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2060. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre IV. Le Père. — Priam. »

quelle scène étalée aux yeux du lecteur !

2061. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre VIII. Des Églises gothiques. »

Voilà pourquoi il n’y a rien de merveilleux dans un temple qu’on a vu bâtir, et dont les échos et les dômes se sont formés sous nos yeux.

2062. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre III. Suite du précédent. — Seconde cause : les anciens ont épuisé tous les genres d’histoire, hors le genre chrétien. »

Il n’en est pas des vérités comme des illusions : celles-ci sont inépuisables, et le cercle des premières est borné ; la poésie est toujours nouvelle, parce que l’erreur ne vieillit jamais, et c’est ce qui fait sa grâce aux yeux des hommes.

2063. (1761) Salon de 1761 « Peinture — Vien » pp. 131-133

la tête de Psyche devrait être penchée vers l’Amour ; le reste de son corps porté en arrière, comme il l’est lorsqu’on s’avance vers un lieu où l’on craint d’entrer et dont on est prêt à s’enfuir, un pied posé et l’autre effleurant la terre ; et cette lampe, en doit-elle laisser tomber la lumière sur les yeux de l’Amour ?

2064. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Loutherbourg » pp. 224-226

L’œil est partout arrêté, récréé, satisfait.

2065. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — X. Service de nuit. »

Je passe devant la maison de Michas… et tout à coup je vois quelque chose qui, partant du sol, montait si haut que mes yeux n’en pouvaient voir la fin.

2066. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Lettre-préface à Henri Morf et Joseph Bédier » pp. -

C’est alors, cher ami Morf, que tu m’ouvris les yeux, que tu me montras, dans un passé de volonté consciente, toutes les promesses d’avenir.

2067. (1891) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Première série

Cette association, qui la rendra visible aux yeux et sensible aux cœurs ? […] Elles satisfont la raison ; l’expérience, la réalité, le tangible, les yeux ouverts les démentent à chaque mot. […] Voilà ce qu’on gagne à prendre pour argument même en faveur d’une cause ce qui, aux yeux des bonnes gens, va contre elle. […] Mais cela ne lui ferme point les yeux. […] Mes yeux se reposent et aussi mon esprit.

2068. (1923) Au service de la déesse

Autour des yeux, les muscles plissaient tout le visage. […] … Mais on peut aussi facilement le trouver très beau, avec ce front monumental, avec ces yeux extraordinaires, etc. […] Je ne sais pas si elle était blonde ou brune, si elle avait les yeux bleus ou noirs ; et nous ne savons pas la couleur des cheveux et des yeux de Manon que des Grieux aima ; ce renseignement nous est inutile. […] Mais il l’a vue avec ses yeux et il l’a vue selon son âme. […] Il a de bons yeux ; il ne dit rien qu’il ne l’ait vu.

2069. (1880) Goethe et Diderot « Diderot »

Il fermait les yeux et ouvrait la bouche, et cela partait, et ruisselait à noyer cinquante petits Sainte-Beuve là-dedans ! […] La tête de Diderot étant donnée, cette belle tête de Houdon avec ces yeux qui boivent la lumière et ce grand front qui la renvoie, expliquez-vous si vous pouvez les niaiseries, les sottises, disons le mot ! les inepties que je trouve, par exemple, dans les Pensées soi-disant philosophiques du premier volume de l’édition Garnier que j’ai là sous les yeux. […] Ces lettres, qu’on ne croirait jamais, en les lisant, écrites pour une femme aimée, sont — il faut bien le dire, puisque nous les avons là sous les yeux, — le plus nauséabond mélange de bouffissure et de platitude, de sentimentalité niaise et de grossièreté. […] Il l’a haïe et il l’a attaquée furieusement, opiniâtrément, toujours ; voilà l’erreur et le crime à mes yeux, qui n’est ni l’erreur ni le crime aux regards de M. 

2070. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « de la littérature de ce temps-ci, a propos du « népenthès » de m. loève-veimars (1833). » pp. 506-509

La ville où l’on séjourne a beau être embrouillée, inégale, tortueuse, sans ordre et sans plan, pleine de carrefours, de tréteaux de charlatans, de passages et de ruelles, de monuments inachevés dont le pierres encombrent les places, d’arcs de triomphe sans chars ni statues de vainqueurs, de clochers et de coupoles sans croix : quand le soleil est couché, quand, du haut des collines prochaines, le voyageur qui n’est pas entré dans cette ville, et qui n’y a pas vécu, l’aperçoit à l’horizon dessinant sa silhouette déjà sombre sur le ciel encore rougi du couchant, il la voit toute différente ; il y distingue des étages naturels, des accidents dominants, des masses imposantes et combinées ; les édifices, que la distance et l’obscurité achèvent et idéalisent à ses yeux, lui apparaissent selon des hauteurs bien diverses.

2071. (1875) Premiers lundis. Tome III « Sur une pétition de directeurs de théâtres contre les auteurs, compositeurs et éditeurs de musique »

C’est ce dernier mode de perception, moins aisé apparemment à définir, et plus sujet à litige, que paraissent avoir eu en vue, dans leurs plaintes, les directeurs dont nous avons les pétitions sous les yeux.

2072. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Daudet, Alphonse (1840-1897) »

Théodore de Banville Une tète merveilleusement charmante, la peau d’une pâleur chaude et couleur d’ambre, les sourcils droits et soyeux, l’œil enflammé, noyé, à la fois humide et brûlant, perdu dans la rêverie, n’y voit pas, mais est délicieux à voir.

2073. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Deroulède, Paul (1846-1914) »

C’est un vrai poète qui a trouvé cette comparaison devant une carte de France : Et les contours sacrés de son vieux territoire Comme un portrait d’aïeul sont fixés dans mes yeux.

2074. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Pailleron, Édouard (1834-1899) »

De tels titres, tombant sous nos yeux, dans un de ces nids d’acide carbonique que nous appelons à Paris un beau troisième sur une belle avenue, nous communiquent soudain les mêmes élans vers l’être qui agitaient Charles Bovary, dans sa chambre d’étudiant de Rouen.

2075. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Pottecher, Maurice (1867-1960) »

Il a pensé qu’il serait bon d’attirer vers des spectacles simples, sains, moralisateurs, la foule des travailleurs des champs, des paysans, des pauvres, qui n’ont trop souvent rien de beau à se mettre sous les yeux.

2076. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Theuriet, André (1833-1907) »

L’un et l’autre aiment la nature, la contemplent du même œil et l’idéalisent en la copiant.

2077. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vacquerie, Auguste (1819-1895) »

Paul Meurice rappelle ces grandes crises littéraires de leur jeunesse ; d’un œil plus froid aujourd’hui, le grand défenseur du romantisme considère les jours de lutte pour les Burgraves et l’arrivée de Ponsard, posé imprudemment par « l’école du bon sens » en adversaire de Victor Hugo ; Ponsard, dit M. 

2078. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre IV. Suite des précédents. — Julie d’Étange. Clémentine. »

Le Dieu que je sers est un Dieu clément, un père : ce qui me touche, c’est sa bonté : elle efface à mes yeux tous ses autres attributs ; elle est le seul que je conçois.

2079. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre VII. Des Saints. »

Nés souvent dans la cabane du pauvre, vous n’avez étalé aux yeux du monde que d’humbles jours et d’obscurs malheurs !

2080. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Hallé  » pp. 127-130

Ne sentez-vous pas que si le sermon est des jugements de Dieu, votre orateur aura l’air sombre et recueilli, et que votre auditoire prendra le même caractère ; que si le sermon est de l’amour de Dieu, votre orateur aura les yeux tournés vers le ciel, et qu’il sera dans une extase que les peuples qui l’écoutent partageront ; que s’il prêche la commisération pour les pauvres, il aura le regard attendri et touché, et qu’il en sera de même de ses auditeurs.

2081. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 43, que le plaisir que nous avons au théatre n’est point produit par l’illusion » pp. 429-434

Nous arrivons au théatre préparez à voir ce que nous y voïons, et nous y avons encore perpetuellement cent choses sous les yeux, lesquelles d’instant en instant nous font souvenir du lieu où nous sommes, et de ce que nous sommes.

2082. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Law »

Les économistes oublient trop une pensée de Bonald, qu’il est peut-être bon de leur rappeler : « Les révolutions, comme les grandeurs des peuples, ont des causes matérielles et prochaines qui frappent les yeux les moins attentifs, mais ces causes ne sont, à proprement parler, que des occasions ; les véritables causes, les causes profondes et efficaces, sont toujours des causes morales, que les petits esprits et les hommes corrompus méconnaissent. » 1.

2083. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Alcide Dusolier »

J’ai dit ce que je pensais du critique littéraire en Dusolier, qui a débuté par un ouvrage intitulé Nos gens de lettres, un peu trop aimable pour nous tous, mais où l’œil trop bleu de l’auteur et trop noyé de bienveillance avait cependant des justesses et des pénétrations singulières.

2084. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre III. Coup d’œil sur le monde politique, ancien et moderne, considéré relativement au but de la science nouvelle » pp. 371-375

Coup d’œil sur le monde politique, ancien et moderne, considéré relativement au but de la science nouvelle La marche que nous avons tracée ne fut point suivie par Carthage, Capoue et Numance, ces trois cités qui firent craindre à Rome d’être supplantée dans l’empire du Monde.

2085. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

Sans le mélange dont je viens de parler, les gens de qualité de Perse seraient les plus laids hommes du monde ; car ils sont originaires de ces pays, entre la mer Caspienne et la Chine, qu’on appelle la Tartarie, dont les habitants, qui sont les plus laids hommes de l’Asie, sont petits et gros, ont les yeux et le nez à la chinoise, les visages plats et larges, et le teint mêlé de jaune et de noir fort désagréable. […] Les affirmations accoutumées sont: sur ma tête, sur mes yeux. […] Le parti fut accepté ; et, la mère s’étant retirée, l’amant essuya les yeux de sa maîtresse et fit le mariage en un instant. […] Quiconque jette les yeux dessus perd l’idée du paradis. […] Le bas, à la hauteur de six pieds, est revêtu de grandes tables de porphyre ondé, et peint de fleurs tirées avec de l’or et des couleurs, dont la vivacité et l’éclat sautent aux yeux.

2086. (1903) Articles de la Revue bleue (1903) pp. 175-627

« Elle avait des yeux d’étoile et d’épée, tels étaient ses yeux ! […] « Pour ses yeux vainqueurs, d’étoile et d’épée, j’eus un bel amour ; pour son cœur ailé brillant et frivole un dédain léger… » Il rentre en France et au moment même où il publie à Paris ses seconds essais de critique, voici le cri lyrique qui s’échappe du plus profond de son être : « Âme libre, épurée, lointaine, ô mon âme future ! […] Il est fier de sa force, et sa mère est éblouie d’avoir enfanté ce génie, cet être de légende : « Elle se mirait, ma mère, en mes yeux splendides, adorablement clairs, et pénétrés du feu des profonds azurs, en ces yeux, disait-elle, faits de saphir, de cristal et de miel. […] C’est ainsi, si je peux dire, qu’une jeune femme au corps parfait peut paraître nue, sans désagrément pour les yeux, mais qu’une grosse femme gélatineuse sera horrible sans corset.

2087. (1860) Cours familier de littérature. X « LIXe entretien. La littérature diplomatique. Le prince de Talleyrand. — État actuel de l’Europe » pp. 289-399

Thiers, par exemple, compulse toutes les négociations et tous les actes de ces diplomaties diverses, et les étale sous les yeux des siècles pour l’instruction des diplomates présents et futurs, de façon que chaque nation reconnaisse sa pensée, bonne ou mauvaise, dans les actes de son gouvernement, et qu’un nouveau droit public devienne la loi pacifique des nations. […] Sa figure délicate et fine révélait, dans ses yeux bleus, une intelligence lumineuse, mais froide, dont les agitations de l’âme ne troublaient jamais la clairvoyance. […] Indifférent au fond, comme sa vie entière l’a prouvé, à la royauté, à la république, à la cause des rois, à la forme des institutions des peuples, au droit ou au fait des gouvernements, les gouvernements n’étaient, à ses yeux, que des formes mobiles que prend tour à tour l’esprit du temps ou le génie national des sociétés, pour accomplir telle ou telle phase de leur existence. […] Il comprit tout de suite que ce n’était plus le temps des affaires, mais des violences, dans sa patrie ; que ses opinions constitutionnelles et novatrices, son amitié avec Mirabeau, ne rachèteraient pas, aux yeux des girondins embarrassés de leur victoire, des jacobins exaltés, des cordeliers sanguinaires, les torts de sa naissance, de son état, de ses mœurs aristocratiques, de ses talents incriminés. […] Bonaparte, très aristocrate d’esprit et très antidémagogue de caractère, trouvait dans M. de Talleyrand un charme de plus, un parfum de hauts lieux, un écho de grands noms ; qui épuraient, à ses yeux, la république de ces subalternités vulgaires et de ces séides sanguinaires dont la présence lui répugnait dans ses conseils et dont il rougissait devant l’Europe.

2088. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juin 1886. »

Va son souffle,      l’amour convie le printemps : large ouvert      dans notre sein son œil sourit ;       sa flamme couvait : de gais oiseaux gazouillent  vois, elle sourit aux feux du jour. […] » et ces paroles sont portées par une mélodie qui, sereine et douce, monte et plane sur quelques mesures, durant lesquelles l’angélique présence semble être divulguée à nos yeux. […] Pourtant lorsque ce grand drame est joué, qu’il a passé devant nos yeux, qu’il n’est plus qu’un tableau dans notre souvenir et un tressaillement dans notre cœur, notre âme est consolée, rassérénée ; les plaies qu’il avait ouvertes sont fermées ; les endolorissements qu’il avait causés sont calmés. […] Alors l’autre jeune femme, sous le rire chaud de ses yeux noirs, et ce ses dents, et de sombres chevelures dénouées, révéla qu’elle était la Joie ; elle enseignait les tendresses parfumées, le délice des longues nuits, comment les âmes se courroucent en des tumultueux frissons et les hurlements éperdus d’un bonheur qui angoisse, et les sommeils tranquilles, après la tourmente. […] Laforgue, maintenant la forme des vers, a osé déjà varier les rythmes suivant des raisons précises, et violer les sottes règles dites « pour les yeux » : comprenant que les sonorités seules importaient dans la poésie, et qu’un mot singulier y pouvait bien rimer avec un terme pluriel, s’ils avaient même façon d’être prononcés.

2089. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Bossuet et la France moderne »

Il en est à tous les yeux, le cerveau, la volonté, le porte-parole, la « personnification » comme on l’a dit. « Il est le centre des choses spirituelles, le régulateur suprême de toutes les affaires ecclésiastiques, la grande autorité, le chef réel des évêques de France. […] Je vous dis qu’aux yeux de Bossuet, pour abolir l’hérésie, tous les moyens étaient bons surtout les plus odieux, et que la modération dont il semble se parer à nos yeux, n’est que l’indispensable vêtement d’hypocrisie dont s’affublèrent les plus grands criminels politiques et religieux. […] Aux yeux des premiers on faisait miroiter de riches alliances et des faveurs spéciales, tandis qu’on circonvenait les seconds, comme il advint du vieux ministre Ferri dont Bossuet tenta en vain la conversion ; ce qui fit inspira au ministre Bernegger cette phrase bien caractéristique : « Ces beaux projets d’accord ne me semblent, désormais, que de beaux songes ; et, quelquefois, la peau du lion, ne servant plus de rien, on prend celle du renard. […] Quelqu’étrange qu’il paraisse à première vue, le fait est là, sous nos yeux, indéniable et clair : Bossuet, à la tête de l’épiscopat français, fait chasser de France l’élite de la France, cinq cent mille de ses meilleurs citoyens. […] « Il n’y a pour vous que deux voies à suivre : ou bien, cessant de vous répandre en patriotiques imprécations contre un ennemi que l’un des vôtres, l’un de vos héros les plus chers arma de sa propre main, vous ferez rejaillir votre haine contre ce héros ; ou bien, fermant obstinément vos yeux devant la vérité (non pas cette « vérité » que vous enseignez, mais la vérité du monde en lui-même), et continuant d’exalter le traître, vous cesserez de vous indigner contre la réalisation de son vouloir.

2090. (1853) Propos de ville et propos de théâtre

Pour ces deux jolies jambes, il a mis au pillage tous les magasins où les merveilles de l’art et de l’industrie agacent les yeux des passants. […] — Voyez-vous ses yeux grands ouverts, sa bouche grande ouverte aussi ?  […] Et, en effet, pendant la représentation, il était visible à tous les yeux qu’ils ne se sentaient pas bien. […] Un autre affirme qu’il faut fermer les yeux. […] J’ai vu devant mes yeux un superbe épagneul écossais, dont un ciseau ingénieux a fait en moins de cinq minutes, un pointer.

2091. (1903) Le problème de l’avenir latin

L’enclos fleuri caresse l’œil et grise le cerveau : c’est cependant le champ potager, d’apparence fruste et grossière, qui donne du sang et des muscles à l’homme. […] Ses frontières représentent à ses yeux colles de la « civilisation » : au-delà ne règne qu’une barbarie plus ou moins atténuée. […] Le sol demeurerait ferme sous les pas de l’enfant et la nature serait toujours là devant ses yeux, voisine, cordiale, attrayante, réelle. […] Rempli d’une confiance illimitée en sa propre supériorité, aussi indiscutable à ses yeux qu’un dogme, les idées étrangères n’ont pas prise sur son être intérieur. […] Jetons les yeux autour de nous et reconnaissons la marche du monde qui s’effectue à côté de nous, sur des points que, dans notre ignorance et notre vanité, nous ignorons presque.

2092. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre VI. Bossuet et Bourdaloue »

Dans les paroisses aristocratiques de Paris, à Saint-Germain, au Louvre, il ne se lasse pas de rappeler qu’il faut payer ses dettes, et qu’il faut faire l’aumône : il remet sans cesse sous les yeux des riches leurs créanciers et les pauvres. […] Ce que ses yeux ne voient pas, ce dont son expérience ne lui fournit pas les formes, les prophètes et les évangélistes lui en donnent les images. […] Bossuet repasse toutes les grandes scènes de la Bible et de l’Evangile ; il nous les présente avec tout ce que son esprit y attache de sens, y enferme de leçons ; mais ce sont des réalités pour lui que cette histoire juive et cette histoire évangélique : et tout le pittoresque de la religion se déroule à nos yeux, parle à nos sens. […] Le prédicateur a le geste rare, un mouvement de bras égal et monotone, la voix mélodieuse et uniforme, sans autre nuance qu’un peu plus de lenteur ou de rapidité dans le débit : les yeux sont clos ; la mémoire travaille pour représenter la suite du discours appris par cœur ; et parfois l’orateur reprend quelques mots pour ressaisir le fil qui lui échappe.

2093. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre deuxième »

A Venise se trouvait alors le jeune Alexis, fils de l’empereur Isaac, à qui son frère avait fait crever les yeux, après avoir usurpé son trône. […] Il n’est pas étonnant que le même homme qui détourne les yeux de la demeure de ses enfants, de peur de s’attendrir, s’embarque sans enthousiasme, et se souvienne qu’il a souffert du mal de mer dans la traversée. […] Les preuves de la vérité sont matérielles ; elles sont fournies par les sens, dont les témoignages sont si douteux pour tout ce qu’on n’a pas vu de ses yeux, ouï de ses oreilles, interprété par sa passion, il faut s’en rapporter aux sens et à la passion d’autrui. […] Peintre avant tout, et faiseur d’armoiries, comme son père, il n’omet rien de ce qui se voit par les yeux : drapeaux, devises, fêtes, tournois, parures, champs de bataille ; il se tait sur tout ce qui se juge.

2094. (1890) L’avenir de la science « X » pp. 225-238

On pourrait faire des observations analogues sur la morale et le culte et prouver que la morale n’est guère aux yeux des Chinois que l’observation d’un cérémonial établi et le culte que le respect des ancêtres. […] D’un autre côté, les esprits superficiels se pâment en voyant des hommes sérieux s’amuser à traduire et commenter des livres informes qui, à nos yeux, ne seraient qu’absurdes et ridicules. […] Un cadavre disséqué est en un sens horrible ; et pourtant l’œil de la science y découvre un monde de merveilles. […] Narayana étendu sur son lit de lotus, contemplant Brahma qui s’épanouit de son nombril, Lachmi reposant sous ses yeux, n’offrirait-il pas un tableau comparable aux plus belles images grecques ?

2095. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre III. Poëtes françois. » pp. 142-215

Ils entrent dans la mémoire des spectateurs, dit M. de V**, comme un jour doux dans des yeux délicats. […] Le public frappé par le brillant des couleurs, ferme les yeux aux défauts ; & si M. de Voltaire est moins estimé que nos trois grands Poëtes, il est plus goûté, puisqu’il est plus suivi. […] Il est, ainsi que son modèle, trop méthodique dans son ordonnance & trop uni dans ses expressions ; mais ses vers sont travaillés, & la précision qu’ils ont communément donne plus de force aux vérités morales qu’ils renferment : vérités qui aux yeux des hommes vertueux valent bien les fictions poétiques. […] Furetiere, contemporain de la Fontaine, osa publier sous les yeux en 1651. cinquante fables que peu de gens connoissent & que personne ne lit.

2096. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — III. (Fin.) » pp. 246-261

Ce n’était pas le compte de Voltaire, qui prétendait, et avec raison, peindre, animer ses tableaux, tenir le lecteur en haleine et les yeux attachés sur les principaux personnages : « Je jetterais mon ouvrage au feu, si je croyais qu’il fût regardé comme l’ouvrage d’un homme d’esprit… J’ai voulu émouvoir, même dans l’histoire. […] Duclos, comme tous les grammairiens de son école depuis Arnauld jusqu’à Volney et à M. de Tracy, vise trop à émonder l’arbre qu’il a sous les yeux et à le tailler régulièrement, avec méthode.

2097. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — II. (Fin.) » pp. 296-311

Avant d’être à Versailles et pendant qu’il pratiquait la médecine à Aix, Lieutaud avait lu avec des yeux sévères un traité de Sénac, premier médecin du roi ; il envoya ses réflexions critiques à un libraire de Paris pour les publier, mais avec permission de les communiquer auparavant à l’auteur qu’elles intéressaient. […] Vicq d’Azyr, lié avec un grand nombre des promoteurs et des meneurs de la Révolution, ne se rendait à l’évidence qu’à l’extrémité ; il persistait à ne pas voir les choses aussi en noir qu’elles se prononçaient et éclataient de toutes parts à bien des yeux, et il ne désespérait qu’à son corps défendant pour ainsi dire.

2098. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Les Chants modernes, par M. Maxime du Camp. Paris, Michel Lévy, in-8°, avec cette épigraphe. « Ni regret du passé, ni peur de l’avenir. » » pp. 3-19

Et par aucun soleil mon œil n’est altéré. […] À la fin d’une tournée en Écosse, et après en avoir noté en vers les principales circonstances pittoresques, le poète des lacs, revenant au monde du dedans et maintenant à l’esprit sa prédominance vivifiante, disait pour conclusion : Il n’y a rien de doux comme, avec les yeux à demi baissés, de marcher à travers le pays, qu’il y ait un sentier tracé ou non, tandis qu’une belle contrée s’étend autour du voyageur sans qu’il s’inquiète de la regarder de nouveau, ravi qu’il est plutôt de quelque douce scène idéale, œuvre de la fantaisie, ou de quelque heureux motif de méditation qui vient se glisser entre les belles choses qu’il a vues et celles qu’il verra.

2099. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Souvenirs et correspondance tirés des papiers de Mme Récamier » pp. 303-319

Quoi qu’il en soit, l’impression que laisse la lecture parallèle de ces lettres de M. de Montmorency et de M. de Chateaubriand est toute favorable au premier ; sa belle et bénigne figure ressort à nos yeux par le contraste ; et dans les générations modernes, ceux qui auront quelque souci encore de ces choses pourront dorénavant se faire une idée de ce dernier homme de bien des grandes races, de ce dernier des prud’hommes (comme on disait du temps de saint Louis), dont la renommée de vertu avait été jusqu’ici renfermée dans un cercle aristocratique tout exclusif. […] Ballanche : il avait des parties vagues, nuageuses, inintelligibles, je le crois, même pour lui, et qu’il ne parvint jamais à éclaircir, qu’il ne débrouilla jamais aux yeux du monde ni aux siens ; il avait des puérilités et des enfances, des bégayements sans fin dans l’entretien habituel, et, tout à côté de cela, il lui sortait de la bouche, et surtout de la plume, des paroles d’or.

2100. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — II » pp. 107-121

Toutes les formes gouvernementales ne sont à mes yeux que des moyens plus ou moins parfaits de satisfaire cette sainte et légitime passion de l’homme. » Lorsqu’on entre dans la politique avec une telle visée, on court risque de rencontrer sur son chemin bien des mécomptes. […] Le premier des devoirs est, à mes yeux, de lutter dans les élections comme ailleurs pour l’opinion qui m’a porté au pouvoir, que j’y défends et qui m’y prête son loyal appui.

2101. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — I » pp. 146-160

Vous voyez, mon père, que ce n’est plus à Pont-de-Vaux qu’il faut songer à aller ; aussi je n’ai plus que Milan ou la paix devant les yeux. […] Je veux pourtant suivre la veine et la dessiner nettement aux yeux pour qu’il n’y ait pas doute ni incertitude.

2102. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Mélanges scientifiques et littéraires, (suite et fin.) »

A mes yeux, il n’est point d’honneur plus grand pour une intelligence humaine que de saisir et d’embrasser l’ensemble de vérités qui constituent les lois des nombres et des mondes. […] Biot que l’Académie lui avait donné pour commissaire, et sous les yeux duquel il avait à répéter l’expérience décisive d’un de ses beaux mémoires, au moment où le résultat annoncé se produisit, M. 

2103. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803, (suite et fin) » pp. 16-34

La sœur de Balzac, Mme Surville, dont la ressemblance physique avec son frère saute aux yeux, est faite en même temps pour donner à ceux qui, comme moi, ont le tort peut-être de n’admirer qu’incomplètement le célèbre romancier, une idée plus avantageuse qui les éclaire, les rassure et les ramène. […] Chateaubriand s’est défini un jour à mes yeux « un épicurien, qui avait l’imagination catholique », et je ne crois pas m’être trompé.

2104. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. »

Mais une note de date postérieure, qu’il a pris soin d’ajouter, nous apprend que cette noble cause s’était entièrement dénaturée, à ses yeux, depuis 1831, par l’introduction de l’élément révolutionnaire. […] Appelé à Bayonne à la fin d’avril 1808 et invité à y rester pendant tout le séjour qu’y fit Napoléon, M. de Senfft assiste au drame espagnol qui s’y joue ; il fait des portraits plus ou moins ressemblants des principaux personnages qu’il a sous les yeux.

2105. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine »

 » Les lettres que nous avons sous les yeux sont une de ces correspondances qui, le croirait-on ? […] On se perd dans ces infiniment petits de la flatterie courtisanesque, et c’est bien le cas de dire avec un annotateur du temps, dont j’ai le manuscrit sous les yeux : « Fadeur et impertinence de tout côté ! 

2106. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite.) »

Je crois que cela me réjouirait le blanc de l’œil. […] On dit que l’œil du maître engraisse le cheval ; aussi vous êtes-vous donné les violons de ce qui aurait peut-être embarrassé les autres, pour ne pas dire pire. » Après Lawfeld, dont le résultat n’avait pas été décisif, la position des ennemis derrière Maëstricht rendant ce siège impossible pour le moment, on se résolut à celui de Berg-op-Zoom, afin d’avoir du moins à montrer un fruit de la victoire.

2107. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « GLANES, PÖESIES PAR MADEMOISELLE LOUISE BERTIN. » pp. 307-327

Une des questions qu’elle se pose le plus habituellement est celle-ci : Si la mort est le but, pourquoi donc sur les routes Est-il dans les buissons de si charmantes fleurs ; Et, lorsqu’au vent d’automne elles s’envolent toutes, Pourquoi les voir partir d’un œil mouillé de pleurs ? […] Sa petite Chloé surtout est charmante ; cette jolie enfant, pendant qu’Homère chante et que tous se taisent, ne peut s’empêcher d’interrompre et d’interroger, de demander si tous ces grands combats sont vrais, si le vieil aveugle les a vus jadis de ses yeux : « Connaissais-tu Priam, Pâris, son frère Hector, Et le fils de Laërte et le sage Nestor ?

2108. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Léonard »

On s’aperçoit aisément, en y jetant les yeux, que le poëte diplomate redouble d’efforts, et que, novice en cela peut-être, il s’applique à justifier par son zèle la distinction dont il est honoré. […] … » Combien de fois dans ma pensée J’ai dit, les yeux baignés de pleurs : Ne verrai-je plus les couleurs Du dieu qui répand la rosée ?

2109. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre IV. De l’amour. »

Si, au contraire, il a existé dans la vie un heureux moment où l’on était aimé ; si l’être qu’on avait choisi était sensible, était généreux, était semblable à ce qu’on croit être, et que le temps, l’inconstance de l’imagination, qui détache même le cœur, un autre objet, moins digne de sa tendresse, vous ait ravi cet amour dont dépendait toute votre existence, qu’il est dévorant le malheur qu’une telle destruction de la vie fait éprouver ; le premier instant où ces caractères, qui tant de fois avaient tracé les serments les plus sacrés de l’amour, gravent en traits d’airain que vous avez cessé d’être aimé ; alors, que comparant ensemble les lettres de la même main, vos yeux peuvent à peine croire que l’époque, elle seule, en explique la différence, lorsque cette voix, dont les accents vous suivaient dans la solitude, retentissaient à votre âme ébranlée, et semblaient rendre présents encore les plus doux souvenirs ; lorsque cette voix vous parle, sans émotion, sans être brisée, sans trahir un mouvement du cœur, ah ! […] Le don de soi, ce sacrifice si grand aux yeux d’une femme, doit se changer en remord, en souvenir de honte, quand elle n’est plus aimée ; et lorsque la douleur, qui d’abord n’a qu’une idée, appelle enfin à son secours tous les genres de réflexions, les hommes condamnés à souffrir l’inconstance, sont consolés par chaque pensée qui les attire vers un nouvel avenir ; les femmes sont replongées dans le désespoir, par toutes les combinaisons qui multiplient l’étendue d’un tel malheur.

2110. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens III) Henri Rochefort »

Elle est singulière, cette tête si connue : longue, maigre jadis, au front proéminent, aux pommettes saillantes, aux yeux enfoncés, aux lèvres serrées, au nez un peu court et comme arrêté d’un coup de ciseau qui a trop mordu : tête tourmentée et bizarre, pleine de protubérances et de méplats, surmontée d’un toupet comme on en voit flamboyer sous le lustre des cirques, et où il y a, en effet, du Méphisto et du clown, et peut-être aussi du chevalier de la triste figure. […] Quelle est la vraie pensée qui vit dans ces yeux ?

2111. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre X. La commedia dell’arte en France pendant la jeunesse de Molière » pp. 160-190

Après, poussant plus loin cette triste figure, D’un cocu, d’un jaloux, il en fait la peinture ; Tantôt à pas comptés vous le voyez chercher Ce qu’on voit par ses yeux, qu’il craint de rencontrer ; Puis, s’arrêtant tout court, écumant de colère, Vous diriez qu’il surprend une femme adultère, Et l’on croit, tant ses yeux peignent bien cet affront, Qu’il a la rage au cœur et les cornes au front.

2112. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

Ce dessous de carte est que, malgré les apparences d’amitié qui, aux yeux du public, unissent mesdames de Montespan et de Maintenon, elles se détestent depuis près de deux ans ; « que la première est révoltée de l’orgueil de la seconde, qui veut bien être au père, point à la mère » ; et qui a bien d’autres torts. […] Le bâtiment s’élève à vue d’œil.

2113. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie-Antoinette. (Notice du comte de La Marck.) » pp. 330-346

Ce n’était pas une beauté, à prendre chaque trait en détail : les yeux, bien qu’expressifs, n’étaient pas très beaux ; son nez aquilin semblait trop prononcé : « Je ne suis pas bien sûr que son nez fût celui de son visage », a dit un témoin spirituel. […] L’affaire du Collier fut le premier signal de ses malheurs, et le bandeau qui lui couvrait jusque-là les yeux se déchira, Elle commença à sortir de son hameau enchanté, et à découvrir le monde tel qu’il est quand il a intérêt à être méchant.

2114. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Pensées de Pascal. Édition nouvelle avec notes et commentaires, par M. E. Havet. » pp. 523-539

L’excellent travail que j’ai sous les yeux, et où M.  […] Le caractère philosophique et indépendant qu’il a tenu à y laisser n’en saurait altérer le prix, et il y ajoute plutôt à mes yeux.

2115. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre troisième. L’appétition »

La critique du savoir découvre deux limites : ce qui est au-delà de notre atteinte, et ce qui est trop près de nous pour être posé devant nous : « parce qu’on ne peut voir ses yeux, ce n’est pas une raison pour dire qu’on n’a pas d’yeux » ; de même l’activité de la pensée ne peut se voir elle-même comme un objet.

2116. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre I : Rapports de cette science avec l’histoire »

Aux yeux du plus grand nombre, la science ne vaut que par son utilité ; mais il n’en est pas ainsi du vrai savant : son seul objet est de connaître pour connaître ; la science a une valeur intrinsèque, indépendante de ses résultats. […] Sans doute les événements extérieurs ont un éclat qui frappe tous les yeux ; mais pour ceux qui aiment la pensée, quel plus grand événement qu’une grande idée, une vue originale sur la nature des choses ?

2117. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VI : M. Cousin philosophe »

Peu à peu la vue perce les nuages ; on entrevoit des ouvertures lumineuses ; le brouillard s’évapore ; devant les yeux se déroulent des perspectives infinies ; des continents entiers s’étalent embrassés d’un coup d’œil ; et l’on se croirait arrivé au sommet de la science et au point de vue du monde, si là-bas, sur un coin de la table, on n’apercevait un volume de Voltaire posé sur un volume de Condillac.  […] C’est qu’alors, en effet, Schelling avait déjà publié son écrit le plus net : Bruno ou de l’Unité absolue, et que, pour n’y point voir le panthéisme, il faudrait se crever les yeux.

2118. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXIII. Des éloges ou panégyriques adressés à Louis XIV. Jugement sur ce prince. »

C’est à elle que Louis XIV dut les principales qualités de son âme ; cette droiture, ennemie de la dissimulation, et qui ne sut presque jamais s’abaisser à un déguisement ; cet amour de la gloire qui, en élevant ses sentiments, lui donnait de la dignité à ses propres yeux, et lui faisait toujours sentir le besoin de s’estimer ; cette application qui, dans sa jeunesse même, fut toujours prête à immoler le plaisir au travail ; cette volonté qui savait donner une impulsion forte à toutes les volontés, et qui entraînait tout ; cette dignité du commandement qui, sans qu’on sache trop pourquoi, met tant de distance entre un homme et un homme, et au lieu d’une obéissance raisonnée, produit une obéissance d’instinct, vingt fois plus forte que celle de réflexion ; ce désir de supériorité qu’il étendait de lui à sa nation, parce qu’il regardait sa nation comme partie de lui-même, et qui le portait à tout perfectionner ; le goût des arts et des lettres, parce que les lettres et les arts servaient, pour ainsi dire, de décoration à tout cet édifice de grandeur ; enfin, la constance et la fermeté intrépide dans le malheur, qui, ne pouvant diriger les événements, en triomphait du moins, et prouva à l’Europe qu’il avait dans son âme une partie de la grandeur qu’on avait cru jusqu’alors n’être qu’autour de lui. […] Ainsi, de quelque côté qu’on jette les yeux on voit des succès et des malheurs ; on voit de grandes vues et de grandes fautes ; on voit le génie, mais tel qu’il est chez les hommes, et surtout dans les objets de gouvernement, toujours limité ou par les passions, ou par les erreurs, ou par les bornes inévitables que la nature a assignées à toutes les choses humaines.

2119. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [Baudelaire.] » pp. 528-529

Je ne veux pas non plus paraître plus prude à vos yeux que je ne suis.

2120. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXXI » pp. 323-327

On n’achète guère de livres quand on lit tant les journaux ; les yeux et l’esprit ont leur ration chaque matin, et s’en tiennent là.

2121. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Note »

. — Je dirai tout de suite que pour avoir sous les yeux tout ce que j’ai écrit ex professo sur La Mennais, il faudrait y joindre l’article sur la Correspondance publiée par M.

2122. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de madame de Genlis sur le dix-huitième siècle et la Révolution française, depuis 1756 jusqu’à nos jours — I »

Elle a pu se croire une puissance dans le siècle, du moment qu’elle s’en est venue accomplir, vers l’an de grâce 1800, je ne sais que le mission prédestinée, dogmatisant parmi les châteaux et les palais, à la plus grande gloire d’en haut ; et maintenant que la lumière est revenue, qu’on n’a plus que faire de précurseur, et que la vie militante a fait place à la vie privée, c’est peut-être un devoir à ses yeux d’enregistrer publiquement les mérites et indulgences qui lui reviennent de cette pieuse lutte, engagée sous son patronage.

2123. (1875) Premiers lundis. Tome III « Lafon-Labatut : Poésies »

N’est-ce point, en effet, l’antique Aveugle qui a dit : « La Muse qui l’aima entre tous lui partagea le bien et le mal : elle le priva des yeux, mais lui donna une voix harmonieuse. » Cette compensation céleste s’est bien des fois vérifiée depuis.

2124. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bataille, Henry (1872-1922) »

Cela a l’air d’être né ainsi, tout fait, un soir, sur des lèvres, près du cimetière et de l’église d’un village de Bretagne, parmi l’odeur âcre des ajoncs écrasés, au son des cloches tristes, sous les yeux surpris des filles aux coiffes blanches.

2125. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Béranger, Pierre-Jean de (1780-1857) »

Ernest Renan On ne peut nier que son œuvre ne soulève aux yeux du critique une singulière difficulté.

2126. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bouchor, Maurice (1855-1929) »

Je cueille au hasard ces beaux vers : Ne te lamente pas, homme des nouveaux âges, Parce que, dans les yeux des voyants et des sages, Les rêves du passé ne resplendiront plus.

2127. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XVI » pp. 188-192

Sur qui jettera-t-il les yeux ?

2128. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XVII » pp. 193-197

à mes yeux, ils ne sont pas moins remarquables que Louis XIV dans l’histoire des mœurs, et n’ont pas moins ajouté à son influence par leur concours, qu’il n’a ajoute à leur gloire par sa protection.

2129. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 493-499

On peut bien nous présenter un Acteur ayant un pied dans le Cothurne, & l’autre dans le Brodequin ; mais tandis qu’on s’applaudira de cet accord bizarre, ce personnage n’en sera que plus ridicule aux yeux du goût & de la raison.

2130. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre VIII. La Fille. — Iphigénie. »

Conduisez le peuple au théâtre : ce ne sont pas des hommes sous le chaume, et des représentations de sa propre indigence qu’il lui faut : il vous demande des grands sur la pourpre ; son oreille veut être remplie de noms éclatants, et son œil occupé du malheur de rois.

2131. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre II. Amour passionné. — Didon. »

Le vieux Loïs des Masures, Tournisien, qui nous a laissé les quatre premiers livres de l’Énéide en carmes françois, a traduit ainsi ce morceau : …………… Si d’un petit Énée, Avec ses yeux, m’estoit faveur donnée, Qui seulement te ressemblas de vis, Point ne serois du tout, à mon advis, Prinse et de toi laissée entièrement.

2132. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre XVI. Le Paradis. »

Tout est machine et ressort, tout est extérieur, tout est fait pour les yeux dans les tableaux du paganisme ; tout est sentiment et pensée, tout est intérieur, tout est créé pour l’âme dans les peintures de la religion chrétienne.

2133. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre VIII. Bossuet historien. »

Simples spectateurs, nous vîmes, ce qui est admirable, soixante mille hommes s’égorger sous nos yeux pour notre amusement.

2134. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Un petit corollaire de ce qui précède [Mon mot sur l’architecture] » pp. 77-79

Si le goût est une chose de caprice, s’il n’y a aucune règle du beau, d’où viennent donc ces émotions délicieuses qui s’élèvent si subitement, si involontairement, si tumultueusement, au fond de nos âmes, qui les dilatent ou qui les serrent, et qui forcent de nos yeux les pleurs de la joie, de la douleur, de l’admiration, soit à l’aspect de quelque grand phénomène physique, soit au récit de quelque grand trait moral ?

2135. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Doyen  » pp. 153-155

Apollon aurait secoué à ses yeux sa terrible égide.

2136. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Doyen » pp. 244-247

Tant que son fils est sous ses yeux, il lui reste de l’espoir.

2137. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 11, des ouvrages convenables aux gens de génie et de ceux qui contrefont la maniere des autres » pp. 122-127

Section 11, des ouvrages convenables aux gens de génie et de ceux qui contrefont la maniere des autres Les hommes de génie qui sont jaloux de leur réputation ne devroient du moins mettre au jour que de grands ouvrages, puisqu’il ne leur a pas été possible de dérober leur apprentissage aux yeux du public.

2138. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 28, du temps où les poëmes et les tableaux sont apprétiez à leur juste valeur » pp. 389-394

En second lieu, cette piece s’imprime et demeure ainsi sous les yeux du public.

2139. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes de l’Évangile » pp. 89-93

… Où qu’on prît ces héroïnes, qui ne forment pas un bataillon, mais toute une armée dans l’histoire ; qu’on les prît sur notre terre de France, que ce fût sainte Radegonde, sainte Geneviève, sainte Clotilde, et tous ces cœurs vaillants de la vaillance de Dieu jusqu’à Jeanne d’Arc et depuis elle, n’importe où l’historien allât les choisir, elles étaient dignes de s’aligner en face des plus grandes (s’il y en avait) de la Révolution française, et de faire baisser les yeux à leurs portraits, plier le genou à leurs cadavres.

2140. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 7172-17709

Nos premiers méthodistes qui vivoient dans un tems où l’on ne voyoit que par les yeux d’autrui, & où l’autorité des anciens tenoit lieu de raisons, frappés de ces passages, n’ont pas même soupçonné que Scaliger & Priscien se fussent trompés. […] Nous allons les rapprocher ici dans un tableau raccourci, qui sera comme la récapitulation de l’exposition détaillée que nous en avons faite, & qui mettra sous les yeux du lecteur l’ordre vraiment encyclopédique des observations grammaticales. […] Mais l’écriture devant offrir aux yeux toutes les idées comprises dans la signification totale d’un mot, l’idée individuelle & l’idée spécifique, l’idée fondamentale & l’idée accidentelle, l’idée principale & l’idée accessoire ; chaque mot primitif suppose nécessairement plusieurs caracteres, qui servent à en présenter l’idée individuelle sous tous les aspects exigés par les vûes de l’énonciation. […] C’est une erreur que je crois suffisamment détruite par les observations que je viens de mettre sous les yeux du lecteur : je passe à une autre qui est encore plus universelle, & qui n’est pas moins contraire à la véritable notion des idiotismes. […] qu’on ne commande pas les choses passées ni les présentes : chacun a répeté cet adage sans l’entendre, parce qu’on n’avoit pas des notions exactes du présent ni du prétérit ; & il semble en conséquence que personne n’ait osé voir ce que l’usage le plus fréquent mettoit tous les jours sous les yeux.

2141. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

« Quelle innocence dans tes yeux !  […] C’était Sous l’œil des barbares. […] À mes yeux ce prince de la jeunesse s’encanaillait. […] Ce serait pis que d’avoir un jésuite dans son mur ou l’œil de Moscou dans sa table de nuit. […] Le premier de qui les yeux aient été dessillés devant la Ville Anadyomène, c’est Byron.

2142. (1904) En lisant Nietzsche pp. 1-362

Aucun Allemand n’avait-il donc alors des yeux pour voir, de pitié dans la conscience pour déplorer cet horrible spectacle ? […] Il faut avoir au moins le courage d’ouvrir les yeux. […] Ne pouvoir jamais contempler les choses autrement qu’avec ces mêmes yeux ? […] Elle leur fait fermer ou baisser les yeux devant elle. […] … Vous devez être ceux dont l’œil cherche toujours un ennemi, votre ennemi.

2143. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

Nos yeux ont la couleur et l’éclat du ciel. […] La vierge carthaginoise vous reste dans les yeux ; Cymodocée vous reste dans le cœur. […] Quelques-uns de nos maîtres ont débuté sous ses yeux. […] Si ses yeux regardent au ciel, son oreille écoute les cœurs. […] Je ne crois pas qu’on lise ce livre sans avoir les larmes aux yeux.

2144. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Mémoires »

Tantôt son œil se rouvrait avec la flamme du jeune aigle, et ce regard humide et enivré jouait dans le soleil, dont quelque rayon, à travers le bleu des franges, le poursuivait obstinément. […] Il faut voir le portrait ineffaçable de ce père dur et révéré, au nez aquilin, à la lèvre pâle et mince, aux yeux enfoncés et pers ou glauques comme ceux des lions ou des anciens barbares. […] Mais quand il vient à se rappeler que cette société, la première qu’il ait  remarquée, est aussi la première qui ait disparu à ses yeux ; quand il montre la mort dépeuplant par degrés cette maison heureuse, une chambre qui se ferme et puis une autre, et le quadrille de l’aïeule devenu impossible, faute des partners accoutumés, il touche alors à une corde de sensibilité intime dont ses Mémoires nous rendent plus d’un tendre soupir.

2145. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — I. » pp. 166-193

La Correspondance avec Bancal, et quelques autres lettres inédites encore que nous avons eues sous les yeux, nous présentent Mme Roland durant une partie de sa vie qu’elle a moins retracée en ses Mémoires, après les années purement intérieures et domestiques, et avant l’entrée de son mari au ministère. […] Ainsi elle écrit à Bancal : « Il n’est pas encore question de mourir pour la liberté ; il y a plus à faire, il faut vivre pour l’établir, la mériter, la défendre. » Et ailleurs : « Je sais que de bons citoyens, comme j’en vois tous les jours, considèrent l’avenir avec un œil tranquille, et, malgré tout ce que je leur entends dire, je me convaincs plus que jamais qu’ils s’abusent. » Et encore : « Je crois que les plus sages sont ceux qui avouent que le calcul des événements futurs est devenu presque impossible. » Elle s’étend en un endroit (p. 233) avec un sens parfait sur cette patience, vertu trop négligée et toutefois si nécessaire aux gens de bien pour arriver à des résultats utiles ; mais, par une singulière contradiction, elle manque, tout aussitôt après, de patience. […] On ne la voit pas prendre feu par la tête, à quinze ans, pour un M. de Guibert, et M. de Boismorel, dont le rôle près d’elle semble analogue, ne fut qu’une figure très-régulière et très-calme à ses yeux.

2146. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la loi sur la presse »

Messieurs les sénateurs, j’ai, avant tout, à m’excuser d’une irrégularité apparente et qui pourra tout d’abord sauter aux yeux. […] J’ai sous les yeux un mémoire ou une note très-digne de considération, qui m’a été remise à ce sujet et qui, répondant point par point aux arguments allégués, conclut à l’admission et au rétablissement de la preuve contre les fonctionnaires. […] Aux yeux du moraliste, cet article inscrit dans une loi paraîtra un jour bien digne d’une époque où ceux qui respectent le moins la règle des mœurs, qui sont les plus habitués à manquer aux devoirs de la famille, à préférer constamment la mauvaise compagnie à la bonne, à violer les convenances et à friser le scandale, qui semblent même les plus disposés par moments à s’en faire gloire avec fatuité, sont en même temps les plus jaloux d’être soustraits à la médisance publique et se montrent les plus offensés si la chronique les effleure.

2147. (1890) L’avenir de la science « VIII » p. 200

Tout prend à ses yeux un sens et une valeur, en vue du but important qu’il se propose, lequel rend sérieuses les choses les plus frivoles qui de près ou de loin s’y rattachent. […] Et pourtant elles ne sont à mes yeux que bien secondaires, eu égard à la place nouvelle que le développement de la philosophie contemporaine devra faire à ces études. […] Les visions pseudo-daniéliques sont à mes yeux le plus ancien essai de philosophie de l’histoire, et restent fort intéressantes à cet égard.

2148. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 août 1885. »

Et ce Livre, où sa double pensée, pleinement, était signifiée, le Livre, ce tout puissant suggestif de l’Idée, ce Livre qui contenait son Œuvre de Poésie et de Théologie, — Wagner le lisait, l’impérieux créateur, et, seul, dans le calme silence de son rêve, parcourant des yeux les pages multiples, et des yeux suivant les Signes, — la lettre, la note et le trait, — il voyait et il entendait, manifestement suggérés par les Signes, vivre en lui, en le merveilleux et suprême théâtre de son Imagination, le drame réel et symbolique. — Peut être, quelques uns, lisant, lisant les partitions d’orchestre, peuvent voir et entendre le Drame musical, ainsi que, tous, nous voyons et entendons, le lisant seulement, le drame littéraire, ainsi que, tous, par la seule lecture, nous suscitons, en notre esprit, les tableaux que le roman décrit ; or, ces quelques uns aussi, lisant, jouiront dans le Livre, sans obstacle et sans divertissement, des splendeurs, magiquement évoquées, du Théâtre Wagnérien idéal ; et, pure vision non troublée par les étrangères matérialités, impudentes ou hypocrites, des salles théâtrales, — en la complète vérité d’un monde imaginatif, le Sens Religieux leur apparaîtra… Le Livre serait le lieu de Représentation, au Drame métaphysique et naturaliste. […] Dans la salle vaguement aperçue, tout à coup l’obscurité tombe, et un grand silence ; alors, en la nuit des yeux et des oreilles et de l’esprit, en la nuit vibrante des quinze cents âmes stupéfiées, un son naît, une résonnance voilée, une sonorité atténuée, emmêlée, dispersée, un mystique résonnement, — inlocalisable, — une intimement chaude mélodie, qui monte, qui s’enfle, et qui dans l’air invisible flotte, portant la pré-sensation des futurs tressaillements du Drame. — Ainsi le Drame se lève : — un rideau s’entrouvre, et, dans le fond, — saillant d’un cadre lointain, noir, obscur, vague, et indistinct, — un paysage apparaît, que nous attendions, et les hommes y sont, dont la vie, en nous inconsciemment vécue déjà, se va en nous revivre évidemment ; — tandis que, parmi l’angoisse des vivantes passions, des désespoirs, des joies, et des extases qui se poussent et s’appellent, parmi l’inéluctable empoignement des très réelles émotions, peu à peu nous descend, insensiblement et nécessairement, l’Explication, l’Idée, la Loi, le prodigieux troublement de l’Unité dernière, comprise.

2149. (1913) La Fontaine « VII. Ses fables. »

Partout où La Fontaine nous dépeindra la grenouille, il nous la dépeindra, avec une espèce de bienveillance rieuse et malicieuse à son égard, mais il la dépeindra, elle-même, dans ses habitudes de la république aquatique, comme il dira ; toutes les fois qu’il la dépeindra en elle-même, il ne lui donnera nullement le caractère vaniteux qu’évidemment la pauvre bête n’a pas ou ne semble pas avoir ; il la dépeindra comme un pauvre petit animal faible, timide, toujours inquiet, toujours sur le qui-vive, toujours sur l’œil, comme nous disons, et craignant rapproche, l’imminence, et même la menace indistincte du moindre péril. […] Je me rapporte aux yeux d’une ourse mes amours. […] La Fontaine n’a pas beaucoup aimé le chien ; en général, il lui donne un rôle de serviteur zélé, un peu servile, un peu courtisan et pas trop sympathique ; mais la tendresse de La Fontaine pour les animaux s’est étendue, en quelque sorte, et a dépassé les limites qu’il observait lui-même, et peut-être que Lamartine, malgré tout son génie et tout son cœur, n’aurait pas fait, sans La Fontaine, ces admirables vers sur le chien, compagnon et seul ami de l’homme : Ô mon pauvre Fido, quand, mes yeux sur les tiens, Le silence comprend nos muets entretiens.

2150. (1879) L’esthétique naturaliste. Article de la Revue des deux mondes pp. 415-432

Zola a voulu simplement dire que l’artiste devait ouvrir les yeux, regarder autour de lui et s’efforcer de peindre l’humanité telle qu’elle est, il n’a fait que répéter le conseil que formulent tous les critiques depuis qu’il y a des critiques, et qu’ont pratiqué instinctivement tous les artistes depuis qu’il y a des artistes : voilà sa grande découverte réduite à une vérité de la Palisse, et il va rendre jaloux l’ombre de Joseph Prudhomme. […] Leur œil est fait de telle façon, leur sensibilité est exercée de telle sorte qu’ils voient uniquement certains faits, qu’ils reçoivent uniquement certaines impressions, et j’accorderai volontiers qu’ils sont parfaitement sincères et qu’il ne dépend pas d’eux de considérer autrement et le monde, et la vie ; ils imaginent de la meilleure foi possible que la nature est exactement telle qu’elle leur apparaît et que rien n’existe en dehors de ce qu’ils aperçoivent. […] Pourquoi se boucher volontairement, en face de la réalité, un des deux yeux, celui qui apercevrait la vertu à côté du vice ?

2151. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre II. La qualité des unités sociales. Homogénéité et hétérogénéité »

Les temps sont passés où sans hésitation, du premier coup d’œil, on reconnaissait à la taille, à la couleur des yeux ou des cheveux, les supérieurs et inférieurs. […] Usages grecs ou cultes orientaux, les importations de l’étranger, usurpant la place des traditions familiales, marquent chacune des étapes de l’élargissement de l’esprit romain. — Et quant à nos sociétés modernes, où la fréquence et la rapidité des communications sont centuplées, qu’elles soient traversées de courants d’imitation encore plus larges et plus nombreux, ce n’est plus à démontrer : il n’y a qu’à ouvrir les yeux sur l’Europe pour noter, en même temps que les progrès de la démocratie, les progrès de l’assimilation par la mode. […] D’où il résulte que les signes distinctifs que la mode fait passer d’un homme à l’autre se détachent de plus en plus aisément, à nos yeux, de ceux qu’ils ne recouvrent que pour un jour.

2152. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIII. »

Les yeux attachés au Verbe divin, repose-toi sur lui. […] Je ne le vois pas, car un nuage s’est arrêté alentour, et tous les mortels n’ont dans leurs yeux que des prunelles mortelles, et ils n’ont pas la force de regarder le Dieu souverain de tous. […] On peut, je crois, difficilement douter que le poëte sicilien n’ait eu sous les yeux quelques expressions du prophète Isaïe, quand il écrivait : « Maintenant, buissons, portez la violette ; portez l’acanthe !

2153. (1865) La crise philosophique. MM. Taine, Renan, Littré, Vacherot

Or, cette idée n’est pas contenue dans le fait particulier qui est devant mes yeux. […] Je ne conclus point de ces observations qu’il faille décourager ceux qui voudraient essayer de telles entreprises ; mais il est bon qu’ils en aient devant les yeux les écueils et les difficultés. […] De quel droit invoquez-vous une telle hypothèse, qui, après tout, est une hypothèse métaphysique, car personne n’a jamais vu de ses yeux un cerveau penser ? […] Il nous fait d’abord une grave concession, car il reconnaît que dans certains cas, par exemple dans la structure de l’œil, la finalité est à peu près évidente. […] Enfin le public doit lui-même ne pas toujours être devant nos yeux.

2154. (1926) La poésie pure. Éclaircissements pp. 9-166

Non, pas plus qu’à l’oreille, quand je constate qu’on n’entend pas avec les yeux. […] Cette objection centrale, solaire, éblouissante, qui saute aux yeux, et que je n’avais pas pu ne pas prévoir, c’est toute la philosophie de son article. […] Je regardais de tous mes yeux, ahuri, mais non sceptique, songeant au fou rire qui prit une de nos sociétés savantes lorsqu’on lui présenta le premier embryon du phonographe. […] « le beau, c’est la beauté vue avec les yeux de l’âme. » on doit regarder les arts comme une sorte de langue à part, comme un moyen unique de communication entre les habitants d’une sphère supérieure et nous. […] André Lhote, en nous montrant sous son vrai jour son « contrôle humain » anti-poétique, un goulot, un oeil, un numéro n’étant pas spécialement humains pour être d’un prosaïsme brutal.

2155. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XII » pp. 47-52

J'ai entendu dire que son livre de Rome était intéressant, mais je ne l’ai pas eu sous les yeux.

2156. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXVI » pp. 147-152

Il parle haut les yeux baissés, et il lance le dédain avec politesse.

2157. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LX » pp. 231-236

Cette croix où, dans son enthousiasme, il reconnaît une main du XIIIe siècle, ayant par le fait été tracée sous les yeux du citoyen Terrasse (garde des archives judiciaires) en l’an XI de la République française une et indivisible, fera désormais pendant avec le camp de Caligula et le prætorium du bon Oldbuck de Monkbarns40.

2158. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXI » pp. 237-241

Jasmin a tous les dehors de l’acteur méridional, bonne taille, œil noir, charbonné, le geste, une poitrine de fer, et une finesse d’homme d’esprit qui voit tout et se possède au milieu de ses apparentes turbulences.

2159. (1874) Premiers lundis. Tome II « La Comtesse Merlin. Souvenirs d’un créole. »

Cette nature vive, fraîche et sensible de l’auteur des Souvenirs, se peignait à mes yeux à travers ces récits plus ou moins semés de jolis mots et sur lesquels courait sa plume facile.

2160. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre III. De la comédie grecque » pp. 113-119

Les belles formes en tout genre plaisaient à leurs yeux ; mais leur âme n’était point avertie par une scrupuleuse délicatesse des égards qu’on doit observer.

2161. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Note III. Sur l’accélération du jeu des cellules corticales » pp. 400-404

Les cavaliers portaient des flambeaux, dont la flamme rouge éclairait des visages mis à nu que traversaient des muscles sanglants ; leurs yeux enfoncés roulaient dans leurs orbites ; leurs bouches s’ouvraient jusqu’aux oreilles, et des casques de chair pendante surmontaient leurs têtes, hideuses.

2162. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre premier. Du rapport des idées et des mots »

Si les mots suivants ont la même vertu, le style est comme un flambeau qui, promené successivement devant toutes les parties d’une grande toile, fait passer devant nos yeux une suite de figures lumineuses, chacune accompagnée par le groupe vague des formes qui l’entourent, et sur lesquelles la clarté principale a égaré quelques rayons.

2163. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — K — Karr, Alphonse (1808-1890) »

bien découvert aux extrémités sous une chevelure drue, noire comme l’Érèbe et tondue de près, les yeux non démesurément ouverts, mais lumineux, sagaces, avec une étincelle de flamme et bien abrités sous leurs sourcils presque droits, le nez osseux, torturé, à l’arête large, aux narines coupées très hardiment, et s’enflant un peu au bout comme celui des grands penseurs, les joues solides, halées par le soleil et le vent de la mer, accusaient une énergie invincible, et la bouche ironique, bienveillante, sensuelle, aux lèvres pourprées, éclatait de vie dans une longue barbe ondoyante et tortueuse comme celle de Clément Marot.

2164. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Laforgue, Jules (1860-1887) »

Autorisé par son sujet, le poète négligeait l’habit noir traditionnel, élidait la voyelle du même droit qu’un vaudevilliste, sacrifiant quand il lui plaisait la rime à l’œil… L’Imitation de Notre-Dame la Lune, tantôt parlant à Séléné, tantôt à cette bonne lune, à une lune d’autres paysages, à des lunatiques, à des lunaires, d’un art plus concentré que les Complaintes, et semé au long de belles chansons personnelles sans égotisme, et de grands vers picturaux s’amoncelant aux petits détails… Et formulons, en terminant, que M. 

2165. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Laprade, Victor de (1812-1883) »

Phidias avaient à mes yeux la forme et l’éclat des marbres du Pentélique et un peu aussi de l’immobilité et de la majesté de ces marbres.

2166. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 23-32

Arrêtons-nous ici, Monsieur, & réfléchissons pour ces penseurs qui pensent si peu ; raisonnons pour ces Philosophes qui raisonnent si mal ; c’est le but que je me suis proposé, en mettant sous vos yeux les principaux traits de leurs Brochures.

2167. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 331-337

Il est des défauts qui n’ont besoin que d’être fidélement retracés, pour ouvrir les yeux à ceux qui en sont atteints, & les en détacher sans retour.

2168. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Art français » pp. 243-257

N’est-il pas plutôt dans ses destins et dans sa fortune de réjouir les yeux, d’être l’animation matérielle d’un fait, la représentation sensible d’une chose, et de ne pas aspirer beaucoup au-delà de la récréation du nerf optique ?

2169. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre VII »

L’enseignement des langues étrangères nous a déjà inclinés au respect d’orthographes et de prononciations qui sont de vilains barbarismes pour nos yeux et nos oreilles.

2170. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre troisième. »

Ce vers et les deux suivans sont d’une vérité pittoresque qui met la chose sous les yeux.

2171. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre VII. Suite du précédent. — Paul et Virginie. »

Son églogue n’est si touchante que parce qu’elle représente deux familles chrétiennes exilées, vivant sous les yeux du Seigneur, entre sa parole dans la Bible, et ses ouvrages dans le désert.

2172. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Carle Vanloo » pp. 183-186

Un œil expérimenté reconnaîtra dans la femme du plus bel embonpoint les traces des muscles du corps de l’homme ; ces parties sont seulement plus coulantes dans la femme, et leurs limites plus fondues.

2173. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 31, de la disposition du plan. Qu’il faut diviser l’ordonnance des tableaux en composition poëtique et en composition pittoresque » pp. 266-272

Il faut enfin que les grouppes soient bien composez, que la lumiere leur soit distribuée judicieusement, et que les couleurs locales loin de s’entretuer, soient disposées de maniere qu’il resulte du tout une harmonie agréable à l’oeil par elle-même.

2174. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une conspiration sous Abdul-Théo. Vaudeville turc en trois journées, mêlé d’orientales — Deuxième journée. Les conspirateurs » pp. 225-233

(Il enfonce son turban sur ses yeux.)

2175. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Remarque finale. Le Temps de la Relativité restreinte et l’Espace de la Relativité généralisée »

Descartes ramenait la matière — considérée dans l’instant — à l’étendue : la physique, à ses yeux, atteignait le réel dans la mesure où elle était géométrique.

2176. (1908) Après le naturalisme

Les yeux attentifs les aperçoivent sous forme de problèmes auxquels il est nécessaire de répondre avant que d’aller plus loin. […] Le creuset de la vie fermente continuellement sous nos yeux. […] Laisser faire la nature matérielle en nous, aboutit à la société que nous avons sous les yeux, à une société pire encore, car déjà l’ont améliorée des actes de bonté et de civilisation venus de l’intelligence. […] L’expérience crève les yeux. […] On déroulera devant nos yeux les fresques de l’avenir.

2177. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre VI. La parole intérieure et la pensée. — Second problème leurs différences aux points de vue de l’essence et de l’intensité »

N’est-il pas naturel que la continuité de notre existence soit faite à nos yeux bien plutôt par le retour périodique des états les plus vifs que par celui des états les plus faibles ? […] Lui-même, esprit d’initiative et d’analyse, comprend peut-être les mots usuels dans toute leur force, et il pourrait exprimer sa pensée dans le langage commun sans que, a ses yeux, elle perdît rien de sa valeur ; mais il la comprend mieux encore quand il lui a trouvé une expression originale, et il sent, bien que cette forme nouvelle est seule capable de répandre au dehors, de vulgariser, la pensée qui lui est chère. […] , p. 212 : le contexte exact est une discussion sur le drame et ce qu’il convient ou non de représenter sur scène ou d’écarter des yeux du spectateur par le simple récit d’un témoin : « Ou l’action se passe sur la scène, ou on la raconte quand elle est accomplie (v. 179). L’esprit est moins vivement touché de ce qui lui est transmis par l’oreille que des tableaux offerts au rapport fidèle des yeux (v. 180-181) et perçus sans intermédiaire par le spectateur (v. 182). […] « Bien que mes doigts et mes mains soient immobiles, je sens, quand je pense, qu’ils agissent ; je vois intérieurement l’image qu’ils produisent ; je sens que ma pensée s’exerce et s’identifie avec ces mouvements que les yeux externes ne voient pas. » Témoignage de Ferd.

2178. (1939) Réflexions sur la critique (2e éd.) pp. 7-263

Ainsi : « L’Ithôme, isolé comme un vase d’azur au milieu des champs de la Messénie. » C’est doux à l’oreille, fade et faux à l’œil. […] Albalat, qui, « ébloui, suit des yeux » M.  […] Il n’existe pas non plus de style absolument artificiel parce que le style a toujours son origine et ses éléments dans une sensibilité de l’œil et de l’oreille. […] Dans (7), ce détail visuel est horizontal, au niveau même de l’œil humain, qui va naturellement à l’œil des vaches étendues et choisit spontanément ce point pour le fixer et s’y fixer. […] Voilà ce qui lui a sauté aux yeux quand il a lu l’article de Jubinal.

2179. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome II

La vision d’un astre lointain est conditionnée par le télescope dont l’œil se sert. […] Le télescope supprimé, l’œil demeure et l’astre aussi. […] Je sentis ma poitrine se gonfler d’une oppression soudaine, et mes yeux s’emplirent de larmes. […] À qui son travail peut-il appartenir, sinon au travailleur, comme ses bras, ses yeux, son corps, comme sa volonté ? […] Elle fait tous ses efforts pour piquer la vache aux yeux.

2180. (1905) Pour qu’on lise Platon pp. 1-398

Voilà en quoi consiste la juste politique, à laquelle nous devons tous tendre, mon cher Clinias, ayant toujours les yeux fixés sur cette égalité dans l’établissement de notre nouvelle colonie. […] L’amour, à le considérer tel que nous le voyons tous les jours de nos yeux, est une chose qui ne serait que la plus ridicule du monde si elle n’était la plus funeste et la plus odieuse. […] Il le voudra ignorant et sot pour qu’il n’ait pas d’yeux pour les autres, d’abord, et pour qu’il ne voie pas les défauts de l’amant. […] Il a les yeux fixés sur sa pensée intérieure, laquelle s’est formée d’abord par contemplation des objets naturels, puis par méditation ; et cela lui est nécessaire et suffisant. […] Si elle est incohérente à ses propres yeux, c’est qu’elle ne s’est pas saisie, c’est qu’elle reste dispersée, c’est qu’elle ne s’est pas ramenée à son centre et à son fort et à son essence.

2181. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome III pp. -

Cet assemblage présentoit aux yeux un spectacle charmant, & relevoit le mérite de l’un & de l’autre art. […] On lui fit ouvrir les yeux sur leur marche sourde, ambitieuse, intéressée. […] Il fit rayer l’endroit qui les avoit choqués, & mettre à la marge que la rature avoit été faite sous les yeux du ministre. […] Comme il avoit les yeux attachés partout, dans ce moment d’enthousiasme, il observa que les capuces étoient un peu différens du sien : aussitôt il le réforma sur ces modèles. […] Toutes les fois & tout le temps que Lémos disputoit, il étoit environné d’une gloire en manière de couronne, dont les yeux même des cardinaux étoient éblouis.

2182. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre III. Le lien des caractères généraux ou la raison explicative des choses » pp. 387-464

III Jetons maintenant les yeux sur les lois où l’intermédiaire explicatif semble au premier aspect d’une tout autre espèce. — Tout corps vibrant dont les vibrations sont comprises entre certaines limites connues de lenteur et de vitesse excite en nous la sensation de son. […] Ainsi Laplace admet que notre système était d’abord une immense nébuleuse épandue autour d’un noyau central116 ; que cette vaste atmosphère, condensée par le refroidissement, s’est divisée en zones de vapeur concentriques semblables aux anneaux de Saturne ; que, par une condensation et un refroidissement ultérieurs, ces zones se sont ramassées en planètes gazeuses, puis liquides, puis solides ; et, de cette condensation graduelle jointe à la loi de la gravitation, il déduit, par un ajustement merveilleux, les principaux caractères et même les particularités singulières que notre système présente aujourd’hui. — Reprenant la supposition au point où Laplace la laisse, les géologues suivent avec vraisemblance l’épaississement de la croûte terrestre, et, d’époque en époque, avec des lacunes de moins en moins grandes, ils expliquent le dépôt et la superposition des couches, leurs soulèvements partiels, leurs érosions, leurs ruptures, la disposition présente de nos continents et de nos mers, par le jeu prolongé des forces minérales ou organiques au milieu desquelles maintenant encore nous vivons117. — À côté d’eux, les minéralogistes et les chimistes ; leurs auxiliaires, voient des roches et des amalgames semblables à ceux que présentent les terrains se former sous leurs mains ou sous leurs yeux, par des actions lentes, par un échauffement prolongé, par une compression continue, par des additions moléculaires118, et, des procédés qu’ils constatent aujourd’hui dans leur petit laboratoire artificiel, ils concluent, avec les précautions convenables, aux procédés analogues par lesquels l’amalgame et la roche se sont faits jadis dans le grand laboratoire naturel. […] Bien mieux, nous indiquons d’avance l’emplacement et les traits principaux de l’intermédiaire qui nous échappe encore. — Nous admettons que, si deux masses s’attirent, c’est en vertu d’un caractère plus simple et plus général, inclus dans le groupe des caractères qui constituent ces masses, tel que serait une impulsion incessamment répétée, laquelle à chaque instant surajouterait un effet à l’effet précédent, ce qu’on exprime en disant que l’attraction est une force dont l’action n’est pas instantanée mais continue, ce qui permet de concevoir la vitesse de la masse tombante comme la somme de toutes les vitesses acquises depuis le premier instant de sa chute, ce qui a conduit quelques physiciens à expliquer l’attraction de deux masses par la poussée continue d’un éther environnant. — Nous admettons que, si l’oxygène présente tels ou tels caractères, c’est en vertu de caractères plus généraux et plus simples qui appartiennent à ses éléments, et qui sont les masses, les distances, les mouvements intestins de ses atomes composants. — Nous admettons que, si un liquide sans forme s’organise en une cellule, c’est grâce aux réactions mutuelles et à l’état antérieur des particules très compliquées dont il est l’ensemble, et que, si autrefois notre nébuleuse est née, c’est grâce aux forces de ses molécules et à l’influence d’un état antérieur que, même par conjecture, nous ne pouvons nous représenter. — À nos yeux, dans tous ces couples, non seulement l’intermédiaire explicatif et démonstratif existe, quoiqu’il se dérobe à nos prises ; mais encore il est un caractère plus général et plus simple que la première donnée du couple, il est inclus en elle, il appartient à ses éléments, et les propriétés de cette première donnée, aussi bien que sa naissance, ont pour dernière raison d’être les caractères et l’état antérieur de ses derniers éléments. […] Nos yeux ne peuvent percevoir l’étendue que comme colorée ; de même, notre intelligence ne peut concevoir les faits que comme explicables. […] L’œil interne, comme l’œil externe, a sa structure innée de laquelle il ne peut s’affranchir et qui impose à toutes ses perceptions un caractère forcé.

2183. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre IV. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire. » pp. 87-211

C’est de Polybe que l’on tient cette maxime célébre, que la vérité est à l’histoire, ce que les yeux sont aux animaux, que comme ceux-ci ne sont d’aucun usage dès qu’on leur a crevé les yeux ; de même l’histoire sans la vérité, n’est qu’une narration amusante & infructueuse. […] Le lecteur y voit d’un seul coup d’œil, combien dans chaque siécle l’Europe a eu de Souverains, combien sous chaque regne la France a eu de grands hommes. […] Mais ces querelles personnelles ne doivent pas fermer les yeux sur le mérite du livre & de l’auteur, l’un des ornemens d’une illustre Congrégation. […] On présente à mes yeux avec une rapidité incroyable une suite de faits importans que je voudrois connoître à fonds, & l’on ne me dit qu’un mot de chacun ; on écrit pour m’instruire, & l’on ne m’apprend que très-peu de chose. […] Lacombe, est de concentrer les faits, avec leurs circonstances ; de donner à la narration la rapidité, la précision nécessaires ; de n’admettre que l’essentiel, en bannissant ce qui est superflu ; en un mot d’offrir un tableau continuel où l’œil & l’esprit embrassent facilement l’objet principal & tous les objets accessoires.

2184. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier »

Forêt dont le mystère invite et fait songer, Où la Réminiscence, ainsi qu’un faon léger, T’attire sur sa trace au milieu d’avenues Nouvelles a tes yeux et non pas inconnues ! […] Il n’était pas tel que nous le voyons aujourd’hui lorsqu’à pas lents, un peu voûté et comme affaissé, il s’achemine tous les jours régulièrement par les quais jusque chez Crozet et Techener, ou devers l’Académie les jours de séance, afin que cela l’amuse, comme dirait La Fontaine. « Vous l’avez rencontré cent fois, vous l’avez coudoyé, dit un spirituel critique, qui en cette occasion est peintre168, et sans savoir pourquoi vous avez remarqué sa figure anguleuse et grave, son pas incertain et aventureux, son œil vif et las, sa démarche fantasque et pensive. » Prenez garde pourtant, attendez : il y a de la vigueur encore sommeillante sous cette immense lassitude, il survient de singuliers réveils dans cette langueur. […] l’œil s’éclaire, la voix monte, le geste lui-même, à peine sorti de sa longue indolence, est éloquent. […] Odyssée pour Odyssée, celle-là, à ses yeux, en vaut bien une autre.

2185. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre neuvième »

Je m’imagine qu’il n’eût pas reconnu Hercule dans cette statuette de Lysippe, dont parle Stace, si petite à l’œil, mais si grande par l’air de grandeur divine que lui avait imprimé l’artiste43. […] La comédie est bien plus près de la peinture que la tragédie ; ce sont deux arts où il est besoin d’yeux : l’homme se manifeste au peintre par les couleurs et par la forme, au poète comique par les mœurs. […] Il verrait sa pupille au cou de Valère, qu’il n’en croirait pas ses yeux. […] On reconnaissait Molière, même de son temps, dans Ariste, de l’École des maris, Ariste, homme déjà mûr, qui doit épouser, comme lui, une fille de seize ans, comme lui tendre et indulgent, avec quelque inquiétude de caractère ; comme lui s’étudiant à contenter les goûts innocents de celle qu’il aime, à gagner son cœur par la facilité et la confiance ; comme lui se flattant de se rajeunir à ses yeux par les soins délicats et les bienfaits.

2186. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juin 1885. »

Ce que, seul, l’œil du génie Allemand avait pu voir, ce que, seule, son oreille pouvait comprendre ; ce qui a conduit notre race, par la défensive la plus intime, jusque la plus irrésistible protestation contre toute domination extérieure, Beethoven lut tout cela, clair et significatif, en ce Livre Allemand, le plus sacré de tous ; et, lui-même, il devint un Mage sacré. […] L’œil intérieur du Maître aperçoit, alors, l’apparition consolante, à lui seul reconnaissable (Allegro 6/8), où le désir arrive à un jeu attendri et gracieux avec lui-même ; l’image du rêve intérieur se réveille, dans le plus aimable souvenir. […] En résumé : 1° Dans la philosophie de Schopenhauer l’Art acquiert une énorme importance, car c’est l’Art qui est la source de toute connaissance ; c’est l’œil de l’Artiste qui pénètre le plus profondément dans les mystères de toute vérité. 2  Pour Schopenhauer toute vérité se mesure à la réalité de l’Âme contemplative. […] 2° À Edgard Poë, 6 planches a — L’œil, comme un ballon bizarre se dirige vers L’Infini.

2187. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Charles Dickens »

De même que ses portraits de physionomie sont dessinés par ces traits saillants qui sautent tout d’abord aux yeux, sans indication véritablement pénétrante des particularités marquantes et profondes des faces, sans en susciter davantage la vision qu’un signalement tantôt comique ou haineux, tantôt sec, les caractères s’accusent chez le romancier anglais par leurs manifestations les plus immédiatement perceptibles, les actes, de gros actes donnés tels quels sans narrer des mobiles des résolutions préalables, et, infiniment plus souvent, par des paroles, des conversations, des soliloques, des tics verbaux, d’interminables et merveilleux bavardages. […] Mais cette manifestation excessive même fait valoir merveilleusement le ridicule, la fantaisie, l’étrange et risible bizarrerie des personnages comiques qui traversent les livres de Dickens avec de si amusants visages et de si drôles de bonnes âmes, vieux messieurs pléthoriques et coléreux, grandes dames prétentieusement pincées, aigres vieilles filles, maris intimidés, prestigieux bohèmes, et ces inénarrables ivrognes, flambant d’alcool, la langue pendante, les yeux blancs sur leurs bajoues violettes, et lui conservent imperturbablement leur décorum de gentlemen après les pires ribotes. […] Tel est dans Olivier Twist l’affreux personnage de Bill Sykes, le voleur colère, brutal et stupide qui, dans un effrayant accès de rage, assomme sa maîtresse à coups de crosse de pistole sur la figure et fuit, harcelé de remords, dans la campagne déserte jusqu’à ce que, abandonné même de son chien, il revienne à son taudis, hanté de l’atroce hallucination des yeux rompus de sa victime, et que, poursuivi par la police, il se laisse choir du toit où il s’était réfugié, le cou pris dans la corde dont il voulait s’aider pour descendre. […] De l’enfant un peu délicat qu’il était, il s’était transformé en un jeune homme élancé, souple, singulièrement agile et vigoureux, que nous montre un portrait de Maclise, où éclate, sous une abondante chevelure bouclée brune et dans le gracieux ovale imberbe et rose du visage, le regard presque lumineux de vitalité et de gaîté de deux fixes yeux bleus.

2188. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « III. M. Michelet » pp. 47-96

Quand l’œil est ténébreux, tout le corps s’obscurcit ! […] « Fantôme à barbe grise, dit-il, aux yeux gris terne, aux fines mains maigres…, qui marché sans marcher, qui s’avance sans qu’il y paraisse, et sans faire bruit, comme on glisse sur un tapis sourd… » À ce portrait des contes de Perrault, qui pourrait jamais reconnaître l’homme de la force positive, le ministre-roi et l’esprit ardent et intense qui put bien emporter dans la mort la plus haute moitié de ses pensées, mais qui en a laissé assez de réalisées sur la terre, pour qu’on ne puisse pas accuser son fier et vigoureux génie, de pâleur ou d’ambiguïté ? […] La plupart des portraits qu’il contient et qui passent sous nos yeux, nous les avons vus déjà dans d’autres panneaux, et il est aisé de les reconnaître. […] … Où qu’on prît ces héroïnes, qui ne forment pas un bataillon, mais toute une armée dans l’histoire, qu’on les prît sur notre terre de France, que ce fût sainte Radegonde, sainte Geneviève, sainte Clotilde, et tous ces cœurs vaillants de la vaillance de Dieu jusqu’à Jeanne d’Arc et depuis elle, n’importe où l’historien allât les choisir, elles étaient dignes de s’aligner en face des plus grandes (s’il y en avait) de la Révolution française, et de faire baisser les yeux à leurs portraits, plier le genou à leurs cadavres.

2189. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XVIII. »

» Quoi qu’il en soit, cette mélopée religieuse et populaire, qui remplaçait pour les affiliés du christianisme tant d’autres plaisirs de l’imagination, tant d’autres attraits des yeux et du cœur, dut avoir une grande puissance dans l’Église et dans la famille. […] Voilà ce qu’à mes yeux la Trinité même a dévoilé de splendeurs, derrière les ailes célestes et le voile divin du temple, sous lequel est cachée la souveraine nature de Dieu. […] « Prête une oreille favorable à l’allégresse de mes hymnes ; dévoile à mes yeux l’éclat de la sagesse ; verse-moi le bonheur. […] C’est par là que ces hymnes grecs doivent se distinguer à nos yeux de tant d’autres vers du même siècle ou du siècle suivant.

2190. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Geoffroy de Villehardouin. — I. » pp. 381-397

Voilà le côté politique et prudent ; mais l’autre côté généreux et grandiose, je ne le dissimulerai pas, comme l’ont trop fait dans leurs divers récits des écrivains raisonnablement philosophes : la grandeur du courage et l’héroïsme, ce sont là aussi des parties réelles qui, même après des siècles, tombent sous l’œil de l’observation humaine. […] L’émotion fut grande parmi le peuple et les pèlerins, d’autant que ce digne chef avait toute raison de demeurer chez soi s’il l’eût voulu : Car il était vieil homme, et, bien qu’il eût de beaux yeux en la tête, il n’y voyait pas, ayant perdu la vue autrefois par le fait d’une blessure.

2191. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — II » pp. 76-92

Ronsard n’a pas évité le léger ridicule qui se mêle à ces sortes d’histoires : Le mari, spectateur d’un acte si piteux, Eut le sein et les yeux de larmes tout moiteux. […] [NdA] D’après la copie très authentique des lettres de Chapelain que j’ai sous les yeux, je rapporte celle-ci à l’année 1640.

2192. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — II » pp. 268-284

Tite-Live, pour l’histoire, a fait comme les Romains dans tous les genres littéraires : il a eu les Grecs sous les yeux ; il s’est dit qu’il les fallait imiter, et, s’il se peut, égaler. […] Il se croyait par moments, et à ses mauvais jours, dans un état de diminution et de décadence intérieure ; cette faculté de réflexion qu’il portait en lui, et qu’il s’appliquait constamment, lui nuisait à force de subtilité ou de clairvoyance : J’assiste comme témoin à la dégradation, à la perte successive des facultés par lesquelles je valais quelque chose à mes propres yeux.

2193. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance de Buffon, publiée par M. Nadault de Buffon » pp. 320-337

Et cependant il ne saurait se contraindre à être le collecteur, l’investigateur minutieux, l’observateur de détail ; ses sens même y faisaient obstacle ; ses yeux étaient mauvais ; sa taille droite et haute était d’un maréchal de France, on l’a dit, plus que d’un homme de laboratoire ou de cabinet. Entre les faits et lui, pour peu qu’il y eût retard, son imagination était sujette à projeter des systèmes : combien de fois à ses débuts, quand il voulait découvrir trop de choses, et trop vite, avec les seuls yeux de l’esprit, le sourire fin de Daubenton, l’homme du scalpel, l’avertit et l’arrêta !

2194. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Essai sur l’Histoire générale des sciences pendant la Révolution française. »

Les sciences, « unies par une philosophie commune, » y sont montrées « s’avançant de front, les pas que fait chacune d’elles servant à entraîner les autres. » Plus de danger sérieux désormais pour l’ensemble des connaissances humaines ainsi liées étroitement et toutes solidaires entre elles, plus de période rétrograde possible depuis la découverte de l’imprimerie : « Lorsqu’au milieu d’une nuit obscure, perdu dans un pays sauvage, un voyageur s’avance avec peine à travers mille dangers ; s’il se trouve enfin au sommet d’une haute montagne qui domine un vaste horizon, et que le soleil, en se levant, découvre à ses yeux une contrée fertile et un chemin facile pour le reste du voyage, transporté de joie, il reprend sa route, et bannit les vaines terreurs de la nuit. […] La Notice, qu’il lut à l’Académie des Sciences en 1810, sur les travaux pour la mesure de la terre qu’il avait poursuivis en Espagne avec Arago, renferme des pages tout à fait littéraires et qui visent même au pittoresque, une entre autres qui pourrait se citer et se détacher : « Combien de fois, assis au pied de notre cabane, les yeux fixés sur la mer, n’avons-nous pas réfléchi… etc. ! 

2195. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourg, par M. Michelet. (suite.) »

Je n’ai pas tout dit de cette éducation inventive et agréable où « la conversation, les amusements, la table, tout, par les soins et l’habileté du maître, devenait leçon pour l’élève, et rien ne paraissait l’être. » Je n’ai rien dit du Télémaque, ce cours de thèmes comme il n’y en a jamais eu, qui n’est, a le bien voir, que la plus longue des fables de Fénelon, l’allégorie développée, devenue épique, et où l’auteur, abordant par les douces pentes de l’Odyssée la grandeur d’Homère, de cet Homère qui, « d’un seul trait met la nature toute nue devant les yeux », n’a fait, en le réduisant un peu, que lui donner la mesure et comme la modulation virgilienne, et le ramener en même temps aux convenances françaises, telles crue les entendaient les lecteurs de Racine. […] Fénelon, qui n’était plus alors à Versailles, mais qui ne cessait de le suivre de l’œil et de l’environner de conseils, sentait bien le défaut capital joint à la qualité que nous signalons, et il en avertit dans beaucoup de ses lettres, pour qu’on y prenne garde et qu’on n’y abonde pas.

2196. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Sainte-Hélène, par M. Thiers »

Sir Hudson Lowe ne démentit point ce diagnostic, d’un œil de génie. […] Et dans ce tome vingtième que nous avons sous les yeux, si c’était l’heure de citer, nous aurions beau jeu.

2197. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, — Antiquité et Moyen Âge — Par M. J. Zeller. »

On peut dire que Bossuet médita de tout temps cet ouvrage, pour lequel il amassait bien des réflexions et des pensées dès les années de son séjour à Metz, lorsqu’il avait sous les yeux le spectacle des Juifs nombreux en ce pays, et qu’il conférait avec les plus savants de leurs rabbins. […] Velléius le justifie à nos yeux, ne fût-ce que par un endroit qui nous touche et qui mérite d’être signalé comme un exemple d’une vue déjà toute moderne.

2198. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « APPENDICE. — CASIMIR DELAVIGNE, page 192. » pp. 470-486

Nous n’y trouvons rien pourtant qu’un œil impartial et exercé n’ait déjà pu entrevoir même sous l’éclat des premiers triomphes. […] Mais, je le répète, ce n’est là que la formalité de clôture, en quelque sorte, dans un thème donné : l’essentiel et le fond, c’est cet ensemble de réflexions morales provoquées chemin faisant, c’est le sentiment judicieux, généreux, sincère, qui ressort de tout l’ouvrage, qui déclare l’honneur supérieur à toutes les opinions de parti, qui le fait voir toujours possible au sein même de ces opinions contraires, comme dans la belle scène finale entre sir Gilbert et Mortins qui mouille les yeux de larmes.

2199. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre premier. De l’amour de la gloire »

Mais non, pourrait-on dire, le jugement de la multitude est impartial, puisqu’aucune passion envieuse et personnelle ne l’inspire ; son impulsion toujours vraie, doit être juste ; mais par cela même que ces mouvements sont naturels et spontanés, ils appartiennent à l’imagination ; un ridicule détruit à ses yeux l’éclat d’une vertu ; un soupçon peut la dominer par la terreur ; des promesses exagérées l’emportent sur des services prudents, les plaintes d’un seul, l’émeuvent plus fortement que la silencieuse reconnaissance du grand nombre ; enfin, mobile, parce qu’elle est passionnée ; passionnée, parce que les hommes réunis ne se communiquent qu’à l’aide de cette électricité, et ne mettent en commun que leurs sentiments ; ce ne sont pas les lumières de chacun, mais l’impulsion générale qui produit un résultat, et cette impulsion, c’est l’individu le plus exalté qui la donne. […] Si la gloire est un moment stationnaire, elle recule dans l’esprit des hommes, et aux yeux mêmes de celui qui s’en voyait l’objet : sa possession émeut l’âme si fortement, exalte à un tel degré toutes les facultés, qu’un moment de calme, dans les objets extérieurs, ne sert qu’à diriger sur soi toute l’agitation de sa pensée : le repos est si loin, le vide est si près, que la cessation de l’action est toujours le plus grand malheur à craindre.

2200. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre III. Inconvénients de la vie de salon. »

» Et Paméla, défaisant ses cheveux, s’agenouille, les yeux au ciel, d’un air inspiré, aux applaudissements de l’assistance309. — La sensibilité devient une institution. […] Si clairvoyants dans le monde, leurs yeux sont obtus en politique.

2201. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre onzième. »

Une pensée qui passe ainsi quatre fois sous les yeux d’un esprit supérieur, à de longs intervalles, sans que le doute ni le dégoût la lui aient fait retoucher, tenez-la pour une vérité. […] Plongez les yeux plus avant, et regardez, dans cette échauffourée, les luttes des ambitions rivales, leur accord passager au détriment de la puissance publique, les illusions, les haines, les préjugés des partis, les entraînements des corps, les convoitises ; c’est une image en raccourci des révolutions.

2202. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre I : Sensations et idées. »

Après avoir vu le soleil, si je ferme les yeux, je ne le vois plus, mais je puis encore y penser. […] Je vois lancer une bombe, je la suis de l’œil, je la vois tomber, causer des dégâts : association successive.

2203. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Légendes françaises. Rabelais par M. Eugène Noël. (1850.) » pp. 1-18

Nous, qui rougirions d’ignorer la géographie et ses divisions principales, nous n’avons qu’à lever les yeux vers le ciel pour voir que nous ignorons à peu près tout de cette cosmographie sublime qu’il suffirait cependant de quelques soirées et d’un démonstrateur pour nous apprendre. […] Puis ôtoit le bandeau de ses yeux pour plus apertement les voir en face, et ouïr leurs plaisants chants et odes poétiques.

2204. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie Stuart, par M. Mignet. (2 vol. in-8º. — Paulin, 1851.) » pp. 409-426

Ce n’est plus la femme passionnée et légère, punie pour ses fragilités et ses inconstances, c’est l’héritière légitime de la couronne d’Angleterre, qui est exposée dans son donjon aux yeux du monde, une catholique fidèle, inébranlable, et qui refuse de sacrifier sa foi à l’intérêt de son ambition et même au salut de sa vie. […] Ayant à raconter dans ses Recherches la mort de Marie Stuart, il l’oppose à l’histoire tragique du connétable de Saint-Pol, à celle du connétable de Bourbon, qui lui ont laissé un mélange de sentiments contraires : « Mais en celle que je discourrai maintenant, dit-il, il me semble n’y avoir que pleurs, et, par aventure, se trouvera-t-il homme qui, en lisant, ne pardonnera à ses yeux. » M. 

2205. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Maurice Rollinat »

Je pourrais, tout comme un autre, avoir la perfidie des citations, qui n’est pas une bien grande finesse, et, patient lapidaire de l’envie qui fait sa petite méchanceté, composer une petite mosaïque de citations tronquées, pour ridiculiser, en les isolant, un ensemble qu’on n’a pas sous les yeux… Il y a bien plus. […] Je regrette aussi qu’il n’ait pas écarté un certain nombre de pièces qui n’ajoutent rien à la manifestation de son grand talent et qui détonnent sur l’ensemble du livre, si absolument beau dans les pièces où la Nature, qu’il voit d’un œil si personnel, et les souffrances morales ou physiques de l’humanité, l’occupent seules.

2206. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre VII. Le cerveau et la pensée : une illusion philosophique »

. — ne sont à ses yeux que des termes provisoires ; c’est l’influence réciproque ou interaction qui est pour elle la réalité définitive. […] L’hypothèse du réaliste n’est donc ici qu’un idéal destiné à lui rappeler qu’il n’aura jamais assez approfondi l’explication de la réalité, et qu’il devra établir des relations de plus en plus intimes entre les parties du réel qui se juxtaposent à nos yeux dans l’espace.

2207. (1887) La banqueroute du naturalisme

Et ils ne seraient enfin tout à fait ressemblans, à leurs propres yeux comme aux nôtres, que s’ils exprimaient des sentimens ou des idées à eux dans la langue du commun et de l’honnête usage. […] La Terre, du moins, aura-t-elle peut-être cette utilité de leur ouvrir les yeux ?

2208. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VIII : M. Cousin érudit et philologue »

Au moment où la douce figure de Mme de Longueville commence à se reformer sous les yeux du lecteur, il entend un fracas d’in-folio qui tombent ; c’est une dissertation qui arrive et efface la charmante image sous son appareil démonstratif. […] « Le catalogue imprimé des manuscrits de la bibliothèque de Leyde m’avait donné des espérances qui, grâce à Dieu, n’ont pas été vaines… Là j’ai vu de mes yeux, touché de mes mains une foule de lettres de Leibnitz, de cette écriture ferme et serrée qui est de son pays plus que de son siècle… Cependant je ne pouvais me persuader qu’il n’y eût pas à Leyde quelques lettres inédites de Descartes lui-même. » Là-dessus il fouille plusieurs gros paquets de lettres non cataloguées, et y découvre un billet de Descartes à son horloger, avec deux autres.

2209. (1874) Premiers lundis. Tome I « Œuvres de Rabaut-Saint-Étienne. précédées d’une notice sur sa vie, par M. Collin de Plancy. »

Ces trois dernières années mémorables sont à ses yeux un grand drame complet qui a eu son commencement, son milieu et sa fin.

2210. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. de Ségur. Mémoires, souvenirs et anecdotes. Tome II. »

Saisi du désir de le soulager, il s’élance de voiture, en habit de bal, arrête le brancard, magnétise le patient, malgré des torrents de pluie, aux yeux des porteurs étonnés, et, quand, fatigué du peu de succès de sa ferveur, il les interroge sur la maladie du pauvre homme, il reçoit pour toute réponse : « Malade !

2211. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Donec eris felix… »

Il n’en croit pas ses yeux et reprend toutes les feuilles l’une après l’autre.

2212. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre premier. Préliminaires » pp. 1-8

Dans ce qui est aux yeux, des Italiens le véritable art comique, dans la Comédie de l’art, la parole est absolument subordonnée et compte à peine.

2213. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre IX » pp. 77-82

Nous avons vu qu’en 1631, la peste régna à Paris ; que madame de Rambouillet y perdit son second fils, le vidame du Mans, âgé de 7 ans, et qu’elle et sa fille Julie, alors âgée de 24 ans, ne quittèrent le malade que quand la mort lui eut fermé les yeux, bien que tous les amis de la maison s’en fussent éloignés.

2214. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 79-87

Pendant qu’il parloit ainsi, le Philosophe historien étoit tombé en foiblesse, ses petits yeux de feu s’étoient fermés, & sa grande bouche restoit ouverte.

2215. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — II »

La réalité est donc bien ici un compromis entre deux forces dont l’une tend à convertir en objet — matière inanimée, spontanéité inconsciente ou automatisme — toute la substance de l’Être ou du moi, dont l’autre tend à transformer en sujet — miroir, œil, regard, contemplation — toute cette même substance de l’Être ou du moi.

2216. (1889) L’art au point de vue sociologique « Préface de l’auteur »

D’un côté, la matière s’est subtilisée toujours davantage sous l’œil du savant, et le mécanisme d’horlogerie de La Mettrie est devenu tout à fait impuissant à rendre compte de la vie : la physiologie s’est affirmée à part et au-dessus de la physique élémentaire.

2217. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Guarini, et Jason de Nores. » pp. 130-138

Il voyoit d’un œil indifférent ses amis & ses ennemis aux mains.

2218. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre IV. De quelques poèmes français et étrangers. »

Mes yeux furent témoins de toutes ses alarmes, Et mon front, bien souvent, fut mouillé de ses larmes.

2219. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — IV. Les ailes dérobées »

Il s’en approcha et vit un autre vieillard dont les yeux étaient aussi gros et aussi rouges que le soleil quand il se lève à l’horizon.

2220. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Charles Barbara » pp. 183-188

De mourant de faim devenu riche, il cache sa richesse, et ce qu’il en montre, il l’établit, il le justifie par des comptes, par un à-jour de ses travaux et de ses salaires dont il poursuit les yeux les plus indifférents.

2221. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Gabriel Ferry »

Dupe, ou, pour dire un mot moins dur, victime du génie de Cooper, Ferry a cru qu’on pouvait reprendre la création achevée d’un immense artiste, et il ne s’est pas aperçu que dans Fenimore Cooper le véritable personnage, le vrai héros des poèmes que nous avons sous les yeux, c’est l’Amérique elle-même, la mer, la plaine, le ciel, la terre, la poussière enfin de ce pays qui n’a pas fait son peuple et qui est émietté par lui… Il n’a pas vu qu’en ôtant Bas-de-Cuir lui-même des romans de Fenimore, — cette figure que Balzac, qui avait le sens de la critique autant que le sens de l’invention, a trop grandie en la comparant à la figure épique de Gurth dans Ivanhoe et qui n’est guères que le reflet du colossal Robinson de Daniel de Foe, — il n’a pas vu qu’il n’y avait plus dans les récits du grand américain qu’une magnifique interprétation de la nature, que l’individualisation, audacieuse et réussie, de tout un hémisphère, mais que là justement étaient le mérite, la profondeur, l’incomparable originalité d’une œuvre qui n’a d’analogue dans aucune littérature.

2222. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Champfleury ; Desnoireterres »

Et si l’on en voulait la preuve, on la trouverait plus nette que jamais dans ce livre que Champfleury nous place sous les yeux.

2223. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre ix »

Presque tous communièrent, officiers, soldats pêle-mêle, le général Reymond à leur tête, à qui je devais fermer les yeux le lendemain même, frappé de trois balles. » (Impressions de guerre de prêtres soldats, recueillies par Léonce de Grandmaison.)‌

2224. (1906) L’anticléricalisme pp. 2-381

De tous ceux qui s’attelaient à l’œuvre anticléricale, c’est lui qui avait l’œil le plus juste. […] Louis XIV n’a jamais cessé d’être devant ses yeux et dans son esprit comme modèle et comme idéal. […] Combes, que méconnaissait l’œil de son père. […] Il est excellent pour eux qu’il y ait un peuple en Europe qui se conduise comme celui qui a les yeux bandés au jeu de colin-maillard, pendant que tous les autres ont les yeux ouverts. […] C’est justement ce qui en fait le mérite aux yeux d’un certain parti.

2225. (1881) Le roman expérimental

Il semble d’abord que tout le monde a deux yeux pour voir et que rien ne doit être plus commun que le sens du réel. […] Chaque œil a ainsi une vision particulière. Enfin, il y a des yeux qui ne voient rien du tout. […] Sans doute, les impressions d’enfance ont été plus vives, l’œil a retenu les tableaux qui l’ont frappé tout d’abord ; puis, la paralysie s’est déclarée, et l’œil a beau regarder Paris, il ne le voit pas, il ne le verra jamais. […] Ayez des yeux, voyez clair.

2226. (1730) Discours sur la tragédie pp. 1-458

Le premier : elles mettent sous les yeux ce que les autres ne présentent qu’à l’esprit ; et elles convainquent par sentiment de ce qu’ils ne font que persuader par raison. […] Horace l’a dit, et c’est une maxime devenuë triviale, que les esprits sont plus vivement frappés par les yeux que par les oreilles. […] Pouvois-je y remplacer les sentimens et les circonstances qu’elle renferme, et suppléer par l’énergie des vers à cet appareil imposant et pathétique qui frappe les yeux ? […] L’opera, malgré ses défauts, a cette avantage sur la tragedie, qu’il offre aux yeux bien des actions qu’elle n’ose que raconter. […] Il en arrive que vous réfutez tout ce que je n’ai pas dit, et que vous ne répondez presque pas un mot à ce que j’ai dit ; méprise qui vous divertiroit vous-même, si vous la pouviez voir d’un oeil indifférent.

2227. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIII : Affinités mutuelles des êtres organisés »

J’en référerai encore ici aux Cirripèdes dont les larves, à leur première phase de développement, ont trois paires de pattes, un seul œil très simple et une bouche en forme de trompe avec laquelle elles mangent beaucoup, car elles s’accroissent considérablement en taille sous cette forme. Dans leur seconde phase qui répond à l’état de chrysalide chez le Papillon, elles ont six paires de pattes natatoires, admirablement construites, une magnifique paire d’yeux composés et des antennes extrêmement compliquées ; mais elles ont une bouche imparfaite hermétiquement close et ne peuvent manger. […] Dès lors, elles demeurent attachées à leur rocher pour le reste de leur vie ; leurs pattes sont transformées en organes préhensiles ; elles retrouvent de nouveau une bouche d’une structure normale ; mais elles n’ont point d’antennes, et leurs deux yeux sont de nouveau remplacés par un seul petit œil très simple pareil à un point. […] Tel aurait été le cas à l’égard des yeux des animaux qui vivent dans les cavernes obscures, et des ailes des oiseaux qui habitent les îles océaniques, et qui, n’étant que rarement forcés de prendre leur vol, ont finalement perdu la faculté de voler.

2228. (1874) Premiers lundis. Tome I « Bonaparte et les Grecs, par Madame Louise SW.-Belloc. »

La Grèce était sous ses yeux ; il ne pouvait ne pas y penser, « La Grèce attend un libérateur, a-t-il dit depuis ; ce serait une belle couronne de gloire !

2229. (1874) Premiers lundis. Tome II « L. Bœrne. Lettres écrites de paris pendant les années 1830 et 1831, traduites par M. Guiran. »

A peine l’histoire se  lève qu’elle a déjà atteint l’éclat du midi et qu’elle s’y a couche ; les yeux vous font mal et on se meurt de chaleur. » Il marque un étonnement ingénu qui fait sourire, quand, à propos des charmantes lettres retrouvées de Diderot à mademoiselle Yoland, il s’écrie : « Croiriez-vous que moi, homme de quarante ans, qui en ai vu de toutes les couleurs, elles « m’ont fait rougir plus de vingt fois ?

2230. (1875) Premiers lundis. Tome III « Émile Augier : Un Homme de bien »

Les jeunes gens du jour ont ce travers commun D’affubler leur candeur d’un vêtement d’emprunt, De faire les lurons à qui rien n’en impose, Et dont l’œil voit d’abord le fond de toute chose ; De ne pas sembler neufs sottement occupés, Ils mettent de l’orgueil à se croire trompés, Perdant ainsi, pour feindre un peu d’expérience, La douceur d’être jeune et d’avoir confiance !

2231. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les brimades. » pp. 208-214

Ces rites brutaux et ces momeries servent donc, en somme, à relever le « prestige » de l’X à ses propres yeux.

2232. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bergerat, Émile (1845-1923) »

C’est que, d’instinct, le nouveau venu marchait sans balancier sur la corde raide du paradoxe ; il trouvait la formule d’un style clownique, désarticulé, chahutant et cascadeur ; des mots alertes, des phrases retroussées, lestes, pimpantes, décolletées, agaçant l’œil, qui complétaient et servaient merveilleusement son esprit incisif, mordant, railleur, prompt à la riposte et rompu à toutes les charges, à tous les argots d’atelier, de coulisses, de boulevard.

2233. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XII. Mort d’Edmond de Goncourt » pp. 157-163

Un don indispensable est ici qualité maîtresse : c’est l’œil, la faculté de voir intensément ses personnages, de les suivre sans brouillard dans leurs mouvements.

2234. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Introduction » pp. 2-6

S’il désire puiser dans les faits des arguments à l’appui d’une doctrine qui lui tient à cœur, il est entraîné malgré lui à grossir les uns et à négliger les autres ; il se crée un intérêt, ce qui est un moyen sûr « pour se crever agréablement les yeux », suivant l’expression de Pascal.

2235. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — Q. — article » pp. 572-580

Ce spectacle si pompeux, si varié, ne présentoit souvent à leurs yeux qu’un magnifique ennui.

2236. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Sophocle, et Euripide. » pp. 12-19

Ils mettoient à profit leur jalousie mutuelle, & l’œil perçant de la critique, pour s’arracher des lauriers.

2237. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre V. Suite des précédents. — Héloïse et Abeilard. »

Julie, sans le savoir, approche de sa fin, et les ombres du tombeau, qui commencent à s’entrouvrir pour elle, laissent éclater à ses yeux un rayon de l’Excellence divine.

2238. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre XIV. Parallèle de l’Enfer et du Tartare. — Entrée de l’Averne. Porte de l’Enfer du Dante. Didon. Françoise de Rimini. Tourments des coupables. »

J’étais seule avec mon amant, et nous étions sans défiance : plus d’une fois nos visages pâlirent, et nos yeux troublés se rencontrèrent ; mais un seul instant nous perdit tous deux.

2239. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Deshays  » pp. 134-138

Voilà un morceau de peinture d’après lequel on ferait toucher à l’œil à de jeunes élèves qu’en altérant une seule circonstance on altère toutes les autres, ou la vérité disparaît.

2240. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 4, du pouvoir que les imitations ont sur nous, et de la facilité avec laquelle le coeur humain est ému » pp. 34-42

Gregoire de Nazianze rapporte l’histoire d’une courtisane qui, dans un lieu où elle n’étoit pas venuë pour faire des reflexions serieuses, jetta les yeux par hazard sur le portrait d’un Polémon philosophe fameux pour son changement de vie, lequel tenoit du miracle, et qui rentra en elle-même à la vûë de ce portrait.

2241. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 44, que les poëmes dramatiques purgent les passions » pp. 435-443

Or les poësies dramatiques, en mettant sous nos yeux les égaremens où les passions nous conduisent, nous en font connoître les symptômes et la nature plus sensiblement qu’un livre ne sçauroit le faire.

2242. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 6, des artisans sans génie » pp. 58-66

Comme les personnes dont je parle, destinées pour être la pepiniere des artisans médiocres, n’ont pas les yeux ouverts par le génie, notre imitateur ne sçauroit appercevoir dans la nature même ce qu’il y faut choisir pour l’imiter.

2243. (1860) Cours familier de littérature. X « LXe entretien. Suite de la littérature diplomatique » pp. 401-463

Cette volonté diplomatique du roi Louis-Philippe était sans cesse contrariée et contrainte par les cabales parlementaires, qui reprochaient à ce gouvernement sa seule vertu, et qui lui remettaient sans cesse sous les yeux, comme un contraste, les grandeurs de Napoléon, sans parler jamais des catastrophes et des expiations de ce génie qui avait dépensé deux fois la France pour payer sa gloire personnelle. […] Nous en avons vu et nous en voyons en ce moment même sous nos yeux des exemples dans des contrées voisines. […] Or voici, selon nous, comment la géographie diplomatique de l’Europe se serait dessinée à ses yeux exercés, et comment il aurait, de ce coup d’œil de haut sur les choses, conclu au système le plus actuel d’alliance, soit pour la guerre, soit pour la paix, convenable à son pays.

2244. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (1re partie) » pp. 305-364

Vous ne voulez pas, etc. » Je leur énumérai ici les misères innombrables et imméritées auxquelles la famille du prolétaire est sujette par le chômage, le veuvage, la caducité, l’abandon, le dénuement des orphelins, et tous les cas où la providence tutélaire d’une société bien inspirée doit s’étendre par l’œil et par la main d’un gouvernement sérieusement populaire, où elle doit intervenir afin de soulager et de rectifier des misères imméritées par des secours actifs et par la charité sociale. […] Que Moïse, Isaïe, apparaisse en nos champs, Les peuples qu’ils viendront juger, punir, absoudre, Dans leurs yeux pleins d’éclairs méconnaîtront la foudre         Qui tonne en éclats dans leurs chants. […] que vos yeux daignent enfin s’ouvrir.

2245. (1914) Enquête : Les prix littéraires (Les Marges)

C’est vous dire que « la façon » n’a, à mes yeux, aucune importance pourvu que le prix existe. […] Si nombreuses que soient les précautions prises et si subtils les détours, ce seront toujours les mêmes spectacles que vous aurez sous les yeux. […] En attendant, d’ailleurs, que ce public, presque toujours trempé par les jurys, lassé en outre de cette succession de fusées qu’on lui fait partir dans les yeux, enfin manquant d’une critique forte, qui sache lui imposer d’autres auteurs que des lauréats, ne se hâte d’oublier le vainqueur du jour, comme il a oublié les précédents, et retourne, l’oreille basse, à ses bazinoires.

2246. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre quatrième »

Mais mon tourment ne me donna loisir De lever l’œil à un si haut désir ; Cherchant pitié, non louange à mes cris. […] Quand Racine imite Sophocle, c’est qu’il a été impossible qu’ayant le même exemplaire sous les yeux, les deux grands peintres ne se rencontrassent. […] La passion même excite la sagacité et, pendant que les admirateurs s’exagèrent les beaux côtés, les ennemis voient les défauts d’un œil d’autant plus sûr qu’il est plus intéressé.

2247. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

Déjà il avait écrit ses cinq volumes de la Littérature anglaise, et ses deux volumes de la Philosophie de l’Art, pour nous prouver par de nombreux exemples qu’un écrivain et qu’un artiste subissent plus ou moins l’influence de la race, du climat et qu’ils peignent ce qu’ils ont sous les yeux. […] M. de Goncourt surprend un détail, dans un musée, la corniche d’une maison, la statue d’une fontaine, et il ne voit pas un seul paysage, il n’a pas un seul aspect bien net de la ville devant les yeux. […] La phrase elle-même n’est pas construite ; M. de Goncourt s’essaie sous vos yeux à la bâtir et n’y arrive pas.

2248. (1913) La Fontaine « V. Le conteur — le touriste. »

Beautés simples et divines, Vous contentiez nos aïeux Avant qu’on tirât des mines Ce qui nous frappe les yeux De quoi sert tant de dépense ? […] Elles ne nous rendirent notre salut, qu’en faisant une légère inclination de tête, marchant toujours avec une gravité de déesses, et ne daignant presque jeter les yeux sur nous, comme simples mortels que nous étions. […] Ce qui m’en plut davantage fut le ton de voix et les yeux.

2249. (1913) La Fontaine « VI. Ses petits poèmes  son théâtre. »

Tantôt sur des tapis d’herbe tendre et sacrée, Adonis s’endormait auprès de Cythérée, Dont les yeux enivrés par les charmes puissants Attachaient au héros leurs regards languissants. […] Ainsi les vers que je vous citais l’autre jour : … Les lieux Honorés par les pas, éclairés par les yeux De l’aimable et jeune bergère…, etc. […] Mon très lettré ami M. de Couynart me fait remarquer : 1° qu’en 1680-1685 des essais assez nombreux d’acclimatation de Shakespeare en France avaient été faits et que La Fontaine avait pu jeter les yeux sur quelque oeuvre du dramatiste anglais   2° que la tragi-comédie de Statira, tirée par Pradon de la Cassandre de La Calprenède, jouée à la fin de 1679, avait été incriminée de mélange de trivialité et de tragique, et que, du reste, Pradon en 1684 ayant, par un factum, exercé des représailles contre Boileau, La Fontaine a pu, réveillé par ce factum contre son ami, se souvenir de Statira et y faire cette allusion prolongée que nous venons de voir ; M. de Couynart penche pour la seconde de ces hypothèses  J’y pencherais aussi, sans doute ; mais d’abord en 1684 Boileau et La Fontaine, compétiteurs à l’Académie, ne devaient pas être si bien ensemble que La Fontaine voulût venger Boileau de Pradon avec un tel éclat ; ensuite Statira présente-t-elle en effet un tel mélange de haut style et de bassesses ?

2250. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Victor Hugo »

… Je n’ai point l’admiration à clos yeux de ceux-là qui avaient découvert dans Hugo la qualité qui fait le dieu : la vie immobile, féconde, éternelle ; le brisement de la faux du Temps. […] La vie privée doit être murée, mais quand elle se fait voir par-dessus les murs ou qu’elle les abat autour d’elle, on ne peut pas s’arracher les yeux ou le souvenir. […] Mais la vouloir chrétiennement pour le salut et l’honneur du Christianisme, la vouloir pour sa résurrection, venir, le cœur attendri et les yeux en larmes, présenter à la Papauté le sabre japonais en l’engageant avec suavité à s’ouvrir elle-même le ventre, ceci est une manière de vouloir la mort de la Papauté qui appartient en propre à Victor Hugo, et si, dans le cours de son poème, il n’a pas la moindre originalité d’idées, il a du moins eu celle-là, dans son hypocrite ou son ironique conception !

2251. (1899) La parade littéraire (articles de La Plume, 1898-1899) pp. 300-117

Et tout à coup j’entendis le poète de Daphné me dire avec des flammes dans les yeux : « Bouhélier, c’est un créateur de vertus. » J’ai retenu cette belle phrase, et je me permets de la transcrire ici. […] je crois que l’humanité pourrait être divisée actuellement en deux familles immenses, ceux qui voient avec les yeux de M.  […] Ils craignent les tempêtes des océans septentrionaux d’où sont sortis les monstres romantiques, leurs yeux se portent vers le lac méditerranéen, berceau du classicisme, qui a roulé dans ses flots la corporelle blancheur des belles nymphes païennes. […] Ses yeux ont conservé l’innocence des premiers âges où se transfigurent et s’ordonnent les plus éphémères réalités. […] Elle aura soin de sa parure, elle se dépouillera de sa gaucherie, perdra sa timidité, vous verrez ses yeux rayonner et ses traits prendre de la fierté.

2252. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre II. Les directions divergentes de l’évolution de la vie. Torpeur, intelligence, instinct. »

Parfois cependant se matérialise à nos yeux, dans une fugitive apparition, le souffle invisible qui les porte. […] Or, la vie manifestée par un organisme est, à nos yeux, un certain effort pour obtenir certaines choses de la matière brute. […] Les avantages et les inconvénients de ces deux modes d’activité sautent aux yeux. […] Tant qu’on ne s’attache qu’à la conscience, on ferme les yeux sur ce qui est, au point de vue psychologique, la différence capitale entre l’intelligence et l’instinct. […] Notre œil aperçoit les traits de l’être vivant, mais juxtaposés les uns aux autres et non pas organisés entre eux.

2253. (1875) Premiers lundis. Tome III « Du point de départ et des origines de la langue et de la littérature française »

Mais il faut voir avec quel dédain de spirituels et doctes amis de Sainte-Palaye jugeaient de cette passion, si singulière à leurs yeux, qu’il avait pour le moyen âge. […] La règle que se sont imposée ces modernes éditeurs a été, en général, de reproduire fidèlement le manuscrit qu’ils avaient sous les yeux : règle excellente, mais provisoire. […] Il compare encore ce grand phénomène aux formations géologiques : « Ce ne sont pas, dit-il, des amas çà et là disséminés par l’action turbulente et saccadée de mille courants variables, mais ce sont des dépôts lents et uniformes produits par l’action également lente et uniforme de vastes mers et de grands lacs. » Il cherche et retrouve la filiation jusque dans le désordre apparent ; il la dégage et la démontre souvent avec bonheur à travers tous les déguisements qui la masquent, et les irrégularités qui sautent aux yeux. […] Aussi Chapelain lui répondit-il, non sans esprit, qu’il était un ingrat et que l’envie ne lui avait pris à lui-même de jeter les yeux sur ce bouquin que pour y observer un peu le langage et le style de nos ancêtres : « Et je m’y déterminai principalement, ajouta-t-il, par l’espérance que j’eus d’y rencontrer un fonds d’importance pour le traité des Origines de notre langue que ce dédaigneux a entrepris. » (De la Lecture des vieux romans, par Chapelain, dans la Continuatum des Mémoires de Sallengre, t. 

2254. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre cinquième. Genèse et action des principes d’identité et de raison suffisante. — Origines de notre structure intellectuelle »

D’une part, un monde livré au hasard ne serait pas seulement incompréhensible pour l’œil de l’intelligence : nous n’y pourrions subsister, car, en répétant le même mouvement dans les mêmes circonstances, nous ne produirions plus le même effet ; non seulement notre intelligence, emportée comme par un vertige, serait perpétuellement jouée et déçue (ce qui ne serait que demi-mal), mais notre existence même serait bientôt victime du désordre universel. […] Ce serait quelque chose d’inintelligible et pourtant de réel ; ce serait une puissance féconde pour créer, quoique sans yeux pour voir et sans yeux pour la voir : elle agirait sans que ses actes fussent soumis aux conditions de la pensée ; elle serait la cause qui produit réellement, sans être la raison qui explique intellectuellement. […] Il se retrouve dans une foule de perceptions, comme celles de pression, de résistance, de coup, de choc, etc. ; il se retrouve dans la sensation d’une vive lumière qui s’impose à nos yeux, d’un son qui envahit nos oreilles.

2255. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre III. Le roman » pp. 135-201

Chacun de ses livres est un bienfait, et les défauts que nous y rencontrons sont peut-être à ses yeux les qualités les plus fortes, parce qu’ils sont des moyens, parfois volontairement naïfs, de mettre en relief les tares qu’il combat. […]   Les Contes des yeux fermés, d’Alphonse Séché, sont des rêves. […] Par la séduction fatale de la Sirène, dans l’illusion qui emplit ses yeux, le possédé voit d’illusoires paysages et les carènes des vaisseaux et la princesse d’Orient devenue humble gardienne de chèvres. […] mais on n’achève que les yeux humides ce marivaudage dans la pénombre d’une tombe. » A. 

2256. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre II. De la multiplicité des états de conscience. L’idée de durée »

Quand, les yeux fermés, nous promenons la main le long d’une surface, le frottement de nos doigts contre cette surface et surtout le jeu varié de nos articulations nous procurent une série de sensations, qui ne se distinguent que par leurs qualités, et qui présentent un certain ordre dans le temps. […] Quand je suis des yeux, sur le cadran d’une horloge, le mouvement de l’aiguille qui correspond aux oscillations du pendule, je ne mesure pas de la durée, comme on paraît le croire ; je me borne à compter des simultanéités, ce qui est bien différent. […] Un geste rapide qu’on accomplit les yeux fermés se présentera à la conscience sous forme de sensation purement qualitative, tant qu’on n’aura pas songé à l’espace parcouru. […] En un certain sens, nous les avons adoptées sans raison, car ce qui en fait le prix à nos yeux, c’est que leur nuance répond à la coloration commune de toutes nos autres idées, c’est que nous y avons vu, dès l’abord, quelque chose de nous.

2257. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — II. (Fin.) » pp. 198-216

Ne pourrai-je aujourd’hui éveiller ces yeux spirituels et intérieurs, qui sont cachés bien avant au fond de votre âme, les détourner un moment de ces images vagues et changeantes que les sens impriment, et les accoutumer à porter la vue de la vérité toute pure ? […] Il le presse, il le pousse ; le spirituel sceptique n’a jamais eu affaire à un si rude interrogateur, ni senti l’éclair d’un glaive si voisin de ses yeux : Et donc !

2258. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — I » pp. 351-368

Les lettres de ce temps que Henri adresse à M. de Saint-Geniez, son lieutenant général en Béarn et l’un de ses meilleurs serviteurs, montrent à quel point il commence à s’occuper sérieusement de ses affaires, et, à cet âge de trente-trois ans où il est arrivé, à devenir tout à fait l’homme de conseil et de maturité qu’il sera depuis : « N’accomparez plus les actions de feu Monsieur (le duc d’Alençon) aux miennes ; si jamais je me fiai en Dieu, je le fais à cette heure ; si jamais j’eus les yeux ouverts pour ma conservation, je les y ai. […] Je baise mes beaux yeux par millions de fois.

2259. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — I » pp. 20-38

Quand on parle de Santeul, l’inconvénient et le péril à chaque instant est de tomber dans la caricature ; aussi faut-il avoir sous les yeux le portrait qu’a tracé de lui La Bruyère et n’en jamais sortir. […] Un portrait que je conseillerais encore d’avoir sous les yeux quand on veut parler de lui, c’est celui qui est dans le recueil des Hommes illustres de Perrault, le beau portrait peint par La Grange et gravé par Edelinck.

2260. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — II » pp. 39-56

tu n’aurais plus raison à mes yeux. » Les jésuites voulaient quelque chose de plus positif, de moins conditionnel, et qu’il mît sapias au lieu de saperes, c’est-à-dire : « Tu n’as plus raison à mes yeux. » Le pauvre Santeul fit deux copies, l’une où était saperes pour les amis de M. 

2261. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Voiture. Lettres et poésies, nouvelle édition revue, augmentée et annotée par M. Ubicini. 2 vol. in-18 (Paris, Charpentier). » pp. 192-209

Il n’avait que vingt-sept ans (4625), Il s’est peint à nous petit, « la taille de deux ou trois doigts au-dessous de la médiocre, la tête assez belle, (ses portraits nous la montrent même très belle), les yeux doux, mais un peu égarés, et le visage assez niais ». […] Je le considère avec un jugement que la passion ne fait pencher ni d’un côté ni d’autre, et je le vois des mêmes yeux dont la postérité le verra.

2262. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — III » pp. 337-355

La poudre manquant, on se mêla l’épée à la main par un soleil si clair, que la lueur des lames éblouissait les yeux des combattants. […] M. de Rohan est souvent resté aux deux tiers du chemin, et il n’a pas triomphé à nos yeux de toutes les obscurités qui pouvaient résulter des replis de son caractère autant que de la conjuration des circonstances.

2263. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier »

Elle aime Paris, la société, la conversation, elle ne peut s’en passer ; comme à Mme Du Deffand, dès qu’elle est seule ou peu entourée, le fantôme de l’ennui se dresse à ses yeux et l’épouvante ; elle est vulnérable par là plus qu’on ne peut dire : Clorinde, même quand elle combat, se retrouve tout à coup plus faible qu’une Herminie. […] Mme de Staël se l’était attaché à titre de précepteur de ses enfants ; mais Schlegel, qui avait ses travers, affectait devant le monde de n’être auprès d’elle que sur le pied d’un ami. « Schlegel, écrivait-elle dans un moment d’épanchement, a des défauts qui me cachent quelquefois ses vertus. » Témoin journalier de l’humeur et même des ridicules de Schlegel (car il en avait qui sautaient aux yeux), Bonstetten disait plus gaiement et en y mettant moins de façon : « Les jours où Schlegel n’est pas gentil, il est impitoyablement fouetté, et le plus joli, c’est que Mme de Staël se charge elle-même de la punition ; alors elle a trois fois plus d’esprit. » Quoi qu’il en ait pu être de ces petites querelles amusantes, Schlegel lui fut, pendant des années, du plus grand usage par ses qualités, par son savoir ingénieux et profond.

2264. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Journal de la santé du roi Louis XIV »

Il a l’air et le port d’un monarque, les cheveux presque noirs, taché de petite vérole, les yeux brillants et doux, la bouche rouge ; et avec tout cela, il est parfaitement beau. […] non, la grande opération n’est plus qu’un incident ; cela ressort du Journal qui est sous nos yeux ; mais vous avez un Louis XIV perpétuel, sans cesse menacé d’accidents nerveux ou sanguins au cerveau, assujetti à mille précautions, et toujours calme, ferme, égal ; n’est-ce pas plus singulier encore, n’est-ce pas mieux ?

2265. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Histoire de la Restauration par M. Louis de Viel-Castel. Tomes IV et V. »

Les liens de l’estime et de la confraternité ne peuvent plus exister entre nous et ceux qui professent des principes contraires, et si l’honneur pouvait être solidaire entre des hommes qui exercent la même profession à des distances Considérables, je me hâterais de protester contre un pareil abus, et je vous dirais hautement : L’avocat qui « chargé volontairement. de défendre un guerrier traître et rebelle à son roi, s’oublie jusqu’à justifier l’action en elle-même, qui cite comme un titre de gloire pour l’accusé le nom d’une bataille (celle de Waterloo) où il acheva de se rendre criminel en combattant contre son maître ; qui invoque à son secours le témoignage d’autres rebelles et les excite à rappeler les moyens qu’ils avaient pour forcer leur roi à la clémence ; l’avocat qui, s’entourant de honteux détours, de méprisables subterfuges, d’ignobles entraves, enlève ainsi au prévenu, autant qu’il est en lui, son dernier honneur, celui du courage, cet avocat a perdu son titre à nos yeux : je me sépare à jamais de lui. » On a beau dire que tout moyen est bon à un avocat pour sauver son client, M. de Martignac passait ici toute mesure, et il est difficile d’admettre qu’il n’obéissait pas lui-même, en s’exprimant de la sorte, à un accès de la fièvre politique qui sévissait partout autour de lui. […] On voyait en première ligne, en tête de ces partisans des rigueurs salutaires, un Bonald, à l’air respectable et doux, métaphysicien inflexible et qui prenait volontiers son point d’appui, non pas dans l’ancienne monarchie trop voisine encore à son gré, mais par-delà jusque dans la politique sacrée et dans la législation de Moïse : oracle du parti, tout ce qu’il proférait était chose sacro-sainte, et quiconque l’avait une fois contredit était rejeté à l’instant, répudié à jamais par les purs ; — un La Bourdonnaie, l’homme d’action et d’exécution, caractère absolu, dominateur, un peu le rival de Bonald en influence, mais non moins dur, et qui avec du talent, un tour d’indépendance, avec le goût et jusqu’à un certain point la pratique des principes parlementaires, a eu le malheur d’attacher à son nom l’inséparable souvenir de mesures acerbes et de classifications cruelles ; — un Salaberry, non moins ardent, et plus encore, s’il se pouvait ; pamphlétaire de plume comme de parole, d’un blanc écarlate ; — un Duplessis-Grenedan, celui même qui se faisait le champion de la potence et de la pendaison, atroce de langage dans ses motions de député, équitable ailleurs, par une de ces contradictions qui ne sont pas rares, et même assez éclairé, dit-on, comme magistrat sur son siège de justice ; — M. de Bouville, qui eut cela de particulier, entre tous, de se montrer le plus inconsolable de l’évasion de M. de Lavalette ; qui alla de sa personne en vérifier toutes les circonstances sur les lieux mêmes, et qui, au retour, dans sa fièvre de soupçon, cherchait de l’œil des complices en face de lui jusque sur le banc des ministres ; — et pour changer de gamme, tout à côté des précédents, cet onctueux et larmoyant Marcellus, toujours en deuil du trône et de l’autel, d’un ridicule ineffable, dont quelque chose a rejailli jusqu’à  la fin sur son estimable fils ; — et un Piet, avocat pitoyable, qui, proposant anodinement la peine de mort pour remplacer celle de la déportation, disait, dans sa naïveté, qu’entre les deux la différence, après tout, se réduisait à bien peu de chose ; ce qui mettait l’Assemblée en belle humeur et n’empêchait pas le triste sire de devenir bientôt, par son salon commode, le centre et l’hôte avoué de tous les bien pensants ; — et un Laborie que j’ai bien connu, toujours en quête, en chuchotage, en petits billets illisibles, courtier de tout le monde, trottant de Talleyrand ou de Beugnot à Daunou, mêlé et tripotant dans les journaux, pas méchant, serviable même, mais trop l’agent d’un parti pour ne pas être inquiétant et parfois nuisible.

2266. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vie de Jésus, par M. Ernest Renan »

. — Soyez tout, excepté Dieu. » Et mon ami continuait très-vivement ; il s’emportait contre cette philosophie de l’histoire qui est une si grosse et si mystérieuse affaire, une si merveilleuse production en même temps qu’un si commode instrument au sens et au gré des nouveaux doctrinaires : ils font de l’histoire quelque chose de sacré, et ils n’admettent pas cependant qu’il y ait un plan primitif tracé, et une Providence qui y ait l’œil et qui y tienne la main : c’est une inconséquence. […] Jamais la prière du Pater ou le Sermon sur la montagne n’ont mieux ressorti à nos yeux dans leur nouveauté native, et n’ont été plus harmonieusement encadrés.

2267. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

Ce qui sautait aux yeux, c’était le nouveau mot d’ordre : Résistance ! […] Certes le progrès en science, en industrie, en civilisation générale, en réparation moins inégale du bien-être, est évident ; il se poursuit et se poursuivra ; mais aux yeux du philosophe, de l’artiste, du moraliste, de tous ceux qui conçoivent avec étendue et qui comparent, c’est toujours un progrès qui cloche et qui clochera, un progrès qui ne bat que d’une aile.

2268. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre (suite et fin.) »

Là où un œil superficiel serait tenté de voir des contradictions, des incohérences, des déviations et des écarts, il n’y a que suite, connexion, accord ; tout se tient et correspond dans un tel caractère ; faites-le sentir dans votre œuvre : qu’on le devine dès le principe tel qu’il sera en avançant ; qu’on le voie jusqu’au bout tel qu’il s’était annoncé d’abord : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . […] C’est ainsi qu’à Dresde, en mai 1812, tous les souverains venus pour saluer humblement Napoléon, à son départ pour la campagne de Russie, eurent des conférences secrètes afin de s’entendre sur le parti à tirer de nos revers possibles en cette aventure lointaine ; et même, sans conférence et sans parole, il leur suffisait, pour s’entendre, de se regarder dans le blanc des yeux, tant ils étaient unanimes dans leur intime révolte et dans une haine commune !

2269. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. (Suite) »

La princesse, fort jeune, blonde avec de grands yeux bleus, vifs et doux en même temps, avait la physionomie très spirituelle, le caractère excellent, une très bonne éducation et des principes, des sentiments de piété comme il convenait dans une alliance avec le dauphin, personnage si religieux. […] Je suis sûr que toute la France en aura beaucoup aussi, et qu’on ne s’attend pas à lui trouver tant de grâce et une figure aussi aimable. »  Et au maréchal, plus gaillardement et en fin connaisseur, il dira, tout compliment à part (27 décembre) : « Je l’ai trouvée réellement charmante ; ce n’est point du tout cependant une beauté, mais c’est toutes les grâces imaginables : un gros nez, de grosses lèvres fraîches, les yeux du monde les plus vifs et les plus spirituels, et enfin je vous assure que, s’il y en avait de pareilles à l’Opéra, il y aurait presse à y mettre l’enchère.

2270. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet »

Et, par exemple, il n’était pas pour l’affranchissement des noirs, à l’exemple des philosophes, et en même temps il demandait assez d’adoucissements à cet odieux état de l’esclavage pour paraître aux yeux des colons un ami des noirs, un négrophile : il ne contentait personne. […] Nommé commissaire général de la marine et membre du Comité de législation pour les colonies, son avis était fort demandé sur toutes les questions de sa compétence ; et quand un homme à projets, un aventurier utopiste, le baron de Bessner (un digne contemporain de Mesmer), proposa un établissement chimérique à la Guyane et en présenta à l’avance les plans réalisés et dessinés aux yeux sur le papier, on voulut bien consulter tout particulièrement Malouet ; on se décida même à l’envoyer sur les lieux, sauf ensuite à faire tout le contraire de ce qu’il aurait dit et observé.

2271. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DIX ANS APRÈS EN LITTÉRATURE. » pp. 472-494

N’aura-t-on à livrer à l’œil du jaloux avenir que des phénomènes individuels, plus ou moins brillants, mais sans force d’union, sans but, même secondaire, sans accord, même spécieux et décent ? […] On se rencontre, on se salue de l’œil ou du geste, ou mieux on se serre la main, et l’on passe, et tout est dit.

2272. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre I. Composition de l’esprit révolutionnaire, premier élément, l’acquis scientifique. »

Les écrivains du dix-huitième siècle renversent ce procédé : c’est de l’homme qu’ils partent, de l’homme observable et de ses alentours à leurs yeux, les conclusions sur l’âme, sur son origine, sur sa destinée, ne doivent venir qu’ensuite, et dépendent tout entières, non de ce que la révélation, mais de ce que l’observation aura fourni. […] Pareillement, de plusieurs idées générales du même degré, nous en extrairons une autre plus générale, et ainsi de suite, pas à pas, en cheminant toujours selon l’ordre naturel, par une analyse continue, avec des notations expressives, à l’exemple des mathématiques qui passent du calcul par les doigts au calcul par les chiffres, puis de là au calcul par les lettres, et qui, appelant les yeux au secours de la raison, peignent l’analogie intime des quantités par l’analogie extérieure des symboles.

2273. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre premier. La contradiction de l’homme » pp. 1-27

C’est un des mensonges primordiaux de la morale que de nous voiler l’antagonisme irréductible et perpétuel qui fait de chaque individu l’ennemi de tous les autres, pour déployer à nos yeux la solidarité tout aussi réelle, qui les relie et les contraint à se rendre, même sans le vouloir et sans le savoir, même contre leur gré, des services réciproques. […] La déformation saute aux yeux.

2274. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Des lectures publiques du soir, de ce qu’elles sont et de ce qu’elles pourraient être. » pp. 275-293

Mais je ne sais pourquoi j’ai l’air d’inventer et de supposer, quand presque tout cela se fait dès à présent, et quand j’ai sous les yeux une liste de lectures déjà anciennes, que M.  […] …” Cet enfant, le jour de la ruine de sa patrie, écrivit ces vers sous les yeux du vainqueur, et le fier Romain ne put retenir une larme. » On leur dirait : « Les Grecs aimaient tant la poésie, qu’elle adoucissait même les guerres, chez eux si cruelles.

2275. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Éloges académiques de M. Pariset, publiés par M. Dubois (d’Amiens). (2 vol. — 1850.) » pp. 392-411

J’ai sous les yeux d’intéressantes lettres de lui adressées à Fauriel et qu’il lui écrivait pendant un voyage aux Pyrénées dans l’été de 1803. […] Les éloges de Cuvier, en regard de ceux de Pariset sur les mêmes sujets, font l’effet d’un dessin net, sévère, un peu maigre peut-être, mais qui repose de la diffusion des couleurs et qui satisfait l’œil de l’esprit19.

2276. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — II. » pp. 494-514

Depuis lors une pareille chance ne se retrouvera plus à ses yeux, et, même à la veille du 18 Fructidor, il n’aura qu’un retour d’espoir bien douteux et bien fugitif. […] Aujourd’hui, sans recourir à des publications volumineuses et difficiles à rassembler, on pourra, grâce aux Mémoires de Mallet du Pan, avoir sous les yeux la série de ses observations essentielles, de ses jugements et de ses descriptions concernant la grande période historique dont il a été l’un des combattants, mais surtout l’annotateur assidu et passionné.

2277. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Patru. Éloge d’Olivier Patru, par M. P. Péronne, avocat. (1851.) » pp. 275-293

Votre image, en votre absence, sera le plus cher objet de nos yeux : nous lui rendrons nos hommages, nos respects : nous lui ferons nos sacrifices. » Voilà le Patru officiel dans toute sa draperie et dans toute sa pompe. […] Ce n’est pas que je n’eusse la tête encore passablement garnie ; mais la garniture paraissait un peu trop antique, et je craignais qu’elle ne blessât enfin les yeux d’Amarante ; c’est comme je nomme la belle qui maintenant tient mon cœur.

2278. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — II. » pp. 460-478

Oui, sans doute, on le sent bien à la lecture, il a manqué quelque chose à cette éloquence ; cet œil ne lançait point d’étincelles ni d’éclairs ; cette voix n’avait point d’éclats sonores, ni de ce qui vibre à distance ; mais du moins un sentiment juste, équitable, pénétré, animait cette gravité douce et abondante ; une imagination tempérée y jetait plutôt de la lumière que de la couleur ; parfois la finesse et une certaine grâce d’ironie n’y manquaient pas ; l’humanité surtout, avec la justice, en était l’âme, et cet orateur au ton sage avait en lui toutes les piétés. […] Je suis un de ceux de la flotte grecque, je le sais, et je conviens que j’ai porté les armes contre Troie ; pour ma peine, si ce crime à vos yeux est indigne de pardon, jetez-moi dans la mer et replongez-moi dans l’immensité des flots.

2279. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

Durant les relâches forcées qu’il fait dans quelque île de la Baltique, il raconte qu’il allait tous les jours passer quelques heures sur des rochers escarpés où la hauteur des précipices et la vue de la mer n’entretenaient pas mal ses rêveries : Ce fut, dit-il, dans ces conversations intérieures que je m’ouvris tout entier à moi-même, et que j’allai chercher dans les replis de mon cœur les sentiments les plus cachés et les déguisements les plus secrets, pour me mettre la vérité devant les yeux sans fard, telle qu’elle était en effet. […] Il recevait toute la jeunesse des environs, et lui-même a ainsi défini son hospitalité pleine de facilité et de noblesse :         Grand chère, vin délicieux,     Belle maison, liberté tout entière ; Bals, concerts, enfin tout ce qui peut satisfaire         Le goût, les oreilles, les yeux ;         Ici, le moindre domestique         A du talent pour la musique.

2280. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre V. Le génie et la folie »

Nous qui, alors enfants, avions été nourris dans ces étranges visions, nous et pouvions pas croire que les hommes supérieurs fussent des personnes naturelles ; et nous ne pouvions nous figurer M. de Lamartine, qu’une lyre à la main et les yeux au ciel. […] Que l’on jette les yeux sur les hommes les plus célèbres de notre époque.

2281. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre II : Philosophie politique de Tocqueville »

« Dans cette extrémité, ils lèvent naturellement les yeux vers cet être immense qui seul s’élève au milieu de l’abaissement universel. » Dans les âges aristocratiques, les individus sont inégaux, mais chacun pris à part est quelque chose ; dans les âges démocratiques, les hommes sont tous égaux, mais chaque individu n’est rien. […] C’était là, comme il le dit lui-même dans une lettre à M. de Kergorlay, « la plus vitale de ses pensées… Indiquer, s’il se peut, aux hommes ce qu’il faut faire pour échapper à la tyrannie et à l’abâtardissement en devenant démocratiques, telle est l’idée générale dans laquelle peut se résumer mon livre… Travailler en ce sens, c’est à mes yeux une occupation sainte. » Ce n’est pas seulement la liberté de l’individu, la liberté de la pensée, la liberté de la commune, que Tocqueville croyait menacées dans les sociétés démocratiques, c’est encore la liberté politique.

2282. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre V. Seconde partie. Des mœurs et des opinions » pp. 114-142

Jetons maintenant les yeux sur cette île qu’on a appelée la terre classique des idées constitutionnelles, constitutionnelles, l’Angleterre. […] Je suis obligé de citer encore l’Angleterre ; car la manière dont s’est formée la constitution anglaise est un fait si considérable dans ce moment, que nous ne pouvons pas nous abstenir d’avoir toujours les yeux sur ce qui s’est passé dans cette île.

2283. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Philarète Chasles » pp. 111-136

Celle de Sainte-Beuve n’était que finesse, œil oblique embusqué dans sa patte d’oie, sourire de vieille femme d’esprit, et l’anecdote y dominait, l’anecdote ramassée partout, car Sainte-Beuve était un mendiant d’anecdotes et il ne dînait en ville que pour demander à ces dîners la charité de quelques-unes. […] Sainte-Beuve, avec la demi-lune rousse de sa tête, pelée comme le derrière d’un renard attaqué d’alopécie, son teint hortensia, son oreille rouge comme celle de Tartuffe et prête à chaque instant à monter au violet de la colère, le tout recouvert du vieux foulard qu’il étendait là-dessus quand il rentrait, échauffé, de l’Académie, et le beau Scaramouche de Chasles, à la face pâle, aux yeux italiens, aux moustaches callotiques, longues, peintes, relevées, qui ne devinrent que le plus tard possible la barbe blanche sans transition de gris qui apparut soudainement, comme celle d’un alchimiste, un jour, à son cours, et fut pour les femmes qui y venaient le coup de pistolet de la surprise.

2284. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Michelet »

On sent cela sans être savant, et l’ignorant le voit très bien à l’œil nu de son ignorance. […] Mettez pour les puissantes, en particulier, tout ce qui tient à l’histoire des grands navigateurs : Colomb, Magellan, etc., et qui est enlevé avec une supériorité décidée ; et pour les charmantes, mettez le chapitre sur le corail, que l’auteur appelle, comme en Orient, la Fleur du sang, et le chapitre sur la perle, qui, tous les deux, sont aussi beaux à mes yeux que des vers de Henri Heine et de Goethe.

2285. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Vigny »

Vigny, ce grand coupable aux yeux qui l’aiment, ne devait plus jamais retrouver que quelques flocons tombés des ailes de l’Ange qui s’en était allé pendant que son poète regardait la terre, et vous le verrez tout à l’heure. […] Mais l’insouciance de l’idéal, la grossièreté du procédé et l’abaissement de l’observation, ces trois caractères de la littérature contemporaine, ont fait monter de dégoût la muse de Vigny dans cette rêverie où elle ne plane plus qu’à l’œil seul du poète… Ce cygne de la famille de celui de Mantoue qui nous est venu par l’Ile des Cygnes de Shakespeare, et qui s’y est attardé, ne nous a pas dit son dernier chant, heureusement !

2286. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre premier. Le problème des genres littéraires et la loi de leur évolution » pp. 1-33

Nous créons alors des rubriques de « tout y va » ; ce sont des tiroirs, pour l’œil ; ce n’est pas de l’ordre, de la lumière pour l’esprit. — Il faudrait se résoudre à bouleverser beaucoup de nos catégories ; pour cela il faut s’habituer d’abord à voir autrement, à embrasser d’un coup d’œil la ligne d’ensemble (esprit général) et le cas individuel, et surtout à saisir, derrière la forme souvent trompeuse, l’état d’âme. […] Depuis dix ans j’ai de plus en plus le sentiment que ma méthode, très simple dans ses grandes lignes, infiniment complexe dans le détail, répond précisément aux réalités de la vie, pour autant qu’il est possible d’exprimer en mots rigides cette fermentation perpétuelle, dont le bouillonnement nous enchante et nous déroute, comme les flots de la mer qui se brisent sur le rivage, selon des lois éternelles, et dont l’œil ne perçoit que la ligne changeante et l’écume fuyante.

2287. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion statique »

Chacun de nous peut faire l’expérience, s’il lui plaît : il verra la superstition jaillir, sous ses yeux, de la volonté de succès. […] Pour que nous nous sentions à notre aise, il faut que l’événement qui se découpe à nos yeux dans l’ensemble du réel paraisse animé d’une intention. […] C’est surtout parce que l’homme a pris à nos yeux une dignité éminente. […] L’évolution est généralement lente et naturelle ; mais elle peut aussi bien être rapide et s’accomplir artificiellement sous les yeux mêmes des adorateurs du dieu. […] Revenons encore une fois sur ce qui a été dit de l’œil et de la vision.

2288. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires du marquis d’Argenson, ministre sous Louis XV »

Glaire en effet à cette simplicité bourgeoise, à ce phlegme incorruptible, qui mieux que la philosophie du grand monde le garantissait des illusions, qui lui faisait dire à Voltaire dont, à la lecture de Pellisson, les yeux se remplissaient de la splendeur de Louis XIV : « Mon cher, vous n’êtes qu’un enfant, qui aimez les babioles et rejetez l’essentiel ; vous faites plus de cas des pompons qui se font chez mesdemoiselles Duchappe que des étoffes de Lyon et des draps de Van-Robais. » ou bien encore qui lui faisait comparer un état épuisé qui donne des fêtes pour mettre l’argent en circulation à une vieille comtesse ruinée qui ouvre brelan et donne à souper avec l’argent des cartes !

2289. (1874) Premiers lundis. Tome I « Anacréon : Odes, traduites en vers française avec le texte en regard, par H. Veisser-Descombres »

Il jette les yeux sur sa coupe, et le voilà qui se met à en célébrer les élégantes ciselures.

2290. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre premier. De l’invention dans les sujets particuliers »

Et c’est ce sentiment monarchique, si peu romain, si peu conforme à la vérité historique, qui, dans la tragédie, commence à relever Auguste aux yeux du spectateur, et à faire oublier Octave.

2291. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre VIII. De la clarté et des termes techniques »

Ce sont comme des visages inconnus, indifférents, s’ils ne sont pas étranges, qui arrêtent l’œil un moment par l’étrangeté, mais ne parlent pas à l’âme.

2292. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Discours prononcé à la distribution des prix du lycée d’orléans. » pp. 223-229

Cette modération-là est en train de devenir, par ce temps de modes outrancières, de cabotinage et de snobisme — en littérature, en art et, dit-on, en politique — quelque chose de rare et d’original ; j’ajoute de méritoire : car les idées extrêmes, plus frappantes, plus faciles à développer, ont bien meilleur air aux yeux des ignorants et sont généralement d’un profit plus immédiat pour ceux qui les professent.

2293. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXIV » pp. 394-401

« Quanto », dit madame de Sévigné dans une lettre du 11 novembre, « dansa aux derniers bals toutes sortes de danses comme il y a 20 ans, et dans un ajustement extrême. » Et le roi, toujours voluptueux, qui se flattait par moments de revoir des mêmes yeux et de retrouver dans le même éclat les charmes dont il avait été épris, se prêtait aux illusions de la parure, et se plaisait à y ajouter sa magnificence.

2294. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 211-219

Pour donner à la fois une idée du Poëme & du talent de l’Interprete, nous croyons devoir mettre sous les yeux du Lecteur le morceau où sont décrits les douze signes du Zodiaque.

2295. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre IX »

On y a compris les mots dont la déformation, invisible pour les yeux, est cependant réelle puisque les Canadiens les prononcent à la française.

2296. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Dédicace, préface et poème liminaire de « La Légende des siècles » (1859) — Préface (1859) »

L’auteur en convient, un rudiment imperceptible, perdu dans la chronique ou dans la tradition, à peine visible à l’œil nu, lui a souvent suffi.

2297. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Émile Augier »

à cet espiègle de petit David, dont le caillou polisson les atteignait entre les deux yeux.

2298. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — VI »

Et il me semble intéressant de mettre, dans ce moment, sous les yeux du public, une page puissante et inédite, où le grand écrivain examine quelle est, en France, la condition des sociétés autres que l’État et marque la qualité morbide d’un tel régime.‌

2299. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Camille Jordan, et Madame de Staël »

J’ai sous les yeux un seul de ces premiers écrits volants, devenus bien rares et presque introuvables, qu’il lançait sous divers noms. […] « Mes yeux les ont vues, s’écriait-il, ces scènes de licence et de rage. […] « Voilà ce qui fut, avec notre intention expresse, l’intention moins développée, mais réelle, de la majorité du peuple, ce qui forme de ce vote un contrat tacite entre la nation et son chef, ce qui seul, aux yeux d’une raison sévère, peut justifier le don que nous lui fîmes… » L’écrit de Camille Jordan est donc l’œuvre d’une haute raison restée libérale. […] combien, depuis que je vous ai quitté, vous avez encore grandi à mes yeux ! […] défendant ses fils et son talent au péril de son bonheur, de sa sécurité, de sa vie, est un moment touchée de ce qu’un jeune homme d’une nature chevaleresque sacrifie tout au plaisir de la voir140. — J’estime avant tout sur cette terre le dévouement, l’élévation et la générosité. — Je voudrais qu’on pût y joindre l’absence totale de faiblesses d’imagination ; mais de toutes les faiblesses, celles qui souillent la plus à mes yeux, ce sont celles du calcul ou de la pusillanimité !

2300. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Massillon. — P.-S. » pp. 38-40

Comme il craignait hier la trop grande consternation de son auditoire sur les défauts de la vocation et sur la difficulté extrême de les réparer, il le releva et le ranima par une incomparable paraphrase de tout le Cantique de Jonas, qui le tint élevé à Dieu et comme transporté hors de la chaire assez longtemps les bras croisés et les yeux au ciel.

2301. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXIV » pp. 247-253

Et voilà qu’un doigt obscur vient y tracer sensiblement pour tous la corde du tissu et vous tire à vue d’œil par la ficelle.

2302. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre I »

Flaubert, particulièrement, avec sa haute taille, ses gros yeux ronds, sa moustache de pirate normand, aimait à “faire le méchant.”

2303. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre V. Du jeu, de l’avarice, de l’ivresse, etc. »

Dans un moment d’émotion, il n’y a plus de jugement, il n’y a que de l’espérance et de la crainte ; on éprouve quelque chose du plaisir des rêves, les limites s’effacent, l’extraordinaire paraît possible, et les bornes ou les chaînes de ce qui est, et de ce qui sera, s’éloignent ou se soulèvent à vos yeux.

2304. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « La Solidarité »

de première classe), vous aurez maintes occasions d’être secourables aux pauvres gens, de faire payer pour eux les riches, de réparer ainsi, dans une petite mesure, l’inégalité des conditions et d’appliquer pour votre compte l’impôt progressif sur le revenu  Notaires (car il y en a ici qui seront notaires), vous pourrez être, un peu, les directeurs de conscience de vos clients et insinuer quelque souci du juste dans les contrats dont vous aurez le dépôt  Avocats ou avoués, vous pourrez souvent par des interprétations d’une généreuse habileté, substituer les commandements de l’équité naturelle, ou même de la pitié, aux prescriptions littérales de la loi, qui est impersonnelle, et qui ne prévoit pas les exceptions  Professeurs, vous formerez les cœurs autant que les esprits ; vous… enfin vous ferez comme vous avez vu faire dans cette maison  Artistes ou écrivains, vous vous rappellerez le mot de La Bruyère, que « l’homme de lettres est trivial (vous savez dans quel sens il l’entend) comme la borne au coin des places » ; vous ne fermerez pas sur vous la porte de votre « tour d’ivoire », et vous songerez aussi que tout ce que vous exprimez, soit par des moyens plastiques, soit par le discours, a son retentissement, bon ou mauvais, chez d’autres hommes et que vous en êtes responsables  Hommes de négoce ou de finance, vous serez exactement probes ; vous ne penserez pas qu’il y ait deux morales, ni qu’il vous soit permis de subordonner votre probité à des hasards, de jouer avec ce que vous n’avez pas, d’être honnête à pile ou face  Industriels, vous pardonnerez beaucoup à l’aveuglement, aux illusions brutales des souffrants ; vous ne fuirez pas leur contact, vous les contraindrez de croire à votre bonne volonté, tant vos actes la feront éclater à leurs yeux ; vous vous résignerez à mettre trente ou quarante ans à faire fortune et à ne pas la faire si grosse : car c’est là qu’il en faudra venir  Hommes politiques, j’allais dire que vous ferez à peu près le contraire de presque tous vos prédécesseurs, mais ce serait une épigramme trop aisée.

2305. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Chirurgie. » pp. 215-222

La conséquence, c’est que, pour exceller dans la première partie de ce programme, le chirurgien doit avoir, avec une connaissance toujours présente de tout le corps humain, un sang-froid inaltérable, un regard lucide et sûr, une main délicate et intelligente, et comme des yeux au bout des doigts, une initiative toujours prête, la puissance d’inventer ou de modifier, à mesure, les procédés de son art, une faculté divinatoire, bref un « don », aussi rare peut-être, aussi instinctif et incommunicable que celui du grand poète ou du grand capitaine.

2306. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Delavigne, Casimir (1793-1843) »

Il est impossible de rencontrer deux natures plus semblables ; chez tous deux, le satin, la paille, la hache seront toujours rendus scrupuleusement avec une minutie hollandaise ; il ne manquera à l’œuvre, pour être parfaite, que des éclairs dans les yeux et du souffle dans les bouches.

2307. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Hartley »

Ce n’est pas tout ; la vibration, c’est-à-dire le fait purement physiologique, en se répétant laisse dans le cerveau une tendance à se reproduire sous forme de vibrations beaucoup plus faibles que Hartley appelle des vibrationcules, et qui sont à ses yeux « des miniatures de la vibration. » Ainsi, en résumé, la vibration produit d’abord la sensation, puis la vibrationcule qui, à son tour, produit les images.

2308. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre III » pp. 30-37

Ayant été fait prisonnier de guerre, durant la Ligue, il prit rang entre les amants de Marguerite de Valois, femme de Henri IV, qui, par cette raison, le vit de mauvais œil.

2309. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre IV. Bossuet orateur. »

Il expire en disant ces mots, et il continue avec les anges le sacré cantique. » Nous avions cru pendant quelque temps que l’oraison funèbre du prince de Condé, à l’exception du mouvement qui la termine, était généralement trop louée ; nous pensions qu’il était plus aisé, comme il l’est en effet, d’arriver aux formes d’éloquence du commencement de cet éloge, qu’à celles de l’oraison de madame Henriette : mais quand nous avons lu ce discours avec attention ; quand nous avons vu l’orateur emboucher la trompette épique pendant une moitié de son récit, et donner, comme en se jouant, un chant d’Homère ; quand, se retirant à Chantilly avec Achille en repos, il rentre dans le ton évangélique, et retrouve les grandes pensées, les vues chrétiennes qui remplissent les premières oraisons funèbres ; lorsqu’après avoir mis Condé au cercueil, il appelle les peuples, les princes, les prélats, les guerriers au catafalque du héros ; lorsque, enfin, s’avançant lui-même avec ses cheveux blancs, il fait entendre les accents du cygne, montre Bossuet un pied dans la tombe et le siècle de Louis, dont il a l’air de faire les funérailles, prêt à s’abîmer dans l’éternité, à ce dernier effort de l’éloquence humaine, les larmes de l’admiration ont coulé de nos yeux, et le livre est tombé de nos mains.

2310. (1887) La Terre. À Émile Zola (manifeste du Figaro)

Lui, cependant, allait, creusant son sillon ; il allait, sans lassitude, et la jeunesse le suivait, l’accompagnait de ses bravos, de sa sympathie si douce aux plus stoïques ; il allait, et les plus vieux ou les plus sagaces fermaient dès lors les yeux, voulaient s’illusionner, ne pas voir la charrue du Maître s’embourber dans l’ordure.

2311. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre VI. Autres preuves tirées de la manière dont chaque forme de la société se combine avec la précédente. — Réfutation de Bodin » pp. 334-341

Tacite nous montre très bien dans ses annales le progrès de cette funeste indifférence ; lorsqu’Auguste fut près de mourir, quelques-uns discouraient vainement sur le bonheur de la liberté, pauci bona libertatis incassum disserere  ; Tibère arrive au pouvoir, et tous, les yeux fixés sur le prince, attendent pour obéir, omnes principis jussa adspectare .

2312. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) «  Chapitre treizième.  »

Or, ce besoin de conformer le monde à soi expose à toutes sortes de paradoxes, où ce qui peut percer de naturel est mêlé de je ne sais quoi de factice qui n’échappe pas à un œil exercé. […] Et il l’aide à se livrer ; il lui prête des yeux pour se voir. […] Non seulement l’oraison funèbre regarde la vie d’un œil plus favorable que le sermon, mais la matière en est d’un ordre plus élevé. […] Dans ce récit, hérissé de théologie, éclatent les deux qualités caractéristiques de Bossuet : le bon sens, qui donne les motifs de toutes choses, et le sentiment de la réalité, qui met les choses elles-mêmes sous nos yeux. […] L’archevêque de Cambrai ne voyait plus les choses du même œil que l’abbé de Fénelon.

2313. (1923) L’art du théâtre pp. 5-212

Une action où la plastique, la musique et la poésie, également et harmonieusement, concourraient à ravir les yeux et les oreilles en même temps que le cœur, voilà certes un maximum dont le théâtre, et seul le théâtre, est capable. […] Et d’abord, tout au moins dans la tragédie, il réduit autant que possible la part faite au plaisir des yeux. […] Par un enchaînement et une progression de gestes qui forcent notre vue et qui s’impriment dans nos yeux. […] Bien nouée, bien dénouée, évidente aux yeux des plus illettrés, elle fait bouger les acteurs, trembler les planches ; elle réalise, dans le drame, ce dynamisme que Molière obtient dans la farce et la comédie, et finit par prêter un semblant de réalité à des ombres ; elle agit dans l’instant sur les spectateurs. […] Par la suite, après la guerre, il devait adopter le dispositif fixe et transformable à volonté que vous avez devant les yeux, multiplier les plans sur lesquels se meuvent les personnages : proscenium, degrés, loggia.

2314. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « M. DE LA ROCHEFOUCAULD » pp. 288-321

M. de La Rochefoucauld fut puni tout le premier de sa vilaine action ; il reçut, au combat du faubourg Saint-Antoine, cette mousquetade qui lui perça le visage et lui fit perdre les yeux pendant quelque temps. […] Ils ne furent sérieux à aucun moment, puisqu’à cette époque il était déjà brouillé avec Mme de Longueville : Pour ce cœur inconstant qu’enfin je connois mieux, J’ai fait la guerre aux Rois : j’en ai perdu les yeux ! […] Elles ont droit de plaire à quiconque a eu sa Fronde et son coup de feu dans les yeux.

2315. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIe entretien. Vie du Tasse (1re partie) » pp. 5-63

La couleur de ses cheveux et de sa barbe tenait le milieu entre le noir et le blond, dans une telle proportion cependant, que le sombre l’emportait sur le clair, mais que ce mélange indécis des deux teintes donnait à sa chevelure quelque chose de doux, de chatoyant et de fin ; son front était élevé et proéminent, si ce n’est vers les tempes, où il paraissait déprimé par la réflexion ; la ligne de ce front, d’abord perpendiculaire au-dessus des yeux, déclinait ensuite vers la naissance de ses cheveux qui ne tardèrent pas à se reculer eux-mêmes vers le haut de la tête, et à le laisser de bonne heure presque chauve ; les orbites de l’œil étaient bien arqués, ombreux, profonds et séparés par un long intervalle l’un de l’autre ; ses yeux eux-mêmes étaient grands, bien ouverts, mais allongés et rétrécis dans les coins ; leur couleur était de ce bleu limpide qu’Homère attribue aux yeux de la déesse de la sagesse et des combats, Pallas ; leur regard était en général grave et fier, mais ils semblaient par moments retournés en dedans, comme pour y suivre les contemplations intérieures de son esprit souvent attaché aux choses célestes ; ses oreilles, bien articulées, étaient petites ; ses joues plus ovales qu’arrondies, maigres par nature et décolorées alors par la souffrance ; son nez était large et un peu incliné sur la bouche ; sa bouche large aussi et léonine ; ses lèvres étaient minces et pâles ; ses dents grandes, régulièrement enchâssées et éclatantes de blancheur ; sa voix claire et sonore tombait à la fin des phrases avec un accent plus grave encore et plus pénétrant ; bien que sa langue fût légère et souple, sa parole était plutôt lente que précipitée, et il avait l’habitude de répéter souvent les derniers mots ; il souriait rarement, et, quand il souriait par hasard, c’était d’un sourire gracieux, aimable, sans aucune malice et quelquefois avec une triste langueur ; sa barbe était clairsemée et, comme je l’ai déjà dépeinte, d’une couleur de châtaigne ; il portait noblement sa tête sur un cou flexible, élevé et bien conformé ; sa poitrine et ses épaules étaient larges, ses bras longs, libres dans leurs mouvements ; ses mains très allongées mais délicates et blanches, ses doigts souples, ses jambes et ses pieds allongés aussi, mais bien sculptés, avec plus de muscles toutefois que de chair ; en résumé, tout son corps admirablement adapté à sa figure ; tous ses membres étaient si adroits et si lestes que, dans les exercices de chevalerie, tels que la lance, l’épée, la joute, le maniement du cheval, personne ne le surpassait.

2316. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Figurines (Deuxième Série) » pp. 103-153

L’œil guetteur et amusé, il a commencé par être un écrivain excessivement pittoresque, un peu dans la manière d’Alphonse Daudet (Inconsolables, Sire). […] Émile Pouvillon, cet amoureux de la terre, qui nous apporte quinze jours à peine, chaque année, ses yeux bleus de faune et d’enfant dans une bonne figure cuite d’officier et qui, le reste du temps, rêve là-bas dans son Quercy, était tout disposé à comprendre la petite pastoure visionnaire. […] Et, seuls vivants dans un pauvre paquet d’os et de muscles ankylosés, noués en boule dans une corbeille, les yeux d’une rachitique roulent, désorbités, effrayants du désir de vivre, de la volonté de guérir… » Mais il faut tout lire.

2317. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Deuxième leçon »

Cette considération aurait à mes yeux, beaucoup de poids, si elle était réellement un motif en faveur de l’ordre historique. […] La connaissance des lois générales de la vie, qui doit être à nos yeux le véritable objet de la physiologie, exige la considération simultanée de toute la série organique sans distinction de végétaux et d’animaux, distinction qui, d’ailleurs, s’efface de jour en jour, à mesure que les phénomènes sont étudiés d’une manière plus approfondie. […] Cette considération est, à mes yeux, d’une si grande importance, que je ne crains pas d’attribuer en partie à ce vice de nos éducations actuelles l’état d’imperfection extrême où nous voyons encore les sciences les plus difficiles, état véritablement inférieur à ce que prescrit en effet la nature plus compliquée des phénomènes correspondants.

2318. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre VI. L’effort intellectuel »

À quelques pas de là, nous tirions de notre poche un crayon et du papier, et nous luttions séparément à qui décrirait un plus grand nombre d’objets que nous avions pu saisir au passage… Il arrivait souvent à mon fils d’inscrire une quarantaine d’objets… » Le but de cette éducation spéciale était de mettre l’enfant à même de saisir d’un seul coup d’œil, dans une salle de spectacle, tous les objets portés sur eux par tous les assistants : alors, les yeux bandés, il simulait la seconde-vue en décrivant, sur un signe conventionnel de son père, un objet choisi au hasard par un des spectateurs. […] Cette perception, nous la confions à notre mémoire ; et dès lors notre but sera d’obtenir de nos jambes des mouvements qui donnent à nos yeux une impression semblable à celle que notre mémoire avait gardée.

2319. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — II. (Fin.) » pp. 213-233

Lorsque Mézeray décrivait la première journée des Barricades qui avait mis Henri III hors de sa capitale (12 mai 1588), ce n’était pas sans en avoir vu faire lui-même sous ses yeux et sans avoir rappris, ainsi que ses contemporains, la puissance et la tactique de ces grands soulèvements populaires. […] Camusat, qui s’était occupé de l’Histoire des journaux, n’a pas eu sous les yeux le manuscrit original, sans quoi il n’eût pas omis cette pièce.

2320. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — I. » pp. 234-253

Coup d’œil sur Belœil, avait-il intitulé son essai (1781) par un de ces jeux de mots et de ces sortes de calembours qui sont un de ses petits travers. […] Il y en a un sur le choix des semences aux environs des parcs ; le prince suppose toujours qu’ils ne sont point enclos de murailles et que la vue s’étend à l’entour par des éclaircies bien ménagées : il soigne alors les nuances diverses des semences dans les plaines, et veut assortir « le petit vert du lin, le mêlé, le tacheté du sarrasin, le petit jaune du blé, le gros vert de l’orge, et bien d’autres espèces que, dit-il, il ne connaît pas encore », toutes ensemble faisant le fond du tableau et qui deviennent le plaisir des yeux.

2321. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — II. (Fin.) » pp. 322-341

Les scènes de passion, dont quelques-unes sont assez belles, entre la duchesse tante de Fabrice et la jeune Clélia, ne rachètent qu’à demi ces impossibilités qui sautent aux yeux et qui heurtent le bon sens. […] L’œil assez petit, mais très vif, sous une voûte sourcilière prononcée, était fort joli dans le sourire.

2322. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — II. (Suite.) » pp. 434-453

Dans la préface qu’il a mise à sa comédie des Capitulations dans le recueil de ses Œuvres, Picard raconte comment il a recommencé sa pièce jusqu’à trois fois, à de nouveaux frais et sur un nouveau plan ; il aurait pu dire qu’il l’avait recommencée cinq et six fois, j’en ai les preuves sous les yeux ; et chaque fois, en lisant la pièce à ses amis, il a le regret de sentir que l’ouvrage (il se l’avoue) reste pâle, toujours grave et sérieux, et incomplet. […] Daru écrivait à Picard sur sa comédie et dans lesquelles il lui faisait les vraies objections dont l’auteur, malgré son effort, n’a pu triompher, ont à mes yeux une valeur morale et plus que littéraire, si l’on songe qu’elles sont du même homme qui, vers le même temps, disait dans une lettre de Berlin adressée à Mme Daru : « Je t’écris d’une main fatiguée de vingt-sept heures de travail. » On le comprend, c’est moins le détail des conseils et ce qu’ils pouvaient avoir de plus ou moins motivé, que le sentiment même qui les inspire, cet amour et ce culte des lettres, tendre, délicat, fidèle, élevé, que je me plais à observer et à poursuivre en M. 

2323. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) «  Œuvres de Chapelle et de Bachaumont  » pp. 36-55

En voici cette fois une édition très soignée, très agréable à l’œil, jouant l’Elzévir à s’y méprendre, et pour laquelle un libraire homme de goût n’a rien négligé. […] Ils ont l’œil si clairvoyant qu’ils aperçoivent le faible de toutes les idées et de tous les styles, aucun prestige ne les éblouit, aucune renommée ne les abuse ; leur goût est un crible qui ne laisse passer que le pur froment ; c’est une de ces balances d’une sensibilité infinie qui ne pèsent que l’or.

2324. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — II » pp. 159-177

Le poète suit les divers degrés de perfectionnement et montre à plaisir la tapisserie dont bientôt on revêtit le bois des sièges dans les anciens jours, tapisserie à l’étroit tissu, richement brodée, « où l’on pouvait voir s’étaler la large pivoine, la rose en fleur tout épanouie, le berger à côté de sa bergère, sans oublier le petit chien et le petit agneau avec leurs yeux noirs tout fixes et tout ronds, et des perroquets tenant une double cerise dans leur bec. » — Tous ces riens sont agréablement déduits et relevés de couleurs, comme le ferait au besoin l’abbé Delille ou comme un spirituel jésuite n’y manquerait pas non plus dans des vers latins. […] Ici, la rivière d’Ouse, serpentant lentement à travers une plaine tout unie de spacieuses prairies parsemées de bestiaux, conduit et amuse le long de sa course sinueuse l’œil ravi d’enchantement !

2325. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — I » pp. 93-111

Ceux de ses écrits qui ont été publiés après sa mort n’ont pu que confirmer cette idée ; les Considérations sur le gouvernement de la France, qui parurent en 1764 dans, une édition très fautive, et dont on refit en 1784 une édition qui passe pour meilleure, justifièrent aux yeux du public les éloges de Rousseau et de Voltaire, et montrèrent M. d’Argenson comme le partisan éclairé et prudent d’une réforme au sein de la monarchie et par la monarchie, d’une réforme sans révolution. […] Sérieux au fond, ayant des goûts à lui et qui parurent bientôt très prononcés, aimant les lectures de toutes sortes, l’histoire, les estampes et l’instruction qu’elles procurent sur les mœurs du temps passé, jugeant sainement des choses et des hommes qu’il avait sous les yeux, et soucieux de l’amélioration de l’espèce dans l’avenir, il fut de tout temps très naturel, au risque même de ne point paraître essentiellement élégant ni très élevé, il avait en lui un principe de droiture et le sentiment de la justice qu’il cultiva et fortifia sans cesse, loin de travailler à l’étouffer.

2326. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le baron de Besenval » pp. 492-510

Il parlait de ses montagnes avec enthousiasme ; il eût volontiers chanté le ranz des vaches avec les larmes aux yeux, et était en même temps le conteur le plus agréable du cercle de la comtesse Jules. […] Les notices que j’ai sous les yeux laissent à désirer pour la précision.

2327. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance inédite de Mme du Deffand, précédée d’une notice, par M. le marquis de Sainte-Aulaire. » pp. 218-237

Et encore, dans une des lettres suivantes : La duchesse de Choiseul n’est pas très jolie, mais elle a de beaux yeux ; c’est un petit modèle en cire, à qui l’on n’a point permis pendant quelque temps de parler, l’en jugeant incapable, et qui a de la timidité et de la modestie : la Cour ne l’a pas guérie de cette modestie ; la timidité est rachetée par le son de voix le plus touchant, et se fait oublier dans le tour élégant et l’exquise propriété de l’expression. […] On tirerait de ces lettres de quoi décrire dans le plus grand détail un idéal d’exil ministériel au xviiie  siècle ; Chanteloup, vu par les yeux de Mme de Choiseul ou par ceux du grand abbé, est un Éden.

2328. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Le journal de Casaubon » pp. 385-404

Ce jour-là les études ont tort, ce jour-là et les jours suivants ; et pendant bien du temps encore, l’image de cette aimable et gentille petite créature viendra passer et repasser devant les yeux paternels, et se placer entre lui et son Athénée, qu’il a rouvert. — Que sera-ce quand il perdra par la suite une autre de ses filles, sa bien-aimée Philippe, âgée de dix-huit ans et demi ? […] [NdA] Ce mot de Henri IV, de ce roi vraiment tutélaire et qui sentait à quel point il l’était, rappelle les belles paroles de Richelieu, en son testament politique, sur la vigilance nécessaire au chef d’un État et sur la gravité de la charge dont il porte le poids à toute heure, la ressentant d’autant plus qu’il est plus habile : « Il faut dormir comme le lion, sans fermer les yeux… Une administration publique occupe tellement les meilleurs esprits, que les perpétuelles méditations qu’ils sont contraints de faire pour prévoir et prévenir les maux qui peuvent arriver les privent de repos et de contentement, hors de celui qu’ils peuvent recevoir voyant beaucoup de gens dormir sans crainte à l’ombre de leurs veilles et vivre heureux par leur misère. »

2329. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset, professeur d’histoire au lycée Bonaparte. »

De plus il a sous lui toute une élite d’hommes secondaires que cette histoire nous découvre et qui prennent figure et vie à nos yeux : — en première ligne, Martinet, lieutenant-colonel du régiment du Roi, mort maréchal de camp, officier modèle, dont le nom devient proverbial dans l’armée, et qui est l’instrument de la réforme, le parfait instructeur, le praticien de la discipline nouvelle dans l’infanterie ; — après lui, le chevalier de Fourilles, qui rend des services pareils, et qui est un autre Martinet pour la cavalerie ; — des intendants comme Chaniel, agent zélé, ferme, intelligent, dont les plus grands généraux redoutent les écritures, qui ne paraît pas en avoir abusé toutefois, et que Louvois, fidèle au principe de la séparation des pouvoirs, soutient sans broncher dans ses contestations avec les maréchaux victorieux, après la conquête. […] Vauban lui a toute reconnaissance pour l’avoir distingué, pour l’avoir tiré de la dépendance du chevalier de Clerville, l’ingénieur en vogue, beau parleur, qui jetait de la poudre aux yeux, et qui était auparavant l’oracle en matière de fortification.

2330. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Montaigne en voyage »

Montaigne, retiré vers l’âge de trente-huit ans dans son château et dans sa tour seigneuriale, s’était amusé à tracer ou à faire tracer sur les poutres et chevrons supérieurs de la pièce qu’il appelait sa librairie ou bibliothèque quelques inscriptions morales et philosophiques, reproduisant les maximes ordinaires de sagesse qu’il tenait à avoir constamment devant les yeux. […] Il ne ressemblait pas à ceux qui portent partout avec eux les lunettes de leur village ; il prenait celles de chaque endroit où il passait, sauf à n’en croire en définitive que ses propres yeux.

2331. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Les frères Le Nain, peintres sous Louis XIII, par M. Champfleury »

Il semble que vous entriez brusquement dans la maison, et que toutes ces bonnes gens, sans sortir de leur quiétude ni de leur caractère, tiennent les yeux fixés vers vous ; et encore semble-t-il que vous soyez plus d’un à entrer, car ils ne regardent pas tous au même point du seuil. […] Malgré ce léger défaut d’action et de composition qui ne s’aperçoit qu’en y repensant et à l’analyse, l’effet de lumière est si vrai, si large, si bien rendu, si pleinement harmonieux ; la bonté, l’intelligence et les vertus domestiques peintes sur toutes ces figures sont si parfaites et si parlantes, que l’œuvre attache, réjouit l’œil, tranquillise le cœur et fait rêver l’esprit.

2332. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Œuvres complètes de Molière »

Eudore Soulié, voué comme il l’est à la mémoire de Molière, et piqué au jeu par le succès même, aura bien de la peine à ne pas entreprendre cette recherche, qui ne serait pas ingrate à ses yeux si elle lui procurait un seul document d’importance. […] Aimer La Fontaine, c’est presque la même chose qu’aimer Molière ; c’est aimer la nature, toute la nature, la peinture naïve de l’humanité, une représentation de la grande comédie « aux cent actes divers », se déroulant, se découpant à nos yeux en mille petites scènes avec des grâces et des nonchalances qui vont si bien au bonhomme, avec des faiblesses aussi et des laisser aller qui ne se rencontrent jamais dans le simple et mâle génie, le maître des maîtres.

2333. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois par M. Camille Rousset. Victor-Amédée, duc de Savoie. (suite et fin.) »

Il faut voir comme l’orateur, après avoir exalté toutes les vertus de la mère, y célèbre dans le jeune prince — « Le rayon divin qui brille avec tant d’éclat sur son visage et dans toute sa personne ; cet air noble, fin et délicat, cette vivacité ingénieuse qui n’a rien de rude, de léger ni d’emporté ; cette physionomie haute, sérieuse et rassise qu’on lui voit prendre dans les fonctions publiques, et qui donne un nouveau lustre aux grâces naïves de son âge ; enfin l’agrément inexprimable que le Ciel a répandu dans toutes ses actions, qui le rend le centre des cœurs aussi bien que des yeux dans les assemblées et dans les cérémonies, qui le distingue beaucoup plus que le rang qu’il y tient, et dans lequel on entrevoit toujours pour dernier charme un fond de bonté, de droiture, de discernement et de raison qui se découvre tous les jours de plus en plus dans tous ses sentiments et toutes ses inclinations. […] Roussel, il baissait encore les yeux, mais avec peine et après une certaine lutte.

2334. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

Il est difficile aux auteurs de ne pas se peindre, surtout dans un premier ouvrage : Émile, qui ne fait autre chose que se raconter à Mathilde, essaye à un endroit de se peindre aussi, ou du moins de tracer l’idéal relatif qu’il a parfois devant les yeux et qu’il est tenté de réaliser : « Il y aurait, dit-il, un caractère intéressant à développer dans un roman ; ce serait celui d’un jeune homme né comme moi sans famille, sans fortune, suffisant à tout ce qui lui manquerait par sa seule énergie, et dont les forces croîtraient avec les obstacles ; un jeune homme qui se placerait au-dessus d’une telle position par un tel caractère ; qui, loin de se laisser abattre par les difficultés, ne penserait qu’à les vaincre, et, esclave seulement de ses devoirs et de sa délicatesse, aurait su parvenir, en conservant son indépendance, à un poste assez élevé pour attirer sur lui les regards de la foule et se venger ainsi de l’abandon. […] Ayant vu, quelques années après, tomber également dans un duel mortel son collaborateur de La Presse, Dujarier, il prononça sur sa tombe, le 14 mars 1845, des paroles qui méritent d’être rappelées et qui témoignent d’un sentiment profond : « Si j’élève ici la voix, disait-il, ce n’est pas seulement pour exprimer de vains regrets et rendre un pieux hommage aux rares qualités que m’avaient fait reconnaître et honorer en lui des relations dont chacune était une épreuve journalière et décisive… Mais, placé entre la tombe qui est sous mes yeux et celle qui demeure ouverte et cachée dans mon cœur, je sens que j’ai un devoir impérieux à remplir, devoir trop douloureux pour n’être pas solennel !

2335. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite et fin.) »

Mais comment discerner ces têtes capables et d’une arrière-pensée bienveillante, comment avoir l’idée de les rapprocher de soi, quand elles apparaissaient chargées de toutes les souillures, presque de tous les crimes, et quand on était soi-même avec un triple bandeau de préventions sur les yeux ? […] Mirabeau voulait que le roi sortît de Paris en roi, en plein jour, non déguisé ni, certes, en domestique, sans rien de ce qui avilit aux yeux d’une nation ; il voulait aussi l’appui d’un général, de M. de Bouillé ; la guerre civile peut-être, non la guerre étrangère… La reine, cependant, commençait à reconnaître qu’il y aurait eu avantage et peut-être salut à suivre plus tôt cette voie de conciliation et d’intelligence avec quelques-uns des hommes influents de l’Assemblée.

2336. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Exploration du Sahara. Les Touareg du Nord, par M. Henri Duveyrier. »

Bien que les vents régnants déplacent continuellement les sables, les proportions de ces changements sur les dunes ne sont point notables et appréciables à l’œil : il y faut la vie d’un homme pour constater quelque différence sensible. […] Ces membres de la confrérie des Senoûsi, ces janissaires de l’Islamisme, se dessinent nettement à nos yeux sous la plume du jeune voyageur qui les a rencontrés partout sur son chemin comme ennemis.

2337. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les fondateurs de l’astronomie moderne, par M. Joseph Bertrand de l’académie des sciences. »

Cela est sensible à qui lit l’Exposition du Système du Monde, de La Place, le modèle du genre : il y a des endroits où on lit des yeux l’énoncé d’une formule que le mathématicien seul comprend : le profane est réduit à l’accepter ; il doit en croire son auteur sur parole et passer outre. […] Au lieu de mondes silencieux et d’étoiles, étrangères à nous et qui nous écrasent, ce ne sont que des demeures différentes qui s’étagent à nos yeux dans la maison de notre Père.

2338. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par le chevalier d’Arneth »

La différence de ces autographes viennois avec les fac-similé français qui ont été donnés saute aux yeux. […] Né dans une classe obscure de la bourgeoisie, imbu de tous les principes de la philosophie moderne, et cependant tenant plus qu’aucun ecclésiastique à la hiérarchie du Clergé, vain, bavard, fin et brusque à la fois, fort laid et affectant l’homme singulier, traitant les gens les plus élevés comme ses égaux, quelquefois même comme ses inférieurs, l’abbé de Vermond recevait des ministres et des évêques dans son bain, mais disait en même temps que le cardinal Dubois avait été un sot ; qu’il fallait qu’un homme de sa sorte, parvenu au crédit, fît des cardinaux et refusât de l’être. » Si l’abbé de Vermond disait de ces choses à tous venants et sans discerner son monde, il avait grand tort ; mais il faut convenir que ce qu’on a présentement sous les yeux ne répond pas tout à fait à ce signalement, tracé par une griffe ennemie.

2339. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La comédie de J. de La Bruyère : par M. Édouard Fournier. »

La Bruyère, dans le monde et à la Cour des Condés, n’était point sans avoir, avec tout son esprit, des défauts qui sautaient aux yeux. […] Puisque s’ingénier est un crime, je m’en garderai, pour ne dire que ce qui crèvera les yeux, et pèsera comme preuve… Plus de conjectures, soit !

2340. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre III. La poésie : V. Hugo et le Parnasse »

Sa vision est une des plus nettes qui se soient jamais rencontrées chez un poète ; son œil garde à la fois le détail et l’ensemble des choses. […] Une chose vue éveille l’idée qui sommeillait en lui, ou l’idée inquiète se projette dans l’objet qui frappe ses yeux.

2341. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XI. L’antinomie sociologique » pp. 223-252

Il y a l’idéologie solidariste qui consiste à voiler l’antagonisme foncier qui fait de chaque individu l’ennemi de tous les autres, pour déployer à nos yeux la solidarité qui les relie ; solidarité réelle assurément, mais qui n’est qu’un des côtés du tableau : côté qu’on se plaît à mettre seul en lumière, en laissant l’autre côté dans une ombre prudente. […] Les individus n’acceptent plus, les yeux fermés, les notions qu’on leur propose.

2342. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

Lacordaire s’était fait le raisonnement que voici : La société, à mes yeux, est nécessaire ; de plus, le christianisme est nécessaire à la société ; il est seul propre à la maintenir, à la perfectionner : donc le christianisme est vrai, non pas d’une vérité politique et relative, comme l’admettent bien des gens, mais d’une vérité supérieure et divine : toute autre vérité secondaire serait un compromis et une sorte de malentendu indigne et de la confiance de l’homme et de la franchise de Dieu. […] Il se compose une histoire à vue de pays, à vol d’oiseau, comme le pourrait faire l’œil de la Providence.

2343. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits de Fénelon. (1850.) » pp. 1-21

Directement il l’avait vu très peu, et il nous en avertit : « Je ne le connaissais que de visage, trop jeune quand il fut exilé. » C’était assez toutefois à un tel peintre qu’une simple vue pour saisir et rendre merveilleusement le charme : Ce prélat, dit-il, était un grand homme maigre, bien fait, pâle, avec un grand nez, des yeux dont le feu et l’esprit sortaient comme un torrent, et une physionomie telle que je n’en ai point vu qui y ressemblât, et qui ne se pouvait oublier quand on ne l’aurait vue qu’une fois. […] Dans le peu qu’on nous donne ici de ses conseils à Mme de Maintenon, il sait mettre le doigt sur les défauts essentiels, sur cet amour-propre qui veut tout prendre sur soi, sur cet esclavage de la considération, cette ambition de paraître parfaite aux yeux des gens de bien, enfin tout ce qui constituait au fond cette nature prudente et glorieuse.

2344. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand. (Berlin, 1846-1850.) » pp. 144-164

La portion historique des Œuvres de Frédéric a eu le pas, à bon droit, sur les autres écrits ; elle forme sept volumes, dont cinq sont sous mes yeux. […] Mais, même l’intérêt du souverain mis de côté, il répugne de voir un grand homme se salir à des plaisanteries de ce genre contre des objets respectables aux yeux du grand nombre ; c’était jusqu’à un certain point violer cette tolérance hospitalière dont il se faisait gloire, que de mépriser ainsi tout haut ce qu’il prétendait accueillir et tolérer.

2345. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Étienne Pasquier. (L’Interprétation des Institutes de Justinien, ouvrage inédit, 1847. — Œuvres choisies, 1849.) » pp. 249-269

Mais bientôt, avec l’âge et le cours des événements, les sujets deviennent plus sérieux : à partir d’un certain moment, toute l’histoire et la politique de son temps y passent, et nous y assistons avec lui, c’est-à-dire par les yeux d’un témoin judicieux, éclairé, placé au meilleur point de vue, ni trop près ni trop loin de la Cour, qui ne se pique point de parler en homme d’État, mais qui apprécie et sent les choses de sa nation avec le cœur et l’intelligence de cette haute bourgeoisie, alors si intègre et si patriotique, et qui se pouvait dire le cœur même de la France. […] À peine investi par la confiance de Henri III de la charge d’avocat général du roi en la Cour des comptes, il en usa pour s’opposer à certain enregistrement d’édit qu’il croyait inique ; et, comme il arriva qu’une grande princesse qu’il vit peu après lui fit part du mécontentement du roi, si bien disposé pour lui auparavant, Pasquier répondit, en se ressouvenant de son ancienne courtoisie galante et de sa poésie de jeunesse pour corriger la sévérité de son procédé, que ce n’étaient là que brouilleries et querelles d’amant et maîtresse ; que « l’issue de ceci serait telle que d’un amoureux, lequel, ayant été éconduit par sa dame, s’en va infiniment mal content, mais qui, revenant peu après à soi, l’aime, respecte et honore davantage » ; et qu’ainsi le roi l’en regarderait bientôt de meilleur œil que devant. — C’est dans ce haut esprit de dévouement que Pasquier ne craignit pas de s’opposer à Henri IV lui-même pour l’enregistrement d’un édit qui allait à démembrer la Cour des comptes, et cela pendant le séjour du Parlement à Tours, c’est-à-dire pendant que les magistrats loyaux partageaient les fortunes diverses du Béarnais et son exil de Paris.

2346. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Nouveaux documents sur Montaigne, recueillis et publiés par M. le docteur Payen. (1850.) » pp. 76-96

Considérant de près le désordre des partis et ce qui s’y développe si vite d’abject et de misérable, il rougit de voir des chefs qui ont quelque renom s’abaisser et s’avilir par de lâches complaisances : car, en ces circonstances, nous le savons comme lui, « c’est au commandant de suivre, courtiser et plier, à lui seul d’obéir ; tout le reste est libre et dissolu. » — « Il me plaît, dit ironiquement Montaigne, de voir combien il y a de lâcheté et de pusillanimité en l’ambition ; par combien d’abjection et de servitude il lui faut arriver à son but. » Méprisant l’ambition comme il le fait, il n’est pas fâché de la voir se démasquer ainsi dans ces pratiques et se dégrader à ses yeux. […] Et, loin de s’abattre et de maudire le sort de l’avoir fait naître en un âge si orageux, il s’en félicite tout à coup : « Sachons gré au sort de nous avoir fait vivre en un siècle non mol, languissant ni oisif. » Puisque la curiosité des sages va chercher dans le passé les confusions des États pour y étudier les secrets de l’histoire et, comme nous dirions, la physiologie du corps social à nu : « Ainsi fait ma curiosité, nous déclare-t-il, que je m’agrée aucunement de voir de mes yeux ce notable spectacle de notre mort publique, ses symptômes et sa forme ; et, puisque je ne la puis retarder, je suis content d’être destiné à y assister et m’en instruire. » Je ne me permettrai pas de proposer à beaucoup de personnes une consolation de ce genre ; la plupart des hommes n’ont pas de ces curiosités héroïques et acharnées, telles qu’en eurent Empédocle et Pline l’Ancien, ces deux curieux intrépides qui allaient droit aux volcans et aux bouleversements de la nature pour les examiner de plus près, au risque de s’y abîmer et d’y périr.

2347. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Marguerite, reine de Navarre. Ses Nouvelles publiées par M. Le Roux de Lincy, 1853. » pp. 434-454

Elle a le nez légèrement aquilin et très long, l’œil long, doux et fin, la bouche également longue, fine et souriante. […] Le Roux de Lincy nous a donné ; elle veut dire qu’il vaut mieux ne rien accorder à un amant que de lui octroyer la moindre petite faveur dont il va se prévaloir à l’instant pour vous faire faire du chemin : Baillez-lui tout ce qu’il veut maintenant, Soit le parler, soit l’œil, ou soit la main, Et vous verrez en lui incontinent Autre vouloir que de cousin germain.

2348. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 33, que la veneration pour les bons auteurs de l’antiquité durera toujours. S’il est vrai que nous raisonnions mieux que les anciens » pp. 453-488

Il est vrai que tous ceux qui sont persuadez maintenant de la circulation du sang ne l’ont point vûë de leurs propres yeux, mais ils sçavent que ce n’est plus par des raisonnemens qu’on la prouve, et que c’est en la faisant voir qu’on la démontre. […] Peut-on nier que la circulation du sang n’ait ouvert les yeux à Monsieur Perrault le médecin sur la circulation de la séve dans les arbres et dans les plantes ?

2349. (1911) Jugements de valeur et jugements de réalité

Aussi se rencontre-t-il des doctrinaires qui les regardent d’un œil défiant et qui s’efforcent de les réduire à la portion congrue. Mais, en fait, il n’en est pas qui aient plus de prix aux yeux des hommes.

2350. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre V. Séductions pour la compréhension de la psychologie indigène. — Conclusion »

Ils se moquent de nos pieds rétrécis déformés par les chaussures ; les yeux bleus leur plaisent davantage 119. […] D’ailleurs, en ce pays, on a si souvent la mort sous les yeux qu’on se familiarise avec l’idée d’une fin définitive.

2351. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Ernest Renan »

L’Église, enfin, est la Vérité visible dont nos pauvres yeux de chair ont tant besoin, et qui faisait dire un jour à une femme, en parlant de Jésus-Christ : « Tout me serait aisé si je pouvais parfois voir passer sa robe bleue ». […] Aussi, tournant le dos à ce qui lui aurait écrasé les yeux s’il l’avait regardé, il a, ce myope, courbé sa vue basse sur des imperceptibilités scripturaires, et il a donné des points et virgules pour base aux mauvais rêves qu’il a faits.

2352. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Brizeux. Œuvres Complètes »

Pointillé à nous impatienter les yeux, l’auteur du Vieux Pauvre du Cumberland, de Lucy Gray, de l’Enfant aveugle, ose des recherches d’originalité, souvent heureuses, et au milieu des infiniment petits du détail, il sait ouvrir de l’horizon. […] Le Génie en patois est encore du génie, et parce qu’il n’a pas le soutien d’un idiome riche, harmonieux, complet, comme la grandeur dans l’indigence, il n’en est, — à nos yeux du moins, — que plus beau !

2353. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Jean Richepin »

Après tout, sous les haillons dont il s’enveloppe si diogéniquement en ses poésies, c’est épicurien aux yeux païens, et un épicurien qui n’a pas la modération et l’équilibre d’Épicure ; car c’est un intense, que M.  […] Il n’offre pas, comme Persée, aux yeux, qu’elle épouvantera tête coupée de la Méduse… On dirait qu’il est amoureux de son effroyable beauté et qu’il en caresse les serpents.

2354. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Sur Adolphe de Benjamin Constant » pp. 432-438

Je crois bien que j’en ressens plus encore, parce que je reconnais l’auteur à chaque page, et que jamais confession n’offrit à mes yeux un portrait plus ressemblant.

2355. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « Mme DESBORDES-VALMORE. (Pauvres Fleurs, poésies.) » pp. 115-123

lève-toi pur sur la France Où m’attendent de chers absents ; A mon fils, ma jeune espérance, Rappelle mes yeux caressants !

2356. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Laurent (de l’Ardèche) : Réputation de l’histoire de France de l’abbé de Montgaillard  »

Et où en serions-nous, si les politiques de la Montagne avaient pu reculer en 1793, comme les historiens en 1822 devant les conséquences du système qui renfermait, à leurs yeux, les seuls moyens de salut public ?

2357. (1874) Premiers lundis. Tome I « Hoffmann : Contes nocturnes »

Zacharias Werner, Berthold, Kreisler, vous tous artistes de nos jours, au génie inquiet, à l’œil effaré, que l’air du siècle ronge ; inconsolables sous l’oppression terrestre, amoureux à la folie de ce qui n’est plus, aspirant sans savoir à ce qui n’est pas encore ; mystiques sans foi, génies sans œuvre, âmes sans organe ; comme il vous a connus, comme il vous a aimés !

2358. (1874) Premiers lundis. Tome II « Deux préfaces »

Sainte-Beuve, qui aurait pu nous échapper, sans l’œil vigilant et attentif d’un amateur et d’un curieux, devient aujourd’hui très essentielle pour tous ceux qu’intéresse l’histoire des livres : « Pour les bibliographes seulement, dit M. 

2359. (1875) Premiers lundis. Tome III « Le roi Jérôme »

Il faudrait savoir et se donner et se doubler en quelque sorte, élever son cœur en même temps qu’anéantir sa volonté propre, comprendre d’un seul coup d’œil toutes les destinées futures qui intervertissent l’ordre antérieur et s’y résigner en grandissant.

2360. (1875) Premiers lundis. Tome III «  La Diana  »

Et c’est ainsi que dans cette salle des anciens États du Forez, sauvée, grâce à lui, de la ruine et consacrée désormais à la Société historique de Montbrison, sous ces voûtes et entre ces murailles toutes chargées d’armoiries et d’emblèmes, M. de Persigny a fait que chacun pût y jeter les yeux sans trop d’orgueil et sans trop d’envie.

2361. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VI. De l’envie et de la vengeance. »

Mais le mal que l’envieux sait causer, ne lui compose pas même un bonheur selon ses vœux ; chaque jour, la fortune ou la nature, lui donne de nouveaux ennemis ; vainement il en fait ses victimes, aucun de ses succès ne le rassure, il se sent inférieur à ce qu’il détruit, il est jaloux de ce qu’il immole ; enfin, à ses yeux mêmes, il est toujours humilié, et ce supplice s’augmente par tout ce qu’il fait pour l’éviter.

2362. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « André Theuriet »

Parfois, lorsqu’il se regarde dans un miroir, et qu’il voit se refléter dans la glace cette figure ridée et vieillotte, ce dos voûté, ces yeux ternes et ces lèvres chagrines, il a peine lui-même à reconnaître dans ce personnage desséché et décrépit le Séverin d’autrefois  le svelte jouvenceau exalté, tendre et romanesque, qui marchait d’un pas si allègre sous les acacias en fleur de la rue du Baile, et qu’on avait surnommé à Juvigny « l’amoureux de la préfète ».

2363. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Choses d’autrefois »

La pauvre victime « jeta les yeux de tous côtés pour voir s’il ne lui viendrait aucun secours.

2364. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Rêveries sur un empereur »

Il vit sous l’œil de Dieu, il se sent choisi et sacré par Dieu.

2365. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Le termite »

Ils considèrent le monde extérieur en malades, en hallucinés, d’un œil qui le déforme et le trouble.

2366. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Les derniers rois »

« Nous avions tous les larmes aux yeux en nous séparant ; et, si j’avais voulu profiter de l’attendrissement général, peut-être serais-je encore à Rio-Janeiro.

2367. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Pour encourager les riches. » pp. 168-175

Et, soit dit en passant, il est remarquable que de telles révélations, et sur des choses d’un ordre si privé, puissent être faites par les journaux, et que celle-là en particulier, si propre à étonner les pauvres et à les induire en de mauvais sentiments, nous ait été apportée par une gazette dont l’emploi ordinaire est de défendre ce qui nous reste du vieil ordre social et, spécialement, l’aristocratie du nom et celle de l’argent et leurs conjonctions si intéressantes… Une fortune de cent quatre-vingts millions, si elle n’a pas été mal acquise, n’a pu être acquise pourtant que par la spéculation, qui est une forme du jeu et qui, étant la recherche du gain sans travail, est, aux yeux d’un chrétien, sur la limite extrême des choses permises.

2368. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Maeterlinck, Maurice (1862-1949) »

C’est, quelle qu’en soit la signification, un rappel aux choses du dehors, une voix qui arrive du monde ; cela ne fait pas partie intégrante du drame ; ces voix ne traversent pas l’œuvre comme tel souffle qui, dans les Aveugles, courbe toutes les têtes ; ici, à tel instant, le roi et la reine se doivent distraire du spectacle de la salle pour jeter les yeux vers ces hommes.

2369. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Merrill, Stuart (1863-1915) »

Et ce seront alors des chansons douces, comme d’une teinte effacée, des ballets de Lulli où sourient de mièvres marquises, des brises ailées et des caresses, toute une savante combinaison de syllabes fondues, atténuées, prolongées ou redoublées, des divertissements verbaux exécutés par un rêveur légèrement triste qui fermerait les yeux pour ne pas être distrait par les choses réelles et mieux rêver les rêves qu’il a élus.

2370. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Retté, Adolphe (1863-1930) »

Que ce soit la mer merveilleuse, tout enguirlandée de varechs et de madrépores, comme une galaxie d’étoiles roses ; que ce soit le fleuve, où tant de fois il admira rouler le Bateau Ivre ; que ce soit le lac plat, ou Autre décor, une eau de songe et jamais grise ; que ce soit la source bruissante en cascatelles d’écume, ou la fontaine de girandes lumineuses, ses yeux avides de cliquetis et de clarté s’amusent puérilement des perles blanches et des cristallines paroles grêles des gouttes d’eau.

2371. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Saint-Pol-Roux (1861-1940) »

Cet éloge semblera faible à vos yeux — bons snobs qui préférez Baudelaire au « génial bafouilleur ».

2372. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XII » pp. 100-108

Elle fut détrompée de cette opinion quand elle se vit négligée par Mazarin ; elle jugea des vues et des espérances du cardinal par son refroidissement ; c’était à ses yeux un indice certain des progrès de la séduction exercée par Marie Mancini sur le jeune monarque.

2373. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 124-134

Plusieurs Critiques respectables & éclairés nous ont reproché d’avoir traité avec trop d’indulgence ses Mélanges de Littérature : de n’avoir pas assez insisté sur les défauts de sa métaphysique souvent obscure, imperceptible, entortillée ; sur les inégalités de son style, tantôt foible, tantôt plein de morgue, & presque toujours froid & bourgeois ; de n’avoir pas mis sous les yeux du Lecteur le contraste qui résulte de la médiocrité de ses productions, & du ton de mépris qu’il affecte, dans toutes les occasions, pour ce qu’il appelle le bas peuple des Poëtes, des Orateurs, des Historiens.

2374. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 439-450

Peut-être la Nation, revenue de son premier enthousiasme, verra-t-elle tout-à-coup s’élever au milieu d’elle un nouvel Aristophane ou un nouveau Lucien, qui achevera de lui ouvrir les yeux, & de la guérir d’une contagion, dont les effets ont passé rapidement du burlesque au tragique.

2375. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VI, première guerre médique »

L’œil perçant de Miltiade y lut aussitôt un signal de traîtres, un appel des partisans d’Hippias avertissant les Perses qu’Athènes, sans défense, était à la merci d’une surprise qui devancerait son retour.

2376. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Orientales » (1829) — Préface de l’édition originale »

Et puis, pourquoi n’en serait-il pas d’une littérature dans son ensemble, et en particulier de l’œuvre d’un poëte, comme de ces belles vieilles villes d’Espagne, par exemple, où vous trouvez tout : fraîches promenades d’orangers le long d’une rivière ; larges places ouvertes au grand soleil pour les fêtes ; rues étroites, tortueuses, quelquefois obscures, où se lient les unes aux autres mille maisons de toute forme, de tout âge, hautes, basses, noires, blanches, peintes, sculptées ; labyrinthes d’édifices dressés côte à côte, pêle-mêle, palais, hospices, couvents, casernes, tous divers, tous portant leur destination écrite dans leur architecture ; marchés pleins de peuple et de bruit ; cimetières où les vivants se taisent comme les morts ; ici, le théâtre avec ses clinquants, sa fanfare et ses oripeaux ; là-bas, le vieux gibet permanent, dont la pierre est vermoulue, dont le fer est rouillé, avec quelque squelette qui craque au vent ; au centre, la grande cathédrale gothique avec ses hautes flèches tailladées en scies, sa large tour du bourdon, ses cinq portails brodés de bas-reliefs, sa frise à jour comme une collerette, ses solides arcs-boutants si frêles à l’œil ; et puis, ses cavités profondes, sa forêt de piliers a chapiteaux bizarres, ses chapelles ardentes, ses myriades de saints et de châsses, ses colonnettes en gerbes, ses rosaces, ses ogives, ses lancettes qui se touchent à l’abside et en font comme une cage de vitraux, son maître-autel aux mille cierges ; merveilleux édifice, imposant par sa masse, curieux par ses détails, beau à deux lieues et beau à deux pas ; — et enfin, à l’autre bout de la ville, cachée dans les sycomores et les palmiers, la mosquée orientale, aux dômes de cuivre et d’étain, aux portes peintes, aux parois vernissées, avec son jour d’en haut, ses grêles arcades, ses cassolettes qui fument jour et nuit, ses versets du Koran sur chaque porte, ses sanctuaires éblouissants, et la mosaïque de son pavé et la mosaïque de ses murailles ; épanouie au soleil comme une large fleur pleine de parfums ?

2377. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Ronsard, et Saint-Gelais. » pp. 120-129

Si la colère vous enflambe, Ne vous pendez pas, envieux : Je vous remets devant les yeux Le malheur du pauvre Lycambe.

2378. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Voiture, et Benserade. » pp. 197-207

Mais au bruit de la cour & à la prière qui m’a été faite, ayant pris les lunettes de ma vieillesse, qui sont peut-être plus assurées que mes yeux du temps passé, je confesse que j’ai un peu modéré la violence de mon amour.

2379. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Addisson, et Pope. » pp. 17-27

Mais la différence qui se trouve entre ces deux ouvrages didactiques, n’est, au yeux de l’impartialité, qu’à l’avantage de Despréaux.

2380. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Rousseau et M. de Voltaire. » pp. 47-58

« Ses talens, ses malheurs, & ce que j’ai oui dire ici de son caractère, ont banni de mon cœur tout ressentiment, & n’ont laissé mes yeux ouverts qu’à son mérite. » *.

2381. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre II. Chimie et Histoire naturelle. »

Quelles effrayantes leçons, si elle jette les yeux autour d’elle !

2382. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 29, si les poëtes tragiques sont obligez de se conformer à ce que la geographie, l’histoire et la chronologie nous apprennent positivement » pp. 243-254

Racine d’avoir fait dire à Narcisse, dans Britannicus, que Locuste, cette fameuse empoisonneuse du tems de Neron, a fait expirer un esclave à ses yeux, pour essayer l’activité du poison qu’elle avoit preparé pour Britannicus, parce que les historiens racontent que cette épreuve fut faite sur un porc.

2383. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 46, quelques refléxions sur la musique des italiens, que les italiens n’ont cultivé cet art qu’après les françois et les flamands » pp. 464-478

Jamais Iphigenie en Aulide immolée n’a coûté tant de pleurs à la Grece assemblée, que dans l’heureux spectacle à nos yeux étalé, en a fait sous son nom verser la chanmeslé.

2384. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 7, que les genies sont limitez » pp. 67-77

Sans invention dans leurs expressions : incapables de s’élever au-dessus de la nature qu’ils avoient devant les yeux, ils n’ont peint que des passions basses et une nature ignoble.

2385. (1818) Essai sur les institutions sociales « Préface » pp. 5-12

Néanmoins, il n’est pas inutile de le remarquer, toutes les grandes convictions sur lesquelles repose le livre sont demeurées intactes, et les problèmes fondamentaux obtiennent toujours, à mes yeux, les mêmes solutions.

2386. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Auguste Nicolas »

En écrivant ces tristes paroles, nous avons sous les yeux le relevé des dernières publications.

2387. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Préface » pp. -

Mais Gil Blas, beaucoup trop vanté, et qui n’est d’ailleurs qu’un roman d’ordre secondaire, puisqu’il est un roman d’aventures, Gil Blas n’est profond qu’aux yeux des gens superficiels, et si Manon Lescaut a la vérité du sentiment, elle n’a pas la vérité de la couleur.

2388. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — IV »

Taine les examine de l’œil dont Henry Monnier collectionnait les traits de Joseph Prudhomme, avec la sympathie d’un Flaubert faisant parler les gens de Rouen pour orner son Homais, son Bouvard et son Pécuchet, avec l’accablement que le « bourgeois » donnait à Gautier.‌

2389. (1905) Études et portraits. Sociologie et littérature. Tome 3.

L’anoblissement était à ses yeux la seule application utile de cette idée si dangereuse d’égalité. […] » C’est pour avoir toujours eu là, sous les yeux, même dans ses plus vastes spéculations, ce petit coin de terre et d’eau, pour s’être toujours figuré le Français réel et concret dans sa famille et sous son toit, que Bonald restera un des maîtres de la politique scientifique. […] Ce que Balzac aperçoit dans son siècle, c’est d’abord et surtout les conditions imposées par les mœurs à une faculté qui, à ses yeux, constitue le fond même de l’âme humaine. […] Mais, tous ceux qui les aiment le savent bien, cette lecture n’est pas, comme celle de la prose courante, une froide lecture des yeux, c’est une récitation intérieure. […] Quand il avait prononcé d’un livre cet arrêt : « Il n’a pas d’âme », ou encore : « Il ne palpite pas », les qualités d’art devenaient nulles à ses yeux.

2390. (1891) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Quatrième série

Ils y avaient, comme on l’a vu, pris le goût de certains détails précis dont le caractère d’authenticité sauvait à leurs yeux ce qu’ils eussent eu, hors de l’histoire, de bas et de familier. […] Mais il suffit à nos yeux, pour expliquer leur succès, qu’il n’y ait jamais eu de romans ni plus romanesques ni plus chevaleresques. […] J’ai d’ailleurs sous les yeux, au moment où j’écris, la quarante-deuxième édition de la Théologie morale d’Escobar13. […] de quels yeux lisons-nous Escobar si nous y voyons autre chose ? […] Non ; mais la vérité, c’est qu’à ses yeux, les prétentions des médecins ne sont pas moins ridicules, en leur genre, que celles des dévots.

2391. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome I

Guizot dénommait Joseph Delorme, dut regarder les personnalités qu’il rencontrait d’un œil plus scrutateur qu’enthousiaste, et s’étonner aussitôt de les constater, à la fois semblables à leurs œuvres par certains points, et si dissemblables par d’autres. […] Ne trouvez-vous point que ce problème est plus intéressant que le déchiffrement d’une page de ses carnets, ainsi, celle que j’ai sous les yeux en ce moment : « Visites et courses. […] J’ai, sous les yeux, une photographie qui date d’alors, avec une affectueuse dédicace tracée de son écriture si ferme et si souple à la fois. […] C’était un grand jeune homme au mince visage olivâtre, éclairé par des yeux à la fois ardents et méditatifs. […] Psichari disait dans son Voyage du Centurion : « Si Maxence regarde l’épée immuable avec amour, pourquoi donc détourne-t-il ses yeux de l’immuable croix ?

2392. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

Homère était plus grand et de meilleure mine qu’Aristote ; il se tenait très droit pour son âge, et ses yeux étaient les plus vifs et les plus perçants que j’eusse jamais vus. […] Voisine de Swift en Irlande, habitant sa maison pendant les voyages qu’il faisait chaque année en Angleterre, elle le voyait sans cesse, mais toujours en présence d’une Madame Dingley, qui ne servait qu’imparfaitement à couvrir ce que cette situation avait de défavorable aux yeux du public. […] Qu’importait aux yeux des hommes religieux de l’Église établie que Martin fût un peu moins ridicule que Pierre et que Jacques, lorsque les croyances communes de Pierre, de Jacques et de Martin étaient avilies sous les plus indignes images, lorsque leurs débats, où leur dignité commune était engagée, devenaient une comédie grossière, lorsqu’enfin le surnaturel, ce fond commun et indispensable de toutes les sectes religieuses, n’apparaissait plus dans leur histoire que sous la forme des inventions indescriptibles de Pierre et des repoussantes aberrations de Jacques. […] Cette mort, le livrant tout à fait à lui-même, augmenta sa disposition à la folie et assombrit encore à ses yeux l’aspect des choses humaines.

2393. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre quatrième. Éléments sensitifs et appétitifs des opérations intellectuelles — Chapitre deuxième. Les opérations intellectuelles. — Leur rapport à l’appétition et à la motion. »

Si je veux faire attention à un objet que je regarde, écoute, palpe, flaire ou savoure, je produis des efforts musculaires dans la direction de mes divers sens ; je tends les muscles de ma main pour mieux palper, ceux de mes yeux pour les accommoder à l’objet et à la lumière, etc. […] Mais nous irons plus loin, et nous ne pensons pas que les mouvements musculaires soient des éléments constitutifs de l’attention, même du côté physique ; ils sont, à nos yeux, les effets d’un mouvement cérébral, non encore musculaire, d’une innervation qui, elle, est vraiment le facteur physique de l’attention comme le désir en est le facteur mental. […] Dans le cas de la sensation actuelle, la chose est évidente : personne ne soutiendra que l’on puisse se dispenser de réagir affirmativement sous l’influence du soleil qui vous éblouit les yeux et d’affirmer ainsi l’actualité de sa sensation. […] Or, cette fonction consiste, d’abord, en ce que l’image qui est au foyer de la conscience, par exemple l’image de l’homme, évoque une multitude d’images semblables qui l’entourent comme autant de répétitions affaiblies d’elle-même : ces images occupent, dans la conscience, le champ de la vision indirecte et y produisent le sentiment de la pluralité, comme quand l’œil fixe directement un grain de sable et aperçoit indirectement tout autour d’autres grains de sable en nombre indéfini.

2394. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Discours sur le système et la vie de Vico » pp. -

Tandis que tout le siècle tournait des yeux avides vers l’avenir, et se précipitait dans les routes nouvelles que lui ouvrait la philosophie, Vico eut le courage de remonter vers cette antiquité si dédaignée, et de s’identifier avec elle. […] L’œil de l’intelligence, c’est-à-dire la raison, reçoit de Dieu la lumière du vrai éternel. […] Ne quittons point cet homme rare sans apprendre de lui-même comment il supporta ses malheurs : « Qu’elle soit à jamais louée, dit-il dans une lettre, cette Providence qui, lors même qu’elle semble à nos faibles yeux une justice sévère, n’est qu’amour et que bonté. […] Debout sur le globe terrestre, la Métaphysique en extase contemple l’œil divin dans le mystérieux triangle ; elle en reçoit un rayon qui se réfléchit sur la statue d’Homère (des poèmes duquel l’auteur doit tirer une grande partie de ses preuves).

2395. (1898) La cité antique

Chaque domaine était sous les yeux des divinités domestiques qui veillaient sur lui182. […] Cet être fragile se trouve sous les yeux d’un témoin qui ne le quitte pas. […] Elle rend le mariage obligatoire ; le célibat est uncrime aux yeux d’une religion qui fait de la continuité de la famille le premier et le plus saintdes devoirs. […] À ses yeux, la plus grave faute qui puisse être commise est l’adultère. […] Aux yeux des anciens, il ne semblait pas que les suffrages des hommes fussent suffisants pour établir le chef de la cité.

2396. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « L’abbé de Bernis. » pp. 1-22

Duclos, son ami, l’un de ceux qui ont le mieux parlé de lui, et dont la brusquerie habituelle s’est adoucie pour le peindre, a dit : « De la naissance, une figure aimable, une physionomie de candeur, beaucoup d’esprit, d’agrément, un jugement sain et un caractère sûr, le firent rechercher par toutes les sociétés ; il y vivait agréablement. » Marmontel enfin, moins agréable cette fois que Duclos, et avec moins de nuances, nous dit : « L’abbé de Bernis, échappé du séminaire de Saint-Sulpice, où il avait mal réussi, était un poète galant, bien joufflu, bien frais, bien poupin, et qui, avec le Gentil-Bernard, amusait de ses jolis vers les joyeux soupers de Paris. » Cette figure ronde et pleine, cette belle mine rebondie et à triple menton, qui frappe dans les portraits de Bernis vieilli, il la prit d’assez bonne heure : mais d’abord il s’y mêlait quelque chose d’enfantin et de délicat ; et toujours, jusqu’à la fin, le profil gardera de la distinction et de l’élégance : le front et l’œil sont très beaux. […] En ce qui était des vers en particulier, comme on venait de représenter pour la première fois La Métromanie (1738), Bernis donnait cours à ses réflexions : « Il est difficile d’être jeune et de vivre à Paris sans avoir envie de faire des vers. » Et de ce qu’on en fait avec plus ou moins de talent, il ne s’ensuit pas que ce talent entraîne avec lui toutes les extravagances qui rendent certains versificateurs si ridicules : Heureux, s’écriait-il avec sentiment et justesse, heureux ceux qui reçurent un talent qui les suit partout, qui, dans la solitude et le silence, fait reparaître à leurs yeux tout ce que l’absence leur avait fait perdre ; qui prête un corps et des couleurs à tout ce qui respire, qui donne au monde des habitants que le vulgaire ignore !

2397. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De l’état de la France sous Louis XV (1757-1758). » pp. 23-43

J’excite un peu d’élévation dans le pouls, et puis la léthargie recommence ; on ouvre de grands yeux tristes, et tout est dit. […] Et en même temps on sort de cette lecture plus disposé à rendre justice à M. de Choiseul qui, d’une situation si compromise et si perdue en réalité, sut tirer des résultats assez spécieux, assez brillants, pour jeter un voile sur la décadence et pour relever la nation à ses propres yeux, en attendant qu’elle se régénérât décidément à travers les orages et qu’elle entrât, désormais vaillante et rajeunie (mais toujours selon l’esprit des chefs qui la guident), dans l’ordre de ses destinées nouvelles.

2398. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — I. » pp. 325-345

Mais faire marcher l’administration et l’ordre public, faire fonctionner la machine au lieu de l’entraver et de la désorganiser, c’était déjà se rendre suspect aux yeux des démagogues50. […] [NdA] J’ai peine à m’expliquer comment Étienne Dumont de Genève, en ses Souvenirs, parlant de Roederer qu’il rencontrait dans le groupe des Girondins, a pu dire de lui : « Roederer, homme d’esprit, mais fort ignorant, avait un fonds de légèreté dans le caractère qui lui donnait un rôle subalterne, quoique par sa capacité il l’emportât sur presque tous. » Quand on a eu sous les yeux les extraits en masse des lectures de Roederer dès sa première jeunesse, et quand on a vu l’ensemble de ses travaux sous la Constituante, on ne saurait admettre que cette ignorance dont parle Dumont, et dont les plus instruits eux-mêmes ne sont pas exempts sur les points étrangers à leurs études, ait porté le moins du monde sur la science politique et économique qui était l’essentiel ici.

2399. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — I » pp. 139-158

Un mal d’yeux interrompit quelque temps ses études ; il fut mis ensuite à l’école de Westminster, où il eut pour amis des condisciples distingués qui se firent connaître depuis ; il y resta jusqu’à dix-huit ans. […] En vain on veut lever les yeux     Aux desseins qu’on lui prête : Il est son seul juge en tous lieux,     Et son seul interprète19.

2400. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — II » pp. 316-336

Il se plaint, en terminant, de tout le monde : « C’est ce qui s’est passé en cette seconde guerre, dit-il, où Rohan et Soubise ont eu pour contraires tous les grands de la Religion de France, soit par envie ou peu de zèle, tous les officiers du roi à cause de leur avarice, et la plupart des principaux des villes gagnés par les appâts de la Cour… Quand nous serons plus gens de bien, Dieu nous assistera plus puissamment. » Par cette paix les réformés obtenaient ce qui à leurs yeux était l’essentiel, la subsistance des nouvelles fortifications qu’ils avaient élevées dans la plupart des petites villes du Midi, c’est-à-dire la faculté de recommencer la guerre. […] Les clefs de La Rochelle, quand il les tiendra, vaudront à ses yeux celles des cabinets qu’il ne peut forcer jusqu alors, ni entraîner comme il le voudrait dans la sphère d’action de la plus belle monarchie du monde.

2401. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — I » pp. 432-453

Il y a plus, et, indépendamment des questions de dates, on arriverait, rien qu’avec les lettres qu’on publie et dont j’ai les originaux sous les yeux, à être assuré que les prétendus mémoires ne sont, à aucune degré, de la marquise de Créqui elle-même. […] La considération de l’éternité forme la limite habituelle et assez rapprochée de son horizon ; c’est là qu’elle porte les yeux dès qu’elle veut anéantir le présent et amortir en elle quelque peine, quelque regret qui remue encore : « Ce ne sont là que des dégoûts, se dit-elle en songeant aux procédés de son fils ; le détachement suit, et alors l’éternité paraît et absorbe tout. » Elle ne nous dit jamais comment elle anime et elle éclaire cette éternité.

2402. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « I » pp. 1-20

Biot se plaisait à citer, comme le plus fidèle et le plus vivant résumé de la théorie de la lumière, ces beaux vers de l’épître à Mme du Châtelet Sur la philosophie de Newton : Il déploie à mes yeux par une main savante De l’astre des saisons la robe étincelante ; L’émeraude, l’azur, le pourpre, le rubis, Sont l’immortel tissu dont brillent ses habits. Chacun de ses rayons dans sa substance pure Porte en soi les couleurs dont se peint la nature ; Et, confondus ensemble, ils éclairent nos yeux, Ils animent le monde, ils emplissent les cieux… Ainsi cette excursion fort inutile de Voltaire dans les mathématiques, et qui allait devenir une fausse route, ne fut pas tout à fait perdue : elle lui servit du moins à composer cette belle épître2. — « Je suis bien malade, écrivait-il à Thieriot en août 1738, Newton et Mérope m’ont tué. » Ni l’un ni l’autre ne le tuèrent.

2403. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — IV » pp. 103-122

Ennuyé pourtant de voir prendre tant de places sous ses yeux sans qu’il lui fût permis ou possible d’agir, il revint d’assez bonne heure de l’armée, sous prétexte ou à cause de sa blessure. […] Le mot que Villars avait redit si souvent à sa cour durant ces dernières campagnes se trouva justifié : « Il ne faut qu’un moment pour changer la face des affaires peut-être du noir au blanc. » Villars, libre enfin de se livrer à l’activité qui était dans sa nature, assiégea et reprit en moins de quatre mois, sous les yeux d’Eugène réduit à l’inaction, Douai, Le Quesnoy, Bouchain, les places que l’ennemi avait conquises sur nous en trois campagnes.

2404. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

Mes goûts, mon caractère, ma conduite, mes volontés, mes passions, tout était décidé avant moi ; mon cœur, mon esprit et mon tempérament ont été faits ensemble, sans que j’y aie rien pu, et, dans leur assortiment, on aurait pu voir ma pauvre santé, mes faiblesses, mes erreurs, avant qu’elles fussent formées, si l’on avait eu de bons yeux. […] Si Vauvenargues dit qu’il lit peu, c’est bien souvent aussi que ses yeux malades lui refusent le service, et qu’il ne trouvait point en tout lieu de lecteur à sa disposition pour le soulager.

2405. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite.) »

J’avais le cœur serré et les larmes aux yeux. […] Voulez-vous persuader à toute l’Europe, qui a les yeux sur vous, que, dans le nombre des gens qui vous aiment, il n’y en a pas un seul que vous jugiez digne de vous servir ?

2406. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Lettres inédites de Michel de Montaigne, et de quelques autres personnages du XVIe siècle »

Montaigne profita de la permission, dans les intervalles du temps où il écrivait les deux premiers livres des Essais, et plus d’un passage fait allusion au spectacle qu’il y avait eu sous les yeux. […] On y voit Montaigne actif, aux aguets, prêtant l’oreille à tous les bruits, ayant l’œil à tout, et à la garde des portes, et du côté de la mer au mouvement des galères, et à celui des troupes dans la campagne ; informant le maréchal avec détail, avec un surcroît d’exactitude, et surtout pressant le plus possible son retour.

2407. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Collé. »

Mais tandis que Béranger, l’œil et le cœur aux choses nationales, n’a garde de se confiner dans le genre érotique et bachique, la chanson de Collé ne fait que tourner et retourner à satiété la gaudriole et n’en sort pas. […] Collé, de sa personne, était et reste, à nos yeux, le plus parfait exemple, et peut-être le dernier, de la pure race gauloise non mélangée ; c’est le dernier des Gaulois : ennemi de l’anglomanie, de la musique italienne, des innovations en tout genre, ennemi des dévots et des Jésuites, il ne pouvait non plus souffrir Voltaire, trop brillanté selon lui, trop philosophique, trop remuant, un Français du dernier ton et trop moderne, il l’appelait « ce vilain homme », et il abhorrait aussi Jean-Jacques à titre de charlatan.

2408. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.). Guerre des Barbets. — Horreurs. — Iniquités. — Impuissance. »

» La guerre était décidée ; Catinat, qui n’a que son objet en vue, qui n’a d’yeux que par Louis XIV et par Louvois, s’en réjouit ; il écrivait, dès le 14 avril : « Toutes les allées et venues des ambassadeurs suisses n’ont point eu de succès ; le prince ne les écoute plus que pour leur dire que sa volonté paraît par son dernier édit. […] Il ferma l’œil, puis les protégea et s’en servit.

2409. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par. M. le Chevalier Alfred d’Arneth »

La religion, les mœurs, si nécessaires pour attirer la bénédiction de Dieu et pour contenir les peuples, ne sont pas oubliées ; enfin je suis dans la joie de mon cœur, et prie Dieu qu’il vous conserve ainsi pour le bien de vos peuples, pour l’univers, pour votre famille et pour votre vieille maman que vous faites revivre. (16 juin 1774.) » Elle y mêle de sages avis, de ne rien précipiter, de tout voir de ses propres yeux, de ne rien changer à la légère ni par un premier entraînement. […] (15 mars 1775.) » Marie-Antoinette se justifie de son mieux, et par un mot qui coupe court à tout : C’est la mode, c’est l’usage : « J’enverrai à ma chère maman, par le prochain courrier, le dessin de mes différentes coiffures ; elle pourra les trouver ridicules, mais ici les yeux y sont tellement accoutumés qu’on n’y pense plus, tout le monde étant coiffé de même. » Marie-Thérèse est plus dans le vif, lorsqu’elle se plaint de ces courses continuelles au bois de Boulogne et ailleurs avec le comte d’Artois, sans que le roi s’y trouve : « Vous devez savoir mieux que moi que ce prince n’est nullement estimé et que vous partagez ainsi ses torts.

2410. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — Note »

Je vis en entrant une jeune femme aux beaux yeux, au beau front, aux cheveux noirs un peu courts, vêtue d’une sorte de robe de chambre sombre des plus simples. […] (Causeries du Lundi, tome I) ; mais je reculai toujours devant une Étude complète où le critique n’eût plus été libre de choisir et où il n’aurait eu en face de lui que l’écrivain seul, et tout l’écrivain : la personne, à mes yeux, était bien supérieure et préférable.

2411. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN DERNIER MOT sur BENJAMIN CONSTANT. » pp. 275-299

Je trouve que je suis avec cette femme sur un pied qui jette sur ma conduite, à mes propres yeux, un air de fausseté, de perfidie et d’ingratitude qui me pèse. […] Aux hommes vraiment politiques, à ceux qui auraient gardé quelque chose du grand art de conduire et de gouverner les autres, il serait par trop simple et peut-être injuste de demander l’exacte moralité du particulier : ils ont la leur aussi, réglée sur la grandeur et l’utilité de l’ensemble ; mais à tous ceux qui prétendent encore à ce titre d’hommes politiques, ne fussent-ils toute leur vie que des hommes d’opposition, on a droit de demander du sérieux, et c’est là le côté faible, qui saute aux yeux d’abord, dans la considération du rôle de Benjamin Constant : une trop grande moitié y parodiait l’autre.

2412. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre III. Montesquieu »

L’opposition de ce monde au nôtre sautait aux yeux : de là à choisir un Oriental pour critique de nos travers et de nos préjugés, il n’y avait qu’un pas ; et Du Fresny donna, en 1707, les Amusements sérieux et comiques d’un Siamois. […] Pour parler du gouvernement républicain, Montesquieu a étudié Rome, les cités grecques ; il a sous les yeux les cantons suisses, Venise, Raguse.

2413. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Paul Bourget  »

Il s’écrie volontiers (en termes plus distingués et sans lever les bras, mais plutôt en mettant ses mains sur ses yeux) : « Où allons-nous ?  […] De même, dans Crime d’amour, ce que fait de Querne n’est un « crime » qu’aux yeux d’un homme qui croit à la responsabilité morale et au prix des âmes.

2414. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Adrienne Le Couvreur. » pp. 199-220

Le Mercure nous la montre plus au naturel, « parfaitement bien faite dans sa taille médiocre, avec un maintien noble et assuré, la tête et les épaules bien placées, les yeux pleins de feu, la bouche belle, le nez un peu aquilin, et beaucoup d’agrément dans l’air et les manières ; sans embonpoint, mais les joues assez pleines, avec des traits bien marqués pour exprimer la tristesse, la joie, la tendresse, la terreur et la pitié ». […] J’ai sous les yeux le procès-verbal, daté du 30 juillet 1729.

2415. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame de La Tour-Franqueville et Jean-Jacques Rousseau. » pp. 63-84

J’ai les cheveux fort bruns et très avantageusement placés ; le front un peu élevé, et d’une forme régulière ; les sourcils noirs et bien arqués ; les yeux à fleur de tête, grands, d’un bleu foncé, la prunelle petite, et les paupières noires ; mon nez, ni gros, ni fin, ni court, ni long, n’est point aquilin, et cependant contribue à me donner la physionomie d’un aigle. […] Un jour, après avoir reçu d’elle la jolie page de portrait que j’ai précédemment citée, Rousseau lui écrivait : « Combien il va m’être agréable de me faire dire par une aussi jolie bouche tout ce que vous m’écrirez d’obligeant, et de lire dans des yeux d’un bleu foncé, armés d’une paupière noire, l’amitié que vous me témoignez ! 

2416. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Procès de Jeanne d’arc, publiés pour la première fois par M. J. Quicherat. (6 vol. in-8º.) » pp. 399-420

Presque toujours seule à l’église ou aux champs, elle s’absorbait dans une communication profonde de sa pensée avec les saints dont elle contemplait les images, avec le ciel où on la voyait souvent tenir ses yeux comme cloués. […] » elle se contentait d’éluder, de se taire, et baissant les yeux : « Passez, disait-elle, à autre chose. » La noble fille, enlacée à son tour par le serpent, n’osait répondre comme Hector, mais elle pensait comme lui.

2417. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Saint-Évremond et Ninon. » pp. 170-191

Elle a les cheveux du plus beau châtain qu’on ait jamais vu, le visage rond, le teint vif, la bouche agréable, les lèvres fort incarnates, une petite fosse au menton, qui lui sied fort bien, les yeux noirs brillants, pleins de feu, souriants, et la physionomie fine, enjouée et fort spirituelle… Pour de l’esprit, Clarice en a sans doute beaucoup, et elle en a même d’une certaine manière dont il y a peu de personnes qui soient capables, car elle l’a enjoué, divertissant, et commode pour toutes sortes de gens, principalement pour des gens du monde. […] Elle-même Ninon avait coutume de comparer Mme de La Fayette à ces riches campagnes de Beauce qui rapportent d’excellent froment, et Mme de La Sablière à un joli parterre qui charme les yeux.

2418. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — I. » pp. 1-22

Le plaisir que j’en ai éprouvé, je ne puis vous l’exprimer, mais je puis vous peindre la douleur et l’affliction que j’ai ressentie en me reportant au temps présent, et voyant disparaître cette atmosphère lumineuse qui un moment avait apparu à mes yeux et venait de s’évanouir comme un songe. […] Ayant écrit pour l’un de ses ouvrages, et peut-être pour ses Mémoires, quelques pages où il se ressouvenait, avec une sorte de complaisance, de l’influence salutaire qu’il avait exercée sur les troupes soumises à ses ordres, soit en 1804 dans ce commandement de l’armée gallo-batave, soit en 1805 à l’armée de Dalmatie, soit en 1811 à l’armée de Portugal, et bien qu’il terminât sa récapitulation par ces seuls mots : « L’ensemble de ces souvenirs fait la consolation de ma vieillesse », il craignit d’en avoir trop dit, il raya les pages, et j’ai sous les yeux les feuillets condamnés avec ces mots en marge de sa main : « Je me décide à supprimer ce dernier paragraphe, qui avait été inspiré par un mouvement d’amour-propre 1. » Dans la campagne d’Austerlitz, Marmont, après avoir contribué à la prise d’Ulm, reçut ordre de se mettre à la tête des troupes occupant la Dalmatie ; elles étaient composées de ce qu’avait de moins bon l’armée d’Italie, il les organisa, les exerça, les anima de son zèle.

2419. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — I. » pp. 455-475

On a sous les yeux un Frédéric sans impiété, sans rien de cette plaisanterie cynique qu’il croyait quelquefois de bon air d’afficher en s’adressant à ses correspondants de France. […] Je regarde avec des yeux d’indifférence tout ce qui m’attend, sans désirer la fortune ni la craindre, plein de compassion pour ceux qui souffrent (son père à l’agonie), d’estime pour les honnêtes gens et de tendresse pour mes amis.

2420. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre I. Shakespeare — Sa vie »

Elle s’était agenouillée, les yeux bandés, pour ce jeu, s’essayant, sans le savoir, à la posture de l’échafaud. […] Il était beau ; il avait le front haut, la barbe brune, l’air doux, la bouche aimable, l’œil profond.

2421. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre II : Rapports de l’histoire de la philosophie avec la philosophie même »

Même dans le désir si louable de me conserver de fortes croyances, je ne dois pas imputer une erreur à mes semblables, si ce n’est point une erreur, ni même me fermer les yeux sur la part de vérité que cette erreur peut contenir. […] Si Lucrèce exprime avec force l’influence du physique sur le moral, je ne dois point me fermer les yeux pour ne pas voir la vérité qu’il me présente, parce qu’un matérialiste et un athée peuvent en abuser.

2422. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VII. Mme de Gasparin »

Les horizons qu’il appelle prochains et qu’il entr’ouvre, sont, lointains, plutôt pour nos yeux et nos âmes, car ce sont les environs du Ciel. […] Elle n’écrit pas pour l’honneur que cela rapporte aux femmes ; — à ses yeux, peut-être comme aux nôtres, un assez triste honneur !

2423. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Saint-Simon »

… C’est cette violation du droit monarchique dont Saint-Simon a été le témoin indigné, lui, l’homme historique par excellence, l’homme monarchique jusque dans les moëlles, — comme il dirait, — c’est cette violation dont il a vu, de son œil d’aigle, les conséquences mortelles, qui lui a fait écrire ces deux splendides Mémoires, — l’un sur les bâtards légitimés de Louis XIV, l’autre sur la renonciation à la couronne de France, quand Philippe V prit la couronne d’Espagne. […] En légitimant ses bâtards, Louis XIV ne fit, aux yeux des superficiels qui ne voient rien que des surfaces dans l’histoire, qu’un acte immoral bien près de la faute politique, et on le lui reproche et on passe, et l’on s’enfonce dans la splendeur enivrante de ce règne qui fait tout oublier !

2424. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ernest Hello » pp. 207-235

Mais il l’est pourtant des hommes attentifs aux événements intellectuels et qui ont l’œil à tout… Pour eux, peut-être il devait planer un jour dans ces hautes sphères de vérité où il pénètre quelquefois, mais par percées ; car l’esprit de Hello procédait comme certains oiseaux qui percent la nue et la traversent, comme s’ils voulaient monter plus haut et percer le ciel. […] Il a vu positivement, à l’œil nu, la main de Dieu, qui prit Habacuc par les cheveux, se perdre dans les cheveux embroussaillés de Hello, dont on peut dire peut-être ce que madame de Fontenay disait du doux platonicien Joubert : que son âme avait un jour rencontré son corps et qu’elle s’en tirait comme elle pouvait.

2425. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — L’inter-nationalisme »

Que signifie-t-il donc, ce mot, aux yeux d’un parlementaire, d’un publiciste ou d’un individu quelconque de la foule, pour provoquer ces accents presque unanimes de réprobation et de flétrissure, qui s’appliquent communément aux vices honteux ? […] Quelque soit l’importance de ces rapports matériels, celle des liens intellectuels de cité à cité, la dépasse à nos yeux.

2426. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre III. “ Fantômes de vivants ” et “ recherche psychique ” »

Il fermait les yeux à et que le phénomène avait de concret. […] Il nous empêche de jeter les yeux à droite et à gauche, et même, la plupart du temps, en arrière ; il veut que nous regardions droit devant nous, dans la direction où nous avons à marcher.

2427. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [Rapport sur les primes à donner aux ouvrages dramatiques.] » pp. 518-522

Elle avait sous les yeux, parmi les ouvrages qui se présentaient à son examen, des études de l’Antiquité, tentées avec ingénuité et avec franchise120 ; des drames où la passion romanesque traverse l’histoire et ne craint pas de se rencontrer en présence des plus grands noms121 ; des comédies surtout, où des scènes et des caractères fort gais ont charmé le public122, et où des figures aimables, entremêlées à d’autres qui ne sont que plaisantes, lui ont procuré et lui procurent chaque jour un divertissement plein de distinction et d’élégance123.

2428. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XIX » pp. 76-83

Ce qui fait à nos yeux l’intérêt de ces lettres, c’est leur entière vérité, c’est-à-dire la faiblesse, la misère de la nature humaine et de toutes choses, prises en quelque sorte sur le fait dans une de ces âmes qu’on appelle grandes, comme parle Bossuet. » — A merveille ; mais pourquoi avoir tant triomphé de ces mêmes misères dans Pascal, au nom d’un cartésianisme impuissant et tout satisfait de lui-même ?

2429. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « [Addenda] »

Mais il y a eu un malheur, un contre-temps qu’on n’attendait pas : de vraies lettres, et cette fois toutes rudes et un peu brutes, adressées bien réellement à l’impératrice par sa fille, ont été publiées à Vienne par M. d’Arneth ; et dès ce moment le contraste a sauté aux yeux.

2430. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « APPENDICE. — M. DE VIGNY, page 67. » pp. -542

Il jeta donc les yeux sur le jeune d’Effiat Cinq-Mars, plein de grâces et d’éclat, fait pour toucher l’oisiveté du monarque.

2431. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Sur l’École française d’Athènes »

Au reste, l’envoyé du ministre est allé, et a vu de ses yeux ; il a dû rapporter des impressions vives.

2432. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la Révolution française. Ve et VIe volumes. »

Initié à la raison des choses, le lecteur n’aurait qu’à se laisser aller de toute sa conviction au récit, et à reposer son intelligence dans le spectacle à la fois varié et continu qui se produirait sous ses yeux par un développement nécessaire, et qu’il ne pourrait s’empêcher de voir ni de comprendre.

2433. (1874) Premiers lundis. Tome I « A. de Lamartine : Réception à l’Académie Française »

Pourtant nous aimons à entendre des voix puissantes et graves nous le redire ; car, par moment, dans les fatigues de la marche, au milieu des inégalités du terrain, l’horizon échappe à nos yeux, et nous nous prenons à douter du but où notre ardeur aspire.

2434. (1874) Premiers lundis. Tome II « E. Lerminier. Lettres philosophiques adressées à un Berlinois »

Quand on entend les hommes renommés par l’étendue de leur savoir et de leur esprit épuiser les sophismes de la logique et mille fausses lueurs détournées de l’histoire, au service d’une négation cynique de tout progrès social, il y a plaisir à contempler un esprit ardent qui, l’œil sur un but magnifique et lointain, ne ménage aucune étude, aucune indication empruntée aux philosophies et aux révolutions du passé, pour diminuer l’intervalle qui reste à franchir, pour tenter d’ajouter une arche de plus à ce pont majestueux où l’humanité s’avance.

2435. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section II. Des sentiments qui sont l’intermédiaire entre les passions, et les ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre III. De la tendresse filiale, paternelle et conjugale. »

Quand les parents aiment assez profondément leurs enfants pour vivre en eux, pour faire de leur avenir leur unique espérance, pour regarder leur propre vie comme finie, et prendre pour les intérêts de leurs enfants des affections personnelles, ce que je vais dire n’existe point ; mais lorsque les parents restent dans eux-mêmes, les enfants sont à leurs yeux des successeurs, presque des rivaux, des sujets devenus indépendants, des amis, dont on ne compte que ce qu’ils ne font pas, des obligés à qui on néglige de plaire, en se fiant sur leur reconnaissance, des associés d’eux à soi, plutôt que de soi à eux ; c’est une sorte d’union dans laquelle les parents, donnant une latitude infinie à l’idée de leurs droits, veulent que vous leur teniez compte de ce vague de puissance, dont ils n’usent pas après se l’être supposé ; enfin, la plupart ont le tort habituel de se fonder toujours sur le seul obstacle qui puisse exister à l’excès de tendresse qu’on aurait pour eux, leur autorité ; et de ne pas sentir, au contraire, que dans cette relation, comme dans toutes celles où il existe d’un côté une supériorité quelconque, c’est pour celui à qui l’avantage appartient, que la dépendance du sentiment est la plus nécessaire et la plus aimable.

2436. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Préface »

Elles sont sous nos yeux ; nous n’en sommes pas réduits aux conjectures, aux divinations douteuses, aux indications vagues.

2437. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Introduction. Origines de la littérature française — 1. Éléments et développement de la langue. »

On ira reprendre dans le riche fond de la latinité ce que l’on y avait d’abord laissé ; et les mots savants viendront presque dès le premier jour s’ajouter aux mots populaires : de ces deux classes de mots, formés ceux-ci sous l’influence et ceux-là hors de l’influence de l’accent latin, ceux-ci par la bouche et l’oreille du peuple, et ceux-là par l’œil des scribes, de ces deux classes se fera une langue plus riche, plus souple, plus fine, plus intellectuelle.

2438. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « George Sand. »

Nous ne voulions plus embellir la vie par le rêve et l’espoir, tant nous étions fiers de la trouver ignoble, et tant ce pessimisme commode nous absolvait de tout à nos propres yeux.

2439. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Pronostics pour l’année 1887. »

Et voici les premières lignes : « Tous les observateurs ont remarqué ce qu’il y a de troublant, d’alliciant et de profondément nostalgique dans le regard des femmes qui offrent cette particularité d’avoir des yeux bleus avec des cheveux bruns, surtout quand ces femmes appartiennent à une race douloureusement affinée par des siècles de vie élégante et artificielle.

2440. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Contre une légende »

Renan est devenu, aux yeux des esprits superficiels, synonyme de scepticisme et de dilettantisme, ces mots étant pris, d’ailleurs, dans leur sens le plus grossier.

2441. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mallarmé, Stéphane (1842-1898) »

d’une chose : c’est d’avoir, en reculant la ligne d’ombre vers les hautes ténèbres intellectuelles, suscité à nos esprits qui vous ont suivi quelque crépusculaire illusion d’un radieux midi ; c’est d’avoir, levant, d’un geste, nos yeux vers l’éblouissement interdit de l’absolu, d’avoir obscurci en nous le sens de la clarté.

2442. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre X. Zola embêté par les jeunes » pp. 136-144

Comment, maintenant, osâtes-vous devancer cette judicieuse mais discrète Postérité, jusqu’à décider quels écrivains naturalistes, à ses yeux non ouverts encore, mériteraient d’être discutés, à l’exclusion de leurs émules ?

2443. (1890) L’avenir de la science « XIV »

L’État n’est pas à mes yeux une simple institution de police et de bon ordre.

2444. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 312-324

Qu’il entasse enfin sophisme sur sophisme, calomnie sur calomnie : son autorité sera toujours, aux yeux du vrai Sage & même du Politique éclairé, le ressort le plus puissant pour rétablir l’ordre général & assurer la félicité de chaque individu.

2445. (1913) Le bovarysme « Troisième partie : Le Bovarysme, loi de l’évolution — Chapitre II. Bovarysme essentiel de l’être et de l’Humanité »

Dès lors toutes les consciences individuelles et tous les instants d’une même conscience individuelle sont les fenêtres où luisent les yeux avides de la connaissance, contemplant le spectacle, changeant de l’univers.

2446. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Seconde Partie. De l’Éloquence. — Éloquence du barreau. » pp. 193-204

La flamme est dans vos yeux, l’écume fut vos lèvres.

2447. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre VI. Conclusions » pp. 232-240

« Si le besoin d’argent fait travailler pour vivre, il me semble que le triste spectacle du talent aux prises avec la faim doit tirer des larmes des yeux les plus secs.

2448. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre VIII. La religion chrétienne considérée elle-même comme passion. »

Nous ne chérissons pas le mensonge, bien que nous y tombions sans cesse ; cette faiblesse ne nous vient que de notre dégradation originelle : nous avons perdu la puissance en conservant le désir, et notre cœur cherche encore la lumière que nos yeux n’ont plus la force de supporter.

2449. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre III. Parallèle de la Bible et d’Homère. — Termes de comparaison. »

La Bible, dans tous ses genres, n’a ordinairement qu’un seul trait ; mais ce trait est frappant et met l’objet sous les yeux.

2450. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre VI. Suite des Moralistes. »

Un homme impartial qui lira attentivement les écrivains du siècle de Louis XIV s’apercevra bientôt que rien n’a échappé à leur vue ; mais que, contemplant les objets de plus haut que nous, ils ont dédaigné les routes où nous sommes entrés, et au bout desquelles leur œil perçant avait découvert un abîme.

2451. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « A Monsieur Naigeon » pp. 9-14

Si l’on n’entend que moi, on me reprochera d’être décousu, peut-être même obscur, surtout aux endroits où j’examine les ouvrages de Sénèque ; et l’on me lira, je ne dis pas avec autant de plaisir, comme on lit les Maximes de La Rochefoucauld, et un chapitre de La Bruyère : mais si l’on jette alternativement les yeux sur la page de Sénèque et sur la mienne, on remarquera dans celle-ci plus d’ordre, plus de clarté, selon qu’on se mettra plus fidèlement à ma place, qu’on aura plus ou moins d’analogie avec le philosophe et avec moi ; et l’on ne tardera pas à s’apercevoir que c’est autant mon âme que je peins, que celle des différents personnages qui s’offrent à mon récit.

2452. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Lépicié » pp. 275-278

Le Saül a les yeux fermés comme il doit arriver à un homme ébloui, mais il est petit, chiffonné, ignoble de caractère, plus mort que vif.

2453. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 2, de l’attrait des spectacles propres à exciter en nous une grande émotion. Des gladiateurs » pp. 12-24

Nos philosophes regarderent avec plaisir ces combats mitigez, mais bientôt ils ne détournerent plus les yeux des combats à toute outrance, et ils s’accoutumerent à voir tuer des hommes uniquement pour les divertir.

2454. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 33, de la poësie du stile dans laquelle les mots sont regardez en tant que les signes de nos idées, que c’est la poësie du stile qui fait la destinée des poëmes » pp. 275-287

L’écrivain le plus austere, celui qui fait la profession la plus serieuse de ne mettre en oeuvre pour nous persuader que la raison toute nuë, sent bientôt que pour nous convaincre il nous faut émouvoir, et qu’il faut pour nous émouvoir mettre sous nos yeux par des peintures les objets dont il nous parle.

2455. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 10, du temps où les hommes de génie parviennent au mérite dont ils sont capables » pp. 110-121

Cependant Marius, à peine officier subalterne, n’avoit encore fait aucun exploit, il n’avoit mis encore en évidence aucune qualité qui le rendît digne dès-lors aux yeux des hommes ordinaires d’être le successeur de Scipion.

2456. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 30, objection tirée des bons ouvrages que le public a paru désapprouver, comme des mauvais qu’il a loüez, et réponse à cette objection » pp. 409-421

En vain contre le Cid un ministre se ligue, tout Paris pour Chimene a les yeux de Rodrigue.

2457. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Alaux. La Religion progressive » pp. 391-400

D’un autre côté, en tant qu’invention, que système religieux, — et un système religieux est loin d’être une religion encore, — la Religion progressive, — même à nos yeux, à nous, catholiques, qui, comme ce grand siècle marcheur, ne cherchons pas la vérité sur toutes les routes, parce que nous savons où elle se tient, immobile et rayonnante !

2458. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Léon Bloy »

Malgré tout, en effet, malgré la contagion de la libre pensée, ce terrible choléra moderne de la libre pensée qui les ronge et qui les diminue chaque jour, les chrétiens sont encore assez nombreux pour faire de la gloire comme le monde la conçoit et la veut, — et, de cela seul que l’Église mettait en question la sainteté de Christophe Colomb, il avait sa gloire, même aux yeux des ennemis de l’Église, qui, au fond, savent très bien, dans ce qui peut leur rester d’âme, qu’il n’y a pas sur la terre de gloire comparable à celle-là !

2459. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Madame Sand ; Octave Feuillet »

Le prêtre catholique que madame George Sand a peint plus d’une fois dans sa vie y est repris et peint une dernière… mais on ne reconnaît plus ici le pinceau qui fit passer devant nos yeux, dans Lélia, le prêtre Magnus et le cardinal Annibal.

2460. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — III »

« Pour être plus complet, — disait une Note des Éditeurs, — peut-être eût-il fallu joindre à ces trois fantaisies certain épisode de Sous l’œil des Barbares et le préambule du Jardin de Bérénice. » (NdE)‌

2461. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre III. Des éloges chez tous les premiers peuples. »

Ces chants ou ces éloges étaient la principale ambition de ces peuples ; c’était un malheur de mourir sans les avoir obtenus, et l’on croyait qu’alors ces ombres guerrières apparaissaient aux yeux du barde pour solliciter ses chants, ou qu’il était averti par le bruit de sa harpe, qui retentissait seule et à travers le silence de la nuit.

2462. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la liberté de l’enseignement »

mais ce nombre, il crève les yeux), — et avec le nombre ils offrent cet autre caractère qui constitue la respectabilité, je veux dire la pratique de la morale et des devoirs civils et sociaux. […] J’ai eu cette thèse sous les yeux ; je n’en suis pas du tout juge ; mais si j’avais eu, littérairement, à donner mon avis, j’aurais dit qu’elle est trop longue. […] quel était le crime du jansénisme aux yeux du molinisme ?

2463. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre II. Le public en France. »

À leurs yeux je suis un infidèle, parce que j’ai encore quelques croyances debout. » — « Savez-vous ce que sont les philosophes et ce que ce mot signifie ici ? […] À ses yeux une religion positive n’est qu’une superstition populaire, bonne pour les enfants et les simples, non pour « les honnêtes gens » et les grandes personnes. […] Je suis chargé de vous offrir de vous réunir à nous pour ne faire qu’un seul cahier. » — « Il faut trois qualités à un député, dit le marquis de Barbançon au nom de la noblesse de Châteauroux : probité, fermeté, connaissances ; les deux premières se trouvent également dans les députés des trois ordres ; mais les connaissances se rencontreront plus généralement dans le Tiers-état, dont l’esprit est exercé aux affaires. » — « Un nouvel ordre de choses se déploie à nos yeux, dit l’abbé Legrand au nom du clergé de Châteauroux ; le voile du préjugé est déchiré, la raison en a pris la place.

2464. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIe Entretien. Marie Stuart, (Reine d’Écosse). (Suite et fin.) »

Ils se jetèrent à ses pieds, l’entraînèrent dans leurs montagnes, levèrent leurs vassaux catholiques, lui formèrent une armée, révoquèrent son abdication, combattirent sous ses yeux pour sa cause, à Longside, contre les troupes de Murray, et furent vaincus une seconde fois. […] Madame, s’écria Melvil en se rapprochant de sa maîtresse et en tombant à ses pieds, j’ai trop vécu, puisque mes yeux étaient réservés à vous voir la proie du bourreau, et que ma bouche devra redire à l’Écosse l’affreux supplice. » Des sanglots s’exhalèrent de sa poitrine au lieu de paroles. […] Entraînés, subjugués par l’accent de Marie Stuart, les exécuteurs eux-mêmes la supplièrent à genoux de leur pardonner. « Je vous pardonne, leur dit-elle, à l’exemple de mon Rédempteur. » « Alors elle arrangea le mouchoir brodé de chardons d’or dont elle s’était fait bander les yeux par Jeanne Kennethy.

2465. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre troisième »

On recherchait alors les vérités générales ; elles étaient tellement prisées, qu’on les distinguait dans le discours par des guillemets, et qu’on les y enchâssait à la façon des pierres précieuses, afin que le lecteur fût averti, même par les yeux, de leur présence. […] Deux amants qu’attache l’un à l’autre une passion profonde et légitime, et que va rendre ennemis la loi du devoir filial et de l’honneur domestique ; Rodrigue aimant Chimène, mais forcé de venger l’affront de son père dans le sang du père de sa maîtresse ; Chimène forcée de haïr celui qu’elle aime, et de demander sa mort, qu’elle craint d’obtenir ; Rodrigue, tout plein des grands sentiments qui feront bientôt de lui le héros populaire de l’Espagne ; Chimène, héritière de l’orgueil paternel, fière Castillane, qui veut se battre contre Rodrigue avec l’épée du roi ; ce roi, si plein de sens et d’équité, image de la royauté de Salomon, par sa modération, par sa connaissance des hommes, par sa justice ingénieuse : les deux pères si énergiquement tracés ; le comte, encore dans la force de l’âge, qui a été vaillant à la guerre, mais qui se paie de ses services par le prix qu’il en exige et par les louanges qu’il se donne ; le vieux don Diègue, qui a été autrefois ce qu’est aujourd’hui le comte, mais qui n’en demande pas le prix, et ne s’estime que par l’opinion qu’on a de lui ; le duel de ces deux hommes, si rapide, si funeste, d’où va naître entre les deux amants un autre duel dont les alternatives seront si touchantes ; Rodrigue, après avoir tué le comte, défendant son action devant Chimène, qui n’en peut détester le motif, puisque c’est le même qui l’anime contre Rodrigue ; la piété filiale aux prises avec l’amour ; l’ambition désappointée ; l’idolâtrie de l’honneur domestique ; des épisodes étroitement liés à l’action ; un récit qui nous met sous les yeux le sublime effort de l’Espagne se débarrassant des Maures, d’un pays rejetant ses conquérants : quel sujet ! […] Tout Paris pour Chimène eut les yeux de Rodrigue.

2466. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre III. Le Petit Séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet (1880) »

Durant les offices, je tombais dans de véritables rêves ; mon œil errait aux voûtes de la chapelle ; j’y lisais je ne sais quoi ; je pensais à la célébrité des grands hommes dont parlent les livres. […] J’avais un oncle voltairien, le meilleur des hommes, qui voyait cela de mauvais œil. […] Le palmarès tomba sous les yeux d’un des hommes éclairés que l’ardent capitaine employait à recruter sa jeune armée.

2467. (1908) Dix années de roman français. Revue des deux mondes pp. 159-190

Tout le passé fantasmagorique qui se résume aux yeux de nombreuses générations éblouies dans cette expression « Céleste Empire », s’abolit sous nos yeux : et cette débâcle tragique, Pierre Loti l’a décrite en quelques tableaux effrayants, éclairés d’une observation directe, mais imprégnés inoubliablement d’une mélancolie recrue et d’une sorte d’horreur. […] Henry Bordeaux, dans une série de récits attachants et de plus en plus remarqués, parmi lesquels nous citerons, principalement, le Pays natal, l’Honnête femme, la Peur de vivre, la Petite Mademoiselle, les Roquevillard et Les Yeux qui s’ouvrent, a montré comment un romancier sincère qui est aussi un artiste personnel peut, sans sacrifier rien de sa personnalité, s’inspirer heureusement du traditionalisme de M.  […] Depuis le Pays natal jusqu’aux Yeux qui s’ouvrent, M. 

2468. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre II. Le comique de situation et le comique de mots »

Envisagée dans l’espace, elle étale à nos yeux des éléments coexistants si intimement solidaires entre eux, si exclusivement faits les uns pour les autres, qu’aucun d’eux ne pourrait appartenir en même temps à deux organismes différents : chaque être vivant est un système clos de phénomènes, incapable d’interférer avec d’autres systèmes. […] Mais il n’est même pas nécessaire que les deux scènes symétriques soient jouées sous nos yeux. […] Et il nous fait rire parce qu’il rend manifeste à nos yeux l’interférence de deux séries indépendantes, source véritable de l’effet comique.

2469. (1870) La science et la conscience « Chapitre IV : La métaphysique »

La philosophie, spéculant sur les résultats de l’expérience et de la science positive, et en formant telle ou telle de ces synthèses qu’on nomme des systèmes, a besoin de voir les choses de très-haut pour pouvoir en saisir les rapports généraux, et s’élever ainsi, selon le sujet de ses recherches, à l’unité de loi, de type, de cause ou de substance, Or, dans cette contemplation suprême, il est presque inévitable, ou bien que les caractères propres de la réalité échappent au philosophe placé à un tel point de vue d’observation, ou bien qu’ils s’effacent et tendent à disparaître dans le vaste horizon ouvert sous ses pieds à ses yeux éblouis. […] Si ces attributs tombaient directement sous l’œil de la conscience, tout le monde les verrait et le doute serait impossible. […] Nous trouvons que la psychologie, par exemple, exactement traitée par la méthode des sciences naturelles, court risque d’en rester à la surface des choses, et de ne point pénétrer dans l’intimité de la nature humaine, ouverte seulement à l’œil de la conscience.

2470. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre II. La Nationalisation de la Littérature (1610-1722) » pp. 107-277

Mais en attendant, ce sont bien elles aussi qui ouvrent, ou pour ainsi parler qui dessillent les yeux de Molière. […] La scandaleuse et tragique affaire des poisons entrouvre brusquement aux yeux comme un abîme d’ignominie [Cf.  […] et il éclate aux yeux que l’universel déterminisme du philosophe est incompatible avec l’idée de la Providence divine. […] Vous aurez beau leur dire que les couleurs sont dans les yeux de ceux qui les regardent et non dans les objets ; les dames ne veulent point dépendre des yeux d’autrui pour leur teint ; elles veulent l’avoir à elles en propre, et s’il n’y a point de couleur la nuit, M. de M… est donc bien attrappé, qui est devenu amoureux de Mlle D.  […] La Préface elle-même nous signale les mots de Falbala, Fichu, Battant l’œil, Ratafia, Sabler ; et on le voit tout de suite, ce sont des termes populaires ou des termes concrets, tirés de l’usage de la vie commune.

2471. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le cardinal de Bernis. (Fin.) » pp. 44-66

Le père Theiner, dans son Histoire du pontificat de Clément XIV, est l’écrivain qui, ayant eu sous les yeux la plus grande partie des dépêches de Bernis, probablement d’après les minutes mêmes recueillies après sa mort et déposées au Vatican, et qui, en ayant fait un usage et un extrait continuel, nous permet d’en porter aujourd’hui le jugement le plus motivé et le plus complet. […] [NdA] J’ai sous les yeux une notice manuscrite très bien faite qui rappelle les principaux services politiques du cardinal de Bernis en ces années du pontificat de Pie VI ; cette notice a été rédigée en 1806 par M. 

2472. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — II. (Fin.) » pp. 109-130

Il ne se trompe certainement pas lorsqu’il montre les grands, les nobles, le haut clergé, les femmes à la mode, ceux qu’on appellera aristocrates quelques mois plus tard, commencer par être les vrais démocrates, désirer un changement dans le gouvernement, y pousser à l’aveugle pour se procurer chacun plus de crédit dans sa sphère, se comporter en un mot comme des enfants qui, en maniant des armes à feu, se blessent et blessent les autres : « Ces aristocrates, dit-il, sont les véritables auteurs de la Révolution ; ils ont enflammé les esprits dans la capitale et les provinces par leur exemple et leurs discours, et n’ont pu ensuite arrêter ou ralentir le mouvement qu’ils avaient excité. » La bourgeoisie française a fait depuis, et sous nos yeux, ce que l’aristocratie avait fait alors ; ç’a été la même répétition, et selon le même esprit, à un autre étage. […] Il peut servir à représenter à nos yeux toute une classe et une race de gens du monde, de gens d’esprit et d’administrateurs distingués, qui existaient tout formés à la fin de l’Ancien Régime, qui succombèrent avec l’ordre de choses, et qui ont péri dans l’intervalle, avant que la société reconstituée pût leur rendre une situation ou même leur donner un asile.

2473. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — II » pp. 112-130

Ce qui fait à mes yeux une grande partie de l’intérêt des écrits de d’Argenson et ce qui doit les rendre précieux pour quiconque aime la vérité, c’est que tout y est successif et selon l’instant même ; il ne rédige pas ses mémoires après coup en résumant dans un raccourci plus ou moins heureux ses souvenirs ; il écrit chaque jour ce qu’il sait, ce qu’il sent ; il l’écrit non pas en vue d’un public prochain ou posthume, mais pour sa postérité tout au plus et ses enfants, et surtout pour lui, pour lui seul en robe de chambre et en bonnet de nuit. […] Ce ne sont partout à ses yeux qu’iniquités heureuses et triomphes apparents de l’injuste sur l’innocent.

2474. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — III » pp. 132-153

L’idéal du bonheur, avec considération et indépendance, s’offre le plus volontiers à ses yeux sous la forme assez bourgeoise d’un juge-consul ou d’un conseiller au Parlement de Paris ; mais il y ajoute certaines conditions supplémentaires qui en font une existence pas du tout ennuyeuse et des plus variées. […] Les jugements et témoignages de d’Argenson sur les écrivains qu’il a connus et les livres d’eux qu’il a lus sont plus sûrs et ont beaucoup de prix à nos yeux.

2475. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe, et d’Eckermann »

Un des beaux enfants d’Ottilie, la belle-fille de Gœthe, s’approcha du visiteur et le regarda avec de grands yeux. […] « La partie n’est pas égale, disait-il ; elle n’est pas loyale de la part de ces yeux armés qui sont tout occupés à m’observer et qui se dérobent. » Le fait est que les lunettes dont se servait, même dans les circonstances solennelles, un Charles-Quint, se concevraient mal sur le nez d’un Sophocle ou d’un Périclès.

2476. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Histoire de la Restauration par M. Louis de Viel-Castel. Tomes IV et V. (suite et fin) »

Ce personnage original et unique, en un temps où il y en a si peu de parfaitement entiers, était, comme on sait, sorti de souche janséniste ou plutôt d’une famille imbue des principes et des maximes de Port-Royal, ce qui est, à mes yeux, un peu différent ; c’était, en un mot, de la sévérité morale chrétienne plutôt encore que de la théologie qui l’avait environné et nourri dès l’enfance, et il n’avait eu sous les yeux que l’exemple des justes dans son petit pays de Sompuis en Champagne, où, par hasard, la bonne et forte semence du pur Port-Royal était allée tomber.

2477. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français et de la question des Anciens et des Modernes »

Le poète, un certain Glaucus, peu connu d’ailleurs, mais qui a de l’art et du sentiment, s’écrie : « C’est après l’avoir vu, le douloureux héros de Trachine, que Parrhasius s’est mis à peindre ce Philoctète : car dans ses yeux desséchés habite une larme muette, et au dedans est la douleur qui le ronge. […] » Il n’y avait rien de banal dans cet éloge ; une seconde épigramme de Léonidas sur le même Aristocratès nous donne de nouveaux détails et nous apprend que cet homme gracieux et sensible avait eu, en mourant, un regret : c’était d’être resté célibataire, d’avoir eu sous les yeux, à sa dernière heure, un foyer bientôt désert et une maison sans enfants : « Une maison sans colonnes est triste à voir. » Mais, tout compte fait, et bien que sachant le mieux, il s’en était tenu au plus sûr : il avait craint la perfidie du sexe.

2478. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite et fin.) »

Qu’il me soit permis, messieurs, de m’honorer à vos yeux d’une mission que je dois à l’amitié de cet homme célèbre… » Ce rapprochement de Raynal et de Franklin ne pouvait passer que grâce à l’illusion de l’amitié : Franklin, véritable patriarche, par un mélange unique de simplicité, de finesse et de douce ironie, avait offert à quiconque l’avait approché dans sa vieillesse le modèle du sage, conseillant à demi-voix et souriant, un des vrais pères ou parrains de la société de l’avenir. […] On y mit pourtant de la réflexion et du temps ; près de dix mois s’écoulèrent, et je ne m’explique pas bien ce retard, cette longueur d’entracte, dont Malouet ne nous rend pas compte et qui semble disparaître à ses yeux dans le raccourci de ses souvenirs.

2479. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [V] »

Ce qu’il avait ambitionné jeune, il l’avait désiré derechef et à tout prix en 1813, au moment de sa démarche (comme il l’appelait) ; il s’était flatté alors, même en rabattant beaucoup de ses espérances, de saisir aux cheveux l’occasion telle quelle, de se venger d’un seul coup de ses ennemis et de ses envieux, en montrant du moins en quelque rencontre signalée tout ce qu’il savait et pouvait faire : c’eût été à ses yeux la justification suprême. […] Le chapitre IV de l’introduction (Coup d’œil sur la constitution des différentes armées européennes à l’époque de la déclaration de guerre en 1792) est tel que Jomini seul pouvait l’écrire.

2480. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [I] »

Toutes ces études convergent à vue d’œil, se croisent et se rejoignent de manière à ne laisser rien échapper. […] Dans une édition que j’ai sous les yeux et qui n’est pas la première, dans l’édition de 1561, je note tout d’abord une disparate : ce sont des distiques grecs de Jean Dorât qui sont en tête et par lesquels le savant maître félicitait Du Bellay de son apologie de la langue française ([mots en grec]).

2481. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les poètes décadents » pp. 63-99

à tes Malices Leur cœur d’aube fleurit comme un doux cyclamen, Et sacrant leurs seize ans aux candeurs de calices, Le hautain contempteur des sordides hymens, Anteros aux yeux d’or cuivre de ses délices Le concombre inclément de leur vierge abdomen. […] Georges Izambard, qui fut, à Charleville, le professeur d’Arthur Rimbaud, nous décochait cette ballade sans venin, dans, la Jeune France, revue libre où Maurice Barrès publia des fragments de Sous l’œil des barbares.

2482. (1902) L’œuvre de M. Paul Bourget et la manière de M. Anatole France

Les choses prennent donc à ses yeux une apparence linéaire, géométrique et non pas évidente, à laquelle leur essence comprimée doit de tendre sans cesse à déborder le dessin où elle se voit réduite. […] Et il aura observé en même temps qu’une pensée se cache derrière l’œuvre de notre écrivain, — inflexible et cruelle comme le sens de la vie aux yeux d’un déshérité, inquiétante comme l’hypocrisie d’un jour désespérément égal, — la pensée de ce que nous signifions dans l’absolu.

2483. (1890) L’avenir de la science « XIX » p. 421

Aux yeux d’hommes grossiers, un homme qui jeûne, qui se flagelle, qui est chaste, qui passe sa vie sur une colonne, est l’idéal de la vertu. […] Quand Platon voulait que, dans sa République, tous vissent par les mêmes yeux et entendissent par les mêmes oreilles, il faisait sciemment abstraction de l’un des éléments les plus essentiels de l’humanité.

2484. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XI. La littérature et la vie mondaine » pp. 273-292

Il dut intéresser à son sort les beaux yeux de Julie d’Angennes. […] Faut-il rappeler ces traductions qu’on appelait « les belles infidèles » ; la Bible pomponnée, attifée, presque enrubannée ; les formules superbes prêtées aux orateurs des républiques antiques : Messieurs les Athéniens, j’ai l’honneur de vous proposer telle mesure. ; les hommes des siècles passés, qu’ils s’appelassent Achille ou Pharamond, dotés de cette majesté dont Louis XIV ne se départait pas, « même en jouant au billard » ; tel poète d’autrefois, à commencer par Homère, honni par les uns, parce qu’il a manqué aux convenances, en mettant aux prises des héros qui se traitent de cœur de cerf et d’œil de chien, défendu par les autres, au nombre desquels est Boileau, sous prétexte que le mot âne, trivial en français, est parfaitement noble en grec.

2485. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « V »

Sarcey se met le doigt dans l’œil avec une sérénité rare. […] Je me souviendrai toujours du regard, que, du profond de ses extraordinaires yeux bleus, Wagner fixa sur moi.

2486. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE XIV »

Alors le masque tombe, l’accent gascon s’efface, le notaire s’évanouit ; et, du nuage que laisse sa disparition, sort un Rodin germanique aux cent yeux, aux cent bras, espion d’une police universelle, représentant d’une société, au capital de cinq milliards, ayant pour but l’achat ou la destruction de toutes les forces vives de la France, armée de glaives et de stylets dont la pointe est partout et dont la poignée n’est nulle part. […] Reprenez, dans la dernière brochure, son triangle humain, ses castes féminines « de temple, de foyer et de rue », ses commentaires apocalyptiques sur le Déluge et sur la Genèse : ajoutez-y les songes creux de Claude et les prophéties de Daniel, et vous aurez un grimoire que l’œil d’un hégélien ne pourrait pas déchiffrer.

2487. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Chansons de Béranger. (Édition nouvelle.) » pp. 286-308

Le mouvement du refrain enlevait et sauvait tout ; mais, dès que le ballon n’est plus lancé et qu’il ne nage plus dans la lumière, on saisit de l’œil les défauts, les fissures et les coutures. […] Pour lui seul, entraîné qu’on était par la modestie apparente du genre, par le bonheur du refrain, par la vogue des sentiments, on a fermé l’œil, on s’est mis de la partie, et, tout en chantant en chœur, on lui a su gré de tout sans réserve.

2488. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Broglie. » pp. 376-398

Que si vous le voulez absolument, mettez ce noble discours en regard d’autres discours plus récents du même honnête homme politique, lesquels ne sont ni moins sentis, ni moins animés d’un accent de vérité, et vous aurez sous les yeux en abrégé toute la leçon de l’expérience, l’éternelle leçon qui recommence toujours. […] M. de Broglie eut en ces années (1828-1829) un véritable rêve d’homme de bien, de philosophe élevé qui croit à Dieu, à la vérité idéale et suprême, à la vérité et à l’ordre ici-bas, à la perfectibilité de l’esprit humain, à la sagesse et au progrès de son propre temps, au triomphe graduel et ménagé de la raison dans toutes les branches de la société et de la science, dans l’ensemble de la civilisation même : « N’en déplaise aux détracteurs officieux de notre temps et de notre pays, écrivait-il en 1828, tout va bien, chaque jour les saines idées gagnent du terrain ; l’esprit public se forme et se propage à vue d’œil. » Il s’agissait, dans ce cas, d’une simple pétition sur les juges auditeurs ; mais on sent la satisfaction généreuse qui déborde du cœur d’un homme de bien.

2489. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « L’abbé Galiani. » pp. 421-442

C’est parce que notre œil est configuré de manière à voir le ciel rond et voûté, que l’homme a ensuite inventé la coupole, le dôme du temple, soutenu de colonnes, qui est une chose belle à voir. […] L’abbé Galiani quitta Paris, pour n’y plus revenir, dans l’été de 1769, et c’est à cette date que commence sa Correspondance avec Mme d’Épinay ; c’est par elle dès lors qu’il se rattache presque uniquement à ses amis de Paris, et il aura l’occasion de lui répéter bien souvent : « Je suis perdu si vous me manquez. » Ce petit Machiavel, qui faisait l’insensible, qui se vantait de n’avoir pleuré de sa vie, et d’avoir vu d’un œil sec s’en aller père, mère, sœurs, tous les siens (il se calomniait lui-même), pleurait et sanglotait en quittant Paris, en quittant « cette nation aimable, disait-il, et qui m’a tant aimé ».

2490. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits du comte Joseph de Maistre. (1851, 2 vol. in-8º.) » pp. 192-216

Une dame, une amie de M. de Maistre, s’effrayait de cette installation de plus en plus souveraine d’un pouvoir qui lui paraissait non légitime : Avec tout le respect que je vous dois, Madame, écrivait M. de Maistre, je ne puis être de votre avis sur le grand événement qui fixe les yeux de l’Europe et qui me paraît unique dans l’histoire. […] Et il agite, il retourne en tout sens son terrible dilemme, insistant de préférence sur la supposition que les Bourbons ne sont pas encore une race usée et peuvent encore faire fonction de race vraiment royale, auquel cas « la commission de Bonaparte, selon lui, est de rétablir la monarchie et d’ouvrir tous les yeux, en irritant également les royalistes et les Jacobins, après quoi il disparaîtra lui ou sa race. ».

2491. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le comte-pacha de Bonneval. » pp. 499-522

Grand, beau, l’air ouvert et martial, l’œil plein de feu, la tête haute, avec une coiffure à lui, la chevelure assez rase et en rond, à la Charles XII, ou à la Titus comme nous dirions, Bonneval attirait les regards. […] Sa mère, la marquise de Bonneval, avait jeté les yeux sur Mlle Judith de Biron, sa parente, l’un des vingt-six enfants du duc de Biron, très protégé du Régent, et qui, avec une telle famille, avait besoin de l’être.

2492. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — I. » pp. 414-435

Il était de ceux qui, avec une physionomie noble et douce, de beaux yeux bleus et un sourire bienveillant, ont reçu en naissant un instinct invincible. […] J’ai sous les yeux une longue lettre de M. 

2493. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Voltaire et le président de Brosses, ou Une intrigue académique au XVIIIe siècle. » pp. 105-126

Foisset en 1836, a produit sous les yeux du lecteur toutes les pièces du procès. […] Jamais esprit ne s’est transformé plus habilement, et ne s’est retourné plus vite à vue d’œil selon son intérêt.

2494. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — I. » pp. 389-410

N’ont-ils pas le plus grand intérêt à avoir les yeux fixés sur vous ? […] « Montrez-moi, lui dit Mirabeau qui y montait, ce que vous avez à dire. » Et jetant les yeux sur le discours, il y saisit une phrase dont il tira parti l’instant d’après, et qui est devenue le mouvement célèbre : « Je vois d’ici cette fenêtre d’où partit l’arquebuse fatale qui a donné le signal du massacre de la Saint-Barthélemy. » Il paraît que l’idée première était de Volney : Mirabeau, s’en emparant et la mettant en situation, en fit un foudre oratoire.

2495. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — II. (Fin.) » pp. 411-433

Derrière moi était Égine ; devant, Mégare ; à droite le Pirée, à gauche Corinthe, toutes villes qui avaient été dans un temps si florissantes, et qui maintenant, renversées et détruites, sont gisantes devant nos yeux. […] Tantôt ce même soleil qui avait vu jeter les fondements de ces cités se couchait majestueusement à mes yeux sur leurs ruines ; tantôt la lune se levant dans un ciel pur, entre deux urnes cinéraires à moitié brisées, me montrait les pâles tombeaux.

2496. (1888) La critique scientifique « La critique et l’histoire »

L’esthopsychologie, la science des œuvres d’art considérées comme signes, accompagnée de la synthèse biographique et historique que nous venons d’esquisser, dépeint des hommes réels, des hommes de fortune médiocre ou élevée, ayant vraiment vécu dans un entourage véritable, ayant coudoyé d’autres hommes en chair et en os, étant enfin des créatures humaines, avec, pour parler comme Shylock, des yeux, des mains, des organes, des dimensions, des sens, des affections., des passions, tout comme les vivants que l’on rencontre aujourd’hui sous nos yeux.

2497. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre I. Après la mort — Shakespeare — L’Angleterre »

Enfin il est anglais jusqu’à essayer d’atténuer Henri VIII ; il est vrai que l’œil fixe d’Élisabeth est sur lui. […] Sans doute les aristocraties dirigeantes, qui mettent la nuit sur les yeux des masses, sont les premières coupables, mais, en somme, la conscience existe pour un peuple comme pour un individu, l’ignorance n’est qu’une circonstance atténuante, et quand ces dénis de justice durent des siècles, ils restent la faute des gouvernements, mais deviennent la faute des nations.

2498. (1694) Des ouvrages de l’esprit

Certains poètes sont sujets, dans le dramatique, à de longues suites de vers pompeux, qui semblent forts, élevés, et remplis de grands sentiments ; le peuple écoute avidement, les yeux élevés et la bouche ouverte, croit que cela lui plaît, et à mesure qu’il y comprend moins l’admire davantage, il n’a pas le temps de respirer, il a à peine celui de se récrier et d’applaudir. […] Il ne faut point de vols, ni de chars, ni de changements, aux Bérénices et à Pénélope : il en faut aux Opéras, et le propre de ce spectacle est de tenir les esprits, les yeux et les oreilles dans un égal enchantement.

2499. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre I. La quantité des unités sociales : nombre, densité, mobilité »

Si nous mesurons les distances non plus aux espaces qu’elles recouvrent, mais (ce qui importe en effet à la vie sociale) aux temps qu’il faut pour les parcourir, nous voyons l’aire des nations modernes se contracter en quelque sorte et se resserrer sous nos yeux. […] Un homme que nous coudoyons journellement, avec lequel nous entretenons des relations les plus fréquentes et les plus variées sera-t-il encore à nos yeux un être quasi-divin ?

2500. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Réception du père Lacordaire » pp. 122-129

Lu, le discours trahira de grandes irrégularités de style, et plus que des audaces, je veux dire des incohérences d’images, des disparates de ton et des défauts d’analogie qui s’apercevront assez : Cela sautait aux yeux, même à l’audition.

2501. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Note »

Une période tout enthousiaste de trois années commença pour moi (1827–1830) ; elle acheva de se consacrer dans mon culte intérieur par le recueil des Consolations qui est resté à mes yeux comme le sanctuaire ardent et pur des plus belles heures de ma jeunesse.

2502. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Études sur Blaise Pascal par M. A. Vinet. »

Et que savons-nous encore s’il ne vécut que par les yeux ?

2503. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Mignet : Histoire de la Révolution française, depuis 1789 jusqu’en 1814. 3e édition. »

Qualités et défauts, tout lui vient d’elle : forte et complexe, féconde en rapports nombreux qu’elle embrasse dans une merveilleuse symétrie, il la représente et la peint aux yeux par l’ordonnance sévère de ses formes et le mécanisme régulier de ses balancements.

2504. (1874) Premiers lundis. Tome I « Madame de Maintenon et la Princesse des Ursins — I »

» Tant que durera la guerre, il n’y a de salut à ses yeux que dans les gros bataillons.

2505. (1874) Premiers lundis. Tome I « Victor Hugo : Odes et ballades — I »

Qu’on imagine à plaisir tout ce qu’il y a de plus pur dans l’amour, de plus chaste dans l’hymen, de plus sacré dans l’union des âmes sous l’œil de Dieu ; qu’on rêve, en un mot, la volupté ravie au ciel sur l’aile de la prière, et l’on n’aura rien imaginé que ne réalise et n’efface encore M. 

2506. (1874) Premiers lundis. Tome I « Walter Scott : Vie de Napoléon Bonaparte — II »

Le général avait donné  l’ordre qu’on veillât à leur sûreté, et il fut obéi ;  mais comme ces citoyens avaient peu d’importance aux yeux des soldats, de longs éclate de rire, partaient de tous les rangs, lorsque, se préparant à recevoir les mameluks, les généraux de division criaient avec le laconisme militaire : — Placez les ânes et les savants au milieu du carré

2507. (1874) Premiers lundis. Tome II « Adam Mickiewicz. Le Livre des pèlerins polonais. »

L’art qui médite, qui édifie, qui vit en lui-même et dans son œuvre, l’art peut se représenter aux yeux par quelque château antique et vénérable que baigne un fleuve, par un monastère sur la rive, par un rocher immobile et majestueux ; mais, de chacun de ces rochers ou de ces châteaux, la vue, bien qu’immense, ne va pas à tous les autres points, et beaucoup de ces nobles monuments, de ces merveilleux paysages, s’ignorent en quelque sorte les uns les autres ; or, la critique, dont la loi est la mobilité et la succession, circule comme le fleuve à leur base, les entoure, les baigne, les réfléchit dans ses eaux, et transporte avec facilité, de l’un à l’autre, le voyageur qui les veut connaître.

2508. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre VII. Éducation de la sensibilité »

Mme de Sévigné laissait trotter sa plume, mais elle l’avait bien en main, et ne la quittait pas de l’œil : elle pesait ses mots avec une décision rapide et sûre qu’elle tenait de son goût naturel et d’un fréquent exercice.

2509. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vielé-Griffin, Francis (1864-1937) »

Il aime regarder les yeux fermés et deviner les fleurs à leurs parfums… Et c’est cela qui a élargi son panthéisme en une intense et compréhensive affection pour toute chose.

2510. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre IX. Beltrame » pp. 145-157

Quand le capitaine lui demande s’il aime Celia, Fulvio, sous l’empire de la même crainte, nie son amour ; il hésite à toucher la main de Celia qu’on lui donne et tourne toujours les yeux vers Scapin pour s’assurer qu’il n’a point mal fait.

2511. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Le lyrisme français au lendemain de la guerre de 1870 » pp. 1-13

Figés en des poses d’extase, Les cheveux longs et les yeux blancs Immobiles comme en des rangs Que le regard d’un chef écrase.

2512. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préfaces de « Han d’Islande » (1823-1833) — Préface d’avril 1823 »

Il lui reste à remercier les huit où dix personnes qui ont eu la bonté de lire son ouvrage en entier, comme le constate le succès vraiment prodigieux qu’il a obtenu ; il témoigne également toute sa gratitude à celles de ses jolies lectrices qui, lui assure-t-on, ont bien voulu se faire d’après son livre un certain idéal de l’auteur de Han d’Islande ; il est infiniment flatté qu’elles veuillent bien lui accorder des cheveux rouges, une barbe crépue et des yeux hagards ; il est confus qu’elles daignent lui faire l’honneur de croire qu’il ne coupe jamais ses ongles ; mais il les supplie à genoux d’être bien convaincues qu’il ne pousse pas encore la férocité jusqu’à dévorer les petits enfants vivants ; du reste, tous ces faits seront fixés lorsque sa renommée sera montée jusqu’au niveau de celles des auteurs de Lolotte et Fanfan ou de Monsieur Botte, hommes transcendants, jumeaux de génie et de goût, Arcades ambo ; et qu’on placera en tête de ses œuvres son portrait, terribiles visu formæ , et sa biographie, domestica facta .

2513. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Aristophane, et Socrate. » pp. 20-32

Il vit sa fin du même œil d’indifférence dont il avoit envisagé tous les événemens de la vie.

2514. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre VIII. La mécanique cérébrale »

Non-seulement nous ne comprenons pas et nous ne comprendrons jamais comment des traces quelconques imprimées dans notre cervelle peuvent être perçues de notre esprit ou y produire des images, mais, quelque délicates que soient nos recherches, ces traces ne se montrent en aucune façon à nos yeux, et nous ignorons entièrement quelle est leur nature. » Le savant et profond physiologiste allemand Müller s’exprime en termes non moins significatifs.

2515. (1879) Balzac, sa méthode de travail

L’auteur de la Comédie humaine, qui vivait à une époque où les écrivains se plaisaient à jeter de la poudre aux yeux du public, fut assez satisfait de cet article d’Ourliac, paru primitivement dans Le Figaro, pour le donner tout entier en appendice dans la première édition de César Birotteau.

2516. (1860) Ceci n’est pas un livre « Les arrière-petits-fils. Sotie parisienne — Premier tableau » pp. 180-195

La preuve, c’est que, quand je dors, j’ai beau m’être repu, je rêve toujours que j’ai faim et que je n’ai rien pour dîner… (Il laisse tomber ses deux bras et reste, les yeux baissés, dans l’attitude du découragement.

2517. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre XI. Première partie. Conséquences de l’émancipation de la pensée dans la sphère des idées religieuses » pp. 315-325

Les peuples n’ont pas les yeux levés en haut pour voir de quel côté les cieux s’abaisseront ; ils n’attendent point de législateur nouveau.

2518. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Gabrille d’Estrées et Henri IV »

Il y a bien une phrase dans l’introduction où il est question de l’image gracieuse de l’amour d’Henri IV et de Gabrielle ; mais c’est de suite fini, et l’auteur, qui a encore ce vieux œil de poudre sur la pensée, ne retourne plus à cette bergerie : il redevient et reste sérieux.

2519. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La défection de Marmont »

Une des plus grandes beautés de la nature humaine sur la terre, c’est de faire son devoir les yeux en larmes et pourtant de le faire d’un cœur ferme.

2520. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Jules Vallès » pp. 259-268

… Est-ce donc que l’ancien réfractaire aurait encore l’involontaire émotion du passé, la larme à l’œil qui empêche de bien voir et le tremblement de la main, quand il tire sur ses camarades d’indiscipline et de débandade ?

2521. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Edmond About » pp. 63-72

se scandaliser lui paraîtrait pédant et lourd, et le genre qu’il affecte pendant tout le cours de son livre en serait, à ses propres yeux, compromis.

2522. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Hebel »

De l’un, il observe d’un œil joyeux et frais les objets de la nature qui manifestent leur vie d’une manière palpable par leur accroissement ou leur mouvement, et qu’ordinairement nous tenons pour inanimés.

2523. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Proudhon et Couture »

Aux yeux du penseur qui nous donne aujourd’hui, dans un écrit fortement condensé, le droit public d’une quatrième race, la révolution française a deux côtés que l’on a toujours trop confondus.

2524. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Comte de Gramont »

Car son regard, ainsi qu’un voile de lumière Sur ses yeux, fait ployer et frémir ma paupière ; Car l’auréole flambe à son front innocent ; Car elle m’apparaît, toujours transfigurée ; Car elle est moins aimée encore qu’adorée, Et je voudrais pouvoir l’empourprer de mon sang !

2525. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — II »

A l’éclat de leurs yeux, à la dureté de leurs regards, je sens que leurs rêveries sont d’un ordre funeste pour la paix sociale.

2526. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre VII. D’Isocrate et de ses éloges. »

Pour nous, ce mérite est presque étranger ; nous sommes des Scythes qui voyageons, un bandeau sur les yeux, à travers les ruines de la Grèce.

2527. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXV. De Paul Jove, et de ses éloges. »

L’évêque, son successeur, nous a laissé, à la tête de ses éloges, une description charmante de ce lieu ; on y voit un homme enthousiaste des lettres et du repos, un historien qui a l’imagination d’un poète, un évêque nourri des doux mensonges de la mythologie païenne ; car il nous peint avec transport ses jardins baignés par les flots du lac, l’ombre et la fraîcheur de ses bois, ses coteaux, ses eaux jaillissantes, le silence profond et le calme de sa solitude ; une statue élevée dans ses jardins à la nature ; au-dedans, un salon où présidait Apollon avec sa lyre et les neuf Muses avec leurs attributs ; un autre où présidait Minerve ; sa bibliothèque, qui était sous la garde de Mercure ; ensuite l’appartement des trois Grâces, orné de colonnes doriques et de peintures les plus riantes ; au-dehors, l’étendue pure et transparente du lac, ses détours tortueux, ses rivages ornés d’oliviers et de lauriers ; et, dans l’éloignement, des villes, des promontoires, des coteaux en amphithéâtre, chargés de vignes ; et les hauteurs naissantes des Alpes, couvertes de bois et de pâturages, où l’œil voyait de loin errer des troupeaux.

2528. (1908) Promenades philosophiques. Deuxième série

C’est une merveille, et cette merveille, quand on la fixe un certain temps, révèle aux yeux enivrés des abîmes de merveilles. […] D’autres chiens, toujours comme certains hommes, quand ils se croient dédaignés, se retirent dans un coin, et on lit la tristesse dans leurs yeux et dans leur attitude. […] Alpiniste est celui qui grimpe aux Pyrénées, tout aussi bien que celui qui grimpe aux Alpes, et le Club Alpin, s’il fixe d’un œil le mont Rose, couve de l’autre le mont Perdu. […] En de tels moments, « il devenait comme fou, ses yeux se révulsaient, il haletait et j’avais toujours bien soin d’avoir l’œil sur ses mains, parce qu’alors il était comme une bête et il voulait toujours me serrer le cou... ». […] Il ne faut pas lui en vouloir : il était romantique, et le propre des romantiques c’est de fermer les yeux à la beauté réelle des choses, pour admirer les chimères de leurs rêveries.

2529. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIIe Entretien. Montesquieu »

Cependant Montesquieu n’avait pas toujours la même présence d’esprit et lord Chesterfield lui avait fait perdre la tête à Venise, en postant sur sa route un homme qui lui fit croire trop aisément que le Conseil des dix avait les yeux sur lui. […] « Après deux ans d’inutiles démarches, il le rencontre par hasard dans la rue, se précipite à ses genoux, le conjure, les larmes aux yeux, de venir partager la joie d’une famille au bonheur de laquelle il ne manque que de pouvoir jouir de la présence de son bienfaiteur et de lui exprimer toute sa reconnaissance. […] « Si nous faisons attention aux dernières guerres, qui sont celles que nous avons le plus sous nos yeux, et dans lesquelles nous pouvons mieux voir de certains effets légers, imperceptibles de loin ; nous citerons bien que les peuples du Nord transportés dans les pays du Midi, n’y ont pas fait d’aussi belles actions que leurs compatriotes, qui, combattant dans leur propre climat, y jouissaient de tout leur courage.

2530. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 novembre 1885. »

Elle a beau s’approcher de lui, caressante, audacieuse et plonger dans ses yeux son regard qui darde une flamme inquiète. […] Enfin elle ouvre les yeux. […] » À ces mots, le chevalier noir se lève, découvre son visage et plante sa lance en terre, puis s’agenouille dans une prière fervente, les yeux levés sur la pointe de la lance. — Gurnémanz a reconnu Parsifal ; il comprend que cette lance est la lance merveilleuse enfin reconquise, que le simple d’autrefois est devenu par de longues épreuves l’élu d’aujourd’hui et s’abandonne à un transport d’admiration.

2531. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Introduction »

Si le positivisme se bornait à dire que la métaphysique ne peut être prise au sérieux comme science, puisqu’elle affirme sans pouvoir vérifier ni démontrer, il faudrait fermer les yeux à l’évidence pour y contredire. […] Au lieu de décider la question, j’aime mieux mettre quelques faits sous les yeux du lecteur. […] III) et quelques observations éparses, la psychologie a complètement fermé les yeux sur les anomalies et exceptions.

2532. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

Il dévorait des yeux celles qu’il ne pouvait manger de baisers : supplice de Tantale, à devenir fou. […] Fontanes, qu’il avait perdu de vue depuis 12 ans, jeté en Angleterre par le coup d’état de Fructidor (4 septembre 1797), fit miroiter devant ses yeux le brillant avenir réservé aux défenseurs du catholicisme, alors renaissant : il s’empressa de planter là la philosophie et de renier Jean Jacques, que cependant il admirait ; et avant que l’encre de l’Essai se fût desséchée, et avec la même plume qui annotait ses passages sceptiques, il écrivit le Génie du Christianisme ; et pour donner des gages au parti qui l’enrôlait, il imprima dans le Mercure (1er nivôse an IX) : « Ma folie à moi est de voir Jésus-Christ partout. » Malheureusement il avait eu l’imprudence d’envoyer son Essai à ses amis de Paris ; ils s’en souvinrent et élevèrent des doutes sur la sincérité de sa conversion. […] Une sensible Malvina de 1801 qui s’habillait « de tissus légers, comme d’un nuage transparent, tellement que l’œil saisissait à la fois et la tendresse des chairs et la magnificence de l’étoffe argentée », aurait haussé les épaules à qui lui aurait demandé de sacrifier ses passions sur l’autel de la religion et aurait fredonné le refrain de la chanson qui avait été si populaire : On a bien fait d’inventer l’enfer Pour épouvanter la canaille.

2533. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre V. Le souvenir du présent et la fausse reconnaissance »

Mais la conscience ne l’aperçoit pas d’ordinaire, pas plus que notre œil ne verrait notre ombre s’il l’illuminait chaque fois qu’il se tourne vers elle. […] À l’intérieur de chacune de ces régions notre attention individuelle se dirigera sans doute à sa fantaisie, mais elle viendra simplement alors se superposer à la première, comme le choix que l’œil individuel fait de tel ou tel objet pour le regarder se superpose à celui que l’oeil humain a fait, une fois pour toutes, d’une certaine région déterminée du spectre pour y voir de la lumière.

2534. (1911) Nos directions

Ceux-ci ferment les yeux sur l’art, et ceux-là sur la vie. Ouvrons les yeux sur toutes choses, dût-on nous en faire grief ! […] Il voudra toucher par les yeux notre âme. […] Le mètre comptera moins à ses yeux que la rime. […] Voilà le fait important à mes yeux de quiconque s’attache à rénover notre technique poétique selon l’instinct et la raison.

2535. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Alexis Piron »

« Voltaire, dit-il dans ses lettres, est venu perdre ici la seule réputation à laquelle il avait sacrifié toutes les autres, sa réputation de bel esprit. » La vanité m’a donné des yeux pour en tant écrire ; mais, réflexion faite, j’ai vaincu avec si peu de péril, que j’en dois triompher sans gloire. […] Quel supplice de voir toujours sous ses yeux une personne que l’on aime, dans une situation aussi déplorable ! […] Le diable, d’ailleurs, avec lui, n’y perdit rien ; le malin vieillard continua jusqu’à la fin de copier, tant que ses yeux le lui permirent, ses vers salés, de lâcher ses épigrammes mordantes, et de lancer ses bons mots au nez d’un chacun. […] Le port de la tête est hardi ; chaque muscle de la face remue et joue ; la double fossette, creusée par l’habitude du sourire, est légèrement indiquée ; la lèvre est parlante, comme impatiente, et ne cesse de railler ; les yeux sont petits et ne regardent pas ; la peau du cou pend et flotte sans maigreur, sans mollesse, et dans la réalité de la vie ; les draperies sont largement jetées.

2536. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Louis Veuillot »

Quand il était seul avec lui-même, il fermait les yeux. […] Un gallican, un doctrinaire, un catholique libéral, c’est d’abord, à ses yeux, un homme qui se trompe. […] En vérité, j’ai joué un rôle de dupe, si je n’y regarde qu’avec l’œil de la raison humaine. […] oui, il l’a aimée  avec crainte, avec remords ; car il savait bien qu’aux yeux d’un chrétien elle ne doit être qu’un instrument : mais, tremblant toujours de l’aimer pour elle-même, il l’adorait avec d’autant plus de passion.

2537. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Un cas de pédanterie. (Se rapporte à l’article Vaugelas, page 394). »

Et je ne craindrai pas d’en faire juge le public qui n’a pas eu sous les yeux la pièce incriminée ; car je ne considère pas comme un texte loyal et sincère le texte déchiqueté et entrecoupé, à chaque mot, de lazzis grossiers, qui lui a été présenté par cet étrange docteur.

2538. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section II. Des sentiments qui sont l’intermédiaire entre les passions, et les ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre II. De l’amitié. »

Tout est dit pour les âmes sensibles, et la personnalité seule peut continuer des entretiens dont l’œil pénétrant de la délicatesse a vu l’amitié fatiguée.

2539. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre III. De l’étude. »

Il semble que notre propre destinée se perde au milieu du monde qui se découvre à nos yeux ; que des réflexions, qui tendent à tout généraliser, nous portent à nous considérer nous-mêmes comme l’une des millièmes combinaisons de l’univers, et qu’estimant plus en nous la faculté de penser que celle de souffrir, nous donnons à l’une le droit de classer l’autre.

2540. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Jules Laforgue » pp. 36-47

« De taille moyenne et assez spontanément épanoui, il porte, pas trop haut, une longue tête enfantine ; cheveux châtains s’avançant en pointe sur un front presque sacré et retombant, plats et faibles, partagés par une pure raie droite, celer deux mignonnes oreilles de jeune fille ; masque imberbe sans air glabre, d’une pâleur un peu artificielle mais jeune ; deux yeux bleu-gris partout étonnés et timides, tantôt frigides, tantôt réchauffés par les insomnies ; un nez sensuel ; une bouche ingénue, ordinairement aspirante, mais passant vite du mi-clos amoureux à l’équivoque rictus des gallinacés… Il ne s’habille que de noir et s’en va, s’en va, d’une allure traînarde et correcte, correcte et traînarde5. » Il dit encore : Mon père (un dur par timidité) Est mort avec un profil sévère ; J’avais presque pas connu ma mère, Et donc vers vingt ans je suis resté.

2541. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 239-252

Ainsi, Rubens laisse toujours l’empreinte de son génie, en offrant aux yeux l’agitation des Furies, ou le sourire des Graces.

2542. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 8-23

Que ces reproches soient fondés ou non, on ne pourra se dispenser d’avouer que l’amour, trop souvent introduit dans ses Tragédies, en fait languir l’intérêt aux yeux des Spectateurs, qui préferent le plaisir d’être émus par l’impétuosité des grandes passions, à celui d’être attendris par des passions plus douces.

2543. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Balzac, et le père Goulu, général des feuillans. » pp. 184-196

Il leur déclara « que, si elles avoient un peu de courage, elles devoient crever les yeux à Balzac, ou du moins lui faire endurer la peine que les dames de la cour voulurent faire souffrir à Jean de Meun ».

2544. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre sixième. »

Il fait trois serpens de deux coups, mettent la chose sous les yeux.

2545. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre II. Qu’il y a trois styles principaux dans l’Écriture. »

Il entre dans son récit à la manière des anciens historiens ; vous croyez entendre Hérodote : « 1º Comme plusieurs ont entrepris d’écrire l’histoire des choses qui se sont accomplies parmi nous ; » 2º Suivant le rapport que nous en ont fait ceux qui dès le commencement les ont vues de leurs propres yeux, et qui ont été les ministres de la parole ; » 3º J’ai cru que je devais aussi, très excellent Théophile, après avoir été exactement informé de toutes ces choses, depuis leur commencement, vous en écrire par ordre toute l’histoire. » Notre ignorance est telle aujourd’hui, qu’il y a peut-être des gens de lettres qui seront étonnés d’apprendre que saint Luc est un très grand écrivain, dont l’Évangile respire le génie de l’antiquité grecque et hébraïque.

2546. (1865) Du sentiment de l’admiration

le souvenir de cet héroïsme moral rayonnera toujours devant ses yeux.

2547. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Casanove » pp. 192-197

Les yeux devant le tableau, plus vous détaillerez, chaque petit détail ayant toujours quelque chose de vague et d’indéterminé, plus vous compliquerez le problème pour l’imagination.

2548. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 29, qu’il est des païs où les ouvrages sont plûtôt apprétiez à leur valeur que dans d’autres » pp. 395-408

Or, ces tableaux qui nous sont toujours présens, et dont le rang est certain, dont le mérite est décidé, servent, s’il est permis de parler ainsi, de pieces de comparaison, qui donnent le moïen de juger sainement à quel point l’ouvrage nouveau qu’on expose sous nos yeux approche de la perfection où les autres peintres ont atteint, et dans quelle classe il est digne d’être placé.

2549. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 18, reflexions sur les avantages et sur les inconveniens qui resultoient de la déclamation composée des anciens » pp. 309-323

Quintilien dit qu’il avoit vu souvent les histrions et les comediens sortir de la scene les larmes aux yeux, lorsqu’ils venoient d’y jouer des scenes interessantes.

2550. (1762) Réflexions sur l’ode

Que le soleil vienne éclairer tout à coup les habitants d’une caverne obscure, qu’il darde impétueusement ses rayons dans leurs yeux non préparés, il ne fera que les aveugler pour jamais ; il fera pis encore ; il leur rendra pour jamais odieux l’éclat du jour, dont ils ne connaîtront que le mal qu’il leur aura causé.

2551. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Histoire des ducs de Normandie avant la conquête de l’Angleterre »

Nous oublions trop que le grand caractère de l’Histoire c’est d’être une peseuse de poussière, et que des écroulements définitifs, des fins accomplies, conviennent mieux à cette Observatrice funèbre que des choses vivantes encore, qui déconcerteraient son œil et sa main.

2552. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Henri Rochefort » pp. 269-279

Il avait essayé du rire, du rire à large fente, et il s’en est fait un comme à la scène on se fait une tête ; car naturellement, si j’en crois le livre que j’ai sous les yeux, il n’est pas un esprit gai ; il n’a pas la promptitude, et la sveltesse, et le pétillement et la couleur rose qui font ce qu’on appelle la gaîté, du moins comme on l’entend en France, le seul pays où on la comprenne.

2553. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Avellaneda »

A nos yeux, l’inspiration en fut toujours presque coupable.

2554. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Louis Wihl »

Il releva de la main ses deux paupières pendantes, qui retombaient toujours sur ses yeux, et il reconnut l’homme qu’il avait là, à deux pas de son chevet.

2555. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Avant-propos de la septième édition »

Mais, d’autre part, nous étonnerions autant cet interlocuteur en lui disant que l’objet est tout différent de ce qu’on y aperçoit, qu’il n’a ni la couleur que l’œil lui prête, ni la résistance que la main y trouve.

2556. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XI. Des éloges funèbres sous les empereurs, et de quelques éloges de particuliers. »

Tout le monde sait que son éloge fut prononcé par Antoine ; et que pour attendrir les Romains, l’orateur fit apporter sous leurs yeux le corps de César percé de coups.

2557. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XVII. »

Il serait bien peu vraisemblable que, dès le temps où ces images étaient incessamment sous les yeux des Romains, la fête de Vénus, placée par la tradition à une des époques les plus riantes de l’année, à la saison des belles nuits et des aurores matinales, n’ait pas été embellie du charme des vers, ou même qu’on n’ait eu, pour célébrer ces gracieux souvenirs, que quelque vieux débris du rituel païen.

2558. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. DAUNOU (Cours d’Études historiques.) » pp. 273-362

Ses goûts de lettré l’éloignaient de la chirurgie ; il prit le parti de ce demi-cloître et ferma les yeux sur les inconvénients de l’avenir, séduit sans doute par une perspective de retraite et d’étude au sein de vastes bibliothèques, par l’idée de ne pas changer de maîtres et de guides, lui timide et qui craignait avant tout le commerce des hommes. […] Je suis toujours tenté d’en vouloir, je l’avoue, à cette méthode logique, à celle de Condillac en particulier, qui faisait ainsi appareil et illusion, à force de clarté, devant des yeux si bien organisés d’ailleurs. […] Des témoins (et il y en avait peu) m’ont dit que lorsque Chénier, déjà atteint de la maladie dont il mourut, arrivait là, se remettait en haleine et entrait en verve, lorsqu’à dérouler les infamies d’alentour et les palinodies qui le suffoquaient, son accent éclatait avec colère, et que son œil noir lançait la flamme, il était beau et terrible ainsi. […] Un de ses gestes familiers trahissait en quelque sorte sa disposition habituelle : Le petit homme, aurait dit un physionomiste, a l’œil vif, le sourcil épais et fin, du nez et du menton, mais le haut du front un peu bas ; — et encore il ramenait sans cesse, il aplatissait tant qu’il pouvait sa perruque pour le dérober. […] La conversation, quand elle dérivait là-dessus, devenait avec lui des plus intéressantes et des plus fines : sous son sourcil gris, son petit œil étincelait.

2559. (1714) Discours sur Homère pp. 1-137

Il a semé son ouvrage de ce que les sentimens naturels ont de plus touchant, de ce que les passions ont de plus vif : mais il ne s’est pas contenté de raconter ces passions ; il les a mises sous les yeux. […] C’est peu pour lui de préparer les événemens, il les annonce sans ménagement et même plus d’une fois, avant que de les mettre sous les yeux. […] Tel que l’yvoire le plus blanc qu’une femme de Méonie ou de Carie a peint avec la plus éclatante pourpre, pour en faire les bossettes d’un mords ; elle le garde chez elle avec soin ; plusieurs braves cavaliers le voyent avec admiration et d’un oeil d’envie ; mais il est réservé pour quelque prince ou pour quelque roi ; car ce n’est pas une parure vulgaire, et elle fait en même tems l’ornement du cheval, et la gloire du cavalier. […] Ces traductions ont trouvé trois sortes de lecteurs, les uns prévenus, et qui ne doutant pas d’avance que les ouvrages d’Homere ne fussent parfaits, croiroient manquer d’esprit et de goût, s’ils n’en étoient charmés ; ainsi pour ne pas s’avilir à leurs propres yeux, ils s’excitent eux-mêmes à l’admiration, et ils s’estiment heureux de pouvoir sentir et parler comme les sçavans. […] Je n’ai pas dépouillé les héros de cet orgueil injuste, où nous trouvons souvent de la grandeur ; mais, je leur ai retranché l’avarice et l’avidité du butin qui les avilit à nos yeux ; et je n’ai pas voulu, par exemple, qu’Achille examinât la rançon d’Hector, avant que de le rendre ; une si basse attention le déshonoreroit plus, poëtiquement parlant, que sa cruauté même.

2560. (1842) Discours sur l’esprit positif

Pour bien comprendre l’esprit, purement théologique, résulté du développement, de plus en plus systématique, de cet état primordial, il ne faut pas se borner à le considérer dans sa dernière phase, qui s’achève, sous nos yeux, chez les populations les plus avancées, mais qui n’est point, à beaucoup près, la plus caractéristique : il devient indispensable de jeter un coup d’œil sur l’ensemble de sa marche naturelle, afin d’apprécier son identité fondamentale sous les trois formes principales qui lui sont successivement propres. […] Car, l’esprit théologique et l’esprit métaphysique sont tous deux conduits, par leur nature absolue, à ne considérer que la portion du passé où chacun d’eux a surtout dominé : ce qui précède et ce qui suit ne leur offre qu’une ténébreuse confusion et un désordre inexplicable, dont la liaison avec cette étroite partie du grand spectacle historique ne peut, à leurs yeux, résulter que d’une miraculeuse intervention. […] Les motifs théologiques devant naturellement offrir, aux yeux du croyant, une intensité très supérieure à celle de tous les autres quelconques, ils ne sauraient jamais devenir les simples auxiliaires des motifs purement humains ils ne peuvent conserver aucune efficacité réelle aussitôt qu’ils ne dominent plus. […] En un temps où il ne faut attendre d’efficacité immédiate que de mesures toujours provisoires, bien adaptées à notre situation transitoire, l’organisation nécessaire d’un tel point d’appui général pour l’ensemble des travaux philosophiques devient, à mes yeux, le principal résultat social que puisse maintenant produire l’entière vulgarisation des connaissances réelles : le public rendra ainsi à la nouvelle école un plein équivalent des services que cette organisation lui procurera. […] Aussitôt que les questions politiques, ou plutôt dès lors sociales, se rapporteront ordinairement à la manière dont le pouvoir doit être exercé pour mieux atteindre sa destination générale, principalement relative, chez les modernes, à la masse prolétaire, on ne tardera pas à reconnaître que le dédain actuel ne tient nullement à une dangereuse indifférence : jusque-là, l’opinion populaire restera étrangère à ces débats, qui, aux yeux des bons esprits, en augmentant l’instabilité de tous les pouvoirs, tendent spécialement à retarder cette indispensable transformation.

2561. (1865) Introduction à l’étude de la médecine expérimentale

Le physiologiste croira certainement avoir fait une expérience parce qu’il est intervenu activement pour faire apparaître des phénomènes qui ne s’offraient pas naturellement à ses yeux. […] Sans doute nous avons devant les yeux les mouvements de cet homme et ses manifestations qui sont, nous en sommes sûrs, les modes d’expression de sa sensibilité et de sa volonté. […] Nous supprimons, dans nos explications, le milieu interne, pour ne voir que le milieu extérieur qui est sous nos yeux. […] On se promène, comme l’on dit, dans le domaine de la science, et l’on poursuit ce qui se présente par hasard devant les yeux. […] L’influence de l’hypothèse est donc ici des plus évidentes ; on avait le fait sous les yeux et on ne le voyait pas parce qu’il ne disait rien à l’esprit.

2562. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Ma biographie »

Un portrait de son père, une miniature peinte en 1791 nous le représente avec des yeux bleus, le nez fort et fin qui, vu de profil, doit être recourbé, la narine bien ouverte ; la bouche, qui devait être grande, est fermée comme par une habitude naturelle : les deux lèvres, sans être serrées et plutôt souriantes, relevées dans les coins, forment une ligne fine et longue sur laquelle la lèvre supérieure seule a un peu de relief et de contour, marqués par une légère teinte rose. […] Cependant on peut lire dans les yeux qui sont bien ouverts, bien vifs et bien arqués, et dans la commissure des lèvres, un peu ironique, une pointe et ce coin de malice et de moquerie qu’on dit être l’apanage de la race picarde. […] C’est une espèce de satire ou conte à l’adresse d’un écrivain bien oublié aujourd’hui, Mme de Genlis, et qui venait de publier alors Les Arabesques mythologiques, — «  avec figures », a bien soin d’ajouter, dans un petit Avertissement, l’auteur de la satire que j’ai sous les yeux.

2563. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

J’ai sous les yeux trois articles favorables et fort judicieux du Journal de Paris (de germinal an x) ; ils sont écrits au point de vue du christianisme pratique, et l’usage tout poétique et sentimental qu’on fait de la religion y est indiqué comme un danger ou du moins comme un affaiblissement d’une chose auguste et sévère. « Au reste, dit en finissant le critique anonyme, on nous annonce depuis longtemps, et je crois même qu’on publie déjà un ouvrage plus considérable ayant, dit-on, pour titre : Des Beautés poétiques, ou seulement Des Beautés du Christianisme, et dont ce livre-ci paraît être l’avant-coureur ; semblables à ces petits aérostats qu’on a coutume de faire partir avant les grands pour juger des courants de l’atmosphère. […] Magnin, les symboliques réminiscences et les instinctifs pressentiments de l’auteur d’Orphée ont-ils un degré de vraisemblance que nous ne retrouvons pas dans l’Homme sans nom : « Dans ce dernier poëme, ajoute le même critique, la proximité de l’objet nous paraît déjouer l’œil profond du mystique interprète : la double vue ne s’applique bien qu’à l’invisible. » Et pourtant, chose remarquable ! […] Son visage avait été défiguré par une opération, mais n’était point du tout laid pour cela ; ses yeux étaient brillants, larges et intelligents ; la joue était enflée d’un côté comme par une fluxion ; l’aspect général était simple, peut-être un peu trop ; mais la plus remarquable bienveillance dans toute sa personne, sa voix et ses manières, donnaient la plus agréable impression à tous ceux qui avaient quelque discernement.

2564. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque (1re partie) » pp. 145-224

Les démonstrations de l’ordre naturel, telles que le témoignage des yeux, de l’oreille, de la main, ne sauraient s’appliquer aux choses qui ne tombent pas sous les sens. […] C’est, selon moi, l’apogée de la parole humaine ; on est à la fois, dans ce dialogue, sur la terre par le cœur, dans la mort par l’anticipation du supplice, dans l’immortalité par l’esprit ; toujours prêt à pleurer d’enthousiasme pour les idées : mais l’admiration pour le philosophe y sèche toujours les larmes au bord des yeux. […] Criton, s’en étant aperçu, lui ferma la bouche et les yeux.

2565. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre premier. Le Moyen Âge (842-1498) » pp. 1-39

Tous les hommes pour lui se ressemblent, un peu comme à nos yeux tous les nègres ou tous les Chinois ; et, au fait, ce qui diversifie les visages humains, et, en les diversifiant, ce qui les individualise, n’est-ce pas le reflet en eux d’une complexité intérieure, d’une richesse, ou d’une intensité de vie inconnue aux hommes de ce temps ? […] Ainsi, de quelque côté que nous tournions les yeux, et en négligeant deux ou trois autres exceptions, puisqu’il faut bien qu’il y en ait toujours, nous ne voyons que symptômes de décadence, et il semble que, dans tous les genres, au moment climatérique de son développement, la littérature du Moyen Âge, en France du moins, se soit comme nouée. […] Le Grand Testament, 169-224], — dont la sincérité nous est prouvée par la Ballade qu’il fit à la requête de sa mère. — Il a eu d’autre part le don de voir et de susciter aux yeux l’image des « choses vues » [Cf. 

2566. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — II. (Fin.) » pp. 98-121

Froissart ne sera jamais un historien critique comme Tillemont, ni encore moins un historien philosophe comme Gibbon ; mais sa vocation, réduite à toute sa simplicité, à l’enquête curieuse et à la vive représentation des faits, n’en paraît que plus en saillie ; nous avons vu cette vocation courir et jouer pour ainsi dire devant nos yeux dès son enfance, et il passa toute sa vie à la satisfaire. […] Froissart, à mesure qu’il l’a mieux connu et eu égard aux variantes sans nombre qu’on y rencontre, n’a plus été, à ses yeux, que le moins exact et le plus incertain des historiens.

2567. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de la Mennais (suite et fin.)  »

Pour moi, de quelque côté que je jette les yeux, je n’aperçois que des sujets de trembler, de gémir et de frémir. […] J’ai toujours l’espoir de vous aller revoir au printemps… » Une lettre toute d’onction de l’abbé Carron à l’abbé Jean, à ce moment, met au grand jour l’âme suavement bénigne et tendre de cet excellent homme : « (12 décembre 1815)… Je ne vous parlerai, cher ami, de mon bien-aimé fils Féli que les larmes aux yeux : je ne suis point un Paul, et pourtant j’ai dans le même personnage un second Tite, un autre Timothée.

2568. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres mêlées de Saint-Évremond »

Giraud s’exprime de la sorte : « Ces opuscules portent leur date en eux-mêmes et sont unis entre eux par un lien qui est visible aux yeux les moins clairvoyants. […] Une des pièces les plus intéressantes qu’il nous ait laissées et des plus délicates (pour employer une de ses expressions favorites), la principale peut-être aux yeux du biographe et comme offrant l’expression entière de sa nature, c’est sa lettre à l’un de ses anciens amis restés des plus affectionnés et des plus fidèles, le maréchal de Créqui, qui lui avait demandé en quelle situation était son esprit, et ce qu’il pensait de toutes choses dans sa vieillesse.

2569. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. NISARD. » pp. 328-357

Tandis que ces personnes de talent brillant et d’imagination vive nous développent des vues générales et des synthèses sur le passé, comment veulent-elles qu’on ne doute pas un peu de la réalité de l’idée, quand on les sait se tromper si à bout portant dans les coalitions qu’elles s’imaginent voir éclore sous leurs propres yeux ? […] Un de mes amis, fort bon latiniste, a marqué, sur un exemplaire que j’ai sous les yeux, quelques contre-sens réels que M.

2570. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « M. MIGNET. » pp. 225-256

A propos des similitudes frappantes et presque des symétries d’accidents qui sautent aux yeux entre l’avénement de la seconde race et celui de la troisième, il disait : « Cette analogie de causes et d’effets est remarquable, et prouve combien les choses agissent avec suite, s’accomplissent de nécessité, et se servent des hommes comme moyens, et des événements comme occasions. » Après avoir montré dans saint Louis le principal fondateur du système monarchique, il suivait les progrès de l’œuvre sous les plus habiles successeurs, et faisait voir avec le temps la royauté de plus en plus puissante et sans contrôle, roulant à la fin sur un terrain uni où elle n’éprouva pas d’obstacle, mais où elle manqua de soutien ; si bien qu’un jour « elle se trouva seule en face de la Révolution, c’est-à-dire d’un grand peuple qui n’était pas à sa place et qui voulait s’y mettre, et elle ne résista pas. […] Mais on ne saurait non plus, par le besoin de tout bien savoir, se réduire désormais à ce régime d’histoire purement diplomatique, dont l’objet est surtout d’enregistrer les textes et de faire passer avec continuité sous les yeux la teneur même des dépêches, actes et traités.

2571. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « L’abbé Prévost »

son recours en désespoir de cause au père du marquis, au noble duc, qui reçoit l’affaire comme si elle lui semblait par trop impossible, et l’effleure avec une légèreté de grand ton qui serait à nos yeux le suprême de l’impertinence ; ces traits-là, que l’âge a rendus piquants, ne coûtaient rien à l’abbé Prévost, et n’empruntaient aucune intention de malice sous sa plume indulgente. […] Le biographe de l’édition de 1810, qui est le même que celui de l’édition de 1783, a copié sur ce point le biographe qui a publié les Pensées de l’abbé Prévost en 1764, et qui lui-même s’en était tenu aux explications insérées dans le nombre 47 du Pour et Contre. — On a imprimé dans je ne sais quel livre d’Ana, que Prévost étant tombé amoureux d’une dame, à Hesdin probablement, son père, qui voyait cette intrigue de mauvais œil, alla un soir à la porte de la dame pour morigéner son fils au passage, et que celui-ci, dans la rapidité du mouvement qu’il fit pour s’échapper, heurta si violemment son père que le vieillard mourut des suites du coup.

2572. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis »

Ses yeux, d’un éclat doux et majestueux, n’annonçaient ni orgueil ni mélancolie ; sa taille était si parfaitement proportionnée, qu’on la distinguait, au milieu des autres femmes, par un air de dignité imposante, exempt néanmoins de toute espèce de prétention ou d’affectation. […] Le signal qui devait être donné par eux est attendu par l’œil attentif des conjurés.

2573. (1921) Enquête sur la critique (Les Marges)

Mais d’ailleurs un critique un peu complet doit être à la fois dogmatique, parce qu’il n’y a pas de personnalité qui compte sans une doctrine, explicite ou implicite, — impressionniste parce qu’il n’y a aucune possibilité d’appliquer une doctrine sans recevoir des œuvres des impressions directes, vrais et nettes, — indépendant, parce que s’il dépendait d’autre chose que de la vérité ou de ce qu’il croit tel, ce ne serait pas un critique, mais un mercenaire, — artiste enfin, ou à tout le moins capable de contempler d’un œil pur et de recréer en soi l’œuvre d’art qu’il est incapable de créer. […] René Gillouin ne se borne pas à exprimer son éclectisme : « … Tous les genres de critique sont bons » ; il en donne très fermement les motifs : « … Un critique un peu complet doit être à la fois dogmatique, parce qu’il n’y a pas de personnalité qui compte sans une doctrine explicite ou implicite, — impressionniste parce qu’il n’y a aucune possibilité d’appliquer une doctrine sans recevoir des œuvres des impressions directes, vraies et nettes, — indépendant, parce que s’il dépendait d’autre chose que de la vérité ou de ce qu’il croit tel, ce ne serait pas un critique, mais un mercenaire, — artiste enfin, ou à tout le moins capable de contempler d’un œil pur et de recréer en soi l’œuvre d’art qu’il est incapable de créer. » Et si M. 

2574. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre troisième »

Mais, l’œil toujours fixé sur Genève, il y surveillait tous les mouvements de l’opinion populaire. […] En face de ce beau lac de Genève, de ce paysage la joie des yeux, Calvin est insensible.

2575. (1890) L’avenir de la science « XVIII »

C’est le vieux Balaam qui tombe et ses yeux s’ouvrent 169. […] Allez, les générations ensevelies sous ces masses ont plus vécu que si elles avaient végété heureuses sous leur vigne et sous leur figuier 176 J’ai sous les yeux en écrivant ces lignes la grande merveille de la France royale, Versailles.

2576. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Malesherbes. » pp. 512-538

Les pièces les plus importantes, les principaux dossiers manuscrits relatifs à cette partie de sa vie et de sa conduite, sont sous mes yeux, et j’en pourrai traiter, non pas avec plus de justesse et d’équité (car la plupart des biographes en ont très bien parlé en général), mais avec plus de précision qu’on ne l’avait fait jusqu’ici. […] Mais ces nouvelles précautions ne tinrent pas ; il y avait eu bientôt du relâchement, et l’ennemi avait trouvé moyen de s’introduire dans la place sous l’œil même des sentinelles.

2577. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre VI. Le Bovarysme essentiel de l’humanité »

Si d’autre part, ayant construit les conséquences logiques qui devraient suivre l’existence d’un libre arbitre, on abaisse les yeux sur la réalité pour y découvrir ces conséquences, on s’aperçoit aussitôt qu’elles y sont absentes. […] À vrai dire, dans cette hypothèse qui distingue d’une façon absolue le bien de l’agréable, il semble que la plupart des hommes souhaiteront que l’inclination vers le plaisir soit chez eux la plus forte et l’emporte sur l’autre : le sentiment du devoir risquera de devenir à leurs yeux le mauvais principe.

2578. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre III : Examen de la doctrine de Tocqueville »

Quel œil serait assez perçant pour prévoir et deviner toutes les conséquences qu’un état social aussi nouveau peut produire dans le monde ? […] Elle a inspiré ces belles maximes éparses dans sa correspondance : « En toutes choses, il faut viser à la perfection ; — ce monde appartient à l’énergie ; — la grande maladie de l’âme, c’est le froid. » Sa vie même a été une confirmation de ses doctrines ; c’était une nature noble et haute, admirablement sincère, ayant toujours devant les yeux la grandeur morale ; c’était une personne, une âme, un caractère.

2579. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre II. Des poëtes étrangers. » pp. 94-141

La pureté & l’élégance du style, l’heureux choix des termes, les graces de l’imagination, une gaieté inépuisable, des tirades sublimes ; voilà ce qui a fait fermer les yeux sur les imperfections du Poëme de l’Arioste. […] Dix Princes chrétiens métamorphosés en poissons, dans les bassins d’Armide, & un perroquet chantant des chansons galantes de sa propre composition, sont des choses bien étranges aux yeux d’un lecteur sensé, quoique nous soyons prévenus par l’histoire de Circé dans l’Odyssée, & quoique nous voyions tous les jours les perroquets imiter la voix humaine.

2580. (1913) La Fontaine « IV. Les contes »

Il est bien temps d’ôter à mes yeux ta présence, Quand tu luis dans mon cœur ! […] Il écrit à sa marraine, c’est-à-dire celle qu’il appelait ainsi parce qu’elle lui avait donné un sobriquet, à Mme Jaubert : Il est donc vrai, vous vous plaignez aussi, Vous dont l’œil noir, gai comme un jour de fête, Du monde entier pourrait chasser l’ennui !

2581. (1767) Sur l’harmonie des langues, et en particulier sur celle qu’on croit sentir dans les langues mortes

On s’est donné bien de la peine pour étudier une langue difficile, on ne veut pas avoir perdu son temps, on veut même paraître aux yeux des autres récompensé avec usure des peines qu’on a prises, et on leur dit avec un froid transport, ah ! […] Je ne doute pas qu’Anacréon ne fût en effet pour les Grecs un auteur charmant : mais je ne doute pas non plus que presque tout son mérite ne soit perdu pour nous, parce que ce mérite consistait sûrement presque en entier dans l’usage heureux qu’il faisait de sa langue ; usage dont la finesse ne saurait être aperçue par des yeux modernes.

2582. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — V » pp. 123-131

Un des titres littéraires du maréchal de Villars à nos yeux, c’est assurément son amitié déclarée pour Voltaire.

2583. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — I » pp. 143-149

La prétendue incapacité était fondée sur le défaut corporel : « Le sieur de Pons a un corps bossu et contrefait ; il est moins homme que nain ; la singularité de son extérieur frappe de surprise et peut scandaliser les faibles. » — Je ne sais, répliquait l’abbé de Pons dans un factum plein de convenance, si l’amour-propre m’a fasciné les yeux, mais il me paraît que mon peintre n’a pas flatté son modèle, et que je puis à présent me montrer avec confiance.

2584. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « PENSÉES » pp. 456-468

La jeune Clady trouve grâce à vos yeux par son sourire ; vous avez pour elle de tendres complaisances, et on l’a vue, me dit-on, à votre bras un soir, et le matin dans la voiture où vous la promeniez.

2585. (1874) Premiers lundis. Tome II « Thomas Jefferson. Mélanges politiques et philosophiques, extraits de ses Mémoires et de sa correspondance, avec une introduction par M. Conseil — II »

La domination de Bonaparte fut à ses yeux une calamité sans compensation et sans mélange.

2586. (1874) Premiers lundis. Tome II « Loève-Veimars. Le Népenthès, contes, nouvelles et critiques »

La ville où l’on séjourne a beau être embrouillée, inégale, tortueuse, sans ordre et sans plan, pleine de carrefours, de tréteaux de charlatans, de passages et de ruelles, de monuments inachevés dont les pierres encombrent les places, d’arcs de triomphe sans chars ni statues de vainqueurs, de clochers et de coupoles sans croix : quand le soleil est couché, quand, du haut des collines prochaines, le voyageur qui n’est pas entré dans cette ville et qui n’y a pas vécu, l’aperçoit à l’horizon dessinant sa silhouette déjà sombre sur le ciel encore rougi du couchant, il la voit toute différente ; il y distingue des étages naturels, des accidents dominants, des masses imposantes et combinées ; les édifices que la distance et l’obscurité achèvent et idéalisent à ses yeux, lui apparaissent selon des hauteurs bien diverses.

2587. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Guy de Maupassant »

Dès le début il considère l’amour et les démarches de l’amour du même œil que le reste, comme des phénomènes tout aussi naturels (je crois bien !)

2588. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VI. Le charmeur Anatole France » pp. 60-71

Pauvres esprits, étroits dogmatiques, que ceux qui ne veulent voir qu’une de ces lueurs qui ferment les yeux aux autres, se disant que, s’ils sont valablement éclairés par l’une, ils ne sauraient l’être par d’autres, comme si toute lumière était dans une lumière.

2589. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XI. Trois bons médanistes : Henry Céard, Joris-Karl Huysmans, Lucien Descaves » pp. 145-156

Ils n’avaient d’yeux que pour le procédé, pour le rendu.

2590. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre II. Enfance et jeunesse de Jésus. Ses premières impressions. »

Au nord, les montagnes de Safed, en s’inclinant vers la mer, dissimulent Saint-Jean-d’Acre, mais laissent se dessiner aux yeux le golfe de Khaïfa.

2591. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIV. Rapports de Jésus avec les païens et les samaritains. »

Le mot de Jésus a été un éclair dans une nuit obscure ; il a fallu dix-huit cents ans pour que les yeux de l’humanité (que dis-je !

2592. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Première partie. Plan général de l’histoire d’une littérature — Chapitre IV. Moyens de déterminer les limites d’une période littéraire » pp. 19-25

Ainsi, notre siècle est coupé, d’une façon si visible qu’elle crève, pour ainsi dire, les yeux, par de grandes commotions nationales et internationales ; sur le fond uniforme des années se détachent, éclairées d’une lueur plus éclatante, joyeuse ou sinistre, ces dates mémorables : 1815,1830, 1848, 1870.

2593. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XV » pp. 175-187

Quatre objets, qui se représentaient sans cesse aux yeux ou à la pensée sous la monarchie ancienne, et surtout dans la littérature, avaient fait contracter ces habitudes de respect : les femmes, les prêtres, les grands, les rois.

2594. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre onzième. »

Couche-toi le dernier, etc… La moralité de cette fable entre dans celle de l’œil du maître, livre IV, fable 21.

2595. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 5, des études et des progrès des peintres et des poëtes » pp. 44-57

Ses yeux à peine entr’ouverts la découvrent déja.

2596. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 5, explication de plusieurs endroits du sixiéme chapitre de la poëtique d’Aristote. Du chant des vers latins ou du carmen » pp. 84-102

La tragedie met donc sous les yeux les objets mêmes dont elle prétend se servir pour exciter la terreur et la compassion, sentimens si propres à purger les passions.

2597. (1912) L’art de lire « Chapitre VI. Les écrivains obscurs »

On me répond, des yeux du moins et de la mine, car nous sommes un peuple poli : « Oh !

2598. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « II »

Mais ceci n’est qu’une forme de l’horreur du lieu commun et du goût que M. de Gourmont connaît bien — il l’a analysé dans une très bonne page — pour regarder toute chose avec des yeux frais, après s’être absolument débarrassé de tout préjugé, de toute manière traditionnelle et acquise de voir, de juger et de sentir.‌

2599. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XIV »

Brunetière déclare le conseil sans portée, et, pour montrer qu’une métaphore suivie peut être ridicule, il cite celle que Molière met plaisamment dans la bouche de Trissotin : Pour cette grande faim qu’à mes yeux on expose, ‌ Un seul plat de huit vers me semble peu de chose, Et je pense qu’ici je ne ferai pas mal De joindre à l’épigramme ou bien au madrigal ‌ Le ragoût d’un sonnet, qui, chez une princesse,‌ A passé pour avoir quelque délicatesse. ‌

2600. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les Philippiques de la Grange-Chancel »

Ils les avaient lavées, brossées vigoureusement et étendues comme des gloires aux yeux du public, ces hontes restées telles.

2601. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Le marquis de Grignan »

Ce livre est, selon moi, le livre supérieur de l’ouvrage, et comme j’en suis pour le moment à faire des découvertes dans les facultés de Masson, j’ai été particulièrement frappé par la puissance avec laquelle il a analysé ce fait, cruel et mortel aux races, de la mésalliance, — de ce sac à hontes et à douleurs de la mésalliance qu’il nous pointille toutes et nous trie sous les yeux, sans nous faire grâce d’une seule de ces hontes et de ces douleurs !

2602. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Notre critique et la leur »

Eh bien, pour commencer par les revues, qui restent plus longtemps que les autres journaux sous l’œil du public et dont la gravité et les développements touchent au livre, la Revue des Deux Mondes et la Revue Contemporaine, ces deux solitaires, nous offrent-elles le modèle et l’exemple de la critique que nous cherchons ?

2603. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Swift »

Très inférieur à Daniel de Foe par le génie, Swift a cette ressemblance avec Daniel de Foe qu’il n’est guères célèbre maintenant que par son Voyage en Lilliput, comme Daniel par son Robinson Crusoé ; mais, comme Foe, il n’a pas laissé sous les yeux indifférents des hommes qui ne lisent point un tas de chefs-d’œuvre : les Mémoires du capitaine Carleton, la Vie de Roxane, l’Histoire d’un cavalier, le Colonel Jacques, l’Histoire politique du Diable, etc., etc.

2604. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Lefèvre-Deumier »

Avec vos yeux d’humains, vous ne voyez donc pas, Qu’où s’arrêtent vos sens, c’est le ciel qui commence ?

2605. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Deltuf » pp. 203-214

Deltuf, qui a l’œil aux nuances et qui, quoique fin, a parfois le naturel de la force, était digne, ce me semble, d’entr’ouvrir ce sujet superbe et de nous donner une confession qui aurait été la confession de toute une vie, et non plus celle d’un moment dans la vie, comme La Confession d’Antoinette.

2606. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome xviii » pp. 84-92

Tous les ressorts des machines diverses, il les a touchés ; tous les plans et les projets jaillissant d’un front sublime, il les a eus sous les yeux, entre les mains ; et le travail qu’il a fait lui-même en s’en rendant compte, le plaisir qu’il a ressenti en les découvrant, il nous le reproduit, il nous le communique avec largesse et lucidité.

2607. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers, Tome xix. (L’île d’Elbe, — L’acte additionnel. — Le champ de mai.) » pp. 275-284

Ce second Empire, qui fut si court et comme étranglé par les événements, avait toujours été d’une extrême importance historique à étudier ; mais la renaissance et le rétablissement de l’Empire, il y a dix ans, lui a rendu un intérêt d’à-propos et de vie, puisqu’il reparaissait en quelque sorte sous les yeux comme un problème actuel et toujours pendant.

2608. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Les poëtes français. Recueil des chefs-d’œuvre de la poésie française »

» « — Erreur, mes bons Messieurs, reprend un magister ; Regardez-le marcher ; c’est le grand Jupiter : L’astre errant à vos yeux scintille. » Moi tout bas à mon cœur j’ai dit : — C’est un flambeau, C’est la cire qui brûle au balcon du château, Dans les mains de la jeune fille.

2609. (1874) Premiers lundis. Tome I « J. Fiévée : Causes et conséquences des événements du mois de Juillet 1830 »

« De tous les ministères, le plus coupable âmes yeux est celui qui pouvait le plus assurer l’avenir ; je parle du ministère de M. 

2610. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — I »

Le célèbre professeur de Berlin regarde la religion ou le sentiment comme le premier moment du développement de l’humanité, la philosophie ou la raison ou la réflexion comme le dernier moment, l’art qui représente la forme étant le terme intermédiaire de cette évolution ; aussi, à ses yeux, la nouvelle époque de l’histoire où nous allons entrer ne sera pas autre chose que la religion chrétienne passée à l’état de philosophie, ou, comme il dit, ayant acquis la conscience de soi.

2611. (1874) Premiers lundis. Tome II « Des jugements sur notre littérature contemporaine à l’étranger. »

Comme ce n’est pas du tout ici une défense systématique ni patriotique que nous prétendons faire, nous laisserons dès l’abord le chapitre des drames qui, d’ailleurs, composés la plupart pour les yeux, sont plus dans le cas d’être jugés à une première vue, même par des étrangers qui ne feraient que passer.

2612. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — George Sand. Cosima. »

lui dit-elle tout d’abord, comme en continuant son rêve ; mais bientôt, à mesure que l’explication se déroule à ses yeux et que sa raison se ressaisit elle-même, elle recule peu à peu, elle regagne insensiblement le terrain qu’un instant de surprise lui avait fait perdre, elle finit par le congédier.

2613. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Régnier, Henri de (1864-1936) »

. — Une fée le toucha de sa baguette fleurie lorsqu’il naquit, et de cette caresse enchantée ses yeux s’ouvrirent à la Beauté.

2614. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rostand, Edmond (1868-1918) »

Son Pégase pointe et parade, mais il n’est certes pas poussif, comme s’est empressé de le proclamer « le monstre aux yeux verts qui se nourrit de lui-même » : l’Envie.

2615. (1890) L’avenir de la science « IX »

Or ce problème se divise à mes yeux en six questions subordonnées, lesquelles devraient toutes se résoudre par des sciences diverses : 1° Question ethnographique.

2616. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVIII » pp. 305-318

Ce sont de sottes créatures qui méritent à peine cette leçon : Former aux bonnes mœurs l’esprit de ses enfants, Faire aller son ménage, avoir l’œil sur ses gens, Et régler la dépense avec économie Doit être son étude et sa philosophie.

2617. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Japonisme » pp. 261-283

Puis comme Hayashi cherchait dans sa mémoire, s’il connaissait quelque détail biographique sur Otaka, ses yeux s’arrêtant sur la demi-page de caractères gravés au-dessus du guerrier, il s’écria : « Mais sa biographie… la voici ! 

2618. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Fontenelle, et le père Baltus. » pp. 2-16

On avoit ouvert les yeux sur la fausseté, l’avarice, les débauches infâmes des prêtres : ils faisoient accroire que le dieu vouloit admettre à son lit les plus belles femmes : elles alloient à la divinité, parées des mains de leurs maris, chargées de présens en reconnoissance de ses faveurs.

2619. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XVII. Morale, Livres de Caractéres. » pp. 353-369

Il est vrai qu’il avoit sur les yeux le bandeau de la foi ; mais il voyoit à travers son bandeau, comme l’a dit un homme d’esprit.

2620. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Quatrième faculté d’une Université. Faculté de théologie » pp. 511-518

L’auguste de ses fonctions lui inspire un tel orgueil, qu’ici le vicaire de Saint-Roch est plus grand à ses propres yeux que le souverain : celui-ci ne fait que des nobles, des ducs, des ministres, des généraux ; qu’est-ce que cela pour celui qui fait des dieux ?

2621. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Baudouin » pp. 198-202

Une innocente prolonge sans fin sa toilette de nuit ; elle tremble, elle s’arrache avec peine des bras de son père et de sa mère, elle a les yeux baissés, elle n’ose les lever sur ses femmes, elle verse une larme.

2622. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XII. Mme la Princesse de Belgiojoso »

On se dit que dans l’âme de cette femme qui traverse indolemment l’étincelante Asie les yeux mi-clos, les ouvrant plus grands sur sa jeune fille qui l’accompagne que sur cette magnifique nature effleurée des pieds de son cheval, l’heure de la chaleur est passée et que l’admiration pour les belles choses visibles est à son reflux.

2623. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Charles Monselet »

Les yeux cachés passèrent hardiment par-dessus les éventails pour regarder le poète inconnu qui tout à coup venait d’apparaître.

2624. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Paul de Saint-Victor » pp. 217-229

Les envieux dont parle Brucker, « qui mettent dans le soleil les taches qu’ils ont dans les yeux », mirent leurs taches dans le soleil de Saint-Victor, mais il n’en continua pas moins d’aller son train, dans sa pureté de soleil !

2625. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Lenient » pp. 287-299

Pourquoi, puisque l’occasion s’en présente, ne donnerions-nous pas un simple coup d‘œil à cette variété littéraire ?

2626. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Francis Wey » pp. 229-241

Il regarde tout, ce rôdeur, d’un œil grand ouvert, perçant, lumineux !

2627. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Léopold Ranke » pp. 1-14

Dans les deux premiers volumes, qui vont jusqu’à la mort de Henri IV, l’auteur, qui semble n’avoir en vue que des résultats généraux, n’en recherche et n’en dégage qu’un seul, dont, à ses yeux, l’importance prime celle de tous les autres, et c’est la question de l’État, comme on dit en Prusse.

2628. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « W.-H. Prescott » pp. 135-148

Mais ce que c’est, c’est de l’histoire tranquille et quelquefois robuste, qui, comme Œdipe, ne se crève pas les yeux et ne les crève pas aux autres avec les agrafes d’or de son manteau.

2629. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Silvio Pellico »

Assurément, un souffle qui n’est pas celui de la bouche d’un homme a passé dans le livre des Prisons, sur cette giroflée jaune du mur d’un captif que toute l’Europe a respirée, les yeux en larmes ; mais ce souffle ne s’est purifié, il n’est devenu complètement pur que dans cette Correspondance, très infime de tout : de vue, de pensée, de passion, d’éloquence et même d’événements, et que cependant il faut lire pour savoir quelle saine et adorable chose le Christianisme peut faire… avec rien !

2630. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « L’abbé Galiani »

Heureusement, il sauva ses beaux yeux italiens de la cécité et ils lui restèrent assez perspicaces pour voir le faux de beaucoup de doctrines du temps.

2631. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIV. M. Auguste Martin »

Il y a dans ce badinage, il est vrai, aux yeux du très sérieux M. 

2632. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXII. Philosophie politique »

Elle est restée aussi, comme une sage petite fille, les yeux baissés et les mains jointes sur sa ceinture, dans cette idée prude ou hypocrite d’une vraie liberté, et elle a mis Dieu par-dessus, mais quel Dieu ?

2633. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXVII. Silvio Pellico »

Assurément un souffle qui n’est pas celui de la bouche d’un homme a passé dans le livre des Prisons, sur cette giroflée jaune du mur d’un captif que toute l’Europe a respirée, les yeux en larmes ; mais ce souffle ne s’est purifié, il n’est devenu complètement pur que dans cette correspondance très infime de tout, de vue, de pensée, de passion, d’éloquence et même d’événements, et que cependant il faut lire pour savoir quelle saine et adorable chose le christianisme peut faire… avec rien !

2634. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Francis Lacombe »

Lacombe a suivi d’un œil perçant ces dégradations successives d’une organisation qui se corrompit, mais qui, malgré la corruption à laquelle elle était en proie, fut encore une force immense au service de la démocratie jusqu’au milieu du xvie  siècle.

2635. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Barthélemy Saint-Hilaire »

Il y a, enfin, dans le Mahomet retrouvé d’aujourd’hui, un homme de génie qui croit à son génie, et ce génie, le plus grand de tous aux yeux d’un monde qu’il sauve, s’appelle le génie religieux.

2636. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Vte Maurice De Bonald »

Or, si, au dire des sages du temps et des diplomates de transaction, la chose est impossible, regardons, comme Maurice de Bonald, avec des yeux lucides, ce qui doit nous faire mourir, et toisons fièrement notre bourreau.

2637. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Mistral. Mirèio »

Il y a aussi un autre chant, intitulé Les Prétendants, où les trois rivaux du pauvre Vincent le vannier sont dépeints avec un détail si prodigieux et si vaste, qu’on dirait trois rois de contrées différentes qu’Alari, le berger, Veran, le gardien de cavales, et Ourrias, le loucheur, Ourrias, toute la tragédie de ce poème, qui se lève et que l’on pressent dès les premières strophes que lui consacre le poète… : « Ourrias, né dans le troupeau, élevé avec les bœufs, — des bœufs il avait la structure et l’œil sauvage, et la noirceur, et l’air revêche et l’âme dure !

2638. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Henri Murger. Œuvres complètes. »

C’est une suite de bouffonneries charivariques assez drôles, dans lesquelles on rencontre de temps à autre un trait touchant, comme perle quelquefois une larme intelligente dans les yeux avinés d’un ivrogne, mais c’est là tout !

2639. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Corneille »

Levallois n’est point de ressusciter un phénix tiré d’un autre phénix qui a brillé et qui brille encore aux yeux des hommes, mais de nous ramener au vieux Corneille, à ce phénix dont la jalousie de Voltaire avait coupé les ailes, et de nous en faire admirer les beautés depuis longtemps inaperçues.

2640. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Charles Didier » pp. 215-226

Tout cela est la défroque pittoresque et littéraire de l’Italie, haillons en poudre qu’une main distinguée ne touche plus et dédaignerait de remuer, mais sous lesquels l’œil fin aperçoit des réalités sociales et individuelles de l’intérêt le plus attachant et le plus vif, — comme celles-là, par exemple, que, dans sa Chartreuse, Beyle a su peindre avec génie, mais qu’il n’a pas épuisées.

2641. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre XI. De la géographie poétique » pp. 239-241

De la géographie poétique La géographie poétique, l’autre œil de l’histoire fabuleuse, n’a pas moins besoin d’être éclaircie que la chronologie poétique.

2642. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre V. »

Un des moins courts fragments qui nous en soient parvenus met sous nos yeux, à cet égard, ce qu’ont décrit d’autres poëtes célèbres, le silence d’une nuit d’été dans les beaux climats de Grèce et d’Italie.

2643. (1878) Leçons sur les phénomènes de la vie communs aux animaux et aux végétaux. Tome I (2e éd.)

Il sera nécessaire de faire bien comprendre le mouvement général qui s’accomplit sous nos yeux et qui tend à l’émancipation de la science physiologique et à sa constitution définitive. […] Je mets sous vos yeux le plan d’un de ces laboratoires : c’est celui de Leipzig dirigé par Ludwig, qui est ici tracé dans le beau rapport de M.  […] Au contraire, les phénomènes de destruction ou de mort vitale sont ceux qui nous sautent aux yeux et par lesquels nous sommes amenés à caractériser la vie. […] Quoi qu’il en soit, ce que nous savons, c’est que le principe vital n’exécute rien par lui-même et qu’il emprunte ses forces au monde extérieur dans les mille et mille manifestations qui apparaissent à nos yeux. […] Nous plaçons sous vos yeux deux grenouilles, l’une que nous avons plongée dans de l’eau à 37 degrés, vous voyez qu’elle est engourdie et ne fait plus de mouvements ; elle est dans le même état que la seconde qui a été plongée dans l’eau glacée.

2644. (1929) Dialogues critiques

Empiètement intolérable puisqu’ils laissent croire au public que leurs « sélections » sont approuvées par l’Association elle-même, voire par ceux de leurs confrères qui n’en font point partie : car tout le monde n’a pas l’Annuaire sous les yeux. […] Il ne faut pas avoir froid aux yeux, et les timides n’assassinent guère. […] Mais les auteurs ont un œil de père pour tous leurs écrits, vers ou prose, y compris leurs lettres.

2645. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXIXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (1re partie) » pp. 241-314

Il parut passer du côté du destin représenté, à ses yeux, par l’homme de la force brutale. […] Je vis aussi un des beaux enfants d’Ottilie, qui s’approcha sans défiance de moi et me regarda avec de grands yeux. […] On jugera combien je m’estimai heureux quand je la tins sous mes yeux.

2646. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre septième »

Ou, s’il faut croire que quelques parties de l’orateur lui ont manqué, nous, pour qui tout le mérite de l’action oratoire est perdu, et qui, les yeux sur un livre inanimé, ne pouvons plus sentir que la muette éloquence des paroles écrites, nous n’en donnerons pas moins la première place au prédicateur qui a écrit le plus fortement. […] On avait peur d’être aperçu de cet œil pénétrant, qui regardait entre ses paupières à demi fermées. […] Dirai-je aussi que la dialectique, dont l’effet est si grand du haut d’une chaire ou d’une tribune, d’où elle semble jeter sur l’auditeur comme un filet invisible, ne paraît guère, aux yeux d’un lecteur tranquille, qui en suit froidement les déductions, qu’un procédé artificiel et spécieux, plus propre à faire tort à la vérité qu’à la servir ?

2647. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VIII »

J’insiste sur ce fait, parce qu’on trouve dans beaucoup de livres français et allemands des indications comme celle-ci : « Puis soudain une autre image se présenta à ses yeux, s’imposa souverainement. […] Mais peut-être pénétrerons-nous plus avant dans ses caractères essentiels, si nous recherchons ses affinités avec le langage du Ring plus cachées, que si nous nous contentons de constater les différences qui sautent aux yeux. […] J’ai les deux versions sous les yeux.

2648. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre III. De la survivance des images. La mémoire et l’esprit »

Justement parce que chacun des éléments ainsi constitués contient, en raison de son origine, quelque chose de ce qui le précède et aussi de ce qui le suit, il devrait prendre à nos yeux la forme d’un état mixte et en quelque sorte impur. […] On la prendra toute faite, réalisée à l’état de faible perception, et on fermera les yeux sur le pur souvenir que cette image a développé progressivement. […] D’abord, les objets échelonnés le long de cette ligne AB représentent à nos yeux ce que nous allons percevoir, tandis que la ligne CI ne contient que ce qui a été déjà perçu.

2649. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Deuxième série

Un premier tableau se présente aux yeux qu’il est fort possible qui soit la réalité dans un siècle. […] Il n’a pas ouvert les yeux davantage sur le mouvement démocratique qui s’est produit. […] Dans le premier cas elle pourrait à demi fermer les yeux ; on la force dans le second à les ouvrir. […] Encore un coup, que n’a-t-elle eu les yeux fixés sur la Réforme ! […] Les païens faisaient la nature tout humaine ; ils la créaient à leur image, autrement dit, ils la voyaient avec leurs yeux.

2650. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « L’Académie française »

La salle de l’Académie était un peu petite pour ces orages imprévus qui d’un rien grossissaient à vue d’œil, et les sujets en eux-mêmes prêtaient rarement à ces débordements d’éloquence. […] Ce n’est pas à dire qu’elle ne puisse de plus en plus, à l’avenir, avoir l’œil à l’état présent des Lettres, aux variations incessantes du goût, au déclin, à la naissance et au développement des genres, à tout ce qu’il lui importe de discerner en pleine connaissance de cause, sans engouement comme sans dédain, dans le champ de plus en plus remué et sillonné de l’activité moderne.

2651. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [III] »

Du Bellay n’hésite pas à nous faire voir le revers misérable de toute cette pompe et de tout cet orgueil qui s’étalait aux yeux et qu’il perce à jour : Quand je vois ces Messieurs, desquels l’autorité Se voit ores ici commander en son rang, D’un front audacieux cheminer flanc à flanc, Il me semble de voir quelque divinité ; Mais les voyant pâlir lorsque Sa Sainteté Crache dans un bassin, et d’un visage blanc Cautement épier s’il y a point de sang, Puis d’un petit souris feindre une sûreté : Oh ! […] Et il ne s’attaque pas seulement à la personne des cardinaux neveux ou favoris, il va jusqu’à prendre à partie ces pontifes qu’il a vus de ses yeux, Jules III, Paul IV : ce dernier se faisant tout d’un coup guerrier in extremis, et qu’il oppose à Charles-Quint, à ce César dégoûté, subitement ambitieux du cloître : l’un et l’autre, dans ce revirement tardif, transposant les rôles et les parodiant pour ainsi dire, faisant comme échange entre eux d’humeur et d’inconstance : Je ne sais qui des deux est le moins abusé, Mais je pense, Morel, qu’il est fort malaise Que l’un soit bon guerrier, ni l’autre bon ermite.

2652. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Bruyère »

La Bruyère était déjà, un peu à ses yeux un homme des générations nouvelles, un de ceux en qui volontiers l’on trouve que l’envie d’avoir de l’esprit après nous, et autrement que nous, est plus grande qu’il ne faudrait. […] En parlant une fois de madame Guizot, nous avons indiqué de combien de pensées mémorables elle avait parsemé ses nombreux et obscurs articles, d’où il avait fallu qu’une main pieuse, un œil ami, les allât discerner et détacher.

2653. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « François Ier, poëte. Poésies et correspondance recueillies et publiées par M. Aimé Champollion-Figeac, 1 vol. in-4°, Paris, 1847. »

Frère et petit n’as craint de me tenir Entre tes bras ; ne crains donc de venir Entre les miens, qui suis grand et ton roy : Car en croissant croist mon amour en moy. » Ainsy parla l’œil plain de charité, Et voz deux bras dirent : C’est veritté16. […] Seigneur Dieu, esveillés-vous, Et vostre œil sa doulceur desplye, Saulvant vostre Christ et nous tous !

2654. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre IV. Racine »

S’il est beau de se vaincre, il est doux d’être heureux… L’éclat de deux beaux yeux adoucit bien un crime : Aux regards des amants tout paraît légitime… Je ne me connais plus et ne suis plus qu’amant ; Tout mon devoir s’oublie aux yeux de ce que j’aime. […] Fuyez l’aspect de ce climat sauvage… Un peuple obéissant vous attend à genoux Sous un ciel plus heureux… ; mais surtout à la fin, dans ce dernier vers qui évoque à nos yeux Monime Souveraine des mers qui la doivent porter, on voit tout un triomphal cortège glisser sur l’étendue resplendissante des eaux.

2655. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre deuxième »

C’est la Renaissance qui lui fait dire que l’imprimerie a été inventée de son temps « par inspiration divine », que les lettres « sont une manne céleste de bonne doctrine57. » C’est la Renaissance qui lui fait écrire au savant Tiraqueau58 : « Comment se fait-il qu’au milieu de la lumière qui brille dans notre siècle, et lorsque par un bienfait spécial des dieux » (il est plus près d’être païen que théologien) « nous voyons renaître les connaissances les plus utiles et les plus précieuses, il se trouve encore çà et là des gens qui ne veulent ou ne peuvent ôter leurs yeux de ce brouillard gothique et plus que cimmérien dont nous étions enveloppés, au lieu de les élever à la brillante clarté dusoleil ?  […] Rabelais tire la Vérité de son puits, et la prostitue aux yeux des passants.

2656. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Chamfort. » pp. 539-566

Son œil bleu, souvent froid et couvert dans le repos, lançait l’éclair quand il venait à s’animer. […] On sait qu’arrêté une première fois et menacé de l’être une seconde, il essaya de se tuer dans son appartement à la Bibliothèque, qu’il se manqua, se creva un œil, se déchira sans pouvoir se frapper mortellement.

2657. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre III : Règles relatives à la distinction du normal et du pathologique »

Le bien et le mal n’existent pas à ses yeux. […] Il y a de graves diathèses qui sont indolores, alors que des troubles sans importance, comme ceux qui résultent de l’introduction d’un grain de charbon dans l’œil, causent un véritable supplice.

2658. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Μ. Ε. Renan » pp. 109-147

Ce qui importe, à moi, plus que ces détails, qui, d’ailleurs, passent trop vite sous nos yeux pour que nous puissions constater la valeur de chacun des grains de poussière qui composent cet incroyable tourbillon d’idées religieuses que l’avènement du Christianisme avait fait lever par toute la terre ; ce qui m’importe, à moi, c’est le nombre de ces idées religieuses ! […] Renan et ne sent jamais le grand, parce que le grand ne se sent qu’avec l’âme, l’écrivain n’est jamais, dans son Antechrist, au niveau des choses horriblement grandioses qu’il avait à raconter, et qu’il n’avait pas à diminuer puisque ce ne sont pas des choses chrétiennes… Le Néron que je cherchais dans cet Antechrist, qui est Néron et qui le fût aux yeux des chrétiens de son temps, lesquels avaient plus d’imagination que le détracteur qui leur prend ce nom pour en tirer un livre, Néron est moins terrible, moins extraordinaire et moins frappant sous les phrases trop modernes que M. 

2659. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Octave Feuillet »

Mais on n’y reconnaît plus ici le pinceau qui fit passer devant nos yeux, dans Lélia, le prêtre Magnus et le cardinal Annibal. […] Or, un homme comme lui, s’il est intégral et conséquent, trempé enfin comme il doit l’être, ne peut pas écrire sérieusement le mot d’honneur, vain à ses yeux comme tous les autres… Pour un matérialiste de cette franchise et de ce bloc, pour un athée de cette vigueur, pour un politique de cette ambition, pour un homme qui dit à son fils : « Aie les femmes et gouverne les hommes », l’honneur, dans un temps comme le nôtre, n’existe plus.

2660. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre II. L’âme et le corps »

Parce que des vibrations venues de loin ont impressionné l’œil et l’oreille, se sont transmises au cerveau ; là, dans le cerveau, l’excitation est devenue sensation auditive ou visuelle ; la perception est donc intérieure au corps et ne s’élargit pas. […] Si vraiment mon souvenir visuel d’un objet, par exemple, était une impression laissée par cet objet sur mon cerveau, je n’aurais jamais le souvenir d’un objet, j’en aurais des milliers, j’en aurais des millions ; car l’objet le plus simple et le plus stable change de forme, de dimension, de nuance, selon le point d’où je l’aperçois : à moins donc que je me condamne à une fixité absolue en le regardant, à moins que mon œil s’immobilise dans son orbite, des images innombrables, nullement superposables, se dessineront tour à tour sur ma rétine et se transmettront à mon cerveau.

2661. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Appendice — Mémoires du comte d’Alton-Shée »

Enfin, et c’est là le sens de la légère étude que je voudrais faire, il est à mes yeux l’un des plus frappants exemples du courage et de l’effort qu’il a fallu à un homme entraîné dans sa jeunesse par la fureur de la dissipation et la fièvre du plaisir, pour se ravoir à temps et ressaisir possession de lui, pour devenir un esprit sérieux, conséquent, philosophique, un citoyen convaincu, ferme et inflexible, ayant réfléchi à toutes les grandes questions sociales et s’étant formé sur toutes une opinion radicale sans doute et absolue, mais qui, j’en suis certain, se rapproche fort de ce qui prévaudra dans l’avenir.

2662. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier après les funérailles »

s’il versait longtemps, le prisme heureux des songes, Sur mes yeux éblouis ses éclairs décevants !

2663. (1874) Premiers lundis. Tome I « Espoir et vœu du mouvement littéraire et poétique après la Révolution de 1830. »

Madame de Staël, dès 1796, avait un sentiment profond et consolant de l’humanité libre, de la société régénérée ; elle était poussée vers l’avenir par une sorte d’aspiration vague et confuse, mais puissante ; elle gardait du passé un souvenir triste et intelligent ; mais elle se sentait la force de s’en détacher et de lui dire adieu pour se confier au courant des choses et au mouvement du progrès, sous l’œil de la Providence.

2664. (1823) Racine et Shakspeare « Chapitre II. Le Rire » pp. 28-42

Enfin si l’on veut me faire rire malgré le sérieux profond que me donnent la bourse et la politique, et les haines des partis, il faut que des gens passionnés se trompent, sous mes yeux, d’une manière plaisante, sur le chemin qui les mène au bonheur.

2665. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre I. Les origines du dix-huitième siècle — Chapitre I. Vue générale »

Pour nous en rendre compte, il faut nous remettre sous les yeux les traits généraux de l’une et l’autre époque464.

2666. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XXI. Le littérateur chez les peintres » pp. 269-282

Les visiter n’est point une fatigue : les magasins sont dans le centre, qui les organisent ; les toiles sont en petit nombre, en bon jour, dans des salles aérées ; en même temps l’effort réalisé d’un peintre durant un certain nombre d’années est mis sous les yeux du curieux, qui peut suivre et comprendre l’évolution de l’artiste.

2667. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXII. Machinations des ennemis de Jésus. »

L’œil, du haut du portique, ne mesurait pas le fond du ravin, et il semblait, par suite de l’inclinaison des talus, qu’un abîme s’ouvrît à pic sous le mur 1001.

2668. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VII » pp. 56-69

« Considérez comme il la conduit avec les yeux.

2669. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre V, la Perse et la Grèce »

. — Cambyse voulant, un jour, prouver son adresse à son chambellan Prexaspès, perça son fils, en présence du père, d’un coup de flèche entre les deux yeux.

2670. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — II. La versification, et la rime. » pp. 257-274

Il les représenta se donnant la torture pour un mot, les yeux étincelans, les ongles rongés, faisant mille gestes convulsifs & ridicules pour amener des idées.

2671. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre VIII. Suite du chapitre précédent. De la parole traditionnelle. De la parole écrite. De la lettre. Magistrature de la pensée dans ces trois âges de l’esprit humain » pp. 179-193

Nous avons vu, de nos jours, ce que l’on peut faire avec et contre l’imprimerie, lorsqu’un ministre de la police étend un œil inquisiteur sur toute la scène où s’exerce le mouvement des idées, et peut mettre la pensée en état de blocus continental.

2672. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VIII. Mme Edgar Quinet »

Cette découverte fait jaillir des yeux les larmes du bonheur.

2673. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIII. Mme Swetchine »

Combinaison qui donna au genre de perfection qu’elle avait une nuance très particulière, d’un charme aux âmes, comme le lilas et le rose, composé aussi de deux couleurs, le sont aux yeux.

2674. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La Société française pendant la Révolution »

Grâce à Dieu et pour l’honneur de la France, en 1662 comme, plus tard, en 1789, la société française occupait plus de place dans le pays dont elle était la plus jolie gloire que les quelques pieds de l’Œil de-Bœuf ou les barrières de ce Paris devenu à son tour un Versailles, le Versailles de la Révolution !

2675. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les Kœnigsmark »

Dès qu’elle apparaît, spectre vague, dans son clair obscur ensanglanté, l’Imagination, effarée et rêveuse, s’assied, pour mieux la contempler, la tête dans sa main et l’œil fixe, comme la hagarde Mélancolie que nous a peinte Albert Durer.

2676. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La diplomatie au xviie  siècle »

Et c’est précisément ce qui rend à mes yeux admirable la conduite de Mazarin et de Louis XIV à son égard.

2677. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Quitard »

Eh bien, ce sont ces inconnus, chers à tous les poètes et à tous les généreux, que Quitard ne ressuscite pas, mais qu’il range à nos yeux dans leur mérite anonyme, puisqu’il y a rangé leurs œuvres !

2678. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « César Daly »

À nos yeux, à nous, qui sommes surtout littéraires, et pour qui les idées, dans leur essence poétique ou rationnelle, doivent passer bien avant les formes plastiques qu’on peut leur donner, la Revue générale de l’Architecture a une importance que ne saurait avoir un monument isolé, lequel, après tout, fût-il de génie, ne nous donnerait jamais que des sentiments élevés ou de puissantes sensations.

2679. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Prévost-Paradol » pp. 155-167

Il fut universitaire, lauréat d’Académie et rédacteur du Journal des Débats… J’ai raconté comme il entra dans ce journal, dont l’incroyable influence survit à tout ce qui fit autrefois le mérite incontesté de sa puissance, et qui vous prend le premier venu et, avec deux lignes de rédaction qu’il lui confie, le sacre comme homme de talent aux yeux des sots traditionnels.

2680. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Gustave III »

Eh bien, c’est ce phénomène qui saute aux yeux dans la vie de Gustave III, c’est cet hermaphrodisme de son personnage historique, qu’il eût été intéressant d’étudier et de mettre en valeur dans le récit qu’on eût fait du règne de cet homme qui avait, à la fois, trop et trop peu pour être cette simplicité équilibrée et toute-puissante que l’on appelle un grand homme !

2681. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Vauvenargues » pp. 185-198

Il y aurait perdu une originalité de cœur plus belle à nos yeux que l’originalité du génie.

2682. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVI. M. E. Forgues. Correspondance de Nelson, chez Charpentier » pp. 341-353

Mais Southey, l’épique de beauté menteuse, l’épique de vignette à la tête de ses Œuvres complètes, n’avait ni l’imagination assez grande, ni l’œil assez perçant pour être l’historien de Nelson.

2683. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Henri de L’Épinois » pp. 83-97

Il a résisté à la tentation universelle de peindre tout à propos de tout, qui envahit la plus grande partie des esprits d’une pauvre époque ayant moins de raison que d’yeux… Ce n’est point un peintre d’histoire ; c’est l’homme d’affaires de l’Histoire.

2684. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « A. Grenier » pp. 263-276

Mais le mépris en bloc de ces grands esprits n’était compris que de quelques-uns, tandis qu’après le livre de Grenier il le sera, en détail, par tout le monde, — qui ne croit qu’au détail, qui a besoin qu’on lui mette une multitude de petits faits, toute une poussière de petits faits dans les yeux, pour l’éclairer, en l’en aveuglant !!

2685. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame Du Deffand »

La flamme de ses beaux yeux éteints sembla descendre sur ses lèvres.

2686. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Nelson »

Mais Southey, l’épique de beauté menteuse, l’épique de vignette à la tête de ses Œuvres complètes, n’avait ni l’imagination assez grande, ni l’œil assez perçant pour être l’historien de Nelson.

2687. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Mademoiselle de Condé »

C’en fut fait à jamais pour les yeux… Mais pour la pensée ?

2688. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XV. Vauvenargues »

Il y aurait perdu une originalité de cœur plus belle à nos yeux que l’originalité du génie.

2689. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXXII. L’Internelle Consolacion »

Ces hommes, qui vivaient les yeux au ciel ou baissés sur la poussière de leurs sandales, se souciaient bien de cette bavarderie qu’on appelle la Gloire, et des commérages que l’Avenir devait faire, un jour, sur leur tombeau !

2690. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Léon Aubineau. La Vie du bienheureux mendiant et pèlerin Benoît-Joseph Labre » pp. 361-375

Diogène, avec le manteau d’Antisthène qu’il avait ramassé à la borne et à travers les trous duquel passait l’orgueil qui crevait les yeux de Platon, Diogène ne buvait dans sa main et ne roulait devant lui son tonneau que pour se passer des hommes et être, tout à son aise, outrageusement insolent avec eux ; mais Benoît Labre, qui s’était fait le pauvre errant dont la main n’avait pas honte de se tendre à l’aumône, ressuscitait, par le spectacle de sa misère, la pitié et la charité dans les cœurs… Ce pauvre volontaire de Jésus-Christ, comme il s’appelait lui-même, fut, à ses risques et périls, tout le temps qu’il vécut, une prédication silencieuse, autrement éloquente que la parole des plus éloquents… C’était, continuée, vivante et incessante, la prédication du sublime sermon sur la montagne, — qu’admirait Rousseau, messieurs les philosophes !

2691. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « A. Dumas. La Question du Divorce » pp. 377-390

Nous laissons les singes passer par les cerceaux, les renards éblouir les dindons avec les mouvements de leurs queues, mais nous nous en tenons à l’ordre sacré du seul Pouvoir qui soit à nos yeux infaillible.

2692. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Gustave D’Alaux »

Voilà, selon d’Alaux, l’explication et la clef de ce phénomène, qui s’appelle pour l’heure Faustin Ier, de la tyrannie indurée de cet homme, arrivé au pouvoir en se frottant les yeux, comme l’Éveillé de la comédie, sans parti pris, sans intention que d’imiter Richer, non parce qu’il était le plus intelligent de ces souverains de pas sage, mais parce qu’il était le dernier passé, et qui trouve tout à coup dans sa religion de barbare, dans sa terreur des sorciers et dans son fétichisme méprisé, une initiative qui fait de lui le représentant le plus pur qu’ait jamais eu à Haïti le parti ultra de la réaction africaine !

2693. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Docteur Favrot »

je ne crois pas que dans ce siècle de progrès, qui fait des questions de toutes choses et qui s’imagine être un grand améliorateur du sort des hommes, il y ait question plus importante, plus pressante, plus menaçante, plus épouvantable que celle-là, si nous avions la force virile de regarder fixement dans cet abîme, et si, comme des femmes, nous n’en détournions pas les yeux.

2694. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Gérard Du Boulan »

Mais c’est le titre même de ce livre qui saute aux yeux comme une énigme !

2695. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Lamartine »

Il a décrit les premiers spectacles qu’il eut sous les yeux, et qu’on pourrait appeler les Géorgiques de la maison de son père, où son père, adoré comme un roi : Comptait ses gras troupeaux rentrant des pâturages, comme, plus tard, quand il entra aux Gardes du Corps, sous Louis XVIII, il a écrit les choses du temps de cet Empire qui finissait dans le désespoir et de cette monarchie qui recommençait, pour finir avec son espérance.

2696. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Eugène Sue » pp. 16-26

Eugène Sue, qui a de la couleur et de l’expression pour tout mérite — le fracas des événements dans ses romans les plus vantés n’en étant point un à nos yeux — ne pouvait devenir un homme de style, car on ne le devient pas, on l’est.

2697. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Mm. Jules et Edmond de Goncourt. » pp. 189-201

Ils sont des flâneurs qui regardent et s’enchantent par les yeux.

2698. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Les Mémoires d’une femme de chambre » pp. 309-321

Il a les yeux pleins du jaune de l’envie ; et d’ailleurs il est sensuel au point d’être toujours bêtement hors de lui à la vue du moindre corsage.

2699. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre xi‌ »

  Ce livre est né de la confiance que me témoignent des inconnus, me communiquant chaque jour ce qu’ils admirent, ce qui les émeut et qu’ils croient bon à mettre sous les yeux du public et dans le cœur de la France.

2700. (1773) Essai sur les éloges « Morceaux retranchés à la censure dans l’Essai sur les éloges. »

On traîne l’accusé, chargé de chaînes, jusque dans la maison de campagne du cardinal ; et c’est là, contre toutes les lois du royaume, c’est sous les yeux et dans la maison même de son ennemi, qu’on lui fait son procès.

2701. (1805) Mélanges littéraires [posth.]

Nous avons sous les yeux un ouvrage de cette dernière espèce, intitulé : la défaite du Solécisme par Despautère, représentée plusieurs fois dans un collège de Paris : le chevalier Prétérit, le chevalier Supin, le marquis des Conjugaisons, et d’autres personnages de la même trempe, sont les lieutenants-généraux de Despautère, auquel deux grands princes, Solécisme et Barbarisme, déclarent une guerre mortelle. […] On pourrait conclure de là, que souvent les figures seront nécessaires dans un dictionnaire de langue ; car il est dans les sciences et dans les arts une grande quantité d’objets, même très familiers, dont il est très difficile et souvent presque impossible de donner une définition exacte, sans présenter ces objets aux yeux ; du moins est-il bon de joindre souvent la figure avec la définition, sans quoi la définition sera vague ou difficile à saisir. […] Enfin, la dernière raison de l’impossibilité d’une réforme exacte et rigoureuse de l’orthographe, c’est que si on prenait ce parti, il n’y aurait point de livre qu’on pût lire, tant l’écriture des mots y différerait à l’œil de ce qu’elle est ordinairement. […] On peut remarquer aussi que l’hiatus est permis lorsque l’e muet est précédé d’une voyelle, comme dans immolée à mes yeux ; et que pour lors la voyelle qui précède l’e muet est plus marquée. Immolé à mes yeux n’est pas permis en poésie, et cependant est moins rude que l’autre : nouvelle bizarrerie.

2702. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre III. La Déformation de l’Idéal classique (1720-1801) » pp. 278-387

Mais surtout, dans un temps où l’on jouissait profondément de « la douceur de vivre », on lui était reconnaissant du respect ému, quasi religieux, qu’il professait pour « l’institution sociale » ; des raisons profondes qu’il semblait qu’il eût trouvées pour en placer les titres au-dessus même des lois ; on lui était reconnaissant des perpectives de perfectionnement croissant qu’il ouvrait à ses contemporains ; — et nous, encore aujourd’hui, si cette religion ne suffit pas à nos yeux pour faire l’unité de l’Esprit des lois, elle en fait du moins la noblesse. […] De l’esprit, discours III, ch. 8] ; et quant à Diderot, le vice de « toutes les institutions politiques, civiles et religieuses », est à ses yeux d’avoir « empoisonné l’homme d’une morale contraire à la nature » [Cf.  […] Éloge de Marivaux], Toute cette psychologie si fine, si déliée, si subtile, n’est à leurs yeux que de « la métaphysique », ou autant dire du galimatias. […] Les mots, à leurs yeux, ne sont plus que des signes conventionnels, artificiels, arbitraires ; la phrase n’est plus qu’un « polynôme » qu’on « ordonne » conformément aux règles ; et le style enfin n’est plus pour eux que l’équation de la pensée pure. […] Vois d’un œil sec et froid ses soupirs et ses larmes.

2703. (1920) Action, n° 2, mars 1920

Les deux articles sur la peinture, d’André Thérive et Roger Allard (contributeur de La Nouvelle Revue française, et l’un des seuls à trouver grâce aux yeux de Florent Fels) sont accompagnés d’abondantes illustrations qui ponctuent la revue. […] André Thérive se révèle opposé au cubisme, trop intellectuel, et promeut le compromis entre sensation et construction que représente par excellence à ses yeux la peinture de Derain. […] Il est allé au Lapin agile, c’est vrai, comme nous tous, mais au milieu de quelle détresse, et en portant quelle charge de soucis et quels trésors dans ses yeux, distraits et sa pensée indomptable. […] C’est une corvée écrasante : elle vous courbe le dos, vous obscurcit les yeux, vous brise l’estomac et les côtes.

2704. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — [Introduction] » pp. 132-142

Aussi il me semble, pour dire toute ma pensée, que si, après ces frappants exemples de Sénèque, de Pline, du Dialogue des orateurs, il était arrivé plus vite à Bacon, à Descartes, à Pascal, à ces grands textes modernes qui dominent la question et qui sont comme le péristyle de son sujet, la façade se serait dégagée aux yeux avec plus d’avantage, tandis que chez lui on a un peu l’inconvénient du portail de Saint-Gervais avant qu’on y eût abattu les maisons et élargi la place.

2705. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « quelque temps après avoir parlé de casanova, et en abordant le livre des « pèlerins polonais » de mickiewicz. » pp. 512-524

L’art qui médite, qui édifie, qui vit en lui-même et dans son œuvre, l’art peut se représenter aux yeux par quelque château antique et vénérable que baigne un fleuve, par un monastère sur la rive, par un rocher immobile et majestueux ; mais, de chacun de ces rochers ou de ces châteaux, la vue, bien qu’immense, ne va pas à tous les autres points, et beaucoup de ces nobles monuments, de ces merveilleux paysages, s’ignorent en quelque sorte les uns les autres ; or la critique, dont la loi est la mobilité et la succession, circule comme le fleuve à leur base, les entoure, les baigne, les réfléchit dans ses eaux, et transporte avec facilité, de l’un à l’autre, le voyageur qui les veut connaître.

2706. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre IV »

Personne ne sait où tourner les yeux pour trouver un guide. « On n’aperçoit pas un homme qui puisse répondre pour le plus petit district ; et, bien plus, on n’en voit pas un qui puisse répondre d’un autre homme794. » La débandade est complète et sans remède.

2707. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre VII. Narrations. — Dialogues. — Dissertations. »

Il faut en montrer l’unité, et tirer, pour ainsi dire, d’une seule source, tous les principaux événements qui en dépendent : par là il instruit utilement son lecteur, il lui donne le plaisir de prévoir, il l’intéresse, il lui met sous les yeux un système des affaires de chaque temps, il lui débrouille ce qui en doit résulter, il le fait raisonner sans lui faire aucun raisonnement, il lui épargne beaucoup de redites ; il ne le laisse jamais languir, il lui fait même une narration facile à retenir par la liaison des faits… « Un sec et triste faiseur d’annales ne connaît point d’autre ordre que celui de la chronologie : il répète un fait toutes les fois qu’il a besoin de raconter ce qui tient à ce fait ; il n’ose ni avancer ni reculer aucune narration.

2708. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XXIV. Conférence sur la conférence » pp. 291-305

Demain j’y retournerai. » La phrase a trop servi, et maintenant la jeune femme répond à son seigneur inquiet de ses yeux fatigués : « Je n’ai pas cessé de courir de Faguet à la Sorbonne, à du Bled chez la duchesse, et à Vanor chez Bodinier, sans trouver la nuance d’âme que je cherchais ; je recommencerai demain. » Je remercie les auditrices, loyales celles-là ou momentanément inoccupées, qui aujourd’hui sont venues en personne entendre moquer leur prétendu passe-temps favori.

2709. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXV. Mort de Jésus. »

Marie Cléophas, Marie de Magdala, Jeanne, femme de Khouza, Salomé, d’autres encore, se tenaient à une certaine distance 1181 et ne le quittaient pas des yeux 1182.

2710. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Rousseau, et Joseph Saurin. » pp. 28-46

Rousseau fut contraint, en 1740, de quitter une seconde fois Paris, les larmes aux yeux & le poignard dans le cœur.

2711. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre III : Le problème religieux »

C’est ce fait qu’on a toujours eu devant les yeux quand on s’est représenté le christianisme comme devant céder la place à son tour soit à une nouvelle religion, soit à la philosophie elle-même.

2712. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 10, continuation des preuves qui montrent que les anciens écrivoient en notes la déclamation » pp. 154-173

Nous avons vû, dit-il, introduire sur la scéne, à la place de la musique simple et grave, des pieces de Noevius et de Livius Andronicus une musique si pétulante, que les acteurs, pour suivre la mesure, sont obligez de s’agiter, de faire des roulemens d’yeux et des contorsions de tête, en un mot, de se démener comme des forcenez.

2713. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VIII »

Donc, forcément, les célèbres protestations sont insignifiantes, comme vous trouvez si judicieusement, sans remarquer toutefois la contradiction des deux adjectifs. »‌ J’ai beau écarquiller les yeux, je ne vois point là de contradiction.

2714. (1757) Réflexions sur le goût

Faute de suivre cette méthode, l’imagination échauffée par quelques beautés du premier ordre dans un ouvrage, monstrueux d’ailleurs, fermera bientôt les yeux sur les endroits faibles, transformera les défauts même en beautés, et nous conduira par degrés à cet enthousiasme froid et stupide qui ne sent rien à force d’admirer tout ; espèce de paralysie de l’esprit, qui nous rend indignes et incapables de goûter les beautés réelles.

2715. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IV. Mme Émile de Girardin »

C’est de la causerie qui passe par les yeux au lieu de passer par les oreilles, mais c’est toujours de la causerie, et voilà pourquoi des lettres sont toujours, plus que les livres, la vie vraie de l’esprit, son jaillissement de source, sa veine ouverte !

2716. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre X. Mme A. Craven »

Ni la critique, ni le monde qui sait lire ne seront dupés de ces couronnes qui tombent peut-être jusque les yeux de Mme Craven et qui l’empêchent de se voir et de se juger.

2717. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIV. L’auteur de Robert Emmet »

« Ça n’est pas écrit avec une plume d’aigle, me dit-elle, mais avec une plume de pie, et de pie qui n’a plus ses deux yeux ! 

2718. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Tallemant des Réaux »

Grâce à cet homme, qui pêche des anecdotes comme on pêche des anguilles, jusque dans la vase, un esprit politique n’aurait-il pas, au moins, indiqué le mal de ce temps qu’on prend pour une époque de force et de virilité, et qui n’offre aux yeux fascinés que la ruine suspendue d’une société dont la tête va tout à l’heure porter contre le fond de l’abîme, mais qui, jusque-là, trouve doux de tomber ?

2719. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Louis XIV. Quinze ans de règne »

Ils discernent bien la faute politique, qu’ils cherchent incessamment « à grand renfort de besicles », comme dirait Rabelais, mais s’ils avaient l’œil plus perçant et l’aile plus robuste, s’ils remontaient d’un cran plus haut que cette politique dans laquelle ils se prennent les pieds, ce qui se détache en faute pour eux rentrerait dans le tissu des nécessités de l’histoire, dont les rois sont bien les tisserands, disait Philippe II, mais à qui Dieu fournit le fil.

2720. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes de la Révolution » pp. 73-87

La plupart des portraits qu’il contient et qui passent sous nos yeux, nous les avons vus déjà dans d’autres panneaux, et il est aisé de les reconnaître.

2721. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Femme au XVIIIe siècle » pp. 309-323

Ils abordèrent le roman contemporain ; mais ils y portèrent des yeux accoutumés à regarder les petites choses du xviiie  siècle et à tenir compte des moindres détails de cette société de dessus de porte et de trumeau.

2722. (1880) Goethe et Diderot « Introduction »

Le coup de pistolet de Werther fit partir un feu de file de coups de pistolet du même genre parmi toutes ces cervelles allemandes, qui, d’ailleurs, n’avaient pas grand’chose à brûler… Un succès comme celui de Werther ne se recommence pas ; mais, après ce coup de pistolet qui attira sur Gœthe l’œil de l’Allemagne, sa gloire était déjà fixée, et elle ne cessa de s’étendre démesurément jusqu’à sa plus extrême vieillesse et sans avoir plus de rides que l’inaltérable beauté de Ninon.

2723. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVII. Mémoires du duc de Luynes, publiés par MM. Dussieux et Soulier » pp. 355-368

Selon moi, il est évident qu’il n’y a place que pour des atomes dans cet œil, mal conformé pour recevoir l’image des choses grandes, et qu’il lui serait impossible de voir autrement qu’il n’a commencé.

2724. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Eugène Pelletan » pp. 203-217

Il en a fait un homme politique, un de ces cuisiniers de révolutions et de gouvernements impossibles, qui empoisonnent la France depuis près d’un siècle… Le journalisme, qui, si l’on n’y prend garde, donne de si mauvaises habitudes à la pensée, a donné à Pelletan tous les défauts qui sautent aux yeux dans son nouveau livre : l’inconsistance, la frivolité, les passions de parti et leurs faux jugements et leurs injustices, et surtout cette terrible et misérable faculté de se monter la tête, de suer à froid, comme disait Beaumarchais, en parlant des avocats, ces journalistes du bec comme les journalistes sont les avocats de la plume, et de se faire illusion à soi-même pour mieux faire illusion aux autres.

2725. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Alexis de Tocqueville »

Il est vrai que Sainte-Beuve, cet homme des « coteaux modérés », doit aimer la modération en toutes choses et peut prendre pour de la poésie ce qui n’en est pas à des yeux plus exigeants que les siens.

2726. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Hoffmann »

À ses yeux, le mérite d’Hoffmann, la preuve de son génie, c’est ce qu’il y a d’inexprimé et d’inexprimable dans ses écrits.

2727. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « G.-A. Lawrence »

L’homme qu’il a offensé (le frère de sa bien-aimée) le soufflette avec son gant, et, quoiqu’il soit à l’heure de mourir, le Samson anglais n’a pas la tête tondue par Dalila, ni les yeux crevés par les Philistins.

2728. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Byron »

Taine, mais j’ai aussi mon petit œil de poudre de physiologie, et je sens qu’il m’est impossible d’accepter le don juanisme de Byron.

2729. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VII. Vera »

Mettons pour Hegel, qui est le plus fort de tous ces Allemands, mettons quelque chose comme quatre-vingts à cent ans d’influence malsaine sur le monde, quelque chose comme la beauté de Ninon qui, vieille, fit des conquêtes, jusqu’à l’épée dans le ventre, car on se tua pour ses beaux vieux yeux chargés de tant d’iniquités.

2730. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIII. Pascal »

Quoiqu’il y ait là de bien grandes images qui frappent le front, les yeux et l’esprit comme une main, ce qui est plus beau que l’image encore, l’image, d’un physique si puissant, c’est l’accent, l’intime accent.

2731. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XX. M. de Montalembert »

Si la vue de l’auteur des Moines d’Occident s’élève ou si son style s’avise de briller, c’est qu’un autre que lui regarde par son œil et écrit par sa main !

2732. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXVIII. M. Flourens »

Flourens et Fontenelle, un rapport qui saute aux yeux, malgré et à travers toutes les différences de philosophie, de sentiment et de destinée, qui existent entre le Secrétaire perpétuel de l’Académie des Sciences du dix-huitième siècle et le Secrétaire perpétuel de l’Académie des Sciences d’aujourd’hui, et ce rapport, c’est l’incomparable diaphanéité de leur Exposition à tous deux.

2733. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « A. P. Floquet »

Destiné à un bonheur immuable, aux pompes triomphantes et joyeuses de Versailles et de Saint-Germain, Bossuet, cet homme à la vertu robuste, qui ne devait connaître ni nos passions ni nos douleurs, ce cœur vierge qui n’avait soif et convoitise que du salut des âmes, ce front pur à force de hauteur, cet œil d’aigle qui ne voyait que Dieu dans les choses humaines, s’accomplissait alors jusque dans le fond le plus intime de son génie.

2734. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Guizot »

J’ai été dupe une fois de plus de ce nom de Guizot, qui papillote encore à l’œil dans la lumière de ce temps, et qui en est, je crois bien, à son dernier papillotage.

2735. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Ernest Hello »

Le dénouement de ce drame psychologique qui vient s’accomplir à l’œil nu, a fait nommer ce sombre conte du mot de Dieu au premier fratricide, mais quel est ce dénouement, au moins aussi étrangement ingénieux et formidable que celui de Ludovic ?

2736. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « José-Maria de Heredia »

Là, au milieu d’un cercle de figures farouches, brigands de la Sierra, contrebandiers, bravaches, vauriens, dont les yeux ardents l’enveloppent de leurs effluves, quelque fringante fille, mal vêtue de haillons éclatants, se cambre dans une pose hardie.

2737. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « La Fontaine »

Et enfin, puisqu’il est descriptif, La Fontaine, l’originalité du paysagiste, quand, en France, de son temps, il n’y en avait pas encore un seul dans la littérature, et que Fénelon nous donnait (dans son Télémaque) une nature souvenue et tirée des Anciens… Eh bien, disons-le, à travers toutes ces originalités différentes, qu’on retrouve quand on les y cherche dans le génie décomposé de La Fontaine, la meilleure à mes yeux et la plus étonnante, celle qui le fait le mieux ce phénix de La Fontaine, celle qui complète le mieux toutes ses puissances par un charme vainqueur de tout, c’est la bonhomie, c’est cet accent de bonhomie qui se mêle à tous les détails de son œuvre, — et je n’entends pas ici que les Fables, mais les Contes !

2738. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Laurent Pichat »

Rien de ce qui peu dure            Rien de ce qui cherche les yeux !

2739. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Jean Richepin »

Dans sa Madame André, il relève, sous des formes littéraires à lui, de Chamfort, de Stendhal et de Mérimée, ces yeux qui n’ont jamais pleuré, ces bouches qui n’ont jamais ri !

2740. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Malot et M. Erckmann-Chatrian » pp. 253-266

Dans les contes terribles qui suivent, en queue de singe, L’Illustre Docteur Mathéus ; L’Œil invisible, Le Requiem du Corbeau et La Tresse noire, il n’a pas non plus la sinistre fascination de cet égaré d’Edgar Poë et sa solennité mystérieuse, et c’est ainsi qu’il n’est ni l’un ni l’autre, mais qu’il est pourtant tous les deux.

2741. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Armand Pommier » pp. 267-279

Dans sa Madame Gil Blas, où j’ai noté pourtant une scène très-belle, d’un tragique très-nouveau, inspirée par la physiologie (c’est un duel, horrible d’acharnement et de longueur, entre deux rivaux, au bord du lit d’une cataleptique, qu’ils croient morte, et qui, rigide, les voit, lus comprend, seul les coups qu’ils se portent et ne peut faire un cri, un geste, un mouvement de paupière pour les empêcher de se massacrer sous ses yeux ouverts, immobiles, marbrifiés par la catalepsie !

2742. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « G.-A. Lawrence » pp. 353-366

L’homme qu’il a offensé (le frère de sa bien-aimée) le soufflette avec son gant, et, quoiqu’il soit à l’heure de mourir, le Samson anglais n’a pas la tête tondue par Dalila, ni les yeux crevés par les Philistins.

2743. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Introduction »

* ** On comprend à présent ce qui constitue à nos yeux le problème purement sociologique des idées égalitaire : nous ne recherchons méthodiquement, parmi les conditions de leur succès, que celles qui se trouvent dans le champ des formes sociales.

2744. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIX. Panégyriques ou éloges composés par l’empereur Julien. »

Tel est un autre endroit sur l’utilité de mettre de bonne heure un jeune prince en action ; de familiariser et ses yeux et son âme avec les périls, les combats, les peuples et les armées ; de lui faire connaître par lui-même, dans son empire, la situation des lieux, l’étendue des pays, la puissance des nations, la population des villes, le caractère des peuples, leur force, leur pauvreté, leur richesse.

2745. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXIV. Siècles de barbarie. Renaissance des lettres. Éloges composés en latin moderne, dans le seizième et le dix-septième siècles. »

Qu’on imagine un pays couvert autrefois de villes florissantes, mais renversées par des secousses et des tremblements de terre, et un peuple entier assoupi sur ces ruines, au bout de mille ans s’éveillant tout à coup comme par enchantement, ouvrant les yeux, parcourant les ruines d’un pas incertain, et fouillant à l’envi dans les décombres, pour en arracher ou imiter tout ce qui a pu échapper au temps : tels parurent les Européens dans cette époque.

2746. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXX. De Fléchier. »

Supposez l’homme dont parle Lucrèce, et qui, des bords de la mer, contemple un vaisseau qui fait naufrage, et suit de l’œil les mouvements de tant de malheureux qui périssent : si ce tableau a porté le trouble et l’agitation dans son âme ; si ses entrailles se sont émues ; si au moment où le vaisseau s’est enfoncé, il a senti ses cheveux se dresser d’horreur sur sa tête ; en peignant à d’autres le spectacle terrible dont il a été le témoin, cherchera-t-il à le relever par des oppositions et des contrastes étudiés ?

2747. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXV. Avenir de la poésie lyrique. »

N’avons-nous pas sous les yeux aujourd’hui même le gage de cette vérité consolante ?

2748. (1911) Psychologie de l’invention (2e éd.) pp. 1-184

Imiter l’antique, à la Renaissance, c’était presque inventer ; traduire l’œuvre d’un Latin ou d’un Grec, c’était, aux yeux des contemporains, faire œuvre originale. […] En certains cas l’histoire d’une œuvre tourne pour ainsi dire autour d’une invention principale qui attire les yeux tout d’abord et à laquelle les autres viennent seulement se subordonner. […] Je l’embrasse ensuite d’un seul coup d’œil, comme un beau tableau ou un joli garçon ; ce n’est pas successivement, dans le détail de ses parties, comme cela doit arriver plus tard, mais c’est tout entière dans son ensemble que mon imagination me la fait entendre. […] Certains dessins d’enfants, par exemple, représentent des maisons dont l’intérieur et l’extérieur sont également visibles ; on voit des hommes plus grands que leurs habitations, un œil de face dans une figure de profil, incohérence longtemps conservée sur les monnaies d’Athènes, etc. […] Voir des chefs-d’œuvre dans son esprit, les contempler, les rendre parfaits par les yeux du cerveau, et quand on veut les réaliser sur la toile, les sentir s’évanouir et devenir intraduisibles !

2749. (1930) Physiologie de la critique pp. 7-243

Et si l’ombre de Brunetière nous regarde d’un œil torve, nous lui ferons observer, pour la rasséréner, que tous les genres ont évolué ainsi, et qu’ils vont tous de la parole à l’écriture. […] Et quand on signale seulement les faiblesses et les misères de cette critique, ce que ne manquent pas de faire les deux autres critiques rivales, c’est qu’on ferme précisément les yeux sur cette multiplicité. […] * * * William Shakespeare passe aux yeux des critiques professionnels pour une œuvre entièrement insane. […] Le goût timide et circonspect tourne sans cesse les yeux autour de lui ; il ne hasarde rien, il veut plaire à tous, il est le fruit des siècles et des travaux successifs des hommes. » En d’autres termes, le goût ne s’exerce que sur ce qui est, sur les œuvres réalisées. […] Il n’arrive jamais, absolument jamais, qu’un artiste de génie ait devant les yeux, avant d’avoir créé une œuvre, le modèle de cette œuvre.

2750. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre III. L’Âge moderne (1801-1875) » pp. 388-524

Mais, pour le moment, en vrais fils qu’ils sont de la génération précédente, ils ne se soucient que du libre exercice de leur « faculté pensante », et le Dieu « rémunérateur et vengeur » de Voltaire n’est lui-même à leurs yeux qu’une hypothèse dont se passent très bien la mécanique céleste ou la fabrication du sucre de betteraves. […] Ils ont eu besoin également d’un vocabulaire plus étendu : Quand, tâchant de comprendre et de juger, j’ouvris Les yeux sur la nature et sur l’art ; l’idiome, Peuple et noblesse, était l’image du royaume ; La poésie était la monarchie, un mot Était un duc et pair ou n’était qu’un grimaud ; et de ce que Victor Hugo dit dans ces vers célèbres, on en a vu plus haut la raison. […] Sortons de nous-mêmes, et ouvrons les yeux ! […] Un fait n’est à ses yeux qu’un fait : il le constate et n’en juge point. […] Jeanne la Rousse] dans l’expression des sentiments forts ; — et surtout d’élévation. — Il a aussi manqué de générosité ; — et bien loin qu’il ait élevé la Chanson jusqu’à la hauteur de l’Ode ; — c’est au contraire le triomphe de l’Ode ; — et généralement du lyrisme romantique ; — qui nous a ouvert les yeux sur le « prosaïsme » des Chansons de Béranger.

2751. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 13, qu’il est probable que les causes physiques ont aussi leur part aux progrès surprenans des arts et des lettres » pp. 145-236

Tournons les yeux présentement sur ce qui s’est passé en France, par rapport à la poësie comme à la peinture. […] Il sembloit que les yeux des artisans, jusques-là fermez, se fussent ouverts par quelque miracle. […] Les statuës et les bas-reliefs antiques, dont Raphaël et ses contemporains sçavoient si bien profiter, avoient été devant les yeux de leurs dévanciers, qui n’en avoient sçû faire usage.

2752. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « Remarques finales. Mécanique et mystique »

Il est comparable à celui des insectes en ce qu’il implique deux organisations, deux systèmes indivisibles de qualités (dont certaines seraient des défauts aux yeux du moraliste) : nous optons pour l’un ou pour l’autre système, non pas en détail, comme il arriverait s’il s’agissait de contracter des habitudes, mais d’un seul coup, de façon kaléidoscopique, ainsi qu’il doit résulter d’un dimorphisme naturel, tout à fait comparable à celui de l’embryon qui a le choix entre les deux sexes. […] Mais cette frénésie même ne devrait-elle pas nous ouvrir les yeux ? […] Supposons qu’une lueur de ce monde inconnu nous arrive, visible aux yeux du corps.

2753. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. VILLEMAIN. » pp. 358-396

Des applaudissements inextinguibles solennisèrent ce moment, où tant de jeunes yeux brillaient d’étincelles et de larmes ; c’était aussi un serment de liberté et d’avenir. […] J’ai souvenir de quelques promenades d’alors et de bien des discours sensés, fleuris, mélancoliques un peu, car il était triste, par ses yeux souffrants encore, par les désirs contrariés d’un bonheur qu’il a depuis trouvé dans le mariage, par les circonstances publiques enfin.

2754. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Jouffroy »

» L’amphithéâtre glorieux encadrant le pays de Vaud, le miroir du Léman, dans un coin la Savoie rabaissée au pied du Mont-Blanc sublime ; cet ensemble solennel que la plume, quand l’œil n’a pas vu, n’a pas le droit de décrire ; la vapeur et les rayons du matin s’y jouant et luttant en mille manières, voilà ce qui l’assaillit d’abord et le stupéfia. […] Chacun, en se souvenant bien, chacun a eu de la sorte son Sinaï dans sa jeunesse, sa mystérieuse montagne où la destinée s’est comme offerte aux yeux, mieux éclairée seulement qu’elle ne le sera jamais depuis.

2755. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIVe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Elle leva les yeux, elle les promena lentement sur ces portiques, morts eux-mêmes depuis tant d’années, et qui avaient vu tant mourir. […] Nous inclinâmes sur l’oreiller la femme arrivée au repos ; elle pencha la tête ; quelques boucles de ses cheveux déroulés tombaient sur son front ; ses yeux étaient fermés, la nuit éternelle était descendue.

2756. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 février 1885. »

Je n’ai qu’à fermer les yeux pour le revoir, en ma mémoire, ainsi que je l’ai vu, le béret de velours noir sur ses cheveux d’argent lisse, en veston de satin noir, sa tête de géant, énorme et fine, dominant sa taille ramassée qu’elle grandissait. […] Il y reparaît plus tard ; il trouve moyen, sous l’habit d’un fou, de tromper tous les yeux et de renouer ses liaisons avec Iseult.

2757. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 décembre 1886. »

Un jour, il avait pris un saumon, et il le mangeait au bord de l’eau, les yeux à moitié fermés, quand Loke le tua d’un coup de pierre … » Rheidmar, irrité de la mort de son fils, force les Ases (les dieux), comme rançon d’Ottur, de remplir d’Or rouge la peau de la loutre, et ensuite de la couvrir d’or. […] Tel est le vivant mais grossier épisode qui est devenu, dans Rheingold, la belle scène du rachat de Freia, avec ce cri si touchant de Fasolt : « Je vois encore briller l’œil de la douce déesse ! 

2758. (1881) La psychologie anglaise contemporaine «  M. Georges Lewes — Chapitre II : La Psychologie »

Lewes, qu’un animal décapité est privé des divers stimulus qu’il peut recevoir par les yeux, les oreilles, l’odorat, lesquels déterminent des mouvements ; il reste donc nécessairement en repos, à moins d’être excité par des sensations viscérales. […] Si je me laisse aller à la rêverie, je puis bien m’imaginer errer dans les rues de Bagdad ou de Bassora ; mais en ouvrant les yeux, je me retrouve dans mon cabinet et je suis ramené bien vite à la réalité.

2759. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Ernest Feydeau » pp. 106-143

il y a encore un comte de Grammont, l’oncle de la jeune fille, Fontenelle-dandy qui finit par glisser dans le dévouement et qui se fait tuer, par honneur du monde, pour sa nièce ; vrai d’inconséquence, ayant l’intérêt d’une larme retrouvée dans un œil qu’on croyait séché ; d’ailleurs sans profondeur aucune, et tout le temps qu’il est égoïste, très-facile à peindre, dans l’égoïsme universel qui pose, sous tant de faces, devant nous. […] Il avait tout décrit avec cette minutie d’observation qui détache tout et qui ne fond rien, et qui finit par nous faire entrer l’objet dans l’œil avec tous ses ongles, pour nous le faire voir.

2760. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre VI. L’espace-temps à quatre dimensions »

Je sais bien que ce mouvement ne compte pas, à vos yeux. […] Nous voyons ainsi se constituer sous nos yeux, l’espace ramassant du temps et le temps ramassant de l’espace, l’invariance de la différence équation pour toutes les vitesses attribuées au système.

2761. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie militaire du général comte Friant, par le comte Friant, son fils » pp. 56-68

Auparavant, dans la campagne d’Italie, il avait combattu dans la division de Bernadotte sous les yeux du général Bonaparte et avait pris une belle part à toute la seconde moitié de cette immortelle campagne (1797). — Les lettres qui lui sont adressées par le général Bernadotte à cette date et depuis, sont écrites encore du style républicain et sur le pied d’égalité.

2762. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire de la littérature française, par M. D. Nisard. Tome iv. » pp. 207-218

Je l’ai dit, l’histoire littéraire à ses yeux est une construction de l’esprit ; elle est un monument de la pensée.

2763. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Waterloo, par M. Thiers (suite) »

J’aime la vérité assurément et la réalité franche, je le répète assez souvent ; je sais même surmonter un dégoût pour arriver au plus profond des choses, au plus vrai de la nature humaine ; mais je m’arrête là où l’inutilité saute aux yeux et où la puérilité commence.

2764. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Dübner »

« Remercions aussi l’artiste distingué dont le ciseau a si bien servi cette pensée d’amitié et de justice, et a su figurer à nos yeux l’image et l’esprit de notre ami dans une composition heureuse.

2765. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, Les Feuilles d'automne, (1831) »

À la verte confiance de la première jeunesse, à la croyance ardente, à la virginale prière d’une âme stoïque et chrétienne, à la mystique idolâtrie pour un seul être voilé, aux pleurs faciles, aux paroles fermes, retenues et nettement dessinées dans leur contour comme un profil d’énergique adolescent, ont succédé ici un sentiment amèrement vrai du néant des choses, un inexprimable adieu à la jeunesse qui s’enfuit, aux grâces enchantées que rien ne répare ; la paternité à la place de l’amour ; des grâces nouvelles, bruyantes, enfantines, qui courent devant les yeux, mais qui aussi font monter les soucis au front et pencher tristement l’âme paternelle ; des pleurs (si l’on peut encore pleurer), des pleurs dans la voix plutôt qu’au bord des paupières, et désormais le cri des entrailles au lieu des soupirs du cœur ; plus de prière pour soi ou à peine, car on n’oserait, et d’ailleurs on ne croit plus que confusément ; des vertiges, si l’on rêve ; des abîmes, si l’on s’abandonne ; l’horizon qui s’est rembruni à mesure qu’on a gravi ; une sorte d’affaissement, même dans la résignation, qui semble donner gain de cause à la fatalité ; déjà les paroles pressées, nombreuses, qu’on dirait tomber de la bouche du vieillard assis qui raconte, et dans les tons, dans les rhythmes pourtant, mille variétés, mille fleurs, mille adresses concises et viriles à travers lesquelles les doigts se jouent comme par habitude, sans que la gravité de la plainte fondamentale en soit altérée.

2766. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « FLÉCHIER (Mémoires sur les Grands-Jours tenus à Clermont en 1665-1666, publiés par M. Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont.) » pp. 104-118

Sa physionomie n’impose pas et ne promet pas au premier coup d’œil tout ce qu’il vaut ; mais on peut remarquer dans ses yeux et sur son visage je ne sais quoi qui répond de son esprit et de sa probité.

2767. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres publiées par M. J. Sabbatier. Tome Ier, 1845. » pp. 154-168

Sabbatier, comme faisant éclair dans ce noir tableau, les seuls écrivains orthodoxes qui trouvent grâce à ses yeux, ce sont MM.

2768. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Des soirées littéraires ou les poètes entre eux »

Fuyant ces brutales révolutions militaires qui bouleversaient la Grèce après Alexandre, on les vit se blottir, en quelque sorte, sous l’aile pacifique des Ptolémées ; et là ils fleurirent, ils brillèrent aux yeux les uns des autres ; ils se composèrent en pléiade.

2769. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. Victor Vousin. Cours de l’histoire de la philosophie moderne, 5 vol. ix-18. »

Cousin, c’est bien moins encore le fond des doctrines sur lesquelles un esprit naturellement sceptique comme le mien se sent peu en mesure de prononcer, que le talent même dont chacun peut se convaincre, et dont l’empreinte brille à mes yeux tout d’abord.

2770. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — III »

Cependant si, au lieu de faire abstraction de mes sens extérieurs, pour ne me servir que de mes sens intérieurs ; si, ouvrant les yeux et remuant la main, je me vois et je me touche dans toutes les régions de mon corps, depuis les cheveux de ma tête jusqu’aux ongles de mon pied, je sens très bien alors que partout sous mon doigt qui se promène, le moi s’éveille et répond ; et si je pouvais atteindre au-delà de la surface cutanée aux organes eux-mêmes, le moi s’y ferait également sentir par une sensation distincte, comme il arrive d’ailleurs en mainte circonstance, lorsque la digestion s’exécute péniblement, lorsqu’un calcul se forme dans le rein, lorsqu’un tubercule se développe dans le poumon.

2771. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XV. De l’imagination des Anglais dans leurs poésies et leurs romans » pp. 307-323

Vérité, bonté, honneur, tendresse, amour, les plus riches bienfaits de l’indulgence du ciel leur sont accordés ; et près d’eux bientôt s’élève leur postérité souriante : la fleur de l’enfance s’épanouit sous leurs yeux, et chaque jour qui s’écoule développe une nouvelle grâce.

2772. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre IV. L’écrivain (suite) »

Sont-ce des vers que vous lisez ici ou un tableau que vous avez sous les yeux, mieux qu’un tableau, puisque le sentiment y est avec les couleurs ?

2773. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Ernest Renan, le Prêtre de Némi. »

Mais d’autres causes encore ont contribué à obscurcir sa foi aux yeux des gens superficiels.

2774. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XI. Il Convitato di pietra (le Convié de pierre) » pp. 191-208

Jetant les yeux sur son maître évanoui dans les bras de la jolie villageoise, il dit : “Si je retombe dans la mer, je souhaite de me sauver sur une barque pareille.”

2775. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Je vous donne à deviner ce qui s’appelait, en ce temps-là, tour à tour, « une bibliothèque vivante où l’on apprend tout sans peine et sans étude ; une salle de musiciens où l’on entend les plus savants concerts ; un théâtre magnifique où tout ce qui frappe les yeux étonne l’esprit et glace la voix ; une école toute céleste où les esprits, de quelque étage qu’ils soient, peuvent, en y arrivant, s’élever à tous moments, et, par l’approche et la communication d’un corps lumineux, acquérir tous les jours des clartés nouvelles ; un parterre orné de fleurs de toutes les couleurs ; un corps qui marche à frais communs et à pas égaux vers l’immortalité ; le sanctuaire et la famille des Muses ; une si haute région d’esprit, que l’on en perd la pensée, comme, quand on est dans un air trop élevé, on perd la respiration. » C’est l’Académie française à qui s’adressaient ces louanges à la fois si énigmatiques et si outrées, dans des discours de réception où les nouveaux élus se donnaient toute cette peine pour ne pas se dire simplement reconnaissants.

2776. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XII. L’antinomie morale » pp. 253-269

C’est simplement, au fond, lui laisser les yeux pour pleurer.

2777. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre V. L’Analyse et la Physique. »

Qui nous a appris à connaître les analogies véritables, profondes, celles que les yeux ne voient pas et que la raison devine ?

2778. (1882) Qu’est-ce qu’une nation ? « II »

Au XIe siècle, l’œil le plus pénétrant n’eût pas saisi des deux côtés du canal la plus légère différence.

2779. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXIII » pp. 378-393

Je me consume de chagrins et de veilles, je sèche à vue d’œil, et j’ai des vapeurs mélancoliques. » Cette lettre fournit matière à réflexion.

2780. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VIII. Quelques étrangères »

La beauté sérieuse de Don Quichotte fut longtemps méconnue ; le ridicule de Madame Bovary finira par frapper tous les yeux.

2781. (1899) Esthétique de la langue française « Le vers populaire  »

Que mon cœur l’est d’amour… Ces vers ne sont strictement rimés que par hasard : Vous avez pâle mine, Je vois à vos jolis yeux bleus Que l’amour vous domine, L’assonance remplace la rime.

2782. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre II. Le dix-neuvième siècle »

Aux yeux des nains, des avortons, des astèques, des myrmidons et des pygmées, à jamais noués dans le rachitisme, la croissance est apostasie.

2783. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — M. de Voltaire, et M. de Maupertuis. » pp. 73-93

On ne put s’empêcher de rire du portrait « d’un vieux capitaine de cavalerie travesti en philosophe, marchant en raison composée de l’air, distrait & de l’air précipité ; l’œil rond & petit, la perruque de même ; le nez écrasé ; la physionomie mauvaise, ayant le visage plein, & l’esprit plein de lui-même ».

2784. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre IV. La folie et les lésions du cerveau »

Il saute aux yeux que les différences qui distinguent ces quatre types sont toutes psychologiques et non physiologiques.

2785. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre VII. Le langage et le cerveau »

Il s’ensuivrait que nous parlons à gauche, ce qui est une assertion très singulière, et surtout contraire à cette loi affirmée par tous les physiologistes, à savoir que les deux hémisphères, comme les deux yeux ou les deux oreilles, ont identiquement les mêmes fonctions et se suppléent mutuellement.

2786. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre premier. Astronomie et Mathématiques. »

« Notre connaissance, dit-il, étant resserrée dans des bornes si étroites, comme je l’ai montré, pour mieux voir l’état présent de notre esprit, il ne sera peut-être pas inutile… de prendre connaissance de notre ignorance, qui… peut servir beaucoup à terminer les disputes… si, après avoir découvert jusqu’où nous avons des idées claires… nous ne nous engageons pas dans cet abîme de ténèbres (où nos yeux nous sont entièrement inutiles, et où nos facultés ne sauraient nous faire apercevoir quoi que ce soit), entêtés de cette folle pensée que rien n’est au-dessus de notre compréhension 153. » Enfin, on sait que Newton, dégoûté de l’étude des mathématiques, fut plusieurs années sans vouloir en entendre parler ; et de nos jours même, Gibbon, qui fut si longtemps l’apôtre des idées nouvelles, a écrit : « Les sciences exactes nous ont accoutumés à dédaigner l’évidence morale, si féconde en belles sensations, et qui est faite pour déterminer les opinions et les actions de notre vie. » En effet, plusieurs personnes ont pensé que la science entre les mains de l’homme dessèche le cœur, désenchante la nature, mène les esprits faibles à l’athéisme, et de l’athéisme au crime ; que les beaux-arts, au contraire, rendent nos jours merveilleux, attendrissent nos âmes, nous font pleins de foi envers la Divinité, et conduisent par la religion à la pratique des vertus.

2787. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre VIII. Des romans. » pp. 244-264

Le Marquis de Roselle est un jeune homme abandonné à lui-même, mais chéri d’une sœur vertueuse qui a les yeux ouverts sur sa conduite, & qui par ses sages conseils lui épargne des travers & les malheurs, suite de ces travers.

2788. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 2, de la musique rithmique » pp. 20-41

Mais comme nous n’avons plus sous les yeux la chose dont il est question, il ne nous est plus bien facile de concevoir ce que S.

2789. (1860) Ceci n’est pas un livre « Mosaïque » pp. 147-175

Sturm, — alourdie tout à l’heure par l’abus du parallélogramme et du trapèze, se transformait soudain : les yeux prenaient de l’esprit, la bouche de la finesse.

2790. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XX. Mme Gustave Haller »

On avait vu un œil, comme dans l’entrevoile d’une Péruvienne.

2791. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXIV. Mme Claire de Chandeneux »

On n’a eu que la peine de l’y porter, — et les premiers jours qu’on l’y a vue, elle y a été regardée avec l’œil rond d’une foule badaude, qui fait une plaisanterie morne et puis, qui s’en va… Le vieux xixe  siècle, — car le voilà vieux, — ressemble au vieux célibataire, qui souffre qu’une femme soit tout chez lui et s’y permette tout.

2792. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La Chine »

Elle est donc toujours un mystère… non pas un simple mystère à ténèbres dans lesquelles l’œil cherche sans voir, mais un mystère à éblouissements qui brise la lumière sous les feux luttants des contradictions… Avec un pareil peuple, qui semble échapper au jugement même, avec ce sphinx retors qui a remplacé l’énigme par le mensonge et auprès de qui tous les sphinx de l’Egypte sont des niais à la lèvre pendante, n’y a-t-il pas toujours moyen, si on ne met pas la main sur le flambeau de la vérité, de faire partir, en frottant son esprit contre tant de récits, les allumettes du paradoxe, et d’agir ainsi, fût-ce en la déconcertant, sur l’Imagination prévenue, qui s’attend à tout, excepté à l’ennui, quand on lui parle de la Chine et des Chinois ?

2793. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « L’idolâtrie au théâtre »

Et, en effet, pour être juste il faut le reconnaître, l’amour du théâtre parmi nous n’est pas seulement le plaisir matériel des spectacles, le pain des yeux, le vin des sens, cher à tout peuple devenu intellectuellement une populace, et qui demande ses circenses.

2794. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Odysse Barot »

Les grands esprits que je viens de nommer ne sont à ses yeux que les pierres d’attente d’une littérature plus grande que la leur, parce qu’elle sera plus pratique et plus politique, et qu’elle servira davantage à l’émancipation définitive de l’humanité.

2795. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le colonel Ardant du Picq »

Ils tirent l’œil et l’âme.

2796. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Louis Vian » pp. 373-387

Il tirait aussi bien à l’œil de Philippe, comme l’archer d’Amphipolis, qu’au talon d’Achille comme Pâris, — au talon de ces choses qui pouvaient encore, dans ce temps-là, se croire immortelles !

2797. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Les Césars »

C’était un observateur, un critique, un liseur intrépide, un antiquaire, un érudit, un dilettante de vieux textes, qui avait fourré l’œil et la main dans les historiens, dans les poètes, dans les légistes (les légistes, les vrais historiens de ce peuple romain, de ce peuple de procureurs !)

2798. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « L’Angleterre depuis l’avènement de Jacques II »

Peut-être viendra-t-il un jour où Jacques II apparaîtra enfin, aux yeux mêmes de ses ennemis, ce qu’il fut réellement dans l’Histoire, — une conscience.

2799. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Jacques Cœur et Charles VII »

On y reconnaît la même physionomie attentive, pénétrante, volontaire, aux yeux soucieux et tristes.

2800. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Histoire des Pyrénées »

Or, en supposant que cette chambre noire du cerveau d’un homme fonctionnât mieux que les machines sorties de ses mains, par cela seul qu’il resterait astreint au coup de timbre fatal de la chronologie l’historien des faits ne nous en montrerait jamais que la fourmilière, plus ou moins fortement groupée, ou la procession éternelle, défilant plus ou moins rapidement sous nos yeux.

2801. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes et la société au temps d’Auguste » pp. 293-307

Ces élégants ou fastueux traîneurs de robes et de toges, ces dandys à la ceinture lâche, qui comprenaient probablement l’histoire comme Blaze de Bury, étaient trop artistes, trop préoccupés de l’effet esthétique dans leurs œuvres, pour se perdre en ces chicanes minutieuses où s’usent des milliers d’yeux et d’esprits modernes… La Critique historique, telle que l’esprit moderne la conçoit et l’exige, était inconnue au temps de Tacite et de Suétone, qui se tirent de toute chose douteuse avec un mot ou deux : Rumor ou ut referunt, dits de très haut, et passent… Esprits superbes, qui n’insistent pas, qui ne s’attachent pas à un texte.

2802. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Papesse Jeanne » pp. 325-340

Mais, fusillée ainsi depuis des siècles, et restée debout, martyre immortelle, l’Église catholique répond aux coups par les tranquilles rayons qu’elle envoie dans les yeux de ceux qui la frappent, et qui, pour les éviter, voudraient maintenant la retourner contre le mur et la fusiller par derrière comme un otage !

2803. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « IV. M. Henri Martin. Histoire de France » pp. 97-110

Probablement métempsychosiste comme le sont ses maîtres, mais avec discrétion et n’ayant pas besoin de l’être expressément dans une Histoire de France, de manière à troubler le Jean Jeannot de lecteur qui ne demande qu’à grignoter sa petite touffe de thym historique ; ne lâchant le mot « transformation » qu’avec prudence, mais le risquant parfois, comme une petite lumière pour les yeux prévenus et fidèles, qui savent bien ce que veut dire cette petite lueur, M. 

2804. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XI. MM. Mignet et Pichot. Charles Quint, son abdication, son séjour et sa mort au monastère de Yuste. — Charles V, chronique de sa vie intérieure dans le cloître de Yuste » pp. 267-281

Sublime, — ou atroce, si l’on veut, ce qui n’empêche pas d’être sublime, — telle était, en fait, l’Espagne du xvie  siècle, et l’histoire, dont la plume est, dit-on, de fer, ne doit-elle pas savoir la regarder avec des yeux impassibles ?

2805. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. H. Wallon » pp. 51-66

— un grand homme, et peut-être le plus grand des hommes, lui sauter aux yeux.

2806. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Michelet » pp. 259-274

II Ce christianisme involontaire de Michelet, qui saute aux yeux s’ils sont attentifs, ce sentiment contradictoire à sa parole, avait toujours frappé les miens ; mais je l’avais tu, de son vivant.

2807. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Émile de Girardin » pp. 45-61

Μ. de Girardin observe comme les hommes à système, qui ont leur idée sur les yeux ; et quant à son style… Qui osera dire que c’est un style (littérairement), que ce hachis de mouton de Dindenaud socialiste servi depuis vingt-cinq ans dans La Presse ?

2808. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Horace Walpole »

Narcisse mécontent, qui disait du mal de sa figure avec coquetterie… « Squelette je suis né, — disait-il, — squelette je suis, et la mort ne me changera pas… » Ce squelette, il l’enveloppait dans un costume complet couleur de lavande, la veste, avec un mince filet d’argent ou de soie blanche, brodée au tambour, des bas de soie œil de perdrix, des boucles d’or, des manchettes et un jabot de dentelles, ce qui, pour un squelette, n’est pas trop mal !

2809. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIX. M. Eugène Pelletan »

Pelletan, lequel, par parenthèse, est bien pittoresque et a le sang bien chaud pour être un métaphysicien, un œil retourné en dedans, comme disait l’abbé Morellet, avec une spirituelle exactitude, pose des lois absolues qu’il tire de tout ce qu’il y a de moins absolu au monde, l’analogie ; l’analogie, cette fille trompeuse de l’imagination, qui a si souvent donné le vertige aux plus fermés observateurs !

2810. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Lacordaire. Conférences de Notre-Dame de Paris » pp. 313-328

J’ai entendu nier la carrure de sa tête, la force doctorale qui est en lui, parce que cette force ne se montre pas assez nue, assez décharnée, assez seule pour qu’on la voie : aux yeux des esprits superficiels ou raccourcis, l’indigence d’une faculté étant le meilleur repoussoir d’une autre.

2811. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « E. Caro »

Il est bien évident que le spirituel critique des trois philosophes ses confrères, y voit très clair, malgré les yeux qu’il baisse devant leurs splendeurs !

2812. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Achille du Clésieux »

La poésie passe aujourd’hui par les yeux, — le plus sensuel des organes.

2813. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « André Chénier »

IV Et, en effet, l’imitation, l’émotion, l’inspiration, le ressouvenir d’André sautent aux yeux dans le sonneur d’airain de 1830.

2814. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Hector de Saint-Maur »

Tout près, dans l’angle obscur de l’étable rustique, — Jadis le presbytère, — une vache au poil roux Vous regarde passer d’un œil profond et doux, Et l’on songe à la crèche, à Jésus, — c’est mystique.

2815. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Édouard Gourdon et Antoine Gandon » pp. 79-94

ce n’était donc pas une vaine affectation que l’incurable mélancolie de Chateaubriand dont se moquait Beyle, aussi triste que lui pourtant, puisque j’en retrouve la désespérance fatiguée dans les yeux de ce ferme soldat, à la martiale candeur et à la tonique ignorance.

2816. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Xavier Aubryet et Albéric Second » pp. 255-270

C’est un esprit acéré de toutes les manières, qui porte à la tête comme le syringa, et aux yeux comme des paillettes d’acier ou les facettes du diamant.

2817. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Honoré de Balzac » pp. 1-15

Poitou a relevées dans quelques fragments épars de La Comédie humaine, ne viennent guères que de sa propre manière de regarder, et à ces contradictions, qui sont le résultat d’une faiblesse d’yeux, impuissants à embrasser un ensemble et une perspective, le critique ajouté ses contradictions et ses titubations à lui-même.

2818. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Jules De La Madenène » pp. 173-187

Si pour bien voir il faut avoir le regard pur, qui l’eut jamais plus essuyé de toute écume, et de toute ombre, colère, mépris, terreur, pessimisme quelconque, que cet observateur, aux yeux clairs, qui traduit toujours son observation avec une expression de la même clarté que son regard ?

2819. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Prosper Mérimée. » pp. 323-336

, de quelques mots illyriens, pris au hasard dans le dictionnaire, n’est pas plus un mystificateur sérieux que Stendhal, quand il signait ses articles du plus fin acier : COTONNET… Du reste, cette ressemblance avec Stendhal, qui saute aux yeux quand on lit M. 

2820. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Francis Wey »

Il y a du bandeau et des yeux baissés jusque dans les moindres choses de ces lettres… Pour cette jeune terrible de sœur Saint-Gatien, Christian n’est jamais que cette personne, et ce trait, à lui tout seul, est un éclair !

2821. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre IV. »

Sur le sommet des mâts un nuage s’est arrêté tout droit, signe de la tempête ; puis vient la terreur qui suit un danger subit. » Quelquefois encore, ces restes brisés de la couronne du poëte grec ne sont que des traits rapides et simples, une parole délicate et passionnée, un coup de pinceau qui ne s’oublie pas52 : La jeune fille triomphait, tenant à la main une branche de myrte et une fleur de rosier ; et ses cheveux épars lui couvraient le visage et le col » ; ou bien encore, avec moins de simplicité, cette autre peinture qui rappelle celle de Sapho : « Semblable passion d’amour, pénétrant au cœur, répandit un nuage épais sur les yeux et déroba l’âme attendrie. » Horace, dans sa vive étude des Grecs, avait sans doute gardé bien d’autres souvenirs d’Archiloque ; et quelques-unes de ses odes, son dithyrambe à Bacchus et d’autres, ne doivent être qu’une étude d’art et de goût substituée au tumulte des anciennes orgies, où le poëte de Paros se mêlait, en chantant : « Le cerveau foudroyé par le vin, je sais combien il est beau d’entonner le dithyrambe, mélodie du roi Bacchus. » Archiloque, s’il faisait des hymnes, devait être, ce semble, le poëte lyrique des Furies et non des Dieux.

2822. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE VIGNY (Servitude et Grandeur militaires.) » pp. 52-90

Presque toutes les belles comparaisons, qui à chaque pas émaillent le poëme d’Éloa, pourraient se détourner sans effort et s’appliquer à la muse de M. de Vigny elle-même, — et la villageoise qui se mire au puits de la montagne et s’y voit couronnée d’étoiles, — et la forme ossianesque sous laquelle apparaît vaguement d’abord l’archange ténébreux, — et la vierge voltigeante qui n’ose redescendre, comme une perdrix en peine sur les blés où l’œil du chien d’arrêt flamboie, — et la nageuse surprise, fuyant à reculons dans les roseaux ; mais surtout rien ne peindrait mieux cette muse dans ce qu’elle a de joli, de coquet, comme dans ce qu’elle a de grand, que l’image du colibri étincelant et fin au milieu des lianes gigantesques ou dans les vastes savanes sous l’azur illimité. […] Je vous écris les larmes aux yeux, et ne sais vraiment quel éloge littéraire vous donner.

2823. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre I. Les chansons de geste »

Ils ont vécu, ce Raoul qui, se faisant adjuger par le roi Louis l’héritage de Herbert de Vermandois, envahit le pays qu’il veut posséder, saccage et brûle, un vendredi saint, la ville d’Origny, avec son monastère et ses nonnes, qu’il promettait tout à l’heure d’épargner, qui, tout échauffé de cette atroce exécution, tout joyeux et de grand appétit, n’ose manger de la viande, quand son sénéchal en se signant lui remémore qu’« il est carême » ; ce Bernier, écuyer de Raoul, fils d’un des quatre fils de Herbert, qui, fidèle à la loi féodale, suit son maître contre son frère et ses oncles, voit sa mère brûlée sous ses yeux dans le monastère où elle s’est retirée, et renonce seulement son hommage quand Raoul, échauffe par le vin, l’a à demi assommé pour avoir trop haut regretté l’incendie de son pays et la mort de sa mère. […] A travers la diffusion banale et molle de ce style, qui du moins ne tire pas l’œil et se laisse oublier, la vraie et primitive épopée transparaît.

2824. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre II. Le quinzième siècle (1420-1515) »

Henri Baude est parfois étonnant d’audace naturaliste, dans sa manière sobre et mordante, où il détache d’un mot sec et saisissant la réalité qu’il veut montrer : et Dieu sait sur quelles réalités tombe son œil implacable d’observateur et de peintre ! […] Une impartiale étude fait éclater à nos yeux que la Renaissance a tout recréé, tout sauvé, loin de rien étouffer ou empêcher de naître.

2825. (1894) Propos de littérature « Chapitre IV » pp. 69-110

Les vers que voici montrent ce défaut adventice ; ils sont en même temps un bon paradigme des quelques combinaisons d’harmonies auxquelles se prête ce poète : Viens dans les calmes eaux laver tes mains coupables Et ton manteau froissé de vents et d’orages Et les yeux remplis du sable Des routes d’ombre et des plages Interminables à tes voyages Des terres de folie au pays des sages Où l’eau terne languit en âges de sommeil Parmi les arbres grêles et sous de pâles ciels. […] L’exemple suivant indique assez nettement le mélange des mesures et des rythmes ; et il contient, ce qui importe davantage, une exquise vision printanière : Des oiseaux sont venus te dire Que je te guettais sous les lilas mauves, Car tu rougis en un sourire Et cachas tes yeux en tes boucles fauves Et te pris à rire.

2826. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Première leçon »

Si, en contemplant les phénomènes, nous ne les rattachions point immédiatement à quelques principes, non seulement il nous serait impossible de combiner ces observations isolées, et, par conséquent, d’en tirer aucun fruit, mais nous serions même entièrement incapables de les retenir, et, le plus souvent, les faits resteraient inaperçus sous nos yeux. […] À cela les physiologistes ont objecté avec raison que, si c’était comme images qu’agissaient les impressions lumineuses, il faudrait un autre œil pour les regarder.

2827. (1828) Préface des Études françaises et étrangères pp. -

Il faut espérer que la Comédie Française ouvrira enfin les yeux. […] Parce qu’une partition semble obscure à des yeux peu exercés, elle n’en sera pas moins belle à l’oreille quand elle sera exécutée avec un sentiment juste.

2828. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — I » pp. 93-106

M. de Kergorlay (pour une raison ou pour une autre) se contentait d’être le dépositaire et le critique intelligent des idées de celui qu’il admirait sans le flatter ; en écoutant la suite des confidences et des épanchements de M. de Tocqueville, celui-ci se définira de lui-même à nos yeux.

2829. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre V. Indices et germes d’un art nouveau — Chapitre II. Signes de la prochaine transformation »

Nous n’en douterons pas si nous ramassons sous nos yeux tous les indices de renouvellement prochain que la littérature et la société nous présentent.

2830. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre IV. Le théâtre des Gelosi » pp. 59-79

L’acteur chargé de réciter le prologue indiquait ordinairement aux spectateurs la ville et les monuments qu’ils avaient devant leurs yeux : « Cette cité pour aujourd’hui sera Ferrare, et ce fleuve que vous apercevez sera le célèbre Pô.

2831. (1890) L’avenir de la science « Préface »

Un œil sagace, en l’an 300 de notre ère, aurait pu voir que le christianisme ne finirait pas ; mais il aurait dû voir que le monde ne finirait pas non plus, que la société humaine adapterait le christianisme à ses besoins et, d’une croyance destructive au premier chef, ferait un calmant, une machine essentiellement conservatrice.

2832. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Avertissement sur la seconde édition. » pp. 23-54

Nous avons vu en même temps, par son moyen, d’heureuses révolutions s’opérer dans les esprits ; les Adorateurs du faux goût rendre hommage au véritable, & murmurer contre l’Ecole qui les avoit égarés ; des Sectateurs de l’impiété ouvrir les yeux sur la supercherie de leurs oracles, & détester leurs dogmes corrupteurs ; des Zélateurs de la Philosophie abjurer ses chimeres & convenir de ses dangers ; des Philosophies même rendre secrétement justice à notre zele, & nous faire de singulieres confidences sur les motifs de leurs engagemens dans la Secte qu’ils paroissoient favoriser.

2833. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Cours de littérature dramatique, par M. Saint-Marc Girardin. (2 vol.) Essais de littérature et de morale, par le même. (2 vol.) » pp. 7-19

Tant d’éclairs m’éblouissent ; je cherche une lumière douce qui soulage mes faibles yeux.

2834. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « De la question des théâtres et du Théâtre-Français en particulier. » pp. 35-48

Un théâtre offre aux yeux en même temps qu’aux oreilles quelque chose de vif, de sensible, d’immédiat ; il peut en résulter des conséquences telles, que les pouvoirs publics aient à y intervenir à chaque instant, comme on a le droit d’éteindre un incendie.

2835. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — IV »

Si nous ne les voyons pas changer, si, en raison de leur durée, elles assument à nos yeux un caractère d’éternité, et nous masquent, sous l’apparence de la loi, l’acte arbitraire qui leur donna naissance, c’est parce qu’en raison de leur utilité fondamentale, au point de vue de la connaissance, l’esprit exerce à leur profit, avec une ténacité extraordinaire, le pouvoir d’arrêt dont il dispose.

2836. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre V. Les âmes »

L’étendue du possible est en quelque sorte sous vos yeux.

2837. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre V. Les esprits et les masses »

La salle est comble, la vaste multitude regarde, écoute, aime, toutes les consciences émues jettent dehors leur feu intérieur, tous les yeux éclairent, la grosse bête à mille têtes est là, la Mob de Burke, la Plebs de Tite-Live, la Fex urbis de Cicéron, elle caresse le beau, elle lui sourit avec la grâce d’une femme, elle est très finement littéraire ; rien n’égal les délicatesses de ce monstre.

2838. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre dixième. »

Ce perroquet qui crève les yeux au fils du roi ; ce roi qui va pérorer le perroquet perché sur le haut d’un pin ; cela n’est pas d’un goût bien exquis.

2839. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 34, que la réputation d’un systême de philosophie peut être détruite, que celle d’un poëme ne sçauroit l’être » pp. 489-511

Quand nous remarquons des défauts dans un livre reconnu generalement pour un livre excellent, il ne faut donc pas penser que nous soïons les premiers dont les yeux aïent été ouverts.

2840. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 35, de l’idée que ceux qui n’entendent point les écrits des anciens dans les originaux, s’en doivent former » pp. 512-533

Quand même nous en aurions pleine connoissance, il se trouveroit que par des raisons que je vais exposer, nous n’aurions pas pour ces choses le même goût qu’avoient les romains, et l’image qui remet sous nos yeux ces mêmes choses, ne peut nous affecter comme elle affectoit les romains.

2841. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre I : Qu’est-ce qu’un fait social ? »

Quand on regarde les faits tels qu’ils sont et tels qu’ils ont toujours été, il saute aux yeux que toute éducation consiste dans un effort continu pour imposer à l’enfant des manières de voir, de sentir et d’agir auxquelles il ne serait pas spontanément arrivé.

2842. (1860) Ceci n’est pas un livre « Décentralisation et décentralisateurs » pp. 77-106

Mais l’œil de la Vierge brille, mais son regard parle, mais on voit courir un sang rouge dans ses veines5. » Et c’est la plus belle — parce que rien n’est beau comme la vie.

2843. (1912) L’art de lire « Chapitre II. Les livres d’idées »

Il est arrivé qu’à lire et à relire La Rochefoucauld, La Rochefoucauld s’est transformé sous nos yeux.

2844. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXII. La comtesse Guiccioli »

C’est l’arc-en-ciel à fixer qui est sur le gouffre ; l’arc-en-ciel qui attire la main après l’œil ; qui s’en joue et qui la désespère !

2845. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Buloz »

mais dont il reste toujours quelque chose aux yeux des hommes, tellement adorateurs du succès qu’ils en respectent le spectre encore.

2846. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VIII. M. de Chalambert. Histoire de la Ligue sous le règne de Henri III et de Henri IV, ou Quinze ans de l’histoire de France » pp. 195-211

Cherchant aujourd’hui le droit dans le fait à propos de la Ligue qui l’avait trouvé dans le ciel, et en face de la race nouvelle érigée sur les débris des races anciennes parmi nous, il aurait proclamé l’arrêt suprême et vu ce que tout le monde sans exception verrait pour le moment en France, si la pitié pour les victimes n’attendrissait le jugement contre les coupables, et si quelques gouttes du sang de martyr de Louis XVI ne nous étaient entrées dans les yeux pour nous retomber sur le cœur !

2847. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Fustel de Coulanges » pp. 15-32

C’est, en effet, la destinée des écrivains plus forts que leur temps, de lui faire retourner la tête vers une œuvre qu’il n’avait pas vue, quoiqu’elle fût sous ses yeux.

2848. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VIII. Du mysticisme et de Saint-Martin »

Lui, dont les yeux sont fins et sûrs, n’a-t-il pas senti que, s’il les avait fixés profondément sur ce qui n’est pas seulement une distinction nominale, faite par la haute sagesse gouvernementale de l’Église, il n’aurait pu s’empêcher de voir, se détachant du fond commun des idées et des phénomènes imputés au Mysticisme, pris dans son acception la plus générale et la plus confuse, un autre mysticisme, ayant ses caractères très déterminés ; l’éclatante réalité, enfin, qui contient la vérité intégrale que la Religion seule met sous les mains de nos esprits, mais dont la Philosophie les détourne ?

2849. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Marie Desylles » pp. 323-339

Pour la faire plus femme encore, l’amour l’a faite une enfant… « Mettez votre cœur dans vos yeux, et donnez-les-moi », dit-elle avec la suave câlinerie de l’enfance.

2850. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Conclusion »

Mais la vérité est que nous apercevons ce moi toutes les fois que, par un vigoureux effort de réflexion, nous détachons les yeux de l’ombre qui nous suit pour rentrer en nous-mêmes.

2851. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre X. Des Romains ; de leurs éloges, du temps de la république ; de Cicéron. »

Leurs artistes même, en les accoutumant à porter un œil plus attentif sur la nature pour bien juger, et du degré d’imitation, et du choix des objets, contribuèrent peut-être à étendre les idées de ce peuple et son langage ; mais les Romains, pendant près de six cents ans, furent privés de tous ces secours.

2852. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXI. De Thémiste, orateur de Constantinople, et des panégyriques qu’il composa en l’honneur de six empereurs. »

Ton œil perçant sait découvrir et rendre inutiles les profondeurs de cet art funeste et caché… Non, désormais je ne craindrai pas les ennemis domestiques plus que les barbares même.

2853. (1923) Les dates et les œuvres. Symbolisme et poésie scientifique

Francis Viélé-Griffin, et qu’il a douée d’un mouvement ondulatoire très particulier donnant à l’oreille une sensation analogue à celle qu’éprouve l’œil à voir, sous la peau, le jeu remuant des muscles. […] Mais l’objurgation ne l’a pas ému, et c’est en souriant qu’il tourne vers moi une large face embuée d’un sang visiblement riche et dans laquelle le front, les yeux, le nez et tous les traits crient puissamment : « Je suis de la famille, vous savez, vous !  […] Ce bon public, Il a pour Moréas les yeux de René Ghil ; Il a pour René Ghil les yeux de Moréas comme tout Paris, autrefois, avait pour Rodrigue les yeux de Chimène. » (xixe  siècle, 20 Février). […] Sur la matité de sa chair serrée et polie au grain dur de marbre, de fines moustaches noires tranchaient  le front casqué d’épais cheveux en brosse, et, derrière le lorgnon, des yeux fiers. […] Rappelons ce qu’écrivait des Fleurs du mal Leconte de Lisle : « Tout concorde à l’effet produit, laissant dans l’oreille exercée comme une vibration multiple savamment combinée de métaux sonores et précieux, et dans les yeux, de splendides couleurs ».

2854. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre II. De la reconnaissance des images. La mémoire et le cerveau »

On faisait apparaître à leurs yeux, pendant quelques secondes, une série de lettres qu’on leur demandait de retenir. […] Dans un cas étudié par Wilbrand 21, la malade pouvait, les yeux fermés, décrire la ville qu’elle habitait et s’y promener en imagination : une fois dans la rue, tout lui semblait nouveau ; elle ne reconnaissait rien et n’arrivait pas à s’orienter. […] Pour apprendre un exercice physique, nous commençons par imiter le mouvement dans son ensemble, tel que nos yeux nous le montrent du dehors, tel que nous avons cru le voir s’exécuter.

2855. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE LONGUEVILLE » pp. 322-357

Mme de Motteville va plus loin : elle nous décrit, même après cet accident, cette beauté qui consistait plus dans certaines nuances incomparables du teint160 que dans la perfection des traits, ces yeux moins grands que doux et brillants, d’un bleu admirable, pareil à celui des turquoises ; et les cheveux blonds argentés, qui accompagnaient à profusion ces merveilles, semblaient d’un ange. […] Un jour, à Moulins, au milieu d’une lecture de piété, « il se tira (c’est elle-même qui parle) comme un rideau de devant les yeux de mon esprit : tous les charmes de la vérité rassemblés sous un seul objet se présentèrent devant moi ; la foi, qui avoit demeuré comme morte et ensevelie sous mes passions, se renouvela ; je me trouvai comme une personne qui, après un long sommeil où elle a songé qu’elle étoit grande, heureuse, honorée et estimée de tout le monde, se réveille tout d’un coup, et se trouve chargée de chaînes, percée de plaies, abattue de langueur et renfermée dans une prison obscure. » Après dix mois de séjour à Moulins, elle fut rejointe par le duc de Longueville, qui l’emmena avec toutes sortes d’égards dans son gouvernement de Normandie.

2856. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre III. Pascal »

Nous sommes emprisonnés dans notre univers, et de cet univers même nous ne pouvons saisir toute l’infinité : « quelque apparence du milieu des choses », voilà le connaissable, voilà la science ; mais les substances, les causes, les principes nous échappent, pendant que se déroulent sous nos yeux des séries de phénomènes qui jamais ne commencent et jamais ne finissent. […] Plutôt que de se reposer béatement, comme tant de savants, dans la science des « apparences », puisque la raison ne lui permettait rien de plus, Pascal a tourné ses yeux d’un autre côté : il a cherché s’il n’y avait pas ailleurs une source de vérité, mais de vérité totale et certaine ; il l’a trouvée, et il est allé demander à la foi une connaissance supérieure à celle que procure la raison.

2857. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VII. La littérature et les conditions économiques » pp. 157-190

Puis, à la fin, que tout le monde obtienne ce qu’il désire ; que la constance inébranlable des héros soit récompensée  ; que tout se termine par des noces et des chansons ; que le lecteur puisse, comme dans un conte de fées, conclure par la formule consacrée : « Ils furent heureux et eurent beaucoup d’enfants. » Voilà comment, dans la seconde moitié du xviiie  siècle on fait un roman pastoral, et, si vous en doutiez, relisez l’œuvre de ce sentimental capitaine de dragons qui s’est appelé M. de Florian, C’est les yeux fixés sur son Estelle que je viens de décrire ce monde enchanté. […] Déjà, en 1833, Hégésippe Moreau, dans sa pièce intitulée L’Hiver, lançait à l’égoïsme des riches un flot de malédictions et de prédictions sinistres : Des hommes que la faim moissonne par millions, En se comptant des yeux, disent : Si nous voulions !

2858. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « IV »

Ils ont pu siffler, hurler, jeter des pierres, sous l’œil serein de la police et à la stupéfaction des honnêtes gens. […] Mais ce qui soulève le cœur de dégoût, ce qui met aux yeux des larmes de colère, c’est le blasphème prononcé, le drapeau souillé par des mains indignes, toutes les choses nobles et grandes profanées par une poignée d’agitateurs.

2859. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

Il n’est pas étonnant que de si hautes séductions agissent sur les intelligences d’élite et les attirent vers ces sujets nouveaux, si grands et toujours grandissants à mesure que l’on s’en approche, semblables à ces montagnes qui paraissent s’élever devant les yeux du voyageur, à mesure qu’elles s’abaissent sous ses pas. […] À vrai dire, ce projet demeura pendant toute la vie de l’auteur de Faust, comme durant la courte vie d’André Chénier, placé devant ses yeux comme un idéal à réaliser.

2860. (1920) Action, n° 3, avril 1920, Extraits

La présentation de l’œuvre dada est toujours pleine de goût pour l’œil, qu’il s’agisse des tableaux aux couleurs charmantes, très mode, ou des livres et revues toujours délicieusement mis en pages, selon des ordonnances de catalogues de parfumerie. […] Ecrire quatre pages sur les mathématiques en les qualifiant de jeunes vierges n’est pas la preuve d’une insignifiante personnalité, envoyer Dieu écorcher un adolescent dans un « lupanar » et faire raconter cette « atrocité » par un cheveu oublié ne serait peut-être pas venu à l’esprit de Leconte de Lisle, mais n’importe quel gilet-rouge français, avant 1830, avait employé Satan à arracher les yeux d’un nombre long de pâles jeunes filles, et écouté leur âme bianchissime lamenter cette abusive exophtalmie, Lautréamont, le premier, raya Satan et âme, et écrivit au-dessus Dieu et cheveu.

2861. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Bossuet. Œuvres complètes publiées d’après les imprimés et les manuscrits originaux, par M. Lachat »

Pareil orateur ne veut pas être regardé avec des yeux myopes.

2862. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Le Brun »

j’atteste les Cieux que j’ai voulu le croire, J’ai voulu démentir et mes yeux et l’histoire ; Mais non : il n’est pas vrai que les cœurs excellents Soient les seuls en effet où germent les talents.

2863. (1875) Premiers lundis. Tome III « Sur le sénatus-consulte »

vous n’avez rien gagné auprès des hommes considérables du passé : et ces hommes, tout évincés et déchus qu’ils sont, ont encore leur clientèle ; ils recrutent de jeunes partisans : vous avez contre vous et d’une façon si déclarée qu’on n’y peut fermer les yeux, vous avez contre vous l’Académie française : « Ah !

2864. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VIII. De l’éloquence » pp. 563-585

Jetez les yeux sur une foule nombreuse ; combien de fois ne vous arrive-t-il pas de rencontrer des traits dont l’expression amie, dont la douceur, dont la bonté vous présagent une âme encore ignorée, qui entendrait la vôtre, et céderait à vos sentiments !

2865. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre II. De l’ambition. »

Mais l’ambitieux, privé du pouvoir, ne vit plus qu’à ses propres yeux : il a joué, il a perdu ; telle est l’histoire de sa vie.

2866. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre VII. Induction et déduction. — Diverses causes des faux raisonnements »

Là, par l’exemple d’Henriette d’Angleterre, ici par un développement tout général et spéculatif, il donne la même leçon, grande et utile : « Ô mort… toi seule nous convaincs de notre bassesse, toi seule nous fais connaître notre dignité ; … tu lui apprends (à l’homme) ces deux vérités, qui lui ouvrent les yeux pour se bien connaître : qu’il est infiniment méprisable, en tant qu’il passe ; et infiniment estimable, en tant qu’il aboutit à l’éternité. » Vous pouvez donc, quoi que vous ayez à démontrer, ou bien chercher dans l’étude des faits historiques ou naturels la preuve expérimentale de ce que vous voulez établir, ou bien chercher dans l’analyse de la question quelque principe évident par lui-même ou antérieurement prouvé, dont la vérité débattue dépende par une conséquence nécessaire.

2867. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre II. La critique »

Étalant à nos yeux son ample collection de petits faits significatifs, il a encore ici fait jouer ses trois forces, race, milieu, moment, avec une étonnante vigueur d’imagination philosophique : quelques erreurs dans l’estimation des sources, de violents partis pris dans l’interprétation de l’enchaînement des faits, ne diminuent pas la solidité de l’œuvre, ni surtout sa richesse suggestive867 Taine est un des grands esprits de ce siècle : il a eu au suprême degré l’intelligence et la volonté.

2868. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « III. Quelques mots sur l’explication de textes »

Ils lisent en eux-mêmes, alors qu’ils croient lire l’auteur qu’ils ont sous les yeux.

2869. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lamartine, Alphonse de (1790-1869) »

Le Lac, quoique la langue en ait vieilli par endroits, me paraît un absolu chef-d’œuvre ; et, pour l’unité, la simplicité, l’émotion, l’emporte à mes yeux sur la Tristesse d’Olympio et le Souvenir.

2870. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre III. La commedia dell’arte en France » pp. 31-58

Quand je m’aperçois de leur intention, la colère gronde en moi ; ma chair, mes nerfs, mes os se tendent ; mon sang tourbillonne dans les veines ; mon visage s’obscurcit comme le ciel en temps d’orage ; mon poil, mes cils se dressent comme des piques ; mes yeux roulent dans leurs gonds sous les arcades sourcilières ; mon nez se méduse ; ma bouche se cerbérise ; mon cou se lestrigonne ; ma main se panthérise ; toute la machine enfin se gonfle, écume, fait un bruit terrible, retentissant de caverne en caverne… LE PÉDANT.

2871. (1863) Molière et la comédie italienne « Textes et documents » pp. 353-376

Le recueil de Flaminio Scala met sous nos yeux une partie de leur répertoire.

2872. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre V. L’antinomie esthétique » pp. 109-129

Aux yeux du moraliste, au contraire, l’idée de beauté est une idée suspecte, sinon franchement immorale. — Pourquoi immorale ?

2873. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VI. Jean-Baptiste  Voyage de Jésus vers Jean et son séjour au désert de Judée  Il adopte le baptême de Jean. »

Ces relations tendirent plutôt à faire dévier de sa voie le jeune prophète de Nazareth ; mais elles lui suggérèrent plusieurs accessoires importants de son institution religieuse, et en tout cas elles fournirent à ses disciples une très forte autorité pour recommander leur maître aux yeux d’une certaine classe de Juifs.

2874. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VIII. Jésus à Capharnahum. »

Le monothéisme enlève toute aptitude à comprendre les religions païennes ; le musulman jeté dans les pays polythéistes semble n’avoir pas d’yeux.

2875. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XV. Commencement de la légende de Jésus  Idée qu’il a lui-même de son rôle surnaturel. »

Peut-être un œil sagace eût-il su reconnaître dès lors le germe des récits qui devaient lui attribuer une naissance surnaturelle, soit en vertu de cette idée, fort répandue dans l’antiquité, que l’homme hors ligne ne peut être né des relations ordinaires des deux sexes ; soit pour répondre à un chapitre mal entendu d’Isaïe 685, où l’on croyait lire que le Messie naîtrait d’une vierge ; soit enfin par suite de l’idée que le « Souffle de Dieu », déjà érigé en hypostase divine, est un principe de fécondité 686.

2876. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXV » pp. 259-278

Elle avait tous les traits du visage agréables et surtout la bouche, des yeux et un regard enchanteurs, une taille élégante, qu’elle conserva belle et noble jusqu’à cinquante ans.

2877. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVI » pp. 279-297

Madame Scarron démêlait certainement ces particularités à travers les obscurités dont on essayait de les enveloppera ses yeux.

2878. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XI »

Cette fois même, le père gagne la sienne, et de haute main, aux yeux du public : les applaudissements se retournent et ne vont qu’à lui.

2879. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Journal de la campagne de Russie en 1812, par M. de Fezensac, lieutenant général. (1849.) » pp. 260-274

Quand la santé résiste aux souffrances physiques, le courage apprend bientôt à les mépriser, surtout quand il est soutenu par l’idée de Dieu, par l’espérance d’une autre vie ; mais j’avoue que le courage m’abandonnait en voyant succomber sous mes yeux des amis, des compagnons d’armes, qu’on appelle, à si juste titre, la famille du colonel, et qu’il semblait ici n’avoir été appelé à commander que pour présider à leur destruction.

2880. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface du « Roi s’amuse » (1832) »

Triboulet n’a que sa fille au monde, il la cache a tous les yeux, dans un quartier désert, dans une maison solitaire.

2881. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — I. La Poësie en elle-même. » pp. 234-256

Un fameux peintre à portrait l’a représenté appuyé sur un bureau, ayant devant lui les œuvres de son illustre père, & sous ses yeux, ce vers d’Hippolyte, dans la tragédie de Phèdre : Et moi, fils inconnu d’un si glorieux père, Je suis encore loin… *.

2882. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre II. Le cerveau chez les animaux »

« Le cerveau et le crâne sont étroits et pointus quand l’animal fouilleur doit se servir de son front et de son museau pour creuser la terre ; larges, au contraire, quand il lui faut pour se nourrir, pour voir et pour entendre, une large bouche, de vastes yeux, de vastes oreilles, entraînant le reste du crâne dans le sens bilatéral, développés en arrière, hérissés de crêtes osseuses, lorsque les exigences de l’équilibre ou celles du mouvement nécessitent elles-mêmes une telle forme. » Ajoutons, d’ailleurs, qu’il est difficile de comprendre à priori, comme le fait remarquer avec justesse M. 

2883. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — I. La métaphysique spiritualiste au xixe  siècle — Chapitre II : Partie critique du spiritualisme »

Il paraît donc démontré, au moins à nos yeux, qu’une pluralité (de succession ou de coexistence) ne peut parvenir à l’unité et à l’identité sentie, en d’autres termes que la matière ne peut devenir esprit.

2884. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre I : Philosophie religieuse de M. Guizot »

La transmission héréditaire des conséquences du péché est un fait qui s’accomplit tous les jours sous nos yeux.

2885. (1912) L’art de lire « Chapitre IX. La lecture des critiques »

L’affligeante stérilité de ces exercices ne le cédait en rien à l’affligeante puérilité des exercices de 1865, si tant est qu’elle ne fût pas, au moins, plus éclatante aux yeux.

2886. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Nièces de Mazarin » pp. 137-156

Le moment n’est pas venu où il doit imposer, à la société dont il sera le maître, le ton de convenance superbe et de décence majestueuse qui nous fait d’ici baisser les yeux.

2887. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XV. M. Dargaud » pp. 323-339

Coligny, le protestant d’action, au xvie  siècle, — et on sait à quoi l’action condamne les hommes les plus purs et les mieux intentionnés, qui en ont le génie, — Coligny, enfoncé dans les faits tumultueux et sanglants de son siècle, est nécessairement au-dessous, aux yeux d’un philosophe comme M. 

2888. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre V. Les figures de lumière »

Nous en verrons la signification se dessiner matériellement sous nos yeux.

2889. (1915) La philosophie française « I »

Réformateur à la manière de Socrate, il eût été tout disposé, comme on l’a fait remarquer, a adopter la maxime socratique « connais-toi toi-même » ; mais il l’eût appliquée aux sociétés et non plus aux individus, la connaissance de l’homme social étant à ses yeux le point culminant de la science et l’objet par excellence de la philosophie.

2890. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XX. De Libanius, et de tous les autres orateurs qui ont fait l’éloge de Julien. Jugement sur ce prince. »

« Après avoir réglé, dit l’orateur, les objets les plus importants de l’administration et de l’empire, il jeta les yeux sur l’intérieur du palais ; il aperçut une multitude innombrable de gens inutiles, esclaves et instruments du luxe, cuisiniers, échansons, eunuques, entassés par milliers, semblables aux essaims dévorants de frelons, ou à ces mouches innombrables que la chaleur du printemps rassemble sous les toits des pasteurs ; cette classe d’hommes dont l’oisiveté s’engraissait aux dépens du prince, ne lui parut qu’onéreuse sans être utile, et fut aussitôt chassée du palais ; il chassa en même temps une foule énorme de gens de plume, tyrans domestiques qui, abusant du crédit de leur place, prétendaient s’asservir les premières dignités de l’État : on ne pouvait plus ni habiter près d’eux, ni leur parler impunément.

2891. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre premier. Table chronologique, ou préparation des matières. que doit mettre en œuvre la science nouvelle » pp. 5-23

Table chronologique, ou préparation des matières que doit mettre en œuvre la science nouvelle La table chronologique que l’on a sous les yeux embrasse l’histoire du monde ancien, depuis le déluge jusqu’à la seconde guerre punique, en commençant par les Hébreux, et continuant par les Chaldéens, les Scythes, les Phéniciens, les Égyptiens, les Grecs et les Romains.

2892. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VIII. »

Mais considère et touche du doigt le côté certain de chaque chose ; et, pour avoir vu de tes yeux, ne te confie pas plus que pour avoir toi-même entendu : ne crois pas un vain bruit plus que le raisonnement, ni quoi que ce soit, là où il y a place pour la réflexion.

2893. (1895) La science et la religion. Réponse à quelques objections

en ce moment même, je les ai là, sous les yeux, tous ces livres, fameux naguère, où nous avons avidement cherché la réponse à nos doutes ; et, en somme, qu’ont-ils établi ? […] J’ai sous les yeux, en ce moment même, un livre intitulé : la Religion basée sur la morale. […] Nous ne nous soucions pas davantage de savoir, — et le lecteur impartial en a maintenant la preuve sous les yeux, — à qui les choses que nous avons dites peuvent plaire ou déplaire, mais uniquement de les dire comme nous les pensons ou comme nous les voyons, ce qui est sans doute la première condition de la recherche « scientifique. » J’ose ajouter que si quelqu’un n’a jamais prêché « le laissez faire du combat pour la vie », c’est nous ; et le docteur Clémenceau le saurait, si depuis vingt ans la préoccupation des choses de la politique ne l’avait rendu comme étranger au mouvement des idées de son temps.

2894. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre I. De la sélection des images, pour la représentation. Le rôle du corps »

Il attendait, pour y croire, « que des ondes sonores donnassent à l’œil la sensation de lumière, ou que des vibrations lumineuses fissent entendre un son à l’oreille 4 ». […] Mais le psychologue qui ferme les yeux sur la différence de nature, sur la différence de fonction entre la perception et la sensation, — celle-ci enveloppant une action réelle et celle-là une action simplement possible, — ne peut plus trouver entre elles qu’une différence de degré. […] Mais nous devons présenter cette même idée sous une troisième forme encore, pour bien établir comment le problème de la mémoire est à nos yeux un problème privilégié.

2895. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre III. Molière »

Nombre de phrases mauvaises, longues, confuses, qu’on trouve chez lui à la lecture, s’organisent spontanément dans la bouche du comédien : ce sont des phrases pour les oreilles, non pour les yeux. […] Voilà Tartufe, le maître hypocrite : son hypocrisie corrompt Orgon, corrompt en lui l’amour de sa femme, de ses enfants, les sentiments élémentaires de bonté, de justice, d’honneur, le fait égoïste sottement, durement, honteusement ; même les âmes honnêtes et pures sont viciées à ce contact, et la douce Elmire en vient à jouer un jeu après lequel son mari doit demeurer à jamais avili à ses yeux.

2896. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre II. Le rôle de la morale » pp. 28-80

Comme Junon avait des yeux de vache, ainsi un magistrat est intègre, un officier est brave, un père est respectable. […] Mais s’il comprend ainsi les choses du point de vue social, il les sentira autrement s’il les regarde avec ses yeux d’individu sacrifié.

2897. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mars 1886. »

Non que je sois antiwagnérien au point de vue musical, au contraire ; j’aime et j’admire l’œuvre du maître de Bayreuth et des larmes d’émotion me viennent aux yeux, lorsque j’entends certains fragments des Nibelungen ; mais mon patriotisme est froissé, à l’idée qu’on jouerait sur un théâtre subventionné l’opéra d’un homme qui, ouvertement, s’est toujours montré hostile à la France. […] Louis de Romain, après un compte-rendu de la représentation du Chevalier Jean, à Cologne, publiait un article où, distinguant la question artistique de toutes autres, il adressait aux artistes l’appel que voici : … Il appartient à la presse musicale, à nos compositeurs dont les œuvres reçoivent de l’autre côté du Rhin une large hospitalité, aux Gounod, aux Saint-Saëns, Massenet, Joncières à tous ceux enfin qui par leur situation, leur autorité, leur talent, ont une influence sur le public de faire cesser une comédie dont le résultat ne peut être que de nous rendre ridicules aux yeux du monde civilisé …   C’est à ces lignes que M. 

2898. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Introduction. Le problème des idées-forces comme fondamental en psychologie. »

Au point de vue de l’observation purement psychologique, la jouissance et la souffrance ainsi que la réaction de l’appétit à l’égard des sensations se distinguent nettement des sensations mêmes, en tant que présentations d’objets qui arrivent ou s’en vont devant l’œil intérieur. […] Fouillée ne se figure peut-être pas assez combien forte serait la position de celui qui soutiendrait que le sentiment d’activité mentale, accompagnant l’arrivée de certains objets devant l’esprit, n’est rien que certains autres objets, à savoir des constrictions dans les sourcils, dans les yeux, la gorge, l’appareil respiratoire, qui sont présents alors, tandis qu’ils sont absents dans les autres modifications du courant subjectif.

2899. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Théâtre » pp. 83-168

Elle avait une de ces figures minables, comme il semble qu’il y en ait eu au moyen âge, après les grandes famines, avec des yeux dont le dévouement jaillissait comme de ceux d’un chien battu. […] Voici la route de Bellevue, et, sur cette route, nous rencontrons tenant par la main un joli enfant, la jeune fille, jeune femme aujourd’hui, que l’un de nous a eu, au moins pendant huit jours, la très sérieuse pensée d’épouser… et qui nous rappelle du vieux passé… Il y a des années qu’on ne s’est vu… On s’apprend les morts et les mariages… et l’on nous gronde doucement d’avoir oublié d’anciens amis… Puis nous voilà dans la maison de santé du docteur Fleuri, causant avec Banville, et croisant dans notre promenade, le vieux dieu du drame, le vieux Frédérick Lemaître… « … Dans tout cela, par tous ces chemins, en toutes ces rencontres, au milieu de toute notre vie morte que le hasard ramène autour de nous et qui semble nous mener à une vie nouvelle, nous roulons, les oreilles et les yeux aux bruits et aux choses comme à des présages bons ou mauvais, et prêtant à la nature le sentiment de notre fièvre… En rentrant : rien. » Une semaine après, nous apprenions que notre pièce n’était ni reçue ni refusée, que Beaufort voyait un danger dans la mise à la scène de la petite presse… qu’il attendait.

2900. (1914) Boulevard et coulisses

Les journaux qui dominaient alors la situation, et vers lesquels tout jeune homme qui se destinait à la littérature avait les yeux fixés, étaient le Figaro, l’Évènement, le Gil Blas et le Gaulois. […] Non, messieurs, vous ne serez pas injustes envers notre époque, plus tard surtout, lorsque vous l’apercevrez d’un peu loin, que les échafaudages qui la recouvrent à nos yeux seront tombés et que ses véritables proportions apparaîtront.

2901. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIV : Récapitulation et conclusion »

Il est certain qu’on peut transformer les caractères d’une espèce en choisissant à chaque génération successive des différences individuelles assez légères pour échapper à des yeux inexpérimentés, et ce procédé sélectif a été le principal agent dans la production des races domestiques les plus distinctes et les plus utiles. […] Il est difficile de ne pas être conduit à cette conclusion, quand on considère par exemple le Microptère d’Eyton (Anas Brachyptera) dont les ailes sont incapables de vol et presque dans le même état que celle du Canard domestique ; lorsqu’on voit le Tuco-Tuco (Ctenomys Brasiliensis), souvent aveugle avec des habitudes souterraines, de même que certaines Taupes qui le sont toujours et qui ont même les yeux recouverts de peau ; ou enfin lorsqu’on songe aux animaux qui habitent les cavernes ténébreuses d’Europe ou d’Amérique et dont l’organe visuel est plus ou moins complétement atrophié.

2902. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Lettres sur l’éducation des filles, par Mme de Maintenon » pp. 105-120

Il a été pour moi, le dernier éclair de ton œil mourant, — cette âme qui y brillait intense et désolée à travers le brouillard épaissi. — N’as-tu rien emporté avec toi dans la région inconnue, rien de ce qui vivait dans ce long, dans cet ardent regard ?

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