fièvre, dans les maladies de l’un ou de l’autre. […] voilà… Nous avons commencé, nous, par la canaille, parce que la femme et l’homme du peuple, plus rapprochés de la nature et de la sauvagerie, sont des créatures simples et peu compliquées, tandis que le Parisien et la Parisienne de la société, ces civilisés excessifs, dont l’originalité tranchée est faite toute de nuances, toute de demi-teintes, toute de ces riens insaisissables, pareils aux riens coquets et neutres avec lesquels se façonne le caractère d’une toilette distinguée de femme, demandent des années pour qu’on les perce, pour qu’on les sache, pour qu’on les attrape, — et le romancier du plus grand génie, croyez-le bien, ne les devinera jamais, ces gens de salon, avec les racontars d’amis qui vont pour lui à la découverte dans le monde. […] Pourquoi, à l’heure actuelle, un romancier (qui n’est au fond qu’un historien des gens qui n’ont pas d’histoire), pourquoi ne se servirait-il pas de cette méthode, en ne recourant plus à d’incomplets fragments de lettres et de journaux, mais en s’adressant à des souvenirs vivants, peut-être tout prêts à venir à lui ? […] Deux ou trois mois avant la mort de mon frère, à la sortie de l’établissement hydrothérapique de Beni-Barde, tous deux nous faisions notre promenade de tous les matins, au soleil, dans une certaine allée du bois de Boulogne, où je ne repasse plus, — une promenade silencieuse, comme il s’en fait, en ces moments de la vie, entre gens qui s’aiment et se cachent l’un à l’autre leur triste pensée fixe.

884. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Le Vavasseur, Gustave (1819-1896) »

Il fut, avec Philippe de Chennevières, l’auteur des Contes de Jean de Falaise , d’un groupe d’esprits rares qui forma un moment une sorte de petite école dont la Normandie aurait le droit d’être fière et qui eût fait plus de bruit si les gens du pays du cidre étaient aussi retentissants et ardents et hardis que les félibres méridionaux.

885. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 157-158

En remontant jusqu’à la source primitive d’un systême de musique connu à la Chine depuis plus de quatre mille ans ; en approfondissant les principes sur lesquels ce systême appuie ; en développant ses rapports avec les autres sciences ; en déchirant ce voile épais qui nous a caché jusqu’ici la majestueuse simplicité de sa marche, ce Savant eût pénétré peut-être jusque dans le Sanctuaire de la Nature… Son Ouvrage nous eût peut-être fait connoître à fond le plus ancien systême de musique qui ait eu cours dans l’Univers [celui des Chinois] ; & en l’exposant avec cette clarté, cette précision, cette méthode qu’on admire dans son Mémoire, il eût servi comme de flambeau pour éclairer tout à la fois & les Gens de Lettres & les Harmonistes : les premiers, dans la recherche des usages antiques, & les derniers dans celle du secret merveilleux de rendre à leur Art l’espece de toute-puissance dont il jouissoit autrefois, & qu’il a malheureusement perdue depuis. »  

886. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « L’abbé de Bernis. » pp. 1-22

Il dit quelques mots sur l’utilité des relations entre les gens du monde et les gens de lettres, sur les avantages qu’en avait recueillis la langue dès le temps des La Rochefoucauld, des Saint-Évremond, des Bussy ; lui, c’était bien sur le pied de leur successeur, d’homme de qualité aimant et cultivant les lettres, qu’il entrait dans la compagnie. […] Je tâche, en même temps, qu’elle soit rangée. » Comme tous les absents de Paris, il en ressent aussitôt le vide, se plaint de sa vie languissante, et regrette la société : « Au reste, si l’on est heureux quand on n’a rien à faire, quand on vit avec des gens à qui on n’a rien à dire, je le suis. […] Malgré moi, vous voyez, monsieur, que la morale me gagne : c’est la maladie des gens qui sont presque toujours dans la solitude.

887. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — II. (Fin.) » pp. 452-472

Je serais fort aise d’avoir plusieurs connaissances comme lui ; car, à tout prendre, il est supérieur à presque tous les gens avec qui je vis. […] Le jardin et le pavillon d’été où il composait sont négligés, et le dernier entièrement dégradé ; mais on le montre encore ainsi que son cabinet, et les gens respectent sa mémoire. […] [NdA] Il écrivait cela à lord Sheffield dans un temps où ce dernier avait manqué sa réélection (11 mai 1784) ; Gibbon essayait, sans trop l’espérer, de le tirer à lui, et il lui disait ce mot qui était le fond de son cœur : « Si cet échec pouvait vous apprendre à rompre une bonne fois avec rois et ministres, et patriotes et partis, et Parlements, toutes sortes de gens pour lesquels vous êtes de beaucoup trop honnête, c’est pour le coup que je m’écrierais avec T… de respectable mémoire : “Bravo, mon cher !

888. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire de la maison royale de Saint-Cyr, par M. Théophile Lavallée. » pp. 473-494

Je m’offre avec tous mes gens pour les servir ; et je n’aurai nulle peine à être leur servante, pourvu que mes soins leur apprennent à s’en passer. […] Car de songer que trois cents jeunes filles qui y demeurent jusqu’à vingt ans, et qui ont à leur porte une cour remplie de gens éveillés, surtout quand l’autorité du roi n’y sera plus mêlée ; de croire, dis-je, que de jeunes filles et de jeunes hommes soient si près les uns des autres sans sauter les murailles, cela n’est presque pas raisonnable. […] S’il est pénible, comme elle l’a dit, de durer trop longtemps, de vivre dans le monde avec des gens de qui l’on n’est pas connu, qui n’ont point été de la vie qu’on a menée autrefois, qui sont en un mot d’un autre siècle, il est très agréable dans la retraite, et sur le banc d’un jardin, de se retrouver devant des âmes toutes neuves et toutes fraîches, qui sont dociles à se laisser former et avides de tout ce que vous leur dites.

889. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Une petite guerre sur la tombe de Voitture, (pour faire suite à l’article précédent) » pp. 210-230

S’il est vrai, ce que vous croyez, que j’aie montré le chemin à beaucoup de gens, comme j’avoue qu’ils y ont fait plus de progrès que moi, ils ne peuvent pas nier que je ne leur aie ouvert le passage en leur montrant le chemin. M. de Voiture a été de ces gens-là… Dans ces termes, Balzac n’exagérait point, et ne s’accordait pas plus qu’il ne méritait. […] Les deux chefs avaient vécu entre eux dans les termes les plus décents ; mais après leur mort, leurs disciples et les gens de leur suite n’y tinrent pas, ils en vinrent aux mains, ils se gourmèrent : c’est l’histoire du débat de Girac et de Coslar.

890. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — II » pp. 316-336

Le plus souvent il n’avait qu’à se montrer pour donner courage à ses alliés du dedans, aux bons habitants qui entraînaient les autres : les consuls et échevins, plus circonspects d’ordinaire et gens déjà de juste milieu, ont besoin pour se rendre que la rue s’en mêle et qu’on leur force la main. […] Il se plaint, en terminant, de tout le monde : « C’est ce qui s’est passé en cette seconde guerre, dit-il, où Rohan et Soubise ont eu pour contraires tous les grands de la Religion de France, soit par envie ou peu de zèle, tous les officiers du roi à cause de leur avarice, et la plupart des principaux des villes gagnés par les appâts de la Cour… Quand nous serons plus gens de bien, Dieu nous assistera plus puissamment. » Par cette paix les réformés obtenaient ce qui à leurs yeux était l’essentiel, la subsistance des nouvelles fortifications qu’ils avaient élevées dans la plupart des petites villes du Midi, c’est-à-dire la faculté de recommencer la guerre. […] Résolution vraiment chrétienne et qui ne dément point tout le cours de sa vie, qui ayant été un tissu d’afflictions continuelles45, elle s’y est trouvée tellement fortifiée de l’assistance de Dieu, qu’elle en est en bénédictions à tous les gens de bien, et sera à la postérité un exemple illustre d’une vertu sans exemple et d’une piété admirable.

891. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric-le-Grand Correspondance avec le prince Henri — II » pp. 375-394

On sait du reste que Frédéric n’était pas le philosophe tout idéal et tout à la Marc Aurèle que les gens de lettres ses amis se hâtèrent de promettre un peu témérairement au monde quand il monta sur le trône ; mais il était réellement philosophe par goût, par bon sens, parce qu’il réduisait chaque chose à la juste réalité, et que, tout en faisant vaillamment son rôle et son métier de souverain, il se séparait à tout instant de cette destinée d’exception pour se juger, pour se regarder soi-même et les autres. […] Au moment du départ, et lorsque le prince était encore en Suède, Frédéric lui écrivait (12 août 1770) : « Vous apprendrez à connaître là bien des gens dont nous avons besoin. […] La plupart des gens de lettres qui faisaient fête au prince Henri, et dont celui-ci parlait avec éloge, étaient inconnus à Frédéric, ou il ne les connaissait que de réputation.

892. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. De Pontmartin. Causeries littéraires, causeries du samedi, les semaines littéraires, etc. »

Dans le chapitre intitulé la Critique et les Honnêtes Gens, titre qui rappelle à dessein l’épigraphe de l’ancien recueil périodique le Conservateur et sa célèbre devise : le Roi, la Charte et les Honnêtes Gens, M. de Pontmartin expose ses principes et plante son drapeau. […] Il y a du chevalier chez M. de Pontmartin ; sa sensibilité, sa générosité parfois l’entraînent un peu loin quand il se réconcilie avec les gens.

893. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Lettres inédites de Michel de Montaigne, et de quelques autres personnages du XVIe siècle »

Nous y verrons un à un tous les fils dont se compose la trame la plus solide de l’histoire, le dessous et l’envers de la tapisserie ; nous apprendrons à y connaître au naturel quelques figures de diplomates guerriers, d’hommes d’État, gens d’esprit ou même écrivains originaux, que les récits du dehors et le spectacle de l’avant-scène laissaient à peine soupçonner43. […] Ces gens de goût, Montaigne et Horace, quand ils nous parlent d’eux et qu’ils se jugent, doivent être écoutés avec intelligence et sourire, avec quelque chose de ce sourire fin qu’eux-mêmes ils ont en nous parlant. […] Et pour preuve que c’était sérieux, il fit venir à l’instant Le Londel, capitaine de ses gardes, et lui ordonna de désarmer Vaillac : « Il s’adressa ensuite à M. de Montaigne, maire, et lui commanda de faire savoir dans toute la ville les intentions du roi et celles de son lieutenant général, afin de disposer les bourgeois, bons et fidèles serviteurs du roi, à se joindre à ses troupes pour forcer la garnison du château à se rendre, si la punition de Vaillac ne les décidait pas à se soumettre. » Vaillac, pressé de toutes parts, se soumit et commanda lui-même à ses gens de sortir et de rendre le château.

894. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par. M. le Chevalier Alfred d’Arneth »

Je ne suis pas si injuste de vouloir vous interdire la conversation très-naturelle des jeunes gens que vous connaissez, de préférence à ceux que vous ne voyez qu’en grand public, mais c’est un point essentiel que la distinction des gens, et que vous ne devez pas négliger, l’ayant si bien acquis au commencement. […] On dit que vous vous négligez beaucoup sur ce point ; on l’attribue à Mesdames, qui jamais n’ont su s’attirer l’estime et la confiance ; mais ce qui est pire que tout le reste, on prétend que vous commencez à donner du ridicule au monde, d’éclater de rire au visage des gens : cela vous ferait un tort infini et à juste titre, et ferait même douter de la bonté de votre cœur ; pour complaire à cinq ou six jeunes dames ou cavaliers, vous perdriez le reste. Ce défaut, ma chère fille, dans une princesse, n’est pas léger ; il entraîne après soi, pour faire la cour, tous les courtisans, ordinairement gens désœuvrés et les moins estimables dans l’État, et éloigne les honnêtes gens, ne voulant se laisser mettre en ridicule, ou s’exposer à se devoir fâcher, et à la fin on ne reste qu’avec mauvaise compagnie, qui entraîne peu à peu dans tous les vices… Ne gâtez pas ce fonds de tendresse et de bonté que vous avez. (17 août 1774.) » Et encore, — car cette morale générale n’est nullement en l’air et ne vient qu’à propos de rapports très-particuliers : « Ne prenez pas pour humeur ou gronderie ce que je vous ai marqué ; prenez-le pour la plus grande preuve de ma tendresse et de l’intérêt que je prends à vous, de vous marquer tout ceci avec tant d’énergie ; mais je vous vois dans un grand assujettissement, et vous avez besoin qu’on vous en tire au plus vite et avec force, si l’on peut encore espérer de l’amendement.

895. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

On ne lui donne pas d’argent, et il fait du scandale ; si l’on peut appeler scandale des injures bien grossières, adressées par un voleur de grand chemin à des gens qu’il n’a jamais vus. […] Quand on parle de goût et qu’on célèbre celui de l’ancienne société, celui de quelques hommes en particulier dont M. de Talleyrand était comme le type accompli, il faut bien s’entendre et se garder de confondre le goût social et le goût littéraire ; car en matière de littérature et surtout de poésie, ces gens d’esprit en étaient restés aux formes convenues de leur jeunesse et aux lieux communs de leur éducation première ; on en a une singulière preuve dans la lettre suivante : « 18 (août 1828) Bourbon. […] Il faut toujours se méfier de l’impression que font les vieillards, surtout s’ils sont gens bien élevés et polis.

896. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET. » pp. 177-201

Ce sont là, à mon sens, des vers d’une telle qualité poétique, que bien des gens de mérite qui sont arrivés à l’Académie par les leurs (M. […] Je donne la moindre en cent à tous faiseurs, copistes, éplucheurs, gens de goût, etc. […] Enfin il oublie encore que la manie de versifier a, de tout temps, été le lot de bien des sots proprement dits, sots fieffés à la Lemierre, à la Delrieu ou à la Viennet, qui poursuivent les gens de leurs rimes jusque dans la rue.

897. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN DERNIER MOT sur BENJAMIN CONSTANT. » pp. 275-299

Vous ne sauriez croire ce que je souffre quand il me semble que vous n’êtes pas en règle avec les gens que je vois. […] Je le suis maintenant, je crois, pour tout l’hiver, dans la famille de ma femme , et dans un antique château dominé par les ruines de deux châteaux plus antiques encore, au milieu d’un assez beau pays, chez des gens qui ont beaucoup plus d’affection de famille qu’il n’est de mode chez nous d’en avoir, avec une femme à laquelle je suis chaque jour plus attaché, parce qu’elle est chaque jour meilleure pour moi, et près de la plus belle bibliothèque de l’Europe. […] Il n’y a pas un livre un peu utile qui ne soit à ma disposition, et les bibliothécaires sont les gens les plus prévenants du monde.

898. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Victor Duruy » pp. 67-94

Il écrivait en terminant : « Nous ne devons pas oublier que les femmes sont mères deux fois, par l’enfantement et par l’éducation ; songeons donc à organiser aussi l’éducation des filles, car une partie de nos embarras actuels provient de ce que nous avons laissé cette éducation aux mains de gens…3 enfin, de gens qui n’avaient pas toute la confiance de M.  […] La citation complète est : « … de gens qui ne sont ni de leur temps ni de leur pays ».

899. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVII. Rapports d’une littérature avec les littératures étrangères et avec son propre passé » pp. 444-461

Les mêmes vers ne peuvent agir de même façon sur des gens qui ont du poète des conceptions si divergentes. […] Alphonse Daudet, qui avait, quand il voulait, une vision si originale des gens et des choses, les a vues parfois à travers les lunettes de Dickens ; Alexandre Dumas père a dans le vaste fleuve de son imagination débordante absorbé quelques petits ruisseaux ; André Chénier, qui fut un vrai poète, fut aussi par endroits un arrangeur industrieux de centons antiques. […] Mais qu’elle aille du petit au grand, ou, ce qui est le cas le plus ordinaire, du grand au petit, cette assimilation entre gens qui se coudoient et visent au même but se produit régulièrement et elle contribue à donner un air de famille aux écrivains d’une même époque.

900. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Adrienne Le Couvreur. » pp. 199-220

Mais la tragédie s’achevait à peine, que les gens de police entrèrent et firent défense de passer outre. […] » Si je suis sérieuse, parce qu’on ne peut être fort gaie au milieu de beaucoup de gens qu’on ne connaît pas : « C’est donc là cette fille qui a tant d’esprit ? […] Les jours où elle n’était pas trop envahie par les duchesses et par les personnes de bel air, Mlle Le Couvreur se plaisait à recevoir ses amis : Ma vanité, disait-elle, ne trouve point que le grand nombre dédommage du mérite réel des personnes ; je ne me soucie point de briller ; j’ai plus de plaisir cent fois à ne rien dire, mais à entendre de bonnes choses, à me trouver dans une société de gens sages et vertueux, qu’à être étourdie de toutes les louanges fades que l’on me prodigue à tort et à travers.

901. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de lord Chesterfield à son fils. Édition revue par M. Amédée Renée. (1842.) » pp. 226-246

Montesquieu, après la publication de L’Esprit des lois, écrivait à l’abbé de Guasco, qui était alors en Angleterre : « Dites à milord Chesterfield que rien ne me flatte tant que son approbation, mais que, puisqu’il me lit pour la troisième fois, il ne sera que plus en état de me dire ce qu’il y a à corriger et à rectifier dans mon ouvrage : rien ne m’instruirait mieux que ses observations et sa critique. » C’est Chesterfield qui, parlant un jour à Montesquieu de la promptitude des Français pour les révolutions et de leur impatience pour les lentes réformes, disait ce mot qui résume toute notre histoire : « Vous autres Français, vous savez faire des barricades, mais vous n’élèverez jamais de barrières. » Lord Chesterfield goûtait certes Voltaire ; il disait à propos du Siècle de Louis XIV : « Lord Bolingbroke m’avait appris comment on doit lire l’histoire, Voltaire m’apprend comment il faut l’écrire. » Mais en même temps, avec ce sens pratique qui n’abandonne guère les gens d’esprit de l’autre côté du détroit, il sentait les imprudences de Voltaire et les désapprouvait. […] Si vous voulez gagner en particulier les bonnes grâces et l’affection de certaines gens, hommes ou femmes, tâchez de découvrir leur mérite le plus saillant, s’ils en ont, et leur faiblesse dominante, car chacun a la sienne ; puis rendez justice à l’un, et un peu plus que justice à l’autre. […] Mais ces petits-maîtres, mûris par l’âge et par l’expérience, se métamorphosent souvent en gens fort capables.

902. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire des travaux et des idées de Buffon, par M. Flourens. (Hachette. — 1850.) » pp. 347-368

La mienne va jusqu’à croire que de certaines gens ne peuvent pas même m’offenser46. […] Il aime l’ordre, il en met partout. » Avec cette justice parfaite et cette bonté qui dérivait de la règle et du tempérament, il ne cessa de faire du bien dans ses alentours, et les gens de Montbard l’adoraient. […] Il n’aimait ni sa personne ni ses talents : il ne l’appelait que le grand phrasier, le roi des phrasiers  ; il le contrefaisait en charge (d’Alembert avait ce malheureux talent de singer les gens).

903. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Monsieur de Bonald, (Article Bonald, dans Les Prophètes du passé, par M. Barbey d’Aurevilly, 1851.) » pp. 427-449

Dans un chapitre intitulé « Des gens de lettres », il saisit très finement les qualités distinctives de cette nouvelle espèce, née ou développée seulement au xviiie  siècle ; il dénonce les inconvénients d’un pareil corps vaguement introduit dans l’État et y devenant une puissance ; il essaie de la restreindre et d’assigner les termes dans lesquels il conviendrait, selon lui, de renfermer toute discussion littéraire, soit par rapport à la religion, soit par rapport aux mœurs. […]  » M. de Bonald, dans ses écrits, à travers leur forme grave et tendue, avait une ironie fine et souvent piquante ; cela se dégage mieux dans ses Pensées : Des sottises, dit-il, faites par des gens habiles ; des extravagances dites par des gens d’esprit ; des crimes commis par d’honnêtes gens, — voilà les révolutions.

904. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

Vous élevez-vous un peu, voilà des gens qui prennent leur pied ou leur toise, lèvent la tête, et vous crient de descendre pour vous mesurer. […] Mme Geoffrin peignait Montesquieu comme un homme distrait, « ne connaissant pas le nom de ses gens, ayant un carrosse qui faisait le bruit d’un fiacre, etc. ». […] Ce qu’on sait moins, c’est que son convoi funéraire se fit sans presque personne ; Diderot (au rapport de Grimm) est, de tous les gens de lettres, le seul qui s’y soit trouvé.

905. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — I. » pp. 329-349

Necker au milieu d’un cercle de gens de lettres, dont la conversation parcourait des sujets qui ne lui devinrent familiers que par degrés ; mais il y avait autre chose encore. […] Bien des gens, aujourd’hui, qui sont brouillés avec M.  […] Autre bonheur : un sot ne doute jamais ; il n’est jamais assailli par la multitude des idées et des points de vue, ni en proie à l’indécision, ce tourment des gens d’esprit.

906. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre VI. Le beau serviteur du vrai »

La tourbe des domestiques sophistes, des écrivains qui ont autour du cou une rondeur pelée, des souteneurs historiographes, des scoliastes entretenus et nourris, des gens de cour et d’école, fait obstacle à la gloire des punisseurs et des vengeurs. […] Vous en avez la démonstration certaine : un profond mépris de l’opinion publique. » — … — « Il est des gens qui ont la manie de fronder tout ce qui est grand : ce sont ceux-là qui se sont attaqués à la Sainte-Alliance ; et pourtant rien n’a été imaginé de plus auguste et de plus salutaire à l’humanité. » — Ces choses, diminuantes pour celui qui les a écrites, sont signées Gœthe. […] Mal en prend aux poëtes d’être gens de cour et de faire ce que leur demandent les maîtresses de roi.

907. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre VI. Des Livres qui traitent de la Rhétorique. » pp. 294-329

A l’égard de la coutume d’apprendre par cœur, l’impossibilité pour bien des gens de prêcher ex abundantis, comme le voudroit Fénélon, sera pour eux une raison décisive de conserver l’ancienne méthode. […] On doit s’en contenter, & ne pas vouloir les astraindre à une méthode, dont peu de gens sont capables, & qui peut produire plus de mal que de bien. […] Voulez-vous enchérir les chaises & les bans, Et jusques au portail mettre en presse les gens ?

908. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Henri Heine »

Les bêtes non plus, parce qu’elles ne font aussi attention qu’à une seule chose, et quand une autre les en détourne, elles s’y tournent tout entières… Mais les rieurs ne considérant les choses qu’avec légèreté et s’en laissant détourner facilement, pour nous montrer que ces gens-là sont intermédiaires entre l’homme et la bête, on a imaginé les satyres rieurs… » Classification profonde ! […] Dans les Virtuoses des concerts particulièrement, lui, ce virtuose de l’ironie, nous joue un air sur Véron, sur cet homme que, pendant un si grand nombre d’années, tous les gens d’esprit de France et de Navarre se renvoyèrent comme une balle du jeu de paume de la moquerie, et nous parierions bien que cet air, depuis longtemps exécuté pour la première fois, le bourgeois de Paris, qui doit tamponner ses oreilles avec du coton, selon l’usage de tous les bourgeois, l’entend cependant toujours, de ces jolies oreilles que nous connaissons. […] Un jour, Henri Heine, dans sa floraison de jeunesse, écrivit, comme s’il eût senti les murmures en lui de cet horrible mal sous lequel il devait succomber, que « tout homme de génie était nécessairement malade et même que le génie n’était qu’à ce prix », et les gens qui se portaient bien trouvèrent la chose insolente et lui en firent la guerre.

909. (1868) Curiosités esthétiques « VI. De l’essence du rire » pp. 359-387

Ces braves gens laissaient passer à côté d’eux la comédie de Robert Macaire sans y apercevoir de grands symptômes moraux et littéraires. […] Peu de gens s’en souviendront sans doute, car bien peu ont paru goûter ce genre de divertissement, et ces pauvres mimes anglais reçurent chez nous un triste accueil. […] Ils sont à peu près raisonnables et ne diffèrent pas beaucoup des braves gens qui sont dans la salle.

910. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « À M. le directeur gérant du Moniteur » pp. 345-355

Combien de gens, même en matière plus grave que des drames ou des romans, se flattent d’obéir à des principes et qui ne font que subir des relations de société ! Mais ce ne sont pas les salons tous seuls qui m’onts donné cette crainte de parler qui, de ma part, vous étonne ; ce sont nos confrères de la presse, les gens du métier et qui ne sont pas sujets d’ordinaire à se scandaliser pour si peu.

911. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Waterloo, par M. Thiers »

Le vieux et brave Friant, ce modèle des divisionnaires dans la main de l’Empereur, en avait, jugé avec son coup d’œil exercé : « Sire, nous ne « viendrons jamais à bout de ces gens-là, si vous ne les « prenez à revers, au moyen de l’un des corps dont « vous disposez. » — « Sois tranquille », lui répondit Napoléon ; « j’ai ordonné ce mouvement trois fois, et « je vais l’ordonner une quatrième. » C’était le corps de d’Erlon que Napoléon avait demandé à Ney dès trois heures un quart ; un ordre rédigé par le maréchal. […] Peut-être eût-il fallu le dire plus, nettement encore, le demander expressément à Ney, et un major-général plus rompu au métier aurait appelé les gens et les corps par leur nom.

912. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, Les Feuilles d'automne, (1831) »

Il ne manque jamais de critiques circonspects qui sont gens, en vérité, à proclamer hautement un génie visible depuis dix ans ; ils tirent gravement leur montre et vous annoncent que le jour va paraître, quand il est déjà onze heures du matin. […] Exquis pour les gens du métier, original et essentiel entre les autres productions de l’auteur, qu’il doit servir à expliquer, le recueil des Feuilles d’Automne est aussi en parfaite harmonie avec ce siècle de rénovation confuse.

913. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « FLÉCHIER (Mémoires sur les Grands-Jours tenus à Clermont en 1665-1666, publiés par M. Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont.) » pp. 104-118

M. de Caumartin avait charge du Roi de tenir les sceaux pendant la durée des Grands-Jours : c’était un magistrat poli, de cour, ami de Retz qui lui rend bon témoignage, et fort lié avec les gens d’esprit de ce temps-là. […] Il y a parmi ce monde officiel des Grands-Jours les gens de palais et de Parlement, à proprement parler ; M. le président Novion, s[ILLISIBLE] à cheval sur la présidence, et dont la conduite ne paraît pas de tout point aussi conséquente qu’elle pourrait l’être ; le redoutable, l’irréprochable M.

914. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Des soirées littéraires ou les poètes entre eux »

Ce genre léger était plutôt le rendez-vous commun de tous les gens d’esprit, du monde, de lettres, ou de cour, des mousquetaires, des philosophes, des géomètres et des abbés. […] On est insensiblement poussé à la forme, à l’apparence ; de si près et entre gens si experts, nulle intention n’échappe, nul procédé technique ne passe inaperçu ; on applaudit à tout : chaque mot qui scintille, chaque accident de la composition, chaque éclair d’image est remarqué, salué, accueilli.

915. (1874) Premiers lundis. Tome II « Thomas Jefferson. Mélanges politiques et philosophiques extraits de ses Mémoires et de sa correspondance, avec une introduction par M. Conseil. — I »

Nous avons contre nous le pouvoir exécutif, la judicature, deux des trois branches de la législature, tous ceux qui ont des places dans le gouvernement et ceux qui en désirent, tous les gens timides qui préfèrent le calme du despotisme aux orages de la liberté, les marchands anglais et les Américains qui commercent avec des capitaux anglais, les agioteurs et tous les hommes intéressés dans les banques ou dans les fonds publics, invention imaginée dans des vues de corruption et pour nous assimiler en tout point, aussi bien aux parties gangrenées qu’aux portions saines du modèle anglais. […] Quand le peuple se lève et passe, ces gens-là se jettent à plat-ventre : on les croirait morts en ces moments, si en ces moments l’on songeait à eux ; mais sitôt que le peuple en personne est passé, vite ils regardent alentour et se ravisent.

916. (1823) Racine et Shakspeare « Chapitre premier. Pour faire des Tragédies qui puissent intéresser le public en 1823, faut-il suivre les errements de Racine ou ceux de Shakspeare ? » pp. 9-27

Si des gens d’un talent incontestable, tels que MM.  […] Les gens de cet âge à Paris ont pris leur parti sur toutes choses, et même sur des choses d’une bien autre importance que celle de savoir si, pour faire des tragédies intéressantes en 1825, il faut suivre le système de Racine ou celui de Shakspeare.

917. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens I) MM. Albert Wolff et Émile Blavet »

Les gens du métier ne les lisent guère. […] Entretenir le public de choses qui ne vous intéressent pas du tout et, là-dessus, faire semblant d’avoir des impressions pour les gens qui n’en ont pas, mais qui pourraient si bien se passer d’en avoir !

918. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « La Plume » pp. 129-149

La salle de débit est calme ; cela ressemble à la salle d’un café de province ; beaucoup de tables sont vides ; la caissière somnole au comptoir ; par économie, on n’a allumé qu’un bec de gaz sur deux ; des gens du quartier jouent aux cartes dans un coin ; le garçon range les journaux du matin. […] La sortie est lente ; des groupes acharnés à discuter un point d’esthétique obstruent les couloirs et les portes avec acharnement ; et les promeneurs du boulevard Saint-Michel ne considèrent pas sans inquiétude ce grouillement insolite de gens, dans la nuit.

919. (1882) Qu’est-ce qu’une nation ? « II »

Charlemagne refit à sa manière ce que Rome avait déjà fait : un empire unique composé des races les plus diverses ; les auteurs du traité de Verdun, en traçant imperturbablement leurs deux grandes lignes du nord au sud, n’eurent pas le moindre souci de la race des gens qui se trouvaient à droite ou à gauche. […] La race n’y est pas tout, comme chez les rongeurs ou les félins, et on n’a pas le droit d’aller par le monde tâter le crâne des gens, puis les prendre à la gorge en leur disant : « Tu es notre sang ; tu nous appartiens ! 

920. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVIII. Institutions de Jésus. »

Poussant jusqu’au bout la logique de l’absurde, certaines gens chassaient les démons par Béelzébub 840, prince des démons. […] Ce fut pour Céphas en particulier l’occasion de montrer un absolu dévouement et de proclamer une fois de plus : « Tu es le Christ, fils de Dieu. » Il est probable que dès lors, dans les repas communs de la secte, s’était établi quelque usage auquel se rapportait le discours si mal accueilli par les gens de Capharnahum.

921. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Deshays » pp. 208-217

Il y a des gens difficiles qui convenant de leur mérite et de la beauté de leur caractère, prétendent qu’elles sont un peu contournées, et que le peintre a serré les cuisses de l’un avec une large bande, sans trop savoir pourquoi. Malheur à ces gens-là, ils ne seront jamais satisfaits de rien.

922. (1824) Notice sur la vie et les écrits de Chamfort pp. -

Il disait : La fraternité de ces gens-là est celle de Caïn et d’Abel. […] La vivacité de son esprit, le sel de ses réparties, une certaine causticité naturelle, qui fait trop souvent suspecter la bonté du caractère, une invincible aversion pour la sottise confiante, et l’impossibilité absolue de déguiser ce sentiment, inspirèrent à beaucoup de gens une sorte de crainte qu’il prenait trop peu de soin de dissiper, et qui, pour l’ordinaire, se change facilement en haine.

923. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVIII. Souvenirs d’une Cosaque »

Franz et faire des X comme un mathématicien, quand il s’agit de nommer les gens par leur nom, car il n’y a pas que son amant qui s’appelle X… dans ses Souvenirs. […] , Buffon, Sur l’Homme, l’Histoire naturelle de Franklin, et certes tous ces gens-là ne sont pas des littérateurs cosaques.

924. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes d’Amérique » pp. 95-110

que beaucoup de gens avaient en secret cette idolâtrie ; mais, quoique nous soyons assez disposés à faire la théorie de nos vices, il ne s’était encore trouvé personne pour faire la théorie de celui-là. […] Moins scrupuleuses, les Américaines ont accepté le type à titre universel, et c’est pour cela que j’en fais ici une propriété nationale de cet excentrique pays… » Et il ajoute, pour l’apaisement d’un scrupule : « Je ne veux pas dire que les Américaines répugnent au mariage et, occupant le côté officieux de la vie civile, se livrent par profession à l’exploitation de l’homme et changent en rapports de contrebande les relations légitimes des sexes… mais j’avoue que le divorce, sous le régime duquel elles vivent, peut, aux yeux de bien des gens, ressembler aux inconstances des Américaines de Paris… » Et, de fait, il a raison ; elles ont le divorce, les Américaines d’Amérique !

925. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes et la société au temps d’Auguste » pp. 293-307

… Il y est resté vivant auprès de tant de gens qui y sont morts. […] Cette langue chaude, que Blaze de Bury parle si bien, introduit un courant de vie de plus dans cette histoire de choses mortes revivifiées, et, ce que je ne compte pas moins, doit ajouter au déconcertement des vieux classiques, des vieilles gens de goût, ces momies !

926. (1880) Goethe et Diderot « Note : entretiens de Goethe et d’Eckermann Traduits par M. J.-N. Charles »

Macaulay, dont la critique est d’un homme et d’un Anglais qui a son mépris très libre pour les gens qu’il juge, trouve excellente la bêtise de Boswell, qui ne serait pas si intéressant s’il n’était pas si bête ; et il ne sentimentalise pas là-dessus. […] Je laisse cela aux gens qui ne croient pas au Dieu qui a fait le ciel et la terre.

927. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Lacordaire. Conférences de Notre-Dame de Paris » pp. 313-328

Il est des gens qui n’entendent point ce mot de moraliste, qui exprime pourtant de si grandes choses. Est un moraliste, pour ces gens-là, le premier venu qui écrit un catéchisme de morale, comme saint Lambert ou comme Franklin.

928. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Roger de Beauvoir. Colombes et Couleuvres. »

Sous les mille arabesques du style, comme on dit maintenant et dont tant de gens sont capables avec de la bonne volonté, il y a dans le livre de M. de Beauvoir, comme au fond de la volute d’un coquillage, la perle, rayée ou malade, si l’on veut, mais la perle de la poésie, la goutte d’éther ou de lumière qui est peut-être une larme, teintée de rose par le sang de quelque souffrance, et qui est plus pour l’âme humaine que toute cette inerte poésie de camaïeu et de dessus de porte qu’on a déplacée et qu’on donne aujourd’hui pour des vers ! […] Il doit laisser là les vers de tambours de basque et de castagnettes, ce facile Carnaval de l’Espagne, les amabilités aux danseuses et le marivaudage des albums, et se maintenir dans une région plus haute et moins exploitée par les petites gens de la poésie contemporaine qui vivent depuis vingt ans des miettes tombées de la table d’Alfred de Musset.

929. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Le Sage » pp. 305-321

Mais, quand elle serait une erreur, elle est très puissante et très honorée en littérature, et elle y devient très vite un petit ciment presque romain de solidité… À l’heure qu’il est, où nous sommes respectueux pour si peu de choses et de gens, il n’est peut-être pas un lettré en France qui, en parlant de Le Sage, n’ôte respectueusement son chapeau : « Ah ! […] « Les gens d’esprit font les livres qu’ils lisent », a dit Montesquieu.

930. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Raymond Brucker » pp. 27-41

Tous les gens d’esprit et de talent que nous avons vus s’éparpiller dans toutes les directions, depuis ce temps-là, ont été couvés dans la veste brodée du Figaro : de La Touche, Becquet ; l’Érigone politique du Journal des Débats, M.  […] Brucker, qui avait toutes les passions de son temps ajoutées aux siennes, se mêla à cette furieuse guerre faite à la Monarchie, qui, sans droit des gens comme sans pitié, mâchait ses balles et empoisonnait les rivières.

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