Les trois ordres de la société, selon lui, « la société chrétienne au nom de sa foi, le monde aristocratique au nom de son honneur et de son orgueil, la classe bourgeoise au nom de ses intérêts, tous s’accordent dans un sentiment de répulsion et d’alarme à l’endroit de la littérature. » Recherchant les causes de cet abaissement général, de ce désaccord de la littérature avec la société, il en demande compte à la critique ; il partage celle-ci en trois catégories, et toutes les trois également impuissantes ou stériles, sous lesquelles il ne tient qu’à nous de mettre des noms : la critique dogmatique et immobile (Gustave Planche, probablement) ; la critique qui se joue en de fantasques arabesques (apparemment Janin, ou Gautier, ou Saint-Victor) ; et celle qui se réfugie dans le passé pour n’avoir pas à se déjuger et à se contredire dans le présent (c’est moi-même, je le crois). […] J’ai en ce moment sous les yeux un livre qui m’est envoyé par un des disciples de M. de Pontmartin en province4, et qui, au nom des mêmes principes aristocratiques, contient des amas d’invectives sur tous les écrivains du moment ; et l’auteur, assure-t-on, est un homme bien né, un marquis. […] Il doit faire des observations à son jeune pupille, lui représenter les inconvénients d’une belle-mère qui est sortie des voies sociales communes, et qui s’est fait un nom admiré des uns, insulté des autres : ……….Onerat celeberrima natam Mater………………. […] Tu le sais, d’Auberive, notre Dauphiné est fier de vous : dans ce temps où tout s’en va, votre race a conservé intact cet honneur, ce vieil et pur honneur qui est le premier des biens… Si jamais tu pouvais l’oublier, je m’en souviendrais pour toi… Quand je regarde ton Emmanuel, si enthousiaste, si beau, si digne de sa sainte mère, je retrouve en lui cette fleur de noblesse que notre siècle ne connaît plus, qui bientôt, peut-être ne sera plus qu’un nom, mais que nous ne devons pas laisser périr, nous qui en sommes les gardiens… Quoi !
Il était Harlay, cinquième du nom ; ce qui prêtait au jeu de mots (Arlequin). […] M. de Harlay était trop courtisan et trop voué à son ambition pour avoir le sentiment de la justice ; mais il était doux, d’un naturel humain, et il dut souffrir de ces sévérités exigées en son nom et pour sa défense. […] Il appréhendait que « ces discours qui avaient charmé dans sa bouche n’eussent pas le même succès quand ils seraient sur le papier. » Legendre, qui avait eu l’idée de les rédiger, est forcé de convenir que le prélat avait raison : « J’ai de lui des sermons qui avaient charmé quand il les avait prononcés et qui réellement ne m’ont paru, en les lisant, que des pièces assez ordinaires. » Les fameuses Conférences restèrent donc à l’état de pure renommée et de souvenir ; si glorieuses qu’elles fussent pour le prélat, elles avaient cessé du jour où il avait pensé que l’effet était produit et son nom remis suffisamment en honneur. […] M. de Harlay, en toutes ces démarches qui ont gravé à jamais son nom dans l’histoire de la Compagnie, était animé du noble désir de la servir, et aussi peut-être de la crainte que si l’Académie venait à se choisir, après le chancelier Séguier, un second protecteur au-dessous du trône, ce protecteur ne fût pas lui, encore si nouveau et l’un des derniers élus.
Ce contemporain, dont le nom n’étonnera que ceux qui n’ont lu aucun de ses trois ouvrages caractéristiques, et qu’un instinct heureux de fureteur ou quelque indication bienveillante n’a pas mis sur la voie des Rêveries, d’Oberman et des Libres Méditations ; l’éloquent et haut moraliste qui débuta en 1799 par un livre d’athéisme mélancolique, que Rousseau aurait pu écrire comme talent, que Boulanger et Condorcet auraient ratifié comme penseurs ; qui bientôt, sous le titre d’Oberman, individualisa davantage ses doutes, son aversion sauvage de la société, sa contemplation fixe, opiniâtre, passionnément sinistre de la nature, et prodigua, dans les espaces lucides de ses rêves, mille paysages naturels et domestiques, d’où s’exhale une inexprimable émotion, et que cerne alentour une philosophie glacée ; qui, après cet effort, longtemps silencieux et comme stérilisé, mûrissant à l’ombre, perdant en éclat, n’aspirant plus qu’à cette chaleur modérée qui émane sans rayons de la vérité lointaine et de l’immuable justice, s’est élevé, dans les Libres Méditations, à une sorte de théosophie morale, toute purgée de cette âcreté chagrine qu’il avait sucée avec son siècle contre le christianisme, et toute pleine, au contraire, de confiance, de prière et de douce conciliation ; fruit bon, fruit aimable d’un automne qui n’en promettait pas de si savoureux ; cet homme éminent que le chevalier de Bouflers a loué, à qui Nodier empruntait des épigraphes vers 1804 ; que M. […] Marie-Joseph Chénier, de la postérité du dix-huitième siècle comme M. de Sénancour, l’a ignoré complètement, puisqu’il ne l’a pas mentionné dans son Tableau de la Littérature depuis 89, où figurent tant de noms. […] Il s’ensevelit sous la religion du silence, à l’exemple des gymnosophistes et de Pythagore ; il médita dans le mystère, et s’attacha par principes à demeurer inconnu, comme avait fait l’excellent Saint-Martin. « Les prétentions des moralistes, comme celles des théosophes, dit-il en tête des Libres Méditations, ont quelque chose de silencieux ; c’est une réserve conforme peut-être à la dignité du sujet. » Désabusé des succès bruyants, réfugié en une région inaltérable dont l’atmosphère tranquillise, il s’est convaincu que cette gloire qu’il n’avait pas eue ne le satisferait pas s’il la possédait, et s’il n’avait travaillé qu’en vue de l’obtenir : « Car, remarque-t-il, la gloire obtenue passe en quelque sorte derrière nous, et n’a plus d’éclat ; nous en aimions surtout ce qu’elle offrait dans l’avenir, ce que nous ne pouvions connaître que sous un point de vue favorable aux illusions. » Il n’est pas étonnant qu’avec cette manière de penser, le nom de M. de Sénancour soit resté à l’écart dans cette cohue journalière de candidatures à la gloire, et que, n’ayant pas revendiqué son indemnité d’écrivain, personne n’ait songé à la lui faire compter. […] On dirait que, dans son scrupule de véracité excessive, il s’abstient du récit, de l’anecdote, du nom propre, comme d’une partie variable et à demi mensongère.
L’idée de l’ancienne élégie de l’Indiscret est reprise dans Réveil, et le premier mouvement a toute la secousse d’un effroi ressenti : C’est qu’ils parlaient de toi, quand, loin du cercle assise, Mon livre trop pesant tomba sur mes genoux ; C’est qu’ils me regardaient, quand mon âme indécise Osa braver ton nom qui passait entre nous. […] L’avenir, nous le croyons, ne l’oubliera pas ; tout d’elle ne sera pas sauvé sans doute ; mais, dans le recueil définitif des Poetæ minores de ce temps-ci, un charmant volume devra contenir sous son nom quelques idylles, quelques romances, beaucoup d’élégies ; toute une gloire modeste et tendre. […] Elle débuta à l’Opéra-Comique dans le rôle de Lisbeth de l’opéra du même nom et y eut du succès. […] Telle est parmi nous la situation des femmes, et, malgré l’exception qu’a formée le nouveau récipiendaire de l’Académie, je crois que, généralement parlant, il est vrai de dire que, pour atteindre maintenant au degré d’intérêt dont elle est susceptible, l’Élégie doit parler par la bouche des femmes, ou du moins en leur nom ; elles seules, dit-on, savent donner de la grâce aux passions malheureuses : en vérité, on peut leur laisser cet avantage-là. » Nulle femme ne se trouva plus que Mme Valmore dans la situation supposée par Mme Guizot, et aucun poëte élégiaque n’a tiré en effet de son cœur des accents plus plaintifs et plus déchirants.
Rendons, rendons enfin admiration et justice à ces hommes qui ont imposé leur nom à leur siècle, Périclès, Auguste, Léon X et Louis XIV ; oui, ils ont été pour beaucoup dans la grandeur et la majesté de l’âge qu’on les a trop accusés d’accaparer ; leur absence totale et prolongée est bien capable aujourd’hui de faire apprécier leur rôle : ils ont empêché les génies et les talents de s’égarer, de se dissiper, les médiocres de passer sur le corps des plus grands ; ils ont maintenu les proportions, les rangs, les vocations, la balance des arts. […] Prenez des noms, je ne m’en charge pas, mais essayez. […] Autour des noms les plus honorés, il n’est pas rare de trouver, comme des clients sous le patron, les plumes les plus abjectes et les plus viles, flattant ici et blessant là, célébrant qui les accepte et insultant qui les méprise : c’est à ce double emploi qu’elles doivent leur faveur et leur sportule. […] Ce sont des questions qui ne sauraient se décider avec quelque fruit et avec tout leur piquant, qu’en reprenant un à un les noms les plus autorisés de nos jours.
Prenons Charles de Secondât de la Brède en 1716, au moment où son oncle le baron de Montesquieu lui transmet avec son nom sa charge de président à mortier au parlement de Bordeaux. […] De nos jours, cependant, la réputation de Montesquieu décline : ou plutôt il reste un nom, il cesse d’être un maître. […] Charles-Louis de Secondat, né à la Brède, près de Bordeaux, le 18 janvier 1689, étudia chez les Oratoriens à Juilly, fut reçu, en 1714, conseiller au parlement de Bordeaux, se maria en 1715, prit, en 1716, la charge de président et le nom de Montesquieu que lui légua un oncle. […] Éditions :Lettres persanes, 1721, in-12, Amsterdam et Cologne ; Considérations sur les causes de la grandeur et de la décadence des Romains, Amsterdam, 1734, in-12 (anonyme) ; De l’esprit des Lois, Genève, 1748, 2 vol. in-4 (sans nom d’auteur) ; Paris, Huart, 1750, 3 vol. in-12.
Il prononce toujours son nom avec un peu de mystère, comme celui du dieu d’une religion secrète. « Henri Beyle », ce nom prend pour lui la douceur d’un petit nom ou l’importance d’un nom sacré et caché, qui n’est révélé qu’aux adeptes.
Si l’érudition n’était que cela, si l’érudit était l’Hermagoras de La Bruyère qui sait le nom des architectes de la tour de Babel et n’a pas vu Versailles, tout le ridicule dont on la charge serait de bon aloi, la vanité seule pourrait soutenir dans de telles recherches, les esprits médiocres pourraient seuls y consacrer leur vie. […] J’aime Leibniz réunissant sous le nom commun de philosophie les mathématiques, les sciences naturelles, l’histoire, la linguistique. […] On pourra négliger le nom de son auteur ; elle-même pourra tomber dans l’oubli ; mais les résultats qu’elle a contribué à établir demeurent. […] Une vie entière de laborieux travaux ne sera qu’une pierre obscure et sans nom dans ces constructions gigantesques, peut-être même un de ces moellons ignorés, cachés dans l’épaisseur des murs.
Bref, de faute en faute, dont quelques-unes sont à lui, dont les autres sont à son lieutenant, et dont la première remonte à Napoléon lui-même, il est amené à signer cette capitulation humiliante à laquelle est resté attaché son nom. […] Il leur parla du christianisme, de Tacite, de cet historien, l’effroi des tyrans, dont il prononçait le nom sans peur, disait-il en souriant ; soutint que Tacite avait chargé un peu le sombre tableau de son temps, et qu’il n’était pas un peintre assez simple pour être tout à fait vrai. […] Le plan général est vaste et même grandiose ; l’historien procède par grandes masses qu’il dispose et distribue autour d’un événement principal qui donne son nom à chaque livre. […] Le troisième livre de ce IXe volume est intitulé Somosierra, mais son vrai titre devrait être Saragosse, du nom de ce siège extraordinaire qui fut l’une de ces défaites triomphantes dont parle Montaigne.
Dans les commencements de sa liaison avec Grimm, s’ennuyant de lui pendant une campagne qu’il faisait en Westphalie à la suite du maréchal d’Estrées (1757), excitée par les lectures qu’elle entendait, vers le même temps, des lettres de La Nouvelle Héloïse, elle eut l’idée d’écrire, elle aussi, une sorte de roman qui fut l’histoire de sa propre vie, et où elle ne ferait que déguiser les noms. […] On restitua avec certitude les principaux noms ; on supprima des hors-d’œuvre et des longueurs, et l’on en tira les trois volumes qui parurent en 1818, et dont le succès fut tel qu’il y eut trois éditions en moins de six mois17. […] Mlle Louise-Florence-Pétronille Tardieu d’Esclavelles, qui, dans le roman, s’appelle du joli nom d’Émilie, fille d’un officier mort au service du roi, dut naître vers 1725. […] J’ai voulu la peindre tout d’abord avec la plume de ces hommes éminents dont le nom se rattache au sien ; il est bon de connaître un peu les gens de vue avant d’écouter leur histoire et leur roman.
C’est surtout en l’étudiant de près qu’on se convainc qu’une grande influence sociale a toujours sa raison, et que, sous ces fortunes célèbres qui se résument de loin en un simple nom qu’on répète, il y a eu bien du travail, de l’étude et du talent ; dans le cas présent de Mme Geoffrin, il faut ajouter, bien du bon sens. […] Mme Geoffrin ajoute un nom de plus à cette liste des génies parisiens qui ont été doués à un si haut degré de la vertu affable et sociale, et qui sont aisément civilisateurs. […] On s’entretenait autour de son lit des moyens que les gouvernements pourraient employer pour rendre les peuples heureux, et chacun d’inventer de grandes choses : « Ajoutez-y, dit-elle, le soin de procurer des plaisirs, chose dont on ne s’occupe pas assez. » Elle mourut sur la paroisse de Saint-Roch, le 6 octobre 1777. — Le nom de Mme Geoffrin et son genre d’influence nous ont naturellement rappelé un autre nom aimable, qu’il est trop tard ici pour venir balancer avec le sien.
Le jour me surprit, et je n’avais encore rien résolu… On devine que cette femme riche, chez qui va se présenter Mme de Senneterre, n’est autre que Suzette, qui a changé de nom. […] Philippe (c’est le nom du valet de chambre, qui, indépendamment de toutes ses qualités, est studieux, instruit, amateur de lecture), Philippe, retiré du service et vivant auprès de son fils, a pris l’habitude de jeter ses pensées sur le papier ; et comme on lui proposait un jour de se faire imprimer : « Non, vraiment, répondit-ilh, je craindrais de trahir les secrets de l’humanité ; on sent le besoin de les cacher quand on connaît les hommes. » Vers le temps où, retiré en Champagne, à l’abri de la proscription, il écrivait sa Dot de Suzette, M. […] Or, dans tout pays où il n’y a plus de service qui ne soit soldé, il y a réellement égalité politique en dépit des prétentions et des souvenirs. » Mais cette vérité de fait ne l’empêche pas de remarquer que l’opinion a gardé pourtant des restes bien légitimes de religion historique : « Des hommes qui ont leur nom dans l’histoire, qui se lient à tout le passé d’une nation, ne sont jamais nuls dans leur patrie. » Dans toutes ces notes de début, M. […] Par penchant et par habitude, il était encore plus homme de presse qu’il ne l’avait été de consultation et de cabinet : « Comme écrivain, disait-il, entre m’adresser au public ou à un souverain, fût-il dix fois plus élevé que la colonne de la place Vendôme, je n’hésiterai jamais à préférer le public ; c’est lui qui est notre véritable maître. » En laissant dans l’ombre les côtés faibles et ce qui n’est pas du domaine du souvenir, et à le considérer dans son ensemble et sa forme d’esprit, je le trouve ainsi défini par moi-même dans une note écrite il n’y a pas moins de quinze ans : Fiévée, publiciste, moraliste, observateur, écrivain froid, aiguisé et mordant, très distingué ; une Pauline de Meulan en homme (moins la valeur morale) ; sans fraîcheur d’imagination, mais avec une sorte de grâce quelquefois à force d’esprit fin ; — de ces hommes secondaires qui ont de l’influence, conseillers nés mêlés à bien des choses, à trop de choses, meilleurs que leur réputation, échappant au mal trop grand et à la corruption extrême par l’amour de l’indépendance, une certaine modération relative de désirs, et de la paresse ; — travaillant aux journaux plutôt par goût que par besoin, aimant à avoir action sur l’opinion, même sans qu’on le sache ; — Machiavels modérés, dignes de ce nom pourtant par leur vue froide, ferme et fine ; assez libéraux dans leurs résultats plutôt que généreux dans leurs principes ; — sentant à merveille la société moderne, l’éducation moderne par la société, non par les livres ; n’ayant rien des anciens, ni les études classiques, ni le goût de la forme, de la beauté dans le style, ni la morale grandiose, ni le souci de la gloire, rien de cela, mais l’entente des choses, la vue nette, précise, positive, l’observation sensée, utile et piquante, le tour d’idées spirituel et applicable ; non l’amour du vrai, mais une certaine justesse et un plaisir à voir les choses comme elles sont et à en faire part ; un coup d’œil prompt et sûr à saisir en toute conjoncture la mesure du possible ; une facilité désintéressée à entrer dans l’esprit d’une situation et à en indiquer les inconvénients et les ressources ; gens précieux, avec qui tout gouvernement devrait aimer causer ou correspondre pour entendre leur avis après ou avant chaque crise.
En parcourant en bien des sens le champ du xviiie siècle, j’ai mainte fois rencontré le grand nom et l’imposante figure de Montesquieu, et je ne m’y suis pas arrêté. […] Le peu de notes qu’on a publiées de lui, et où il fait son portrait, ont donné à sa physionomie une vie et un naturel qui est mieux que de la majesté : « Plutarque me charme toujours, disait-il ; il y a des circonstances attachées aux personnes qui font grand plaisir. » Né le 18 janvier 1689, au château de La Brède, près de Bordeaux, il sortait d’une famille de robe et d’épée, de bonne noblesse de Guyenne : « Quoique mon nom ne soit ni bon ni mauvais, disait-il, n’ayant guère que deux cent cinquante ans de noblesse prouvée, cependant j’y suis attaché. » Son père, qui avait servi, après s’être retiré de bonne heure, soigna fort son éducation ; le jeune Montesquieu fut destiné à la magistrature. […] Les Lettres persanes parurent sans nom d’auteur en 1721, et elles eurent à l’instant un succès qui marquait une date et qui en fit le livre de l’époque. […] Montesquieu (car c’est lui ici qui parle, ainsi qu’il parlera en son nom jusqu’à la fin de sa vie), tâche d’y établir en quoi cette idée de justice ne dépend point des conventions humaines : « Et quand elle en dépendrait, ajoute-t-il, ce serait une vérité terrible qu’il faudrait se dérober à soi-même. » Montesquieu va plus loin : il tâche même de rendre cette idée et ce culte de justice indépendants de toute existence supérieure à l’homme ; il va jusqu’à dire, par la bouche d’Usbek : Quand il n’y aurait pas de Dieu, nous devrions toujours aimer la justice, c’est-à-dire faire nos efforts pour ressembler à cet Être dont nous avons une si belle idée, et qui, s’il existait, serait nécessairement juste.
— qui porte le nom de cette flatterie ! […] Ils y étaient restés des bâtards, et quelques-uns, qui se sont vengés de leur naissance par de la gloire, en ont gardé le nom. […] Mais les lois qui n’en suivent pas les dérèglements ont cru imiter Dieu en en faisant un peuple à part, exclus de tout nom, de toute succession, de toute faculté de tester, et, par conséquent, de faire souche et lignée ; en un mot, un peuple dévoué à l’obscurité la plus profonde, sans consistance, sans existence, la plus vive image du néant. […] Il n’est pas moins certain qu’il y a eu divers bâtards de princes, de seigneurs et de particuliers qui se sont élevés, par leur mérite, au-dessus du sort de leur origine, et qui ont été revêtus de biens et d’emplois et quelques-uns même d’éclatants ; mais, si on les examine, on les trouvera inhabiles à tous autres biens qu’à ceux de la fortune, et que parmi tout le lustre acquis par leur mérite et la protection de leurs parents, les lois n’ont pas fléchi en leur faveur… De là ces noms si communs dans les plus considérables illégitimes, le bâtard de Bourbon, le bâtard d’Orléans, le bâtard de Rubempré, et tant d’autres de princes, de seigneurs et de particuliers, appelés ainsi de leur temps, sans qu’ils eussent d’autres dénominations, par laquelle ils sont transmis jusqu’à nous dans les histoires. » Tel est, pour le mâle et pratique esprit de Saint-Simon, le point de départ du Mémoire sur les légitimés.
Enfin, on peut compter encore les sympathies personnelles d’un Roi très éclairé, le Roi de Prusse, qui aime le catholicisme en artiste, et qui pourrait s’en servir en homme d’état, et aussi la bonne volonté de Schelling, le plus grand nom de l’Allemagne actuelle, l’homme le plus puissant sur l’opinion de son pays. […] Pourquoi ce nom imposant de l’Allemagne protestante invoqué bruyamment par des catholiques arriérés ? […] De ce que, justes envers le passé, quand ils n’en sont pas enthousiastes, mais l’étudiant avec trop de persévérance et d’efforts pour ne pas finir par l’aimer, — car il est de la nature de l’homme de mettre son amour où il a mis sa peine, — des écrivains se prennent d’une haute bienveillance ou d’un sentiment plus respectueux encore pour quelques grands caractères de l’Église romaine, est-ce une raison suffisante pour déclarer que les écrivains en question ne trouvent d’absolument vrai que les idées au nom desquelles ces grands caractères ont agi ? […] En effet, si une tache sanglante reste sur son nom, c’est que sa modération, pour le coup criminelle, n’a pas osé l’effacer.
Il n’eut pas seulement un prédécesseur de son nom, auteur de quelques froids sonnets, et cependant admiré jusqu’à la passion par une jeune fille poëte, qui voulut se nommer la Nina di Dante : il crut, dans sa jeunesse, avoir quelques rivaux de poésie, et ne laissa que bien tard échapper l’aveu qu’il espérait les effacer tous, comme le peintre Cimabué surpassait Giotto. […] Il fut un temps où, selon leur récit, elles étaient adorées ; mais aujourd’hui elles sont pour tous objet de haine ou d’indifférence. » Ces trois femmes mystérieuses, que l’amour interroge sur leurs noms, c’étaient la Justice, la Générosité et la Tempérance, persécutées désormais par les hommes et réduites à une vie errante et pauvre. […] Cette gloire n’appartient qu’à la grande œuvre du Dante ; et là même, malgré ce nom de Cantique appliqué par lui-même il cette œuvre, ce n’est pas l’inspiration lyrique qui domine le plus. […] Dans cette vie si calme, dans cette belle vie de citoyen, dans cette communauté si pure, dans ce doux hospice, me fit naître Marie invoquée à grands cris ; et, sur votre antique baptistère, je reçus à la fois les noms de chrétien et de Cacciaguida », À ces traits naïfs, trop altérés dans toute traduction, à ce langage d’une si maligne et si poétique candeur, on peut comparer les regrets et la verve moqueuse d’Horace, ses louanges des vieux Romains et de leurs chastes épouses, son âpre censure des mœurs dégénérées et de la danse ionienne.
Il y a Nieuwerkerke, un savant du nom de Pasteur, Sainte-Beuve, Chesneau, le critique d’art de L’Opinion nationale. […] Alors, je ne sais qui jette le nom de Hugo dans la conversation. […] Et l’on ne sait comment le nom de Racine tombe dans la conversation. […] Dans ce dernier, on écrit tout ce dont on a besoin, en indiquant son nom et sa chambre. […] Au fond, je crois qu’à l’heure présente il n’y a plus de courtisanes, et que tout ce qui porte ce nom, n’est que des filles.
Il est bien nommé de son petit nom : Nestor. […] Il est en extase devant le dos et le nom du volume. […] Ce monsieur ne connaît pas notre nom, n’a jamais lu un livre de nous. […] Nous demandons L’Entr’acte, et lisons et relisons les noms de nos acteurs. […] Et derrière la toile du fond, nous entendons, pendant un quart d’heure, des vociférations féroces ne pas vouloir permettre à Got de dire notre nom.
L’effet moral vraiment digne de ce nom, sur une scène élevée, doit sortir du spectacle même de la nature humaine observée et saisie dans le jeu varié de ses passions, dans ses misères et dans ses grandeurs, et jusque dans l’énergique naïveté de ses ridicules. […] Ici l’enseignement peut être plus direct et plus en relief ; le genre vertueux, pour le nommer par son vrai nom, peut être plus décidément encouragé : mais que le talent y mêle toujours le plus d’observation réelle et de vérité possible, il agrandira et passionnera ses effets.
On était aux premières années de la Restauration ; pour arrondir son nom ou pour le rendre moins rond, il l’a entouré de deux de (pardon de l’inévitable cacophonie) ; il en a fait de Genoude. […] Pour couronner le tout, sa femme étant morte, il s’est fait prêtre ; il publie toutes sortes de traductions des Pères qu’il commande à des jeunes gens et auxquelles il met son nom ; le produit de cette espèce de librairie, servie par son journal, lui a été très-fructueux.
Jetée, jeune et pauvre, dans le monde, avec sa beauté et son titre de demoiselle, exposée dès l’enfance aux persécutions des dévots, qui la convertirent à grand’peine, et plus tard chez Scarron, aux galanteries des grands seigneurs qui ne la séduisirent pas, madame de Maintenon se distingua de bonne heure, et dans tous les états, par cette prudence accomplie, cet esprit de conduite, qu’alors on regardait comme la première vertu de son sexe, et qui de nos jours est resté tant à cœur à la haute société monarchique, sous le nom presque sacré de convenance. […] Il est curieux de la voir, dans cette correspondance, protester à tout propos contre l’idée qu’on pouvait avoir de son crédit : « Je ne suis qu’une particulière assez peu importante ; je ne sais pas les affaires, on ne veut point que je m’en mêle, et je ne veux point m’en mêler. » Tantôt elle se compare avec pruderie à une ingénue de quinze ans : « Je suis un peu comme Agnès, je crois ce qu’on me dit, et ne creuse pas davantage. » Tantôt elle se vieillit avec une complaisance qui fait sourire : « Si vous me voyiez, madame, vous conviendriez, que je fais bien de me cacher : je ne vois presque plus ; j’entends encore plus mal ; on ne m’entend plus, parce que ma prononciation s’en est allée avec mes dents, la mémoire commence à s’égarer ; je ne me souviens plus des noms propres, je confonds tous les temps, et nos malheurs joints à mon âge me font pleurer comme toutes les vieilles que vous avez vues. » Sans croire tout à fait à ce renoncement absolu au monde, on est pourtant forcé de reconnaître qu’il y a dans ce langage de madame de Maintenon plus de manie que d’hypocrisie, et qu’à force de se faire, en paroles, insignifiante et inactive, elle l’était sur la fin réellement devenue.
La tolérance enfin, c’est bien un des noms de l’esprit critique : mais c’est aussi un des noms de la modestie et de la charité.
Il lui arrive quelquefois d’oublier un nom en route, le temps d’une édition nouvelle. […] Dubois-Desaulle m’affirme qu’ils sont exacts, qu’il s’est borné à transcrire, sans y rien ajouter, tout ce dont il a été le témoin ; qu’il n’a pas même déguisé le nom de ses personnages.
Paul Bourget, le nom des prédicateurs et des demoiselles en vogue, des modistes et des poètes chez qui il est élégant de se fournir. […] La supériorité intellectuelle et morale se résumait à peu près en ceci : « Mépriser la politique et aimer le théâtre. — Connaître au moins de vue et de nom les personnages de “la fête” à Paris. — N’aller déjeuner et dîner que dans les restaurants connus. — Faire semblant d’avoir tout lu. — Savoir tous les potins. — Couper les livres des auteurs qui dînent chez vous. — Dîner beaucoup en ville et aller à la messe. — Retenir d’une exposition les tableaux des gens qu’on rencontre dans le monde. — Éviter le solennel et prendre la vie à la blague. » * * * Étrange société où connaître les gens qui font « la fête » suffit pour conférer un titre d’excellence.
Ainsi, le riche réglant plus ou moins la production littéraire et artistique par son goût suffisamment connu, et ce goût étant généralement (il y a de nobles exceptions) vers la littérature frivole et l’art indigne de ce nom, il devait fatalement arriver qu’un tel état de choses avilît la littérature, l’art et la science. […] Letronne a plus gagné en faisant des livres élémentaires médiocres que par les admirables travaux qui ont illustré son nom.
Sur le bateau-torpille qui est venu, il y a quelques mois, s’amarrer au pont de Solferino, à Paris, il y avait un torpilleur du nom de Renan. […] C’est ce que je me disais, ces jours-ci à Perros, en retrouvant toute sorte de vieilles petites connaissances, des oiseaux, des fleurs poussant sur les vieux murs, dont j’avais oublié le nom, et, en particulier, ce rocher du groupe des Sept-Îles qui est, au printemps, rempli d’innombrables oiseaux de mer.
Le nom de Montmaur y est déguisé sous celui de Gomor. […] Montmaur étoit si décrié qu’on ne le désignoit plus que par les noms de cuistre, de chercheur de lipée, de sycophante, de mallebête, de loup, de porc, de tonneau.
Il les introduit sous son nom dans la grande construction française. […] « Au soir de Wagram, a le droit de dire un Bonaparte, j’étais si fatigué que je suis tombé de sommeil, que j’ai dormi couché tout de mon long dans un sillon : j’étais la semence d’une admirable moisson de dévouement, de belle volonté et d’un lyrisme jusqu’alors inconnu. » Taine parfois justifie la timidité, le repliement sur soi-même et, sous le nom d’« acceptation », certaine servilité.
Dans la suite même, quand il ne resta plus d’eux que leur nom et leurs bienfaits, et cet éclat de réputation qui agrandit tout, on en fit des dieux ; alors leur tombe fut un autel, et leurs éloges furent des hymnes. […] Les Danois qui, sous le nom de Normands, ravagèrent la moitié de l’Europe et mirent deux fois le siège devant Paris, en s’embarquant pour aller exercer leur métier de conquérants ou de pirates, ne manquaient jamais de mettre dans leurs vaisseaux, avec leurs provisions, leurs armes et leurs tonneaux de bière, quelques scaldes ou poètes pour chanter leurs succès.
En prononçant, avec les ménagements convenables, ces noms toujours un peu suspects et malsonnants, que ce nous soit une occasion d’ajouter qu’un des traits les plus marquants de l’esprit de Mlle de Meulan à ses débuts et dans les feuilletons du Publiciste où nous allons la voir, ç’a été de n’avoir aucune pruderie fausse, aucune délicatesse rechignée. […] Une femme qui a soutenu avec honneur un nom illustre, Mme de Condorcet, de quinze ans environ l’aînée de Mlle de Meulan, et qui se rattachait plus directement au monde de la Décade, tentait vers cette époque, dans ses Lettres à Cabanis sur la Sympathie, une analyse, à proprement parler philosophique, sur les divers sentiments humains. […] Elle publia vers ce temps les Enfants, contes, premier ouvrage auquel elle attacha son nom, guidée par un sentiment de responsabilité morale. […] A un endroit de cette discussion, le nom et l’autorité de Turgot sont invoqués, et l’on sent comment les prédilections de l’auteur reviennent encore et s’appuient par un bout au XVIIIe siècle, mais relevées et agrandies. […] Voilà pourquoi je ne puis plus soutenir au spectacle, ou dans les romans, ou dans les poëmes, sous les noms de Tancrède, ou de Zaïre, ou d’Othello, ou de Delphine, n’importe, la vue des grandes douleurs de l’âme ou de la destinée.
Saint-Sulpice doit son origine à un homme dont le nom n’est point arrivé à la grande célébrité ; car la célébrité va rarement chercher ceux qui ont fait profession de fuir la gloire et dont la qualité dominante a été la modestie. […] II Ainsi que je l’ai déjà dit, les deux années de philosophie qui servent d’introduction à la théologie ne se font pas à Paris : elles se font à la maison de campagne d’Issy, située dans le village de ce nom, un peu au-delà des dernières maisons de Vaugirard. […] Ce nom vient de ce que le livre fit partie d’un cours complet d’études ecclésiastiques rédigé il y a une centaine d’années par l’ordre de M. de Montazet, l’archevêque janséniste de Lyon. […] Il évitait en général de prononcer son nom. […] Il me faisait souvent envisager ce qu’une telle carrière a d’honorable, et plus d’une fois il prononça le nom de l’École normale.
Ce poème, connu aussi sous le nom de Lohengrin, termine en quelque sorte le cycle du Saint-Gral : de plus, il relie la « matière de Bretagne » à la « matière de France » pour parler comme nos trouvères, par le lieu où se passe l’aventure et les versions diverses qui l’ont rattachée dans la suite au cycle de Charlemagne. […] Ces deux faits d’histoire ne contribuèrent pas peu à lui rendre sa couleur méridionale, à faire réapparaître, dans les récits merveilleux des poètes, des noms et des personnages empruntés à l’Orient. […] La version française méridionale est contenue dans le Titurel ; elle diffère beaucoup de celle adoptée par Wagner, et la Question n’y porte pas sur le nom du héros, mais sur son origine22. […] Néanmoins, le seul fait d’avoir joué exactement ce que Wagner voulait est un titre incomparable de gloire pour un artiste, et les noms de Mmes Materna et Malten, de Schnorr, Gudchus, Scaria et de tant d’autres deviendront plus célèbres, par le seul fait que ceux qui les portaient ont préféré obéir à un maître, que ceux qui essayent de se donner un renom particulier, et suivant l’ignoble argot du cabotinage, de tirer à eux la couverture. […] Son nom prononcé l’a frappé d’une surprise, comme si un souvenir vague remontait dans son esprit.
Un drame, même quand il nous peint des passions ou des vices qui portent un nom, les incorpore si bien au personnage que leurs noms s’oublient, que leurs caractères généraux s’effacent, et que nous ne pensons plus du tout à eux, mais à la personne qui les absorbe ; c’est pourquoi le titre d’un drame ne peut guère être qu’un nom propre. Au contraire, beaucoup de comédies portent un nom commun : l’Avare, le Joueur, etc. […] Pour citer encore une fois Pascal, nous définirons volontiers ici la marche de l’esprit par la courbe que ce géomètre étudia sous le nom de roulette, la courbe que décrit un point de la circonférence d’une roue quand la voiture avance en ligne droite : ce point tourne comme la roue, mais il avance aussi comme la voiture. […] Et enfin l’admiration de la machine administrative pourrait, à la rigueur, aller jusqu’à nous faire croire que rien n’est changé au préfet quand il change de nom, et que la fonction s’accomplit indépendamment du fonctionnaire.
Le Panuphtius de la poétesse saxonne est un bon copte du nom de Paphnuti, que M. […] Il a des kyrielles prodigieuses de noms et d’adjectifs. […] Mais le bon saint n’est point sans rancune, et il venge les offenses faites à son nom. […] C’est un grand soulagement que de changer de temps à autre le nom de l’inconnaissable. […] Son sentiment pour celle à qui nous laissons le nom de Béatrice dura après la séparation.
Ce nom est sacré, et, pour réduire le peuple à tout ce qu’on souhaite, il suffit de dire : Le roi le veut. […] A peine s’il en connaît de nom deux ou trois ; encore faut-il pour cela qu’il soit un homme instruit, éclairé. […] J’interrompis l’architecte pour lui demander le nom de cet oiseau. […] Je dois à Dieu et à mon nom d’être le plus honnête homme que je pourrai. […] … Qu’est-ce que perdre un nom, et qu’est-ce qu’un nom à présent ?
L’art de lire les bons livres serait son vrai nom. […] Le nom de Dumas ne périra pas. […] Aussi ne s’en cachait-il pas, et il disait volontiers le nom de ses collaborateurs. […] Il ne prend aux personnages de l’histoire que leur nom. […] Claretie est celle du caractère de Madeleine Bertin, qui donne son nom à l’œuvre.
le nom de philosophe n’est déjà que trop odieux, avec quelque modestie qu’on le porte ! […] En effet, quoi de plus doux que de croire qu’on enrichira sa nation d’un grand nom de plus ? […] Si ces calomniateurs des gens de bien n’étaient pas étrangers à tout sentiment honnête, ils rougiraient de placer ce nom justement décrié, à côté des noms les plus respectables et les plus respectés. […] » Quoi de plus sensé que ce qui suit : « Qu’est-ce que ces noms d’empereur, de sénateur, de questeur, de chevalier, d’affranchi, d’esclave… ? […] Lorsque j’en verrai qui se seront fait un nom dans la magistrature (chap.XIX), au barreau, loin de croire qu’ils ont perdu leurs années pour qu’une seule portât leur nom, je serai désolé de n’en pouvoir compter une aussi belle dans toute ma vie.
Il y a plus d’une façon de laisser une œuvre durable, un nom immortel. […] Seuls en usurpant votre nom qu’ils profanent, seuls les hommes sont coupables. […] Comment comprendre que, jusque vers 1832, le peuple français eût oublié le nom même de la République ? que ce nom magique n’eût suscité ni les résistances de 1815, ni les complots de la Restauration ? […] Sous le nom de Consulat, sous l’étiquette de la République, sévit déjà le despotisme.
On se plaint, et depuis assez de temps, qu’il ne s’élève point dans le champ de l’imagination et de l’invention proprement dite d’œuvre nouvelle, de talent nouveau du premier ordre, qui prenne aussitôt son rang et se fasse reconnaître à des signes éclatants, incontestables ; on ne saurait faire entendre cette plainte dans le monde de l’érudition et de la critique ; elle serait injuste, et l’on aurait à l’instant à vous répondre en vous citant des noms qui se sont produits depuis ces dix ou douze dernières années et qui ont acquis dès leur début une célébrité véritable. […] Renan avait reçu notamment une très vile impression des idées et des vues de Herder ; cette espèce de christianisme ou de fonds religieux supérieur, qui admet toutes les recherches, toutes les conséquences de la critique et de l’examen, et qui, avec cela, laisse subsister le respect, même l’enthousiasme ; qui le conserve et le sauve en le transférant en quelque sorte du dogme à l’histoire, à la production complexe et vivante, le rasséréna et le tranquillisa beaucoup ; il sentait que, s’il eût vécu en Allemagne, il eût pu trouver des stations propices à une étude indépendante et respectueuse, sans devoir rompre absolument avec des choses ou des noms vénérables, et à l’aide d’une sorte de confusion heureuse de la poésie avec la religion du passé. […] Certes, l’homme qui s’exprime ainsi n’est pas irréligieux : il me paraîtrait même conserver et introduire dans sa conclusion dernière une légère part de mysticisme ou d’indéterminé sous le nom d’idéal ; et je serais plutôt tenté, quand je considère l’histoire du monde, la vanité de notre expérience, la variété et le recommencement perpétuel de nos sottises ; quand je viens à me représenter combien de lacunes en effet dans ce cabinet des types et échantillons qu’il appelle magnifiquement la conscience du genre humain, combien de pertes irréparables et que de hasard dans ce qui a péri et ce qui s’est conservé, combien d’arbitraire et de caprice dans le classement de ce qui reste, et que ce restant dont nous sommes si fiers, si l’on excepte les tout derniers siècles qui nous encombrent, et dont, nous regorgeons, n’est, en définitive, qu’un trésor composé d’épaves comme après un naufrage ; — quand je me représente toutes ces interruptions, ces oublis, ces brusqueries et ces croquis de souvenirs, ces ignorances complètes ou ces à-peu-près, et à vrai dire, ces quiproquos qui ne sauraient pourtant revenir tout à fait au même, — je serais, je l’avoue, plutôt tenté de trouver que M.
Ce qu’on sait mieux, c’est qu’à partir de cette rédaction sous Pisistrate, de nombreux travaux sont venus ordonner de plus en plus, resserrer, éclaircir et aussi polir dans le détail l’œuvre du poëte, en simplifier peut-être les contours, en faire mieux saillir le dessin, en rendre surtout plus nettes les épreuves et le texte même, jusqu’à ce qu’enfin l’œuvre soit sortie telle que nous la possédons, aussi parfaite et divine qu’on la pouvait désirer, des mains du plus grand des critiques, de celui dont le nom est devenu comme celui d’Homère un immortel symbole de perfection et de louange, — des mains d’Aristarque. […] Au cinquième chant, par exemple, le chef des Paphlagoniens Pylæmenès a été tué, et l’on retrouve au chant treizième un guerrier du même nom suivant tout en pleurs le corps de son fils. […] night (c’est le nom du hasardeux reconstructeur) a mis d’ailleurs en tète de son Homère d’ingénieux et intéressants Prolégomènes, où il donne les vrais arguments pour l’unité de composition de l’Iliade et de l’Odyssée.
Si Corneille en personne se fût adressé à Voltaire, il n’eût pas, certes, plus dignement parlé que Le Brun ne l’a fait en son nom. […] Nous dirons un mot des élégies de Le Brun, parce que c’est pour nous une occasion de parler d’André Chénier, dont le nom est sur nos lèvres depuis le commencement de cet article, et auquel nous aspirons, comme à une source vive et fraîche dans la brûlante aridité du désert. […] Les amours de Le Brun avec la femme qu’il a célébrée sous le nom d’Adélaïde se rapportent précisément au temps dont nous parlons.
Il a causé avec une comtesse poitevine, « assez jeune et de taille raisonnable », qui avait de l’esprit, déguisait son nom et venait de plaider en séparation contre son mari, « toutes qualités de bon augure ; j’y aurais trouvé quelque sujet de cajolerie, si la beauté s’y fût rencontrée. […] Il donna à ses amis, à Pintrel, à Maucroix, le seul bien qu’il eût, tout ce qu’il pouvait donner, c’est-à-dire son temps et sa gloire, traduisant des vers pour eux, mettant son nom à côté du leur pour qu’on lût leurs ouvrages. […] On se rappelle le jour où, par hasard, ayant lu Baruch, il aborda tout le monde avec ce nom sur les lèvres.
Avec la même indifférence, il semait de ses pages dans les livres de ses amis : un traité de clavecin de Bemetzrieder, une histoire de l’abbé Raynal, une gazette de Grimm, tout lui était bon ; l’essentiel, pour lui, c’était d’écrire ; y mettre son nom n’aurait rien ajouté à son plaisir ! […] Il n’existe pas pour nom ; si nous disons un peu imprudemment qu’il n’existe pas du tout, il n’y a pas grand mal à cela. […] Elle n’est qu’une institution sociale, d’autant plus haïssable que sa contrainte hypocrite s’exerce par le dedans : sous le nom de morale, on instruit les enfants à s’interdire les plaisirs légitimes qui résultent des fonctions naturelles.
Il restera une foule de ces vers admirables qui n’empêchent pas les poèmes d’être médiocres, et qui sont les dernières fleurs dont se parent les poésies mourantes ; il restera le souvenir de grandes facultés poétiques, supérieures à ce qui en sera sorti ; il restera le nom harmonieux et sonore d’un poète auquel son siècle aura été trop doux et la gloire trop facile, et en qui ses contemporains auront trop aimé leurs propres défauts. […] L’épithète, chez lui, faite de grâce on d’éclat, sans rigide précision, semblait jetée négligemment sur le nom comme une parure légère ou somptueuse flottant au vent de l’inspiration. […] Aucun de ces disciples n’a laissé un nom ni gardé une physionomie distincte à côté du maître.
Ce seroit ici le lieu de peindre l’ivresse qui pénetre son ame, lorsqu’aux acclamations des Citoyens satisfaits, la gloire aux aîles brillantes, descend sur sa tête la couronne qu’il a méritée ; lorsqu’un Peuple éclairé & sensible lui prodigue ces applaudissemens qui font pâlir l’Envie ; lorsque la reconnoissance multiplie son nom dans toutes les bouches, & que plus heureux encore il voit la flamme généreuse qui embrâse ses écrits se répandre dans tous les cœurs, & qu’ils se remplissent des principes vertueux qu’il a établis pour le bonheur des hommes. […] Que ne puis-je placer ici les noms de ces Ecrivains non moins distingués par leurs vertus que par leurs talens ? […] Que ces têtes étroites, ces ames mal nées indifférentes sur l’intérêt général, concentrées dans leurs petits intérêts ne voyent que ce qui les blesse, vous hommes de Lettres & dignes de ce nom, vous ne profanerez point une plume qui ne doit être consacrée qu’au bien public, en la faisant servir à l’orgueil d’immoler un rival ; c’est à vous de donner l’exemple de ce généreux désintéressement, de cette impartialité qu’on est en droit d’attendre de vous, & que vous exigeriez pour vous même..
Parmi les géomètres allemands de ce siècle, deux noms surtout sont illustres ; ce sont ceux des deux savants qui ont fondé la théorie générale des fonctions, Weierstrass et Riemann. […] Non ; le nom que lui donnent les mathématiciens suffirait pour le prouver. […] Les noms que j’ai cités tout à l’heure me dispensent d’insister.
La pratique fondamentale qui donnait à la secte de Jean son caractère, et qui lui a valu son nom, a toujours eu son centre dans la basse Chaldée et y constitue une religion qui s’est perpétuée jusqu’à nos jours. […] Robinson (Biblical Researches, I, 494 ; II, 206) a retrouvé cette Jutta portant encore le même nom, à deux petites heures au sud d’Hébron. […] Le verbe araméen seba, origine du nom des Sabiens, est synonyme de [Greek : baptizô].
Les plantations d’oliviers, de figuiers, de palmiers y étaient nombreuses et donnaient leurs noms aux villages, fermes ou enclos de Bethphagé, Gethsémani, Béthanie 953. […] Les brebis entendent sa voix ; il les appelle par leur nom et les mène aux pâturages ; il marche devant elles, et les brebis le suivent, parce qu’elles connaissent sa voix. […] Aujourd’hui El-Azirié (de El-Azir, nom arabe de Lazare) ; dans des textes chrétiens du moyen âge, Lazarium.
On faisait mystère du nom du père ; on voulait que l’éducation fût secrète. […] Un directeur était un parasite, « jaloux d’obtenir le secret des familles, aimant à trouver les portes ouvertes dans les maisons des grands, à manger souvent à de bonnes tables, à se promener en carrosse dans une grande ville, et à faire de délicieuses retraites à la campagne, à voir plusieurs personnes de nom et de distinction s’intéresser à sa vie, à sa santé, et à ménager pour les autres et pour lui-même tous les intérêts humains…, couvrant tous les intérêts du soucieux et irrépréhensible prétexte du soin des âmes ». […] Il s’était fait un nom par sa sévérité.
Il hésite à prononcer tout haut le nom illustre de son père, ce nom qui était le sien : Virgile, qui d’Homère apprit à nous charmer, Boileau, Corneille, et Toi que je n’ose nommer, Vos esprits n’étaient-ils qu’étincelle légère ? […] Cette rhétorique, qu’on ne saurait plus confondre avec la poésie sans profaner ce dernier nom, se marque par une singulière habitude et comme par un tic qui finit par devenir fatigant.
On commande à un groupe d’hommes déjà considérable, mais jouissant encore d’une parfaite unité, qu’on tient tout entier dans sa main et sous son regard, dont on peut connaître chacun par son nom, en le suivant jour par jour dans ses actes. […] C’était là ma véritable souffrance, ou, pour mieux dire, la seule ; car je n’appelle pas de ce nom la faim, le froid et la fatigue. […] Là aussi, pour consoler des scènes contristantes, on vit chez quelques-uns le courage et l’honneur briller d’un plus vif éclat au plus fort de la détresse ; on vit de ces jeunes officiers humains, généreux, compatissants autant que braves, et à la fois dignes de l’éloge qui a été accordé à l’un d’eux, à ce jeune Hippolyte de Seytres, dont une amitié éloquente a consacré le nom : « Modéré jusque dans la guerre, ton esprit ne perdit jamais sa douceur et son agrément !
Elle comprend elle-même plusieurs organes distincts, dont la description serait trop compliquée, et dont il suffira de connaître les noms. […] Dans le sens propre, il désigne cette portion de l’encéphale qui remplit la plus grande partie de la cavité crânienne, et qui est distincte du cervelet, de la moelle allongée et de ses annexes ; il est le renflement le plus considérable formé par l’axe médullo-encéphalique : sa forme est celle d’un ovoïde irrégulier, plus renflé vers le milieu de sa longueur, et il se compose de deux moitiés désignées sous le nom d’hémisphères, réunies entre elles par un noyau central que l’on appelle le corps calleux. […] La partie grise en enveloppe la partie blanche, et forme comme l’écorce du cerveau ; de là le nom de substance grise ou substance corticale.
Pour appeler les choses par leur nom, le positivisme n’est autre chose que le matérialisme et l’athéisme, acceptés plus ou moins explicitement. […] De l’unité de la vérité, il conclut à l’unité de l’être ; il confond l’idée et la réalité, la science et l’existence, et abolit tous les êtres en les concentrant dans un seul, lequel n’est plus qu’une notion impersonnelle, un nom stérile qui tombe à son tour dans le néant. […] Guizot, qui n’a pas craint de défendre en beaucoup de circonstances la cause de l’Église catholique, se croit aussi le droit de signaler dans la conduite de cette Église ce qu’il appelle « un certain manque de clairvoyance religieuse autant que de prudence politique », et il reconnaît que, « tant que le gouvernement de l’Église n’aura pas accepté et accompli cette œuvre de conciliation, les amis de la liberté auront sujet et raison de se tenir envers ce gouvernement dans une réserve vigilante, au nom des principes moraux et libéraux qu’il désavoue. » Cette défiance toutefois n’est autorisée qu’envers une seule Église.
Ils ne conserveraient le nom de temps que parce que le premier de la série, à savoir OB, mesurait la durée psychologique de l’observateur en S. […] Conservez-leur le nom de temps, je le veux bien : ce seront, par définition, des Temps conventionnels, puisqu’ils ne mesurent aucune durée réelle ou possible. […] Pourquoi la première des lignes de lumière, OB, est-elle collée par l’observateur en S contre sa durée psychologique, communiquant alors aux lignes successives O₁B₁, O₂B₂ …, etc., le nom et l’apparence du temps, par une espèce de contamination ?
En fait, leur état est une forme mitigée de ce cas morbide que nous étudierons plus loin sous le nom d’idée fixe. […] Nous désignerons ce groupe, par opposition à l’autre, sous le nom d’atrophie de l’attention. […] On leur a donné divers noms suivant leur caractère prédominant. […] La forme interrogative qui lui est propre l’a fait désigner sous le nom de Fragetrieb. […] Que de noms chacun de nous oublie, et il n’en a cure !
Elle mettra en scène, sous des noms d’emprunt ou sous leur véritable nom, les hommes publics les plus en vue. […] Car voici « la pièce moderne » ; mi-partie drame, mi-partie comédie, on ne saurait lui donner un nom plus précis. […] L’art dramatique qui se cherche est condamné à la dispersion, en raison même d’une complexité qui pourrait porter le nom d’anarchie. […] Imaginez une littérature dramatique digne de ce nom, populaire et chrétienne, prenant soudain — ou lentement, car il faudra compter avec des résistances, — la place occupée depuis des siècles par des insanités et des médiocrités sans nom. […] D’autres, même, m’ont précédé dont j’ignorais les remarquables tentatives : retenez le nom de René Des Granges.
Le seul technicien qui tire son nom de l’acte créateur pur, ποιειν, c’est le Poète. […] Non ce hasard organique animé et divinisé sous le nom d’inspiration et de délire, mais un hasard mathématique, mécanique. […] Le nom même qui le désigne est aussi le nom, parmi nous, de la raison et du calcul ; un seul mot dit ces trois choses. » Les paroles les plus simples sont les nombres. […] Mais la vue soutient difficilement cette lumière de poésie pure, cette lumière intense qui mérite si peu le nom de clarté diffuse. […] (Avais-je tort de rappeler ici en sourdine le nom et l’effort philosophique analogues de M.
Pierre Les meilleurs académiciens sont donc ceux dont on ne se rappelle jamais le nom ? […] René Doumic a purement et simplement exclu de son Manuel de Littérature le nom même de Baudelaire. […] Paul Ceux qui n’ont pas de prétentions sont très supportables et méritent à peine ce nom. […] Doumic n’osait même pas imprimer dans son Manuel de littérature française ce nom qui faisait scandale. […] C’est la première fois que je vois son nom.
C’était Lucien Bonaparte, dont le nom répondait autant à la République qu’à l’Empire, caractère à deux aspects des hommes de deux dates, la République et l’Empire. […] Sa taille était élégante ; sa tête, dégagée de ses épaules minces, semblait s’incliner de peur d’humilier la foule ; son œil était limpide, sa bouche ferme ; sa physionomie intéressait avant qu’on eût appris son nom ; il y avait dans ses traits cette dignité qui survit aux éclipses du sort. […] L’histoire doit conserver les noms de ces rares patrons du génie de Robert : M. […] Un jeune et héroïque étranger, d’un grand nom, exilé comme elle de sa patrie et errant en Italie, comme elle, après l’ombre de la liberté, avait son amour. […] Son corps est indiqué au passant par une simple pierre où ses amis ont gravé son nom.
— Voilà un nom de vrai grand homme ! […] Il lui fallait, pour comprendre sa valeur, un gouvernement dictatorial assis sur la popularité d’un nom indiscutable, et pouvant tout oser. […] Il a un nom aussi drôle que celui du docteur. […] Il y a d’ailleurs d’innombrables difficultés à vaincre pour aborder n’importe quelle scène, et je n’ai pas le loisir de jouer des jambes et des coudes ; un chef-d’œuvre seul, et mon nom m’en ouvriraient les portes ; mais je n’en suis pas encore aux chefs-d’œuvre. […] Sa veuve avait acheté sur la route de Fontainebleau une belle colline boisée à Villeneuve-le-Roi, au sommet de laquelle elle habite avec l’ombre de son mari, un grand nom qui grandira sans cesse.
Quelle loterie des carrières, des fortunes et des noms à la sortie ; ça a quelque chose de semblable aux fusées des bouquets de feux d’artifice, qui, parties ensemble, crèvent presque aussitôt, ou montent, en volant, jusqu’au haut du ciel. […] Il décrit le soulier de satin blanc, qui, pour chacune d’elles, est soutenu par un petit matelassage de soie dans les endroits où la danseuse sent qu’elle pèse et appuie davantage : matelassage qui indiquerait à un expert le nom de la danseuse. […] reprenait-il, c’est peut-être le pain sur la planche qui m’a manqué, pour être un des quatre grands noms du siècle… Pourquoi n’aurais-je pas atteint Hugo ? […] Et on a rabâché sur la contagion de leur corruption, l’imitation et les plagiats de leurs modes, et on a cité les noms des femmes de la société qui rivalisent avec elles. […] Il nous écrit qu’il la reçoit sur notre nom, sans la lire, et nous donne rendez-vous pour lundi, afin de distribuer immédiatement les rôles.
Ces noms que nous venons de dire, et ceux que nous aurions pu ajouter, redites-les. […] Quant à la cité bâtie par lui, il murmure au-dessus d’elle ce nom mystérieux : JEHOVAH SCHAMMAH, qui signifie : l’Éternel-Est-Là. […] Les génies recommençants, c’est le nom qui leur convient, surgissent à toutes les crises décisives de l’humanité ; ils résument les phases et complètent les révolutions. […] Les brahmes ont eu beau, comme nos prêtres, raturer et intercaler, Zoroastre y est, l’Ized Serosch y est, l’Eschem des traditions mazdéennes y transparaît sous le nom de Siva, le manichéisme y est distinct entre Brahma et Bouddha. […] L’auteur de Tout y ajoute un nom quand les besoins du progrès l’exigent.
Tout nombre est un, en effet, puisqu’on se le représente par une intuition simple de l’esprit et qu’on lui donne un nom ; mais cette unité est celle d’une somme ; elle embrasse une multiplicité de parties qu’on peut considérer isolément. […] Tous les jours j’aperçois les mêmes maisons, et comme je sais que ce sont les mêmes objets, je les désigne constamment par le même nom, et je m’imagine aussi qu’elles m’apparaissent toujours de la même manière. […] Pourtant je donne encore le même nom à la sensation éprouvée, et je parle comme si, le parfum et la saveur étant demeurés identiques, mes goûts seuls avaient changé. Je solidifie donc encore cette sensation ; et lorsque sa mobilité acquiert une telle évidence qu’il me devient impossible de la méconnaître, j’extrais cette mobilité pour lui donner un nom à part et la solidifier à son tour sous forme de goût. […] Tout à l’heure chacun d’eux empruntait une indéfinissable coloration au milieu où il était placé : le voici décoloré, et tout prêt à recevoir un nom.
Son nom ne cache aucun groupe. […] Le nom de M. […] et ses vers philosophiques ne sont faits que de noms propres […] Mallarmé aux noms de ceux qui nous ont donné des livres. […] Nulle doctrine, d’ailleurs ; d’abord le nom de M.
Aussi désigne-t-on ces faits sous le nom d’états de conscience. […] Mais le plus grand génie qui y ait attaché son nom est Leibniz. […] Elle prend alors le nom de fantaisie. […] Son nom suffit à la définir. […] On distingue quelquefois sous le nom de proposition singulière une variété des propositions universelles, celle où le sujet est un nom propre.
En revanche, quand nous disons une sottise, notre nom y reste attaché pour l’éternité. […] Son vrai nom, c’est roman dramatique. […] Le nom de vertu était réservé pour autre chose. […] Pour nous faire un beau nom, pour éblouir les gens, Nous usons de moyens tout à fait différents. […] En latin comme en grec, comme en métaphysique, Mon nom fut sans rival et mon succès unique !
L’une de ces deux petites villes a un grand nom, et porte toujours dans l’esprit une grande idée : il n’en faut pas davantage pour anoblir les Horaces et les Curiaces. […] Le fils demande le nom de l’offenseur. […] Racine n’avait rien écrit : on crut Fontenelle, appuyé du grand nom de son oncle. […] Voyez ceux de la déclaration de Pluton à Proserpine, dans l’opéra de ce nom. […] Cette dernière déclamation porte le nom d’air ; la première a été appelée le récitatif.
Dans les conférences académiques, chacun devait rendre compte des anciens auteurs qu’il avait lus ; et même chaque académicien prenait le nom de celui de ces anciens auteurs pour lequel il avait le plus de goût, ou de quelque personnage célèbre de l’antiquité. […] Ce fait peut servir à relever la méprise de quelques écrivains modernes, qui rapportent que ce fut pour se conformer au goût général des savants de son siècle, qui étaient grands admirateurs des noms romains, qu’Alcuin prit celui de Flaccus Albinus. […] Il y en a peu en Angleterre ; la principale et celle qui mérite le plus d’attention, est celle que nous connaissons sous le nom de Société royale, et on peut y joindre la Société d’Édimbourg. […] On donne à ces discours le nom d’amplifications ; nom très convenable en effet, puisqu’ils consistent, pour l’ordinaire, à noyer dans deux feuilles de verbiage ce qu’on pourrait et ce qu’on devrait dire en deux lignes. […] Mais il s’en faut bien que celle des collèges mérite ce nom : elle ouvre pour l’ordinaire par un compendium, qui est, si on peut parler ainsi, le rendez-vous d’une infinité de questions inutiles sur l’existence de la philosophie, sur la philosophie d’Adam, etc.
Quel homme, digne du nom d’artiste, et quel amateur véritable a jamais confondu l’art avec l’industrie ? […] Legros, mais j’avouerai que je n’avais encore vu aucune production signée de son nom. […] quelle splendeur de soleil couché le nom de cet homme jette dans l’imagination ! […] Presque le même peintre, presque le même nom. […] Je me garderai bien de citer ces noms ; la victime se sentirait peut-être aussi offensée que l’usurpateur.
Je reviens au cardinal de Bernis que je n’avais pas songé d’abord à prendre si politiquement, ni d’une manière si grave ; je reviens au caractère général qui m’avait d’abord attiré vers sa personne et dont je ne me laisserai plus détourner même par les grandes affaires et les controverses très vives où son nom se trouve mêlé. […] Le nom de Richelieu revient quelquefois sous la plume de Voltaire comme une flatterie indirecte : « Ah ! […] D’après cela, tout Français qui peut se réclamer de Son Éminence, dans quelque circonstance que ce soit, à son nom seul est respecté. La Garde s’ouvre dans les cérémonies ; le barigel (lieutenant de police), ses officiers, les sbires s’arrêtent à son nom et lâchent plutôt prise que d’aller se compromettre sous sa juridiction.
Faideau (un de ces vieux docteurs) est mort il y a trois ans, mais je n’ai que faire de ses registres : j’ai une copie des noms et surnoms de tous les licenciés et docteurs, selon qu’ils ont passé par ordre en notre école depuis plus de trois cents ans, avec tout ce qui s’est passé de mémorable dans notre Faculté. […] Pour bien faire la médecine, pensait-il, il ne faut guère de remèdes, et encore moins de compositions, la quantité desquelles est inutile et plus propre à entretenir la forfanterie des Arabes, au profit des apothicaires, qu’a soulager des malades… Je rends la pharmacie le plus populaire qu’il m’est possible… Il cite les noms de plusieurs de ses confrères comme ayant introduit dans les familles de Paris « une médecine facile et familière, qui les a délivrées de la tyrannie de ces cuisiniers arabesques ». […] De là des colères, des injures sans nom, et des procès dont il ne put sortir qu’à ses dépens. […] Dans les raisons alléguées par la Faculté, par ceux qui écrivent en son nom, et par Gui Patin en particulier, contre Renaudot, et pour preuve de son incapacité et de son indignité à pratiquer la médecine, ce qui tient la première place, c’est le trafic et négociation qu’il fait « à vendre des gazettes, à enregistrer des valets, des terres, des maisons, des gardes de malades, à exercer une friperie, prêter argent sur gages, et autres choses indignes de la dignité et de l’emploi d’un médecin.
Marivaux a donné la dénomination à un genre, et son nom est devenu synonyme d’une certaine manière : cela seul prouverait à quel point il y a insisté et réussi. […] On est souvent trompé sans mériter le nom de dupe. […] C’est ainsi qu’en se couvrant du nom de La Rochefoucauld, Marivaux présente sa propre défense ; il cite encore Montaigne, le grand exemple cher aux novateurs, comme un des écrivains dont les critiques de 1725 eussent chicané le style : « Car il ne parlait ni français, ni allemand, ni breton, ni suisse : il pensait, il s’exprimait au gré d’une âme singulière et fine. » Et La Bruyère, n’est-il pas tout plein de singularités ? […] Bref, Mme de Miran (c’est le nom de cette dame) s’intéresse à elle, et quand Marianne, l’instant d’après, a l’idée de s’adresser à la prieure, elle trouve déjà quelqu’un qui est tout disposé à la recommander et à l’appuyer.
À Paray, où elle poursuivait de préférence son travail, elle ne trouvait aucun secours ; le curé du village n’était pas capable de la diriger, ni même de l’entendre : Je lui demandais un jour ce qu’il pensait des Pères apostoliques ; il n’en pensait absolument rien, ne sachant pas même leurs noms. […] Il y a deux choses qui surprennent dans sa vie intime (de M. de Tracy) : c’est d’avoir inventé une contredanse à laquelle il donna son nom lorsqu’il était un beau danseur aux bals de la reine et l’élégant colonel du régiment de Penthièvre, et d’avoir bien longtemps après bâti une église avec les débris d’une grosse tour qu’il fit abattre. […] Je parle au point de vue du public, et je ne doute pas que de ces trois volumes qui sont presque inédits on n’en pût tirer un qui plairait à tout le monde, et qui placerait à un bon rang dans notre littérature morale le nom de Mme de Tracy. […] La Jeune Captive célébrée par André Chénier n’était ni la marquise de Coigny, née de Conflans, ni sa fille la comtesse Sébastiani, mais, bien Mlle Aimée de Coigny, qui fut duchesse de Fleury et qui épousa depuis M. de Montrond ; elle avait repris son nom de famille, et elle n’en portait pas d’autre quand elle mourut le 17 janvier 1820.
Il y a enfin celles qu’il faut bien appeler par leur nom, les filles entretenues, une des productions singulières et développées du xviiie siècle. […] La maréchale duchesse de Luxembourg était fille du duc de Villeroy et petite-fille du maréchal de ce nom, ami de Louis XIV. […] » On a raconté diversement l’historiette, et selon d’autres, c’était le nom d’Oreste qui aurait été mal orthographié, et Voltaire aurait répondu : « Madame la duchesse, on n’écrit pas Oreste par un h. […] Grâce à elle et malgré les souvenirs de licencieuse jeunesse qui se rattachaient à son nom, qui se chantonnaient encore à voix basse à la cantonade, qui ne nuisaient en rien cependant à sa considération dernière, et qui peut-être, auprès de générations très-gâtées, y aidaient plutôt (car on la savait d’une expérience suprême), grâce donc à la maréchale de Luxembourg, l’ancienne société, l’ancien salon français resta jusqu’à la fin marqué d’un caractère propre et unique pour l’excellence du ton.
Par une sorte de prédestination qui s’accusait même dans les noms, il avait fait ses premières études chez les Pères de la doctrine chrétienne, autrement dits Doctrinaires. […] Il répondit un jour à l’un d’eux44 qui, dans une discussion, l’appelait emphatiquement son maître : « Il y a longtemps, Monsieur, que je l’ai été. » Le nom de M. […] Elle n’avait fait jusqu’alors, par ses motions trop zélées et intempestives, qu’impatienter Louis XVIII : mais quand elle voulut lui forcer la main, non-seulement une première, mais une seconde fois, sur cet article capital, et empiéter trop à découvert, par voie d’amendement, sur l’initiative et la prérogative royale, elle le blessa : une légère rougeur lui monta à la joue en apprenant un dernier rejet opiniâtre et la substitution d’un nouveau projet à celui qu’on avait présenté derechef en son nom : « Eh bien ! […] Cette Rome dont la puissance a traversé tant de siècles. qui a tenu si longtemps le sceptre du monde, à quelle cause faut-il attribuer sa prodigieuse durée, si ce n’est peut-être à l’audacieuse, mais admirable confiance qui lui inspira de se saluer elle-même du nom de Ville éternelle ?
Bouchu se trouvait dans la chambre du roi au moment où Louis XIV, dans son cabinet, déclara les nouveaux maréchaux, et les personnes qui étaient dans la chambre, c’est-à-dire dans la pièce voisine, en eurent la première nouvelle : ce fut l’archevêque de Paris, M. de Harlay, qui, sortant du cabinet, le dit à Bouchu, et le pria de mander à Catinat cette circonstance que le roi, en lisant au Père de La Chaise et à lui archevêque la liste des sept nouveaux maréchaux, avait dit, en répétant le nom de Catinat : « C’est bien la vertu couronnée ! […] Mme Pucelle, la mère du célèbre abbé de ce nom, méritait-elle donc qu’on lui appliquât le mot de La Fontaine : Rien ne pèse tant qu’un secret : Le porter loin est difficile aux dames. […] » Dans la quantité de félicitations qu’il reçoit, il faut distinguer celles de l’abbé de Fénelon, non archevêque encore : « Je viens de lui faire réponse à une lettre toute des plus obligeantes qu’il m’a fait l’honneur de m’écrire, où ton nom est mêlé : il paraît bien qu’il t’aime ou pour mieux dire, qu’il te chérit. » Croisilles, fort pieux et d’une piété tendre, était un des fils spirituels de Fénelon. On distingue aussi ce que Catinat dit de Vauban ; ce grand homme de bien dont on aime à unir le nom avec le sien l’avait félicité de l’honneur auquel il était promu, et Catinat l’en avait remercié en exprimant l’espérance d’une réciprocité prochaine.
C’était un pasteur du nom de Manuel, qui, dans sa jeunesse, avait habité Francfort, et qui possédait son Allemagne comme d’autres possèdent leur Paris. […] Deschanel, et un homme de beaucoup de mérite, qui, dans une situation plus ou moins analogue à la sienne, est resté sombre, triste dans sa critique, amer aux personnes, souvent injuste et sujet aux préventions, appliqué à éviter certains noms et à en chercher d’autres, affecté d’une sorte de préoccupation constante en écrivant. […] C’est un excellent vulgarisateur, sans prétention, et qui se plaît à parler moins en son nom qu’avec l’esprit et les paroles des autres. […] Je me réservais, dans cette réimpression, de mettre le nom de la personne à laquelle j’avais songé par contraste ; mais je ne le ferai point, et par une très bonne raison : c’est que le portrait a cessé pour moi d’être exact et ressemblant.
76, de dix ans plus jeune que Franceschi, courait en toute hâte la même carrière, car ils semblaient tous, alors, pressés de se signaler, d’immortaliser leur nom et de mourir. […] Prisonnier par accident, enlevé par une guérilla, enfermé, frappé de langueur, mourant après seize mois de misère sur un lit d’agonie, il ne parvenait point à apprendre distinctement son nom à la France et à l’histoire. […] Le voilà donc général de brigade au lendemain d’Austerlitz ; tout lui a souri jusqu’ici : il a forcé l’entrée de la grande carrière ; il est au premier rang des émules dans cette arme d’avant-garde qui cite avec orgueil les noms des Conflans, des Ziethen, parmi les maîtres du genre et les héros du passé, et qui, après le brave Stengel, légué par l’ancien régime à l’armée d’Italie77, a déjà sa pléiade nouvelle, les Murât, les Kellermann, les Lasalle, les Colbert… Pourquoi, comme eux, n’arriverait-il pas à la gloire ? […] Le père était probablement Piémontais, mais si peu lettré qu’il ne savait pas même comment son nom devait être écrit suivant l’orthographe italienne.
La pension où il fut placé le laissait jouir d’une certaine liberté ; l’éducation, ou ce qui s’affichait alors sous ce nom, était un confus mélange où les restes informes des anciennes connaissances s’amalgamaient à des fragments de préceptes, débris incohérents de tous les naufrages ; on faisait la liaison tant bien que mal, moyennant une veine de phraséologie philosophique et philanthropique à l’ordre du jour. […] Bientôt un mariage selon ses vœux allait fixer son bonheur et enchaîner sa destinée avec grâce à l’un des noms les plus aimables du siècle illustre qu’il venait de juger11. […] La Restauration, au moins au début, semblait remplir un des vœux de M. de Barante ; ses liaisons sociales, on l’a vu, ses goûts modérés, ses lumières, et, pour les nommer par leur nom, ses vertus civiles, le disposaient à l’ordre constitutionnel sagement entendu, c’est-à-dire à ce qu’on augurait du régime nouveau. […] La seconde phase de cette guerre, la mémorable campagne de 1476, à jamais illustrée par les noms de Granson et de Morat, cette lutte corps à corps dans laquelle il semblerait que les Suisses traqués ne faisaient que se défendre, est plus propre sans doute à donner de l’illusion ; mais même dans ce second temps, si on veut bien le démêler avec M. de Gingins, on est fort tenté de reconnaître que le duc Charles (Charles le Hardi, comme il l’appelle toujours, et non le Téméraire) ne franchissait point le Jura en conquérant ; il venait rétablir le comte de Romont et les autres seigneurs vandois dans la possession de leur patrimoine, dont les Suisses les avaient iniquement dépouillés pour leur attachement à sa personne ; il venait délivrer le comté de Neufchâtel de l’occupation oppressive des Bernois.
Mais quand la pensée et l’âme y tiennent la place qui convient à ce nom d’amour, quand les souvenirs déjà anciens et en mille façons charmants se sont mêlés et pénétrés, quand les cœurs sont restés fidèles, un accident, une froideur momentanée ne sont pas irréparables. […] Mme de Pontivy avait senti aussi s’agiter en elle quelque chose d’inconnu ; et quand elle fut seule et qu’elle en chercha le nom, et que celui d’amour vint à sa pensée, elle s’effraya et se jeta à genoux dans son oratoire en cachant sa face dans ses mains ; et le lendemain, dans la matinée, comme, sans se rendre compte, elle embrassait plus fréquemment sa fille, l’enfant réveilla son effroi en lui disant : « Pourquoi est-ce que vous m’aimez encore plus aujourd’hui ? […] Son monde à lui, en effet, selon ses goûts, aurait été plutôt celui dont elle citait là les noms, ou encore le monde de Mme de Lambert et de M. de Fontenelle. […] M. de Murçay, qui peut-être y pensait le plus constamment, évitait surtout d’en parler ; c’était au plus par quelque allusion de lieu qu’il le désignait ; et je croirais, en vérité, que, depuis la déclaration du berceau, il ne lui arriva jamais de nommer le mari de Mme de Pontivy par son nom dans le tête-à-tête.
Joubert158 Bien que les Pensées de l’homme remarquable, dont le nom apparaît dans la critique pour la première fois, ne soient imprimées que pour l’œil de l’amitié, et non publiées ni mises en vente, elles sont destinées, ce me semble, à voir tellement s’élargir le cercle des amis, que le public finira par y entrer. Parlons donc de ce volume que solennise d’abord au frontispice le nom de M. de Chateaubriand éditeur, parlons-en comme s’il était déjà public : trop heureux si nous hâtions ce moment et si nous provoquions une seconde édition accessible à la juste curiosité de tous lecteurs ! […] La classe libre d’intelligences actives et vacantes qui se sont succédé dans la société française à côté de la littérature qu’elles soutenaient, qu’elles encadraient, et que, jusqu’à un certain point, elles formaient ; cette dynastie flottante d’esprits délicats et vifs aujourd’hui perdus, qui à leur manière ont régné, mais dont le propre est de ne pas laisser de nom, se résume très-bien pour nous dans un homme et peut s’appeler M. […] « Mais, pour plaire aux sages et pour avoir la perfection, il faut que l’unité ait pour limites celles de sa juste étendue, que ses limites viennent d’elle ; ils la veulent éminente pleine, semblable à un disque et non pas semblable à un point. » En songeant à ses erreurs, à ce qu’il croyait tel, il ne s’irritait pas ; sa bienveillance pour l’humanité n’avait pas souffert : « Philanthropie et repentir, c’est ma devise. » Trompé par une ressemblance de nom, nous avons d’abord cru et dit que, comme administrateur du département de la Seine, il contribua à la formation des Écoles centrales ; nous avions sous les yeux un discours qu’un M.
« Retrouvant dans nos châteaux, avec nos paysans, nos gardes et nos baillis, quelques vestiges de notre ancien pouvoir féodal, jouissant à la cour et à la ville des distinctions de la naissance, élevés par notre nom seul aux grades supérieurs dans les camps, et libres désormais de nous mêler sans faste et sans entraves à tous nos concitoyens pour goûter les douceurs de l’égalité plébéienne, nous voyions s’écouler ces courtes années de notre printemps dans un cercle d’illusions et dans une sorte de bonheur qui, je crois, en aucun temps, n’avait été destiné qu’à nous. […] On peut soupçonner toutefois qu’en y rattachant si expressément en tête le nom assez disparate du roi de Prusse, en serrant de près avec une exactitude sévère le règne de ce champion si empressé de la coalition, qui fut le premier à rengainer l’épée et à déserter dans l’action ses alliés compromis, M. de Ségur prenait à sa manière, et comme il lui convenait, sa revanche de la non-réussite de Berlin. […] Un Gouvernement glorieux s’inaugurait, avide de tous les services brillants et des beaux noms : la place de M. de Ségur y était à l’avance marquée. […] La bienveillance, comme il l’entend, n’est autre que la charité sécularisée, se souvenant et se rapprochant de son étymologie de grâce, telle qu’il l’avait entrevue dans sa jeunesse chez madame Geoffrin, telle qu’il l’eût pu désigner non moins heureusement par un nom plus moderne de femme dont c’est le don accompli et l’immortelle couronne179.
Car les autres personnages, s’ils ont plus de consistance que les « mânes » fabuleux, n’ont pourtant pas un relief assez fort pour rester longtemps dans l’esprit ; et leurs physionomies sont si faiblement individuelles que la mémoire les confond les uns avec les autres et ne tarde pas à brouiller leurs noms. Il y a d’abord les beaux ténébreux tels que Maxime Odiot et le commandant d’Eblis ; puis M. de Camors et les sous-Camors tels que Philippe et M. de Vaudricourt ; les jeunes gens élégants et insignifiants comme M. de Bévallans et d’autres dont le nom m’échappe ; les vieux gentilshommes un peu maniaques comme M. des Rameures ou M. de Courteheuse ; les vieilles femmes aimables et charitables comme Mme de Férias ou Mme de Louvercy ; les vieilles femmes évaporées comme Mme de Combaleu ou venimeuses comme Mme de la Roche-Jugan. […] Jeanne Bérengère (quel joli nom !) […] Pour lui comme pour beaucoup de personnes de la caste qu’il aime, le naturalisme en littérature et la démocratie en politique sont liés intimement à l’ensemble assez compliqué d’idées et de tendances qu’il nomme du nom commode de matérialisme.
Les sujets traités ont été avant tout tirés de l’histoire sainte ; de là le nom de miracles et de mystères que les pièces ont gardé ; mais à la fin du moyen âge le nom devient menteur ; il couvre des sujets empruntés à l’histoire nationale, aux romans d’aventure, à la vie de tous les jours et même aux fables païennes. […] Ces noms seuls sont significatifs. […] Le nom de philosophe est alors synonyme d’esprit fort, de libre-penseur.
Il ignore le nom de sa maîtresse, et une sorte de pudeur sévère l’empêche de regarder de trop près dans cette partie de sa vie. […] Son tuteur lui parle mariage, et elle répond aussitôt par le nom de Paul. […] Mais il a suivi sa trace ; il l’a relancée jusqu’à Paris, où il apprend qu’elle est devenue veuve ; et maintenant il prie son ami Paul, qui est connu d’elle, d’aller, de sa part, lui offrir solennellement son nom et sa main. […] Il lui fait dire son nom, et une colère de fâcheux augure s’empare de lui subitement.
Tel est surtout le caractère qu’elle offre dans son roman de Gil Blas, ce facile et délicieux chef-d’œuvre, auquel son nom est à jamais attaché. […] On a souvent prononcé, à propos de Gil Blas, les noms de Panurge et de Figaro. […] Les deux premiers volumes de l’ouvrage, après avoir fait passer sous les yeux toutes sortes de classes et de conditions, voleurs, chanoines, médecins, auteurs, comédiens, laissaient Gil Blas intendant de don Alphonse, et chargé de faire en son nom une restitution. […] Il y eut encore un troisième fils de Lesage, qui se fit comédien et courut l’Allemagne sous le nom de Pittenec ; mais ce dernier ressemblait aux moins bons ouvrages de son père.