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1698. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les deux Tartuffe. » pp. 338-363

C’est le premier Tartuffe seul qui vit pour les foules, justement parce qu’il n’est qu’une trogne haute en couleur, aux traits simplifiés et excessifs, une tête de jeu de massacre. […] (Et je pourrais ajouter que les figures les plus populaires ont été souvent créées par des esprits fort médiocres : tels Robert Macaire ou Joseph Prudhomme.) — Alphonse Daudet a conçu et fait vivre vingt personnages d’une vérité plus rare que Tartarin, d’une observation plus difficile, plus aiguë, plus curieuse ; et peut-être est-ce du seul Tartarin que les siècles se souviendront. […] et bien plus largement que les autres, lesquelles ou ne sont autorisées que dans un seul lit ou ne le sont pas du tout ! […] Et, par cela seul qu’il applique à une passion profane le vocabulaire et les images de la « mystique » chrétienne, il se trouve presque composer, sans le savoir, une sorte d’élégie idéaliste aux airs déjà vaguement lamartiniens : Ses attraits réfléchis brillent dans vos pareilles… Il a sur votre face épanché des beautés Dont les yeux sont surpris et les cœurs transportés ; Et je n’ai pu vous voir, parfaite créature, Sans admirer en vous l’auteur de la nature, Et d’une ardente amour sentir mon cœur atteint, Au plus beau des portraits où lui-même il s’est peint. […] Reste le Tartuffe que j’appelais le « second Tartuffe », et qui est, en réalité, le seul.

1699. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Ducis. » pp. 456-473

La pièce d’Abufar, la seule tout à fait originale qu’il ait composée, fut représentée en avril 1795. […] On a souvent raconté comment il échoua auprès de Ducis, qui refusa tout, le Sénat, la Légion d’honneur : Je suis, disait-il, catholique, poète, républicain et solitaire : voilà les éléments qui me composent, et qui ne peuvent s’arranger avec les hommes en société et avec les places… Il y a dans mon âme naturellement douce quelque chose d’indompté, qui brise avec fureur, et à leur seule idée, les chaînes misérables de nos institutions humaines. […] Je suis, mon cher ami, comme un pauvre hibou, tout seul, sicut nycticorax in domicilio. […] Au moment où je vous écris, disait-il à Bernardin de Saint-Pierre, à qui la plupart de ces jolies lettres de la fin sont adressées, je suis seul dans ma chambre : la pluie tombe, les vents sifflent, le ciel est sombre, mais je suis calme dans mon gîte comme un ours qui philosophe dans le creux de sa montagne. […] » Puis, s’appuyant sur mon épaule pour descendre, et m’ayant consulté sur l’effet de son bouquet, le seul sans doute que la saison eût pu lui offrir : « Mon ami, ajouta-t-il avec une figure dont l’expression m’est encore présente, les anciens couronnaient de fleurs les sources où ils avaient puisé.

1700. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — II. (Fin.) » pp. 206-223

En entendant ces nombres heureux et cette musique nouvelle unie à la couleur, on se rappelle le mot de Chênedollé, que « Chateaubriand est le seul écrivain en prose qui donne la sensation du vers ; d’autres ont eu un sentiment exquis de l’harmonie, mais c’est de l’harmonie oratoire : lui seul a une harmonie de poésie ». […] Fénelon seul, sans songer à copier ni à inventer, et par une simplicité naturelle de goût, a retrouvé sous sa plume et recommencé facilement la Grèce. […] L’amitié seule et la pensée de Mme de Choiseul l’animaient encore, et son dernier soin, dans ses derniers jours, fut pour elle et pour qu’on lui ménageât l’émotion que la nouvelle de son état devait lui causer. […] Un seul trait vous peindra la douceur de son âme philanthropique : « Que n’est-il donné à un mortel, s’écriait-il souvent, de pouvoir léguer le bonheur !

1701. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Préface de la seconde édition »

Car ce qu’il importe de savoir, ce n’est pas la manière dont tel penseur individuellement se représente telle institution, mais la conception qu’en a le groupe ; seule, en effet, cette conception est socialement efficace. […] Ce ne sont pas les particules non-vivantes de la cellule qui se nourrissent, se reproduisent, en un mot, qui vivent ; c’est la cellule elle-même et elle seule. […] Aussi acceptons-nous très volontiers le reproche qu’on a fait à cette définition de ne pas exprimer tous les caractères du fait social et, par suite, de n’être pas la seule possible. Il n’y a, en effet, rien d’inconcevable à ce qu’il puisse être caractérisé de plusieurs manières différentes ; car il n’y a pas de raison pour qu’il n’ait qu’une seule propriété distinctive6. […] Il est vrai seulement que les individus en sont les seuls éléments actifs.

1702. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre V : M. Cousin historien et biographe »

Corneille et Racine ont fait des discours admirables, et n’ont pas créé un seul personnage tout à fait vivant. Shakspeare n’a pas fait un seul discours concluant et éloquent, et toutes ses figures ont le relief, la vérité, l’animation, l’originalité, l’expression des physionomies réelles. […] Et, pour cela, l’on n’a pas besoin d’une longue explication ; souvent une phrase suffit ; un seul mot, comme un éclair, déchire le voile obscur du temps, ramène en pleine lumière les figures cachées, rallume dans leurs yeux ternes la divine flamme de la vie. […] « Commençons par celui qui l’a le mieux connue et qui certes ne l’a pas flattée, La Rochefoucauld. » Ne vous méprenez pas, lecteur zélé ; souvenez-vous que « les deux seules bonnes et complètes éditions sont celles de Renouard, 1804 et 1817, et celles de la collection Petitot. […] Cousin a naturellement l’accent oratoire, et dans ce tableau de mœurs élégantes, de galanteries aimables, de jolis péchés et d’amusements littéraires, le style simple de la narration aisée était le seul qui ne fût pas déplacé.

1703. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VIII : M. Cousin érudit et philologue »

Il a tenté, un instant, de l’écrire en philosophe ; il a voulu trouver les lois des faits, et l’ordre de leur succession ; il a improvisé la fameuse théorie des quatre systèmes, les seuls, disait-il, qui puissent exister, et qu’on retrouve à toutes les époques de la philosophie. […] « Ce sont là les seules petites découvertes cartésiennes que j’ai faites en Hollande. » Un peu plus tard il apprend que la Bibliothèque royale de Paris contient la correspondance de l’abbé Nicaise et de Leibnitz. […] Tout ce qui se rapporte à un homme de génie n’est pas la propriété d’un seul homme, mais le patrimoine de l’humanité… Retenir, altérer, détruire la correspondance d’un tel personnage, c’est dérober le public, et, à quelque parti qu’on appartienne, c’est soulever contre soi les honnêtes gens de tous les partis. […] Cousin s’enfonce dans ces noires galeries, il songe au retour, et d’un élan, sans qu’on s’y attende, le voilà remonté dans la philosophie, dans la haute histoire, dans le grand style, dans le monde supérieur où il eût dû toujours vivre, et qui est le seul digne de sa science et de son talent. […] La seule différence entre ces deux esprits, c’est que Bossuet était serein dans la grandeur et s’y trouvait dans son assiette, tandis que M. 

1704. (1927) Des romantiques à nous

Mme d’Houdetot, laissée seule par son amant Saint-Lambert, appelé aux armées, est sa voisine de campagne. […] Au fait, le résultat seul comptera. […] Les seuls enchantements qu’elle ait connus et qui aient orienté l’essor de ses désirs, sont ceux de la merveilleuse chanson chrétienne. […] Leur art en rejoignait un autre, un vieil art russe, quelque peu byzantin, son seul ancêtre légitime. […] Ce fut pour lui une révélation étonnante* Il devint, d’après le conseil du sage, l’homme d’un seul livre.

1705. (1880) Goethe et Diderot « Diderot »

« La raison, — dit-il, — la raison seule fait des croyants » ; ce qui, en tout état de cause, est une bêtise. […] Voltaire, seul, se doutait de quelque chose : « Mes frères, qui vivra verra !  […] Il s’éparpillait dans trop de choses pour être ce qu’il faut dans une seule quand on y veut tout écraser. […] Nul écrivain ne fut mieux d’un seul jet que cet écrivain, qui ne fut lui-même qu’un jet toute sa vie. […] Ne sont-ils pas de grands gouvernements à eux seuls ?

1706. (1916) Les idées et les hommes. Troisième série pp. 1-315

Tous les peuples d’Europe, un seul excepté, le nôtre. […] … N’a-t-elle pas fait, à elle seule, la Réforme ? […] Le seul ouvrier, le pasteur, s’est marié peut-être étourdiment. […] Seul, Potterat dédaigne la tentation de Mauser et de sa monnaie. […] Le seul changement que M. 

1707. (1873) Molière, sa vie et ses œuvres pp. 1-196

En est-il un seul parmi nos contemporains qui échangeât volontiers sa gloire contre leur existence ? En est-il un seul capable de ces résignations et de cette ténacité ? […] Quant à Molière, en sa qualité de directeur, il avait un cheval pour lui seul. […] Sa seule faute est d’être né dupe comme tant d’autres naissent fripons. […] — Mais la haine littéraire ne dicte pas seule à Le Boulanger de Chalussay ses odieuses attaques.

1708. (1854) Causeries littéraires pp. 1-353

j’ai donné, dans ce seul mot, la clef de toutes les œuvres de M.  […] Elle dit adieu à son amant sans lui adresser un seul reproche. […] Ponsard, et vaut à lui seul toute la tragédie de Lucrèce. […] c’est bien à toi seul que je me sacrifie. […] La royauté ne tombe pas seule.

1709. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

La paix ne me convient pas ; la guerre seule me plaît. […] Mais ce qui est l’instrument de cette civilisation en est d’abord la seule forme et la seule pensée. […] C’est le seul mot arabe que je sache. […] Que Dieu accorde son secours à Conrad, car celui des hommes est bien lent ; seul il obtiendra le prix, puisque seul il brave les fatigues et les dangers. […] Sous ce rapport seul, il serait digne d’un haut intérêt.

1710. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

Maintenant je resterai seule. — Seule et pensive. — Oui, Madanika. […] Et c’est pourquoi, demeuré seul, ses perplexités redoublent. […] On se substitue à lui dans une question où lui seul est juge. […] Une seule chose m’a inquiété. […] La seule raison d’être de l’un et de l’autre, c’est qu’ils se font pendant.

1711. (1914) En lisant Molière. L’homme et son temps, l’écrivain et son œuvre pp. 1-315

Pour les hommes de génie c’est la meilleure et c’est presque la seule qui leur convienne. […] Tant y a que c’est bien le seul ridicule qu’il ait eu. […] Orgon n’est pas le seul personnage de la pièce qui soit pieux et qui soit ridicule. […] Il a été l’auteur de cette révolution qui a remplacé l’extraordinaire par le vrai et l’imagination par le goût des peintures morales, il l’a été par le seul fait de son existence, par le seul fait de son arrivée à Paris et de son succès en 1659 Il a été l’avènement de la Comédie. […] Ainsi, quand même il ne le voudrait pas, Molière, par sa seule présence et son seul succès, ferait, dans l’art dramatique la révolution que j’ai dite.

1712. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

Vous verrez comme habituellement je suis seule. […] Car la pluie seule de Zeus faisait croître pour eux les froments, les orges et les vignes aux belles grappes. […] disent-ils, alors, tu es seul ! […] Quoique seul à prendre la défense des chats, Moncrif lutte avec courage. […] Seule la pièce de Frédégonde et Brunehaut eut du succès.

1713. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 367-370

Le Journal des Savans, qu’il se chargea de continuer seul, après la mort de M. […] Les volumes qui sont de lui, offrent une variété si étonnante de matieres, qu’on a peine à se persuader qu’un seul homme ait pu y suffire.

1714. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Millet Francisque » p. 168

Et que vous jettez son livre loin de vous, il ne vous voit pas ; peut-être seul dans son cabinet, se relisant avec complaisance, se félicite-t-il d’être l’homme de tant de rares concepts. […] Elle sera seule dans les ténèbres ; elle entendra autour d’elle les soupirs de cent amans heureux, son cœur et ses sens s’enflammeront des plus ardens désirs, elle appellera les malheureux à qui elle a fait concevoir tant de fausses espérances ; aucun d’eux ne viendra, et elle aura les mains liées sur le dos.

1715. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Étienne de La Boétie. L’ami de Montaigne. » pp. 140-161

Oui, tous bientôt vont passer devant cette ruine, devant cette chapelle et cet autel détourné, devant ce site sauvage et mystérieux dont on savait presque seul les sentiers et dont on avait, l’un des premiers, reconnu le caractère. […] « Je crains l’homme d’un seul livre », a-t-on dit en plus d’un sens. […] Que d’autres craignent cet homme d’un seul livre : pour moi, quand c’est M. le docteur Payen, bien au contraire, je le cherche, j’aime à le voir d’abord et à le consulter ; et ce respect affectueux qu’il ressent pour l’objet de son étude, aisément lui-même il l’inspire. — M.  […] À ce prix, inquiet sur ce seul point, rassuré sur le reste, je me résigne à vivre en exil, à ne point revoir la maison natale, et, avec cette amère certitude, j’attendrai le décret du destin, soit que l’ennui d’un ciel étranger doive m’enlever avant l’heure, soit qu’il plaise à la Parque de me laisser longtemps survivre. […] Je n’ai voulu qu’indiquer le seul coin par où l’admirable chapitre des Essais laisse à désirer et à redire.

1716. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire du règne de Henri IV, par M. Poirson » pp. 210-230

Les succès de Henri IV dans cette première campagne, en prouvant aux princes lorrains leur impuissance quand ils étaient seuls, les poussèrent bon gré mal gré entre les bras de l’Espagne. […] En une grande tempête, l’une des plus assurées confiances que l’on peut avoir, c’est quand on sait que le pilote entend bien son état… Pour te le peindre d’un seul trait de pinceau, je te dis que c’est un grand roi de guerre, et je conseille à quiconque de ses voisins, qui se voudra jouer à lui de n’oublier hardiment rien à la maison. Quant aux particularités de son naturel, il l’a extrêmement vif et si actif, que, à quoi qu’il s’adonne, il s’y met tout entier, ne faisant jamais guère qu’une seule chose à la fois. […] C’est le prince du monde, continue Du Fay, qui a le plus de créance et de fiance en ceux qui le servent, et qui les traverse le moins en leurs charges, lui semblant que depuis qu’il a une fois fait élection de quelqu’un en quelque chose, il lui doit laisser faire son devoir sans l’en empêcher… Et n’y a rien en quoi il fasse gloire de s’en faire croire seul qu’aux principaux coups de la guerre, lorsqu’il se trouve à cheval. […] Si la France s’était assise et établie sous Henri IV et sur les bases de la société d’alors, si elle y avait acquis son ciment qui l’eût fixée sous la forme qu’elle semblait affectionner de 1600 à 1610, l’élément prédominant, je l’ai dit, eût été le gentilhomme rural, disséminé dans le pays, le cultivant, mais aussi le possédant ; prenant volontiers la charrue après l’épée, mais ayant aussi seul le droit de porter l’épée, ayant le droit de justice sur le paysan, etc.

1717. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « François Villon, sa vie et ses œuvres, par M. Antoine Campaux » pp. 279-302

En vertu du don de joyeux avènement, leur peine était remise à tous les prisonniers d’une ville où le roi entrait après son sacre, et par le seul fait de la présence de Louis XI à Meung dans ces circonstances, Villon obtenait sa grâce et se trouvait libre6. […] Nous savons, pour l’avoir mainte fois observé, combien l’invention est rare en poésie, combien la gent versifiante est moutonnière, et qu’une forme, une veine, une seule note, une fois trouvée, se copie et se répète ensuite à satiété jusqu’à ce qu’une autre ait succédé, qu’on épuise à son tour. […] Ainsi la seule pièce de Millevoye, La Chute des feuilles, a produit toute une postérité de mélancoliques et d’infirmes gémissants ; La Pauvre Fille de Soumet a eu aussi sa génération malingre et plaintive. […] Ce n’était pas seulement chez lui dégoût instinctif des fadeurs pastorales, et manque absolu peut-être, extinction, causée par la misère, du sens des beautés de la nature ; c’était encore répugnance profonde pour un cadre où toutes ses habitudes se trouvaient désorientées ; répugnance constante et qui ne se dément pas une seule fois dans son œuvre. […] c’est toute sa réponse. — On a cherché quelle était au juste l’originalité de Villon dans cette charmante pièce qui, seule, suffirait à assurer son renom.

1718. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite et fin.) »

Robespierre monte à la tribune, et c’est la première, la seule fois que je l’ai vu adroit et même éloquent. […] C’est au retour de ce voyage de Varennes qu’il reçut un de ces témoignages touchants qui se gravent dans le cœur comme la seule digne récompense du dévouement désintéressé. […] Comme on m’accordait en cette partie plus d’expérience et de lumières qu’aux députés étrangers à cette administration, on ne fut pas étonné des compliments de Barnave ; mais je compris ce qu’ils signifiaient, et je me prêtai volontiers à l’explication qu’il cherchait : il eut l’air, après la séance, de traiter particulièrement avec moi la même question, et nous restâmes seuls au comité. […] Le roi seul eût été sincèrement disposé à suivre une marche plus raisonnable. […] Jay sur Raynal, qui est en tête de la dernière édition de l’Histoire philosophique des deux Indes, Notice vague et générale comme on les faisait en ce temps-là, ne contient qu’une seule anecdote neuve tirée d’une lettre de M. de Lally au comte Portalis : on y voit l’abbé Raynal et M. de Lally au naturel, tous deux gens à démonstrations, à grands sentiments et à embrassades.

1719. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. J. J. AMPÈRE. » pp. 358-386

L’une, seule, a prévalu au dehors, et, à dater de ses spirituels articles au Globe sur Goëthe (1827), M. […] Ampère nous est revenu un historien littéraire de plus en plus consommé et enrichi ; dans ce genre élevé et combiné tel qu’il l’embrasse, il nous a rendu et nous rend incessamment ce que lui seul pouvait faire. […] Et ce n’est pas un pur accident et chez un seul personnage ; toute la forme de mauvais goût autour de lui reproduit, comme dans un pendant, les bizarreries courantes d’Ausone à Sidoine. […] Quelques inconvénients achètent tant d’avantages ; du moment qu’on ne choisit plus une seule route rapide et déjà ouverte, mais qu’on veut occuper l’ensemble du pays et se conformer à l’entière réalité du sujet, on a des intervalles pénibles et qui ne se peuvent supprimer. […] Dans un temps où il y aurait encore une Anthologie française, une seule pièce pareille suffirait pour y marquer un nom.

1720. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. Joubert »

. — En littérature, je ne suis pas tout à fait de cet avis constitutionnel, je ne crois pas absolument au jury des seuls confrères, ou soi-disant tels, en matière de goût. […] des esprits tout envahis d’eux-mêmes, de leurs prétentions rivales, de leurs intérêts d’amour-propre, et, pour le dire d’un mot, des esprits trop souvent perdus de tous ces vices les plus hideux de tous que la littérature seule engendre dans ses régions basses. […] La seule fonction publique de M.  […]  » Une de ces pensées, par exemple, qui s’inscrivaient toutes seules sur les arbres, sur quelque vieux tronc bien chenu, tandis qu’il se promenait par les bois un livre à la main, la voulez-vous savoir ? […] « On parle de leur imagination : c’est de leur goût qu’il faut parler ; lui seul réglait toutes leurs opérations, appliquant leur discernement à ce qui est beau et convenable.

1721. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « La jeunesse du grand Condé d’après M. le duc d’Aumale »

Ce que les autres hommes n’obtiennent que par un génie, une fortune ou un effort exceptionnels : le souvenir de la postérité, la mention de leurs noms dans les annales futures, les princes en sont sûrs par cela seul qu’ils sont venus au monde, et si tout est vanité, comme je n’en doute point, cela est pourtant une des vanités les plus recherchées des mortels. […] Car d’abord c’est le seul moyen de voir de près les mœurs, les sentiments, les âmes des humbles et la lutte pour l’existence sous ses formes les plus simples et les plus tragiques. […] Dans tous les cas, les facultés dont est composé le génie d’un soldat sont presque toujours d’une espèce assez humble ; le degré seul en est quelquefois éminent. » Ainsi raisonne-t-on à l’âge heureux où l’on a toutes les impertinences. […] Ce mouvement de Gassion, la seule trace que j’en découvre, c’est peut-être dans ce bout de phrase qu’on a lu : « Laissant Gassion à droite avec quelques escadrons pour dissiper tout nouveau rassemblement de la cavalerie wallonne, Anguien », etc. […] Au commencement de la bataille, « tous les escadrons sont sur une seule ligne ; Gassion en conduit sept et prend à droite, Anguien à gauche, un peu en arrière avec huit ».

1722. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre premier »

Les Italiens nous méprisaient, et ne songeaient guère à nous faire participer à ces biens de l’esprit dont ils jouissaient tout seuls, ni à nous passer ce flambeau de la vie, dont parle Lucrèce. […] La Renaissance et la Réforme ne furent d’abord qu’une seule et même cause, ayant pour ennemis tous ceux qu’offusquait cette double lumière. […] Telle était l’ardeur de Marguerite pour la science, qu’en 1524 l’évêque de Meaux, Briçonnet, lui écrivait « Madame, s’il y avoit au bout du royaume ung docteur qui par un seul verbe abrégé peust apprendre toute la grammaire autant qu’il est possible d’en sçavoir, et ung aultre de la rhétorique, et ung aultre de la philosophie, et aussy des sept arts libéraux, chacun d’eux par un verbe abregé, vous y courriez comme au feu. » Elle voulait tout savoir, et savoir vite. […] La seule chose qu’on y pût censurer, c’était un trop grand nombre de vers embarrassés et obscurs, et de la théologie en stylem arotique. […] Au reste, la seule chose certaine est aussi la seule qui nous importe.

1723. (1887) Discours et conférences « Rapport sur les prix de vertu lu dans la séance publique annuelle de l’Académie française »

Et d’abord, vous êtes seuls au monde à la récompenser ; puis, vous ne récompensez que les plus humbles vertus ; puis, vous les récompensez si modestement que, si quelqu’un pouvait avoir l’idée de concourir en vue de vos médailles, oh ! […] On ne se souvient pas qu’un seul de ses élèves, et elle en a eu par centaines, soit revenu au mal. […] La vieille mulâtresse est toujours là ; elle a soixante-douze ans ; un cancer lui a rongé la moitié de la figure, et pourtant elle court encore les rues avec son panier d’ananas, cherchant à récolter la petite somme nécessaire au repas des délaissées dont elle est le seul soutien. […] Elle fait marcher le moulin, charge les sacs, soigne les bêtes de somme, fait le ménage à elle seule. […] … Mais, Messieurs, personne n’en sait rien, ou plutôt nous ne savons qu’une seule chose, c’est que chacun la trouve dans les inspirations de son cœur.

1724. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE XIV »

C’est même la seule victime qu’il soit certainement en état de faire. […] Claude refuse, voulant rester seul maître de son oeuvre, et il laisse Cantagnac discuter, en tête-à-tête avec sa femme, la vente de cette maison qui représente l’apport de sa dot. […] C’est à peu près quarante sous par homme que ce canon transcendant pourra tuer dans une seule bataille. […] La poésie seule peut soutenir, avec ses ailes, de telles monodies intercalées au milieu d’une pièce. […] Or, par une incroyable faute de logique, l’auteur l’a frappée au seul endroit où elle n’était pas vulnérable.

1725. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame Émile de Girardin. (Poésies. — Élégies. — Napoline. — Cléopâtre. — Lettres parisiennes, etc., etc.) » pp. 384-406

C’était assurément la seule chance qu’ait eue dans sa vie le général Cavaignac d’être comparé au pasteur Endymion. […] On finit par croire qu’avec de l’esprit, beaucoup d’esprit, et un tour de main extrêmement habile, on peut tout faire, tout contrefaire : contrefaire, je ne le nie pas ; mais avec de l’esprit seul, on ne fera jamais ni du sentiment, ni de la passion, ni de la nature, ni du drame, ni de la religion. […] Sais-tu que le seul témoin des temples autrefois renommés n’est plus qu’une colonne brisée, que l’herbe et la giroflée couronnent ? […] Le style en est assurément le côté le plus remarquable, le seul même vraiment remarquable : non pas que la trame m’en paraisse de qualité solide, subsistante et sincèrement louable ; mais il est éclatant, souvent ferme et toujours habile. […] La société parisienne est observée à fleur de peau ; elle est saisie dans son travers, dans son caprice d’une saison, d’un seul jour, d’une seule classe qui se dit élégante par excellence.

1726. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Lambert et madame Necker. » pp. 217-239

En voyant les gens de lettres si assidus chez elle, et Messieurs de l’Académie y dîner deux fois par semaine, ses envieux ne manquèrent pas de l’accuser de tenir bureau d’esprit : C’était, dit Fontenelle, à un petit nombre d’exceptions près, la seule maison qui se fût préservée de la maladie épidémique du jeu, la seule où l’on se trouvât pour se parler raisonnablement les uns les autres, et même avec esprit selon l’occasion. […] Ailleurs, dans un petit Traité de la vieillesse, elle parlera de la dévotion, non pas comme d’un faible, mais comme d’un soutien à mesure qu’on avance en âge : « C’est un sentiment décent et le seul nécessaire… La dévotion est un sentiment décent dans les femmes, et convenable à tous les sexes. » Cette manière d’envisager la religion est irréprochable au point de vue social et moral ; mais le vrai chrétien demande davantage, et je conçois que le digne M. de La Rivière n’ait pas été entièrement satisfait, à cet égard, des dispositions de son amie. […] Mais cette supériorité, continue-t-elle, ne doit pas se mesurer sur le rang seul, car il y a des grandeurs réelles et personnelles, et des grandeurs d’institution. […] Le seul défaut de ces conseils à la lecture, c’est de ne laisser aucun point de repos ; la trame est toute serrée et toujours tendue. […] La passion s’augmente par les retours qu’on fait sur soi : l’oubli est la seule sûreté qu’on puisse prendre contre l’amour.

1727. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — II. (Suite.) Janvier 1830-mars 1831. » pp. 105-127

Ces seuls articles que je cite prouveraient que le projet était déjà arrêté et mûri dans sa pensée dès avant 1830. […] Mais la seule combinaison de la langue de ces trois hommes ne serait-elle donc pas la plus grande et la plus neuve des originalités ? […] Je ferai une seule remarque qui touche au caractère général de l’homme. […] La pratique suivra : La révolution de Juillet ne nous a rendu ni plus ni moins ardents que nous ne l’étions sous le dernier gouvernement… L’obstacle est écarté… il n’y a plus qu’à marcher avec un juste sentiment de ce qu’il y a d’avenir dans ce seul fait : Plus de royauté ennemie des institutions ; et l’on arrivera à tous les biens que tant de systèmes successivement essayés ont promis sans jamais tenir. — Ce n’est pas là de l’optimisme, ajoute Carrel, c’est une juste confiance dans le principe essentiel de notre gouvernement : la souveraineté du peuple représentée par la souveraineté des majorités parlementaires. […] … Oui, vienne cette lutte que nous appelons de tous nos vœux parce que nous la croyons inévitable, parce qu’elle seule peut vider la querelle entre la vieille et la nouvelle Europe !

1728. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre I. Shakespeare — Son génie »

Les génies modernes seuls ont cette profondeur dans le sourire qui, en même temps qu’une élégance, fait voir un abîme. […] À la seule condition qu’un certain équilibre latent soit maintenu et qu’une certaine proportion mystérieuse soit conservée, la plus prodigieuse complication, soit dans le style, soit dans l’ensemble, peut être simplicité. […] La haute critique seule, qui a son point de départ dans l’enthousiasme, pénètre et comprend ces lois savantes. […] Cette simplicité, qui est profonde, est la seule que l’art connaisse. […] Shakespeare, le condor seul donne quelque idée de ces larges allures, part, arrive, repart, monte, descend, plane, s’enfonce, plonge, se précipite, s’engloutit en bas, s’engloutit en haut.

1729. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre I. Après la mort — Shakespeare — L’Angleterre »

À lui seul il contrebalance notre beau dix-septième siècle français et presque le dix-huitième. […] Vivre seule, aller seule, régner seule, être seule. […] En avril 1764, il y avait deux cents ans que Shakespeare était né, l’Angleterre contemplait l’aurore de Georges III, roi destiné à l’imbécillité, lequel, à cette époque, dans des conciliabules et des aparté peu constitutionnels avec les chefs tories et les landgraves allemands, ébauchait cette politique de résistance au progrès qui devait lutter, d’abord contre la liberté en Amérique, puis contre la démocratie en France, et qui, rien que sous le seul ministère du premier Pitt, avait, dès 1778, endetté l’Angleterre de quatre-vingt millions sterling.

1730. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Philarète Chasles » pp. 147-177

Il était même, avec Jules Janin, le seul vivant, vraiment vivant, d’un journal qui ne représente plus que la littérature bien conservée, — une momie à peu près, mais qui fait illusion en l’enveloppant bien. […] Ce qu’on a toujours oublié, ce qu’on oublie toujours encore dans cette question de Galilée, c’est qu’il prétendait être théologien de par les mathématiques et enseigner ce que les docteurs en droit canon, et encore sous le regard ouvert de l’Église, ont seuls le droit d’enseigner. […] « Cette société — dit-il — écrasait l’individualité, l’individualité qui doit être libre de toute discipline extérieure. » Et, sur ce thème, le voilà qui part, et dans tout ce livre, heureusement très court, il s’en va, tranchant et frivole, le cure-dent à la bouche, faisant le joli, procureur général expéditif de toute une époque, jugeant dix mille couvents sur un seul, gracieux mignon, mais dont l’insolence est de tout généraliser. […] L’attendrissement est donc, en y regardant bien, la seule chose qui appartienne en propre à Philarète Chasles dans sa Psychologie sociale… Certes ! […] quaker sans être chrétien, sans être le chrétien armé de la croix qui est le seul être ayant le droit de prêcher l’amour aux hommes et la puissance de s’en faire écouter, — Philarète Chasles, qui n’est point saint Paul, qui n’est pas saint Jean, pour nous répéter de nous aimer les uns les autres, mais un professeur de morale indépendante et d’instruction obligatoire attendri, ne voit plus la beauté, — cette entité par elle-même ! 

1731. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome II

L’expérimentation peut seule apprendre quelque chose sur les propriétés des objets que l’anatomiste constate et décrit. […] On divise le tissu cellulaire sous-cutané, et l’on trouve dans un seul paquet la veine, l’artère faciale, un nerf et le conduit salivaire. […] Le morceau de membrane muqueuse appartenant à la base de la langue a seul communiqué à l’eau de macération la viscosité limpide du fluide sécrété. […] Le résidu, repris une seule fois par l’alcool absolu froid, a donné une liqueur alcoolique (c) et un résidu insoluble (d). […] Une seule goutte de l’eau de strontiane employée dans l’expérience précédente (3 gouttes = 2 milligrammes) a ramené fortement au bleu le tournesol ainsi rougi.

1732. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Post-scriptum sur Alfred de Vigny. (Se rapporte à l’article précédent, pages 398-451.) »

-B. m’aime et m’estime, mais me connaît à peine et s’est trompé en voulant entrer dans les secrets de ma manière de produire… Il ne faut disséquer que les morts… Dieu seul et le poète savent comment naît et se forme la pensée. […] Leur date de naissance est leur unique mérite et ma seule excuse. […] C’était la seule connue. » Je laisse à la charge de mon savant ami le fait, pour moi très-douteux, de ces documents historiques tout à fait inconnus et inédits : c’est d’ailleurs chose facile à vérifier.

1733. (1874) Premiers lundis. Tome I « Madame de Maintenon et la Princesse des Ursins — I »

La première condition imposée à Louis XIV l’obligeait à détrôner son petit-fils ; et madame des Ursins, que révoltait cette seule idée, repoussait inexorablement au sujet de ses maîtres toute suggestion détournée d’abdication volontaire. […] « Sa Majesté, lui écrit-elle, aussi modeste que vos jeunes demoiselles de Saint-Cyr, voudrait passionnément cacher à tout le monde ce que sa seule conscience l’oblige à faire. » L’abbé Albéroni fut seul chargé de tout conclure ; on connaît assez l’issue.

1734. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VII. De la littérature latine, depuis la mort d’Auguste jusqu’au règne des Antonins » pp. 176-187

Les hommes de lettres d’alors n’ont point décoré la tyrannie ; et la seule occupation à laquelle on se soit livré sous ces maîtres détestables, c’est l’étude de la philosophie et de l’éloquence ; on s’exerçait aux armes qui pouvaient servir à renverser l’oppression même. […] Les écrits polémiques, ceux qui doivent agir sur l’opinion du moment et sur l’événement du jour, n’auraient jamais pu être d’aucune utilité, d’aucune influence avant l’usage de la presse ; ils n’auraient jamais été assez répandus pour produire un effet populaire : la tribune seule pouvait atteindre à ce but ; mais on ne composait jamais un ouvrage que sur des idées générales ou des faits antérieurs propres à l’enseignement des générations. […] La désorganisation de l’opinion publique pouvait seule permettre de tels excès31.

1735. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVIII. Pourquoi la nation française était-elle la nation de l’Europe qui avait le plus de grâce, de goût et de gaieté » pp. 366-378

La grâce était, pour ainsi dire, dans leur situation, une politique nécessaire ; elle seule pouvait donner quelque chose de volontaire à l’obéissance. […] Les hommes de la première classe de la société, en France, aspiraient souvent au pouvoir ; mais ils ne couraient dans cette carrière aucun hasard dangereux ; ils jouaient sans jamais risquer de beaucoup perdre ; l’incertitude ne roulait que sur la mesure du gain ; l’espoir seul animait donc les efforts : de grands périls ajoutent à l’énergie de l’âme et de la pensée, la sécurité donne à l’esprit tout le charme de l’aisance et de la facilité. […] La flatterie qui sert à l’ambition exige beaucoup plus d’esprit et d’art que celle qui ne s’adresse qu’aux femmes : ce sont toutes les passions des hommes et tous leurs genres de vanité qu’il faut savoir ménager, lorsque la combinaison du gouvernement et des mœurs est telle, que les succès des hommes entre eux dépendent de leur talent mutuel de se plaire, et que ce talent est le seul moyen d’obtenir les places éminentes du pouvoir.

1736. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Contes de Noël »

si douce   survivra à cette nuit, Mais j’éprouve un grand besoin d’être seule… Accordez-moi cette grâce, vous que j’ai tant fait souffrir. […] Et alors, pour consoler son frère Yves, Loti l’enferme avec Mme Chrysanthème et va se promener tout seul au bord de la mer. […] Manger ça toute seule… ça durerait trop longtemps… Et puis ça me ferait trop gros cœur… Alors, Monsieur, si ça ne vous gênait pas… au lieu d’aller à la brasserie, nous rentrerions chez moi tout de suite… je ferais cuire le boudin et les crépinettes… Ça serait gentil et ça me ferait tant de plaisir !

1737. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre IX. L’avenir de la Physique mathématique. »

Il y a donc là une question préjudicielle, et à ce qu’il semble l’expérience seule peut la résoudre. […] Le radium seul leur prendrait un peu de leur énergie et il nous la rendrait ensuite sous diverses formes. […] Alors les faits qui d’abord nous apparaissaient comme simples ne seraient plus que les résultantes d’un très grand nombre de faits élémentaires que les lois seules du hasard feraient concourir à un même but.

1738. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Tout ce que j’ai compris de ma vie du clair-obscur » pp. 26-33

Si je vois une verte prairie, de l’herbe tendre et molle, un ruisseau qui l’arrose, un coin de forêt écarté qui me promette du silence, de la fraîcheur et du secret, mon âme s’attendrira ; je me rappellerai celle que j’aime : où est-elle, m’écrierai-je ; pourquoi suis-je seul ici ? […] La perspective rapproche les parties des corps ou les fait fuir, par la seule dégradation de leurs grandeurs, par la seule projection de leurs parties vues à travers un plan interposé entre l’œil et l’objet, et attachées ou sur ce plan même, ou sur un plan supposé au-delà de l’objet.

1739. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 14, de la danse ou de la saltation théatrale. Comment l’acteur qui faisoit les gestes pouvoit s’accorder avec l’acteur qui récitoit, de la danse des choeurs » pp. 234-247

Ceux qui enseignent l’art de la scéne, dit-il, dans un autre endroit du même chapitre, trouvent que le geste qu’on fait de la tête seule est un mauvais geste. […] L’homme de génie dont je viens de parler avoit conçû par la seule force de son imagination que le spectacle pouvoit tirer du pathetique, même de l’action muette des choeurs, car je ne pense pas que cette idée lui fut venuë par le moïen des écrits des anciens, dont les passages qui regardent la danse des choeurs n’avoient pas encore été entendus, comme nous venons de les expliquer. […] Il n’y entroit point un seul pas de notre danse ordinaire.

1740. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Comte de Gramont »

Mais en poésie, où tout est Sentiment et Expression, ces deux purs dons de Dieu, comme la Beauté et la Naissance, le travail compte pour rien quand il est tout seul, et voilà pourquoi la Critique, qu’on croit dédaigneuse et qui ne veut pas même être sévère, laisse là, en fait de poésie, les violettes de la médiocrité, d’autant plus cachées sous le foin de leur gazon que leur parfum ne les trahit pas. […] Chère toujours à la race sans idées et sans cœur des païens de la fantaisie, cette école, qui a trouvé sa colonne d’Hercule dans le dernier livre (Émaux et Camées) de Gautier, — le seul de ses enfants posthumes dont le vieux Ronsard se sentirait de l’orgueil, — cette école pourrait réclamer Gramont comme un des poètes de sa pléiade, mais, tout esclave qu’il en est par le plus large côté de ses œuvres, il lui échappe cependant, et, en résumé, il vaut mieux qu’elle. […] Le poète, amoureux pendant si longtemps de la couleur, de la ligne et des mille nuances de la lumière, qui voulait peindre, comme Titien, la chair d’opale de sa maîtresse et ses … cheveux dont l’or blême frisonne Et se poudre d’argent sous les rais du soleil… cesse tout à coup, dans le dernier livre de ses sonnets de jouer cette gageure enragée qu’exprimait Shakespeare quand il parlait de dorer l’or et de blanchir les lys, et le voilà qui n’a plus souci que de la seule qualité d’expression que Dieu ait permise aux poètes !

1741. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Erckmann-Chatrian » pp. 95-105

I Ces deux têtes dans un bonnet qu’on appelle d’un seul nom, fait avec les deux leurs, Erckmann-Chatrian, pour l’appeler comme ces deux têtes s’appellent, vient de publier de nouveaux Contes fantastiques. […] Nous ne parlons pas du Sacrifice d’Abraham, une grande diablesse d’histoire dont Rembrandt est le héros, laquelle n’a pas de raison pour être plutôt dans ce volume que dans tout autre volume de nouvelles, et qui en aurait une que je sais bien de n’y être pas… Enfin, dans les Contes de la montagne, où l’auteur se détire de son fantastique et commence de s’en dégager, vous ne trouverez que deux contes de cette espèce : Le Violon du pendu et L’Héritage de mon oncle Christian, aussi faibles d’ailleurs que tout le reste ; car pour le Conte qui a presque proportion de roman, et qui envahit, à lui seul, tout le volume, ce très beau Conte de Hugues-le-Loup, je ne le mets point parmi les tentatives fantastiques de l’auteur, malgré la donnée somnambulique qui en fait le dénouement et qui a été si rabâchée depuis Shakespeare, mais je le place plutôt parmi les autres récits, où le talent d’Erckmann-Chatrian, son talent réel et lumineux, — son talent antifantastique — s’est montré avec le plus de suite et d’éclats. […] Cela suffirait seul pour justifier nos observations sur Erckmann-Chatrian, qui, de nature, n’est pas fait pour ce monde à part, surnaturel et clair-obscur, ou fantastique, et dont le talent n’a qu’au plein jour de la vie réelle et corpulente, sa force et son intensité.

1742. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre premier. De la louange et de l’amour de la gloire. »

Ambitieux et faibles, mélanges d’imperfection et de grandeur, une estime étrangère peut seule justifier celle que nous tâchons d’avoir pour nous-mêmes. […] ôtez-la de dessus la terre ; tout change : le regard de l’homme n’anime plus l’homme ; il est seul dans la foule ; le passé n’est rien ; le présent se resserre ; l’avenir disparaît ; l’instant qui s’écoule périt éternellement, sans être d’aucune utilité pour l’instant qui doit suivre. […] On a demandé souvent si le devoir d’un seul ne peut pas suppléer à la gloire.

1743. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre IX. »

Cicéron, il est vrai, nous dit que la poésie d’Anacréon roulait toute sur l’amour. » Mais un docte et ingénieux Hellène, l’empereur Julien98, désignait Anacréon comme ayant fait beaucoup de poésies, les unes sérieuses et graves, les autres agréables et riantes ; et il le nommait à côté d’Alcée et d’Archiloque, avec la seule différence de sa vie prospère et voluptueuse aux rudes épreuves, aux passions violentes ressenties par les deux poëtes de Lesbos et de Paros. On remarque encore que les seuls chants d’Anacréon parvenus jusqu’à nous n’ont été nulle part imités par Horace, ce qui laisse douter si ce sont les mêmes qu’on connaissait à Rome, et si nous n’avons pas seulement l’œuvre d’une époque plus récente, et la tradition affaiblie plutôt que l’inspiration du vieillard de Téos. […] Il peut aussi admirer çà et là dans ce recueil quelques pièces charmantes, et que la Fontaine seul pouvait embellir.

1744. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre IV. Shakspeare. » pp. 164-280

La mort de la majesté royale ne va pas seule. […] Un chêne, avec une seule feuille verte pour tout feuillage, lui aurait répondu. […] Il raconte qu’il a combattu seul contre deux hommes. […] Ils souffraient plusieurs intrigues en une seule. […] L’habit bariolé est le seul habit.

1745. (1908) Esquisses et souvenirs pp. 7-341

À Paris seulement de rares roses font voir cette amère beauté de l’être seul. […] Je préférai la salle du haut où je fus seul. […] Alors, seule par ma bouche, la Muse, fille de Jupiter, se plaignait sur la lyre. […] Il est vrai que je suis tout seul. […] Mais il a fait aussi l’impossible puisqu’il a été le seul critique possible en matière littéraire.

1746. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Appendice. »

Le Périple d’Hannon n’est donc pas « un monument « carthaginois », bien loin « d’être le seul » comme vous le dites. […] Je n’ai pas employé un seul mot spécial sans le faire suivre de son explication immédiatement. […] La seule chose qu’il demandait à ceux qui lui portaient intérêt, c’était qu’on ne s’occupât jamais de lui. […] Après lui, j’eus presque immédiatement pour secrétaire un homme très-jeune alors et dont le nom aujourd’hui bien connu est, à lui seul, un éloge. […] Flaubert, à qui je fais relire ce passage de sa lettre, reconnaît qu’il n’a pas été le premier ni le seul, comme il l’avait cru d’abord, à parler du temple de Thugga.

1747. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre IV. Racine »

L’amour dispense Astrate de générosité, de dignité, d’affection filiale même : l’amour est une vertu, la seule vertu. […] L’orageuse beauté de Phèdre résulte de ce que sa volonté tient à peu près en balance son amour ; une lutte intérieure la déchire, tellement que tout le drame est dans ce seul rôle. […] Reste donc Bajazet, le seul sujet qui ait été choisi par Racine pour sa pure valeur dramatique et réaliste. […] La seule étoffe de son E style nous en avertit. […] Racine en a prolongé seul la splendeur, dans une époque qui n’était plus capable que de l’opéra.

1748. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur de Latouche. » pp. 474-502

Émile Deschamps, donnait au théâtre Favart (1818) Selmours, comédie en trois actes et en vers, qui eut un succès honnête, et Le Tour de faveur à Favart d’abord, puis à l’Odéon (1818), un seul acte en vers qui eut un succès de vogue, jusqu’à cent représentations. […] Il avait le sentiment du brillant de ces anneaux et de je ne sais quelle puissance interne qui les animait : sa colère était de ne pouvoir les rejoindre et en faire un seul corps. […] Il n’écrivit qu’une seule fois au Globe doctrinaire, vers 1827, mais il s’arrangea si bien que ce seul petit article fit scandale ; il y avait fourré toutes sortes d’ironies rentrées à propos du fameux cierge du maréchal Soult. […] Seul, il songeait trop au public. […] Mme Sand cite quelques jolis extraits de ses lettres ; mais elle n’en peut citer une seule tout entière.

1749. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1870 » pp. 321-367

Il me revenait aussi dans les yeux un original singulier, un vieil oncle de ma tante, travaillant dans le fond d’une écurie, à confectionner une voiture à trois roues, qui devait aller toute seule. […] 8 avril Il est touché presque par cela seul : les colorations de la nature et surtout les aspects du ciel. […] 11 juin Ce matin, il lui a été impossible de se rappeler un titre, un seul titre de ses romans, et cependant il possède encore deux facultés remarquables : la qualification pittoresque avec laquelle il caractérise un passant, l’épithète rare avec laquelle il peint un ciel. […] Avant-hier jeudi, il me lisait encore les Mémoires d’outre-tombe, car c’était le seul intérêt et la seule distraction du pauvre enfant. […] Dans quelques jours, dans quelques heures va entrer dans ma vie si remplie de cette affection, et qui, je puis le dire, était mon seul et unique bonheur, va entrer l’épouvantable solitude du vieil homme sur la terre.

1750. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre deuxième. Le génie, comme puissance de sociabilité et création d’un nouveau milieu social »

. — D’autre part, qu’est-ce que la réalité même, pour le poète, sinon une vision, d’un autre genre que celle où le cerveau seul enfante, mais pourtant encore une vision ? […] Du reste, l’art n’est pas le seul jeu qui, en se compliquant, devienne ainsi un travail ; tout jeu, dès qu’il est raisonné et cherche à produire un résultat donné, constitue lui-même un travail véritable, et c’est assurément un travail très absorbant pour un enfant que le jeu de la toupie, du bilboquet ou de la corde à sauter. […] Produire par le don de sa seule vie personnelle une vie autre et originale, tel est le problème doit que résoudre tout créateur. […] Mais il est des génies qui n’ont pour ainsi dire à leur disposition qu’un seul timbre, une seule voix ; les autres ont tout un orchestre ; — différence de richesse beaucoup plus que de nature. […] C’est pour cette raison que nous accordons à toute œuvre d’art nouvelle notre attention, notre sympathie, sans nous donner pour cela tout entiers, ni pour toujours, ni à un seul.

1751. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre II : Examen critique des méditations chrétiennes de M. Guizot »

Le monde fini seul est à sa portée, et c’est le seul qu’elle puisse sonder… L’homme porte en lui-même des notions et des ambitions qui s’étendent au-delà ; … mais de cet ordre supérieur il n’a que l’instinct et la perspective, il n’en a pas, il n’en peut pas avoir la science… L’esprit sait qu’il y a des espaces au-delà de celui que les yeux parcourent ; mais les yeux n’y pénètrent pas. » Plus je médite ces belles paroles, moins je vois la différence qui les sépare de la pensée de M.  […] Or, quelque effort que je fasse, il m’est impossible ici de ne pas voir une seule et même pensée chez M.  […] En montrant et surtout en faisant sentir que la religion apporte une consolation dans les chagrins, une force dans le combat des passions que la philosophie ne donne qu’à très-peu d’âmes, on se placerait, je crois, sur un terrain inexpugnable, sur le terrain de l’expérience intérieure, où chacun est seul juge de ce qu’il éprouve. […] Pour n’en citer qu’une seule, ce n’est pas une petite différence que celle qui consiste à admettre ou à rejeter la pratique de la confession. […] Il n’est pas, que je sache, nommé une seule fois.

1752. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Angellier, Auguste (1848-1911) »

Dans lesquels seuls le fond du cœur peut apparaître. […] À lui tout seul, il est un signe d’élection.

1753. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 163-165

Malheur aux François modernes que ces sortes de peintures ne toucheroient pas, & qui préféreroient l’art froid de raisonner à cette noble sensibilité, seule capable de former des Héros & des Sages ! […] d’Arnaud ne sauroit donc recevoir trop de marques de reconnoissance & de considération de la part de cette classe d’hommes, que leur sagesse & leurs lumieres mettent seuls en état d’apprécier le talent & son véritable usage.

1754. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — I »

Cet état que l’on convoitait et qui seul semblait digne de susciter et d’orienter l’aspiration humaine devait être procuré par la connaissance et la possession de la vérité. […] Il apparaîtra que, dans tous les cas, chacune de ces tendances aspire à supprimer l’autre, afin de régner seule, qu’elle exprime cette aspiration en une suite de propositions qui se donnent pour des vérités et dont le faisceau constitue la Vérité.

1755. (1855) Louis David, son école et son temps. Souvenirs pp. -447

Entre autres, il se mit seul et sans guide, à dessiner le paysage d’après nature. […] Auguste de Saint-Aignan, dont le nom seul chatouillait agréablement l’oreille. […] La sainte égalité plane sur la terre, et d’une immense population fait une seule famille. […] Je ne suis pas le seul qui ait été trompé sur son compte. […] Un fait touchant pourra seul atténuer la teinte sombre de ce récit.

1756. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre II. Les bêtes »

Voilà de ces vers délicats et sobres, aussi gracieux que leur objet, et que La Fontaine seul rencontre. […] Retiré dans sa tanière, il vit seul pendant des semaines entières, sans faire un pas ni dire un mot. […] 122 Il est orgueilleux comme tout être qui vit seul et concentré en lui-même. […] Que cette conception produise un poëme de six mille vers ou un récit de six lignes, le mérite est le même ; la conception primitive est la seule chose qui ait du prix. […] Il est certain du moins que la seule volonté qu’il juge bonne est la sienne, et certes, quand il la contente, elle ne lui fait pas beaucoup d’honneur.

1757. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre I. Les chansons de geste »

Les premiers monuments de notre littérature sont, comme on l’a vu, d’inspiration cléricale : il ne faut pas s’en étonner, les clercs seuls écrivaient. […] Détachés à l’instant des mots qui nous les apportent, leur image réelle subsiste seule en nous : ils s’ordonnent d’eux-mêmes en une vision étrangement nette et objective : on ne lit pas, on voit. […] Adenet, Jean Bodel, Jendeus de Brie, Bertrand de Bar-sur-Aube ne veulent pas perdre le bénéfice de leur travail ; s’ils tiennent au profit, ils aiment aussi la gloire, dont la recherche est un des symptômes caractéristiques de l’individualisme : cela seul nous avertirait que les temps épiques sont passés. […] Tout l’ennuyeux et tout l’extravagant doit périr à nouveau : ce qui mérite de vivre en sera plus au large, et la Chanson de Roland, deux ou trois autres poèmes, une douzaine d’épisodes discrètement détachés d’une centaine de poèmes, n’ont qu’à gagner à représenter seuls l’épopée française, qui y gagnera encore plus. […] Le seul poème complet antérieur sans doute à cette forme du Roland est le Pèlerinage de Charlemagne à Jérusalem (vers 1060), poème d’un caractère assez spécial.

1758. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre I. Polémistes et orateurs, 1815-1851 »

Pareillement dans la religion, un seul pouvoir, le pape : plus d’Église gallicane, plus de libertés gallicanes ; le pape souverain et infaillible. […] Lamennais, attaquant l’individualisme et le principe de l’évidence cartésienne sur lequel il repose, plaçait la vérité dans le consentement universel, accord merveilleux dont une révélation de Dieu peut seule être cause, dont la tradition seule est la manifestation ; et de la tradition, l’Église est dépositaire, le pape interprète et gardien. […] Il lui faut une dynastie séculaire pour avoir un droit royal avéré, indiscutable : autour de ce droit, le limitant et le soutenant de leurs droits, il dresse les deux Chambres, et il forme ainsi le gouvernement, en qui, et en qui seul, il place la souveraineté693 . […] Trop souvent même, les intérêts personnels passèrent au premier plan ; et les orateurs de l’orléanisme nous apparaissent comme occupés surtout de saisir ou de retenir le pouvoir, divisés par leur ambition seule, et montant à l’assaut du ministère, sans s’inquiéter de discréditer la bourgeoisie qu’ils représentent tous au même titre, ou d’ébranler la dynastie dont ils sont tous également serviteurs. […] 1848 vint, et ce fut un moment unique, que celui où Lamartine, pendant des semaines, fut à lui seul tout le gouvernement, et gouverna par son éloquence de poète, calmant, maniant, purifiant les passions populaires, contenant la révolution qu’il avait faite, faisant acclamer le drapeau tricolore par l’émeute qui apportait le drapeau rouge.

1759. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Mme Desbordes-Valmore » pp. 01-46

par l’inconstance ; Ce doute est le seul bien que m’a laissé le sort. […] Ceci n’est point amour en l’air ni paroles de romances. » Et il lui fit, soit de vive voix, soit par lettres (car ces fâcheuses idées lui revenaient plus aigrement quand il était seul) des scènes de jalousie. […] « … La poésie n’est qu’un monstre, si elle altère ma seule félicité, notre union. […] Ce dernier point seul est exact. […] j’ai vu ceux de Lyon, je vois ceux de Paris, et je pleure pour ceux du monde entier. » Humanitaire et chrétienne, elle a des alliances, toutes féminines, d’idées, de sentiments et de croyances, — alliances dont le secret semble perdu, et qu’elle seule pouvait oser, et qui paraîtraient aujourd’hui extravagantes, je ne sais pas pourquoi.

1760. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, le 8 décembre 1885. »

Maintenant (prélude du troisième acte), ce motif est joué seul et développé pour s’éteindre dans la résignation ; mais, en même temps et comme de loin, les cors font résonner le chant solennel par lequel Hans Sachs salue Luther et la Réformation, et qui au poète a acquis une incomparable popularité. […] Dans les Vainqueurs la victoire est celle du renoncement ; c’est l’idée de Parsifal, mais avec cette différence que le renoncement y est victorieux par soi, seul, et sans l’action. […] Ce long travail terminé, j’ai trouvé qu’à l’exception de quatre ou cinq, épisodiques, tous ces motifs n’étaient que les aspects particuliers d’un seul motif générateur. […] Motif 14 (p. 24). — Ne vient qu’une seule fois quand Eva, s’oubliant, dit à Walther qu’elle épousera « Euch, oder keinen !  […] En se bornant à la seule étude musical du drame, on voit que chaque personnage se trouve éclairé de la chaude lumière du génie de Walther.

1761. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VIII, les Perses d’Eschyle. »

Ce long chemin est le seul qui mène au point de vue d’où l’on découvre sous leur vrai jour, non point seulement cette tragédie isolée, mais encore tout le théâtre d’Athènes. […] Si le théâtre athénien domina et inspira tous les autres, c’est qu’Athènes avait été l’âme de ces grandes luttes ; c’est que seule elle avait eu l’idée d’une Patrie commune se levant en masse contre les Barbares, et que cette patrie était née des efforts magnanimes qu’elle fit pour la concevoir. […] Vrais géants du royaume des Ombres, il semble que les portes d’ivoire et de corne de la fable grecque aient dû s’exhausser pour leur livrer passage : la Bible seule en a d’aussi grands. […] Mais, sache-le, jamais, en un seul jour, tant d’hommes ne sont morts. » Et il reprend, après les exclamations désolées d’Atossa, son rapport lugubre. […] Enfin les assaillants, se ruant d’un seul bond, les taillent en pièces, les égorgent, jusqu’à ce que tous aient perdu la vie.

1762. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XVII, l’Orestie. — les Euménides. »

Seule, Pallas, en pleine corruption, garde intacte la pureté native de son premier type. […] En réalité, l’accusé était son seul juge. […] » — « Je l’ai tuée, je ne le nie pas. » Et il l’accuse de deux meurtres commis en un seul ! […] Lui seul représentait la série passée des ancêtres et celle des descendants à venir. […] Seule entre tous les dieux, je sais où sont les clefs du lieu où la foudre de mon père est renfermée.

1763. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1878 » pp. 4-51

Mais ce doux empoignement de mes cheveux, avec ce seul mot, quelquefois cela me revient, et d’y penser, ça me rend tout heureux. » Puis on cause de l’état d’âme après la satisfaction amoureuse. […] Malgré tous leurs enthousiasmes, leur fanatisme, leur idolâtrie, je ne trouve pas au fond d’eux, le deuil des défaites, qui seul peut, selon moi, assurer le retour des partis vaincus. […] * * * — Claude Bernard, dans le délire qui précéda son agonie, ne répétait qu’un seul mot : « Foutu ! […] Je suis seul dans mon wagon, et en la trépidation du chemin de fer, et par la nuit qui vient, ma pensée va au roman des « Deux clowns. » (Les Frères Zemganno.) […] Il me répondait que non, ajoutant que c’était une pièce très rare, très ancienne, et d’un seul morceau, et qu’il me le laisserait cependant à 1 200 francs.

1764. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre IV. Shakespeare l’ancien »

Ces figures grossissantes, propres aux poëtes suprêmes, et à eux seuls, sont vraies, au fond, d’une vérité de rêverie. […] Ces quatorze trilogies à elles seules donnent un total de cinquante-six pièces, si l’on réfléchit que toutes à peu près étaient des tétralogies, c’est-à-dire des drames quadruples, et se terminaient par une satyride. […] Eschyle est, dans toute la littérature hellénique, le seul exemple de l’âme athénienne mélangée d’Égypte et d’Asie. […] Il avait une ville gorgonienne, Cysthène, qu’il mettait en Asie, ainsi qu’un fleuve Pluton, roulant de l’or, et défendu par des hommes à un seul œil, les arimaspes. […] La seule décroissance de la liberté de la presse diminue la stature d’un peuple.

1765. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Poésies complètes de Théodore de Banville » pp. 69-85

Je ne vois à reprendre dans cet ouvrage qu’une seule chose : le romantique y est converti par le classique. […] Personne n’a converti les romantiques ; en gens d’esprit et de talent, ils se sont convertis tout seuls. […] Mais les principes littéraires sont chose légère, dira-t-on, et ils n’ont pas le sérieux que comportent seules les matières d’intérêt politique et social. […] , un sentiment sincère, profond, passionné, qui, pour s’appliquer aux seules choses de l’art, n’en avait que plus de désintéressement et de hauteur, et n’en était que plus sacré.

1766. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Lettres de la mère Agnès Arnauld, abbesse de Port-Royal, publiées sur les textes authentiques avec une introduction par M. P. Faugère » pp. 148-162

L’histoire seule a désormais à en profiter, et encore la seule histoire du monastère dont la mère Agnès a été sinon une grande, du moins une aimable figure. […] Le Maître lui avait écrit en termes exaltés des mérites et des beautés de sa fiancée future, elle essayera de l’entendre, — de supposer qu’il l’entend de l’épouse du Cantique des cantiques, de la seule épouse spirituelle digne de ce nom, de l’Église : Mais en écrivant, ceci, je relis votre lettre, et, comme me réveillant d’un profond sommeil, j’entrevois je ne sais quelle lumière au milieu de ces ténèbres, et quelque chose de caché et de mystérieux dans des paroles qui paraissent si claires et si communes. […] Assurément la mère Agnès connaissait Mme de Sévigné et l’avait entendue causer, puisqu’un jour que cette aimable femme était venue au couvent de la Visitation de la rue Saint-Jacques où se trouvait alors reléguée la mère Agnès par ordre de l’archevêque, et avait demandé à la voir sans en obtenir la permission, la recluse et prisonnière écrivait à l’oncle : « J’aurais beaucoup perdu du fruit de ma solitude si j’avais eu l’honneur de voir Mme de Sévigné, puisqu’une seule personne qui lui ressemble tient lieu d’une grande compagnie. » Cette religieuse, on le voit, connaissait son monde ; causer en tête à tête avec Mme de Sévigné, c’était posséder plusieurs femmes d’esprit à la fois.

1767. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre III : Sentiments et Volonté »

Deux seuls ont essayé de la traiter à fond, notre auteur et M.  […] Par ce seul fait qu’ils ont été l’objet d’actes de bonté répétés, ils deviennent un objet d’affection pour nous. […] Cette apparente simplicité est uniquement un exemple de ce mode d’association qui unit intimement plusieurs idées, qu’elles paraissent être non plus plusieurs idées, mais une seule. » Un son, une couleur, un objet quelconque sont appelés beaux ou sublimes, selon les idées qu’ils éveillent en nous par association. […] Un seul passage (ch.

1768. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Cours de littérature dramatique, par M. Saint-Marc Girardin. (2 vol.) Essais de littérature et de morale, par le même. (2 vol.) » pp. 7-19

Ce dernier point seul est contestable, et tient à tout un système. […] Il y a dans un seul de ses chapitres prodigieusement d’idées, de vues, d’observations, bien plus sans doute que dans le même nombre de pages de Quintilien ou de Longin ; mais il y a aussi du bel esprit. […] Le titre seul de certains chapitres est déjà une épigramme ; ces chapitres, commencés avec gravité, finissent souvent en pointe. […] Il n’a cessé de lui redire sur tous les tons, sur le ton de la raillerie, comme aussi sur celui de l’affection : Ne vous croyez pas supérieur aux autres ; acceptez la vie commune ; ne faites pas fi de la petite morale, elle est la seule bonne.

1769. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « De la question des théâtres et du Théâtre-Français en particulier. » pp. 35-48

Étienne, dans son Histoire du Théâtre-Français pendant la Révolution, a dit : « L’expérience a montré que les comédiens ne s’administrent bien que par eux-mêmes : c’est la seule république du monde où la puissance soit mal exercée par un chef. » Le mot est piquant. […] J’ai cru remarquer que, même dans les lettres, dans cette république des lettres, le plus sûr, pour que les choses aient quelque ensemble, c’est qu’il y ait au fond quelqu’un, un seul ou un petit nombre, qui tienne la main. […] Il existe une presse, et c’est la seule estimée, qui se commande à elle-même cette retenue dont la loi, à la rigueur, l’affranchit. […] Ma seule conclusion serait que, sous une forme politique ou sous une autre, l’État en France a les mêmes intérêts et les mêmes devoirs ; qu’il se tromperait en abdiquant toute direction de l’esprit public, en n’usant pas des organes légitimes d’action qui lui sont laissés ; que c’est faire de la bonne politique que de travailler d’une manière ou d’une autre à contenir la grossièreté croissante, la grossièreté immense qui, de loin, ressemble à une mer qui monte ; d’y opposer ce qui reste encore de digues non détruites, et de prêter la main, en un mot, à tout ce qui s’est appelé jusqu’ici goût, politesse, culture, civilisation.

1770. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Montalembert orateur. » pp. 79-91

En effet, à ne le prendre que dans cette carrière déjà si pleine qu’il a fournie durant treize années au sein de la Chambre des pairs, je vois en lui un orateur des plus distingués, l’avocat ou plutôt le champion, le chevalier intrépide et brillant d’une cause ; mais tous ses développements d’alors roulent sur deux ou trois idées absolues, opiniâtres, presque fixes : il défend la Pologne, il attaque l’Université, il revendique une liberté illimitée pour l’enseignement ecclésiastique, pour les ordres religieux ; il a deux ou trois grands thèmes, ou plutôt un seul, la liberté absolue. […] Il a cessé de voir les questions par un seul aspect ; il unit deux choses contraires, il combine. […] Il est trop aisé et trop simple de n’obéir qu’à un seul souffle direct, impétueux ; le beau de la force humaine est de se contenir, de se diriger entre des impulsions diverses et d’assembler sous une même loi les contraires. […] Il put y faire entendre en toute franchise les accents les plus passionnés pour cette liberté dont l’amour fut le seul excès de sa jeunesse ; il put y développer sans interruption ses théories absolues, qui eussent fait frémir dans une autre bouche, mais qui plaisaient presque dans la sienne.

1771. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre IV. Littérature dramatique » pp. 202-220

Nous avons eu les pièces à terreur, les pièces à surprises macabres, de la parade italienne de Ruzzante nous descendons au drame chirurgical, l’ancienne scène à effet du mélodrame servie, seule, avec beaucoup d’épices et sans sauce. […] En eux seuls l’on sent cet idéal supérieur, ce besoin impérieux qui les unit malgré toutes les dissemblances de manière, malgré les rivalités individuelles et les pousse à une action commune et presque inconsciente pour constituer et imposer un Art grandiose et nouveau. […] Antoine seul ose de temps à autre quelque tentative de ce genre. […] Les deux premiers n’ont pas fourni encore toute leur mesure, mais comptent déjà, le dernier a écrit peut-être les seules comédies de ce temps qui ont chance de survivre avec celles de M. 

1772. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre dixième. »

J’aurais mieux aimé que La Fontaine eût exprimé le sens de l’idée suivante : Heureux celui qu’un seul avertissement engage à triompher de sa passion favorite ! […] Ce mot seul fait la critique de cet Apologue. […] Tircis, qui pour la seule Annette. […] Voilà un de ces vers que La Fontaine seul a su faire.

1773. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre IV. Suite du parallèle de la Bible et d’Homère. — Exemples. »

Homère a mille façons sublimes de peindre une mort violente ; mais l’Écriture les a toutes surpassées par ce seul mot : « Le premier-né de la mort dévorera sa beauté. » Le premier-né de la mort, pour dire la mort la plus affreuse, est une de ces figures qu’on ne trouve que dans la Bible. […] Il les appelle auprès de lui : car s’il a élevé la voix assez haut pour être entendu de toute la maison de Pharaon, lorsqu’il a dit, je suis Joseph, ses frères doivent être maintenant les seuls à entendre l’explication qu’il va ajouter à voix basse : ego sum, Joseph, frater vester, quem vendidistis in Ægyptum  : c’est la délicatesse, la générosité et la simplicité poussées au plus haut degré. […] Au reste, la comparaison qu’Homère a faite des sanglots de Télémaque et d’Ulysse, aux cris d’un aigle et de ses aiglons (comparaison que nous avons supprimée), nous semble encore de trop dans ce lieu ; « et, s’étant jeté au cou, de Benjamin pour l’embrasser, il pleura ; et Benjamin pleura aussi, en le tenant embrassé » : c’est là la seule magnificence de style, convenable en de telles occasions. […] Quelle poésie peut jamais valoir ce seul tour : « Populus tuus populus meus, Deus tuus Deus meus.

1774. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Le comte de Gasparin » pp. 100-116

Malgré elle, la tentation de l’applaudissement l’y saisit, et elle y tombe promptement dans cette corruption, pire que l’esclavage sous un seul maître, et qu’on appelle la soif de cette popularité qui est l’esclavage sous plusieurs ! […] Le comte de Gasparin était, malheureusement, protestant, — mais nous arrivons à ce moment épouvantable dans les croyances et dans les mœurs, où ceux qui ont gardé, à travers toutes les méconnaissances, toutes les erreurs et toutes les révoltes, un pauvre atome de foi chrétienne dans leur esprit et dans leur cœur, ont, de cela seul, une supériorité relative qui les met bien au-dessus de la tourbe des écrivains de la libre incrédulité. […] Pour lui, de cela seul que l’idée est chrétienne, elle n’est plus soumise à la loi qui régit les autres idées dans toutes les sphères de notre activité. […] C’est, disons-le, du mauvais — comme Bossuet seul en pouvait faire ; une chose imposante encore, du mauvais de Bossuet !

1775. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Goethe »

Trois raisons pour expliquer la préoccupation et la fermentation d’alors, dont une seule suffirait : — la renommée de Goethe. […] Il l’écrivit comme tous les hommes qui écrivent leur histoire, en la mêlant si bien avec le mensonge, qu’eux seuls, l’œuvre faite, sont capables de dire : « Voici l’idéal, et voilà la réalité !  […] La femme allemande, dans sa simplicité, dans son éternelle facilité à croire, la femme allemande, née plus séduite que les autres femmes, et qui se rencontre aussi bien dans les ridicules romans d’Auguste Lafontaine que dans les romans et les drames du grand Goethe, voilà en une seule toutes les femmes de Goethe, dont Paul de Saint-Victor a fait, lui, des femmes différentes, en exécutant sur le motif monotone de Goethe de ces prodigieuses variations à faire prendre le change aux plus habiles et leur faire croire que Goethe a mis dans ses femmes ce que lui, Saint-Victor, seul, y a vu !

1776. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VIII. Du mysticisme et de Saint-Martin »

De toutes les religions connues, le Catholicisme ayant le mieux traité la personnalité de l’homme selon ce qu’elle vaut, en lui arrachant son orgueil, a eu seul aussi la puissance de creuser un lit dans les âmes pour ce torrent de l’infini qui submerge certaines natures et finirait par les engloutir ! Lui seul, dans cette balance si vite faussée de nos facultés, a fait équilibre au bassin qui penche sous le poids accablant de l’Amour, en jetant dans l’autre bassin la charge de l’Obéissance ! […] Lui, dont les yeux sont fins et sûrs, n’a-t-il pas senti que, s’il les avait fixés profondément sur ce qui n’est pas seulement une distinction nominale, faite par la haute sagesse gouvernementale de l’Église, il n’aurait pu s’empêcher de voir, se détachant du fond commun des idées et des phénomènes imputés au Mysticisme, pris dans son acception la plus générale et la plus confuse, un autre mysticisme, ayant ses caractères très déterminés ; l’éclatante réalité, enfin, qui contient la vérité intégrale que la Religion seule met sous les mains de nos esprits, mais dont la Philosophie les détourne ? […] Que si elle n’affirmait pas, ne retombait-elle point inévitablement à la monographie pure et simple, aux petites analyses qui pincent les fibrilles des choses au lieu de les briser d’une seule et grande rupture dans leurs muscles les plus résistants ?

1777. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Marie Desylles » pp. 323-339

Il n’y a dans tout ce flot d’amour, qui déferle d’un bout à l’autre en ces lettres éloquentes, qu’un seul événement, en dehors de cet amour qui est le fond du livre, et encore qui ne s’y accomplit pas. […] Cette résolution, qui ne dure qu’une minute, est la seule circonstance étrangère au magnifique développement d’amour qui est l’intérêt profond de ce roman par lettres sans égal ; car Clarisse et Delphine et les Lettres de deux jeunes mariées sont pleines d’événements. […] Ce qui me fait, ce sont ces lettres où elle a laissé l’empreinte tour à tour charmante et brûlante de son âme, et ces lettres-là, je les ai, et, à elles seules, elles m’en apprennent plus que ces déchirures d’histoire qui ne sont peut-être qu’un conte. […] Allez boire, à cette source mystérieuse, le voluptueux et pur breuvage qui ensorcelle… Elle l’a bu, elle, et elle en est morte, nous dit-on à la fin de ce livre, fait avec les fleurs d’une âme qui ne devaient s’épanouir que pour l’amour seul… Il faut bien qu’elle soit morte, puisqu’on l’a publié !

1778. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’architecture nouvelle »

De cette sorte d’édifices, dont l’absence de prétention est la seule excuse, il n’y a rien à dire, sinon que bâtis uniquement en vue de l’acheteur ou du locataire, nul souci d’esthétique n’a pu présider à leur conception. Dans cet ordre de construction, la devise est : faire vite banal, à bon marché ; et les quelques ornements seuls permis à la virtuosité de l’artiste, ne peuvent qu’accentuer la laideur de l’ensemble. […] L’unité de conception n’est pas la seule marque distinctive de la réforme imposée par Horta. […] Leur seul caractère commun est la marque qu’elles portent toutes de la profonde originalité de leur auteur. « La maison-type n’existe pas pour lui »40 a-t-on avec juste raison.

1779. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre VI. Bossuet et Bourdaloue »

Il n’en a publié qu’un seul, sur l’Unité de l’Église, qui était comme le manifeste du gallicanisme. […] Parfois il prêchera pour le roi seul : sur les Devoirs des rois. […] Le seul incident de sa vie est une mission en Languedoc après la révocation de l’édit de Nantes. […] Un seul homme, sans doute, ne leur fut pas inférieur, je veux parler de Fénelon. […] Il construisit ses sermons sur une seule idée, dont il développait les divers aspects.

1780. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre cinquième. De l’influence de certaines institutions sur le perfectionnement de l’esprit français et sur la langue. »

Comment croire que la seule cause de cette différence soit une idée heureuse venue à l’esprit du cardinal de Richelieu ? […] Le génie dans notre pays c’est la réunion, dans un seul homme, de tout ce qu’il y a de bon sens répandu dans tous ; la langue écrite de génie, c’est celle que parle chacun de nous quand il est dans la vérité. […] L’Académie française a seule été un corps fondateur ; et c’est peut-être parce qu’elle a eu la gloire d’établir les règles, qu’elle n’a pas toujours assez estimé le modeste honneur de les maintenir. […] C’était la doctrine catholique proscrite à Port-Royal, où l’on enseignait, d’après saint Augustin, que la grâce seule permet de participer à la communion efficacement. […] Pourquoi cette perfection de la langue générale n’est-elle pas ce style dont on a dit que seul il fait vivre les écrits ?

1781. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mars 1886. »

Carvalho partit seul ; il vit le Lohengrin qui fut joué à son intention, avec un soin particulier, le 10 octobre, et revint plus affermi que jamais dans ses résolutions. […] L’admirable ouverture qui maintenant fait la joie de nos concerts fut enterrée sous les ricanements ; Richard Wagner connut chez nous toutes les blessures sans avoir récolté une seule satisfaction d’orgueil ; il ne pouvait pas aimer Paris et il le détestait. […] Un seul serait à craindre, M.  […] L’œuvre d’art seule devrait nous occuper. […] Les patriotes de la Ligue sont, eux, seuls juges, seuls maîtres, seuls responsables de leur attitude personnelle.

1782. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Introduction »

Une science exacte et positive ne peut point se borner à des affirmations vagues ; elle doit prouver et vérifier ses assertions, c’est-à-dire peser les plus minutieux détails ; un chimiste ne craindra pas de consacrer plusieurs années à l’étude d’un seul corps simple et de ses composés, un zoologiste à celle de quelque humble infusoire que le microscope seul découvre. […] Ils ne s’inquiètent point de concilier Newton avec Leibniz, ni Locke avec Kant, sur la nature du temps et de l’espace, ils acceptent les axiomes sans les discuter, sur la seule garantie du sens commun ; mais ils marchent. […] II), « que les mystiques ont seuls connu la vraie manière de philosopher », n’est-ce pas dire que la métaphysique est d’autant plus haute qu’elle ressemble plus à une effusion ou à une rêverie ? […] L’observation intérieure seule ne suffit donc pas à la plus timide psychologie. […] Cette étude, qui doit servir de point de départ et de base à toutes les autres, est la seule qui ait été cultivée jusqu’ici par les psychologistes.

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