C’est celui qu’on pourrait appeler sentimental, à condition de prendre le mot « sentiment » dans l’acception que lui donnait le XVIIe siècle, et d’y comprendre toute connaissance immédiate et intuitive. […] Disons un mot des théories les plus importantes et citons les principaux noms. […] Ce fut d’abord un merveilleux écrivain, si toutefois on peut encore appeler écrivain celui qui nous fait oublier qu’il emploie des mots, sa pensée paraissant s’insinuer directement dans la nôtre. […] On pourrait maintenant, pour conclure, dire un mot de l’entreprise tentée par l’auteur de l’Évolution créatrice pour porter la métaphysique sur le terrain de l’expérience et pour constituer, en faisant appel à la science et à la conscience, en développant la faculté d’intuition, une philosophie capable de fournir, non plus seulement des théories générales, mais aussi des explications concrètes de faits particuliers.
Dans ses discours, avec tous les mots heureux qu’on lui a vus et les saillies qui lui échappaient, il n’avait pas la netteté, et, à un certain moment, il s’embarrassait dans les digressions, ce qui a fait dire à Fénelon « qu’il n’avait que des lueurs d’esprit ». […] J’avais toujours bien dit, s’écria Villars mourant, que cet homme-là était plus heureux que moi. » — Berwick étant mort seulement le 12, et si loin de là, Villars a eu tout juste le temps d’apprendre la nouvelle et de dire ce mot. Mais le mot est si bien dans sa nature, que, s’il ne l’a pas dit, il a dû le dire.
Il vous faut rentrer dans votre bouge, polir votre mot, trouver votre rime, vous taper le front et vous ronger les ongles. […] Mot charmant de madame Valmore, avec cet air humble et ce geste de femme : « Il faut faire de la vie, comme on coud : point à point. » XXVII. […] « Être content, c’est être contenu, le mot le dit ; c’est-à-dire contenir ses vœux dans les limites que Dieu a tracées, et parce que c’est lui qui les a tracées.
D’abord du 10 août au 9 thermidor, l’influence directe des royalistes fut nulle ; tout le monde en convient : le nom de royaliste alors n’était plus qu’un mot vide de sens, que les partis se jetaient à la tête comme une injure et une menace. […] Il y eut, en un mot, des muscadins, comme il y avait eu des sans-culottes ; mais ces muscadins étaient armés de bâtons courts et plombés en forme d’assommoirs, et en faisaient un fréquent usage contre les jacobins dans toutes les rencontres. […] Tant que les cinq directeurs constitutionnels restèrent au pouvoir, tant que les deux tiers conventionnels eurent la majorité dans les Conseils, en un mot, tant que les auteurs de la Constitution furent là pour la surveiller et la pratiquer, tout alla bien ; les Conseils et le gouvernement vécurent en harmonie ; on vit la prospérité renaissante au dedans, au dehors d’immortelles victoires qui n’ont pas été surpassées depuis.
D’ici à quelques jours, tout mot sincère sur notre glorieuse Révolution, tout hommage à son jeune et digne historien nous seront peut-être interdits 10 ; peut-être notre comité de salut public aura repris sa tâche. […] Au dedans ce ne sont en apparence que de mesquines et sourdes intrigues, des conflits d’amour-propre et de cupidité, en un mot des chicanes d’avocats et de procureurs derrière les trophées àe l’héroïsme et de la victoire. […] C’est lui qui, dans une vive discussion sur l’entreprise d’Égypte, répond à Bonaparte, qui prononce le mot de démission : « Je suis loin de vouloir qu’on vous la donne ; mais si vous l’offrez, je suis d’avis qu’on l’accepte. » Enfin, s’il succombe lui-même au 30 prairial, si les Conseils, prenant la revanche du 18 fructidor, l’expulsent par violence d’un poste où il défend intrépidement une Constitution dont on ne veut plus, ce n’est pas à la peur ni aux prières qu’il cède, c’est à la conviction de son impuissance, au vœu trop manifeste de ses concitoyens, et, en se retirant, pauvre, à pied, dans sa petite maison d’Andilly, il emporte avec lui la dignité et la force du Directoire.
Heine est plutôt celui d’un poète que celui de tout le monde ; il n’a pas seulement de ces traits inattendus, saisissants, courts, de ces rapports neufs et piquants qu’un mot exprime et enfonce dans la mémoire ; il a, à un haut degré, l’imagination de l’esprit, le don des comparaisons singulières, frappantes, mais prolongées, mille gerbes, à tout instant, de réminiscences colorées, d’analogies brillantes et de symboles. […] Heine pousse trop à l’effet de chaque jour ; s’il voit tel petit flot voisin plus gros et plus menaçant qu’il ne l’était en réalité ; si en un mot l’harmonie du temps et de l’histoire n’a point encore passé sur ces impressions successives et parfois discordantes, que de vérités en revanche, que d’observations fines et bien saisies il sème chemin faisant ! […] Quoiqu’il en soit, nous avons ici un dernier mot de lui sur Henri Heine.
Il n’est pas possible de dire avec de pauvres mots plus de détresse morale, plus de poignante et d’annihilante souffrance d’être. […] Ceux-là sont à plaindre ceux qui ne considèrent en ces poèmes que la valeur isolée d’un vers, d’un mot, qui ne comprennent pas — ou ne veulent pas comprendre — que le vrai poète, comme le dit M. […] Verhaeren paraît un fils direct de Victor Hugo, surtout en ses premiers œuvres ; même après son évolution vers une poésie plus librement fiévreuse, il est encore resté romantique ; appliqué à son génie, ce mot garde toute sa splendeur et toute son éloquence.
L’esprit humilié voit partout des idoles, On voudrait faire un choix de suaves paroles, Mais en vain, pour qu’à l’aise ils s’y posent en tas, La rêverie aux mots s’offre comme une branche. […] Ce sont, dans tout l’absolu du mot, des réfractaires. […] Le mot « illuminations » est anglais et veut dire gravures coloriées, coloured plates : c’est même le sous-titre que M.
Les artistes ne sont pas polis, on lui demande grossièrement s’il est d’elle, elle répond que oui, un mauvais plaisant ajoute : et de votre teinturier. on lui explique ce mot de la farce de Patelin qu’elle ne connaissait pas ; elle se pique, elle peint celui-ci qui vaut mieux ; et on la reçoit. […] Comme depuis le péché d’Adam on ne commande pas à toutes les parties de son corps comme à son bras, et qu’il y en a qui veulent quand le fils d’Adam ne veut pas, et qui ne veulent pas quand le fils d’Adam voudrait bien ; dans le cas de cet accident, je me serais rappellé le mot de Diogène au jeune lutteur : mon fils, ne crains rien, je ne suis pas si méchant que celui-là. si cette femme s’est un peu promenée au sallon, elle aura vu passer avec dédain devant des productions fort supérieures aux siennes, et pueri nasum… etc., et elle s’en retournera un peu surprise de la sévérité de nos jugemens, plus sociable, plus habile, et moins vaine. […] … ils sont faits à ce mot, ils se taisent et rient.
Nous voïons par le livre de Quintilien que ceux, qui faciebant modos, où les compositeurs de déclamation furent appellez dans la suite, artifices pronuntiandi, mot à mot des artisans en prononciation. […] Nous avons expliqué déja ci-dessus ce que les romains entendoient par le mot carmen.
Ne leur parlez de rien, ils n’entendent rien et vous arrêtent au premier mot. […] Avec une pareille tournure d’esprit, il n’est pas surprenant qu’on n’ait vu dans notre enseignement que des formules, des recettes, des conseils artificiels, une rhétorique mécanique, un empirisme suspect, une méthode, en un mot, insuffisante à expliquer la sensibilité, l’inspiration et le talent personnels. […] Avec une pareille tournure d’esprit, il n’est pas surprenant qu’on n’ait vu dans notre enseignement que des formules, des recettes, des conseils artificiels, une rhétorique mécanique, un empirisme suspect, une méthode, en un mot, insuffisante à expliquer la sensibilité, l’inspiration et le talent personnels.
Nous nous disions qu’il aurait l’admiration révélatrice et féconde, et qu’il sortirait de la tourbe des gens d’esprit qui ont commenté, chacun à son tour, La Bruyère, et qui se sont efforcés — qu’on nous passe le mot en faveur de sa vérité ! […] Destailleur, qui est un esprit distingué et juste, s’est-il rappelé le mot de Voltaire, ou l’aurait-il subi, non seulement en passant aussi vite qu’il l’a fait sur la personnalité de son auteur, dont il ne nous dit que ce que dit l’histoire, mais en négligeant de nous donner la clef de ses divers Caractères, sortis, tous, de l’étude de quelque personnalité ? […] Il est évident que ce mot-là le choque comme une malpropreté.
J’ai ri, me voilà désarmé, est un mot toujours juste. […] Mirabeau, tout Mirabeau qu’il fût, n’avait jamais parlé que de « vertus inertes », mais Suleau, qui trempa, d’ailleurs, dans ce glorieux complot de Mirabeau pour sauver une monarchie qui ne voulut pas être sauvée, Suleau sut dire le mot terrible qu’aucun royaliste d’alors n’eût osé prononcer et qu’aucun n’ose prononcer encore, quoique ce mot soit devenu le jugement suprême et définitif de l’histoire !
Ernest Charrière l’injure de penser qu’il n’a compris que le mot à mot de l’auteur russe qu’il vient de traduire et que le sens et le caractère de l’ouvrage d’Yvan Tourgueneff lui ont complètement échappé. […] C’est de l’observation à bâtons rompus, de l’observation de nature et d’aventure, relevée par de la fantaisie, et avec ces deux mots-là, vous avez tout !
À mesure qu’il a vécu et travaillé (et j’emploie ce mot à dessein) il s’est dégagé de ses écumes et de ses scories. Il s’est filtré, et quoiqu’on soit un peu étonné de ce mot-là quand il s’agit de M. […] Théophile Gautier représentait glorieusement l’école volontaire de la poésie travailleuse et, qu’on nous permette le mot, rageuse au travail, qui pose assez insolemment pour soi-même et pour le génie, que la Poésie est le résultat d’une poétique, la langue touchée, de telle ou telle façon, comme un piano, et qui croit simplifier et réaliser tout par des règles.
Cependant M. le Conte de L’Isle aurait pu être très Indien encore et ne pas employer sans notes et sans vocabulaire (ce qui est par trop indien ou par trop indifférent à l’intelligence de son lecteur), cette tourbe de mots étrangers à peu près inintelligible. […] Or, comme ces glorifications du Néant et de l’Être ne peuvent jamais être très variées, et qu’on ne voit pas grand’chose, quand on n’est pas fakir, dans ces deux pierres noires, il se trouve que pour nous, restés occidentaux, aux sensations nettes, à l’esprit positif et au cœur chrétien, il est (qu’il nous permette de lui dire ce mot qui n’est pas indien) souverainement ennuyeux. […] Mais quel triste destin pour un poète d’être comparé même à de grands peintres dont il n’est jamais avec les mots que le pâle reflet !
Louis Bouilhet en deux mots ! […] En poésie, la littérature de 1830 n’a pas dit le dernier mot des choses, et déjà, sur une tête jeune et ardente comme celle de M. […] __ Et vous pourrez, selon le mot Du bon poète que j’adore, Sur le tombeau de plus d’un sot Plus d’une fois compter l’aurore !
Par sa nature, il doit répugner à cette forme essentiellement parnassienne du sonnet, à cette œuvre d’asthmatique qui, entre deux toux, place nettement son petit mot… Et puisque nous avons tous une famille littéraire quand nous sommes bien nés littérairement, et qu’alors nous ne nous mettons pas aux Enfants Trouvés des Écoles, l’auteur de La Vie inquiète s’apparente de loin à Henri Heine, et, de plus près, à lord Byron. […] Gozlan, qui n’était pas Parnassien, mais qui était surtout un homme d’esprit, a fait ce mot, qui n’est qu’une épigramme : « Alfred de Musset, c’est lord Byronnet. » M. […] C’est l’Amour aveugle qui s’étrangle avec son bandeau… C’est un peu trop ingénieux, peut-être ; c’est, qu’on me passe le mot !
Qui peut dédommager un homme de talent, surtout quand il commence à naître et qu’il a besoin d’un peu de succès pour se développer ; qui peut le dédommager de l’inattention, du silence, de l’oubli, de toutes ces horribles choses qui viennent s’entasser autour de son livre et l’intercepter au public, qui le lirait, si la Critique, vigie infidèle, avait dit le mot qu’elle doit dire et avait averti ? […] Deltuf n’aurait-il pas, lui, des grâces irisées, ayant le mot brillant par-dessus le mouvement qui charme, le mot que le mouvement même de la pensée ferait mieux briller ?
On voit combien ce nom et le souvenir d’une ancienne grandeur en imposaient encore : « L’orateur, dit-il, craint de faire entendre devant les héritiers de l’éloquence romaine, ce langage inculte et sauvage d’au-delà des Alpes, et son œil effrayé croit voir dans le sénat les Cicéron, les Hortensius et les Caton assis auprès de leur postérité pour l’entendre. » Il y a trop d’occasions où il faut prendre la modestie au mot, et convenir de bonne foi avec elle qu’elle a raison ; mais ici il y aurait de l’injustice : l’orateur vaut mieux qu’il ne dit ; s’il n’a point cet agrément que donnent le goût et la pureté du style, il a souvent de l’imagination et de la force, espèce de mérite qui, ce semble, aurait dû être moins rare dans un temps où le choc des peuples, les intérêts de l’empire et le mouvement de l’univers, qui s’agitait pour prendre une face nouvelle, offraient un grand spectacle et paraissaient devoir donner du ressort à l’éloquence : la sienne, en général, ne manque ni de précision, ni de rapidité. […] Par exemple, au milieu de son discours, il fait un long commentaire sur la lettre que Gratien lui a écrite, sur chaque mot dont il s’est servi, sur la robe qu’il lui a envoyée, enfin sur ce qu’en le nommant consul, il l’a nommé le premier et non pas le second. […] On n’a d’autres dédommagements que quelques épigrammes et des jeux de mots.
— Vous pourriez dire un mot du poëme d’ Hermia de Laprade (Revue indépendante) ; c’est assez beau, grandiose, mais monotone. […] Le fin mot de mon article, c’est que nous sommes dans un 15 avril universel ; en politique, sous M.
Sainte-Beuve, s’animant tout d’un coup, éclata : « Ah çà, dit-il, est-ce que vous voulez que je me déshonore (je garantis le mot) ? […] Sainte-Beuve, piqué au jeu, dicta à son secrétaire le début d’article que nous reproduisons intégralement, et auquel il n’ajouta pas un mot depuis.
Et comme il est bien fait pour la voix, cet hexamètre mâle, avec ses mots qui donnent le frisson, et ces élans cornéliens pareils à de grands coups d’ailes ! […] Quand on aura pris son parti de deux ou trois mots dont la sonorité chinoise semble bien un peu barbare à nos oreilles accoutumées à de moins rudes syllabes, on goûtera délicieusement la délicatesse et la tendresse de l’humble fabliau où l’on ne sait Si c’est la fleur qui chante ou l’oiseau qui fleurit.
C’est ainsi que Despréaux l’annonce pour le créateur de la belle Poésie parmi nous : Enfin Malherbe vint, & le premier, en France, Fit sentir dans ses Vers une juste cadence, D’un mot mis en sa place enseigna le pouvoir, Et réduisit sa Muse aux regles du devoir. […] Sa Poésie consistoit moins à dire de grandes choses, qu’à en exprimer de petites par de grands mots moitié Grecs, moitié François ; il donnoit, par cet appareil, un air merveilleux à son style, que l’ignorance seule pouvoit goûter.
On ignore assez généralement que Voltaire ne s’est servi des paroles de François de Guise qu’en les empruntant d’un autre poète ; Rowe en avait fait usage avant lui dans son Tamerlan, et l’auteur d’Alzire s’est contenté de traduire, mot pour mot, le tragique anglais : Now learn the difference,’wixt thy faith and mine… Thine bids thee lift thy dagger to my throat ; Mine can forgive the wrong, and bid thee live.
On jette enfin de la terre sur la tête, et en voilà pour jamais. » Comme ce dernier mot est effrayant ! […] Nous avons entendu dire : « Si Bossuet et Pascal revenaient, ils n’écriraient plus comme cela. » C’est nous, prétend-on, qui sommes les écrivains en prose par excellence, et qui sommes bien plus habiles dans l’art d’arranger des mots.
Je me bornerai donc, dans cet avertissement, à déclarer que j’emploie le mot philosophie dans l’acception que lui donnaient les anciens, et particulièrement Aristote, comme désignant le système général des conceptions humaines ; et, en ajoutant le mot positive, j’annonce que je considère cette manière spéciale de philosopher qui consiste à envisager les théories, dans quelque ordre d’idées que ce soit, comme ayant pour objet la coordination des faits observés, ce qui constitue le troisième et dernier état de la philosophie générale, primitivement théologique et ensuite métaphysique, ainsi que je l’explique dès la première leçon.
Et, cela dit avec une telle rigueur, on s’étonnera peut-être que nous signalions un livre qui semble appartenir à la littérature dont nous venons en quelques mots de tracer l’histoire. Le livre que Pierre Mancel de Bacilly a récemment publié porte sur sa première page ces deux mots mystérieux et terribles : Du Pouvoir et de la Liberté 17, dont l’alliance renferme toute la politique de ces derniers temps.
Notez le dernier mot. […] Cette stratégie va l’induire à jouer sur les mots. […] Un dernier mot. […] N’en croyez pas un mot ! […] Paul Bourget à jongler avec les mots.
Sa tendance propre est celle que formule le mot d’Amiel : faire de la nature qu’il contemple un état d’âme, un état d’âme qui trouve son équilibre en devenant un état d’intelligence. […] À ce moment le sens passe de l’extérieur à l’intérieur, de la peinture à la poésie : les mots les plus ordinaires suffisent alors garder intacte et à prolonger longtemps la force de l’adjectif. […] Et ensuite ce « retour de faiblesse ou de pitié » qui fait laisser par Madeleine à Dominique le mot d’amour qu’il emportera dans la séparation irrévocable. […] Le dernier mot de l’Éducation sentimentale : « C’est peut-être ce que nous avons eu de meilleur » fait un curieux contraste avec les conclusions de Dominique. […] J’ai déjà relevé de lui un mot déplaisant sur « Corneille, grand homme, grand nigaud », et signalé, par un juste retour, en ce mot de nigaud la réaction spontanée d’un Parisien devant certaines candeurs germaniques d’Amiel.
— Oui, c’est là le vrai mot que l’on doit dire sur lui : c’était une âme pure ! […] Il emprunta, pour répéter encore le mot, les costumes, mais il inventa et donna l’âme à ces personnages. […] Cet homme de bien, qu’on croyait enterré, se reprend à dire son mot dans les choses temporelles. […] Ce mot est celui des Fourberies de Scapin. […] Despois pour avoir, en beaucoup de points, le dernier mot sur Molière.
Répondez-moi quelques mots, je vous prie. […] Adressez-les comme ci-dessous, mot à mot : « H. […] À des soupers où je ne dis pas un mot, si quelqu’un me parle de vous, je deviens tout autre. […] Il y a en effet une rature à ce mot. […] mots qui ont un grand sens, mais qui certes ne sont pas prudents.
Il y a de ces esprits élevés, hardis, même insolents (je répète ce mot inévitable), qui ne vous enfoncent ainsi la vérité que par leurs pointes. […] Il eût vu Bacon, qu’au premier mot de rencontre et d’accord, au moindre signe commun dans le même symbole, il lui aurait sauté au cou. […] On cite son mot presque affreux à Mme de Staël, qui le voyant à Saint-Pétersbourg, le voulut mettre sur l’Église anglicane et sur ses beautés : « Eh bien, oui, madame, je conviendrai qu’elle est parmi les Églises protestantes ce qu’est l’orang-outang parmi les singes. » Ce qui doit choquer dans ce mot n’est pas ce qui tombe sur l’Église anglicane, laquelle cumule en effet toutes les cupidités et les hypocrisies. […] laissons-leur cet os à ronger. » Je prends plaisir à répéter ce mot qui est une clef essentielle dans le De Maistre. […] et, quelle qu’ait été votre vie avec ses torts et ses infortunes, soyez salué à jamais un des auteurs originaux les plus à consulter, un des moralistes les plus relus, un des bienfaiteurs, en un mot, de l’humaine culture !
Il a eu des héros et il a eu des saints, dans le sens vrai de ce mot. […] Le mot de Claude Bernard est toujours vrai : « Je ne sais rien à fond. […] Ce n’est pas jouer sur les mots. […] Le même mot désigne, et à très bon droit, ce qui est juste et ce qui est bien réglé. […] Il y a dans le mot l’idée générale de bonne organisation et d’organisme bien fait.
Il choisit ses mots avec une minutieuse exactitude et conduit sa phrase avec une charmante et fine rigueur. […] Il s’assied de l’autre côté de la table, lance un mot vif et rude dans la conversation. […] Quant à Jarry, il s’était réservé de faire précéder le spectacle de quelques mots d’introduction. […] Puis, le rideau se leva, et Ubu lança « le mot ». […] La spécialité des « mots cruels », Forain la partageait avec Degas, et aussi avec Henry Becque.
Cette phrase a deux mots pourtant que je voudrais retrancher : jamais ennuyés ! […] Sainte-Beuve pouvait être plus utile, plus actuel, d’une application plus réelle et plus directe, en un mot plus moral, sans cesser pour cela d’être catholique. […] Les mots, sous la plume de M. […] Neal-Sing subissait, sans dire mot, l’ascendant irrésistible que prenait insensiblement sur lui son audacieux prisonnier. […] Ce sont des êtres faussés, des énigmes sans mot, des figures comme on en voit dans les rêves d’une digestion pénible ou dans des élucubrations bachiques après souper.
Le grand mérite d’un écrivain est de connaître le pouvoir d’un mot mis à sa place. […] Voici un conte fait à plaisir pour amener un bon mot de Piron. […] Ses premiers mots devaient être ; « Généreux inconnu, vous n’avez point combattu pour une criminelle : je suis innocente. […] Quel puéril arrangement de mots ! […] quel abus des mots !
Ce mot nous remet en mémoire les grandiloquents manifestes de la vaniteuse et, babillarde École Romane. […] Sa ferveur pour la parole fut telle, qu’il en arriva à ne plus considérer les objets pour eux-mêmes, mais pour le mot même qui les représente. […] Le magnétisme des mots qui s’attirent, se diaprent, ainsi que des pierreries, de reflets réciproques, devait suppléer la direction apparente de l’écrivain. […] Pour une coquetterie mentale, ou pour posséder des mots d’auteur, les voyez-vous abdiquer leur beauté et leur rôle nécessaire. […] Zola, n’est plus une description ; sous les mots, les objets naissent, tout se reconstruit.
Poëtes, Orateurs, Historiens, Philosophes, tous trouvoient dans leur langue abondante, énergique, harmonieuse & sonore, l’expression propre à chaque Art & à chaque Science : elle exprimoit, elle animoit, elle représentoit tout ; en un mot, elle étoit en tout genre le pinceau du génie. […] Ce n’est pas que quelques Auteurs ne cherchassent les moyens d’enrichir la langue Françoise, & de lui donner une certaine harmonie ; mais ce n’étoit encore qu’un mélange barbare de mots Grecs ou Latins, qu’on tâchoit de naturaliser. […] Elle acquéroit insensiblement plus de nombre & plus d’harmonie ; on étoit plus sévère sur le choix des mots ; l’éloquence étaloit des charmes inconnus jusqu’alors ; mais c’étoit aux dépens de la noble simplicité. […] Aux troubles intestins de l’Etat, aux factions les plus puissantes & les plus dangereuses, à la commotion universelle de la chose publique, aux tentatives indiscrètes & criminelles de l’indépendance, en un mot à la fermentation générale des esprits, succéda le calme le plus heureux. […] Quelle harmonie, quelle facilité dans ses vers, où l’on ne trouve pas une épithète oisive, pas un mot de sur-charge ou d’enflure, pas une seule nuance de sentiment imparfaite ou manquée !
Ce mot même de patrie semblait n’avoir plus de sens. […] En un mot, il lui donna une âme. […] L’éducation se résume dans ces mots : famille, patrie, nature. […] Chaque mot fait penser, ou rêver. […] Villemain, à qui il en a parlé, a prononcé le mot de mercantilisme.
Nos successeurs diront sans efforts, et en deux mots, ce que nous nous sommes donné beaucoup de peine pour envelopper ou délayer. […] Même en énumérant les qualités des talents amis, il y a un mot qu’il ne faudrait jamais perdre de vue, le circum prœcordia ludit, qu’un satirique accorde à l’aimable Horace : se jouer autour du cœur de ceux même qu’on caresse, et montrer qu’on sait les endroits où l’on ne veut pas appuyer.
Quoi qu’il advienne de ce jugement vénérable et suprême, pour ce que nous savons et voyons directement nous avons bien le droit de dire que le caractère de notre littérature actuelle est avant tout la diversité, la contradiction, le pour et le contre coexistants, accouplés, mélangés, l’anarchie la plus inorganique, chaque œuvre démentant celle du voisin, un choc, un conflit, et, comme c’est le mot, un gâchis immense. […] En un mot, à chaque fait un peu général que vous cherchez à établir touchant cette pauvre littérature, l’exception se lève aussitôt et le ruine ; quelque caractère particulier et déterminé que vous tâchiez d’indiquer, il se trouve toujours à côté autre chose d’assez imposant et d’aussi légitime que le reste, qui vous répond : « Non, la littérature de notre temps n’est pas cela. » C’est toute la définition que j’en veux donner aujourd’hui.
J’ai répondu quelques mots à M. de Loménie, et cette réponse peut se lire au tome III, page 373, de mes Portraits contemporains (1846). […] Inouï qu’avec ma souffrance intérieure j’aie pu écrire un mot qui eût le sens commun.
Jésus-Christ dormit dans le sein de Jean ; et sur la croix, avant d’expirer, l’amitié l’entendit prononcer ce mot digne d’un Dieu : Mater, ecce filius tuus ; discipule, ecce mater tua. […] Pour que deux hommes soient parfaits amis, ils doivent s’attirer et se repousser sans cesse, par quelque endroit ; il faut qu’ils aient des génies d’une même force, mais d’une différente espèce ; des opinions opposées, des principes semblables ; des haines et des amours diverses, mais au fond la même sensibilité ; des humeurs tranchantes, et pourtant des goûts pareils ; en un mot, de grands contrastes de caractère et de grandes harmonies du cœur.
« Ces héros pleins de bonté et de lumière pensent toujours à leur Créateur, et sont tout éclatants de la lumière qui rejaillit de la félicité dont ils jouissent en lui. » — Et plus loin, « héros vient d’un mot grec qui signifie amour, pour marquer que, pleins d’amour pour Dieu, les héros ne cherchent qu’à nous aider à passer de cette vie terrestre à une vie divine et à devenir citoyens du ciel69. » Les Pères de l’Église appellent à leur tour les saints des héros : c’est ainsi qu’ils disent que le baptême est le sacerdoce des laïques, et qu’il fait de tous les chrétiens des rois et des prêtres de Dieu 70. […] On sait comment Neptune, ……… S’élevant sur la mer, D’un mot calme les flots……… Nos dogmes fournissent un autre genre de poésie.
Ce dernier mot vient peut-être de salire, saltare danser, de même que chez les Grecs le premier chœur avait été une danse en rond. […] Le mot satyre signifiaient originairement en latin, mets composés de divers aliments (Festus)94.
Un mot expressif de Saint-Simon, si fertile, comme on sait, en mots de ce genre, et qui n’est suspect ni d’indulgence pour Louis XIV, ni de complaisance pour ses amours, me met sur la voie. […] Mot charmant, qui fait sentir si vivement la beauté de son sacrifice. […] Louis XIV ne voulait pas de ce mot. […] Pour Boileau comme, plus tard, pour La Bruyère, il n‘y a en français qu’un mot pour exprimer une chose. […] C’est d’Arnauld lui-même qu’on tient le mot.
Les savants s’indignent sur ce mot, et on en rit dans les laboratoires. […] Deux mots suffisent à les résumer : la Science a perdu son prestige ; et la Religion a reconquis une partie du sien. […] Ce sera l’affaire de deux mots et de trois questions, — dont la première est déjà bien jolie, mais la seconde l’est encore davantage, et la troisième les passe toutes deux. […] Je n’ai « prédit la déroute de personne » ; je n’ai pas écrit un seul mot qui puisse lui donner à croire que je trouve rien de « divin dans l’ordre d’iniquité » qu’il attaque. […] Catholiques, protestants, ces mots n’ont plus d’actualité, plus d’intérêt, Ah !
En quelque discrédit que soit tombé le mot drame par la manière abusive et tortionnaire dont il a été prodigué dans ces temps de douloureuse littérature, il est nécessaire de l’employer ici ; non que cette histoire soit dramatique dans le sens vrai du mot, mais, l’œuvre accomplie, peut-être aura-t-on versé quelques larmes intra muros et extra. […] Ses ormoires (il prononçait ce mot à la manière du menu peuple) furent remplies par la nombreuse argenterie de son ménage. […] « Je n’aimai pas ce dernier mot, mais je demandai le nom du castel et celui du propriétaire. […] Elle étendait ainsi, sans le savoir, le sens des mots, et vous entraînait l’âme dans un monde surhumain. […] Aussi plaisait-elle sans artifice, par sa manière de s’asseoir, de se lever, de se taire ou de jeter un mot.
Son article, pour nous autres Français, est tout simplement… (le mot d’inintelligent rendrait faiblement ma pensée), et il offre une confusion en tout point, qui doit nous rendre très humbles et un peu sceptiques dans les jugements que nous portons des littératures auxquelles nous n’avons pas assisté, même quand nous avons les pièces en main et que nous les avons compulsées soigneusement. […] Heureuse cette littérature à la fois plus démocratique et plus aristocratique, plus raffinée et plus audacieuse, moins moyenne en un mot, si elle n’est pas jetée hors de toute beauté et de tout calme d’exécution, hors d’un certain bon sens indispensable au génie et de certaines conditions éternelles de l’art, par la pruderie, l’honnêteté exemplaire et les prétentions établies de l’autre littérature ! […] C’est en France encore (que les reviewers étrangers daignent le croire) que les ouvrages qu’on lui reproche de faire naître, sont le plus promptement, le plus finement critiqués raillés sinon par écrit toujours partout ailleurs, en causant, au coin d’une rue ou d’un salon, dans la moindre rencontre de gens qui à demi mot s’entendent.
Coordonner en un mot la littérature avec tout l’ensemble des institutions de l’empire, et faire que cette seule chose ne reste pas livrée au pur hasard, voilà le point précis. […] On nous apprend à aimer le beau, l’agréable, à avoir de la gentillesse en vers latins, en compositions latines et françaises, à priser avant tout le style, le talent, l’esprit frappé en médailles, en beaux mots, ou jaillissant en traits vifs, la passion s’épanchant du cœur en accents brûlants ou se retraçant en de nobles peintures ; et l’on veut qu’au sortir de ce régime excitant, après des succès flatteurs pour l’amour-propre et qui nous ont mis en vue entre tous nos condisciples, après nous être longtemps nourris de la fleur des choses, nous allions, du jour au lendemain, renoncer à ces charmants exercices et nous confiner à des titres de Code, à des dossiers, à des discussions d’intérêt ou d’affaires, ou nous livrer à de longues études anatomiques, à l’autopsie cadavérique ou à l’autopsie physiologique (comme l’appelle l’illustre Claude Bernard) ! […] Poussée à ce degré, l’espèce (qu’on me passe ce mot scientifique) n’est-elle pas aussi un inconvénient, — Dieu me garde de dire un danger ?
Il y a, à la vérité, un signe où elle reconnaît les grands hommes, et il n’est peut-être pas bien exact de dire que tous les objets soient égaux devant l’indifférence de sa curiosité ; Molière est mille fois plus intéressant à ses yeux que Cyrano de Bergerac, Pradon ou Boursault : « Plus un poète est parfait, dit-elle, plus il est national ; plus il pénètre dans son art, plus il a pénétré dans le génie de son siècle et de sa race ; la hauteur de l’arbre indique la profondeur des racines465. » Quoi qu’il en soit, l’école historique, je dis l’école historique idéale, à la considérer dans l’unité et la pureté de sa doctrine, annule la critique littéraire au sens où le langage a toujours entendu le mot de critique, puisqu’elle ne juge pas, ne blâme ni ne loue. […] Que faut-il entendre par ce mot : perfectionnement du goût ? […] Sans définir les mots d’art et de science (ce dont il faut se garder, si l’on veut s’entendre soi-même et se faire entendre), on peut dire qu’entre la science et l’art il y a cette différence que, dans l’une les gens médiocres peuvent rendre d’utiles services, au lieu que dans l’autre ils ne font rien qui vaille.
Dubout, comme l’ont insinué quelques médisants, ait obéi à un autre sentiment qu’au zèle pur de la vérité ; pas un instant je n’ai cru qu’il cédait, dans sa poursuite grotesquement acharnée, à un dépit cuisant d’auteur tombé, à une rage de vanité déçue, à une démangeaison de réclame, à une humeur processive et hargneuse d’homme d’affaires et de chicanou provincial, ou encore au désir têtu de montrer aux habitants de sa petite ville, témoins de son retour humilié, que ces gens de Paris ne lui faisaient pas peur et qu’ils n’auraient pas avec lui le dernier mot. » Qu’auriez-vous à dire ? […] Je viens, là-dessus, de relire mon article, et je ne puis, en conscience, en retrancher un seul mot. […] a été d’un « gendelettre », et je suis obligé de donner ici à cet affreux mot toute sa force.
Les vieillards, les valets prenaient les masques de Pantalon, de Brighelle ou d’Arlequin, et la pièce recommençait à chaque fois avec toutes les complications et toutes les cascades (cascate, le mot est dans La Supplica de Beltrame) que le genre comportait. […] Nous ne parlerons que du troisième, de Mamfurio, à qui Métaphraste, du Dépit amoureux, a emprunté l’étymologie du mot magister, « trois fois plus grand, tre volte maggiore ». […] Rappelons en quelques mots où en était la scène française à la même époque.
La pièce des Femmes savantes, jouée pour la première fois, en 1672, est une dernière malice de Molière, à double fin : d’abord pour se défendre de la réprobation de quelques mots de son langage et de quelques erreurs de sa morale ; ensuite pour servir les amours du roi et de madame de Montespan, qui blessaient tous les gens de bien et dont la mort récente de madame de Montausier était une éclatante condamnation. […] Il les rétablit aussi dans l’horreur convulsive du mauvais langage, et surtout des expressions qui se rapportent à l’amour vulgaire et grossier ; il leur fait un supplice du barbare amas De mots estropiés cousus par intervalle De proverbes traînés dans tes ruisseaux des halles. […] Mais, ajoute Voltaire, les connaisseurs rendirent bientôt à Molière les suffrages de la ville, et un mot du roi lui donna ceux de la cour. » Le suffrage du roi, qui explique très bien celui de la cour, et celui des connaisseurs de la ville, s’explique très clairement lui-même par l’intérêt qu’avait le prince à diminuer la considération des sociétés graves, de mœurs honnêtes, d’occupations nobles, à rendre ridicules les censeurs de ses désordres ; et c’est ce que Molière entreprit dans sa comédie des Femmes savantes, où il représente tout savoir dans les femmes comme une méprisable pédanterie, et toute critique, ou toute censure exercée de fait sur les opinions et les mœurs de la cour, comme une insolence digne de châtiment.
Nier l’immortalité de l’ame, ôter tout frein aux passions, confondre les notions du bien & du mal, réduire tout à l’amour de soi-même, exterminer toutes les vertus, rompre tous les liens, attaquer les Loix, renverser les principes, ne faire, en un mot, de la vie humaine qu’un tissu de motifs arbitraires, d’intérêts personnels, d’appétits sensuels & déréglés, d’actions animales* ; la terminer par un anéantissement entier, ou préconiser un suicide aveugle qui, par foiblesse ou par désespoir, en abrege le cours : n’étoit-ce pas en insulter les membres, & leur porter les coups les plus funestes ? […] Il nous reste à dire un mot sur le plan que nous avons suivi. […] Tout ce qui a pu donner lieu à des réflexions intéressantes, à des critiques utiles, à des réfutations nécessaires, à des discussions de morale ou de littérature ; en un mot, tout ce qui a été une occasion de rappeler aux vrais principes & de répandre de la variété, n’a pas été regardé comme étranger à notre Ouvrage.
On y trouve un écrivain dont les grands talens doivent faire oublier ses Lettres du chevalier d’Her… ses comédies peu théâtrales, son Apologie des tourbillons de Descartes & les Essais informes qu’il a faits dans les genres de Lucien & de Théocrite ; plus heureux dans ceux de Quinault & de Bacon, & surtout dans la géométrie ; faisant aimer les sciences les plus abstraites ; réunissant la subtilité du raisonnement à un stile qui lui est particulier & qui a fait beaucoup de mauvais imitateurs ; ayant plus d’esprit que de génie, & plus de délicatesse que d’invention ; placé sous deux règnes pour mériter l’estime de deux siècles, & par la variété de ses connoissances, & par la singularité de son ame toujours paisible, modérée, égale, inaccessible aux mouvemens inquiets ou violens, qui rendent les autres hommes malheureux ; fait, en un mot, pour les agrémens & les délices de la société, mais non pour être l’exemple des belles ames, des cœurs sensibles & reconnoissans. […] On va jusqu’à lui faire dire qu’étant jeune écolier à Rouen, sa mère, sœur de Pierre & de Thomas Corneille, le menoit, le dimanche, au prône, à la messe, à vêpres, au sermon ; mais que, dès cet âge, il n’en croyoit pas un mot. […] Naïf jusqu’à cette simplicité qui s’allie si bien au génie, il s’attira le mot de Fontenelle.
La sublime est un mot vuide de sens : la simple est la seule qu’on puisse employer ? […] L’un & l’autre, ainsi que tous les rhéteurs anciens & modernes, l’ont définie l’Art de persuader : deux mots que bien des gens traitent aujourd’hui d’absurdités. […] Ce monarque, qu’on a dit avoir été dédommagé de la qualité de roi, par l’amour qu’il a pour les arts & les lettres, manda ces propres mots à ce rhéteur : Des hommes tels que vous marchent à côté des souverains.
Rousseau, une nature gigantesque et imaginaire ; c’est la nature telle qu’elle est, à la vérité, dans des âmes tout à la fois tendres et élevées, fortes et sensibles ; en un mot, d’une trempe peu commune. […] J’ai trouvé la préface mauvaise ; elle m’avait même un peu prévenu contre l’ouvrage : on voit que l’auteur ne pense pas un mot de ce qu’il dit, et qu’il serait très fâché que son livre ne plût qu’à lui seul. […] Rousseau, qu’en étalant ces grands mots si peu nécessaires, vous avez cédé à un petit mouvement de vanité.
Il aimait le mot net, l’emporte-pièce de la propriété du terme, et de plus il sentait le génie grec, ce vigneron au bonnet de laine grise, et le génie gaulois, et il aurait voulu les faire tenir tous deux sous ce bonnet. […] En un mot, c’est ce scélérat adoré de La Fontaine, c’est cet hypocrite de naïveté, qu’on aime comme le plus vrai des hommes quand il n’est peut-être que le plus profond et le plus retors des artistes ! […] qui ne tendait la main qu’au renseignement historique et non pas, comme Homère, au morceau de pain ; malgré même ce sourire malin dans sa barbe, quand il dit ce joli mot naïf et fin dont il excusait ses commérages : « Je suis tenu de conter ce que l’on dit et non pas de le croire du tout !
et non pas étrangère, et dans un livre très amusant, et svelte à étonner, sur la langue et la littérature françaises, il mit des idées sous des mots, comme tant d’autres ne mettent que des mots sur des idées. […] … L’anecdote serre l’homme de près, le déshabille, l’habille et ne babille point, mais le pointille souvent d’un mot !
« La France s’américanise », est un mot devenu commun. […] Excepté le vieux rabâchement de bigoterie, placé çà et là, comme la cassure dans un verre étoilé, et l’épithète de frénétique appliquée à saint Pie V, pas un mot qui, dans cette Histoire de Philippe II, sente son Américain ou son Anglais. […] Malgré le mot frénétique, qu’il a si malheureusement appliqué à un homme qui ne fut pas seulement un grand Pape, mais un saint Pape, Prescott explique avec beaucoup de perçant ce qu’il appelle une intolérance.
je n’ai trouvé dans cet Essai de philosophie religieuse ni philosophie, ni religion, car le déisme n’est pas plus une religion que le spiritualisme n’est une philosophie, et le mot même d’essai n’est pas plus vrai que le reste avec sa modestie, car un essai suppose qu’on s’efforce à dire une chose neuve, et l’auteur en redit une vieille dont nous sommes blasés, tant nous la connaissons ! […] Quand il l’est, on peut le prendre au mot. […] Avec leurs tourbillons, leur vide et leur plein, leur dynamique, leurs harmonies préétablies, leurs idéalismes impossibles, ce sont de grands poëtes, mais abstraits, — des faiseurs, comme dit le mot poëte, des créateurs de puissantes ou d’impuissantes chimères, car l’homme n’invente réellement que sur le terrain de l’imagination : mais Dieu lui donne et il reçoit seulement sur celui de la vérité.
Taine, qui l’avait signée, est l’auteur de ce livre, Les Philosophes français, dans lequel il n’est pas dit un mot de ce grand philosophe français, M. […] II En effet, ni philosophie positive, ni religion positive, et la manière de se passer de toutes les deux, élevée à l’état de théorie, voilà d’un mot tout le livre de M. Jules Simon, qu’il appelle La Religion naturelle, et qui pourrait très bien, sans jeu de mots, dispenser du devoir qui a dû le suivre, car, quel que soit l’ordre de succession dans la publicité, il est certain que le devoir est la conséquence de la Religion naturelle, au moins dans la tête de l’auteur !
couronner l’auteur d’un livre pareil, en toute circonstance c’est montrer à quel point les respectables auteurs du dictionnaire de la langue française peuvent être dupes des mots et des formes limpides que la pensée sait parfois revêtir. […] Ce secret, ce dernier mot des influences de la charité chrétienne sur le monde ancien et sur le monde moderne, des protestants ne pouvaient pas le dire, mais s’ils ne le disaient pas, ils mutilaient l’histoire et les faits criaient, malgré l’habileté des mutilateurs. […] Tel est, en peu de mots, un livre pour lequel l’Académie, tout en rendant justice au talent de l’auteur, n’a pas voulu courir la responsabilité d’une couronne.
Ce n’est pas tout à fait le mot de l’Évangile de Beaumarchais : « Il fallait un calculateur pour cette place, ce fut un danseur qui l’obtint ». […] Si l’Académie des sciences morales et politiques n’avait pas la langue si pâteuse, elle n’aurait dit qu’un mot qui les valait tous : « Quelles sont les causes de l’anarchie contemporaine ? […] Quand elle s’est servie de ce vague mot de société, c’est évidemment de nous qu’elle voulait parler, et Armand Hayem l’a bien compris ainsi, malgré les bouffées de métaphysique qui offusquent parfois son esprit, et qui embrouillent un livre qui pouvait être fort et rester sobrement et simplement un livre d’observation historique, sans mélange affaiblissant ou énervant d’aucune sorte.
Sans doute, tu lui dis… Ce « sans doute tu lui dis » est Augier tout entier dans un seul mot et donne, sans plus nous faire attendre, une idée de son tour poétique et des ressources de la langue qu’il parle. […] Cela rappelle trop le mot de Rivarol : « C’est là de la prose où les vers se sont mis. » Et encore, nous connaissons beaucoup de proses d’un tissu plus serré, plus étincelant, plus ferme et plus souple que ces molles poésies sans articulation et sans relief. […] D’ailleurs, nous défierions bien Augier d’être autre chose que ce qu’il est, c’est-à-dire, en deux mots, invariablement et irrémissiblement, un poète de carton-pâte modelant en petit des sujets connus, je ne sais quel faux bellâtre sans physionomie sincère et profonde, — qui n’est pas plus la beauté d’un poète que la cire du cabinet de Curtius qui veut jouer la vie n’est un homme !
I Je voudrais bien, cependant, dire un mot que je n’ai pas dit sur M. […] C’était le dernier mot du Romantisme en gaieté ou plutôt en griserie et le premier du Réalisme qui allait naître et qui allait en dire de plus laids. […] On oubliera demain ce Neveu de Rameau de la blague (je parle sa langue, en écrivant ce mot-là) et ce Bernardin de Saint-Pierre des Paul et Virginie du concubinage.
ils ne diraient jamais un mot. […] Les gens sans pensée qui picorent sur des mots, ont appelé Heine une âme païenne parce qu’il a fait jouer dans le diamant de son imagination réverbérante quelques formes du monde antique, mais il n’était pas plus païen que chrétien et que juif. Le judaïsme et le christianisme, et par ce mot de christianisme entendez le catholicisme, — les idées protestantes étant tout ce qu’il y avait de plus antipathique à l’esprit de Heine, — le catholicisme donc et le judaïsme avaient laissé également en son âme des impressions superbes qu’il a superbement exprimées, quitte à s’en moquer une minute après !
À ces mots nous nous mîmes au travail à l’envi l’un de l’autre. […] À ces mots, il tendit la main, et lui donna une bourse de cent écus d’or, en lui recommandant de m’en donner ma part. […] L’autre duchesse s’écria à ces mots : C’est donc ainsi qu’on rend la justice à Rome, au nom du vicaire de Jésus-Christ ! […] À ces mots, regardant son épée : Vous dites la vérité, répondit-il ; elle est telle qu’elle était lorsque je me suis mis en route. […] Benvenuto fut consterné et comprit alors le sens du mot infâme des revers de la médaille.
La voici, réduite en peu de mots : mais ces mots sont clairs, positifs, précis, et ne laissent ni ombre pour les obscurcir, ni fables pour les dénaturer. […] Il assure qu’Hermolaüs et ses complices, appliqués à la torture, ne dirent pas un seul mot contre Callisthène. […] Et, si l’on remonte par la pensée à deux ou trois mille ans plus loin que sa Politique, ne sera-t-on pas tenté de croire que le monde est né vieux et que les mêmes mots ont exprimé les mêmes choses depuis l’origine inconnue des mots et des choses ? […] Et celle-là, on l’appelle précisément État, ou association politique. » Du premier mot voilà la vérité qui apparaît dans tout son jour. […] La foule se révolte de l’inégalité des fortunes, et les hommes supérieurs s’indignent de l’égale répartition des honneurs ; c’est le mot du poète : Quoi !
Puis la manière subtile de porter à la fin de chaque tranche quotidienne la situation critique ou le mot mystérieux. […] Elle veut appeler… Les mots expirent sur ses lèvres. […] Comme il ne sait pas un traître mot du feuilleton en cours, il lui serait bien difficile d’en continuer la série. […] Elles sont comme cela quelques-unes alignant des mots et des colonnes, interminablement. […] (Ce mot a le tort d’ouvrir toute une discussion ; on m’accordera, du moins, que momentanément le lecteur par de tels livres est tiré de son ordinaire, ennobli.)
Plaute formé sur Aristophane, donna dans les bouffonneries, les turlupinades, les jeux de mots de ce Poëte Comique. […] Ce mot reveille toutes les idées de la belle poésie. […] Il a donc voulu en sécouer le joug ; intimidé, dit-il, & averti par le peu de succès de quelques traducteurs de différens Poëtes ; traducteurs craintifs & scrupuleux, qui n’ont eu d’autre mérite dans leur travail que celui de prouver au public qu’ils savent expliquer mot pour mot leur auteur. […] C’étoient pensées sur pensées, de l’esprit à chaque mot, par conséquent peu de sentiment & de passion. […] Les pointes & les jeux de mots font son principal mérite.
Cependant s’il était question de régler la supériorité sur ce qui contribue le plus au bonheur, sur ce qui nous rend plus indépendants des autres, et les autres plus dépendants de nous, sur ce qui donne en un mot le plus d’amis apparents, et le moins d’envieux déclarés, la fortune devrait avoir la première place. […] Dans le temps que notre langue n’était encore, grâce aux tribunaux d’esprit, qu’un mélange bizarre de bas et de précieux, les grands écrivains la devinaient pour ainsi dire, en proscrivant de leurs ouvrages les tours et les mots qu’ils sentaient devoir bientôt vieillir : c’est ce que Pascal a fait dans ses Provinciales, ouvrage qu’on croirait de nos jours, quoique composé il y a cent ans. […] Liberté, vérité et pauvreté, (car quand on craint cette dernière, on est bien loin des deux autres) voilà trois mots que les gens de lettres devraient toujours avoir devant les yeux, comme les souverains celui de postérité. Quand je dis que la pauvreté doit être un des mots de la devise des gens de lettres, je ne prétends pas qu’ils soient obligés d’être indigents, comme ils le sont d’être vrais et libres, et que la pauvreté doive être un attribut essentiel de leur état ; je dis seulement qu’ils ne doivent pas la redouter. […] Mais à voir la manière dont ils les traitent, on serait tenté de croire que le mot de république des lettres est bien mal imaginé ; rien n’est moins républicain que leur conduite et leur manière d’agir envers leurs semblables.
Nous devons nous demander dans quel sens les mots sont pris. […] Mais rappelons d’abord en deux mots ce que nous disions de la simultanéité intuitive, celle qu’on pourrait appeler réelle et vécue. […] Pourtant vous conservez le mot. Même, le long de ce mot commun aux deux cas et qui opère magiquement (la science n’agit-elle pas sur nous comme l’ancienne magie ?) […] Mais dès maintenant nous pouvons en dire un mot.
Si ce n’était profaner les mots grecs que de les appliquer à une barbarie, nous dirions qu’il est monarchique ou oligarchique, probablement les deux à la fois. […] Vous n’éviterez pas la réglementation (vilain mot, mais qui dit bien ce qu’il veut dire, en ce qu’il met impérativement des rallonges à règle et à règlement). […] Ici encore la science a son mot à dire, et elle le dira un jour si nettement qu’il faudra bien l’écouter : il n’y aura plus de plaisir à tant aimer le plaisir. […] Si l’on donne à ce dernier mot le sens qu’il a chez M. […] Sens dont nous ne considérons d’ailleurs ici qu’une partie, comme nous le faisons aussi pour le mot « impérialisme ».
« Encore un mot. […] Comme, dès les premiers mots, on sent en elle la sœur des plus nobles statues grecques ! […] À mesure que le temps marchait, l’esprit belliqueux s’affaiblissait ; les mots de liberté et de guerre cessaient de se trouver ensemble. […] Eu prolongeant la réflexion, on parvient même à se passer de ce petit mot. […] Il renonce à une femme digne de lui et il refuse d’être grand-maître de Malte, je ne dis pas sur un mot, mais sur un silence.
En Allemande des bords du Necker et du Rhin, Élisabeth-Charlotte aimait les sites pittoresques, les courses dans les forêts, la nature livrée à elle-même, et aussi des coins bourgeois et plantureux au milieu de l’encadrement sauvage : J’aime mieux voir des arbres et des prairies que les plus beaux palais ; j’aime mieux un jardin potager que des jardins ornés de statues et de jets d’eau ; un ruisseau me plaît davantage que de somptueuses cascades ; en un mot, tout ce qui est naturel est infiniment plus de mon goût que les œuvres de l’art et de la magnificence : elles ne plaisent qu’au premier aspect, et aussitôt qu’on y est habitué, elles inspirent la fatigue et on ne s’en soucie plus. […] Elle aimait les chiens et les chevaux, passionnément la chasse et les spectacles, n’était jamais qu’en grand habit ou en perruque d’homme, et en habit de cheval… Et ailleurs, dans un second portrait d’elle qu’il recommence admirablement et qu’il conclut en ces mots : « La figure et le rustre d’un Suisse ; capable avec cela d’une amitié tendre et inviolable. » Introduite à la Cour par sa tante, l’illustre princesse palatine Anne de Gonzague, elle ne lui ressemblait donc en rien pour l’esprit, pour le don d’insinuation habile et de conciliation, pour la prudence ; succédant, à la première Madame, elle en était encore plus loin et véritablement le contraire pour les manières, pour la qualité et le tour des pensées, pour la délicatesse et pour tout, Madame, dans toute sa vie, était et sera ainsi le contraire de bien des choses et de bien des personnes autour d’elle : elle était originale du moins, et tout à fait elle-même. […] À la table, il fallait bien qu’il s’entretînt avec moi, puisque les autres ne lui disaient mot. […] Quand le nom du roi fut hors de cause, Mme de Maintenon eut bientôt à parler pour son propre compte et à répondre aux reproches que lui faisait Madame d’avoir varié de sentiments à son égard : l’ayant laissée dire comme la première fois, l’ayant laissée s’avancer jusqu’au bout et s’enferrer en quelque sorte, elle lui découvrit tout d’un coup des paroles secrètes, particulièrement offensantes pour elle-même, qu’elle savait depuis dix ans et plus, qu’elle avait gardées sur le cœur, et que Madame avait dites à une princesse, morte depuis, laquelle les avait répétées dans le temps mot pour mot à Mme de Maintenon : « À ce second coup de foudre, Madame demeura comme une statue ; il y eut quelques moments de silence. » Puis ce furent des pleurs, des cris, des pardons, des promesses, et un raccommodement qui, fondé sur un triomphe froid pour Mme de Maintenon et sur une humiliation intime pour Madame, ne pouvait être de bien longue durée.
Il faut lire dans les prétendus mémoires le dédaigneux et insolent chapitre qui commence d’une façon toute triomphante : « Écoutez le récit d’un désastre à faire pâlir… », et qui finit par ces mots jetés d’un ton leste : « Et voilà ce qu’il est convenu d’appeler la banqueroute du prince de Guemené ». […] L’amour n’a jamais seulement effleuré son âme ; l’amitié suffit à sa sensibilité… La vie de cœur de Mme de Créqui, aux années actives, se résume en ces deux mots : Elle a aimé son digne oncle, et elle a souffert par son fils. […] c’est Pascal qui nous a fait ce larcin-là. » Je ne sais s’il a dit réellement ce mot, et je ne voudrais pas refuser à Pascal l’honneur d’avoir contribué à l’entière réformation de Mme de Créqui. […] Elle lisait moralistement (c’est son mot), en raisonnant et en extrayant de tout une moralité applicable. […] Seulement, au lieu de s’épancher et de se répandre en longs discours, ce fonds d’humeur s’échappe en mots brefs et secs qui laissent leur empreinte.
Il nous raconte quelque temps après (dans sa préface des Histoires des anciens comtes d’Anjou, 1681), qu’un ami à qui il avait fait cadeau d’un de ces rares exemplaires de son Athénée ne put se résoudre à lui en faire compliment à cause des vers qu’il y avait entremêlés, et que ce même ami à qui il donna à lire quelques jours après sa version en vers du prophète Daniel s’excusa de lui en dire un seul mot, prétextant que sa vue était très affaiblie. […] Colbert, il le définissait très bien en peu de mots : C’est un écrivain rapide, dont le style est ce qu’il a de moins mauvais ; il n’est pas sans savoir, mais il est sans aucun jugement, traduit mal, ne fait rien raisonnablement que les généalogies. […] Il ne me reste plus qu’un mot à dire de Marolles, et ce mot m’embarrasse un peu. […] [NdA] Dans un écrit de Furetière, Nouvelle Allégorique, ou histoire des derniers troubles arrivés au royaume d’Éloquence (1659), on lit : « Il y vint (à l’armée du Bon Sens) un illustre abbé de Marolles, qui poussa ses conquêtes jusques dans les terres de Tibulle, Catulle, Properce, Stace, Lucrèce, Piaule, Térence et Martial ; terres auparavant inconnues à tous ceux de sa nation ; cependant il les dompta, et les mit sous le joug de ses sévères versions, et il les traita avec telle exactitude et rigueur, que de tous les mots qu’il y trouva, il n’y eut ni petit ni grand qu’il ne fît passer au fil de sa plume, et qu’il n’obligeât à parler français et à lui demander la vie… » Ce jugement ne ferait guère d’honneur à la critique de Furetière qui était d’ailleurs un homme d’esprit, mais il est à croire qu’il ne parlait pas sérieusement quand il écrivait cela.
Livet d’avoir songé à procurer (c’est l’ancien mot) une nouvelle édition de ces histoires de Pellisson et de d’Olivet, en y joignant quantité de notes et de pièces qui en varient et en rafraîchissent la lecture. […] En un mot, les vieux académiciens voisins de la fondation et contre lesquels, à ses débuts, Boileau avait eu à guerroyer vécurent assez pour donner la main à des académiciens plus jeunes et qui, dès le début, se retrouvaient opposés à leur tour à Boileau déjà mûr ou déjà vieux. […] Les lettres patentes de 1635, et le projet qui avait précédé, exprimaient en termes très nets le but des études et l’objet des travaux de l’Académie ; l’espoir « que notre langue, plus parfaite déjà que pas une des autres vivantes, pourrait bien enfin succéder à la latine, comme la latine à la grecque, si on prenait plus de soin qu’on n’avait fait jusques ici de l’élocution, qui n’était pas à la vérité toute l’éloquence, mais qui en faisait une fort bonne et fort considérable partie » ; que, pour cet effet, il fallait en établir des règles certaines ; premièrement établir un usage certain des mots, régler les termes et les phrases par un ample Dictionnaire et une Grammaire exacte qui lui donneraient une partie des ornements qui lui manquaient, et qu’ensuite elle pourrait acquérir le reste par une Rhétorique et une Poétique que l’on composerait pour servir de règle à ceux qui voudraient écrire en vers et en prose : que, de cette sorte, on rendrait le langage français non seulement élégant, mais capable de traiter tous les arts et toutes les sciences, à commencer par le plus noble des arts, qui est l’éloquence, etc., etc. […] Il l’aurait voulu avoir sur le Génie du christianisme le lendemain de la publication ; plus tard, sur les grandes œuvres poétiques qui ont fait schisme (je suppose toujours un Richelieu permanent et immortel) ; il aurait exigé, en un mot, que les doctes parlassent, n’attendissent pas l’arrêt du temps, mais le prévinssent, le réglassent en quelque sorte, et qu’ils donnassent leurs motifs ; qu’ils fendissent le flot de l’opinion et ne le suivissent pas. […] L’originalité de La Bruyère n’est pas d’avoir fait des portraits tels quels, à la diable, et dessinés plus ou moins couramment à la plume, par manière de jeu de société, comme on les brochait avant lui, mais de les avoir faits serrés, profonds, savants, composés, satiriques, en un mot tels qu’un grand peintre seul les pouvait faire.
Je ne dirai pas avec l’enthousiaste éditeur que, grâce à elle, on a maintenant « le dernier mot » du caractère de Collé. […] Bonhomme emploie les mots de la langue au hasard, sans en savoir la valeur. […] Et sur ce mot élévation, entendons-nous bien : il est relatif. […] Le jeune homme se plaignait d’être timide, de ne savoir où placer son mot en conversation ; Collé lui répond : « Suivez et commentez, pour ainsi dire, les idées des personnes avec lesquelles vous causez, vous serez sûr de réussir. […] Il est bon, lorsqu’on prétend juger les hommes célèbres et d’un grand talent, vers qui, pourtant, on ne se sent pas porté de goût, de se contrarier un peu, de faire effort pour être juste ; il est bon, en un mot, d’être un peu gêné ; et Collé, n’écrivant contre Voltaire que pour lui seul ou pour des amis intimes, ne se gêne pas du tout.
Les portraits que trace Malouet dans un de ses premiers chapitres, et qui forment comme sa galerie des États généraux, n’approchent certes pas, même de bien loin, de ceux qu’un Retz a tracés dans sa galerie de la Fronde, et un Saint-Simon dans ses tableaux de la Régence ; mais les principaux traits sont fort justes, fort ressemblants, et le mot propre du caractère de chacun est souvent donné. […] » A ce mot de propositions articulé d’un certain ton, Mirabeau bondit, et toisant son interlocuteur : « Ma proposition, dit-il, est de vous souhaiter le bonjour » ; et il sortit. […] Que l’on mette aujourd’hui cette phrase mystérieuse et pleine de sous-entendus en regard de la page des Mémoires où éclate le Mirabeau véritable dans toute sa hideur et sa beauté91 : rien ne nous montre mieux combien l’histoire a de doubles fonds, et tout ce que la postérité a à faire avant d’arriver sur bien des points à savoir le dernier mot ; il y aura auparavant à lever bien des scellés et à ouvrir bien des serrures. […] Napoléon, qui s’entend à juger son monde, a dit en courant sur le prince Lebrun un mot qu’il ne faudrait pourtant pas négliger dans un portrait complet ; c’est dans une lettre à son aide de camp Lemarois, datée de Mayence, 2 avril 1813 : « . . . […] Il a eu un beau mot pour définir la Société de Jésus, qu’il connaissait bien : « C’est, disait-il, une épée dont la poignée est à Rome, et la pointe partout. » Ce qui ne l’empêcha pas, quand les Jésuites furent supprimés, de se faire honneur de prendre jusqu’à un certain point leur parti.
Mais il m’a pénétré le cœur comme eût fait le récit d’une vie douloureuse et puissante, dite avec des mots simples et profonds… Comme vous valez mieux que moi, mon ami ! […] Il m’en a témoigné le désir, vous n’aurez donc qu’un mot à lui dire de ma part : mais venez avec lui la première fois, car les premières fois me sont toujours fatales. […] Il y a aussi des mots de sympathie qui m’ont été au cœur et qui m’ont consolée de tous les maux de ma vie, autant que je puis l’être. […] Si elles sont défavorables, je ne vous impose pas, mon ami, la corvée de me les dire, mais vous pouvez d’un mot m’engager à insister ou m’en empêcher. […] En un mot, elle a la puissance et le cœur, et plus on la connaîtrait en tous ses orages, plus on lui resterait attaché par cet attrait qui intéresse aux natures singulières en même temps que par ce nœud qui lie aux êtres profondément humains.
En littérature seulement, c’est-à-dire roman, poëme et théâtre, on a pu trouver avec plus de fondement, en effet, que les promesses avaient quelque peu menti, que les saturnales duraient et s’étendaient avec insolence, que la boue des rues et l’ordure des bornes remontaient trop souvent jusqu’au balcon, que les grands talents à leur tour donnaient le pire signal et manquaient à leur vocation première, qu’ils s’égaraient, qu’ils gauchissaient à plaisir dans des systèmes monstrueux ou creux, en tout cas infertiles ; en un mot, qu’ils n’amusaient plus et qu’ils avaient cessé de charmer. […] Mais ces générations, dont nous parlons ici, et desquelles nous nous glorifions d’être, ne sont pas tombées ; elles vivent encore, elles n’ont pas tout à fait abdiqué et peuvent dire un dernier mot. […] L’improbité est un mot bien dur à articuler : il ne demeure que trop constant néanmoins que cette qualification flétrissante pourrait, sans trop d’impropriété, s’appliquer à bien des actes et des relations où des gens de talent obérés s’engagent et se dégagent tour à tour. […] Un homme d’esprit, qui avait trempé autrefois dans le métier, disait en plaisantant que le mot révolutionnairement, par sa longueur, lui avait beaucoup rapporté. […] Mais quand les grandes doctrines sont taries, qu’on ne peut plus que les simuler encore par simple gageure et jeu, quand les questions d’ambition personnelle et d’amour-propre débordent, que la popularité à tout prix est la conseillère, on devient facile et de bonne composition ; les acceptions distinctes s’effacent ; tous les efforts de l’Académie, bien loin de pouvoir rétablir les nuances entre les synonymes, ne sauraient maintenir leur sens moyen au commun des mots ; les termes d’homme de talent, d’écrivain consciencieux, se prodiguent pêle-mêle à chaque heure, comme de la grosse monnaie effacée.
Il a des mots écrasants pour les financiers, dont le corps, fait-il dire à son Persan, se recrute parmi celui des laquais. […] Il dit son mot sur les affaires actuelles, sur le système de Law, dont il fait la critique. […] Ce mot de religion ne doit pas nous tromper sur la pensée de Montesquieu. […] Et il y avait aussi en lui un causeur brillant, coquet, ne voulant pas en société lâcher un mot qui ne fût une saillie ou une pensée. […] Il ne soufflait mot des Juifs, et le peuple de Dieu avec ses lois révélées tenait moins de place dans son ouvrage que les sauvages de l’Amérique ou de l’Océanie.