/ 3236
1159. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Diderot »

Du plus loin qu’il m’aperçut, il laissa son ouvrage, il s’avança sur sa porte et se mit à pleurer. […] Cependant, accablé de nouvelles charges, livré à des travaux pénibles, traduisant, aux gages des libraires, quelques ouvrages anglais, une Histoire de la Grèce, un Dictionnaire de Médecine, et méditant déjà l’Encyclopédie, Diderot se désenchanta bien promptement de cette femme, pour laquelle il avait si pesamment grevé son avenir. […] On lui accorde de reste les fantaisies humoristes, les boutades d’une saillie incomparable, les chaudes esquisses, les riches prêts à fonds perdu dans les ouvrages et sous le nom de ses amis, le don des romans, des lettres, des causeries, des contes, les petits-papiers, comme il les appelait, c’est-à-dire les petits chefs-d’œuvre, le morceau sur les femmes, la Religieuse, madame de La Pommeraie, mademoiselle La Chaux, madame de La Carlière, les héritiers du curé de Thivet ; — ce que nous tenons ici à lui maintenir, c’est son titre social, sa pièce monumentale, l’Encyclopédie ! […] Pourtant, dans un ouvrage qu’il composa durant sa vieillesse et peu d’années avant de mourir, l’Essai sur la Vie de Sénèque, il s’est plu à traduire le passage suivant d’une lettre à Lucilius, qui le transporte d’admiration : « S’il s’offre à vos regards une vaste forêt, peuplée d’arbres antiques, dont les cimes montent aux nues et dont les rameaux entrelacés vous dérobent l’aspect du ciel, cette hauteur démesurée, ce silence profond, ces masses d’ombre que la distance épaissit et rend continues, tant de signes ne vous intiment-ils pas la présence d’un Dieu ?  […] Je suis heureux de trouver dans le même ouvrage un jugement sur La Mettrie, qui marque chez Diderot un peu d’oubli peut-être de ses propres excès cyniques et philosophiques, mais aussi un dégoût amer, un désaveu formel du matérialisme immoral et corrupteur.

1160. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 janvier 1886. »

Nous trouverons, en effet, en allant droit à la source, en examinant la genèse de Lohengrin, que cet ouvrage a été conçu et exécuté sous des conditions très particulières, uniques dans la vie du Maître. […] Il était forcé de gagner de l’argent avec ses ouvrages et de « faire son possible pour assurer un succès extérieur, quoiqu’intérieurement il y fût complètement indifférent » (IV, 370). […] Souvent, Wagner a ressenti le besoin de s’expliquer à lui-même cet ouvrage ; ses explications, les contradictions qu’elles renferment, l’étude approfondie de l’œuvre telle que nous la possédons sur le théâtre, tout concourt pour nous démontrer que — du point de vue qui nous occupe actuellement, celui de l’état d’âme du Maître pendant cette période de la genèse de Lohengrin — c’est le doute qui caractérisa sa pensée. […] Cette étude fera partie d’un ouvrage que doit publier prochainement la librairie Fischbacher, l’Œuvre dràmatîque de Wàgner. […] Pour l’interprétation de ces textes, on se reportera à l’ouvrage de Cécile Leblanc, Wagnérisme et création en France, 1883-1889, Honoré Champion, Paris, 2005.

1161. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Chamfort. » pp. 539-566

La petite comédie de Chamfort, La Jeune Indienne, représentée à la Comédie-Française le 30 avril 1764, n’est, disait Grimm, qu’un ouvrage d’enfant, « dans lequel il y a de la facilité et du sentiment, ce qui fait concevoir quelque espérance de l’auteur ; mais voilà tout ». […] Chamfort enchérira lui-même sur cette doctrine du petit nombre des élus en matière de goût, quand il répondra à quelqu’un qui lui opposait sur un ouvrage le jugement du public : « Le public ! […] Le comte de Lauraguais, qui le juge très bien, nous raconte81 que, visité un matin par Chamfort, celui-ci lui dit : Je viens de faire un ouvrage. — Comment ! […] Mustapha et Zéangir parut imprimé en 1778 et fut dédié à la reine ; voici cette dédicace, qui n’a pas été reproduite dans les éditions des Œuvres de Chamfort : « Madame, l’indulgente approbation dont Votre Majesté a daigné honorer la tragédie de Mustapha et Zéangir m’avait fait concevoir l’espérance de lui présenter cet ouvrage, et vos bontés ont rendu ce vœu plus cher à ma reconnaissance. Heureux si je pouvais, Madame, la consacrer par de nouveaux efforts, si je pouvais justifier vos bienfaits par d’autres travaux, et trouver grâce devant Votre Majesté par le mérite de mes ouvrages plus que par le choix de leur sujet !

1162. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « II. M. Capefigue » pp. 9-45

Cependant, quoique à chaque ouvrage qui paraissait, il y eût un dépouillement plus profond des qualités qu’on pouvait remarquer encore dans l’ouvrage qui avait précédé, c’est particulièrement dans ces dernières années que M.  […] À tout moment de notre histoire, dans les nombreux ouvrages sortis de sa plume, la question dominante, pour lui, était la question monarchique, qui est de fait, pour les esprits sensés, toute la question de l’histoire de France. […] Capefigue, qui a montré, dans quelques-uns de ses ouvrages, le don précieux et rare de l’initiative ; qui a souvent touché le premier, quand personne n’y pensait ou n’osait, à des réhabilitations d’hommes ou de choses qui se sont achevées depuis, sous des plumes plus creusantes que la sienne, n’a même pas songé à justifier, par une discussion préalable, tout ce qu’il nous dit de Louis XV et de la société du xviiie  siècle. […] Et voilà comment, pour la première fois, la philosophie du Mondain : Il n’est jamais de mal en bonne compagnie, s’est introduite dans l’histoire sous une plume que le catholicisme de l’auteur (car l’auteur a toujours respecté le catholicisme dans ses ouvrages) aurait dû rendre plus sévère.

1163. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIX. M. Cousin » pp. 427-462

D’abord l’ouvrage quête à l’anecdote, au renseignement, aux faits perdus… C’est un travail presque archéologique appliqué à l’histoire, et nous sommes tous, à ce moment, plus ou moins timbrés d’archéologie. […] Le livre en question, s’il continue d’être ce qu’il est dans le premier volume, s’engloutira un jour tout doucement dans les œuvres complètes de l’auteur, et ne sera plus tiré par personne du rayon protecteur où les ouvrages qu’on ne lit plus se livrent à des somnolences éternelles. […] Si on disait qu’un tel ouvrage est ennuyeux, malgré les noms célèbres qui étoilent faiblement d’une lueur d’intérêt, bientôt éteinte, les pages sans relief qui s’y multiplient, on aurait l’air de ne traduire qu’une sensation personnelle, et on dirait une vérité. […] Cousin, dans son ouvrage, ressemble (en sera-t-il flatté ?) […] L’haleine y manque à l’auteur comme s’il avait accompli le plus difficile des travaux d’Hercule, et il se sert de ce qui lui en reste pour nous lamenter des adieux de cygne mourant dans un style qui dépasse de beaucoup le ton de pipeau auquel il a, dans ce dernier ouvrage, ramené l’histoire.

1164. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Le goût aussi qui nous porte vers tel ouvrage contemporain et nous éloigne de tel autre est-il bien libre ? […] Aussi voit-on que les ouvrages méprisés à leur naissance ont peu de chance de plaire un jour, et qu’au contraire les ouvrages célèbres dès le début gardent longtemps leur réputation et sont estimés encore après être devenus inintelligibles. […] Mais cet ouvrage n’est pas seulement une suite de scènes plastiques. […] L’auteur de ces magnifiques livres, écrits avec amour, n’a nul souci de la destinée de ses ouvrages. […] Au reste, il me parut peu occupé de son ouvrage et de lui-même.

1165. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

J’ai consulté avec fruit l’ouvrage si connu de Walter-Scott sur Swift, l’essai historique de Craufurd, un excellent article de la revue d’Édimbourg de septembre 1816, et la belle étude de M.  […] Je ne rendrai jamais qu’imparfaitement l’impression que firent sur moi les amères beautés de cet ouvrage ; elle n’a pas vieilli, mais elle s’est depuis confondue avec tant d’impressions diverses, qu’il me faut un effort pour la ressaisir avec ses premiers charmes et sa vigueur première. […] Tous approuvèrent la distinction, et les voilà de nouveau à l’ouvrage. […] L’apparition de cet ouvrage et son prodigieux succès eurent sur la vie de Swift une influence décisive et irréparable. […] « L’auteur, écrivait le judicieux Atterbury, a raison de se cacher, car les touches profanes de cet ouvrage nuiraient plus à sa réputation et à son intérêt dans le monde que son esprit ne peut lui faire de bien. » Plus tard, Voltaire en jugea de même.

1166. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire de la maison royale de Saint-Cyr, par M. Théophile Lavallée. » pp. 473-494

Lavallée s’était fait très honorablement connaître jusqu’ici par divers ouvrages consciencieux et utiles, exécutés avec beaucoup de décision et de fermeté. […] l’ouvrage garde de l’intérêt au milieu de cette condensation continue et se fait lire. […] Lavallée dans un second ouvrage intitulé l’Histoire militaire de Saint-Cyr ; il n’était pas inutile de montrer dès l’abord le rapport et le lien. […] Mme de La Maisonfort était de ces personnes rares comme on en connaît quelques-unes en tout temps, qui se portent d’abord au sommet de toutes les curiosités de leur époque, juges suprêmes et raffinés des ouvrages de l’esprit, oracles et prosélytes des opinions en vogue : elle eût fait agréablement du jansénisme avec Racine ou avec M. de Tréville, comme elle distillait du quiétisme avec Fénelon, comme au xviiie  siècle elle se fût éprise de David Hume avec la comtesse de Boufflers, comme au xixe elle eût brillé dans un salon doctrinaire, eût discuté sur la psychologie ou l’esthétique, et peut-être eût poussé jusqu’aux Pères de l’Église, non sans effleurer le socialisme en passant.

1167. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — I. » pp. 413-433

Ce serait une occasion naturelle pour parler de l’ouvrage et de l’auteur, s’il était besoin pour cela d’une occasion, et si le nom de M.  […] Si mon ouvrage paraît jamais, vous aurez sans doute envie de le lire, et je crois que cette lecture vous fera du bien. […] L’ouvrage fut fort sévèrement critiqué dans L’Année littéraire. […] Daru. pour être un chef-d’œuvre, je ne fais que répéter ce que je trouve écrit dans les lettres que lui adressaient ses amis à lui-même ; car Daru était de cette école de littérateurs qui se consultaient sincèrement entre eux sur leurs ouvrages, qui ne se louaient pas à l’excès, qui admettaient les observations en les discutant.

1168. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Le président Hénault. Ses Mémoires écrits par lui-même, recueillis et mis en ordre par son arrière-neveu M. le baron de Vigan. » pp. 215-235

On a dit que c’était l’abbé Boudot, de la Bibliothèque du roi, qui lui avait préparé cet ouvrage et qui en avait rassemblé les matériaux. […] Je ne puis vous exprimer quel effet m’ont fait ces pièces… » Voltaire eut toute une discussion avec le président au sujet de ce François II : « Je voudrais que, quand il se portera bien, disait-il, et qu’il n’aura rien à faire, il remaniât un peu cet ouvrage, qu’il pressât le dialogue, qu’il y jetât plus de terreur et de pitié, etc. » Bons conseils à suivre lorsque le démon intérieur s’en mêle. […] Je trouve, je vous l’avoue, une barbarie insigne dans ces sortes d’ouvrages. […] Je ne suis pas au bout de ma liste35 : c’en est plus qu’assez, ce me semble, pour prémunir le public, et aussi pour avertir l’éditeur de vouloir bien, après révision, après collation totale de l’imprimé avec le manuscrit, ajouter au plus vite un ample Errata, accompagné de quelques cartons, à un ouvrage qui, dans son état actuel, fourmille d’erreurs, et est certes le moins digne d’un homme comme le président Hénault, qui a consacré la meilleure part de ses loisirs à étudier l’histoire et à en répandre des notions exactes.

1169. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Maine de Biran. Sa vie et ses pensées, publiées par M. Ernest Naville. » pp. 304-323

Et en réfutant un ouvrage de M. de Bonald, ce qui pourtant devait lui convenir et lui fournir un but précis : « Je me fatigue chaque jour en pure perte et fais avec un grand labeur des pages qui seleront effacées le lendemain. […] Ils ont confiance dans leurs idées et leurs sentiments, précisément parce qu’ils ne se les approprient pas comme l’ouvrage de leur esprit, comme le produit de leur activité proprex, mais qu’ils les attribuent à Dieu ou à quelque bon génie… » C’est précisément le génie dont il manque, le bon démon, celui de la facilité, la muse, comme on dirait en d’autres sujets. […] Par son premier ouvrage public, couronné par l’Institut (Influence de l’habitude sur la faculté de penser, 1802), Maine de Biran s’était rallié à l’école, alors régnante, des idéologues de la fin du xviiie  siècle ; mais il ne s’y rattacha jamais que transitoirement, et bientôt, ne consultant que son sens intime, il passa outre. […] Par exemple : dans un ouvrage qu’il vient de publier sur La Connaissance de l’âme (1857), le Père Gratry s’est vivement et habilement emparé de ces pensées de Maine de Biran pour dire aux philosophes de l’école de M. 

1170. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de l’Académie française, par Pellisson et d’Olivet, avec introduction et notes, par Ch.-L. Livet. » pp. 195-217

Si, au sortir de quelque naturel et vivant ouvrage de cette époque, aussitôt après les Mémoires du cardinal de Retz par exemple, on lit du Pellisson, on comprendra bien ce que je veux dire. […] Né à Béziers en 1624, originaire de Castres, d’une famille protestante très distinguée dans la robe, ayant fait ses études dans le Midi, il y prit un grand goût pour les bons auteurs latins, Cicéron, Térence, et ne s’aperçut, au sortir du collège, que l’on pouvait bien écrire aussi en français, que lorsqu’il eut vu quatre ouvrages dont il garda toujours un souvenir reconnaissant : les Huit Oraisons de Cicéron alors récemment traduites, Le Coup d’État de Sirmond, un volume des lettres de Balzac, et les charmants Mémoires de la reine Marguerite. […] On se lisait les uns aux autres les ouvrages qu’on avait composés ; on se critiquait, on s’encourageait. « Les conférences étaient suivies tantôt d’une promenade, tantôt d’une collation en commun. » Pendant trois ou quatre ans, on continua de la sorte avec une entière obscurité et liberté : « Quand ils parlent encore aujourd’hui de ce temps-là et de ce premier âge de l’Académie, nous dit Pellisson, ils en parlent comme d’un âge d’or, durant lequel avec toute l’innocence et toute la liberté des premiers siècles, sans bruit et sans pompe, et sans autres lois que celles de l’amitié, ils goûtaient ensemble tout ce que la société des esprits et la vie raisonnable ont de plus doux et de plus charmant. » Il y avait secret promis et gardé : Qui sapit in tacito gaudeat ille sinu. […] Car en France, notez-le bien, on ne veut pas surtout s’amuser et se plaire à un ouvrage d’art ou d’esprit, ou en être touché, on veut savoir si l’on a eu droit de s’amuser et d’applaudir, et d’être ému ; on a peur de s’être compromis, d’avoir fait une chose ridicule ; on se retourne, on interroge son voisin ; on aime à rencontrer une autorité, à avoir quelqu’un à qui l’on puisse s’adresser dans son doute, un homme ou un corps.

1171. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. De Pontmartin. Causeries littéraires, causeries du samedi, les semaines littéraires, etc. »

Ainsi, parlant de l’ouvrage de M. Mignet sur Charles-Quint, il dira : « Si l’on me demandait quel est, parmi les ouvrages de l’esprit, celui que je préfère à tous les autres, je répondrais hardiment : Un bon livre écrit en l’honneur d’un grand roi . » Singulière préférence à ériger ainsi en article de foi littéraire ! […] Cousin, il lui accorde toutes les prétentions et presque toutes les conclusions de ses brillants ouvrages, et, après avoir proclamé le chef-d’œuvre, il n’apporte dans le compte rendu aucun de ces correctifs de détail qui seraient nécessaires à chaque instant pour remettre le lecteur dans le vrai ; car selon la parole d’un des hommes qui connaissent le mieux l’illustre auteur, « c’est un des esprits qui ont le plus besoin de garde-fou ; et quand ce n’est pas dans le fond, c’est dans la forme, il excède toujours. » Mais M. de Pontmartin, une fois qu’il a pris parti pour quelqu’un, n’est pas homme à mettre des garde-fous d’aucun côté ; il les ôterait plutôt ; il lui suffit qu’un courant général de spiritualisme élevé le rapproche de M.  […] Moins il sera tenté de se livrer aux thèmes tout faits de l’esprit de coterie et de parti plus il sera lui-même, jugeant des ouvrages de l’esprit par la pratique et le sentiment immédiat, et mieux il vaudra.

1172. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite et fin.) »

Horace Walpole, dans la description des fêtes qu’il donna à sa résidence de Strawberry-Hill en l’honneur de Mme de Boufflers, nous la montre fort agréable, mais arrivant fatiguée, excédée de tout ce qu’elle avait eu à voir et à faire la veille : « Elle est arrivée ici aujourd’hui (17 mai 1763) à un grand déjeuner que j’offrais pour elle, avec les yeux enfoncés d’un pied dans la tête, les bras ballants, et ayant à peine la force de porter son sac à ouvrage. » En fait de Français, Duclos était de la fête, lui « plus brusque que vif, plus impétueux qu’agréable », et M. et Mme d’Usson, cette dernière solidement bâtie à la hollandaise et ayant les muscles plus à l’épreuve des plaisirs que Mme de Boufflers, mais ne sachant pas un mot d’anglais. […] Je ne puis mieux la faire connaître qu’en rapportant ici son Portrait, fait par un homme à qui elle avait rendu le service important de le tirer du couvent et de le faire relever de ses vœux ; il lui dédia un ouvrage sans mettre son nom à la tête de l’Épître dédicatoire, parce qu’elle n’avait pas voulu le lui permettre. La délicatesse et l’esprit qui brillent dans ce morceau sont bien dignes du sujet qu’il traite ; voici comment il s’exprime : « Je dédie cet ouvrage à la personne à qui je dois le bien le plus précieux de la vie pour qui sait en jouir. […] Il s’agissait de la traduction d’un ouvrage anglais dont, par malheur, Dutens n‘a pu nous dire le titre ; sans quoi Ion arriverait à savoir le nom de ce moine si digne d’intérêt et si reconnaissant.

1173. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

Évidemment le titre d’un ouvrage anglais, les Réminiscences d’Horace Walpole, l’a séduit ; mais, en laissant à la charge de l’auteur anglais le mot de Réminiscences pris en ce sens, je nie qu’en français ce soit le mot juste. […] Cuvier, dit-il, un des plus grands génies de notre époque, qui a participé à l’instruction publique toute sa vie, soit comme professeur, soit comme haut administrateur, soit par ses ouvrages, soit par ses voyages d’inspection, était un ennemi prononcé de la rhétorique. […] Elle était pauvre ; elle travaillait pour vivre à des ouvrages de prose, à des biographies. […] En politique, il a bien plus fondé de doctrines que ceux qu’on a nommés doctrinaires ; en philosophie, son ouvrage sur les religions contient plus de vérités neuves et mères qu’aucune des trois écoles opposées de Lamennais, de Cousin et de Tracy.

1174. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre VIII. La question de gout ce qui reste en dehors de la science » pp. 84-103

Nous ne lui demandons pas ce que nous devons penser d’un auteur ou d’un ouvrage ; qu’il nous mette seulement en main les pièces qui nous permettront de juger par nous-mêmes. » Le malheur est que cette parfaite indifférence est. impossible. […] Mettez deux ouvrages en parallèle ; celui-ci, inférieur sur un point, peut fort bien reprendre l’avantage sur un autre. […] Il s’ensuit, d’une part, que le style doit être personnel, original, c’est-à-dire qu’il doit obtenir, par une combinaison neuve des éléments qui sont ses matériaux, ce caractère irréductible qui est l’individualité ou, comme on disait jadis, la marque de l’ouvrier sur son ouvrage. […] D’autre part, à quelques moyens qu’on recoure pour mesurer la somme de vie contenue dans un ouvrage, fût-on d’une habileté consommée à démêler tous les éléments dont se compose cette résultante mystérieuse, ce n’en est pas moins un avantage précieux que de sentir directement la vie et la beauté.

1175. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de lord Chesterfield à son fils. Édition revue par M. Amédée Renée. (1842.) » pp. 226-246

Montesquieu, après la publication de L’Esprit des lois, écrivait à l’abbé de Guasco, qui était alors en Angleterre : « Dites à milord Chesterfield que rien ne me flatte tant que son approbation, mais que, puisqu’il me lit pour la troisième fois, il ne sera que plus en état de me dire ce qu’il y a à corriger et à rectifier dans mon ouvrage : rien ne m’instruirait mieux que ses observations et sa critique. » C’est Chesterfield qui, parlant un jour à Montesquieu de la promptitude des Français pour les révolutions et de leur impatience pour les lentes réformes, disait ce mot qui résume toute notre histoire : « Vous autres Français, vous savez faire des barricades, mais vous n’élèverez jamais de barrières. » Lord Chesterfield goûtait certes Voltaire ; il disait à propos du Siècle de Louis XIV : « Lord Bolingbroke m’avait appris comment on doit lire l’histoire, Voltaire m’apprend comment il faut l’écrire. » Mais en même temps, avec ce sens pratique qui n’abandonne guère les gens d’esprit de l’autre côté du détroit, il sentait les imprudences de Voltaire et les désapprouvait. […] Il aurait mieux valu presque avoir échoué totalement et n’avoir réussi à faire qu’un original en sens inverse, tandis qu’avec tant de soins et à tant de frais, n’en être venu qu’à produire un homme du monde insignifiant et ordinaire, un de ceux desquels, pour tout jugement, on dit qu’on n’a rien à en dire, il y avait de quoi se désespérer vraiment, et prendre en pitié son ouvrage, si l’on n’était pas un père. […] Il n’entreprit point de longs ouvrages, pour lesquels il se sentait trop fatigué, mais il envoyait quelquefois d’agréables essais à une publication périodique, Le Monde. […] Pourtant rien n’approche de l’ouvrage qui, pour lui, n’en était pas un, de ces lettres, qu’il comptait bien que personne ne lirait, et qui sont aujourd’hui le fonds de sa richesse littéraire.

1176. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Diderot. (Étude sur Diderot, par M. Bersot, 1851. — Œuvres choisies de Diderot, avec Notice, par M. Génin, 1847.) » pp. 293-313

Mme d’Épinay, aidée de Grimm, eut bien de la peine à l’apprivoiser chez elle ; elle méritait d’y réussir par la manière vive dont elle le goûtait : « Quatre lignes de cet homme me font plus rêver, disait-elle, et m’occupent plus qu’un ouvrage complet de nos prétendus beaux esprits. » L’impératrice de Russie, la grande Catherine, apprivoisa également le philosophe à force de supériorité et de bonne grâce ; il alla la voir, comme on sait, à Saint-Pétersbourg, et il n’est pas bien sûr qu’il ne l’ait pas traitée quelquefois, en causant, comme un camarade. […] S’il y a dans un ouvrage, dans un caractère, dans un tableau, dans une statue, un bel endroit, c’est là que mes yeux s’arrêtent ; je ne vois que cela, je ne me souviens que de cela, le reste est presque oublié. […] Mme Necker écrivait à Diderot : « Je continue à m’amuser infiniment de la lecture de votre Salon : je n’aime la peinture qu’en poésie ; et c’est ainsi que vous avez su nous traduire tous les ouvrages, même les plus communs, de nos peintres modernes. » Voilà bien l’éloge, et qui, selon quelques gens de goût, est la plus grande critique. […] C’est le cas, ou jamais, je le crois, d’appliquer ce mot que le chevalier de Chastellux disait à propos d’une autre production de Diderot, et qui peut se redire plus ou moins de presque tous ses ouvrages : « Ce sont des idées qui se sont enivrées, et qui se sont mises à courir les unes après les autres. » Diderot vieillissant se demandait s’il avait bien employé sa vie et s’il ne l’avait point dissipée.

1177. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — I. » pp. 287-307

Sa Correspondance littéraire avec les cours du Nord et les souverains d’Allemagne lui vint d’abord par le canal de l’abbé Raynal qui s’en déchargea sur lui ; elle commence en 1753, et par une critique même d’un ouvrage de l’abbé Raynal, dont Grimm parle avec indépendance, tempérant l’éloge par quelques mots de vérité. […] « Paris, a-t-on dit très justement, est le lieu du monde où l’on a le moins de liberté sur les ouvrages des gens qui tiennent un certain coin. » Cela était vrai alors, et l’est encore aujourd’hui. […] Il ne saurait être de mon dessein d’examiner ici ce procès : quand on lit les Mémoires de Mme d’Épinay d’une part, et Les Confessions de l’autre, il est clair que les lettres citées dans l’un et dans l’autre ouvrage, et qui peuvent servir à éclaircir la question, ne sont pas semblablement reproduites, qu’elles ont été altérées d’un des deux côtés, et que quelqu’un a menti. […] La volumineuse collection de ses feuilles, malgré les défauts et les bigarrures, malgré les morceaux de différentes mains qui y sont entrés, fait un corps d’ouvrage et mérite d’être inscrite au nom de Grimm.

1178. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Rivarol » pp. 245-272

En voyant aujourd’hui à quel poids spécifique on a réduit l’édition ancienne, on se demande si c’est par respect ou par enthousiasme pour Rivarol, que les éditeurs du présent volume se sont donné les airs de faire un choix dans ses ouvrages, de prendre ceci ou de laisser cela, au nom de leur propre goût à eux, éditeurs, et de leurs préférences, ou si c’est plutôt par mépris bien entendu pour le public, qui n’aime et ne lit que les petits livres, quand il les lit toutefois… Ce qu’il y a de certain, c’est que nous n’avons pas là Rivarol ; c’est que nous n’avons en petit paquet que quelques paillettes de ce Pactole intellectuel, qui passa, en brillant, à travers le xviiie  siècle. […] En effet, pour qui veut parler avec cette propriété qu’il aimait et qu’il appelait la probité de la langue française, les ouvrages de Rivarol ne sont pas des œuvres. […] Prenez ses ouvrages, et jugez ! […] C’était là, il me semble, ce qu’il fallait dire, puisqu’on risquait ce nom de de Maistre auprès du nom de Rivarol, il fallait tirer de la vie de Rivarol, jetée à tous les vents du monde et des ouvrages plutôt parlés qu’écrits de cet écrivain, un enseignement sévère et un avertissement utile.

1179. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Innocent III et ses contemporains »

Conséquent dans sa vie aux opinions et aux sentiments de ses ouvrages, le président du consistoire de Schaffouse s’est fait depuis catholique. […] Il vaut mieux l’admettre comme un fait acquis à l’histoire contemporaine ; il vaut mieux dire, avec la hauteur d’une conclusion sans réplique : C’est une chose maintenant certaine : l’Europe, dégoûtée de tous les systèmes, lasse de toutes les expériences, tend par ses penseurs, par ses meilleurs esprits, vers l’unité catholique, et cette tendance, nous nous chargeons de la montrer dans les ouvrages les plus marquants. […] Pourquoi Saint-Chéron, intéressé à des citations nombreuses, n’a-t-il donc cité que les ouvrages du docteur Hook et du professeur Voigt ? […] Après avoir dit ce que les prétentions de l’école ultramontaine voulaient faire du livre de Hurter, et montré combien ces prétentions étaient vaines, il nous reste à examiner l’ouvrage en lui-même.

1180. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Jean-Jacques Ampère »

Mérimée le vit, Fauriel avait sur sa table un ouvrage qu’il lui montra. […] Peut-être ¡1 ajoutait d’une main presque octogénaire une dernière perfection à ses ouvrages ! […] L’introduction, se relevant après coup et acquérant tout son prix, aurait suivi la fortune de tout l’ouvrage. […] Il est difficile de bien juger M. de Sénancour sans avoir entretenu avec lui, par les principaux ouvrages de sa jeunesse, un commerce intime et prolongé. […] Voici ce paragraphe extrêmement vif et spirituel ; on ne saurait mieux dire : « Malheureusement pour ceux qui sont impatients de voir achever cet important ouvrage (l’Histoire de la Littérature française), M. 

1181. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre premier. La Formation de l’Idéal classique (1498-1610) » pp. 40-106

Ce dernier ouvrage est demeuré manuscrit jusqu’à l’édition qu’en a donnée M.  […] Le Clerc, « Discours sur la vie et les ouvrages de Montaigne », en tête de son édition des Œuvres ; — Sainte-Beuve, Port-Royal, t.  […] Ce dernier ouvrage est le seul des trois qu’on ait souvent réimprimé. […] Sapey, Essai sur la vie et les ouvrages de G. du Vair, Paris. 1847 ; — E. […] Il faut noter ici, sans attendre davantage, que l’édition des Essais de-1580 ne comprend que les deux premiers livres de l’ouvrage, auxquels le troisième ne s’est ajouté pour la première fois que dans l’édition in-4 de 1588.

1182. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XIX » pp. 76-83

 — Il aura droit bientôt de mettre à une prochaine édition de Ses Mystères cette épigraphe édifiante : J'ai fait un peu de bien, c’est mon plus bel ouvrage ! Si j’étais de l’Académie, je le proposerais l’année prochaine pour le prix de vertu ou de l’ouvrage le plus utile aux mœurs.

1183. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Contre une légende »

Renan devait développer, en les précisant ou en les affinant, dans la suite de ses ouvrages. […] Or, je puis leur affirmer que cela même, avec quelques autres choses, est dans les ouvrages de M. 

1184. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XVIII » pp. 198-205

Je me bornerai à remarquer dans cet ouvrage quelques sorties contre les précieuses, des mots grossiers qui reproduisent vingt fois une idée grossière, une scène licencieuse depuis longtemps interdite au théâtre, Arnolphe (c’est le vieillard), après un entretien avec Agnès dont la simplicité l’enchante, adresse cette apostrophe aux précieuses : Héroïnes du temps, mesdames les savantes, Pousseuses de tendresse et de beaux sentiments, Je défie à la fois tous vos vers, vos romans, Vos lettres, billets doux, toute votre science, De valoir cette honnête et pudique ignorance. […] Ce qui décrédite dans cet ouvrage les paroles dirigées contre les précieuses, ce sont des in décences pires que les plus ridicules affectations.

1185. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 372-383

La plupart des Grands, sans en excepter les Princes, semblables à ces arbres nés dans le silence, & accrus à l’ombre des forêts, vivent & meurent sans que leur existence & leur chute fassent une sensation & un vide dans le monde : il n’en est pas de même de l’homme qui a su se rendre utile par ses lumieres ou ses talens ; il est connu par-tout où ses Ouvrages pénetrent ; & plus ou moins honoré de ses Contemporains, selon qu’il s’est montré plus ou moins supérieur dans le genre qu’il a embrassé, il peut se flatter d’exister encore avec honneur dans la mémoire des générations futures. […] Nous connoissons peu d’Ouvrages aussi solidement pensés, aussi sagement écrits, & plus capables de former l’esprit & le cœur des jeunes gens.

1186. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Lépicié » pp. 275-278

Au fond de la boîte, c’est le Christ n’ordonnant pas à ses disciples de laisser approcher les petits enfans, comme le peintre le dit ; mais les recevant, les accueillant ; ainsi Lépicié n’a su ce qu’il fesait ; et c’est le moindre défaut de son ouvrage. […] Il faut que le chancelier Bacon reste ignoré pendant cinquante ans ; lui-même l’avait prédit de son propre ouvrage.

1187. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XV »

Ces lignes résument notre ouvrage ; c’est à ces quatre- vingt-dix-neuf écrivains sur cent qu’il s’adresse. […] Quand Boileau conseillait de mettre vingt fois son ouvrage sur le métier, de le polir et de le repolir sans cesse, il ne distinguait pas, il s’adressait à tout le monde, et il n’avait pas tort.

1188. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Wallon »

Puisque, dit Wallon en finissant, « Cousin n’est qu’un enfant de Paris, mais un enfant… sublime », il ne fallait pas écrire à la tête de son ouvrage : Esto vir !  […] C’est ainsi que tous les arts et même la musique font arabesque autour du livre majestueux qu’ils ornent et qu’ils parachèvent… Il n’y a certainement rien de supérieur à l’encyclopédisme de cette publication, mais ce n’est pas là, pour nous, le plus grand mérite de l’ouvrage, qui est mieux que complet par les renseignements puisqu’il est vrai par l’aperçu… La vérité, qui est toujours le but de l’Histoire, est, dans l’histoire de Jeanne d’Arc, plus difficile à atteindre que dans une histoire moins sublime et moins merveilleuse… L’histoire de Jeanne d’Arc est plus qu’humaine.

1189. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — III »

Renan, dans la suite, a poussé sa manière, et, quant à la substance même c’est l’ouvrage d’un enfant. […] Aucun des ouvrages de l’auteur de la Vie de Jésus ne me semble aussi parfaitement étranger au sentiment catholique, voire au sentiment religieux, que cette correspondance où éclate d’ailleurs une admirable passion de l’étude.‌

1190. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XV. De Tacite. D’un éloge qu’il prononça étant consul ; de son éloge historique d’Agricola. »

Quoique Tacite n’ait composé aucun panégyrique de prince, Cependant l’ordre des temps, la liaison des idées, le mérite de ce grand homme et le caractère particulier de ses ouvrages, semblent exiger que nous en parlions ici. […] 47. » Dans cet ouvrage, qui est, comme on le voit, un véritable éloge, Tacite a réuni la philosophie à l’histoire, et l’histoire à l’éloquence : on y retrouve à chaque ligne l’âme d’un citoyen qui porte tout le poids du malheur de la vertu, et qui, en peignant les maux de sa patrie, les éprouve une seconde fois.

1191. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « IV »

Elle montre, une fois de plus, quels résultats nos artistes pourront donner du jour où ils s’appliqueront à des ouvrages vraiment humains. […] Pasdeloup, on demandait le retrait de sa subvention, on voulut même d’abord qu’il ne jouât pas d’ouvrages de jeunes auteurs : M.  […] Nous avons jadis analysé cet ouvrage qui vient d’être réédité. […] Les ouvrages annoncés sont en vente au bureau de la Revue : envoi franco par la poste. […] L’ouvrage de Martine Kahane, Wagner et la France, Herscher, 1984, présente des documents très riches sur ce sujet.

1192. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Victor Hugo »

Et, de fait, cette critique ne saurait aujourd’hui aller bien à fond, comme elle ira peut-être, puisque nous n’avons que le premier volume d’un ouvrage qui en a plusieurs. […] Et il n’y a probablement au monde que Victor Hugo qui puisse se permettre la haute impertinence de jeter au nez du public le premier tome d’un ouvrage qui doit en avoir encore trois ! […] On pourrait même supprimer, si on voulait, sans que je les lusse, les volumes inconnus de l’ouvrage… que, franchement, je n’en mourrais pas ! […] L’Homme qui rit aurait rejoint le Shakespeare de Victor Hugo dans ce néant de l’oubli où il a le mieux et le plus vite sombré de tous les ouvrages de cet homme sonore, qui, même quand il le voudrait, ne pourrait pas faire silencieusement une bêtise. […] Il l’a renversé dans ce livre inachevé, qui n’est que le premier volume d’un ouvrage qui en aura deux.

1193. (1893) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Cinquième série

Quelque opinion que Bossuet, dans ses ouvrages que l’on appelle philosophiques, ait donc exprimée sur des questions de ce genre, elles ne sont pas « sa philosophie ». […] L’ouvrage entier en recevrait une force interne et une utilité secrète, dont les effets sourds seraient nécessairement sensibles avec le temps. […] C’est ce que Voltaire exprime à sa manière, en disant quelque part que « Desmarets, sur la fin de sa vie, fut plus connu par son fanatisme que par ses ouvrages ». […] , Ce ramas d’ennemis qui, faibles et mutins, Préfèrent à nos chants les ouvrages latins. […] Un ouvrage de morale, de politique, de critique, peut-être même d’éloquence, en sera plus beau, toutes choses égales d’ailleurs, s’il est fait de main de géomètre.

1194. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Étude sur la vie et les écrits de l’abbé de Saint-Pierre, par M. Édouard Goumy. L’abbé de Saint-Pierre, sa vie et ses œuvres, par M. de Molinari. — I » pp. 246-260

Le caractère et les ouvrages de ce respectable abbé ont été, dans les derniers temps, l’objet d’études approfondies qui, en l’exagérant un peu, le font très bien connaître, M. de Molinari, au point de vue des économistes, nous l’a présenté par extraits, par citations resserrées et abrégées, seule manière dont l’abbé de Saint-Pierre soit lisible, et il l’a justement rapproché de son futur parent dans l’ordre des esprits, le philosophe utilitaire Bentham. […] Je lisais les meilleurs ouvrages. J’allais consulter le feu père Malebranche, et lui faire des objections sur quelques endroits de ses ouvrages.

1195. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Bossuet. Œuvres complètes publiées d’après les imprimés et les manuscrits originaux, par M. Lachat »

« On a de lui cinquante et un ouvrages, dit Voltaire ; ce sont ses Oraisons funèbres et son Discours sur l’Histoire universelle qui l’ont conduit à l’immortalité. » D’Alembert, Thomas, La Harpe, lui rendent pleine justice à cet égard, mais à cet égard seulement. Les Sermons, publiés après les autres ouvrages et en plein xviiie  siècle (1772), provoquent l’opinion hautement favorable et le suffrage enthousiaste de l’abbé Maury ; mais, tout en sentant les choses de l’éloquence en orateur, Maury est d’ailleurs un critique un peu léger, tranchant, décisif, affirmatif ; il ne fait autorité qu’à demi. […] Cet estimable et savant ouvrage, qu’on dirait d’un Tillemont biographe, n’a contre lui que le style dans lequel il est écrit et qui est un peu revêche.

1196. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre V. De la lecture. — Son importance pour le développement général des facultés intellectuelles. — Comment il faut lire »

Cette liste n’est pas longue : mais qui se serait assimilé la substance de ces ouvrages aurait la tête déjà bien meublée. […] Quelques bons ouvrages de critique féconde et d’érudition sans vétilles aideront à comprendre les anciens et les étrangers, comme aussi à s’orienter dans la littérature française. […] Ils trouveront plus de matière dans le xvie et dans le xviie  siècle que dans le xviiie  ; de ces deux premiers, il n’est presque rien à proscrire, sauf les exigences de la moralité ; de l’autre, il n’est presque rien qu’on puisse lire sans défiance : trois ou quatre ouvrages peut-être, de trois ou quatre écrivains.

1197. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Les femmes de France : poètes et prosateurs  »

Il est vrai que le souvenir de leur sexe peut également se retourner contre elles… En somme, soit que l’idée d’un autre charme que celui de leur style agisse sur nous, soit qu’au contraire l’effort de leur art et de leur pensée nous semble attenter aux privilèges virils, il est à craindre que nous ne les jugions avec un peu de faveur ou de prévention, qu’elles ne nous plaisent à trop peu de frais dans les genres pour lesquels elles nous semblent nées (lettres, mémoires, ouvrages d’éducation), et qu’elles n’aient, en revanche, trop de peine à nous agréer dans les genres que nous considérons comme notre domaine propre (poésie, histoire, critique, philosophie). […] La plupart (et c’est heureux) n’ont point fait profession d’écrire, n’ont laissé que des lettres, des mémoires et des ouvrages d’éducation. […] L’influence des femmes sur la marche et le développement de la littérature française s’est beaucoup moins exercée par les ouvrages qu’elles ont composés que par la conversation, par les salons, par les relations de société qu’elles ont eues avec les écrivains.

1198. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre premier. La critique et la vie littéraire » pp. 1-18

Cela est sans rapport avec le mérité du livre, mais indique seulement une adaptation de l’ouvrage au lecteur. […] Et s’il se dérobait, s’il se contentait d’appeler « aimable » un ouvrage insignifiant, il jugeait encore, quoique de travers. […] S’il y a, dans un ouvrage, dans un caractère, dans un tableau, dans une statue, un bel endroit, c’est là que mes yeux s’arrêtent ; je ne vois que cela ; le reste est presque oublié. » Qu’est-ce à dire ?

1199. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Chefs-d’œuvre de la littérature française (Collection Didot). Hamilton. » pp. 92-107

C’est aujourd’hui le seul ouvrage d’Hamilton qu’on doive relire ; car pour ses vers et même pour ses contes, il en faut peu parler. […] Comment se fait-il que, dans les ouvrages d’esprit qui ont plu en naissant à de bons juges, il entre ainsi toute une partie qui se mortifie avec le temps et qui passe ? […] « Cet ouvrage, a dit Voisenon en parlant des Mémoires de Grammont, est à la tête de ceux qu’il faut régulièrement relire tous les ans. » C’est là un conseil qui vaut mieux qu’on ne l’attendrait de Voisenon.

1200. (1912) L’art de lire « Chapitre IX. La lecture des critiques »

Il doit indiquer l’esprit général d’un temps d’après tout ce qu’il sait d’histoire proprement dite ; l’esprit littéraire et artistique d’un temps, ce qui est déjà un peu différent, d’après tout ce qu’il sait d’histoire littéraire et de l’histoire même de l’art ; mesurer, ce qui du reste est impossible, mais c’est pour cela que c’est intéressant, les influences qui ont pu agir sur un auteur ; s’inquiéter de la formation de son esprit d’après les lectures qu’on peut savoir qu’il a faites, d’après sa correspondance, d’après les rapports que ses contemporains ont faits de lui ; s’enquérir des circonstances générales, nationales, locales, domestiques, personnelles dans lesquelles il a écrit tel de ses ouvrages et puis tel autre ; chercher, ce qui est encore une manière de le définir, l’influence que lui-même a exercée et c’est-à-dire à qui il a plu, les répulsions qu’il a excitées et c’est-à-dire à qui il a déplu. […] A lui, ce qu’on demande, au contraire, c’est sa pensée sur un auteur ou sur un ouvrage, sa pensée, soit qu’elle soit faite de principes ou qu’elle le soit d’émotions ; ce qu’on lui demande, ce n’est pas une carte du pays, ce sont des impressions de voyage ; ce qu’on lui dit, c’est : « Vous vous êtes rencontré avec M.  […] J’ai vécu pendant quelques années dans une société d’hommes très intelligents, très lettrés, de beaucoup de goût, très décisionnaires aussi, qui parlaient sans cesse des ouvrages nouveaux.

1201. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Eugène Fromentin ; Maxime du Camp »

En effet, c’est d’un séjour d’un an qu’il est question en cet écrit, et d’un séjour recommencé, ce qui donne à l’ouvrage un charme de passé que ne connaissent pas d’ordinaire les livres de voyage, qui poussent droit devant eux la tête en avant, et ne savent pas la retourner en arrière avec cette mélancolie qui convient si bien aux livres des hommes ! […] Mais tout cela restera inférieur pourtant, parce que l’ouvrage de Fromentin n’est rien de plus qu’un livre de voyage individuel et pittoresque, quoiqu’il le soit moins que bien d’autres, — des pages sur des pages, des descriptions sur des descriptions ! […] Eh bien, c’est ce style dont nous pouvons dire : « J’ai vu mieux », que nous retrouvons dans le livre sur la Hollande, où rien, absolument rien de l’auteur ne rachète les défauts inhérents au genre d’ouvrage qu’il a entrepris !

1202. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre » pp. 393-472

Ces ouvrages étaient presque tous encore en portefeuille. […] Quelque temps après je fus chargé d’apporter moi-même à Paris un de ses principaux ouvrages en manuscrit pour le faire imprimer. […] « Dans les ouvrages de l’homme, tout est pauvre comme l’ouvrier ; les vues sont bornées, les moyens roides, les ressorts inflexibles, les résultats monotones. Dans les ouvrages de Dieu, les richesses de l’infini se montrent à découvert jusque dans le moindre élément. […] Aussi, ce qu’il y a à admirer dans ce premier ouvrage de Joseph de Maistre, ce ne sont pas les vérités, ce sont les vues.

1203. (1884) Articles. Revue des deux mondes

Notre but est plus modeste ; nous voudrions seulement recueillir dans de récens et importans ouvrages, particulièrement dans celui de M.  […] Marselli, comme l’ouvrage plus considérable de M. de Rougemont, sont, pour ainsi dire, les vestibules de la science du progrès. […] A quoi bon dès lors curieusement étudier les ouvrages scientifiques des anciens ? […] Admirable dans le détail, l’ouvrage l’est peut-être plus encore par les généralités philosophiques qui marquent, en un langage élevé, le caractère divin de cette fonction universelle. […] Perrier, qu’Aristote n’a pas proposé de classification méthodique, parce que l’objet véritable de son ouvrage ne lui en faisait pas une obligation ?

1204. (1913) Le mouvement littéraire belge d’expression française depuis 1880 pp. 6-333

Lorsqu’au bout de la glèbe, admirant leur ouvrage. […] Bruxelles, Bulens, 1903. — Jacques Jordaens et son œuvre (traduction de l’ouvrage néerlandais de P.  […] Ouvrage déjà cité. […] Stefan Zweig, Émile Verhaeren, ouvrage déjà cité. […] Ouvrage déjà cité.

1205. (1933) De mon temps…

Il aimait se mêler à eux, confronter leurs personnes à leurs ouvrages, friand d’anecdotes à leur sujet et capable de bons offices à leur endroit. […] Ajoutez-y que Villiers, idéaliste et chrétien, auteur grave et chaste, devait être profondément choqué par le caractère érotique et païen des ouvrages de Mendès. […] Là, dans le silence de sa bibliothèque, il pouvait satisfaire librement sa passion pour la lecture et travailler sans hâte aux ouvrages qu’il préparait. […] Déjà, à cette époque, cet ouvrage figurait rarement sur les catalogues, et l’exemplaire de Robert de Bonnières était en bel état. […] Ses immenses lectures l’ont mis au fait de maints auteurs et de maints ouvrages peu connus.

1206. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — II. (Fin.) » pp. 257-278

L’amour-propre est si ingénieux, même chez les plus humbles, que cet aveu de son tort et l’explication qu’il en donne vont tourner encore à la glorification de son rôle réservé et de son utopie chérie : Il y a, confesse-t-il, dans quelques-uns de mes ouvrages plusieurs points qui sont présentés avec négligence, et qui auraient dû l’être avec beaucoup de précaution pour ne pas réveiller tes adversaires. […] Je conçois que ces points-là ont pu nuire à mes ouvrages, parce que le monde ne s’élève pas jusqu’au degré où, s’il était juste, il trouverait abondamment de quoi se calmer et me faire grâce, au lieu qu’il n’est pas même assez mesuré pour me faire justice. […] Il mourut subitement dans le joli pays d’Aulnay, chez son ami le sénateur Lenoir-Laroche, le 13 octobre 1803. — Dans ce souvenir rapide que je viens de lui consacrer et dont j’ai cru qu’il était digne, je ne vais point jusqu’à conseiller de relire aucun ouvrage de lui : « Ceux qui ont de l’âme, disait-il, prêtent à mes ouvrages ce qui leur manque : ceux qui ne les lisent point avec leur âme leur refusent même ce qu’ils ont. » S’il disait cela en son temps et à l’heure de la publication, que sera-ce à plus de cinquante ans de distance ?

1207. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Œuvres de Louise Labé, la Belle Cordière. »

Francis Wey,, dans un spirituel Rapport adressé au Comité des travaux historiques51, a cité de ce poème des vers descriptifs fort exacts sur l’avalanche, sur sa formation et sa marche ; mais là encore ce qui domine chez Peletier, dans cet ouvrage qu’on a bien fait de réimprimer et qui est, en effet, une curiosité locale, je le demande, est-ce bien le poète, celui qui mérite qu’on l’appelle et qu’on le salue de ce nom, et n’est-ce pas plutôt le savant encore, l’observateur, le physicien et le curieux de la nature ? […] On voit d’ici le bon cordier à l’ouvrage, et qui se recule, en effet, tout en tressant sa corde. […] On connaît le sujet par la fable de La Fontaine, l’Amour et la Folie, qui en est comme un simple et agréable sommaire, La Fontaine s’étant évidemment refusé à lutter avec un ouvrage presque accompli ; mais même quand il ne fait que passer, l’immortel bonhomme met à tout sa marque, et l’on sait le début ravissant : Tout est mystère dans l’Amour. […] Voir au tome II de l’ouvrage, fort instructif d’ailleurs, de M. 

1208. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Don Carlos et Philippe II par M. Gachard Don Carlos et Philippe II par M. Charles de Mouy »

M. de Mouy doit, ce me semble, bien moins se plaindre, que se féliciter de voir l’ouvrage de M.  […] L’Académie française, qui vient de remarquer et de couronner l’ouvrage de M. de Mouy, lui dira bientôt d’une manière flatteuse, et par un organe éloquent, tous ses mérites74. […] Il est colère autant qu’un jeune homme peut l’être, et obstiné dans ses opinions… Son précepteur s’attache uniquement à lui expliquer les Offices de Cicéron afin de modérer l’impétuosité de son caractère ; mais don Carlos ne veut presque toujours parler que des choses de la guerre et lire que des ouvrages qui s’y rapportent. […] C’est l’ouvrage de M. 

1209. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. »

C’est dans un autre ouvrage de lui, Mes Rêveries, qu’on trouverait de quoi suppléer (et très incomplètement encore) à ces trop courts Mémoires par quelques anecdotes et souvenirs qu’il y a fait entrer à l’occasion. […] Jomini, tout le premier, s’emparant de quelques phrases de la préface, a jugé très sévèrement l’ouvrage et ne paraît pas l’avoir pris un instant au sérieux9. […] Mais, même en tenant compte de la fantaisie qui évidemment y a eu très grande part et qui s’y donne toute carrière, le comte Vitzthum croit avoir trouvé le sens et le but de l’ouvrage : selon lui, lorsqu’il le composa, Maurice, qui avait l’œil sur le Nord et qui était dans le secret de certains projets menaçants, songeait surtout à une guerre éventuelle en Pologne et à la manière de l’y conduire : Mes Rêveries seraient donc moins un traité théorique qu’un mémoire ad hoc pour un but spécial déterminé, un ensemble de notes et d’instructions adressées au roi Auguste, son père, et qui reviendraient à cette conclusion : « Si vous voulez faire la conquête de la Pologne, voici comment il faut organiser votre armée : donnez-moi carte blanche et quarante-cinq mille hommes, en deux campagnes, sans livrer une seule bataille, je vous rendrai maître de la république ; cela ne vous coûtera pas un sou. » — Ce point de vue ingénieux et nouveau, qui donnerait une clef à une production un peu bizarre, me paraît exagéré et ne saurait guère s’appliquer qu’à deux ou trois chapitres du livre : l’exemple de la Pologne et les plans de guerre qui s’y rapportent ne viennent à l’auteur que chemin faisant. […] Cette mémorable lettre du maréchal de Saxe au comte de Maurepas, datée du camp sous Maastricht, le 15 mai 1718, se trouve citée dans l’ouvrage de M. 

1210. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [II] »

C’est vous qui m’avez adressé un ouvrage fort important. Je suis charmé que le premier ouvrage qui démontre les vrais principes de guerre appartienne à mon règne. […] Jomini se remettait à l’étude, et il datait de Varsovie, 4 janvier 1807, la reprise de son grand ouvrage (le tome III). […] Je n’ai fait dans la page qu’on vient de lire, et en général je ne ferai que résumer les jugements et emprunter les expressions mêmes de Joinini dans ses différents ouvrages.

1211. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LE COMTE XAVIER DE MAISTRE. » pp. 33-63

Loin de nous, en Savoie, en Russie, au ciel de Naples, il semblait s’être conservé exprès pour nous venir offrir, dans sa trop courte visite, à l’âge de près de soixante-seize ans, l’homme le plus moralement semblable à ses ouvrages qui se puisse voir, le seul de nos jours peut-être tout à fait semblable et fidèle par l’âme à son passé, naïf, étonné, doucement malin et souriant, bon surtout, reconnaissant et sensible jusqu’aux larmes comme dans la première fraîcheur, un auteur enfin qui ressemble d’autant plus à son livre qu’il n’a jamais songé à être un auteur. […] En parcourant les ouvrages à la mode, il s’est effrayé d’abord, il s’est demandé si notre langue n’avait pas changé durant ce long espace de temps qu’il avait vécu à l’étranger : « Pourtant ce qui me tranquillise un peu, ajoutait-il, c’est que, si l’on écrit tout autrement, la plupart des personnes que je rencontre parlent encore la même langue que moi. » En assistant à quelques séances de nos Chambres, il s’est trouvé bien dérouté de tant de paroles ; au sortir du silence des villas et du calme des monarchies absolues, il comprenait peu l’utilité de tout ce bruit, et l’on aurait eu peine, je l’avoue, à la lui démontrer pour le moment. […] Il admire, comme on le peut penser, les ouvrages de son illustre frère, et, en toute tolérance, sans ombre de dogmatisme, il semble les adopter naturellement comme l’ordre d’idées le plus simple du monde ; il trouve que le plus beau livre du comte Joseph est celui de l’Église gallicane. […] En même temps que le comte Xavier de Maistre s’est offert à nous comme un de ces hommes dont la rencontre console de bien des mécomptes en littérature et réconcilie doucement avec la nature humaine, il y a, dans la publicité insensible et croissante de ses ouvrages, un mouvement remarquable qui peut encore, ce semble, rassurer le goût.

1212. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. J. J. AMPÈRE. » pp. 358-386

Ampère se jeta avec tout le feu de ces années d’assaut et d’avant-garde ; mais, par la forme même de ses projets et de ses ébauches, il dénota tout d’abord son instinct des grands ouvrages et des longues entreprises. […] Son ouvrage est tout original, puisé aux sources, d’une méthode et de résultats qui ne sont qu’à lui. […] Il suffit même qu’il soit dit quelque part que tel Gaulois ou tel Français a écrit quelque chose pour qu’on lui accorde un rang dans la liste et qu’on en fasse mention dans le corps de l’ouvrage ; avoir été simplement homme de lettres, ou même avoir haï et persécuté les sciences (comme l’empereur Caracalla), est un titre pour avoir un article à part, et un digne éloge ou un juste blâme. » Osons le redire à notre tour ; oui, Prévost avait raison ; échappé lui-même des Bénédictins et de leur méthode, il en parlait pertinemment. […] La discussion des points de détail, sur lesquels s’appesantissent si essentiellement les Bénédictins, est quelquefois un peu rapide chez lui ; ses indications en notes sont plus incomplètes et plus empressées qu’on ne le voudrait dans un ouvrage fait pour guider les études et ouvrir les sources ; il y a des inadvertances.

1213. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Pierre Corneille »

Walter Scott déclare, pour son compte, qu’il ne sait point de plus intéressant ouvrage en toute la littérature anglaise que l’histoire du docteur Johnson par Boswell. […] De René au dernier ouvrage de M. de Chateaubriand, des premières Méditations à tout ce que pourra créer jamais M. de Lamartine, d’Andromaque à Athalie, du Cid à Nicomède, l’initiation est facile : on tient à la main le fil conducteur, il ne s’agit plus que de le dérouler. […] Cela posé, nous nous garderons d’en faire une sévère application à l’ouvrage plein de recherches et de faits que vient de publier M.  […] Ce morceau a été écrit à l’occasion de l’Histoire de la Vie et des Ouvrages de Pierre Corneille, par M. 

1214. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Madame de Krüdner et ce qu’en aurait dit Saint-Évremond. Vie de madame de Krüdner, par M. Charles Eynard »

Il ne paraît pas soupçonner combien ce jeune Anacharsis, qu’il appelle un Scythe glacé , dut paraître agréable à son début ; et quand il fait de celui qui conçut cet ingénieux ouvrage un vieil abbé, membre de l’Académie des Inscriptions, il méconnaît l’hôte spirituel de Chanteloup, le savant supérieur qui, entre autres choses, savait vivre, savait écrire et causer. […] Eynard, sur ce point, ne nous laisse rien ignorer, et ce chapitre de son ouvrage est un des plus piquants que nous offre l’histoire secrète de la littérature. […] Ce voyage à Paris, qu’elle désire de toute son âme et qu’elle vient de provoquer, elle le présente comme une obligation sérieuse et plutôt pénible ; peu s’en faut qu’elle n’en parle presque déjà comme d’une mission sacrée : « Je regarderais comme une lâcheté, écrit-elle à Mme Armand, de ne pas produire un ouvrage qui peut âtre utile (son roman), et voilà comme mon voyage à Paris devient un devoir, tandis que mon cœur, mon imagination, tout m’entraîne au bord de votre lac où je brûle d’aller, dégoûtée du séjour de Paris, blasée sur ses succès, n’aimant que le repos et les affections douces. » En produisant de telles lettres, M.  […] Eynard nous montre que s’il avait voulu appliquer dans tout son ouvrage le même esprit de critique, il s’en fût acquitté très-finement ; mais dès qu’il aborde la vie religieuse de Mme de Krüdner, lui qui a été si adroit à pénétrer la personne mondaine, il croit tout d’abord à la sainte : il s’arrête saisi de respect, n’examinant plus, et ne voulant pas admettre que, même sur un fond incontestable de croyance et d’illusion, c’est-à-dire de sincérité, il a dû se glisser bien des réminiscences plus ou moins involontaires de ce premier jeu, bien des retours de cet ancien savoir-faire.

1215. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre IV. Le patriarche de Ferney »

Le Sermon des Cinquante (1762) inaugure cette nouvelle manière : dans toute une suite d’ouvrages importants547, Voltaire ne met plus en cause les prêtres ou les croyants, mais la religion elle-même, la Bible, l’Evangile. […] Il ne procède pas par volumineux ouvrages, savants et méthodiques, qu’on ouvre à dessein de s’instruire. […] Mais le théâtre et le roman, ce sont de trop grands genres, des ouvrages de temps et de patience : il faudra bien six jours pour faire Olympie. […] Il écrivit contre Dalembert qui voulait qu’on ouvrît un théâtre à Genève, et son ouvrage eut le malheur d’exciter l’austérité genevoise : il fut pour quelque chose dans les tracasseries qui forcèrent Voltaire de transporter à Ferney son théâtre et son domicile.

1216. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « L’abbé Galiani. » pp. 421-442

L’abbé Galiani est une des figures les plus vives, les plus originales et les plus gaies du xviiie  siècle ; il a écrit bon nombre de ses ouvrages en français ; il appartient à notre littérature autant qu’aucun étranger naturalisé chez nous, presque autant qu’Hamilton lui-même. […] Après le dîner, et le café pris, l’abbé s’assied dans un fauteuil, ses jambes croisées en tailleur, c’était sa manière ; et, comme il faisait chaud, il prend sa perruque d’une main, et gesticulant de l’autre, il commence à peu près ainsi : « Je suppose, messieurs, celui d’entre vous qui est le plus convaincu que le monde est l’ouvrage du hasard, jouant aux trois dés, je ne dis pas dans un tripot, mais dans la meilleure maison de Paris, et son antagoniste amenant une fois, deux fois, trois fois, quatre fois, enfin constamment, rafle de six. […] Les amis de Galiani, et l’abbé lui-même avaient coutume de dire de son livre sur les blés : « C’est moins un livre sur le commerce des blés qu’un ouvrage sur la science du gouvernement : il faut savoir y lire le blanc et l’entre-deux des lignes. » Le gouvernement chargea l’abbé Morellet de répondre à Galiani, et cet autre abbé, aussi grand de taille que l’autre était petit, aussi didactique et pesant de plume que l’autre était léger, fit cette réponse de manière à n’être pas lu. […] Il s’applique aussi à des ouvrages nouveaux ; il pousse plus loin son étude sur Horace, qu’il avait déjà commenté avec un goût rare, aiguisé de paradoxe ; il pense à tirer de son poète favori toute une philosophie morale.

1217. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — II. (Lettres écrites du donjon de Vincennes.) » pp. 29-50

On ne saurait assez déplorer cette publication de Manuel ; car de cette même masse de papiers, tombant en de dignes mains, au lieu de quatre volumes compromis et souillés, on aurait pu tirer, sans infidélité et moyennant de simples suppressions, deux ou trois volumes touchants, graves, éloquents, « un ouvrage à la fois attrayant et à peu près irréprochable, plein de piquants sujets d’études psychologiques et d’exemples de style, dont aucune impureté ne souillerait la grâce, dont aucun danger ne ferait condamner l’agrément ». […] L’amant était encore tout vivant et tout délirant en lui ; le père était tout occupé de l’enfant qui venait de naître et qui vécut peu ; le prisonnier multipliait ses réclamations, ses apologies, ses mémoires, dans la vue de ressaisir sa liberté, et, en attendant, l’homme d’étude se livrait à toutes les lectures qui lui étaient possibles, à la traduction et à la composition de divers ouvrages, dont on voudrait à jamais anéantir deux ou trois, pour l’honneur de l’amour, pour la dignité du malheur et celle du génie. […] C’est pour elle que j’ai fait ce petit ouvrage, qui m’a coûté du temps et de la peine ; c’est pour elle, dis-je, car, pour toi, je ne me consolerais pas si tu allais consulter la Grammaire sur une phrase que tu me destines ou que tu m’adresses. […] On trouve dans les lettres imprimées à Sophie bon nombre de phrases et de passages tirés de cet écrit, et, en général, des divers ouvrages dont Mirabeau s’occupait à cette époque ; et l’on ne saurait s’en étonner.

1218. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La Harpe. Anecdotes. » pp. 123-144

Sur Malherbe, sur Boileau, sur Pope, sur Johnson, non content de les juger par leurs ouvrages, on a fait des livres, on a recueilli leurs moindres mots, on les a étudiés et poursuivis jusque dans le détail domestique de leur vie. […] Ils ont décidé que celui qui aurait l’audace de n’être pas tout à fait aussi épris de leurs ouvrages qu’ils le sont eux-mêmes, serait un homme d’un caractère affreux, sans douceur, sans aménité, sans respect pour les lois de la société : en un mot, sans honnêteté ; c’est le terme. […] Pasquier, qui avait suivi ses leçons au Lycée dès 1787, l’alla revoir et causa avec lui ; il le mit sur le Génie du christianisme, en se donnant comme quelqu’un qui goûtait l’ouvrage. […] Pour juger d’un livre, il y a une épreuve sûre : quand vous en avez retranché tous les défauts, s’il y reste de grandes beautés, l’ouvrage mérite de vivre.

1219. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — II. (Fin.) » pp. 411-433

Son Voyage d’Égypte et de Syrie avait rang d’un ouvrage classique, et l’auteur était consulté en toute question comme le type du voyageur par excellence. […] Il ne publia qu’en 1803 l’ouvrage intitulé Tableau du climat et du sol des États-Unis d’Amérique, ouvrage utile, et même réputé excellent en son genre, mais incomplet, où la partie morale, celle des institutions, est totalement mise de côté, et où il n’est question que de géographie physique. […] I, p. 302) une de ces impressions de lecture comme je les aime et qui ont pour moi du prix : Je viens de lire le nouvel ouvrage de Volney (Tableau du climat et du sol des États-Unis d’Amérique).

1220. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XII] »

Ses plaisanteries sur les républiques populacières, son indignation contre les excès des peuples, tout enfin dans ses ouvrages prouve qu’il haïssait de bonne foi les charlatans de la philosophie. […] » Il dit plus haut, en parlant de ce même ouvrage : On dira que l’auteur veut qu’on ne soit gouverné ni par Dieu, ni par les hommes. […] Quant à ceux qui font un crime au christianisme d’avoir ajouté la force morale à la force religieuse, ils trouveront ma réponse dans le dernier chapitre de cet ouvrage, où je montre qu’au défaut de l’esclavage antique, les peuples modernes doivent avoir un frein puissant dans leur religion. […] Nous apprenons de Moïse que ce grand et sage architecte, diligent contemplateur de son propre ouvrage, à mesure qu’il bâtissait ce bel édifice du monde, en admirait toutes les parties215 : Vidit Deus lucem quod esset bona : « Dieu vit que la lumière était bonne » : qu’en ayant composé le tout, parce qu’en effet la beauté de l’architecture paraît dans le tout, et dans l’assemblage plus encore que dans les parties détachées, il avait encore enchéri et l’avait trouvé parfaitement beau216.

1221. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vien » pp. 74-89

C’est une chose bien singulière que le dieu qui fait des prodiges, n’est jamais une belle chose, l’ouvrage d’un habile homme ; mais toujours quelque magot tel qu’on en adore sur la côte du Malabare ou dans la chaumière du caraîbe. […] Or si un grand prince, une grande princesse commandait à M. de Voltaire un ouvrage et que l’exécution ne répondît ni au nom de l’auteur ni au nom auguste qui l’aurait ordonné, ne croyez-vous pas qu’il serait bien naturel à moi de chercher les moyens de me dispenser de déférer cet ouvrage à celui à qui il est destiné ? […] Par hazard, compteroit-on parmi les ouvrages du mari, ceux de sa femme.

1222. (1920) Action, n° 4, juillet 1920, Extraits

Faites souscrire à nos ouvrages, faites lire la revue. […] Cette page de publicité, qui reprend les sommaires des numéros précédents de la revue, renseigne également sur les recensions critiques qui réapparaissent au numéro suivant sous le nom, justement d’« ouvrages reçus » : seront recensés les ouvrages envoyés en double à la revue. […] Faites souscrire à nos ouvrages, faites lire la revue.

1223. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre X. Première partie. Théorie de la parole » pp. 268-299

Les cieux racontent la gloire de leur auteur : tous les êtres disent qu’ils sont l’ouvrage d’une main toute-puissante. […] Michel-Ange, aveugle, cherchait à s’exalter en venant toucher le torse qu’il ne pouvait plus voir : qu’eût dit à ses mains inspirées le plus bel ouvrage d’orfèvrerie ? […] Jamais Catulle, jamais Pétrone, n’auraient songé à offenser l’honnêteté publique s’ils eussent dû vaincre la pudeur des oreilles pour confier leurs ouvrages à la mémoire des hommes. […] Moïse, le seul des législateurs anciens qui ait écrit ses lois, avait prévu tous les détails pour que la lettre ne restât pas en silence ; et Dieu avait imprimé à cette législation écrite un sceau de durée que ne peuvent avoir les ouvrages des hommes.

1224. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution française »

J’ai hâte d’arriver à l’analyse de cet ouvrage, si remarquable de profondeur, de simplicité et de portée, que, sans cette analyse fidèle, le lecteur certainement ne le croirait pas. […] ce n’est pas là, comme on pourrait le croire, la partie la moins curieuse et la moins importante de l’ouvrage de Cassagnac. […] Ainsi, pour ne prendre que le siècle présent, le xixe  siècle, sa philosophie, qui est le panthéisme, a poussé, comme un affreux polype, de vivaces et inévitables boutures dans tous les ouvrages contemporains, et particulièrement en histoire. […] c’est non seulement être conséquent au vrai principe de l’Histoire et la puiser à sa source la plus pure et la plus reculée, — la conscience, — mais, de plus, c’est justifier l’idée qui plane comme une vérité sur tout l’ouvrage, à savoir : que la Révolution française, l’une des plus grandes catastrophes de désordre qui aient jamais existé, pouvait très bien être évitée, comme peuvent l’être, du reste, tous les crimes et toutes les fautes imputables, soit aux hommes, soit aux sociétés.

1225. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « V. M. Amédée Thierry » pp. 111-139

Amédée Thierry, et voilà, en un seul mot, la critique la plus profonde que nous puissions faire de son ouvrage. […] Ce que pensait Attila, le rôle des dieux qui tombaient, celui du Dieu qui s’élevait, la défiance créée entre Rome et Constantinople par l’érection de cette dernière en siège de l’Empire, le travail intérieur du Christianisme parmi ces peuples, à la faveur d’une mission qui courait comme la foudre, soit souterrainement, soit en plein jour, rien de tout cela, qui était l’important dans une telle histoire, ne se trouve dans l’ouvrage de M.  […] Il ne monta pas jusqu’à cette intuition transcendante, jusqu’à celle émotion aux palpitations toutes-puissantes qui sont le génie ; il s’arrêta à la pénétration et à l’art, et voilà pourquoi ses Récits mérovingiens, qui sont plus des tableaux historiques que de l’histoire complète dans toute la profondeur de sa notion, sont le meilleur de ses ouvrages. […] Thierry veut y voir et qui est le point de vue rayonnant sur tous ses ouvrages depuis son Histoire de la Gaule — trois robustes volumes inachevés qu’il ne faut pas confondre avec son histoire des Gaulois sous la domination romaine — jusqu’à ces Récits d’aujourd’hui !

1226. (1874) Premiers lundis. Tome I « Tacite »

Mais ces estimables essais disparaissent aujourd’hui devant l’ouvrage complet de M.  […] Distraits en effet à chaque pas par des difficultés de détail, forcés de reprendre souvent haleine, et de cheminer péniblement phrase à phrase ; de plus, dénués de verve personnelle, et revenant puiser sans cesse à celle de l’original, ils courent risque, s’ils n’y prennent garde, de laisser trace en leur ouvrage de ces allées et venues perpétuelles, et de fatiguer le lecteur par leur marche inégale et heurtée.

1227. (1874) Premiers lundis. Tome I « Walter Scott : Vie de Napoléon Bonaparte — II »

Comme l’état de la France se dessine de plus en plus nettement, et que d’ailleurs les souvenirs abondent, les erreurs matérielles y sont moins capitales que dans les premières parties de l’ouvrage, et elles se simplifient, en quelque sorte, avec le cours des événements. […] Et nous nous disions : Si, au lieu d’une Vie de Napoléon Bonaparte, Walter Scott avait eu l’idée d’écrire un roman historique où ce personnage eût joué un rôle, s’il avait saisi cette occasion pour peindre des scènes de la Révolution française et pour montrer en action quelques-uns des caractères principaux qui s’y rencontrent, il eût fait un ouvrage plus intéressant à coup sûr que son histoire, mais également plein de vues fausses, de descriptions superficielles, et de portraits de fantaisie : et pourtant Walter Scott a eu sur cette période contemporaine autant et plus de renseignements que sur les époques d’Ivanhoë, de Quentin Dthrward, d’Élisabeth, de Cromwell et des Puritains.

1228. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVIII. Pourquoi la nation française était-elle la nation de l’Europe qui avait le plus de grâce, de goût et de gaieté » pp. 366-378

Il n’y avait pas sans doute beaucoup de philosophie dans la conduite de la plupart des hommes éclairés ; ils avaient souvent eux-mêmes les faiblesses qu’ils condamnaient dans leurs ouvrages : néanmoins ce qui relevait les écrits et les conversations, c’était une sorte d’hommage à la philosophie, qui avait pour but de montrer que l’on connaissait de la raison tout ce que l’esprit eu peut savoir, et qu’au besoin on pourrait se moquer de son ambition, de son orgueil, de son rang même, quoique l’on fût bien résolu à n’y point renoncer. […] Un ouvrage assez piquant d’Agrippa d’Aubigné, distinguait, il y a plus de deux siècles, l’être et le paraître, en faisant le portrait d’un Français, le duc d’Épernon.

1229. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre I. La poésie »

La Henriade irait rejoindre Alaric et la Pucelle, si Voltaire n’avait entouré son poème, truqué et fardé, de notes qui sont souvent de curieuses dissertations littéraires et historiques, si le nom de l’auteur aussi ne constituait pas seul un intérêt sensible à l’ouvrage. […] Il y a donc de quoi lire, et où se plaire dans les ouvrages en vers du xviiie  siècle.

1230. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préface des « Feuilles d’automne » (1831) »

Ici se présente une objection d’une autre espèce : — Sans contredit, dans le moment même le plus critique d’une crise politique, un pur ouvrage d’art peut apparaître à l’horizon ; mais toutes les passions, toutes les attentions, toutes les intelligences ne seront-elles pas trop absorbées par l’œuvre sociale qu’elles élaborent en commun, pour que le lever de cette sereine étoile de poésie fasse tourner les yeux à la foule ? […] Hâtons-nous de déclarer ici, car il en est peut-être temps, que dans tout ce que l’auteur de ce livre vient de dire pour expliquer l’opportunité d’un volume de véritable poésie qui apparaîtrait dans un moment où il y a tant de prose dans les esprits, et à cause de cette prose même, il est très loin d’avoir voulu faire la moindre allusion à son propre ouvrage.

1231. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre V. Le mouvement régionaliste. Les jeunes en province » pp. 221-231

Le lecteur a déjà rencontré la plupart des noms cités ici, au cours de cet ouvrage. […] Et nous regrettons de ne pouvoir, étant donné le plan de cet ouvrage, signaler les poètes occitans ou bretons.

1232. (1879) Balzac, sa méthode de travail

On a conté plaisamment que tout caractère imprimé excitant la verve du conteur, s’il s’agissait dans un atelier de typographes de composer du Balzac, une feuille d’un ouvrage quelconque en train, fût-ce la Bible, était envoyée au romancier et que le résultat définitif était le même ; l’une ou l’autre de ces épreuves revenait avec une égale quantité de corrections. […] Le fameux Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage semble un conseil de Boileau adressé à Balzac : il est d’une exécution facile pour un poète qui laisse un volume à la postérité ; mais qu’on pense à cette recommandation prise au pied de la lettre et appliquée aux deux ou trois cent mille pages de l’œuvre du peintre de la Comédie humaine.

1233. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Greuze » pp. 234-241

Elle a cessé son ouvrage, et elle avance de côté sa tête pour entendre. […] Du reste, pour l’habit, le caractère et la couleur, c’est l’ouvrage d’un habile homme.

1234. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Satire contre le luxe, à la manière de Perse » pp. 122-126

… — Oui, beaucoup d’ouvrages, et beaucoup d’ouvrages médiocres.

1235. (1912) L’art de lire « Chapitre X. Relire »

A propos d’un Werther en musique, il y a quelques années, averti par les observations de plusieurs critiques éminents de l’insignifiance et de la puérilité du Werther de Goethe, je relus Werther, que je n’avais pas lu depuis à peu près un demi-siècle, ayant accoutumé de relire plutôt Faust et le Divan, Je fus certainement moins ému qu’à seize ans ; je ne pleurai point ; mais je fus frappé de la solidité de l’ouvrage, de l’admirable disposition des parties, de la progression lente et forte, de tout ce qu’il y a enfin de savant dans cet ouvrage d’un étudiant et qui ne se retrouve plus du tout, beaucoup plus tard, dans les Affinités électives.

1236. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

La fin de l’automne ayant prévenu celle de notre ouvrage, nous ne pûmes nous le communiquer achevé, parce que nous fûmes obligés de nous séparer ; mais nous le fîmes deux ans après. […] Le roi entretient là trente-deux maisons ou ateliers de tous les ouvrages qu’on fait pour son usage. […] Joignant le portail, en dedans, il y a deux hautes aiguilles ou tourelles, avec des loges ou galeries couvertes au-dessus des chapiteaux, le tout de même ouvrage que le contour du portail. […] Tous les plafonds sont aussi d’ouvrage différent. […] C’est ce qu’on lit dans l’ouvrage intitulé: Ouâq’à Mérïy.

1237. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. de Fontanes »

L’ouvrage d’un Allemand, Hirschfeld, sur les jardins et les paysages, lui fournissait surtout matière à gaieté. […] « Brave général, « Tout a changé et tout doit changer encore, a dit un écrivain politique de ce siècle, à la tête d’un ouvrage fameux. […] C’est dans cet ouvrage, dont je m’occupe depuis plusieurs années, qu’il faut chercher mes principes, et non dans les calomnies des délateurs subalternes qui ne seront plus écoutés. […] J’ai reparlé de Fontanes en mainte page de l’ouvrage intitulé : Chateaubriand et son Groupe littéraire…  ; il est une partie considérable du sujet. […] Raynal (1795), avec l’indication de Fontanes, comme en étant l’auteur sous le nom de Raynal ; mais ici il y a erreur : l’ouvrage est de Servan.

1238. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre quatrième »

La poésie de Jean de Meung, de Villon, de Marot, avait eu d’ailleurs son Art poétique, ouvrage en prose de Thomas Sebilet, qui parut en 1547, et qui n’est qu’une apologie de Marot, où Sebilet a mêlé quelques préceptes excellents. […] Il y avait deux nouveautés dans cette satire : le titre même de satire, qui se voyait pour la première fois en tête d’un ouvrage en vers français, et l’alexandrin substitué au petit vers, si populaire depuis Jean de Meung. […] Le poëte de génie, celui qui a le don de voir d’une vue claire et d’exprimer en termes durables la vérité, se voit lui-même tout d’abord et tel qu’il est ; et, soit qu’il s’approuve ou se blâme, il ne tire que de lui-même l’opinion qu’il a de ses ouvrages. […] Toutefois, Ronsard a laissé une trace dans l’histoire de cette poésie ; il en personnifie une époque ; à ce titre, il devait avoir une place dans un livre où l’on n’a voulu s’occuper que des ouvrages et des noms durables. […] Ses vers si fort admirés, et ses préceptes si obéis, attirèrent les esprits à ces études fécondes où nous devions prendre le goût d’ouvrages plus parfaits que les siens ; cet enthousiasme, même mal exprimé, pour ce qui a fait depuis lors le fond de notre éducation intellectuelle, a de la vie.

1239. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XIII] »

N’est-ce pas en France que tous les ouvrages contre la religion ont été composés, vendus et publiés, et souvent même imprimés ? […] Oui, je le crois, témoins de leur affreux ouvrage, Ils auraient des François désavoué la rage. […] « Je ne peux me plaindre de la bonté avec laquelle vous parlez d’un Brutus et d’un Orphelin ; j’avouerai même qu’il y a quelques beautés dans ces deux ouvrages ; mais encore une fois, vive Jean (Racine) ! […] Nos mauvais livres sont moins mauvais que les mauvais que l’on faisait du temps de Boileau, de Racine et de Molière, parce que dans ces plats ouvrages d’aujourd’hui, il y a toujours quelques morceaux tirés visiblement des auteurs du règne du bon goût. […] Elle ne se ralentit pas même dans les guerres qu’il soutenait contre l’Europe ; car, en bâtissant trois cents citadelles, en faisant marcher quatre cent mille soldats, il faisait élever l’Observatoire, et tracer une méridienne d’un bout du royaume à l’autre, ouvrage unique dans le monde.

1240. (1913) La Fontaine « V. Le conteur — le touriste. »

Je ne retire rien de ce que j’ai dit : il n’y a pas beaucoup de moralité dans aucun des ouvrages de La Fontaine, mais les fables qui sont des contes sont d’une inspiration certainement plus élevée, comment dirai-je ? […] La Fontaine touriste est tout entier contenu dans cet ouvrage qu’on a appelé après coup le Voyage en Limousin et qui, simplement, est constitué par des lettres de La Fontaine à Mlle de La Fontaine, sa femme. […] Peut-être parce que cela ne lui a pas paru former un ouvrage complet. […] Quant aux jardins le parterre est grand et l’ouvrage de plus d’un jour. […] Mais quand La Fontaine est à Richelieu, c’est précisément alors que son ouvrage n’est bien intéressant que pour qui verrait avec lui ce lieu-là et les objets d’art qu’il a vus et qui y sont restés encore.

1241. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre III. De la logique poétique » pp. 125-167

En effet, la métonymie du nom de l’auteur pris pour celui de l’ouvrage, vint de ce que l’auteur était plus souvent nommé que l’ouvrage ; celle du sujet pris pour sa forme et ses accidents vint de l’incapacité d’abstraire du sujet les accidents et la forme. […] Nous faisons dans cet ouvrage un usage continuel de ce vocabulaire. […] Le père Mabillon, dans son ouvrage De re diplomaticâ, a pris le soin de reproduire par la gravure les signatures apposées par des évêques et des archevêques aux actes des Conciles de ces temps barbares ; l’écriture en est plus informe que celle des hommes les plus ignorants d’aujourd’hui ; et pourtant ces prélats étaient les chanceliers des royaumes chrétiens, comme aujourd’hui encore les trois archevêques archichanceliers de l’Empire pour les langues allemande, française et italienne. […] Si l’on peut ajouter foi aux calculs de Héron dans son ouvrage sur la Langue Anglaise, l’Espagnol en aurait trente mille, le Français trente-deux mille, l’Italien trente-cinq mille, l’Anglais trente-sept mille.

1242. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

. — Le plus simple était d’ailleurs, à première vue, de présenter d’abord sa vie, puis ses ouvrages. […] Tous ses ouvrages étaient déjà des sortes de confessions. […] Il faisait lui-même, pour ses amies, des copies calligraphiées de ses ouvrages. […] L’ouvrage, vu de loin, prend, avec un peu de bonne volonté, des aspects de récit biblique, de mythe religieux. […] C’est un des ouvrages les plus connus de Rousseau.

/ 3236