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1520. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Bossuet et la France moderne »

Peu de temps après avoir fondé l’Union Évangélique, qui est une alliance des nations presque toutes réformées, contre la catholique maison d’Autriche, et après avoir montré par là qu’il pressentait pour l’Europe la voie de l’avenir, Henri IV mourut sous les coups d’un assassin, instrument des Ligueurs, à qui ce tiède dévot était toujours en haine.‌ […] Il est édifiant de recueillir l’aveu d’un de leurs plus farouches persécuteurs, l’intendant du Languedoc, Basville, à qui échappera plus tard, en 1699, cet aveu : « Généralement parlant, les nouveaux convertis (c’est-à-dire les protestants contraints par la force de simuler une abjuration) sont plus à leur aise, plus laborieux et plus industrieux que les anciens catholiques de la province. » L’historien de Sismondi l’affirme : « La meilleure partie du commerce et des manufactures de France était entre les mains des protestants71 » « Ils représentaient la substance morale de la France72 » a-t-on dit. « Élément sain, calme et fort, écrit à son tour Michelet… Nos protestants… étaient les meilleurs Français de France… Ils ne demandaient rien qu’à travailler là tranquilles, y vivre et y mourir ».‌ […] Quoique gentilhomme catholique, Saint-Simon fut assez large d’esprit et de cœur pour ne pas dissimuler la sympathie profonde que lui inspirèrent ces victimes de la théocratie : « La révocation de l’édit de Nantes, écrit-il, sans le moindre prétexte et sans aucun besoin, et les diverses proscriptions plutôt que déclarations qui la suivirent, furent les fruits de ce complot affreux qui dépeupla un quart du royaume, qui ruina son commerce, qui l’affaiblit dans toutes ses parties, qui le mit si longtemps au pillage public et avoué des dragons, qui autorisa les tourments et les supplices dans lesquels ils firent réellement mourir tant d’innocents de tout sexe par milliers, qui ruina un peuple si nombreux, qui déchira un monde de familles, qui arma les parents contre les parents pour avoir leur bien et les laisser mourir de faim ; qui fit passer nos manufactures aux étrangers, fit fleurir et regorger leurs États aux dépens du nôtre et leur fit bâtir de nouvelles villes, qui leur donna le spectacle d’un si prodigieux peuple proscrit, nu, fugitif, errant sans crime, cherchant asile loin de sa patrie ; qui mit nobles, riches, vieillards, gens souvent très estimés pour leur piété, leur savoir, leur vertu, des gens aisés, faibles, délicats, à la rame, et sous le nerf très effectif du Comité, pour cause unique de religion ; enfin qui, pour comble de toutes horreurs, remplit toutes les provinces du royaume de parjures et de sacrilèges, où tout retentissoit de hurlements de ces infortunées victimes de l’erreur, pendant que tant d’autres sacrifioient leur conscience à leurs biens et à leur repos, et achetoient l’un et l’autre par des abjurations simulées d’où sans intervalle on les traînoit à adorer ce qu’ils ne croyoient point, et à recevoir réellement le divin corps du Saint des saints, tandis qu’ils demeuroient persuadés qu’ils ne mangeaient que du pain, qu’ils devoient encore abhorrer.

1521. (1898) La cité antique

Heureusement, le passé ne meurt jamais complètement pour l’homme. […] Une famille qui s’éteint, c’est un culte qui meurt. […] L’homme meurt, le culte reste ; le foyer ne doit pas s’éteindre ni le tombeau être abandonné. […] Il y a simplement continuation, morte parentis continuatur dominium. […] Il faut surtout savoir mourir pour elle.

1522. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — I. » pp. 413-433

Et il s’y mêlait une sorte d’accompagnement patriotique, lorsque, célébrant le triomphe de la patrie romaine contre cette Cléopâtre qui, du haut de ses vaisseaux, avait osé menacer le Capitole, et qui fuyait à son tour, qui fuyait comme une femme, mais qui savait mourir comme une reine, le poète s’écriait : Et sans daigner chercher quelque houleux asile, Elle a voulu périr, d’un visage tranquille,          Sur son trône ébranlé. […] Et c’est ainsi que cette part de labeur qu’on avait acceptée et qu’on ne s’était point choisie, cette part qui pouvait ne sembler d’abord qu’ennui et corvée inévitable, imposée à l’ami des Muses, devient sa gloire la plus sûre auprès de la postérité ; car, à la suite et dans le cortège de celui qui ne mourra point, il a pris rang, lui aussi, comme témoin des prodiges, et il est entré dans l’histoire.

1523. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — II » pp. 316-336

Henri IV était le seul homme qui eût pu calmer, et il y arrivait par son habileté, par sa justice, par sa force si bien tempérée d’adresse ; il mourut trop tôt, et, après lui, il était bien difficile que les ferments mal apaisés, et qu’excitait derechef l’air du dehors, ne se renflammassent pas. […] En revanche, Rohan se plaît fort à célébrer une action héroïque de sept soldats de Foix qui, s’enfermant dans une bicoque auprès de Carlat, arrêtèrent le maréchal et toute son armée deux jours entiers, et, après lui avoir tué plus de quarante hommes, se sauvèrent au nombre de quatre ; trois sur les sept, trois proches parents, voulurent demeurer et se sacrifier, parce que l’un était blessé et hors d’état de sortir : « Ainsi les quatre autres, dit Rohan, à la sollicitation de ceux-ci et à la faveur de la nuit, après s’être embrassés, se sauvent, et ces trois-ci se mettent à la porte, chargent leurs arquebuses, attendent patiemment la venue du jour, et reçoivent courageusement les ennemis, desquels en ayant tué plusieurs, meurent libres. » Ce sont là les seuls éclairs du récit chez Rohan, qui voudrait bien assurer aux noms de ces braves soldats une immortalité dont il n’est pas le dispensateur : il fallait de certains échos particuliers, et qui ne se retrouvent pas deux fois, pour nous renvoyer les glorieux noms qui ont illustré les Thermopyles.

1524. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Collé. »

Panard, par suite de son abandon et de son peu de conduite, mourut, comme La Fontaine, dépendant des autres et à leur charge, recevant d’eux des secours payés par bien des dégoûts : « Mais je crois, ajoute Collé, qu’il y était assez insensible. […] Collé mourut le 3 novembre 1783, à l’âge de soixante-quatorze ans, et de chagrin plus encore que de vieillesse.

1525. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par. M. le Chevalier Alfred d’Arneth »

Elle mourut avant d’avoir vu sa fille mère de celui qu’on appelait l’héritier du trône. […] Deux vérités sont désormais en présence et incontestables : Marie-Antoinette s’est perdue en grande partie elle-même par toutes ses imprudences, et Marie-Thérèse avait prévu tous les dangers, y compris ceux de la coterie Polignac dont elle aperçut et dénonça, avant de mourir, l’influence fatale.

1526. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

Des yeux gris sous des sourcils touffus44, une face morte plaquée de taches, un petit visage qui diminuait encore sous son immense chevelure, le menton noyé dans une large cravate molle remontante, qui rappelait celle des incroyables et le négligé du Directoire, le nez en pointe insolemment retroussé, une lèvre inférieure avançant et débordant sur la supérieure, avec je ne sais quelle expression méprisante indéfinissable, fixée aux deux coins de la bouche et découlant de la commissure des lèvres45 ; un silence fréquent d’où sortaient d’un ton guttural quelques paroles d’oracle ; il y avait là de quoi faire, en causant, un vis-à-vis de première force à Royer-Collard, bien que celui-ci eût plus de sève et de verdeur. […] Casimir Perier, dont l’état était déjà, désespéré, mourait le 16 mai.

1527. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. (Les Pleurs, poésies nouvelles. — Une Raillerie de l’Amour, roman.) » pp. 91-114

Elle pleura son amie d’enfance, Albertine, qui mourait ; elle eut Délie qui fut une autre amie pour elle ; mère, elle aima, elle pleura sur un berceau et fit de charmants récits et des prières. […] Elle ne porta pas ce coup. — Son réveil, ce fut de mourir à quarante et un ans !

1528. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET. » pp. 177-201

La religion sans âme, la beauté vénale et souillée, ce n’est pas seulement Rome ou Venise ; le peuple méprisé et fort, c’est partout la Terre de labour ; Juliette assoupie et non pas morte, Juliette au tombeau, appelant le fiancé, c’est la Vierge palingénésique de Ballanche, la noble Vierge qui, des ombres du caveau, s’en va nous apparaître sur la plate-forme de la tour ; c’est l’avenir du siècle et du monde. […] Le style du Spectacle dans un Fauteuil n’a plus rien du système ni du pastiche, comme certains endroits des Contes d’Espagne et d’Italie ; mais, en revanche, les incorrections et les négligences n’y sont pas ménagées : la plupart meurt, etc., etc.

1529. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre II. De l’expression »

Il n’a point suivi « les beaux esprits » qui poursuivaient l’élégance à tout prix, et faisaient mourir leurs héros en style académique. […] De son arc toutefois il bande les ressorts Le sanglier, rappelant les restes de sa vie, Vient sur lui, le découd, meurt vengé sur son corps     Et la perdrix le remercie.

1530. (1894) Propos de littérature « Chapitre II » pp. 23-49

Non, ces mains ne pouvaient bénir ; Maudites, certes, étaient-elles ; Puisque j’ai désiré mourir D’avoir vu leurs pâleurs mortelles ; Puisque le vin de mes amours, Amertumeux et plein de larmes, Endolorit le pain des jours, Depuis leur signe aux fatals charmes. […] Ma douleur regarde la mort, Car l’espoir a fermé sa porte Et tristement, le vent du Nord Souffle sur ma chandelle morte.

1531. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XI, les Suppliantes. »

D’autres fois, on murait les portes, et on le laissait mourir de faim dans ce désert d’or et de marbre. […] » — « À parer ces figures d’ornements nouveaux. » — Tu parles par énigmes. » — « Nous nous pendrons aussitôt aux statues des dieux. » — Terrible image qui rappelle les servantes d’Ithaque, qu’Homère nous montre dans l’Odyssée, pendues, à la file, au câble tendu entre les colonnes du palais d’Ulysse. — « De même que les grives aux ailes ployées et les colombes se prennent dans un filet, au milieu des buissons du champ clos de murs où elles sont entrées, et y trouvent un lit funeste ; de même ces femmes avaient le cou serré dans un lacet, afin de mourir misérablement, et leurs pieds ne s’agitèrent point longtemps. » — Cette fois, Pélasgos n’hésite plus, l’horreur le saisit.

1532. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre IV »

On meurt ou l’on souffre à présent de cette plaie d’argent jadis si facile à guérir. […] Il s’éloigne, il s’en va mourir, seul et misérable, dans quelque cachette obscure.

1533. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome IXe. » pp. 138-158

C’était en décembre et au Nord ; c’étaient de vieux soldats, pleins de santé et de vigueur, excités par un climat rigoureux, au lieu d’être abattus par un climat énervant, habitués à toutes les vicissitudes de la guerre, exaltés par l’honneur, n’hésitant jamais entre mourir ou se rendre. […] Je dis Pitt, car si de sa personne il mourut à la peine, ce fut sa politique qui triompha en 1814 par ses continuateurs et ses élèves.

1534. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Œuvres de Barnave, publiées par M. Bérenger (de la Drôme). (4 volumes.) » pp. 22-43

C’est ainsi qu’un ancien, un ami de Cicéron ou de Thraséas, pouvait parler de sa fin prochaine au milieu des siens, et savait mourir. Après tout, mourir à trente-deux ans, au comble d’une vie si remplie, au moment où la jeunesse rayonne encore, où l’expérience acquise n’a pas encore achevé de flétrir en nous l’espérance et la foi à la régénération de la société et aux futures destinées humaines, ce n’est peut-être pas un sort si lamentable.

1535. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame Geoffrin. » pp. 309-329

La Harpe raconte qu’elle avait à sa dévotion un confesseur capucin, confesseur à très large manche, pour la commodité de ses amis qui en auraient eu besoin ; car si elle n’aimait pas, quand on était de ses amis, qu’on se fît mettre à la Bastille, elle n’aimait pas non plus qu’on mourût sans confession. […] On s’entretenait autour de son lit des moyens que les gouvernements pourraient employer pour rendre les peuples heureux, et chacun d’inventer de grandes choses : « Ajoutez-y, dit-elle, le soin de procurer des plaisirs, chose dont on ne s’occupe pas assez. » Elle mourut sur la paroisse de Saint-Roch, le 6 octobre 1777. — Le nom de Mme Geoffrin et son genre d’influence nous ont naturellement rappelé un autre nom aimable, qu’il est trop tard ici pour venir balancer avec le sien.

1536. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — I. » pp. 471-493

Il mourut d’épuisement à l’œuvre et à la peine, le 10 mai 1800, dans sa cinquante et unième année, pauvre et pur, hautement estimé et considéré de tous ceux qui l’avaient connu. […] — « Il est de l’essence de la démocratie, pense-t-il encore, d’aller toucher le pôle tant qu’aucun obstacle ne l’arrête. » Analysant avec une force de dissection effrayante les idées fausses, vagues, les sophismes de divers genres qui ont filtré dans toutes les têtes au milieu d’une nation amollie et de caractères déformés par l’épicuréisme, Mallet du Pan montre comment on n’a jamais opposé au mal que des moyens impuissants et des espérances dont se berçait la présomption ou la paresse : « Cependant on s’endormait sur des adages et des brochures : Le désordre amène l’ordre, disaient de profonds raisonneurs ; l’anarchie recomposera le despotisme. — La démocratie meurt d’elle-même ; la nation est affectionnée à ses rois. » C’est surtout aux émigrés, on le sent, qu’il parle ainsi ; et, tandis que les partis se nourrissaient de leurs illusions et de leurs rêves, les Jacobins seuls marchaient constamment au but : « Les Jacobins seuls formaient une faction, les autres partis n’étaient que des cabales. » Et il montre en quoi consiste cette faction, son organisation intérieure, son affiliation par toute la France, ses moyens prompts, redoutables, agissant à la fois sur toutes les mauvaises passions du cœur humain.

1537. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) «  Mémoires de Gourville .  » pp. 359-379

Il mourut en juin 1703, sans avoir eu le temps de les retoucher ni de les gâter. […] Dans la dernière maladie qu’il fit, étant à Fontainebleau, au moment de mourir, il exprima à Gourville ses intentions pour son testament, et en peu de paroles il lui déclara ce qu’il voulait faire pour ses domestiques et pour lui en particulier, à qui il destinait cinquante mille écus, ajoutant obligeamment qu’il ne pouvait jamais reconnaître assez les services qu’il lui avait rendus : Je ne lui répondis rien, continue Gourville, et m’en allai faire dresser ce testament par son secrétaire, et sans notaire, avec toute la diligence possible.

1538. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

Montesquieu mourut à Paris le 10 février 1755. […] Le xviiie  siècle, qui allait marcher bientôt avec ensemble et prosélytisme comme un seul homme, et qui se donnera tout entier son rendez-vous final aux funérailles solennelles de Buffon (avril 1788), n’était pas encore enrôlé ni même debout à la date où mourut Montesquieu.

1539. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre quatrième. L’expression de la vie individuelle et sociale dans l’art. »

Le formalisme dans l’art, au contraire, finit par faire de l’art une chose tout artificielle et conséquemment morte. […] Le sentiment est la résultante la plus complexe de l’organisme individuel, et il est en même temps ce qui mourra le moins dans cet organisme ; il est la plus profonde formule de la réalité vivante.

1540. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Ivan Tourguénef »

Dans ses huit volumes de romans, où figurent tous les exemplaires de la race humaine, du paysan au prince, de la petite fille aux vieilles moribondes, chaque acteur agit, existe et souffre, avec toute l’intensité d’un être en chair, avec des gestes particuliers, une physionomie minutieusement évoquée, des façons individuelles de se tenir, de s’exprimer, de se comporter, d’aimer ou de mourir, qui suscitent peu à peu chez le lecteur des images nettes et comme familières. […] « La nature m’a beaucoup donné, écrit-il, mais je mourrai sans avoir rien fait.

1541. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « X. Ernest Renan »

» Quand l’Allemagne elle-même, si longtemps nommée la douce et religieuse Allemagne, mais qui a dernièrement recommencé le dix-huitième siècle en mettant de grands mots et des obscurités d’école où le dix-huitième avait émis de petites phrases claires comme de l’eau (car il ne faut pas profaner ce mot de lumière), quand l’Allemagne elle-même attaque Dieu, elle n’y va pas de main morte. […] Caligula philologique à faire mourir de rire qui voudrait que l’humanité n’eût qu’une tête pour la lui couper, si cette tête portait un nom propre !

1542. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ernest Hello » pp. 207-235

Il ne savait donc pas qu’on est solidaire toujours un peu des admirations qu’on inspire, et que si elles sont par trop bêtes, la bonne renommée d’un homme d’esprit peut en mourir ? II Elle n’en est pas morte, cependant, de cette fois du moins.

1543. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXVI » pp. 100-108

Pour couronner le tout, sa femme étant morte, il s’est fait prêtre ; il publie toutes sortes de traductions des Pères qu’il commande à des jeunes gens et auxquelles il met son nom ; le produit de cette espèce de librairie, servie par son journal, lui a été très-fructueux.

1544. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « APPENDICE. — M. DE VIGNY, page 67. » pp. -542

Richelieu était à Tarascon et le roi à Narbonne, tous deux malades de la maladie dont bientôt après ils moururent.

1545. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la Révolution française. Ve et VIe volumes. »

Assez d’autres, il est vrai, à défaut de lui, s’offrirent pour les remplir ; les instruments impurs ne manquent jamais ; mais lui, homme pur, il n’a qu’à rentrer dans son foyer, à s’y asseoir jusqu’à des jours meilleurs, et, s’il le faut, à y mourir.

1546. (1874) Premiers lundis. Tome II « E. Lerminier. Lettres philosophiques adressées à un Berlinois »

Dans sa revue de la société, au premier plan, se rencontraient la philosophie éclectique de la Restauration et la politique doctrinaire, l’une déjà morte, l’autre toujours vivace.

1547. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre II. De la philosophie. »

Rien cependant n’inspire autant d’horreur que la possibilité d’exister uniquement, parce qu’on ne sait pas mourir ; et comme c’est le sort qui peut attendre toutes les grandes passions, un tel objet d’effroi suffit pour faire aimer cette puissance de philosophie, qui soutient toujours l’homme au niveau de la vie, sans l’y trop attacher, mais sans la lui faire haïr.

1548. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Guy de Maupassant »

Personne ne fut plus souvent proclamé « sain » que ce jeune homme qui devait mourir fou.

1549. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre X. Zola embêté par les jeunes » pp. 136-144

Lisez (si vous souriez, je vous prierai de me croire sur parole) la déjà longue série des romans jeunes de Zola, Les Mystères de Marseille, Le Vœu d’une morte… puis lisez les Contes à Ninon, et enfin les Rougon-Macquart, soutiendrez-vous que l’artiste n’ait point évolué, n’ait point lentement et mûrement corrigé sa manière ?

1550. (1890) L’avenir de la science « VII »

Et à cette heure sérieuse à laquelle il faut toujours se transporter pour apprécier les choses à leur vrai jour, qui pourra mourir tranquille, si, en jetant un regard en arrière, il ne trouve dans sa vie que frivolité ou curiosité satisfaite ?

1551. (1890) L’avenir de la science « XX »

Celui qui consacre sa vie à la science peut se tenir assuré de mourir dans la misère, s’il n’a du patrimoine, ou s’il ne peut trouver à utiliser sa science, c’est-à-dire s’il ne peut trouver à vivre en dehors de la science pure.

1552. (1887) Discours et conférences « Discours prononcé à Quimper »

Nous sommes prêts à vivre, quand tant de gens ne parlent que de mourir.

1553. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 372-383

La plupart des Grands, sans en excepter les Princes, semblables à ces arbres nés dans le silence, & accrus à l’ombre des forêts, vivent & meurent sans que leur existence & leur chute fassent une sensation & un vide dans le monde : il n’en est pas de même de l’homme qui a su se rendre utile par ses lumieres ou ses talens ; il est connu par-tout où ses Ouvrages pénetrent ; & plus ou moins honoré de ses Contemporains, selon qu’il s’est montré plus ou moins supérieur dans le genre qu’il a embrassé, il peut se flatter d’exister encore avec honneur dans la mémoire des générations futures.

1554. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1851 » pp. 1-9

À vingt ans, il avait des opinions républicaines et une grande barbe, et il portait un chapeau pointu couleur feuille morte, disait : « mon parti », écrivait dans la Liberté de penser, rédigeait de terribles articles contre l’inquisition, et prêtait de l’argent au philosophe X… Tel était notre jeune cousin, Pierre-Charles, comte de Villedeuil.

1555. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre VIII »

Club, prononcé à l’anglaise, est en train de mourir ; l’instinct revient à cercle.

1556. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Milton, et Saumaise. » pp. 253-264

Une de ses filles, morte il n’y a pas longtemps à Londres, y mendioit des secours publics.

1557. (1761) Salon de 1761 « Récapitulation » pp. 165-170

Comptez mon ami ; le portrait du roi par Vanlo ; la Magdelaine dans le désert ; la Lecture ; le grand paysage de Boucher ; le St Germain qui donne une médaille à Ste Genevieve ; le St Andre de Deshays, son St Victor ; son St Benoit près de mourir ; le Socrate condamné ; le Bénédicité de Chardin ; le Soleil couchant de Lebel ; les deux Vues de Bayonne ; le Jeune élève de Drouais ; le Diomede de Doyen ; la Blanchisseuse ; le Paralytique, le Fermier brûlé, le portrait de Babuti par Greuse ; le crucifix de bronze de Roland de la Porte ; et d’autres qui ont pu m’échapper.

1558. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Lépicié » pp. 275-278

Ceux qui touchent au plan général et commun sont à la portée de la main, ils sont persécutés ; ceux qui s’en élèvent à une grande distance ne sont pas apperçus, ils meurent oubliés et tranquilles.

1559. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 3, que l’impulsion du génie détermine à être peintre ou poëte, ceux qui l’ont apporté en naissant » pp. 25-34

Bernoulli, qui s’étoit acquis dès la jeunesse une si grande réputation, et qui mourut il y a vingt-sept ans, professeur en mathematiques dans l’université de Basle, s’étoit livré à cette science malgré les efforts que son pere avoit faits durant long-temps pour l’en détourner.

1560. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — VII »

Tout cela, c’est le Taine des dernières années qui allait mourir du diabète à soixante-six ans.

1561. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XV. De Tacite. D’un éloge qu’il prononça étant consul ; de son éloge historique d’Agricola. »

Le début, qui est d’une grande beauté, est d’une éloquence tout à la fois simple et forte ; il y parle de l’ancien usage de célébrer les grands hommes, de l’indifférence de son siècle pour ceux qui l’honorent, du danger de louer la vertu sous les tyrans, des effets de l’oppression, qui fait mourir les arts en étouffant le génie.

1562. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre III. Combinaison des deux éléments. »

Cette idée, Rousseau l’a tirée tout entière du spectacle de son propre cœur410 : homme étrange, original et supérieur, mais qui, dès l’enfance, portait en soi un germe de folie et qui à la fin devint fou tout à fait ; esprit admirable et mal équilibré, en qui les sensations, les émotions et les images étaient trop fortes : à la fois aveugle et perspicace, véritable poète et poète malade, qui, au lieu des choses, voyait ses rêves, vivait dans un roman et mourut sous le cauchemar qu’il s’était forgé ; incapable de se maîtriser et de se conduire, prenant ses résolutions pour des actes, ses velléités pour des résolutions et le rôle qu’il se donnait pour le caractère qu’il croyait avoir ; en tout disproportionné au train courant du monde, s’aheurtant, se blessant, se salissant à toutes les bornes du chemin ; ayant commis des extravagances, des vilenies et des crimes, et néanmoins gardant jusqu’au bout la sensibilité délicate et profonde, l’humanité, l’attendrissement, le don des larmes, la faculté d’aimer, la passion de la justice, le sentiment religieux, l’enthousiasme, comme autant de racines vivaces où fermente toujours la sève généreuse pendant que la tige et les rameaux avortent, se déforment ou se flétrissent sous l’inclémence de l’air. […] Avec tout cela, je mourrai persuadé que, de tous les hommes que j’ai connus en ma vie, nul ne fut meilleur que moi. » — À Mme B. 16 mars 1770. « Vous m’avez accordé de l’estime sur mes écrits ; vous m’en accorderiez plus encore sur ma vie si elle vous était connue, et davantage encore sur mon cœur s’il était ouvert à vos yeux. […] Confessions, 2e partie, IX, 361. « J’étais si ennuyé des salons, des jets d’eau, des bosquets, des parterres et des plus ennuyeux montreurs de tout cela ; j’étais si excédé de brochures, de clavecin, de tri, de nœuds, de sots bons mots, de fades minauderies, de petits conteurs et de grands soupers, que, quand je lorgnais du coin de l’œil un simple pauvre buisson d’épines, une haie, une grange, un pré, quand je humais, en traversant un hameau, la vapeur d’une bonne omelette au cerfeuil…, je donnais au diable le rouge, les falbalas et l’ambre, et, regrettant le dîner de la ménagère et le vin du cru, j’aurais de bon cœur paumé la gueule à Monsieur le chef et à Monsieur le maître qui me faisaient dîner à l’heure où je soupe et souper à l’heure où je dors, mais surtout à Messieurs les laquais qui dévoraient des yeux mes morceaux, et, sous peine de mourir de soif, me vendaient le vin drogué de leur maître, dix fois plus cher que je n’en aurais payé de meilleur au cabaret. » 418.

1563. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre II. Le public en France. »

Sans doute il y a beaucoup de déistes, surtout depuis Rousseau ; mais je ne crois pas que, sur cent personnes du monde, on trouve encore à Paris dix chrétiens ou chrétiennes. « Depuis dix ans514, dit Mercier en 1783, le beau monde ne va plus à la messe ; on n’y va que le dimanche pour ne pas scandaliser les laquais, et les laquais savent qu’on n’y va que pour eux. » Le duc de Coigny515 dans ses terres auprès d’Amiens, refuse de laisser prier pour lui, et menace son curé, s’il prend cette licence, de le faire jeter en bas de sa chaire ; son fils tombe malade, il empêche qu’on apporte les sacrements ; ce fils meurt, il interdit les obsèques et fait enterrer le corps dans son jardin ; malade lui-même, il ferme sa porte à l’évêque d’Amiens qui se présente douze fois pour le voir, et meurt comme il a vécu. — Sans doute un tel scandale est noté, c’est-à-dire rare ; presque tous et presque toutes « allient à l’indépendance des idées la convenance des formes516 ». […] Si on l’esquive, c’est sous un prétexte décent ; mais, si on lui complaît, ce n’est que par bienséance ; « à Surate, quand on meurt, on doit tenir la queue d’une vache dans sa main ».

1564. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXIXe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe (2e partie) » pp. 161-232

et déjà mourir ! […] Veux-tu donc que je meure ? […] Il jouait avec l’amour, dans sa correspondance avec Bettina d’Arnim, jeune fille de dix-neuf ans, à laquelle il permettait de l’adorer sur son déclin ; il voulait mourir dans l’ivresse calme des illusions.

1565. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque. Deuxième partie. » pp. 225-303

La division du peuple en professions arbitraires et infranchissables ; La suppression de la propriété, seule responsabilité de l’homme rétribué héréditairement par son travail ; La communauté des biens, c’est-à-dire de la misère ; La communauté des femmes et des enfants, qui supprime du même coup les trois amours dont se perpétue l’espèce humaine : l’amour conjugal, l’amour maternel, l’amour filial, et toutes les vertus aussi humaines que divines qui émanent de ces trois sources d’amour ; L’impudeur, aussi flagrante que l’impudicité, dans cette gymnastique des femmes de tout âge s’exerçant nues devant le peuple à des luttes dégoûtantes d’obscénité ; Le meurtre des enfants mal conformés, punissant le tort de la nature par la mort de ses victimes ; La population maintenue, au moyen d’une loi révoltante, au même nombre par l’immolation des hommes nés en dépit de la loi ; Les arts, proscrits de cette démocratie des métiers, de peur que l’esprit ne se corrompe par ses plus belles manifestations intellectuelles ; Enfin, on ne sait quel gouvernement de vieillards, écoliers jusqu’à cinquante ans dans des gymnases de sophistes, et n’arrivant au gouvernement qu’à l’âge où les passions généreuses meurent généralement dans l’homme en même temps que les passions fougueuses, c’est-à-dire un gouvernement d’eunuques sur un troupeau de brutes esclaves : Voilà, encore une fois, ce délire d’un philosophe que l’on continue à appeler le divin Platon ! […] L’empire romain devait naître et mourir en peu de temps. […] Elle a vécu, elle vit et elle vivra, parce qu’elle se transforme et qu’elle meurt et renaît sans cesse.

1566. (1908) Dix années de roman français. Revue des deux mondes pp. 159-190

L’atroce détresse de ces malheureuses, desséchées moralement et physiquement étiolées sous le ciel paradisiaque de Stamboul, parce que sur elles semble retombée la lourde pierre d’une civilisation morte, voilà ce que les Désenchantées ont pour jamais buriné dans notre mémoire. […] René Bazin pourrait se rattacher aux romanciers sociaux, puisqu’il analysa avec une émotion ennoblie de pitié et colorée de réalisme, la condition si attachante des ouvrières de la mode dans De toute son âme ; la dure et humble destinée des nourrices « déracinées » dans Donatienne ; la grave question, toujours actuelle, de la ruine agraire par l’exode du paysan vers la ville dans la Terre qui meurt. […] Les personnes qui les ont lus, depuis la Terre qui meurt jusqu’à Donatienne et au Blé qui lève, savent quelle émotion et quel souvenir charmé elles en ont gardés.

1567. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

Qui résistera à vos paroles et ne sera pas obéissant à tous vos ordres, qu’il meure ! […] Ils mourraient de faim avant de devenir philosophes. […] Chacun ne tirerait de revenu que de sa terre et n’en tirerait précisément que ce qu’il lui faut pour ne pas mourir de faim. […] Quant aux pays catholiques, non seulement la culture des terres y est abandonnée, mais même l’industrie y est pernicieuse ; elle ne consiste qu’à apprendre cinq ou six mots d’une langue morte. […] Alors mourir pour son pays c’est aller au martyre ; violer les lois c’est être impie et soumettre un coupable à l’exécration publique c’est le dévouer au courroux des dieux.

1568. (1894) Critique de combat

Comme si la poésie n’était pas morte et enterrée ! […] Il était convenu que, pour être un grand économiste, il fallait appartenir à l’école orthodoxe du « Laissez faire, laissez mourir ». […] Il n’y va pas de main morte, le régent d’Alfanie ! […] Pour ressusciter la foi morte, il faudrait réparer les brèches irréparables faites au dogme par la science et la philosophie. […] Victor Hugo a écrit : Ne dites pas : mourir.

1569. (1897) Aspects pp. -215

Grymalkin regarda au dehors : la campagne dormait toute morte de silence et d’hiver. […] Ils réveillent les inertes : ils répandent la vie en donnant la mort — et ils meurent eux-mêmes, désintéressés, en jetant à la face de tous leur sang fécond. […] Enfin, épuisé par tant de fatigues, par la misère et les déceptions, il meurt à Berne, d’une maladie de cœur, le 6 juillet 1876. […] Que tout meure, que tout croule, que tout retourne à la nuit du chaos ! […] D’autres, comme Laforgue, qui en mourut, deviennent Hartmanniaques.

1570. (1802) Études sur Molière pp. -355

Dans l’acte II, scène ire , Lisette avance que, « par bonnes raisons, il ne faut jamais dire, une telle personne est morte d’une fièvre ou d’une fluxion de poitrine ; mais elle est morte de quatre médecins et de deux apothicaires ». […] Thalie a dicté l’une à visage découvert, dans la crainte que la finesse de ses traits, de son sourire, de sa malignité, n’échappât à son favori ; pour inspirer l’autre, elle a pris son masque le plus grotesque ; quant aux deux dernières, la Muse comique semble n’y être pour rien, aussi n’ont-elles vu le jour qu’à Saint-Germain, où elles moururent presque en naissant, malgré quelques jolis vers noyés dans beaucoup de fadeurs et de flatteries exagérées. Occupons-nous d’abord de la pièce qui ne mourra jamais. […] Parce que je me suis accoutumé peu à peu à me passer d’exposition, que j’en dispense les auteurs, et qu’il me plaît d’applaudir aujourd’hui ce que j’applaudissais hier. — Voilà qui est sans réplique ; par la même raison, vous applaudirez demain, après-demain, aux mêmes fautes, et le parterre, en souverain qui ne meurt jamais, éternisera la plus absurde des traditions. […] , et à la suite duquel les convives, pris de vin, résolurent d’aller se jeter dans la rivière, autant pour se débarrasser, disaient-ils, d’une vie toujours orageuse, que pour avoir le plaisir de mourir ensemble.

1571. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

Le peintre qui travaille « de chic » a devant les yeux la scène imaginaire qu’il traduit à meure. […] La crédulité n’est pas morte ; elle fut même rarement plus vigoureuse ; mais une certaine naïveté est morte. […] Rien ne meurt plus vite que le style qui ne s’appuie pas sur la solidité d’une forte pensée. […] Cymodocée est morte étouffée sous sa trop riche et trop lourde robe.                                 […] On ne peut le nier : l’imparfait du subjonctif est en train de mourir.

1572. (1856) Articles du Figaro (1855-1856) pp. 2-6

» Julien se mourait de trouver un cœur dans lequel il pût décharger le poids de ses secrets. […] Quelle multiplicité de leçons pour la foule, et surtout quelle variété inépuisable de sujets pour le poète La comédie est morte, nous dit-on. […] Comme ils étaient sur le point de mourir d’inanition, vint à passer M.  […] Jaccottet n’eût pas mieux fait de le laisser mourir de sa belle mort, à cet obscur coin de borne de l’indifférence publique. […] celle-là, nous l’avions crue morte, et nous applaudissions du cœur et de la main à ce trépas inespéré. — Fou que nous étions !

1573. (1856) À travers la critique. Figaro pp. 4-2

» Ce plaît-il dans lequel l’écrivain s’embarrasse à plaisir et se contredit lui-même, est un de ces éclairs de génie de la même famille que le qu’il mourût du vieil Horace et le Moi de Médée, avec un rajeunissement complet de la forme. […] Amédée Achard Ce littérateur doit être rangé parmi les écrivains sans tempérament qui meurent de l’onanisme littéraire. […] Un écrivain du siècle dernier, qui faisait, lui aussi, le métier de courir les salons, mais qui avait beaucoup d’esprit, Grimm disait à son ami Diderot, philosophe mal léché : « Vous mourrez dans votre chenil. […] Après avoir inutilement cherché un levier, — des souscripteurs, — n’ayant pas les moyens de vivre, elle eut l’esprit de savoir mourir. […] Dennery primer Molière et le Médecin des enfants en être l’esprit et le Misanthrope la lettre morte !

1574. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1888 » pp. 231-328

Ce sont les articles faits d’avance sur les gens qui sont en train de mourir, et qu’on garde, même quand ils réchappent, pour éviter de payer un autre article dans l’avenir. […] Mardi 24 juillet L’idée, que la planète la Terre peut mourir, peut ne pas durer toujours, est une idée qui me met parfois du noir dans la cervelle. […] Puis la conversation devient sérieuse, et l’on s’entretient de la force vitale du mal, des atomes crochus qui font que le poitrinaire recherche la poitrinaire, le fou, la folle, comme pour le réengendrer, en le doublant ce mal, — ce mal qui pourrait peut-être mourir, s’il restait isolé. […] Là-dessus, Daudet se met à parler des gens de valeur, que des circonstances, la paresse, n’ont jamais laissé se produire, et qui meurent tout entiers, faute d’un Eckermann, et le nom d’un ami lui vient à la bouche, comme celui d’un de ces hommes, tout plein de choses délicates, et qui aura passé dans la vie, sans laisser de trace. […] Alors le père lui racontait, que l’entendant, une nuit, tout doucement pleurer dans son lit, il lui demandait ce qu’il avait, et que l’enfant lui répondait : « Ça m’ennuie de mourir ! 

1575. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome I

Et quel est l’homme de bien qui balancerait à mourir pour son pays, quand sa mort peut lui être utile ? […] Il pousse la barbarie jusqu’à reprocher à cette pauvre femme de ne pas mourir. Sabine , dit-il, parle toujours de mourir ; il n’en faut pas tant parler quand on ne meurt point. Je crois que si on eût demandé à Voltaire ce qu’il aurait voulu que fît Sabine pour être intéressante, il aurait répondu : Qu’elle mourût. […] Zaïre, le chef-d’œuvre du moins religieux des poètes, est aussi une sainte et une martyre, puisqu’elle est tuée en allant au baptême, puisqu’elle meurt victime tout à la fois de la piété chrétienne et de la piété filiale.

1576. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — II. Duclos historien » pp. 224-245

» Le portrait de la première Dauphine, de Marguerite d’Écosse, celle qui donna le baiser de sapience à Alain Chartier endormi, et qui mourut à la fleur de l’âge, victime de la calomnie et abreuvée de dégoûts, en disant pour dernière parole : « F. de la vie ! […] Elle en dit tant, et avec un air si simple, si indifférent sur les partis et si touchant sur l’intérêt qu’elle prenait au roi, qu’il lui répondit qu’elle avait raison ; qu’il suivrait son conseil en tout ce qu’il pourrait là-dessus, parce qu’il sentait que ces gens-là le feraient mourir… Or, que fait Duclos ?

1577. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — II. (Fin.) » pp. 257-278

Quinze jours après, le père mourut, et j’assistai à la cérémonie funèbre dans le même lieu où j’avais assisté à celle du mariage. […] Il mourut subitement dans le joli pays d’Aulnay, chez son ami le sénateur Lenoir-Laroche, le 13 octobre 1803. — Dans ce souvenir rapide que je viens de lui consacrer et dont j’ai cru qu’il était digne, je ne vais point jusqu’à conseiller de relire aucun ouvrage de lui : « Ceux qui ont de l’âme, disait-il, prêtent à mes ouvrages ce qui leur manque : ceux qui ne les lisent point avec leur âme leur refusent même ce qu’ils ont. » S’il disait cela en son temps et à l’heure de la publication, que sera-ce à plus de cinquante ans de distance ?

1578. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — III » pp. 132-153

Il mourut en janvier 1757 ; nous avons de lui ses remarques sur ses lectures jusqu’en décembre 1756, et nous le suivons dans l’intimité. […] Dix-huit mois avant sa mort, d’Argenson, qui mourut à soixante-deux ans et qui était encore plein de santé et de verdeur, se promettait une longue vieillesse : il se la prédisait sous une forme indirecte dans un portrait intitulé Goûts d’un vieux philosophe, et qui est de juin ou juillet 1755 : Le vieux Damon m’a dit avoir conservé ses goûts sans passions en plus grand nombre et le plus longtemps qu’il avait pu.

1579. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Souvenirs militaires et intimes du général vicomte de Pelleport, publiés par son fils. » pp. 324-345

Dugommier, nommé général en chef, s’applique à réorganiser l’armée ; la seconde campagne (1794) s’ouvre par de beaux faits d’armes du vieux Dagobert, qui meurt au milieu des troupes « dont il a guidé l’inexpérience avec un dévouement patriotique ». […] Le récit qu’il fait de la campagne de Russie où il eut une si belle conduite sous les ordres de Ney à l’arrière-garde de la retraite, commence par un aveu d’une effusion extrême, et qui exprime bien le genre d’intérêt religieux que ces militaires esclaves du devoir et de l’honneur attachent à la consécration des souvenirs : L’un des grands regrets que je puisse éprouver aujourd’hui, écrivait Pelleport dans les dernières années de sa vie, c’est de penser qu’il me faudra peut-être mourir sans avoir pu lire dans Thiers l’histoire de notre immortelle campagne de Russie.

1580. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français et de la question des Anciens et des Modernes »

Il paraît que la guerre de Pyrrhus et des Romains l’arracha à sa patrie, qu’il passa le reste de sa vie errant, et mourut dans l’exil. […] Une autre fois, c’est un simple portefaix, l’honnête Miccalion, qui fait son offrande aux dieux : « Cette statue, ô Passant, est une consécration du portefaix Miccalion ; mais elle n’a pas échappé à Mercure, la piété du portefaix qui, dans son pauvre métier, a trouvé moyen de lui faire une offrande : toujours et partout l’homme de bien est homme de bien. » Mais la fleur des épigrammes de Léonidas en faveur du pauvre monde me paraît être l’épitaphe qu’il composa pour la bonne ouvrière Platthis, morte à quatre-vingts ans : « Soir et matin, la vieille Platthis a bien souvent repoussé le sommeil pour combattre la pauvreté ; elle a chanté aussi sa petite chanson à la quenouille et au fuseau, son compagnon d’ouvrage, jusqu’au terme de la blanche vieillesse ; se tenant à son métier jusqu’à l’aurore, elle parcourait avec les Grâces le stade de Minerve, dévidant d’une main tremblante, autour de son genou tremblant, l’écheveau qui devait suffire à la trame, l’aimable vieille !

1581. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite et fin.) »

Louis xviii le fit ministre de la marine ; mais les forces du fidèle serviteur étaient à bout, et Malouet mourait bien avant la fin de cette année 1814 (6 septembre). […] Lorsque Raynal mourut, il faisait partie de l’Institut national nouvellement créé, et dans la première séance générale qui se tint au Louvre en toute solennité le 15 germinal de l’an iv (4 avril 1796), Le Breton, secrétaire de la Classe des Sciences morales et politiques, lut sur lui une Notice dont Ginguené a parlé ainsi dans la Décade : « Ceux qui ont une connaissance exacte des secours qu’il avait eus pour la composition de son Histoire philosophique et politique ont trouvé que l’auteur de cette Notice traitait un peu trop problématiquement cette question assez importante, qu’il fallait peut-être résoudre avec une équité sévère.

1582. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [I] »

Mais, quelque estime que nous ayons pour les savants étrangers qui s’occupent de nous à ce degré et qui veulent bien entrer dans notre inventaire domestique, quelque reconnaissance que nous leur devions, c’est toujours pour nous une impression singulière de nous voir ainsi établis par eux sur une table de dissection, comme une nature morte, comme une langue morte.

1583. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [II] »

Admirateur et adorateur pieux des vieux maîtres, dans un beau désespoir de les égaler et de les atteindre, on se serait dit volontiers avec ce docte allemand (Creutzer) : « Il ne nous reste, à nous autres modernes, qu’à les aimer. » On pouvait se dire encore avec Goethe : « Négliger ces vieux modèles, Eschyle, Homère, c’est mourir. » J’ai surtout en vue nos Français attiques du bon temps, non ceux que le xviiie  siècle nous a livrés sur la fin, un peu gâtés ou fort affaiblis, mais ceux-ci mêmes, dont était Fontanes, et quand ils se maintenaient dans cette noble mesure de goût, avaient leur manière d’être et de sentir heureuse et rare. […] Du Bellay donne très justement le précepte d’user à propos de l’infinitif pris substantivement : l’aller, le chanter, le vivre, le mourir, le renaître… La Fontaine a bien su en user de lui-même : Maître François dit que Papimanie Est un pays où les gens sont heureux.

1584. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ULRIC GUTTINGUER. — Arthur, roman ; 1836. — » pp. 397-422

Celui qui, les sachant, trahirait leur mystère, Sans doute, en les disant, mourrait ! […] je mourrai de douceur si vous ne modérez ma joie. » Mais eux disaient cela après avoir bu de l’eau du désert et mangé des racines ; il est vrai que c’était aussi après avoir prié. — Nourriture céleste et abondante qui donne à tout une exquise saveur ! 

1585. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LE COMTE XAVIER DE MAISTRE. » pp. 33-63

Mais le vent des Alpes souffla ; l’oranger fleurit peu et bientôt mourut. […] Le comte Xavier était si peu connu en France, même après cette publication, qu’on l’attribua à son frère Joseph, et, comme celui-ci était venu à mourir, une dame d’esprit se crut libre carrière pour retoucher l’opuscule à sa guise.

1586. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « HISTOIRE DE LA ROYAUTÉ considérée DANS SES ORIGINES JUSQU’AU XIe SIÈCLE PAR M. LE COMTE A. DE SAINT-PRIEST. 1842. » pp. 1-30

Quand elle meurt de l’affreux supplice, quand elle disparaît attachée aux crins d’un coursier sauvage, c’est la royauté elle-même, c’est la royauté asiatico-germanique à l’agonie, que le coursier féodal emporte. — Et le talent aussi, l’imagination dans le style, n’est-ce donc pas une espèce de coursier de Mazeppa ? […] Il mourut à trente-trois ans, formant l’anneau, et un anneau très-entier, entre Clovis et Charlemagne.

1587. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. Joubert »

« Quelque aménité doit se trouver même dans la critique ; si elle en manque absolument, elle n’est plus littéraire… Où il n’y a aucune délicatesse, il n’y a point de littérature. » A aucune en particulier, mais à toutes en général, ce qui ne peut, certes, blesser personne, dans ce sexe plus ou moins émancipé : « Il est un besoin d’admirer, ordinaire à certaines femmes dans les siècles lettrés, et qui est une altération du besoin d’aimer. » Et ces pensées qui semblent dater de ce matin, étaient écrites il y a quinze ans au moins, avant 1824, époque où mourait M.  […] Soixante-dix ans moins trois jours ; il mourut le 3 mai.

1588. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre III. L’Histoire »

Il mourut en 1319. Joinville écrivit son histoire à la requête de Jeanne de Navarre, comtesse de Chamapgne et reine de France : comme elle mourut en 1305, le livre de Joinville fut offert, en 1309, à son fils Louis (plus tard Louis X).

1589. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre I. Roman de Renart et Fabliaux »

D’un seul côté, ils sont moins vivants : car ils ne meurent pas, et rien n’est vraiment vivant que ce qui meurt.

1590. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Anatole France »

Mais, Hippias étant revenu, elle ne peut plus résister à son amour : ils fuiront tous deux, ou plutôt ils iront se jeter aux pieds de Kallista et la fléchiront… Kallista survient et chasse le jeune homme avec des imprécations ; mais Daphné le rejoint, la nuit, au tombeau des aïeux et meurt dans ses bras, car elle a pris du poison et l’évêque Théognis vient trop tard la délier du vœu de sa mère. […] Car Clémentine n’est pas morte, M. 

1591. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « La jeunesse du grand Condé d’après M. le duc d’Aumale »

On vit et on meurt isolé de l’immense humanité. […] Il le recommande avant de mourir, au roi qui, mourant lui-même, lui donne un commandement en chef.

1592. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre IX. La littérature et le droit » pp. 231-249

Dans la Princesse de Clèves, l’époux meurt de chagrin et de jalousie en séparant par sa mort ceux qu’il a séparés de son vivant. […] André Chénier, avant de mourir par eux, décoche un trait envenimé « aux juges tigres, nos seigneurs ».

1593. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVIII. Formule générale et tableau d’une époque » pp. 463-482

Phèdre a des remords de chrétienne, Andromaque des délicatesses et des coquetteries de princesse habituée à la vie de cour ; Junie se fait vestale, comme une fille noble, ayant perdu son fiancé, entre en religion ; Mithridate expire aussi majestueusement que mourra Louis XIV. […] Quand vient à mourir un prince, une princesse, un homme de haut parage, on tapisse une église de tentures superbes ; on dresse au milieu de la nef un catafalque qui cache l’autel ; on expose des tableaux qui racontent les hauts faits du personnage et de sa famille ; on construit des estrades où s’entassent marquises, duchesses et grands seigneurs ; on fait en un mot de la cérémonie funéraire une pompe théâtrale capable d’effacer les plus belles décorations des ballets royaux.

1594. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VII »

Pour qu’il se repente, pour qu’il demande grâce, il faut que Léa noblement affligée du mal qu’elle a fait, vienne promettre à Camille un éloignement éternel ; il faut encore qu’il lise une lettre où la pauvre enfant, se sentant de trop, lui annonçait qu’elle allait mourir, puisque sa mort le rendrait heureux. […] Mais, au point où le poète a poussé la frénésie de son démoniaque, on comprend qu’il ne lui ait fallu rien de moins que l’évocation d’un cadavre, rien de moins que l’image de cette petite morte retirée de l’eau pour lui faire recouvrer la raison et le sens moral.

1595. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Broglie. » pp. 376-398

Il mourut sur l’échafaud, à l’âge de trente-quatre ans. Avant de mourir, il s’était fait amener son jeune fils, le duc de Broglie actuel, âgé seulement de huit ans, et lui avait recommandé, malgré tout, de ne jamais déserter la cause de la liberté.

1596. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Mme de Caylus et de ce qu’on appelle Urbanité. » pp. 56-77

Quand il mourut en Flandre (novembre 1704), « il fit plaisir à tous les siens ; il était blasé, hébété depuis plusieurs années de vin et d’eau-de-vie », et on le tenait hiver comme été à la frontière, avec défense d’approcher ni de sa femme ni de la Cour. […] Elle mourut en avril 1729, âgée seulement de cinquante-six ans.

1597. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Biographie de Camille Desmoulins, par M. Éd. Fleury. (1850.) » pp. 98-122

C’est bien lui encore qui, même revenu à une sorte de résipiscence dans son Vieux Cordelier, dira : « Je mourrai avec cette opinion, que pour rendre la France républicaine, heureuse et florissante, il eût suffi d’un peu d’encre et d’une seule guillotine ?  […] Il mourut sur l’échafaud le 5 avril 1794.

1598. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La duchesse du Maine. » pp. 206-228

Née en 1676, la duchesse du Maine est morte en 1753, il n’y a pas tout à fait cent ans. […] On meurt comme on a vécu… — Ajoutez, pour achever de la peindre, qu’aimant à ce point la comédie et la jouant sans cesse, elle la jouait mal, et qu’elle n’en était que plus applaudie.

1599. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Condorcet, nouvelle édition, avec l’éloge de Condorcet, par M. Arago. (12 vol. — 1847-1849.) » pp. 336-359

Condorcet, dans son rêve d’Élysée terrestre, oublie un genre de mort qui pourrait devenir fréquent si la chose se réalisait jamais, c’est qu’on y mourrait d’ennui. […] Condorcet, proscrit avec les Girondins, mourut à Bourg-la-Reine, dans la nuit du 7 au 8 avril 1794 ; il s’empoisonna lui-même en se voyant arrêté.

1600. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « L’abbé de Choisy. » pp. 428-450

Il en avait vingt-deux quand elle mourut (1666). […] Point d’ambition, point de vues : plus attentive à songer à ce qu’elle aimait qu’à lui plaire ; toute renfermée en elle-même et dans sa passion, qui a été la seule de sa vie ; préférant l’honneur à toutes choses, et s’exposant plus d’une fois à mourir, plutôt qu’à laisser soupçonner sa fragilité ; l’humeur douce, libérale, timide ; n’ayant jamais oublié qu’elle faisait mal, espérant toujours rentrer dans le bon chemin ; sentiments chrétiens qui ont attiré sur elle tous les trésors de la miséricorde, en lui faisant passer une longue vie dans une joie solide, et même sensible, d’une pénitence austère.

1601. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Hégésippe Moreau. (Le Myosotis, nouvelle édition, 1 vol., Masgana.) — Pierre Dupont. (Chants et poésies, 1 vol., Garnier frères.) » pp. 51-75

Qu’il suffise de rappeler qu’Hégésippe Moreau, au moment même où il venait de trouver un éditeur pour ses vers, et où Le Myosotis publié avec luxe (1838) et déjà loué dans les journaux allait lui faire une réputation, entrait sans ressource à l’hospice de la Charité et y mourait le 20 décembre 1838, renouvelant l’exemple lamentable de Gilbert et faisant un pendant trop fidèle au drame émouvant de Chatterton, dont l’impression était encore toute vive sur la jeunesse. […] Moreau est un poète ; il l’est par le cœur, par l’imagination, par le style : mais chez lui rien de tout cela, lorsqu’il mourut, n’était tout à fait achevé et accompli.

1602. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame Necker. » pp. 240-263

On peut juger un homme public, mort ou vivant, avec quelque rudesse ; mais il me semble qu’une femme, même morte, quand elle est restée femme par les qualités essentielles, est un peu notre contemporaine toujours ; elle l’est surtout quand elle n’a cessé de se continuer jusqu’à nous par une descendance de gloire, de vertu et de grâce. […] Mme Necker avait donné son chant du cygne ; elle mourut en mai 1794, dans une habitation près de Lausanne ; elle n’avait que cinquante-quatre ans.

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