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2039. (1836) Portraits littéraires. Tome II pp. 1-523

Comme il a l’air de n’avoir pas écouté, on se demande pourquoi il blâme ce qu’il n’a pas entendu. […] mais les deux mille vers que nous avons entendus n’embrassent guère en apparence plus de quinze jours. […] Henri a tout entendu ; il enferme Alfred et le défie. […] Angèle arrive pour signer son contrat, on entend une détonation. […] il faudrait avoir entendu le rôle entier pour estimer la difficulté de l’entreprise.

2040. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. — POST-SCRIPTUM. » pp. 269-272

Que si maintenant, nous relisant nous-même comme nous venons forcément de le faire, nous avions à confesser notre propre impression et à faire entendre un aveu, nous dirions que, dans la suite de ces articles critiques et dans leur mode de justice distributive (s’il nous est permis d’employer un tel mot), il est certains manques de proportions et de gradations que nous regrettons de n’avoir pu mieux rajuster.

2041. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Note qu’il faut lire avant le chapitre de l’amour. »

Le mot d’amour réveille dans l’esprit de ceux qui l’entendent, autant d’idées diverses que les impressions dont ils sont susceptibles.

2042. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gregh, Fernand (1873-1960) »

… C’est convenu, et j’entends d’ici clabauder les petits camarades.

2043. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Guérin, Charles (1873-1907) »

Pierre Quillard Dès longtemps nous n’avons entendu célébrer avec une pareille intensité de passion la douceur et l’amertume de la chair sensuelle, le dégoût des heures vaines dépensées en futiles plaisirs et l’âpre volupté des déchéances consenties, simultanément ; dès longtemps aussi, on n’avait associé avec une telle plénitude l’universelle nature, dédaigneuse de nous, aux sursauts passagers de la fragile et magnifique humanité.

2044. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — VII. La fausse fiancée »

Il arriva qu’un jour une vieille qui cherchait des champignons en bordure du lougan entendit Dêdé chanter.

2045. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Préface »

Mais qu’on m’entende bien, une poétique n’est un traité de la poésie qu’en littérature.

2046. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre III. Combinaison des deux éléments. »

Ils ont prononcé la parole unique, héroïque ou tendre, enthousiaste ou assoupissante, la seule qu’autour d’eux et après eux le cœur et l’esprit voulussent entendre, la seule qui fût adaptée à des besoins profonds, à des aspirations accumulées, à des facultés héréditaires, à toute une structure mentale et morale, là-bas à celle de l’Indou ou du Mongol, ici à celle du Sémite ou de l’Européen, dans notre Europe à celle du Germain, du Latin ou du Slave ; en sorte que ses contradictions, au lieu de la condamner, la justifient, puisque sa diversité produit son adaptation, et que son adaptation produit ses bienfaits  Cette parole n’est pas une formule nue. […] — Morale de l’instinct animal et de l’intérêt bien entendu. […] Il lui est aussi impossible d’aimer le bien pour le bien que d’aimer le mal pour le mal404. » — « Les principes de la loi naturelle405, disent les disciples, se réduisent à un principe fondamental et unique, la conservation de soi-même. » « Se conserver, obtenir le bonheur », voilà l’instinct, le droit et le devoir. « Ô vous406, dit la nature, qui, par l’impulsion que je vous donne, tendez vers le bonheur à chaque instant de votre durée, ne résistez pas à ma loi souveraine, travaillez à votre félicité, jouissez sans crainte, soyez heureux. » Mais, pour être heureux, contribuez au bonheur des autres ; si vous voulez qu’ils vous soient utiles, soyez-leur utile ; votre intérêt bien entendu vous commande de les servir. « Depuis la naissance jusqu’à la mort, tout homme a besoin des hommes. » — « Vivez donc pour eux, afin qu’ils vivent pour vous. » — « Soyez bons, parce que la bonté enchaîne tous les cœurs ; soyez doux, parce que la douceur attire l’affection ; soyez modestes, parce que l’orgueil révolte des êtres remplis d’eux-mêmes… Soyez citoyens, parce que la patrie est nécessaire à votre sûreté et à votre bien-être. […] « Si un misanthrope s’était proposé de faire le malheur du genre humain, qu’aurait-il pu inventer de mieux que la croyance en un être incompréhensible, sur lequel les hommes n’auraient jamais pu s’entendre, et auquel ils auraient attaché plus d’importance qu’à leur propre vie ? 

2047. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXVIe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (2e partie) » pp. 417-487

Et je me réponds : Le premier et l’infaillible législateur, c’est celui qui a fait l’homme ; c’est celui qui, en faisant l’homme, a mis en germe dans l’âme de sa créature ces lois, non écrites, mais vivantes, consonances divines de la nature intellectuelle de l’homme avec la nature de Dieu, consonances qui font que, quand le Verbe extérieur, la loi parlée se fait entendre, à mesure que l’homme a besoin de loi pour fonder et perfectionner sa société civile, la conscience de tout homme, comme un instrument monté au diapason divin, se dit involontairement : C’est Juste ; c’est Dieu qui parle en nous par la consonance de notre esprit avec sa loi ! […] C’est là que vous voyez et que vous entendez la souveraineté de la nature, s’exprimant par ces lois instinctives qui révèlent le Créateur de l’homme sociable dans les prescriptions nécessaires à toute société politique. […] Voilà la révolution française, voilà la sublime démocratie divine entendue comme elle peut être seulement entendue par les esprits politiques à qui la démagogie, l’esprit de radicalisme, la manie des sophisme ou la rage suicide du nivellement impossible, qui ne serait que l’extrême injustice, n’ont pas faussé le bon sens.

2048. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (3e partie) » pp. 81-152

J’ai trouvé du courage dans toutes les circonstances de ma vie : pour celle-ci, je n’en trouve pas du tout ; je suis tous les jours plus accablée, et je ne sais pas comment je ferai pour continuer à vivre aussi malheureuse. » Pour que rien ne manquât à l’exactitude et aussi à la moralité de cette histoire, il fallait entendre les cris de douleur que pousse la comtesse d’Albany. […] Avant la fin de l’été, je compte aller à Florence vous rendre mes devoirs et entendre de votre bouche, madame, votre jugement sur mes Républiques. […] Sans doute, madame, moi aussi j’aurais ardemment désiré que Mme de Staël eût assez de fermeté dans le caractère pour renoncer complètement à Paris et ne faire plus aucune démarche pour s’en approcher ; mais elle était attirée vers cette ville, qui est sa patrie, par des liens bien plus forts que ceux de la société ; ses amis, quelques personnes chères à son cœur, et qui seules peuvent l’entendre tout entier, y sont irrévocablement fixées. […] Sans doute l’intérêt bien entendu des coalisés serait encore aujourd’hui même d’accord avec celui de la France et de l’humanité ; mais est-ce une raison pour oser se flatter qu’il sera écouté ?

2049. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure  »

« Il y a plaisir » disait-il, « à entendre cet homme-là, c’est la raison incarnée. […] À mon retour de la Suisse française où j’avais gardé des amis, vers 1840, je concevais un parfait journal littéraire dont il y aurait eu un rédacteur double, l’un à Paris pour tout savoir, l’autre à Lausanne ou à Neuchâtel pour tout dire, — j’entends tout ce qui se peut dire honnêtement et avec convenance. […] Dans le passage cité de Phèdre et que Bayle applique à Boileau, il y a : Naris emunctæ senex, Ésope, ce vieillard au nez fin ; Bayle, en citant, a eu le soin d’oublier ce vieillard ; personne, en effet, n’est charmé de s’entendre appeler vieillard, même en latin, et même dans un compliment.

2050. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Appendice. Discours sur les prix de vertu »

De toutes les manières d’entendre et de définir ce mot de vertu (et il en est plus d’une, assurément, depuis Aristote jusqu’à Franklin), le xviiie  siècle avait préférablement choisi et adopté celle qui se résume dans l’idée de bienfaisance. […] Il y a, Messieurs, reconnaissons-le, une grande bonne volonté de nos jours : chacun s’entend, se rapproche, se cotise pour faire le bien, pour soulager les maux et en diminuer la somme. […] La littérature, Messieurs (et par ce mot j’entends toute la culture des choses de l’esprit, se manifestant par l’impression ou par la représentation dramatique), a pris de nos jours un caractère qu’il ne faudrait ni dénigrer ni préconiser outre mesure.

2051. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville (suite et fin.) »

A M. de Montalembert, après la lecture de son livre, des Intérêts catholiques au XIXe siècle (1852), Tocqueville écrivait également : « Je n’ai jamais été plus convaincu qu’aujourd’hui qu’il n’y a que la liberté (j’entends la modérée et la régulière) et la religion, qui, par un effort combiné, puissent soulever les hommes au-dessus du bourbier où l’égalité démocratique les plonge naturellement dès que l’un de ces deux appuis leur manque. » Il n’épousait la démocratie que sous toutes réserves. […] Je m’en suis bien aperçu, il y a quelque trente ans déjà, un jour que, sans y trop songer et peut-être un peu légèrement, j’avais hasardé devant lui je ne sais quoi sur les principes de 89 qui, malgré tout, sont bien les miens : je vis qu’il n’entendait pas raillerie, ni peut-être même discussion sur cet article, et je me le tins pour dit désormais. […] Je l’ai vu un jour, à un dîner chez Mme Récamier, ne pas entendre raillerie sur je ne sais quoi de 89 : je me tins pour averti.

2052. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres de Virgile »

Benoist entend par ex alto non point ex alto cœlo, mais ex alto mari, et il ajoute à l’appui de ce sens : « Les nuages qui amènent la pluie semblent toujours venir de la mer Tyrrhénienne. Si je consulte des souvenirs personnels, je n’hésiterai pas à entendre ex alto de la mer. […] J’aimerais donc que, dans une édition de Virgile comme celle-ci, indépendamment de la partie philologique et critique proprement dite, il y eût et un peu de rhétorique (j’entends de la bonne, la seule dont M. 

2053. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [IV] »

Jomini était « un militaire de peu de valeur. » Qu’est-ce à dire, et Napoléon lui a-t-il jamais fourni l’occasion de se montrer militaire dans le sens où il l’entend, et de conduire une brigade à l’ennemi ? […] En un mot, je me rappelai la célèbre réponse de Scanderbeg au sultan, qui lui avait demandé son sabre (« Dites à votre maître qu’en lui envoyant le glaive je ne lui ai pas envoyé le bras ») ; fiction ingénieuse et applicable à tous les militaires qui se trouveront dans le cas de donner leurs idées sur des opérations qu’ils ne dirigeront pas. » Après la bataille perdue et quand on se décida à la retraite, lorsque, dans la soirée du 27, Jomini vit l’ordre apporté par Toll, — « le brouillon encore tout trempé de pluie56 », — qui réglait cette retraite jusque derrière l’Éger en quatre ou cinq colonnes, « chacune d’elles ayant son itinéraire tracé pour plusieurs jours, comme une feuille de route, par étapes, qu’on exécuterait en pleine paix, sans s’inquiéter de ce qui arriverait aux autres colonnes » ; à la vue de cette disposition burlesque », il n’y put tenir : toute sa bile de censeur éclairé et de critique militaire en fut émue, comme l’eût été celle de Boileau à la vue de quelque énormité de Chapelain ; et il s’écria sans crainte d’être entendu : « Quand on fait la guerre comme ça, il vaut mieux s’aller coucher. » L’ambassadeur anglais, lord Cathcart, présent, crut devoir le prendre à part pour lui conseiller de ménager davantage l’amour-propre de ses nouveaux camarades. […] Il y eut un moment où Ney, battu du canon en flanc dans sa marche, n’y tint pas et fit tête de colonne à droite malgré tout ce que put lui dire Jomini, à qui il ferma la bouche avec ce propos de soldat : « Je n’entends rien à toute votre sac… stratégie ; je ne connais qu’une chose, je ne tourne pas le dos au canon. » 51.

2054. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « M. MIGNET. » pp. 225-256

Le pas en effet est glissant, de la confusion se peut faire sans trop d’effort, si l’on n’y prend garde : M ignet du moins ne l’a jamais entendu ainsi, et quel qu’ait été, selon lui, le rôle assigné aux individus par le destin ou la Providence dans l’ordre successif des choses, il a toujours mis à part l’intention morale. […] Ces deux jeunes esprits entraient dans la lutte bien persuadés que la dynastie (par suite de toutes sortes de raisons et de circonstances générales ou individuelles dont ils n’étaient pas embarrassés de rendre compte) ne se résignerait jamais à subir le gouvernement représentatif ainsi entendu, et dès lors ils tenaient pour certaine l’analogie essentielle qui se reproduirait jusqu’à la fin entre la révolution française et la révolution d’Angleterre, et qui amènerait pour nous au dernier acte un changement de dynastie. […] Ici et dans tout ce qui suivra, il est bien entendu que je ne parle que de l’ancienne diplomatie : quant à la nouvelle, là où il existe encore telle chose qu’on doive appeler de ce nom, je suis disposé à faire en sa faveur toutes les exceptions qu’on pourra désirer.

2055. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Introduction »

Indépendamment de tous les crimes particuliers qui ont été commis, l’ordre social a été menacé de sa destruction pendant cette révolution par le système politique même qu’on avait adopté : les mœurs barbares sont plus près des institutions simples mal entendues, que des institutions compliquées ; mais il n’en est pas moins vrai que l’ordre social, comme toutes les sciences, se perfectionne à mesure qu’on diminue les moyens, sans affaiblir le résultat. […] Tout ce qu’il faut de mouvement à la vie sociale, tout l’élan nécessaire à la vertu existerait sans ce mobile destructeur : mais, dira-t-on, c’est à diriger les passions et non à les vaincre, qu’il faut consacrer ses efforts ; je n’entends pas comment on dirige ce qui n’existe qu’en dominant : il n’y a que deux états pour l’homme, ou il est certain d’être le maître au-dedans de lui, et alors il n’a point de passions ; ou il sent qu’il règne en lui-même une puissance plus forte que lui, et alors il dépend entièrement d’elle. […] J’entends par constitution démagogique, celle qui met le peuple en fermentation, confond tous les pouvoirs, enfin la constitution de 1793.

2056. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre II. Les romans bretons »

Ce n’était pas tout encore : selon le hasard qui présidait à la vie des écrivains, selon le livre qui leur tombait entre les mains, le voyageur ou le croisé qu’ils avaient entendu, selon enfin qu’eux-mêmes avaient été promener leur curiosité en telle province ou en tel pays, une incroyable diversité de récits réclamait tour à tour l’attention du public : romans grecs et byzantins, contes orientaux, traditions anglo-saxonnes, légendes locales de Normandie ou du Poitou, fables incroyables, anecdotes vraies ou vraisemblables, sujets pathétiques, comiques, féeriques, historiques, et même réalistes. […] Un chevalier toutes les nuits vient regarder la dame accoudée à sa fenêtre : elle a un vieux mari qui s’inquiète, et lui demande ce qu’elle fait ainsi ; elle répond qu’elle vient entendre le chant du rossignol, et le brutal fait tuer le doux chanteur : la dame envoie le petit corps de l’oiseau à son ami, qui le garde dans une boite d’or : et c’est tout. […] Chrétien de Troyes a esquissé parfois la charmante comédie de l’amour aux prises avec la vanité, et s’il n’entend rien à la passion, il sait envelopper délicatement le sentiment sincère de naturelle coquetterie.

2057. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre II. Littérature dramatique — Chapitre II. Le théâtre du quinzième siècle (1450-1550) »

Sur la scène vaste, large de 30 à 50 mètres, tous les lieux à travers lesquels se transportera successivement l’action sont figurés simultanément : figurés en abrégé ou en raccourci, bien entendu, et comme par échantillons ou symboles. […] Qu’on lui parle de lui, et contre ceux par qui il croit souffrir : il entend volontiers mépriser les nobles et les prêtres, et tous ses maîtres. […] Dans la Cornette, un vieux mari cajolé, berné, prévenu par sa femme, n’entend pas le mal que ses neveux viennent lui en dire, et, grâce à un stratagème de la rusée coquine, prend pour railleries sur sa cornette toutes les vérités qu’ils lui content de sa moitié ; dans le Cuvier, un faible mari, opprimé par sa femme et sa belle-mère, a accepté de faire le ménage, la lessive, balayer, cuire le pain, soigner le marmot, etc. ; mais une bonne occasion s’offre de s’insurger sans péril, et de redevenir maître chez lui du consentement de sa femme.

2058. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre III. Montaigne »

Le troisième livre, tout nouveau, montrait le progrès de l’âge de l’auteur : il est plus grave (n’entendez pas plus réservé), plus posé, que les deux premiers, les contes y tiennent moins de place, les idées s’y élancent moins en pointes, s’étalent davantage, semblent plus fermes, plus arrêtées. […] Il était causeur et gausseur entre amis, l’humeur gaie, de langage assez effronté, point avare, assez détaché de tout par complexion et par étude, songe-creux, vagabond et voyageur jusqu’en sa vieillesse, point cérémonieux, très franc, sans mémoire, peu entendu aux choses du ménage, très ignorant des choses rustiques et jusque des mots de la culture, sachant se laisser voler autant qu’il faut par ses gens, se mettant parfois en colère, jamais longtemps, fuyant par-dessus tout les tracas et les engagements. […] Il a beau identifier volupté et vertu : il entend bien par vertu quelque chose de positif et de distinct, qui peut être volupté en lui, mais non pas forcément en tout autre.

2059. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. Le théâtre romantique »

Le duc de Guise meurtrit le bras de sa femme pour lui faire écrire la lettre qui attirera Saint-Mégrin dans le guet-apens ; la duchesse de Guise se fait briser le bras pour tenir sa porte fermée, pendant que Saint-Mégrin fuit par la fenêtre et qu’on entend le tumulte des assassins qui le reçoivent. […] Musset a le sens du dialogue : il voit les interlocuteurs comme personnes distinctes, et il entend manifestement le timbre de chaque voix, l’accent, la réplique, qui manifestent chaque âme en son état et qualité. […] Il a le génie des préparations, si l’on entend par là, non les préparations morales qui font apparaître la vérité des effets dramatiques, mais les indications de faits qui doivent servir à faire basculer soudainement l’intrigue.

2060. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Ferdinand Fabre  »

Et c’est ainsi que plus tard, devenu archevêque et tout proche du cardinalat, un jour que, dans un accès de délire ambitieux, il hausse son rêve jusqu’à la tiare, nous l’entendons gémir « avec une lueur de bon sens et une profonde humilité » : — « Moi, né dans une hutte au hameau de Harros, je pourrais gravir les marches du trône pontifical ! […] Mon oreille a de singulières finesses pour entendre vibrer Dieu au fond de la voix humaine. […] De là des outrances et des naïvetés : continuellement il nous avertit que ce que nous voyons ou entendons est terrible, et, comme il le croit, il nous le fait croire. « Tout à coup il eut un soubresaut, et de sa bouche s’échappèrent ces paroles épouvantables. » Ou bien : « On ne saurait croire l’expression de force, de fermeté, que la figurine de ce vieillard de soixante-quinze ans, molle, souriante auparavant, venait de prendre tout à coup. » Et voyez quelle conviction dans cette réflexion candide : « En vérité, l’homme est-il ainsi fait que la passion le puisse ravaler à ce point ?

2061. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’expression de l’amour chez les poètes symbolistes » pp. 57-90

Schopenhauer entendait démontrer que la séduction de la femme est en nous. […] Il faudrait pourtant s’entendre. […] Aussi bien il faut étendre ici la signification de symboliste à celle de poète nouveau, sans quoi, étant donné le caractère protéiforme du mouvement, il ne serait plus possible de s’entendre.

2062. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. John Stuart Mill — Chapitre II : La Psychologie. »

Mill déclare « qu’il ne s’occupe pas de la cause première ou métaphysique de quoi que ce soit. » Ce n’est pas aux causes efficientes que j’aurai affaire, mais aux causes physiques, à des causes entendues uniquement au sens où l’on dit qu’un phénomène est la cause d’un autre ; ce que sont les causes premières ou même s’il y en a, c’est une question sur laquelle je n’ai pas à me prononcer. […] La psychologie est concrète, tandis que la logique même entendue à la façon moderne, c’est-à-dire dépouillée du formalisme scolastique, reste abstraite ; le mécanisme du raisonnement lui important beaucoup plus que la matière à laquelle il s’applique. […] Mais les meilleures autorités philosophiques ne supposent plus maintenant que n’importe quelle cause exerce sur son effet cette coaction mystérieuse110. » Le tort des nécessitariens, c’est d’entendre par la nécessité qu’ils reconnaissent dans nos actions plus qu’une simple uniformité de succession qui permet de les prévoir : ils ont au fond l’idée qu’entre les voûtions et leurs causes il y a un lien beaucoup plus serré.

2063. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Études sur Saint-Just, par M. Édouard Fleury. (2 vol. — Didier, 1851.) » pp. 334-358

Il entend par ce dernier mot quelque chose d’à part et de solennel, et qui n’impliquait pas des cruautés lâches, comme celles qu’il signale. […] Il s’étend longuement et déclame contre l’échafaud, les bourreaux, les supplices ; il y a des moments où, à l’entendre épancher ses vœux d’optimisme et d’indulgence, on croirait avoir affaire à un de Gérando. […] Entre Ham et Noyon, sur la grande route, se traînant comme il pouvait, appuyé sur son sabre, il entend venir une voiture : « Si c’est une charrette, se disait-il, je monterai dessus. » C’était un cabriolet : un jeune homme élégant était dedans, qui lui dit : « Mais, mon camarade, où allez-vous ?

2064. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre III. L’histoire réelle — Chacun remis à sa place »

On entendait des bruits d’écroulements dans leur gloire. […] Paul de Russie émet cet axiome : « Il n’y a d’homme puissant que celui à qui l’empereur « parle, et sa puissance dure autant que la parole qu’il entend. » Philippe V, d’Espagne, si férocement calme aux auto-da-fé, s’épouvante à l’idée de changer de chemise, et reste six mois au lit sans se laver et sans se couper les ongles, de peur d’être empoisonné par les ciseaux, ou par l’eau de la cuvette, ou par sa chemise, ou par ses souliers. […] Un ensemble ténébreux dont les cris ne sont point entendus produit le tigre.

2065. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre II. Des poëtes étrangers. » pp. 94-141

Les Italiens l’appellent divin, mais c’est une divinité cachée ; peu de gens entendent ses oracles ; il a des commentateurs ; c’est peut-être encore une raison de plus pour n’être pas compris. […] Pope la réponse que Socrate fit à Euripide, qui lui demandoit son sentiment sur les écrits d’Héraclite : Ce que j’entends est plein de force, je crois qu’il en est de même de ce que je n’entends pas.

2066. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre II. Le fond et la forme dans la littérature indigène. »

Procédé de Malick Sy 48, le rusé marabout obtenant, par sa diligence entendue, un terrain considérablement plus vaste que celui que comptait lui concéder le chef du pays. […] Diêgui) qui, pour annoncer d’une façon moins brutale à son frère que ses troupeaux ont été enlevés, lui fait apporter pour son repas un couscouss uniquement composé d’herbes, sans le moindre morceau de viande, lui donnant ainsi à entendre qu’à moins de reconquérir ses bestiaux dérobés, il n’aura plus désormais que les produits du sol pour le nourrir. […] Depuis mon arrivée au Haut-Senégal-Niger, j’ai eu au contraire maintes fois l’occasion d’en entendre chanter et une traduction des contes inédits des Mille et une Nuits, lue depuis cette époque, m’a convaincu que dans toutes les littératures merveilleuses le petit couplet est une partie essentielle du conte.

2067. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre VI. De la politique poétique » pp. 186-220

Ils ont entendu par le premier mot, des peuples où les plébéiens seraient déjà citoyens, par le second, des monarques, par le troisième, une liberté populaire. […] Si l’on veut qu’Homère instruise autant qu’il intéresse, ce qui est le devoir du poète, on ne doit entendre par ce héros irréprochable, que le plus orgueilleux, le plus irritable de tous les hommes ; la vertu célébrée en lui, c’est la susceptibilité, la délicatesse du point d’honneur, dans laquelle les duellistes faisaient consister toute leur morale, lorsque la barbarie antique reparut au moyen âge, et que les romanciers exaltent dans leurs chevaliers errants. […] De telles guerres entraînent dans toute leur dureté les servitudes héroïques ; les vaincus sont regardés comme des hommes sans dieux, et perdent non-seulement la liberté civile, mais la liberté naturelle. — D’après toutes ces considérations, les républiques doivent être alors des aristocraties naturelles, c’est-à-dire composées d’hommes qui soient naturellement les plus courageux ; le gouvernement doit être de nature à réserver tous les honneurs civils à un petit nombre de nobles, de pères de famille, qui fassent consister le bien public dans la conservation de ce pouvoir absolu qu’ils avaient originairement sur leurs familles, et qu’ils ont maintenant dans l’état, de sorte qu’ils entendent le mot patrie dans le sens étymologique qu’on peut lui donner, l’intérêt des pères (patria, sous-entendu res).

2068. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Étude sur la vie et les écrits de l’abbé de Saint-Pierre, par M. Édouard Goumy. L’abbé de Saint-Pierre, sa vie et ses œuvres, par M. de Molinari. — I » pp. 246-260

Il y en avait qui étaient réformateurs en avant et par les moyens propres aux sociétés modernes, discussion, liberté d’examen, suffrage éclairé, lumières graduées et intérêt bien entendu, progrès dans l’égalité, le bien-être et la morale civile. […] C’est lui qui, un jour qu’un homme en place, excédé de son procédé, lui en faisait sentir l’inconvenance, répondait sans s’émouvoir ; « Je sais bien, monsieur, que je suis, moi, un homme fort ridicule ; mais ce que je vous dis ne laisse pas d’être fort sensé, et, si vous étiez jamais obligé d’y répondre sérieusement, soyez sûr que vous joueriez un personnage plus ridicule encore que le mien. » C’est lui qui, s’apercevant un jour qu’il était de trop dans un cercle peu sérieux, ne se gêna pas pour dire : « Je sens que je vous ennuie, et j’en suis bien fâché ; mais moi, je m’amuse fort à vous entendre, et je vous prie de trouver bon que je reste. » Tout cela est bien de l’homme dépeint par La Bruyère dans son portrait chargé, mais reconnaissable, de celui même que le cardinal de Fleury, à son point de vue de Versailles, appellera un politique triste et désastreux ; malencontreux, du moins, et intempestif, qui avait reçu le don du contretemps comme d’autres celui de l’à-propos, et qui, lorsqu’il se doutait du léger inconvénient, prenait tout naturellement son parti de déplaire, pourvu qu’il allât à ses fins.

2069. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’impératrice Catherine II. Écrits par elle-même, (suite.) »

Un jour que Catherine était dans sa chambre à coucher, attenante à celle où se faisait ce vacarme, et qu’elle lisait peut-être du Bayle ou du Platon, elle entendit de tels cris qu’elle ouvrit la porte : « Je vis qu’il tenait un de ses chiens en l’air par le collier, et qu’un garçon, Kalmouck de naissance, qu’il avait, tenait le même chien par la queue (c’était un pauvre petit Charlot de la race anglaise), et avec le gros manche d’un fouet, le grand-duc battait ce chien de toute sa force. […] Je me retirai et me retranchai dans mon ignorance, comme femme, des lois militaires : cependant il ne laissa pas de me bouder sur mon éclat de rire, et au moins pouvait-on dire, pour la justification du rat, qu’il avait été pendu sans qu’on lui eût demandé ou entendu sa justification. » En sa qualité de souverain du Holstein, le grand-duc aimait tout ce qui lui en venait, les gens et les huîtres.

2070. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « La Réforme sociale en France déduite de l’observation comparée des peuples européens, par M. Le Play, Conseiller d’État. »

Les faits seuls y sont, mais ils parlent ; en mettant à les bien entendre et à les méditer quelque chose de la même attention et de la même patience qui les a amassés et classés si distinctement, on sent naître en soi des réflexions sans nombre. […] La bohème, même la plus sérieuse et la plus honnête, — et par bohème j’entends tout ce qui est précaire, — est à cent lieues de la bureaucratie, même la plus prévenante et la plus polie.

2071. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « HOMÈRE. (L’Iliade, traduite par M. Eugène Bareste, et illustrée par M.e Lemud.) —  second article  » pp. 342-358

Ce que j’ai le plus à cœur de signaler comme fruit à recueillir dans le commerce familier avec le plus héroïque des génies, c’est l’impression morale, à entendre ce mot largement. […] Ai-je besoin d’ajouter que je n’entends ici parler d’aucune influence littérale et servile ?

2072. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « L’abbé Prevost et les bénédictins. »

Un séculier, homme d’honneur et de distinction, m’a assuré, par un billet écrit exprès, qu’il avoit entendu dire à peu près la même chose à Votre Révérence. […] Je n’appris son arrivée qu’après son départ, et je fus très-affligé d’entendre dire à plusieurs personnes qu’il étoit parti avec l’opinion que j’avois évité à dessein de lui parler et de le voir.

2073. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre III. De la vanité. »

il a vieilli dans les affaires sans y prendre une idée, sans atteindre à un résultat, cependant il se croit l’esprit des places qu’il a occupées ; il vous confie ce qu’ont imprimé les gazettes ; il parle avec circonspection même des ministres du siècle dernier ; il achève ses phrases par une mine concentrée, qui ne signifie pas plus que les paroles ; il a des lettres de ministres, d’hommes puissants, dans sa poche, qui lui parlent du temps qu’il fait, et lui semblent une preuve de confiance ; il frémit à l’aspect de ce qu’il appelle une mauvaise tête, et donne assez volontiers ce nom à tout homme supérieur ; il a une diatribe contre l’esprit à laquelle la majorité d’un salon applaudit presque toujours, c’est, vous dit-il, un obstacle à bien voir que l’esprit, les gens d’esprit n’entendent point les affaires. […] L’homme vain s’enorgueillit de tout lui-même indistinctement, c’est moi, c’est encore moi, s’écrie-t-il ; cet égoïsme d’enthousiasme fait un charme à ses yeux de chacun de ses défauts. — Cléon est encore à cet égard un bien plus brillant spectacle ; toutes les prétentions à la fois sont entrées dans son âme ; il est laid, il se croit aimé, son livre tombe, c’est par une cabale qui l’honore, on l’oublie, il pense qu’on le persécute ; il n’attend pas que vous l’ayez loué, il vous dit ce que vous devez penser ; il vous parle de lui sans que vous l’interrogiez, il ne vous écoute pas si vous lui répondez, il aime mieux s’entendre, car vous ne pouvez jamais égaler ce qu’il va dire de lui-même.

2074. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre V. De la lecture. — Son importance pour le développement général des facultés intellectuelles. — Comment il faut lire »

Mieux encore que La Bruyère, La Fontaine enseignera à saisir ces rapports secrets et sûrs qui unissent le moral et le physique, à deviner un caractère dans un geste, à entendre une âme dans l’accent d’une phrase. […] Que Malebranche et Pascal vous éclairent sur Montaigne ; que Bossuet vous fasse comprendre Corneille et Racine, et la nature du poème dramatique ; anathème à part, il y a peu de critiques qui aient mieux entendu le théâtre que Bossuet.

2075. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre III. Poésie érudite et artistique (depuis 1550) — Chapitre I. Les théories de la Pléiade »

Et ne croit-on pas entendre encore Malherbe, et même Boileau, quand Ronsard défend de sacrifier « la belle invention » et la justesse de l’expression, c’est-à-dire la raison, à la rime ? […] On a tort de lui jeter toujours à la tête le quatrain qui précède la Franciade : car il a posé nettement pour règle que les inventions du poète devront être « bien ordonnées et disposées, et bien qu’elles semblent passer celles du vulgaire, elles seront toutefois telles qu’elles pourront être facilement conçues et entendues d’un chacun ».

2076. (1842) Essai sur Adolphe

Adolphe est comme une savante symphonie qu’il faut entendre plusieurs fois, et religieusement, avant de saisir et d’embrasser l’inspiration de l’artiste. […] Il y a dans la possession de cette femme un aliment magnifique pour sa vanité ; il sera envié par ceux-là mêmes qui médisent d’elle, et qui se vengent de ses dédains en redoublant son isolement ; il sera montré au doigt par la ville comme un lutteur adroit, comme un rusé jouteur : chaque fois qu’il entrera dans un salon, il entendra autour de lui le chuchotement glorieux de ses rivaux.

2077. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre I. L’intuition et la logique en Mathématiques. »

Le défaut de ce raisonnement nous apparaît immédiatement, parce que nous employons le terme abstrait de fonction et que nous sommes familiarisés avec toutes les singularités que peuvent présenter les fonctions quand on entend ce mot dans le sens le plus général. […] Vous savez ce que Poncelet entendait par le principe de continuité.

2078. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVII. Forme définitive des idées de Jésus sur le Royaume de Dieu. »

Mais ce royaume de Dieu, ainsi que nous l’avons déjà dit, Jésus paraît l’avoir entendu dans des sens très divers. […] » qui ouvre et ferme l’Apocalypse, cet appel sans cesse répété : « Que celui qui a des oreilles entende 786 ! 

2079. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXI. Dernier voyage de Jésus à Jérusalem. »

Les brebis entendent sa voix ; il les appelle par leur nom et les mène aux pâturages ; il marche devant elles, et les brebis le suivent, parce qu’elles connaissent sa voix. […] Les pharisiens lui jetaient des pierres 994 ; en quoi ils ne faisaient qu’exécuter un article de la Loi, ordonnant de lapider sans l’entendre tout prophète, même thaumaturge, qui détournerait le peuple du vieux culte 995.

2080. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIII. Dernière semaine de Jésus. »

Ô Père, sauve-moi de cette heure 1061. » On croyait qu’une voix du ciel à ce moment se fit entendre ; d’autres disaient qu’un ange vint le consoler 1062. […] Jean, qui pouvait converser avec Jésus sans être entendu, lui demanda le mot de cette énigme.

2081. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires touchant la vie et les écrits de Mme de Sévigné, par M. le baron Walckenaer. (4 vol.) » pp. 49-62

En parlant d’elle, on a à parler de la grâce elle-même, non pas d’une grâce douce et molle, entendons-nous bien, mais d’une grâce vive, abondante, pleine de sens et de sel, et qui n’a pas du tout les pâles couleurs. […] Il était venu un matin à l’Arsenal pour voir des canons ; elle sortait pour aller à la messe aux Célestins : Il me reconnut, dit-elle, à ma livrée, mit pied à terre et me mena à la messe, et l’entendit avec moi.

2082. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface du « Roi s’amuse » (1832) »

Il aurait bien voulu que le public en vînt à étouffer cette pièce sans l’entendre pour un tort imaginaire, comme Othello étouffe Desdémona. […] Nous entendons la faire ainsi.

2083. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Bossuet, et Fénélon. » pp. 265-289

Quand son esprit prophétique s’emparoit d’elle, on croyoit entendre les Ezéchiel & les Isaïe. […] Il est aisé d’imaginer combien madame Guyon fut empressée d’entendre le saint à la mode, un homme dont la façon de penser & de sentir étoit analogue à la sienne.

2084. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — I. La Poësie en elle-même. » pp. 234-256

On ne condamne, disoient-ils, la poësie, que faute de s’entendre : on a l’injustice de confondre l’abus d’un talent avec le talent même. […] On ne peut s’offenser d’entendre dire d’un conquérant que la victoire accompagne partout ses pas ; que l’épouvante marche devant lui ; qu’il traîne après lui la désolation & l’horreur. » Le poëte Santeuil prit la défense des fables, dans le temps qu’on les attaquoit le plus vivement.

2085. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre II. Le cerveau chez les animaux »

Que l’on enlève à un animal, une poule ou un pigeon par exemple, les deux hémisphères cérébraux, l’animal ne meurt pas pour cela : toutes les fonctions de la vie organique continuent à s’exercer ; mais il perd tous ses sens et tous ses instincts, il ne voit plus, il n’entend plus ; il ne sait plus ni se défendre, ni s’abriter, ni fuir, ni manger, et s’il continue de vivre, c’est à la condition que l’on introduise mécaniquement de la nourriture dans son bec. […] « Le cerveau et le crâne sont étroits et pointus quand l’animal fouilleur doit se servir de son front et de son museau pour creuser la terre ; larges, au contraire, quand il lui faut pour se nourrir, pour voir et pour entendre, une large bouche, de vastes yeux, de vastes oreilles, entraînant le reste du crâne dans le sens bilatéral, développés en arrière, hérissés de crêtes osseuses, lorsque les exigences de l’équilibre ou celles du mouvement nécessitent elles-mêmes une telle forme. » Ajoutons, d’ailleurs, qu’il est difficile de comprendre à priori, comme le fait remarquer avec justesse M. 

2086. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Eugène Fromentin ; Maxime du Camp »

Nous ne parlons pas, bien entendu, des voyages scientifiques, de ces glorieuses courses à travers le globe, dont le résultat est de rapporter aux Instituts immobiles et sédentaires la trace des civilisations perdues ou les fossiles d’un monde écroulé. […] Nous n’entendons pas clouer l’homme à son seuil, — quoiqu’il fût certainement plus original et plus fort s’il y restait et que l’éducation du talent se fasse d’elle-même avec puissance dans tous les milieux.

2087. (1915) La philosophie française « I »

Mais la psychologie elle-même, entendue comme une idéologie, c’est-à-dire comme une reconstruction de l’esprit avec des éléments simples, — la psychologie telle que l’a comprise l’école « associationiste » du siècle dernier, — est sortie, en partie, des travaux français du XVIIIe siècle, notamment de ceux de Condillac. […] La philosophie, ainsi entendue, est susceptible de la même précision que la science positive.

2088. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VIII. »

Mais considère et touche du doigt le côté certain de chaque chose ; et, pour avoir vu de tes yeux, ne te confie pas plus que pour avoir toi-même entendu : ne crois pas un vain bruit plus que le raisonnement, ni quoi que ce soit, là où il y a place pour la réflexion. […] Il est un tout cependant qu’on souhaite de découvrir, bien qu’il soit formé de ce que l’homme ne voit pas, n’entend pas, ne peut saisir par la pensée.

2089. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « APPENDICE. — M. SCRIBE, page 118. » pp. 494-496

A la première représentation, j’ai entendu comparer la pièce à un bonbon exquis (cette scène du quatrième acte) qui serait enveloppé dans quatre boîtes de carton, et tout au fond de la quatrième.

2090. (1874) Premiers lundis. Tome II « Le poète Fontaney »

Il n’eut jamais d’autres fonctions ; mais depuis, chargé de correspondance pour certains journaux, il revit l’Espagne, il visita l’Angleterre ; il savait à merveille ces deux pays, parlait leur langue dans toutes les propriétés de l’idiome, chérissait leurs portes, leurs peintres : il était intéressant à entendre là-dessus.

2091. (1875) Premiers lundis. Tome III « Viollet-Le-Duc »

L’auteur, par  quelques lignes pleines de grâce et de fine malice, a raison de se rendre à lui-même, en finissant, ce témoignage que dans sa tâche, plus méritoire pourtant qu’il ne veut bien le dire, il a réussi comme il l’entendait ; en se livrant, non sans complaisance, aux douceurs presque paternelles de la propriété, il aura servi d’une manière durable la littérature.

2092. (1875) Premiers lundis. Tome III « M. de Latena : Étude de l’homme »

C’est une citadelle qui a courageusement repoussé les assauts, et que la famine force enfin de se rendre. » « Une femme nous semble un peu moins jolie quand nous avons entendu contester sa beauté. » Je ne sais si l’auteur a raison de refuser aux femmes la faculté d’être amies entre elles ; il ne la leur refuse du reste que dans leur première jeunesse et quand une autre sorte de passion plus vive est en jeu.

2093. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre IV. — Molière. Chœur des Français » pp. 178-183

Pendant que les Allemands nous prouvent que Molière n’est pas un bon poète comique, nous n’avons pas cessé d’entendre les Français chanter sa gloire : Gloire à Molière, le plus grand des poètes comiques !

2094. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Note II. Sur l’hallucination progressive avec intégrité de la raison » pp. 396-399

La nuit suivante, l’ouïe se mit de la partie, et, ne dormant pas, il entendait ses images fredonner d’une voix lointaine, confuse, mélodieuse, de petites phrases musicales.

2095. (1861) La Fontaine et ses fables « Conclusion »

Par lui nous voyons les gestes, nous entendons l’accent, nous sentons les mille détails imperceptibles et fuyants que nulle biographie, nulle anatomie, nulle sténographie ne saurait rendre, et nous touchons l’infiniment petit qui est au fond de toute sensation ; mais par lui, en même temps, nous saisissons les caractères, nous concevons les situations, nous devinons les facultés primitives ou maîtresses qui constituent ou transforment les races et les âges, et nous embrassons l’infiniment grand qui enveloppe tout objet.

2096. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bouilhet, Louis (1821-1869) »

Les sujets, les entrelacements, les rimes, tous les secrets de la métrique, il les possède ; aussi son œuvre fourmille-t-elle de bons vers, de ces vers tout d’une venue et qui sont bons partout, dans le Lutrin comme dans les Châtiments… On m’objectera que toutes ces qualités sont perdues à la scène, bref, qu’il « n’entendait pas le théâtre ! 

2097. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hervilly, Ernest d’ (1839-1911) »

Écoutez plutôt ces vers que Kami récite en jouant de l’éventail : Lorsque tu baignes ton pied tendre Dans ta rivière aux frais cailloux, Les beaux lys rosés font entendre Un long murmure de jaloux.

2098. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mikhaël, Éphraïm (1866-1890) »

La fleur fraîche a péri, mais la feuille éternelle Verdoie, et tu souris, poète, et lu entends Chanter, échos amis de ta voix fraternelle, « Les joueurs de Syrinx épars dans le printemps ».

2099. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XVI. Consultation pour un apprenti romancier » pp. 196-200

Le fruit sec, le cœur sec n’aime pas et n’entend pas : quand il répète, il joue faux.

2100. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XXII. L’affichage moderne » pp. 283-287

Vous entendez bien, illustrée, non pas l’affiche picturale, ce qui n’a pas de sens, illustrée, c’est-à-dire dont la mention commerciale est rehaussée, commentée, synthétisée par quelques couleurs, quelques traits appropriés.

2101. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Première partie. Plan général de l’histoire d’une littérature — Chapitre premier. Nécessité d’une histoire d’ensemble » pp. 9-11

Outre qu’il est désobligeant et le plus souvent injuste de rabaisser les travaux de ceux qui nous ont frayé la route, l’exposé seul de ce que j’entends réclamer des historiens à venir suffira pour montrer ce qui manque, selon moi, aux historiens présents ou passés.

2102. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 303-308

Le plan en est vaste, sagement entendu, habilement exécuté.

2103. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre III. Partie historique de la Peinture chez les Modernes. »

Ainsi, lorsqu’on entend soutenir que le christianisme est l’ennemi des arts, on demeure muet d’étonnement, car à l’instant même on ne peut s’empêcher de se rappeler Michel-Ange, Raphaël, Carrache, Dominique, Lesueur, Poussin, Coustou, et tant d’autres artistes, dont les seuls noms rempliraient des volumes.

2104. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 6, de la nature des sujets que les peintres et les poëtes traitent. Qu’ils ne sçauroient les choisir trop interressans par eux-mêmes » pp. 51-56

On s’imagine entendre les reflexions de ces jeunes personnes sur la mort qui n’épargne ni l’âge, ni la beauté, et contre laquelle les plus heureux climats n’ont point d’azile.

2105. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — V. L’avare et l’étranger »

Un étranger entendit railler sa ladrerie : « Aujourd’hui, affirma-t-il, je vais manger du touho de l’avare ».

2106. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Pierre Mancel de Bacilly »

Quoiqu’une théorie repose au fond d’un pareil ouvrage, — car de toute pensée générale, de tout fragment de vérité, il est facile de déduire ce que la science appelle une théorie, — ce livre n’est pas, à proprement parler, ce que les esprits qui recherchent ces organisations de la pensée entendent généralement par un système.

2107. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Paul Nibelle »

Dans le rugissement des lionceaux on entend le rugissement des lions futurs.

2108. (1926) La poésie de Stéphane Mallarmé. Étude littéraire

Ses intimes nous assurent qu’on ne l’entendit jamais dire, d’un livre, quelque mal. […] l’Azur triomphe, et je l’entends qui chante Dans les cloches. […] C’est même cela souvent que l’on entend par ce mot : comprendre. […] Je lis cela à la lumière d’une leçon que j’entendais, il y a quelques années, de M.  […] C’est dans ce sens que doit s’entendre l’image des reflets mutuels dont s’éclairent les pierreries.

2109. (1835) Critique littéraire pp. 3-118

Et qu’on nous permette de demander ici à beaucoup d’honnêtes témoins de cette grande révolution, qui l’avaient vu faire sous leurs yeux, qui avaient entendu gronder le canon et mugir le peuple soulevé, si, le lendemain de leur victoire, ils se croyaient beaucoup plus éveillés que Victor Jacquemont. […] Il la prédisait du fond de l’Indoustan, à quelques mille lieues du théâtre des événements, et plus de trois ans avant que lord Palmerston eût fait entendre, dans le parlement anglais, ces paroles mémorables : « Les relations qui unissent la France et l’Angleterre deviennent de jour en jour plus amicales. […] « Mon mépris les accabla, écrit-il ; ils n’avaient jamais entendu un de leurs rajahs parler de lui-même comme je le faisais, à la troisième personne ; Runjet-Sing seul le fait dans le Punjaub ; et tandis que je me rendais à moi-même tous ces respects, je ne leur parlais que comme à des serviteurs. […] « J’ordonnai alors qu’on m’apportât du lait. — N ‘entendez-vous pas, dis-je a Neal-Sing, que le seigneur désire avoir du lait ? […] Aujourd’hui, l’auteur se défend d’avoir eu cette intention ; et vraiment nous le croyons, car il semble avoir composé le Secrétaire intime tout exprès pour prouver l’excellence d’un mariage bien assorti ; le tout est donc de s’entendre.

2110. (1864) Corneille, Shakespeare et Goethe : étude sur l’influence anglo-germanique en France au XIXe siècle pp. -311

Aussi convient-il de rappeler, une fois pour toutes, avant d’entrer dans le sujet même, que je n’entends point borner le Romantisme à l’imitation ou à l’initiation des éléments étrangers qui venaient s’y joindre. […] Mais au moment où il allait se rendre à son poste, il entend crier dans la rue le jugement et la condamnation du duc d’Enghien. […] Écoutez plutôt le ton de mon discours : « “Puisse notre voix être entendue des générations présentes comme autrefois elle le fut de la sérieuse jeunesse de la Restauration. […] Schlegel et Sismondi semblent s’être entendus pour frapper tous deux à la fois un grand coup. […] Ainsi que nous l’avons vu, Diderot avait cherché, dans la préface d’une de ses pièces, à fixer les principes du théâtre, tels qu’il les entendait.

2111. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

La trirème érafla l’idole établie à l’angle du mêle… » Et cette pensée de Flaubert : « On entendait le broutement d’une vache qu’on ne voyait pas », n’est-ce pas la pensée même de Chateaubriand : « J’entendais le murmure d’une rivière qu’on ne voyait pas ?  […] Bientôt j’entends courir d’un bout du pont à l’autre et tomber des paquets de cordages. […] Shakespeare mettait moins de façons pour nous faire entendre sur la scène des dialogues d’amour adultère devant un cercueil. […] Il n’y a rien de plus important que cette question de l’observation, sur laquelle on ne s’entend pas, faute de bien s’expliquer. […] Les diverses façons dont on entend l’inspiration ne changent donc pas les résultats.

2112. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Avertissement de la première édition »

Pourtant il n’est pas si malaisé d’entendre ce qu’il n’a été permis que d’indiquer ; et même dans cette manière, que je nomme ma première, et qui a un faux air de panégyrique, la louange (prenez-y garde) n’est souvent que superficielle, la critique se retrouverait dessous, une critique à fleur d’eau : enfoncez tant soit peu, et déjà vous y touchez.

2113. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Deroulède, Paul (1846-1914) »

Paul Déroulède, ne les ayant jamais entendus que braillés par des commères tricolores de café-concert.

2114. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Pottecher, Maurice (1867-1960) »

Vous entendez bien que la partie la mieux venue, c’est la partie réaliste.

2115. (1882) Qu’est-ce qu’une nation ? « III »

Un passé héroïque, des grands hommes, de la gloire (j’entends de la véritable), voilà le capital social sur lequel on assied une idée nationale.

2116. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 527-532

le Normand lui dit, après sa premiere cause, qu’il n’avoit jamais rien entendu de si éloquent.

2117. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article » pp. 519-526

Voici quelques Strophes de l’Ode : « Du Roi des Rois la voix puissante S’est fait entendre dans ces lieux : L’or brille, la toile est vivante, Le marbre s’anime à mes yeux.

2118. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 532-537

Le style deviens sec, moins nerveux que tendu, Et, pour vouloir trop dire, on n’est plus entendu.

2119. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Étienne Dolet, et François Floridus. » pp. 114-119

Il a déshonoré autant qu’il étoit en lui, à force de passions & de vices, & les belles-lettres qu’il entendoit parfaitement, & le saint chrême qu’il avoit malheureusement reçu. » Partout il s’attira des affaires terribles.

2120. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre II. Vue générale des Poèmes où le merveilleux du Christianisme remplace la Mythologie. L’Enfer du Dante, la Jérusalem délivrée. »

N’entend-on plus sur le sommet du Liban la voix des prophètes ?

2121. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre VI. La Mère. — Andromaque. »

Vox in Rama audita est, dit Jérémie18, ploratus et ululatus multus ; Rachel plorans filios suos, et noluit consolari, quia non sunt. « Une voix a été entendue sur la montagne, avec des pleurs et beaucoup de gémissements : c’est Rachel pleurant ses fils, et elle n’a pas voulu être consolée, parce qu’ils ne sont plus. » Comme ce quia non sunt est beau19 !

2122. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre XII. Suite du Guerrier. »

On est avec eux sous les murs de Solyme ; on croit entendre le jeune Bouillon s’écrier, au sujet d’Armide : « Que dira-t-on à la cour de France, quand on saura que nous avons refusé notre bras à la beauté ? 

2123. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre premier. Que le Christianisme a changé les rapports des passions en changeant les bases du vice et de la vertu. »

Jésus-Christ dormit dans le sein de Jean ; et sur la croix, avant d’expirer, l’amitié l’entendit prononcer ce mot digne d’un Dieu : Mater, ecce filius tuus ; discipule, ecce mater tua.

2124. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre IV. Pourquoi les Français n’ont que des mémoires. »

Si c’était le titre de citoyen, plutôt que celui de sujet qui fit exclusivement l’historien, pourquoi Tacite, Tite-Live même, et, parmi nous, l’évêque de Meaux et Montesquieu, ont-ils fait entendre leurs sévères leçons sous l’empire des maîtres les plus absolus de la terre ?

2125. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Hallé  » pp. 127-130

Les autres ne s’entendent pas plus en dessin que moi.

2126. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Law »

Ce qui lui appartient en propre, c’était le génie, si on entend par génie cette espèce de force intellectuelle qui déplace beaucoup d’idées et renverse toutes les traditions.

2127. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre VI. Observations philologiques, qui serviront à la découverte de véritable Homère » pp. 274-277

Ceci doit nous faire entendre que ces poèmes n’étaient auparavant qu’un amas confus de traditions poétiques.

2128. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Appendice. Histoire raisonnée des poètes dramatiques et lyriques » pp. 284-285

À les entendre, le temps des poètes lyriques vit aussi fleurir des poètes tragiques distingués, et Diogène Laërce assure que la première tragédie fut représentée par le chœur seulement.

2129. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1895 » pp. 297-383

Finot ; le directeur de la Revue des Revues, un Polonais, qui me parle aimablement du succès de ma littérature dans les pays slaves, dans ces contrées, où se forment des réunions d’une trentaine de personnes, pour entendre la lecture d’un livre nouveau, et il m’apprend, à mon grand étonnement, que Charles Demailly est le roman de tous mes romans, qui a eu le plus grand succès là-bas. […] Là, il s’interrompt, voyant la porte ouverte, et me demande à être entendu par moi seul. […] Un ami, qui était là, part à sa place… Mais voici le curieux : le vent nous pousse juste sur la Varenne, et là un calme nous y arrête… Nous étions à huit cents mètres… j’entends une voix, qui m’appelle par mon nom… nous étions juste au-dessus du jardin de l’abbé… nous ne le voyons pas, mais nous voyons très bien sa maison… Un moment l’idée de descendre et de le reprendre, mon ami en ayant assez… mais le vent revient… Le lendemain, nous étions à cinq heures à Spa. […] Ce soir Gyp, qui vient de passer deux mois au lit, Gyp, à l’élégance ondulante du corps, dans un fourreau de satin blanc, cause avec moi de sa maladie, sur une note comique, disant qu’elle entendait le médecin dire, derrière un paravent, à sa garde : « Voilà une petite dame qui est en train de se laisser couler !  […] Et on l’entendait répéter : « Moi j’étais né pour écrire, dans toute ma vie, un petit volume in-douze, dans le genre de La Bruyère, et rien que ce petit in-douze ! 

2130. (1845) Simples lettres sur l’art dramatique pp. 3-132

Buloz, pareil à ces gens dont parle l’Évangile, qui ont des yeux et qui ne voient point, qui ont des oreilles et qui n’entendent point, M. Buloz a passé près de ce comédien sans le voir et sans l’entendre. […] Véron toujours, bien entendu, dans la même Revue de Paris. […] « 4 décembre 1844. » Vous entendez, M.  […] Buloz, dans la Revue de Paris, annonce, sans pouvoir y croire cependant, que je bornerai désormais ma fabrication littéraire à 18 volumes par an, ce qui laisse à entendre que j’en fais d’ordinaire beaucoup plus.

2131. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers (3e partie) » pp. 249-336

Quoique le brouillard fût épais, à travers son épaisseur même, les avant-postes ennemis aperçurent la lueur des torches, entendirent les cris de joie de nos soldats, et allèrent donner l’alarme au général Tauenzien. » L’espace que Napoléon cherchait d’abord à conquérir pour y déployer son armée encore à demi cachée derrière les montagnes est balayé avant dix heures du matin. […] Napoléon, revenu à Iéna, s’occupait, suivant son usage, de faire ramasser les blessés, et entendait les cris de Vive l’Empereur ! […] « On n’entend au milieu de la canonnade que ce cri des officiers : Serrez les rangs ! […] Et en ce moment il s’avançait au Nord, laissant derrière lui la France épuisée et dégoûtée d’une gloire sanglante, les âmes pieuses blessées de sa tyrannie religieuse, les âmes indépendantes, de sa tyrannie politique ; l’Europe enfin, révoltée du joug étranger qu’il faisait peser sur elle, et menait avec lui une armée où fermentait sourdement la plupart de ces sentiments, où s’entendaient toutes les langues, et qui n’avait pour lien que son génie et sa prospérité jusque-là invariable ! […] XXIII Nous entendons d’ici l’objection : L’homme universel nous le voyons bien, nous dit-on ; mais l’écrivain où est-il ?

2132. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (2e partie) » pp. 409-488

III Or M. de Mareste aimait Beyle, je ne comprenais pas pourquoi ; car je l’avais de confiance, moi, en antipathie, pour avoir entendu dire qu’il ne croyait pas en Dieu, et qu’il s’en vantait, et qu’il était cynique. […] Mais quand j’en ai longtemps échauffé ma pensée, Que la Prière en pleurs, à pas lents avancée, M’a baisé sur le front comme un fils, m’enlevant Dans ses bras loin du monde, en un rêve fervent, Et que j’entends déjà dans la sphère bénie Des harpes et des voix la douceur infinie, Voilà que de mon âme, à l’entour, au dedans, Quelques funestes cris, quelques désirs grondants Éclatent tout à coup, et d’en haut je retombe Plus bas dans le péché, plus avant dans la tombe ! […] Il y avait le même talent, l’immense talent, mais un talent faisait tort à l’autre, excepté quelques pages divines, telles que celles-ci : la mort de Théram : « Vers le matin pourtant, les autres personnes étant absentes toujours, et même la domestique depuis quelques instants sortie, tandis que je lisais avec feu et que les plus courts versets du rituel se multipliaient sous ma lèvre en mille exhortations gémissantes, tout d’un coup les cierges pâlirent, les lettres se dérobèrent à mes yeux, la lueur du matin entra, un son lointain de cloche se fit entendre, et le chant d’un oiseau, dont le bec frappa la vitre, s’élança comme par un signal familier. […] » Et l’autre berger reprend : « Oui, vous l’avez entendu dire, et ç’a été en effet un bruit fort répandu ; mais nos vers et nos chansons, au milieu des traits de Mars, ne comptent pas plus, ô Lycidas ! que les colombes de Dodone quand l’aigle fond du haut des airs. » Puis il donne à entendre qu’il s’en est fallu de peu que Ménalque, cet aimable chantre de la contrée, n’eût perdu la vie : “Et qui donc alors eût chanté les Nymphes ?

2133. (1899) Les industriels du roman populaire, suivi de : L’état actuel du roman populaire (enquête) [articles de la Revue des Revues] pp. 1-403

Tourmenté par la famine, il réclamait souvent et n’était jamais entendu. […] V Les femmes, qui s’entendent fort bien à soigner leurs intérêts, dès que leur attention s’est éveillée sur le point délicat, ont fait incursion là comme ailleurs, les unes pour brocher des romans-feuilletons avec une fécondité malheureuse, les autres pour exploiter le genre en douceur, à l’exemple de leurs grands confrères masculins. […] Les questions ont des aspects multiples ; les intérêts sont complexes, d’un peuple à l’autre, dans un même peuple, souvent ils s’opposent, le plus sage serait de comprendre les raisons de ses adversaires, de faire valoir les siennes, de ne pas crier d’abord à tue-tête pour avoir quelque chance de l’entendre. […] Bien entendu que tel bon ouvrage qui pourrait être apprécié de plusieurs catégories de lecteurs figurerait sur plusieurs catalogues. […] Mais, pour le faire entendre du public, M. de Curel a dû recourir à un art que beaucoup de bons esprits considèrent comme inférieur : il a dû faire une pièce !

2134. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre quatrième. L’idée du temps, sa genèse et son action »

De même, un son ne s’entend que parce qu’il a un écho où il se prolonge, un commencement, un milieu et une fin : il y a déjà de la musique et de l’harmonie dans la plus élémentaire de nos perceptions de l’ouïe ; son apparente simplicité enveloppe une infinité de voix unies en un concert. […] Un son imperceptible n’est pas nécessairement un souvenir de son, quoique, en écoutant une cloche lointaine, quand le son atteint un certain degré de faiblesse, on ne sache plus si ce qu’on entend est souvenir ou perception. […] Si nous avons, à la manière de Herbart, supposé une force inhérente aux idées, il est bien entendu que ce n’est pas pour nous une force qu’auraient en elles-mêmes des idées détachées, des représentations individualisées et à l’état atomique. […] Spencer a tort de croire que Kant ait entendu par la forme pure du temps la notion abstraite du temps telle « que l’adulte la possède » ; Kant, d’ailleurs, n’admet pas que le temps soit « un concept discursif ou, comme on dit, général » ; mais, d’autre part, M.  […] Un animal est couche immobile au milieu d’un paysage immobile : un son se fait entendre une fois, puis deux fois, puis trois fois : il y a là une série en contraste avec l’immuable tableau de l’espace : c’est comme l’incarnation du temps dans le son.

2135. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIVe entretien. Épopée. Homère. — L’Odyssée » pp. 445-524

VIII La tonte des brebis, le lavage des agneaux dans le bassin d’eau courante ; la dernière gerbe qui arrivait dans l’aire sur le dernier char de la moisson, festonné de bleuets, de pavots, de guirlandes de chêne ; la dernière gerbe battue, dont on apportait le grain dans une écuelle au maître du château pour la répandre sous ses pas et pour qu’il remplît à son tour l’écuelle vide de petites monnaies pour les batteurs ; la visite des étables, où les bœufs, les vaches, les taureaux, liés aux mangeoires par de grosses cordes, étalaient leurs flancs luisants et leurs litières dorées, témoignages des soins et de la propreté des bouviers ; les écuries des chevaux de trait, tapissées de harnais aux boucles de cuivre aussi éclatantes que l’or, le bruit de leurs mâchoires qui moulaient l’orge, la fève ou l’avoine entre leurs dents, délicieuse musique des râteliers bien garnis aux heures où le laboureur détèle trois fois par jour ses attelages ; les mugissements lointains des bœufs de labour répercutés d’une colline à l’autre, le matin avant que le soleil se lève ; les cris intermittents de l’enfant qui les chatouille de la pointe de l’aiguillon ; les claquements du fouet du charretier qui revient à vide de la ville où il a déchargé ses sacs de blé ; le roucoulement perpétuel des pigeons sur le toit du colombier ou sur la paille des basses-cours, ou ils disputent l’épi mal vidé aux poules ou aux passereaux ; les fêtes champêtres au château, fêtes qui marquaient pour les serviteurs et pour les mercenaires des hameaux voisins la fin de chaque travail essentiel de l’année ; les danses dans la grande salle délabrée quand la pluie ou le froid s’opposait aux danses sur les pelouses des parterres ; les préférences naissantes, les inclinations devinées, avouées, combattues, ajournées, triomphantes enfin entre les jeunes serviteurs de la ferme et les jeunes servantes de la maison ; les aveux, les fiançailles, les noces, les joies des épousées devenant la joie et l’entretien de toute la tribu ; enfin ces repos et ces silences complets des dimanches d’été succédant aux bruits de la semaine, silences délassants pendant lesquels on n’entendait plus autour du château et jusqu’au fond des bois que le bourdonnement des abeilles sur le sainfoin autour des ruches et le ruminement assoupissant des bœufs couchés sur les grasses litières dans les étables ; toutes ces scènes de la vie privée, quoique vulgaire, rurale, domestique, n’étaient-elles pas aussi riches de véritable poésie épique ou descriptive que les scènes de la vie publique dans l’Iliade, que les tentes des héros, les conseils des chefs, les champs de bataille d’Ilion ? […] Demandez-leur si elles ne troqueraient pas tout le bruit de leur nom contre un soupir qui ne serait entendu que de leur cœur ? […] Il dit ; aussitôt la nourrice Euryclée se prend à pleurer, et à travers ses larmes elle fait entendre ces paroles… » « Euryclée lui dit (vous l’entendez !) […] On entend le bruit de leurs sabots sur le sol ; sans se ralentir, elles courent, emportant le linge et la princesse accompagnée de ses servantes.

2136. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre V : Lois de la variabilité »

Ainsi, des animaux, présentant à peu de chose près les caractères ordinaires, préparent la transition entre le domaine de la lumière et celui des ténèbres ; des espèces adaptées aux lueurs crépusculaires viennent ensuite ; et, les derniers de tous, apparaissent ceux qui peuvent supporter une obscurité complète, et dont l’organisation offre des caractères tout particuliers. » Les remarques de Schiœdte s’appliquent, bien entendu, non pas à une seule et même espèce, mais à des espèces considérées comme distinctes. […] C’est cette loi de variations simultanées que j’entends exprimer par le terme de corrélation de croissance. […] Un seul exemple suffira pour expliquer ce que j’entends par là. […] Ces variations peuvent être, bien entendu, soit des déviations, soit des perfectionnements du type. […] Ces caractères sont le plus souvent externes, et sont rarement essentiels à la conservation de l’individu lui-même, sous les conditions de vie où il est placé, les dangers auxquels peuvent l’exposer ses relations sexuelles mis à part, bien entendu.

2137. (1887) George Sand

Elle entendit, elle aussi, un jour, dans un coin sombre de la chapelle où elle s’abîmait en méditations, le Tolle, lege de saint Augustin, qu’un tableau naïf représentait devant elle. […] Cependant il faut s’entendre sur ce point délicat. […] C’est tantôt un jugement amèrement résigné sur la vie et les hommes, tantôt une plainte aigre, un cri d’angoisse, un de ces cris qui se font entendre à travers le monde, et qui ont un long retentissement. […] Le noble comte peut continuer longtemps ainsi, il y a longtemps que je rêve, et je soupçonne Consuelo de n’avoir tant de patience à l’entendre que parce qu’elle fait comme moi. […] Ceux qui ne comprirent pas ou qui n’entendirent pas ce cri de conscience, cette plainte entrecoupée, mêlée de fièvre et de sanglots, se scandalisèrent.

2138. (1875) Revue des deux mondes : articles pp. 326-349

J’ai entendu souvent raconter à M.  […] Le cadavre que l’on a devant les yeux entend et distingue ce que l’on fait autour de lui, il ressent des impressions douloureuses quand on le pince ou qu’on l’excite. […] De cause en cause il arrive finalement, suivant l’expression de Bacon, à une cause sourde qui n’entend plus nos questions et ne répond plus. […] Je suppose ici, bien entendu, que l’aveu est sincère ; sans cela, le cœur n’éprouverait rien et le sentiment ne serait que sur les lèvres. […] Tout le monde s’entend quand on parle de la vie et de la mort.

2139. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. RODOLPHE TÖPFFER » pp. 211-255

Qu’on se figure bien la difficulté pour un écrivain de la Suisse française, qui tiendrait à la fois à rester Suisse et à écrire en français, comme on l’entend et comme on l’exige ici. […] On chante, on chante pour soi, pour Dieu et pour ses frères voisins ; mais la grande patrie est absente, la grande, la vaine et futile Athènes n’en entend rien. […] Töpffer, je n’ai guère vécu avec quelqu’un d’autre. » Entendons-nous bien, c’est avec le Rousseau de Julie, avec celui des courses de montagnes et des cerises cueillies, et de tant d’adorables pages du début des Confessions, avec le Rousseau des Charmettes. […] En lisant ces pages pittoresques et vives, où la lumière se joue, on ne peut s’empêcher de partager les espérances de l’auteur, lorsque, vers la fin, en vue de l’avenir de l’art dans ces contrées où il n’eut point de passé, on l’entend qui s’écrie : « Toutefois, Suisse, ma belle, ma chère patrie, les temps sont venus peut-être !

2140. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (5e partie) » pp. 145-224

Par instants elle entendait à une certaine distance des espèces de secousses sourdes, et elle disait : — C’est singulier qu’on ouvre et qu’on ferme les portes cochères de si bonne heure ! […] Horace en était, Goethe en était, La Fontaine peut-être ; magnifiques égoïstes de l’infini, spectateurs tranquilles de la douleur, qui ne voient pas Néron s’il fait beau, auxquels le soleil cache le bûcher, qui regarderaient guillotiner en y cherchant un effet de lumière, qui n’entendent ni le cri, ni le sanglot, ni le râle, ni le tocsin, pour qui tout est bien, puisqu’il y a le mois de mai ; qui, tant qu’il y aura des nuages de pourpre et d’or au-dessus de leur tête, se déclarent contents, et qui sont déterminés à être heureux jusqu’à épuisement du rayonnement des astres et du chant des oiseaux. […] « Çà et là, par intervalles, quand le vent donnait, on entendait confusément des cris, une rumeur, des espèces de râles tumultueux, qui étaient des fusillades, et des frappements sourds, qui étaient des coups de canon. […] « Celui-ci était un bourgeois ; le même peut-être qu’un jour Marius, à travers sa fièvre d’amour, avait entendu, près de ce même grand bassin, conseillant à son fils “d’éviter les excès”.

2141. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre VI. Bossuet et Bourdaloue »

La cour aussi veut l’entendre : il prêche au Louvre le Carême de 1662, puis l’Avent de 1665 ; à Saint-Germain, le Carême de 1666, l’Avent de 1669. […] Mais, en se proposant avant tout d’instruire des vivants à l’occasion des morts, Bossuet n’a pas oublié que son office était de faire entendre l’éloge des morts. […] Mais il a dit, ou fait entendre toute la vérité qu’il était capable de concevoir. […] En 1669, il prêche un Avent à Paris ; en 1670, un carême à la cour, qui neuf fois encore l’entendit.

2142. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre quatrième »

« Les preuves de la philosophie, a dit Nicole, ne laissent pas d’être proportionnées à certains esprits, elles ne sont pas à négliger. » Je doute qu’il l’ait entendu des esprits excellents, et qu’il estimât autant ceux qui s’en peuvent contenter que ceux qui y préfèrent les preuves de la religion. […] Les habiles gens s’entendront mieux avec Descartes écrivant que « les poils blancs qui commencent à lui venir l’avertissent qu’il ne doit plus étudier, en physique, à autre chose qu’au moyen de les retarder. » Et ailleurs : « Qu’il n’a jamais eu tant de soin de se conserver que maintenant. » Et plus loin : « Qu’il fait un abrégé de médecine, dont il espère pouvoir se servir par provision pour obtenir quelque délai de la nature. » Ceux qui souffrent, et c’est le grand nombre, ceux qui ont la mauvaise part dans la distribution des biens de fortune, d’opinion ou de santé, ceux pour qui en particulier le Christ est venu, aimeront mieux Pascal disant dans cette sublime prière que j’ai citée : « Je ne trouve en moi, Seigneur, rien qui vous puisse agréer ; je ne vois rien que mes seules douleurs, qui ont quelque ressemblance avec les vôtres. […] Si, de plus, on entend la méthode dans le sens cartésien, où trouver une plus belle application de cet art de chercher la vérité, dont Descartes avait donné les règles ? […] J’entends par la fin comique l’art de tirer le ridicule de l’observation, plutôt que de certains contrastes inattendus d’où naît le plaisir fugitif de la surprise.

2143. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre quatrième. Les émotions proprement dites. L’appétit comme origine des émotions et de leurs signes expressifs. »

Dans la Cène de Léonard de Vinci, l’étonnement est peint d’une manière admirable sur le visage des disciples, avec les nuances les plus diverses selon les caractères, au moment où ils entendent cette parole de Jésus : « L’un de vous me trahira » ; et toutes ces nuances sont en même temps celles de l’aversion et de la crainte. […] Darwin ayant demandé à un enfant de moins de quatre ans ce qu’il entendait par être content, l’enfant répondit : « cela veut dire rire, babiller et embrasser ; » ce jeune psychologue ne séparait point le sentiment de son expression. […] Une même cause, agissant sur plusieurs animaux à la fois, leur fait par exemple pousser un même cri d’alarme ; la peur et le cri entendu finissent par s’associer machinalement : cette association même, grâce à la survivance des mieux doués, devient organique et héréditaire : à la fin, la seule audition du bruit d’alarme suffit donc à éveiller machinalement le sentiment de l’alarme elle-même. — Sans nier ici l’influence de l’habitude et de l’hérédité, nous croyons que cette explication de Spencer demeure encore trop extérieure : il y a une liaison intime, à la fois physiologique et psychologique, entre le cri de détresse et la détresse même. […] elle rampe et se brise comme en agonie, si on crispe une feuille de métal, bien que le son soit alors si faible que nous l’entendons à peine ; elle danse en cadence une valse jouée par un instrument ; enfin elle bat la mesure au tic-tac d’une montre.

2144. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre troisième. La volonté libre »

Le moi connu, le moi d’expérience, que le sujet aperçoit, est en réalité un objet, son produit en même temps que le produit des choses extérieures : il n’est pas le sujet lui-même, le sujet tout entier ; et par là, n’entendez plus seulement le sujet pur, qui peut n’être qu’une abstraction, mais le sujet sentant, pensant et faisant effort au sein d’un organisme. […] Si donc l’on commence par définir la liberté : « ce qui est en contradiction absolue avec le déterminisme et inconciliable par définition avec le déterminisme, de quelque manière qu’on l’entende », il est clair qu’il n’y aura plus de conciliation à chercher. […] Il n’est donc pas étonnant que l’idée de liberté morale ou de perfection morale, ainsi entendue, soit un idéal capable d’exercer un attrait sur l’être raisonnable. […] Il est bien entendu que nous ne parlons pas d’une puissance en l’air et sans objet, mais du pouvoir de se décider à tel acte déterminé, par exemple adresser des excuses à quelqu’un qu’on a offensé.

2145. (1856) Cours familier de littérature. I « VIe entretien. Suite du poème et du drame de Sacountala » pp. 401-474

Le héros , regardant du côté d’où il a entendu partir les voix. […] … Il faut que cette imprécation ait été lancée contre moi dans un moment où mon âme était toute concentrée dans l’objet de mon amour, et que mes compagnes seules l’aient entendue ; car je me rappelle fort bien ces paroles qu’elles m’ont dites à mon départ, d’un ton de voix qui trahissait leur inquiétude : « Si le roi refusait de te reconnaître, n’oublie pas de lui montrer son anneau. » Hélas ! […] Le héros les défie, et son cri de guerre est entendu par-dessus le roulement des tambours, plus fort, plus répété que la clameur de l’éléphant sauvage, retentissant dans les bois de la montagne. […] On entend de loin, derrière un rideau de forêts et sur les rives du fleuve, les cris de détresse et les gémissements de la jeune épouse abandonnée, qui vient de mettre au monde les deux jumeaux recueillis par les brahmanes et adoptés par les nymphes sacrées.

2146. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Geoffroy de Villehardouin. — II. (Fin.) » pp. 398-412

C’est là le cas, en effet, et ce que démontre amplement la version de Du Cange, outre que tout n’y est pas très finement et très exactement entendu. […] La poésie, comme l’histoire, à voir les choses simplement, elle était plutôt à cette heure du côté des croisés que des Byzantins, malgré toutes leurs divinités et leurs Aréthuses, — la poésie, et j’entends par là la véritable, à la fois le souffle, l’inspiration, la fleur et déjà l’art de l’expression, et aussi l’artifice du rythme.

2147. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — II. (Fin.) » pp. 296-311

Lorry, il est si au fait de tous nos maux, que l’on dirait qu’il a lui-même accouché. » Ce mot familièrement spirituel n’est pas, comme bien l’on pense, dans le discours de Vicq d’Azyr : celui-ci, en effet, observe les tons, respecte les nuances, fait entendre ce qu’il ne dit pas, et, répondant aux détracteurs de M.  […] Faut-il maintenant s’étonner qu’à la mort de Buffon, l’Académie française, ou plutôt la société parisienne tout entière qui allait entendre les éloges de Vieq d’Azyr comme elle allait applaudir au Lycée les leçons de La Harpe, aient désigné d’une commune voix l’éloquent médecin pour succéder au roi des naturalistes et pour le célébrer ?

2148. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — III » pp. 90-104

L’explication que lui donna Montluc, si elle se trouvait dans une histoire ancienne, serait célèbre, et nous la saurions dès l’enfance : Alors, je lui répondis (au roi) que c’était une chose que j’avais trouvée facile ; et comme je le vis affectionné à la vouloir entendre, connaissant qu’il prenait plaisir d’en ouïr conter, je lui dis que je m’en étais allé un samedi au marché, et qu’en présence de tout le monde j’avais acheté un sac et une petite corde pour lier la bouche d’icelui, ensemble un fagot, ayant pris et chargé tout cela sur le col à la vue d’un chacun ; et comme je fus à ma chambre, je demandai du feu pour allumer le fagot, et après je pris le sac, et là j’y mis dedans toute mon ambition, toute mon avarice, mes haines particulières, ma paillardise, ma gourmandise, ma paresse, ma partialité, mon envie et mes particularités, et toutes mes humeurs de Gascogne, bref tout ce que je pus penser qui me pourrait nuire, à considérer tout ce qu’il me fallait faire pour son service ; puis après je liai fort la bouche du sac avec la corde, afin que rien n’en sortît, et mis tout cela dans le feu ; et alors je me trouvai net de toutes choses qui me pouvaient empêcher en tout ce qu’il fallait que je fisse pour le service de Sa Majesté. […] Et, pour énumérer quelques-unes de ses qualités spéciales et naturelles qui venaient en aide à sa bravoure et la distinguaient d’une aveugle témérité, il avait « le coup d’œil topographique », et là où d’autres ne voyaient rien qu’escarpement et difficulté absolue, il discernait l’assiette possible d’une batterie, le côté faible et vulnérable d’une place : aussi excellait-il aux reconnaissances. — Il avait cet autre coup d’œil qui sait nombrer de loin une troupe dans une plaine, et, à un demi-mille de distance, il savait son chiffre, si considérable qu’il fut à cinquante hommes près. — Il s’entendait à merveille, dans une escarmouche, à « tâter » l’ennemi, c’est-à-dire à connaître à sa marche et à son attitude s’il avait peur ou s’il était en force et solide

2149. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — I — Vauvenargues et Fauris de Saint-Vincens » pp. 1-16

Cela ne saurait déplaire à ceux qui s’ennuyaient déjà de l’entendre toujours louer comme Aristide. […] Vauvenargues ne saurait mieux marquer par quelle extrémité de fortune et, pour ainsi dire, par quelle contrainte du sort il est arrivé comme malgré lui à livrer au public les productions de sa plume, à se faire homme de lettres ; et quand Saint-Vincens, qui n’a pas lu encore l’ouvrage et qui en a entendu dire du bien, lui en renvoie par avance de flatteuses louanges, voyez de quel air il les accueille ; il en est presque humilié : Je suis bien touché de la part que vous voulez prendre aux suffrages que mon livre a obtenus ; mais vous estimez trop ce petit succès.

2150. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — II » pp. 107-121

J’entendais, à ce propos, l’autre jour, un de nos braves et spirituels généraux lâcher sous sa moustache le mot de pédantisme. […] Dans ces Mémoires, d’ailleurs, le grand Frédéric ne parle guère que de batailles, ce à quoi je n’entends rien… Ce que j’aurais voulu surtout savoir, c’est comment Frédéric menait son gouvernement, et les réflexions que ce sujet lui suggérait ; mais j’imagine qu’il dédaignait trop cette partie de sa vie pour s’appliquer à la faire comprendre au lecteur.

2151. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Questions d’art et de morale, par M. Victor de Laprade » pp. 3-21

Augustin Thierry, qui se faisait beaucoup lire, un jour qu’il entendait ces Stances au chêne, arrêta son lecteur au vers que je viens de citer, et fit observer, en souriant de son fin sourire d’aveugle, qu’il n’y avait pas de raison pour qu’on ne dît pas à une citrouille : Pour ta rotondité, je t’aime entre nos sœurs. […] Il prétend qu’entre eux il n’y a pas seulement différence de degré, mais de nature ; c’est une pure question de mots, et qui dépend de ce qu’on entend par l’un et l’autre de ces termes.

2152. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Lettres de Madame de Sévigné »

Je les entends d’ici dans leurs doléances : « A quoi bon ces remaniements perpétuels, ces remue-ménage sans fin ? […] comme elle pense et s’entend à tout !

2153. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Les Contes de Perrault »

Mais quand on a rendu à Boileau tous ces hommages et toute cette justice, il faut s’arrêter : il n’entendait bien et n’aimait que les vers ou une certaine prose régulière, ferme, élevée, dont Pascal, dans ses Provinciales, offrait le modèle. […] Et il n’est guère probable que Perrault lui-même connût ce recueil. » Ainsi donc, il est bien entendu que ce n’est nullement d’invention qu’il s’agit avec Perrault ; il n’a fait qu’écouter et reproduire à sa manière ce qui courait avant lui ; mais il paraît bien certain aussi, et cela est satisfaisant à penser, que ce n’est point dans des livres qu’il a puisé l’idée de ses Contes de Fées ; il les a pris dans le grand réservoir commun, et là d’où ils lui arrivaient avec toute leur fraîcheur de naïveté, je veux dire à même de la tradition orale, sur les lèvres parlantes des nourrices et des mères.

2154. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. »

M. de Pradt eût pu atteindre son but avec un peu plus de modération et de prudence dans ses discours, et sous un règne moins contraire aux gens d’Église et moins porté à choisir pour les places les plus élevées des instruments aveuglément soumis. » Nous ne saurions admettre un tel portrait flatté du spirituel et loquace abbé, nous qui vivons depuis assez longtemps pour l’avoir rencontré, à notre tour, et pour l’avoir entendu dans sa vieillesse. […] La dépêche de M. de Senfft, « expédiée par la poste », fut sujette à être remarquée ; c’est lui qui le dit ou qui l’insinue ; peut-être aussi, ajoute-t-il, se rappela-t-on comment il avait été placé ce jour-là pour bien entendre et pour tout retenir.

2155. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite.) »

Je voudrais bien être sur une des chaises de la brune, à côté de toutes les perruques rousses, pour entendre le haricot qu’ils font de nous tous, et aussi pour y voir passer des paniers. […] Il devait, en vertu de cette patente, avoir autorité sur les autres maréchaux, excepté (bien entendu) le maréchal de Saxe.

2156. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite et fin.) »

Sentant l’absurdité de cette manœuvre et pour lui donner à entendre qu’il se méprenait, le prince adressa à Mortaigne un de ces dictons vulgaires et même grossiers que recueille un Suétone ou un Bachaumont, mais qui ne sont pas faits pour le Moniteu. […] Cependant il put, ainsi que les autres princes du sang, engagés dans la même opposition parlementaire, entendre vanter, à cette occasion, son courage civil et ses vertus de citoyen.

2157. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Léonard »

— N’entends-tu pas, dit le Ruisseau, A l’autre bord de ce coteau, Gémir la moitié de moi-même ? […] C’est Philomèle que j’entends.

2158. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVII. De la littérature allemande » pp. 339-365

C’est quelquefois aussi par un désir mal entendu de plaire aux femmes, que les Allemands veulent unir ensemble le sérieux et la frivolité. […] Ils s’entendent mieux que nous à l’amélioration du sort des hommes ; ils perfectionnent les lumières, ils préparent la conviction ; et nous, c’est par la violence que nous avons tout essayé, tout entrepris, tout manqué.

2159. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Préface » pp. 1-22

Préface Si je ne me trompe, on entend aujourd’hui par intelligence ce qu’on entendait autrefois par entendement ou intellect, à savoir la faculté de connaître ; du moins, j’ai pris le mot dans ce sens.

2160. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre IV. Poésie lyrique »

Belle Amelot en chantant nomme son ami, et sa mère l’entend : belle Eglantine ne nomme pas le sien ; mais à voir son « gent corps », sa mère ne peut douter qu’elle en ait un. […] On fit d’abord quelques chansons de croisade, ou des chansons politiques : mais bientôt nos trouvères se réduisirent à l’amour, entendons à l’idée de l’amour et aux délicates déductions de cette idée.

2161. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre II. L’analyse interne d’une œuvre littéraire » pp. 32-46

» — Et il déclare qu’il entend faire des tragédies tragiques, qui arrachent le cœur au lieu de l’effleurer. […] Hugo fait parler en vers apocalyptiques ce qu’il appelle la bouche d’ombre, où il entend la voix de spectres gigantesques visibles pour lui seul ; rappelez-vous l’Eloa d’Alfred de Vigny, où anges et démons flottent dans l’espace indéterminé, et les Tragiques de d’Aubigné, où le poète transformé en voyant nous dit la joie ineffable des élus et les transes immortelles des damnés.

2162. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 janvier 1887. »

  Sous le radeau premier des naissantes mémoires Le grand lac commençait à dérouler ses moires Pour l’homme, brute aux bras trop longs, au nez trop court ;   Et dans l’annonce obscure, en tintements agiles, Tout ce qui rôde, et vole, et nage, et rampe, et court, Entendait bégayer les futurs Evangiles. […]   Il entendit l’oiseau qui chante dans les bois.

2163. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre II : L’intelligence »

Vous entendez lire un passage, vous avez entendu Bachelou Macready, et l’on dit : « Imaginez Macready ou Rachel prononçant ce passage. » Vous voulez remanier le plan de votre jardin, c’est par une association constructive que vous pouvez imaginer l’effet qu’il produira, quand le nouveau plan sera réalisé.

2164. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Madame Récamier. » pp. 121-137

Pour bien entendre, par exemple, ce qu’était Mme de Maintenon auprès de Louis XIV, ou Mme de Sévigné auprès de sa fille, et quel genre de sentiment ou de passion elles y apportaient, il faut s'être posé sur la jeunesse de ces deux femmes plusieurs questions, ou plus simplement il faut s’en être posé une, la première et presque la seule toujours qu’on ait à se faire en parlant d’une femme : A-t-elle aimé ? […] Un moraliste amer, La Rochefoucauld, l’a dit : « On n’aurait guère de plaisir si on ne se flattait jamais. » J’ai entendu des gens demander si Mme Récamier avait de l’esprit.

2165. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Walckenaer. » pp. 165-181

Walckenaer aimait l’administration ; il s’y entendait, et plus tard il y mettait même peut-être un peu d’amour-propre, lui qui en montrait si peu ; il ne se vanta jamais d’être un savant, et il se piquait d’être un administrateur. […] C’est assez faire entendre aussi, je pense, ajoute-t-il, que les personnages ne sont pas des sauvages de l’Ancien ni du Nouveau Monde ; ils sont Français et costumés à la française : enfin, ce qui est encore plus extraordinaire, autant du moins qu’il a été possible à l’auteur, ils parlent français… ».

2166. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Les deux cathédrales »

… J’entends par œuvre forte, une œuvre qui vit ; j’appelle matériaux avariés, des sentiments faux et des idées abolies. […] Je le sais, vous n’êtes pas seul, puisque la Sainte Église vous couvre de sa protection, mais combien toutefois, vous paraissez faible à tous ceux que fut assez puissante pour entraîner, la nouvelle chanson, celle que vous n’entendez pas !‌

2167. (1936) Réflexions sur la littérature « 6. Cristallisations » pp. 60-71

S’il faut entendre, comme cela paraît raisonnable, par histoire de la psychologie, l’histoire de la suite qui a contribué à notre connaissance de l’homme intérieur, peu de noms y compteront plus éminemment que Stendhal. […] Delacroix : « l’énergie est chez lui l’aspiration de l’énergie, le rêve de l’énergie, la nostalgie d’un passé historique plutôt que la puissance de construction d’un avenir. » L’image de la cristallisation qui forme le leit-motiv du livre est à la fois le produit d’une imagination musicale, une figure de la réalité amoureuse : " il me semble, dit Stendhal dans une lettre, qu’aucune des femmes que j’ai eues ne m’a donné un moment aussi doux et aussi peu acheté que celui que je dois à la phrase de musique que je viens d’entendre. " la musique, surtout telle que la goûtait Stendhal qui n’y sentait qu’un motif de rêverie, c’est le monde et l’acte mêmes de la cristallisation parfaite, de sorte que Beyle, amoureux de second plan, simple amateur en musique, se définirait peut-être comme un cristallisateur.

2168. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVIII et dernier. Du genre actuel des éloges parmi nous ; si l’éloquence leur convient, et quel genre d’éloquence. »

En général, l’être vertueux et moral s’affectera bien plus que celui qui est sans principes ; le malheureux, plus que celui qui jouit de tout ; le solitaire, plus que l’homme du grand monde ; l’habitant des provinces, plus que celui des capitales ; l’homme mélancolique, plus que l’homme gai ; enfin, ceux qui ont reçu de la nature une imagination ardente qui modifie leur être à chaque instant, et les met à la place de tous ceux qu’ils voient ou qu’ils entendent, bien plus que ceux qui, toujours froids et calmes, n’ont jamais su se transporter un moment hors de ce qui n’était pas eux. […] vous tromperez tout au plus l’âme indifférente et glacée qui n’a pas le secret de cette langue ; mais l’âme sensible, vous la repoussez ; elle démêle votre jeu, vos systèmes, vous voit arranger vos ressorts ; votre ton n’est pas le sien, et vos âmes ne sont pas faites pour s’entendre.

2169. (1886) Le naturalisme

Cette méthode est invariable et exacte comme la marche d’une pendule… quand elle marche bien s’entend. […] Peut-être nous autres, placés à distance plus grande, apprécierons-nous mieux la grandeur du chef des naturalistes et préfèrerons-nous l’entendre à nous scandaliser. […] Combien nous sommes las d’entendre louer certains livres qu’on vante seulement parce qu’ils ne contiennent rien qui puisse faire rougir une jeune fille ! […] Comme chaque auteur entend la morale à sa manière, ils l’expliquent ainsi : je laisse au jugement du lecteur de décider ce qui est le plus mauvais, de laisser la morale de côté ou de la falsifier. […] Je me hâte d’expliquer ce que j’entends par horizons limités pour que personne n’entende cette phrase d’une manière offensante pour le sympathique écrivain.

2170. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Appendice — Début d’un article sur l’histoire de César »

Si vous voulez réussir auprès d’eux, n’ayez ni un tour fin ni une nuance délicate, ils ne l’entendraient pas.

2171. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MARIA » pp. 538-542

La mère fut exacte à la chose entendue : Elle amenait l’enfant, et je payais à vue.

2172. (1874) Premiers lundis. Tome I « Charles »

Darcey emmène à la campagne, et se fait fouler aux pieds des chevaux : il meurt, et Léonide, comme on le fait entendre, ne lui survivra pas.

2173. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Objections d’un moraliste contre l’exposition de 1900. » pp. 162-167

La réjouissance finie, les misérables, plus nombreux, se retrouvent aussi moins résignés… Des voix autorisées nous diront que ces fêtes sont les fêtes de la paix et de la fraternité ; et jamais nous n’aurons entendu plus de solennelles facéties et de sottises officielles.

2174. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bataille, Henry (1872-1922) »

Toutes les petites maisons y sont de vieilles petites maisons de village, où de bonnes lampes brûlent la nuit ; et toutes leurs petites chambres sont des cellules de souvenir que traversent des poupées lasses, souriantes et fanées ; et on y entend le crépitement de la pluie sur le toit ; et au-dessus des croisillons des fenêtres, on voit fuir les canards gris ; et le matin, au cri du coq, on est saisi par l’haleine des roses.

2175. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bouchor, Maurice (1855-1929) »

Bouchor, ce pour quoi nous l’aimons, c’est qu’il a entendu la voix profonde qui conseille au poète, en ce temps, de se ressouvenir des plus anciennes leçons, d’écouter l’enseignement immémorial des mages primitifs, de se pencher au bord des métaphysiques et des religions antiques.

2176. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 348-354

d’Alembert, Traducteur de plusieurs morceaux de Tacite, n’entend pas le Latin, & que ses Mélanges de Littérature, si estimés de tous ses amis, sont écrits avec sécheresse & avec froideur ; que de tous les Ouvrages de M.

2177. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Racan, et Marie de Jars de Gournai. » pp. 165-171

Mademoiselle de Gournai, qui étoit violente, se persuada tout de bon que c’étoit un homme envoyé pour la jouer ; &, défaisant sa pantoufle, elle le chargea à grands coups de mule, & l’obligea de se sauver. » Ménage ajoute que Boisrobert racontoit cette scène à quiconque vouloit l’entendre, & qu’il en plaisantoit même en présence de Racan.

2178. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre II. Amour passionné. — Didon. »

Elle s’imagine que tant de larmes, tant d’imprécations, tant de prières, sont des raisons auxquelles Énée ne pourra résister : dans ces moments de folie, les passions, incapables de plaider leur cause avec succès, croient faire usage de tous leurs moyens, lorsqu’elles ne font entendre que tous leurs accents.

2179. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre III. Massillon. »

Non toutefois que l’évêque de Clermont n’ait en partage que la tendresse du génie ; il sait aussi faire entendre des sons mâles et vigoureux.

2180. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Doyen » pp. 244-247

Plus près d’Andromaque, elle pourra lui parler, il pourra l’entendre.

2181. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 14, qu’il est même des sujets specialement propres à certains genres de poësie et de peinture. Du sujet propre à la tragedie » pp. 108-114

Personne n’ignore qu’on entend en poësie par scelerat un homme qui viole volontairement les préceptes de la loi naturelle, à moins qu’il ne soit excusé par une loi particuliere à son païs.

2182. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 28, du temps où les poëmes et les tableaux sont apprétiez à leur juste valeur » pp. 389-394

Mais, dira-t-on, si ma comédie tombe opprimée des sifflets d’une cabale ennemie, comment le public qui n’entend plus parler de cette piece pourra-t-il lui rendre justice.

2183. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Saint-Marc Girardin »

Le peu de livres qui se publient (nous parlons de livres, entendons-nous !

2184. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre IV. Des éloges funèbres chez les Égyptiens. »

en prononçant sur lui, songez à leur sang. » Ainsi, au pied de ce tribunal de l’Égypte, retentissaient les plaintes des malheureux : mais il manquait quelque chose à la justice ; il eût été à souhaiter que l’oppresseur entendît sous sa tombe, et que sa froide cendre pût frissonner.

2185. (1898) Essai sur Goethe

voilà ce que je n’ai pas entendu de mon temps. […] (On entend sonner. […] Il n’entendait point en partager la gloire avec la généralité de ses contemporains. […] Vous comprenez ce que j’entends par là. […] Il n’entend compromettre aucun des grands résultats obtenus.

2186. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome II

Tant que le Psychologue reste purement Psychologue, il n’entend pas ce que signifient ces mots : crime, mépris, indignation. […] Chacun des deux interlocuteurs fait, des phrases qu’il entend, une traduction involontaire et immédiate, conforme à ces impressions. […] On entend bien qu’il n’y a pas là, comme dans l’Armance de Stendhal, un cas de défaillance physiologique. […] J’entends la critique impersonnelle et objective. […] Ce n’était pas là du patriotisme au sens exact où nous entendons ce terme ; c’était une sorte de communion mystique avec le cœur de sa race.

2187. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite et fin). »

Son âme chrétienne s’épanchait devant Deleyre avec un mélange et une plénitude de douceur et d’amertume dans les larmes : « Je l’ai embrassée pour la dernière fois à cinq heures et demie du soir, le 30 du mois dernier (juillet 1787), sans qu’elle ait pu me voir ni m’entendre. […] Mais j’entends qu’on se plaint, qu’on gémit, qu’on m’accuse. […] Je suis devenu avare : mon trésor est la solitude ; je couche dessus avec un bâton ferré, dont je donnerais un grand coup à quiconque voudrait m’en arracher. » « La solitude est plus que jamais pour mon âme ce que les cheveux de Samson étaient pour sa force corporelle. » Mais cette solitude n’est pas tout à fait aussi farouche qu’elle en a l’air ; et avec toutes ces austères résolutions, si un ami arrive, il est du plus loin le bienvenu : « Il y a des voix humaines que j’aime à entendre résonner dans ma Thébaïde.

2188. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Appendice. »

Des gens qui se font appeler fils de Dieu, œil de Dieu (voyez les inscriptions d’Hamaker) ne sont pas simples comme vous l’entendez ! […] On a dit et imprimé que lorsque l’abbé Lacordaire prêcha les premières fois dans la chapelle du collège Stanislas, quelques amis et hommes de lettres qui l’entendirent n’augurèrent pas beaucoup d’abord de son éloquence, et l’on m’a nommé comme étant de ces premiers auditeurs. C’est inexact en ce qui me concerne, et je n’ai entendu l’abbé Lacordaire en chaire qu’assez longtemps après et quand son éloquence ne faisait question pour personne. » Lettre à M. 

2189. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Bruyère »

« En vérité, je ne doute point, s’écrie La Bruyère avec un « accent d’orgueil auquel l’outrage a forcé sa modestie, que « le public ne soit enfin étourdi et fatigué d’entendre depuis « quelques années de vieux corbeaux croasser autour de ceux « qui, d’un vol libre et d’une plume légère, se sont élevés à « quelque gloire par leurs écrits. » Quel est ce corbeau qui croassa, ce Théobalde qui bâilla si fort et si haut à la harangue de La Bruyère, et qui, avec quelques académiciens, faux confrères, ameuta les coteries et le Mercure Galant, lequel se vengeait (c’est tout simple) d’avoir été mis immédiatement au-dessous de rien 150 ? […] C’est la première fois qu’à propos d’un des maîtres du grand siècle on entend toucher cette corde délicate, et ceci tient à ce que La Bruyère, venu tard et innovant véritablement dans le style, penche déjà vers l’âge suivant. […] , il nous dit, dans cet admirable chapitre des Ouvrages de l’Esprit, qui est son Art poétique à lui et sa Rhétorique : « Entre toutes les différentes expressions qui peuvent rendre une seule de nos pensées, il n’y en a qu’une qui soit la bonne : on ne la rencontre pas toujours en parlant ou en écrivant ; il est vrai néanmoins qu’elle existe, que tout ce qui ne l’est point est foible et ne satisfait point un homme d’esprit qui veut se faire entendre. » On sent combien la sagacité si vraie, si judicieuse encore, du second critique, enchérit pourtant sur la raison saine du premier.

2190. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVe entretien. Chateaubriand, (suite) »

Il me manquait quelque chose pour remplir l’abîme de mon existence : je descendais dans la vallée, je m’élevais sur la montagne, appelant de toute la force de mes désirs l’idéal objet d’une flamme future ; je l’embrassais dans les vents ; je croyais l’entendre dans les gémissements du fleuve ; tout était ce fantôme imaginaire, et les astres dans les cieux, et le principe même de vie dans l’univers. » « C’est juste l’Isolement de Lamartine, toujours avec la différence des complexions et des natures : Que le tour du soleil ou commence ou s’achève, D’un œil indifférent je le suis dans son cours ; En un ciel sombre ou pur qu’il se couche ou se lève, Qu’importe le soleil ? […] Défions-nous des hommes d’esprit qui entendent malice à la nature ! […] On dirait qu’un nouvel instrument musical fait résonner ses sons dans les concerts de l’esprit ; on croit entendre les soupirs du vent dans les roseaux, les secousses du vent d’orage dans les vastes cimes des forêts, les chutes des cataractes dans les abîmes, les éclats de la foudre entre les rochers, et quelque chose de plus pathétique encore, les battements intimes du cœur, les frissons de l’âme, le suintement des larmes à travers la peau, et les cris muets de la tristesse humaine cherchant en vain des mots pour dire ses angoisses.

2191. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre cinquième »

La grâce y est plus rare ; j’entends par là l’expression naïve de sentiments personnels à l’homme, alors que, pour féconder un sujet imaginaire, il mêle aux formules de la poésie amoureuse de son temps le souvenir d’émotions qu’il a connues. […] Ronsard l’entendit de l’imitation matérielle ; il en copia les formes, il en francisa la langue autant qu’il put, sinon autant qu’il voulut. […] Par vices, je n’entends pas ces violents excès, ces fautes grossières qui sautent aux yeux de tous, comme il en échappe tant à Ronsard parmi beaucoup de choses d’une franche verve et de bon aloi.

2192. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quinzième. »

N’est-il pas plaisant d’entendre Balzac et Voiture, gorgés de dragées comme le Vert-Vert de Gresset, se lamenter sur leur bonheur ? […] Tout ce mouvement autour du mourant, d’abord de respect et d’intérêt pour une vie de si grande importance, puis, à mesure que les chances de guérison diminuent, d’ambition et de précautions avec le règne futur ; ces appartements du duc d’Orléans encombrés, « à n’y pas mettre une épingle », quand le roi est désespéré, vides et déserts sur le bruit qu’il est mieux ; ces valets qui pleurent, les seuls vrais amis du monarque ; la froide et triste octogénaire qui assiste l’œil sec à sa longue agonie, profitant des courts répits du mal pour faire ajouter à la part des bâtards, et quand le roi n’est plus qu’un moribond qui ne peut plus ni ôter ni donner, n’attendant pas la fin et se sauvant à Saint-Cyr ; ces grandes et touchantes paroles du roi ; cette attente de la mort dans la majesté qu’il mettait à toutes ses actions, sans défaillances, sauf celles de la nature quand le combat va finir ; cette inquiétude du chrétien, qui craint que ses souffrances ne soient une trop faible expiation de ses fautes ; tout cela raconté au jour le jour, dans l’ordre où chaque chose arrive, parmi des détails sur le service intérieur, l’étiquette, les allées et les venues des courtisans et des gens de service, les messes entendues dans le lit et les derniers repas du mourant ; tout cela, dans son abandon, égale l’art le plus consommé. […] Que de fois n’ai-je pas entendu des puristes, ou qui croyaient l’être, triompher des fautes de grammaire dans un auteur !

2193. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « I »

.) ; il était profondément religieux, mais toute théologie lui était antipathique au plus haut degré, il lui fallait voir de ses yeux le Christ crucifié et entendre de ses oreilles le soupir poussé sur Golgotha (Bayr. […] Par contre, il enseigne : « Vérité, réalité, sensualité, sont trois termes identiques… il n’y a d’autre preuve de l’être que l’amour, que les sens. » Et Wagner nous dit : « Ce qui m’attira vers Feuerbach, ce fut que cet écrivain renie la philosophie et qu’il donne de la nature humaine une explication dans laquelle je crus reconnaître l’homme artiste tel que je l’entendais moi-même » (III, 4). […] Seghers, le premier chef d’orchestre qui fit entendre une œuvre de Wagner à Paris.

2194. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1858 » pp. 225-262

Dans la visite des chambres, il entend un frôlement de robe, aperçoit un pied sous un lit, tire à lui un bas de soie noire, au bout duquel il y a une jolie femme, et encore un autre pied et une autre jolie femme. […] » Et il s’approchait de l’élève pour le jeter dehors, mais, voyant le bambin se mettre en état de défense, on l’entendait s’écrier : « Madame Cerceau ! […] Le boulevard pourrait entendre les voix qu’il fait parler sous la Lesché !

2195. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Sainte-Beuve » pp. 43-79

Il n’est pas un imitateur, du moins ce qu’on entend ordinairement par là en littérature. […] Pour être toujours prêt à faire le décompte des misères de position et des faiblesses de toute nature qui se mêlent à nos œuvres comme des pailles à l’acier, pour avoir été casuiste à ses heures et avoir entendu les formulaires de Port-Royal, Sainte-Beuve méritait-il pour cela d’être accablé, par des ours aux regrets, de cet immense pavé qu’on lui jette à la tête d’une faculté inouïe qui fut la gloire spéciale de Shakespeare, de Walter Scott et de Balzac ? […] … » Il faut avoir entendu cela !

2196. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Michelet » pp. 167-205

Nous avons entendu alors, il est vrai, passer eu se glissant le bruit mystérieux de saisie, risqué peut-être par la spéculation ; mais ce bruit n’est pas allé loin… Telle est l’histoire du livre de Michelet. […] En théologie, tous les deux donnent une singulière idée de leur science lorsqu’ils soutiennent hardiment que la Grâce, comme l’entend l’Église catholique, est exclusive de la Justice ; car c’est précisément l’idée contraire qui est la vraie. […] Michelet, qui ne croyait pas aux prophètes comme nous les entendons, nous qui voyons un Dieu personnel derrière eux ; Michelet, le pur rationaliste, a eu l’impertinence de prophétiser comme un Mystique.

2197. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIII. »

Le palmier de Délos s’est doucement incliné tout à coup, et le cygne fait entendre un mélodieux accent dans les airs. […] Et vous, faites silence pour entendre le chant sur Apollon ! […] Et Thétis, la malheureuse mère, ne pleure plus Achille sitôt qu’elle a entendu le péan : ô triomphe !

2198. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Académie française — Réception de M. Émile Augier » pp. 317-321

Il y avait encore une autre raison excellente et plus particulière : on avait à entendre l’éloge de M. de Salvandy prononcé par M. 

2199. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre III. De la comédie grecque » pp. 113-119

Les effets graduels et nuancés ne conviennent guère aux mœurs démocratiques ; et comme c’était toujours du peuple qu’il fallait se faire entendre et se faire applaudir, on se livrait, pour l’amuser, aux contrastes saillants qui frappent aisément tous les hommes.

2200. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre premier. Que personne à l’avance ne redoute assez le malheur. »

Ce mot terrible, le malheur, s’entend dans les premiers jours de la jeunesse, sans que la pensée le comprenne.

2201. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre premier. Du rapport des idées et des mots »

Maintenant il faut travailler pour les autres, penser pour eux, avec les phrases, les mots qu’ils entendent.

2202. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Saint-Georges de Bouhélier (1876-1947) »

Mais j’entends bien que, loin de vouloir imposer une règle et des formules aux individualités, votre ambition est simplement de les susciter, de les éclaircir, de leur donner comme une atmosphère de sympathie et d’enthousiasme qui bat leur pleine floraison.

2203. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XIII. Beau trio » pp. 164-169

J’entends bien qu’à une certaine altitude de succès on ne cherche un peu de vérité que chez les plus jeunes.

2204. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 92-99

On croit entendre Démosthene parler le langage de Platon.

2205. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Art français » pp. 243-257

Il y avait déjà quelque temps qu’il entendait, sans y prendre garde, crier du papier derrière lui, quand il se retourna.

2206. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Louise Labbé, et Clémence de Bourges. » pp. 157-164

Le maître des dieux veut entendre les deux parties intéressées.

2207. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre VII. Suite du précédent. — Paul et Virginie. »

De même, quand l’écho me fait entendre les airs que tu joues sur ta flûte, j’en répète les paroles au fond de ce vallon… …………………………………………………………………………………………… Je prie Dieu tous les jours pour ma mère, pour la tienne, pour toi, pour nos pauvres serviteurs ; mais quand je prononce ton nom, il me semble que ma dévotion augmente.

2208. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre III. Partie historique de la Poésie descriptive chez les Modernes. »

La nature cessa de se faire entendre par l’organe mensonger des idoles ; on connut ses fins, on sut qu’elle avait été faite premièrement pour Dieu, et ensuite pour l’homme.

2209. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Carle Vanloo » pp. 183-186

Sans s’entendre beaucoup en proportions, on est choqué du peu de distance de la hanche au-dessous du bras ; mais je ne sais pourquoi je dis de sa hanche, car elle n’a point de hanche.

2210. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Restout » pp. 187-190

La couleur du tout est faible ; mais les reflets de lumière sont bien entendus.

2211. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 26, que les jugemens du public l’emportent à la fin sur les jugemens des gens du métier » pp. 375-381

Il seroit inutile d’expliquer au lecteur, qu’ici comme dans toute cette dissertation, le mot de mauvais s’entend rélativement.

2212. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 27, qu’on doit plus d’égard aux jugemens des peintres qu’à ceux des poëtes. De l’art de reconnoître la main des peintres » pp. 382-388

Les hommes qui admirent plus volontiers qu’ils n’approuvent, écoutent avec soumission, et ils repetent avec confiance tous les jugemens d’une personne qui montre une connoissance distincte de plusieurs choses où ils n’entendent rien.

2213. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre I. De la sagesse philosophique que l’on a attribuée à Homère » pp. 252-257

Admettons cependant qu’Homère a été forcé de les choisir ainsi pour se faire mieux entendre du vulgaire, alors si farouche et si sauvage ; cependant le bonheur même de ces comparaisons, leur mérite incomparable, n’indique pas certainement un esprit adouci et humanisé par la philosophie.

2214. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

Mais comme l’intérêt est passé des Empereurs, des Rois de l’antiquité, aux marquis des xviie et xviiie  siècles, puis des marquis aux gros bourgeois du xixe  siècle, ils entendent qu’on s’arrête à ce personnage noble de l’heure présente, et qu’on ne descende pas plus bas. […] Il se défend un moment de le dire, se plaignant d’avoir un gilet qui l’a laissée à découvert, puis il avoue que c’est une chaîne d’or, au bout de laquelle, il y a un médaillon contenant des cheveux de son père, et je l’entends à la fin du dîner discuter avec Daudet, et soutenir que l’homme de maintenant vaut mieux que l’homme d’il y a deux cents ans. […] il fait bon être Scandinave… Si la pièce était d’un Parisien… Oui, oui, c’est entendu, du dramatique bourgeois qui n’est pas mal… mais de l’esprit à l’instar de l’esprit français, fabriqué sous le pôle arctique… et un langage parlé, quand il s’élève un peu, toujours fait avec des mots livresques. […] Et Montesquiou est très intéressant à entendre développer la façon de peindre de Whistler, auquel il a donné dix-sept séances, pendant un mois de séjour à Londres. […] Là-dessus je lui dis : « Pensez-vous que dans le siècle prochain, il y aura peut-être des appareils pour voir tout ce qui se passe derrière ces murs, et y entendre tout ce qui s’y dit. » Et en effet ce sera peut-être… Le miracle de l’instantané est un miracle tout aussi étonnant que pourraient être ceux-ci.

2215. (1920) Action, n° 2, mars 1920

Le prince des Génies ne peut pas l’entendre sans un frisson. […] Plus vous l’entendez braire, plus vous lui soupirez, avec ravissement : « Ô mon amour, tu es le rossignol que j’attendais ! […] Et l’on entend l’alouette des caresses heureuses chanter, comme une source qui déborde, l’allégresse d’un cœur plein de larmes bénies. […] Le gorille de l’instinct s’entend avec ses frères glabres, les primates humains, pour souiller et meurtrir l’élite sublime de la beauté. […] Je l’entends prononcer : « Dâdâ !

2216. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIe entretien. Littérature latine. Horace (1re partie) » pp. 337-410

Cicéron, dont nous venons de vous entretenir, avait vu naître Horace ; Horace avait vu naître et avait entendu chanter Virgile ; Virgile, Horace, Cicéron ne forment qu’un seul groupe qui semble se tenir par la main. […] Toute la jeunesse aristocratique de Rome y passait quelques années, occupée à entendre les cours de philosophie, de poésie, d’éloquence, de la bouche des plus célèbres pédagogues. […] Si jeune encore et si loin de la grondeuse vieillesse, ne dédaigne pas les danses et les amours ; montre-toi sans honte au champ de Mars ou dans ces promenades publiques où l’on entend, aux heures convenues, les doux chuchotements des mystérieux entretiens ; épie cet éclat de rire folâtre qui trahit l’asile où la jeune fille s’est cachée dans ses jeux, et ravis-lui, après une feinte lutte, son bracelet ou son anneau. » XXII Tout portait l’âme d’Horace, en ce temps-là, à la sérénité, à l’insouciance des affaires publiques et aux plaisirs de la ville ou des champs. […] Écoutez Voltaire ; vous croiriez entendre Horace encore.

2217. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CIXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (1re partie) » pp. 5-79

Herzan va s’entendre avec Calcaquin pour le sonder avant de lui porter les voix du parti autrichien ; il le trouve insuffisant, obstiné, quoique honnête. L’archevêque de Bologne s’offre au choix, il le mérite par ses vertus ; mais il a déserté le parti Mattei dans le commencement, ce parti ne le lui pardonne pas et lui refuse son concours par vengeance ; de longs jours s’écoulent, on désespère de s’entendre. […] En effet, celui qui écrit ces pages peut affirmer qu’aux funérailles du Pape défunt, il entendit les spectateurs parler des cardinaux assis sur les bancs et dire ces mots : “Quel dommage que ce conclave soit celui qui va donner un successeur à Pie VI ! […] Consalvi crut nécessaire de lui suggérer que, pour ne pas les augmenter et même pour les diminuer autant que possible, non-seulement il était indispensable de conserver le secret le plus absolu jusqu’à ce que la chose fût ébruitée par les adversaires, mais encore qu’à l’instant où ils la soumettraient aux intéressés, lui, cardinal Braschi, pour témoigner une grande modération et une parfaite indifférence, devait répondre que, ses relations particulières avec le cardinal Chiaramonti pouvant faire arguer qu’en le patronnant auprès de ceux de son parti il cherchait plutôt à satisfaire son amitié et ses goûts qu’à procurer le bien de tous, il entendait renoncer en une certaine façon à l’honneur de chef de parti.

2218. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIIe entretien. Littérature américaine. Une page unique d’histoire naturelle, par Audubon (1re partie) » pp. 81-159

C’est que cette pensée de prendre position contre les États-Unis au Mexique ne devait pas être exclusivement française, mais européenne ; il fallait se consulter, se concerter, s’entendre franchement avant d’agir ; on ne l’a pas fait. […] Bientôt un long murmure se fit entendre. […] Un bruit se fit entendre ; mes paupières s’ouvrirent ; je vis deux jeunes gens, d’une haute taille et d’une grande vigueur, entrer dans la hutte ; ils apportaient un cerf qu’ils venaient de tuer. […] L’Indien s’était levé ; le tomahawk que sa main brandissait allait tomber sur l’un des assassins, et j’allais presser la double détente de mon fusil, quand on entendit frapper à la porte.

2219. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIIe entretien. Fior d’Aliza » pp. 177-256

On le voyait tous les matins, après avoir entendu la messe, gravir seul, sans chapeau, des portefeuilles sous le bras, des filets à prendre des insectes à la main, les pentes escarpées des ruelles d’Aix, qui mènent aux plus hauts plateaux des montagnes, tout en murmurant à demi-voix les versets de son bréviaire. […] Il avait beaucoup d’amitié pour moi, parce que j’aimais à aller, à mes heures perdues, visiter son herbier et entendre les explications scientifiques et providentielles sur la vertu des plantes et sur les mœurs des insectes, toutes attestant, suivant lui, la grandeur et les desseins de la Providence. […] Le cavalier servant et l’époux, selon l’usage aussi du pays, s’entendaient pour adorer, l’un d’un culte conjugal, l’autre d’un culte de pure assiduité, l’idole commune d’attachements différents, mais aussi ardents l’un que l’autre. […] Ton nom résonne encore à l’homme qui l’entend, Comme un glaive tombé des mains du combattant ; À ce bruit impuissant, la terre tremble encore, Et tout cœur généreux te regrette et t’adore.

2220. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juillet 1885. »

Interprétation par Baudelaire30 bk M’est-il permis de raconter, de traduire avec des paroles la traduction inévitable que mon imagination fit de ce morceau, lorsque je l’entendis la première fois, les yeux fermés, et que je me sentis pour ainsi dire enlevé de terre ? […] C’est précisément à ce titre que nous regrettons de le voir représenter aujourd’hui dans une salle si défectueuse, où il n’est possible de bien entendre de nulle part, l’acoustique laissant fort à désirer ; où beaucoup de places sont mauvaises ; où les premières sont spécialement affectées aux exhibitions de toilettes et aux conversations mondaines ; où l’orchestre, enfin, manque d’ensemble… et d’un chef pour le conduire. […] Quand au-dessous de lui, au milieu de l’humanité il entend le cri de détresse de cette femme, il descend donc de sa solitude délicieuse, mais déserte. […] Qui pourrait entendre cette œuvre musicale admirable sans être, persuadé de ce que la musique de l’Ouverture enferme, déjà, le drame entier ?

2221. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Charles Dickens »

Quand dans Bleak House, l’avoué qui figure dans ce récit, regarde l’heure qu’il est à diverses horloges, en se dirigeant vers sa maison où l’attend une femme qui va l’assassiner, Dickens discute sur les avertissements qu’auraient dû donner au promeneur ces cadrans taciturnes et leur fait tenir les discours que, pour son malheur, l’homme de loi ne put entendre. […] Quelque terne que soit le signalement qu’il donne, quelque bizarre et hors nature le type qu’il entend représenter, d’une phrase, d’un monologue, d’un récit rapporté et interjeté, la nature morale particulière qu’il veut montrer apparaît dans tous les détails de sa configuration individuelle. […] D’autre part, pour que l’image soit une caricature, il faut qu’elle éveille par elle-même le sentiment de dérision ou d’aversion que l’artiste désire susciter, souvent à propos de gens qui ne sont ni ridicules, ni haïssables ; il faut donc que la représentation de ces gens qui doit être véridique, soit en même temps déformée, de telle sorte qu’elle force par elle-même à formuler le jugement que l’artiste entend suggérer. […] L’enfant qui était alors chétif et faible, qui avait des goûts studieux, un peu pédants même, bien rares parmi ses compatriotes, se pénétra de tous ces livres ; il passa dans sa famille pour un petit prodige et, comme il était habile à retenir les chansons de café-concert qu’on le menait entendre, on l’exhibait souvent aux voisins, juché sur une table et faisant montre de ses talents.

2222. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre premier. Le Moyen Âge (842-1498) » pp. 1-39

Entendez par là qu’en aucun temps l’écrivain n’a moins mis de sa personne dans son œuvre. […] Les philologues nous enseignent que la langue de Joinville et de Guillaume de Lorris, — la langue de la Vie de saint Louis et de la première partie du Roman de la Rose, — moins riche assurément, moins colorée, moins souple, moins subtile et moins raffinée que la nôtre, était cependant, en un certain sens, plus voisine de sa perfection, comme étant plus logique ; et ils entendent par là plus conforme aux lois de l’évolution organique des langues. […] Il est d’abord comme entendu que l’on n’écrira pas en français pour écrire, mais pour agir ; et que cette action aura pour objet la propagation des idées générales. […] Le Roman de la Rose. — On en saisit mieux le rapport avec les genres qui les ont précédées, et entre elles. — En observant qu’elles sont toutes, ou à peu près, du même temps, on s’aperçoit que l’« allégorie » caractérise toute une « époque » de la littérature du Moyen Âge ; — et on est conduit à chercher les raisons de ce goût pour l’allégorie. — Il s’en trouve de sociales, comme le danger qu’on pouvait courir à « satiriser » ouvertement un plus puissant que soi ; — mais il y en a surtout de littéraires, qui se tirent — du peu d’étendue de l’observation « directe » de la réalité au Moyen Âge ; — du peu d’aptitude de la langue à exprimer les idées générales sans l’intermédiaire d’une personnification matérielle ; — et de la tendance des « beaux esprits » de tout temps à parler un langage qui ne soit pas entendu de tout le monde.

2223. (1868) Curiosités esthétiques « I. Salon de 1845 » pp. 1-76

Donc, quand nous disons que ce tableau est bien dessiné, nous ne voulons pas faire entendre qu’il est dessiné comme un Raphaël ; nous voulons dire qu’il est dessiné d’une manière impromptue et spirituelle ; que ce genre de dessin, qui a quelque analogie avec celui de tous les grands coloristes, de Rubens par exemple, rend bien, rend parfaitement le mouvement, la physionomie, le caractère insaisissable et tremblant de la nature, que le dessin de Raphaël ne rend jamais. — Nous ne connaissons, à Paris, que deux hommes qui dessinent aussi bien que M.  […] La couleur est d’une crudité terrible, impitoyable, téméraire même, si l’auteur était un homme moins fort ; mais… elle est distinguée, mérite si couru par MM. de l’école d’Ingres. — Il y a des alliances de tons heureuses ; il se peut que l’auteur devienne plus tard un franc coloriste. — Autre qualité énorme et qui fait les hommes, les vrais hommes, cette peinture a la foi — elle a la foi de sa beauté, — c’est de la peinture absolue, convaincue, qui crie : je veux, je veux être belle, et belle comme je l’entends, et je sais que je ne manquerai pas de gens à qui plaire. […] Nous voudrions voir déployer ce même talent au profit d’idées plus modernes, — disons mieux, au profit d’une nouvelle manière de voir et d’entendre les arts — nous ne voulons pas parler ici du choix des sujets ; en ceci les artistes ne sont pas toujours libres, — mais de la manière de les comprendre et de les dessiner. […] — J’entends par là envoyer à l’imprimeur du livret des légendes pour le public du dimanche.

2224. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire littéraire de la France. Ouvrage commencé par les Bénédictins et continué par des membres de l’Institut. (Tome XII, 1853.) » pp. 273-290

À mesure qu’on avancera dans le monde moderne, il deviendra pourtant de plus en plus difficile aux rédacteurs qui seront en exercice alors de se contenir à l’exposé des faits à l’analyse des ouvrages, sans y mêler quelque chose des idées et des impressions qui sortent presque inévitablement : mais jusqu’à présent l’esprit essentiel et primitif de l’œuvre, convenablement entendu et dans une juste extension, a été fidèlement observé. […] … » Nos fabulistes épiques du Moyen Âge, dont quelques-uns sans doute allaient en récitant, comme les rapsodes, par les villages et les bourgs, n’ont jamais de ces mouvements touchants ou élevés ; mais ils entendent la fable en elle-même et la développent souvent avec une grâce, une invention et une fertilité de détail, avec un riant d’expression qui serait encore aujourd’hui d’un vif agrément s’ils ne tombaient pas tout aussitôt dans la prolixité.

2225. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Nouveaux voyages en zigzag, par Töpffer. (1853.) » pp. 413-430

C’est là qu’en accostant, dit-il, le paysan qui descend la chaussée, ou en s’asseyant le soir au foyer des chaumières, on a le charme encore d’entendre le français de souche, le français vieilli, mais nerveux, souple, libre et parlé avec une antique et franche netteté par des hommes aussi simples de mœurs que sains de cœur et sensés d’esprit ; … — en telle sorte que la parole n’est plus guère que du sens, mais franc, natif, et comme transparent d’ingénuité. […] Et ne croyez pas que ce dernier mot soit une épigramme ; car tout aussitôt, dans une page très belle et pleine d’onction, tout en réservant son principe de foi, il va rendre hommage à ce trait d’ingénue et d’absolue soumission qui est obtenue plus facilement par la religion catholique et qui procède du dogme établi de l’autorité même ; il y reconnaît un vrai signe de l’esprit religieux sincère : Et en effet, dit-il, être chrétien, être vrai disciple de Jésus-Christ, c’est bien moins, à l’en croire lui-même, admettre ou ne pas admettre telle doctrine théologique, entendre dans tel ou tel sens un dogme ou un passage, que ce n’est assujettir son âme tout entière, ignorante ou docte, intelligente ou simple, à la parole d’en haut, pas toujours comprise, mais toujours révérée.

2226. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres de François Arago. Tome I, 1854. » pp. 1-18

Pour moi, qui n’ai pas même l’honneur de comprendre et de lire dans leur langue les mémoires de haute science où il s’est montré inventeur, ces considérations sur les profondes et fines parties de l’optique et du magnétisme où il a gravé son nom ; qui n’ai eu que le plaisir de l’entendre quelquefois, soit dans ses cours à l’usage des profanes, soit dans les séances publiques de l’Académie, je ne puis ici que m’approcher respectueusement de lui par un aspect ouvert à tous ; je ne puis que l’aborder, si ce n’est point abuser du mot, par son côté littéraire. […] La première lettre qu’il reçut de Paris était d’un homme déjà célèbre lui-même par ses voyages, par des fatigues de tout genre et des périls encourus pour la science : M. de Humboldt, sur ce qu’il avait entendu dire de son mérite et de ses malheurs, lui offrait son amitié.

2227. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — III. (Fin.) » pp. 162-179

Le président Jeannin, et ses collègues Buzenval et Bussy, mais lui plus qu’aucun, avaient charge d’avoir l’œil à cette grave affaire, de s’entendre avec l’ambassadeur du roi d’Angleterre Jacques Ier, et de ressaisir autant qu’il se pourrait l’arbitrage et la conduite d’une négociation si obliquement entamée. […] Le roi lui demanda à titre de service de se charger d’écrire l’histoire de son règne, l’assurant « qu’il entendait laisser la vérité en sa franchise, et à l’auteur la liberté entière de l’écrire sans fard ni artifice, et sans lui attribuer, à lui, ce qui était dû à la seule providence de Dieu ou à la vertu d’autrui ».

2228. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — I. » pp. 180-197

Ces vérités ne sont déjà plus nouvelles : combien de fois ne les avons-nous pas entendues ! […] Discussion peut-être est beaucoup dire ; il ne faut pas l’entendre du moins dans un sens historique ou philosophique ; il est évident, sur une foule de points qui y prêteraient, que M. 

2229. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — III » pp. 476-491

Quant à l’effet moral que lui fait le manège de l’homme vu de près et son inquiétude de succès, il faut l’entendre elle-même : J’ai vu la correspondance de Voltaire (dans l’édition de Kehl, qui paraissait alors), et comme je lis moralistement, elle me fait beaucoup de plaisir. […] N’allez pas me demander de définir l’atticisme ; l’aticisme chez un peuple, et au moment heureux de sa société ou de sa littérature, est une qualité légère qui ne tient pas moins à ceux qui la sentent qu’à celui qui parle ou qui écrit ; je me contenterai de dire que c’est une propriété dans les termes et un naturel dans le tour, une simplicité et netteté, une aisance et familiarité entre gens qui s’entendent sans appuyer trop, et qui sont tous de la maison.

2230. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire de la littérature française à l’étranger pendant le xviiie  siècle, par M. A. Sayous » pp. 130-145

La plupart des hommes croiraient ne savoir pas vivre s’ils les entretenaient naturellement et d’autre chose que d’elles-mêmes ; il leur paraît que de ne pas dire à une femme, du moins de temps en temps, qu’elle est belle et qu’elle a de l’esprit, ce serait lui faire entendre que la beauté et l’esprit lui manquent. […] Nous sommes très disposés à les recevoir, bien entendu que ce sont des excuses et non pas des commandements », Tout cela, le rôle étant donné, est fort bien plaidé.

2231. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’Impératrice Catherine II. Écrits par elle-même. »

Dans cette pleurésie qu’elle a et qu’on traite tout de travers (car l’absurdité autour d’elle éclate de toutes parts et sous toutes les formes), elle a près de son lit des dames placées par l’Impératrice, et elle entend d’elles, à leur insu, et devine beaucoup de choses qu’elle a intérêt à connaître : « Je m’étais accoutumée, dit-elle, pendant ma maladie, d’être les yeux fermés ; on me croyait endormie, et alors la comtesse Roumianzoff et les femmes disaient entre elles ce qu’elles avaient sur le cœur, et par là j’apprenais quantité de choses. » Elle sait qu’avant tout, à ses débuts, il faut plaire, — plaire à l’Impératrice d’abord, personne faible, crédule, pleine de préventions et de petitesses ; plaire à la nation aussi, et paraître soi-même en être éprise. […] Je ne me souviens pas de ma vie d’avoir entendu autant de louanges de tout le monde que ce jour-là : on me disait belle comme le jour et d’un éclat singulier.

2232. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Les Saints Évangiles, traduction par Le Maistre de Saci. Paris, Imprimerie Impériale, 1862 »

Le premier des Évangiles est aussi le plus naïf, le plus naturel, si l’on peut dire, celui qui nous rend le plus abondamment les discours de Jésus, comme le pouvait faire un témoin qui les avait entendus, qui les avait recueillis à la source, et qui s’est attaché à en conserver le caractère populaire, innocent et bienfaisant. […] sont-ce même des simples d’esprit, comme on l’entend quelquefois par abus ?

2233. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Poésies, par Charles Monselet »

Il faut bien aussi que je fasse mon métier de critique grave, d’écrivain de grand journal, et que je ne donne pas raison en tout, que je ne paraisse pas rendre les armes à mon auteur d’aujourd’hui, à ce « premier d’entre les petits journalistes », ainsi que je l’ai entendu qualifier, et qui sans cela pourrait bien se rire de nous. […] Monselet (car ici je l’appellerai monsieur), a donc voulu réhabiliter Fréron ; il n’est pas le premier qui l’ait tenté ; je me rappelle, il y a bien des années, avoir entendu là-dessus, à l’Athénée, une leçon de notre ami Jules Janin qui fit précisément la même tentative.

2234. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite.) »

On se dit en lisant ces couplets : « J’ai déjà entendu cela quelque part. » Ils reviennent pourtant ici avec je ne sais quel accent nouveau et touchant, personnel à l’homme. — Et s’asseyant au bord du torrent, s’absorbant aux bruits vagues, uniformes et profonds, qui berçaient sa pensée et qui lui en renvoyaient comme l’écho, il s’écriait encore : « Va, coule dans ton lit de pierres vives, précipite-toi dans ta fougue indomptée, enfant des neiges et de l’orage ! […] Il avait fait depuis longtemps ce vœu d’imagination qu’il lui semblait réaliser en ce moment : Je veux aller un jour sur un faîte sublime, Dans quelque vieux couvent penché sur un abîme, Où je n’entendrai plus aucun bruit des vivants ; Sur quelque Sinaï, sur un Horeb en flamme, Où l’Éternel descend, pour se montrer à l’âme, Vêtu de la foudre et des vents !

2235. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres choisies de Charles Loyson, publiées par M. Émile Grimaud »

J’entends… Ma fin prochaine en sera moins amère ; Mes amis, il suffit : je suivrai vos conseils, Et je mourrai du moins dans les bras de ma mère. Le moment où Charles Loyson faisait entendre ce cri d’une sensibilité si vraie, ces accents d’une gravité attendrie, était précisément celui où Lamartine préparait ses premières Méditations, qui ne parurent que l’année suivante (1820).

2236. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. EDGAR QUINET.— Napoléon, poëme. — » pp. 307-326

La quantité de préludes que nous entendons, la riche matière poétique qu’on broie à l’envi sur ce sujet, au lieu de préparer l’œuvre finale, ne la rendent-ils pas plus difficile ? […] Antiquaire par son érudition allemande, poëte et philosophe par ses vues profondes et intimes sur l’histoire de l’humanité, familier avec les idées des Niebühr et des Gœrres, épris de l’imagination pittoresque de l’auteur de l’Itinéraire, il aborde la Grèce et l’interroge par tous les points, sur son antiquité, sur ses races, sur la nature de ses ruines, sur les vicissitudes de ses États, sur ses formes de végétation éternelle ; il saisit, il entend, il compose tous ces objets épars ; il les enchaîne et les anime dans un récit vivant, fidèle, expressif, philosophique ou lyrique par moments, selon qu’il s’élève aux plus hautes considérations de l’histoire des peuples, ou selon qu’il retombe sur lui-même et sur ses propres émotions ; c’est une œuvre d’art que ce récit de voyage : le sens historique et le sens des lieux y respirent et s’y aident d’un l’autre ; l’harmonie y règne ; le souffle du dieu Pan y domine ; l’interprétation du passé, depuis les époques cyclopéennes et homériques jusqu’à la féodalité latine, y est d’un merveilleux sentiment, et elle pénètre de toutes parts dans l’âme du lecteur, sinon toujours par voie claire et directe, du moins à la longue par mille sensations réelles et continues, comme il arriverait à la vue des ruines mêmes et sous l’influence du génie des lieux.

2237. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Jean-Baptiste Rousseau »

De brillant, de gracieux, de grotesque ou de terrible qu’il était au Moyen-Age et à la Renaissance, il était devenu froid, lourd et superficiel ; on le tourmentait comme une énigme, parce qu’on ne l’entendait plus à demi-mot. […] Le poëte a beau se démener, se commander l’enthousiasme, se provoquer au délire, il en est pour ses frais, et l’on rit de l’entendre, à la mort du prince de Conti, s’écrier dans le pindarisme de ses regrets : Peuples, dont la douleur aux larmes obstinée, De ce prince chéri déplore le trépas, Approchez, et voyez quelle est la destinée Des grandeurs d’ici-bas.

2238. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre X. De la littérature italienne et espagnole » pp. 228-255

L’art d’exciter la terreur et la pitié par le seul développement des passions du cœur, est un talent dont la philosophie réclame une grande part ; mais l’effet du merveilleux sur la crédulité est d’autant plus puissant, que rien de combiné ni de prévu ne prépare le dénouement, que la curiosité ne peut se satisfaire à l’avance par aucun genre de probabilité, et que tout est surprise dans les récits que l’on entend. […] Les opéras seuls sont suivis, parce que les opéras font entendre cette délicieuse musique, la gloire et le plaisir de l’Italie.

2239. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Conclusion. »

C’est dans la crise d’une révolution qu’on entend répéter sans cesse, que la pitié est un sentiment puérile, qui s’oppose à toute action nécessaire, à l’intérêt général, et qu’il faut la reléguer avec les affections efféminées, indignes des hommes d’état ou des chefs de parti ; c’est au contraire au milieu d’une révolution que la pitié, ce mouvement involontaire dans toute autre circonstance, devrait être une règle de conduite ; tous les liens qui retenaient sont déliés, l’intérêt de parti devient pour tous les hommes le but par excellence : ce but, étant censé renfermer et la véritable vertu et le seul bonheur général, prend momentanément la place de toute autre espèce de loi : hors dans un temps où la passion s’est mise dans le raisonnement, il n’y a qu’une sensation, c’est-à-dire, quelque chose qui est un peu de la nature de la passion même, qu’il soit possible de lui opposer avec succès ; lorsque la justice est reconnue, on peut se passer de pitié ; mais une révolution, quel que soit son but, suspend l’état social, et il faut remonter à la source de toutes les lois, dans un moment où ce qu’on appelle un pouvoir légal, est un nom qui n’a plus de sens. […] C’est bien là certainement l’une des causes de la pitié ; mais l’inconvénient de cette définition, comme de toutes, est de resserrer la pensée que faisait naître le mot qu’on a défini : il était revêtu des idées accessoires et des impressions particulières à chaque homme qui l’entendait, et vous restreignez sa signification par une analyse toujours incomplète quand un sentiment en est l’objet ; car un sentiment est un composé de sensations et de pensées que vous ne faites jamais comprendre qu’à l’aide de l’émotion et du jugement réunis.

2240. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre III. Inconvénients de la vie de salon. »

Tout à coup, au milieu d’une compagnie, on l’entend dire à la jeune orpheline qu’elle exhibe : « Paméla, faites Héloïse !  […] Enfermés dans leurs châteaux et leurs hôtels, ils n’y voient que les gens de leur monde, ils n’entendent que l’écho de leurs propres idées, ils n’imaginent rien au-delà ; deux cents personnes leur semblent le public  D’ailleurs, dans un salon, les vérités désagréables ne sont point admises, surtout quand elles sont personnelles, et une chimère y devient un dogme parce qu’elle y devient une convention.

2241. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre II. Rapports des fonctions des centres nerveux et des événements moraux » pp. 317-336

Pareillement, les yeux fermés et sans être prévenu, vous voyez un flamboiement, en même temps vous entendez un son, et enfin vous avez dans le bras la sensation d’un coup de bâton ; essayez l’expérience sur un ignorant ou sur un enfant ; il croira qu’on l’a frappé, que quelqu’un a sifflé, qu’une vive lumière est entrée dans la chambre ; et cependant les trois faits différents n’en sont qu’un seul, le passage d’un courant électrique. — Il a fallu faire l’acoustique pour montrer que l’événement qui éveille en nous, par nos nerfs tactiles, les sensations de vibration et de chatouillement, est le même qui, par nos nerfs acoustiques, éveille en nous les sensations de son. […] Tel est le livre que les philosophes tâchent d’entendre ; devant le barbouillage final de la première écriture, et devant les lacunes énormes de la seconde, ils s’arrêtent embarrassés, et chacun d’eux décide, non d’après les faits constatés, mais d’après les habitudes de son esprit et les besoins de son cœur. — Les savants proprement dits, les physiciens, les physiologistes, qui ont commencé le livre par le commencement, disent qu’il n’y a là qu’une langue, celle de l’écriture interlinéaire, et que l’autre se ramène à celle-ci ; supposition énorme, puisque les deux langues sont tout à fait différentes. — Les moralistes, les psychologues, les esprits religieux qui ont commencé le livre par la fin et sont pourtant forcés d’avouer que le gros de l’ouvrage est écrit dans un autre idiome, trouvent un mystère inexplicable dans cet assemblage de deux langues, et disent communément qu’il y a là deux livres juxtaposés et bout à bout.

2242. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre III. Théorie de la fable poétique »

Si enfin l’usage impérieux nous contraint de la mettre à part, nous en ferons une exclamation, un regret, un souhait de poëte ; elle prendra un tour éloquent, comique ou touchant ; elle perdra son apparence didactique, en devenant un mouvement de l’âme ; on entendra, en l’écoutant, la voix passionnée d’un homme ; elle sera couverte sous un sentiment, et la poésie la revendiquera en jetant sur elle une poignée de ses fleurs. — Il sera facile alors d’animer le récit qui la confirme. […] Votre serviteur Gille,          Cousin et gendre de Bertrand,          Singe du pape en son vivant,          Tout fraîchement en cette ville Arrive en trois bateaux exprès pour vous parler : Car il parle, on l’entend ; il sait danser, baller,          Faire des tours de toute sorte, Passer en des cerceaux, et le tout, pour six blancs.

2243. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre III. Trois ouvriers du classicisme »

Son rôle a donc été fort analogue à celui de Malherbe : en face de la strophe oratoire préparée par celui-ci, il a construit la période éloquente, et Boileau avait le droit d’écrire : « On peut dire que personne n’a jamais mieux su sa langue que lui, et n’a mieux entendu la propriété des mots et la juste mesure des périodes. » Et vraiment, quand on lit certaines pages de Balzac, dans le Socrate chrétien par exemple, on sent que la forme de Bossuet est trouvée. […] Il n’est pas cause des œuvres contemporaines de son œuvre : il est très peu cause (cause directe, bien entendu) des œuvres qui ont paru après son œuvre.

2244. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre I. La lutte philosophique »

Cependant il faut bien entendre que je n’établis pas là une transmission d’influences, mais seulement des affinités de nature. […] Helvétius, très honnête homme et très bienfaisant, réduisait toute la morale à l’intérêt bien entendu.

2245. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre III. Madame de Staël »

Elle entend, elle aime surtout ce qui est complexe, ce qui alimente la pensée, exerce l’intelligence en émouvant l’âme : le sentiment imprégné de philosophie. […] Son esprit se forme à entendre Raynal, Thomas, Grimm.

2246. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les deux Tartuffe. » pp. 338-363

Dans la scène de la déclaration du troisième acte, il cachait ses pieds sous la jupe de Mme Préville, lui serrait les doigts, lui pressait le genou, et cela avec des attouchements si impudents, qu’exaspérée elle lui dit un jour, de façon à être entendue d’une partie de l’orchestre : « Si nous n’étions pas en scène, quel soufflet je vous appliquerais !  […] « S’il vient à roter… », entendez : si cela lui arrive, par hasard… comme cela peut arriver à tout le monde… Du Tartuffe violemment caricaturé par Dorine, passons au Tartuffe pieusement et béatement dessiné par Orgon.

2247. (1914) Enquête : L’Académie française (Les Marges)

Vous entendez ce que je veux dire ? […] Quant à son influence sur la vie de la langue et sur les lettres, elle n’est ni bonne ni mauvaise, elle est nulle — à moins que vous n’entendiez par « les lettres » une petite coterie d’ardélions serviles et de fades convertis.

2248. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVI. Les derniers temps de la comédie italienne en France » pp. 311-338

je vois que vous l’entendez… COQUINIÈRE. […] Car, enfin que vous l’entendiez, quand on veut faire son coup, il faut être dans cette odeur de fortune et d’opulence.

2249. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre onzième. »

Par moralistes il faut entendre les écrivains, prosateurs ou poètes, qui traitent des mœurs, non parmi d’autres choses, mais à part, et comme sujet unique. […] Il s’agit seulement de s’entendre sur l’ordre auquel ces vérités appartiennent.

2250. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « La Religieuse de Toulouse, par M. Jules Janin. (2 vol. in-8º.) » pp. 103-120

Mais, chez les anciens aussi, il a ses antécédents et presque ses modèles ; il va les chercher, à ses instants de loisir, chez Apulée, chez Pétrone, chez Martial, et il a parlé d’eux tous avec le sentiment de quelqu’un qui les entend mieux que par la lettre et par le texte, qui en ressaisit l’essence et l’esprit, et qui est, à quelque degré, de leur descendance. […] Il semble qu’avec les idées qui percent dans sa conduite et dans quelques articles de ses Constitutions, elle eût pu bien mieux s’entendre avec Mme de Maintenon, avec la fondatrice de Saint-Cyr, et que si, née plus tard, elle s’était appuyée de ce côté, elle aurait trouvé un ordre d’idées plus en accord avec ses inclinations, sans aller se heurter contre l’écueil où elle a péri.

2251. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Qu’est-ce qu’un classique ? » pp. 38-55

Un vrai classique, comme j’aimerais à l’entendre définir, c’est un auteur qui a enrichi l’esprit humain, qui en a réellement augmenté le trésor, qui lui a fait faire un pas de plus, qui a découvert quelque vérité morale non équivoque, ou ressaisi quelque passion éternelle dans ce cœur où tout semblait connu et exploré ; qui a rendu sa pensée, son observation ou son invention, sous une forme n’importe laquelle, mais large et grande, fine et sensée, saine et belle en soi ; qui a parlé à tous dans un style à lui et qui se trouve aussi celui de tout le monde, dans un style nouveau sans néologisme, nouveau et antique, aisément contemporain de tous les âges. […] Les plus antiques des sages et des poètes, ceux qui ont mis la morale humaine en maximes et qui l’ont chantée sur un mode simple converseraient entre eux avec des paroles rares et suaves, et ne seraient pas étonnés, dès le premier mot, de s’entendre.

2252. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — III. (Suite et fin.) » pp. 47-63

Il exprima le désir d’entendre de sa bouche le récit détaillé et méthodique des campagnes d’Italie, d’Égypte et de toutes celles de l’Empire, en un mot « d’apprendre sous lui l’art de la guerre ». […] L’autre trait que Marmont aimait à citer au duc de Reichstadt, et que d’autres encore ont entendu de sa bouche, est plus remarquable.

2253. (1903) Zola pp. 3-31

Thérèse Raquin était un drame bourgeois, sombre et violent, sans nuances, dont j’ai entendu dire par une dame, à cette époque éloignée : « Ce serait bien ennuyeux, si ce n’était pas si triste. » Le don d’apitoyer par l’horreur se montrait déjà. […] Enfin, une manie particulièrement française était délicieusement chatouillée dans les romans de Zola, le goût d’entendre dire du mal de la France.

2254. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre III. Le Bovarysme des individus »

Il colle son oreille au ras du sol et il entend retentir les cris de la tribu ennemie. […] Et ces métamorphoses dépassent les limites du jeu ordinaire ; la feinte risque à tout moment de devenir réalité : il arrive que le hardi chasseur, à l’affût derrière un tronc d’arbre, soit pris de panique, à entendre le rugissement du tigre qui s’approche et qu’il s’enfuie en courant vers les genoux de sa bonne.

2255. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre II. Marche progressive de l’esprit humain » pp. 41-66

Au reste, je n’ai pas besoin d’expliquer qu’il ne s’agit point ici du système de la perfectibilité, tel qu’il a été entendu dans ces derniers temps ; car alors j’aurais à assigner les limites naturelles de cette perfectibilité, qui ne sont autres que les limites mêmes de la liberté de l’homme. […] Une voix inconnue se fit jadis entendre à un homme qui s’est appelé Homère ; et cette voix ensuite a retenti, pleine de mille doux charmes, parmi les générations humaines.

2256. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Hippolyte Babou »

Et quand je dis qu’il va plus loin, il faut entendre qu’il y saute, et avec un geste que la justice ne connaît pas. […] La science paraîtra peut-être un mot bien lourd à la légèreté ailée d’Hippolyte Babou ; mais, à défaut de science, la conscience — la conscience littéraire, bien entendu !

2257. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VIII : M. Cousin érudit et philologue »

Au moment où la douce figure de Mme de Longueville commence à se reformer sous les yeux du lecteur, il entend un fracas d’in-folio qui tombent ; c’est une dissertation qui arrive et efface la charmante image sous son appareil démonstratif. […] J’ai entendu des habitants de ces caves traiter de chimère l’histoire que font les philosophes et les artistes, et rejeter comme choses malsaines l’imagination passionnée de M. 

2258. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXII. »

Pour goûter l’inspiration, il faut entendre la voix et saisir du même coup le sens et l’harmonie. […] Avez-vous entendu bruire le tocsin de la bataille, lances contre lances, coursiers contre coursiers ?

2259. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires sur Voltaire. et sur ses ouvrages, par Longchamp et Wagnière, ses secrétaires. »

On n’arrive à ces détails clairsemés qu’à travers un texte hérissé d’interminables notes, par-delà onze préfaces, avis, avertissements d’auteur ou d’éditeur ; et on ne peut éviter, chemin faisant, d’entendre MM. 

2260. (1874) Premiers lundis. Tome I « Œuvres de Rabaut-Saint-Étienne. précédées d’une notice sur sa vie, par M. Collin de Plancy. »

Ses paroles, aigres et chagrines, respirent une méprisante ironie : « Je suis las, s’écria-t-il, durant le procès a du roi, je suis las de la portion de tyrannie que je suis contraint d’exercer, et je demande qu’on me fasse perdre les formes et la contenance des tyrans. » Son vœu fut entendu.

2261. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Gilbert Augustin-Thierry »

Oui, j’entends bien, voilà assez longtemps qu’on nous ressasse l’éternelle histoire de l’amour et de l’adultère, et celles de la jalousie, de la haine, de la cupidité, et de toutes les passions et de tous les vices individuels.

2262. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Donec eris felix… »

Il songe que, il y a vingt ans, un autre exilé faisait ainsi… Une voix mystérieuse, qu’il voudrait bien ne pas entendre, lui murmure à l’oreille : — Celui-là portait sous son front les Contemplations, la Légende des Siècles et les Misérables.

2263. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « En guise de préface »

* * * * * … Il est, pour le moins, deux façons d’entendre la critique des œuvres littéraires.

2264. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Dupont, Pierre (1821-1870) »

Le recueil de ses chansons représente tout un petit monde où l’homme fait entendre plus de soupirs que de cris de gaîté et où la nature, dont notre poète sent admirablement l’immortelle fraîcheur, semble avoir mission de consoler, d’apaiser, de dorloter le pauvre et l’abandonné.

2265. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Une petite revue ésotérique » pp. 111-116

Cet homme c’est le « Héros », c’est celui qui entend chanter l’âme intérieure des choses, qui nous mène au bord de l’infini et nous y laisse, quelques moments, plonger le regard.

2266. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVII. Sort des ennemis de Jésus. »

Il fut le premier triomphe de la révolution, la victoire du sentiment populaire, l’avènement des simples de cœur, l’inauguration du beau comme le peuple l’entend.

2267. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre III. Des moyens de trouver la formule générale d’une époque » pp. 121-124

Je crois, en un mot, qu’il importe de renverser les procédés dont je viens de parler : j’entends que l’historien de la littérature doit mettre les données de la sociologie et de la psychologie au service de l’histoire particulière qu’il élabore, et non pas faire le contraire pour le plus grand avantage peut-être de la philosophie, mais au détriment certain de la tâche qui lui incombe.

2268. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Introduction »

En adoptant la doctrine de révolution, nous ne la prendrons plus dans ce sens trop matérialiste dont Spencer se contente et qui ne laisse à la pensée que le rôle d’un appareil enregistreur ; mieux entendue, la doctrine de l’évolution doit faire à la pensée sa place légitime dans le développement des choses et, à plus forte raison, dans le développement des idées.

2269. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — II »

C’est dans ce sens qu’il faut entendre la remarque de Nietzsche, « les poètes savent toujours se consoler »19.

2270. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre II »

Par peuple, en linguistique, il faut entendre, sans distinction de classe, de caste, ou de couche, l’ensemble du public, tel que livré à lui-même et usant de la parole sans réflexion analytique.

2271. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « La course à la mort » pp. 214-219

Celui que ce livre nous confesse est atteint plus profondément que dans son intelligence ; il est malade de la volonté et de la sensibilité, il se sait vaguement frappé au centre de son être et s’entend à démêler dans la contemplation de sa ruine morale les plus secrets symptômes.

2272. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Clément Marot, et deux poëtes décriés, Sagon & La Huéterie. » pp. 105-113

S’il veult rien faire de nouveau, Qu’il œuvre hardiment en prose (J’entends s’il en sçait quelque chose) ; Car, en rime, ce n’est qu’un veau             Qu’on meine aux champs.

2273. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre IV. De quelques poèmes français et étrangers. »

Les muses parlent et entendent toutes les langues : que de choses ne pouvaient-elles pas lire sur ces tables !

2274. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 25, des personnages et des actions allegoriques, par rapport à la poësie » pp. 213-220

On remarquera que ce poëte fait entrer dans son ouvrage un petit nombre de personnages de cette espece, et je n’ai jamais entendu loüer Lucain d’en avoir fait un usage plus fréquent.

2275. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — IV. Les ailes dérobées »

Comme il descendait de cheval, il entendit un vieillard crier : « Qui veut, pour un jour de travail, gagner 100 mesures d’or ? 

2276. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Bathild Bouniol »

Il l’emporte aussi par ce côté sur la plupart des satiriques, qui se sont cantonnés, presque tous, dans quelques vices ou dans quelques travers déterminés, et qui n’entendent pas la guerre des masses.

2277. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — III »

Et, notamment, n’est-il pas lamentable qu’un ministre de l’Instruction publique en soit encore à ignorer ce qu’on entend philosophiquement par le moi et le culte du moi ?

2278. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quatorzième. »

On parlait de mouches étouffées dans l’huile. de crapauds crevés avec de la poudre, de bagatelles, de mécaniques, occupations dont il sortait par des gaietés déplacées ou des exercices physiques de peu de dignité163. » Saint-Simon lui reproche en outre le trop continuel amusement de cire fondue, ce qui s’entend des longues lettres, alors qu’il fallait agir. […] « J’espère, lui écrit le duc de Bourgogne, par la grâce de Dieu, non pas telle que les jansénistes l’entendent, mais telle que la connaît l’Eglise catholique, que je ne tomberai jamais dans les pièges qu’ils voudront me dresser. » Le sage Mentor a oublié le conseil qu’il donnait au roi Idoménée de ne point se mêler des affaires de religion, et d’en laisser les débats aux prêtres des dieux165. […] Richelieu s’y entendait bien mieux, lui qui fondait ce grand corps pour discipliner la langue et la fixer ; et Bossuet, lui qui voulait que l’Académie française défendît cette langue contre la mobilité des caprices populaires. […] Ce Télémaque, pour lequel « il ne fallait jamais rien trouver d’impossible, et dont les moindres retardements irritaient le naturel ardent172 », c’est le duc de Bourgogne, « s’emportant, dit Saint-Simon, contre la pluie, quand elle s’opposait à ce qu’il voulait faire173. » A la vérité, le moment de colère passé, la raison ressaisissait le duc de Bourgogne et surnageait à tout ; il sentait ses fautes, et il les avouait, « et quelquefois avec tant de dépit qu’il rappelait la fureur. » Ainsi fait Télémaque lorsqu’au sortir de ses emportements, « retiré dans sa tente, aux prises avec lui-même, on l’entend rugir comme un lion furieux. » Cet orgueil, cette hauteur inexprimable, que note Saint-Simon dans le duc de Bourgogne c’est l’orgueil, c’est la hauteur où Pénélope avait nourri Télémaque, malgré Mentor. […] Calypso s’entend moins à aimer que Didon abandonnée, et le fils d’Ulysse est plus tiède encore que le fils d’Anchise.

2279. (1925) La fin de l’art

Beethoven aimait à composer ses symphonies au milieu de la nature dont il percevait encore le rythme quand il n’entendait plus ses bruits. […] Il faut entendre Apollinaire, homme intelligent, trop intelligent, vous dire : « Dans peu, vous vous y habituerez ; l’œil reconstruira. […] C’est au point qu’on a pu nous faire entendre, sans nous lasser, des opéras russes chantés en russe. […] Car cela semble bien dans cette vue qu’elle gave la jeunesse et il semble bien aussi que cette vue ne soit plus absolument compatible avec le parti que cette jeunesse entend tirer de la vie. […] J’entends un vrai Boileau, non un insulteur sans solidité, un homme qui saurait motiver ses jugements.

2280. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre sixième. Le roman psychologique et sociologique. »

Le roman embrasse la vie en son entier, la vie psychologique s’entend, laquelle se déroule avec plus ou moins de rapidité ; — il suit le développement d’un caractère, l’analyse, systématise les faits pour les ramener toujours à un fait central ; il représente la vie comme une gravitation autour d’actes et de sentiments essentiels, comme un système plus ou moins semblable aux systèmes astronomiques. […] Cette scène de violence se fond aussitôt dans une scène de coquetterie, de séduction par le regard, par l’attitude, par la caresse de la voix, enfin par la caresse même du langage (elle lui parle basque) ; « notre langue, monsieur, est si belle que, lorsque nous l’entendons en pays étranger, cela nous fait tressaillir. » — « Elle mentait, monsieur, elle a toujours menti. […] Les étoiles sont comme des lampions d’illuminations, on dirait qu’elles fument et que le vent les éteint, je suis ahurie, comme si j’avais des chevaux qui me soufflent dans l’oreille ; quoique ce soit la nuit, j’entends des orgues de Barbarie et les mécaniques des filatures, est-ce que je sais, moi ? […] A midi mille papillons blancs s’y réfugiaient, et c’était un spectacle divin de voir là tourbillonner on flocons dans l’ombre cette neige vivante de l’été… Le soir, une vapeur se dégageait du jardin et l’enveloppait ; l’odeur si enivrante des chèvrefeuilles et des liserons en sortait de toute part comme un poison exquis et subtil ; on entendait les derniers appels des grimpereaux et des bergeronnettes s’assoupissant sous les branchages… C’était un jardin fermé, mais une nature acre, riche, voluptueuse et odorante . […]  » Il tressaillit et s’éloigna un peu…   » Un petit bruit sec se fit entendre. » 59.

2281. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « [Béranger] » pp. 333-338

Ses derniers chants, non encore publiés et dont quelques amis ont entendu dès longtemps la confidence, sont, nous dit-on, dans le genre des Souvenirs du peuple : On parlera de sa gloire Sous le chaume bien longtemps.

2282. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mort de M. Vinet »

Toutes ses qualités précises et fines ont passé dans ses écrits, mais il restera de lui une plus haute encore et plus chère idée à ceux qui l’ont entendu.

2283. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de Dampmartin, Maréchal de camp »

Mais M. de Dampmartin, par un scrupule assez rare et même louable en son principe, s’est interdit une si vaste perspective ; il n’a voulu parler que de ce qu’il a vu, et s’est imposé silence sur ce qu’il n’a fait qu’entendre des autres ; l’autorité des témoins les plus respectables n’a pu, nous dit-il, le faire déroger à cette loi.

2284. (1874) Premiers lundis. Tome I « Bonaparte et les Grecs, par Madame Louise SW.-Belloc. »

Car ce n’est pas dans notre acception politique qu’il lui est donné jusqu’à ce jour d’entendre la liberté ; et pour celle que Napoléon lui réservait, l’Italie et la Pologne sont là pour le dire.

2285. (1874) Premiers lundis. Tome II « Dupin Aîné. Réception à l’Académie française »

Aussi nous avons été surpris, un instant après, de l’entendre réprouver, par une phrase bien inutile, je ne sais quel genre déréglé sur le compte duquel MM. 

2286. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Introduction. Origines de la littérature française — 4. Physionomie générale du moyen âge. »

Pauvre et triste temps que cette fin du xe  siècle où se fait entendre à nous la voix grêle qui dit la vie et la mort de saint Léger.

2287. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les brimades. » pp. 208-214

Nous ne valons guère, c’est entendu ; nous sommes pleins de vices et vides d’énergie.

2288. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — J — Jammes, Francis (1868-1938) »

Souvent, parmi les jolis motifs de ses poèmes, j’ai pris plaisir à entendre tinter L’harmonieux grelot du jeune agneau qui bêle.

2289. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rollinat, Maurice (1846-1903) »

» Il entend « Satan cogner dans son cœur ».

2290. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre V. Un livre de Renan et un livre sur Renan » pp. 53-59

Séailles marque par la répétition invariée de cette étiquette qu’il entend faire figure originale d’historien.

2291. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XII. Mort d’Edmond de Goncourt » pp. 157-163

Par une opposition curieuse, des poètes nouveaux étaient venus à lui en ces dernières années, attirés par l’aristocratie de son talent : mais il va sans dire que le vieillard ne les entendait pas.

2292. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Sophocle, et Euripide. » pp. 12-19

On n’entendoit pas assez bien le plan des pièces.

2293. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Deshays  » pp. 134-138

La tête en est belle ; mais on se rappelle le même sujet peint dans un des tableaux placés autour de la nef de Notre-Dame ; et l’on sent tout à coup que le peintre de ce dernier a mieux entendu l’effet des ténèbres sur la lumière artificielle.

2294. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Hallé » pp. 71-73

Ils sont si mauvais que c’est presque un des caractères d’un bon esprit que de ne pas les entendre.

2295. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 11, les romains partageoient souvent la déclamation théatrale entre deux acteurs, dont l’un prononçoit tandis que l’autre faisoit des gestes » pp. 174-184

Lucien dans l’écrit qu’il a composé sur l’art de la danse, tel que l’avoient les anciens, dit en parlant des personnages tragiques, qu’on leur entend prononcer de temps en temps quelques vers iambes, et qu’en les prononçant ils n’ont attention qu’à bien faire sortir leur voix, car les artisans ou les poëtes qui ont mis les pieces au théatre ont pourvû au reste.

2296. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — I »

Entendez bien que je ne le félicite pas d’avoir négligé de faire fortune ou d’avoir peu insisté pour être sénateur.

2297. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « George Farcy »

L’impression qui résulte de ces vers, quand on les a lus ou entendus, est celle d’un stoïcisme triste et résigné qui traverse noblement la vie en contenant une larme. […] Les élans généreux ne lui manquaient jamais ; il était toujours capable de vertueuses colères ; mais sa sagesse désespérait moins promptement des hommes ; elle entendait davantage les tempéraments et entrait plus avant dans les raisons. […] Voici quelques vers commencés que nous trouvons dans ses papiers : Thérèse, que les Dieux firent en vain si belle, Vous que vos seuls dédains ont su trouver fidèle, Dont l’esprit s’éblouit à ses seules lueurs, Qui des combats du cœur n’aimez que la victoire, Et qui rêvez d’amour comme on rêve de gloire,  L’œil fier et non voilé de pleurs ; Vous qu’en secret jamais un nom ne vient distraire, Qui n’aimez qu’à compter, comme une reine altière, La foule des vassaux s’empressant sur vos pas ; Vous à qui leurs cent voix sont douces à comprendre, Mais qui n’eûtes jamais une âme pour entendre Des vœux qu’on murmure plus bas ; Thérèse, pour longtemps adieu !

2298. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (2e partie) » pp. 305-367

Je touche à peine à ma pleine maturité ; j’ai vu de mes yeux d’enfant la première république sans la comprendre et sans me souvenir d’autre chose que des sanglots qu’elle faisait retentir dans les familles décimées par les prisons ou les échafauds ; j’ai vu l’empire sans entendre autre chose que les pas des armées allant se faire mitrailler sur tous les champs de bataille de l’Europe, et les chants de victoire mêlés au deuil de toutes ces familles du peuple qui payaient ces victoires du sang prodigué de leurs enfants ; j’ai vu l’Europe armée venir deux fois, sur les traces de nos armées envahissantes, envahir à son tour notre capitale ; j’ai vu les Bourbons rentrer avec la paix humiliante mais nécessaire à Paris et y retrouver la guerre des partis contre eux au lieu de la guerre étrangère éteinte sous leurs pas ; j’ai vu Louis XVIII tenter la réconciliation générale, dans le contrat de sa charte entre la monarchie et la liberté ; je l’ai vu manœuvrer avec longanimité et sagesse au milieu de ces tempêtes de parlement et d’élection qui ne lui pardonnaient qu’à la condition de mourir ; j’ai vu Charles X, pourchassé par la meute des partis parlementaires, ne trouver de refuge que dans un coup d’État désespéré qui fut à la fois sa faute et sa punition. […] Il est sans doute possible qu’après un si long laps de temps le curé de Bessancourt ait commis quelques inadvertances de noms, de dates, de détails sur des personnages si nombreux alors dans les prisons et sur leurs rôles respectifs dans ce drame pathétique de leur dernière heure ; mais il est impossible à qui a entendu ce modeste et sincère témoin de ces scènes de révoquer en doute sa véracité. […] Elle m’accueillit avec sécurité, prévenue qu’elle était par le poète Béranger que je n’étais point de sa religion politique, que je ne venais ni pour la flatter ni pour la trahir, mais uniquement pour m’instruire et pour entendre ses témoignages sur le temps, sur les choses, sur les hommes qu’elle avait traversés, connus, fréquentés de si près dans cette intimité quotidienne où les hommes les plus comédiens en public oublient de se masquer, selon leurs rôles, devant les témoins domestiques de toutes les heures secrètes de leur vie.

2299. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIe entretien. La passion désintéressée du beau dans la littérature et dans l’art. Phidias, par Louis de Ronchaud (1re partie) » pp. 177-240

I Causons à l’ombre de ce dernier bouquet de chênes de la colline de Saint-Point, puisqu’un véritable soleil d’Athènes luit aujourd’hui sur cette vallée de Gaules, fait grincer la cigale d’Attique dans les joncs desséchés des bords de la Valouze, comme je les ai entendues autrefois dans les lits poudreux du Céphyse, et puisque la lumière ardente du midi répercutée et rejaillissante de ces roches grises, en faisant nager et onduler dans l’éther les cimes dentelées de ces montagnes, me fait songer, autant que ce livre ouvert sur mes genoux, à cette lumière dorée de la Grèce. […] Plus bas, on voit reluire et on entend gronder au fond d’un ravin inaccessible le torrent du Lignon qui court en circuitant autour des collines abruptes rejoindre la Bienne, rivière de Saint-Claude dans la vallée de Malingès. […] Les secrets doivent rester sur les lèvres de ceux qui ont entendu ces confidences d’une belle âme.

2300. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (1re partie) » pp. 305-364

Je les ai applaudis quelquefois aux premières représentations ; mais j’avoue que j’applaudissais de confiance, et, quand j’entendais le public les applaudir avec enthousiasme, je pensais que le public, seul juge en cette matière, avait raison, et que j’étais apparemment sourd de cette oreille. […] Mais il fut entendu par les spectateurs les plus rapprochés, qui, ne respectant pas mon incognito nécessaire, crièrent à l’instant : Vive Lamartine ! […] Et, pendant que je retrempais mes forces à leur table, tout en les écoutant causer comme Périclès écoutait la marchande d’herbes d’Athènes, le cabriolet longtemps cherché se fit enfin entendre.

2301. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxive Entretien. Réminiscence littéraire. Œuvres de Clotilde de Surville »

… Te parle, et ne m’entends… eh ! […] … Ne m’entend ; se complaist à s’abreuver de larmes, Tyze les feulx qui le vont dévorans… Mieulx ne vauldroit, hélas ! […] Se destinez, comme l’entends, Ô dames qu’oyez mon histoire, Prilx à qui plus fist pour la gloire, L’emporte Ismene ; n’y prétens ; Se, pour le bonheur, luy contends : Beau certes avoir l’accolade !

2302. (1839) Considérations sur Werther et en général sur la poésie de notre époque pp. 430-451

« Si, disions-nous, la poésie ne faisait pas entendre aujourd’hui ce concert de douleur qui annonce le besoin d’une régénération sociale ; si elle ne jetait pas ainsi, dans toutes les âmes capables de la sentir, le premier germe de cette régénération ; si elle ne versait pas dans ces âmes, avec la douleur de ce qui est, le désir de ce qui doit être, elle ne serait pas, ce qu’elle a toujours été, prophétique. » Poursuivant partout ce caractère de la poésie de notre temps, nous le montrions jusque chez les écrivains qui alors affectaient le calme d’artistes heureux, satisfaits du présent et des dons accordés par le ciel à leur génie, ou qui se rattachaient à un passé qui a été grand, mais qui ne peut plus être. […] L’Angleterre a entendu, autour de ses lacs, bourdonner, comme des ombres plaintives, un essaim de poètes abîmés dans une mystique contemplation. […] » Puisque tout est doute aujourd’hui dans l’âme de l’homme, les poètes qui expriment ce doute sont les vrais représentants de leur époque ; et ceux qui font de l’art uniquement pour faire de l’art sont comme des étrangers qui, venus on ne sait d’où, feraient entendre des instruments bizarres au milieu d’un peuple étonné, ou qui chanteraient dans une langue inconnue à des funérailles.

2303. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIV. La littérature et la science » pp. 336-362

On comprend ces moqueries) quand on entend, cinquante ans après Voltaire, le bon Nodier déclarer que le mot luron vient sans doute de tra deri dera, attendu qu’on dit un joyeux luron et qu’un homme joyeux fredonne volontiers un refrain. […] Sully Prudhomme, dans son noble poème de la Justice, a condensé en un dialogue tragique l’antagonisme de ces deux voix que l’homme moderne entend retentir au fond de sa conscience ; l’une est celle de la science, implacable et sereine, qui renverse sans pitié les vieilles idoles, les croyances chères à l’enfance des peuples, les préjugés enracinés par une longue accoutumance ; l’autre est celle du cœur qui proteste, qui tantôt a peur de ce bouleversement, s’attendrit sur les choses détruites, proclame l’inutilité du savoir humain et conseille au chercheur de s’endormir dans le plaisir et l’insouciance, tantôt se révolte, taxe la science d’impie, l’accable d’invectives passionnées, l’accuse de désenchanter la vie, d’anéantir le bonheur et la vertu. […] Nous n’entendons plus seulement par là les champs opposés à la ville.

2304. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VI »

D’une génération à l’autre on ne s’entend plus. […] Ils s’entendent à demi-mot, ils se renvoient de muets mépris. […] De toute l’assistance, d’Estrigaud et Navarette sont seuls capables de comprendre un pareil langage : les autres ne l’entendent pas plus qu’André ne les comprendrait lui-même, s’ils lui parlaient javanais.

2305. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre premier. La sélection et la conservation des idées dans leur relation à l’appétit et au mouvement. »

Quand Mozart, après avoir entendu deux fois le Miserere de la chapelle Sixtine, le notait de mémoire malgré son extrême complication, il avait conservé la représentation des sons et de leurs rapports, il la reproduisait, enfin il la reconnaissait pour identique à ce qu’il avait entendu dans le passé : voilà la mémoire complète. […] Ainsi entendues, les idées-forces, c’est-à-dire les états de conscience corrélatifs aux vibrations du cerveau, luttent pour l’existence et les plus fortes l’emportent : il y a conflit dynamique et sélection dans les plaisirs et les peines, dans les émotions, dans les pensées, dans les états de conscience de toute sorte, dont chacun, étant lié aux vibrations de cellules particulières dans le cerveau, enveloppe une tendance à se maintenir et à survivre, corrélative de la tendance des cellules à leur propre conservation et à leur propre développement.

2306. (1902) La métaphysique positiviste. Revue des Deux Mondes

Ce qui revient à dire que si quelques vérités, très générales, demeureront éternellement les mêmes, — et ce sont celles qui n’expriment pas tant les lois de la nature des choses que la constitution de l’esprit humain, — la science, bien loin d’être exceptée de la loi du changement, ne peut donc progresser qu’en changeant, comme aussi bien toutes les choses humaines ; et c’est ce que l’on entend quand on dit que du « point de vue statique », le positivisme a fait passer le concept de science au « point de vue dynamique. » Elle n’est plus aujourd’hui ce qu’elle était hier : elle n’est pas aujourd’hui ce qu’elle sera demain. […] Les autres métaphysiques sont toutes subjectives, la métaphysique positiviste est une métaphysique tout objective, — et j’entends par ce mot une métaphysique dont on a fait effort pour éliminer tout ce que les métaphysiciens ont môle généralement à la leur de leur manière personnelle de voir, et de leurs convictions a priori. […] Si la vérité n’est en effet que la « totalisation de l’expérience humaine » l’expression en devient nécessairement relative, successive, progressive, et, de sa relativité bien entendue dérive, pour ainsi dire, la loi même de son progrès.

2307. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre III. De la signification de la vie. L’ordre de la nature et la forme de l’intelligence. »

Mais il sera entendu que, plus elle s’enfonce dans les profondeurs de la vie, plus la connaissance qu’elle nous fournit devient symbolique, relative aux contingences de l’action. […] L’idée du désordre, entendu au sens d’une absence d’ordre, est donc celle qu’il faudrait analyser d’abord. […] La vie dans son ensemble, envisagée comme une évolution créatrice, est quelque chose d’analogue : elle transcende la finalité, si l’on entend par finalité la réalisation d’une idée conçue ou concevable par avance. […] Quand j’entre dans une chambre et que je la juge « en désordre », qu’est-ce que j’entends par là ? […] Notre comparaison ne fait que développer le contenu du terme logos, tel que l’entend Plotin.

2308. (1922) Enquête : Le XIXe siècle est-il un grand siècle ? (Les Marges)

Loin de moi l’intention d’approuver toujours cet accent et cette allure, mais je consentirais à ne jamais pénétrer dans ledit « salon » si l’on y exigeait que je renonce à entendre certaines vérités profondes qui ne sauraient être exprimées dans son atmosphère sereine. […] Nous manquons d’une société digne d’entendre un nouveau Molière. […] Jules Marsan, professeur à la faculté des lettres de Toulouse La question est, je crois, de politique plus que de littérature et je n’entends pas grand-chose à cela. […] Mais il est vrai aussi que ce temps dans sa frénésie à s’affranchir de toute discipline et sa superstition pour ce qu’il a appelé la Science, sans trop savoir ce qu’il entendait par là, a compromis son génie, altéré son art, et conduit le monde à l’abêtissement.

2309. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VII, seconde guerre médique. »

Les Grecs, quand ils entendirent cette page, lue par Hérodote, aux jeux Olympiques, sa rappelèrent sans doute le « malfaisant Oneiros » du second chant de l’Iliade, ce Songe menteur, traître masqué des sommeils perplexes, que Zeus envoie à ceux qu’il veut perdre. […] Perséphone put l’entendre du fond de son temple dressé tout auprès sur une pente de l’Oeta, et marquer leurs places au festin funèbre. […] On entendait craquer ses jointures, elle semblait prête à se disloquer. […] Le butin fut prodigieux : on entend rouler, tout le long d’une page de l’historien grec, les trônes, les lits, les cratères, les bassins, les bracelets, les cimeterres d’or.

2310. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Conclusions »

Il semble résulter de l’examen de ses contes que l’auteur en tenait exprès sa sensibilité à l’écart, pour les combiner mieux, ainsi, la tête plus froide et plus reposée que s’il eût éprouvé les terreurs et les angoisses qu’il s’entend à susciter. […] Que je dise tout de suite qu’en relevant ces similitudes et d’autres, je n’entends nullement signaler une imitation volontaire. […] Ses analyses de caractère sont mieux poussées que celles du romancier anglais chez lequel elles sont médiocres, ses peintures de milieux beaucoup plus exactes, ses descriptions, ses scènes plus renseignantes, sa composition mieux entendue. […] La vie de société, telle qu’on l’entend aujourd’hui, développe simultanément, à mesure quelle avance, ces deux conditions, unissant les hommes par leurs intérêts seuls et les risques qu’ils courent, les dispensant de s’unir de cœur, par suite même de la perfection actuelle des institutions légales, policières, de politesse, qui, permettant de vivre sans que l’on se heurte, empêchent aussi que l’on se touche.

2311. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIe entretien. Littérature italienne. Dante. » pp. 329-408

Il s’était formé, de ses débris mêlés aux dialectes vulgaires des provinces romaines et de la Gaule méridionale, une langue usuelle, imparfaite, flottante, diverse, par laquelle on s’entendait tant bien que mal dans la conversation, mais sans pouvoir y graver ses pensées dans cette forme solide, convenue et uniforme, seule langue avec laquelle on puisse construire des monuments de style. […] Il faut le vide autour des ombres et le silence autour des grandes mémoires ; on entendrait mieux l’âme gémissante de l’exilé dans les gémissements des pins de la pineta et des vagues sans repos sur la grève. […] Alors, et alors seulement, il entendit toute la voix de son génie, étouffée jusque-là par les bruits de la terre. […] Ratisbonne roule, avec un bruit latin, dans la langue française, les blocs, les rochers et jusqu’au limon de ce torrent de l’Apennin toscan qu’on entend bruire dans les vers du Dante.

2312. (1884) Articles. Revue des deux mondes

Quand le titan console ses souffrances par le souvenir attendri de ce qu’il a fait pour les hommes, quand il rappelle la misérable condition de ces pauvres êtres « qui avaient des yeux et ne voyaient pas, des oreilles et n’entendaient pas », — comme il les a trouvés blottis au fond d’obscures cavernes, incapables de marquer le cours des saisons, ignorans de tout métier, de tout raisonnement, jouets de la confusion et du hasard, — comme il leur a révélé l’usage des nombres et de l’écriture, l’art d’observer le lever et le coucher des étoiles, de bâtir des maisons, de dresser les animaux, de guérir les maladies, de naviguer sur la mer, de pratiquer les différens modes de divination, — quand enfin, sous l’angoisse de son supplice, en face de l’odieux ministre de Jupiter, il prédit la chute de son tyran, le triomphe de la justice et sa propre apothéose, — n’est-ce pas l’histoire même du progrès, attesté par les laborieuses conquêtes de l’esprit sur la nature, sanctifié et couronné par le dévoûment des meilleurs à la cause du genre humain ? […] Cette conclusion, à laquelle avaient déjà abouti Herbart et Schopenhauer, semble paradoxale : le tout est de s’entendre sur la signification du mot loi. […] Mais la finalité, telle que l’entend Aristote, nous paraît assez voisine de celle que peut accepter un savant. […] Par exemple, ses opinions sur la semence et la génération, sur la manière dont se forme l’enfant dans le sein de sa mère, et si vous l’entendiez assurer que l’âne, non-seulement ne rit pas, mais qu’il ne peut ni charpenter ni ramer ! 

2313. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — III. (Suite et fin.) » pp. 454-472

Daru, dans le premier moment, répondant peu et ne paraissant pas entendre : « Comte Daru, lui dit Louis XVIII, puisque vous n’entendez plus Horace, je vais vous le traduire en beaux vers français. » Et avec toute sa coquetterie royale, il se mit à réciter à l’auteur le passage de sa traduction même.

2314. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — II. (Fin.) » pp. 36-54

Ce n’est que dans une lettre du 27 juillet 1711 (et le prince mourut le 18 février 1712) que Fénelon, écrivant au duc de Chevreuse, dit pour la première fois : J’entends dire que M. le Dauphin fait beaucoup mieux. […] Les religieuses sont pourtant séparées, mais j’occupe une partie de leurs logements… » Interrogé sur un cas de conscience lorsqu’il venait de donner un conseil royal et de politique, Fénelon souffre évidemment ; il rassure en deux mots son élève : « Vous ne devez avoir aucune peine, lui dit-il, de loger dans la maison du Saulsoir : vous n’avez rien que de sage et de réglé auprès de votre personne ; c’est une nécessité à laquelle on est accoutumé pendant les campements des armées. » Mais il fait précéder sa réponse sur ce point-là de bien des avis plus généraux que le duc de Bourgogne devait être capable d’entendre : « On dit que vous êtes trop particulier, trop renfermé, trop borné à un petit nombre de gens qui vous obsèdent.

2315. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Chateaubriand. Anniversaire du Génie du christianisme. » pp. 74-90

Ses yeux sont âpres, ses tempes chauves, sa taille élevée, il est maigre, pâle, et, quand il récite son Exegi monumentum, on croirait entendre Pindare aux jeux Olympiques… » Il n’est pas malaisé d’y surprendre des particularités qui convainquent les Mémoires d’outre-tombe de légère inexactitude. […] Ainsi, quoi que vous entendiez dire, quoi qu’il puisse tôt ou tard se révéler des variations, des contradictions subséquentes ou antérieures, de M. de Chateaubriand, un point nous est fermement acquis : jeune, exilé, malheureux, vers le temps où il écrivait ces pages pleines d’émotion et de tendresse adressées « Aux infortunés », — sous le double coup de la mort de sa mère et de celle de sa sœur, — les souvenirs de son enfance pieuse le ressaisirent ; son cœur de Breton fidèle tressaillit et se réveilla ; il se repentit, il s’agenouilla, il pria avec larmes ; — la lettre à Fontanes, expression et témoignage de cet état d’exaltation et de crise mystique, est écrite de la même plume, et, si je puis dire, de la même encre que l’ouvrage religieux qu’il composait à ce moment et dont il transcrivait pour son ami quelques pages.

2316. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — I » pp. 236-253

Par vulgaire, il n’entend pas le peuple proprement dit, « mais les esprits populaires, de quelque robe, profession et condition qu’ils soient », gens opiniâtres à ce qu’ils ont une fois pris à cœur, et qu’il y a péril à venir heurter dans leurs préjugés établis : dont il a semblé à plusieurs, dit-il, qu’il n’y faut aucunement toucher, mais laisser le moutier où il est, laisser rouler le monde comme il a accoutumé, et se contenter d’en penser ce qui en est ; et que ce n’est raison que les sages se mettent en peine pour les fols opiniâtres. […] Joubert) a dit, pour donner à entendre ce qu’il y a de divin dans le christianisme : « On ne peut ni parler contre le christianisme sans colère, ni parler de lui sans amour. » C’est cet amour qu’on ne rencontre point dans les écrits religieux de Charron.

2317. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — I » pp. 57-75

Ici j’entends des érudits de nos jours qui en parlent bien à leur aise, et qui disent (MM. de Schlegel en tête) : Cette poésie française élevée existait au moyen-âge, elle était dans les romans de chevalerie, dans ces chansons de geste qu’on exhume chaque jour, dans ces traditions vraiment modernes où il fallait l’aller chercher comme à sa source naturelle, et non chez les Grecs et les Latins. […] Muret convient cependant que dans ce volume « il y a quelques sonnets qui d’homme n’eussent jamais été bien entendus, si l’auteur ne les eût, ou à lui ou à quelque autre, familièrement déclarés » et expliqués.

2318. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Voiture. Lettres et poésies, nouvelle édition revue, augmentée et annotée par M. Ubicini. 2 vol. in-18 (Paris, Charpentier). » pp. 192-209

Ce ne sont chez lui que plaisanteries de société et de coterie, tours de force subtils dont on ne sait d’abord que dire quand on le lit aujourd’hui, et qu’on n’est pas très sûr d’entendre à moins d’être initié. […] Voiture avait dans la volupté, pratiquée comme il l’entendait, un principe de sagesse relative et d’indifférence.

2319. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Les Caractères de La Bruyère. Par M. Adrien Destailleur. »

Gourville, l’homme entendu, était devenu le gouverneur et le maître des affaires du grand Condé, et il y avait remis l’ordre. […] Son discours, un peu long, était certes le plus remarquable que l’Académie eût entendu à cette date, de la bouche d’un récipiendaire.

2320. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Béranger, recueillie par M. Paul Boiteau. »

» La poésie sérieusement l’occupe : « Elle est pour moi maintenant une occupation douce, qui ne me nourrit point d’idées chimériques, mais qui n’en charme pas moins tous mes instants. » Cette poésie, comme il l’entendait, était pourtant alors à ses yeux très distincte encore de ses chansons ; il rêvait un succès par quelque poëme d’un genre élevé et régulier, tel que le lui avait conseillé Lucien Bonaparte, son protecteur, tel que la littérature impériale classique le prescrivait à tout jeune auteur qui briguait la palme. […] David d’Angers avait fait de lui un beau médaillon en marbre, et on le mit en loterie à 20 francs le billet ; la loterie, bien entendu, était toute au bénéfice du pauvre rapsode : « Si nous plaçons promptement ces billets, lui dit Béranger, vous aurez enfin de quoi renouveler cette maudite garde-robe qui s’en va toujours trop vite pour nous autres pauvres diables ; car je me rappelle le temps où je n’avais qu’un pantalon, que je veillais avec un soin tout paternel, et qui ne m’en jouait pas moins les tours les plus perfides.

2321. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Connaissait-on mieux la nature humaine au XVIIe siècle après la Fronde qu’au XVIIIe avant et après 89 ? »

La Fontaine, à travers toutes ses distractions et ses rêveries, avait lui-même entendu de ses oreilles le sage ou soi-disant tel crier selon les temps, et du jour au lendemain : Vive le Roi ! […] Non ; si inférieurs aux Retz et aux La Rochefoucauld pour l’ampleur et la qualité de la langue et pour le talent de graver ou de peindre, ils connaissaient la nature humaine et sociale aussi bien qu’eux, et infiniment mieux que la plupart des contemporains de Bossuet, ces moralistes ordinaires du xviiie  siècle, ce Duclos au coup d’œil droit, au parler brusque, qui disait en 1750 : « Je ne sais si j’ai trop bonne opinion de mon siècle, mais il me semble qu’il y a une certaine fermentation de raison universelle qui tend à se développer, qu’on laissera peut-être se dissiper, et dont on pourrait assurer, diriger et hâter les progrès par une éducation bien entendue » ; le même qui portait sur les Français, en particulier ce jugement, vérifié tant de fois : « C’est le seul peuple dont les mœurs peuvent se dépraver sans que le fond du cœur se corrompe, ni que le courage s’altère… » Ils savaient mieux encore que la société des salons, ils connaissaient la matière humaine en gens avisés et déniaisés, et ce Grimm, le moins germain des Allemands, si net, si pratique, si bon esprit, si peu dupe, soit dans le jugement des écrits, soit dans le commerce des hommes ; — et ce Galiani, Napolitain de Paris, si vif, si pénétrant, si pétulant d’audace, et qui parfois saisissait au vol les grandes et lointaines vérités ; — et cette Du Deffand, l’aveugle clairvoyante, cette femme du meilleur esprit et du plus triste cœur, si desséchée, si ennuyée et qui était allée au fond de tout ; — et ce Chamfort qui poussait à la roue après 89 et qui ne s’arrêta que devant 93, esprit amer, organisation aigrie, ulcérée, mais qui a des pensées prises dans le vif et des maximes à l’eau-forte ; — et ce Sénac de Meilhan, aujourd’hui remis en pleine lumière40, simple observateur d’abord des mœurs de son temps, trempant dans les vices et les corruptions mêmes qu’il décrit, mais bientôt averti par les résultats, raffermi par le malheur et par l’exil, s’élevant ou plutôt creusant sous toutes ; les surfaces, et fixant son expérience concentrée, à fines doses, dans des pages ou des formules d’une vérité poignante ou piquante.

2322. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite) »

Personne mieux que Gœthe ne s’entendait à prendre la mesure des esprits et des génies, de leur élévation et de leur portée ; il savait les étages ; c’est ce que trop de critiques oublient et confondent aujourd’hui. […] Je ne fus pas moins émerveillé, lorsqu’un jour j’entendis mes vers dans une langue étrangère. » La traduction de Gérard ne dut pourtant lui donner cette agréable sensation qu’à demi, car elle était en grande partie en prose.

2323. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vie de Jésus, par M. Ernest Renan »

Renan, ont un sens douteux et double et ne sont pas entendus également des deux côtés. » Un troisième ami m’arriva avant la fin de la journée ; celui-ci est très-mesuré et très-circonspect, c’est un prudent et un politique ; il vit le livre sur ma table, ne me questionna que pour la forme et, sans attendre ma réponse, me dit : « Je n’aime pas ces sortes de livres, ni voir agiter et remuer ces questions. […] Son procédé, entendu ainsi qu’il doit l’être, signifie : « Supposez, pour simplifier, que les choses se soient passées comme on le dit là, et vous ne serez pas très-loin de la vérité. » Cette extrême bonne foi dans l’exposé de ses vues ne sera invoquée contre lui que par ceux qui n’entrent pas dans sa pensée et qui, ayant un parti pris, interdisent toute recherche.

2324. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre (suite et fin.) »

C’est ainsi qu’à Dresde, en mai 1812, tous les souverains venus pour saluer humblement Napoléon, à son départ pour la campagne de Russie, eurent des conférences secrètes afin de s’entendre sur le parti à tirer de nos revers possibles en cette aventure lointaine ; et même, sans conférence et sans parole, il leur suffisait, pour s’entendre, de se regarder dans le blanc des yeux, tant ils étaient unanimes dans leur intime révolte et dans une haine commune !

2325. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

Cette identité place entre les hommes de ces deux pays un caractère commun qui les fera toujours se prendre l’un à l’autre et se reconnaître ; ils se croiront mutuellement chez eux quand ils voyageront l’un chez l’autre ; ils échangeront avec un plaisir réciproque la plénitude de leurs pensées et toute la discussion de leurs intérêts, tandis qu’une barrière insurmontable est élevée entre les peuples de différent langage qui ne peuvent prononcer un mot sans s’avertir qu’ils n’appartiennent pas à la même patrie ; entre qui toute transmission de pensée est un travail pénible, et non une jouissance ; qui ne parviennent jamais à s’entendre parfaitement, et pour qui le résultat de la conversation, après s’être fatigués de leurs efforts impuissants, est de se trouver mutuellement ridicules. […] Dudon, qui était alors auditeur au Conseil d’État, certifiait l’avoir entendu de sa bouche.

2326. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DIX ANS APRÈS EN LITTÉRATURE. » pp. 472-494

Et ceux qui étaient encore en feu il y a dix ans, et ceux qui se sont produits et déjà fatigués depuis, et ceux qui ressaisissent aujourd’hui de bons éclairs d’une ferveur littéraire longtemps ailleurs détournée, tous ne sont pas si loin de s’entendre pour de certaines vues justes, de certains résultats de goût, de sens rassis et de tolérance. […] Le fait est que c’est l’heure pour les générations qui ont commencé à briller ou qui étaient déjà en pleine fleur il y a dix ans, de se bien pénétrer, comme en un rappel solennel, qu’il y a à s’entendre, à se resserrer une dernière fois, à se remettre en marche, sinon par quelque coup de collier trop vaillant, du moins avec quelque harmonie, et, avant de se trouver hors de cause, à fournir quelque étape encore dans ces champs d’études qui ont toujours eu jusqu’ici gloire et douceurs.

2327. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre II. Du goût, de l’urbanité des mœurs, et de leur influence littéraire et politique » pp. 414-442

Une femme perd de son charme, non seulement par les paroles sans délicatesse qu’elle pourrait se permettre, mais par ce qu’elle entend, par ce qu’on ose dire devant elle. […] L’on se reconnaît, dans les grandes circonstances, aux sentiments du cœur ; mais dans les rapports détaillés de la société, on ne s’entend que par les manières ; et la vulgarité portée à un certain degré, fait éprouver à celui qui en est le témoin ou l’objet, un sentiment d’embarras, de honte même, tout à fait insupportable.

2328. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre VI. Science, histoire, mémoires »

J’entends par là qu’ils sont parvenus à un public qui en juge sans compétence particulière, qui n’y cherche aucune instruction technique, qui s’en fait, plus ou moins frivolement ou grossièrement, des moyens de culture générale, de plaisir intellectuel. […] Toutes les précautions que ce loyal esprit a prises pour éviter le parti-pris, les vues étroites ou exclusives, pour saisir toutes les parties et manifester tous les aspects de la vérité, ont donné le change aux esprits superficiels ou prévenus : en même temps que notre grossière façon d’entendre l’opposition théorique de la science et de la foi nous faisait mal juger tous ces fins sentiments, ces expansions affectueuses ou enthousiastes, qui se mêlaient sans cesse chez Renan aux affirmations du déterminisme scientifique.

2329. (1911) La valeur de la science « Troisième partie : La valeur objective de la science — Chapitre XI. La Science et la Réalité. »

Qu’entend-on par là ? […] Et d’abord que devons-nous entendre par objectivité ?

2330. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre V. La littérature et le milieu terrestre et cosmique » pp. 139-154

En effet, de même que le montagnard (j’entends le montagnard pur, non affiné et non gâté) appelle la montagne « le mauvais pays », l’homme redoute et n’admire pas les torrents, les ravins, les escarpements, tant qu’il y voit un danger et un obstacle permanents. […] Bernardin de Saint-Pierre, qui habita l’île de France, qui rêva d’aller établir une colonie en plein cœur de l’Asie, sur les bords de la mer d’Aral, avait à peine huit ans qu’il s’enfuyait de la maison paternelle pour vivre de racines et d’eau pure, comme les Pères du désert, dont il avait lu ou entendu lire les légendes.

2331. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Mme de Genlis. (Collection Didier.) » pp. 19-37

Elle sait tout faire et comment tout se fait, elle s’entend au cidre comme à la harpe. […] Elle allait pouvoir élever comme elle l’entendait, non seulement de jeunes filles, mais de jeunes hommes et des princes, dont l’un est devenu roi.

2332. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — II. » pp. 494-514

Ce qui frappe Mallet aux diverses époques de notre Révolution, surtout pendant la période qui suit la Terreur, et au lendemain des nouvelles rechutes (telles que le 13 Vendémiaire, le 18 Fructidor), c’est l’absence complète d’opinion et d’esprit public, dans le sens où on l’entend dans les États libres : L’esprit public proprement dit, écrit-il le 28 janvier 1796, est un esprit de résignation et d’obéissance ; chacun cherche à se tirer, coûte que coûte, c’est-à-dire par mille bassesses infâmes, de la détresse générale. […] Telle est la doctrine de Mallet du Pan, et Louis XVIII n’était pas mûr à cette date pour l’entendre.

2333. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — I. » pp. 201-219

Il se montra un digne élève de Pâris-Duverney, ayant en lui de ce qu’avaient les Orry, les Gourville, ces hommes à expédients, ces spéculateurs entendus et modérément scrupuleux. […] Selon cette théorie d’un faux bon sens ennemi du grand goût, il suffirait de transporter purement et simplement toute action émouvante et attendrissante de la vie bourgeoise sur le théâtre pour avoir atteint le plus haut point de l’art : Si quelqu’un est assez barbare, assez classique (il est piquant de voir ces deux mots accolés par Beaumarchais et pris comme synonymes), pour oser soutenir la négative, il faut lui demander si ce qu’il entend par le mot drame ou pièce de théâtre n’est pas le tableau fidèle des actions des hommes.

2334. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « L’abbé Gerbet. » pp. 378-396

C’est le sentiment vif de cette incomparable et idéale agonie qui lui inspira un Dialogue entre Platon et Fénelon, où celui-ci révèle au disciple de Socrate ce qu’il lui a manqué de savoir sur les choses d’au-delà, et où il raconte, sous un voile à demi soulevé, ce que c’est qu’une mort selon Jésus Christ : Ô vous, qui avez écrit le Phédon, vous, le peintre à jamais admiré d’une immortelle agonie, que ne vous est-il donné d’être le témoin de ce que nous voyons de nos yeux, de ce que nous entendons de nos oreilles, de ce que nous saisissons de tous les sens intimes de l’âme, lorsque, par un concours de circonstances que Dieu a faites, par une complication rare de joie et de douleurs, la mort chrétienne, se révélant sous un demi jour nouveau, ressemble à ces soirées extraordinaires dont le crépuscule a des teintes inconnues et sans nom ! […] L’amitié vraie, telle que l’entendait La Fontaine, demande plus de soins et d’égalité.

2335. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

Bredouille réplique par la grande raison de tous les poètes heureux : « Pour moi, je n’y entends pas tant de façon ; quand une chose me plaît, je ne vais point m’alambiquer l’esprit pour savoir pourquoi elle me plaît. » Regnard aurait pu se dispenser de cette petite pièce ; Le Légataire se défendait tout seul avec les rires qu’il provoquait. […] Voltaire l’attribue au chagrin et fait même entendre que cet homme si gai avança ses jours ; d’autres disent qu’il est mort d’indigestion et d’une médecine prise mal à propos.

2336. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1853 » pp. 31-55

Ce qu’il voyait, ce qu’il entendait, la déclaration de ce substitut, les dénégations de Latour-Dumoulin qui lui avait dit travailler à arrêter les poursuites, tout cela, le sortant de son égoïste optimisme, faisait tout à coup, ainsi que du feu d’un caillou, jaillir de l’indignation de ce vieux bourgeois habitué par sa longue vie à ne s’indigner de rien. […] La rivière allait en pente très douce, elle y entrait pas à pas, et quand elle avait de l’eau jusqu’aux genoux, elle était entraînée par le courant… mais, à demi noyée, elle ne perdait pas toute connaissance ; à un moment, elle avait parfaitement le sentiment que sa tête cognait contre un câble tendu et que ses cheveux dénoués se répandaient autour d’elle, et, quand elle entendit un chien sauter à l’eau, de la Verberie, elle éprouvait l’appréhension anxieuse qu’il ne l’empoignât par un endroit ridicule.

2337. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Vigny »

Mais c’est d’une puissance humaine qui en fait quelque chose d’à part, — puisque ce n’est pas religieux comme nous entendons qu’on doive l’être, — quelque chose d’inouï, qui pourrait s’appeler, pour donner une idée des trésors de fortitude et de consolation déposés en ces pages : Imitation de Jésus-Christ, pour ceux qui ne croient plus, hélas ! […] Mais, nous qui l’aimons et qui écoutons impatiemment son silence depuis si longtemps, quand donc entendrons-nous sa voix ?

2338. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LVIII » pp. 220-226

Lisez pourtant, parcourez les œuvres de tous, vous y verrez à divers degrés les mêmes sujets de tristesse, vous y entendrez les mêmes soupirs et, par moments, les mêmes cris : « Mais toi, idole de ma jeunesse, Amour dont je déserte le temple à jamais, s’écrie George Sand dans les Lettres d’un voyageur, adieu !

2339. (1874) Premiers lundis. Tome I « Dumouriez et la Révolution française, par M. Ledieu. »

Une correspondance s’engagea, et l’on parut s’entendre.

2340. (1875) Premiers lundis. Tome III « Eugène-Scribe. La Tutrice »

Cette inconnue est bien la plus aimable prêcheuse qu’on puisse entendre.

2341. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Philosophie du costume contemporain » pp. 154-161

En somme, la ceinture telle que l’entendent nos contemporaines, non plus souple et commode comme chez les femmes antiques, mais totalement déformatrice du corps, et jusqu’au renversement des proportions de la cage thoracique, divise résolument la femme en deux — pour localiser notre attention.

2342. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Malaise moral. » pp. 176-183

On en a, depuis, cherché les raisons ; et, bien entendu, on en a supposé de vilaines.

2343. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Casuistique. » pp. 184-190

N’avez-vous point entendu dire que, rassurées par la bienfaisante antisepsie, des noceuses, les unes du monde et les autres d’ailleurs, hésitaient peu à se faire délivrer une fois pour toutes afin d’être tranquilles, attendu que sublata causa tollitur effectus ; et que cette opération, préservatrice de la maternité, était presque à la mode, au point qu’un humoriste a pu écrire que ce dont elles se débarrassent « ne se porte pas cette année ? 

2344. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Lutèce » pp. 28-35

Alors, il lui prit un très grand regret de n’avoir vu l’enterrement de Victor Hugo, — et il marchait, songeant à cela, — ses yeux se dilataient, il croyait entendre le piétinement de la foule et, parfois, se sentait comme coudoyé, — et afin de se donner mieux l’illusion Vie la cohue, il grimpa sur un arbre ; — dans la nuit, il lui semblait voir s’avancer l’interminable cortège.

2345. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXIV » pp. 251-258

Nous nous jetâmes, dit-elle, dans des subtilités ou nous n’entendions plus rien  ; et madame de Sévigné se rit avec madame de Grignan de cette échappée.

2346. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre IV »

Qui entendit jamais prononcer le mot stère ?

2347. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Joseph Scaliger, et Scioppius. » pp. 139-147

Personne n’entendoit comme lui les représailles.

2348. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 31, que le jugement du public ne se retracte point, et qu’il se perfectionne toujours » pp. 422-431

Un auteur qui a trente ans quand il produit ses bons ouvrages, ne sçauroit vivre les années dont le public a besoin pour juger, non-seulement que ses ouvrages sont excellens, mais qu’ils sont encore du même ordre que ceux des ouvrages des grecs et des romains toujours vantez par les hommes qui les ont entendus.

2349. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — I. Takisé, Le taureau de la vieille »

A peine était-elle assise qu’elle entendit du bruit dans la case.

2350. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XVIII. La bague aux souhaits »

La femme dit au kélé : « J’ai entendu que cette bague fait avoir tout ce qu’on lui demande.

2351. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre V. Première partie. Les idées anciennes devenues inintelligibles » pp. 106-113

Au milieu de ce violent tumulte, qui fut le plus souvent une discussion très solennelle, les idées anciennes étaient défendues, tantôt avec une réserve que l’on prenait pour de la faiblesse, tantôt avec un courage que l’on prenait pour de l’exagération ; quelquefois on eût dit le chant du cygne qui va mourir : mais ce chant du cygne n’était point entendu, et n’avait point la force d’émouvoir ; il n’y avait rien de contagieux dans ces derniers accents d’idées expirantes, ou dont l’empire n’était plus que dans le passé : encore, il faut l’avouer, souvent aussi ce n’était point même le chant du cygne ; c’était quelque chose de vague et d’incertain, comme un éblouissement des oreilles ; c’était, en un mot, une cause mal comprise et mal défendue.

2352. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — II »

Nous n’entendons plus que comme une belle poésie la façon dont il confond le sentiment religieux et la curiosité scientifique.

2353. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre I. Définition des idées égalitaires »

Définition des idées égalitaires Qu’entendons-nous par l’idée de l’égalité des hommes ?

2354. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Jean-Jacques Ampère »

Mais ce qui me plaît surtout, c’est le ton sociable de tous ces articles : on voit toutes ces personnes penser et parler au milieu d’une compagnie nombreuse ; au contraire, en Allemagne, on reconnaît à la parole du meilleur d’entre nous qu’il vit dans la solitude, et toujours c’est une seule voix que l’on entend. » Goethe revint souvent en ces années sur ces articles d’Ampère à son sujet ; il les traduisit en allemand ; il disait82 : « Le point de vue de M.  […] Et je ne parle point ici par hypothèse, car ces discours d’Ampère, je les ai entendus ; ces leçons, je les ai suivies avec tout un fidèle auditoire pendant des années. […] Villemain toutes les déférences, il n’avait point précisément la tradition comme on l’entendait aux environs du collège du Plessis ou à l’ombre de la Sorbonne, je veux dire la marque et le cachet de l’éducation puisée à nos écoles. […] En attendant, je jouis en mon particulier de lire les agréables chapitres sur Virgile, Horace, Ovide, Properce, Tibulle, non toutefois sans sourire encore d’entendre Ampère nous dire à propos de ce dernier : « L’aimable Tibulle est le seul des poètes de ce temps auquel je n’aie pas à reprocher un vers en l’honneur d’Auguste. […] Lui-même me semble avoir bien apprécié ce que son rôle a eu, à son moment, d’original et d’incomplet, dans la note manuscrite suivante : « Dans ces siècles d’affectation et d’apparence, il aurait pu arriver que je fusse le seul qui entendît, qui voulût entendre ces regrets profonds que l’étude des choses inspire, seule voie sans doute qui puisse ramener les hommes au bonheur.

2355. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Académie française — Réception de M. de Falloux » pp. 311-316

La plénitude du principe monarchique, entendue selon la libre et nationale interprétation, elle est là où il y a passé glorieux et gloire nouvelle, là où apparaissent deux restaurateurs de la société à cinquante ans de distance, deux conducteurs de peuple remettant la France sur un grand pied et, sans trop se ressembler, la couronnant également d’honneur.

2356. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre VII. De la propriété des termes. — Répétition des mots. — Synonymes. — Du langage noble »

On entendit un roi dire : Quelle heure est-il ?

2357. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Delavigne, Casimir (1793-1843) »

Si j’en avais le loisir, je chercherais quelque détour pour vous faire entendre, sans vous le dire, que nous nous sommes fort ennuyés… C’est au point que cette impression d’ennui est à peu près tout ce que j’ai retenu de la pièce.

2358. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Desbordes-Valmore, Marceline (1786-1859) »

Ce long soupir, mouillé d’une larme qui tremble, Ma sœur, c’était ton âme, où l’âme humaine entend Vers l’infini gémir tous les amours ensemble.

2359. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VIII » pp. 70-76

Ce que nous entendons aujourd’hui par décence dans le langage était inconnu aux Grecs et aux Romains30.

2360. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre cinquième. »

Pour donner une moralité à cet Apologue, il fallait faire entendre que l’esprit consiste à s’élever au-dessus des illusions de l’amour propre, et que notre véritable intérêt doit nous conseiller de nous défier sans cesse de notre vanité.

2361. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre X. Suite du Prêtre. — La Sibylle. — Joad. — Parallèle de Virgile et de Racine. »

Tous deux polissent leurs ouvrages avec le même soin, tous deux sont pleins de goût, tous deux hardis, et pourtant naturels dans l’expression, tous deux sublimes dans la peinture de l’amour ; et, comme s’ils s’étaient suivis pas à pas, Racine fait entendre dans Esther je ne sais quelle suave mélodie, dont Virgile a pareillement rempli sa seconde églogue, mais toutefois avec la différence qui se trouve entre la voix de la jeune fille et celle de l’adolescent, entre les soupirs de l’innocence et ceux d’une passion criminelle.

2362. (1887) La Terre. À Émile Zola (manifeste du Figaro)

——— Or, il est bien vrai que Zola semble excessivement préoccupé (et ceux d’entre nous qui l’ont entendu causer ne l’ignorent pas) de la question de vente ; mais il est notoire aussi qu’il a vécu de bonne heure à l’écart et qu’il a exagéré la continence, d’abord par nécessité, ensuite par principe.

2363. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 17, quand ont fini les représentations somptueuses des anciens. De l’excellence de leurs chants » pp. 296-308

Les circonstances du temps et du lieu font voir que ce passage doit s’entendre des chrétiens.

2364. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre viii »

Les protestants, de leur côté, disent que la vraie tradition de la Réforme est en France, que le salut de la France, c’est le salut du protestantisme, et le Comité protestant de propagande française, dans sa « Réponse à l’appel allemand aux chrétiens évangéliques de l’étranger », déclare : « Nous sommes résolus à marcher cœur à cœur avec nos frères d’Angleterre, et coude à coude avec nos amis d’Amérique, de la Suisse romande, de Hollande, des Pays scandinaves, ayant la certitude de représenter avec eux la tradition la plus pure de la Réforme du xvie  siècle, cette qui entend unir toujours plus étroitement à la pitié évangélique la pratique de la justice, le respect de l’indépendance d’autrui et le souci de la grande fraternité humaine ».

2365. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Cromwell » (1827) »

Dans cette flagrante discussion qui met aux prises les théâtres et l’école, le public et les académies, on n’entendra peut-être pas sans quelque intérêt la voix d’un solitaire apprentif de nature et de vérité, qui s’est de bonne heure retiré du monde littéraire par amour des lettres, et qui apporte de la bonne foi à défaut de bon goût, de la conviction à défaut de talent, des études à défaut de science. […] On les voit pulluler, on les entend bourdonner dans ce foyer de putréfaction. […] On entend les cris de Clytemnestre que son propre fils égorge, et Électre crie sur le théâtre : « Frappez, ne l’épargnez pas, elle n’a pas épargné notre père. » Prométhée est attaché sur un rocher avec des clous qu’on lui enfonce dans l’estomac et dans les bras. […] L’alexandrin les avait tant de fois ennuyés, qu’ils l’ont condamné, en quelque sorte, sans vouloir l’entendre, et ont conclu, un peu précipitamment peut-être, que le drame devait être écrit en prose. […] Ce précepte effectivement, qui donne pour règle de ne point garder quelquefois de règles, est un mystère de l’art qu’il n’est pas aisé de faire entendre à des hommes sans aucun goût… et qu’une espèce de bizarrerie d’esprit rend insensibles à ce qui frappe ordinairement les hommes. » — Qui dit cela ?

2366. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Charles Labitte »

En réalité pourtant, on a beau chercher à se le dissimuler, plus on s’éloigne des choses, et moins on en a connaissance, j’entends la connaissance intime et vive ; tous ces je ne sais quoi que les contemporains possédaient et qui composaient la vraie physionomie s’évanouissent ; on perd la tradition pour la lettre écrite. […] Auguste Bernard exige absolument qu’on lui produise, après plus de deux siècles, un acte notarié et un procès-verbal authentique en faveur de ces noms, il peut se flatter d’avoir gain de cause ; mais, faute de ce certificat, auprès de tous ceux qui entendent le mot pour rire, et qui savent encore saisir au vol la voix de la Renommée, cette chose jadis réputée divine et légère, la gloire de Pithou, de Rapin et de Passerat, n’y perdra rien. […] Je me suis aperçu que le bonheur, comme il faut l’entendre, n’est autre chose, quand on n’en est plus aux idylles, que le parti pris de s’attendre à tout et de croire tout possible.

2367. (1875) Premiers lundis. Tome III « Les poètes français »

On est allé, pour la récolte et la vendange, chercher les plus entendus et les mieux préparés sur chaque production du pays, sur chaque cru ; on a demandé à chacun ce qu’on savait à l’avance de son goût, ce qu’il préférait, au risque de le voir un peu se délecter et abonder dans son propre sens. […] J’ai entendu regretter que lorsque cette poésie française rajeunissante essaya, vers les années 1820-1830, de remonter par-delà Malherbe, de regarder à son passé, de se rattacher aux ancêtres et de ressaisir un souffle de la Renaissance ou du moyen âge, nos poètes modernes aient négligé ces vieux monuments, et ne s’y soient pas directement inspirés et ralliés, au lieu de se borner à des poètes du xvie  siècle, à Ronsard et à ses contemporains de la Pléiade, et de s’arrêter ainsi à mi-chemin, — au quart du chemin. […] Il a trouvé pour quelques-uns de ces regrets naturels qui reviennent sans cesse, sur la beauté évanouie, sur la fuite des ans, l’expressionla meilleure et définitive, une expression vraie, charmante, légère, et qui chante à jamais au cœur et à l’oreille de celui qui l'a une fois entendue.

2368. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIe entretien. Vie du Tasse (1re partie) » pp. 5-63

On n’entendait sortir des fenêtres démantelées de ces maisons que les voix criardes des Transtévérines qui s’appelaient d’un grenier à l’autre, les pleurs d’enfants qui demandaient le lait de leurs mères, et le bruit sourd et cadencé des berceaux de bois que ces pauvres mères remuaient du pied pour les endormir ; on n’apercevait çà et là sur le seuil des maisons ou sur les balcons que quelques figures pâles et amaigries de femmes élevant leurs bras grêles au-dessus de leurs têtes pour atteindre le linge que le soleil avait séché ; de temps en temps une jeune fille demi-nue, à la taille élancée, au profil antique, au geste de statue, à la chevelure noire et aussi lustrée que l’aile du corbeau, apparaissait sur un de ces balcons sous des nuages flottants de haillons parmi les pots de basilic et de laurier-rose, comme ces giroflées qui pendent aux murailles en ruine, trop haut pour être respirées ou cueillies par le passant. […] Quoiqu’il en soit, je détachai pieusement avec mon couteau quelques fragments de la brique la plus rapprochée du chevet du lit du Tasse, et qui devait avoir entendu de plus près les soupirs et les gémissements du prisonnier ; je les emportai comme un morceau de la croix de ce calvaire poétique, et je les fis enchâsser depuis dans un anneau d’or que je porte toujours à mon doigt. […] s’écrie le poète, déjà touché à son insu, qu’entendis-je !

2369. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (1re partie). Littérature scientifique » pp. 221-288

Les habitants d’un vaisseau recherchent la vue d’un homme étranger ; ils voudraient entendre le son de la parole d’une bouche étrangère, venant d’un autre pays… c’est donc un événement qui saisit de joie, quand vient à passer un autre navire ; on se précipite sur le pont, on s’appelle, on se demande son nom, son pays, on se salue et bientôt on se voit réciproquement disparaître à l’horizon. […] La mer doucement agitée brillait d’un faible éclat phosphorescent, on n’entendait que le cri monotone de quelques oiseaux de mer qui gagnaient le rivage. […] Je sollicitai la permission de me joindre à lui pour aller observer de près, pendant une de ces nuits solennelles, le phénomène du volcan en éruption, pour entendre, de sa bouche savante et éloquente, les observations du Pline allemand sur cette illumination du volcan ; il eut la bonté de me l’accorder.

2370. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVe entretien. Vie de Michel-Ange (Buonarroti) »

Il entendit un jour deux étrangers qui attribuaient, par ignorance, ce groupe au ciseau d’un autre sculpteur romain ; bien que Michel-Ange n’eût pas l’habitude de marquer ses œuvres d’un autre signe que leur immortelle perfection, il craignit cette fois que le temps ou l’erreur populaire ne lui dérobât sa gloire, et, rentrant la nuit dans la chapelle, il grava son nom en petits caractères sur l’étroite ceinture qui retient la robe de la Vierge au-dessous du sein. […] L’entretien de Michel-Ange avec lui-même avait besoin de ce silence où l’homme s’entend penser. […] J’ai eu chez moi Urbin pendant vingt-sept ans, et je l’ai toujours éprouvé fidèle et admirable serviteur ; et maintenant que je l’avais fait riche et que je comptais sur lui comme sur le bâton et le repos de ma vieillesse qui s’approche, il m’est enlevé, et il ne m’est resté d’autre espérance que de le revoir en paradis ; et ainsi Dieu m’a fait entendre par la bienheureuse mort qu’Urbin a faite que ce véritable ami regrettait bien moins de mourir que de me laisser en proie à tant d’angoisse dans ce monde traître et pervers, bien que la meilleure part de moi-même s’en soit allée avec lui et qu’il ne me reste qu’une misère infinie.

2371. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre I. Les chansons de geste »

Cependant il faut bien savoir ce qu’on entend quand on dit que l’épopée française est d’origine germanique. […] Il la vend au jongleur, qui la joint à son répertoire, et la colporte de château en château, plus tard aussi, et de plus en plus, de ville en ville et de village en village : il se fait entendre dans la grande salle féodale, aux barons assemblés, ou sur la place publique, aux bourgeois, aux vilains. […] Chants épiques, bien entendu, non poème unique et suivi : naissance de Mérovée ; exil de Childéric ; mariage, baptême, guerres de Clovis ; la biche qui lui découvre un gué ; les murs croulant au son des trompettes ; meurtres des chefs francs, etc.

2372. (1894) Propos de littérature « Chapitre IV » pp. 69-110

J’entends bien qu’il y a de la surprise chez ceux qui déchiffrent cette phrase. […] Car ce mot, la mélodie, je l’ai si souvent entendu prononcer, et par des bouches qui lui donnaient des significations si diverses, que je n’oserais permettre à mon meilleur ami de l’employer devant moi sans le définir. […] Elle est bien une mélodie, cette musique que nous admirons dans l’Après-midi d’un Faune, mais les littérateurs dont je viens de parler l’entendent sans doute autrement ; car à ce mot ils paraissent attribuer la signification que lui donnent les femmes, d’une phrase qui émeut et chatouille les sens, ou celle d’une vague improvisation tzigane ; au moins leur mode de composition est-il d’accord avec une définition semblable.

2373. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Additions et appendice. — Treize lettres inédites de Bernardin de Saint-Pierre. (Article Bernardin de Saint-Pierre, p. 420.) » pp. 515-539

Je laisse ces spéculations à votre prudence, car je n’entends rien au commerce. […] À deux heures et demie du matin, nous entendîmes trois coups de tonnerre à 2 minutes d’intervalle. […] J’entends le petit chien qui, depuis trois ans, est mon ami fidèle.

2374. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre IV. Shakespeare l’ancien »

Dans son exil de Sicile, il va souvent boire religieusement à la fontaine Aréthuse, et jamais les pâtres qui l’observent ne l’entendent nommer Aréthuse autrement que de ce nom mystérieux, Alphaga, mot assyrien qui signifie source entourée de saules. […] Cette géographie vertigineuse est mêlée à une tragédie extraordinaire où l’on entend des dialogues plus qu’humains : — « Prométhée. […] Tragédie et comédie faites pour s’entendre.

2375. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre V : Règles relatives à l’explication des faits sociaux »

Nous n’entendons pas dire, d’ailleurs, que les tendances, les besoins, les désirs des hommes n’interviennent jamais, d’une manière active, dans l’évolution sociale. […] Par ce dernier mot, il faut entendre non pas le resserrement purement matériel de l’agrégat qui ne peut avoir d’effet si les individus ou plutôt les groupes d’individus restent séparés par des vides moraux, mais le resserrement moral dont le précédent n’est que l’auxiliaire et, assez généralement, la conséquence. […] Quant à la densité matérielle — si, du moins, on entend par là non pas seulement le nombre des habitants par unité de surface, mais le développement des voies de communication et de transmission — elle marche, d’ordinaire, du même pas que la densité dynamique et, en général, peut servir à la mesurer.

2376. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — II. (Suite.) » pp. 155-174

Jeune, il était déjà propre et entendu à bien des emplois : le coup d’œil de Henri sut démêler en lui ces capacités diverses qui étaient comme enveloppées, et son art de roi fut de les employer à propos alternativement et successivement, tenant de longue main l’utile serviteur en réserve pour les destinations futures. […] Ce que le roi a de mieux à faire, c’est de ne pas leur donner lieu de s’unir et de s’entendre pour traiter avec lui ; c’est de les lasser et d’avoir bon marché de chacun en détail, en les laissant se diviser et achever de se morceler de plus en plus : Tant qu’enfin étant tous mal contents les uns des autres, et désespérés de leurs impertinents desseins, il faudra que tout ce qu’il y a de Français parmi eux se vienne jeter entre vos bras par pièces et lopins, comme vous devez désirer, ne reconnaissant que votre seule royauté, ne cherchant protection, appui ni support qu’en elle, ni n’espérant d’obtenir bienfaits, dignités, charges, offices ni bénéfices que de votre seule grâce et libéralité.

2377. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — II. (Fin.) » pp. 213-233

Ce pesant Chapelain, qui avait du jugement dans les matières de prose, a dit de Mézeray en notant quelques-uns de ses défauts : « C’est néanmoins le meilleur de nos compilateurs français. » L’éloge est juste, si l’on entend le mot de compilateur sans aucune idée défavorable et en se contentant de le prendre par opposition aux écrivains de mémoires et de première main. […] Dès l’arrivée du duc de Guise à Paris, la physionomie de la capitale a changé : Tout Paris était plein de gens nouveaux et de visages qui semblaient ne respirer que la proie et la vengeance ; il se tenait jour et nuit des conférences au Louvre et chez les partisans du duc ; on n’entendait plus autre chose dans la ville et à la Cour que des bruits confus de diverses résolutions qui se prenaient, et peut-être qu’à l’heure il ne s’en était encore pris aucune.

2378. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — I. » pp. 431-451

Vers ce temps, comme s’il sentait qu’il doit commencer à se réconcilier avec l’idiome natal et à se diriger vers le but où l’appelle son secret talent, il se remet à lire les auteurs anglais, et surtout les plus récents, ceux qui, ayant écrit depuis la révolution de 1688, unissent à la pureté du langage un esprit de raison et d’indépendance, Swift, Addison ; puis, lorsqu’il en vient aux historiens, il est beau d’entendre avec quelle révérence il parle de Robertson et de Hume auxquels on l’adjoindra un jour : La parfaite composition, le nerveux langage, les habiles périodes du docteur Robertson m’enflammaient jusqu’à me donner l’ambitieuse espérance que je pourrais un jour marcher sur ses traces : la tranquille philosophie, les inimitables beautés négligées de son ami et rival, me forçaient souvent de fermer le volume avec une sensation mêlée de plaisir exquis et de désespoir. […] Il fait voir que la connaissance véritable de l’Antiquité est le résultat d’un ensemble très varié, très détaillé, sans lequel on ne fait qu’entrevoir les beautés des grands classiques : « La connaissance de l’Antiquité, voilà notre vrai commentaire ; mais ce qui est plus nécessaire encore, c’est un certain esprit qui en est le résultat ; esprit qui non seulement nous fait connaître les choses, mais qui nous familiarise avec elles et nous donne à leur égard les yeux des anciens. » Il cite des exemples tirés de la fameuse querelle des anciens et des modernes, et qui prouvent à quel point, faute de cette connaissance générale et antérieure, des gens d’esprit comme Perrault ont décidé en aveugles de ce qu’ils n’entendaient pas. — Il y a, chemin faisant, des vues neuves et qui sentent l’historien.

2379. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — II. (Fin.) » pp. 322-341

Une de ses grandes théories, et d’après laquelle il a écrit ensuite ses romans, c’est qu’en France l’amour est à peu près inconnu ; l’amour digne de ce nom, comme il l’entend, l’amour-passion et maladie, qui, de sa nature, est quelque chose de tout à fait à part, comme l’est la cristallisation dans le règne minéral (la comparaison est de lui) : mais quand je vois ce que devient sous la plume de Beyle et dans ses récits cet amour-passion chez les êtres qu’il semble nous proposer pour exemple, chez Fabrice quand il est atteint finalement, chez l’abbesse de Castro, chez la princesse Campobasso, chez Mina de Wangel (autre nouvelle de lui), j’en reviens à aimer et à honorer l’amour à la française, mélange d’attrait physique sans doute, mais aussi de goût et d’inclination morale, de galanterie délicate, d’estime, d’enthousiasme, de raison même et d’esprit, un amour où il reste un peu de sens commun, où la société n’est pas oubliée entièrement, où le devoir n’est pas sacrifié à l’aveugle et ignoré. Pauline, dans Corneille, me représente bien l’idéal de cet amour, où il entre des sentiments divers, et où l’élévation et l’honneur se font entendre.

2380. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — II. (Suite.) » pp. 434-453

Être homme de lettres, — entendons-nous bien, l’être dans le vrai sens du mot, avec amour, dignité, avec bonheur de produire, avec respect des maîtres, accueil pour la jeunesse et liaison avec les égaux ; arriver aux honneurs de sa profession, c’est-à-dire à l’Institut ; avoir un nom, une réputation ainsi fixée et établie, c’était alors une grande chose : il y avait, et parmi les auteurs et dans le public, comme un sentiment de religion littéraire. […] Littérairement, Fontanes fut le critique accepté et autorisé de l’Empire : c’était lui que l’Empereur aimait à faire causer et à entendre sur ces questions délicates et dans ces discussions animées où son actif génie se délassait.

2381. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le marquis de la Fare, ou un paresseux. » pp. 389-408

et n’est-ce pas le cas d’appliquer ici le mot de Vauvenargues : « La plus fausse de toutes les philosophies est celle qui, sous prétexte d’affranchir les hommes des embarras des passions, leur conseille l’oisiveté, l’abandon et l’oubli d’eux-mêmes. » La Fare nous explique d’ailleurs qu’il ne s’agit point d’une paix sobre et recueillie comme l’entendraient certains philosophes ; la sienne était remplie de gaieté, de gros jeu, de festins, de beautés d’opéra, et ne ressemblait pas mal à une ode bachique continuelle. […] Je fus voir hier, à quatre heures après midi, M. le marquis de La Fare, en son nom de guerre M. de la Cochonière, croyant que c’était une heure propre à rendre une visite sérieuse76 ; mais je fus bien étonné d’entendre dès la cour des ris immodérés et toutes les marques d’une bacchanale complète.

2382. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — III — Toujours Vauvenargues et Mirabeau — De l’ambition. — De la rigidité » pp. 38-55

Il n’a jamais mieux déployé que dans ces lettres cette indulgence supérieure, cette ouverture, cet art de la persuasion dont il se pique, « l’art de plaire et de dominer dans un entretien sérieux » ; on croit l’entendre. […] Dans les lettres qui suivent, la discussion continue et traîne un peu sur ce thème de l’éducation sociale du chevalier, Vauvenargues s’y dessinant de plus en plus comme un maître de grâce sérieuse et persuasive, et Mirabeau se redressant bientôt en homme de race et en patricien opiniâtre qui ne veut rien retrancher des défauts et qui entend respecter jusqu’aux tics de la famille.

2383. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Montaigne en voyage »

nous venons d’entendre le secrétaire de Montaigne ; que dit de son maître, au contraire, le Joseph de Chateaubriand, celui même dont il est parlé dans l’Itinéraire : « Dès qu’il est arrivé dans un lieu, il n’a rien de plus pressé que d’en repartir ?  […] L’air de Rome lui allait ; il le trouvait « très plaisant et sain. » Surtout il ne s’y ennuyait pas un seul instant : « Je n’ai rien, disait-il, si ennemi à ma santé que l’ennui et oisiveté : là j’avais toujours quelque occupation, sinon si plaisante que j’eusse pu désirer, au moins suffisante à me désennuyer », Et il les énumère : à défaut d’antiquités, aller voir les Vignes « qui sont des jardins et lieux de plaisir de beauté singulière, où j’ai appris, ajoute-t-il, combien l’art se pouvait servir bien à point d’un lieu bossu, montueux et inégal » à d’autres jours, à défaut de promenades, aller entendre des sermons, des thèses, ou faire la conversation chez les dames : il mêle tout cela.

2384. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

Un jour que je l’avais entendu raconter avec feu ses premières années, il m’est arrivé d’écrire : « Émile de Girardin est un produit de l’éducation naturelle. […] « Moins qu’à tout autre, je le sais, il m’appartient, en cette douloureuse circonstance, de prononcer ici les noms de la Religion et de la Raison ; aussi leur langage élevé n’est-il pas celui que je viens faire entendre, mais l’humble langage qui me convient… » Et il donnait quelques conseils pratiques, des conseils qui s’adressaient particulièrement aux témoins, seuls juges du cas d’inévitable extrémité auquel il fallait réduire de plus en plus cette odieuse pratique, débris persistant d’une autre époque.

2385. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite) »

Dans ses descriptions ou analyses pittoresques, son style serré, pressé, procédant par séries, par rangées et enfilades, à coups denses et répétés, par phrases et comme par hachures courtes, aiguës, qui récidivent, a fait dire à un critique de l’ancienne école qu’il lui semblait entendre la grêle rude et drue tombant et sautant sur les toits : Tam multa in tectis crepitans salit horrida grando. […] Je me rappelle d’intéressantes révélations que j’entendais faire un jour sur sa préoccupation étrange et son égoïsme d’auteur en composant.

2386. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite et fin.) »

Il est bien entendu qu’en insistant à dessein et par manière d’exemple sur les mérites de Pope, je ne fais à l’ouvrage de M.  […] On raconte que Shelley, la première fois qu’il entendit réciter le poème de Christabel, à un certain passage magnifique et terrible, prit effroi et tout d’un coup s’évanouit.

2387. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Nos célèbres historiens, Thiers, Lamartine, Michelet, Louis Blanc, avaient tour à tour parlé d’elle et fait entendre les accents de la patrie, de la poésie et de l’histoire. […] Dauban, l’éditeur actuel des Mémoires de Mme Roland et qui arrive à sa date, 71 ans après la mort de cette femme illustre, a beau jeu pour venir nous développer aujourd’hui sa doctrine austère ; il est bon, toutefois, de l’entendre à ce sujet.

2388. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite.) »

On a entendu Marie-Antoinette s’écrier dans cette réponse où elle parlait du Zamore de Mme Du Barry : « Si j’étais mère ! […] Elle serait disposée à le mieux comprendre et à tirer de lui meilleur parti que Louis XVI qui n’entend rien à cette nature puissante d’homme public, de tribun éloquent, et au double rôle qu’elle est obligée de jouer dans le temps même où elle se donne.

2389. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire de la Grèce, par M. Grote »

Ne se proposant en apparence pour objet que de constituer un bon texte d’Homère, il avait été amené à se demander, historiquement, ce qu’avaient pu être des poëmes d’aussi longue haleine que l’Iliade et l’Odyssée, et même si réellement ils avaient pu être et exister dans leur ensemble, à une époque où l’écriture n’existait pas, où rien ne pouvait se fixer et se consigner sur le papyrus ni sur d’autres matières ; où les chants seuls, par conséquent, flottaient sur les lèvres et dans la mémoire des hommes, à la merci des récitateurs et des chantres, et en présence d’auditoires avides, qui n’en pouvaient entendre que des portions. […] Le juge Graham ici, et même tout Français que vous avez pu entendre, est lent en comparaison de lui, et ce qui est remarquable, c’est que, malgré cette précipitation, il parle fort distinctement.

2390. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par le chevalier d’Arneth »

J’ai commencé pendant six semaines par des principes de belles-lettres : elle m’entendait bien, lorsque je lui présentais des idées toutes éclaircies ; son jugement était presque toujours juste, mais je ne pouvais l’accoutumer à approfondir un objet, quoique je sentisse qu’elle en était très-capable. […] Elle s’est déshabituée d’un nombre de mauvaises expressions ; il lui reste quelques mauvais tours de phrases dont elle se corrigera promptement lorsqu’elle n’entendra plus l’allemand et le mauvais français des personnes qui la servent.

2391. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. »

J’accompagnai plusieurs fois le baron de Tott, lieutenant-colonel de Berchiny, auquel il avait beaucoup de confiance et qui entendait bien cette espèce de guerre ; nous y eûmes des succès balancés, mais toujours des coups de fusil et des occasions de s’instruire. […] J’entendis toute cette dispute, et le pauvre prince fut comme un écolier qui laisse toujours parler son gouverneur. » Le grief contre Lœwendal, on le sent, était qu’il n’était pas Français, et on le lui faisait à tout moment sentir.

2392. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVe entretien. Littérature grecque. L’Iliade et l’Odyssée d’Homère » pp. 31-64

Eux, ayant entendu la lecture de ces divers poèmes, et les jugeant sans passion, sans esprit de rivalité, n’écoutant que l’intérêt de la vérité, et ne considérant que la convenance de l’art, déclarèrent unanimement que la compilation d’Aristarque et celle de Zénodote étaient les meilleures ; enfin, jugeant entre les deux, celle d’Aristarque eut la préférence. […] On appelait le chant, alors, tout ce qui parle, tout ce qui exprime, tout ce qui peint à l’imagination, au cœur, aux sens, tout ce qui chante en nous, la grammaire, la lecture, l’écriture, les lettres, l’éloquence, les vers, la musique ; car ce que les anciens entendaient par musique s’appliquait à l’âme autant qu’aux oreilles.

2393. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre I. La tragédie de Jodelle à Corneille »

Il y avait du moins un art que ce barbouilleur entendait mieux que tous les artistes de la Pléiade : c’était l’art dramatique. […] Quant à la tragédie, dans la mesure où les exigences de la scène le permettent, elle a repris l’allure d’une déclamation littéraire, à la façon dont l’entendaient les poètes du xvie  siècle.

2394. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. L’Histoire »

Il discipline les faits, pour qu’ils montrent leurs lois, et pour qu’ils donnent un enseignement par ces lois : mais entendez qu’ils donnent un enseignement orthodoxe, c’est-à-dire selon l’orthodoxie doctrinaire. […] Depuis l’invasion barbare jusqu’à la révolution française, il nous donne moins l’histoire objective, impersonnelle, scientifique de la France, que les émotions de Jules Michelet lisant les documents originaux qui peuvent servira écrire cette histoire : on entend ses cris de joie, de douleur, d’amour, de haine, d’espérance, de dégoût, tandis que les pièces qu’il dépouille font passer sous ses yeux les passions, les désirs, les actes de nos ancêtres.

2395. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre III. La poésie : V. Hugo et le Parnasse »

On croit entendre les clameurs d’un Isaïe ou d’un Ezéchiel : protestation du droit contre la force, affirmation de la justice contre la violence, espérance superbe de la conscience qui, blessée du présent, s’assure de l’éternité. […] On a parlé d’épopée à propos de la Légende des siècles : il faut s’entendre.

2396. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Pensées, essais, maximes, et correspondance de M. Joubert. (2 vol.) » pp. 159-178

La dernière lettre qu’il lui adresse (12 octobre 1803) est remplie d’une tendresse émue ; on y sent comme une révélation, longtemps contenue, qu’il se fait enfin à lui-même ; il ne s’était jamais dit encore à ce degré combien il l’aimait, combien elle lui était nécessaire : Tout mon esprit, écrivait-il, m’est revenu ; il me donne de grands plaisirs ; mais une réflexion désespérante les corrompt : je ne vous ai plus, et sûrement je ne vous aurai de longtemps à ma portée pour entendre ce que je pense. […] Un philosophe de ce temps-ci, homme d’infiniment d’esprit lui-même, a coutume de distinguer ainsi trois sortes d’esprits : Les premiers, à la fois puissants et délicats, qui excellent comme ils l’entendent, exécutent ce qu’ils conçoivent, et atteignent le grand et le vrai beau ; une rare élite entre les mortels !

2397. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Campagnes d’Égypte et de Syrie, mémoires dictés par Napoléon. (2 vol. in-8º avec Atlas. — 1847.) » pp. 179-198

Il dut noter cette conversation, de souvenir et peu après l’avoir entendue. […] Comment il s’y prit à cet effet, par quelles précautions, par quels artifices de langage et quel appareil de conduite, il faut l’entendre là-dessus lui-même.

2398. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Lettres de la marquise Du Deffand. » pp. 412-431

« N’est-il pas insupportable, disait-elle de son monde factice, de n’entendre jamais la vérité ?  […] Je l’ai entendue discuter avec toutes sortes de gens sur toutes sortes de sujets, et je ne l’ai jamais trouvée en faute.

2399. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mme du Châtelet. Suite de Voltaire à Cirey. » pp. 266-285

Jamais on ne l’entendit relever un ridicule. […] Tout à côté, Mme du Châtelet parlera de lui comme d’un enfant, avec sollicitude, avec tendresse : « Nous sommes quelquefois bien entêté, dit-elle en souriant, et ce démon d’une réputation que je trouve mal entendue ne nous quitte point. » Dans ces lettres à d’Argental, nous retrouvons la Mme du Châtelet passionnée et tendre, celle que Voltaire nous a si bien peinte en deux mots, « un peu philosophe et bergère ».

2400. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Balzac. » pp. 443-463

Comment l’artiste serait-il resté insensible et sourd à ces mille échos de la célébrité, et n’y aurait-il pas entendu l’accent de la gloire ? […] Dans l’intervalle, on me nomme à la maîtresse de la maison ; la conversation s’engage, et quand celle des dames qui était sortie rentre, tenant le plateau à la main pour nous l’offrir, elle entend tout d’abord ces paroles : « Eh bien !

2401. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Confessions de J.-J. Rousseau. (Bibliothèque Charpentier.) » pp. 78-97

Ce début primitif, beaucoup moins emphatique et moins fastueux que celui qu’on lit en tête des Confessions, ne nous fait point entendre le coup de trompette du Jugement dernier, et ne finit point par la fameuse apostrophe à l’Être éternel. […] Tour à tour bruyant et joyeux, silencieux et triste, je rassemblais autour de moi mes jeunes compagnons ; puis, les abandonnant tout à coup, j’allais m’asseoir à l’écart, pour contempler la nue fugitive, ou entendre la pluie tomber dans le feuillage… Et encore : Jeune, je cultivais les Muses ; il n’y a rien de plus poétique, dans la fraîcheur de ses passions, qu’un cœur de seize années.

2402. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Étienne Pasquier. (L’Interprétation des Institutes de Justinien, ouvrage inédit, 1847. — Œuvres choisies, 1849.) » pp. 249-269

Il fit ensuite le voyage d’Italie, et alla entendre à Pavie et à Bologne les professeurs de droit les plus en renom. […] Il pense qu’il y a profit à entendre les gens de divers métiers, militaires, veneurs, financiers, et jusqu’aux simples petits artisans.

2403. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Maintenon. » pp. 369-388

Je voudrais en démêler les raisons et les faire entendre. […]  » Et après l’avoir entendue un peu plus longtemps, on finit par le dire sérieusement avec elle : Oui, la pauvre femme en effet !

2404. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le duc d’Antin ou le parfait courtisan. » pp. 479-498

Mais, avant tout, une petite explication est nécessaire sur ce qu’on doit entendre par les Mémoires du duc d’Antin. […] Sa disgrâce, en 1707, après vingt-quatre ans de service, lui semble donc complète, et il la déplore avec des accents où la servilité elle-même se déguise sous des airs de sentiment : Mon malheur est sans exemple… Ce qu’il y a de plus épouvantable pour ce qui me regarde, c’est que le roi a toujours paru content de moi et touché de mes soins ; il l’a dit en son particulier même à qui l’a voulu entendre ; j’ai toujours été favorablement traité, même avec privauté et distinction ; un mois même avant ce dernier coup, il me dit tout haut dans son cabinet, devant toute la Cour, que j’avais toujours bien fait ; et cependant en voilà la récompense !

2405. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — II. (Fin.) » pp. 476-495

J’y suis accoutumé : je n’entends que mensonges répandus sur mon sujet ; je ne suis presque nourri que d’infâmes satires et que d’impostures grossières que la haine et l’animosité ne cessent de publier en Europe. […] C’est ainsi que Frédéric entend dans la pratique la tolérance.

2406. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre deuxième. Rapports du plaisir et de la douleur à la représentation et à l’appétition »

Par exemple, le plaisir de la faim assouvie diffère-t-il, comme plaisir, de celui d’entendre une sonate ? […] Nous n’avons pas d’un côté une froide intelligence qui contemplerait indifféremment les qualités des choses, et une sensibilité qui n’apprécierait que les intensités ; ces deux personnages ne pourraient jamais s’entendre.

2407. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre deuxième. La force d’association des idées »

De là cette loi : Si toute représentation tend à s’agréger avec les représentations semblables, c’est en vertu de l’identité structurale de leur siège dans le cerveau, ou en vertu de la connexion établie entre deux centres différents ; cette connexion suppose une communication et un trajet commun entre les deux centres, par exemple l’Opéra de Paris et un air des Huguenots que j’y ai entendu. […] C’est que la région cérébrale occupée à produire la conscience des sons actuels n’est plus entièrement disponible pour la représentation des sons autrefois entendus.

2408. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre III. Personnages merveilleux des contes indigènes »

Mot ouolof qui bénéficie du fait que c’est le premier que l’on entend en venant en Afrique pour désigner les êtres surnaturels des contes indigènes. […] J’entends par là ceux qui ne sont pas affectés à l’usage d’un possesseur unique et n’ont pas pour objet unique le bien de ce possesseur.

2409. (1824) Discours sur le romantisme pp. 3-28

La voix qui se fait entendre est celle de toutes peut-être qui a le moins de force et d’autorité ; mais il ne lui sera pas reproché de manquer de zèle pour la bonne cause et de respect pour la vérité. […] Les romantiques font aux classiques plusieurs reproches qu’il convient d’examiner ; et, d’abord, il faut savoir ce qu’ils entendent par classiques.

2410. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Saint-Bonnet » pp. 1-28

Mais si l’on entend par ce mot de marguillier, mal choisi pour tout le monde, ce que je ne veux pas comprendre, je dirai, moi, à son critique, qu’il est marguillier comme Platon — lequel, du reste, avait vendu de l’huile — était épicier. […] La science, la seule science qu’il reconnaisse, avec raison, et qui importe à l’homme : la science de son être et de l’Être, il ne l’entend que dans le sens révélé du mot.

2411. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Ernest Renan »

Et d’autant que dans son livre il y a une théorie, la seule chose nettement formulée dans ce livre composé d’un peut-être universel, et qui m’inquiète à juste titre sur la probité de l’auteur, — j’entends sa probité d’historien et de philosophe. […] Et d’autant que l’Église, en ces derniers temps, avait déjà entendu bruire contre elle ces plumes protestantes, — la petite pluie après les tonnerres éteints de Luther, — et n’en avait pas sourcillé.

2412. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iii »

Écoute. » Il s’agenouillait devant lui, lui entourait le cou de ses bras ; leurs deux têtes s’appuyaient l’une à l’autre, et, pendant quelques minutes, on n’entendait plus rien que le chuchotement des lèvres… Puis, après l’avoir entendu, il lui parlait, le fortifiait, l’enthousiasmait, et, quand c’était fini et que le petit était encore mieux qu’avant disposé à tous les sacrifices, il l’embrassait ».

2413. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [M. de Latena, Étude de l’homme.] » pp. 523-526

Car, pour louer ensuite plus à mon aise M. de Latena, je veux en passant avouer une disposition de mon esprit qui est peut-être un faible, mais dont je ne puis faire tout à fait abstraction dans mes jugements : je suis (sans être Alcibiade) du goût de celui-ci, à qui Socrate disait : « Vous demandez toujours quelque chose de tout neuf ; vous n’aimez pas à entendre deux fois la même chose. » Je suis de ceux qui, dans cet ordre moral, pencheraient plus volontiers du côté du nouveau (si le nouveau est possible) que du trop connu ; en ce qui est de l’expression, le brillant du tour et la pointe (dans le sens des anciens) ne me déplaisent pas non plus autant qu’à d’autres.

2414. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XI » pp. 39-46

C'est la poésie des recueils sur le théâtre ; » voulant faire entendre que le succès de Lucrèce est d’avoir fait connaître à tous sur la scène, en fait de beautés de style, ce qui auparavant s’imprimait un peu à la sourdine et n’était lu que des gens du métier.

2415. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXIII » pp. 133-140

Saint-Marc Girardin a prêchée dans ses cours avec beaucoup de suite et de piquant, c’est la petite morale, comme il l’appelait, celle de tout le monde, celle de la société et du grand chemin, celle de la religion sans doute, mais celle aussi de l’intérêt bien entendu ; il sait la dose juste dans laquelle on peut combiner la générosité et l’utilité sans compromettre celle-ci ; il a constamment raillé, et souvent avec bien de la justesse, les enthousiasmes pompeux, les désintéressements à faux, toute l’exagération lyrique d’alentour.

2416. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « SUR ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 497-504

Cette influence n’atteignit pas non plus Béranger, dont les moules merveilleux étaient déjà fondus et les refrains de toutes parts voltigeants ; mais, s’il ne profita pas des perfectionnements de l’artiste, nul mieux que lui n’était fait pour entendre ce mélange d’étude et de passion, d’élaboration ingénieuse et d’enthousiasme147.

2417. (1874) Premiers lundis. Tome I « Deux révolutions — I. L’Angleterre en 1688 et la France en 1830 »

En Angleterre, les partis politiques qui avaient conservé leurs formes religieuses même sous la Restauration, et qui s’étaient successivement brouillés ou réunis, selon leurs intérêts, finirent par s’entendre, en haine du papisme qui les opprimait, et la Révolution de 1688 aboutit au triomphe complet de l’anglicanisme, à la tolérance pour les non-conformistes protestants, à la proscription contre les catholiques.

2418. (1874) Premiers lundis. Tome II « Mort de sir Walter Scott »

, le devoir des générations nouvelles, leur piété bien entendue envers les mânes de ces hommes dont la grandeur et les vrais bienfaits ont racheté les faiblesses, consiste, au défaut du génie que Dieu seul dispense, à ne pas s’endormir dans un lâche sommeil ni dans des intérêts étroits et vulgaires, à ne pas s’égarer dans de chétives ambitions, à ne pas croupir au giron de quelque pouvoir corrompu et corrupteur, mais à marcher avec constance, développant leur pensée, défendant leur droit, n’abdiquant aucune portion de la vérité, la cherchant dans la méditation et l’étude, la répandant par la parole, et fidèles à tout ce qui relève l’homme et l’honore.

2419. (1874) Premiers lundis. Tome II « Deux préfaces »

Fontenelle, d’Alembert, De Boze, Fréret, Vicq-d’Azyr et Condorcet, ont davantage approché dans leurs Éloges du but tel que je l’entends.

2420. (1875) Premiers lundis. Tome III « Le roi Jérôme »

Il fait son devoir dans les terribles journées des Quatre-Bras et de Waterloo ; blessé, il continue de lutter ; il se bat simplement, vaillamment, dans ce bois accidenté d’Hougoumont dont chaque arbre est pris et repris avec tant d’acharnement pendant tout le jour ; le soir, il rejoint l’héroïque et désespéré Capitaine dans le carré de la vieille garde, où l’âme guerrière de la France s’est comme réfugiée ; et il entend cette parole qui, en un tout autre moment, eût réjoui son cœur : « Mon frère, je vous ai connu trop tard. » On n’a pas à suivre le prince Jérôme dans les longues années de la proscription et de l’exil.

2421. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIX. De la littérature pendant le siècle de Louis XIV » pp. 379-388

Un seul asile restait encore, la religion, et dans cet asile, un homme, Bossuet, fit entendre quelques vérités courageuses.

2422. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « André Theuriet »

Il n’entendait plus parler de Mme de Grandclos, et il ne s’en attristait plus… « Maintenant il est vieux, il a pris sa retraite, et, encore que rien ne le retienne plus en Touraine, il n’a pas quitté Montrésor, où il continue le même train de vie insipide et inutile.

2423. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Une âme en péril »

C’est égal, je voudrais entendre la prière qu’il adresse à Dieu, de sa stalle de chanoine.

2424. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Rêveries sur un empereur »

Un autre acte, bien entendu, serait lié à celui-là.

2425. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Maeterlinck, Maurice (1862-1949) »

Et, ici, les voix qu’on entend ont de telles plaintes.

2426. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Merrill, Stuart (1863-1915) »

Louis de Saint-Jacques Il est bien entendu que je ne fais pas un grief à M. 

2427. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VIII. Les Fedeli » pp. 129-144

Giovanni-Battista figurait aussi, bien entendu, dans les rangs des Gelosi et jouait sous le nom de Lelio.

2428. (1882) Qu’est-ce qu’une nation ? « I »

Les nations, entendues de cette manière, sont quelque chose d’assez nouveau dans l’histoire.

2429. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIX » pp. 207-214

La philosophie du xviiie  siècle tenait pour maxime que c’était par l’amélioration des rois qu’il fallait commencer l’amélioration du sort des peuples, et j’ai entendu d’Alembert excuser par ce motif les paroles adulatrices de Voltaire au grand Frédéric et à l’impératrice de Russie.

2430. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 124-134

Mais ne doit-on pas convenir qu’il a trop abusé de cette réputation, en voulant établir dans les Lettres certains paradoxes qui tendent à dénaturer les genres, & que l’esprit géométrique, si nous entendons par ce mot la justesse des idées, auroit dû être le premier à réprouver ?

2431. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 439-450

Pour donner une idée complette de la bonne foi de cet Ecrivain, nous ne devons pas laisser ignorer qu’il fait entendre à ses Lecteurs que c’est contre son gré que nous avons loué ses Ouvrages, tandis que son déchaînement contre nous vient de ce que nous ne lui avons pas accordé autant d’éloges qu’il en désiroit.

2432. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Démosthéne, et Eschine. » pp. 42-52

que seroit-ce , dit-il, si vous l’aviez entendu lui-même ?

2433. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Ronsard, et Saint-Gelais. » pp. 120-129

Il faut entendre un badaud de l’Hélicon se plaindre de ce qu’on n’admire pas assez Ronsard, de ce que son talent n’est pas une égide contre tous les traits de la critique.

2434. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 18, que nos voisins disent que nos poëtes mettent trop d’amour dans leurs tragedies » pp. 132-142

On les entend sans cesse s’applaudir des fers qu’ils portent, et ils souhaitent que leurs chaînes soïent éternelles, nouvelle preuve qu’ils n’en sentent point le poids.

2435. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 29, si les poëtes tragiques sont obligez de se conformer à ce que la geographie, l’histoire et la chronologie nous apprennent positivement » pp. 243-254

Ce que je dis ne doit pas s’entendre des faits de peu d’importance, et consequemment peu connus.

2436. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 7, que les genies sont limitez » pp. 67-77

Il entendoit très-bien le clair-obscur, et il a surpassé dans la couleur locale ses concurrens.

2437. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 18, qu’il faut attribuer la difference qui est entre l’air de differens païs, à la nature des émanations de la terre qui sont differentes en diverses regions » pp. 295-304

Comme il est des païs plus sujets au tonnerre que d’autres, il est aussi des années où il tonne dix fois plus souvent dans le même païs qu’en d’autres années. à peine entendit-on deux coups de tonnerre à Paris l’été de 1716.

2438. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le voltairianisme contemporain »

Il Voltaire, en effet, suffit seul, — et ceci, entendez-le bien !

2439. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Préface » pp. -

Je n’entends nullement dire par là que le roman ait détrôné les autres œuvres de l’esprit humain, et leur ait ravi l’attention publique.

2440. (1921) Esquisses critiques. Première série

Les hommes à qui elles se trouvent décernées entendent un temps durant leur nom résonner tumultueusement dans la bouche des hommes. […] Nul n’a comme lui le secret d’insinuer et de laisser entendre. Or il va de soi que lorsque l’on sous-entend, il faut pour que l’on soit entendu que l’auditeur y mette du sien, et quand ce qu’il entend alors est très plaisant, comment ne se féliciterait-il pas d’y avoir réussi ? […] Marcel Boulenger qu’il nous conviendrait le mieux d’analyser ce que nous entendons par ce terme. […] Les drames du cœur leur sont inconnus, et l’on n’entend sortir de la bouche inexpressive de leurs figurines qu’une voix fluette, sans écho, ni retentissement.

2441. (1898) La cité antique

Qu’est-ce que les jurisconsultes entendaient par l’agnation, par lagens ? […] Qu’entendait-on par cette liberté dont on parlait sans cesse ? […] On a beaucoup discuté sur ce que les jurisconsultes romains entendaient par l’agnation. […] Il faut d’ailleurs bien entendre que le droit d’aînesse n’était pas la spoliation des cadets au profit de l’aîné. […] Le père est le chef suprême de la religion domestique ; il règle toutes les cérémonies du culte comme il l’entend ou plutôt comme il a vu faire son père.

2442. (1908) Après le naturalisme

Mais n’y voyons point autre chose qu’un faisceau de méthodes positives, matérielles, coordonnées entre elles et surtout ne lui croyons point une compréhension de l’absolu en soi, une intellexion des causes originaires dont il n’entend même pas en quoi elles peuvent consister. […] Sa vie, expliquons-nous sur ce point, réside dans le succès qu’elle rencontre auprès de la multitude intelligente — et par succès, nous entendons non pas la faveur seule qui s’attache aux œuvres, mais l’influencé qu’elles portent dans les mœurs. […] La bonté, l’égoïsme même, tel que nous l’entendons, expression de l’individualisme vital, nous imposent de soulager ceux qui souffrent et voilà l’œuvre de l’esprit ramené après un long détour, pas tout-à-fait inutile cependant, au point d’où sont partis les Encyclopédistes. […] La vérité entend les vaincre. […] Mais il faut s’entendre lorsqu’on parle de tradition.

2443. (1857) Causeries du samedi. Deuxième série des Causeries littéraires pp. 1-402

Or, maintenant, si M. de Balzac, comme vous le dites, possédait si bien le sentiment de cette réalité, de cette vérité, comment se fait-il que, dès qu’il se trouvait en présence d’un public rassemblé, il n’y eût plus moyen de s’entendre ? […] Eh bien, que dirait-on d’un maître de maison qui, au lieu d’offrir à ses invités des violons et des bougies, des parures et des fleurs, les forcerait de passer par une étude d’avoué et d’entendre la lecture d’un inventaire ou d’un procès ? […] Chaque parti d’ailleurs entend son honneur à sa manière, et l’on ne doit pas blâmer ceux qui regardent certaines alliances comme plus compromettantes et plus onéreuses que certaines inimitiés. […] C’est donc pour nous une double bonne fortune que d’entendre médire de Voltaire avec une modération spirituelle, et de le voir attaqué par le ministre d’une religion qui n’est pas la nôtre. […] Il dut causer de rudes insomnies à ces respectables robes noires qui n’entendaient pas laisser mettre leurs doctrines en chansons.

2444. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre III. Ben Jonson. » pp. 98-162

Je t’entends. […] N’ayez pas peur, il n’entend pas. […] Morose, enchanté de ses courtes réponses et de sa voix qu’il entend à peine, l’épouse pour faire pièce à son neveu. […] Entendez la reine Élisabeth.

2445. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Figurines »

» Elle était « naturelle », c’est entendu. […] Mme de Sévigné avait fort bien laissé Marguerite au couvent jusqu’à dix-huit ans, et l’on sait que, lorsque la mère et la fille se rencontraient, elles ne pouvaient s’entendre. […] Personne, enfin, n’a mieux vu la vanité du décor politique, social et religieux de son temps, et n’a entendu plus de craquements dans le vieil édifice. […] Il dit de Voltaire : « Voltaire a, comme le singe, les mouvements charmants et les traits hideux. » Il dit de Platon : « Platon se perd dans le vide, mais on voit le jeu de ses ailes, on en entend le bruit. » Il nous apprend que « Xénophon écrit avec une plume de cygne, Platon avec une plume d’or et Thucidyde avec un stylet d’airain ».

2446. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

Car, mes frères, ne vous souvenez-vous pas d’avoir entendu comme moi, quand nous étions enfants, quelqu’un dire qu’il avait entendu le domestique de mon père dire que mon père donnerait volontiers le conseil à ses enfants de porter des galons d’or, aussitôt qu’ils auraient de l’argent pour en acheter ? […] Avec sa merveilleuse facilité à prendre tous les rôles et à les jouer au naturel, Swift se fit drapier40 pour être mieux entendu des commerçants et du peuple, et jamais la crédulité populaire, la peur, l’intérêt n’ont été mis en œuvre avec plus de chaleur et d’habileté que dans ces célèbres Lettres. […] « Il y a environ dix jours, écrivait Gay à Swift, le 17 novembre 1726, fut publié ici un livre sur les voyages d’un certain Gulliver, qui depuis fait l’entretien de toute la ville ; toute l’édition fut vendue en une semaine, et rien n’est plus divertissant que d’entendre les opinions différentes de tout le monde sur ce livre, que tout le monde cependant s’accorde à goûter au dernier point.

2447. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre quatrième. Éléments sensitifs et appétitifs des opérations intellectuelles — Chapitre deuxième. Les opérations intellectuelles. — Leur rapport à l’appétition et à la motion. »

Dès que l’animal entend un son qui, par rapport au silence antérieur, est une nouveauté, si ce n’est pas le premier son qu’il entende, il assimilera aussitôt ce son aux autres sons qu’il a entendus ; il reconnaîtra un son, non une odeur ou une saveur. […] La notion de cause ainsi entendue, ou, ce qui revient au même, le déterminisme des antécédents et des conséquents, est le nerf de toute induction.

2448. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — I. » pp. 473-493

Il est un point sur lequel il faut passer condamnation une fois pour toutes, afin d’être juste ensuite envers Mme Dacier : elle n’entend pas la raillerie, elle n’est à aucun degré femme du monde, et elle manque d’un certain goût, d’un certain tact rapide qui est souvent la principale qualité de son sexe. […] Du caractère dont elle est, Mme Dacier entend mieux la force, l’abondance, la veine pleine et continue d’un auteur ancien que la grâce et la légèreté ; elle rend mieux l’effet du texte avec Plaute, avec Térence qu’avec Anacréon ; et surtout elle nous rendra mieux Homère.

2449. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « I » pp. 1-20

À l’entendre, lui l’homme de la publicité harcelante et qui fatigua la renommée, il ne publiait jamais, presque jamais, ses livres que malgré lui, à son corps défendant : il avait un secrétaire qui le volait, un ami indiscret qui colportait ses manuscrits ; le libraire pirate s’emparait de son bien en le gâtant, en le falsifiant, et force lui était alors d’imprimer lui-même ses productions et de les livrer au public dans leur sincérité. […] Je n’y entends rien : je ne conçois pas que la mesure d’un angle soit proportionnelle, et que l’angle ne le soit pas.

2450. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Maine de Biran. Sa vie et ses pensées, publiées par M. Ernest Naville. » pp. 304-323

mais le progrès, dans le sens où il l’entend, gagne et avance toujours ; il est de ceux qui travaillent à se perfectionner sans cesse « L’homme extérieur se détruit, l’homme intérieur se renouvelle », se dit-il avec l’apôtre. […] Quand on l’a bien lu, il naît, selon l’esprit et les dispositions qu’on y apporte, une foule de réflexions sur les problèmes les plus importants et les plus déliés de notre condition humaine ; mais la nature si délicate de ces problèmes fait qu’il vaut mieux que chacun tire sa leçon comme il l’entend, et boive l’eau de la source à sa manière.

2451. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie de Maupertuis, par La Beaumelle. Ouvrage posthume » pp. 86-106

Et La Harpe écrivait de La Beaumelle, vers 1774 : « Je l’ai entendu, il y a deux ans, avouer lui-même que son procédé était inexcusable, et qu’il avait eu les premiers torts avec M. de Voltaire. » — Voltaire outré répondit (1753) par son Supplément au Siècle de Louis XIV, ou réfutation des notes critiques qu’avait données La Beaumelle ; il lui prêta même et lui imputa, par une de ces confusions volontaires dont il ne se faisait pas faute, des notes qui n’étaient pas de lui, mais d’un continuateur, et la guerre à mort fut engagée. […] Je crois l’entendre : « Si je lui mettais ici un peu de Montaigne, ça ne ferait pas mal. » Nous l’avons vu qui vient d’en mettre.

2452. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de l’Académie française, par Pellisson et d’Olivet, avec introduction et notes, par Ch.-L. Livet. » pp. 195-217

Je n’ai voulu que faire sentir d’une manière un peu saillante comment, sur ce point, le grand fondateur l’avait entendu. […] On oublie que, par ces concours qu’elle ouvre à l’émulation des jeunes auteurs, l’Académie semble dire : « Jeune homme, avancez, et là, sur ce parquet uni, au son d’une flûte très simple, mais au son d’une flûte, exécutez devant nous un pas harmonieux ; débitez-nous un discours élégant, agréable, justement mesuré, où tout soit en cadence et qui fasse un tout ; où la pensée et l’expression s’accordent, s’enchaînent ; dont les membres aient du liant, de la souplesse, du nombre ; un discours animé d’un seul et même souffle, ayant fraîcheur et légèreté ; qui laisse voir le svelte et le gracieux de votre âge ; dans lequel, s’il se montre quelque embarras, ce soit celui de la pudeur ; quelque chose de vif, de court, de proportionné, de décent, qui fasse naître cette impression heureuse que procure aux vrais amis des lettres la grâce nouvelle de l’esprit et le brillant prélude du talent. » — Ainsi j’entends cet idéal de début académique, dont il ne se rencontre plus guère d’exemple.

2453. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Journal et mémoires du marquis d’Argenson, publiés d’après les manuscrits de la Bibliothèque du Louvre pour la Société de l’histoire de France, par M. Rathery » pp. 238-259

Vous n’avez ni parlements, ni comités, ni états, ni gouverneurs, j’ajouterai presque ni roi ni ministres ; ce sont trente maîtres des requêtes, commis aux provinces, de qui dépend le bonheur ou le malheur de ces provinces, leur abondance ou leur stérilité… » Une autre fois, dans le salon de son père, d’Argenson avait entendu Law dire de la France, par opposition à l’Angleterre ; « Heureux le pays où, en vingt-quatre heures, on a délibéré, résolu et exécuté, au lieu qu’en Angleterre il nous faudrait vingt-quatre ans !  […] Il avait de l’ambition pour lui, et, de là, il en avait pour l’État ; j’entends par là de cette ambition de grandeur, inane nomen.

2454. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

Je m’occupe un peu à lire Cicéron, Montaigne, des livres qui me donnent un peu de force à l’âme ; mais elle est accablée. » N’entendons-nous pas le cri de l’âme ? […] Elle avait des maximes pleines de sens : « Il y a un âge où il faut se contenter du bien sans chercher le mieux. » — « Le bonheur est comme chacun l’entend, il est relatif. » — « La santé et les affaires d’intérêt sont les deux bases du bonheur, il faut les soigner et les ménager. » Chez elle la passion était usée et éteinte il y avait beau jour.

2455. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

Quand on parle de goût et qu’on célèbre celui de l’ancienne société, celui de quelques hommes en particulier dont M. de Talleyrand était comme le type accompli, il faut bien s’entendre et se garder de confondre le goût social et le goût littéraire ; car en matière de littérature et surtout de poésie, ces gens d’esprit en étaient restés aux formes convenues de leur jeunesse et aux lieux communs de leur éducation première ; on en a une singulière preuve dans la lettre suivante : « 18 (août 1828) Bourbon. […] Cela est vrai si, par figure, on entend l’ensemble de la physionomie. — « Les traits, a dit La Bruyère, découvrent la complexion et les mœurs », et il ajoute : « mais la mine désigne les biens de fortune ».

2456. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « QUELQUES VÉRITÉS SUR LA SITUATION EN LITTÉRATURE. » pp. 415-441

Or, pour qui sait voir et observer, ces deux faits (que je n’entends encore une fois ni égaler ni juger en eux-mêmes) sont un grand enseignement, une mesure très-sensible de l’état du goût, du degré de température, et du niveau d’aujourd’hui. […] J’entends par sportule la protection banale et à la fois empressée, le pied d’égalité avec les meilleurs.

2457. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — II. » pp. 195-213

Mlle Phlipon s’en tira en beauté qui ne craint pas les épreuves, et elle était remise à peine de la longue convalescence qui s’ensuivit, que les prétendants, à qui mieux mieux, et de plus en plus éblouis, se présentèrent. « Du moment où une jeune fille, écrit-elle dans ses Mémoires, atteint l’âge qui annonce son développement, l’essaim des prétendants s’attache à ses pas comme celui des abeilles bourdonne autour de la fleur qui vient d’éclore. » Mais à côté d’une si gracieuse image, elle ne laisse pas de se moquer ; elle est agréable à entendre avec cette levée en masse d’épouseurs qu’elle fait défiler devant nous et qu’elle éconduit d’un air d’enjouement. […] Sophie, Sophie, juge à quel point je ressens l’amitié, puisque c’est chez moi le seul sentiment qui ne soit pas captif. » Mais Sophie seule, même en amitié, ne suffit plus ; vers le milieu de cette année 1776, on aperçoit quelque baisse, on entend quelque légère plainte : « Sophie, Sophie, vos lettres se font bien attendre… » En même temps que d’un côté on pensait à La Blancherie, de l’autre, à Amiens, on pensait au cloître ; Sophie avait eu l’idée, un momeni, de se faire religieuse.

2458. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre III »

Plus elle est monstrueuse, plus elle est vivace, accrochée aux plus frêles vraisemblances et tenace contre les plus fortes démonstrations  Sous Louis XV, pendant l’arrestation des vagabonds, quelques enfants ayant été enlevés par abus ou par erreur, le bruit court que le roi prend des bains de sang pour réparer ses organes usés, et la chose paraît si évidente, que les femmes, révoltées par l’instinct maternel, se joignent à l’émeute : un exempt est saisi, assommé, et, comme il demandait un confesseur, une femme du peuple prend un pavé, crie qu’il ne faut pas lui donner le temps d’aller en paradis, et lui casse la tête, persuadée qu’elle fait justice739  Sous Louis XVI, il est avéré pour le peuple que la disette est factice : en 1789740, un officier, écoutant les discours de ses soldats, les entend répéter « avec une profonde conviction que les princes et les courtisans, pour affamer Paris, font jeter les farines dans la Seine ». […] « Au seul nom des nouvelles assemblées, dit une commission provinciale en 1787745, nous avons entendu un pauvre laboureur s’écrier : Hé quoi !

2459. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Paul Bourget  »

En réalité, il y a autant de manières d’entendre la critique que le roman, le théâtre ou la poésie : la personnalité de l’écrivain peut donc s’y marquer aussi fortement, quand il en a une. […] A peine si le psychologue entend ce que signifie ou crime, ou mépris, ou indignation… Même il se complaît à la description des états dangereux de l’âme qui révoltent le moraliste ; il se délecte à comprendre les actions scélérates, si ces actions révèlent une nature énergique et si le travail profond qu’elles manifestent lui paraît singulier.

2460. (1894) Propos de littérature « Chapitre II » pp. 23-49

On l’entend bien, le concept philosophique n’est pas nécessairement antérieur au concept plastique ; l’un et l’autre restent indissolublement unis si, encore une fois, les formes secondaires ont leur raison d’être dans le conflit qu’elles achèvent d’exprimer. […] Par lesquels je n’entends pas les chefs-d’œuvre de Puvis de Chavannes, de Rops, de Moreau, de Burne Jones ; on pourrait appliquer plutôt à la plupart d’entre eux ce que je disais des cathédrales.

2461. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre VIII. La question de gout ce qui reste en dehors de la science » pp. 84-103

Soutenez encore l’équivalence artistique de Sparte et d’Athènes, des Romains et des Grecs, et vous entendrez quel éclat de rire saluera ce paradoxe. […] D’ailleurs, se fût-on, par le plus grand des hasards, entendu sur les noms de ces grands juges de la littérature, il y a gros à parier qu’ils seraient eux-mêmes en désaccord sur une foule de points, et l’on serait replongé dans l’incertitude.

2462. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre IV »

Hubert est un mari de campagne : il n’entend rien aux galanteries de la ville, et traite en braconnier l’amour défendu. […] Les femmes s’entendent à faire la police d’un salon ; leurs yeux acérés furettent malignement dans les mille plis d’une robe, dans les broderies d’un corsage ; elles estiment l’étoffe, elles expertisent la guipure, elles évaluent les bijoux ; en un clin d’œil, l’addition de la dame est faite, et, si la somme excède ses ressources, voilà la victime parée pour le sacrifice.

2463. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Fontenelle, par M. Flourens. (1 vol. in-18. — 1847.) » pp. 314-335

Disciple de Descartes en philosophie, mais disciple libre et qui se permettait de juger son maître, il comprit qu’il y avait un rôle à prendre, un milieu à tenir entre les gens du monde et les savants, et que l’esprit, qui, d’un côté, servait à entendre, pouvait servir, de l’autre, à exprimer. […] Fontenelle n’entend rien à la Grèce.

2464. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Saint-Évremond et Ninon. » pp. 170-191

J’ai quelquefois entendu demander pourquoi j’aimais tant à m’occuper de ces femmes aimables et spirituelles du passé, et à les remettre dans leur vrai jour. […] « Les femmes courent après Mlle de Lenclos, disait Mme de Coulanges, comme d’autres gens y couraient autrefois. » Et là-dessus Mme de Sévigné écrivait à M. de Coulanges : « Corbinelli me mande des merveilles de la bonne compagnie d’hommes qu’il trouve chez Mlle de Lenclos ; ainsi elle rassemble tout sur ses vieux jours, quoi que dise Mme de Coulanges, et les hommes et les femmes. » Aucun livre ne nous rend mieux ce qu’était dans les derniers temps le salon de Mlle de Lenclos, que le Dialogue sur la musique des anciens, par l’abbé de Châteauneuf : c’est une conversation qui se tient chez elle, et où on l’entend dire son mot avec goût, avec justesse, et en excellente musicienne qu’elle était.

2465. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Mémoires du cardinal de Retz. (Collection Michaud et Poujoulat, édition Champollion.) 1837 » pp. 40-61

Retz entend à merveille et nous fait entendre tout cela.

2466. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — I. » pp. 1-22

Sans trop serrer de près les questions qui se rattachaient aux deux époques critiques de la vie du maréchal, j’avais entendu causer quelques-uns de ses amis, et j’avais été frappé du degré de chaleur et d’affection que tous mettaient à le défendre et à continuer de l’aimer. […] Les généraux le distinguèrent ; il eut son premier combat à Maison-Méane ; il y entendit pour la première fois le sifflement des balles et des boulets, qui lui parut des plus agréables : « J’avais une impétuosité et une ardeur extrêmes, dont l’effet me portait à vouloir toujours avancer. » Envoyé au siège de Toulon, il y retrouve Bonaparte, qui l’emploie et le garde avec lui.

2467. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Ivan Tourguénef »

Tourguénef nous emmène à Bade, dans les salons de l’aristocratie russe, ou qu’il nous fasse entendre les paroles mystiques du nain Caciane, au fond d’une forêt du gouvernement de Kalouga, ou que ce soit la vie infiniment triste et monotone d’un propriétaire végétant seul au milieu des boues de son bien qu’il nous montre, immédiatement, de plain-pied, nous pénétrons dans le cercle de ces existences lointaines ; comme séduits par une incantation, nous prenons notre part à d’autres souffrances et à d’autres passions que les nôtres, jusqu’à ce que le rayon de nos émotions et de notre expérience comprenne toute une époque et toute une terre, où nous emporte une illusion aussi complète et aussi impérieuse qu’un rêve. […] Que l’on considère que ces études de pathologie mentale sont écrites par un auteur qui s’entend merveilleusement à décomposer les mouvements d’âme, à manier les sentiments, à percevoir la forme particulière qu’ils revêtent dans l’individu qu’il analyse, à faire entrevoir par le clair-obscur d’un style réticent, par l’indécis des incidents contradictoires, tout le complexe de l’être qu’ils affectent, qui connaît les infinies sinuosités, les étranges mélanges de clarté et d’ombre que présente tout esprit humain, on mesurera ce que les romans de Tourguénef ont de concluant et de propre.

2468. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre I. Shakespeare — Sa vie »

Le bruit de la mer toujours entendu. […] On représentait là la tragédie de lord Buckhurst, Gorboduc ou Ferrex et Porrex, la mère Bombic, de Lily, où l’on entendait les moineaux crier phip phip, le Libertin, imitation du Convivado de Piedra qui faisait son tour d’Europe, Félix and Philiomena, comédie à la mode, jouée d’abord à Greenwich devant la « reine Bess », Promos et Cassandra, comédie dédiée par l’auteur George Whetstone à William Fletwood, — recorder de Londres, le Tamerlan et le Juif de Malte de Christophe Marlowe, des interludes et des pièces de Robert Greene, de George Peele, de Thomas Lodge et de Thomas Kid, enfin des comédies gothiques, car, de même que la France a l’Avocat Pathelin, l’Angleterre a l’Aiguille de ma commère Gurton.

2469. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre II : La littérature du xviie  siècle »

Lorsque je vois Boileau s’échauffer contre les mauvais ouvrages, comme si c’étaient de mauvaises actions, louer et célébrer avec foi et passion et avec une admiration désintéressée Racine et Molière, lorsque j’entends sa voix mâle et émue demander au poëte l’honnêteté, la dignité, la fierté du cœur, je l’aime et je l’admire avec M.  […] La Fronde, bien entendu, est un événement perdu auquel on ne fait que de vagues et lointaines allusions : à plus forte raison a-t-on oublié le xvie  siècle.

2470. (1868) Curiosités esthétiques « VI. De l’essence du rire » pp. 359-387

J’ai entendu résonner à mes oreilles de pareilles hérésies dans des dîners d’académiciens. […] Le comique ne peut être absolu que relativement à l’humanité déchue, et c’est ainsi que je l’entends.

2471. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — L’inter-nationalisme »

Le sentiment de la foule et même l’opinion raisonnée s’entendent, comme nous l’avons dit, pour envisager chaque nation comme un tout absolument indépendant de son milieu, et « sans fenêtre » sur l’extérieur comme la monade leibnitzienne. […] Il nous faut du reste préciser le sens que nous entendons donner à cette expression de solidarité inter-nationale.

2472. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXIX » pp. 117-125

Cela m’a tout l’air d’une question qui vient se poser et se fonder pour longtemps et sur laquelle on n’est pas près de s’entendre.

2473. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Sur l’École française d’Athènes »

S’il s’agissait de bien entendre et de goûter l’ancien français de Villehardouin, dont je suppose qu’on eût été séparé par quelque grande catastrophe sociale et quelque conquête, le plus sûr serait encore d’être Français, et, un peu d’étude aidant, on se trouverait aisément en avance à cet effet sur le plus docte des Germains. » Il semble que le résultat indiqué par ces considérations diverses, c’est qu’une École française , instituée à Athènes pour un certain nombre de jeunes architectes et de jeunes philologues , concilierait à la fois les intérêts de l’art et ceux de l’érudition.

2474. (1874) Premiers lundis. Tome I « [Préface] »

La publication, que nous préparons après celle-ci, sera la Correspondance générale : deux appels précédents ont été entendus, et nous ont valu de précieux témoignages de confiance.

2475. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la Révolution française. Ve et VIe volumes. »

C’est quand il suit à l’échafaud des victimes sans tache, les Girondins, madame Roland, Marie-Antoinette, qu’il faut l’entendre alors n’épargnant pas les accents d’une pitié d’autant plus éloquente qu’elle est sans réserve.

2476. (1874) Premiers lundis. Tome II « E. Lerminier. Lettres philosophiques adressées à un Berlinois »

Quand on entend les hommes renommés par l’étendue de leur savoir et de leur esprit épuiser les sophismes de la logique et mille fausses lueurs détournées de l’histoire, au service d’une négation cynique de tout progrès social, il y a plaisir à contempler un esprit ardent qui, l’œil sur un but magnifique et lointain, ne ménage aucune étude, aucune indication empruntée aux philosophies et aux révolutions du passé, pour diminuer l’intervalle qui reste à franchir, pour tenter d’ajouter une arche de plus à ce pont majestueux où l’humanité s’avance.

2477. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre V »

On ne peut — toute question de censure mise à part — dire et faire dire tout ce que l’on écrit : le même mot qui, aperçu avec sa forme propre et son aspect typographique se pardonne ou s’admire, devient vite, entendu et défiguré par l’acoustique artificielle de la rampe, insupportable d’invraisemblance ou de pédantisme. — Et cela même lorsqu’il sort d’une bouche autorisée — Les rôles de médecins sont particulièrement délicats à traiter, car ils oscillent forcément entre la terminologie vague des mentalités moyennes, ou le répertoire magistral de l’enseignement technique.

2478. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIV. De la plaisanterie anglaise » pp. 296-306

Ils développent toutes les idées, ils exagèrent toutes les nuances, ils ne se croient entendus que lorsqu’ils crient, et compris qu’en disant tout.

2479. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 39-51

Qui pourroit n’être pas révolté de le voir recueillir soigneusement les éloges qu’il a reçus de M. de Voltaire dans des Lettres particulieres ; de lui entendre répéter, au sujet de son Eloge de Fénélon, que c’est-là le style des Grands Maîtres , que c’est le Génie du grand Siecle passé, fondu dans la Philosophie du Siecle présent  ; &, au sujet de sa Mélanie, que l’Europe attendoit cette Piece avec impatience ?

2480. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre VIII »

La langue de la marine s’est fort gâtée en ces derniers temps, j’entends la langue écrite par certains romanciers, car la langue orale a dû se maintenir intacte.

2481. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préface des « Rayons et les Ombres » (1840) »

On entendrait les oiseaux chanter dans ses tragédies ; on verrait l’homme souffrir dans ses paysages.

2482. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean de Meun, et les femmes de la cour de Philippe-le-Bel. » pp. 95-104

Ils écrivirent qu’elles avoient mal pris le sens de son livre ; que le roman étoit une allégorie soutenue ; que, par cette rose, l’objet des vœux de l’amant, il falloit entendre la sagesse, ou l’état de grace, ou la sainte Vierge, ou bien l’éternelle béatitude.

2483. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — Les inscriptions des monumens publics de France doivent-elles être écrites en Latin ou en François. » pp. 98-109

Le roi lui-même voulut que, par la suite, les glorieux événemens de son règne fussent lus & entendus de tout le monde.

2484. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — De la langue Latine. » pp. 147-158

L’auteur se propose d’y montrer le ridicule qu’il y a de prétendre bien écrire en latin, bien parler & bien entendre cette langue.

2485. (1867) Le cerveau et la pensée « Avant-propos »

Il n’est pas moins clair que deux musiciens qui, à mérite égal, auraient à se faire entendre sur deux instruments inégaux paraîtraient être l’un à l’autre dans le rapport de leurs instruments.

2486. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre VI. Conclusions » pp. 232-240

Peut-être entendait-il par-là la production actuelle.

2487. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre II. Des Orateurs. — Les Pères de l’Église. »

Ce qu’on remarque de plus frappant dans cet ouvrage, c’est le développement de l’esprit humain : on entre dans un nouvel ordre d’idées ; on sent que ce n’est plus la première antiquité ou le bégaiement de l’homme qui se fait entendre.

2488. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 33, de la poësie du stile dans laquelle les mots sont regardez en tant que les signes de nos idées, que c’est la poësie du stile qui fait la destinée des poëmes » pp. 275-287

Mais, comme je viens de le dire, il faut qu’hors de ces deux occasions le stile de la poësie soit rempli de figures qui peignent si bien les objets décrits dans les vers, que nous ne puissions les entendre sans que notre imagination soit continuellement remplie des tableaux qui s’y succedent les uns aux autres, à mesure que les periodes du discours se succedent les unes aux autres.

2489. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 1, du génie en general » pp. 1-13

Voilà de grandes maximes, mais l’homme né sans génie, n’entend rien au précepte qu’elles renferment, et le génie le plus heureux ne devient pas même capable en un jour de les bien appliquer.

2490. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 3, que l’impulsion du génie détermine à être peintre ou poëte, ceux qui l’ont apporté en naissant » pp. 25-34

Que le lecteur se souvienne enfin de ce qu’il a lû, comme de ce qu’il a entendu dire à des témoins oculaires, sur le sujet dont il s’agit ici.

2491. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XI »

Ecrivez comme vous l’entendrez, au petit bonheur.

2492. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Wallon »

J’entends ceux qui ont enseigné : Kant et Hegel, Fichte et Schilling ?

2493. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — III »

J’entends qu’on veut trouver entre ces deux romantiques une réelle divergence d’éthique.

2494. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XV. De Tacite. D’un éloge qu’il prononça étant consul ; de son éloge historique d’Agricola. »

Les recherches des délateurs nous ont ôté jusqu’à la liberté de parler et d’entendre, et nous eussions perdu le souvenir même avec la voix, s’il était aussi facile à l’homme d’oublier que de se taire44. » Il se représente ensuite, au sortir du règne de Domitien, comme échappé aux chaînes et à la mort, survivant aux autres, et, pour ainsi dire, à lui-même, privé de quinze ans de sa vie, qui se sont écoulés dans l’inaction et le silence, mais voulant du moins employer les restes d’un talent faible et d’une voix presque éteinte, à transmettre à la postérité et l’esclavage passé, et la félicité présente de Rome.

2495. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre III. Trois espèces de jurisprudences, d’autorités, de raisons ; corollaires relatifs à la politique et au droit des Romains » pp. 299-308

. — Admirons la Providence, qui dans les premiers temps où les hommes encore idolâtres étaient incapables d’entendre la raison, permit qu’à son défaut ils suivissent l’autorité des auspices, et se gouvernassent par les avis divins qu’ils croyaient en recevoir.

2496. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre II. Comment les nations parcourent de nouveau la carrière qu’elles ont fournie, conformément à la nature éternelle des fiefs. Que l’ancien droit politique des romains se renouvela dans le droit féodal. (Retour de l’âge héroïque.) » pp. 362-370

Les Latins appellent operarius ce que nous entendons par journalier. — On disait chez les Latins greges operarum, comme greges servorum, parce que de tels ouvriers, ainsi que les esclaves des temps plus récents étaient regardés comme les bêtes de somme que l’on disait pasci gregatim.

2497. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Les nièces de Mazarin et son dernier petit-neveu le duc de Nivernais. Les Nièces de Mazarin, études de mœurs et de caractères au xviie  siècle, par Amédée Renée, 2e éd. revue et augmentée de documents inédits. Paris, Firmin Didot, 1856. » pp. 376-411

Ce fut pendant ce même souper que ma mère fit ce fameux sonnet : Dans un fauteuil doré, Phèdre tremblante et blême Dit des vers où d’abord personne n’entend rien, etc. […] On savait aussi qu’il cultivait l’élégie de société ; l’archevêque, qui l’avait entendu réciter quelques-uns de ses vers, fit encore à sa modestie la trahison d’indiquer ce nouveau titre littéraire. […] Il est vrai qu’à la nouvelle de cette avanie dont l’aubergiste n’avait pas manqué de faire trophée, la noblesse de Londres et de la contrée s’indigna et résolut de faire un exemple : on s’entendit pour ne plus descendre chez l’aubergiste exacteur, qui fut ruiné et qui n’eut de recours, dans la suite, qu’en la bienfaisance et la générosité du duc de Nivernais.

2498. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque. Deuxième partie. » pp. 225-303

Rousseau, dans son Contrat social et dans ses Plans de constitution pour la Pologne ; L’abbé de Saint-Pierre, dans sa Paix universelle ; Robespierre et Saint-Just, dans leur système d’égalité et de nivellement démocratique à tout prix, qui auraient décapité la société jusqu’à la dernière unité vivante, pour que l’un ne dépassât pas l’autre d’une faculté, d’une obole ou d’un cheveu ; Babeuf, dans sa communauté des biens ; Saint-Simon, de nos jours, dans sa proportion algébrique entre les aptitudes et les fonctions ; Fourrier, dans son cauchemar d’industrie, réduisant toute la société physique et morale à une association en commandite dont Dieu est le commanditaire, et promettant à l’homme jusqu’à des organes naturels de plus, pour jouir de félicites plus matérielles ; Cabet, dans son Icarie indéfinissable, chaos d’une tête vague, qui ne savait pas même rêver beau ; Tel autre, dans son égalité des salaires, charité idéale inspirée de l’Évangile sans doute, mais qui deviendrait la souveraine injustice envers le travail et le talent, et la prime réservée à l’oisiveté et aux vices, système des frelons qui pillent la ruche ; Tel autre, enfin, dans ses sentences de philosophie suicide, expropriant la famille, cette unité triple, qui enfante, nourrit, moralise et perpétue seule l’humanité, pour assouvir l’individu qui la tue : maximes folles, mais comminatoires, qui firent écrouler d’effroi toute démocratie progressive devant la démagogie des idées ; sophiste néfaste, mille fois plus funeste à la République que tous les poètes chassés de la République par Platon : Voilà ce qu’on entend par utopiste : ce sont les sophistes de la politique. […] La plupart, dans ces réunions, s’épuisent en plaintes et en regrets amers au souvenir des plaisirs de la jeunesse, de l’amour, des festins et de tous les autres agréments de ce genre : à les entendre, ils ont perdu les plus grands biens ; ils jouissaient alors de la vie, maintenant ils ne vivent plus. […] Ceux qui étaient auprès de lui l’avaient retenu, voulant nous entendre jusqu’à la fin.

2499. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIe entretien. Vie du Tasse (2e partie) » pp. 65-128

C’est une sorte de mirage moral qui suscite des horizons de verdure, de fontaines et de lacs de l’aridité du désert ; c’est le coup qui frappe au cœur le soldat du Tyrol ou de l’Helvétie, quand il entend, à mille lieues de son pays, une note du chant du pasteur des Alpes rassemblant ses troupeaux, et qui le fait languir et se consumer de désir, jusqu’à ce qu’il ait respiré de nouveau une haleine de sa première patrie ; c’est cette nostalgie, véritable démence du souvenir, surajoutée à une autre démence, qui dirigeait instinctivement et comme à son insu le Tasse vers le royaume de Naples. […] « Lorsque la tendre Cornélia fut instruite et tranquillisée, et qu’elle eut pleinement entendu de la bouche de son frère les causes de sa fuite et de son déguisement, elle résolut de le retenir secrètement dans sa maison, sans révéler le mystère qu’à ses deux enfants et à ses plus discrets familiers. […] j’entendis une meute de chiens qui se ruait avec de grands cris de mon côté.

2500. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre troisième »

Et comme je comprends l’enthousiasme dont furent saisis nos pères, il y a un peu plus de deux siècles, quand ils virent cette aimable et pathétique image de la vie, et qu’ils entendirent cette voix des passions parlant le langage de tous les temps et de tous les pays ! […] Mais si l’on entend par caractère un naturel toujours le même, qui marque toutes les actions d’un homme, une habitude de l’âme ancienne et profonde, indépendante des circonstances extérieures de condition, de temps et de lieu, j’attends encore qu’on m’en montre un exemple dans le théâtre espagnol. […] Qu’entendait-il par des pièces embarrassées ?

2501. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — IV. La Poësie dramatique. » pp. 354-420

Jaloux peut-être de voir Mélanide courue, & marquée au même coin de supériorité que la Métromanie, il plaisanta beaucoup sur les comédies attendrissantes, qu’il comparoit à de froids sermons : Tu vas donc entendre prêcher le père La Chaussée , dit-il un jour à un de ses amis qu’il rencontra allant à Mélanide. […] Ce n’est pas sans génie qu’on change une intrigue ; qu’on prend d’autres personnages ; qu’on trouve le rapport d’une action grande, avec quelque action de la vie commune ; qu’on fait sortir des fautes & des ridicules ; qu’on amène adroitement des situations comiques & applaudies ; qu’on divertit des gens de goût, en mettant, dans la bouche des bourgeois & des artisans, ce qu’on avoit entendu de celles des rois & des héros ; que, suivant l’intelligence du théâtre, on charge ou l’on affoiblit certains traits ; qu’enfin on fait contraster la plus grande simplicité avec tout l’appareil & tout le faste tragique. […] « Ils sont assez avancés, ou, si l’on aime mieux, assez pervertis, pour pouvoir entendre Brutus & Rome sauvée, sans avoir à craindre d’en devenir pires. » Lequel croire de M. d’Alembert ou d’un citoyen qui veut sauver sa patrie de la corruption ; qui ne lui présage qu’abomination & que malheurs, si l’on ne l’écoute ; qui eût pu s’appuyer de la raison que donne Cornelius Nepos pour marquer la différence des mœurs des Grecs & des Romains : C’est que les comédiens étoient estimés des premiers, & qu’ils étoient déshonorés chez les autres.

2502. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VIII : Hybridité »

Par le terme d’affinités systématiques, on entend les ressemblances de structure et de constitution que les espèces ont entre elles, et plus particulièrement dans des organes de haute importance physiologique qui, en général, diffèrent peu entre des espèces proche-alliées. […] Par croisement réciproque entre deux espèces, il faut entendre, par exemple, le cas où, d’une part, un étalon est croisé avec une ânesse, et, d’autre part, un âne avec une jument. […] J’expliquerai mieux, à l’aide d’un exemple, ce que j’entends, quand je dis que la stérilité n’est qu’une conséquence des différences des deux organisations génératrices et non une propriété spéciale dont les espèces seraient douées.

2503. (1865) Introduction à l’étude de la médecine expérimentale

Ils n’ont donc pas respecté eux-mêmes l’autorité de leurs prédécesseurs, et ils n’entendent pas qu’on agisse autrement envers eux. […] On entend tous les jours les médecins employer les mots : le plus ordinairement, le plus souvent, généralement, ou bien s’exprimer numériquement, en disant par exemple, huit fois sur dix, les choses arrivent ainsi ; j’ai entendu de vieux praticiens dire que les mots toujours et jamais doivent être rayés de la médecine. […] Nous entendons par cause d’un phénomène la condition constante et déterminée de son existence ; c’est ce que nous appelons le déterminisme relatif ou le comment des choses, c’est-à-dire la cause prochaine ou déterminante. […] Je me rappelle avoir souvent entendu de Blainville s’efforcer dans ses cours de distinguer ce qu’il fallait, suivant lui, appeler un substratum de ce qu’il fallait au contraire nommer un organe. […] Seulement on ne s’en rend pas compte, par cette raison bien simple qu’on commence par raisonner avant de savoir et de dire qu’on raisonne, de même qu’on commence par parler avant d’observer que l’on parle, de même encore que l’on commence par voir et entendre avant de savoir ce que l’on voit et ce que l’on entend.

2504. (1894) Les maîtres de l’histoire : Renan, Taine, Michelet pp. -312

Je ne lisais pas, j’entendais… comme si cette voix douce et paternelle se fût adressée à moi-même. […] Comme chez la religieuse extatique qui à force de penser au Christ finit par le voir et l’entendre, la pensée en lui se changeait en vision. […] Les heures s’écoulaient vite à l’entendre ! […] Les bruits du dehors l’empêchaient d’entendre le rythme intérieur. […] Poinsot mort, Michelet n’a plus eu d’ami, j’entends d’ami uniquement aimé.

2505. (1925) Dissociations

Je poursuis et voilà que l’oncle a l’occasion d’entendre à travers une cloison ou un rideau les deux jeunes gens discourir familièrement. […] Celui-ci, disait la notice, et bien entendu en jargon scientifique, est lourd et celui-ci léger. […] Et puis (baissant la voix), il nous faut du sang. » Combats Je vis hier, au cinéma bien entendu, le combat de la pieuvre et du homard. […] Comme on entend mentalement les paroles à mesure que va la musique, on se demande ce que veut dire : « Le jour de gloire est arrivé », quand il s’agit de planter un flot de rubans sur l’échiné d’un œuf ? […] On ne se douterait vraiment pas, à entendre toujours les mêmes sons, que la musique instrumentale se soit si prodigieusement enrichie depuis soixante ans.

2506. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — II. (Fin.) » pp. 109-130

La scène entre le médecin et le ministre, qui a été souvent répétée et que le docteur Koreff jouait à merveille en parlant de certains de ses malades, était alors : le médecin, après les symptômes entendus, déclare que la maladie qu’on éprouve est une ambition rentrée, et, après avoir proposé divers palliatifs, il arrive à un grand remède qui, selon lui, serait le seul efficace ; il conseille à son malade de se faire exiler par le roi : un exil d’éclat, un exil à la Chanteloup, cela relève la fadeur et le morne d’une disgrâce. […] Je devine, ou n’entends jamais ; je compose et ne peux corriger.

2507. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — II. (Fin.) » pp. 257-278

À force de vouloir tout deviner dans le passé et dans l’avenir, de tels hommes ne voient plus rien de certain autour d’eux ; ils croient savoir au juste ce qui se passait dans le paradis terrestre et ce qu’était Adam avant son sommeil, ce que redeviendra l’homme après sa réparation, et ils n’entendent rien aux conditions les plus indispensables et les plus immédiates de l’ordre social et du bon ménage politique. […] Il lui envie cette puissance et cette fermeté de talent qu’il n’avait pas, mais il se sent d’une région plus noble et plus élevée : « Rousseau, dit-il, frappait plus bas que moi. » Il diffère de lui surtout en ce qu’il croit essentiellement à un Dieu qu’on ne salue pas seulement, qu’on ne se borne pas à proclamer, mais qu’on aime et qu’on prie : « À force de dire, Notre Père, espérons que nous entendrons un jour dire, Mon fils. » Voilà ce que l’orgueil de Rousseau eût repoussé.

2508. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) «  Essais, lettres et pensées de Mme  de Tracy  » pp. 189-209

Cela ne m’amuse guère… Mme de Coigny tâche de m’inspirer son goût pour Mockranowski, son admiration pour Radzivill, sa passion pour Braniki et tant de ki, toujours vaincus, toujours si malheureux, désolés, perdus, ruinés… » Elle ne peut s’empêcher (c’est bien l’image de la jeunesse) de se consoler de sa lecture en dansant toute seule sur les airs du bal d’en face qu’elle entend. […] À Paray, où elle poursuivait de préférence son travail, elle ne trouvait aucun secours ; le curé du village n’était pas capable de la diriger, ni même de l’entendre : Je lui demandais un jour ce qu’il pensait des Pères apostoliques ; il n’en pensait absolument rien, ne sachant pas même leurs noms.

2509. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La femme au XVIIIe siècle, par MM. Edmond et Jules de Goncourt. » pp. 2-30

Et comment se mêler de peindre la femme, si l’on ne s’entend un peu aux paniers, aux rubans et aux mouches ? MM. de Goncourt s’y entendent beaucoup.

2510. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier. »

— Je n’avais pas assez de temps pour l’employer A compasser des mots : — adorer mon idole, La parer, admirer sa chevelure folle, Mer d’ébène où ma main aimait à se noyer ; L’entendre respirer, la voir vivre, sourire Quand elle souriait, m’enivrer d’elle, lire Ses désirs dans ses yeux ; sur son front endormi Guetter ses rêves, boire à sa bouche de rose Son souffle en un baiser, — je ne fis autre chose Pendant quatre mois et demi. […] Je signale l’excès ; mais la raison aussi, — j’entends la raison poétique, — la fantaisie, nourrice de l’art, y trouvaient leur compte ; et lorsqu’un des adeptes se détachait de cette société si parfaitement désintéressée et si vraiment innocente dans ses fureurs, pour entrer tout de bon dans la violence, dans la conspiration et la haine, quels vers aimables et doux Théophile Gautier lui adressait, en le rappelant cette fois à la nature non distincte de l’art !

2511. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. CHARLES MAGNIN (Causeries et Méditations historiques et littéraires.) » pp. 387-414

En introduisant ce brin de politique entre des pages plus fraîches et restées plus neuves, en y oubliant, comme par mégarde, ce coin de cocarde, le critique littéraire a voulu sans doute témoigner qu’il avait sur certains points des opinions, des principes, rappeler qu’il les avait soutenus, et faire entendre qu’il s’en souvenait comme de tout le reste. […] On prend un livre, on s’y enfonce, on s’y oublie ; on médite alentour, on y muse et s’y amuse, desipere in libro ; puis insensiblement la pensée se prend, une idée sourit, on veut l’étendre, l’achever : déjà la plume court, la déduction ingénieuse et industrieuse se poursuit, et, quand on s’y entend aussi aisément que M.

2512. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE PONTIVY » pp. 492-514

Elle en revenait toujours à son idée, que la passion est tout, et le reste insignifiant ou très-secondaire ; ou bien elle accordait que les distinctions de M. de Murçay étaient parfaites, qu’il y avait nécessité pour elle de se rendre plus raisonnable et un peu moins tendre, et qu’elle tâcherait l’un et l’autre ; ce qu’il n’entendait pas du tout ainsi. […] Après plus d’une heure d’attente et de propos saccadés, frivoles, par où s’exhalait une irritation étouffée, après avoir essuyé quelques traits de Mme de Noyon, et avoir fait une espèce de paix suffisante pour le moment, M. de Murçay, allant droit à Mme de Pontivy, toujours entourée, lui dit assez haut pour que sa voisine du coin de la cheminée l’entendît, qu’il désirait l’entretenir quelques instants de ce qu’elle savait, et qu’il lui en demandait la faveur avant qu’elle se retirât. « Certainement, » répondit Mme de Pontivy ; et la voisine, qui voulut bien comprendre à demi, se leva après quelques minutes.

2513. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Le comte de Ségur »

. — Au dîner qui suivit, le front de Sémiramis apparut tout chargé de nuages et silencieux ; vers la fin, s’adressant au jeune ambassadeur, elle lui fit entendre que ses goûts brillants le rappelaient dans la capitale, et qu’il devait supporter impatiemment les ennuis de cette retraite monotone. […] La bienveillance, comme il l’entend, n’est autre que la charité sécularisée, se souvenant et se rapprochant de son étymologie de grâce, telle qu’il l’avait entrevue dans sa jeunesse chez madame Geoffrin, telle qu’il l’eût pu désigner non moins heureusement par un nom plus moderne de femme dont c’est le don accompli et l’immortelle couronne179.

2514. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIIe entretien. Fénelon, (suite) »

Il représenta au roi que la première dignité à ses yeux était la tendresse qui l’attachait à son petit-fils, et qu’il ne changerait volontairement contre aucune autre. « Non, lui répondit avec bonté Louis XIV, j’entends que vous restiez en même temps précepteur de mon petit-fils. […] Sa peine n’était pas dans son orgueil, elle était dans son incertitude de conscience, il avait remis sa conscience à l’Église, elle avait prononcé ; il crut entendre la voix de Dieu et il s’inclina sous l’arrêt.

2515. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre I. Roman de Renart et Fabliaux »

C’est plaisir d’entendre si justement noter la plainte de dame Pinte la poule, dont cinq frères et quatre sœurs ont passé sous la dent de Renart : même pour cette fois il émane de l’expression tout objective comme une tiède sympathie qui enveloppe, adoucit, allège l’ironie. […] Ailleurs, dans un conseil que tient le roi Noble, sur la façon de conduire le procès de Renart, Musart le chameau, légat du pape, prend la parole : il faut entendre cette éloquence de canoniste et de lettré, cet incroyable jargon fait d’italien, de latin, de français burlesquement amalgamés, et dont le sens fort impudent est qu’il faudra mettre Renart hors de cour s’il sait donner à temps « universe sa pécune ».

2516. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre II. Clément Marot »

Mais, à la fin du Miroir de l’âme pécheresse dans l’édition de Paris de 1533, sous les auspices donc de la reine de Navarre, Marot fit imprimer un psaume, le Pater, le Credo, d’autres prières essentielles, traduits en français : surtout il avait, avant 1534, dédié à François Ier un Sermon du bon pasteur où l’on croirait entendre Calvin. […] Il continua sa traduction des Psaumes, même après qu’il fut entendu que ce travail était incompatible avec la fidélité d’un bon catholique.

2517. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre V. Le roman »

Ce sont des corps, mais aussi des esprits et des âmes dont il parle : il ne se prononce pas sur la cause des phénomènes, mais il lui suffit que tout le monde s’entende sur les ordres de faits désignés par les noms d’idées, désirs, affections, volontés. […] Il veut représenter les apparences de la vie, faisant entendre par les mouvements, par les actes, les ressorts et les forces intimes de la conscience.

2518. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIII. Retour de Molière à Paris » pp. 225-264

La jeune fille fait entendre des exclamations douloureuses. […] « Il contrefaisait d’abord les marquis avec le masque de Mascarille, dit un des interlocuteurs de La Vengeance des Marquis 42 ; il n’osait les jouer autrement, mais à la fin il nous a fait voir qu’il avait le visage assez plaisant pour représenter sans masque un personnage ridicule. » Il faut entendre ces mots en ce sens que Molière, la première fois qu’il contrefit les marquis, dans Les Précieuses ridicules, eut recours au travestissement de Mascarille, le valet de L’Étourdi et du Dépit amoureux, rôles qu’il aurait joués avec le masque, suivant l’étymologie du nom (maschera, mascarilla).

2519. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre quatrième »

Aujourd’hui, lire la Henriade n’est possible à personne ; j’entends la lire comme on fait des vrais poètes, pour la lire. […] Aussi aime-t-on mieux l’entendre en personne que par ses interprètes.

2520. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre VIII. L’antinomie économique » pp. 159-192

On se rend maintenant très bien compte, à l’aspect du travail — c’est-à-dire de cette dure activité du matin au soir — que c’est là la meilleure police, qu’elle tient chacun en bride et qu’elle s’entend vigoureusement à entraver le développement de la raison, des convoitises, des envies d’indépendance. […] « On voit maintenant se former, remarque ce philosophe, la culture d’une société dont le commerce est l’âme… Celui qui s’adonne au commerce s’entend à tout taxer d’après le besoin du consommateur et non d’après son besoin personnel ; chez lui, la question des questions, c’est de savoir “combien de personnes consomment cela”.

2521. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre III. La notion d’espace. »

Quand on parle de la relativité de l’espace, on ne l’entend pas d’ordinaire dans un sens aussi large ; c’est ainsi cependant qu’il conviendrait de l’entendre.

2522. (1902) L’œuvre de M. Paul Bourget et la manière de M. Anatole France

Qui ne voit d’ailleurs que les grandes lignes du roman, c’est-à-dire le sujet dans sa floraison mouvante, ne sauraient constituer à elles seules le roman, ni surtout le roman d’analyse ; que, par suite, le sujet ne saurait être entièrement séparé de sa portée psychologique, et nous entendons par l’auteur, — dont le dogmatisme n’est une charge d’état que parce qu’il y a des significations multiples derrière les événements les plus futiles en apparence, derrière les moindres affirmations de la réalité où tout s’enchaîne, tout le passé à tout le présent, dans une constante, rigoureuse et subtile logique. — On ne peut nier non plus que, si les faits présentés, si peu alourdis qu’ils soient de complications matérielles, se distinguent des ordinaires accidents ressassés, par une idée, — il en résulte souvent un ensemble capable d’offrir des ressources d’émotion et d’intérêt, mille fois plus puissantes sur le cœur que ne l’ont jamais été sur l’imagination les ficelles du roman à physionomie unilatérale, comme le roman d’aventures, par exemple. […] France ait un penchant pour le casuel — entendez pour ce qui tente, — et qu’il devienne significatif, dès que l’on s’en rapporte à la physionomie de son œuvre, pour se le représenter, de le voir s’écarter en un sens de l’idée qu’il donne succinctement de lui-même, — nous le voulons bien.

2523. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVII et dernier » pp. 442-475

Quinault même n’était pas loin du moment où il dirait : Je n’ai que trop chanté les jeux et les amours ; Sur un ton plus sublime il faut me faire entendre. […] et des voix qui concertent depuis longtemps (au théâtre), se fassent entendre… Parce qu’on ne danse pas encore aux Théatins », demande enfin La Bruyère, « me forcera-t-on d’appeler tout ce spectacle office divin144 ? 

2524. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Goethe et de Bettina, traduites de l’allemand par Sébastien Albin. (2 vol. in-8º — 1843.) » pp. 330-352

Un matin qu’assise dans le jardin parfumé et silencieux, elle rêvait à son isolement, l’idée de Goethe se présenta à son esprit ; elle ne le connaissait que par sa renommée, par ses livres, par le mal même qu’elle entendait quelquefois dire autour d’elle de son caractère indifférent et froid. […] Ne croirait-on pas vraiment entendre, non la femme d’un bourgeois de Francfort, mais l’épouse d’un sénateur romain, une impératrice romaine ou Cornélie ?

2525. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Hégésippe Moreau. (Le Myosotis, nouvelle édition, 1 vol., Masgana.) — Pierre Dupont. (Chants et poésies, 1 vol., Garnier frères.) » pp. 51-75

On n’y entendait point trop malice encore. […] Il faut l’entendre lui-même quand il chante : il commence avec une sorte de peine, avec une voix enrouée, un peu cassée, bientôt entraînante pourtant.

2526. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — II. (Suite.) » pp. 220-241

Il voulait être le maître du théâtre, et le musicien voulait l’être aussi ; il n’y avait pas moyen de s’entendre. […] On le voit, pendant tout le temps de la vogue de Figaro, occupé de sa pièce comme un auteur entendu qui sait les rubriques du métier, et qui ne songe qu’à en tirer tout le parti possible pour le bruit et pour le plaisir.

2527. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Rollin. » pp. 261-282

Il était, comme on s’intitulait alors, appelant et réappelant 34, en toute énergie et sans entendre à aucun accommodement. […] Je ne voudrais rien faire entendre au-delà de ma pensée : les modestes, sans doute, pas plus que les présomptueux, ne doivent être pris au mot ; l’homme, dans la plupart des cas, vaut plus ou moins qu’il ne se croit et surtout qu’il ne se montre.

2528. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Voltaire et le président de Brosses, ou Une intrigue académique au XVIIIe siècle. » pp. 105-126

Je suis Suisse, je n’entends point raison quand on me vexe. […] À l’entendre, c’était à son corps défendant qu’il était amené à une telle querelle.

2529. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vien » pp. 74-89

C’est un éloge qu’on ne peut refuser à Vien ; mais quand on tourne les yeux sur Doyen qu’on voit sombre, vigoureux, bouillant et chaud, il faut s’avouer que dans la prédication de saint Denis tout ne se fait valoir que par une foiblesse supérieurement entendue ; foiblesse que la force de Doyen fait sortir ; mais foiblesse harmonieuse qui fait sortir à son tour toute la discordance de son antagoniste. […] Il est excellent à entendre là-dessus.

2530. (1920) Action, n° 4, juillet 1920, Extraits

Ce sont des pages d’André Bretonx qui me le révèlent — lasses et extrêmes comme la voix qui au fond des grottes ne s’entend que par échos, avouant dans un expirant murmure le mystère qui ne sera jamais approché. […] Dans le fracas du moment, j’entends à peine une nouvelle funèbre, pourtant plus importante aux Lettres que le sort d’une province ou le montant d’une indemnité.

2531. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « X. M. Nettement » pp. 239-265

nous n’entendons pas seulement un gouvernement, mais une époque, — rechercher comme le botaniste cherche dans la fleur le point noir qui doit la faire périr, rechercher le point d’erreur ou de faiblesse par lequel tout ce qui semblait si vivant devait s’altérer et durer si peu, qu’à quelques années de distance, c’était fini ou à peu près de ce qui paraissait éternel, n’est-ce pas là un magnifique sujet d’histoire, plus beau, selon nous, et plus tentant pour une forte pensée, que l’histoire d’une époque qui eût construit des œuvres durables et accompli tout son destin ? […] C’est un homme qui a l’honneur d’être chrétien comme nous autres catholiques nous entendons qu’on le soit.

2532. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre II. Réalité des idées égalitaires »

Mais d’abord, qu’entendre par « idées sociales » ? […] Ceux-là mêmes qui ne s’accordent nullement sur les modes de l’intervention de l’État, semblent plus près de s’entendre sur sa raison d’être : les questions qui divisent sont des questions de « moyens » plutôt que des questions de « fins »4.

2533. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Note »

Je faisais dès ce temps-là des vers, mais pour moi seul et sans m’en vanter : je saisis vite les choses neuves que j’entendais pour la première fois et qui, à l’instant, m’ouvrirent un jour sur le style et sur la facture du vers ; comme je m’occupais déjà de nos vieux poëtes du xvie siècle, j’étais tout préparé à faire des applications et à trouver moi-même des raisons à l’appui.

2534. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « AUGUSTE BARBIER, Il Pianto, poëme, 2e édition » pp. 235-242

Il y a une profonde et consolante vérité à nous présenter ainsi le peuple comme certain de lui-même, sentant sa vigueur croissante et son avénement prochain ; à lui faire donner une sévère leçon au poëte qui trop souvent en nos jours, lui qui devrait diriger, s’égare, s’exaspère, n’entend que la voix de l’orgueil blessé, au lieu de répondre d’une lyre sympathique à l’appel fraternel des hommes, et farouche, inutile, manquant de foi au lendemain, s’enfuit comme Salvator dans les montagnes84.

2535. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Mignet : Histoire de la Révolution française, depuis 1789 jusqu’en 1814. 3e édition. »

Nous n’entendons exprimer ici aucune préférence, et bien plutôt nous félicitons l’un et l’autre de cette éclatante diversité de mérites qu’ils ont portée dans le même sujet et jusque dans les mêmes opinions.

2536. (1874) Premiers lundis. Tome I « Madame de Maintenon et la Princesse des Ursins — I »

Madame des Ursins, en arrivant à Madrid, s’entend aussitôt avec l’ambassadeur Amelot, le ministre Orry, et le maréchal Tessé.

2537. (1874) Premiers lundis. Tome I « Tacite »

Le paradoxe était criant en effet ; il attaquait mille amours-propres en masse, et d’ailleurs le monde n’était pas encore, comme depuis, accoutumé à entendre, à tolérer, à embrasser les paradoxes.

2538. (1874) Premiers lundis. Tome I « Walter Scott : Vie de Napoléon Bonaparte — II »

Entendu de cette façon, il nous semble que le talent fécond, brillant et pittoresque de Walter Scott, abordant le genre austère de l’histoire, a bien pu s’égarer, comme il l’a fait, à la merci de passions mesquines et de préjugés aveugles ; égarement miraculeux et de tout point incompréhensible, si l’on reconnaît à l’auteur cette intelligence profonde des époques et ce sens historique pénétrant dont on l’a jusqu’ici trop libéralement doué.

2539. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre IV. De la bienfaisance. »

Jamais il ne voit un homme dans le malheur qu’il ne lui dise ce qu’il a besoin d’entendre, que son esprit, son âme ne découvrent la consolation directe, ou détournée, que cette situation rend nécessaire, la pensée qu’il faut faire naître en lui, celle qu’il faut écarter, sans avoir l’air d’y tâcher.

2540. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Paul Bourget, Études et portraits. »

J’entendais dans le lointain des aboiements épouvantables, et je vis dévaler du haut de la colline fauve, à grandes enjambées, des formes blanches… J’eus peur, pourquoi ne le dirais-je pas ?

2541. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Contes de Noël »

Mais tout à coup la comédienne a ce caprice, d’aller entendre la messe de minuit à la Madeleine.

2542. (1887) Discours et conférences « Discours lors de la distribution des prix du lycée Louis-le-Grand »

Vous entendrez ce qu’on dira de nous, vous saurez ce qu’il y aura eu de fragile ou de solide dans nos rêves.

2543. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre V : Rapports du physique et du moral. »

Ce problème, au sens où on l’entend d’ordinaire, est fatalement insoluble, puisqu’on se borne à opposer deux substances inconnues l’une à l’autre, à se demander comment l’esprit (qu’on ne connaît pas) peut agir sur la matière (qu’on ne connaît pas).

2544. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre premier. »

La Fontaine veut dire que d’être prêteuse est son moindre défaut, pour faire entendre qu’elle ne l’est pas ; et on peut croire qu’il dit que de n’être pas prêteuse est son moindre défaut, c’est-à-dire qu’elle a de bien plus grands défauts que de ne pas prêter.

2545. (1879) Balzac, sa méthode de travail

Épreuves, le mot peut s’entendre dans l’acception la plus pénible.

2546. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XV. Des ouvrages sur les différentes parties de la Philosophie. » pp. 333-345

Ceux qui faute d’entendre le latin seront privés de cette lecture, en trouveront une espêce de dédommagement dans l’abrégé que M.

2547. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Tout ce que j’ai compris de ma vie du clair-obscur » pp. 26-33

Si je ne le vois pas, et que j’entende au loin son fracas, C’est ainsi, me dirai-je, que ces fléaux si fameux dans l’histoire ont passé.

2548. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 23, que la voïe de discussion n’est pas aussi bonne pour connoître le mérite des poëmes et des tableaux, que celle du sentiment » pp. 341-353

Que penser de ces systêmes de poësie, qui, loin d’être fondez sur l’expérience, veulent lui donner le démenti, et qui prétendent nous démontrer que des ouvrages admirez de tous les hommes capables de les entendre depuis deux mille ans, ne sont rien moins qu’admirables.

2549. (1912) L’art de lire « Chapitre X. Relire »

J’assure qu’à les relire pour la vingtième fois, on trouve des passages que l’on n’avait point compris comme ils devaient l’être, et que l’on entend pour la première fois.

2550. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre XI. Première partie. Conséquences de l’émancipation de la pensée dans la sphère des idées religieuses » pp. 315-325

Le moment est donc arrivé où nous devons nous entendre sur les croyances générales et unanimes.

2551. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Edmond About » pp. 63-72

Alors, les livres de voyage n’étaient pas d’une grande difficulté (intellectuelle, s’entend), et ils intéressaient presque tous.

2552. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Hebel »

Quand les poésies de Hebel parurent, Goethe et Jean-Paul, qui tenaient le sceptre de la Critique en Allemagne, firent entendre de ces paroles qui étaient le jugement antidaté de la postérité, la question de toute supériorité intellectuelle n’étant jamais rien de plus qu’une avance de la Pensée sur le Temps : « Je viens de lire pour la sixième fois — s’écriait Jean-Paul — ce recueil de chants populaires qui pourrait trouver place dans celui de Herder, si on osait faire un bouquet au moyen d’un autre.

2553. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Leopardi »

Et entendez-moi bien !

2554. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Docteur Véron »

» Ni M. de Coislin, ni ce fameux capitaine de vaisseau qui mourut d’une révérence en reculant, pour son troisième salut, sur un pont trop étroit, et qui tomba à la mer, n’eurent de leur temps des grâces plus onctueuses, et ne s’escrimèrent en révérences plus circonflexes et plus respectueuses que celles de Véron à l’assemblée dont il entend bien ne pas cesser de faire partie… Seulement, les questions qu’il soulève seront-elles aussi agréables au Corps législatif que les révérences qu’il lui fait ?

2555. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — II »

Je ne veux pas être une pensée mutilée, fragmentaire, dans l’universelle raison, un être isolé dans la communauté des hommes : j’entends servir la société et non point par goût des louanges, ni par désir d’être aimé, ni par sympathie pour mes contemporains, mais parce que le monde est un et que je veux me conformer à ses lois, qui sont d’ailleurs harmonieuses avec ma raison.‌

2556. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre premier. De la louange et de l’amour de la gloire. »

Et il faudrait que tous les matins ce fût la première parole qu’on fît entendre aux princes, à leur réveil ; l’amour de la gloire veillerait autour d’eux pour en repousser les faiblesses et les vices ; car tel est le caractère de ce sentiment ; il est fier, délicat, sévère à lui-même.

2557. (1908) Promenades philosophiques. Deuxième série

Cette constance ne doit pas, bien entendu, être considérée comme individuelle. […] Léonard a-t-il même pensé à ce que nous entendons par circulation ? […] Il faut s’entendre. […] N’entendons par ce mot ni rien de trop grossier ni rien de trop subtil. […] Ce n’est pas ce qu’entendait Epicure.

2558. (1853) Portraits littéraires. Tome I (3e éd.) pp. 1-363

Il est heureux de la voir, heureux de l’entendre ; il met aux pieds de sa maîtresse toute sa vie, toute sa volonté. […] Quand elle revient près de lui, il ne lui permet pas de s’accuser, il lui pardonne sans vouloir entendre l’aveu de sa faute. […] Il s’est fait autour de chacune de ses œuvres un grand silence, puis un grand bruit ; la multitude a écouté, dans un recueillement respectueux, puis, après avoir entendu, elle a battu des mains ou protesté par ses clameurs contre la valeur des paroles qu’elle venait d’entendre. […] Le pape ne voulut rien entendre. […] Trop souvent le ton familier descend jusqu’au ton trivial et fait tache dans la période ; l’oreille est alors blessée comme si elle entendait une note fausse.

2559. (1860) Cours familier de littérature. IX « Le entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier (2e partie) » pp. 81-159

Elle y entendait la messe avec recueillement dans un coin reculé de l’église. Un de mes amis, M. de Genoude, protégé alors par la femme célèbre, et très assidu dès l’aurore aux devoirs de l’amitié, l’accompagnait tous les jours à l’église ; il m’a raconté souvent, avant l’époque où lui-même entra dans les ordres sacrés, que M. de Chateaubriand ne manquait jamais de se rencontrer dans l’église à l’heure où madame Récamier s’y rendait, qu’il s’agenouillait pour entendre la messe derrière la chaise de son amie, et qu’il oubliait quelquefois l’ardeur de ses prières pour s’extasier à demi-voix sur tant de charmes. […] Cela bien entendu, lisons encore.

2560. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIe entretien. Littérature politique. Machiavel » pp. 241-320

« De là je descends sur le grand chemin, dans la taverne du village ; je cause avec les passants, je leur demande des nouvelles de leur pays ; j’entends des choses neuves et diverses, je remarque les goûts différents et les fantaisies opposées des hommes. […] Après le repas je retourne à la taverne : j’y trouve ordinairement l’hôtelier, un boucher, un menuisier et deux chaufourniers ; je m’encanaille avec eux tout le reste du jour au criccrac ou trictrac, jeux pendant lesquels surgissent entre nous mille disputes, mille chocs de paroles injurieuses, et où le plus souvent on conclut pour un quatrino (un sol), et où on ne nous entend pas moins crier de là à San-Casciano. […] Les Italiens, poursuit-il, n’entendent rien aux affaires de guerre, et les Français rien aux affaires d’État ! 

2561. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre III. Molière »

Il l’a définie excellemment quand, justifiant un mot de l’Ecole des Femmes, il disait : « L’auteur n’a pas mis cela pour être de soi un bon mot, mais seulement pour une chose qui caractérise l’homme », l’homme qui parle, bien entendu, dans son humeur particulière. […] Molière est tout près de Voltaire, que l’on croirait entendre dans certains vers de Tartufe. […] Le 5 août 1667, représentation à Paris de l’Imposteur, où Tartufe est devenu Panulphe : le président de Lamoignon interdit la pièce après la Ire représentation : 2e placet, porté au camp de Flandre par deux comédiens ; ordonnance de l’archevêque Hardouin de Péréfixe qui défend de représenter, d’entendre, ou de lire la pièce sous peine d’excommunication.

2562. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre III. La poésie romantique »

Nul ne fut mieux fait pour chanter l’hymne de l’espérance ; et l’on ne peut s’étonner des accents que firent entendre son éloquence et sa poésie, lorsqu’il éleva jusqu’à lui nos misères sociales et nos inquiétudes politiques. […] Mais j’entends la voix d’une âme qui chante à l’occasion de ces objets : elle ne me les montre pas, elle se montre par eux à moi, et le paysage est un hymne. […] On trouve : 3+5+4 ; 4 + 5 + 3 ;3 + 4 + 5 ; 2 + 6 + 4 ; 1 + 6 + 5, etc.De la fleur, | de l’oiseau chantant, | du roc muet. (3 + 5 + 4)Car partout | où l’oiseau vo | le, la chèvre y grimpe. (3 + 4 + 5) On entendait | aller et venir | dans l’enfer, etc. (4 + 5 + 3) 748.

2563. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Edmond et Jules de Goncourt »

Ce néologisme s’entend aisément ; mais ce qu’il représente n’est pas très facile à déterminer, car le moderne change insensiblement, et puis ce qui est moderne est toujours superposé ou mêlé à ce qui ne l’est point ou à ce qui ne l’est déjà plus. […] Sœur Philomène, Germinie Lacerteux, Renée Mauperin et même Madame Gervaisais ressemblent davantage à ce qu’on entend d’ordinaire par un roman ; mais l’action est encore morcelée, découpée en tableaux entre lesquels il y a d’assez grands vides. […] Le détail est infini, menu, extrêmement cherché ; mais il est un, j’entends subordonné à un effet d’ensemble.

2564. (1861) Questions d’art et de morale pp. 1-449

On éprouve plus de fatigue à l’entendre, en prenant ce mot dans sa double acception. […] Mais il ne faut point se laisser tromper par les mots ; Athènes n’était rien moins qu’une démocratie, comme on l’entend aujourd’hui. […] Si donc le poète doit beaucoup penser, beaucoup méditer, il doit aussi beaucoup voir et beaucoup entendre ; il est donc d’une curiosité infinie. […] Vous entendez la musique des sapins, ces murmures aussi larges, aussi profonds et plus variés encore que les bruits mêmes de la grande nue. […] Les chœurs continuaient ensuite en donnant leur assentiment à ce qu’ils venaient d’entendre.

2565. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre III. L’Âge moderne (1801-1875) » pp. 388-524

C’est donc aussi précisément pourquoi, de tous les caractères du romantisme, il n’y en a pas qui lui soit plus essentiel : j’entends par là qui explique mieux les causes de sa grandeur ; celles de sa décadence ; et la nature de la réaction qu’il devait provoquer. […] Ce qu’en tout cas ils ont bien compris, c’est que douze ou quinze cents spectateurs, de tout âge et de toute condition, ne se renferment pas pendant quatre ou cinq heures dans une salle close pour y entendre un auteur leur parler de lui-même. […] On a surtout entendu le viril conseil : Gémir, pleurer, prier est également lâche, qu’il opposait aux lamentations dont les romantiques avaient assourdi les oreilles de leurs contemporains. […] Comte, n’étant pas philologue, n’entendait rien aux sciences de l’humanité » [Cf.  […] Je ne sache pas qu’il y ait non plus de plus beaux vers que ceux de Leconte de Lisle : j’entends encore de plus « classiques ».

2566. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre huitième »

Par là Monime est cornélienne et digne sœur de Pauline, dont on croit entendre la noble langue, dans cette scène où Monime, plus grande que Mithridate, lui reproche les détours par lesquels il a surpris ses aveux : Vous seul, seigneur, vous seul vous m’avez arrachée A cette obéissance où j’étais attachée ; Et ce fatal amour, dont j’avais triomphé, Ce feu, que dans l’oubli je croyais étouffé, Dont la cause à jamais s’éloignait de ma vue, Vos détours l’ont surpris et m’en ont convaincue. […] Tout à coup la trompette des Tyriens se fait entendre autour du temple. […] Quant au lecteur la perfection de ces vers lus dans le recueillement, d’un œil que ne distrait pas le spectacle, le dédommage de tous les plaisirs qui ne lui arrivent pas par les sens ; et, s’il n’entend pas la musique des chœurs, il reçoit par l’oreille de l’âme l’harmonie de leurs strophes divines. […] Ne faisons pas de comparaisons, pour n’exciter pas de disputes ; disons seulement que ce mérite d’harmonie et de douceur est l’effet de tous les autres réunis, et que ce qu’entendent par là ceux qui y regardent de près, c’est la perfection.

2567. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIII : Affinités mutuelles des êtres organisés »

Mais beaucoup de naturalistes entendent quelque chose de plus par ce mot de système naturel ; ils y voient une révélation du plan créateur. […] Le lecteur comprendra mieux ce que j’entends, s’il veut prendre la peine de consulter encore la figure du quatrième chapitre. […] Il n’est pas inutile d’expliquer cette manière d’entendre la classification des êtres organisés, par un exemple tiré des diverses langues humaines. […] J’emploie cette expression, quoique je sache bien qu’il est presque impossible de définir clairement ce qu’on entend par infériorité ou supériorité d’organisation.

2568. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Pour moi, c’est bien plus un caractère qu’un génie : un caractère veut toujours la même chose, — un caractère dans l’ordre du talent, bien entendu, car dans l’ordre de la moralité nous aurons aussi à juger Gœthe dans cette étude, et vous verrez ce qu’il pesait. […] On se bat là-dessus et on se bouscule, en ce moment, entre mandarins, et, comme Scaliger le disait des Basques, on prétend qu’ils s’entendent. […] Pour les Affinités électives, je l’ai dit, c’est le concubinage consenti entre quatre ou cinq Mormons qui s’entendent. […] « Le sort de ce fou — (il l’appelait fou, preuve qu’il ne lui ressemble pas, ) — me touche, parce que c’est le mien », — ce qui est impudent et comique. — « Il est vrai que je sais un peu mieux me tirer d’affaire », reprend-il avec le sourire satisfait de l’homme entendu.

2569. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Poésies d’André Chénier »

» Il y avait longtemps pour lui que les illusions s’étaient envolées ; son âme avait connu toutes les passions, toutes les ardeurs, Némésis elle-même et les Euménides, j’entends celles de la vertu.

2570. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Un cas de pédanterie. (Se rapporte à l’article Vaugelas, page 394). »

Cela s’entend de soi ; cela ne rappelle à personne la création du monde, mais bien la création de l’institution particulière dont il s’agit.

2571. (1874) Premiers lundis. Tome I « Ferdinand Denis »

Mais ici, autour de l’idée principale, venaient naturellement se grouper une foule de questions accessoires que l’auteur a négligées et que provoquait l’esprit de l’époque : jusqu’à quel point est légitime et approuvé par le goût cet emprunt d’images étrangères ; en quoi il peut réellement consister ; si c’est en bravant l’harmonie par une foule de mots barbares tirés d’idiomes encore grossiers, ou en reproduisant simplement une pensée naïve, une coutume touchante d’un jeune peuple, si c’est en s’emparant sans discernement des êtres créés dans des mythologies étrangères, ou en ne s’enrichissant que des allégories ingénieuses et faites pour plaire en tous lieux, que le poète imitateur méritera dignement de la littérature nationale ; ou encore, s’il n’y a pas l’abus à craindre dans ce recours trop fréquent à des descriptions de phénomènes ; si Delille, Castel, que l’auteur cite souvent, et les écrivains de cette école qu’il paraît affectionner, s’en sont toujours gardés ; si enfin il n’y a pas souvent cet autre danger non moins grave à éviter, de parler à la nation d’une nature qu’elle ne comprend pas, d’en appeler à des souvenirs qui n’existent que pour l’écrivain, et réduire l’homme médiocrement éclairé à consulter Buffon ou Cuvier pour entendre un vers.

2572. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Poésie — I. Hymnes sacrées par Édouard Turquety. »

Elle n’est ni jolie, ni séduisante, comme on l’entend, et n’a aucune des grâces apprises : Qu’importe ?

2573. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre III. De l’étude. »

Nul être vivant ne le secourt, nul être vivant ne s’intéresse à son existence ; il ne lui reste que la contemplation de la nature, et elle lui suffit ; c’est ainsi qu’existe l’homme sensible sur cette terre, il est aussi d’une caste proscrite, sa langue n’est point entendue, ses sentiments l’isolent, ses désirs ne sont jamais accomplis, et ce qui l’environne, ou s’éloigne de lui, ou ne s’en rapproche que pour le blesser.

2574. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Grosclaude. »

La bouffonnerie d’Étienne Grosclaude, telle que cet esprit éminent l’entend et la pratique, est, d’abord, d’une irrévérence universelle.

2575. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vigny, Alfred de (1797-1863) »

On relira éternellement cette page du Mont des Oliviers, et, à travers ces beaux vers et ces magnifiques pensées, on peut entendre comme le sanglot viril du poète.

2576. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Jules Laforgue » pp. 36-47

Aussi sa joie éclate à Strasbourg, où les enseignes sont en français, où le bureau de tabac a sa lanterne rouge, où il entend une jeune bonne dire en français à un enfant : « Pourquoi que tu pleures, René ? 

2577. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Samuel Bailey »

Au milieu des honneurs prodigués aux recherches sur les recoins les plus cachés du monde matériel, entendrons-nous dire que l’examen exact, minutieux, pénétrant de notre nature mentale est un travail vain et superflu, sans bénéfice, sans issue qui vaille ?

2578. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre IV » pp. 38-47

Elle a été soupçonnée de s’être entendue avec Gaston, frère du roi, pour le détrôner, et d’être convenue avec ce premier de l’épouser ensuite.

2579. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XI » pp. 89-99

Pour que cette double réaction soit bien comprise, il est nécessaire de bien entendre la fronde.

2580. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXIX » pp. 319-329

Si les paroles du roi ne prouvent pas en lui réveil d’un sentiment nouveau, il est du moins certain qu’elles durent faire une vive impression sur deux personnes fort intéressées a les étudier, après les avoir entendues.

2581. (1899) Le monde attend son évangile. À propos de « Fécondité » (La Plume) pp. 700-702

Cette prédication-là peut bien être entendue.

2582. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre quatrième. L’aperception et son influence sur la liaison des idées »

Il y a assurément dans ces théories, qui rappellent le progrès de Condillac à Laromiguière, une part de vérité ; mais il faut s’entendre sur la vraie nature de la force déployée dans l’attention et l’aperception.

2583. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre sixième. »

Mais j’ai déjà observé que la morale de la résignation est toujours excellente à prêcher aux hommes, bien entendu que le mal est sans remède.

2584. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre III. Paradis perdu. »

Ève a entendu les gémissements de son époux : elle s’avance vers lui ; Adam la repousse ; Ève se jette à ses pieds, les baigne de larmes.

2585. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre II. Qu’il y a trois styles principaux dans l’Écriture. »

Il entre dans son récit à la manière des anciens historiens ; vous croyez entendre Hérodote : « 1º Comme plusieurs ont entrepris d’écrire l’histoire des choses qui se sont accomplies parmi nous ; » 2º Suivant le rapport que nous en ont fait ceux qui dès le commencement les ont vues de leurs propres yeux, et qui ont été les ministres de la parole ; » 3º J’ai cru que je devais aussi, très excellent Théophile, après avoir été exactement informé de toutes ces choses, depuis leur commencement, vous en écrire par ordre toute l’histoire. » Notre ignorance est telle aujourd’hui, qu’il y a peut-être des gens de lettres qui seront étonnés d’apprendre que saint Luc est un très grand écrivain, dont l’Évangile respire le génie de l’antiquité grecque et hébraïque.

2586. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre VII. Des ouvrages périodiques. » pp. 229-243

Son ouvrage comprend la belle littérature, les productions agréables, telles que les histoires, les romans, les brochures, les piéces d’éloquence & de poésie, les ouvrages dramatiques, particuliérement la musique, la peinture, la sculpture, l’architecture, en un mot, ce qu’on entend par belles-lettres & beaux arts.

2587. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Michel Van Loo » pp. 66-70

Michel Van Loo est vraiment un artiste : il entend la grande machine ; témoins quelques tableaux de famille où les figures sont grandes comme nature et louables par toutes les parties de la peinture.

2588. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Philippe II »

Il n’a rien entendu à la grandeur divine de la Cause ; il n’a vu que l’indignité de ses serviteurs.

2589. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Lettres portugaises » pp. 41-51

Dès qu’on parle de l’expression enflammée d’une passion vraie, il est de bonne rhétorique de citer les Lettres portugaises, et les esprits les plus forts d’appréciation comme les plus faibles, les esprits qu’on bride le plus et les esprits qu’on bride le moins, ou qui sans bruit vont sur la foi d’autrui, reprennent alors la phrase d’admiration qui traîne partout et y ajoutent leur petite arabesque… Écoutez tous ceux qui ont dit leur mot sur les lettres de la Religieuse portugaise, depuis madame de Sévigné, la Célimène de la maternité… — et qui ne sait pas plus que l’autre Célimène ce que c’est qu’une passion trahie, ce que c’est que cette morsure de l’Amour, qui s’en va après l’avoir faite, — jusqu’à Stendhal, le Dupuytren du cœur, et qui n’aurait pas dû se tromper sur les tressaillements de ses fibres, et vous entendrez de tous côtés le même langage : une symphonie de pâmoisons.

2590. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Alexandre Dumas fils » pp. 281-291

La question de la bâtardise, la possession d’état de l’enfant naturel, la position que doit faire la législation à la fille-mère, toutes ces questions sont touchées dans L’Affaire Clémenceau avec une curiosité enfantino-frémissante ; et, quoiqu’elles n’y soient pas résolues, quoiqu’elles n’y soient agitées que comme l’enfant agite la boîte où il a mis des scarabées et qu’il colle contre son oreille pour les entendre qui remuent, on sent que la partie de son livre que Dumas fils estime davantage, c’est le remuement de ces questions… Du reste, ce côté inattendu et révélé dans le nouveau roman d’Alexandre Dumas fils ne l’a pas empêché cependant de rester parfaitement le fils de son père, même à propos de cette question du bâtard qui s’étend sous les pieds de tout dans son livre, et qui en est comme le sous-sol.

2591. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Taine »

La vérité n’y est pas… et l’erreur, qu’on prend quelquefois pour elle quand elle est puissante, l’erreur — j’entends la forte erreur d’une tête robustement organisée — n’y est pas davantage.

2592. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Avant-propos de la septième édition »

Et par « image » nous entendons une certaine existence qui est plus que ce que l’idéaliste appelle une représentation, mais moins que ce que le réaliste appelle une chose, — une existence située à mi-chemin entre la « chose » et la « représentation ».

2593. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre II. Des éloges religieux, ou des hymnes. »

Alors il le cherche à travers ce monde solitaire ou il a été jeté ; il le demande aux cieux, à la terre, à tout ce qui l’environne ; il prête l’oreille pour l’entendre.

2594. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIII. Éloges donnés aux empereurs, depuis Auguste jusqu’à Trajan. »

Ovide qui, né chevalier romain, et relégué par un seul mot d’Octave à quatre cents lieues de Rome et parmi des peuples barbares, des bords du Pont-Euxin, fatigua, pendant six ans, de prières et d’éloges son tyran, qui ne daignait pas l’entendre !

2595. (1880) Goethe et Diderot « Diderot »

Diderot, après Voltaire, bien entendu, est certainement supérieur à tous ses compagnons de siècle ou d’encyclopédie. […] Dans ses romans, comme dans ses autres livres, il ne s’oublie jamais, ni lui ni sa prêcherie… Peintre qui crevait sa peinture pour passer sa tête par le trou de sa toile, afin qu’on le vît bien et qu’on l’entendît bien toujours. Et c’était trop qu’on le voyait et qu’on l’entendait. […] On le connaît, on l’entend, on ne peut l’oublier, ce moi bouillonnant et retentissant de Diderot, cette nappe enflée d’un bavardage immense, cette inondation, ce déluge qui passe par-dessus tous les personnages de ses drames ! […] Aussi toutes les lettres de la Correspondance de Diderot, n’importe à qui elles sont adressées, ne sont-elles que le refrain moins bien chanté de chansons déjà entendues.

2596. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre III. La Déformation de l’Idéal classique (1720-1801) » pp. 278-387

Mais les encyclopédistes n’y ont vu qu’un enfantillage, et n’ont pas entendu la leçon. […] « Les femmes s’enivrèrent du livre et de l’auteur » [Confessions, II, 2], Et les hommes, à leur tour, dans l’Émile, dans la Lettre à l’archevêque de Paris, dans le Contrat social, crurent entendre gronder sourdement ils ne savaient quelle menace ! […] Ils lui ont fait entendre à lui-même la nature de son pouvoir. […] Les voilà maîtres des affaires ; et il faut maintenant les entendre se moquer des jeunes gens « qui se croient en sortant du collège obligés d’apprendre aux puissances à diriger leurs États » ! […] Inconvénients de cette manière d’entendre l’histoire ; — et que Voltaire n’y a pas lui-même échappé.

2597. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Saint-Arnaud. Ses lettres publiées par sa famille, et autres lettres inédites » pp. 412-452

Je les aime comme mes enfants, tout en désirant leur faire entendre quelques balles d’un peu près. » — Et quand il est déjà colonel : « Je viens de recevoir pour mon brave régiment une croix d’officier, quatre croix de chevalier et deux grades à l’occasion de l’affaire de Dellys. […] Avec les Arabes, c’est à recommencer toujours : « Cette nation-là naît un fusil à la main et un cheval entre les jambes. » Au point où il est arrivé, Saint-Arnaud sent ses vues s’agrandir, et se multiplier les occasions d’agir comme il l’entend. […] Moi je penserai à vous tous, à ma femme, à mes enfants. » Un moment viendra où il entendra la messe pour elle-même, le sacrifice pour le sacrifice : il a en lui un commencement de disposition, qui de la tête lui descendra dans le cœur.

2598. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier »

Nul écrivain de nos jours ne saurait mieux prêter à nous définir d’une manière vivante le littérateur indéfini, comme je l’entends, que ce riche, aimable et presque insaisissable polygraphe, — Charles Nodier. […] Pour savoir le Nodier d’alors, c’est bien moins le Nodier d’aujourd’hui, trop lassé de s’entendre, qu’il eût fallu interroger, que le témoin mémoratif et glorieux d’un tel ami, lorsque dans la belle promenade de Chamars, si pleine de souvenirs (avant que le Génie militaire eût gâté Chamars), il s’épanchait en abondants et naïfs récits, et faisait revivre sous les grands feuillages d’automne les confidences des printemps d’autrefois, désespoirs ardents, philtres mortels, consolations promptes, complots, terreurs crédules, fuites errantes, une fenêtre escaladée, les années légères. […] Je donnerais un long poème Pour un cri du cœur que j’entends.

2599. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers (2e partie) » pp. 177-248

On s’entendra ensuite sur le gouvernement qui doit lui succéder. […] On discute l’attentat froidement, on ne s’entend pas sur les conséquences : Moreau veut le pouvoir pour lui seul, Pichegru et Georges pour les Bourbons. […] Celui-ci répondait que Bouvet avait mal entendu, mal compris, et par conséquent fait un rapport inexact.

2600. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VIII. La littérature et la vie politique » pp. 191-229

Mais, en 1807, il écrivait au Mercure les lignes suivantes : « Lorsque dans le silence de l’abjection l’on n’entend plus retentir que la chaîne de l’esclave et la voix du délateur ; lorsque tout tremble devant le tyran et qu’il est aussi dangereux d’encourir sa faveur que de mériter sa disgrâce, l’historien paraît, chargé de la vengeance des peuples. […] Ils chercheront mille moyens détournés pour faire entendre le quart ou la moitié de leur pensée. […] Discours, pamphlets, brochures, articles de polémique éclosent avec une formidable abondance ; et, après ces ouvrages inspirés par les circonstances, animés par les passions du jour, adressés aux contemporains et peu soucieux de la postérité, il en apparaît bientôt d’autres plus médités, plus apaisés, plus froids en apparence, mais où il n’est pas difficile de retrouver le feu couvant sous la cendre ; j’entends les mémoires et les histoires qui prétendent transmettre à l’avenir et déjà juger les événements de la veille.

2601. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre deuxième. L’idée de l’espace. Son origine et son action »

pourquoi n’entendons-nous pas les sons sous la forme d’odeurs ? […] Par ces sensations de mouvement nous n’entendons pas des impressions de pure succession temporelle. […] Si leurs sensations, relativement très passives, ne provoquent pas d’une façon assez nette des efforts moteurs, il n’en existe pas moins jusque dans ces sensations une certaine part d’activité, et d’activité motrice : on tend l’oreille pour mieux entendre, on meut les narines et on aspire l’odeur pour mieux sentir, on réagit contre une chaleur ou un froid trop vif par des mouvements dans les parties affectées.

2602. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Gustave Flaubert. Étude analytique » pp. 2-68

La terre à la fin se fit plus étroite qu’une sandale  et après avoir jeté vers le soleil des gouttes de l’océan, nous tournâmes à droite pour revenir. » Et ailleurs : « Il y avait des jets d’eau dans les salles, des mosaïques dans les cours, des cloisons festonnées, mille délicatesses d’architecture et partout un tel silence que l’on entendait le frôlement d’une écharpe ou l’écho d’un soupir. » Par un contraste que l’on perçoit déjà dans ce passage, Flaubert, précis et magnifique sait user parfois d’une langue vague et chantante qui enveloppe de voiles un paysage lunaire, les inconsciences profondes d’une âme, le sens caché d’un rite, tout mystère entrevu et échappant : Certaines des scènes d’amour où figure Mme Arnoux, l’énumération des fabuleuses peuplades accourues à la prise de Carthage, le symbole des Abaddirs et les mythes de Tanit, les louches apparitions qui, au début de la nuit magique, susurrent à saint Antoine des phrases incitantes, la chasse brumeuse où des bêtes invulnérables poursuivent Julien de leurs mufles froids, tout cet au-delà est décrit en termes grandioses et lointains, en indéfinis pluriels abstraits et approchés qui unissent à l’insidieux des choses, la trouble incertitude de la vision. […] Emma serrait son châle contre ses épaules et se levait. » Pénétrant davantage la sourde éclosion de ses sentiments, d’incessantes métaphores matérielles disent le néant de son existence à Tostes, son intime rage de femme laissée vertueuse, par le départ de Léon et son exultation aux atteintes d’un plus mâle amant : « C’était la première fois qu’Emma s’entendait dire ces choses ; et son orgueil, comme quelqu’un qui se délasse dans une étuve, s’étirait mollement et tout entier à la chaleur de ce langage. » Et encore la contrition grave de sa première douleur d’amour : « Quant au souvenir de Rodolphe, elle l’avait descendu tout au fond de son cœur ; et il restait là plus solennel et plus immobile qu’une momie de roi dans un souterrain. […] Souvent quelque bête nocturne, hérisson ou belette, se mettant en chasse, dérangeait les feuilles, ou bien on entendait par moments une pêche mûre qui tombait toute seule de l’espalier. » Et cette passion déçue, la cruelle corruption de Mmc Bovary, la flamme intense de ses prunelles et le pli hardi de sa lèvre, son existence dehasard, le coupde folie de sa luxure, et enfin pourchassée, outragée, et rageuse, cette agonie par laquelle elle s’acquitte de toutes ses hontes, quelle violente évasion, en toutes ces scènes, hors le banal de la vie !

2603. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIIe entretien » pp. 87-159

… En sorte que toute l’humanité naissante, déchue, gémissante, priante, chancelante, vivante, morte, ressuscitée, est contenue et exprimée dans cette épopée des races hébraïques ; que le prêtre et le poète n’est qu’un seul homme pour les peuples de cette théogonie ; et que toutes les fois que le peuple assiste à ses mystères dans les temples, il entend le pontife réciter ses annales, chanter ses hymnes, commémorer ses drames, et qu’il assiste ainsi à sa propre épopée en action ! […] Pour l’entendre, il faut d’abord monter à son niveau, le ciel. […] Bossuet entendit l’avertissement dans son cœur, et le répercuta dans sa voix.

2604. (1857) Cours familier de littérature. III « XIIIe entretien. Racine. — Athalie » pp. 5-80

La langue n’est pas moins transformée que l’idée ; de molle et de langoureuse qu’elle était dans Andromaque, dans Bajazet ou dans Phèdre, elle devient nerveuse comme le dogme, majestueuse comme la prophétie, laconique comme la loi, simple comme l’enfance, tendre comme la componction, embaumée comme l’encens des tabernacles ; ce ne sont plus des vers qu’on entend, c’est la musique des anges ; ce n’est plus de la poésie qu’on respire, c’est de la sainteté. […] Cependant, ayant appris, à force de les entendre, tous les autres rôles, je les jouai successivement, à mesure qu’une actrice se trouvait incommodée : car on représenta Esther tout l’hiver ; et cette pièce qui devait être renfermée dans Saint-Cyr, fut vue plusieurs fois du roi et de toute la cour, toujours avec le même applaudissement. […] Sans l’entendre, il l’envoie à la mort.

2605. (1739) Vie de Molière

Du moins c’est ce que l’on trouve dans le Ménagiana ; et il est assez vraisemblable que Chapelain, homme alors très-estimé, et cependant le plus mauvais poëte qui ait jamais été, parlait lui-même le jargon des Précieuses ridicules chez madame de Longueville, qui présidait, à ce que dit le cardinal de Retz, à ces combats spirituels dans lesquels on était parvenu à ne se point entendre. […] Molière, qui n’entendait rien au jargon de la chasse, pria le comte de Soyecourt lui-même, de lui indiquer les termes dont il devait se servir. […] Molière ayant suspendu son chef-d’œuvre du Misanthrope, le rendit quelque temps après au public, accompagné du Médecin malgré lui, farce très gaie et très bouffonne, et dont le peuple grossier avait besoin ; à peu près comme à l’opéra, après une musique noble et savante, on entend avec plaisir ces petits airs qui ont par eux-mêmes peu de mérite, mais que tout le monde retient aisément.

2606. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Elle s’était mise au latin et était arrivée à entendre les odes d’Horace ; elle lisait l’anglais et avait traduit en vers quelques pièces de William Cowper, notamment celle des Olney Hymns, qui commence ainsi : God moves in… ; une poésie qui rappelait les Cantiques de Racine et toute selon saint Paul. […] C’est dans une lettre du 1er novembre 1826 ; elle lui écrivait, en bonne royaliste toujours, en amie spirituelle et sensée, mais qui n’entendait rien à ce genre de scrupules : « Mon cœur, disait-elle, sait lui pardonner (à la sœur de Mme Valmore, pour un grief en l’air et par manière de plaisanterie), comme il te pardonne la nonchalance que tu mets pour recevoir une pension qui ne peut, sous tous les rapports, n’être pour toi que fort agréable.

2607. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE BALZAC (La Recherche de l’Absolu.) » pp. 327-357

A le lire, à l’entendre, on le croirait davantage du midi, plus voisin d’Angoulême et des contrées de son célèbre homonyme. […] On s’impatiente de l’entendre louer pour son génie ; on le traite de fou délirant ; on accuse la faiblesse de ses proches qui ne l’ont pas fait enfermer déjà : on tremble quand on voit sa fille aînée lui obtenir, pour l’arracher à son laboratoire, une caisse de recette générale au fond de la Bretagne ; on froisse la page sous sa main, mais on y revient ; on est ému enfin, entraîné, on se penche malgré soi vers ce gouffre inassouvi.

2608. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SUE (Jean Cavalier). » pp. 87-117

Il s’enchante insensiblement près d’elle ; tous deux s’entendent sans se le dire ; puis vient l’aveu : ils vont s’épouser. […] Mais bientôt, en avançant dans son sujet, l’auteur eut une crainte : certains feuilletons firent crier les moins scrupuleux ; l’odeur secrète, ce que j’ai entendu appeler l’odeur du fond de cale, si masquée qu’elle fût de temps à autre dans des parfums, perçait trop par intervalles.

2609. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « UNE RUELLE POÉTIQUE SOUS LOUIS XIV » pp. 358-381

J’erre seul, et de loin à peine J’entends les savants convaincus : A ce fronton l’un veut Bacchus, L’autre Constantin fils d’Hélène ; Moi, j’ai ma date plus certaine, Et je lis encore aux murs nus : Sous le consulat de Plancus. […] n’est-il point dangereux de l’entendre Quand on ne veut plus rien aimer191 ?

2610. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre I »

J’ai plusieurs de mes paroisses où l’on doit trois années de taille ; mais, ce qui va toujours son train, ce sont les contraintes… Les receveurs des tailles et du fisc font chaque année des frais pour la moitié en sus des impositions… Un élu est venu dans le village où est ma maison de campagne, et a dit que cette paroisse devait être fort augmentée à la taille de cette année, qu’il y avait remarqué les paysans plus gras qu’ailleurs, qu’il avait vu sur le pas des portes des plumages de volaille, qu’on y faisait donc bonne chère, qu’on y était bien, etc  Voilà ce qui décourage le paysan, voilà ce qui cause le malheur du royaume. » — « Dans la campagne où je suis, j’entends dire que le mariage et la peuplade y périssent absolument de tous côtés. […] On dirait un glas funèbre qui s’interrompt pour reprendre ; même lorsque l’année n’est pas désastreuse, on l’entend de toutes parts.

2611. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre I. Les mondains : La Rochefoucauld, Retz, Madame de Sévigné »

Il s’entendait étonnamment à évaluer les actions ou les réactions que pouvait fournir chaque homme, de façon à y proportionner son jeu. […] Et si l’horizon de Mme de Sévigné est plus large, si elle a des inquiétudes plus hautes et plus philosophiques, Mme de Maintenon a une expérience sûre et profonde de la nature humaine et des tempéraments individuels, une de ces expériences d’institutrice et de directrice d’âmes à qui rien ne se dérobe : on aime à entendre une personne de si bon sens et si bien informée, qui a perdu ses illusions sans en trop vouloir à autrui.

2612. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre huitième »

Dans un discours de sa jeunesse79, il avait traité de la politique des Romains dans la religion ; il est vrai qu’il s’agit de la religion en la main des grands pour gouverner les petits, par « cette crédulité des peuples qui est toujours au-dessus du ridicule et de l’extravagant. » Bossuet l’entend d’une tout autre façon. […] Ai-je besoin de dire qu’il ne s’agit ni de l’autorité comme l’entendent ceux qui en usent mal et ceux qui sont incapables d’obéissance, ni de la puissance publique sous une forme particulière de gouvernement.

2613. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre neuvième »

La pratique du gouvernement représentatif, où tous les ressorts d’une grande société sont mis au jour, nous a persuadé que nous sommes très bons juges de la politique, que nous n’ignorons pas la guerre, que nous nous entendons en finances et en administration, que rien ne nous échappe des rapports de la fortune publique avec l’esprit général du gouvernement. […] La pensée qui lui fait prendre la plume est de railler des abus ; mais s’il s’en présente un par trop criant qui le prenne aux nerfs, il éclate, et l’on entend le cri de la douleur vraie parmi des moqueries.

2614. (1890) L’avenir de la science « XVIII »

J’ai la certitude que l’humanité arrivera avant un siècle à réaliser ce à quoi elle tend actuellement, sauf, bien entendu, à obéir alors à de nouveaux besoins. […] Les droits se font comme toute chose ; ils se font, non pas par des lois positives, bien entendu, mais par l’exaltation successive de l’humanité, laquelle se manifeste en la conquête qu’elle fait de ces droits.

2615. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — Y. — article » pp. 529-575

Nous ne craignons pas de le dire, nous le disons sans craindre d’être démentis par cette raison qui entend ses véritables intérêts, le joug de la Foi étoit nécessaire à la raison humaine. […] Il y a toujours de la ressource pour ramener au bien celui qui s'en est écarté, tant que la voix de ses devoirs peut se faire entendre à son cœur, au lieu que le méchant irréligieux est inaccessible au cri de la Justice, comme à celui du remords.

2616. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Malesherbes. » pp. 512-538

Quelques-uns de ces amours-propres parlaient au nom de la religion et de la morale ; quelques autres (et ce n’étaient pas les moins aigres) se mettaient en avant au nom du goût : J’ai entendu dire sérieusement, remarquait-il, qu’il est contre le bon ordre de laisser imprimer que la musique italienne est la seule bonne… Je connais des magistrats qui regardent comme un abus de laisser imprimer, sur la jurisprudence, des livres élémentaires, et qui prétendent que ces livres diminuent le nombre des véritables savants. […] Il va, dans son délire d’amour-propre, jusqu’à écrire, par allusion à ce nom vénéré : « Le nom de Fréron est sans doute celui du dernier des hommes, mais celui de son protecteur serait à coup sûr l’avant-dernier. » À l’entendre, M. de Malesherbes « avilit la littérature », il fait entrer dans ses calculs de budget le « produit des infamies de Fréron », il « aime le chamaillis ! 

2617. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1879 » pp. 55-96

Samedi 7 juin Je suis à l’enterrement du vieux Maherault, l’avant-dernier collectionneur sincère, l’avant-dernier collectionneur pauvre — je me regarde comme le dernier, — et je n’entends que colloques sans pudeur d’amateurs, tout réjouis par la perspective de la vente, et ne vois que têtes de marchands d’estampes, travaillant à attirer sur elles, l’attention de la famille. […] * * * — J’entendais, l’autre jour, un marchand de vin, d’un ton mi-triomphant, mi-gouailleur, jeter à un cocher, auquel il apportait une consommation sur son siège : « Maintenant, mon vieux, tout est permis, tu peux faire tout ce qui te fait plaisir ! 

2618. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IX. Eugénie de Guérin »

Après s’être habillée, elle faisait une prière vocale ou mentale, et lorsqu’elle était dans une ville, elle ne manquait pas d’aller entendre la messe au premier autel. […] La lady Augusta de Byron n’a peut-être pas entendu, dans le bruit des baisers de ses enfants, le dernier soupir de son frère.

2619. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Résumé et conclusion »

Aucune doctrine philosophique, pourvu qu’elle s’entende avec elle-même, ne peut d’ailleurs échapper à cette conclusion. […] L’image en est donc actuellement donnée, et dès lors les faits nous permettent indifféremment de dire (quittes à nous entendre très inégalement avec nous-mêmes) que les modifications cérébrales esquissent les réactions naissantes de notre corps ou qu’elles créent le duplicat conscient de l’image présente.

2620. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Note »

On dit que Diderot, ayant un jour entendu vanter la campagne, se hâta d’aller vers le gouverneur de Meudon, qu’il connaissait, et retint une chambre au château ; mais voilà tout ce qu’il en fit ; il laissait passer les étés sans y aller, et comme Delille, sachant cela, lui demanda le logement pour quelques semaines : « Mon cher abbé, lui répondit Diderot, nous avons tous notre chimère, que nous plaçons loin de nous et que nous promenons à notre horizon ; si nous y mettons la main, elle se porte ailleurs ; je ne vais pas à Meudon, mais je me dis chaque jour : J’irai demain.

2621. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. LOUIS DE CARNÉ. Vues sur l’histoire contemporaine. » pp. 262-272

Nous aimons de tels ouvrages, parce que, s’il en naissait beaucoup de cette sorte dans des rangs qui ne sont pas les nôtres, ce serait une preuve qu’après bien des luttes et des déceptions cruelles, et même avec des dissidences d’affection persistantes, les générations nouvelles pourraient enfin s’entendre sur le terrain d’une vraie et pratique liberté.

2622. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « EUPHORION ou DE L’INJURE DES TEMPS. » pp. 445-455

Mais de ce que Properce est érudit et quelque peu difficile à entendre par endroits jusqu’au sein de la passion, la perte de ses étincelantes élégies serait-elle moins pour l’homme de goût une calamité littéraire ?

2623. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « PENSÉES » pp. 456-468

L’esprit (je l’entends au sens le plus fin) est une des choses dont on se passe le plus aisément entre soi dans la jeunesse : on a l’imagination, la sensibilité, le mouvement.

2624. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la Révolution française — II. La Convention après le 1er prairal. — Le commencement du Directoire. »

Ce fut une marque de civisme, aussitôt après le 9 thermidor, de remplacer la carmagnole par un habit carré et décolleté, les cheveux sales et plats par des cadenettes et un peigne, de passer sa journée au Palais-Royal à lire l’Orateur du peuple de Fréron et les brochures politiques ; d’aller le soir, avec un crêpe au bras, au Bal des victimes ou au salon de madame Tallien ; d’entendre le chanteur Garat à Feydeau, ou La Harpe déclamant au Lycée contre le tutoiement révolutionnaire.

2625. (1874) Premiers lundis. Tome II « Thomas Jefferson. Mélanges politiques et philosophiques, extraits de ses Mémoires et de sa correspondance, avec une introduction par M. Conseil — II »

On y apprend, par exemple, que Jefferson n’a jamais entendu, dans les assemblées, Washington ni Franklin parler plus de dix minutes de suite et s’occuper d’autre chose que de la principale difficulté pour la résoudre.

2626. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre I. Un retardataire : Saint-Simon »

Cette façon d’entendre la religion est ce qu’il y a de plus intelligent en lui.

2627. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Guy de Maupassant »

J’entendais dire qu’il avait du talent, mais je n’éprouvais pas le besoin d’y aller voir.

2628. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XI. Trois bons médanistes : Henry Céard, Joris-Karl Huysmans, Lucien Descaves » pp. 145-156

Le voici, brièvement : (Il est entendu que ces messieurs ne se sont pas mis à une grande table, posant : « Nous allons faire, etc. ».

2629. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre VI. L’Astronomie. »

J’entends bien que sous cette sombre voûte, nous aurions été privés de la lumière du Soleil, nécessaire à des organismes comme ceux qui habitent la Terre.

2630. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les poètes maudits » pp. 101-114

J’entends d’ici les gens reprendre : « Mais c’est le symbole, il y a longtemps que ça existe. » Certes, oui, le symbole existait, mais il existait à l’état inconscient.

2631. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Première partie. Plan général de l’histoire d’une littérature — Chapitre IV. Moyens de déterminer les limites d’une période littéraire » pp. 19-25

La seconde période, qui va de la Renaissance jusqu’à la Restauration, au début de notre siècle, est l’époque classique, en rendant à ce mot le sens exact qu’il devrait toujours avoir ; j’entends par là que la littérature ?

2632. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre V. Des trois ordres de causes qui peuvent agir sur un auteur » pp. 69-75

C’est qu’à vrai dire on a coutume d’entendre ce mot milieu dans un sens trop peu précis ; on n’a pas l’air de se douter en quelle multitude de milieux partiels le milieu social se fractionne.

2633. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre III. Soubrettes et bonnes à tout faire »

Rien de fatigant comme de l’entendre zézayer, en phrases longues et filandreuses — j’en ai compté une de soixante-quatre lignes — la fable sentimentalo-bébête.

2634. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Corneille, et le cardinal de Richelieu. » pp. 237-252

Aussi disoit-on que, pour retrouver le grand Corneille, il falloit aller l’entendre à l’hôtel de Bourgogne.

2635. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre onzième. »

Quand il connaît ses devoirs aussi bien que la plupart des princes connaissent leurs droits, quand il sait ne parler que de ce qu’il entend, quand on a formé sa raison, quand on lui a enseigné l’art d’apprécier les hommes et les choses, son éducation est très-bonne et très-avancée.

2636. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 5, des études et des progrès des peintres et des poëtes » pp. 44-57

Le Correge qui n’étoit pas encore sorti de son état, quoiqu’il fut déja un grand peintre, étoit si rempli de ce qu’il entendoit dire de Raphaël, que les princes combloient à l’envi de présens et d’honneurs, qu’il s’étoit imaginé qu’il falloit que l’artisan, qui faisoit une si grande figure dans le monde, fût d’un mérite bien superieur au sien qui ne l’avoit pas encore tiré de sa médiocrité.

2637. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les Philippiques de la Grange-Chancel »

Ces Philippiques 36 effroyables, ces furies lyriques, insinuées d’abord dans l’opinion comme un secret, puis y détonant comme une indiscrétion, n’étaient pas d’un pauvre poète obscur, plein de courage et de génie, qui aurait eu le temps de mourir de faim avant qu’on eût entendu s’élever sur sa lyre la voix divine de la justice.

2638. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Notre critique et la leur »

Parmi les critiques qui se font ainsi palinodie les uns aux autres, il y en a, les uns d’un talent qui promet, les autres d’un talent qui donne ; mais ce qu’ils promettent ou ce qu’ils tiennent n’est certainement jamais de la critique comme nous l’entendons.

2639. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Bruyère » pp. 111-122

On l’écouta et on l’entendit.

2640. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « De Cormenin (Timon) » pp. 179-190

Ceux que nous attendions du peintre pamphlétaire, c’étaient des orateurs vivants des orateurs de son époque, qu’il a vus, entendus, pratiqués, — et pas du tout !

2641. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Swift »

IV Tel est pour nous, cependant, ce fameux Jonathan Swift qu’on a osé comparer à Rabelais qui, du moins, fait entendre un rire inspiré du fond de sa fange.

2642. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIII. P. Enfantin »

Entendez-vous, Mesdemoiselles !

2643. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Roger de Beauvoir »

Tout le monde la sait dans cette ville de cristal sonore à travers lequel on voit et l’on entend et qui s’appelle Paris.

2644. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Gères. Le Roitelet, verselets. »

L’avenir prend de l’importance, L’horizon paraît s’élargir, On entend à large distance La mer éternelle mugir Sur les rives de l’existence !

2645. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « J.-J. Ampère ; A. Regnault ; Édouard Salvador »

J’ai dit qu’il prend l’air, mais c’est l’air plein qu’il faut entendre ; car les choses qui sont dans l’air, les choses matérielles, extérieures, sont les seules qui le préoccupent.

2646. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XIX. »

Mieux vaut entendre de la bouche du lyrique chrétien sa belle invocation au Créateur, foyer des âmes humaines, et sa confiance dans la vie éternelle qui leur est promise : « La mort220, ô Dieu !

2647. (1884) L’art de la mise en scène. Essai d’esthétique théâtrale

Et ce vengeur, en effet, c’est un autre pédant, Vadius, qui, tout pédant qu’il est lui-même, fera entendre à Trissotin de dures, mais justes vérités. […] Je ne parle bien entendu que des rôles importants, et je ne tiens pas compte des cas fortuits ou de force majeure. […] Il vient d’entendre l’accusation portée par Œnone, et il interroge celle-ci, méditant sur la cruauté de ce coup du destin qui l’attendait à son retour dans son palais. […] Il vient d’apprendre la mort violente de Jocaste et d’entendre le récit lamentable de l’attentat d’Œdipe sur lui-même. […] Bien entendu il ne faudrait pas restreindre cette concordance entre un artiste et un groupe de rôles à de simples similitudes physiques.

2648. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VI : Difficultés de la théorie »

Souvent elle tue de petits oiseaux en leur assénant de vigoureux coups de becs sur la tête, exactement comme la Pie-Grièche (Lanius), et bien des fois je l’ai entendue frapper à coups redoublés des graines d’if contre une branche, et les briser ainsi, comme ferait le Casse-Noix (Nucifraga caryocatactes). […] Par l’unité de type, il faut entendre cette ressemblance fondamentale que l’on constate dans la structure de tous les êtres organisés de la même classe, ressemblance qui semble complétement indépendante de leurs habitudes de vie. […] Bien entendu que nous n’entendons pas déterminer ici d’une façon certaine la généalogie positive de nos diverses classes de vertébrés, mais indiquer seulement, en général, comment ils ont pu se former successivement.

2649. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Hommes et dieux, études d’histoire et de littérature, par M. Paul De Saint-Victor. »

Sa voix (je l’ai entendu) prend des accents irrités, vibrants et comme métalliques quand il croit qu’on les outrage : son goût noble et élevé devient altier en ces moments-là.

2650. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Lélia (1833) »

Or, voici que depuis trois ans environ, depuis que, d’une part, le bon ton rangé et le vernis moral de la Restauration ont disparu, et que, d’autre part, le Saint-Simonisme a fait entendre ses cris d’émancipation et ses appels multipliés, voici que l’esprit d’indépendance a remué les femmes comme le reste, et qu’une multitude d’entre elles prenant la  parole, dans des journaux, dans des livres de contes, dans de longs romans, sont en train de confesser leurs peines, de réclamer une part de destinée plus égale, et de plaider contre la société.

2651. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Virgile et Constantin le Grand par M. J.-P. Rossignol. »

En lui s’est rassemblé, comme dans un harmonieux et suprême organe, l’écho mourant de cette voix sacrée qu’entendirent, à l’origine de la fondation romaine, les Évandre et les Numa.

2652. (1874) Premiers lundis. Tome II « Des jugements sur notre littérature contemporaine à l’étranger. »

C’est en France encore (que les reviewers étrangers daignent le croire) que les ouvrages qu’on lui reproche de faire naître, sont le plus promptement, le plus finement critiqués raillés sinon par écrit toujours partout ailleurs, en causant, au coin d’une rue ou d’un salon, dans la moindre rencontre de gens qui à demi mot s’entendent.

2653. (1875) Premiers lundis. Tome III « L’Ouvrier littéraire : Extrait des Papiers et Correspondance de la famille impériale »

La bohème, même la plus sérieuse et la plus honnête, — et par bohème j’entends tout ce qui est précaire, — est à cent lieues de la bureaucratie, même la plus prévenante et la plus polie.

2654. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre V. Des personnages dans les récits et dans les dialogues : invention et développement des caractères »

On entend par ce mot tout ce qui est non pas extraordinaire, mais merveilleux, tout ce qui est hors de la possibilité naturelle, tout ce qui n’arrive pas, les combinaisons trop ajustées d’événements, les rencontres trop heureuses du hasard, les coups de vertu ou de passion inexpliqués dans leur grandeur, les perfections et les bonheurs incroyables dans leur continuité.

2655. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre II. Distinction des principaux courants (1535-1550) — Chapitre II. Jean Calvin »

Et surtout il a l’inestimable don du xvie  siècle, la jeunesse : cela étonne ; j’entends par là la fraîcheur d’une pensée toute proche encore de la vie et chargée de réalité.

2656. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Dumas, Alexandre (1802-1870) »

Gardez-vous d’exagérer votre activité… Il faut que l’art soit la règle de l’imagination pour qu’elle se transforme en poésie… » Critique admirable et digne absolument de l’esprit sans règle et sans frein dont les premiers tumultes se faisaient entendre à tout le genre humain.

2657. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rostand, Edmond (1868-1918) »

Les garçons du café François Ier ne l’ont pas entendu vaticiner autour de l’absinthe de Verlaine.

2658. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’Âge héroïque du Symbolisme » pp. 5-17

Mais il n’y a pas que le livre qui entende ouvrir des voies nouvelles, il y a aussi les Arts plastiques et le Théâtre.

2659. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 151-168

Ils ont beau s’écrier d’un fausset philosophique, qu’il n’a fait que copier Horace & Juvenal, qu’il n’est tout au plus qu’un bon versificateur, qu’il ne connut jamais le sentiment, que ses idées sont froides & communes, qu’il n’est pas enluminé comme eux, qu’il n’a qu’un ton, qu’une maniere ; ils ont beau s’applaudir réciproquement de leurs prouesses littéraires, lever jusqu’aux nues l’entortillage & l’enflure de leurs pensées, ne trouver rien d’égal à la profondeur de leurs courtes vues, s’extasier sur le vernis de leurs mystérieuses expressions ; la voix noble & ferme de Stentor n’a qu’à se faire entendre, & aussitôt cette engeance mutine disparoîtra, avec son Général, pour se cacher sous ses humbles pavillons.

2660. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Abailard, et saint Bernard. » pp. 79-94

Cet oracle de son siècle, aussi malheureux en écrits qu’en amour, fut au désespoir d’être jugé, sans qu’auparavant on l’eût entendu.

2661. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre huitième. »

C’est l’art de La Fontaine de faire entendre beaucoup plus qu’il ne dit.

2662. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Baudouin » pp. 198-202

Il n’entend rien à la convenance, il ne sait pas qu’il faut que tout tienne ; il ignore ce que les autres savent sans l’avoir appris, et pratiquent de jugement naturel et d’instinct.

2663. (1799) Jugements sur Rousseau [posth.]

J’entends dire que toutes les lettres sont du même ton, et que c’est toujours l’auteur qui parle et non pas les personnages : je n’ai point senti ce défaut ; les lettres de l’amant sont pleines de chaleur et de force, celles de Julie de tendresse et de raison.

2664. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Deux diplomates »

Partis d’un même principe, ils ne s’entendaient plus dans leurs conclusions différentes sur l’avenir du monde, titubants, incohérents et contrastants par tout ce qu’il y a de plus opposé dans l’âme des hommes : le désespoir et l’espérance !

2665. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Charles Monselet »

— et on se disait : « C’est du Monselet que vous allez entendre, c’est-à-dire le xviiie  siècle ressuscité ! 

2666. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Pélisson et d’Olivet »

Il Rien de plus insignifiant, en effet, que les histoires superstitieusement réimprimées par Livet ; rien qui ressemble moins à ce que nous autres gens du xixe  siècle nous sommes accoutumés d’entendre par de la critique et de l’histoire.

2667. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Paul de Saint-Victor » pp. 217-229

Quant au détail, en ce livre, il est si exquis et d’un intérêt si poétique et si raffiné, que les avaleurs de feuilletons, qui n’ont faim que des vulgaires surprises de l’aventure, n’ont su trouver probablement aucune saveur à cette littérature élevée… Pour mon compte, n’ai-je pas entendu traiter cette haute littérature d’ennuyeuse ?

2668. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Le cardinal Ximénès »

D’abord confesseur de la reine Isabelle, ensuite archevêque de Tolède, puis cardinal et grand inquisiteur de Castille et de Léon, enfin ministre et régent d’Espagne, sous les différentes pourpres du commandement qu’il revêtit avec tant de magnificence, l’humble sandale du Franciscain se retrouva toujours… Richelieu, auquel le docteur Hefele la comparé dans un parallèle très substantiel et très détaillé, est principalement gentilhomme et grand seigneur, — Mazarin est un habile et séduisant officier de fortune, — mais Ximénès est un moine qui entend le gouvernement des hommes parce qu’il le regarde du point de vue de Dieu.

2669. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Marie-Antoinette » pp. 171-184

Or, cet affaiblissement par les Bourbons de la monarchie en France et dans le monde, cet affaiblissement qui nous faisait tomber dans le mépris d’un roi de Prusse, — car Dieu, qui s’entend au mépris, sait choisir la coupe d’où il le verse ! 

2670. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Francis Wey » pp. 229-241

III Eh bien, voilà, selon moi, le meilleur de Francis Wey et de son Dick Moon à Paris, c’est-à-dire en province, car il faut s’entendre avec ce narquois de Wey, qui sait pourtant, d’ordinaire, dire très bien la chose comme elle est !

2671. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XII. Marie-Antoinette, par MM. Jules et Edmond de Goncourt » pp. 283-295

Or, cet affaiblissement par les Bourbons de la monarchie en France et dans le monde, cet affaiblissement qui nous faisait tomber dans le mépris d’un roi de Prusse, — car Dieu, qui s’entend au mépris, sait choisir la coupe d’où il le verse, — personne en Europe ne le prévoyait mieux que la sage et pieuse Marie-Thérèse.

2672. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Léopold Ranke » pp. 1-14

III Ainsi, — qu’on l’entende bien ! 

2673. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Le docteur Revelière » pp. 381-394

Le Royalisme de l’auteur des Ruines est le Royalisme incompatible, qui n’entend à aucune transaction, et qui n’a ni la niaiserie, ni la lâcheté d’une espérance… C’est le Royalisme absolu comme la vérité est absolue. — Et c’est pourquoi il est une ruine aussi, parmi tant d’autres, impossibles à relever !

2674. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Μ. Eugène Hatin » pp. 1-14

Hatin l’entend si bien ici, que son histoire s’ouvre au xviie  siècle et à l’avènement dans la publicité de Théophraste Renaudot, qu’il appelle le père du journalisme en France ; car le journalisme naquit presque le même jour par toute l’Europe.

2675. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « IV. Saisset »

Saisset n’a jamais tué personne, elle n’est meurtrière que de vérité ; mais elle va mourir au milieu d’ennemis chaque jour plus nombreux, plus prompts aux coups et plus puissants… Parmi eux, bien entendu, le Catholicisme est là qui la presse, et non pas seulement le Catholicisme farouche, haineux, théocratique et rétrograde, que hait modestement M. 

2676. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIV. M. Auguste Martin »

Martin et dont il entreprend l’histoire est bien la morale telle qu’on l’entend en Chine, cette morale athée qui charma, quand il la découvrit, tout le dix-huitième siècle, qui se connaissait à cette morale-là.

2677. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Chastel, Doisy, Mézières »

Il paraît que ces cris-là, l’Académie n’a pas voulu les entendre.

2678. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Vte Maurice De Bonald »

» Et, de leur côté, les royalistes à transaction, qui s’imaginent que toute la politique est de s’entendre avec la révolution au profit de la royauté, s’écrieront : « Vous nous perdez avec une imprudence ! 

2679. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Armand Hayem »

Comment pourrions-nous nous entendre ?

2680. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Émile Augier, Louis Bouilhet, Reboul »

Mais tous les trois donnent, chacun à sa façon, une note déjà entendue ; tous les trois mettent en relief ce signe du temps : l’absence de l’originalité !

2681. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Gérard de Nerval  »

Tout ce qui est de regard et de récit dans ce Voyage d’Orient est à étonner de bon sens, de bonne humeur et de bon ton, toutes choses rares dans l’école romantique ; et s’il s’y rencontre des parties inférieures, ce sont les pages que l’auteur a voulu faire poétiques, comme la légende de la Reine de Saba, qu’il prétend avoir entendu raconter par un conteur de café, en Egypte, et que, pour cette raison, je ne mettrai point à sa charge.

2682. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Banville. Les Odes funambulesques. »

La sienne, à lui, est, obscure et secrète comme un chiffre qui n’a point de clef ; trente personnes peut-être dans Paris ont le sens de cette gaîté logogriphique, mais, à partir de la banlieue, tous les hommes d’esprit de la terre peuvent se mettre à plusieurs pour comprendre, ils ne seront pas plus heureux que les bourgeois de Hambourg qui se cotisaient pour entendre les mots de Rivarol !

2683. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Henri Heine »

Le judaïsme et le christianisme, et par ce mot de christianisme entendez le catholicisme, — les idées protestantes étant tout ce qu’il y avait de plus antipathique à l’esprit de Heine, — le catholicisme donc et le judaïsme avaient laissé également en son âme des impressions superbes qu’il a superbement exprimées, quitte à s’en moquer une minute après !

2684. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Duranty » pp. 228-238

J’ai entendu vanter le pathétique du roman de M. 

2685. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre V. Autres preuves tirées des caractères propres aux aristocraties héroïques. — Garde des limites, des ordres politiques, des lois » pp. 321-333

Imperium s’entend des grandes magistratures, du consulat, de la préture qui donnaient le droit de condamner à mort ; potestas, des magistratures inférieures, telles que l’édilité, et modicâ coercitione continetur.

2686. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIVe entretien. Littérature, philosophie, et politique de la Chine » pp. 221-315

Pour le découvrir avec évidence, il faudrait connaître l’origine du peuple primitif de la Chine et le suivre pas à pas au flambeau de l’histoire depuis son berceau jusqu’à sa décadence actuelle (décadence militaire, entendons-nous bien). […] « “Nous ne sommes pas assez érudit, poursuit-il, pour prononcer entre le Chi-King, et les poètes d’Occident ; mais nous ne craignons pas de dire qu’il ne le cède qu’aux psaumes de David pour parler de la divinité, de la providence, de la vertu, etc., avec cette magnificence d’expression et cette élévation d’idées qui glacent les passions d’effroi, ravissent l’esprit et tirent l’âme de la sphère des sens.” » XIII S’élevant ensuite à la hauteur d’une critique supérieure aux ignorances et aux préjugés de secte, le savant disciple des jésuites parle des Kings, de leur antiquité, de leur authenticité, de leur caractère en ces termes : « De bons missionnaires qui avaient apporté en Chine plus d’imagination que de discernement, plus de vertu que de critique, décidaient sans façon que les Kings étaient des livres, sinon antérieurs au déluge, du moins de peu de temps après ; que ces livres n’avaient aucun rapport avec l’histoire de la Chine, qu’il fallait les entendre dans un sens purement mystique et figuré. […] « Vous ne me connaissez point, leur répondit Confucius, si vous croyez que c’est par dédain que je ne veux pas accepter le bienfait dont le roi de Tsi veut m’honorer ; et le roi de Tsi me connaît moins encore s’il s’imagine que je suis venu dans ses États et auprès de sa personne en vue de quelque intérêt temporel qui me soit propre. » XXIV On demandait à un sage qui avait vu et entendu Confucius ce que c’était que ce philosophe : « C’est un homme, répondit le sage, auquel aucun homme de nos jours ne peut être comparé.

2687. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (2e partie) » pp. 5-80

XV La plaine est grise comme une cendre d’herbes brûlées par le soleil ; autour de vous une vapeur ambiante sort des pierres et rampe presque visible sur le sol ; de légers nuages de poussière rose s’élèvent et retombent çà et là sous les pieds de l’alouette qui secoue en partant la tige des pavots saupoudrés de terre ; le silence du sommeil, à l’heure de la sieste, pèse sur l’espace ; on entend seulement, de loin en loin, le frôlement métallique de l’épi contre l’épi, quand la brise de mer effleure en passant les grands champs de blé ; les ombres crues de l’aqueduc se replient, comme pour fuir la chaleur du milieu du jour, sous les arcades. […] Le char se présente au spectateur la pointe du timon en avant ; il est traîné ou plutôt il était traîné tout à l’heure par une paire de buffles robustes, attelés au timon par une longue tringle de bois arrondi qui passe par-dessus le timon ; ce joug y est fixé par le milieu au moyen d’une chaîne, en anneaux luisants de fer, qu’on voit briller et qu’on croit entendre cliqueter au branle du front des buffles. […] … XXXVIII Quoiqu’il en soit, le 20 mars 1835, après avoir entendu dans la soirée de la veille le Requiem de Mozart, chanté, à sa prière, par deux Allemands musiciens de sa connaissance ; après avoir donné quelques coups de pinceau à son tableau et après avoir lu en silence quelques versets de sa Bible, il était monté à son atelier, où son frère, en entrant, le trouva sans vie au pied de son chevalet.

2688. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIIe entretien. Cicéron » pp. 81-159

Mais sa santé se rétablissait ; les maîtres des écoles d’éloquence les plus célèbres d’Athènes, de Rhodes, de l’Ionie, accouraient pour l’entendre discourir dans les académies de l’Attique, et, pénétrés d’admiration pour ce jeune barbare, ils confessaient avec larmes que Rome les avait vaincus par les armes, et qu’un Romain les dépassait par l’éloquence. […] Je crois l’entendre en ce moment t’adresser la parole : Catilina, semble-t-elle te dire, depuis quelques années, il ne s’est pas commis un forfait dont tu ne sois l’auteur, pas un scandale où tu n’aies pris part. […] Nous avons assisté de nos jours, dans un pays aussi lettré que Rome, dans des temps aussi révolutionnaires que le temps de Cicéron, à des scènes d’éloquence aussi décisives que celle du sénat romain, entre des hommes de bien, des hommes de subversion, des ambitieux, des factieux, des Catilinas, des Clodius, des Cicérons, des Pompées, des Césars modernes ; nous avons assisté, disons-nous, aux drames les plus tumultueux et les plus sanglants de notre époque : mais nous n’avons jamais entendu des accents où la colère et le génie oratoire, le crime ou la vertu vociférés par des lèvres humaines, fussent autant fondus en lave ou en foudre dans des harangues si ardentes d’invectives, si solennelles de vertu et si accomplies de langage !

2689. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre troisième »

On sait seulement, par un passage du Testament de Jean de Meung, que Dieu lui donna de servir les plus grandes gens de la France, et, par une préface au roi Philippe le Bel, qu’il avait traduit du latin un livre de Végèce, les lettres d’Héloïse et d’Abailard, et le livre, de la Consolation de Boëce, « que j’ai translatée en français, dit-il au roi, jaçoit qu’entendes bien latin. » Jean de Meung vécut jusque vers l’an 132O : il était contemporain du Dante. […] Si beaucoup d’érudits l’ont entendu autrement, et si Marot notamment, qui en a donné une édition ou plutôt une version, a vu dans la rose, soit « l’état de sapience » soit « l’état de grâce », soit « le souverain bien infini », soit enfin la glorieuse vie de Marie elle-même, c’est que le plan, fort peu clair dans la première partie, est encore plus obscur dans la continuation de Jean de Meung, et que parmi ces personnages allégoriques, il en est plusieurs dont le rôle ne correspond pas toujours à une circonstance bien déterminée, soit de l’amour, soit des passions dont il est le mobile. […] Et s’aucun me vouloit reprendre Et dire que je le mauldys, Non fais, si bien le scet entendre, Et rien de lui je ne mesdys.

2690. (1894) Textes critiques

Ceux qui savent ouïr entendront que nulles murailles, nulles grilles, nulles barrières ne défendent les approches du château de granit lourd, mais l’effroi ininterrompu des douves noires, pareilles au carcan dont on a serré la tête d’un saint Jean-Baptiste couronné, avant de la déposer dans un plat vert. […] Comme aujourd’hui elle va à la Comédie-Française entendre Molière et Racine parce qu’ils sont joués d’une façon continue. […] Nous ne reviendrons pas sur la question entendue une fois pour toute de la stupidité du trompe-l’œil.

2691. (1856) Cours familier de littérature. II « XIIe entretien » pp. 429-507

« Et moi aussi j’ai déjà entendu souvent ces paroles !  […] « A-t-il entendu la trompette, il dit : Allons ! […] dit-il ; jusqu’à présent je n’avais entendu ta voix que par les oreilles, maintenant mes yeux te voient par tes œuvres !

2692. (1903) La renaissance classique pp. -

Ils se mêlent de réglementer les plaisirs du peuple, ils entendent l’amuser à leur manière, — à la fois décente et instructive. […] Qu’il soit bien entendu que nous n’avons rien à voir avec la science. […] Ce qu’on entend par là, c’est un sujet qui se suffise à lui-même, qui ne doive rien d’essentiel ni à la pathologie, ni à la statistique, ni à la sociologie ; qui ne puisse être conçu que par un poète (dans le grand sens du mot), et dont un autre ne puisse rien tirer ; un sujet enfin qui se développe spontanément à la façon d’une plante ou d’un organisme vivant.

2693. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Diderot »

En attendant, tous les genres de travaux qui s’offraient lui étaient bien venus ; le métier de journaliste, comme nous l’entendons, n’existait pas alors, sans quoi c’eût été le sien. […] C’est une rétractation partielle, une rectification de ce que j’avais écrit précédemment dans un article du Globe, dont je reproduis ici le début : « Il y a dans Werther un passage qui m’a toujours frappé par son admirable justesse : Werther compare l’homme de génie qui passe au milieu de son siècle, à un fleuve abondant, rapide, aux crues inégales, aux ondes parfois débordées ; sur chaque rive se trouvent d’honnêtes propriétaires, gens de prudence et de bon sens, qui, soigneux de leurs jardins potagers ou de leurs plates-bandes de tulipes, craignent toujours que le fleuve ne déborde au temps des grandes eaux et ne détruise leur petit bien-être ; ils s’entendent donc pour lui pratiquer des saignées à droite et à gauche, pour lui creuser des fossés, des rigoles ; et les plus habiles profitent même de ces eaux détournées pour arroser leur héritage, et s’en font des viviers et des étangs à leur fantaisie.

2694. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre premier. Mécanisme général de la connaissance — Chapitre II. De la rectification » pp. 33-65

Le roulement strident s’affaiblit, s’efface ; j’ai beau prêter l’oreille, je n’entends plus que le murmure indistinct de la campagne et le chuchotement monotone des feuilles remuées par le vent. […] J’ai vu cent fois cette pendule que je me figure ; j’ai entendu ou lu mille fois, dix mille fois, ces paroles mentales qui roulent dans mon esprit ; j’ai remarqué trente ou quarante fois le geste d’étonnement, le sourire de plaisir, l’accent de colère que j’imagine ; la preuve en est qu’ils me reviennent ; si je sais, c’est que je me souviens.

2695. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXVIIe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (3e partie) » pp. 5-56

Ne parlons donc plus de liberté dans le sens que Rousseau et sa secte de 1791, et même la secte de La Fayette en 1792, et la secte parlementaire de 1830, et la secte radicale des polémistes de 1848, l’ont entendue. […] IV Mais si on entend par ce mot de liberté la participation d’un plus grand nombre de sujets ou de citoyens au gouvernement, soit par la pensée exprimée au moyen de la presse ou dans les conseils, soit dans les élections, soit dans les délibérations, soit dans les magistrats, aucun doute alors que cet exercice du commandement social attribué par les constitutions au peuple, ne soit, quand le peuple en est capable par ses vertus et par ses lumières, une excellente condition de progrès moral, de dignité et de grandeur humaine.

2696. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre IV. Chateaubriand »

Il alla au Niagara, descendit l’Ohio jusqu’à sa rencontre avec le Kentucky : on peut croire, si l’on tient à lui faire plaisir, qu’il descendit le Mississipi et vit la Floride ; les lambeaux de son journal de voyage, mêlés d’extraits de ses lectures, laissent entendre qu’il parcourut d’immenses espaces. […] Il a offert sa phrase artiste, harmonieuse, expressive, simple, tantôt nerveuse, tantôt onduleuse, tantôt large et calme ; et sa prose a fait entendre ce que pouvaient être des vers.

2697. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre septième. »

Tels sont les défauts des écrivains penseurs du xvie  siècle ; et j’entends par défauts, non les taches de détail qui gâtent un ouvrage excellent, mais de mauvaises conditions pour voir la vérité et pour l’exprimer dans un langage durable. […] il touche à toutes les circonstances de la vie, il connaît tout, il dit tout, ou, comme il s’en rend le témoignage à la fin d’un chapitre sur l’honnêteté du lit nuptial, « il fait entendre sans le dire ce qu’il ne voulait pas dire172. » En tout ce qui regarde les actes de la vie secrète, il y a une grande différence entre Charron et lui.

2698. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre VI. Premiers pas hors de Saint-Sulpice  (1882) »

Une des idées que j’ai le plus souvent à combattre, c’est que l’amitié, comme on l’entend d’ordinaire, est une injustice, une erreur, qui ne vous permet de voir que les qualités d’un seul et vous ferme les yeux sur les qualités, d’autres personnes plus dignes peut-être de votre sympathie. […] La providence individuelle, comme on l’entendait autrefois, n’a jamais été prouvée par un fait caractérisé.

2699. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 457-512

Qu’on ne s’imagine pas que nous voulions faire entendre par-là, que sa Prose soit mauvaise ou inférieure à sa Poésie : ce seroit être absurde, que de méconnoître dans le Prosateur les mêmes qualités qui brillent dans le Poëte. […] Est-ce à travers des saillies, des épigrammes, des jeux de mots, des plaisanteries indécentes, qu'elle se plaît à lancer ses rayons & à faire entendre son langage ?

2700. (1863) Le réalisme épique dans le roman pp. 840-860

Je voudrais expliquer par une sorte d’aperçu généalogique ce qu’il faut entendre par le réalisme de Goethe. […] tout resplendit, tout ruisselle, tout est mystérieusement énorme ; on ne sait plus ce qu’on voit, on ne sait plus ce qu’on entend, et l’auteur, sentant qu’il a beau jeu, poursuit devant l’auditoire aveuglé, assourdi, son incompréhensible exhibition.

2701. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre troisième. La reconnaissance des souvenirs. Son rapport à l’appétit et au mouvement. »

« Souvent, dit-il, dans une promenade, l’idée m’est venue que j’avais déjà vu, entendu ou pensé auparavant ceci ou cela sans que je pusse me rappeler dans quelles circonstances. […] Si on lui lisait quelque chose dans la soirée, il se réveillait le lendemain matin l’esprit plein des pensées et des expressions entendues la veille, et il les écrivait de la meilleure foi du monde, sans se douter qu’elles ne lui appartenaient pas.

2702. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre III. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire sacrée & ecclésiastique. » pp. 32-86

Il assure que le nom d’Ignace étoit redoutable aux puissances de l’enfer, & qu’on a entendu quelquefois les possédés s’écrier au milieu des exorcismes à la vue d’une image du serviteur de Dieu : Où est ton pouvoir, Lucifer, puisqu’un peu de papier avec la figure d’un Prêtre nous fait fuir sans que nous puissions résister ? […] Il vouloit qu’on pût le lire tout de suite, sans qu’on eût besoin d’étude, pour examiner ce qui étoit douteux, & se faire expliquer ce qu’on n’entendoit pas.

2703. (1809) Quelques réflexions sur la tragédie de Wallstein et sur le théâtre allemand

Il avait, par ce ménagement mal entendu, dépouillé le chœur de l’impartialité qui donne à ses paroles du poids et de la solennité. […] Tout l’univers s’adresse à l’homme dans un langage ineffable qui se fait entendre dans l’intérieur de son âme, dans une partie de son être inconnue à lui-même, et qui tient à la fois des sens et de la pensée.

2704. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre III : Règles relatives à la distinction du normal et du pathologique »

Il est vrai que, couramment, on entend aussi par santé un état généralement préférable à la maladie. […] Tous les criminologistes s’entendent sur ce point.

2705. (1913) La Fontaine « VII. Ses fables. »

Il y a des fables où les animaux sont des prétextes, et pas autre chose, et où, sous le nom de lion, il faut entendre le roi, sous le nom de loup, le hobereau cruel et tyrannique de campagne, ou — car il y a cela aussi — l’homme absolument indépendant et vivant la vie libre et sauvage. […] Or, si l’animal est capable de progrès, de changements, de modification à ses usages et à son industrie selon les circonstances, il est un homme ; il est inférieur, bien entendu, comme capacité inventrice, à l’homme, mais il est susceptible de progrès.

2706. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « II. M. Capefigue » pp. 9-45

ils entendaient si bien la vie ! […] Capefigue et nous ne les lui avons pas épargnés), il les entend toujours, il se débat contre eux, car il leur répond et il les discute.

2707. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIX. M. Cousin » pp. 427-462

Le factieux et le libertin était parfaitement digne d’écrire l’histoire de cette factieuse et de cette libertine, et, s’il n’a pas pour elle l’admiration qu’on pouvait attendre, c’est que ces gens-là ne s’entendent jamais entre eux. […] Cousin de ne plus s’entendre avec lui-même !

2708. (1773) Discours sur l’origine, les progrès et le genre des romans pp. -

Mais qu’entend-il par un ouvrage solide ? […] Il faut envoyer le Tasse dans le désert d’Armide ; exiler Chimene & Camille, malgré le respect dû à Corneille ; brûler presque tous les chefs-d’œuvre de Racine ; se bien garder de voir ni d’entendre Zaïre, &c.

2709. (1874) Premiers lundis. Tome I « Victor Hugo : Odes et ballades — II »

Jamais orgie satanique n’a été conçue ni rendue avec plus de verve : l’argot des diables, leurs rires bruyants, leurs bonds impétueux, tout cela se voit et s’entend.

2710. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre III. Du récit des faits. — Antécédents et conséquents. — Causes et effets »

La brièveté consiste à prendre son point de départ où il faut, sans remonter trop haut ; à ne point énumérer les parties où il suffit de montrer le tout (souvent on peut se contenter de dire le fait sans entrer dans le détail ni dire le comment) ; à ne point prolonger la narration au-delà de ce qu’on a besoin de savoir ; à n’y point mêler de choses étrangères ; à faire entendre parfois ce qu’on ne dit pas par le moyen de ce qu’on dit ; à écarter non seulement ce qui nuit au récit, mais aussi cc qui ne lui nuit ni ne lui sert, à ne dire chaque chose qu’une fois ; à ne point recommencer ce qu’on vient justement d’achever de dire.

2711. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre I. Les origines du dix-huitième siècle — Chapitre I. Vue générale »

Toutes les forces révolutionnaires — les forces intellectuelles, s’entend — entrent en ligne, et la victoire est complète.

2712. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre I. Les origines du dix-huitième siècle — Chapitre II. Précurseurs et initiateurs du xviiie  siècle »

Il exposa le système de Copernic et les découvertes de tous les académiciens de telle sorte que tout le monde entendait et retenait.

2713. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre II. La tragédie »

On voit, par cet exemple, comment Crebillon entend son métier : mais que devient la tragédie, ainsi pratiquée ?

2714. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Édouard Rod »

Rod de s’intéresser à toutes les conceptions de la vie, même les plus contraires à ce qu’on entend justement par dilettantisme, et d’y entrer tour à tour.

2715. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XXI. Le littérateur chez les peintres » pp. 269-282

Je dis qu’on doit les recevoir : j’entends, comme reçoit un maître de maison qui ne vous loge point au bout de la table.

2716. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre IX. L’antinomie politique » pp. 193-207

., où l’on pratique le compelle intrare et le compelle remanere et où l’individu indépendant ne peut guère faire entendre sa voix au milieu du bruit tumultueux et confus des voix anonymes.

2717. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre III. Éducation de Jésus. »

Le lien de l’idée est le seul que ces sortes de natures reconnaissent : « Voilà ma mère et mes frères, disait-il en étendant la main vers ses disciples ; celui qui fait la volonté de mon Père, voilà mon frère et ma sœur. » Les simples gens ne l’entendaient pas ainsi, et un jour une femme, passant près de lui, s’écria, dit-on : « Heureux le ventre qui t’a porté et les seins que tu as sucés ! 

2718. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VII » pp. 56-69

Il croit que ce mot, chez les Romains, s’entendait principalement de la science de la conversation et du don de plaire en bonne compagnie ; que les Grecs ont abusé de cette connaissance, et que les seuls Romains, même en Italie, en ont connu le vrai et le légitime usage.

2719. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXII » pp. 222-236

Il a de l’esprit et peu de jugement ; il disait quantité de sottises et les débitait agréablement ; il voulait faire entendre au roi, qu’au jugement de Dieu, il lui serait reproché de lui avoir ôté sa femme.

2720. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 326-344

Thomas, est de tirer ses métaphores précisément des objets qui auroient besoin eux-mêmes de métaphores pour être entendus.

2721. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre II. Le Bovarysme comme fait de conscience son moyen : la notion »

On entend par là qu’elle est donnée dans une intuition d’art.

2722. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — La synthèse »

Le charme des musiques devra de même être reproduit après leur analyse ; l’intime éclosion de rêves et d’actes que provoque le lent essor d’une voix dans le silence d’une nuit, le ravissement des mélodies, le suspens des longues notes tenues, le heurt douloureux des cris tragiques sera décrit et rappelé, comme les mâles et sobres éclats des pianos, le jeu des souples doigts, les élans atrocement rompus des marches, les prestos envolés, retombants, et voletants, ou la grave insistance de ces andantes qui paraissent exhorter et calmer et apaiser les sanglots qui traînent sur le pas des suprêmes décisions ; les violons nuanceront tout près de l’oreille et de l’âme leur voix sympathique, âpre et chaude, et l’on entendra passer leur chant captif sur les sourds élans des contrebasses, l’embrasement suprême des cuivres, le ricanement sinistre des hautbois, unis en cette gerbe montante de sons, de formes et de mouvements, qui s’échappe des orchestres et porte les symphonies.

2723. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre neuvième. »

D’après un trait de la vie de La Fontaine, que j’ai raconté, on a vu qu’il allait quelquefois entendre les charlatans de place, et on voit par cette fable qu’il ne perdait pas son temps.

2724. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VII »

Donc, c’est entendu : toutes les traductions d’Homère sont suspectes, parce qu’il ne saurait y avoir de bonne traduction.

2725. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre VIII. Suite du chapitre précédent. De la parole traditionnelle. De la parole écrite. De la lettre. Magistrature de la pensée dans ces trois âges de l’esprit humain » pp. 179-193

Les législateurs anciens étaient dirigés par de bien plus hautes raisons que celle qu’on leur suppose si gratuitement d’avoir voulu entretenir l’ignorance des peuples ; et, une fois pour toutes, ne devrait-on pas s’entendre sur la vraie et juste acception de ce terrible mot d’ignorance ?

2726. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIII. Mme Swetchine »

Légères malgré leur sérieux, gracieuses comme le monde l’entend et presque mystiques comme l’Église l’approuve, elles s’étaient lestement envolées de chez l’éditeur.

2727. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Joseph de Maistre »

Avant de l’avoir lue, nous nous doutions bien du genre de jugements qu’on y trouverait (à part les arrangements d’Albert Blanc, bien entendu).

2728. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Royalistes et Républicains »

Et quand je dis les partis extrêmes, entendez surtout le parti royaliste !

2729. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La diplomatie au xviie  siècle »

Il devait s’y trouver très bien, dans ce tombeau splendide ; mais telle n’est pas l’opinion de Valfrey, — un exigeant, à ce qu’il paraît, — qui a voulu le tirer de là et lui bâtir, à part et de sa main, une petite colonnette… Chacun entend la gloire à sa façon, surtout quand on croit pouvoir la donner, et Valfrey est impatient d’ajouter à celle de Hugues de Lionne, qu’il ne trouve ni assez retentissante, ni assez personnelle.

2730. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « César Daly »

Si vous parcouriez, en effet, les académies de l’Europe, et il est de presque toutes, excepté, bien entendu, de celles de son pays, et si vous leur demandiez, à ces académies, pour votre édification personnelle, ce que c’est que César Daly, ce que c’est que le fondateur et le directeur de cette encyclopédie de science et d’art qui se publie, depuis plus de vingt ans, sous le titre de Revue générale de l’Architecture et des travaux publics, vous verriez ce qu’on vous répondrait !

2731. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Jules Girard » pp. 327-340

Cette sévérité par appauvrissement, — car toute sévérité consiste à se priver de quelque chose, — cette simplification comme l’entendent les Grecs, est toujours la diminution ou l’extinction d’une réalité dont un art plus large et plus fort ne redouterait ni la grandeur ni l’énergie.

2732. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Collé »

Je parle bien entendu des éditeurs littéraires… Les autres n’ont pas le diable au corps, mais ils sont le diable de nos corps et de nos esprits.

2733. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « X. Doudan »

Ses amis, qui l’admiraient en ses causeries et qui n’avaient jamais entendu causer comme cela dans aucun ministère, se pendirent à ses oreilles pour lui faire écrire quelque chose comme eux.

2734. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXXII. L’Internelle Consolacion »

On sait s’ils s’entendent en précaution, messieurs les philosophes.

2735. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ch. de Rémusat. Abélard, drame philosophique » pp. 237-250

Il manque même de haine philosophique, quoique de Rémusat doive avoir, tapies quelque part, les haines de sa philosophie, et quoique le scepticisme du temps et la glace de son tempérament aient bien diminué cette rage contre l’Église qu’ont tous, au fond du cœur, les philosophes, et que Cousin, lâche, mais indiscret, révélait en la couvrant de ce mot, dit justement à propos d’Abélard : « Il avait déposé dans les esprits de son temps le doute salutaire et provisoire, qui préparait l’esprit à des solutions meilleures que celles de la foi. » Charles de Rémusat n’a jamais eu de ces imprudentes et impudentes paroles d’un homme dont l’espérance trahit l’hypocrisie, mais à quelque coin, dans cet esprit moyen, dans cette âme de sagesse bourgeoise, il y a toujours, prête à se glisser au dehors, l’hostilité contre toutes les grandes choses que nous croyons… Comme Abélard, le héros de toute sa vie, comme Bacon, qu’il a aussi commenté, de Rémusat s’est toujours plus ou moins vanté d’être un écrivain de libre examen et de libre pensée, un philosophe contre la théologie, un adversaire de l’autorité sur tous les terrains, en religion comme en politique, — et comme l’Église est l’autorité constituée de Dieu sur la terre et qu’elle a le privilège divin « que les portes de l’enfer ne prévaudront jamais contre Elle », de Rémusat, qui est une de ces portes-là, — non pas une porte cochère, aux cuivres insolemment luisants et aux gonds tournant à grand bruit, mais une petite porte, discrète et presque cachée à l’angle et sous les lierres prudents de son mur, — de Rémusat entend bien prévaloir contre l’Église et lui prouver que son privilège divin n’est qu’une prétention !

2736. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Caro. Le Pessimisme au XIXe siècle » pp. 297-311

L’Allemagne, chez qui tout est possible dans le désordre du rêve ; l’Allemagne, ce pays de M. de Bismarck, qui ne rêve pas, lui, et qui doit avoir sur Schopenhauer une opinion que je voudrais lui entendre exprimer ; l’Allemagne, et même la Prusse, prennent au sérieux Schopenhauer.

2737. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Léon Aubineau. La Vie du bienheureux mendiant et pèlerin Benoît-Joseph Labre » pp. 361-375

Pieux dès qu’il respira et comme il respirait, élevé par son oncle, un pauvre curé de campagne, qui lui apprit assez de latin pour entendre le bréviaire, Benoît-Joseph, dès qu’il fut en âge de choisir sa fonction parmi les hommes, sentit tressaillir en lui la vocation religieuse, qui y tressaillit longtemps, mais sans l’éclairer.

2738. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « A. Dumas. La Question du Divorce » pp. 377-390

Dumas, — parce que la famille légale étouffe l’homme, tandis que la propriété matérielle l’éblouit et que la liberté illimitée l’enivre. » J’en… j’entends fort bien, comme dit Brid’oison : il ne faut pas que sous aucun prétexte l’homme soit étouffé, et il faut que, enivré, il puisse boire encore et toujours !

2739. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Georges Caumont. Jugements d’un mourant sur la vie » pp. 417-429

qui n’entend pas du tout se fondre, lui, si aisément que cela, dans l’espèce ?

2740. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Brispot »

L’artiste catholique note de pareils cris quand il les entend, et le penseur sait ce qu’ils contiennent… Les gravures du livre de l’abbé Brispot, au nombre de cent vingt-huit, représentent les scènes les plus solennelles et les plus pathétiques du passage du Fils de Dieu sur la terre.

2741. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Charles De Rémusat »

L’épigramme, — et encore l’épigramme qui tremble sur sa tige comme un épi au vent, — voilà la vaillante manière dont, à cette heure, ce râblé Rémusat entend le pamphlet !

2742. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Auguste Vacquerie  »

ce n’est plus là le petit bout d’oreille du lion, mais la griffe du lion Hugo tout entière, griffant, griffant les mots, les riens, le rien ; ce sont les rugissements du lion Hugo que j’entends dans ce turlututu sublime !

2743. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Ferdinand Fabre »

J’ai entendu quelquefois comparer Ferdinand Fabre à Gustave Flaubert, qu’on pourrait appeler « le descriptif laborieux » ; car il décrit jusqu’aux nervures des feuilles et aux angles des ombres qui s’évaporent.

2744. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Les Mémoires d’une femme de chambre » pp. 309-321

Le succès de bruit, entendons-nous bien !

2745. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Edgar Poe » pp. 339-351

Positivement, le lecteur assiste à l’opération du chirurgien ; positivement il entend crier l’acier de l’instrument et sent les douleurs.

2746. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVII. Des panégyriques ou éloges adressés à Louis XIII, au cardinal de Richelieu, et au cardinal Mazarin. »

Quoi qu’il en soit, on rapporte que se regardant un jour dans une glace, étonné de se voir déjà tant de cheveux blancs, il en accusa les complimenteurs et panégyristes éternels qu’il était condamné à entendre depuis qu’il était roi.

2747. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre huitième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Victor Hugo »

Victor Hugo a eu, comme notre société moderne, — j’entends la société pensante, — le sentiment de ce qu’on appelle aujourd’hui l’inconnaissable. […] Si j’écoute mon cœur, j’entends un dialogue. […] Avoir continuellement à ses côtés une femme, une fille, une sœur, un être charmant, qui est là parce qu’elle ne peut se passer de vous, se savoir indispensable à qui nous est nécessaire, pouvoir incessamment mesurer son affection à la quantité de présence qu’elle nous donne et se dire : — puisqu’elle me consacre tout son temps, c’est que j’ai tout son cœur — voir la pensée à défaut de la figure, constater la fidélité d’un être dans l’éclipsé monde, percevoir le frôlement d’une robe comme un bruit d’ailes, l’entendre aller et venir, sortir, rentrer, parler, chanter ; et songer qu’on est le centre de ces pas, de cette parole, de ce chant ; manifester à chaque minute sa propre attraction, se sentir d’autant plus puissant qu’on est plus infirme… peu de félicités égalent celle-là. […] Et cette âme trouvée et prouvée est une femme.Une main vous soutient, c’est la sienne ; une bouche effleure votre front, c’est sa bouche ; vous entendez une respiration tout près de vous, c’est elle.

2748. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Et ce mot, je ne l’entends pas : Car je suis une faible femme, Je n’ai su qu’aimer et souffrir ; Ma pauvre lyre, c’est mon âme, Et toi seul découvres la flamme D’une lampe qui va mourir… Je suis l’indigente glaneuse Qui d’un peu d’épis oubliés À paré sa gerbe épineuse, Quand ta charité lumineuse Verse du blé pur à mes pieds… Envoyant à M. 

2749. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « quelque temps après avoir parlé de casanova, et en abordant le livre des « pèlerins polonais » de mickiewicz. » pp. 512-524

Je ne parle pas, bien entendu, des vers de Voltaire ; mais, dans sa prose, combien de ces mots sans image apparente, et qui sont la pensée même en son plus vrai mouvement !

2750. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XX. Du dix-huitième siècle, jusqu’en 1789 » pp. 389-405

La plaisanterie était, du temps de Voltaire, comme les apologues dans l’Orient, une manière allégorique de faire entendre la vérité sous l’empire de l’erreur.

2751. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre IX et dernier. Conclusion » pp. 586-601

Les premiers pas qu’on fait dans l’espoir d’atteindre à la réputation sont pleins de charmes, on est satisfaite de s’entendre nommer, d’obtenir un rang dans l’opinion, d’être placée sur une ligne à part ; mais si l’on y parvient, quelle solitude, quel effroi n’éprouve-t-on pas !

2752. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre II. — De la poésie comique. Pensées d’un humoriste ou Mosaïque extraite de la Poétique de Jean-Paul » pp. 97-110

La voix la plus faible entrait dans les fibres circulaires de l’ongle : de sorte que, grâce à son industrie, le philosophe de là-haut entendit parfaitement le bourdonnement de nos insectes de là-bas.

2753. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre IV »

Les villes, les villages n’ont pas plus de rapport entre eux que les arrondissements auxquels ils sont attribués ; ils ne peuvent même s’entendre entre eux pour mener les travaux publics qui leur sont nécessaires. » Depuis cent cinquante ans, le pouvoir central a divisé pour régner.

2754. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Richepin, Jean (1849-1926) »

Henry Fouquier … J’ai même entendu qualifier le Chemineau de livret d’Opéra-Comique et d’exercice de rhétorique.

2755. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Rousseau, et Joseph Saurin. » pp. 28-46

Cela donna lieu à cette fameuse chanson, dans le goût de celles du pont-neuf dont le sujet fut mis en estampe, & laquelle fit tant de peine à Rousseau : Or, écoutez, petits & grands, L’histoire d’un ingrat enfant, Fils d’un cordonnier, honnête homme, Et vous allez entendre comme Le diable, pour punition, Le prit en sa possession.

2756. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — Les traductions. » pp. 125-144

par tel homme qui n’entend pas mieux le François que le Latin ; par tel rimailleur, le mépris & l’effroi des gens sensés ; par beaucoup de ces auteurs condamnés à subsister de leur plume, à enfanter livre sur livre, non pour l’honneur, mais pour le gain.

2757. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Louis XIV. Quinze ans de règne »

Quinze ans découpés dans le siècle de Louis XIV, quinze ans d’un règne pour les gâter en les racontant, ce serait encore trop, sans nul doute ; mais il entend l’Histoire.

2758. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVII. Mémoires du duc de Luynes, publiés par MM. Dussieux et Soulier » pp. 355-368

Lorsque le duc de Luynes, qui rapporte tout cela très correctement, avec la répétition d’une exactitude infatigable, lorsque le duc de Luynes écrivait de telles choses, il pouvait, en sa qualité de grand seigneur, parfaitement myope et naturellement fat, qui croyait la monarchie éternelle, se dire qu’il faisait là l’éducation de ses enfants, et qu’ils trouveraient dans ces récits paternels du goût, du parfum et de l’instruction, — l’instruction de ce singulier état de grand seigneur, tel qu’on l’entendait à Versailles, — et qu’ainsi, cela pouvait être utile, mais à présent et pour nous, à quoi cela est-il bon ?

2759. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Th. Carlyle » pp. 243-258

Joseph de Maistre avait bien déclaré la Révolution satanique, mais le rire de Satan, ce rire du Diable qui rit de se voir si bien obéi par les hommes, personne, avant Carlyle, ne l’avait entendu retentir dans l’Histoire, et c’est lui qui, le premier, le lui a campé sur ses fortes et impassibles lèvres d’airain.

2760. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Armand Carrel » pp. 15-29

Obstinations, taquineries, aigreurs, objurgations de la presse contre le pouvoir et du pouvoir contre la presse, arrestations, duels, convois politiques, émeutes, conspirations et révolutions plus ou moins avortées, toute cette petite pluie de petites choses qu’après les tonnerres de l’Empire il nous a fallu entendre tomber, voilà les événements que Carrel jauge, interprète, éclaire, et sur lesquels il cherche, en tâtonnant, à ajuster la loi de l’avenir.

2761. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Eugène Pelletan » pp. 203-217

C’est entendu, c’est nous !

2762. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Balzac »

… « Toute personnalité grandiose est odieuse, quand elle n’a pas le pouvoir », — a écrit Balzac, dans sa Correspondance, et il entendait certainement le pouvoir matériel, politique, absolu ; le pouvoir qui a les six laquais de Pascal, multipliés par une nation, et qui empêche toute contestation insolente ; le pouvoir qui crée des chambellans !

2763. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Benjamin Constant »

— et ensuite parce qu’elle avait atteint l’homme qui devait le plus y échapper, — s’éteignit tout à coup, un jour, comme la flamme d’un grand incendie qui ne peut plus rien dévorer et qui tombe sur des débris fumants et noirs… Après avoir aimé Madame Récamier comme il l’avait aimée, Benjamin Constant retourna à la vie ordinaire de ces passions qui ne sont plus la passion unique, la passion despotique et torturante qui donne bien l’idée de ce que les catholiques entendent par leur possession du démon… Benjamin revint à la vie de la pensée, à ses travaux, à ses ambitions, à ses passions même ; car il en eut pour d’autres que Madame Récamier.

2764. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Hoffmann »

On ne peut qu’applaudir à cette tentative ; mais ce que nous aurions désiré et ce qui nous manque encore, c’eût été la mesure prise d’Hoffmann — exactement et sans faiblesse — par un esprit entendu à ce genre de Critique qui va de l’homme à l’œuvre et de l’œuvre à l’homme.

2765. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « G.-A. Lawrence »

Son cheval lui a cassé les reins, il est vrai, mais il a encore des bras terribles, des bras auprès desquels les bras de Rob-Roy ne sont que des fuseaux, et cependant le lion outragé ne rugit même pas et ne fait entendre qu’une parole, non de pardon, mais qui demande pardon !

2766. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XX. M. de Montalembert »

Tout grand orateur ou plutôt tout orateur quelconque verrait s’interrompre tout à coup, et s’abolir le rapport qu’il y a entre lui et son public, s’il n’était pas un peu vulgaire comme ces foules auxquelles il a affaire, et avec lesquelles il doit s’entendre pour les entraîner.

2767. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Matter. Swedenborg » pp. 265-280

Mais que ce juge vienne bientôt ou tarde, nous aurons fait ce pas, nous, que quelle que soit la réalité du mysticisme de Swedenborg, ce mysticisme n’est pas, après tout, si magnifique et si grandi Nous qui pensons que l’Église seule s’entend aux questions du surnaturel et doit seule en connaître, nous ne trouvons pas moins dans le surnaturel de Swedenborg quelque chose qui est de notre ressort, — c’est sa valeur poétique, sa valeur d’effet sur les imaginations littéraires.

2768. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Athanase Renard. Les Philosophes et la Philosophie » pp. 431-446

Le mot de « révélation des lois de l’entendement » que le Dr Renard emploie, ne peut s’entendre que d’une révélation individuelle, qu’on est libre d’admettre ou de rejeter.

2769. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « A. P. Floquet »

Sous peine de retomber dans les redites de la vulgarité, un grand homme est presque nécessaire pour juger un grand homme… Du moins, un certain plain-pied doit-il exister entre l’historien et son héros, pour que l’histoire soit entendue.

2770. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Guizot »

Guizot, qui a opposé l’ordre et la liberté dans une antithèse connue, digne de Victor Hugo, comme il oppose aujourd’hui saint Louis à Calvin, dans une autre antithèse, n’entend sous aucun prétexte être un révolté, si protestant qu’il puisse être, et il tripote dans l’histoire pour nous prouver que cela fait deux.

2771. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Marquis Eudes de M*** »

jusqu’aux croisades et à la révocation de l’Édit de Nantes, la foi et la science s’entendaient merveilleusement sur toutes choses… Mais, en dehors de tous les dogmes justifiés, réhabilités, il en était un qu’on n’avait jamais abordé : c’était celui-là dont le jeune homme de Saint-Étienne s’était montré si révolté, c’est-à-dire la reconnaissance des puissances spirituelles et leur intervention dans les affaires de ce bas-monde. » Et ce fut à dater de cette époque que l’auteur des Esprits et de leurs manifestations fluidiques se mit à étudier un problème qui, comme il l’a dit très bien quelques lignes plus bas, renfermait le Christianisme tout entier.

2772. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Musset »

Demain, la Postérité s’en va naître, la Postérité qui n’entendra rien aux considérations et aux discrétions d’un monde éphémère, la Postérité qui sait que tout grand poète ressort de l’histoire, et, par conséquent, doit apparaître dans l’histoire avec le cortège de toute sa vie.

2773. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Soulary. Sonnets humouristiques. »

— une flamme humaine trop tôt éteinte, un cri du cœur trop tôt interrompu et qu’on n’est guère accoutumé de voir ni d’entendre parmi les poètes de la niellure et des intailles sur onyx, en ces Sonnets qui sont maintenant les pierres gravées de la littérature.

2774. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Auguste Barbier »

Il est bien évident que l’homme qui a écrit : Que tels que des gens fous, troublés, anéantis, ne s’est pas entendu en écrivant, et que le métier ne l’a pas averti, ce bouché d’oreilles, ce sourd-muet d’une organisation qui n’est plus rien une fois qu’elle n’est plus inspirée !

2775. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Théodore de Banville »

Élégiaque aussi, mais moins élégiaque que lyrique, et quoique élégiaque, à ses heures, comme les romantiques, qui ont tous, plus ou moins, chanté la romance du Saule avant de mourir, ayant, lui, une qualité d’esprit rare chez les romantiques, et que les romantiques qui ne l’avaient pas se permettaient de mépriser… Bien entendu, puisqu’ils ne l’avaient pas, M. 

2776. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Laurent Pichat »

Seulement, ce que je veux exclusivement vous faire entendre pour vous prouver que nous avons ici affaire à un poète, ce n’est pas l’expression réussie de la haine qui se croit victorieuse, mais c’est l’accent éternellement cruel et doux de la vie passée, qui, finie, crée immédiatement l’infini du souvenir dans nos cœurs.

2777. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Madame Sand et Paul de Musset » pp. 63-77

C’est toujours, enfin, cet amour maternel — sans sacrement, bien entendu ! 

2778. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Deux romans scandaleux » pp. 239-251

C’est toujours enfin cet amour maternel, — sans sacrement, bien entendu, — qui ressemble monstrueusement à l’inceste, puisque celle qui l’éprouve ne l’éprouve que pour devenir la maîtresse de celui qu’elle ose appeler son enfant !

2779. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Malot et M. Erckmann-Chatrian » pp. 253-266

Seulement il faudra, pour qu’on écoute et qu’on frémisse, qu’il soit jeté avec une profondeur d’accent, une âpreté de rugissement qu’on n’avait pas encore entendue ?

2780. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Ch. Bataille et M. E. Rasetti » pp. 281-294

Peindre pour peindre, décrire pour décrire, voilà leur visée, une visée très-courte, quand on l’entend comme eux, car ce n’est pas la main qui peint, c’est la tête.

2781. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « G.-A. Lawrence » pp. 353-366

Son cheval lui a cassé les reins, il est vrai, mais il a encore des bras terribles, des bras auprès desquels les bras de Rob-Roy ne sont que des fuseaux, et cependant le lion outragé ne rugit même pas et ne fait entendre qu’une parole, non de pardon, mais qui demande pardon !

2782. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iv »

Les catholiques étaient venus l’entendre avec les protestants.

2783. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Introduction »

Entre deux hommes qui s’entendent sur la définition de l’idéal social à réaliser, tout en ne s’entendant pas sur le choix des types d’institutions à favoriser ou à combattre, ne peut-on décider, abstraction faite de tout sentiment personnel ou de tout principe métaphysique, par une recherche objective ?

2784. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXV. Avenir de la poésie lyrique. »

Vous avec lu surtout les rescrits des Césars ; vous n’avez pas entendu les cris des opprimés, leurs apologies, leurs hymnes, leurs prières.

2785. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre III. — Du drame comique. Méditation d’un philosophe hégélien ou Voyage pittoresque à travers l’Esthétique de Hegel » pp. 111-177

Les deux parties entendues, les juges vont aux voix. […] L’intervention des idées morales sur la scène efface, avec toute la gaieté du drame comique, toute sa poésie, et je me souviens d’avoir entendu M. de Schlegel dire, avec une familiarité de langage dont le sel n’excuse point l’irrévérence, que grâce à cette parfaite symétrie du mal et du bien, du faux et du vrai, de l’absurde et du raisonnable dans les comédies de Molière, chacune d’elles présentait à son œil édifié cet aspect régulier et satisfaisant qui caractérise une pincette. […] Tous ceux qui l’entendent sont étonnés de la sagesse de ses discours238.

2786. (1860) Cours familier de littérature. X « LIXe entretien. La littérature diplomatique. Le prince de Talleyrand. — État actuel de l’Europe » pp. 289-399

Nous avons entendu nous-même ce récit, à la fois pastoral et romain, du temps des proscriptions, de la bouche de cette belle matrone française, devenue, après la restauration, ambassadrice de France auprès d’une grande cour de famille. […] M. de Talleyrand, lié de jeunesse avec les diplomates des grands cabinets en lutte avec la France anarchiste, était l’interprète le plus propre à faire entendre à ces cabinets, lassés d’efforts, de défaites, et même de victoires, des insinuations de paix. […] Le roi, encore valide, et le vieux diplomate expirant, s’enfermèrent sous le rideau du lit pour que personne n’entendît leur entretien.

2787. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 octobre 1885. »

Ainsi, la Salammbô de Reyer, malgré Sigurd, ne sera pas entendue à Paris. […] Saint-Saëns admire, volontiers, l’œuvre de Wagner, mais il n’entend pas être contraint à cette admiration. — 2  La question patriotique qui pouvait, en 1876, être séparée de la question artistique au sujet de Wagner, ne peut plus en être séparée en 1885. — 3° Le duo de Parsifal semblerait, aujourd’hui trop facile à un jeune élève bien doué, de M.  […] Emmanuel Cosquin de Vitry le François ; on remarquait aussi Hans de Bülow, qui, paraît-il, entendait pour la première fois la Tétralogie.

2788. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre II : La psychologie »

Cette question, entendue au sens des métaphysiciens, c’est-à-dire par rapport à une substance inconnaissable, est oiseuse, insoluble. […] C’est ainsi que nous apprenons à entendre une langue étrangère ; c’est ainsi que l’enfant, hésitant d’abord sur les lettres et les syllabes, en vient à interpréter couramment les mots et les phrases. […] VII Si l’on veut bien se rappeler maintenant que nous n’avons exposé qu’une très faible partie de l’œuvre de notre philosophe, et si l’on a été frappé, comme on a dû l’être, de la vigueur de sa pensée et de l’originalité de sa méthode, on ne s’étonnera pas d’entendre un contemporain153 se demander « s’il a jamais paru en Angleterre un penseur plus éminent, quoique l’avenir seul puisse déterminer sa place dans l’histoire… » Seul des penseurs anglais, dit M. 

2789. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Discours sur le système et la vie de Vico » pp. -

… Mais le tonnerre s’est fait entendre, ses terribles effets sont remarqués ; les géants effrayés reconnaissent la première fois une puissance supérieure, et la nomment Jupiter ; ainsi dans les traditions de tous les peuples, Jupiter terrasse les géants. […] c’est que des chapelles y servaient d’asiles. — L’âge muet des premiers temps du monde se représenta, les vainqueurs et les vaincus ne s’entendaient point ; nulle écriture en langue vulgaire. […] Comme Aristote et Platon tirent souvent leurs preuves des mathématiques, il étudia la géométrie pour les mieux entendre ; mais il ne poussa pas loin cette étude, pensant qu’il suffisait de connaître la méthode des géomètres ; « pourquoi mettre dans de pareilles entraves un esprit habitué à parcourir le champ sans bornes des généralités, et à chercher d’heureux rapprochements dans la lecture des orateurs, des historiens et des poètes ? 

2790. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite et fin.) »

Il est évident qu’il ne voulait pas s’exposer, dans le cas où il eût survécu, ne fût-ce que de peu, à entendre les commentaires du public et à assister à son propre jugement. […] D’un côté, des hommes politiques vieux et jeunes, des hommes d’État aux cheveux gris, se pressaient autour du foyer et causaient avec animation ; de l’autre, on remarquait un groupe de jeunes gens et de jeunes dames, dont les œillades et les gracieux murmures échangés à voix basse formaient un triste contraste avec les gémissements suprêmes du mourant. » La bibliothèque, dont la porte donnait dans la chambre mortuaire, était remplie également des gens de la maison et de domestiques aux aguets : de temps en temps la portière s’entrouvrait, une tête s’avançait à la découverte, et l’on aurait pu entendre chuchoter ces mots : « Voyons, a-t-il signé ?

2791. (1860) Cours familier de littérature. X « LXe entretien. Suite de la littérature diplomatique » pp. 401-463

Voici ce que je me répondis, en croyant véritablement entendre la voix creuse et impassible, la voix lapidaire de l’oracle des cabinets : X « Il y a deux partis à prendre, quand on est maître absolu de ses décisions, le lendemain d’un événement qui a fait table rase en Europe, quand on est la France de 1848 et qu’on s’appelle république : on peut se placer en idée sur le terrain des ambitions napoléoniennes, des ressentiments de Waterloo, des vengeances militaires, des humiliations populaires, des propagandes insurrectionnelles, des appels des peuples contre tous les trônes ; on peut faire appel à toutes les turbulences soldatesques ou populaires ; jeter au vent tous les traités, toutes les cartes géographiques qui limitent les nations ; lever, au chant d’une Marseillaise agressive, un million de soldats lassés de la charrue ou de l’atelier ; les lancer, comme des proclamations vivantes, par toutes les routes de la France, sur toutes les routes de l’Italie, de l’Espagne, de l’Allemagne, de la Belgique, de la Hollande, et promener ces quatorze armées révolutionnaires avec le drapeau de l’insurrection universelle des peuples contre les rois, la grande Jacquerie moderne, le rêve de tous les démagogues et de tous les forcenés de gloire, contre toutes les bases sociales, contre tous les pouvoirs et contre toutes les paix du continent. […] Cet habile négociateur jugea, au contraire, qu’il était de l’intérêt bien entendu de la France de s’allier avec la maison d’Autriche pour empêcher la Russie de déborder trop irrésistiblement sur l’Occident, et pour empêcher la Prusse de créer à son profit cette unité ambitieuse de l’Allemagne qui étoufferait sous sa masse toute influence française sur le Rhin et au-delà du Rhin.

2792. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre sixième. »

Mais Montaigne n’est pas seulement le premier de son époque ; il est le premier par rang d’ancienneté de nos écrivains populaires ; j’entends de ceux dont les esprits cultivés ne se peuvent pas plus aisément défaire que Montaigne de Plutarque. […] Il ne francise pas moins de mots latins que Rabelais de grecs ; mais, comme Rabelais, quand il n’a songé qu’à s’entendre avec lui-même, il ne réussit pas toujours à les faire entrer dans le corps de la langue.

2793. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre deuxième. Le développement de la volonté »

— Mais comment pouvez-vous entendre, demande M.  […] Or, si on entend par motifs toutes les dispositions à agir, quelles qu’elles soient et d’où qu’elles tirent leur origine, rien n’est plus absurde que de séparer ainsi la volonté des motifs, comme s’ils étaient « hors d’elle », disait Leibnitz, semblables aux poids séparés de la balance.

2794. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Victor Hugo » pp. 106-155

Hugo entend l’âme de ses personnages. […] Pour d’oiseux problèmes débattus par de faibles arguments, Pensar Dudar et Ce qu’on entend sur la montagne sont à lire.

2795. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre II : Règles relatives à l’observation des faits sociaux »

Tout ce qu’on a pu faire et tout ce qu’on a fait, c’est de démontrer dialectiquement que les individus doivent procéder ainsi, s’ils entendent bien leurs intérêts ; c’est que toute autre manière de faire leur serait nuisible et impliquerait de la part de ceux qui s’y prêteraient une véritable aberration logique. […] Elles sont naturelles, si l’on veut, en ce sens qu’elles énoncent les moyens qu’il est ou qu’il peut paraître naturel d’employer pour atteindre telle fin supposée ; mais elles ne doivent pas être appelées de ce nom, si, par loi naturelle, on entend toute manière d’être de la nature, inductivement constatée.

2796. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Émile Zola »

Son Ventre de Paris est l’œuvre à présent la plus avancée (et vous pouvez l’entendre comme il vous plaira !) […] Il a fini par bien poser, et d’aplomb, son archet sur les cordes de son violon, et il nous a joué cet air horrible de Thérèse Raquin qui fait saigner le cœur et l’oreille, et que nous allons entendre au théâtre pour qu’il les y fasse saigner mieux.

2797. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Alfred de Musset » pp. 364-375

C’est alors aussi qu’on entendait dans les salons des gens d’esprit et réputés gens de goût, des demi-juges de l’art comme il y en a surtout dans notre pays55, affecter de dire qu’ils aimaient Musset pour sa prose, et non pour ses vers, comme si la prose de Musset n’était pas essentiellement celle d’un poète : qui avait fait les vers pouvait seul faire cette fine prose.

2798. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie militaire du général comte Friant, par le comte Friant, son fils » pp. 56-68

Thiers (page 168) la scène militaire dans laquelle Napoléon, à Witebsk, reçut le général Friant comme colonel commandant des grenadiers à pied de la Garde, et l’allocution qu’il lui adressa, je reconnus à l’instant le type que je poursuivais ; je me dis que c’était bien là le lieutenant de seconde ligne, mais hors ligne, en la personne de qui Napoléon entendait honorer et récompenser tous les autres.

2799. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — I » pp. 219-230

Chaque secte est la seule (à l’entendre) qui ait trouvé la vérité ; chaque livre contient exclusivement les préceptes de la sagesse ; chaque auteur est le seul qui nous enseigne ce qui est bien.

2800. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803 » pp. 2-15

J’ai souvent entendu reprocher à la critique moderne, à la mienne en particulier, de n’avoir point de théorie, d’être tout historique, tout individuelle.

2801. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Waterloo, par M. Thiers »

À deux heures et demie, le canon de Fleurus et de Ugny se faisait entendre ; Napoléon engageait sa bataille, et, malgré ses ordres réitérés depuis la veille, rien du côté de Ney ne lui annonçait encore que l’action fût engagée aux Quatre-Bras.

2802. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Dübner »

. — Si par là l’on entend diviser le procès, mettre les parties dos à dos et partager jusqu’à un certain point les torts, je ne demande pas mieux et je n’ai rien à opposer.

2803. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Appendice — II. Sur la traduction de Lucrèce, par M. de Pongerville »

Nous consentions aisément à l’entendre louer, parce que l’éloge ne portait préjudice à personne.

2804. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, romans (1832) »

Durant toute cette portion finale de Notre-Dame, l’orchestre lyrique, l’orgue en quelque sorte, pourrait jouer, par manière d’accompagnement, Ce qu’on entend sur la Montagne, cette admirable et lugubre symphonie des Feuilles d’Automne.

2805. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres publiées par M. J. Sabbatier. Tome Ier, 1845. » pp. 154-168

Ce qui lui en était resté de chagrin au fond, dans une âme assez légère, était inimaginable, et je l’ai entendu à près de quatre-vingt-dix ans revenant à satiété en vieil écolier sur ces injustices prétendues ou réelles dont il avait été victime.

2806. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. Victor Vousin. Cours de l’histoire de la philosophie moderne, 5 vol. ix-18. »

Cousin de cette philosophie première, mais on sent qu’elle a des ailes. » Elle en eut en effet dès sa naissance ; dans ce premier Discours d’ouverture du 7 décembre 1815, où Reid très-amplifié apparaît comme un grand régénérateur et comme celui qui est venu mettre fin au règne de Descartes, dans ce Discours où éclatent à tout instant une parole et un souffle plus larges que la méthode même qui y est proclamée, on croit entendre encore les applaudissements qui durent saluer cette péroraison pathétique par laquelle, au lendemain des Cent-Jours et avant l’expiration de cette brûlante année, le métaphysicien ému se laissait aller à adjurer la jeunesse d’alors : « C’est à ceux de vous dont l’âge se rapproche du mien que j’ose m’adresser en ce moment ; à vous qui formerez la génération qui s’avance ; à vous l’unique soutien, la dernière espérance de notre cher et malheureux pays.

2807. (1874) Premiers lundis. Tome I « Alexandre Duval de l’Académie Française : Charles II, ou le Labyrinthe de Woodstock »

D’après la réputation de la pièce dans ces diverses réunions, l’un des premiers acteurs de la Comédie-Française, qui avait entendu l’ouvrage, le faisait à son tour recevoir par ses camarades.

2808. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

Pour simple vengeance je proposerais une variante au proverbe de Paul-Louis Courier : « Tu t’entends à cela comme Gail au grec », en d’autres termes, comme Jomard à la géographie.

2809. (1875) Premiers lundis. Tome III « M. Troplong : De la chute de la République romaine »

L’histoire de ces temps peut donc servir à la nôtre, ou plutôt le spectacle de ce que nous avons eu sous les yeux et le sentiment de ce que nous avons observé nous-mêmes peuvent nous servir à entendre complètement cette histoire du passé ; car c’est moins l’histoire ancienne qui, en général, éclaire le présent, que l’expérience du présent qui sert à rendre tout leur sens et toute leur clarté aux tableaux transmis et plus ou moins effacés des anciennes histoires.

2810. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre III. Les dieux »

Entendez par là non pas la formule qu’on récitait, mais le sentiment qu’il inspirait.

2811. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Armand Silvestre »

Elle n’a pas trop l’air de s’entendre, la vieille Lélia ; mais enfin elle admire son filleul.

2812. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Baudelaire, Œuvres posthumes et Correspondances inédites, précédées d’une étude biographique, par Eugène Crépet. »

J’entends par là que jamais il ne contrista sa mère autrement que par ses vices, dont je ne sais à quel point il faut le rendre responsable, et qu’il fut constamment, avec elle, affectueux, attentif et tendre.

2813. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Ernest Renan, le Prêtre de Némi. »

C’est peut-être qu’il y a plusieurs façons de lire et d’entendre M. 

2814. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Anatole France, le Lys rouge »

Lire, entendre, c’est traduire.

2815. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XI. Il Convitato di pietra (le Convié de pierre) » pp. 191-208

Des chants lugubres et mystérieux se font entendre ; la statue se lève, le tonnerre gronde, la terre s’ouvre, la flamme infernale brille, et l’homme de pierre entraîne l’impie dans l’abîme.

2816. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre V. L’Analyse et la Physique. »

Ce caprice, qui lui-même d’ailleurs ne tarderait pas à se lasser, nous entraînerait sans doute bien loin les uns des autres et nous cesserions promptement de nous entendre entre nous.

2817. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre IX. Les disciples de Jésus. »

Nous n’entendons pas toutefois décider si l’Apocalypse est de lui.

2818. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XI. Le royaume de Dieu conçu comme l’événement des pauvres. »

Il les laissait dire, et quand on lui demandait s’il entendait, il répondait d’une façon évasive que la louange qui sort de jeunes lèvres est la plus agréable à Dieu 539.

2819. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVIII. Institutions de Jésus. »

Une fois surtout, il se laissa aller, dans la synagogue de Capharnahum, à un mouvement hardi, qui lui coûta plusieurs de ses disciples. « Oui, oui, je vous le dis, ce n’est pas Moïse, c’est mon Père qui vous a donné le pain du ciel 856. » Et il ajoutait : « C’est moi qui suis le pain de vie ; celui qui vient à moi n’aura jamais faim, et celui qui croit en moi n’aura jamais soif 857. » Ces paroles excitèrent un vif murmure : « Qu’entend-il, se disait-on, par ces mots : Je suis le pain de vie ?

2820. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXIII » pp. 378-393

Elle ne prétendait pas faire oublier madame de Montespan par les saillies, par les moqueries, par les imitations chargées ; mais elle faisait sentir au roi un intérêt de cœur, elle lui faisait pressentir des jouissances inconnues, elle excitait dans son âme la puissance des sympathies ; la glorieuse, l’amante de la considération s’entendait bien avec l’amant de la gloire sur la valeur de cette jouissance, sur les moyens de se l’assurer.

2821. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre V. Chanteuses de salons et de cafés-concerts »

Dans un salon je l’entendis rire de sa plaisanterie de tortionnaire.

2822. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VIII. Quelques étrangères »

Et nous entendons bien que, lorsqu’un Stelio Effrena nous parle de lui-même, c’est Gabriele d’Annunzio qui, « sous le voile de quelque allégorie séduisante, avec le prestige des belles cadences », nous entretient de la « chère âme » de Gabriele d’Annunzio.

2823. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre III, naissance du théâtre »

Les anciens en parlent avec ravissement — « C’est de là », — dit Aristophane dans les Oiseaux — « que Phrynicos a tiré le fruit de ses vers exquis comme l’ambroisie, et les chants si doux qu’il fait toujours entendre. » — Dans les Guêpes, il montre les vieillards se plaisant à fredonner ses refrains antiques, comme à boire un vieux vin qui les rajeunit.

2824. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre III »

Avec deux signes (un peu retors, il est vrai), avec, par exemple, le mot chum (cloche) et un déterminatif, les Chinois disent : « Son que produit une cloche dans le temps de la gelée blanche » ; avec trois signes ils disent : « Son d’une cloche qui se fait entendre à travers une forêt de bambous16. » Voilà sans doute l’idéal de tous ceux qui ignorent que, grâce à ce délicieux système, il faut une quarantaine d’années pour s’assimiler les « finesses » de ce langage immense mais immobile .

2825. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — M. de Voltaire, et M. de Maupertuis. » pp. 73-93

On a entendu dire à la Beaumelle : Personne n’écrit mieux que M. de Voltaire.

2826. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre I : Une doctrine littéraire »

L’imagination (et j’entends par là tout mouvement donné à la pensée) n’est donc pas une condition accessoire ou subordonnée dans les œuvres littéraires : elle y est essentielle, comme la couleur en peinture.

2827. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre septième. »

Cela n’a l’air que d’une plaisanterie : cependant La Fontaine s’avisait quelquefois de traiter des sujets de philosophie et de physique, auxquels il n’entendait pas grand-chose.

2828. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre III. Besoin d’institutions nouvelles » pp. 67-85

Je n’entends accuser les intentions d’aucun des hommes dont le nom est resté honorable.

2829. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre VI. Du trouble des esprits au sujet du sentiment religieux » pp. 143-159

Mais souvent il arrive que ce grand gémissement, ce gémissement général du genre humain se fait mieux entendre.

2830. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre premier. Mme de Staël »

Les contemporains de Mme de Staël qui n’entendaient pas grand’chose à la physiologie et qui avaient dans la tête le type de beauté dont Pauline Borghèse et Mme Récamier étaient l’idéal, n’ont rien compris à ces traits un peu gros, à ce large nez de lionne, à ces lèvres roulées plus amoureuses encore qu’éloquentes, aux orbes solaires de ces yeux, sincèrement ouverts jusqu’à l’âme, qui ont trempé tant de fois leurs feux dans les larmes, comme le soleil trempe les siens dans les mers !

2831. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XV. Mme la Mise de Blocqueville »

Mme de Blocqueville raffine tellement, que bientôt elle ne s’entend plus… « Le caprice et la fantaisie, — dit-elle encore, — fleurissent aux époques de décadence, d’une manière si furibonde qu’ils étouffent l’art sincère… » Mais à part cette floraison furibonde qui est une manière de fleurir de la Villa des Jasmins, qu’y a-t-il donc de plus sincère que le caprice et la fantaisie, qui tuent l’art sincère ?

2832. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVIII. Souvenirs d’une Cosaque »

Tuer un homme endormi, après possession préalable, bien entendu, — une idée qui a passé dans la tête, et jusque dans la main de la dame cosaque d’aujourd’hui, car son poignard était déjà levé, quand l’homme menacé se réveilla ; — le tuer, cet homme endormi qui avait été à tant de femmes, pour qu’il ne fût plus à personne, n’est pas une idée d’originalité très cosaque, mais du plus vieux, du plus usé et du plus plat romanesque de partout, à cette heure, sotte et folle, de ce beau monde civilisé !

2833. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXIV. Mme Claire de Chandeneux »

Voici que le droit des femmes devient, même pour les hommes d’État, une sérieuse opinion politique ; que le club jadis fondé par Mme Olympe Audouard, de rose mémoire, qui ne pensait peut-être pas en tête-à-tête avec un homme ce qu’elle disait devant des hommes réunis, voici que ce club haché si longtemps par la plaisanterie rejoint ses tronçons et ressuscite avec d’autres Olympe Audouard, aussi affreusement rouges qu’elle était, elle, délicieusement rose… Voici que les Tricoteuses de la Révolution, si elles revenaient dans notre monde, ne voudraient plus tricoter devant la tribune, mais entendraient bien y monter !

2834. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le comte du Verger de Saint-Thomas »

Justement effrayés du développement que prenait cette coutume du duel, d’origine religieuse, — puisque les jugements de Dieu, qui furent les premiers duels, partaient de l’idée (mal entendue, il est vrai), mais de l’idée de sa justice, — les rois, en France, ne cessèrent, depuis Louis IX jusqu’à Louis XIV, de s’opposer à ce développement et de le combattre.

2835. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Guizot » pp. 201-215

Mais nous, et Guizot avec nous, qui maintenons l’originalité profonde et même incomparablement profonde de Shakespeare ; nous qui ne voulons pas qu’il soit seulement une perle dans une coquille d’huître, et qui ne nous sentons aucun respect pour cette huître où elle s’est formée ; nous qui ne croyons pas, comme Emerson, que le mérite inadéquate de Shakespeare ait été d’être à l’unisson de son temps et de son pays, car son pays et son temps n’ont pas dit un mot du succès de ses pièces et n’ont pas classé son génie, — ce qui prouve qu’ils ne le sentaient pas ; — nous disons, nous, que « le biographe de Shakespeare n’est pas Shakespeare », si on entend par là son œuvre.

2836. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Ernest Hello » pp. 389-403

., reste donc dans le désert de l’inconnu, comme Saint Siméon Stylite sur sa colonne, mais avec cette différence que des populations tout entières allaient se grouper d’admiration et de respect aux pieds du Solitaire miraculeux, comme autour d’un Prophète, pour entendre tomber ses oracles, tandis que le Saint Siméon Stylite du xixe  siècle reste sur la colonne de ses écrits, sans que la foule qui passe y prenne garde et s’aperçoive que cette colonne est rayonnante !

2837. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Jacques Cœur et Charles VII »

L’histoire donc, mais l’histoire, entendons-nous bien !

2838. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Sévigné » pp. 243-257

Car, je l’ai dit, amuser et surprendre, voilà toute la visée actuelle d’Hippolyte Babou, qui est un homme d’esprit comme Rivarol l’entendait, et pas autrement.

2839. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes et la société au temps d’Auguste » pp. 293-307

C’est ainsi que Blaze de Bury entend l’exactitude et la précision de son titre !

2840. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XI. MM. Mignet et Pichot. Charles Quint, son abdication, son séjour et sa mort au monastère de Yuste. — Charles V, chronique de sa vie intérieure dans le cloître de Yuste » pp. 267-281

Le Rationalisme contemporain, qui n’entend pas grand-chose aux questions spirituelles et auquel, par là, bien des grandeurs se trouvent naturellement fermées, se tire, comme il peut, de la difficulté en refaisant, une millième fois, le mauvais vieux livre de l’Influence du physique sur le moral, de Cabanis.

2841. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIII. M. Nicolardot. Ménage et Finances de Voltaire » pp. 297-310

Inconnu hier encore, l’auteur, qui a les instincts les plus vifs de l’érudition et qui entend la chasse aux faits comme un véritable Mohican intellectuel, sera peut-être célèbre dans deux jours, de cette bonne et fière célébrité qui vient à un homme dans l’injure et qui sied mieux aux lutteurs, amants de la foudre, comme dirait Pindare, qu’une renommée flatteuse et tranquille.

2842. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. H. Wallon » pp. 51-66

Wallon, l’universitaire, le professeur d’École normale, n’a pas eu peur d’écrire l’histoire, un peu compromettante pour un moderne, de ce singulier Roi, qui n’était pas Tartuffe, et qui entendait ses trois messes par jour ; qui ne se donnait pas la discipline comme Tartuffe, mais qui se la faisait donner par son confesseur pour être plus sûr de la recevoir ; et qui, malgré tout cela, n’en était pas moins un grand homme !!!

2843. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. le vicomte de Meaux » pp. 117-133

Pour eux, le Roi était plus que l’Église, et c’est encore un profit — comme il entend les profits ! 

2844. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « MM. Jules et Edmond de Goncourt » pp. 201-216

Ulysse se bouchait les oreilles au chant des sirènes ; mais avec quoi se boucher l’imagination tout entière, l’imagination qui les voit et qui les entend quand elles ne sont plus et qu’il faut les peindre, et, après les avoir peintes, les juger et les condamner ?

2845. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Crétineau-Joly » pp. 247-262

… Diderot dit quelque part que, dans les peintures des grands peintres, ce qu’il y a de plus beau, ce sont les laissés… Il entend par là les choses qu’ils n’y mettent pas quoiqu’elles soient dans le sujet, et que les artistes médiocres ne manqueraient pas d’y mettre.

2846. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Alexandre de Humboldt »

Depuis cinquante ans et davantage, mais surtout depuis cinquante ans, l’a-t-on entendu prononcer !

2847. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Horace Walpole »

Il n’y avait que la chanterelle de l’ironie sur laquelle il jouait avec un archet de fils d’acier fin, et c’est cette chanterelle, qu’on entend perpétuellement dans sa correspondance, et qui plaisait tant à Lord Byron, lequel savait jouer aussi sur cette chanterelle, mais avec un bien autre archet !

2848. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Le roi Stanislas Poniatowski et Madame Geoffrin »

Il n’entend point du tout que cette vieille d’esprit et de monde, cette expérimentée de la vie, cette âme de salon qui n’est jamais sortie de son salon avant de s’en aller en Pologne, pour faire un pèlerinage à Stanislas-Auguste, puisse, par impossible, avoir été amoureuse comme sa contemporaine, cette folle octogénaire de Madame Du Deffand, qui, elle, positivement l’était, quoique M. de Mouy, dans une de ses notes, en ait fait la Sévigné de l’athéisme et de l’insensibilité… Madame Geoffrin, qu’il rapetisse pour qu’on ne soit pas tenté d’en faire la paire avec Madame Du Deffand, qu’il trouve compliquée, était, dit-il, « seulement une femme de beaucoup d’esprit, une bourgeoise aimant la société des gens de lettres et des grands seigneurs, — (rien de plus que cela ?) 

2849. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « II. Jean Reynaud »

Ils ont écouté sérieusement cet écho attardé, que Pythagore, s’il l’entendait, n’adorerait plus !

2850. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVII. Saint-Bonnet »

Saint-Bonnet nous explique ce qu’il entend par cette faculté, d’ordinaire si vaguement définie.

2851. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIV. Alexandre de Humboldt »

Depuis cinquante ans et davantage, mais surtout depuis cinquante ans, l’a-t-on entendu prononcer !

2852. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Raymond Brucker. Les Docteurs du jour devant la Famille » pp. 149-165

On l’entend, en effet, plus qu’on ne le voit, dans ce livre, qui exprime bien tout ce qu’était cet esprit de vif argent dans le remuement incessant de ses infatigables facultés.

2853. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Th. Ribot. La Philosophie de Schopenhauer » pp. 281-296

Et d’autant plus qu’en philosophie, et surtout en philosophie allemande, on s’entend si peu que, souvent, l’interprète le plus fidèle d’une philosophie passe, même aux yeux des adeptes de cette philosophie, pour un déformateur et un calomniateur d’idées.

2854. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Funck Brentano. Les Sophistes grecs et les Sophistes contemporains » pp. 401-416

III Ce qui l’est le moins, je l’ai déjà donne à entendre, c’est la partie du livre consacrée aux sophistes grecs, et cela devait être.

2855. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Dargaud »

Seulement, cela dit, nous n’entendons ne parler que d’effets d’art et de résultats littéraires quand nous reprochons à Dargaud de n’être pas, dans la réflexion de son esprit, le catholique qu’il est dans la spontanéité de ses sentiments.

2856. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « E. Caro »

car c’est précisément aujourd’hui l’homme de philosophie et de goût qui va s’entendre avec le catholique idolâtre et le barbare.

2857. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Edmond About » pp. 91-105

En effet, s’il pouvait se défaire de ce ton sans gêne qui ne le quitte jamais (littérairement, bien entendu) et qui le conter, la casquette sur la tête et les mains dans ses goussets, il serait ici, nous en convenons, dans son vrai genre, il aurait découvert son filon.

2858. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXI. De Mascaron et de Bossuet. »

Bossuet s’arrête tantôt sur ces idées, tantôt à travers une foule de sentiments qui l’entraînent, il ne fait que prononcer de temps en temps ces mots, et ces mots alors font frissonner, comme les cris interrompus que le voyageur entend quelquefois, pendant la nuit, dans le silence des forêts, et qui l’avertissent d’un danger qu’il ne connaît pas.

2859. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre premier. La Formation de l’Idéal classique (1498-1610) » pp. 40-106

Et ce qu’ils ont enfin essayé de ravir à l’antiquité, ce n’est pas sa « science » ou sa « philosophie », c’est son « art » : entendez ici le secret d’éveiller en nous l’impression de volupté presque sensuelle que leur procurait à eux-mêmes la lecture de l’Énéide ou de l’Iliade, celle de Pindare ou celle d’Horace. […] Multiplions les occasions de nous réunir, ce sera multiplier les moyens de nous entendre ; et de chacun de nous se dégagera, pour ainsi dire, un modèle d’honnête homme, qui n’aura pas « d’enseigne » ou de « spécialité », comme nous dirions de nos jours. […] Entendez par cette restriction qu’elle s’attachera moins à traduire dans ses œuvres ce que toute morale a d’absolu dans son principe que ce qu’elle a toujours de relatif dans ses applications. […] Réputation de Marot ; — et qualités qui la justifient : esprit, clarté, malice. — Que ces qualités sont à peine d’un poète, mais plutôt d’un prosateur qui aurait mis des rimes à sa prose. — Marot n’a eu du poète ni l’intensité du sentiment, ni le pittoresque de la vision, ni l’éclat du style. — Comparaison à cet égard de Marot et de Villon ; — Banalité des idées de Marot ; — et qu’il ne faut point faire peu de cas de Marot ; — mais qu’il est pourtant nécessaire de le réduire à sa juste valeur, si l’on veut bien entendre la réforme et l’œuvre de Ronsard.

2860. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE RÉMUSAT » pp. 458-491

On se rappelle, dans les Mémoires de Silvio Pellico, le touchant roman ébauché avec cette Madeleine repentie, dont il n’entend que la voix et les cantiques à travers le mur ; mais le roman reste, pour ainsi dire, dans l’air, à l’état de fil de la Vierge, et flotte en pur rêve. […] M. de Talleyrand, comme grand-chambellan, signifiait l’auguste désir avec son visage le plus solennel : « Messieurs, l’Empereur ne badine pas, il entend qu’on s’amuse. »

2861. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXIIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (4e partie) » pp. 1-63

Il entendit sans changer de couleur, de regard, d’attitude, les invectives lancées contre lui et le décret de sa déchéance. […] L’Europe l’entendit ; la France répondit.

2862. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre I. Polémistes et orateurs, 1815-1851 »

Tout s’attache à l’autorité du pape, et c’est une théocratie que Lamennais entend constituer. […] Mais il est clair : voilà sa qualité éminente et la clef de ses succès ; histoire, économie politique, Révolution, Empire, plans de campagne, finances, question d’Orient, il inonde de clarté tous les sujets : il donne à toutes les incompétences qui l’entendent, la joie de ne plus rien trouver d’obscur dans les plus difficiles et spéciales affaires.

2863. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre cinquième »

L’approche d’une catastrophe qui n’est guère moins prévue que redoutée, une sorte de crainte qui nous instruit en même temps qu’elle nous trouble, voilà la terreur telle que l’entendent les maîtres de notre théâtre. […] Je n’entends pas par là l’authenticité de l’événement qui sert de sujet à une tragédie, ni cette notoriété qui résiste au scepticisme d’un Niebuhr.

2864. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1878 » pp. 4-51

» Le romancier de l’Impératrice, après avoir regardé à gauche, à droite, répondit : « Moi, je le trouve très médiocre, mais je serais désolé qu’on m’entendît, on me croirait jaloux de lui !  […] Il fallait l’entendre couper le littéraire de sa conversation, par des blagues sur la nourrice morvandiste qu’il a découverte, et sur son dernier-né, qu’il appelle Tardivaux, à l’indignation de sa femme.

2865. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Première leçon »

Bien au contraire, un cours de la nature de celui-ci exige, pour être convenablement entendu, une série préalable d’études spéciales sur les diverses sciences qui y seront envisagées. […] C’est la coexistence de ces trois philosophies opposées qui empêche absolument de s’entendre sur aucun point essentiel.

2866. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Deuxième leçon »

C’est là probablement ce qu’entendait Bacon, quoique fort imparfaitement, par cette philosophie première qu’il indique comme devant être extraite de l’ensemble des sciences, et qui a été si diversement et toujours si étrangement conçue par les métaphysiciens qui ont entrepris de commenter sa pensée. […] La loi générale qui domine toute cette histoire, et que j’ai exposée dans la leçon précédente, ne peut être convenablement entendue, si on ne la combine point dans l’application avec la formule encyclopédique que nous venons d’établir.

2867. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Crétineau-Joly »

les parlements n’étaient aimés ni respectés des philosophes ; cependant ils s’entendirent au premier mot contre le formidable Institut. […] Qu’on se rappelle la grave affaire des billets de confession, que les bouffonneries de Voltaire n’ont pas rapetissée dans l’opinion des hommes qui s’entendent à la conduite des peuples !

2868. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Agrippa d’Aubigné. — II. (Fin.) » pp. 330-342

… Il n’est pas possible que tout ce que vous êtes ici consentiez à tous les points que je viens d’entendre : me prendre à la gorge sur le premier pas de mon avènement !

2869. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. Louis de Viel-Castel » pp. 355-368

Pour moi, après cette lecture patiente, suivie, instructive, lorsque j’arrive aux événements du 1er mars, au débarquement de Napoléon à Cannes, quand j’entends vibrer les paroles aiguës, vengeresses, de sa proclamation, de son adresse à l’armée, j’éprouve un soulagement, un sentiment de délivrance, coûte que coûte, après tant d’affronts et d’inepties ; je suis entraîné, je suis peuple, je sens comme le peuple, et, sans plus de théorie, 1815 m’est expliqué.

2870. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — I » pp. 93-106

M. de Tocqueville sembla reculer pour la première fois en arrière de 89, lui qui en avait eu jusque-là la religion et qui n’entendait point badinage sur ce sujet.

2871. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET (La Confession d’un Enfant du siècle.) » pp. 202-217

« Tu ne t’entends pas trop mal, se dit Octave à lui-même en se rendant justice, à exalter une pauvre tête, et tu pérores assez chaudement dans tes délires amoureux. » Le dernier chapitre, ce dîner en tête-à-tête de Brigitte et d’Octave aux Frères Provençaux, a du charme ; la résolution d’Octave part d’un noble cœur ; il s’immole, il renonce à Brigitte, il l’accorde à Smith, et, malgré l’étrangeté du procédé, on n’y sent pas le manque de délicatesse ; mais pour qu’on pût jouir un peu de cette situation nouvelle et plus reposée, pour qu’on y crût et qu’elle fût définitive aux yeux du lecteur, il faudrait des garanties dans ce qui précède.

2872. (1874) Premiers lundis. Tome II « Hippolyte Fortoul. Grandeur de la vie privée. »

L’intérêt, qui languissait dans le tête-à-tête, se relève avec l’arrivée d’un tiers ; c’est Rousseau lui-même qui, jeune, inconnu encore et s’ignorant, ouvre un jour la barrière verte du jardin de la maisonnette, et s’avance, sans trop savoir pourquoi, mais invinciblement attiré par l’image du bonheur qu’il rêve et par un air de clavecin qu’il entend.

2873. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIII. Des tragédies de Shakespeare » pp. 276-294

Quel attendrissement n’éprouve-t-on pas lorsqu’on entend les plaintes d’Arthur, jeune enfant dévoué à la mort par l’ordre du roi Jean, ou lorsque l’assassin Tirrel vient raconter à Richard III le paisible sommeil des enfants d’Édouard !

2874. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre I. L’esprit gaulois »

Le besoin de rire est le trait national, si particulier, que les étrangers n’y entendent mot et s’en scandalisent.

2875. (1892) Boileau « Chapitre III. La critique de Boileau. La polémique des « Satires » » pp. 73-88

Nommer Despréaux Desvipéreaux, lui reprocher d’avoir fait servir des alouettes au mois de juin dans son Repas ridicule, glorifier Pelletier de recevoir chaque jour vingt-cinq personnes à sa table, traiter l’auteur des Satires de « bouffon » et de « faussaire », ou de « jeune dogue » qui aboie autour de lui, et lui dire agréablement qu’il ne fait rien « que les mouches ne fassent sur les glaces les plus nettes », le menacer du bâton ou faire entendre que les cotrets ont déjà pris le contact de ses épaules, trouver dans ses vers des insultes au parlement, à la cour, au clergé, au roi, et un athéisme digne du sort de Vanini, le reprendre tantôt d’user « de quolibets des carrefours, de déclamations du Pont-Neuf qui ne peuvent être souffertes que dans un impromptu de corps de garde », et tantôt de piller Horace, Juvénal ou Molière : voilà ce que la rancune venimeuse des victimes de Boileau invente pour le confondre.

2876. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre V. Indices et germes d’un art nouveau — Chapitre II. Signes de la prochaine transformation »

Plus de comédiens, bien entendu, et plus de pantomime : presque plus de monologue ; à peine quelques traits de cette admirable méditation surnagent.

2877. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre I. Publicistes et orateurs »

Entendez le dédain des ornements : mais cette simplicité moins parée est souvent plus compliquée.

2878. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre IV. Le théâtre des Gelosi » pp. 59-79

Burattino, qui entend cela, appelle sa femme, et les voilà tous les deux à questionner ce mystérieux opérateur.

2879. (1899) L’esthétique considérée comme science sacrée (La Revue naturiste) pp. 1-15

Nous ne sommes pas venus au monde pour faire entendre des chants stériles, riches et polis.

2880. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Évolution de la critique »

Cette conception indiciaire de l’œuvre entendue comme « document », avait déjà fait l’objet d’une promotion récente, avant qu’Émile Hennequin ne s’en empare, par Paul Bourget, dans ses Essais de psychologie contemporaine, qui écrivait de son côté en 1883 : « Le lecteur, en effet, ne trouvera pas dans ces pages, consacrées pourtant à l’œuvre littéraire de cinq écrivains célèbres, ce que l’on peut proprement appeler de la critique.

2881. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces diverses — Préface du « Rhin » (1842) »

Ce qu’elles contiennent, on le voit d’ici ; c’est l’épanchement quotidien ; c’est le temps qu’il a fait aujourd’hui, la manière dont le soleil s’est couché hier, la belle soirée ou le matin pluvieux ; c’est la voiture où le voyageur est monté, chaise de poste ou carriole ; c’est l’enseigne de l’hôtellerie, l’aspect des villes, la forme qu’avait tel arbre du chemin, la causerie de la berline ou de l’impériale ; c’est un grand tombeau visité, un grand souvenir rencontré, un grand édifice exploré, cathédrale ou église de village, car l’église de village n’est pas moins grande que la cathédrale, dans l’une et dans l’autre il y a Dieu ; ce sont tous les bruits qui passent, recueillis par l’oreille et commentés par la rêverie, sonneries du clocher, carillon de l’enclume, claquement du fouet du cocher, cri entendu au seuil d’une prison, chanson de la jeune fille, juron du soldat ; c’est la peinture de tous les pays coupée à chaque instant par des échappées sur ce doux pays de fantaisie dont parle Montaigne, et où s’attardent si volontiers les songeurs ; c’est cette foule d’aventures qui arrivent, non pas au voyageur, mais à son esprit ; en un mot, c’est tout et ce n’est rien, c’est le journal d’une pensée plus encore que d’un voyage.

2882. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « IX »

Dépité d’entendre dire que Bossuet raturait son style, notre éplucheur affirme que je me suis mépris sur ses corrections. «  Là, dit-il, où M. 

2883. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’empire russe depuis le congrès de vienne »

Et qui donc croirait risquer un paradoxe en affirmant qu’il n’est rien de semblable en Russie, si l’on entend par société quelque chose de lié, de pénétré, d’intimement fondu, d’identique ; quelque chose, qu’on nous passe le mot !

2884. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VI. M. Roselly de Lorgues. Histoire de Christophe Colomb » pp. 140-156

L’historien a donc vu nettement l’esprit de Dieu, comme l’entendent les chrétiens, dans l’esprit de Christophe Colomb, et il l’a dit avec cette rectitude catholique qui ne craint pas de dire ce qu’elle voit.

2885. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Goethe »

Le héraut d’armes de la gloire de Goethe, qui la sonne dans une trompette d’or, un poète qui a plus fait pour Goethe que Goethe lui-même, Henri Heine, n’a pu s’empêcher d’en convenir : « Goethe — dit-il — traita, en général, l’enthousiasme d’une façon tout historique, comme quelque chose de donné, comme une étoffe qu’il faut travailler, et c’est ainsi que l’esprit devient matière sous ses mains. » L’entendez-vous ?

2886. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Vie de la Révérende Mère Térèse de St-Augustin, Madame Louise de France »

Bien entendu, personne n’en parla.

2887. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Monselet »

Et lorsque je dis : la Critique, n’entendez pas telle ou telle critique injuste, improbe, malavisée ; non !

2888. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Théodore de Banville »

Le xixe  siècle a d’autres affaires à démêler que la gloire de ses poètes… et le mal est bien grand, puisque la poésie comme l’entendent Banville et son école ne peut captiver le regard grossier de la société de ce temps.

2889. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Léon Gozlan » pp. 213-230

Il est évident que ce genre d’esprits, qui entendent, d’ailleurs, presque toujours les choses sociales : la notion qu’on se fait de Dieu impliquant tout le reste, l’emportent, et de beaucoup, sur les esprits qui ne se préoccupent que des problèmes terrestres de la vie, et ne songent qu’à tirer — extraction sublime, néanmoins ! 

2890. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « L’Abbé Prévost et Alexandre Dumas fils » pp. 287-303

Mais le vieux diable d’abbé, qui s’est fait à lui-même deux préfaces, et qui se sent un peu gêné dans sa soutane quand elle s’accroche par trop au jupon de Manon Lescaut, se débat et n’entend pas être si candide que le prétend son panégyriste, et n’en est pas moins lié par lui, pour notre édification éternelle, à ce pilori de candeur.

2891. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Marie Desylles » pp. 323-339

Elle fait écouter et entendre tant de choses… Je néglige tout pour ne me souvenir que de vous.

2892. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Gustave Flaubert » pp. 61-75

Le grand mérite de ce roman est dans la figure principale, qui est toute la pensée du livre et qui, quoique commune, cesse de l’être par la profondeur avec laquelle elle est entendue et traitée.

2893. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Conclusion »

Avec lui nous avons admis que l’espace homogènes est une forme de notre sensibilité ; et nous entendons simplement par là que d’autres intelligences, celles des animaux par exemple, tout en apercevant des objets, ne les distinguent pas aussi nettement, ni les uns des autres, ni d’elles-mêmes.

2894. (1878) Leçons sur les phénomènes de la vie communs aux animaux et aux végétaux. Tome I (2e éd.)

On entend dire en effet souvent que le physicien agit sur l’électricité ou sur la lumière ; que le médecin agit sur la vie, la santé, la fièvre ou la maladie : ce sont là des façons de parler. […] C’était là, bien entendu, une simple désignation et non une explication. […] D’abord, qu’est-ce que les chimistes entendent sous ce nom de combustion ? […] Qu’entend-on par putréfaction ? […] Nous devons d’abord examiner ce que l’on entend par ce mot irritabilité et savoir quelles idées et quels faits il désigne.

2895. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mademoiselle Aïssé »

Cette question semblait n’en être plus une depuis longtemps ; on a cité un passage tiré d’une lettre de M. de Ferriol à Mlle Aïssé, trouvée dans les papiers de M. d’Argental, duquel il ressortait trop nettement, ce semble, qu’elle aurait été sa maîtresse ; mais ce passage isolé en dit plus peut-être qu’il ne convient d’y entendre, à le lire en son lieu et en son vrai sens. […] Celle-ci, née pour les affections, et qui les avait dû refouler jusque-là, orpheline dès l’enfance, n’ayant pas eu de mère et l’étant à son tour sans oser le paraître, amante heureuse mais troublée dans son aveu, du moment qu’elle rencontra un cœur de femme digne de l’entendre ; s’y abandonna pleinement, elle éclata : « Je vous aime comme ma mère, ma sœur, ma fille, enfin comme tout ce qu’on doit aimer. » De vifs regrets aussitôt, des retours presque douloureux s’y mêlèrent : « Hélas ! […] Elle contait à ravir, et sa conversation était si attrayante, son esprit si charmant, que je quittais tous les jeux de mon âge pour l’aller entendre quand elle venait chez ma mère.

2896. (1848) Études critiques (1844-1848) pp. 8-146

Il a entrevu des personnages et ces personnages n’ont rien fait ; il a voulu les entendre mais à peine ils ont parlé, le poète a expliqué les ressorts qui auraient pu faire agir ses marionnettes, il a montré leurs fils d’archal, mais il n’a rien mis en mouvement. […] Dans tout ce bruit de cymbales et de tambours dont on est assourdi, on devine que la voix des personnages, bien que fort enflée, ne saurait beaucoup se faire entendre. […] Il veut faire sur la terre un paradis, et il n’entend pas que l’on s’accommode plus longtemps à la souffrance. […] Il y court, en effet, et comme il se tient sur le pont, regardant couler les eaux profondes, voici qu’il entend tout à coup sortir du sein du fleuve une voix creuse et tremblotante, interrompue par des quintes de toux, en un mot une voix de vieillard qui le salue et s’empresse de lui conter en gémissant mille infortunes.

2897. (1864) Études sur Shakespeare

À la vérité, au fond des masses populaires, la réforme, flattée mais non satisfaite, grondait sourdement ; on l’entendait même élever par degrés cette voix qui devait bientôt ébranler toute l’Angleterre. […] Un peuple qui marche ainsi selon sa première impulsion, et ne cesse point de s’appartenir tout entier, jette sur lui-même des regards de complaisance ; le sentiment de la propriété s’attache pour lui à tout ce qui le touche, la joie de l’orgueil à tout ce qu’il produit ; ses poëtes animés à lui retracer ses propres faits, ses propres mœurs, sont certains de ne rencontrer nulle part une oreille qui ne les entende, une âme qui ne leur réponde ; leur art est à la fois le charme des dernières classes de la société et l’honneur des conditions les plus élevées. […] quelles occasions, quelles solennités rassemblaient si fréquemment les hommes, et offraient à ces chantres populaires une multitude disposée à les entendre ? […] Comment y parviendra-t-il s’il ne s’adapte avec soin à leurs dispositions, à leurs penchants, s’il ne répond aux besoins actuels de leur esprit, s’il ne s’adresse constamment à des idées qui leur soient familières, et ne leur parle le langage qu’ils ont coutume d’entendre ? […] Et l’on entend dire à la fin de la pièce qui, depuis l’exil de Bolingbroke, n’a pu durer plus de quinze jours, que Mowbray, exilé au même moment que lui, a fait pendant ce temps plusieurs voyages à la terre sainte, et est venu mourir en Italie.

2898. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME GUIZOT (NEE PAULINE DE MEULAN) » pp. 214-248

Les gentilshommes de Versailles entendaient mieux la raillerie que plusieurs de nos superbes modernes. […] » Et de ce ton de douairière du Marais qu’elle affectionne : « La manie de votre âge, dit-elle en terminant, est de vouloir faire entendre la raison aux hommes : l’expérience du mien enseigne qu’il est plus sûr de les y laisser revenir ; que le temps les ramène d’ordinaire à la raison et à la vérité ; mais que la raison et la vérité n’ont presque jamais convaincu personne. » Cet esprit si expérimenté et si sûr, qui débute par où d’autres sages finissent, patience !

2899. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre IV. Le Séminaire d’Issy (1881) »

Un jour, on entendit quelque bruit sur la place Saint-Sulpice : — Allons à la chapelle mourir tous ensemble, s’écria l’excellent M. ***, prompt à s’enflammer, -je n’en vois pas la nécessité, répondit M. ***, plus calme, plus prémuni contre les excès de zèle ; et l’on continua de se promener en groupe sous les porches de la cour. […] La contradiction des travaux philosophiques ainsi entendus avec la foi chrétienne ne m’apparaissait point encore avec le degré de clarté qui bientôt ne devait laisser à mon esprit aucun choix entre l’abandon du christianisme et l’inconséquence la plus inavouable.

2900. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « III »

La légende chrétienne du Gral a dû naturellement avoir une forme primitive orientale, encore très vague bien entendu ; transportée en Bretagne20 par la marche de la prédication, elle a coïncidé avec les traditions nationales de la Celtique, l’initiation aux mystères du « Gradal », les souvenirs de résistance à la conquête et les espoirs d’affranchissement. […] Par Bretagne il faut entendre ici et l’Armorique et l’Angleterre, spécialement le pays de Galles et l’Irlande.

2901. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre quatrième. Éléments sensitifs et appétitifs des opérations intellectuelles — Chapitre premier. Sensation et pensée »

. — « Rien n’est, disaient-ils, mais tout devient ; les sages, à l’exception de Parménide, s’accordent sur ce point : Protagoras, Héraclite, Empédocle ; Homère même n’a-t-il pas dit : l’Océan, père des Dieux, et Téthys, leur mère ; donnant à entendre que toutes choses sont produites par le flux et le mouvement ?  […] Si le son du tonnerre suit l’éclair, dépend-il de moi d’entendre le son avant l’éclair ?

2902. (1908) Dix années de roman français. Revue des deux mondes pp. 159-190

Puis il parle, et une solidarité intense est éveillée en nous par sa parole ; on croit entendre le cri d’une âme tordue par des affres déchirantes et subtiles. […] René Doumic l’a bien indiqué, le roman social, tel que l’entendent M. 

2903. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

Le Chercheur s’arrête interdit : J’entends monter des voix à des appels pareilles, Indomptables échos du passé dans mon cœur. […] Je ne discute pas sur le sujet lui-même, mais sur la manière dont il a été entendu et traité par l’auteur.

2904. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre II. La poésie lyrique » pp. 81-134

Olivier de la Fayette nous a favorablement surpris par son Rêve des Jours où les deux muses, la traditionnelle et la symboliste font entendre tour à tour leurs rythmes. […] Souveraine d’orgueil, dans ma nuit ignorée, J’entends monter vers moi les prières des hommes, Je devance leur marche, impalpable fantôme, Et je guide leurs pas au seuil des cieux fermés.

2905. (1888) Petit glossaire pour servir à l’intelligence des auteurs décadents et symbolistes « Petit glossaire »

Entendre un son humain dans la salle voisine, permettait y fuir sautellante. […] Entends dans l’horizon l’appel des tympanons.

2906. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Proudhon » pp. 29-79

, qui renouvelle, n’a point fait pousser pour nous d’inconnu dans cette vieille connaissance, laquelle nous tend aujourd’hui, de sa main saltimbanque, comme autrefois, ce tambour de basque doctrinaire dans lequel foisonnent et vibrent toujours ces antinomies que nous avons trop entendues… Hélas ! […] quand on pose de ces thèses contre cet enseignement séculaire qu’on appelle l’Église, et qu’on lui dit, avec le sans-façon d’un goujat, qu’elle, la sainte Église, ne fut jamais juste, on est tenu au moins de déterminer avec une clarté d’éclair fixé, avec une splendeur de soleil, ce qu’on entend par la Justice, Mais P.

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