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1818. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre IV. L’ironie comme attitude morale » pp. 135-174

Son caractère, ses désirs, ses idées seraient certainement plus ou moins heurtés et froissés partout, mais ils pourraient l’être moins qu’ils ne le sont. […] Leur ironie — quand elle n’est pas encore une simulation de timide impressionnable, qui s’adapte mal au caractère, craque et se fend çà et là — reste roide et guindée. […] Elle se rattache alors à la fausse impassibilité que j’ai étudiée dans Les Mensonges du caractère (Paris, F. 

1819. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Août 1886. »

Cette modification avait pour but — sans rien changer à l’esprit général et à l’organisation pratique de l’Association — de donner à l’Association un caractère légal qui lui permît d’établir ensuite une « Fondation-Wagner » et de recevoir des legs. […] Toute comparaison est impossible entre les théâtres ordinaires et celui de Bayreuth ; le caractère particulier de Bayreuth, l’emplacement du théâtre, l’air de sérénité qu’on y respire, l’imposant mystère de la salle, tout cela s’ajoute en cette communion qui nécessairement unit les assistants … Ainsi apparaît Tristan, transfiguré de ce que nous l’avions vu à Munich ou ailleurs. […] Mais, immédiatement après, au printemps de 1856, il esquissa les Vainqueurs, où réapparut, sous le nom d’Ananda, ce Parsifal du renoncement, et spécialement du renoncement à l’amour entre les sexes : le violent amour sensuel de Prakriti et sa finale rédemption par le vœu de chasteté nous montrent la première esquisse du caractère de Kundry (Voir Revue Wagnérienne, 1885, XI, 308).

1820. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1858 » pp. 225-262

Il lui a attribué un caractère de sérénité tout humaine, une espèce de beauté ronde, une santé presque junonienne. […] Ces âmes d’hommes de lettres-là font tache dans ce libre xviiie  siècle par la bassesse sourde du caractère, sous la hauteur des mots et l’orgueil des idées. […] De Cimabué à la Renaissance, les yeux vont de maître en maître en s’éloignant du nez, quittent le caractère du rapprochement byzantin, regagnent les tempes, et finissent par revenir chez le Corrège et chez André del Sarte à la place où les mettaient l’Art et la Beauté antique.

1821. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « II. M. Capefigue » pp. 9-45

Mme la duchesse de Berry, « fine et charmante de caractère » (surtout !) […] L’inconséquence entre les opinions qu’on a et la vie qu’on mène est bien plus commune que l’hypocrisie, ce vice des sociétés fortes, qui gêne comme un masque et suppose une volonté et un caractère inconnus aux sociétés faibles, lâchement et cyniquement sincères, mais cette inconséquence ne fausse pas la vérité des principes, parce qu’en pratique elle les viole, et tout au contraire, elle la proclame de plus haut ! […] Le fait qu’on nous impute est faux, mais il entre dans la donnée générale de notre caractère et de nos habitudes, et voilà pourquoi il est admis.

1822. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’avenir du naturalisme »

« Quand on aura prouvé, écrit Zola, que le corps de l’homme est une machine, dont on pourra un jour démonter et remonter les rouages au gré de l’expérimentateur, il faudra bien passer aux actes passionnels et intellectuels de l’homme… On a la chimie et la physique expérimentale, on aura la physiologie expérimentale ; plus tard encore on aura le roman expérimental… Nous devons opérer sur les caractères, sur les passions, sur les faits humains et sociaux, comme le chimiste et le physicien opèrent sur les corps bruts, comme le physiologiste opère sur les corps vivants. […] Tout le caractère de son œuvre et du regard qu’il jeta sur le monde dépend incontestablement de ce dénuement prolongé de l’adolescence. Le jeune homme timide et réservé — car tel a été, dit-on le caractère de Zola, dans la jeunesse comme dans l’âge mûr — était enfermé avec ses fraîches énergies dans une mansarde, d’où le panorama du monde de Paris se déployait au-dessous de lui.

1823. (1898) Les personnages de roman pp. 39-76

Avec mon caractère faible, je suis bien en danger. […] La seconde opération de l’esprit est bien différente, celle de la mise au point, l’approfondissement des caractères, la combinaison des scènes, la création des personnages accessoires que l’idée maîtresse n’a pas nécessairement évoqués. […] L’intrigue elle-même, si elle est bien conduite, supprime une foule d’actions communes et sans intérêt ; elle simplifie le personnage, et c’est un effet de l’art ; elle l’engage en des situations où il reste fidèle au caractère d’élection, mais qu’il n’a pas traversées, et dont on peut dire seulement qu’il les eût traversées de cette manière.

1824. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Académie française — Réception de M. Émile Augier » pp. 317-321

Lebrun était particulièrement agréable aux auditeurs et aux confrères qui sont accoutumés à apprécier son caractère et sa personne.

1825. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXVI » pp. 147-152

caractères bien faits !

1826. (1874) Premiers lundis. Tome II « La Comtesse Merlin. Souvenirs d’un créole. »

En arrivant dans le monde européen, en y entrant par l’Espagne, sa seconde patrie, contrée de caractère et d’allure encore franches, elle a pu ne pas trop se heurter d’abord et s’acclimater.

1827. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Giraud, Albert (1848-1910) »

D’un côté, en effet, nous avons un caractère impérieux et nostalgique, de l’autre, une âme badine, presque gamine.

1828. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Laprade, Victor de (1812-1883) »

Mais ce qui est propre à certains poèmes, ce qui les marque d’un caractère à part, c’est la prédominance d’une sorte de piété attendrie, de vénération filiale pour la Nature.

1829. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XIII. Beau trio » pp. 164-169

Ces caractères sommaires sont notifiés par des formules que les précédents romans de M. 

1830. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre VII »

Sous cette forme supposée, la langue française aurait eu un caractère très original, très pur, et peut-être faut-il regretter la longue tutelle qu’elle a subie au cours des siècles.

1831. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Louise Labbé, et Clémence de Bourges. » pp. 157-164

Mêmes goûts, mêmes rapports de caractère & d’humeur.

1832. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre VII. Suite du précédent. — Paul et Virginie. »

Or, quiconque a médité l’Évangile, doit convenir que ses préceptes divins ont précisément ce caractère triste et tendre.

1833. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre III. Partie historique de la Poésie descriptive chez les Modernes. »

Mais les grands écrivains du siècle de Louis XIV, dégoûtés de ces peintures, où ils ne voyaient aucune vérité, les bannirent de leur prose et de leurs vers, et c’est un des caractères distinctifs de leurs ouvrages, qu’on n’y trouve presque aucune trace de ce que nous appelons poésie descriptive 63.

1834. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre V. Histoire littéraire. » pp. 212-219

Fixer à des époques certaines la naissance, l’accroissement, la perfection, la décadence & le renouvellement de chaque art & de chaque science ; tracer avec netteté les principales actions & les traits les plus marqués du caractère de chaque auteur ou de chaque artiste, tel est le but de l’Histoire Littéraire.

1835. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XVII »

»‌ Or, non seulement je ne le proscris pas, ce genre de phrases, mais j’ai déclaré formellement ceci, de peur qu’on ne se méprenne :‌ « Cela ne veut pas dire qu’on doive proscrire ces expressions, Il y a des cas où il les faut, où elles sont très belles et où rien ne peut les remplacer… On peut se permettre ces locations et on les trouve chez les meilleurs écrivains ; mais c’est la continuité qui crée la banalité et le caractère incolore du style. »‌ Pourquoi nos adversaires tronquent-ils toujours notre pensée et ne rapportent-ils que la moitié de nos opinions ?

1836. (1825) Racine et Shaskpeare, n° II pp. -103

On connaît le compérage des journaux, les ruses des auteurs, les éditions à cinquante exemplaires, les faux-titres, les frontispices refaits7, les caractères remaniés, etc., etc. ; tout ce petit charlatanisme est mis à découvert depuis longtemps. […] Comparez les événements de la comédie intitulée Lanfranc ou le Poète à la fable du même sujet traité par la muse classique ; car dès le premier mot, vous avez deviné que ce n’est pas sans dessein que j’ai choisi le principal caractère d’une des comédies classiques les plus renommées : comparez, dis-je, les actions de Lanfranc à celles du Damis de la Métromanie. […] Un homme vient de lire Iphigénie en Aulide de Racine, et le Guillaume Tell de Schiller ; il me jure qu’il aime mieux les gasconnades d’Achille que le caractère antique et vraiment grand de Tell. […] Malgré tout le besoin que j’en avais, j’ai dédaigné l’esprit que je n’aurais pu obtenir qu’à l’aide d’allusions malignes aux accidents de la vie privée ; et cependant la meilleure partie de l’esprit de nos Académiciens ne se compose, dit-on, que d’anecdotes scandaleuses sur le caractère de leurs prédécesseurs. […] 4º À moins qu’il ne soit question de peindre les changements successifs que le temps apporte dans le caractère d’un homme, peut-être trouvera-t-on qu’il ne faut pas, pour plaire en 1825, qu’une tragédie dure plusieurs années.

1837. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CLe entretien. Molière »

XXIII Le Misanthrope, le meilleur de ses drames, et dont le seul défaut est que le dénouement ne sort pas du caractère, mais de l’autorité, tomba ; le sujet était trop triste pour un parterre de Français. […] Le Misanthrope n’est pas un caractère, c’est une manie. […] Molière et Racine n’étaient point amis ; leurs caractères ne différaient pas moins que leurs génies. […] C’est le caractère du génie. […] Arnolphe paraîtra d’autant plus ridicule alors, que son caractère aura été mieux établi ici.

1838. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1892 » pp. 3-94

Comme je lui parle des obstacles, des empêchements qu’on rencontre au théâtre, elle m’affirme — et sa figure prend un caractère de résolution — qu’elle a une volonté, que rien ne décourage, que rien ne rebute, et qui arrive toujours au but qu’elle s’est fixé. […] » Jeudi 17 mars Conversation avec Alfred Stevens, qui est un vrai magasin d’anecdotes, et ce qui est mieux, un extraordinaire garde-mots de toutes les phrases typiques des peintres de sa connaissance, dans le passé et dans le présent, — des phrases qui définissent mieux que vingt pages de critique, un moral, un caractère, un talent. […] Mercredi 13 avril Après dîner, on cause de l’élection de Loti, et le commandant Brunet, qui est venu s’asseoir à côté de moi, rendant complètement justice à l’évocateur des climats, qu’est Loti, trouve, comme moi, ses marins un peu conventionnels, et manquant d’un certain nombre de choses, faisant leur caractère, et de l’orgueil de leur profession. […] Mardi 28 juillet Hier, sur un petit catalogue qui m’est tombé, de je ne sais où, j’ai donné commission pour des notes de Chamfort, ainsi cataloguées : Les rognures de son livre, Maximes et Pensées, Caractères et Anecdotes. […] Sa tête était tombée sur des épreuves fraîches du dictionnaire de Robert Estienne, qu’il corrigeait, et la sueur de la mort avait imprimé quelques caractères des épreuves sur son front.

1839. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier »

A travers le chimérique de l’action, le vague et l’exalté des caractères, on y peut relever quelques tableaux de nature qui rappelaient alors les touches encore récentes de Bernardin de Saint-Pierre, et qui supposaient le voisinage prochain de Chateaubriand et d’Oberman. […] Toutes les forêts s’inclinent, tous les saules blanchissent, tous les ruisseaux se rident, et tous les échos soupirent. » De plus en plus, en avançant, le style de Nodier, avec une grâce et une souplesse qui ne seront qu’à lui et qui composeront son caractère, atteindra à peindre de la sorte les mouvements prompts, les reflets soudains, les chatoiements infinis de la verdure et des eaux, moins sans doute, dans toute scène, les grands traits saillants et simples qu’une multitude de surfaces nuancées et d’intervalles qui semblaient indéfinissables et qu’il exprime. […] Après cela, malgré les grâces courantes, les longs rubans flexibles et les méandres de mots, les caractères, dans ce petit roman d’Adèle, laissent fortement à désirer. […] Son caractère aimable et la douceur de ses mœurs lui ayant procuré, comme partout, des protecteurs et des amis, il fut chargé de la direction de la librairie et devint, à ce titre, propriétaire et rédacteur en chef d’un journal intitulé le Télégraphe, qu’il publia d’abord en trois langues, français, allemand et italien, puis en quatre, en y ajoutant le slave vindique.

1840. (1860) Cours familier de littérature. IX « XLIXe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier » pp. 6-80

L’attrait était le caractère dominant et magique de cette figure ; le regard s’y collait comme le fer à l’aimant ; c’était une physionomie aimantée : elle aurait enlevé une enclume au ciel. […] La parfaite harmonie, c’était en tout le caractère de cette femme harmonique. […] La hauteur et le dédain étaient le caractère des physionomies ; l’amertume y plissait les lèvres ; il y avait trop de fiel dans les cœurs pour que ce salon fût agréable à fréquenter ; l’ironie était la figure habituelle de ses discoureurs ; la littérature n’y était qu’une arme de faction surannée ; sa forme était l’épigramme du haut en bas, le discours de tribune ou le pamphlet de dénigrement. […] XVI Il y avait le salon de madame de Montcalm, sœur du duc de Richelieu et centre de son parti politique ; ce parti, c’était l’aristocratie intelligente, ralliée à la Révolution raisonnable, une égalité par le talent ; l’aristocratie de l’honneur, c’était son drapeau ; on y respirait un air doux et tempéré comme le caractère de la maîtresse de maison ; la fine et gracieuse figure de madame de Montcalm, retenue, quoique jeune encore, sur son canapé, y présidait avec un accueil qui n’avait rien de banal ; ses goûts étaient des amitiés vives ; ses opinions devenaient des sentiments ; on voyait défiler devant ce canapé tous les hommes éloquents et sages qui auraient pu réconcilier la Restauration avec la liberté.

1841. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIe entretien. L’Arioste (2e partie) » pp. 81-160

Le portique, assez vaste pour contenir une foule de clients ; l’escalier de marbre blanc à rampes moulées ; la salle des gardes, presque aussi longue et aussi large que le palais lui-même ; la tribune haute qui régnait sous les corniches ; les fresques poudreuses qui décoraient le sombre plafond ; les statues de nobles Vénitiens sous leur armure, qui contemplaient les passants du fond de leurs niches autour de la salle ; le parvis négligé et humide de cette salle ; les volées de colombes qui s’y abattaient librement par les fenêtres ouvertes ; le vent de mer qui faisait tinter ces vitres, mal attachées aux châssis de plomb ; enfin le léger et mélancolique clapotement des petites vagues du canal contre les marches extérieures de l’escalier : tout cela donnait au palais de Léna une apparence et comme une odeur de sépulcre, qui imposait à tous les sens une certaine langueur molle, le caractère de la ville et des habitants. […] « En parcourant des pas et du regard les alentours de la grotte, il vit des caractères gravés sur l’écorce de tous les arbrisseaux qui croissaient auprès de la source, et aussitôt qu’il y eut attaché les yeux avec attention, il fut trop convaincu que ces caractères étaient gravés par la main de sa divinité terrestre ; cet antre et cette source étaient un des sites que j’ai décrits plus haut, que la belle reine du Cathay avec son cher Médor fréquentaient le plus souvent, parce que c’était le lieu de repos le plus voisin de la cabane du berger. […] je connais trop ces caractères, je les ai tant vus et tant lus dans un autre temps !

1842. (1890) L’avenir de la science « III » pp. 129-135

Malebranche n’a pas été trop sévère pour ces savants « qui font de leur tête un garde-meuble, dans lequel ils entassent, sans discernement et sans ordre, tout ce qui porte un certain caractère d’érudition, et qui se font gloire de ressembler à ces cabinets de curiosités et d’antiques, qui n’ont rien de riche, ni de solide, et dont le prix ne dépend que de la fantaisie, de la passion et du hasard ». […] Scrupules de petits esprits, incapables de discussion rationnelle et désireux de pouvoir s’en tenir à des caractères extérieurs ; scrupules respectables pourtant, car ils sont honnêtes et supposent la foi à la vérité ! […] Une épopée est d’autant plus parfaite qu’elle correspond mieux à toute l’humanité, et pourtant, après la plus parfaite épopée, le thème est encore nouveau et peut prêter à d’infinies variations, selon le caractère individuel du poète, son siècle ou la nation à laquelle il appartient. […] Les hommes sérieux concevaient comme idéal de la vertu des caractères grossiers et incultes, et comme idéal de la société un développement tourné exclusivement vers le dévouement à la patrie et le bien faire (Sparte, l’ancienne Rome, etc.).

1843. (1856) Cours familier de littérature. I « IVe entretien. [Philosophie et littérature de l’Inde primitive (suite)]. I » pp. 241-320

Ce qui est poésie dans la nature physique ou morale, et ce qui n’est pas poésie, se fait reconnaître à des caractères que l’homme ne saurait définir avec précision, mais qu’il sent au premier regard et à la première impression, si la nature l’a fait poète ou simplement poétique. […] C’est là le caractère des grandes épopées indiennes. […] Cette charité à tout prix, qui est le caractère de ces poésies sacrées de l’Inde, et qui est le pressentiment d’une autre charité, est bien supérieure à la justice. […] Cette littérature sacrée de l’Inde a, de plus, un caractère qui la rapproche de la littérature hébraïque ; elle est exclusivement religieuse.

1844. (1857) Cours familier de littérature. III « XIVe entretien. Racine. — Athalie (suite) » pp. 81-159

Soit que le style ferme et modeste de mon billet l’eût prévenu machinalement en ma faveur, soit que mes caractères élégants et mon nom semi-aristocratique eussent eu un attrait non raisonné pour ses yeux, il ne m’avait pas fait faire antichambre une heure aux portes de sa gloire. […] Si je suis trop politique dans ma physionomie et dans mon geste, j’enlève à ce rôle le caractère d’inspiration et d’intervention divine qui fait la grandeur et la sainteté de cette tragédie. […] Depuis François Ier, les lettres étaient un des caractères de la France ; elles brillaient sur la tête de ses rois comme la plus belle pierre précieuse de leur diadème. […] Il avait ce caractère que se donne Cicéron dans une de ses lettres, plus porté à craindre les événements malheureux qu’à espérer d’heureux succès : Semper magis adversos rerum exitus metuens quam sperans secundos.

1845. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Edgar Poe »

Le caractère général de cette race, qui ne le sait ? […] les deux plus monstrueux caractères de sa pensée. […] Tel est le double caractère du talent, de l’homme et de l’œuvre que la traduction française, qui est très bien faite, nous a mis à même de juger : la peur et ses transes, la curiosité et ses soifs ; la peur et la curiosité du surnaturel dont on doute, et, pour l’expliquer, toutes les folies d’une époque et d’un pays matérialiste qui effraye autant qu’il attire. […] Soit bizarrerie de caractère, soit passions prématurées de la part de ce génie sombrement passionné, des dissentiments sur la nature desquels on n’a que des notions incertaines et confuses séparèrent, à deux reprises, Edgar Poe de son bienfaiteur, et il dut s’arracher, non sans déchirement, de la maison où il avait été recueilli et où il avait reçu une éducation intellectuelle assez forte pour armer son génie contre la société qu’il allait trouver devant lui, et qui devait le vaincre dans le terrible combat d’un seul contre tous… Ce fut à ce moment qu’il entra dans cette vie littéraire qu’on pourrait bien appeler la mort littéraire.

1846. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire littéraire de la France. Ouvrage commencé par les Bénédictins et continué par des membres de l’Institut. (Tome XII, 1853.) » pp. 273-290

Un inconvénient, en effet, d’une histoire littéraire ainsi composée, c’est que le caractère personnel des rédacteurs, leur talent doit s’effacer pour ne laisser paraître et se développer que leur savoir, leurs recherches, et les résultats qui en ressortent : tout ce qui serait une vue un peu vive, une idée neuve un peu accusée, tout ce qui aurait un cachet individuel trop marqué semblerait jurer avec la circonspection et la méthode de l’ensemble. […] Là-dessus chaque animal, chaque haut baron donne son avis, et chacun selon son humeur et son caractère.

1847. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De la dernière séance de l’Académie des sciences morales et politiques, et du discours de M. Mignet. » pp. 291-307

Jouffroy et sans lequel on ne peut saisir son caractère distinctif entre les hommes de la même école ? […] Il aurait pu marquer avec plus d’énergie le malheur qu’il y eut pour lui à y entrer, les versatilités un peu promptes qu’on lui reprocha, les influences qu’il ne savait pas écarter ; car cet homme qui, au premier abord, avait l’intelligence si haute et la parole si absolue, avait le caractère faible, ou du moins il l’eut tel dans les dernières années.

1848. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres de François Arago. Tome I, 1854. » pp. 1-18

Son objet principal et même unique était de faire connaître le caractère, la physionomie et les mœurs des savants qu’il présentait au monde dans ses gracieuses et discrètes notices. […] Voilà les caractères et les défauts que je pourrais appuyer et démontrer par maint exemple : mais, à côté de cela, on sent l’homme compétent et supérieur quand il parle du fond des sujets ; on s’efforce de le comprendre et de le suivre, et on y parvient avec quelque application.

1849. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — III. (Fin.) » pp. 162-179

Le président Jeannin (c’est en effet un des traits de son caractère, et qui le distingue encore de Villeroi) aimait les lettres et les savants. […] Au reste, pour apprécier l’ensemble de la conduite et du caractère du président Jeannin en ces années, on n’a rien de mieux à faire que de s’en rapporter au témoignage décisif du cardinal de Richelieu, un moment son adversaire, qui le vit de près à l’œuvre, qui lisait et relisait ses Négociations manuscrites durant son exil d’Avignon, et à qui il échappe à son sujet des paroles d’une admiration généreuse : On ne saurait assez dire de ses louanges, écrit-il à l’occasion de sa mort ; mais il faut faire comme les cosmographes qui dépeignent dans leurs cartes les régions tout entières par un seul trait de plume.

1850. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — I. » pp. 180-197

Et c’est par tous ces caractères qu’il est unique pour nous, et que, quel que soit l’emploi de sa parole, il reste le modèle de l’éloquence la plus haute et de la plus belle langue. […] En résumé général, dans cette physionomie, la grâce du caractère couvrait si complètement la force de l’intelligence, et la suavité y tempérait si harmonieusement la virilité de l’ensemble, qu’on ne s’y apercevait du génie qu’à l’exquise délicatesse des muscles et des nerfs de la pensée, et que l’attrait l’emportait sur l’admiration… Voilà un Bossuet primitif bien adouci et attendri, cela me semble, un Bossuet qu’on tire bien fort à soi du côté de Jocelyn et de Fénelon, afin de pouvoir dire ensuite : « L’âme évidemment dans ce grand homme était d’une trempe, et le génie d’une autre.

1851. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — I. » pp. 279-295

Quoiqu’il eût de la fermeté dans le caractère, il s’y mêlait quelque faiblesse : aimant les louanges, il paraissait les négliger ; sensible aux contrariétés, il avait l’art de se contraindre, mais sa rougeur le trahissait, et les impressions étaient durables. […] Dans l’Éloge de M. de Lassone, il indiquera plus directement encore, et par une exacte définition, le caractère qui doit distinguer les académies d’avec les facultés ou collèges : Les académies, disait-il en parlant des sociétés médicales de Londres et d’Édimbourg, les académies de ce genre et les facultés ou collèges de médecine ont toujours formé des corps distincts.

1852. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sylvain Bailly. — I. » pp. 343-360

Né en septembre 1736, aux galeries du Louvre, vers le cul-de-sac du Doyenné, l’enfant croissait à son gré et fut laissé à ses bons instincts naturels : « La douceur aimable et la touchante docilité de son caractère, nous dit Lémontey, en firent l’idole de sa famille ; elle ne put se résoudre à se séparer de lui, ni à chagriner son enfance par de pénibles études. […] Hâtons-nous de dire que Bailly ne paraît nullement avoir songé à en faire une arme contre la tradition ni contre des croyances révérées, comme plus tard cela se vit dans l’arsenal de Dupuis où s’arma Volney ; Bailly, plaidant entre Buffon et Voltaire, ne songeait qu’à défendre avec agrément et vraisemblance une opinion qui lui avait souri en étudiant les anciens peuples, à tirer tout le parti possible d’un jeu de la science et de l’imagination, et à satisfaire ce besoin d’un âge d’or en grand, qui était un des caractères optimistes de son temps et de son propre esprit.

1853. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — III » pp. 476-491

À cela près73, l’âge n’avait rien changé en elle ; sa figure resta noble et agréable jusqu’à la fin de sa vie, et son caractère ne subit pas plus de modification. […] Elle portait dans sa vieillesse un petit bonnet à bec, et était montée sur des mules avec des talons très hauts. — C’est sous cette figure, qui ne manque pas du moins de caractère, qu’on peut se représenter de loin la personne respectable, aujourd’hui remise dans son vrai jour, au moment où elle disparaît l’une des dernières au bout d’une des allées du xviiie  siècle.

1854. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Tallemant et Bussy ou le médisant bourgeois et le médisant de qualité » pp. 172-188

Je reviens au caractère de ce dernier. […] Il a préféré à son avancement le plaisir de faire un livre, et de donner à rire au public ; il a voulu se faire un mérite de sa liberté ; il a affecté de parler franchement et à découvert, et il n’a pas soutenu jusqu’au bout ce caractère.

1855. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Guillaume Favre de Genève ou l’étude pour l’étude » pp. 231-248

Le caractère de son esprit et de sa vocation, c’est d’avoir aimé l’étude pour l’étude, la recherche pour la recherche, sans aucune préoccupation de la publicité. […] Adert, un des anciens élèves de notre École normale et depuis plus de dix ans établi en Suisse, en publiant aujourd’hui, d’après le vœu de la famille, les principaux essais et mémoires qu’avait préparés plutôt qu’achevés Guillaume Favre, mais qu’il avait préparés toute sa vie, a très bien marqué et défini en sa personne ce caractère original du savant pur, du savant qui étudie toujours, qui prend note sur note et amasse les éruditions autour des pages, qui ne vise qu’au complet et à l’exactitude du fond, qui est le contraire de celui qui dit : Mon siège est fait ; qui, vécût-il quatre-vingts ans, n’a de plaisir qu’à aller toujours ailleurs en avant, et, de chasse en chasse, d’enquête en enquête, scrupuleux et amusé qu’il est, n’en finit pas.

1856. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance de Buffon, publiée par M. Nadault de Buffon » pp. 320-337

Les quatre grands personnages littéraires du xviiie  siècle ont écrit des lettres fort inégalement et avec des différences qui sont bien celles de leur caractère, de leur physionomie. […] Cette disposition du plus ou moins d’indifférence à la critique dépend donc non de la croyance en général, mais de l’humeur, du caractère, ou, si l’on veut, de la croyance et confiance qu’on a en soi.

1857. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire de mon temps. Par M. Guizot. »

Ses Mémoires, du moment qu’il se décidait à les publier de son vivant, ne pouvaient avoir qu’un caractère public et non secret : ne vous attendez pas à des révélations bien rares sur les personnes ou sur les choses. […] La Bruyère a remarqué que « le caractère des Français demande du sérieux dans le souverain. » Louis-Philippe n’a pas tout le sérieux voulu.

1858. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Essai sur l’Histoire générale des sciences pendant la Révolution française. »

On y voit se développer ce caractère ondoyant et complexe « avec toute la progression de ses sentiments, depuis les premiers mouvements d’une bonté naturelle jusqu’aux tristes jouissances d’un égoïsme raisonné. » Le sceptique y est combattu par de bonnes raisons, et les seules dignes d’un philosophe moderne. […] » C’est une imitation, une inspiration élégante d’après Jean-Jacques ou Bernardin de Saint-Pierre ; mais la nature particulière de l’Espagne, le caractère du paysage ne s’y peint par aucun de ces traits tout à fait distincts, et qu’on ne peut plus oublier.

1859. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « M. de Pontmartin. Les Jeudis de Madame Charbonneau » pp. 35-55

Sandeau, que tous ceux qui le connaissent pour la sûreté de ses relations, pour l’aménité de son caractère, pour ses mœurs gracieuses et bienveillantes, eussent été loin d’accuser sans aucun doute, s’est fait toutefois, avec raison, un devoir de protester publiquement, ne pouvant admettre à aucun degré le soupçon d’avoir trempé dans cette composition équivoque. […] Et moi, tout flatté que je puisse être de mille douceurs et sucreries qu’il m’adresse par compensation en maint endroit, mais plus jaloux, je l’avoue, d’être honnête homme que de passer pour avoir du goût, je lui dis tout net à propos de ces phrases étranges qu’on vient de lire, et qui atteignent directement et outrageusement mon caractère : « Savez-vous, Monsieur, que si vous n’étiez pas un homme léger qui ne pèse pas ses paroles, vous seriez un calomniateur ! 

1860. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Sainte-Hélène, par M. Thiers »

Qu’on lui sache gré surtout de nous fournir, par l’étendue même et le caractère circonstancié de ses récits, les moyens de le discuter, de le contrôler à notre tour, et parfois de le contredire. […] Que ne puis-je détacher ces trois pages de résumé admirable sur le caractère de Napoléon (p. 710-713), depuis ces mots : Napoléon était né avec un esprit juste, … jusqu’à ceux-ci : Telle fut cette nature extraordinaire !

1861. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Les Saints Évangiles, traduction par Le Maistre de Saci. Paris, Imprimerie Impériale, 1862 »

Le premier des Évangiles est aussi le plus naïf, le plus naturel, si l’on peut dire, celui qui nous rend le plus abondamment les discours de Jésus, comme le pouvait faire un témoin qui les avait entendus, qui les avait recueillis à la source, et qui s’est attaché à en conserver le caractère populaire, innocent et bienfaisant. […] Un homme estimable et savant, qui a récemment travaillé sur les Évangiles, et qui n’a porté dans cet examen, quoi qu’on en ait dit, aucune idée maligne de négation, aucune arrière-pensée de destruction, qui les a étudiés de bonne foi, d’une manière que je n’ai pas qualité pour juger, mais certainement avec « une science amoureuse de la vérité », a qualifié heureusement en ces termes la mission et le caractère de Jésus, de la personne unique en qui s’est accomplie la conciliation la plus harmonieuse de l’humanité avec Dieu : « Celui qui a dit : Soyez parfaits comme Dieu, et qui l’a dit non pas comme le résultat abstrait d’une recherche métaphysique, mais comme l’expression pure et simple de son état intérieur, comme la leçon que donnent le soleil et la pluie : celui qui a parlé de la sainteté supérieure qu’il exigeait des siens comme d’un “fardeau doux et léger” ; celui qui, révélant à nos yeux une pureté sans tache, a dit que “par elle on voyait Dieu…”, celui qui, enfin, renonçant à la perspective du trône du monde, a senti qu’il y avait plus de bonheur à souffrir en faisant la volonté de Dieu qu’à jouir en s’en séparant… celui-là, c’est Jésus de Nazareth. » Lui seul, et pas un autre au monde42 !

1862. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Pourvue d’un triste mari, et n’ayant pu enlever Raoul à Sibylle, elle a pris pour amant Gandrax, le savant, l’homme de mérite, athée, il est vrai (à propos, je ne croyais pas que ce personnage d’athée proprement dit existât encore sous cette forme, à la Wolmar), — mais, à part cela, le caractère le plus droit, le plus probe, une personnalité marquante et originale, tout à fait distinguée. […] Ma conclusion, c’est que les caractères, dans cette Histoire de Sibylle, ne sont pas vrais, consistants, humainement possibles ; ils n’ont pas été assez étudiés d’après nature et sur le vif.

1863. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Poésies, par Charles Monselet »

Le caractère de Monselet, dès ses débuts, c’est le goût du naturel, un vif sentiment du ridicule. […] Quel plus triste métier après tout, quand on a l’honneur d’être le contemporain d’un grand esprit qui a des défauts de caractère, que de passer son temps et de consacrer sa vie à le harceler, à l’irriter, à lui faire faire toutes les fautes dont il est capable !

1864. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres choisies de Charles Loyson, publiées par M. Émile Grimaud »

Le second Recueil de Charles Loyson, dans lequel étaient comprises les meilleures pièces du premier, et qui avait pour titre Épîtres et Élégies (1819), présente un tout autre caractère. […] Mettez si vous voulez 1816 ou 1818, on n’en est pas à quelques mois près ; mais ce qui est certain, c’est que, de quelque point de vue qu’on prenne la Restauration, le caractère de ce régime n’était point encore prononcé et tranché à cette date.

1865. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LE COMTE MOLÉ (Réception à l’Académie.) » pp. 190-210

Il y avait jouissance de société, il y avait caractère public et sérieux hommage : un prélat mort, un homme d’État considérable qui le remplaçait, et qu’on nous permette d’ajouter, un homme aimable. […] Sa précocité acheva de s’y développer ; sa nature offrait alors, à ce qu’il paraît, un caractère méditatif qui s’est dérobé depuis sous le positif des affaires et la bonne grâce du monde.

1866. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « APPENDICE. — CASIMIR DELAVIGNE, page 192. » pp. 470-486

Ce qui dure à une certaine hauteur, ce qui se soutient ou se perfectionne a, par cela même, son caractère ; et s’il entre dans ce ménagement du talent bon sens et prudence, c’est une part morale, après tout, dont on n’a pas à rougir, et qui, parmi tant de profusions et d’écarts, devient une distinction de plus. […] Les caractères ont du dessin ; ils se détachent bien, ils se détachent trop en ce sens qu’ils représentent trop chacun une idée, une partie du système politique, un ressort.

1867. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre II »

Il possède encore deux facultés remarquables : la qualification pittoresque avec laquelle il caractérise en passant, l’épithète rare avec laquelle il peint un ciel… » Modification du caractère. — « Avril : Absorption complète, refus de parler, toute l’après-midi, son chapeau de paille lui barrant la vue, il reste assis en face d’un arbre, dans une immobilité tristement farouche. » 8 avril : « Peu à peu il se dépouille de l’affectuosité, il se déshumanise ; les autres commencent à ne plus compter pour lui et recommence en lui le féroce égoïsme de l’enfant. » 16 avril : « Ce qu’il y a d’affreux dans ces abominables maladies de l’intelligence, c’est qu’elles détruisent souterrainement et à la longue, chez l’être aimant qu’elles frappent, la sensibilité, la tendresse, l’attachement, c’est qu’elles suppriment le cœur… cette douce amitié qui était le gros lot de notre vie, de notre bonheur, je ne la trouve plus, je ne la rencontre plus… Non je ne me sens plus aimé par lui, et c’est le plus grand supplice que je puisse éprouver, et que tout ce que je puisse me dire n’adoucit en rien… ! […] Aujourd’hui que l’on s’occupe beaucoup de cette question dans notre monde médical, j’ai trouvé intéressant de signaler ce fait, auquel n’ont probablement pas songé les auteurs du roman, ils ont fait mourir leur héroïne d’un rhume négligé, mais ils ont tracé les caractères et la marche du mal d’une manière que ne renierait pas l’auteur du meilleur Traité de clinique médicale que nous possédions. » Questionné à ce sujet précis par le Dr Cabanès, Ed. de Goncourt répondit textuellement dans une lettre : « Pour Germinie38 ça s’est passé ainsi dans la nature, la pleurésie a précédé la tuberculose », et une autre fois « … j’ai décrit un cas de pleurésie prétuberculeuse, c’est bien l’expression technique ?

1868. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre III. La personne humaine et l’individu physiologique » pp. 337-356

. — Ils ne désignent qu’un caractère d’un événement, à savoir, la particularité qu’il a d’être suivi constamment par un autre. — Illusion métaphysique qui érige les forces en essences distinctes. […] Et cependant elle n’est rien en soi qu’un caractère, une propriété, une particularité d’un fait, la particularité qu’il a d’être constamment suivi par un autre, particularité détachée de lui par abstraction, posée à part par fiction, maintenue à l’état d’être distinct par un nom substantif distinct, jusqu’à ce que l’esprit, oubliant son origine, la juge indépendante et devienne la dupe de l’illusion dont il est l’ouvrier.

1869. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXe Entretien. Souvenirs de jeunesse. La marquise de Raigecourt »

Ses Lettres, que nous venons de lire, découvrent en elle des qualités de caractère que l’on ne croyait pas jointes à tant d’innocence. […] III Mathieu de Montmorency n’avait aucune ambition qui ne fût digne de son nom, de son caractère et de sa race.

1870. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre I. La lutte philosophique »

Mais au moins ce sont des caractères, ce sont deux grands honnêtes gens, avec leur esprit étroit et obstiné ; ils savent souffrir pour le bien. […] Il mourut trop tôt pour avoir eu le temps d’être autre chose qu’un amateur, ne laissant que quelques écrits d’un talent inégal et peu mûr, des Discours, des Caractères, des Réflexions, que complète son émouvante correspondance avec le marquis de Mirabeau et Fauris de Saint-Vincent.

1871. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre IV. L’heure présente (1874) — Chapitre unique. La littérature qui se fait »

Mais, sans prétendre juger les œuvres d’aujourd’hui comme fixes et complètes, nous pouvons nous en figurer assez nettement le caractère et la direction : d’autant que, par une heureuse rencontre, nous sommes évidemment placés à un point de partage, ou, si l’on veut, à un tournant de la littérature. […] Ce Théâtre a été fondé pour établir l’art réaliste : grossièreté allant jusqu’à l’obscénité, puisque c’est notre erreur favorite, à nous autres Français, de croire que plus le modèle est dégoûtant, plus l’imitation est réelle, et, d’autre part, minutieuse exactitude du décor, de la mise en scène, du jeu et du débit des acteurs, voilà les deux caractères apparents que présente d’abord le Théâtre Libre.

1872. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « J.-J. Weiss  »

Il n’avait pas seulement ce qu’on peut appeler la dureté de l’âme générale et l’inhumanité, défaut commun chez les écrivains et les personnages célèbres de son temps, seul défaut saillant d’un siècle où bien décidément le caractère et l’esprit français ont atteint leur point de perfection et d’équilibre. […] Weiss et quelque chose même de son caractère.

1873. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Alphonse Daudet  »

Peu d’esprit de « mots », mais un comique de verve, d’imagination, d’hyperboles, et plus souvent encore un comique de situations et de caractères. […] VI Une bonne part du charme de tous ces récits est dans le choix merveilleux des détails, des traits, des mots typiques, de ceux qui résument un caractère, qui rendent visible une attitude, qui fixent une situation dans la mémoire.

1874. (1914) Enquête : L’Académie française (Les Marges)

Je la tiens pour surannée, sans but, sans mandat valable, hostile à la vraie indépendance du caractère et du talent, donnant des primes à l’arrivisme, et tout occupée de mesquines intrigues. […] Camille Mauclair, il tient l’Académie « pour surannée, sans but, sans mandat valable, hostile à la vraie indépendance du caractère et du talent, donnant des primes à l’arrivisme et tout occupée de mesquines intrigues ».

1875. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre V. Premiers aphorismes de Jésus. — Ses idées d’un Dieu Père et d’une religion pure  Premiers disciples. »

Souvent des âmes très grandes et très désintéressées présentent, associé à beaucoup d’élévation, ce caractère de perpétuelle attention à elles-mêmes et d’extrême susceptibilité personnelle, qui en général est le propre des femmes 215. […] Son caractère aimable, et sans doute une de ces ravissantes figures 226 qui apparaissent quelquefois dans la race juive, faisaient autour de lui comme un cercle de fascination auquel presque personne, au milieu de ces populations bienveillantes et naïves, ne savait échapper.

1876. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Qu’est-ce qu’un classique ? » pp. 38-55

Royer-Collard, M. de Rémusat disait : « S’il tient de nos classiques la pureté du goût, la propriété des termes, la variété des tours, le soin attentif d’assortir l’expression et la pensée, il ne doit qu’à lui-même le caractère qu’il donne à tout cela. » On voit qu’ici la part faite aux qualités classiques semble plutôt tenir à l’assortiment et à la nuance, au genre orné et tempéré : c’est là aussi l’opinion la plus générale. […] Croire qu’en imitant certaines qualités de pureté, de sobriété, de correction et d’élégance, indépendamment du caractère même et de la flamme, on deviendra classique, c’est croire qu’après Racine père il y a lieu à des Racine fils ; rôle estimable et triste, ce qui est le pire en poésie.

1877. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Ducis. » pp. 456-473

Mais il y a le Ducis homme et caractère, poète au cœur chaud, d’autant plus poète qu’il parle en prose et non en vers, et qu’il a le langage plus naturel, écrivant à ses amis des lettres charmantes, toutes semées de mots simples et grandioses, de pensées qui sentent la Bible, le livre de la Sagesse, et où résonne pourtant comme un lointain grondement du tonnerre tragique. […] Tout en s’accommodant avec bonheur de cette condition bourgeoise, il y faisait entrer sans trop d’effort de hautes pensées, et sa modestie domestique prenait un caractère de grandeur morale : Mon père, dit-il quelque part, à propos de je ne sais quel détail de conduite, mon père, qui était un homme rare et digne du temps des Patriarches, le pratiquait ainsi ; et c’est lui qui, par son sang et ses exemples, a transmis à mon âme ses principaux traits et ses maîtresses formes.

1878. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre III. Le Bovarysme des individus »

Pendant une longue période, la notion, par son caractère d’universalité, l’emporte en autorité sur ses expériences individuelles. […] Bien qu’observés déjà, et souvent décrits, ils recevront quelque clarté du fait d’être rattachés à la loi dont on expose ici le caractère général.

1879. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « J. K. Huysmans » pp. 186-212

Il sait voir les personnes, les objets, les ensembles, les caractères avec une exactitude notablement supérieure à celle des romanciers idéalistes ; la vie d’un homme étant rarement tragique, il s’abstient de toute intrigue violente ou qui comprenne d’autres incidents que ceux éprouvés par un Parisien de la moyenne ; l’histoire à raconter se trouvant ainsi réduite, M.  […] Huysmans établit le caractère de ses personnages.

1880. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre I : De la méthode en général »

Toujours est-il que le caractère remarquable de la société contemporaine est précisément cet effort d’appliquer la science à l’amélioration de la destinée humaine. […] Par elle, l’esprit découvre une planète que les sens n’ont jamais vue ; par elle, il explique une langue qu’aucun homme ne comprenait plus ; il déchiffre des caractères mystérieux dont le secret était perdu ; il pénètre bien au-delà des époques historiques, et, en l’absence de tout témoignage direct, jusqu’aux origines de la civilisation indo-européenne ; il calcule enfin ce qui paraît échapper à toute prise, le hasard et l’infini.

1881. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre V. Mme George Sand jugée par elle-même »

C’est un vice qui demande presque du caractère. […] Il ne s’agit plus d’invention, de combinaison et de caractère, il s’agit de la vie et de la couleur du style de Mme George Sand, si incroyablement vanté !

1882. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Gustave Droz » pp. 189-211

Monsieur et Madame me firent l’effet des Caractères d’un petit La Bruyère… mauvais sujet, — d’une espèce de La Bruyère qui connaissait les femmes, non pas « entre tête et queue », comme les connaissait et voulait qu’on les prît La Bruyère, mais qui les prenait avec la tête et avec la queue, et Dieu sait si la queue est un endroit par lequel on puisse les prendre à présent ! […] On n’aurait peut-être pas cru que ce regard d’observateur, qui n’allait qu’aux détails de la vie intime d’entre le lit et le berceau, s’allongerait sur les choses de la vie sociale, et qu’au lieu de sentiments délicats à exprimer de deux à trois cœurs, comme d’un fruit les gouttes d’une essence exquise, il s’occuperait un jour à démêler et à peindre des passions et des caractères.

1883. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VIII : M. Cousin érudit et philologue »

Vous apercevez ici une des causes et un des caractères de l’histoire de la philosophie, telle que M.  […] Pendant ces fortes études, il fut admis, grâce à sa réputation naissante et à son caractère sacré, dans la société des femmes et des hommes les plus nobles et les plus polis du siècle.

1884. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXII. »

Il n’y aura pas sans doute ici ce qui semble avoir été le caractère de Pindare, cette abondance naturelle de génie, cette âme ouverte de toutes parts à la poésie et retentissante comme le sanctuaire harmonieux d’Apollon. […] Sur ces collines, là-bas, je les vois siéger, terrible bande, bien que languissants encore : vengeurs de leur terre natale, ils se joignent à moi dans un redoutable concert ; et ils tressent de leurs mains sanglantes la trame de ta lignée : filez le rouet et tissez la toile enroulée de la race d’Édouard ; donnez-lui grande étendue et assez de marge pour y tracer les caractères infernaux.

1885. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Académie française — Réception de M. Biot » pp. 306-310

En retraçant avec cette netteté vigoureuse qui est le cachet de sa parole les traits du caractère scientifique de M. 

1886. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXVIII » pp. 158-163

Marie-Joseph Chénier a eu sans doute un caractère difficile, irritable ; il a cédé parfois à de mauvaises passions, il a traversé une époque orageuse et souillée en y payant trop largement son tribut.

1887. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. de Ségur : Mémoires, souvenirs et anecdotes. Tome III. »

Il attachait dans ses récits par la philosophie de sa raison, par la bonhomie de son caractère, et par la finesse doucement maligne de son esprit.

1888. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Gilbert Augustin-Thierry »

Mais la pensée d’où il est éclos a un tel caractère de beauté morale, et en même temps les circonstances extérieures où il se déroule ont un tel air de réalité, qu’on est tenté de se demander : Pourquoi pas ?

1889. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Donec eris felix… »

Car, à moins qu’il ne soit devenu un grand sage pour avoir vu les hommes de près ou qu’il n’ait été secouru par une heureuse frivolité de caractère, cet homme si rudement tombé, et de si haut, doit, à l’heure qu’il est, souffrir infiniment.

1890. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Chénier, André (1762-1794) »

Il serait à souhaiter qu’elle fût revêtue d’un caractère critique que n’ont pas eu les éditions précédentes, qui semblent avoir été entreprises surtout dans un esprit de panégyrique et d’hommage rendu à la mémoire du poète.

1891. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVII. Sort des ennemis de Jésus. »

Mais le jour viendra où la séparation portera ses fruits, où le domaine des choses de l’esprit cessera de s’appeler un « pouvoir » pour s’appeler une « liberté. » Sorti de la conscience d’un homme du peuple, éclos devant le peuple, aimé et admiré d’abord du peuple, le christianisme fut empreint d’un caractère originel qui ne s’effacera jamais.

1892. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre III. Des moyens de trouver la formule générale d’une époque » pp. 121-124

Le milieu psycho-physiologique est le moins important pour nous dans l’ordre de recherches où nous nous engageons, puisqu’il change d’un individu à l’autre et que nous travaillons maintenant à déterminer les caractères généraux d’une époque.

1893. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre premier. » pp. 5-11

Il est néanmoins certain, et il sera prouvé que la guerre de Molière et de ses amis contre ce qu’ils appelaient les précieuses, a été fort malentendue dans le siècle dernier, qu’elle l’est toujours plus mal, à mesure que nous avançons ; il est de fait que l’unique intention de Molière a été d’attaquer les affectations et l’hypocrisie des Peckes (ou Pécores) provinciales et bourgeoises ; qu’il respectait, non pas l’hôtel de Rambouillet qui ne subsistait plus de son temps, mais les personnages qui en restaient, notamment le gendre de la marquise, ce duc de Montausier, dont il emprunta plusieurs traits pour peindre l’austérité de principes et de goût, et pour en orner le liant caractère de son Misanthrope.

1894. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Appendice. Note concernant M. Laurent-Pichat, et Hégésippe Moreau. (Se rapporte à la page 395.) » pp. 541-544

Or, voici deux fragments que je n’avais pas jugé à propos de produire, et qui me justifieront peut-être si je n’ai pas fait d’Hégésippe Moreau un plus grand caractère politique et un plus grand citoyen.

1895. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Panurge » pp. 222-228

Panurge rassemble quelques-uns des traits les plus permanents et les plus rarement retracés de l’ancien caractère français.

1896. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Guarini, et Jason de Nores. » pp. 130-138

Il avoit cette dureté de caractère que souvent on contracte dans l’école, & cette érudition immense & sans choix qui est le tombeau du génie.

1897. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre IV. De quelques poèmes français et étrangers. »

Le caractère d’Abbadona, l’ange repentant, est une conception heureuse.

1898. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Bathild Bouniol »

car les satiriques ne manquent pas à la littérature française, mais aucun de ceux-là qui l’ont illustrée n’ont le caractère de force douce, comme l’est la vraie force, qui distingue la poésie satirique de ce chrétien qui trempe son fouet dans l’huile de la charité avant de frapper, et qui n’en frappe que plus fort après.

1899. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Champfleury ; Desnoireterres »

C’est aussi un recueil de nouvelles, mais d’un tout autre ton et d’un tout autre caractère que les Contes d’Été de Champfleury.

1900. (1913) Poètes et critiques

Sa pièce, parla même, perd le caractère antique, la sobriété du détail ; par contre, elle devient un morceau accompli de réalisme vigoureux. […] Seule, l’avant-dernière année, (1898), avait été marquée par une publication que j’ai déjà citée, mais que je me reprocherais de ne pas définir, au moins en quelques mots, pour en marquer le caractère peu commun. […] Et rien ne donne l’idée de la fermeté de caractère de M.  […] Cette sorte de culte prenait un caractère étonnamment religieux, dans des assemblées d’un autre âge tenues à mi-hauteur du clocher de l’église. […] Elle est toute psychologie ; elle sait pénétrer et exprimer les caractères.

1901. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1862 » pp. 3-73

* * * — Le grand caractère de la fille tombée à la prostitution : c’est l’impersonnalité. […] Un salon garni de meubles en damas rouge, aux bois dorés, aux lourdes formes vénitiennes ; de vieux tableaux de l’école italienne avec de belles parties de chairs jaunes ; au-dessus de la cheminée, une glace sans tain, historiée d’arabesques de couleur et de caractères persans, genre café turc : une somptuosité pauvre et de raccroc faisant comme un intérieur de vieille actrice retirée, qui n’aurait touché que des tableaux à la faillite d’un directeur italien. […] Il existe chez cette femme le véritable et intime caractère de la fille : la passivité. […] De ce rien, de cet embryon rudimentaire qui est la première idée d’un livre, faire sortir le punctum saliens , tirer un à un de sa tête les incidents d’une fabulation, les lignes des caractères, l’intrigue, le dénouement : la vie de tout ce petit monde animé de vous-même, jailli de vos entrailles et qui fait un roman. […] Et chez cette femme une énergie de caractère, une force de volonté, un art du mystère, auxquels rien ne peut être comparé.

1902. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1875 » pp. 172-248

Non, je ne suis jamais tombé sur un homme, ayant emporté d’un pays, une réminiscence plus gardeuse de tous les détails à demi-cachés et presque secrets, qui en font le caractère intime. […] Je lui dis qu’il faut bien se garder de les atténuer, qu’un des caractères de ce siècle, c’est la petitesse des hommes dans la grandeur et la tourmente des choses ; que s’il veut le faire absolument supérieur, il fera un Maxime de Trailles, un de Marsay, il construira enfin une abstraction. […] Cette rue Rousselet, dans ces lointains perdus de la rue de Sèvres, a le caractère d’une banlieue de petite ville, dans laquelle le voisinage de l’École militaire met quelque chose de soldatesque. […] Puis il s’étend sur les Orléanistes, accuse leur manque de caractère, de décision, leur peur de se compromettre au grand jour. […] « Il n’y a que les choses qu’on enlève comme cela dit-il, qui sont bonnes. » Maintenant dans la robe, la créature qu’il y avait mise, était, selon son expression, une statuette de Saxe très ébréchée, cassée en beaucoup d’endroits, une statuette à placer tout en haut sur une planche, de peur qu’un coup de plumeau ne la réduise en morceaux, une femme dont la cocasse morale, les fêlures psychiques, le ressoudage incomplet, avaient fait dans la pourpre le caractère de ce tableau.

1903. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1893 » pp. 97-181

Lundi 1er mai A propos du juif, qui pendant la guerre, avait demandé à être décoré, et avait offert pour ce, de verser 30 000 francs, à la souscription de chaussures, lancée par Thiers, quelqu’un disait, ce soir, que le caractère de la race juive diffère absolument du caractère de la race aryenne, en ce que chez cette race, toute chose au monde a une évaluation en argent. […] Comme il est question de Vigny, de son grand caractère, Daudet faisant allusion à sa pièce, le Loup, raconte qu’il était mort un peu à la façon de son loup, gardant un mutisme effrayant dans d’affreuses douleurs. Je ne sais plus qui ajoute, comme trait du caractère décoratif de l’homme, qu’il avait fait jeter sur le pied de son lit un manteau d’officier, s’ensevelissant d’avance dans son ancien uniforme. […] Mme Ménard-Dorian a un corsage, à bandes diaprées de petites fleurettes de couleur, rappelant le souvenir de ces images de parterre du xviiie  siècle, et ainsi galamment habillée, avec ses grands yeux ombreux, et le caractère de sa tête d’un autre temps, elle est vraiment originalement belle.

1904. (1904) Essai sur le symbolisme pp. -

Le souci de l’exactitude, du réalisme, dont s’enorgueillit la Comédie larmoyante ou drame, entraîne la prédominance de la condition et des moyennes conditions sur le caractère « abstrait ». […] Le romancier pourra multiplier les traits de caractère, faire parler et agir son héros autant qu’il lui plaira : tout cela ne vaudra pas le sentiment simple et indivisible que j’éprouverais si je coïncidais un instant avec le personnage lui-même. […] Or, les termes se dérobent pour décrire le caractère particulariste et individuel d’une émotion ainsi contemplée à sa source. […] Mais qu’est-ce à dire, sinon : 1º Qu’on ne parvient à déformer la nature qu’après l’avoir longtemps maniée, et que la sublimiser, ce n’est pas la nier, mais la débarrasser d’un lierre parasite et, bien au contraire, s’en servir comme piédestal pour situer dessus l’esprit humain ( homo additus naturæ ) ; 2º que Michel-Ange, les Alexandrins et les caricaturistes ne modifient les rapports et dépendances mutuelles des parties d’un tout, qu’en vue de rendre plus sensible le caractère essentiel de l’objet, de mieux dégager de la nature son essence, et que l’artiste exagère la nature pour la davantage manifester. […] Bien souvent, des Esseintes avait médité sur cet inquiétant problème, écrire un roman concentré en quelques phrases qui contiendraient le suc cohobé des centaines de pages toujours employées à établir le milieu, à dessiner les caractères, à entasser à l’appui les observations et les menus faits.

1905. (1922) Le stupide XIXe siècle, exposé des insanités meurtrières qui se sont abattues sur la France depuis 130 ans, 1789-1919

Or, aucune des découvertes, dont le XIXe siècle est si vaniteux, n’a ce caractère de pérennité et de consubstantialité. […] Ces ânes bâtés ont peuplé les Académies, devenues, par l’affadissement des idées et l’affaissement des caractères, le sanctuaire de ces grotesques idoles. […] Exemple : combien d’excellents amiraux et de remarquables généraux ont vu leur prestige amoindri par un passage au ministère de la Marine ou de la Guerre, où leur inhabileté parlementaire donna l’injuste impression d’une inhabileté tout court, où leur manque de caractère politique donna l’injuste impression d’un manque de caractère tout court. […] Mais on s’ébahit tout de même aujourd’hui qu’il ait pu être pris au sérieux, car il ne montre ni un caractère, ni un trait de caractère ; ni une crise qui ne soit artificielle ; ni un dialogue qui ne soit plat, et plus que plat. […] Ils le sont davantage encore, quand ils manquent de cette logique inébranlable, jointe à l’esprit de détermination, que l’on appelle le caractère.

1906. (1924) Critiques et romanciers

Ils n’ont pas le caractère de ce genre brillant et caduc. […] Conséquemment, on se figure que les œuvres de l’art empruntent à leur caractère idéal ou concret leur qualité plus ou moins durable. […] Il ne possédait pas une croyance et il ne possédait pas un caractère qui lui permit de résister à la grande avanie française. […] Il y en a de toute sorte : leurs espèces ou leurs races ne les distinguent pas autant que leurs caractères individuels. […] Mais il fallait noter ce caractère de son œuvre : elle est sérieuse et active d’abord.

1907. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Académie française — Réception de M. Jules Sandeau » pp. 322-326

D’ailleurs, une grande sûreté dans le commerce, une grande fidélité à ses amitiés, à ses opinions, le constant désir, le ferme propos d’être et de rester aimable jusque dans la ruine de la santé et au sein de la souffrance59, ces qualités sociales indiquaient en lui un fond de caractère plus solide que son esprit.

1908. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « [Appendice] » pp. 417-422

il n’y avait pas de trace de Ménage ni de Cotin, au moral du moins et pour le caractère, chez Fléchier.

1909. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de madame du Hausset, femme de chambre de madame de Pompadour. »

Madame du Hausset semblait faite pour ce rôle de Suétone par sa position et par son caractère ; il est dommage qu’elle n’ait ni plus regardé ni plus écrit.

1910. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires relatifs à la Révolution française. Le Vieux Cordelier, par Camille Desmoulins ; Les Causes secrètes ou 9 thermidor, par Villate ; Précis du 9 thermidor, par Ch.-A. Méda, Gendarme »

Ce caractère si peu naturel, ce nous semble à nous autres de sang-froid, était pourtant devenu si naïf chez eux, qu’ils ne le démentirent jamais ; tels ils avaient été à la tribune et au club, tels ils furent à la barre et sur la charrette, se drapant et déclamant encore ; gladiateurs du peuple, ils luttèrent dans l’arène jusqu’au bout, et tombèrent avec grâce.

1911. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Tissot. Poésies érotiques avec une traduction des Baisers de Jean Second. »

De là l’indécision et la faiblesse de cette école sans caractère, reflet gracieux, mais pâle, d’un siècle déjà sous l’horizon.

1912. (1874) Premiers lundis. Tome II « L. Bœrne. Lettres écrites de paris pendant les années 1830 et 1831, traduites par M. Guiran. »

Rien n’est plus dangereux que de l’esprit sans caractère, que le génie auquel manque la matière.

1913. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lemercier, Népomucène Louis (1771-1840) »

La duchesse de Bragance, qui parut si digne du trône que son époux lui dut en partie ; le brave Almeida, véritable chef de l’entreprise, et qui, bien plus que Pinto, en détermina le succès ; le cardinal de Richelieu la favorisait de loin, non pour servir la nation portugaise, mais pour affaiblir la monarchie espagnole ; des noms, des caractères, des motifs, des résultats d’un tel ordre, étaient dignes de la tragédie.

1914. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre V. Un livre de Renan et un livre sur Renan » pp. 53-59

. — Il veut, des œuvres et des manifestations de Renan, déduire son caractère.

1915. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Girac, et Costar. » pp. 208-216

» J’avois quelque scrupule, dit-il, de repousser les insultes d’un ennemi respectable par son caractère.

1916. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre premier. Que la Mythologie rapetissait la nature ; que les Anciens n’avaient point de Poésie proprement dite descriptive. »

Les déserts ont pris sous notre culte un caractère plus triste, plus grave, plus sublime ; le dôme des forêts s’est exhaussé ; les fleuves ont brisé leurs petites urnes, pour ne plus verser que les eaux de l’abîme du sommet des montagnes : le vrai Dieu, en rentrant dans ses œuvres, a donné son immensité à la nature.

1917. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Méry »

Le caractère du talent de Méry, quand la fantaisie le prend d’écrire l’histoire, est de la sentir et de l’aimer.

1918. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre premier. Sujet de ce livre » pp. 101-107

D’une seule branche de ce tronc sortirent, en se séparant, la logique, la morale, l’économie et la politique poétiques ; d’une autre branche sortit avec le même caractère poétique la physique, mère de la cosmographie, et par suite de l’astronomie, à laquelle la chronologie et la géographie, ses deux filles, doivent leur certitude.

1919. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE KRÜDNER » pp. 382-410

MADAME DE KRÜDNER197 Dans les personnes contemporaines dont les productions nous ont amené à étudier la physionomie et le caractère, nous aimons quelquefois à chercher quels traits des âges précédents dominent, et à quel moment social il serait naturel de les rapporter comme à leur vrai jour. […] Le séjour à Berlin, l’intimité avec la reine de Prusse, et les événements de 1806, y mirent le comble ; c’est vers ce temps, en Suède, je crois, au milieu d’une vie encore toute brillante, mais à l’âge où l’irréparable jeunesse s’enfuit, qu’une révolution s’opéra dans l’esprit de Mme de Krüdner ; qu’un rayon de la Grâce, disait-elle, la toucha, et qu’elle se tourna vers la religion, bien que pourtant d’abord avec des nuances légèrement humaines, et sans le caractère absolu et prophétique qui ne se décida que plus tard. […] Outre le caractère religieux qu’elle revêt et qui la distingue, ce qu’a de particulier le rôle de Mme de Krüdner entre tous les enthousiasmes teutoniques d’alors, c’est qu’elle s’appuie plutôt sur l’extrême Nord, sur la Russie, et, comme elle le dit, sur les peuples de l’Aquilon ; elle les concilie dans son cœur avec un ardent amour de la France.

1920. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIVe entretien. Littérature politique. Machiavel (3e partie) » pp. 415-477

Oubliez-vous que l’Espagne catholique de Charles-Quint et de Philippe II, dont l’infanterie disposait de l’Europe au service de la Rome papale, n’est plus qu’une puissance de huit millions d’hommes, qui ne compte plus en Europe que par son grand nom et par le caractère resté entier de sa chevalerie militaire ; puissance historique plus que politique aujourd’hui dans les combinaisons des nations ? […] Ces deux caractères de pontife et de prince dans un même homme ne se confondent pas, quoi qu’on en dise avec plus de politique que de foi. […] Les Italiens, si magnifiquement doués par la nature, sont les mêmes génies et les mêmes caractères dans un autre milieu européen.

1921. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIe entretien. Trois heureuses journées littéraires » pp. 161-221

Tout semble se mouvoir au mouvement de la pensée elle-même ; c’est une terre en action, quoiqu’en repos ; on y assiste à une création quotidienne ; toutes les heures du jour et de la nuit y donnent en passant un coup de pinceau, une teinte, un caractère, une physionomie. […] Que Dieu lui conserve tous ces bonheurs : il les mérite par son caractère, de la même trempe que son génie ; car, au milieu de cette cohue de talents sceptiques, railleurs, ironiques, oiseaux siffleurs qui profanent depuis dix ans la poésie par des indécences ou des persiflages, et qui font descendre comme Heine le feu du ciel pour allumer leur cigare, Laprade, lui, conserve son honnêteté à la haute littérature. […] Ce caractère de l’honnête dans le beau n’est pas seulement un signe de vertu dans l’homme, il est un gage d’immortalité dans le poète ; car on peut corrompre son siècle, mais la postérité est incorruptible, et, si le vice peut donner quelquefois l’engouement, il ne donne jamais la gloire.

1922. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXIXe entretien. Tacite (2e partie) » pp. 105-184

« Cécina, de son côté, comme s’il avait laissé sur l’autre revers des Alpes la licence et la férocité de son caractère, s’avançait en Italie avec une armée irréprochable dans sa discipline. […] « Nous ne craignons pas Vespasien ; son âge, son caractère modéré, nous rassurent : mais les exemples durent plus longtemps que les caractères.

1923. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIVe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Les faiblesses des grands hommes n’ont pas de noms ; leur caractère a des traces. […] C’est son caractère, il est grand, parce qu’il est religieux ; il est grand, parce qu’il est éloquent ; il est grand, parce qu’il est triste ; il est grand, parce qu’il est poëte ! […] L’ennui est la maladie de Chateaubriand, il en vit et il en meurt ; mais cet ennui infini est son caractère et son génie, ôtez-le lui, il n’y a plus qu’un homme heureux ; mais il n’était pas fait pour le bonheur : il eût demandé avec larmes des larmes à Dieu ; oui, il eût pleuré pour obtenir la gloire des douleurs.

1924. (1920) Enquête : Pourquoi aucun des grands poètes de langue française n’est-il du Midi ? (Les Marges)

On comprend que la limite puisse varier suivant les caractères que l’on attribue à cette langue. […] La limite inférieure, c’est-à-dire, la ligne où disparaissent les derniers caractères d’oïl, part d’un point situé à 15 kilomètres environ au nord-est d’Angoulême, à l’extrémité supérieure de la forêt de la Braconne, se dirige vers le nord-est, laissant Confolens en pays d’oc, passe au-dessus de Bellac, contourne Guéret au sud, sépare le Puy-de-Dôme de l’Allier, touche par leur limite nord aux territoires de Roanne et de Lyon pour rejoindre la frontière à peu près au point où le Rhône pénètre en France. […] En effet, l’on conçoit qu’un pays puisse être d’un caractère qui le rende absolument impropre à la poésie Mais notre Midi a eu des poètes.

1925. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

Nul récit, nul caractère, nulle réflexion d’historien, nul portrait, nul relief. […] Non : il nous peint des personnages vulgaires, sans distinction d’esprit ni de caractère, des mœurs basses et communes, mais il relève tout cela par des sensations rares et par un style plus rare encore ; ainsi, pour certains bibliophiles, le contenu du livre importe moins que le papier et la reliure. […] C’est le caractère d’un écrivain, sa nature, qu’il faut considérer, et non pas sa pensée.

1926. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre premier. La sélection et la conservation des idées dans leur relation à l’appétit et au mouvement. »

Le caractère particulier de la cause extérieure entraînera le développement particulier des centres sensoriels, qui sont, si l’on veut, autant de mémoires organiques. […] James Ward remarque avec raison que nous appelons souvent vivacité de souvenir, intensité de souvenir, le caractère distinct et complet des souvenirs ; or ce caractère distinct et complet tient à la qualité et aux rapports plus ou moins nombreux que nous saisissons, bien plus qu’à l’intensité proprement dite.

1927. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Victor Hugo » pp. 106-155

Hugo, dont nous avons déjà passé les approches, à examiner non plus les paroles, mais leur sens, non la rhétorique mais la matière même qu’elle ouvre, non la loi des développements mais la nature des idées développées, le caractère commun et saillant des scènes, des portraits, des événements et des conceptions, qui donnent lieu à déployer des répétitions, des images et des antithèses. […] En d’autres termes aux anomalies d’expression et de pensée qui sont devenues manifestes au cours de cette étude, pouvons-nous assigner pour cause une ou plus d’une anomalie interne du mécanisme intellectuel connu, qui, admise sur hypothèse, paraisse être à l’origine de tous les caractères marqués de l’œuvre de M.  […] D’une œuvre infiniment complexe, dont les propriétés saillantes ont été résumées en exemples, nous avons extrait quelques caractères généraux, ceux-ci ont été repris en un couple fort clair et fort simple de tendances universelles ; celles-ci en un fait psychologique absolument net.

1928. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XIII] »

Il faut se souvenir que le caractère de saint Chrysostome était de parler aux grands et aux puissants, même dans le temps de leur plus grande prospérité, avec une force et une liberté vraiment épiscopales. […] Elle devrait être écrite en caractères éclatants dans toutes les places publiques, aux portes des maisons, dans toutes nos chambres : mais elle devrait encore bien plus être gravée dans nos cœurs, et faire le continuel sujet de nos entretiens. […] Tout, jusqu’aux vérités, trompe dans ses écrits ; Et du faux et du vrai ce mélange adultère Est d’un sophiste adroit le premier caractère.

1929. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VII. M. Ferrari » pp. 157-193

Or, si elles en avaient le caractère et l’importance, elles n’eussent point, soyez-en sûr, passé si vite et si aisément sous des pointes si rapprochées, et il aurait fallu plus de quelques lignes (la moyenne que M.  […] Seule, elle dispense les caractères, les passions, l’énergie qui enchaînent la fortune… » Certes, M.  […] Voilà le fatalisme dans son plus honteux caractère.

1930. (1925) Feux tournants. Nouveaux portraits contemporains

Mais dans ce commerce avec la ravissante étrangère, Alain s’efforce encore de dissimuler sa personnalité pour aisément dégager les caractères généraux de cet amour de guerre. […] Ces vues d’un esprit français sur le monde, confirmées par des expériences de voyage et de politique, achèveront de donner à l’œuvre de Barrès son caractère goethien. […] Toutefois le caractère était toujours modelé par la crise, on ne le sentait que trop ; mais en 1913, avec le Secret, M. Bernstein présentait un caractère, dont il était le maître absolu, qui allait créer un conflit et non point dépendre de lui. […] L’un et l’autre de ces écrivains en imposent par la noblesse du caractère et leur solitude.

1931. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Notes et pensées » pp. 441-535

Mais comme il commençait à tourner et à changer du tout au tout, il m’était impossible de le suivre et de tourner avec lui, sans abdiquer tout caractère de critique ; ce que je n’ai jamais fait. […] Tout cela dit, je continuerai de noter quelques souvenirs, quelques mots encore qui me reviendront çà et là, à l’occasion, et qui sont autant de traits pour la connaissance de ce grand et éloquent esprit et de ce médiocre caractère. […] CXXVIII La vanité de ce temps-ci a un caractère à elle, qui la distingue de la vanité des époques précédentes : elle se combine avec l’utilité. […] L’ordre renaît, c’est alors qu’il retrouve toute sa valeur ; son jugement excellent, n’étant plus troublé par la peur ni traversé par l’intérêt, s’applique aux choses avec calme, avec étendue et lucidité ; son caractère obligeant fait merveille. […] Dubois, il me montra sur sa table les deux volumes d’Odes et ballades qu’il venait de recevoir et dont il me proposa de rendre compte : « C’est de ce jeune barbare, dit-il, Victor Hugo, qui a du talent, et qui de plus est intéressant par sa vie, par son caractère ; je le connais et je le rencontre quelquefois. » J’emportai les volumes, et quelques jours après je vins lire à M. 

1932. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Littré. »

Nous touchons là, dans ce caractère essentiellement moral, à quelqu’une des difficultés secrètes qui sont le scrupule des consciences délicates et qu’on ne peut que sonder discrètement. […] Quand je dis que j’aurais désiré trouver un tel portrait idéal, je ne suis pas juste, car il y est, bien qu’un peu trop dispersé ; les chapitres xiii et xiv de l’Introduction, qui ont pour titre : Exposé sommaire de la doctrine médicale d’Hippocrate ; Remarques sur le caractère médical et le style d’Hippocrate ; ces chapitres ne sont autre chose que la description exacte, précise, définitive, de la forme de science et du genre de talent de l’Homère médical. […] La guerre aux sophistes faite par Socrate, la guerre à l’esprit de charlatanisme faite par Hippocrate, sont de la même époque et portent le même caractère. » M.  […] Littré est médecin par la vocation, le dévouement, la science, et j’ajouterai, la méthode en tout : c’est un physiologiste et un organicien en toute étude ; être médecin est son vrai caractère scientifique.

1933. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Théocrite »

Les traits qui suivent nous sont connus par Virgile, qui les a semés en plus d’une églogue ; mais ici ils se tiennent, ils se rapportent à l’ensemble des personnages, et leur donnent de la réalité jusque dans l’idéal ; c’est le caractère constant de Théocrite. […] car, à mon sens, je n’en suis pas encore à vaincre ni le bon Asclépiade de Samos, ni Philétas, avec mes chants, et je me fais plutôt l’effet de la grenouille qui le dispute aux sauterelles. —  Ainsi je parlais exprès ; et le chevrier reprit avec un doux sourire… » Arrêtons-nous un moment à ces traits vivants de caractère ; nous savons dès l’enfance ces derniers vers par l’imitation heureuse de Virgile : Me quoque dieunt vatem pastores… ; ils nous frappent davantage ici comme se rapportant à la personne même de Théocrite et nous donnant jour dans ses pensées. […] Nous sommes en plein dans l’amour antique, dans celui de Phèdre, mais d’une Phèdre sans remords, dans celui que Sapho a exprimé en son ode délirante, et qu’aussi le grand poëte Lucrèce a dépeint en effrayants caractères, tout comme il décrit ailleurs la peste et d’autres fléaux. […] Comme variété de femmes chez Théocrite, et aussi éloignées du caractère pur de Theugénis que de la nature passionnée de Simétha, il faut placer les Syracusaines, qui sont le sujet de tout un petit drame piquant et satirique.

1934. (1929) Dialogues critiques

Paul Oui, chez ceux-là, le caractère est égal au talent. […] Pierre Tout dépend des caractères. […] On ne peut trop savoir gré à l’esprit et au caractère du bon maître, dont il abomine forcément les idées. […] Pierre À condition d’avoir bon caractère.

1935. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (2e partie) » pp. 5-80

C’était Lucien Bonaparte, dont le nom répondait autant à la République qu’à l’Empire, caractère à deux aspects des hommes de deux dates, la République et l’Empire. […] D’ailleurs, nous l’avons dit, la physionomie ingrate et le caractère concentré du jeune artiste ne laissaient ni prévoir en lui, ni éclater hors de lui, des sentiments contre lesquels la princesse aurait pu avoir à se défendre. […] Je ne puis penser à Florence sans émotion ; la raison, le devoir, le caractère de mon attachement peut-être ne permettent pas à une tristesse violente de s’emparer de moi ; c’est seulement une mélancolie qui ne peut nuire à mes travaux. […] « Les lettres de la princesse que j’ai vues, dit le frère de Léopold, étaient empreintes d’un intérêt constant, qui pouvait provenir seulement de l’estime pour le talent et pour le caractère de Léopold.

1936. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIIe entretien. Cicéron » pp. 81-159

Mais ces deux fautes, si on étudie bien son histoire, ne sont pas les fautes de son caractère : elles sont surtout les fautes de son temps. […] Et, quant aux compositions avec les événements et avec les tyrannies qu’on reproche de loin à Cicéron, il faut se reporter à l’état de la république romaine, à la corruption des mœurs, à la lâcheté du peuple, à l’énervation des caractères de son temps, pour être juste envers ce grand homme. […] Ses anxiétés usaient, non sa vertu, mais son caractère. […] Il avoua à ses affranchis que, lassé d’incertitude et de fuite, il avait résolu un moment de rentrer à Rome, et d’aller s’ouvrir lui-même les veines sur le seuil d’Octave, afin de se venger du moins, en mourant, d’une ingratitude écrite en caractères de sang sur le nom de ce parricide, et d’attacher à ses pas, avec la mémoire de son crime, une furie qui ne le laissât reposer jamais !

1937. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1874 » pp. 106-168

Un original garçon que ce Degas, un maladif, un névrosé, un ophtalmique à un point, qu’il craint de perdre la vue, mais par cela même un être éminemment sensitif, et recevant le contrecoup du caractère des choses. […] Lundi 17 août Le caractère des heures de découragement, c’est de vivre rencogné dans l’heure présente, la pensée comme ramenée sur elle-même, et retirée du champ de l’avenir, où elle est toujours à prendre le galop. […] Mercredi 2 septembre L’anniversaire de la défaite de la France prend, cette année, en Bavière, un caractère religieux. […] Le récit a un caractère de vérité, mais quelle est cette sœur, dont les biographes ne parlent pas.

1938. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1887 » pp. 165-228

Une pièce amusante, des caractères délicatement étudiés, du fin comique, un habile transport des détails et des aspects de la vie intime sur les planches, et une œuvre ne présentant pas de danger. […] Car en dehors de l’éloignement de son tempérament, pour l’aigu, le mot violemment vrai, la coloration barbare, il y avait chez lui une déplorable soumission aux exigences de l’éditeur : témoin l’Hamlet russe, que je lui ai entendu avouer, sur les observations de Buloz, avoir amputé de quatre ou cinq phrases, faisant son caractère. C’est dans son œuvre, cet adoucissement du caractère de l’humanité de son pays, qui amena un jour entre Flaubert et moi, la plus vive discussion que nous ayons jamais eue, me soutenant que cette rudesse était une exigence de mon imagination, et que les Russes devaient être tels qu’il les avait représentés. […] Je suis forcé de faire venir le docteur Malhené, qui trouve à mon rhume le caractère d’une forte bronchite.

1939. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre IV. De la délimitation, et de la fixation des images. Perception et matière. Âme et corps. »

Et nous ne pouvons le tenir pour insoluble, parce que nous définissons esprit et matière par des caractères positifs, non par des négations. […] D’autre part, les données de la vue et du toucher sont celles qui s’étendent le plus manifestement dans l’espace, et le caractère essentiel de l’espace est la continuité. […] Ce caractère mixte de notre perception immédiate, cette apparence de contradiction réalisée, est la principale raison théorique que nous ayons de croire à un monde extérieur qui ne coïncide pas absolument avec notre perception ; et comme on la méconnaît dans une doctrine qui rend la sensation tout à fait hétérogène aux mouvements dont elle ne serait que la traduction consciente, cette doctrine devrait, semble-t-il, s’en tenir aux sensations, dont elle a fait l’unique donnée, et ne pas leur adjoindre des mouvements qui, sans contact possible avec elles, n’en sont plus que le duplicat inutile. […] L’association d’un souvenir à une perception présente peut compliquer cette perception en l’enrichissant d’un élément connu, mais non pas créer un nouveau genre d’impression, une nouvelle qualité de perception : or la perception visuelle de relief présente un caractère absolument original.

1940. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Massillon. — II. (Fin.) » pp. 20-37

Non : il connaît trop bien le caractère particulier de ces doutes et de ceux qui les forment, ou plutôt qui les ont appris et qui les répètent tout vulgaires et usés déjà. […] Dans cet âge où les affections de l’esprit et celles de l’âme ont une communication réciproquement si soudaine, où la pensée et le sentiment agissent et réagissent l’un sur l’autre avec tant de rapidité, il n’est personne à qui quelquefois il ne soit arrivé, en voyant un grand homme, d’imprimer sur son front les traits du caractère de son âme ou de son génie.

1941. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — II. (Fin.) » pp. 62-79

Les côtés excessifs et disparates du caractère de Madame sont déjà assez visibles et assez connus : je voudrais ne pas négliger de faire apercevoir les parties fermes et élevées de son âme. […] Le père Cathalan, jésuite, en prononça une à Laon le 18 mars, et elle nous a fourni quelques traits de caractère.

1942. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — I. » pp. 80-97

Certes, les plus célèbres et les plus riches en souvenirs, les plus historiques, les plus en accord avec le caractère et l’esprit du monument. […] Sa vie, son caractère sont pleins de naturel et d’originalité, et merveilleusement assortis à son œuvre.

1943. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — II. (Fin.) » pp. 36-54

Abandonnez-vous donc à la simplicité et à la folie de la croix. » Les lettres de Fénelon au duc de Chevreuse finirent par être plutôt de conseil moral et d’affaires intimes que de direction ; mais, au commencement, le caractère de lettres spirituelles y est assez marqué. […] Les lettres de Fénelon, à cette date, jettent un profond et triste jour sur la décadence de l’esprit public et la détérioration des caractères et de la morale sociale.

1944. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — II » pp. 254-269

Quant au fond, il recommande tout ce que son maître a également recommandé, de ne point laisser les valets ni servantes embabouiner cette tendre jeunesse de sots contes ni de fadaises ; de ne pas croire que l’esprit des enfants ne se puisse appliquer aux bonnes choses aussi aisément qu’aux inutiles et vaines : « Il ne faut pas plus d’esprit à entendre les beaux exemples de Valère Maxime et toute l’histoire grecque et romaine, qui est la plus belle science et leçon du monde, qu’à entendre Amadis de Gaule… Il ne se faut pas délier de la portée et suffisance de l’esprit, mais il le faut savoir bien conduire et manier. » Il s’élève contre la coutume, alors presque universelle, de battre et fouetter les enfants ; c’est le moyen de leur rendre l’esprit bas et servile, car alors « s’ils font ce que l’on requiert d’eux, c’est parce qu’on les regarde, c’est par crainte et non gaiement et noblement, et ainsi non honnêtement. » Dans l’instruction proprement dite, il veut qu’en tout on vise bien plutôt au jugement et au développement du bon sens naturel qu’à l’art et à la science acquise ou à la mémoire ; c’est à cette occasion qu’il établit tous les caractères qui séparent la raison et la sagesse d’avec la fausse science. […] Il a des pages très ingénieuses, très fines, sur l’instinct et la raison, sur les caractères qui les spécifient, perfection prompte, courte et immobile, d’un côté, perfectibilité de l’autre.

1945. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — II » pp. 39-56

Il y en a pourtant qui, pour n’être pas si polies, ne laissent pas d’imprimer du respect et de la révérence. » Ce jugement de l’abbé de Rancé est celui d’un homme de sens et de goût ; il fait les deux parts et reconnaît, même aux vieilles hymnes dont le langage rebute parfois, ce caractère qui imprime de la révérence. […] Tout ce qui part de sa plume, mais particulièrement de son cœur, a un caractère qui frappe et qui plaît tout ensemble.

1946. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — I » pp. 298-315

Toutefois le caractère du duc de Rohan, bien que surtout formé de politique, et différant peu en cela de celui de Bouillon, semble plus fait pour embrasser les intérêts du parti en lui-même, et on entrevoit dans ses desseins, s’il avait réussi, plus de générosité et de grandeur : à mesure qu’il avance, il est plus sincère dans son rôle de grand seigneur réformé. […] Écoutons Plutarque nous exprimer et nous définir cette grâce singulière et ce je ne sais quoi de réussi qui s’attachait à toutes les actions de l’heureux mortel : Car de son temps, en Grèce, nous dit-il, beaucoup ayant été grands et ayant fait de grandes choses, desquels étaient Timothée, et Agésilas, et Pélopidas, et celui que Timoléon avait surtout pris pour modèle, Épaminondas, les actions de tous ceux-là eurent pour caractère l’éclat mêlé d’une certaine violence et d’un certain labeur, de telle sorte qu’il a rejailli sur quelques-unes et du blâme et du repentir ; mais des actions de Timoléon, si l’on excepte cette fatale nécessité au sujet de son frère, il n’en est pas une où il ne convienne, selon la remarque de Timée, de s’écrier avec Sophocle : « Ô dieux !

1947. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — III » pp. 337-355

Encore une fois, il convient de douter et de s’abstenir, et ma seule conclusion sera qu’un des traits du caractère de Rohan est la circonspection jusque dans le courage, c’est-à-dire une disposition qui n’est pas très française. […] M. de Rohan est souvent resté aux deux tiers du chemin, et il n’a pas triomphé à nos yeux de toutes les obscurités qui pouvaient résulter des replis de son caractère autant que de la conjuration des circonstances.

1948. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Madame Bovary par M. Gustave Flaubert. » pp. 346-363

Le nouveau pays où l’on s’installe, et qui confine à la Picardie, « contrée bâtarde où le langage est sans accentuation comme le paysage sans caractère », est décrit avec une vérité non flatteuse ; le gros bourg et les principaux habitants, le curé, le percepteur, l’aubergiste, le sacristain, le notaire, etc., y sont pris sur le fait et restent fixés dans la mémoire. […] Ce sont les caractères que semblent affecter les chefs de file des générations nouvelles.

1949. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Béranger, recueillie par M. Paul Boiteau. »

Je n’en pensais pas plus que je n’en ai dit alors sur les défauts mêlés aux mérites, et, ces réserves faites, ces correctifs apportés, et, si l’on veut, ces malices rendues, je restais dans ma mesure d’admiration et de respect pour le caractère de l’homme et pour le talent du poëte. […] Mon caractère ne serait point là placé convenablement, et, dès lors, plus de bonheur pour moi.

1950. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. Suite et fin. » pp. 73-95

le côté politique, le caractère des personnages, le génie du peuple, les aspects par lesquels l’histoire particulière de ce peuple navigateur, et civilisateur à sa manière, regarde l’histoire générale et intéresse le grand courant de la civilisation, sont sacrifiés ici ou entièrement subordonnés au côté descriptif exorbitant, à un dilettantisme qui, ne trouvant à s’appliquer qu’à de rares débris, est forcé de les exagérer. […] L’amour de la vieille Carthage, puisqu’amour il y avait, y aurait trouvé son compte : on en aurait refait l’histoire, en indiquant les lacunes, en restituant, à l’aide des fragments et du parti raisonnable qu’on en peut tirer, la religion, la politique, le caractère, les mœurs.

1951. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Études de politique et de philosophie religieuse, par M. Adolphe Guéroult. »

Israël et le Magnificat ; que tout ce qu’il y a de poésie dans le culte chrétien, l’encens, les chasubles brodées d’or, les longues processions avec des fleurs, léchant, le chant surtout aux fêtes solennelles, grave ou lugubre, tendre ou triomphant, l’a vivement exalté ; qu’il a respiré cet air, vécu de cette vie, et que, par conséquent, il a dû pénétrer plus avant dans le sens et l’intelligence de la musique chrétienne que beaucoup de jeunes gens qui, nourris des traditions de collège et ne voyant dans la messe qu’une corvée hebdomadaire, ne se seraient jamais avisés d’aller chercher de l’art et de la poésie dans les cris inhumains d’un chantre à la bouche de travers. » Et plus loin, insistant, sur le caractère propre, à ces chants grandioses ou tendres, et qu’il importe de leur conserver sans les travestir par trop de mondanité ou d’élégance, devançant ce que MM. d’Ortigue et Félix Clément ont depuis plaidé et victorieusement démontré, il dira (qu’on me pardonne la longueur de la citation, mais, lorsque je parle d’un écrivain, j’aime toujours à le montrer à son heure de talent la plus éclairée, la plus favorable, et, s’il se peut, sous le rayon) : « J’ai dit tout à l’heure, en parlant du Dies iræ, que je ne connaissais rien de plus beau ; j’ai besoin d’y revenir et de m’expliquer. […] On ne dira pas que je diminue ceux que je viens de définir ; j’en viens hardiment aux autres : ces autres ne sont ni absolutistes ni serviles, je repousse ce nom à mon tour de toute la fierté à laquelle toute sincère conviction a droit ; mais il en est qui pensent que l’humanité de tout temps a beaucoup du à l’esprit et au caractère de quelques-uns ; qu’il y a eu et qu’il y aura toujours ce qu’on appelait autrefois des héros, ce que, sous un nom ou sous un autre, il faut bien reconnaître comme des directeurs, des guides, des hommes supérieurs, lesquels, s’ils sont ou s’ils arrivent au gouvernement, font faire à leurs compatriotes, à leurs contemporains, quelques-uns de ces pas décisifs qui, sans eux, pouvaient tarder et s’ajourner presque indéfiniment.

1952. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite) »

Il va même trop loin dans les lettres de ce temps que j’ai sous les yeux73 ; il joue, il plaisante imprudemment avec le bizarre ermite comme avec un caractère bien fait et qui entendrait la raillerie ; il s’égaye beaucoup trop aux dépens de son humeur belliqueuse, à propos du fusil que Rousseau tenait toujours chargé contre les voleurs et qu’il s’amusait parfois à tirer sur les loirs. […] Tout ce que j’ai vu dans mon siècle serait capable de me faire mépriser les hommes, si je ne craignais de rejeter sur eux les torts de mon caractère, qui sont ceux de ma nature.

1953. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vie de Jésus, par M. Ernest Renan »

A d’autres moments, à considérer notre sérieux dans les discussions et les recherches les moins attrayantes et les plus ardues, c’était à croire que notre légèreté française proverbiale était en défaut, et qu’un nouvel élément s’était introduit dans le caractère de la nation. […] Renan, avec ses réserves qui font partie de sa force, me paraît être le champion philosophique le mieux approprié à cette seconde moitié du XIXe siècle, de cette époque dont le caractère est de ne point s’irriter ni se railler des grands résultats historiques, mais de les accepter et de les prendre à son compte, sauf explication.

1954. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français, et de la question des anciens et des modernes, (suite et fin.) »

J’y trouve, heureusement rappelée par lui, une anecdote d’un beau caractère, et qui montre une fois de plus combien ces hommes d’État de la Grande-Bretagne sont la plupart imbus d’une forte et indélébile éducation classique. […] Ménard, tout en l’honneur de la Grèce primitive, de la Grèce religieuse et héroïque, peut se résumer en ces mots : « Aucun rêve ne fut plus beau que le sien, et aucun peuple n’approcha plus près de son rêve. » Peuple à jamais aimable, en effet, dont le caractère se marquait en tout, et dès la première rencontre !

1955. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. »

Nul exemple ne me paraît plus propre à montrer à quel point des hommes, même énergiques de trempe et de volonté, sont assujettis et soumis au milieu où ils vivent, dépendant des circonstances, changeant de face sans changer de caractère ; combien il est juste, même après des excès et des torts, de ne pas désespérer de ceux qui ont une valeur réelle et un vertueux principe d’énergie ; comment le malheur éprouve et épure, même à leur insu, certaines natures restées saines au fond ; et ce que peuvent devenir d’honorable et d’utile pour la société et pour la patrie ceux qui, hors des cadres réguliers et durant l’orage des interrègnes, dans la convulsion des mouvements révolutionnaires, cherchaient vainement leur niveau et leur emploi. […] On a de lui quelques sermons imprimés ; cela avait besoin du débit ; son expression manque d’originalité et de caractère.

1956. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « La Réforme sociale en France déduite de l’observation comparée des peuples européens. par M. Le Play, conseiller d’État. (Suite et fin.) »

Habitué comme je le suis et enclin par nature à étudier surtout les individus, et ainsi fait moi-même que la forme des esprits et le caractère des auteurs me préoccupent encore plus que le but des ouvrages, je l’ai défini et appelé tout d’abord, après avoir lu de lui quelques chapitres : « un Bonald rajeuni, progressif et scientifique. » Mais de telles désignations sommaires ne signifient rien que pour ceux qui savent déjà tout ce qu’on y met. […] Le Plav. l’antagonisme social n’est point un fait nouveau, spécial à notre temps : les discordes civiles avaient même autrefois un caractère de violence qu’elles n’offrent guère aujourd’hui.

1957. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. (Suite) »

La princesse, fort jeune, blonde avec de grands yeux bleus, vifs et doux en même temps, avait la physionomie très spirituelle, le caractère excellent, une très bonne éducation et des principes, des sentiments de piété comme il convenait dans une alliance avec le dauphin, personnage si religieux. […] Il y a eu des degrés dans rabaissement de ce caractère.

1958. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre I. Composition de l’esprit révolutionnaire, premier élément, l’acquis scientifique. »

Grew, puis Vaillant viennent de démontrer les sexes et de décrire la fécondation des plantes ; Linné invente la nomenclature botanique et les premières classifications complètes ; les Jussieu découvrent la subordination des caractères et la classification naturelle. […] Tels sont enfin le caractère national et la religion. — Toutes ces causes ajoutées l’une à l’autre ou limitées l’une par l’autre contribuent ensemble à un effet total, qui est la société.

1959. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Pierre Loti »

Vous n’y trouverez ni drames singuliers ou puissants, ni subtiles analyses de caractères, puisque tout s’y réduit à des amours suivies de séparations et que les personnages y ont des âmes fort simples. […] Le drame, c’est le plus uni et le plus douloureux de tous : le drame unique, éternel, de la séparation des êtres qui s’aiment… Ainsi l’exotisme explique également, dans les romans de Pierre Loti, la nouveauté et l’intensité des sensations, et le caractère universel et largement humain des sentiments.

1960. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires de Philippe de Commynes, nouvelle édition publiée par Mlle Dupont. (3 vol. in-8º.) » pp. 241-259

Il faut lire là-dessus le chapitre xix du livre V, intitulé « Caractère du peuple françois et du gouvernement de ses rois », pour avoir de Commynes et de son esprit politique toute l’estime qu’il mérite. […] Le nom de Tacite se présente ici naturellement avec l’image de Tibère s’enfermant dans l’île de Caprée ; mais le récit de Tacite est d’un caractère à la fois plus atroce et plus grand.

1961. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Des lectures publiques du soir, de ce qu’elles sont et de ce qu’elles pourraient être. » pp. 275-293

Je voudrais qu’en disant nos belles qualités comme peuple, à des hommes qui en sont déjà assez pénétrés, on ajoutât, en le prouvant quelquefois par des exemples, que nous avons aussi quelques défauts ; qu’en France ce qu’on a le plus, c’est l’essor et l’élan, que ce qui manque, c’est la consistance et le caractère ; que cela a manqué à la noblesse autrefois et pourrait bien manquer au peuple aujourd’hui, et qu’il faut se prémunir de ce côté et se tenir sur ses gardes. […] Les lieux assignés aux lectures sont un point très important, et qui peut influer non seulement sur leur succès, mais sur leur caractère.

1962. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Le Palais Mazarin, par M. le comte de Laborde, de l’Institut. » pp. 247-265

« Enfin, il fit si bien, dit Retz, qu’il se trouva sur la tête de tout le monde, dans le temps que tout le monde croyait l’avoir encore à ses côtés. » On ne dira pas que je suis insensible aux grâces persuasives de Mazarin ; mais là où je me sépare un peu de M. de Laborde et de ses ingénieuses apologies, c’est dans l’admiration générale du personnage et du caractère. […] Voilà les côtés que Retz a merveilleusement saisis et connus, le caractère des hommes, le masque et le jeu des personnages, la situation générale et l’esprit mouvant des choses ; par toutes ces parties, il est supérieur et hors d’atteinte dans l’ordre de la pensée et de la peinture morale, autant que Mazarin peut l’être lui-même dans l’histoire comme signataire de la paix des Pyrénées.

1963. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « L’abbé Gerbet. » pp. 378-396

L’abbé Gerbet revêtit le plus qu’il put le système de M. de Lamennais du caractère de persuasion et de conciliation qui lui est propre ; il en adoucit et en gradua les pentes : ce fut là proprement son rôle en cette période de sa jeunesse. […] Voici quelques vers (car, sans y prétendre, l’abbé Gerbet est poète) qui rendent déjà le premier effet et qui marquent le ton de l’âme ; la pièce est intitulée Le Chant des Catacombes, et elle est destinée, en effet, à être chantée51 : Hier j’ai visité les grandes Catacombes                    Des temps anciens ; J’ai touché de mon front les immortelles tombes                    Des vieux chrétiens : Et ni l’astre du jour, ni les célestes sphères,                    Lettres de feu, Ne m’avaient mieux fait lire en profonds caractères                    Le nom de Dieu.

1964. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Philarète Chasles » pp. 111-136

C’est, comme pour elle, la vie qui est le caractère du talent de Philarète Chasles. […] Il n’est pas le jugeur haut et ferme, — inconnu, d’ailleurs, à ce temps sans doctrines et sans caractères, — mais il n’est même plus la personnalité étincelante et de libre fantaisie qu’il a été quelquefois.

1965. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Vigny »

Le meilleur de ces drames est Chatterton, tiré tout entier de Stello ; mais il est dans Stello beaucoup plus beau et plus complet, puisque l’analyse, et l’imagination qui décrit, y ajoutent leur profondeur et leur éclat de la passion et des caractères. […] Mais l’insouciance de l’idéal, la grossièreté du procédé et l’abaissement de l’observation, ces trois caractères de la littérature contemporaine, ont fait monter de dégoût la muse de Vigny dans cette rêverie où elle ne plane plus qu’à l’œil seul du poète… Ce cygne de la famille de celui de Mantoue qui nous est venu par l’Ile des Cygnes de Shakespeare, et qui s’y est attardé, ne nous a pas dit son dernier chant, heureusement !

1966. (1856) À travers la critique. Figaro pp. 4-2

Le caractère qui distingue plus particulièrement cet admirable fragment de critique contemporaine, c’est une bonhomie qui n’a rien de joué. […] Dumas fils a écrit cette curieuse comédie dans le style du Demi-Monde littéraire, et avec son esprit jeune jusqu’à la gaminerie, bien portant jusqu’à la pléthore… la santé est un des caractères distinctifs du talent de M.  […] Mais, à défaut de talent, il y a une chose qu’il est juste de louer chez le chroniqueur de l’Assemblée nationale, c’est le caractère de l’écrivain. […] Il y a, au contraire, dans le trio final de la Nuit blanche, une phrase admirablement dite par Darcier ; cette phrase, empreinte d’une ineffable tendresse, circule, sans rien perdre de son caractère, à travers le ton joyeux du morceau. […] Quant à la fabulation dramatique dans laquelle circulent ces visages qui sont des types, ces femmes qui sont des grâces, ces hommes qui sont des caractères, ce n’est rien de plus qu’un accessoire et un cadre, et si vous le revendiquez à titre d’art dramatique, à la bonne heure !

1967. (1925) Les écrivains. Première série (1884-1894)

Les cerveaux et les caractères de cette trempe sont rares. […] Jules Barbey d’Aurevilly était, non seulement un homme de grand talent, mais un homme de haut caractère. […] Je lisais, ces jours derniers, un fort beau livre : Un caractère, de M.  […] quelques mois à peine séparent la représentation de La Mort du duc d’Enghien de l’apparition d’Un caractère. […] Certes, je n’attendais pas qu’un si prompt et surtout qu’un si haut témoignage donnât à cette erreur récente un caractère aussi éclatant d’indélébilité historique.

1968. (1927) Les écrivains. Deuxième série (1895-1910)

Je ne le choisis pas spécialement, je le prends au hasard, car tous ont ce caractère d’indicible et épouvantante horreur. […] Ces qualités qui vous frappent tiennent au caractère de la race et nullement à un état social raisonné et meilleur que le vôtre. […] Que vaut cette faiblesse passagère dans l’impeccable unité de ce caractère où, tous, nous n’avons à puiser que de nobles et beaux exemples ? […] Il agit et pense selon son milieu, avec tous les caractères de pensée et d’action qui lui sont propres. […] Car, tout disparaît — les idées, les caractères, les traditions et les maisons… Ah !

1969. (1868) Rapport sur le progrès des lettres pp. 1-184

Nous ne pouvons pas analyser ici en détail son œuvre poétique, qui est considérable, et il a fallu nous contenter d’esquisser le caractère du talent de l’auteur. […] L’erreur, avec cette netteté et cette logique de formes, prend le caractère de la vérité. […] C’est le plus bel éloge qu’on puisse faire de son caractère et de son talent. […] Béranger l’appréciait beaucoup, Sainte-Beuve fait grand cas de son talent et de son caractère. […] Ces deux volumes contiennent, en effet, une douzaine de poëmes épiques, mais concentrés, rapides, et réunissant en un bref espace le dessin, la couleur et le caractère d’un siècle ou d’un pays.

1970. (1900) La culture des idées

Le génie par excellence est celui qui s’assimile tout, qui sait tout s’approprier sans préjudice pour son caractère inné. […] C’était le métier de saint Paul de tisser des tentes : jamais métier ne symbolisa mieux le caractère d’un homme. […] Il faut sans doute tenir compte, dans l’examen de ces faits contradictoires, soit de l’intelligence, soit du caractère du vainqueur. […] Le caractère orgueilleux des Romains avait eu le même résultat que la stupidité des Arabes. […] Peut-être gagnera-t-elle à être dépouillée de tout caractère polémique.

1971. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Appendice à l’article sur Gabriel Naudé »

Je recommence, en septembre 1861, plus activement que jamais, une campagne de lundis au Constitutionnel, en tâchant de donner à celle-ci un caractère un peu différent de l’ancienne. — En Avant  : un dernier coup de collier ; en Avant !

1972. (1875) Premiers lundis. Tome III « Eugène-Scribe. La Tutrice »

Cette pièce a de l’entrain ; le caractère de la tutrice est d’une donnée assez neuve, et l’esprit, sans y être de haut vol, n’est pas trop vulgaire.

1973. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre VIII. De la clarté et des termes techniques »

Si l’on méconnaissait ce caractère nécessaire du mot propre, qui est d’être clairement intelligible, à quels excès n’arriverait-on pas ?

1974. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Les legs de l’exposition philosophie de la danse »

Elle est d’un caractère éminemment privé et intime.

1975. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Philosophie du costume contemporain » pp. 154-161

Elle est sans doute restée décorative dans le détail de ses ornements — où la « décoration » prend d’ailleurs, de plus en plus, un caractère de curiosité archéologique.

1976. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Discours prononcé à la distribution des prix du lycée d’orléans. » pp. 223-229

Chaque province de France a sa marque, son caractère.

1977. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre premier. Impossibilité de s’en tenir à l’étude de quelques grandes œuvres » pp. 108-111

Mais il est visible, au premier coup d’œil, que, si nous trouvons, en parcourant la littérature d’une époque, des caractères qui sont strictement individuels, nous en rencontrons d’autres qui sont communs à plusieurs auteurs, à des groupes plus ou moins étendus.

1978. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre IV »

Récemment la racine [mot en caractère grec] est venue donner naissance, d’abord à l’hippologie (qui n’est autre que la maréchalerie), puis à l’hippophagie ; les palefreniers sont devenus très probablement des hippobosques et enfin, ceci est plus certain, la colle faite avec la peau du cheval a pris le nom magnifique d’hippocolle.

1979. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Dédicace, préface et poème liminaire de « La Légende des siècles » (1859) — Préface (1859) »

Ce livre, s’il n’y avait pas quelque affectation dans des comparaisons de cette nature, aurait, lui aussi, ce double caractère.

1980. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Joseph Scaliger, et Scioppius. » pp. 139-147

Pour Gaspard Scioppius, il ne mourut que l’an 1649, à Padoue, où il s’étoit retiré, faute de pouvoir trouver ailleurs une retraite assurée contre la multitude d’ennemis qu’il s’étoit faits par l’impétuosité de son caractère.

1981. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Introduction »

Il sera traité assez longuement de ce principe fondamental de sélection naturelle dans le quatrième chapitre ; et nous verrons comment cette sélection naturelle cause presque inévitablement de fréquentes extinctions d’espèces parmi les formés de vie moins parfaites, et conduit à ce que j’ai nommé la divergence des caractères.

1982. (1767) Salon de 1767 « Peintures — [autres peintres] » pp. 317-320

J’aime son caractère, parce qu’il est simple et non maniéré.

1983. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Émile Augier »

J’ai dit quels étaient les caractères de sa comédie.

1984. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre I. Définition des idées égalitaires »

Des caractères, du jugement de valeur ainsi fondé découlent ceux des impératifs qu’il implique.

1985. (1927) André Gide pp. 8-126

André Gide a les vues qui conviennent à son caractère. […] Mais les sympathies qu’on accorde justement au caractère et au talent de cet écrivain jovial n’empêchent point qu’en l’espèce il n’ait tout à fait tort. […] Caractères Il y a bien des observations fines et des croquis spirituels dans le nouvel opuscule à tirage restreint que M.  […] Il s’explique de certaines choses avec une audace dont on se fût bien passé et qui n’a certes rien du caractère évasif qu’on attribue aux Normands, d’ailleurs bien à tort : le manque de netteté n’apparaît guère chez Corneille, Flaubert ou Maupassant. […] L’esprit critique doit en effet multiplier les points de vue et peser le pour et le contre, mais, au moins sur les problèmes du domaine positif, il sait conclure, s’il n’en est empêché par quelque faiblesse de caractère, tiédeur ou peur des responsabilités.

1986. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre V. Swift. » pp. 2-82

. —  Son caractère. —  Son orgueil. —  Sa sensibilité. —  Sa vie chez sir W. […] —  Son jugement sur la société, le gouvernement, les conditions et les professions. —  Comment il diffame la nature humaine. —  Derniers pamphlets. —  Construction de son caractère et de son génie. […] Quand Swift la revit, il lui dit pour première parole : « Dites-moi, madame, êtes-vous aussi fière et d’aussi mauvais caractère aujourd’hui que la dernière fois ?  […] III C’est à ce moment et entre ses mains que le journal atteignit en Angleterre son caractère propre et sa plus grande force. […] Mais ces mêmes alentours et cette même nature, qui le chassaient hors du bonheur, de l’amour, du pouvoir et de la science, l’ont élevé, dans cet âge d’imitation française et de modération classique, à une hauteur extraordinaire, où, par l’originalité et la puissance de son invention, il se trouve l’égal de Byron, de Milton et de Shakspeare, et manifeste en haut relief le caractère et l’esprit de sa nation.

1987. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1865 » pp. 239-332

Il y a la signature du caractère et la griffe du talent dans cette main de l’homme. […] Et comme nous essayions de démêler les caractères des deux peuples français et anglais, Herzen nous dit : « Tenez, il y a un Anglais qui les a assez bien résumés ces deux caractères, dans cette phrase : « Le Français mange du veau froid chaudement ; nous, nous mangeons notre bœuf chaud froidement. » * * * — D’homme à femme, peut-être n’y a-t-il de bien vrai et de bien sincère, que les sentiments que la parole n’exprime pas. […] Elles tiennent étrangement du fantôme et de l’animal, — se faisant tentantes par un caractère d’apparition, par l’aspect cadavéreux, par l’enluminure macabre, enfin par un renversement de nature parlant à des appétits d’amour viciés. […] Au résumé chose étrange, chez nous, la plus absolue différence de tempéraments, de goûts, de caractère, et absolument les mêmes idées, les mêmes sympathies et antipathies pour les gens, la même optique intellectuelle. […] 10 octobre Vraiment c’est une chose injuste qu’on n’ait pas donné à notre corps l’étoffe de notre caractère.

1988. (1923) Les dates et les œuvres. Symbolisme et poésie scientifique

Quand ils écrivent son nom, c’est en gros caractères, en le détachant par deux tirets du reste de la phrase. […] Il eut une vieille presse et des caractères d’occasion, et mit le « Décadent » au service de la Poésie nouvelle. […] Il publia vers et prose de presque tous ceux d’alors, et quand parut le Traité du verbe, il sortit capitales et caractères gras et en toute sincérité lui donna une redondante publicité. […] Tout naturellement en le développement, s’éprouveront en même temps les caractères par où s’oppose la « Poésie scientifique ». […] Essai de remplacer la ponctuation par des gradations dans la grandeur ou l’exiguïté des caractères d’imprimerie, selon l’importance des membres de phrases. » Voilà donc la suprême préoccupation !

1989. (1882) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Deuxième série pp. 1-334

C’est d’abord dans l’usage de ces expressions abstraites et de ces termes généraux qui sont un caractère manifeste et notable du style de Massillon. […] Rien de plus légitime ; et ne vouloir voir là qu’un moyen de rhéteur, ce serait faire gratuitement injure au caractère de Massillon. […] Or comment pouvais-je annoncer plus naturellement sa piété, qualité d’ailleurs si convenable à son état et à son caractère ? […] Le cœur se gonfle, le caractère s’aigrit ; et l’on dit et l’on fait des folies. […] Il n’y a, par exemple, ni rigueurs, ni contrainte, ni tyrannie qui puisse excuser, ou justifier, à plus forte raison, la bassesse du caractère.

1990. (1856) Le réalisme : discussions esthétiques pp. 3-105

J’aurais pu dire en mon propre nom tout ce qu’ils vont nous dire, mais toutes ces allégations contradictoires n’eussent certainement pas conservé au bout de ma plume le caractère d’autorité et de généralité qu’elles présentent, en se dégageant directement des différents appréciateurs que je mets aux prises. […] La loi, en exigeant que l’écrivain assume la responsabilité de son écrit, lui rend, même dans l’ordre littéraire, ce caractère particulier au génie du dix-neuvième siècle. […] Tout le monde a vu, placardée aux murs de Paris, en compagnie des saltimbanques et de tous les marchands d’orviétan et écrite en caractères gigantesques, l’affiche de M.  […] L’enquête d’un préfet n’en révélerait certainement pas aussi bien le caractère, l’intelligence et les mœurs. […] Depuis quand est-ce que les intervalles d’une situation en forment le caractère ?

1991. (1878) Nos gens de lettres : leur caractère et leurs œuvres pp. -316

Je vois percer dans l’épisode Bonneau le caractère espiègle et gamin de Champfleury. […] Mais où ce caractère s’accuse le plus effrontément, où tous les voiles sont déchirés, où M.  […] Rejetez-le en arrière, jusque dans le xviie  siècle, sa phrase aura les mêmes caractères. […] Il restera, parce qu’il a tracé des caractères. […] La logique dans les caractères, la suite dans la vraisemblance, dans les situations, ne le préoccupent guère, on le voit, et, qui sait ?

1992. (1925) Promenades philosophiques. Troisième série

Les enfants sucent avec le lait le caractère de leur nourrice. […] Elles se rattachent à une des vieilles religions de l’Asie dont les caractères essentiels étaient le sacrifice et la communion. […] Gœthe avait une sœur d’un caractère tout à fait anormal. […] La fantaisie de Musset n’a jamais un caractère morbide ; elle est de la gaminerie, et non pas de l’extravagance. […] Le goût du rouge signale la rudesse, et le goût du vert, la douceur du caractère.

1993. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « [Note de l’auteur] » pp. 422-425

Ces réserves morales qu’on fait sur le caractère de M. 

1994. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Andrieux »

En somme, ce fut un honorable caractère, et plus fort peut-être que son talent ; mais ce talent lui-même était rare.

1995. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre I »

Mais rien n’est plus inexact que cette étiquette collée sur leurs œuvres, si ce n’est la connaissance de leurs caractères.

1996. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre II. De la sensibilité considérée comme source du développement littéraire »

Ce qui arrive ordinairement, c’est que, dans ces bouleversements de l’âme entière, le fond de la nature apparaît, et le mot est ce que le caractère primitif et les habitudes invétérées le font.

1997. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Delavigne, Casimir (1793-1843) »

Delavigne, l’essor de la grande ambition littéraire, en ce qu’il peut avoir parfois de téméraire et de suprême, était arrêté en lui et comme limité par une sorte de réserve naturelle, qu’on peut louer ou blâmer, selon qu’on préfère dans les productions de l’esprit le goût qui circonscrit ou le génie qui entreprend, mais qui était une qualité aimable et gracieuse, et qui se traduisait en modestie dans son caractère et en prudence dans ses ouvrages.

1998. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVI. Jésus au tombeau. »

Lors même qu’on admettrait la position du Golgotha comme à peu près exacte, le Saint-Sépulcre n’aurait encore aucun caractère bien sérieux d’authenticité.

1999. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre III » pp. 30-37

Aussi Boileau lui-même y reconnaît-il « une narration également vive et fleurie, des fictions très ingénieuses, des caractères aussi finement imaginés qu’agréablement variés et bien suivis Il fut fort en estime même des gens du goût le plus exquis17 ».

2000. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XVI, les Érynnies. »

Ce qui rendait encore les Érynnies haïssables, c’était l’idée qu’on se faisait de leur caractère.

2001. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Malherbe, avec différens auteurs. » pp. 148-156

Malgré ce caractère malheureux, il n’eut que trois démêlés remarquables.

2002. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre V. Harmonies de la religion chrétienne avec les scènes de la nature et les passions du cœur humain. — Chapitre VI. Harmonies morales. — Dévotions populaires. »

Des opinions d’une espèce différente, mais toujours d’un caractère religieux, inspiraient l’humanité : elles sont si naïves, qu’elles embarrassent l’écrivain.

2003. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXIII. Des panégyriques en vers, composés par Claudien et par Sidoine Apollinaire. Panégyrique de Théodoric, roi des Goths. »

Alexandre fut déshonoré par le meurtre de Clitus, et le supplice bien plus barbare de Callisthène ; Auguste, par les proscriptions ; Vespasien, par ses rapines et le meurtre d’Helvidius Priscus ; Trajan, par ses excès dans le vin ; Adrien, par ses mœurs ; Constantin, par le meurtre de presque toute sa famille ; Julien, par ses superstitions ; Théodose, par le massacre de Thessalonique ; et Théodoric, dont nous parlons, par le meurtre de Symmaque : tant, parmi les hommes, et surtout ceux qui ont le malheur d’être puissants, on trouve peu de vertus qui soient pures, et de grands caractères sans faiblesses !

2004. (1913) Les livres du Temps. Première série pp. -406

On concevrait à la rigueur cette objection chez de fermes classiques, n’admettant, que les caractères généraux et purement humains. […] Je n’ai voulu ni discuter des talents, ni peindre des caractères. […] Son père s’y oppose : les caractères al tiers de ces deux hommes se heurtent. […] Pas de synthèse poétique ni de psychologie pénétrante, dans ce tableau de sabbat ni dans le caractère de ce démoniaque chanoine Docre. […] Malgré cette familiarité qui aurait pu passer pour un trait de caractère chez une paysanne, M. 

2005. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

Tels sont les caractères du désordre que j’aperçois. […] Plaisamment faite, la satire a le caractère de la vérité. […] Voilà le caractère de son esprit, l’originalité, la singularité de sa philosophie. […] Le plus moderne émoi revêt ici un caractère cornélien. […] Nous nous efforçons de leur laisser ce que les philosophes appellent un caractère objectif.

2006. (1889) Ægri somnia : pensées et caractères

Qui donc, dans une famille, est moins contredit que l’esprit faux, plus ménagé que le mauvais caractère, plus obéi que le violent, moins interrompu que le bavard ? […] L’autorité du journal qui avait publié l’article lui donnait le caractère d’une protestation. […] Rousse, la revue de sa vie politique, dans ce langage sobre, correct, robuste, passionné et contenu qui est son caractère, son tempérament, tout son être ? […] Mais s’il n’y a qu’une opinion sur le caractère général de beauté de leurs œuvres, sur le détail il y a de grandes dissidences. […] La question scientifique prit ainsi le caractère d’une question religieuse.

2007. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre septième. Les altérations et transformations de la conscience et de la volonté — Chapitre deuxième. Troubles et désagrégations de la conscience. L’hypnotisme et les idées-forces »

Il n’y a pas d’action du dehors sur nous qui ne provoque une réaction interne sous forme d’impulsion ou d’aversion : rien ne nous laisse indifférent et passif, du moins à l’origine, et la sensation même, avec son caractère agréable ou pénible, présuppose l’appétit vital, dont elle provoque infailliblement la réponse en un sens ou en l’autre, l’assentiment ou le refus. […] L’attention volontaire est celle qui dépend de l’intérêt offert par quelque représentation à laquelle elle s’attache, et cet intérêt provient de ce que cette représentation est associée avec un groupe d’autres représentations d’un caractère agréable ou pénible. […] Seulement ces réflexes n’ont plus le caractère immédiat de l’attention involontaire : ils sont provoqués par l’intermédiaire de la portion du cerveau qui préside au mécanisme de l’inhibition et de la direction. […] Elle n’en conserve pas moins un caractère spécifique qu’il importe de déterminer. […] Supposez maintenant un état de l’esprit où les actions et paroles soient encore automatiques et constituent ainsi des réflexes, c’est-à-dire des réponses immédiates et déterminées à telle excitation extérieure déterminée, mais avec ce caractère particulier qu’elles seront conscientes et absorberont en elles-mêmes toute l’attention restée disponible : vous aurez l’état hypnotique, avec ses effets sur la motion.

2008. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1867 » pp. 99-182

Un des caractères de la beauté de l’œil dans les statues grecques — caractère que je n’ai vu indiquer nulle part — c’est la retraite de la paupière inférieure, en sorte que si on regarde un œil de profil, il se dessine en une ligne complètement fuyante, tandis que dans les bustes romains, et cela est très marqué dans la sculpture médiocre, la paupière supérieure est sur la même ligne que l’inférieure. […] * * * Je suis frappé combien le caractère du Français se dénationalise à l’étranger, et combien vite et naturellement le pays qu’il habite, déteint sur lui et jusqu’au fond de son être. […] 6 mai Penser qu’il n’y a jamais eu un paysagiste — et personne ne l’a remarqué — un paysagiste depuis le Poussin et Claude Lorrain jusqu’à ce triste Benouville, qui ait eu l’idée de rendre les deux plus frappants, les deux plus visibles caractères de cette campagne romaine ; la spécialité du bleu du ciel et le vert-de-gris particulier de la verdure du chêne-liège et de l’olivier. […] Puis le laid, toujours le laid, et le laid bourgeois, le laid sans son grand caractère, sans la beauté du laid.

2009. (1895) La science et la religion. Réponse à quelques objections

Puisque jadis, en des temps étrangement confus, l’Église avait triomphé de cette espèce d’éruption de l’instinct et de cette révolte de la nature, qui fut sans doute l’un des caractères essentiels de la Renaissance, et qu’elle avait même arraché l’empire de l’art au paganisme du xve  siècle ; — puisque, cent cinquante ou deux cents ans plus tard, elle avait pu contrebalancer la redoutable influence du cartésianisme en l’absorbant, et même en s’en aidant pour développer ce qu’il y a de substance rationnelle dans son propre enseignement ; — et puisque, enfin, au début du siècle où nous sommes, elle n’avait pas refusé de traiter avec la Révolution, et qu’elle l’avait pu, sans rien abandonner de ses droits ni surtout céder de son dogme ; — pourquoi, dans un temps comme le nôtre, s’il y a dans sa tradition quelque vertu sociale, et qu’aucune considération de l’ordre temporel n’en gêne plus le libre développement, pourquoi n’essaierait-elle pas de se présenter aux peuples sous ce nouvel aspect d’elle-même, et pourquoi n’y réussirait-elle pas ? […] Ce sont là de nobles paroles, dont la noblesse n’est égalée que par la sincérité de l’émotion qui les anime ; et certes, aucun rêve, — si les expressions du Saint-Père lui-même nous autorisent peut-être à nous servir de ce mot, — ou aucune espérance, ne saurait mieux convenir et aux aspirations de cette fin de siècle, et au caractère de l’illustre vieillard qui gouverne à peu près souverainement la croyance de 200 millions d’hommes. […] « Qu’on tourne la question comme on voudra, disait Scherer, on arrivera toujours à ce résultat que le christianisme diffère de l’hellénisme en ce qu’il est une religion, qu’il est une religion, parce qu’il prétend aune origine surnaturelle, et que sa vertu vient précisément de ce caractère de révélation… L’hellénisme est quelque chose de très grand et de très beau, mais il n’est qu’une philosophie, et il est condamné à rester sans influence sur les masses, sans contact même avec elles, un objet d’admiration et un aliment spirituel pour une imperceptible élite de l’humanité. […] Le caractère général de son enseignement ou de sa prédication en est-il changé dans son fond ou modifié dans sa teneur essentielle ? […] Je me contenterai de faire observer à ce propos que la justification qu’il donne de l’esclavage, ou l’excuse, est justement fondée sur ce qu’on appelle le caractère sacré de la vie humaine, servus a servando  : l’esclave est pour lui le vaincu dont le vainqueur a respecté la vie.

2010. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE VIGNY (Servitude et Grandeur militaires.) » pp. 52-90

Quand j’ai insisté, pour rectifier une erreur, sur les premières relations littéraires et les accointances poétiques de M. de Vigny, ce n’est pas du moins que je prétende diminuer aucunement son caractère d’originalité et l’idée qu’on se doit faire de la puissance solitaire et méditative empreinte dans ses poëmes. […] On a trop présent le grave et sublime caractère du capitaine Renaud et tout ce qu’il y a, sous cette mâle infortune, de philosophie humaine, d’abnégation stoïque attendrissante, de sagesse contristée et néanmoins incorruptible, pour que je fasse autre chose que d’y renvoyer Chez M. de Vigny, les grands sentiments de la pitié de l’amour, de l’honneur, de l’indépendance, se trouvent comme une liqueur généreuse enfermée dans des vases et des aiguières élégamment ciselées, avec des tubes, avec des longueurs de cou qui serpentent et qui ne la laissent arriver que goutte à goutte à notre lèvre : une source courante, à laquelle on puiserait dans le ci eux de la main, aurait son avantage ; mais la liqueur aussi a gagné en éclat et en saveur à ces retards ménagés, à ces filtrations successives. […] J’avais en effet, depuis la mort de De Vigny, écrit sur lui dans la Revue des Deux Mondes un article qui, par son caractère de vérité, n’avait contenté qu’à demi le petit cénacle de ses fidèles des dernières années (Voir Nouveaux Lundis, tome VI).

2011. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « M. DE LA ROCHEFOUCAULD » pp. 288-321

En 1665, il y avait neuf ans que les Provinciales avaient paru ; les Pensées ne devaient être publiées que cinq ans plus tard, et le livre des Caractères qu’après vingt-deux ans. […] Si les Maximes peuvent sembler, à leur naissance, n’avoir été qu’un délassement, un jeu de société, une sorte de gageure de gens d’esprit qui jouaient aux proverbes, combien elles s’en détachent par le résultat, et prennent un caractère au-dessus de la circonstance ! […] Une grande partie des qualités du style, chez tel auteur brillant, tient à un défaut du caractère.

2012. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Charles Labitte »

Un caractère digne d’être noté honore en mille endroits ces premiers épanchements d’une vie naturelle et pure : ce sont les sentiments de croyance et de moralité, si familiers, ce semble, à toute jeunesse qu’on ne devrait point avoir à les relever, mais si rares (nous assure-t-on) chez les générations venues depuis Juillet, qu’elles sont vraiment ici un trait distinctif. […] Il ne se bornait pas aux simples faits principaux ni à l’analyse des ouvrages, ni même à la peinture de la physionomie et du caractère ; il voulait tout savoir, renouer tous les rapports du personnage avec ses contemporains, le montrer en action, dans ses amitiés, dans ses rivalités, dans ses querelles ; il visait surtout à ajouter par quelque page inédite de l’auteur à ce qu’on en possédait auparavant. […] En général, l’éditeur des Procès-verbaux de 1593 accordait à l’assemblée des États de la Ligue un caractère national et incontesté , fait pour surprendre ceux qui avaient été nourris de la vieille tradition française.

2013. (1875) Premiers lundis. Tome III « Les poètes français »

Le moyen âge, dans sa première partie, avec ses œuvres souvent anonymes ou au moins d’un caractère impersonnel, demandait à être exposé, à être analysé simplement, nettement, à être enseigné dans son fond même, au moment où l’on en présentait la fleur ; et c’est ce qu’a fait tout d’abord la plume docte et sûre de M. […] Car le caractère du Renart finissant, comme celui du Roman de la Rose à sa conclusion, est le cynisme et l’impudeur. […] Quoi qu’il en soit de ces meilleures veines entremêlées et persistantes, et de quelques honorables exceptions qui retardent sur le siècle, telles que la Chronique rimée de Du Guesclin et le Combat des Trente, ce fragment épique du plus rude et du plus grand caractère, ce poème d’honneur qui nous rappelle le ton de la Chanson de Roland, la décadence durant tout le xiv e siècle se continue et, qui pis est, elle s’ignore, elle s’applaudit, elle foisonne et se diversifie à plaisir en toute sorte de subtilités et de fausses gentillesses.

2014. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIIe entretien. Poésie lyrique. David (2e partie) » pp. 157-220

La pensée de ce Dieu, qui éclate avec les éclairs et les grondements de sa foudre dans les paroles de son poète, ajoute à ce chant de guerre un caractère surnaturel, qui est, par excellence, le caractère de la poésie lyrique des Hébreux. […] Ce caractère religieux manque aux chants guerriers de Tyrtée.

2015. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXIIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (4e partie) » pp. 1-63

« Danton fut surtout poussé au meurtre par une cause plus personnelle et moins théorique : son caractère. […] Il crut que son acte, en se justifiant par l’intention et par le lointain, perdrait de son caractère ; que son nom grandirait quand il serait en perspective, et qu’il serait le colosse de la Révolution. […] Prince épuisé et dépopularisé par quatre ans de lutte inégale avec la nation, livré vingt fois à la merci du peuple, sans crédit sur les soldats ; caractère dont on avait si souvent sondé la témérité et l’indécision, descendu d’humiliation en humiliation et degré par degré du haut de son trône dans la prison, Louis XVI était l’unique prince de sa race à qui il ne fût pas possible de songer à régner.

2016. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXIVe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (5e partie) » pp. 65-128

L’histoire se demande à son tour si le triomphe de la Gironde au 31 mai aurait sauvé la république ; s’il y avait dans ces hommes de paroles, dans leurs conceptions, dans leur union, dans leurs caractères et dans leur génie politique, les éléments d’un gouvernement à la fois dictatorial et populaire, capable de comprimer les convulsions de la France au dedans, de faire triompher la nation au dehors, et de procurer l’avènement d’une république régulière en la préservant des rois et des démagogues. […] Était-ce le stoïcisme du caractère ? […] « Il y a dans les mouvements d’une révolution une grandeur qui se communique aux caractères, et qui grandit quelquefois les âmes les plus vulgaires à la proportion des événements auxquels elles participent.

2017. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Figurines (Deuxième Série) » pp. 103-153

Mes amis me le reprochent souvent… Cette disposition native n’a fait que s’accroître pendant seize ans de vie à l’armée, où le silence est une consigne ; cette coutume s’est accrue encore par un long séjour en Angleterre… Il en résulte qu’il y a sur mon caractère une enveloppe de taciturnité, qui fait que j’aime à parler des idées et des sentiments, jamais des personnes. » Et ailleurs : « Quand j’étais dans la Charente, d’où je vous écrivais souvent, je fus atteint de la fièvre typhoïde. […] D’autres sont de bons biographes ou de bons peintres de caractères. […] Ce sont moins les talents et les connaissances que les caractères qui manquent à cette Chambre méprisée.

2018. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE IX »

Son caractère est une sincérité presque effrayante, et je ne sais quel irrésistible besoin d’étreindre la vie jusqu’au sang, et de lui faire rendre tous ses cris et toutes ses larmes. […] » — N’en parlons plus, soit ; mais, pour débuter dans sa vie nouvelle, Marguerite Gautier n’en allait pas moins retourner au passé qu’elle avait vomi ; elle allait faire, pour se promener à la campagne, avec son amant, ce que la Marion Delorme de Victor Hugo ne subit que pour arracher le sien à la hache… — « Je folâtrais un jour avec la facile Hermione — dit une épigramme de l’Anthologie ; — elle avait, comme Vénus, une ceinture brodée en fleurs avec des caractères d’or. […] Cependant il est, çà et là, des choses qui me blessent dans ce vif ensemble : c’est le rôle de moraliste que s’arroge le jeune peintre vis-à-vis de la femme qu’il va entraîner, tout à l’heure, dans tous les casse-cou de l’amour coupable ; c’est l’attitude vertueuse et presque contrite que prend cette femme devant l’homme auquel elle a jeté son mouchoir ; c’est, en un mot, le faux air d’entrevue de pénitente et de directeur qui déguise mal le caractère de ce profane tête-à-tête.

2019. (1857) Articles justificatifs pour Charles Baudelaire, auteur des « Fleurs du mal » pp. 1-33

Le caractère de la poésie des Fleurs du mal, à l’exception de quelques rares morceaux que le désespoir a fini par glacer, c’est le trouble, c’est la furie, c’est le regard convulsé, et non pas le regard sombrement clair et limpide du Visionnaire de Florence. […] Mais il était écrit là-haut sans doute que tout ce qui désigne ce sexe deviendrait une injure ; et ce sont les femmes elles-mêmes qui se sont calomniées en rejetant comme indécents tous les mots qui avaient ce caractère. […] Ils m’ont donc déjà compris lorsque j’ai cherché à indiquer le caractère de cette poésie abondante dans sa sobriété, de cette forme serrée où parfois l’image fait explosion avec l’éclat soudain de la fleur d’aloès.

2020. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Gustave Flaubert »

II Le caractère principal du roman si malheureusement nommé de ce titre abstrait, pédagogique et pédant : L’Éducation sentimentale, est avant tout la vulgarité, la vulgarité prise dans le ruisseau, où elle se tient, et sous les pieds de tout le monde. […] Réellement, ce n’est pas une histoire que les misérables faits de la vie de ce galopin sans esprit et sans caractère, de cette marionnette de l’événement qui le bouscule, et qui vit, ou plutôt végète comme un chou, sous la grêle des faits de chaque jour. […] Et, de vrai, le caractère du lion (littérairement ou non) c’est la force, c’est l’impétuosité, c’est le bond !

2021. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — I. » pp. 495-512

Quant à Napoléon… Ceux qui aiment à retourner en idée les caractères par tous les aspects, peuvent s’exercer et faire leur rêverie là-dessusl. […] Ceux qui aiment à retourner en idée les caractères par tous les aspects, peuvent s’exercer et faire leur rêverie là-dessus.

2022. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — I. » pp. 262-280

Après sa mort, une lettre du supérieur de la maison professe, le père Martineauk ; un éloge mis en tête de ses Sermons par le religieux qui en fut l’éditeur, le père Bretonneau ; une lettre de M. de Lamoignon, son ami de tous les temps ; un autre hommage plus développé mais du même genre, par une personne de condition, Mme de Pringy, c’est tout ce qu’on a sur Bourdaloue ; et, je le dirai, quand on l’a lu lui-même et considéré quelque temps dans l’esprit qui convient, on ne cherche point sur son compte d’autres particularités, on n’en désire pas : on entre avec lui dans le sens de cette conduite égale, uniforme, qui est le caractère de la prudence chrétienne et le plus beau support de cette saine éloquence ; et l’on répète avec une des personnes qui l’ont le mieux connu : « Ce qui m’a le plus touché dans sa conduite, c’est l’uniformité de ses œuvres. » On ne sait rien ou à peu près rien non plus de la vie de La Bruyère ; mais, à l’égard de ce dernier, le sentiment qu’on apporte est, ce me semble, tout différent. […] Cet éloge funèbre du Grand Condé, dont Mme de Sévigné a esquissé une vive analyse dans une lettre à Bussy et dont elle se disait transportée, est d’un caractère à part et garde encore l’empreinte morale de la manière de Bourdaloue ; il laisse la vie glorieuse et mondaine du prince, ou plutôt, dans cette vie, il ne s’attache qu’à son cœur, à ce qui s’y conserve d’intègre, de droit, de fidèle, jusque dans ses infidélités envers son roi et envers son Dieu, et il va dégageant de plus en plus cette partie pure, héroïque et chrétienne, jusqu’à ce qu’il la considère en plein dans la maturité finale et un peu tardive de ses dernières années.

2023. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — II. (Fin.) » pp. 322-341

À la fin du tome II, le Dauphiné est traité par l’auteur avec une complaisance particulière : Beyle n’est pas ingrat pour sa belle province ; il en rappelle toutes les gloires, surtout l’illustre Lesdiguières, le représentant et le type du caractère dauphinois, brave, fin, et « jamais dupe ». […] Plusieurs écrivains dans ces derniers temps, et après M. de Balzac, se sont occupés de Beyle, de sa vie, de son caractère et de ses œuvres : M. 

2024. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Instruction générale sur l’exécution du plan d’études des lycées, adressée à MM. les recteurs, par M. Fortoul, ministre de l’Instruction publique » pp. 271-288

Car c’est dans la nature, bien plus que dans les livres, qu’il faut chercher des inspirations pour un enseignement qui doit demeurer élémentaire, pratique et toujours approprié aux intelligences moyennes… À mesure que l’enseignement se fortifie, on peut donner aux exercices un caractère plus profitable ; poser aux élèves des problèmes numériques et en faire contrôler la solution de temps en temps… Par quelques exercices de ce genre, les jeunes gens apprennent bientôt à calculer, à peser, à mesurer, et on leur inspire le goût de l’expérience avec la confiance dans ses enseignements. […] Mises à leur place, ces notions entrent sans fatigue dans l’esprit des élèves, trouvent plus tard dans la vie leurs applications, et contribuent au plus haut degré à donner à l’enseignement de la chimie son véritable caractère.

2025. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « II » pp. 21-38

Bordes (mars 1765), vous voyez bien que Jean-Jacques ressemble à un philosophe comme un singe ressemble à l’homme… On est revenu de ses sophismes, et sa personne est en horreur à tous les honnêtes gens qui ont approfondi son caractère. […] En 93 même, s’il y avait assisté, il aurait dit : « Les y voilà, je les reconnais, mes Welches ; c’est bien cela. » Nul n’a aussi vivement et aussi fréquemment exprimé le contraste qui se fait remarquer dans le caractère des Français et des Parisiens aux diverses époques de notre histoire.

2026. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance inédite de Mme du Deffand, précédée d’une notice, par M. le marquis de Sainte-Aulaire. » pp. 218-237

L’abbé Barthélemy, l’hôte des Choiseul, l’ami qui s’est donné une fois pour toutes et que le charme a irrévocablement touché, y gagne aussi et se dessine dans toutes les nuances de son caractère, le plus poli des savants, aimable et estimable, gai et tempéré, bon garçon, tout à tous, vrai trésor de société, ayant des heures pourtant où il regrette sourdement l’indépendance du cabinet et les libres délices de l’étude. […] Mais, pour peu qu’on entre dans l’esprit de cette correspondance, on ne tarde pas, avec les deux femmes distinguées dont il entretient et resserre l’union, à apprécier à sa valeur cet ami essentiel, ce caractère uni et sûr, complaisant sans bassesse, agréable et serviable sans flatterie.

2027. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Charles-Quint après son abdication, au monastère de Saint-Just »

De tous les États et lieux qui faisaient partie de sa vaste monarchie, Charles-Quint choisit exprès, pour cet acte solennel, la capitale des provinces belges, où il était né, où il avait été nourri, qu’il affectionnait particulièrement, et aux institutions desquelles il rendait ainsi le plus bel hommage ; il voulut imprimer, à cette renonciation politique suprême comme un caractère de famille ; et lui, le plus hautain partout ailleurs et le grave des maîtres, il eut ce jour-là des accents de cordialité et presque de bonhomie. […] Un ambassadeur vénitien écrivait peu après, en terminant une dépêche où il résumait tout le règne et le caractère de Charles-Quint : « Mais la fuite d’Inspruck, le mauvais succès de l’entreprise de Metz ont traversé le cours de cette gloire et sont venus remettre en mémoire les autres mauvais succès, comme ceux de Provence, d’Alger et de Castelnuovo ; la trêve désavantageuse conclue avec Sa Majesté très chrétienne, la renonciation aux États, le départ pour l’Espagne et l’entrée dans un monastère, tout cela lui a fait perdre presque toute sa réputation, je dis presque toute, parce qu’il lui en reste autant qu’il reste d’impulsion à une galère qui a été fortement poussée par les rames et le vent, et qui, l’un et l’autre cessant, fait pourtant encore un peu de chemin ; chacun concluant de là que c’est par le souffle favorable de la fortune qu’a été guidé l’immense navire des États, royaumes et pires de Sa Majesté. » Mais, patience !

2028. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Œuvres complètes de Molière »

Malgré de très légères erreurs qu’un des rivaux les plus compétents et non des moins malins s’est amusé à y relever, et qui me prouvent précisément combien il y a peu à y reprendre, elle est généralement irréprochable sur tous les faits essentiels, et elle porte avec elle, sur l’œuvre et le caractère du grand comique, toutes les circonstances élevées et justes qu’on peut désirer. […] C’était un de ces moments si précieux pour la haute éducation de l’esprit, où les masques se détachent, où les physionomies ont toute leur expression, où les caractères ont tout leur jeu, où les conditions sociales s’opposent violemment les unes aux autres, où les travers, les vices, les ridicules se montrent avec une pétulance fanfaronne… » Non content d’une large et riche Introduction, qui se poursuit et se renouvelle même en tête du second volume par une Étude sur la troupe de Molière, M. 

2029. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois par M. Camille Rousset. Victor-Amédée, duc de Savoie. (suite et fin.) »

Ce dernier, en vertu des documents actuellement mis en œuvre, acquiert un relief qui le constitue un des caractères les plus originaux de l’histoire. […] Devait-il donc régner au profit de Louis XIV ; et du caractère dont il était et dont on avait contribué à le faire, devait-on raisonnablement l’espérer ?

2030. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite et fin.) »

Le traducteur avait tâché, comme il disait, d’accommoder son texte au génie et au goût de notre nation, sans trop s’éloigner du sujet, et de telle sorte que quelques endroits sentissent encore l’espagnol ; car, remarquait-il naïvement, « j’ai cru qu’une traduction doit toujours conserver quelque odeur de son original, et que c’est trop entreprendre que de s’écarter entièrement du caractère de son auteur. » Cette traduction de Filleau de Saint-Martin, qui est des meilleures dans le goût du xviie  siècle, et des plus belles comme on disait alors, fut aussi attribuée à M.  […] Gustave Doré n’a pu ni dû échapper à la science moderne plus ambitieuse, et son crayon en a contracté du caractère.

2031. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite et fin.) »

Tous les mérites en effet, tous les caractères distinctifs de ce beau talent, il les a reconnus, et on pourrait même lui emprunter des phrases pour les définir ; mais il ne se comporte pas avec lui comme avec les autres grands poètes qu’il a rencontrés jusque-là, il ne se complaît pas à le replacer dans son milieu ; il le déprime plutôt dans l’ensemble, il le réduit, et quand il est forcé de lui reconnaître une qualité, il ne la met pas dans son plus beau jour. […] Taine a signalé avec raison celle, entre autres, où il traite des caractères et de la maîtresse-passion des hommes.

2032. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Dumont de Genève, dans ses Souvenirs sur la Révolution, a parlé d’elle très pertinemment aussi, avec bien de la discrétion et une incontestable justesse ; il regrettait de l’avoir moins connue qu’il ne l’aurait pu, et il nous en dit la raison : « Mme Roland, à tous les agréments personnels, joignait tout le mérite du caractère et de l’esprit. […] En même temps qu’il la voit disciple de Rousseau et modelant en partie ses Mémoires sur les Confessions, il cherche à l’en distinguer par un caractère fondamental : il ne découvre dans ses écrits, dit-il, « ni la tragique sollicitude de Rousseau pour les âmes simples et ignorantes, ni la douloureuse anxiété avec laquelle celui-ci remue et sonde les bas-fonds de la société, ni sa haine contre l’inégalité, même quand ce n’est pas sur le talent qu’elle pèse, ni les cris vengeurs que lui arrache la vue du paysan opprimé par un publicain barbare ou celle de l’homme du peuple étouffant dans les étreintes de la misère.

2033. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Leckzinska (suite et fin.) »

La reine croit, et cela paraît certain, que Mme de Mailly l’examine sans cesse pour lui trouver de nouveaux ridicules et égayer le roi à ses dépens dès qu’elle l’a quittée : c’est une indignité. » Lors même que cela n’était pas (car Mme de Mailly n’avait point ce caractère de méchanceté), il suffisait que la reine se figurât qu’il en était ainsi pour qu’elle éprouvât un lent et continuel supplice. […] Le roi était tombé malade à Metz le 8, et son mal avait pris aussitôt le plus pernicieux caractère.

2034. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite.) »

. — La reine, en ces commencements du règne, prise à partie par son frère Joseph qui ne demandait qu’à la conseiller, et questionnée par lui sur les qualités et défauts de son époux, lui répondait (27 juin 1774) : « Vous voulez, pour m’en dire davantage, que j’entre dans des détails particuliers et confidentiels, et à cœur ouvert, sur le caractère du roi : c’est quelque chose de bien délicat à écrire. […] Le roi est pour moi d’une attention de mère… » C’est d’elle, c’est de cet enfant son premier-né, que quelques années après, Marie-Antoinette, dont on a déjà vu la justesse de coup d’œil en ce genre d’observations familières, écrivait (25 décembre 1784) : « Ma fille qui a six ans fait beaucoup de progrès ; elle a le caractère un peu difficile et d’une fierté excessive ; elle sent trop qu’elle a du sang de Marie-Thérèse et de Louis le Grand dans les veines ; il faut qu’elle s’en souvienne pour être digne de son sang, mais la douceur est une qualité aussi nécessaire et aussi puissante que la dignité, et une nature orgueilleuse éloigne les affections… » On sent dans ce peu de lignes le trait de nature et la ligne primitive qui fera de la plus vertueuse et de la plus respectable des princesses une personne moins aimable qu’on n’aurait voulu.

2035. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Exploration du Sahara. Les Touareg du Nord, par M. Henri Duveyrier. »

Duveyrier a joui de l’hospitalité parmi ces nobles tribus de montagnards nomades, et il nous a décrit (en ce qui est de ceux du Nord) leurs mœurs, leurs usages, leur caractère et tout ce qui les concerne, de façon à laisser peu à désirer. […] Les Touareg sont grands, maigres, secs, nerveux ; leurs muscles semblent des ressorts d’acier : « Un des caractères physiques auxquels un Targui peut se reconnaître entre mille est l’attitude de sa démarche grave, lente, saccadée, à grandes enjambées, la tête haute, attitude qui rappelle un peu celle de l’autruche ou du chameau en marche, mais qui est due principalement au port habituel de la lance. » Ils sont pauvres.

2036. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les fondateurs de l’astronomie moderne, par M. Joseph Bertrand de l’académie des sciences. »

De ce que Newton, contrôleur de la monnaie de Londres, a été d’avis qu’on devait pendre un faux monnayeur convaincu de ce crime par-devant le jury, et de ce qu’il n’ait pas donné à l’avance dans l’opinion de Beccaria contre la peine de mort, je ne vois pas ce qu’on en peut conclure par rapport à son génie ou même à son caractère, et il faut bien être de cette date philanthropique de 1865 pour voir là dedans autre chose qu’une opinion des plus ordinaires et des plus simples, des plus commandées à la date et dans la position de Newton. […] Je signalerai pourtant un reproche qui lui a été adressé par un écrivain d’une haute autorité morale : « Un caractère distinctif des Entretiens sur la Pluralité des Mondes, a dit M. 

2037. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre (suite et fin) »

À chaque pas, en toute occasion, ce trait essentiel du caractère de Louis XV se trahit et reparaît. […] et exigera-t-on absolument qu’il ait été un grand stratégiste et un grand caractère ?

2038. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

Cette tragédie, si je ne me trompe, est au cinquième acte : le dénouement va paraître. » Il ne se serait point ouvert à lui, comme à un confident, sur le misérable caractère de cette royale famille espagnole, de ce brave homme ou benêt de roi, du prince des Asturies, de la reine, de ce méprisable et inséparable prince de la Paix qui, disait-il, avait l’air d’un taureau : « Le prince des Asturies est très-bête, très-méchant, très-ennemi de la France… La reine a son cœur et son histoire sur sa physionomie, c’est vous en dire assez. » Il ne lui eût pas confié ces princes en personne et ne les lui eût pas donnés tout d’abord pour hôtes à Valençay pour « les bien traiter et leur faire passer agréablement le temps », tout en lui recommandant de les isoler et « de faire surveiller autour d’eux. » Notez bien que cette année 1808, celle de la fourberie de Bayonne, ne fut point du tout une année de disgrâce pour Talleyrand. […] Les plus vifs de caractère et d’humeur y arrivent à la longue tout comme les autres.

2039. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « JASMIN. » pp. 64-86

Reboul est un poëte français, de l’école des Méditations ; il écrit et chante en notre français classique avec pureté, harmonie ; son originalité consiste bien plutôt dans le contraste de ses écrits avec sa profession, que dans le caractère même de sa poésie. […] Le dernier et le plus remarquable poëme de Jasmin, l’Aveugle de Castel-Cuillé, offre, plus qu’aucun des précédents, le caractère de sensibilité et de pathétique au milieu des grâces conservées d’une muse légère.

2040. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « THÉOPHILE GAUTIER (Les Grotesques.) » pp. 119-143

Bazin, quoi qu’il en soit, a très-bien rapporté le caractère de la poésie de Théophile à la date politique qui y correspond. […] Ses premiers excès l’induisirent ainsi à de perpétuelles palinodies qui ôtent à l’ensemble de ses œuvres tout caractère.

2041. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXVIIIe entretien. Tacite (1re partie) » pp. 57-103

Il faut qu’il ait pratiqué lui-même les conseils, les assemblées, les négociations, les délibérations, les affaires publiques, afin d’avoir observé de ses propres yeux le jeu des passions, des intérêts, des ambitions, des intrigues, des caractères, des vertus ou des perversités qui s’agitent dans les cours, dans les camps, dans les comices, dans la place publique. […] « Souviens-toi que tu vas commander ici à des hommes aussi incapables de supporter une entière liberté qu’une entière servitude. » L’invention d’une telle éloquence dans l’historien ne suppose-t-elle pas dans Tacite toutes les qualités d’homme d’État, de philosophe, de politique consommé, de vieillard expérimenté des choses et des caractères, et enfin d’orateur d’État, qualités que l’historien prête au vieux Galba ?

2042. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IV. Des figures : métaphores, métonymies, périphrases »

Elles substituent au nom propre de l’objet le mot qui fait ressortir un attribut, une propriété, un caractère, sur lequel le mot propre n’appellerait pas suffisamment l’attention : ainsi lorsqu’Alfred de Musset représente les paysans de la Forêt-Noire qui viennent perdre leur argent à la roulette de Bade, il ne nomme pas l’argent, mais la sueur qu’il leur a coûtée, le pain qu’il leur donnerait : Je les ai vus, debout, sous la lampe enfumée, Avec leur veste rouge et leurs souliers boueux, Tournant leurs grands chapeaux entre leurs doigts calleux, Poser sous les râteaux la sueur d’une année, Et là, muets d’horreur devant la destinée, Suivre des yeux leur pain qui courait devant eux. […] Que vous servira d’avoir tant écrit dans ce livre, d’en avoir rempli toutes les pages de beaux caractères, puisque, enfin, une seule rature doit tout effacer : encore une rature laisserait-elle quelque trace, du moins d’elle-même ; au lieu que ce dernier moment, qui effacera d’un seul trait tout notre vie, s’ira perdre lui-même avec tout le reste dans ce grand gouffre du néant… Qu’est-ce donc que ma substance, ô grand Dieu ?

2043. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre III. La poésie : V. Hugo et le Parnasse »

Caractère de l’homme. […] Hugo apparaîtra aussi dans les trois recueils : on y verra comment les mots sonores se groupent en vers expressifs, avec quelle science la distribution des coupes dans le vers, l’ordonnance des strophes ou des parties dans la pièce règlent le mouvement, selon la nature du sentiment ou de la pensée, avec quelle justesse se fait presque toujours l’adaptation d’une certaine structure métrique au caractère du sujet.

2044. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « M. Émile Zola, l’Œuvre. »

Or la psychologie est tout uniment, pour les philosophes, l’étude expérimentale des facultés de l’esprit, et, pour le romancier, la description des sentiments que doit éprouver une créature humaine, étant donnés son caractère, son tempérament s’il y a lieu, et une situation particulière. […] Il est très juste de dire que « physiologie, psychologie, cela ne signifie rien », qu’on ne saurait les séparer absolument, et que celle-ci est le prolongement de celle-là (le caractère dépendant du tempérament et quelquefois du milieu, et tout sentiment ayant son point de départ dans une sensation).

2045. (1829) De la poésie de style pp. 324-338

C’est là, dit-on, un caractère commun à tous les écrits de Jean Paul. […] C’est ainsi qu’il a fort bien discerné le caractère ferme et arrêté que les écrivains du Dix-Septième Siècle avaient donné à notre langue, et montré qu’ainsi faite elle répugnait à la poésie du nord.

2046. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IV. Précieuses et pédantes »

Les trois douleurs intimes sont étudiées avec une apparence de conscience et les caractères ne sont pas maladroitement établis. […] Le « nouveau Christ » est pourtant d’un caractère assez inattendu.

2047. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Campagnes d’Égypte et de Syrie, mémoires dictés par Napoléon. (2 vol. in-8º avec Atlas. — 1847.) » pp. 179-198

Pascal, dans les immortelles pensées qu’on a trouvées chez lui à l’état de notes, et qu’il écrivait sous cette forme pour lui seul, rappelle souvent, par la brusquerie même, par cet accent despotique que Voltaire lui a reproché, le caractère des dictées et des lettres de Napoléon. […] Kléber avait dans le caractère on ne sait quoi de nonchalant qui le rendait facilement dupe des intrigants.

2048. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

Les conférences de l’abbé Lacordaire ont un caractère qui ne les rattache à rien de ce qui est réputé classique en ce genre, mais qui est singulièrement approprié à l’auditoire de ce temps-ci. […] L’Église, dit-il en parlant des temps de mélange et de confusion semblables aux nôtres, l’Église alors appelle à son secours une parole qu’il serait difficile de définir par des caractères constants, à cause de la variété des erreurs qu’elle doit combattre et des âmes qu’elle veut convaincre, mais qu’on peut appeler la prédication extérieure ou apostolique.

2049. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mémoires d’outre-tombe, par M. de Chateaubriand. Le Chateaubriand romanesque et amoureux. » pp. 143-162

Mais je reviendrai à fond sur ce prodigieux caractère de l’homme politique (si on peut appeler cela un homme politique), qui se révèle désormais à nu, et sans plus de masque, dans toute son humeur massacrante et sa verve exterminatrice : aujourd’hui je ne veux parler que du Chateaubriand romancier, romanesque et amoureux. […] Ici, il avait affaire à une personne aussi élevée par l’esprit que noble et facile par le caractère, belle et jeune encore, et n’en abusant pas ; qui le comprenait par ses hauts côtés, qui lui ôtait tout sentiment de lien, tout soupçon de tracasserie ; il était gai avec elle, aimable, maussade aussi parfois souriant le plus souvent, et s’émancipant comme un écolier échappé aux regards du maître : « J’ai peur que les temps de courte liberté, dont je jouis si rarement dans ma vie, ne viennent à m’échapper de nouveau. » Il écrivait cela en août 1832, en courant les grandes routes de Paris à Lucerne.

2050. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Charles Perrault. (Les Contes des fées, édition illustrée.) » pp. 255-274

Et sans plus de réponse, je me borne à citer l’aimable anecdote suivante qui nous montre au vrai le caractère sincère et ingénu de Perrault, et je laisse l’impression s’en faire d’elle-même sur le lecteur : Quand le jardin des Tuileries fut achevé de replanter, et mis dans l’état où vous le voyez : « Allons aux Tuileries, me dit M.  […] La brièveté et la simplicité du texte contribuait à laisser au livre son caractère monumental.

2051. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « De la poésie et des poètes en 1852. » pp. 380-400

Un poète que j’apprécie infiniment et dont l’élévation est aussi le caractère, M.  […] Leconte de Lisle, qui n’est encore apprécié que de quelques-uns, a un caractère des plus prononcés et des plus dignes entre les poètes de ce temps.

2052. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — II. (Suite et fin.) » pp. 436-455

Quand ses descriptions sont un peu moins travaillées, moins concertées, et qu’elles restent à l’état d’esquisses rapides, elles sont aussi plus vraies, et souvent dans une perfection ravissante : je recommande à ceux qui ont le temps de refeuilleter les Études la page de l’Étude septième, qui commence ainsi : « Il n’y a que la religion qui donne à nos passions un grand caractère… », et où l’on voit la jeune Cauchoise en pleurs au bord du rivage, regardant de loin les bateaux pêcheurs partis le matin par un gros temps, et sa station consolée au pied d’un calvaire. […] Un caractère commun les unit tous trois : avec Buffon et Jean-Jacques la langue française, malgré ses conquêtes et ses accroissements pittoresques, restait encore en Europe : avec ces trois autres, Bernardin, Chateaubriand et Lamartine, par le luxe et l’excès des couleurs, elle est décidément en Asie.

2053. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Saint François de Sales. Son portrait littéraire au tome Ier de l’Histoire de la littérature française à l’étranger par M. Sayous. 1853. » pp. 266-286

Sayous ; il lui trouve, à défaut d’une littérature nationale, un certain génie littéraire qui se marque volontiers dans les productions de tout enfant du pays : Ce génie chez les Savoyards, dit-il, a pour caractères essentiels la grâce et l’enjouement, une sensibilité qui n’a rien de triste, et une bonhomie qui n’est pas exempte de malice. […] Dégageons donc les gentillesses et les fleurs pour arriver jusqu’à cette âme si doucement ardente et forte, et à ce caractère si ferme, bien que revêtu de suavité.

2054. (1897) Préface sur le vers libre (Premiers poèmes) pp. 3-38

Nous ne saurions pas davantage attribuer à cette rythmique le caractère pesant et illogique de la règle classique. […] Le vers libre, à son sens, serait la technique désignée pour l’autobiographie du soi, la fixation d’états d’âmes, pour l’arabesque personnelle que le poète doit tracer autour de son caractère propre.

2055. (1889) Émile Augier (dossier nécrologique du Gaulois) pp. 1-2

Son caractère était égal à son talent, dont il avait l’énergique droiture et la haute honnêteté ! […] C’était un grand cœur et un réel caractère.

2056. (1892) L’anarchie littéraire pp. 5-32

Même la lutte avait pris un degré de violence tel et un caractère si nettement déterminé, qu’on désignait sous le nom de décadents tous ceux qui s’attaquaient à la littérature pompière et prudhommesque où s’illustraient MM.  […] Les Symbolistes Les Symbolistes, en général, ont un caractère absolument opposé.

2057. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Baudelaire  »

Le caractère de la poésie des Fleurs du mal, à l’exception de quelques rares morceaux que le désespoir a fini par glacer, c’est le trouble, c’est la furie, c’est le regard convulsé, et non pas le regard sombrement clair et limpide du Visionnaire de Florence. […] Comme l’impayable amateur de prunes, dans les Caractères de La Bruyère, il ouvre cette prune malade et empoisonnée, la partage, la flaire, et dit : « Quelle chair !

2058. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre II : M. Royer-Collard »

Certainement, si quelqu’un était enclin à sortir de l’ancienne route, c’était lui ; car personne n’était plus opposé, de caractère et d’éducation, aux maximes et à l’esprit du dix-huitième siècle. […] Il avait par excellence le caractère impérieux et noble.

2059. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre III : M. Maine de Biran »

Osez dire que vous entendez celle-ci : « Chacun peut observer en lui-même que les perceptions directes des sens externes, comme les images ou intuitions du sens interne, et les idées mêmes, produits élaborés de l’intelligence, venant à être réfléchis ou contemplés successivement par le moisous des modifications sensitives diverses, ou avec un sentiment variable de l’existence, triste ou pénible, agréable ou facile, se proportionnent jusqu’à un certain point à ces variations, quant aux degrés de clarté ou d’obscurité, de mobilité ou de persistance, de confiance ou de doute, qui impriment à ces idées un caractère particulier et comme une physionomie propre15. » Voilà un fait bien désigné, n’est-ce pas ? […] « Chacun peut observer en lui-même que les perceptions directes des sens externes, comme les images ou intuitions du sens interne, et les idées mêmes, produits élaborés de l’intelligence, venant à être réfléchies ou contemplées successivement par le moi sous des modifications sensitives diverses, ou avec un sentiment variable de l’existence, triste ou pénible, agréable ou facile, etc., se proportionnent jusqu’à un certain point à ces variations, quant aux degrés de clarté ou d’obscurité, de mobilité ou de persistance, de confiance ou de doute, qui impriment à ces idées un caractère particulier et comme une physionomie propre. » Cette période effaroucherait Hegel ou Duns Scot lui-même.

2060. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Note »

Je dirai de plus que le caractère de mes relations avec M. de Chateaubriand a été tout à fait méconnu et défiguré à plaisir par des critiques, venus depuis et qui ne se sont pas rendu compte des vrais rapports naturels entre une ardente jeunesse qui s’élève et une gloire déclinante qui vieillit. — Je ne désirai jamais être présenté à M. de Chateaubriand : ce fut M.

2061. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Laurent (de l’Ardèche) : Réputation de l’histoire de France de l’abbé de Montgaillard  »

Sans méconnaître le côté sinistre et livide de ce caractère jaloux, sans contester non plus la médiocrité littéraire du rhéteur, l’historien croit découvrir sous son jargon sentimental une logique puissamment systématique, et l’intelligence des plus hautes vérités, des principes les plus fondamentaux qui doivent présider à toute renaissance sociale.

2062. (1874) Premiers lundis. Tome II « H. de Balzac. Études de mœurs au xixe  siècle. — La Femme supérieure, La Maison Nucingen, La Torpille. »

On rencontre un personnage, un caractère dans une situation ; il suffit, s’il n’est pas le personnage essentiel, qu’il soit bien saisi : il aide à l’effet, et on ne se soucie pas de le suivre ensuite à perpétuité dans ses recoins.

2063. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Le Comte Walewski. L’École du Monde »

La comédie de L’École du Monde est assez agréable à la lecture ; elle n’a rien qui choque ; on ne laisse pas de s’intéresser à Émilie ; les autres caractères y sont assez bien esquissés ; on n’y manque pas aux usages ; il y a dans le dialogue de la correction, une certaine élégance, quelques traits spirituels.

2064. (1875) Premiers lundis. Tome III «  La Diana  »

En ces tristes journées on est tenté de se demander vraiment si l’on est une nation forte, sérieuse, ayant le caractère fait.

2065. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VI. De l’envie et de la vengeance. »

Quand on est criminel de sang-froid, comme on calcule toujours, tels périls, tels obstacles de plus peuvent arrêter ; mais les hommes passionnés, qui se précipitent dans les révolutions, sont irrités par la crainte même si l’on parvient à la leur faire éprouver ; la peur excite les caractères impétueux au lieu de les contenir.

2066. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Avertissement »

Voilà le caractère de ce livre, et voilà son utilité — si on le lit comme je veux qu’on le lise, et si je l’ai fait tel que j’ai voulu le faire.

2067. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Et Lamartine ? »

Mais, tandis qu’elles me félicitaient tout bas, j’étais accusé tout haut d’injustice et d’irrévérence, et j’ai vu que plusieurs de mes confrères persistaient à revendiquer pour Victor Hugo « l’immortalité hors classe », une immortalité d’un caractère officiel, sanctionnée par les pouvoirs publics.

2068. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Retté, Adolphe (1863-1930) »

Adolphe Retté est un homme généreux et primesautier en même temps qu’un des meilleurs poètes de sa génération ; son beau livre, miroir de son caractère, est primesautier et généreux.

2069. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Silvestre, Armand (1837-1901) »

Sainte Thérèse donne à l’amour de Dieu les caractères d’un amour physique, et M. 

2070. (1863) Molière et la comédie italienne « Préface » pp. -

C’est encore Molière qui, dans un intermède du Malade imaginaire, lui a donné le plus grand rôle ; mais il n’est là qu’un prête-nom ; il ne fait que remplacer le Pédant, comme on le verra dans la suite de ce livre, et n’a point son caractère original.

2071. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VIII. Les Fedeli » pp. 129-144

  Un acteur qui eut un grand succès dans les rôles naïfs, sous le nom de Bertolino, et qui jouit de la faveur particulière de Victor-Amédée Ier, duc de Savoie, il signor Nicolo Zeccha, fit partie de la troupe des Fedeli ; il paraît y avoir remplacé le Pedrolino de la troupe des Gelosi, avec une nuance un peu différente du caractère.

2072. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre VII. L’Histoire de la Physique mathématique. »

On a été conduit ainsi à les regarder comme des vérités expérimentales ; la conception des forces centrales devenait alors un soutien inutile, ou plutôt une gêne, puisqu’elle faisait participer les principes de son caractère hypothétique.

2073. (1887) Discours et conférences « Discours à l’Association des étudiants »

Nous devons à la patrie d’être à sa disposition pour la servir ; mais nous ne sommes pas obligés de sortir de notre caractère pour obtenir ses mandats.

2074. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXX » pp. 330-337

Cet événement fut au nombre de ceux qui concoururent, dans la période de 1670 à 1680, à opérer de grands changements dans la situation, dans l’esprit et le caractère du roi, et a confirmer l’ascendant qu’avaient pris sur les mœurs de la cour les exemples des personnes en qui s’étaient conservées les traditions morales de l’hôtel de Rambouillet.

2075. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — L’Empereur Néron, et les trois plus grands poëtes de son siècle, Lucain, Perse & Juvénal. » pp. 69-78

Cette multitude de gens parvenus excita la bile de Juvénal ; il se sentit emporté par les fougues de son caractère.

2076. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Ronsard, et Saint-Gelais. » pp. 120-129

Mellin de Saint-Gelais étoit en possession de charmer par le caractère des siennes.

2077. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Voiture, et Benserade. » pp. 197-207

Cet ami ne balança point, & lui envoya pour réponse un rondeau qui finit par ces vers : De ces rondeaux un livre tout nouveau A bien des gens n’a pas eu l’art de plaire : Mais, quant à moi, j’en trouve tout fort beau, Papier, dorure, images, caractère, Hormis les vers qu’il falloit laisser faire A la Fontaine.

2078. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre V. La Henriade »

On convient que les caractères dans la Henriade ne sont que des portraits, et l’on a peut-être trop vanté cet art de peindre dont Rome en décadence a donné les premiers modèles.

2079. (1818) Essai sur les institutions sociales « Préface » pp. 5-12

Nodier disait « Pour juger une grande époque de destruction et de renouvellement, comme celle où nous vivons, il faudrait pouvoir se séparer tout à fait du passé et de l’avenir, ne conserver de l’un que des souvenirs sans passion, ne fonder sur l’autre que des espérances sans regrets… On sent partout, dans ce livre, l’inspiration qui a produit Antigone ; et je ne sais par quel mystère qui étonne et qui effraie, il rappelle le langage des fondateurs de la civilisation, comme si la nôtre était déjà détruite : il résulte de ce mélange d’éléments quelque chose qui accable la pensée, mais qui a un caractère monumental très instructif pour le siècle, si les livres remarquables sont les témoins de l’état de la société.

2080. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Léon Feugère ; Ambroise-Firmin Didot »

Didot, obligé par le nom qu’il porte, — comme l’était la noblesse autrefois, — a condensé en ce volume, d’un caractère fin, mais étincelant de netteté et de précision, une science profonde et un détail immense.

2081. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Les dîners littéraires »

Il s’est dit qu’aucune dissidence d’opinion, aucune répugnance, aucune animosité, aucune hauteur de caractère ne tiendrait contre le charme d’un dîner galvanisateur, et il a eu raison.

2082. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le voltairianisme contemporain »

On a beaucoup parlé, sur ce vieux thème que n’ont pas chanté les phraseurs, de l’activité imprimée par la philosophie à l’esprit humain ; mais le caractère particulier de l’action et de l’influence de Voltaire, c’est précisément d’avoir, avec de la légèreté et de l’ironie, dispensé à tout jamais l’esprit humain d’activité et de recherche.

2083. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Auguste Nicolas »

Encore une fois, c’est là le caractère du talent et du livre de Nicolas : une grande bonté et une grande lumière, un attendrissement éloquent avec une larme qui perle dans chaque mot et qui fait étinceler son style des lueurs les plus douces.

2084. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « ??? » pp. 175-182

d’un monde où des caractères si élevés, si purs, si grandioses, ont chance de se heurter et finalement de se briser.

2085. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre II. Quelques traditions sur Pindare. »

On peut y voir seulement la preuve du caractère merveilleux dont l’imagination des Grecs aimait toujours à entourer le nom du grand poëte qui les avait charmés.

2086. (1894) La bataille littéraire. Septième série (1893) pp. -307

Ici le roman prend, de par le caractère très net de l’héroïne, son importance capitale. […] Le père lui donne sa part d’amour comme aux autres, et plus le caractère du mari trompé s’élève, plus la femme se sent abaissée, car elle doit rougir de ce qui fait l’orgueil de toutes, de sa maternité. […] Nisard le difficile qui trouve au bas de sa figure un caractère d’animalité très développé, nous devons à la vérité de dire qu’il n’a pas les joues convenablement creuses, et qu’il a l’air de se porter beaucoup trop bien. […] Une grâce aisée, une modestie naturelle cachait le sérieux de son esprit ; une tendresse presque féminine servait de voile à la fermeté de son caractère. […] Il est certain qu’elles eurent pour les Apôtres le caractère d’une réalité suprême.

2087. (1883) La Réforme intellectuelle et morale de la France

Pourquoi le Languedoc est-il réuni à la France du nord, union que ni la langue, ni la race, ni l’histoire, ni le caractère des populations n’appelaient ? […] Cette catastrophe, en effet, ne sortit pas d’une nécessité générale de situation ; elle vint d’un trait particulier du caractère de l’empereur Napoléon III. […] On ne change pas le caractère d’une nation. […] Vu certaines particularités du caractère français, il serait bon d’interdire la publicité des séances, laquelle fait trop souvent dégénérer les débats en parade. […] Elle traversa quarante ans de silence, qui servirent merveilleusement à tremper le caractère de la nation.

2088. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

Il en juge arbitrairement, selon son goût et son caractère, à son idée, en artiste enfin ! […] Taine y est suspecté dans ses intentions, attaqué dans son caractère, soupçonné dans sa probité d’écrivain. […] Il est dans le caractère des religieux de mépriser l’histoire et d’aimer la légende. […] Renan, elle est un trait de caractère. […] Jean Béraud, a un caractère plus moderne encore.

2089. (1891) Enquête sur l’évolution littéraire

S’il possède les dons qui constituent tout grand caractère, il n’a nul besoin de se livrer à tant d’acrobaties pour que ce qu’il signe soit distingué. […] Le minimum d’un mage est fait de trois choses : génie, caractère, indépendance. […] Poubelle, exigeant le caractère le plus élevé, légendaire pour un concours musical, mais interdisant le caractère religieux. […] Dans son dernier roman, Un Caractère, il étudie les phénomènes les plus compliqués de l’hypnotisme. […] Je reconnais son talent qui est délicat et subtil, mais j’estime peu son caractère.

2090. (1915) Les idées et les hommes. Deuxième série pp. -341

La rapidité furieuse avec laquelle nous vivons ne laisse pas aux caractères le loisir de se marquer. […] Peut-être le temps est-il venu où le service de la littérature prend un caractère héroïque. […] Ils vont même attribuer à leur mauvaise conduite un caractère sacré. […] Quel retournement de son caractère ! […] C’est qu’elle a bon caractère.

2091. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Gabriel Naudé »

Naudé, lui, n’avait aucun de ces caractères qui étaient propres au siècle nouveau ; il ne se souciait en rien de l’expression littéraire, il ne s’en doutait même pas ; et pour ce qui est d’innover et de renchérir en fait de système, s’il avait jamais pensé à le faire, c’eût été dans les lignes mêmes et comme dans la poussée du xvie  siècle, en reprenant quelque grande conception de l’antiquité et en greffant la hardiesse sur l’érudition. […] Naudé n’en eut qu’une, mais il l’eut toute sa vie, et avec les caractères de constance, d’enthousiasme et de dévouement qui conviennent aux généreuses entreprises. […] Achetez et lisez les livres faits par les vieillards, qui ont su y mettre l’originalité de leur caractère et de leur âge. […] Le caractère de Saint-Ange, c’est le gros bon sens, près de Mascurat qui représente l’érudit rusé : « Tu m’emportes, lui dit à certain moment Saint-Ange, comme l’aigle fait la tortue, hors de mon élément ; revenons… » Et plus loin, lorsque Mascurat lui énumère complaisamment les grands génies de première classe, les douze preux de pédanterie  : Archimède, Aristote, Euclide, Scot (Duns), Calculator, etc.

2092. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Le Chevalier de Méré ou De l’honnête homme au dix-septième siècle. »

Malgré ces défauts ou à cause de ces défauts mêmes, le chevalier de Méré est un type ; et si aujourd’hui on veut étudier un des caractères les plus en honneur au xviie siècle, on ne saurait mieux s’adresser ni surtout plus commodément qu’à lui. […] Les Lettres du chevalier parurent en 1682, quand le grand siècle n’attendait plus, pour nouveauté dernière qui l’excitât, que les Caractères de La Bruyère. […] Il n’y était pas encore, quand il parlait de Pétrone et de César, et quoiqu’il y ait dans le ton dont il disserte de ces fameux Romains un faux air de Clélie, il s’y trouve une connaissance incontestable du fond des choses et du caractère des personnages. […] La dernière lettre que j’ai à produire, et qui est restée jusqu’ici enfouie dans le recueil qu’on ne lit pas, est d’un tout autre caractère que la précédente, et d’un intérêt moral tout particulier ; elle nous rend la conversation d’un des hommes qui causaient le mieux, avec le plus de douceur et d’insinuation, de ce La Rochefoucauld qui n’avait de chagrin que ses Maximes, mais qui, dans le commerce de la vie, savait si bien recouvrir son secret d’une enveloppe flatteuse.

2093. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre I. Principe des mœurs sous l’Ancien Régime. »

Aspect physique et caractère moral de Versailles. […] En 1780, il abat 20 534 pièces ; en 1781, 20 291 ; en quatorze ans, 189 251 pièces, outre 1 254 cerfs ; les sangliers, les chevreuils, sont en proportion ; et notez que tout cela est sous sa main, puisque ses parcs confinent à ses maisons  Tel est en effet le caractère d’une « maison montée », c’est-à-dire munie de ses dépendances et de ses services ; tout y est à portée : c’est un monde complet qui se suffit à lui-même. […] Mais le caractère mondain a recouvert l’ancien fond militaire ; à la fin du dix-huitième siècle, leur grand talent est le savoir-vivre, et leur véritable emploi consiste à recevoir ou à être reçus. […] XVII. — E. et J. de Goncourt, la Femme au dix-huitième siècle, 52. — Chamfort, Caractères et anecdotes .

2094. (1858) Cours familier de littérature. V « XXIXe entretien. La musique de Mozart » pp. 281-360

Cette fiction charmante, qui touche au caractère moral de la musique et à la constitution physique de l’échelle sonore, contient des vérités fondamentales qui ont été confirmées depuis par des expériences plus rigoureuses et entrevues dans l’antiquité par Pythagore. […] C’était le caractère de cette piété tendre du père, de la mère et des enfants, dans la maison de Mozart, à Salzbourg. […] On remarque aussi dans ces lettres un caractère tout spécial aux musiciens ; caractère qui nous a souvent frappé nous-même dans les grands compositeurs que nous avons connus : c’est la gaieté, le badinage, l’enjouement ; en d’autres termes, la verve.

2095. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (2e partie) » pp. 409-488

C’est en effet le céleste caractère de cette pièce. […] Les noms de ces premiers patrons, et aussi celui de Varus, décorent les essais bucoliques du poète, leur impriment un caractère romain, avertissent de temps en temps qu’il convient que les forêts soient dignes d’un consul, et nous apprennent enfin à quelles épreuves pénibles fut soumise la jeunesse de celui qui eut tant de fois besoin d’être protégé. […] « “En tout, le paysage du domaine de Virgile était doux, d’une douceur un peu pâle et stagnante, de peu de caractère, peu propre à exciter de sublimes émotions ou à suggérer de vives images ; mais le poète avait vécu de bonne heure au milieu des grandes scènes du Vésuve ; et, même alors, s’il étendait ses courses un peu au-delà des limites de son domaine, il pouvait visiter, d’un côté, le cours grandiose du rapide et majestueux Éridan, ce roi des fleuves, et, de l’autre côté, la Bénaque, qui présente par moments l’image de l’Océan agité. […] Nos défauts moraux ou physiques influent beaucoup sur notre humeur, et sont souvent la cause du tour particulier que prend notre caractère.

2096. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

Si je ne cite aucun des écrits plus récents qui ont pu paraître sur Swift, c’est que je n’ai trouvé dans ceux que j’ai pu lire que la collection habituelle de ces anecdotes, que d’innombrables notices sur Swift ont déjà répandues dans le public, et parmi lesquelles j’avais déjà choisi le petit nombre de celles qui me semblent nécessaires pour la parfaite intelligence du caractère de ce grand écrivain ; et celles-là, Craufurd, Walter-Scott, et les œuvres mêmes de Swift me les avaient fournies. […] Je ne fais donc nulle difficulté de dire que je dois aux biographes de Swift ou à son propre témoignage les événements de sa vie, mais je sais que je ne dois qu’à moi-même l’étude de son caractère, l’appréciation de ses œuvres et les sentiments qu’elles m’ont inspirés. […] Bien qu’on ait longtemps montré à Dublin la maison où naquit Swift, bien qu’il ait passé la plus grande partie de sa vie en Irlande et y soit devenu populaire, Swift n’avait rien d’Irlandais, ni dans le sang, ni dans le caractère. […] L’ensemble des œuvres religieuses de Swift, écrites aux époques les plus diverses de sa vie, confirme notre opinion sur le caractère exclusivement politique de son intervention constante en faveur de l’Église établie.

2097. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 avril 1885. »

Wagner est ainsi amené à poser mieux encore les caractères de l’esprit allemand. […] Il croit que Wagner attendait plus d’une France ennemie de l’Allemagne que d’une Allemagne dont le génie germanique est affaibli. — Il découvre le second motif dans le trait essentiel du caractère allemand, lequel est le penchant prononcé pour la critiqué, tandis que l’amour de l’action est plus marqué dans les races latines. « En règle générale, c’est l’Allemagne qui pense, et la France qui réalise la pensée allemande. » — Enfin, M. de Letamendiau a la conviction que chaque race humaine produit des grands hommes de deux catégories opposées : les uns sont la quintessence de leur race, les autres en sont la contradiction absolue. […] Ne retenant que le seul caractère extérieur de la musique de Wagner, le qualificatif de « wagnériste » est utilisé par le public pour qualifier les compositeurs d’œuvres audacieuses et bruyantes. […] L’ensemble de la création wagnérienne semble être tendue vers le caractère sublime et religieux de l’art dont la réalisation suprême est Parsifal.

2098. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juin 1886. »

Il faut s’inquiéter si vous conservez au style son caractère ; si vous le négligez, guère n’importe que, cherchant ou omettant une forme versifiée, vous vous donniez plu » ou moins de facilités à traduire ; le plus ou moins de succès dans le travail achevé est seul à voir. […] Durant cet intermède qui ne présente aux sens que des formes attrayantes et qui néanmoins soulève toute notre répulsion, donnant ainsi au sabbat où les mortels fraient avec les démones, un caractère bien plus poétiquement vrai que les laides, burlesques, écœurantes peintures qui en ont été faites avec un égal mauvais goût, dans les arts les plus divers, l’Allégro de l’ouverture est exécuté derrière la scène comme s’il sortait des entrailles de la montagne. […] Elle y a exercé un caractère spécial ; qui s’est imprimé aux premiers contes même qu’elle nous a laissés. […] Toutes innovations nécessaires et légitimes, mais qui ne font pas excusable le caractère incomplet de cette vie : le personnage est, non expliqué, décrit ; nous savons, ce qu’il sent, mats non par quels motifs il le sent.

2099. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1890 » pp. 115-193

Un dessin d’un grand caractère est l’interprétation de la parole : « Vous suivrez un homme qui porte une Cruche », — un homme à la robe jaune, gravissant au jour tombant, la montée qui contourne le rempart, et qu’en bas du dessin, un apôtre désigne à un autre. […] On se serait cru dans une gare de chemin de fer, où un roulement des trains, éteignait toutes les cinq minutes, la célébration du talent, du caractère, de la bonté de mon ami, par Larroumet, Hamel, Spuller. […] Mercredi 17 septembre Lavoix, revenant de Savoie, nous apprend que les Charmettes avaient été achetées par les cochers de Chambéry et d’Aix, craignant que la propriété ne tombât aux mains d’un propriétaire peu respectueux, qui y apportât des changements, lui enlevât son caractère historique, tandis qu’eux la laissent inhabitée, et telle qu’elle pouvait être au temps des amours de Jean-Jacques. […] Je suis frappé, ce matin, de la mauvaise mine de Maupassant, du décharnement de sa figure, de son teint briqueté, du caractère marqué, ainsi qu’on dit au théâtre, qu’a pris sa personne, et même de la fixité maladive de son regard.

2100. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Bossuet et la France moderne »

Touchés de tant de merveilles, épanchons nos cœurs sur la piété de Louis ; poussons jusqu’au ciel nos acclamations, et disons à ce nouveau Constantin, à ce nouveau Théodose, à ce nouveau Marcien, à ce nouveau Charlemagne, ce que les six cent trente Pères dirent autrefois dans le concile de Chalcédoine ; « Vous avez affermi la foi, vous avez exterminé les hérétiques : c’est le digne ouvrage de votre règne, c’en est le propre caractère. […] Écoutez plutôt : « L’autorité royale est absolue… Les princes sont des espèces de dieux, suivant le langage de l’Écriture, et participent eu quelque façon à l’indépendance divine… Au caractère royal est inhérente une sainteté qui ne peut être effacée par aucun crime, même chez les princes infidèles… » Bossuet en déifiant le prince, quelqu’il soit et de quelque manière qu’il ait été établi, en le marquant d’un caractère de sainteté qu’aucun forfait ne peut effacer, n’est plus qu’un adorateur du fait brutal, de la force pure, et il rétrograde ainsi par-delà le moyen âge et jusqu’aux Césars byzantins… »‌ Je ferai la même observation que pour l’alinéa précédent. […] Le double caractère de fourberie et de violence des « conseillers secrets » apparaît bien dans cette duplicité des moyens de conversion.‌

2101. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De l’état de la France sous Louis XV (1757-1758). » pp. 23-43

Ce qui manque évidemment à Bernis dans toute cette carrière purement politique, c’est le caractère et la trempe d’un homme d’État supérieur ; n’en ayant ni le fond ni l’apparence, il ne sut point conquérir sur ses alentours cet ascendant qui ne s’accorde jamais à ceux à qui on peut le refuser. […] Jamais la décadence de la monarchie de Louis XV n’a été démasquée plus à nu : on sent, au caractère du mal, qu’on est très proche de la dissolution des choses.

2102. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — I. » pp. 413-433

J’essaierai ici, après m’être éclairé et environné des plus sûrs témoignages91, de bien marquer ce caractère et de l’homme de lettres et de l’homme public en M.  […] Daru, par son activité d’esprit, par cette fermeté de bon sens et de caractère qu’il eut dès sa jeunesse, était l’âme de la petite société et la dirigeait ; il en était le président, le trésorier.

2103. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — II » pp. 316-336

M. de Rohan a plus de prudence ; prudence et opiniâtreté, ce sont deux traits distinctifs de son caractère. […] Richelieu tout le premier montra qu’au fond il jugeait mieux de Rohan lorsqu’il lui confia ensuite le corps d’armée destiné à entrer dans la Valteline, et que, dans une lettre de lui adressée à ce général victorieux, il lui dit « qu’il sera toujours très volontiers sa caution envers le roi que lui, Rohan, saura conserver les avantages acquis et ne perdra aucune occasion de les augmenter. » Mais, en ce moment de la guerre civile, ce sont deux génies, deux âmes rivales et antagonistes qui sont aux prises, et tous les défauts, toutes les complications et enchevêtrements de la conduite et du rôle de Rohan lui apparaissent : il les impute à son caractère, et il les exprime avec excès, avec injustice sans nul doute, mais avec discernement du point faible et en des termes qui ne s’oublient pas.

2104. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric-le-Grand Correspondance avec le prince Henri — II » pp. 375-394

Mais la campagne de 1778 qui s’ouvrit à l’occasion de la succession de la Bavière remit le prince Henri en désaccord avec le roi, et se retrouvant sur le même terrain, celui de la politique à main armée et de la guerre, les différences de caractère et de vues qui avaient déjà paru entre eux précédemment se prononcèrent encore. […] À cette demande d’un chapitre additionnel à l’usage des rois qui n’ont pas assez de caractère pour l’être, Frédéric répondit : L’article que vous désirez, que je devrais ajouter à ma petite brochure, j’en ai commis le soin à Prométhée ; il est le seul qui puisse le fournir : mes facultés ne s’étendent pas aussi loin.

2105. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — IV » pp. 103-122

Il était temps que cette méthode rétrograde, injurieuse au caractère national et abaissante pour la France, eût un terme. […] Il n’était pas non plus un caractère.

2106. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie de Maupertuis, par La Beaumelle. Ouvrage posthume » pp. 86-106

Un peu plus de scepticisme ne fera pas mal, surtout de ce côté-ci du Rhin. » Partout il lui prête des maximes, des bouts de tirade et des sorties, des explications de sa conduite : « Ce qu’il y a de singulier, lui fait-il dire (p. 272), c’est que mon penchant à l’indécision n’influe ni sur ma conduite soit militaire, soit politique, ni sur mon caractère. […] Et ce piège, voyez combien vous étiez imprudent et coupable de le tendre : vous y avez fait tomber tout le premier un homme de votre sang et de votre nom, l’historiographe estimable, qui, en publiant votre ouvrage posthume et ce que vous y aviez préparé de pièces à l’appui, a cru vous rendre service, venger votre mémoire, réhabiliter votre caractère ; et il n’aura aidé, bien involontairement et de la meilleure foi du monde, qu’à confirmer en définitive l’opinion sévère qu’on avait conçue de vous, et à prouver à tous que vous étiez incurable dans votre procédé d’homme d’esprit foncièrement léger et sans scrupule.

2107. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Merlin de Thionville et la Chartreuse du Val-Saint-Pierre. »

C’est un des caractères de Merlin, on l’a remarqué, de n’avoir jamais cédé qu’au mouvement de sa propre passion, de s’être arrêté là où elle s’arrêtait, sans jamais servir d’instrument à celle des autres. […] Il était en train d’y réussir, d’y acquérir l’estime dans sa province, et il s’appliquait fort à une profession qu’il jugeait définitive, quand la Révolution éclata et le jeta brusquement dans une sphère d’orages, où il eut besoin de toute son énergie et de tout son caractère.

2108. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. De Pontmartin. Causeries littéraires, causeries du samedi, les semaines littéraires, etc. »

Cette jeune enfant de dix à onze ains, amenée un matin au pensionnat par une mère belle, superbe, au front de génie et à la démarche orageuse ; le peu d’empressement de la maîtresse de pension à la recevoir, la froide réserve de celle-ci envers la mère, son changement de ton et de sentiment quand elle a jeté les yeux sur le front candide de la jeune enfant, les conditions qu’elle impose ; puis les premières années de pension de la jeune fille, ses tendres amitiés avec ses compagnes, toujours commencées vivement, mais bientôt refroidies et abandonnées sans qu’il y ait de sa faute et sans qu’elle se rende compte du mystère ; l’amitié plus durable avec une seule plus âgée qu’elle et qui a dans le caractère et dans l’esprit plus d’indépendance que les autres ; tout cela est bien touché, pas trop appuyé, d’une grande finesse d’analyse. […] Ma conclusion bien sincère sur l’ensemble du talent de M. de Pontmartin, et malgré toutes ces critiques auxquelles je me suis vu forcé, ayant à combattre avec lui pied à pied et me trouvant réduit à la défensive, est qu’il y a de la distinction, de l’élégance, que c’est un homme d’esprit et d’un esprit délicat, auquel il n’a manqué qu’une meilleure école, et plus de fermeté dans le jugement et dans le caractère, pour sortir de la morale de convention et pour atteindre à la vraie mesure humaine, sans laquelle il n’est pas de grand goût, de goût véritable.

2109. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. (suite et fin). »

Il établit, dès le début, la meilleure police ecclésiastique dans la capitale, visitant les séminaires, les paroisses, tantôt l’une, tantôt l’autre, à l’improviste, s’inquiétant que les prêtres étrangers ou les religieux en passage à Paris n’y vécussent que convenablement à leur caractère ; sévère et sans quartier pour les moines errants. […] Un homme qui connaissait bien les hommes, le cardinal de Forbin-Janson, avait tiré son horoscope : « M. de Noailles, avait-il dit, sera un jour chef de parti, mais ce sera sans le vouloir ni le savoir. » Encore une fois, au point de vue politique et ecclésiastique extérieur, et comme archevêque dirigeant tout un Ordre auguste et vénérable, M. de Harlay n’avait qu’un défaut, celui qui fit tort au sage roi Salomon ; et La Bruyère, ce grand et excellent juge, l’a dit avec bien de la modération et de la finesse ; car c’est très probablement à l’archevêque de Paris qu’il pensait lorsqu’il a tracé ce Caractère : « Il coûte moins à certains hommes de s’enrichir de mille vertus que de se corriger d’un seul défaut ; ils sont même si malheureux que ce vice est souvent celui qui convenait le moins à leur état et qui pouvait leur donner dans le monde plus de ridicule : il affaiblit l’éclat de leurs grandes qualités, empêche qu’ils ne soient des hommes parfaits et que leur réputation ne soit entière.

2110. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

Ce caractère est le plus souvent délicat à saisir et à déterminer. […] Le peuple est triste, sans aucune imagination, sans esprit même, avide d’argent, ce qui est le caractère dominant des Anglais… » Ainsi parlait du pays, dont son défunt mari avait prétendu être le roi légitime, cette femme de trente-neuf ans, mûre désormais, une vraie femme du XVIIIe siècle, et des meilleures, sensible et sensée.

2111. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Lettres inédites de Michel de Montaigne, et de quelques autres personnages du XVIe siècle »

C’est bien tel et sous ces traits tout conformes à son caractère que nous allons le retrouver et le reconnaître dans la charge nouvelle qui lui était déférée. […] Des lettres de Du Plessis-Mornay à Montaigne, d’une date antérieure à 1585, mais écrites dans le même temps de cette mairie de Bordeaux, nous montrent combien, du côté du roi de Navarre, on se fiait en lui à titre de caractère modéré et conciliant, et nous prouvent qu’on aimait en toute circonstance à le prendre pour témoin et garant des intentions, comme quelqu’un qui, « en sa tranquillité d’esprit, n’était ni remuant ni remue pour peu de chose. ».

2112. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite et fin.) »

Bayle, dans sa Réponse aux questions d’un Provincial (1703), a tout un chapitre là-dessus ; son doute n’existait qu’avant d’avoir lu les lettres ; dès qu’il les a vues, il n’hésite pas à exprimer son sentiment ; les faussaires n’ont pas de ces accents-là : « J’y trouvai, dit-il, tant de caractères d’ingénuité et la nature si parlante, qu’il me sembla qu’un imposteur n’aurait jamais pu déguiser si heureusement son artifice. […] Il est plus qu’un homme, qu’un simple individu, c’est un caractère et un type.

2113. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de La Mennais »

D’un autre côté, un désir constant, qui semble résister à tous les obstacles et triompher des répugnances naturelles les plus vives, n’offre-t-il pas un caractère de vocation digne au moins d’être examiné ? […] Dans la singulière courbe excentrique décrite par La Mennais tout est d’accord aujourd’hui, tout se rapporte (pour le caractère du moins), tout s’explique.

2114. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — M. de Sénancour, en 1832 »

Si l’on cherche la raison de cet oubli bizarre, de cette inadvertance ironique de la renommée, on la trouvera en partie dans le caractère des débuts de M. de Sénancour, dans cette pensée trop continue à celle du xviiie siècle, quand tout poussait à une brusque réaction, dans ce style trop franc, trop réel, d’un pittoresque simple et prématuré, à une époque encore académique de descriptions et de périphrases ; de sorte que, pour le fond comme pour la forme, la mode et lui ne se rencontrèrent jamais ; — on la trouvera dans la censure impériale qui étouffa dès lors sa parole indépendante et suspecte d’idéologie, dans l’absence d’un public jeune, viril, enthousiaste ; ce public était occupé sur les champs de bataille, et, en fait de jeunesse, il n’y avait que les valétudinaires réformés, ou les fils de famille à quatre remplaçants, qui vécussent de régime littéraire. […] Dans les autres écrits de M. de Sénancour, soit ceux qui précèdent, soit ceux que j’omets (le livre essentiel et ingénieux de l’Amour, les réfutations de MM. de Chateaubriand et de Bonald, le Résumé des traditions morales et religieuses chez tous les peuples, etc.), presque toujours on rencontre à l’occasion une sorte d’aigreur sardonique contre le christianisme tel que les âges l’ont constitué et transmis ; car, pour son essence prétendue primitive et le caractère purement moral de son fondateur, M. de Sénancour serait disposé à lui rendre hommage.

2115. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — II. » pp. 195-213

Ceux au contraire qui croient qu’une âme est tout un monde, qu’un caractère éminent n’est jamais trop approfondi, ceux qui mêlent à leur jugement sur Mme Roland un culte d’affection et de cœur, trouveront ici mille raisons de plus à leur sympathie et démêleront une foule de détails aussi respectables que charmants. […] C’est l’intérêt des vies domestiques que d’y deviner, d’y suivre le caractère et le génie qui vont tout à l’heure éclater, qui auraient pu aussi bien n’en jamais sortir.

2116. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIe entretien. Sur la poésie »

Ce qui est poésie dans la nature physique ou morale, et ce qui n’est pas poésie se fait reconnaître à des caractères que l’homme ne saurait définir avec précision, mais qu’il sent au premier regard et à la première impression, si la nature l’a fait poëte ou simplement poétique. […] Le jeune disciple, par son caractère, donnait autant à redouter qu’à espérer de sa nature.

2117. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre VIII. La question de gout ce qui reste en dehors de la science » pp. 84-103

Mais, si ce travail de dissection nous révèle l’existence de tels ou tels caractères, il ne nous apprend rien sur la valeur esthétique qu’on doit leur assigner. […] Il s’ensuit, d’une part, que le style doit être personnel, original, c’est-à-dire qu’il doit obtenir, par une combinaison neuve des éléments qui sont ses matériaux, ce caractère irréductible qui est l’individualité ou, comme on disait jadis, la marque de l’ouvrier sur son ouvrage.

2118. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame Geoffrin. » pp. 309-329

Une grande promptitude de coup d’œil à découvrir les caractères, de la pénétration à aller au fond de chacun, et un crayon qui ne manque jamais la ressemblance ; et elle est rarement en beau. […] Dans l’admirable chapitre de saint Paul sur la Charité, on lit, entre autres caractères de cette vertu divine : « Charitas non quaerit quae sua sunt… Non cogitat malum… La Charité ne recherche point ce qui lui est propre.

2119. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Jasmin. (Troisième volume de ses Poésies.) (1851.) » pp. 309-329

La douleur de la pauvre abandonnée, son changement de couleur, son attitude, ses discours, ses projets, le tout encadré dans la fraîcheur du printemps et dans l’allégresse riante d’alentour, porte un caractère de nature et de vérité auquel les maîtres seuls savent atteindre. […] Avec sa facilité improvisatrice, encore aidée des ressources du patois dans lequel il écrit, Jasmin pourrait courir et compter sur les hasards d’une rencontre heureuse comme il n’en manque jamais aux gens de verve et de talent : mais non, il trace son cadre, il dessine son canevas, il met ses personnages en action, puis il cherche à retrouver toutes leurs pensées, toutes leurs paroles les plus simples, les plus vives, et à les revêtir du langage le plus naïf, le plus fidèle, le plus transparent, d’un langage vrai, éloquent et sobre, n’oubliez pas ce dernier caractère.

2120. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — II. (Suite et fin.) » pp. 341-361

Ce ne fut qu’au mois de juin 1830 que le mystère cessa, et qu’il dut être clair pour tous que cette mort n’était point un coup de parti ni une vengeance politique, mais quelque chose de plus simple et de plus commun, le guet-apens et le complot de domestiques grossiers, irrités et cupides, voulant en finir avec un maître dur et de caractère difficile. […] On ne connaîtrait que son talent et non point tout son caractère, si on ne l’avait vu façonner à plaisir et limer ses aiguillons.

2121. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Michaud, de l’Académie française. » pp. 20-40

— La nature, disait-il encore, a mis dans l’âme et dans le caractère de celui qu’elle destine aux grandes actions une sorte de verve semblable à celle qui crée les chefs-d’œuvre ». […] Il avait à tout instant de ces mots dont le caractère était la bonhomie et l’extrême finesse.

2122. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — I. » pp. 41-62

Il faut voir dans ces paroles, non pas le mépris du fait, mais la subordination du fait à l’idée, ce qui est un caractère chez Montesquieu. […] Dans cette vue que je me suis permise sur la nature morale de Montesquieu, et à laquelle a donné jour sa définition de la justice dans les Lettres persanes, loin de moi l’idée de diminuer la beauté sévère et humaine du caractère !

2123. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Saint-Simon »

Nulle d’affaires, comme je l’ai dit plus haut, l’ambassade d’Espagne n’eut d’autre importance politique que des mariages entre des enfants, et sans ces stupéfiantes adorations à Dubois, qui jurent si cruellement avec le caractère connu de Saint-Simon, de cet homme qui semblait fait d’un seul morceau comme un bloc de granit volcanisé, il n’y aurait rien à y chercher… Le portrait du roi et de la reine d’Espagne, l’esquisse du grand portrait des Mémoires, ne fait point partie des dépêches de l’ambassadeur, et il est rejeté à la fin du volume. […] On peut donc dire que du temps de Saint-Simon elle était d’hier… Excepté Dunois, le glorieux bâtard d’Orléans, qui fut un héros et qui racheta et effaça sa tache de bâtardise par les services qu’il rendit à la France, mais dont la postérité (la maison de Longueville) a gardé jusqu’à la dernière heure dans l’État, qu’elle n’a pas cessé de troubler, le caractère essentiel et pervers attaché à toute bâtardise, il faut descendre jusqu’à Louis XII pour trouver cette monstruosité de bâtards légitimés que Louis XIV, dans son orgueil de Nabuchodonosor, rendit plus monstrueuse encore.

2124. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XIX » pp. 76-83

Les procureurs du roi de chefs-lieux d’arrondissement et même les présidents de cour sont émus et correspondent avec l’auteur pour lui soumettre leurs idées et discuter les siennes ; il répond dans les Débats très-officiellement et sans rire à ces missives qui lui donnent un caractère respectable et qui servent à couvrir son jeu.

2125. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXVI » pp. 100-108

Quoi qu’il en soit, le caractère de professeur qui les a marqués d’abord reste empreint sur chacun des trois.

2126. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « APPENDICE. — M. DE VIGNY, page 67. » pp. -542

Quoi qu’il en soit, il fallait être sobre au milieu de tant d’abondance, n’user qu’avec circonspection de ces hommes empruntés et non inventés, et ne pas surcharger leur conduite ni leur caractère au gré de son imagination.

2127. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la Révolution française. Ve et VIe volumes. »

Dès lors, qu’on ne s’en étonne pas, les forces humaines, égarées de leur sphère, se manifestent sous des formes inaccoutumées, et semblent emprunter aux forces physiques quelques-uns de leurs caractères : comme elles, sourdes, aveugles, inflexibles, accomplissant jusqu’au bout leur loi sans la comprendre.

2128. (1874) Premiers lundis. Tome I « Madame de Maintenon et la Princesse des Ursins — II »

J’ai vu mourir le roi comme un saint et comme un héros ; j’ai quitté le monde que je n’aimais pas ; je suis dans la plus aimable retraite que je puisse désirer ; et partout, madame, je serai toute la vie, avec le respect et l’attachement que je vous dois, votre très humble et très obéissante servante. » Nous ne pousserons pas plus loin ces citations, qui suffisent, ce nous semble, pour définir le caractère de madame de Maintenon.

2129. (1874) Premiers lundis. Tome I « Deux révolutions — I. De la France en 1789 et de la France en 1830 »

Mais c’est ce que ne comprennent pas les hommes de transition, les hommes de restauration mitigée, qui dans les Chambres et dans les Conseils pèsent encore sur nous ; gens qui font les capables et les prudents ; sans physionomie, sans caractère décidé, à courte vue, égoïstes au fond, qui, la main sur le cœur, n’ont de sympathie réelle ni avec la Révolution de 89, ni avec celle de 1830 ; qui ne fléchiraient pas le genou devant nos grands vieillards politiques, et ne céderaient pas non plus un pouce de terrain à notre virile et patriotique jeunesse.

2130. (1874) Premiers lundis. Tome I « Vie, poésies et pensées de Joseph Delorme. Deuxième édition. »

Le talent et le caractère de M. 

2131. (1874) Premiers lundis. Tome II « E. Lerminier. Lettres philosophiques adressées à un Berlinois »

« Si la France ne le comptait pas parmi ses citoyens, si M. de La Fayette était anglais ou américain, on ne manquerait pas de raisonnements et de raisonneurs pour établir que jamais un caractère si persévérant et si droit n’aurait pu s’élever et grandir en France, pays de la mobilité, terre toujours remuée et toujours ébranlée.

2132. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre V. Figures de construction et figures de pensées. — Alliances de mots et antithèses »

Hugo, une ample pièce n’est qu’une antithèse amplifiée ; et les caractères des personnages de ses drames tiennent presque tous dans une antithèse, qui en est la formule.

2133. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Prosper Mérimée. »

Mécanisme des passions, brutalité des instincts, caractères d’hommes, paysages, tristesse des choses, effroi de l’inexpliqué, jeux de l’amour et de la mort, tout cela s’y trouve noté brièvement et infailliblement, dans un style dont la simplicité et la sobriété sont égales à celles de Voltaire, avec quelque chose de plus serré, de plus prémédité, de plus aigu.

2134. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « George Sand. »

Je ne parle pas de ses jeunes filles si charmantes ; et je ne rappellerai pas qu’elle a fait les analyses les plus fines et les plus fortes du caractère des artistes et des comédiens (Horace, le Beau Laurence, etc.).

2135. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Contre une légende »

L’Avenir de la Science est sans doute un des premiers livres où une entreprise qui passait, il y a cent ans, pour irréligieuse, ait été tentée chez nous religieusement et ait ainsi repris son vrai caractère.

2136. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mallarmé, Stéphane (1842-1898) »

Entre sa femme et sa fille, deux grands caractères, il vécut, doux, accueillant et paisible.

2137. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XII. Ambassade de Jean prisonnier vers Jésus  Mort de Jean  Rapports de son école avec celle de Jésus. »

Il y donna un grand festin, durant lequel Salomé exécuta une de ces danses de caractère qu’on ne considère pas en Syrie comme messéantes à une personne distinguée.

2138. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XVIII » pp. 198-205

Racine, celui des quatre amis dont le caractère avait le plus d’élévation, celui à qui les autres étaient le moins nécessaires, celui dont la marche était la plus sûre à la cour, n’aidait de son talent, ni même n’accréditait par une approbation éclatante, ni la satire directe, ni la comédie satirique ; mais s’il n’était pas celui qui se fît le plus craindre de l’ennemi, c’était celui qui flattait le plus noblement le maître, celui dont l’éloge avait le plus de poids, et qui donnait à l’agrégation des quatre amis le plus de sûreté et de stabilité, parce qu’il était celui qui affectionnait le plus les autres et avait au plus haut degré leur confiance.

2139. (1913) Le bovarysme « Troisième partie : Le Bovarysme, loi de l’évolution — Chapitre II. Bovarysme essentiel de l’être et de l’Humanité »

À vrai dire la destruction de l’idée du moi à laquelle avait conclu déjà l’une de ces analyses précédentes avait bien pour effet de rendre sans objet toute l’amertume que semblait devoir entraîner après elle la découverte du caractère illusoire inhérent à l’effort humain.

2140. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean de Meun, et les femmes de la cour de Philippe-le-Bel. » pp. 95-104

Ces deux abbés, plus célèbres encore par la causticité de leur caractère, que par le mêrite de leurs écrits, craignoient si fort la répétition de ces espéces d’exécutions militaires, qu’ils n’osoient jamais souper en ville.

2141. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — Les inscriptions des monumens publics de France doivent-elles être écrites en Latin ou en François. » pp. 98-109

Les caractères de notre langue y sont bien saisis.

2142. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — De la langue Latine. » pp. 147-158

Chacun a son ton, son caractère : le génie offre tant de faces différentes.

2143. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre VIII. La religion chrétienne considérée elle-même comme passion. »

La gravité et la noblesse du caractère chrétien sont marquées jusque dans ces vous opposés aux tu de la fille de Félix : cela seul met déjà tout un monde entre le martyr Polyeucte et la païenne Pauline.

2144. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre III. Parallèle de la Bible et d’Homère. — Termes de comparaison. »

Les descriptions d’Homère sont longues, soit qu’elles tiennent du caractère tendre ou terrible, ou triste, ou gracieux, ou fort, ou sublime.

2145. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre II. Des Orateurs. — Les Pères de l’Église. »

Quand on nomme un saint aujourd’hui, on se figure quelque moine grossier et fanatique, livré, par imbécillité ou par caractère, à une superstition ridicule.

2146. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « A Monsieur Naigeon » pp. 9-14

Une expérience que je proposerais volontiers à l’homme de soixante-cinq ou six ans, qui jugerait les miennes ou trop longues, ou trop fréquentes, ou trop étrangères au sujet10, ce serait d’emporter avec lui, dans la retraite, Tacite, Suétone et Sénèque ; de jeter négligemment sur le papier les choses qui l’intéresseraient, les idées qu’elles réveilleraient dans son esprit, les pensées de ces auteurs qu’il voudrait retenir, les sentiments qu’il éprouverait, n’ayant d’autre dessein que celui de s’instruire sans se fatiguer : et je suis presque sûr que, s’arrêtant aux endroits où je me suis arrêté, comparant son siècle aux siècles passés, et tirant des circonstances et des caractères les mêmes conjectures sur ce que le présent nous annonce, sur ce qu’on peut espérer ou craindre de l’avenir, il referait cet ouvrage à peu près tel qu’il est.

2147. (1761) Salon de 1761 « Récapitulation » pp. 165-170

C’est le père qui attache principalement les regards ; ensuite l’époux ou le fiancé ; ensuite l’accordée, la mère, la sœur cadette ou l’aînée, selon le caractère de celui qui regarde le tableau ; ensuite le tabellion, les autres enfants, les servantes et le fond ; preuve certaine d’une bonne ordonnance.

2148. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « III »

La Bruyère était homme d’un seul goût, mais il savait que chacun se pique d’en avoir un qu’il croit bon, et c’est ce qu’il voulait faire entendre, quand il disait de son portrait de Ménalque : « Ceci est moins un caractère particulier qu’un recueil de faits, de distractions.

2149. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Alaux. La Religion progressive » pp. 391-400

C’est un enfantillage de penser qu’en cessant d’être la religion qu’il fut toujours, le catholicisme sauvera le monde, qui ne croit plus au catholicisme et qui le repousse ; et c’est la contradiction la plus effroyable pour un philosophe qui devrait avoir l’habitude du raisonnement, que d’appeler une Religion progressive celle dont on a ôté le Dogme, c’est-à-dire la seule chose qui donne aux systèmes religieux, — qui, sans elle, ne seraient que des systèmes, — leur caractère sine quâ non de religion.

2150. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la liberté de l’enseignement »

En effet, quelque opinion qu’on ait personnellement sur telle ou telle de leurs doctrines, ils présentent évidemment le double caractère qui rend un ordre de citoyens respectable dans l’État moderne : le nombre d’abord, le nombre croissant (je l’affirme, et en pourrait-on douter, quoiqu’il n’y ait pas de recensement ni de statistique officielle ? mais ce nombre, il crève les yeux), — et avec le nombre ils offrent cet autre caractère qui constitue la respectabilité, je veux dire la pratique de la morale et des devoirs civils et sociaux. […] — Je sais qu’on établit des distinctions entre doctrine et doctrine, et qu’il s’est élevé, depuis une quarantaine d’années, une sorte de philosophie dont j’ai déjà indiqué le caractère, philosophie à double fin, en quelque sorte bâtarde et amphibie, tantôt dénoncée elle-même par le clergé, tantôt, selon les circonstances, accueillie par lui comme alliée et auxiliaire, laquelle prétend établir un moyen terme entre le symbole religieux et la recherche rigoureusement philosophique et scientifique, avec ses résultats quels qu’ils puissent être.

2151. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIVe entretien. Madame de Staël. Suite »

Comprennent-ils la diversité des pays, l’accent et le caractère des idiomes étrangers ? […] Il avait la gravité précoce, la vertu froide, l’opinion faite, le caractère infaillible des hommes élevés dans le foyer domestique d’une grande gloire. […] Ses ouvrages peuvent périr, mais son accent reste à la langue et aux caractères.

2152. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugo, Victor (1802-1885) »

Jay Le drame de Cromwell n’a excité en moi d’autre sentiment que celui de la commisération pour un jeune homme né avec d’heureuses dispositions, d’un caractère très estimable, et qui, dans quelques productions lyriques, a montré un vrai talent. […] Elle m’a semblé un tissu d’extravagances, auxquelles l’auteur s’efforce vainement de donner un caractère d’élévation, et qui ne sont que triviales et souvent grossières. […] Chacun de ses ouvrages signale un perfectionnement très sensible dans l’instrument littéraire ; mais tous, pourtant, sont empreints d’un commun caractère : ils procèdent plutôt de la pensée solitaire et recueillie, écoutant au-dedans d’elle-même les voies confuses de la rêverie et de l’imagination, que d’un besoin logique de systématiser sous la forme épique et dramatique les développements d’une passion observée dans la vie sociale ou d’une anecdote compliquée d’incidents variés.

2153. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre III. Le Petit Séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet (1880) »

Un inconvénient plus grave, c’est que, ne m’étant pas amusé quand j’étais jeune, et ayant pourtant dans le caractère beaucoup d’ironie et de gaieté, j’ai dû, à l’âge où on voit la vanité de toute chose, devenir d’une extrême indulgence pour des faiblesses que je n’avais point eu à me reprocher ; si bien que des personnes qui n’ont peut-être pas été aussi sages que moi ont pu quelquefois se montrer scandalisées de ma mollesse. […] Le plus beau trait du caractère de M.  […] Plus tard, je le trouvai passé à des idées politiques très exaltées ; la passion vive, qui faisait le fond de son caractère, s’était tournée vers la démocratie ; il rêvait la justice, il en parlait d’une manière sombre et irritée ; il pensait à l’Amérique, et je crois qu’il doit y être.

2154. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre IV. Le Séminaire d’Issy (1881) »

Olier, dans ce groupe de réformateurs catholiques, présente un caractère à part. […] La société fondée par Olier garda jusqu’à la Révolution son respectable caractère de modestie et de vertu pratique. […] Les rapports des directeurs de Saint-Sulpice avec les élèves ont un caractère large et grave.

2155. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 novembre 1886. »

A une extrémité de la ville, un édifice de forme inattendue, mais qui pourrait être une usine ou un hôpital, — sans la moindre prétention à aucun caractère d’élégance architecturale, c’est le théâtre. […] C’est une étude sur Tristan et Parsifal ; le caractère spécial du génie de Wagner est plusieurs fois méconnu, mais il y a des idées neuves et ingénieuses et de fuies analyses : au début et à la fin de l’article, un Bayreuth humoristique. […] Ce n’est pourtant pas en raison du caractère trop écrasant de la partition comme certains détracteurs ont pu l’écrire mais à cause d’un refroidissement qui entraîna une crise d’apoplexie.

2156. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1876 » pp. 252-303

Il me disait qu’il cherchait toujours, qu’il venait de découvrir à peu près la tache que fait sous des arbres, une amazone de femme, et qu’il ne désespérait pas, à la longue, de trouver le caractère, le style d’un habit noir, enfin l’héroïsme de la vie moderne. […] » — s’exclame tout à coup Zola, qui depuis quelques instants, ainsi que toutes les fois qu’il entend des choses convertissables en roman, s’agite sur sa chaise, à laquelle il fait décrire des demi-cercles. — Mais c’est un livre superbe à faire… il y a là un caractère, si j’avais eu cela pour l’Excellence Rougon… Est-ce que ce n’est pas votre avis, Flaubert ? […] On la rencontre toujours irritée ou animée par quelque passion de l’âme, en bas, en haut, dans les coins, — cela donnant au regard un caractère fiévreusement étrange.

2157. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Proudhon » pp. 29-79

VII C’était là son caractère. Aimable et charmant caractère ! […] Le sophisme dans le vice, c’est le caractère de la femme au xixe  siècle.

2158. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Victor Hugo. Les Contemplations. — La Légende des siècles. »

Hémistiches alternés et pondérés, balance exactement équilibrée, périodes mesurées, sévérités rythmiques, splendeur de vocabulaire, majesté d’images, voilà les caractères essentiels, grands et profonds, qui ont toujours distingué le vers, dans les œuvres lyriques ou dramatiques de tous les âges. […] Dante n’avait pas besoin d’être un grand génie et un grand caractère. […] Une si effroyable comédie de l’emphase n’est plus de la littérature ni du talent, mais du désordre intellectuel du plus inquiétant caractère, de l’anarchie d’esprit à sa plus haute puissance.

2159. (1881) Le naturalisme au théatre

Il serait désastreux de lui prendre ses procédés d’outrance, sa rhétorique, sa théorie de l’action quand même, aux dépens de l’analyse des caractères. […] Du moment où l’absolu n’existe pas dans un art, le don prend un caractère plus large et plus souple. […] Je l’ai dit, l’évolution se porte sur tout et c’est justement là ce qui en montre le caractère scientifique. […] Quelques-uns, je parle des comiques, chargent trop l’excentricité, ce qui leur fait perdre le caractère. […] Selon les caractères et les passions, elle se posera et se dénouera.

2160. (1893) Impressions de théâtre. Septième série

Maurice Donnay d’avoir altéré le caractère de l’héroïne d’Aristophane. […] Il est d’un caractère raisonnable et sérieux. […] Emile Pouvillon est imprimé en deux caractères, comme la Tentation de saint Antoine. Le gros caractère est pour le dialogue ; le petit est pour l’indication des attitudes et la description des paysages. […] Son caractère est au-dessus de tout soupçon.

2161. (1916) Les idées et les hommes. Troisième série pp. 1-315

Mais, dans le cartésianisme, l’intuition n’est pas rien, si la première évidence, le cogito ergo sum, a le caractère d’une certitude intuitive. […] Les caractères de la science française, M.  […] Bergson continue cette philosophie française dont les caractères sont bien ceux qu’il a discernés. […] Le caractère éminemment civilisateur de la Germanie, c’est, pour notre auteur, un dogme, un acte de foi catégorique. […] Cette alarme perpétuelle, tant de facilité à souffrir ; et une sérénité volontaire, une sagesse de l’esprit dominant le trouble du cœur : voilà le caractère de l’élève Gilles et de l’auteur, qui lui ressemble.

2162. (1905) Promenades philosophiques. Première série

Son caractère n’est aucunement sombre. […] Le pessimisme tient au caractère, et le caractère est une expression de la physiologie. […] Il est peintre avant tout, quoique doué aussi du sens critique : ses tableaux sont des caractères en même temps que des poèmes. […] Les caractères sont moins différenciés, facilement classables sous quelques types. […] Les mots en caractères ordinaires indiquent les formes proposées par la Commission.

2163. (1896) Essai sur le naturisme pp. 13-150

De la beauté formelle des choses, de leur caractère et de leur compréhension, il ne se préoccupa désormais plus : ce qui le ravit alors, ce fut la magnificence de leur vocable. […] Leur génie et leurs artifices consisteraient à parer ses intimités d’un caractère d’éternité, à restituer à ces hommes frustes et serviles, soumis aux contingences leur signification divine et absolue. […] Les sautes de son caractère concordent fraternellement avec ses changements d’opinion. […] Mais des circonstances, des fléaux, des migrations inévitables modifient les caractères et les existences. — Un homme qui épanouit en lui, additionne et accumule des instincts héréditaires, se trouve, par le hasard de sa nativité et les péripéties de la vie dans une contrée et une société, étrangères le plus souvent à son destin et à sa race. […] Pour avoir vécu les pensées de Jésus et d’Orphée, il doua les choses d’un caractère d’éternité.

2164. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

Mercredi 4 février Aujourd’hui j’achète chez Hayashi une poche à tabac de Gamboun, le figurateur spécialiste de la fourmi au Japon : un objet de la vie intime, au caractère d’un objet de sauvage, mais fabriqué par le sauvage le plus artiste de la terre. […] Mais arrêté dans son désir par le caractère de ses œuvres, qui étaient les œuvres d’un artisan, et non d’un poète ou d’un savant, il lui demandait une fois, s’il n’avait pas un autre talent que celui d’ornemaniste. […] Très grand caractère, le nouveau décor du cimetière Montmartre, exécuté d’après l’aquarelle de mon frère. […] Là-dedans, au milieu de ce mobilier d’un autre siècle, l’ovale délicat de son pâle visage, ses yeux noirs doux et profonds, la sveltesse de sa personne longuette, lui donnent quelque chose d’une apparition, d’un séduisant et souriant fantôme ; caractère que je retrouve dans son portrait pastellé par Helleu. […] Je prenais congé de la gracieuse femme, au moment où elle me disait qu’elle me porterait un jour un volume d’histoires, racontées par sa petite fille à l’âge de cinq ans, pendant qu’elle était à sa toilette : histoires d’un caractère très original, inventées par l’enfant, au moment où elle ne savait ni lire ni écrire et qu’elle a fait copier dans un volume par un homme de ce temps, qui a l’écriture de Jarry.

2165. (1936) Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours pp. -564

Quand nous les comparons aux autres charnières de la suite française, un caractère singulier nous frappe. […] La Muse de sa destinée le menait naturellement et noblement vers cette stylisation dont il accrut, en la voulant posthume, le caractère pharaonique. […] Le caractère sérieux de ses œuvres, toutes morales et moralisantes, s’en trouve à la fois alourdi et rendu plus touchant. […] Du caractère italien, de la littérature italienne, personne encore n’avait parlé en France avec autant de sympathie éclairée. […] La lutte du classique et du romantique a pris le même caractère.

2166. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre sixième »

Caractère et tour d’esprit de ce poète […] La condition des poètes et trop souvent leur caractère étaient conformes à ces habitudes d’esprit. […] Qu’un caractère, un talent s’y produise, voilà l’un des partis qui devient le maître, et l’État est assuré. […] Caractère et tour d’esprit de Boileau. […] Le caractère de Boileau, la dignité de sa vie, ne rendirent pas moins méprisables les mœurs des poètes contemporains, que ses satires n’avaient rendu leurs vers ridicules.

2167. (1896) Le livre des masques

-Ferdinand Herold Le danger du vers libre, c’est qu’il demeure amorphe, que son rythme, trop peu accentué, lui donne quelques-uns des caractères de la prose. […] Jouant un peu sur le mot, je l’ai appelé « dramaturge », au mépris des étymologies et de l’usage, quoiqu’il n’ait jamais écrit pour le théâtre ; mais à la façon dont ses récits sont machinés et comme équilibrés à miracle sur le revirement, sur le retour à leur vraie nature des caractères d’abord affolés par la passion, on devine un génie essentiellement dramatique. […] Un caractère, puis la vie pèse et le caractère fléchit ; une nouvelle pesée le redresse et le dresse selon sa vérité originelle : c’est l’essence même du drame psychologique, et si le décor participe aux modifications humaines, l’œuvre prend un air d’achèvement, de plénitude, donne une impression d’art inattendu par la logique acceptée des simplicités naturelles. […] Par l’imagination qui lui permet d’évoquer et de faire vivre les êtres les plus divers, les plus caractéristiques, les plus personnels, il a, comme Balzac, le génie de donner à ses personnages non seulement la vie, mais la personnalité, d’en faire de vrais individus, tous bien doués d’une âme particulière ; dans la Force du Mal, une jeune fille est ainsi posée et si nettement sous nos yeux qu’elle en devient inoubliable ; malheureusement son caractère fléchit à la fin du roman, trop brusquement résumé. […] De sincérité nulle, caractère de femme, de fille, nativement méchant et même féroce, Rimbaud a cette sorte de talent qui intéresse sans plaire.

2168. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — II. Duclos historien » pp. 224-245

Il s’agit du caractère de Charles VII, que l’abbé Le Grand oppose dès l’abord à celui de Louis XI et que Duclos donne sans poser le contraste : j’indique sur deux colonnes, comme l’a fait M.  […] Indépendamment de son caractère propre, les réflexions qu’il fit sur les premiers objets dont il fut frappé contribuèrent beaucoup à la conduite que nous lui verrons tenir.

2169. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — I. » pp. 342-363

Cette vivacité d’esprit dont je parle a cela de beau qu’elle éclaire ceux qu’elle touche, elle les pénètre d’évidence : on en aperçoit la sagesse et le vrai, d’une manière qui porte le caractère de ces deux choses, c’est-à-dire distincte ; elle ne fait point un plaisir imposteur et confus, comme celui que produit le feu de l’imagination ; on sait rendre raison du plaisir que l’on y trouve. […] Et quant aux modernes tout voisins de nous, et qui semblent mieux accommodés au goût et au ton de notre siècle, il ne faut pas qu’un jeune écrivain les imite davantage : car « cette façon a je ne sais quel caractère ingénieux et fin dont l’imitation littérale ne fera de lui qu’un singe, et l’obligera de courir vraiment après l’esprit ».

2170. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — II. (Fin.) » pp. 257-278

Quoique Saint-Martin eût beaucoup moins à se plaindre qu’un autre de la Révolution et qu’il ait pu dire que jusqu’à une certaine heure elle l’avait traité en enfant gâté, il avait assez à en souffrir pour pouvoir récriminer contre elle s’il l’avait voulu et si son caractère l’y eût porté. […] Sa profession de foi sur la Révolution française est simple, elle est celle d’un croyant : il pense que la Providence s’en mêle soit directement, soit indirectement, et par conséquent il ne doute pas que cette Révolution n’atteigne à son terme, « puisqu’il ne convient pas que la Providence soit déçue et qu’elle recule » : En considérant la Révolution française dès son origine et au moment où a commencé son explosion, je ne trouve rien à quoi je puisse mieux la comparer qu’à une image abrégée du Jugement dernier, où les trompettes expriment les sons imposants qu’une voix supérieure leur fait prononcer, où toutes les puissances de la terre et des cieux sont ébranlées… Quand on la contemple, cette Révolution, dans son ensemble et dans la rapidité de son mouvement, et surtout quand on la rapproche de notre caractère national, qui est si éloigné de concevoir et peut-être de pouvoir suivre de pareils plans, on est tenté de la comparer à une sorte de féerie et à une opération magique ; ce qui a fait dire à quelqu’un qu’il n’y aurait que la même main cachée qui a dirigé la Révolution, qui pût en écrire l’histoire.

2171. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — II » pp. 112-130

Il était naturel que le petit-fils du comte d’Argenson, ayant à choisir dans les papiers de son grand-oncle, ne fît point porter précisément les extraits sur ce qui était au désavantage de son aïeul : mais l’omission eût mieux valu qu’une altération qui fausse jusqu’à un certain point la physionomie des deux hommes et le sens des caractères. […] Le fond de sa pensée attaque toujours ses supérieurs, quoique avec l’abord humble, honteux et embarrassé à leur égard, sans se jouer pour cela, mais par habitude ; mais il ne se ravale pas pour cela avec les inférieurs, ce qui est la suite de ce caractère chez les gens véritablement généreux ; au contraire, il y porte un air important et distrait qui en impose aux égaux et qui le fait respecter des inférieurs.

2172. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — III » pp. 81-102

Villars allait se retrouver à sa vraie place : toutefois, cette mission des Cévennes et le caractère qu’il y déploya ne le diminuent point à nos yeux. […] Je n’ai certes pas la prétention de le suivre dans toutes ses campagnes ; mais il importait de relever dans le cours d’une carrière si pleine les traits de caractère qui définissent cette humeur et ce génie.

2173. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe, et d’Eckermann »

Cousin, de « rester toujours à la maison. » Gœthe avait donc organisé sa vie avec ensemble, avec une suprême ordonnance, et dans l’intérêt de cette universalité de goûts qui était le caractère éminent de sa vaste intelligence. […] Un sujet particulier prend un caractère général et poétique, précisément parce qu’il est traité par un poëte.

2174. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Histoire de la Restauration par M. Louis de Viel-Castel. Tomes IV et V. (suite et fin) »

Son jugement excellent, que plus rien n’influençait, s’appliqua aux choses avec calme, avec étendue et lucidité ; son caractère obligeant faisait merveille, retranché dans sa dignité inamovible : les côtés moins vigoureux de ce caractère, désormais encadrés ainsi et appuyés, ne paraissaient plus que des mérites.

2175. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

Il se devait à lui-même de l’essayer, et il l’essaya ; ce n’est pas a nous qu’il appartient de dire quels mérités encore de vérité et de ressemblance conservent et continuent d’offrir ces tableaux composés en Italie, même quand il n’y aurait pas atteint tout le caractère qu’on y cherche. […] Je t’assure que, dès ce moment, je n’ai plus pensé qu’au bonheur de joindre à tous les souvenirs que j’ai déjà dans la tête une nouvelle collection de matériaux d’un caractère tout particulier.

2176. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

Horace, qui passait pour léger, avait du coup d’œil, et l’honneur était l’âme de son caractère. […] … » Et comme Horace lui exprimait son désir de faire une visite en France : « L’empereur m’a dit alors, les larmes dans les yeux : « Allez, vous ferez ce qu’un galant homme doit faire ; si vous voyez le roi des Français, dites-lui bien que je partage tout son malheur ; que personne plus que moi ne peut le comprendre davantage, car je lui dois de connaître le bonheur dont vous me voyez jouir chaque jour : dites-lui tout ce qui pourra le convaincre de l’estime que j’ai pour ses grandes vertus et pour la fermeté de son caractère. » — « L’empereur me tenait la main ; nous sommes restés quelques minutes sans prononcer une parole, en proie à la plus vive émotion, et lorsque j’ai pu parler, je lui ai demandé s’il m’autorisait à répéter textuellement cette conversation.

2177. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo en 1831 »

Mme Hugo, femme supérieure, d’un caractère viril et royal, comme dirait Platon, s’était décidée à ne pas voir le monde, et a vivre retirée dans une maison située au fond du cul-de-sac des Feuillantines, faubourg Saint-Jacques, pour mieux vaquer à l’éducation de ses fils. […] Ce soleil de la Sierra, en bronzant leur caractère, avait aussi doré leur imagination.

2178. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LOYSON. — POLONIUS. — DE LOY. » pp. 276-306

Il possède le secret ou l’instinct de cette puissante sympathie, qui est le lien incompréhensible du commerce des âmes. » Parmi les reproches qu’il se permet de lui adresser, il lui trouve un peu trop de ce vague qui plaît dans la poésie, qui en forme un des caractères essentiels, mais qui doit en être l’âme, et non le corps : est-il possible de mieux dire143 ? […] Labinsky par l’analyse plutôt et le développement approfondi d’un caractère.

2179. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIe Entretien. Chateaubriand »

Cela m’avait laissé une mauvaise impression du caractère de M. de Chateaubriand. […] Cette admiration désintéressée fait le plus grand éloge du caractère de M. de Fontanes.

2180. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre II. Clément Marot »

Son caractère et son talent. […] C’est un joli essai de psychologie sentimentale, à l’aide de caractères généraux.

2181. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre IV. Le patriarche de Ferney »

Jugement d’ensemble sur Voltaire : caractère, esprit ; style ; l’ironie voltairienne ; l’art de conter. […] Si l’on essaie d’analyser l’ironie voltairienne, on s’aperçoit qu’elle a un caractère rigoureusement mathématique.

2182. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « La jeunesse du grand Condé d’après M. le duc d’Aumale »

Ce n’est là qu’une impression ; mais, me souvenant quel terrible homme a été le grand Condé, je comptais voir son caractère se dégager, dès son enfance, avec un tout autre relief. […] J’avoue que je lui ai fait çà et là un procès de tendance ; mais j’ai si grand’peur qu’il ne cède à la tentation d’embellir ou d’adoucir les traits du caractère de son héros !

2183. (1890) L’avenir de la science « II »

De là ce fier caractère d’audace contre les dieux que portent les premiers inventeurs ; de là ce thème développé dans tant de légendes mythologiques : que le désir d’un meilleur état est la source de tout le mal dans le monde. […] L’oscillation, au contraire, est le caractère du développement véritablement humain, et les constitutions modernes sont conséquentes quand elles se posent des termes périodiques auxquels elles peuvent être modifiées.

2184. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame de La Vallière. » pp. 451-473

Parlant de Bossuet, elle dit : « Pour M. de Condom, c’est un homme admirable par son esprit, sa bonté et son amour de Dieu. » Et, en effet, quand on lit en même temps les lettres de Bossuet sur Mme de La Vallière, on est touché de ce caractère de bonté, de charité parfaite, et même d’humilité, dans le grand directeur et le sublime orateur. […] Mais comment se peut-il que Bossuet ait agi en ceci comme Mme de Genlis ou tout autre écrivain esclave d’une élégance timide eût été capable de faire, qu’il ait partout affaibli et atténué ce qui donnait à l’expression de l’accent et du caractère, et que sa plume, en raturant et en corrigeant autrui, soit allée au rebours de ce qu’elle pratique si hautement elle-même ?

2185. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Voltaire et le président de Brosses, ou Une intrigue académique au XVIIIe siècle. » pp. 105-126

Une lettre qu’il écrivit dans ce train d’idées au président, lui valut une réponse qui restera mémorable dans l’histoire de sa vie, et qu’il faut mettre à côté de la noble lettre que le grand Haller lui adressa un jour pour faire cesser les manèges et les intrigues où il essayait de l’immiscer : Souvenez-vous, monsieur, lui disait de Brosses, des avis prudents que je vous ai ci-devant donnés en conversation, lorsqu’en me racontât les traverses de votre vie, vous ajoutâtes que vous étiez d’un caractère naturellement insolent. […] [NdA] Depuis que ceci est écrit, lisant la correspondance du grand Frédéric avec Darget (tome XX des Œuvres de Frédéric le Grand, Berlin, 1852), j’y trouve des jugements d’une précision définitive et terrible : Voltaire s’est conduit ici en faquin et en fourbe consommé ; je lui ai dit son fait comme il mérite… Voltaire est le plus méchant fou que j’aie connu de ma vie, il n’est bon qu’à lire… Je suis indigné que tant d’esprit et de connaissances ne rendent pas les hommes meilleurs… Son caractère me console des regrets que j’ai de son esprit… Croiriez-vous bien que Voltaire, après tous les tours qu’il m’a joués, a fait des démarches pour revenir ?

2186. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre II : De la méthode expérimentale en physiologie »

Quelle que soit d’ailleurs la solution que la science puisse donner plus tard au problème de la vie, n’oublions pas qu’elle ne peut compromettre en rien l’existence du principe immatériel que nous appelons l’âme pensante, car, si la vie se distingue des forces brutes par des caractères différents, l’âme pensante se distingue de la matière par des caractères opposés.

2187. (1860) Ceci n’est pas un livre « Hors barrières » pp. 241-298

— Il est facile de conclure de cette inscription à l’un des caractères le plus fortement accusés de la population toulousaine : le pédantisme. — Ne serait-ce pas à cette inscription que Toulouse doit d’être connue, à Villefranche et dans le reste de l’Europe, sous le nom flatteur de Toulouse la savante ? […] * *   * Voilà, mon ami, pour le côté matériel de Toulouse. — Je viens de te parler des pierres, — veux-tu connaître les caractères ?

2188. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre II. Réalité des idées égalitaires »

Il faut se garder, sans doute, de tenir pour démontré dès à présent que la démocratie soit forcément l’aboutissant de toute évolution sociale : ce serait se méprendre étrangement sur le caractère des lois sociologiques que d’y voir on ne sait quelles « lois d’évolution » qui prédestineraient, par exemple, — quelles que dussent être les circonstances variées de leur développement, — toutes les sociétés à la démocratie. […] Si le droit moderne est avide d’égalité, le caractère de l’ancien droit est qu’il « vit de distinctions » 17.

2189. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Réception du père Lacordaire » pp. 122-129

Le principal intérêt est dans le caractère des deux personnages qui y figurent.

2190. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Post-scriptum sur Alfred de Vigny. (Se rapporte à l’article précédent, pages 398-451.) »

Il en est de même pour la peinture qu’il fait des caractères de certains de ses personnages.

2191. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Note »

Que si ma pensée se reporte, non plus sur le poëte, mais sur l’homme auquel tant de liens de ma jeunesse m’avaient si étroitement uni et en qui j’avais mis mon orgueil, ressongeant à celui qui était à notre tête dans nos premières et brillantes campagnes romantiques et pour qui je conserve les sentiments de respect d’un lieutenant vieilli pour son ancien général, je me prends aussi à rêver, à chercher l’unité de sa vie et de son caractère à travers les brisures apparentes ; je m’interroge à son sujet dans les circonstances intimes et décisives dont il me fut donné d’être témoin ; je remue tout le passé, je fouille dans de vieilles lettres qui ravivent mes plus émouvants, mes plus poignants souvenirs, et tout à coup je rencontre une page jaunie qui me paraît aujourd’hui d’un à-propos, d’une signification presque prophétique ; je n’en avais été que peu frappé dans le moment même.

2192. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « AUGUSTE BARBIER, Il Pianto, poëme, 2e édition » pp. 235-242

M. de Lamartine, dans de fort belles méditations et dans sou dernier chant de Childe-Harold, avait point à merveille les grands traits des horizons et des paysages, l’idéal en quelque sorte élyséen de ce ciel, de cette mer de Naples, de cette éternelle enchanteresse au sein de laquelle l’auteur des Martyrs nous avait déjà introduits un moment avec saint Augustin, Jérôme et Eudore ; mais dans ces harmonieux tableaux de M. de Lamartine, les hommes avec leurs variétés et leurs contrastes, les monuments avec leurs caractères, n’étaient pas touchés : la nature envahissait tout, et encore la nature dans sa plus vague plénitude, sans contours arrêtés, sans détails curieux et distincts, telle en un mot qu’elle se réfléchit dans un cœur que remplit l’amour ; ce n’étaient que chauds soleils, aubes blanchissantes, comme dans Claude Lorrain, firmaments étoilés, murmures, vapeurs et ombrages.

2193. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres mises en ordre par M. J. Sabbatier. (Tome II, 1844.) » pp. 144-153

Né en 1785 dans l’Ardèche, il vint à Paris à l’âge de dix-neuf ans, c’est-à-dire tout au début de l’Empire ; et par ses goûts déclarés, par ses essais sérieux et variés en vers et en prose, par le caractère des doctrines, il mérita bientôt de se voir l’enfant chéri, le fils adoptif de la littérature alors régnante, de celle qui se rattachait plus étroitement aux traditions du xviiie  siècle.

2194. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Mignet : Histoire de la Révolution française, depuis 1789 jusqu’en 1814. 3e édition. »

Les arts ne sont point leur lot à coup sûr : cette insouciance naïve qui en fait en grande partie le caractère et le charme, cette disposition, tant soit peu nonchalante et molle, à prendre les choses comme elles sont, s’effaroucherait d’une préoccupation sérieuse et d’une arrière-pensée perpétuelle.

2195. (1874) Premiers lundis. Tome I « Tacite »

Qu’on puisse traduire Platon ou Cicéron comme on traduit Aristote ou Vitruve, c’est ce qu’il ne nie point ; mais qu’on espère reproduire leur caractère et leurs beautés, c’est ce qui lui paraît chimérique.

2196. (1874) Premiers lundis. Tome I « Walter Scott : Vie de Napoléon Bonaparte — II »

Et nous nous disions : Si, au lieu d’une Vie de Napoléon Bonaparte, Walter Scott avait eu l’idée d’écrire un roman historique où ce personnage eût joué un rôle, s’il avait saisi cette occasion pour peindre des scènes de la Révolution française et pour montrer en action quelques-uns des caractères principaux qui s’y rencontrent, il eût fait un ouvrage plus intéressant à coup sûr que son histoire, mais également plein de vues fausses, de descriptions superficielles, et de portraits de fantaisie : et pourtant Walter Scott a eu sur cette période contemporaine autant et plus de renseignements que sur les époques d’Ivanhoë, de Quentin Dthrward, d’Élisabeth, de Cromwell et des Puritains.

2197. (1874) Premiers lundis. Tome II « Charles de Bernard. Le nœud Gordien. — Gerfaut. »

M. de Bernard, dans cette fin, a trop cédé à la dramaturgie moderne ; il y avait, j’ose le lui affirmer, sans pouvoir l’indiquer, quelque autre conclusion possible et vraie, qu’il eût trouvée en le voulant bien et en restant fidèle à tous ses caractères, même à celui du baron.

2198. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre I. La poésie »

Il corrige donc les caractères des dieux, des héros, leurs actions brutales, leurs injurieux discours, la prolixité des descriptions, la négligence des redites, tout ce qui choque la morale, la politesse, le goût d’un siècle éclairé.

2199. (1897) La crise littéraire et le naturisme (article de La Plume) pp. 206-208

Aussi le seul remède à cet état de choses sera donc de refuser aux arts ce caractère aristocratique où l’on voudrait le limiter.

2200. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Contes de Noël »

Elle éclate notamment dans le caractère que prend, chez ce peuple sérieux la célébration des fêtes dont l’anniversaire de la nativité de Jésus est l’occasion.

2201. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vielé-Griffin, Francis (1864-1937) »

Il ne lui manque jusqu’ici que de donner à ses lieds un caractère de consistance et de nécessité.

2202. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre IX. L’avenir de la Physique mathématique. »

La loi physique alors prendrait un aspect entièrement nouveau ; ce ne serait plus seulement une équation différentielle, elle prendrait le caractère d’une loi statistique.

2203. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre IV Le Bovarysme des collectivités : sa forme imitative »

Or l’idéal commun, qui s’exprime dans la loi, dans la coutume, dans le préjugé, dans les mœurs, se propose à tous avec un même caractère d’uniformité.

2204. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préfaces de « Han d’Islande » (1823-1833) — Préface d’avril 1823 »

Il faut avouer qu’outre l’agrément de voir les sept ou huit caractères romains qui forment ce qu’on appelle son nom, ressortir en belles lettres noires sur de beau papier blanc, il y a bien un certain charme à le faire briller isolément sur le dos de la couverture imprimée, comme si l’ouvrage qu’il revêt, loin d’être le seul monument du génie de l’auteur, n’était que l’une des colonnes du temple imposant où doit s’élever un jour son immortalité, qu’un mince échantillon de son talent caché et de sa gloire inédite.

2205. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préfaces de « Marion de Lorme » (1831-1873) »

À cela près de quelques changements de détail qui ne modifient en rien ni la donnée fondamentale de l’ouvrage, ni la nature des caractères, ni la valeur respective des passions, ni la marche des événements, ni même la distribution des scènes ou l’invention des épisodes, l’auteur donne au public, au mois d’août 1831, sa pièce telle qu’elle fut écrite au mois de juin 1829.

2206. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Aristophane, et Socrate. » pp. 20-32

Il a mis Aristophane dans son banquet, l’a distingué des autres, l’a fait parler suivant son caractère, & même avec ce Socrate immolé à la risée.

2207. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Bayle, et Jurieu. » pp. 349-361

Toute l’Europe fut indignée de voir le plus fougueux & le plus déraisonnable des hommes s’acharner contre un philosophe, contre un sage, un homme doux, simple, modéré, plus admirable encore par le caractère de sa belle ame que par celui de son génie & de ses écrits.

2208. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Satire contre le luxe, à la manière de Perse » pp. 122-126

Maîtres des nations, ôtez à l’or son caractère représentatif de tout mérite.

2209. (1897) L’empirisme rationaliste de Taine et les sciences morales

Ils n’ont donc de ce qu’ils attaquent qu’une notion bien confuse Le héros du Disciple, qui a ouvert la campagne il y a environ neuf ans, n’est pas seulement un triste caractère, c’est un médiocre esprit, un mauvais élève qui n’a pas compris son maître.

2210. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Hebel »

Fils d’un tisserand du Palatinat, son père, qui avait émigré, s’était marié dans cette douce contrée, le pays de la bonhomie vraie qu’on appelle l’Oberland badois, et c’est là, entre le Rhin et les hauteurs boisées de la Forêt Noire, que ce poète de la bonhomie — car tel est le caractère distinctif de la poésie de Hebel et son originalité supérieure — nourrit son génie de ces premières impressions qu’on devait toujours y retrouver, et qui entrent dans la pensée d’un homme profondément organisé comme le goût du thym dans le miel de l’abeille et la saveur des serpolets vierges dans la chair sauvage des chevreuils.

2211. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Leopardi »

Il faut encore que la tristesse ait un caractère, une puissance, une fécondité.

2212. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Charles Monselet »

Le caractère du talent de Monselet est bien là.

2213. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXV. De Paul Jove, et de ses éloges. »

D’abord, ils ont le mérite d’être très courts ; ils renferment quelquefois en peu de lignes, et d’autres fois en peu de pages, l’idée du caractère, des actions, des ouvrages de celui qu’il loue, ou du moins dont il parle ; car quelquefois il fait le portrait d’hommes plus célèbres que vertueux ; mais il les représente tels qu’ils sont, loue les vertus, admire les talents et déteste les crimes.

2214. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre IX. »

S’il passe une partie de sa longue vie à la cour des tyrans de Syracuse, maîtres bons ou mauvais, généreux ou cruels, mais toujours amis des arts, s’il n’a rien du caractère héroïque d’un Eschyle, que nous voyons cependant aller aussi chercher asile à Syracuse, Simonide, du moins, avait senti en poëte cette gloire des armes qu’il ne partageait pas.

2215. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

Si la postérité n’a que faire des faiblesses de quelques grands noms, elle a droit de revendiquer les documents qui la conduiront sur la trace de certaines carrières étonnantes, qui lui dévoileront les vrais éléments dont s’est formé à la longue tel caractère historique controversé. » Au nombre de ces pièces que la curiosité publique est en droit de réclamer, on peut placer sans inconvénient (et sauf quelques endroits sujets à suppression) la correspondance de Benjamin Constant avec Mme de Charrière. […] Voici quelques-unes des premières lettres, où le caractère éclate tel qu’il sera toute la vie. […] Mais cela est bien réparé par la force et la vérité des caractères et des détails. […] ce n’est pas l’esprit qui est une arme, c’est le caractère. […] Comme elle est opposée à mon caractère, je la vaincrai facilement.

2216. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre IV. Que la critique doit être écrite avec zèle, et par des hommes de talent » pp. 136-215

Lovelace est le type odieux et blafard des plus malhonnêtes gens qui aient déshonoré le caractère du peuple anglais. — Les uns et les autres, de Lovelace à Brummel, ils ne se doutent pas qu’ils ont pour aïeul… Don Juan ! […] Pas une scène de ce drame n’explique mieux le caractère de notre héros ; enfin, savez-vous une façon plus nette et plus vive de préparer l’entrée de Don Juan dans la tombe du Commandeur et la terrible péripétie qui va venir ? […] Bulwer, renferme dans ma pièce tout ce qui prétend à l’héroïque. » Il avoue même « que, dans ce caractère, il a pris, lui, M.  […] c’est là encore mentir à l’histoire et avilir à plaisir et sans aucune nécessité dramatique, le noble caractère de M. le marquis de Montespan. […] La fantaisie ne tient compte ni du temps, ni du lieu, ni des distances, ni des caractères ; elle va son chemin au hasard ; tantôt elle court à perdre haleine ; tantôt elle s’arrête sans dire pourquoi ; ou bien elle attend les événements sans rien faire, pour les tourner au drame et aux coups de théâtre.

2217. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Mais Helmer a beau aimer sa femme, c’est un homme d’un caractère un peu raide et entier. […] (Et, à ce propos, je ne comprends point qu’on ait contesté la vérité du caractère d’Olympe. […] Il refuse encore, il a décidément bien mauvais caractère. […] La fidélité à l’empereur prend un caractère religieux, puisque c’est Dieu que l’empereur représente. […] Notez que je n’accuse point le caractère de Charmerelz de n’être pas vrai.

2218. (1932) Les idées politiques de la France

Plus précisément une réforme dans l’État, une réforme dans le chef, une réforme dans les membres, — et les trois réformes de caractère démocratique et populaire. […] Il faut cependant reconnaître un caractère presque miraculeux au service qu’en ont reçu le libéralisme international du Saint-Siège et la politique de Pie XI. […] Le catholicisme actuel, en France, exclurait automatiquement le caractère, l’action et l’indépendance d’un Dupanloup. […] Réalisée même en Italie, où la dictature, d’abord favorisée par la bourgeoisie, accentue de plus en plus son caractère populiste. […] Il y a une critique politique négative, parfaitement à sa place dans l’atmosphère spirituelle de Paris, qui consiste à dégager le caractère ridicule ou odieux que comporte ça et là sous tous les régimes le genre de vie politique.

2219. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « PARNY. » pp. 423-470

Le jeune créole, à peine hors des bancs, trahit son caractère vif, enthousiaste et mobile ; il songea d’abord, assure-t-on, à prendre l’habit religieux chez les Pères de la Trappe, et il finit par entrer dans un régiment. […] Le créole de ces deux îles où notre élégie et notre idylle ont eu leur berceau, offre en effet des caractères d’esprit et de sensibilité très-reconnaissables. […] Désiré Laverdant) qui s’est sérieusement occupé de Madagascar, et qui a pris la peine de recueillir quelques chansons malegaches authentiques, nous confirme d’ailleurs dans notre doute, et nous assure que les Chansons madecasses de Parny sont tout à fait impossibles : « Il a inventé, nous dit-on, les nuances de sentiment, les caractères qu’il prête à cet état de société, et jusqu’aux noms propres ; c’est du Parny enfin, du sauvage très-agréablement embelli. » La comparaison de quelques pièces du vrai cru avec celles de Parny, et les considérations piquantes que pourrait suggérer ce rapprochement, nous mèneraient ici trop loin ; nous espérons en tirer matière un jour à un petit chapitre supplémentaire.

2220. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIe entretien. Le Lépreux de la cité d’Aoste, par M. Xavier de Maistre » pp. 5-79

De Vignet resta en arrière ; mais ce fut par défaut de caractère plus que par infériorité d’aptitudes. […] VI Les relations de ses camarades avec lui étaient gênées et souvent épineuses, à cause de ce caractère sombre qui n’y laissait ni sécurité ni égalité. […] Maman avait été assez liée avec elle pour connaître son caractère : ayant très innocemment inspiré du goût à quelqu’un sur qui Mme de Menthon avait des prétentions, elle resta chargée auprès d’elle du crime de cette préférence, quoiqu’elle n’eût été ni recherchée ni acceptée ; et Mme de Menthon chercha depuis lors à jouer à sa rivale plusieurs tours, dont aucun ne réussit.

2221. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre quatrième »

Celle de Pascal n’a point ce caractère. […] Enfin, dans toutes ses pensées mélancoliques, dont quelques-unes semblent capricieuses, et dont aucune n’est indifférente, je reconnais le doute de notre temps, non ce doute des esprits médiocres qui n’est qu’impuissance de penser et de vouloir, mais celui qui est au fond des esprits les plus élevés et des caractères les plus fermes, après deux siècles qui ont vu tant de grandeurs et tant de chutes. […] Le plus grand nombre de ses questions et de ses réflexions a ce caractère de double entente, si plaisant au théâtre, par lequel on blâme ce qu’on paraît approuver, et on loue ce qu’on paraît blâmer.

2222. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Introduction. Le problème des idées-forces comme fondamental en psychologie. »

La conscience, en un mot, est l’immédiation des fonctions intérieures et subjectives ; elle n’est pas l’observation, elle n’est pas la réflexion, elle n’est pas la pensée, elle n’est pas la connaissance ; elle est la fonction psychique considérée dans son caractère de subjectivité irréductible. […] Concluons que la conscience n’est ni une faculté distincte ni un acte distinct ; elle est simplement un caractère commun, constant et immédiat des fonctions psychiques. […] Le caractère d’objectivité qu’une représentation acquiert ne tient pas seulement à son intensité ; il tient aussi à sa détermination qualitative et à la complexité de ses détails.

2223. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1882 » pp. 174-231

Il se plaint spirituellement, que l’inauguration de la statue du grand écrivain du Rire, ait eu le caractère d’une inauguration de statue de Dupont de l’Eure, d’une apothéose de parlementaire vertueux et correct. […] Zola a cette inquiétude agitée, qui est le caractère particulier de sa nervosité. […] Et ce Nancy, dans lequel je courais éperdu, prenait le caractère brouillardeux et immense d’un Londres, et mes compatriotes, auxquels je m’adressais, semblaient ne pas me comprendre.

2224. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

Précisément dans ce qui n’a pas le caractère d’une volonté, laquelle peut être une passion et même l’est toujours. […] Il en est qui sont d’un caractère tellement individuel qu’ils répugnent, qu’ils résistent à s’incarner dans une corporation, ou plutôt que la nature des choses résiste à ce qu’ils le fassent. […] J’en conviens ; mais les insulaires ont en général un autre caractère que ceux du continent, et les mœurs anglaises sont moins molles que celles des autres Européens. […] C’était une suite naturelle de l’organisation judiciaire elle-même et du caractère qu’elle avait pris. […] Son caractère doit être la douceur et la modération.

2225. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Alexis Piron »

« Aimé Piron, dit un biographe bien informé79, avait un grand esprit de prévoyance, et, voulant connaître à fond le caractère de ses trois fils dans leur jeunesse, il les enivra un jour. […] « Il passait cependant pour un bonhomme, nous dit Condorcet, parce qu’il était paresseux, et que, n’ayant aucune dignité dans le caractère, il n’offensait pas l’amour-propre des gens du monde. » Le lendemain donc, le dîner a lieu ; en voici la relation et le bulletin tout au long, car c’est une victoire, et Piron entonne son propre Te Deum : « Chantez tous ma gloire et commencez ainsi le psaume : Je chante le vainqueur du vainqueur de la terre, Binbin qui mit à bas l’invincible Voltaire. […] Mais si vous lisez les lettres de Piron pendant son second séjour à Bruxelles, vous y voyez celui qu’il appelle en public « le grand Rousseau », traité sans respect ni affection, comme un hypocrite et un tartufe, un envieux, un méchant, qui ne dit du bien de personne, comme « un consommé de Panurge et de La Rancune », comme un homme enfin, dont la conduite et le caractère sont des énigmes et la honte des animaux raisonnables : « Il va et vient pourtant, s’ajuste encore soigneusement ; et, malgré la pesanteur et la caducité visible où l’a jeté son apoplexie, il porte une perruque à cadenettes très-coquette, et qui jure parfaitement avec un visage détruit et une tête qui grouille. […] Le caractère de Piron gagne peu à cette confrontation exacte entre ses rimes et sa prose.

2226. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Discours prononcé à la société des visiteurs des pauvres. » pp. 230-304

Sans compter bien des petites douceurs pour papa et maman… Oui, oui, je suis plutôt contente. » Mais il est sans doute dans la destinée et dans le caractère de Lia d’être dupe. […] Cette fois, c’est trop vraiment ; Lia se révolte contre son destin d’éternelle déçue et d’éternelle sacrifiée ; et au pasteur Pétermann qui lui dit : « Tu sais où est la consolation, tu te tourneras vers Dieu, tu prieras », elle répond : « Non, mon père. » À ce moment critique, se présente un lieutenant de hussards, neveu de Dursay, et qui n’a d’autre caractère que d’être lieutenant de hussards, car c’est tout ce qu’il fallait ici. […] Eh bien, oui, je prends à mon compte les aveux de cet excellent, de ce sympathique et sincère pasteur Mikils : « Mon caractère ? […] Leur mauvais caractère nous punit encore des crimes de nos aïeux.

2227. (1890) Causeries littéraires (1872-1888)

Non, il y a encore à craindre, outre l’affaissement de l’esprit, l’affaissement du caractère. […] Alphonse Daudet et le résumé de ses griefs contre l’Académie, griefs nullement personnels, comme vous voyez, ce qui enlève à ces violences tout caractère odieux. […] Et voilà comment cette peinture d’une passion, d’un caractère particulier, ne sera pas, elle non plus, banale. […] Sans doute, il voit dans le succès de sa mitrailleuse la fin de toutes les guerres ; mais cette vue chimérique est déjà un trait de caractère. […] Dumas a pu faire accepter la repoussante figure en tempérant l’odieux du personnage par la légèreté du caractère et l’absence de tout sentiment moral.

2228. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXVIII » pp. 266-276

Cousin, en terminant, conclut : « Selon nous, Pascal est l’exagération de Port-Royal comme Port-Royal est l’exagération de l’esprit religieux du xviie  siècle… » Puis il montre le xviiie  siècle réagissant en sens tout opposé : « Aujourd’hui, dit-il, le xixe  siècle a devant lui la dévotion sublime mais outrée du xviie  siècle, et la philosophie libre mais impie du xviiie  ; et il cherche encore sa route entre ces deux siècles… Son caractère distinctif qui déjà44 commence à paraître, consiste précisément à fuir toutes les extrémités qui jusqu’ici ont séduit et entraîné l’esprit français… Est-il donc impossible de s’arrêter sur la pente des systèmes et de concilier tout ce qui est vrai et tout ce qui est bien ?

2229. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Un cas de pédanterie. (Se rapporte à l’article Vaugelas, page 394). »

Tel est l’usage ; et c’est ainsi qu’à propos de l’École normale dans sa première nouveauté, j’ai été conduit à parler de la « ferveur de la création. » Enfin (et c’est là le seul côté sérieux de la discussion présente) ce docteur, grammairien improvisé, prend pour des fautes de langue ce qui n’est, à vrai dire, que le caractère et la marque d’an style ; il impute à la grammaire ce qui tient à la manière d’un écrivain.

2230. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Poésie — I. Hymnes sacrées par Édouard Turquety. »

Le caractère qui me frappe le plus dans la poésie de M. 

2231. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre IV. La fin de l’âge classique — Chapitre I. Querelle des Anciens et des Modernes »

La Bruyère, dans ses Caractères, soutenait la même cause, et forçait les portes de l’Académie, où son discours de réception était un éclatant hommage aux modernes qui s’étaient mis à l’école de l’antiquité.

2232. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Marcel Prévost et Paul Margueritte »

Je voudrais abréger les quatre-vingts premières pages, celles où l’auteur nous fait connaître son héros, son caractère indécis et fier, son ennui, son désespoir, sa tentative de suicide… Ce sont là choses connues et qu’il était peu utile de répéter.

2233. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mistral, Frédéric (1830-1914) »

Il est la poésie même avec son caractère d’éternité.

2234. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XIV. Moralistes à succès : Dumas, Bourget, Prévost » pp. 170-180

Les caractères, les passions, les nuances des sensibilités, non seulement il les méprise, mais il les ignore.

2235. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Jules Laforgue » pp. 36-47

Jean-Baptiste Rousseau est venu, depuis, se réclamer de l’esprit divin et Vigny a attesté le caractère sacré du poète.

2236. (1890) L’avenir de la science « XI »

Nulle loi, nul règlement ne leur a donné, ne leur ôtera ce caractère qu’ils tiennent de l’histoire.

2237. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre II. Recherche des vérités générales » pp. 113-119

Instituer entre les œuvres des comparaisons multiples, en les rapprochant tantôt d’après tel de leurs caractères, tantôt d’après tel autre, est un infaillible moyen d’étendre ses connaissances.

2238. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Samuel Bailey »

Soyez sûr qu’ici l’investigation infatigable, la minutieuse analyse, la recherche exacte, la distinction attentive des choses qu’on peut confondre, le soin scrupuleux dans l’étude des procédés, la précision à enregistrer les résultats, sont aussi bien placés, aussi fructueux, aussi importants, aussi indispensables, aussi élevés en dignité, si vous voulez, qu’ils le sont (je le dis sans vouloir les déprécier) quand il s’agit de rechercher d’invisibles étoiles, de calculer les millions d’ondulations imperceptibles d’un rayon de soleil, de peser les atomes des éléments chimiques, d’observer les cellules des corps organiques, d’étudier l’anatomie des cousins et des mites, et même de rechercher les caractères spécifiques et les habitudes particulières de mollusques et d’animalcules273. » M. 

2239. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXIX » pp. 319-329

On ne peut reprocher un anachronisme à un Roman historique ; cependant la transposition de certains faits en change tout-à-fait le caractère et leur fait perdre l’importance qu’ils tiennent souvent de leur enchaînement à d’autres qui suivent ou qui précèdent.

2240. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — M. de Voltaire, et l’abbé Desfontaines. » pp. 59-72

Né sans fortune & malheureusement incapable de s’en procurer, étant d’un caractère inquiet, caustique & porté à l’indépendance, il fut réduit à ne vivre que de sa plume ; mais il trouva toujours en elle des ressources qui n’eussent peut-être pas convenu à tout autre.

2241. (1762) Réflexions sur l’ode

Vous en verrez d’excellentes, chacune en leur genre, comme l’ode à la Fortune et l’ode à la Veuve, dont le caractère est absolument différent, quant aux idées, quant au style, quant à la nature même des stances et de la mesure ; et vous viendrez après cela nous tracer des règles.

2242. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’insurrection normande en 1793 »

Malheureusement, Vaultier n’a vu mademoiselle Corday qu’à sa fenêtre, et ce n’est pas assez pour nous renseigner beaucoup sur cette âme profonde, énigme de plus jetée par la silencieuse fierté d’un grand caractère aux vaines disputes des historiens !

2243. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Philippe II »

C’est son caractère particulier, profond, essentiel, absolu, d’être religieuse… Or, Forneron ne l’est pas.

2244. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Lettres portugaises » pp. 41-51

Mais la passion d’une religieuse pour un homme, si elle est possible, doit être quelque chose de terrible, d’inouï, de tragique à faire pâlir Phèdre, et le livre qui l’exprime, s’il est éloquent comme vous le prétendez, doit porter un caractère de désordre, de fatalité, de folie, de douleur à la fois abjecte et sublime, auquel, dans l’histoire des littératures, il n’y a rien à comparer.

2245. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Les honnêtes gens du Journal des Débats » pp. 91-101

Il n’est jamais de mal en bonne compagnie, a dit Voltaire, dans un conte peu honnête, avec cette fascinante légèreté qui fait passer pour spirituels les plus grands sophismes et les plus grandes bêtises de cet esprit pervers et dépravant ; car ce vers, si joli et si souvent cité, a le double caractère de l’erreur complète : il est à la fois bête et faux.

2246. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Taine »

Le caractère de cela, c’est précisément ce que le système nie.

2247. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Dupont-White »

Dans ces conditions d’impénitence finale devant la Critique, l’envoi de la préface avait un caractère qui n’était pas précisément de la sympathie.

2248. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Avant-propos de la septième édition »

Le premier est que l’analyse psychologique doit se repérer sans cesse sur le caractère utilitaire de nos fonctions mentales, essentiellement tournées vers l’action.

2249. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre II. Des éloges religieux, ou des hymnes. »

Il ne faut donc pas s’étonner si les premiers peuples du monde, qui étaient presque tous des peuples pasteurs, et surtout les Orientaux qui, habitant un plus beau climat, doivent plus aimer et sentir la nature, ont donné à leurs éloges religieux un caractère que l’on ne trouve point parmi nous.

2250. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIII. Éloges donnés aux empereurs, depuis Auguste jusqu’à Trajan. »

Dans ces temps de crise, où les gouvernements changent, et où les peuples agités passent de la liberté républicaine à une autre constitution, l’homme d’état a besoin de l’homme d’esprit ; Horace, par le genre du sien, était un instrument utile à Octave ; ses chansons voluptueuses adoucissaient des esprits rendus féroces par les guerres de liberté ; ses satires détournaient sur les ridicules, des regards qui auparavant se portaient sur le gouvernement et sur l’État ; sa philosophie, tenant à un esprit moins ardent que sage, prenant le milieu de tout, évitant l’excès de tout, calmait l’impétuosité des caractères et plaçait la sagesse à côté du repos ; enfin ses éloges éternels d’Octave accoutumaient au respect et faisaient illusion sur les crimes ; la génération, qui ne les avait pas vus, était trompée ; celle qui s’en souvenait, doutait presque si elle les avait vus.

2251. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIV. Panégyrique de Trajan, par Pline le jeune. »

Pour achever de faire connaître le caractère et le genre d’éloquence de Pline, je vais citer quelques pensées détachées de ce panégyrique qui, avec ses défauts, est encore un des ouvrages les plus estimables de l’antiquité.

2252. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre V. Du gouvernement de la famille, ou économie, dans les âges poétiques » pp. 174-185

Leur pouvoir fut armé des terreurs d’une religion effroyable, et sanctionné par les peines les plus cruelles ; c’est dans le caractère de Polyphème que Platon reconnaît les premiers pères de famille67. — Remarquons seulement ici que les hommes, sortis de leur liberté native, et domptés par la sévérité du gouvernement de la famille, se trouvèrent préparés à obéir aux lois du gouvernement civil qui devait lui succéder.

2253. (1865) La crise philosophique. MM. Taine, Renan, Littré, Vacherot

Sans doute, la polémique n’est pas absente des deux phases précédentes, surtout de la première ; mais elle n’en est pas le caractère dominant, et elle y est d’ailleurs plutôt agressive que défensive : c’est le contraire aujourd’hui. […] Renan, et même son talent avec ses trois caractères les plus saillants, l’art, la flamme et la mobilité. […] Déjà l’on voit deux philosophies de caractère très-différent se dessiner l’une en face de l’autre et renouveler, comme on l’a vu à toutes les époques, l’éternelle opposition de l’empirisme et de l’idéalisme : d’une part, une philosophie circonspecte à l’excès, ennemie de toute spéculation métaphysique, n’admettant que les faits constatés, avec leurs rapports, c’est-à-dire leurs lois ; de l’autre, une philosophie idéaliste, ne pouvant consentir à trouver dans les phénomènes les derniers éléments de l’être et de la vie, pénétrant au-delà pour y découvrir la cause, la substance, l’infini, — l’une tout imprégnée de l’esprit des sciences positives, n’admettant que ce qui est démontré et vérifié, l’autre inspirée des hardiesses de l’esprit allemand, mais tempérée par les lumières et la mesure de l’esprit français, — l’une enfin à la recherche du positif, l’autre à la poursuite de l’idéal. […] Si le spiritualisme est vrai, il n’a rien à craindre de cette contre-épreuve, car la vérité ne peut se démentir elle-même ; mais si, dédaigneuse à l’excès de ce qui se passe autour d’elle, la philosophie spiritualiste ne s’apercevait pas de l’empire chaque jour plus étendu que conquièrent les sciences positives dans notre société, et des habitudes d’esprit qu’elles amènent avec elles, il serait à craindre que, même en possédant la vérité, elle ne se vit abandonnée, la plupart trouvant inutile de raisonner pour établir des vérités que le sens commun, le cœur et la foi démontrent suffisamment à leurs yeux, et les autres lui contestant le caractère de science, et opposant à son immobilité les progrès croissants de la physique, des mathématiques et de la chimie. […] Le spectacle de la nature nous offre trois classes d’êtres, ou, si l’on veut, trois degrés d’êtres profondément différents : au premier degré, la matière brute, obéissant à des lois mécaniques, à des combinaisons fatales et mathématiques, se développant en apparence sans raison et sans but ; au second degré, la vie, dont le caractère le plus saisissant est une combinaison de moyens appropriés à une fin, qui manifeste par conséquent l’idée de but et l’idée de choix ; seulement ce choix, dans les êtres vivants, paraît être l’objet d’un instinct aveugle, d’une activité qui s’ignore.

2254. (1923) Paul Valéry

L’effet est le tout ornemental, et l’œuvre prend ainsi lie caractère d’un mécanisme à impressionner un public, à faire surgir les émotions et se répandre les images. » Le passage de la réalité matérielle et vivante à une réalité de rapports qui provoquent des associa-lions, suscitent des sentiments et des idées, nous la trouvons dans l’art ornemental (tout art, par un certain côté, est ornemental), et aussi dans le style. […] Le caractère ambigu et fuyant de leur vers défend la poésie de Mallarmé et de Valéry contre cette expression fixe et cet invariable, leur donne du jeu, leur permet de vivre différemment dans chaque lecteur. […] Non femme parce qu’en effet femme, mais seulement pour porter en lumière, comme le vers et les images eux-mêmes, la figure décorative du poème, et aussi pour lui enlever tout le je, tout le caractère de lyrisme personnel et d’aveu, incompatibles avec l’idée de poésie pure. […] Mais ce qui, de Valéry, éveille dans l’esprit du critique les associations classiques, c’est le caractère à la fois passionné et impersonnel de sa poésie, de son lyrisme. […] La critique qui cherche à ramener à un signe algébrique, à un « caractère » unique, des réalités en apparence si distinctes aurait besoin ici d’une sorte d’idée platonicienne (ou de schème dynamique) du feu.

2255. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

Voilà enfin un trait de caractère. […] Et encore je songe, en écrivant cela, à la traduction même des Caractères de Théophraste ; la suite, les Caractères de La Bruyère ne doivent au grec que ce que l’auteur français en a pris, non par nécessité, mais par superstition. […] le mot même écrit dans l’espace en caractères d’imprimerie, Océan. […] Dès qu’il commence à écrire, Jean-Jacques change de caractère ; sa sensibilité tout entière passe dans son style. […] Albert Samain, qui vient de mourir, eut un caractère assez différent ; il n’est pas familier non plus, mais il est tendre.

2256. (1884) Propos d’un entrepreneur de démolitions pp. -294

Encore que je n’aime guère le temps où je vis, je reconnais en moi plus d’un trait de son caractère, et notamment celui que je condamne le plus Je méprise. […] J’ai trouvé une espèce de feuille automnale, de palimpseste hébraïque, où l’on croirait reconnaître les caractères indéchiffrés d’un très ancien texte samaritain. […] On conçoit très bien que tout puisse être dit à un homme de ce caractère. […] Le fameux critique des Lundis ne se recommandait pas précisément par la beauté du caractère, et quant au talent, nous verrons ce que la postérité de demain en décidera. […] Cette excommunication, spécialement réservée au Souverain Pontife, portait le plus formidable caractère de réprobation et ne pouvait être levée que par lui.

2257. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque (2e partie) » pp. 81-155

Je ne sais trop que vous en dire : son caractère est doux, et les fleurs de son adolescence promettent beaucoup ; j’ignore quel en sera le fruit, mais je crois qu’il sera un honnête homme. […] Cet engouement et ce dédain dureront ce que durent les caprices de la postérité (car elle en a) ; puis viendra une troisième et dernière postérité qui remettra chacun à sa place, Dante au sommet des génies sublimes, mais disproportionnés, Pétrarque au sommet des génies parfaits de sensibilité, de style, d’harmonie et d’équilibre, caractère de la souveraine beauté de l’esprit. […] La beauté, la vertu, la docilité de sa fille et le caractère accompli de son gendre adoucirent les regrets de la mort d’un fils peu digne d’un tel père.

2258. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque (1re partie) » pp. 145-224

Platon fut à Socrate ce que saint Paul fut au Christ ; tous deux écrivent, commentent et développent la doctrine de son maître qui n’a rien écrit, et, ici, il serait curieux peut-être d’examiner pourquoi ni le révélateur d’une philosophie raisonnée, ni le révélateur d’une religion révélée, n’ont pas voulu, ou n’ont pas daigné écrire eux-mêmes une seule ligne, si ce n’est ce doigt sur le sable qui traça des caractères de miséricorde. […] On y retrouve ce double caractère de simplicité et de merveille qui est en général le signe de toute vérité, quand il s’agit des œuvres de Dieu. […] Ce qui donne par-dessus tout son caractère et son autorité à cette philosophie, c’est la conscience, supérieure encore ici à la philosophie.

2259. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIIe entretien. Littérature américaine. Une page unique d’histoire naturelle, par Audubon (1re partie) » pp. 81-159

Nous devons dire à son sujet un mot du caractère et de la littérature de son pays ; un homme n’en est jamais indépendant. […] Voici le portrait qu’il en fait : Le costume mesquin et ridicule de l’Europe ne pouvait déguiser entièrement cette dignité simple et presque sauvage, dont le génie prend le caractère au sein de la solitude qui le nourrit. […] L’alliage, le mensonge de la société n’entrent pour rien dans son caractère et ses mœurs.

2260. (1856) Cours familier de littérature. I « IIIe entretien. Philosophie et littérature de l’Inde primitive » pp. 161-239

C’est là en effet le caractère distinctif de l’homme. […] XXV La grandeur, la sainteté, la divinité de l’esprit humain sont les caractères dominants de cette philosophie dans la littérature sacrée et primitive de l’Inde. […] XXX Mais la douceur envers l’homme et envers toute la nature est le second caractère divin de la philosophie et de la littérature indiennes.

2261. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « III. M. Michelet » pp. 47-96

Quand, après avoir mis une moitié de son être moral dans l’engrenage de cette logique révolutionnaire qui ne lâche plus ceux qu’elle a pris, on met l’autre moitié restante dans la gueule de la bête populaire, à tout crin ou peignée, à laquelle il faut son morceau de mensonge ou sa ration de paradoxes à dévorer tous les matins, l’homme rongé par les deux côtés tombe en lambeaux sous la double force qui le tue ; c’est son talent aujourd’hui, c’est son cœur demain, après-demain c’est son caractère, et il disparaît bientôt tout entier. […] Pourquoi ce Livre d’Or d’une noblesse recherchée et retrouvée dans cette foule que le poète Barbier appelle une sainte canaille et qui est bien au-dessus de tous les blasons du génie, de la gloire et du caractère, privilèges insolents de toutes les grandes personnalités de l’histoire ? […] Michelet, ému jusqu’aux entrailles dans la personne de cette petite Mme Robert, se risque à protester contre le portrait déshonorant qu’en fait Mme Roland dans ses Mémoires, — « ce qui prouve, ajoute-t-il mélancoliquement, que les plus grands caractères ont leurs misères et leurs faiblesses ! 

2262. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XVIII. »

Ce fut un des caractères de l’Église grecque. […] Ce caractère de dévouement intrépide, cette magnanimité religieuse, nous paraît dominer dans un hymne assez long, où le poëte de Cyrène reproduisait le mètre court et rapide de quelques anciens lyriques, de Stésichore et d’Alcée. […] Dieu jettera quelque regard favorable sur l’autel arrosé par le sang du pontife. » Cela même, cette résolution qui fut accomplie, relève singulièrement le caractère du poëte dans l’évêque.

2263. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure »

Mais nous voyons déjà le caractère du Journal de Mathieu Marais ; il s’est plu à consigner par écrit des nouveautés en usant des franchises du vieux langage ; il ne craint pas d’appeler les choses par leur nom, sauf à garder ses historiettes sous clef et, après deux ou trois lectures à huis clos, à les resserrer dans son tiroir. […] Je le crois aussi ; mais, monsieur le voleur, nous avez bien fait, vous ne serez pas puni pour cela, et vous auriez été couronné à Lacédémone. » Il ne tarit pas là-dessus, il est comme notre ami Sacy ; il n’en a jamais assez de la relire : « Je suis enchanté, monsieur, de la manière dont vous parlez des Lettres de Mme de Sévigné ; elles m’ont fait la même joie, et je les relis comme elle relisait les lettres de sa fille, pour faire durer le plaisir. » Sur Mme de Motteville, dont les Mémoires parurent pour la première fois en 1723, on n’a jamais mieux dit que Mathieu Marais sous l’impression toute vive d’une première lecture : « Il n’y a jamais eu ensemble tant de faits secrets, tant de caractères bien marqués, tant de portraits ressemblants et une connaissance si grande de la Cour et des familles.

2264. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres de Virgile »

Le caractère de son commentaire en ce qui est des Bucoliques et des Géorgiques est une grande clarté, une part de grammaire, facilement et largement traitée, sans sécheresse aucune, l’indication rapide des variantes qui ont été proposées, et une certaine part aussi de critique littéraire et admirative que nos voisins d’outre-Rhin n’admettent pas d’ordinaire à ce degré. […] J’aimerais, ai-je dit, que nos éditions françaises des classiques anciens gardassent, tout en se perfectionnant, un caractère français.

2265. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de la Mennais (suite et fin.)  »

Il vaut encore mieux cependant que ce qui l’entoure. » Il a conscience dès lors de son incompatibilité, s’il fonde quelque chose, et du rôle qu’il doit tenir et qui ne peut être celui d’auxiliaire et de second : « Si nous faisons un ouvrage périodique, je suis convaincu qu’il faut que nous en soyons absolument les maîtres, et par conséquent les seuls rédacteurs. » On voit donc qu’avec des idées toutes contraires il a déjà le même caractère qu’il conservera jusqu’à la fin : c’est qu’on peut changer ses opinions et les retourner du tout au tout, on ne change pas son caractère.

2266. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Petite de taille, d’un visage régulier avec de beaux yeux bleus, elle avait quelque chose d’angélique et de puritain, un caractère sérieux et ferme, une sensibilité pure et élevée. […] Il a de plus le charme d’un caractère candide, et les goûts les plus sobres.

2267. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. VINET. » pp. 1-32

Alexandre Vinet se distingua de bonne heure, et par son application, et par des qualités plus en dehors, plus hardies ou plus gaies qu’il semble n’appartenir à son caractère habituel ; mais toute jeunesse a sa pointe qui dépasse à émousser. […] Commençant par ces mots : Le caractère de Voltaire, etc., etc.

2268. (1875) Premiers lundis. Tome III «  À propos, des. Bibliothèques populaires  »

« Je ne ferai rien qui puisse dénaturer le caractère essentiellement public du conflit. […] Les recherches de l’auteur sont attentives ; ses jugements, intègres ; sa prédilection, ardente pour tout effort de justice et d’humanité, pour tout noble caractère, dans quelque parti qu’il se trouve.

2269. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre I »

Une femme avec deux enfants au maillot, « sans lait, sans un pouce de terre », à qui l’on a tué ainsi deux chèvres, son unique ressource, une autre à qui l’on a tué sa chèvre unique et qui est à l’aumône avec son fils, viennent pleurer à la porte du château ; l’une reçoit douze livres, l’autre est admise comme servante, et désormais « ce village donne de grands coups de chapeau, avec une physionomie bien riante »  En effet, ils ne sont pas habitués aux bienfaits ; pâtir et le lot de tout ce pauvre monde. « Ils croient inévitable, comme la pluie et la grêle, la nécessité d’être opprimés par le plus fort, le plus riche, le plus accrédité, et c’est ce qui leur imprime, s’il est permis de parler ainsi, un caractère de souffre-douleur. » En Auvergne, pays féodal, tout couvert de grands domaines ecclésiastiques et seigneuriaux, la misère est égale. […] La chose est à peine croyable, quoique certaine ; on ne peut l’expliquer que par le caractère du paysan français, par sa sobriété, sa ténacité, sa dureté pour lui-même, sa dissimulation, sa passion héréditaire pour la propriété et pour la terre.

2270. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis »

On pourrait excuser sur les mœurs de ce siècle une circonstance qui paraît démentir la gravité du caractère de Côme de Médicis : mais lui-même dédaigna une pareille apologie, et, reconnaissant les erreurs de sa jeunesse, il voulut réparer auprès de la société l’atteinte qu’il avait portée à des règlements salutaires, en s’occupant avec intérêt de donner à son fils illégitime des principes de vertu et une existence honorable. […] En effet, mon cher Laurent, quoique vous ayez donné des preuves d’un mérite et d’une vertu qui semblent à peine appartenir à la nature humaine ; quoiqu’il n’y ait point d’entreprise, si importante qu’elle soit, dont on ne puisse espérer de voir triompher cette prudence et ce courage que vous avez développés dès vos plus jeunes années ; et quoique les mouvements de l’ambition, et l’abondance de ces dons de la fortune qui ont si souvent corrompu des hommes dont les talents, l’expérience et les vertus donnaient les plus hautes espérances, n’aient jamais pu vous faire sortir des bornes de la justice et de la modération, vous pouvez néanmoins, pour vous-même et pour cet État dont les rênes vont bientôt vous être confiées, ou plutôt dont la prospérité repose déjà en grande partie sur vos soins, tirer de grands avantages de vos méditations solitaires ou des entretiens de vos amis sur l’origine et la nature de l’esprit humain : car il n’y a point d’homme qui soit en état de conduire avec succès les affaires publiques, s’il n’a commencé par se faire des habitudes vertueuses, et par enrichir son esprit des connaissances propres à lui faire distinguer avec certitude pour quel but il a été appelé à la vie, ce qu’il doit aux autres et ce qu’il se doit à lui-même. » Alors commença entre Laurent et Alberti une conversation dans laquelle ce dernier s’attache à montrer que, comme la raison est le caractère distinctif de l’homme, l’unique moyen pour lui d’atteindre à la perfection de sa nature, c’est de cultiver son esprit, en faisant entièrement abstraction des intérêts et des affaires purement mondaines.

2271. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre I. Les mondains : La Rochefoucauld, Retz, Madame de Sévigné »

Tandis que La Rochefoucauld dément Corneille, Retz le réalise : toute sa vie, son caractère, ses écrits, sont un commentaire perpétuel et une illustration de la tragédie cornélienne. […] Elle appliqua aux filles le grand principe pédagogique que Port-Royal avait posé : elle voulut faire des caractères droits et des esprits justes.

2272. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Francisque Sarcey »

Celle-ci se fait alors toujours aimer, quoique malheureuse, et celui-là se fait toujours haïr, bien que triomphant. » Le public, au moins dans le drame et dans la comédie sérieuse, entend que le bien ou le mal domine clairement dans la composition d’un caractère (et, à vrai dire, il goûte peu les caractères trop complexes).

2273. (1895) La musique et les lettres pp. 1-84

Invention de caractères, de format, illustrations, le papier d’une époque présenté au chef-d’œuvre constitue un apport propre ou monnayable. […] Quand son initiative, ou la force virtuelle des caractères divins lui enseigne de les mettre en œuvre.

2274. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’expression de l’amour chez les poètes symbolistes » pp. 57-90

L’expression de l’amour chez les poètes symbolistes La génération qui précède immédiatement la génération symboliste s’était signalée par son caractère misogyne. […] Aussi bien il faut étendre ici la signification de symboliste à celle de poète nouveau, sans quoi, étant donné le caractère protéiforme du mouvement, il ne serait plus possible de s’entendre.

2275. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre X. La littérature et la vie de famille » pp. 251-271

Corneille n’avait qu’à transfigurer légèrement les grandes dames qu’il avait sous les yeux pour créer ses héroïnes au caractère impérieux, fait de fierté, d’assurance et de fermeté mâle ; et l’on comprend, que les Sévigné, les femmes qui avaient été jeunes dans l’époque tumultueuse de la Fronde, aient toujours préféré à Racine (chez qui l’homme bien souvent prend sa revanche) celui qu’elles appelaient « leur vieil ami ». […] Cette action permanente que les femmes exercent ainsi, même sans y tâcher, explique bien des caractères de notre littérature  ; mais il me suffit pour l’instant de l’indiquer ; nous la préciserons un peu plus tard en étudiant les effets de la vie mondaine qui est l’intermédiaire ordinaire par où passe cette subtile et puissante influence.

2276. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1859 » pp. 265-300

C’est cela surtout, l’éternité en arrière, que notre pauvre cervelle ne peut imaginer… Et pas une révélation, cela était si facile à Dieu… oui, de grandes lettres dans le ciel, quoi, une charte divine, imprimée clairement en caractères de feu. […] Un portrait où éclate l’esprit de la physionomie, ce caractère tout moderne et qui se lit assez peu dans les portraits du temps de Louis XIV, et même dans la plupart des portraits, au type bovin de la Régence, peints par Nattier.

2277. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre II. Le fond et la forme dans la littérature indigène. »

Caractère fatidique des nombres 3 ou 7 et de leurs multiples. […] — Tous ceux où l’on voit des morts agir n’ont pas ce caractère, à mon avis.

2278. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — La solidarité des élites »

J’entends par la Solidarité des Élites, cette communauté de vision chez des êtres profondément différents d’âge, de race et de caractère, vivant sous les plus dissemblables latitudes, ne se connaissant pas entre eux pour la plupart, mais donnant de l’énigme du monde une solution identique, au fond, malgré les innombrables différences dans l’expression de leur désir. […] Aussi, en disant que Walt Whitman a le premier reconnu pleinement le caractère sacré de toute réalité, qu’il a contemplé d’un œil radicalement nouveau la plus infime partie d’univers, qu’il a enrichi d’un sens divin les plus coutumières actions de nos vies, qu’il a créé le sentiment de pleine confiance et de liberté envers nous-mêmes et envers les autres, qu’il a enfin (et c’est le point capital pour nous) positivement découvert un nouveau de la vie, je n’aurais fait que tracer la pâle esquisse d’une scène géante.‌

2279. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Appendice. [Rapport sur les primes à donner aux ouvrages dramatiques.] » pp. 497-502

En un mot, il a été relevé quelque exagération dans les caractères et des tons trop tranchés.

2280. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la Révolution française — II. La Convention après le 1er prairal. — Le commencement du Directoire. »

Vingt héros, divers de caractère et de talent, pareils seulement par l’âge et le courage, conduisaient ses soldats à la victoire.

2281. (1874) Premiers lundis. Tome I « Diderot : Mémoires, correspondance et ouvrages inédits — I »

La gêne et le besoin, une singulière facilité de caractère, une excessive prodigalité de vie et de conversation, la camaraderie encyclopédique et philosophique, tout cela soutira continuellement le plus métaphysicien et le plus artiste des génies de cette époque.

2282. (1874) Premiers lundis. Tome II « Thomas Jefferson. Mélanges politiques et philosophiques, extraits de ses Mémoires et de sa correspondance, avec une introduction par M. Conseil — II »

Les jugements de Jefferson sur la France et sur la Révolution qu’il avait vue commencer, sont dignes d’être médités et portent à un haut degré l’empreinte du caractère judicieux, circonspect et persévérant que tout nous signale en lui.

2283. (1874) Premiers lundis. Tome II « E. Lerminier. De l’influence de la philosophie du xviiie  siècle sur la législation et la sociabilité du xixe . »

Roland, sans être un homme de génie, était un esprit rare et un plus rare caractère.

2284. (1875) Premiers lundis. Tome III « Profession de foi »

Le titre même du journal avait été choisi en rapport avec ce caractère d’investigation encyclopédique.

2285. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre II. Utilité de l’ordre. — Rapport de l’ordre et de l’originalité »

Qu’il y ait eu des esprits privilégiés dont l’improvisation avait tous les caractères de la méditation, et qui dans le développement spontané de leur pensée gardaient l’ordre exact, la marche régulière, le mouvement égal et continu, qui n’appartiennent ordinairement qu’aux œuvres de patience et de réflexion : je ne le nie pas.

2286. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Guy de Maupassant »

Ce qui est remarquable, c’est que ce drame, de donnée romanesque (par le caractère absolument exceptionnel de la situation et de quelques-uns des sentiments), M. de Maupassant le développe par les procédés du roman réaliste.

2287. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les petites revues » pp. 48-62

Les images ont pour but de faire saillir le caractère d’une chose en les faisant reconnaître dans une autre ; la comparaison, en les détachant, les met en évidence.

2288. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Conclusions » pp. 169-178

Moréas s’était rendu compte que le Symbolisme, utile à son heure, n’offrait que les caractères d’un Art transitoire, et qu’à le suivre inconsidérément, au lieu de s’acheminer à la Terre promise, on risquait de choir dans un cul-de-sac.

2289. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Corneille, et le cardinal de Richelieu. » pp. 237-252

Qu’on ne songe point à Corneille si souvent déclamateur, mais à Corneille unique pour les grands caractères & le sublime de l’héroïsme ; à Corneille élevant le génie de la nation, & s’ouvrant une carrière dans laquelle ses rivaux voulurent l’arrêter, mais dont les efforts réunis ne servirent qu’à lui faire doubler ses pas de géant.

2290. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — L’orthographe, et la prononciation. » pp. 110-124

Cette dispute développa de part & d’autre le caractère ardent & l’impolitesse de quelques écrivains : mais il y en eut pourtant qui s’y engagèrent avec modération, & qui voulurent rapprocher les deux partis.

2291. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre V. Harmonies de la religion chrétienne avec les scènes de la nature et les passions du cœur humain. — Chapitre II. Harmonies physiques. — Suite des Monuments religieux ; Couvents maronites, coptes, etc. »

Il redouble la paix qui m’attache en ces lieux ; Son jour mélancolique, et si doux à nos yeux, Son vert plus rembruni, son grave caractère, Semblent se conformer au deuil du monastère.

2292. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Rome et la Judée »

Enfin, comme appoint à ces trois dissertations historiques, l’auteur de Rome et la Judée finit son volume par un coup d’œil sur les hérésiarques et les imposteurs païens, sur le caractère des manifestations qu’ils provoquèrent, et sur l’Église, lieux communs qu’il n’a pu renouveler.

2293. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « De Cormenin (Timon) » pp. 179-190

une anatomie vivante du pamphlet qui ressemble beaucoup moins à une analyse qu’à un hymne ; mais ce lyrisme en l’honneur du pamphlet, le discours écrit, prouve à quel point cette forme, qui chez lui a le caractère oratoire, mais qui n’est pas nécessairement oratoire, transportait et emportait haut sa pensée.

2294. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Dante »

Quelle que soit la grandeur du maître en poésie qu’il a devant lui, le jeune homme obscur a dit avec une virilité prématurée ce qui lui semblait le vrai sur le Dante tout entier, auteur et homme, et bien loin de le mesurer avec le mètre enflammé de ceux qui en font un génie complexe et presque universel, et un double grand homme aussi auguste par la force du caractère que par la force de la pensée, le critique à ses premières armes a dédaigné ces exagérations, ces italianismes de l’enthousiasme, et il n’a vu dans l’auteur de la Divine Comédie qu’un poète à la manière des plus grands, mais, notez-le bien !

2295. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lessing »

Excepté son ironie avec Voltaire, et qui n’a nullement le caractère sagittaire et apollonien que lui donne Heine dans ses autres ouvrages, Lessing est doux.

2296. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Deltuf » pp. 203-214

Dans Le Mariage de Caroline, c’est la vieille fille encore, mais qui s’est donné la passion maternelle en vivant maternellement avec une nièce, et c’est la jalousie maternelle exaspérée dans le cœur de cette vieille fille, restée vieille fille pourtant par tous les autres cotés de son caractère, que M. 

2297. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « J.-J. Ampère ; A. Regnault ; Édouard Salvador »

C’est un Barnum honnête… Il se contente alors d’inventorier les choses connues sur les Mormons, les sucreries, les Quakers, l’esclavage, le caractère flibustier des américains.

2298. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Conclusion »

Et sans doute, dans la civilisation gréco-romaine, tous ces caractères sont singulièrement moins marqués qu’ils ne le seront dans la civilisation contemporaine : quand ils reparaissent après le moyen âge, ils sont portés à de bien plus hautes puissances.

2299. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre IV. De la méthode » pp. 81-92

En réfléchissant sur les commencements de la religion et de la civilisation païennes, on arrive à ces premières origines, au-delà desquelles c’est une vaine curiosité d’en demander d’antérieures ; ce qui est le caractère propre des principes.

2300. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre IV. Conclusion. — D’une république éternelle fondée dans la nature par la providence divine, et qui est la meilleure possible dans chacune de ses formes diverses » pp. 376-387

Voilà, à ce qu’il semble, le caractère de l’éloquence romaine au temps de Scipion-l’Africain ; mais les états populaires venant à se corrompre, la philosophie suit cette corruption, tombe dans le scepticisme, et se met, par un écart de la science, à calomnier la vérité.

2301. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

Non, il ne pouvait écrire Fana peccatis… ou alors, il pouvait estropier tous les vers également, au même titre d’indication de caractère. […] Paul Bourget porte aux nues Renan non seulement pour son style, mais pour son caractère et pour sa science, ridiculement niée par quelques polémistes. […] Daniel Mornet met en gros caractères les auteurs importants, et les moindres en petit texte. […] Je crois qu’il a mieux saisi que Barrès et que Gabriel d’Annunzio le véritable caractère de sa ville chérie. […] André Gide non seulement un trait de caractère, mais un principe.

2302. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

Ces récits nous montrent des peintures fidèles, exécutées vivement, des caractères au naturel, un pathétique vrai où la passion parle toujours son propre langage. […] Et cette passion, encore que d’un caractère fort élevé, ne laisse pas d’être sensuelle. […] Elles la commentent avec tact et à propos, et savent garder leur propre caractère artistique sans se faire indiscrètes. […] Là-dessus, j’aime à citer l’opinion de Goethe, qui pensait que le caractère du chef-d’œuvre est de se prêter à diverses interprétations. […] Ils avaient sans doute un jeu bien conforme au caractère des ouvrages qu’ils interprétaient.

2303. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre V. La Renaissance chrétienne. » pp. 282-410

. —  Comment les événements bibliques et les sentiments hébraïques sont d’accord avec les mœurs contemporaines et le caractère anglais. —  Le Prayer-Book. —  Poésie morale et virile des prières et des offices. —  La prédication. —  Latimer. —  Son éducation. —  Son caractère. —  Son éloquence familière et persuasive. —  Sa mort. —  Les martyrs sous Marie. —  L’Angleterre est désormais protestante. […] Avec Latimer et ses contemporains, la prédication comme la religion change d’objet et de caractère ; comme la religion, elle devient populaire et morale, et s’approprie à ceux qui l’écoutent pour les rappeler à leurs devoirs. […] C’est son caractère propre de n’être point en opposition avec le monde, mais au contraire de le rattacher à soi en se rattachant à lui. […] L’énergie stoïque, l’honnêteté foncière de la race se sont éveillées sous l’appel de l’imagination enthousiaste ; et ces caractères tout d’une pièce se lancent sans réserve du côté du renoncement et de la vertu. […] On ne trouve dans leur caractère que virilité, dans leur conduite qu’austérité, dans leur esprit qu’exactitude.

2304. (1897) La vie et les livres. Quatrième série pp. 3-401

Depuis la négresse ancestrale jusqu’à l’auteur de la Dame aux camélias, le caractère de la famille s’affine, se précise, s’enrichit. […] Avec ses toits en poivrière et son profil aigu, cette bâtisse résume, en des proportions restreintes, les caractères généraux de deux époques. […] Tous deux laissèrent éclater leur joie et tombèrent d’accord que ces caractères avaient été griffonnés par la main même de Richelieu. […] Dès le collège, son caractère était remarquable par un singulier mélange de fougue conquérante et d’analyse réfléchie. […] Analyser les caractères de vieillards dans Corneille ?

2305. (1908) Après le naturalisme

Toujours l’art des grandes époques, procédant par synthèse, élimina le circonstanciel, l’accident, pour parvenir au caractère essentiel, générique. […] L’arrivisme, le matérialisme sont les caractères apparents d’une crise tellement considérable qu’il ne s’en est pas présenté une semblable parmi les hommes depuis l’époque où la décadence du paganisme ancien nécessita qu’il fût remplacé par une foi nouvelle : le christianisme. […] Ces effets montrent tous les caractères du cosmos. […] Le caractère essentiel de la Littérature sociale : un objectivisme voulu, lui faisait complètement défaut. […] Quelques événements, reconnaissables à leur caractère général, à l’immanence qu’ils contiennent, marquent les symptômes des moments suprêmes.

2306. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff (suite) » pp. 317-378

Quoiqu’écrivain supérieur à Balzac dans la perfection des détails et dans le portrait des personnages, hommes ou femmes, il n’atteignit pas du premier coup la grandeur de son cadre, il ne sut pas ramener comme nos romanciers la diversité des caractères à l’unité dramatique. […] Son mari, ex-procureur du gouvernement, connu, dans son temps, pour un homme retors en affaires, caractère décidé et entreprenant, d’un naturel bilieux et entêté, était mort depuis dix ans. […] Elle était moins bonne que sensible, et avait conservé, à un âge mûr, les défauts d’une pensionnaire ; elle avait le caractère d’un enfant gâté, était irascible et pleurait même quand on troublait ses habitudes ; par contre, elle était aimable et gracieuse lorsqu’on remplissait ses désirs et qu’on ne la contredisait point. […] Nastasia Karpovna était de petite noblesse, veuve et sans enfants ; elle avait le caractère le plus gai et le plus accommodant ; une tête ronde et grise, des mains blanches et douces, une figure avenante, malgré ses traits un peu gros et un nez épaté et de forme assez comique. […] De son vivant je ne l’aimais pas, mais il faut lui rendre justice ; c’était une fille de caractère et d’esprit, — et puis elle ne t’a pas oublié.

2307. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre I. Les Saxons. » pp. 3-71

. —  Influence du climat sur le caractère. […] —  Compilations. —  Impuissance des latinistes. —  Raisons tirées du caractère saxon […] Opposition des races germaniques et des races latines. —  Caractère de la race saxonne. —  Elle persiste sous la conquête normande. Telle est cette race, la dernière venue, qui, dans la décadence de ses sœurs, la grecque et la latine, apporte dans le monde une civilisation nouvelle avec un caractère et un esprit nouveaux.

2308. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxiiie entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff »

En un mot, il n’y a rien de romanesque dans ces pages ; ce sont des études sérieuses et impartiales qui nous initient fidèlement aux habitudes et au caractère du peuple. […] Ce dernier trait de caractère a fourni à l’auteur une de ses meilleures études ; elle est intitulée les Chanteurs, et, ainsi que son titre l’indique, nous y assistons à un concert champêtre qui est plein d’intérêt. […] Ces hommes ont un caractère à part qui leur vaut à la fois la vénération de leurs compatriotes, l’idolâtrie des femmes et les railleries des ignorants. […] Ses principaux caractères sont la finesse, la vérité, l’étrangeté.

2309. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIe entretien. L’homme de lettres »

On sent que le désir de s’élever donnait des vertus à son âme, et de l’énergie à son caractère. […] Son caractère était pur, candide et enthousiaste. Amant de la gloire de loin, comme des choses qui brûlent en éblouissant, sa figure portait le témoignage de son caractère ; il était grand, fort, élancé ; ses traits, pris séparément, n’étaient pas délicatement irréprochables, mais vus de distance ils étaient imposants, doux et fiers ; ses membres souples, sa démarche libre et noble. […] Les caractères vifs, sur lesquels glissent les peines légères, sont ceux qui résistent le moins aux grands chagrins.

2310. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1866 » pp. 3-95

Il règne, dans ce temps, une fureur impitoyable de vérité qui éclate avec ses caractères les plus frappants dans ces drôleries à froid, dans ce déshabillé de la basse humanité du xixe  siècle. […] Alors je me mets à crier et à m’emporter plus fort que lui, avec tout le soulèvement des nerfs que je commence à éprouver pour cet homme de talent, mais sans opinion à lui, et toujours l’humble serviteur d’une opinion consacrée, et dont la voix baisse et dont la colère prend des tons pleurards, quand il rencontre un caractère qui montre les dents. […] Il nous parle longuement du moderne qu’il veut faire d’après nature, du caractère sinistre qu’il y trouve, de l’aspect presque macabre qu’il a rencontré chez une cocotte, du nom de Clara Blume, à un lever de jour à la suite d’une nuit de pelotage et de jeu : — un tableau qu’il veut peindre, et pour lequel il a fait quatre-vingts études d’après des filles. […] voilà mon caractère ! 

2311. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1895 » pp. 297-383

Jeudi 31 janvier À la fin de la soirée, arrive Helleu, qui a passé toute la journée à peindre par ce froid, les statues de Versailles, à demi ensevelies sous la neige, parlant de la beauté de spectacle et du caractère de ce monde polaire. […] Et son intention est de peindre sa Jeanne d’Arc au bord de la Loire, sur un cheval blanc, éclairée par le soleil couchant : une Jeanne d’Arc ayant le caractère d’un bas-relief. […] Mais sur cette pierre, il y avait des caractères qui intriguaient la comtesse. […] ces deux inspirations mal mariées, et donnant à notre premier livre, le caractère d’une œuvre à deux voix, à deux plumes.

2312. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome xviii » pp. 84-92

Le spectacle d’hommes remarquables par le caractère, l’intelligence, le talent, pensant différemment les uns des autres, se le disant vivement, rivaux sans doute, mais rivaux pas aussi implacables que ces généraux qui, en Espagne, immolaient des armées à leurs jalousies ; occupés sans cesse des plus graves intérêts des nations, et élevés souvent par la grandeur de ces intérêts à la plus haute éloquence ; groupés autour de quelques esprits supérieurs, jamais asservis à un seul ; offrant de la sorte mille physionomies, animées, vivantes, vraies comme l’est toujours la nature en liberté ; — ce spectacle intellectuel et moral commençait à saisir et à captiver fortement la France.

2313. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers, Tome xix. (L’île d’Elbe, — L’acte additionnel. — Le champ de mai.) » pp. 275-284

Lanfrey, un jeune critique de mérite, a, dans une revue, porté un jugement des plus sévères sur l’ensemble de l’ouvrage, et il a particulièrement insisté sur l’absence d’un certain caractère, d’un certain cachet à la Tacite.

2314. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Hommes et dieux, études d’histoire et de littérature, par M. Paul De Saint-Victor. »

Ce qui est certain, c’est qu’à tout instant son expression illumine et grave les caractères.

2315. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « en tête de quelque bulletin littéraire .  » pp. 525-535

Tout ceci est pour dire que les écoles littéraires sont dissoutes depuis huit ans, que les limites et les garanties de caractère autour des plus nobles talents ont cédé brusquement ou graduellement à je ne sais quelle force de choses confondante et dissolvante.

2316. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre II. Distinction des principaux courants (1535-1550) — Chapitre II. Jean Calvin »

Caractère de l’homme.

2317. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Réponse à M. Dubout. » pp. 305-316

Et, pour en pouvoir exprimer votre immense dépit, non seulement par un papier public, — de quoi se fût contenté tout autre que vous, — mais dans des conditions choisies par vous, sous la même couverture où parurent les pages honnêtes qui vous ont fait saigner, et « à la même place et dans les mêmes caractères typographiques », vous avez dépensé plus d’obstination et plus d’énergie qu’il n’en faut pour faire son salut.

2318. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Musset, Alfred de (1810-1857) »

Sans barbe alors, et tout resplendissant d’une grâce juvénile, ce nez aquilin trop long et trop busqué, d’un caractère si étrange et hardi, ces yeux ingénus et profonds, cette petite bouche aux lèvres amoureuses, faites pour les baisers, ce puissant menton byronien, et surtout ce large front modelé par le génie, et cette épaisse, énorme, violente, fabuleuse chevelure blonde, tordue et retombant en onde frémissante, lui donnent l’aspect d’un jeune dieu.

2319. (1894) Propos de littérature « Chapitre Ier » pp. 11-22

Cette opposition, qu’on retrouverait aussi dans le caractère des deux hommes, me paraît assez nettement sensible pour que, au long des pages de cette étude, je ne croie pas nécessaire de la rappeler chaque fois qu’elle peut se sous-entendre ; je n’indiquerai que sommairement en elle la cause des oppositions secondaires de méthode, de réalisation lyrique et plastique et de technique de MM. de Régnier et Griffin.

2320. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VI. La commedia sostenuta » pp. 103-118

Riccoboni nous apprend, par exemple, que la Emilia, de Luigi Groto, surnommé l’aveugle d’Adria, cette pièce qui a fourni à Molière plusieurs des caractères et des situations de L’Étourdi, servait fréquemment de canevas aux acteurs de la comédie improvisée19.

2321. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XV. La commedia dell’arte au temps de Molière et après lui (à partir de 1668) » pp. 293-309

Giraton entreprit de restaurer ce type fameux de Pedrolino ou Pierrot ; il lui rendit son ancien caractère, à la fois niais et badin, son bon sens mélangé de sottise et de crédulité, et il eut un très grand succès.

2322. (1890) L’avenir de la science « I »

Mais ce qui pourra devenir possible dans une forme plus avancée de la culture intellectuelle, c’est que le sentiment qui donne la vie à la composition de l’artiste ou du poète, la pénétration du savant et du philosophe, le sens moral du grand caractère, se réunissent pour former une seule âme, sympathique à toutes les choses belles, bonnes et vraies, et pour constituer un type moral de l’humanité complète, un idéal qui, sans se réaliser dans tel ou tel, soit pour l’avenir ce que le Christ a été depuis dix-huit cents ans  un Christ qui ne représenterait plus seulement le côté moral à sa plus haute puissance, mais encore le côté esthétique et scientifique de l’humanité.

2323. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Japonisme » pp. 261-283

Puis comme Hayashi cherchait dans sa mémoire, s’il connaissait quelque détail biographique sur Otaka, ses yeux s’arrêtant sur la demi-page de caractères gravés au-dessus du guerrier, il s’écria : « Mais sa biographie… la voici ! 

2324. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Odes et Ballades » (1822-1853) — Préface de 1824 »

En effet, si, après une révolution politique qui a frappé la société dans toutes ses sommités et dans toutes ses racines, qui a touché à toutes les gloires et à toutes les infamies, qui a tout désuni et tout mêlé, au point d’avoir dressé l’échafaud à l’abri de la tente, et mis la hache sous la garde du glaive ; après une commotion effrayante qui n’a rien laissé dans le cœur des hommes qu’elle n’ait remué, rien dans l’ordre des choses qu’elle n’ait déplacé ; si, disons-nous, après un si prodigieux événement, nul changement n’apparaissait dans l’esprit et dans le caractère d’un peuple, n’est-ce pas alors qu’il faudrait s’étonner, et d’un étonnement sans bornes ?

2325. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — De la langue Françoise. » pp. 159-174

Une société de précieuses établie à Paris, y avoit mis en mode un jargon ridicule analogue à leur caractère, une façon romanesque de s’exprimer, une affeterie continuelle, un ton hors de nature, & qu’elles appelloient celui de la bonne compagnie.

2326. (1682) Préface à l’édition des œuvres de Molière de 1682

Il n’était pas seulement inimitable dans la manière dont il soutenait tous les caractères de ses Comédies ; mais il leur donnait encore un agrément tout particulier par la justesse qui accompagnait le jeu des Acteurs ; un coup d’œil, un pas, un geste, tout y était observé avec une exactitude qui avait été inconnue jusques-là sur les Théâtre de Paris.

2327. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre huitième. »

Et quand La Fontaine ajoute qu’il s’amuserait du conte de Peau-d’âne, il peint les effets de son caractère.

2328. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Baudouin » pp. 198-202

Encore si le mauvais choix des tableaux de Baudouin était racheté par le dessin, l’expression des caractères, un faire merveilleux ; mais non, toutes les parties de l’art y sont médiocres.

2329. (1799) Jugements sur Rousseau [posth.]

Rousseau ; c’est là, selon l’opinion publique, le caractère distinctif de ses ouvrages, c’est là ce qui en fait le succès, c’est là ce qui le fait préférer par bien des lecteurs à tous nos écrivains, sans en excepter aucun.

2330. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Le Christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet »

Entrepris dans un but de propagande religieuse, — l’auteur était lazariste, — ces voyages, dont nous avons rendu compte avec une sympathie presque enthousiaste, car, à part de leur but, le plus grand que puisse atteindre l’homme, ils prouvaient autant de caractère, de décision, de persévérance que de curiosité élevée ; ces voyages, qu’il faudra désormais citer quand on parlera de l’Asie, ont mis pour la première fois dans la circulation des notions certaines sur ces mystérieuses populations qui vivent et meurent depuis tant de siècles comme des fourmilières d’insectes dans des boîtes fermées, sous le couvercle semé d’hiéroglyphes de leurs impénétrables civilisations.

2331. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Charles Monselet »

C’est justement le fossoyeur d’Hamlet, — un aimable et solide garçon, un good fellow s’il en fut oncques, et qui en vieillissant a continué de plaisanter, mais à la plaisanterie duquel l’habitude de creuser des trous dans la terre et d’y mettre ou d’en ôter des morts a donné une profondeur et un caractère très particuliers, mais puissants… Eh bien, est-ce que le temps du rieur d’Hamlet, de ce creuseur de fosses qui voit toutes les espèces de creux, serait arrivé pour Monselet, ce travailleur aussi après décès, comme le fossoyeur de Shakespeare ?

2332. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Paul de Saint-Victor » pp. 217-229

On n’y sent pas l’insupportable oppression des notes, et l’imagination, qui n’a pas ce plomb sur la gaze de ses ailes, les y étend de toute leur longueur, III Car l’imagination, c’est la grande puissance de Saint-Victor, c’est le caractère original et supérieur de son livre.

2333. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution d’Angleterre »

de l’Histoire, qui est bien le caractère de la pensée historique de notre temps.

2334. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Léopold Ranke » pp. 1-14

Il a essayé de cacher le secret de son âme, le rayonnement de son opinion intime, sous une forme impartiale et dégagée, et à l’instant même le livre qu’il a écrit a perdu tout caractère, et l’ancien talent de Ranke, on se demande… où il a passé ?

2335. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « W.-H. Prescott » pp. 135-148

Mais c’est, surtout, quand il s’agit de l’homme redoutable envers lequel il était si facile à un écrivain comme Prescott d’être injuste, que ses paroles deviennent, à force d’impartialité, d’un grand poids : « Nous frémissons, — (je ne crois pas qu’il frémisse beaucoup, cet homme de race anglo-saxonne, fils de boucanier et de flibustier, mais passons-lui ce petit sacrifice à la rhétorique), — nous frémissons en regardant un tel caractère, — (il s’agit du monstrueux duc d’Albe), — mais, nous devons l’avouer, il y a quelque chose qui provoque notre admiration dans cette rigueur, dans cette inflexibilité, dans ce mépris de toute crainte et de toute faveur avec lesquels cette nature indomptable exécute ses plans !!! 

2336. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Silvio Pellico »

S’il aima son pays, ce fut bien plus avec la tendresse d’un enfant inquiet qu’avec la vigueur d’un grand caractère.

2337. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « L’abbé Galiani »

Si la nostalgie de Paris n’avait pas poussé le pauvre Galiani à jeter des lettres dans ce tombeau où les lettres arrivent , disait si mélancoliquement Madame de Staël de l’absence, il ne se serait pas endormi sous le bleu du ciel de Naples comme les lazzaroni de ses bornes, car il n’avait rien du lazzarone, cet homme d’éther et de phosphore, mais il aurait, avec cette dextre souplesse qui est le caractère de son genre de génie, rempli stoïquement les hautes fonctions économiques, financières, administratives et judiciaires auxquelles le gouvernement napolitain l’appela pour lui faire oublier sa disgrâce d’un jour.

2338. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VI. Jules Simon »

Dans l’état actuel du journalisme et de nos mœurs, une réclame quelconque ne saurait étonner personne, mais celle-ci avait du caractère, et d’ailleurs, qui sait ?

2339. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXVII. Silvio Pellico »

S’il aima son pays, ce fut bien plus avec la tendresse d’un enfant inquiet qu’avec la vigueur d’un grand caractère.

2340. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Francis Lacombe »

Maîtrisé par l’idée spéciale de son livre, il a passé vite sur tous les caractères qui distinguent le monde moderne de l’ancien monde ; car il n’y a qu’une grande division en histoire, et c’est la croix de Jésus-Christ qui l’a faite.

2341. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Chastel, Doisy, Mézières »

C’est un livre de médiocrité sérieuse, voilà tout, une espèce d’almanach du Bonhomme Richard, qui paraîtra de l’économie politique, domestique ou morale, à tous les esprits qui s’imaginent que, dès que l’élévation manque dans les choses de la pensée et du caractère, il y a immédiatement du bon sens.

2342. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Barthélemy Saint-Hilaire »

Il n’a fallu rien moins, pour m’apaiser, que la supériorité absolue du Mémoire (car c’en est un) de Barthélemy Saint-Hilaire ; de ce chef-d’œuvre de critique impartiale, juste et presque généreuse, dont le double caractère est d’augmenter, par la manière dont il les expose et par le parti qu’il en tire, le désir de lire ces histoires, et de pouvoir en dispenser.

2343. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Émile Augier, Louis Bouilhet, Reboul »

Si nous choisissions nos sujets de critique, s’il nous était loisible de faire planer seulement notre examen sur les ouvrages considérables ayant réellement une importance, soit dans le bien, soit dans le mal, nous ne parlerions jamais d’une foule de productions sans portée et sans caractère.

2344. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Vigny. Œuvres complètes. — Les Poèmes. »

C’est un observateur, c’est un moraliste, c’est un inventeur à tout autre titre qu’au titre de poète, c’est un historien, c’est un romancier, c’est enfin un de ces esprits marqués du caractère essentiellement moderne, qui ont fait vibrer sous leur main un grand nombre de faits, de sentiments et d’idées, et chez qui l’imagination est devenue encyclopédique comme la mémoire.

2345. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Henri Murger. Œuvres complètes. »

II C’est en effet le caractère du talent de M. 

2346. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Pécontal. Volberg, poème. — Légendes et Ballades. »

Siméon Pécontal, avec le don de simplicité qui est le plus précieux caractère de son talent et cette fraîcheur d’âme dont, à plusieurs places de son Volberg, on avait vu resplendir les teintes frissonnantes et nacrées, devait préférer la ballade à toutes les autres formes de la pensée poétique.

2347. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Henri Heine »

Henri Heine I Il y a un certain nombre d’années déjà que la première partie d’une Correspondance de Henri Heine (complétée en 1877) a été publiée, et, il faut en convenir, ces deux premiers volumes de Correspondance ne grandissaient pas Henri Heine comme talent et le diminuaient comme caractère.

2348. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — L’arbitrage et l’élite »

On la trouve pour la première fois chez nous, en 1888, avec un caractère général est permanent, dans un traité avec l’Équateur… Le 9 juillet 1884, une Union était constituée entre onze États pour la protection de la propriété industrielle ; deux ans après à Berne, dix grands États d’Europe organisaient l’Union internationale pour la propriété littéraire et artistique, avec un bureau commun, chaque État assurant, par ses lois et ses tribunaux intérieurs, la répression des infractions.

2349. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXV. Des éloges des gens de lettres et des savants. De quelques auteurs du seizième siècle qui en ont écrit parmi nous. »

Mais ce qu’il ne faut pas oublier, c’est que cet homme qui avait de la douceur dans le caractère, comme de la grâce dans le style, et qui avait été témoin de la Saint-Barthélemi en France, dans des phrases élégantes et harmonieuses, en parle non seulement avec tranquillité, mais avec éloge.

2350. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Alfred de Vigny. »

Quoique bien novice et inexpérimenté alors en matière d’histoire et en jugement politique, quoique mal édifié sur la vraie grandeur de Richelieu, j’en savais assez déjà pour relever dans cet ingénieux roman la fausseté de la couleur, le travestissement des caractères, les anachronismes de ton perpétuels : non, quoi que de complaisants amis pussent dire, non, ce n’était pas là du Walter Scott français ; M. de Vigny n’eut jamais, pour réussir à pareil rôle, la première des conditions, le sentiment et la vue de la réalité, — j’entends aussi cette seconde vue qui s’applique au passé. […] Le caractère et les termes en sont tout mystiques. […] Quelques observations furent faites, qui n’avaient aucune intention blessante, ni aucun caractère d’hostilité ni d’aigreur : elles portèrent uniquement sur l’exactitude de certains faits et de certaines interprétations historiques.

2351. (1875) Premiers lundis. Tome III « Du point de départ et des origines de la langue et de la littérature française »

Néanmoins ses données sont en général fort exactes, et j’en ai souvent profité. « Les règles grammaticales étaient les mêmes pour tous les dialectes de la langue d’oïl : tous, sans exception, étaient régis par la même grammaire. « Après avoir posé cette règle générale, Fallot divise le vieux langage français en trois dialectes principaux, qu’il nomme non point du nom d’une province dans laquelle ils fussent exclusivement parlés, mais du nom de celle dans le langage de laquelle leurs caractères se trouvent le plus saillants, le mieux réunis et le plus complètement en relief : normand, picard, bourguignon. […] Fallot avait reconnu que les caractères distinctifs du dialecte de telle province se retrouvaient, avec quelques différences secondaires, dans les dialectes de plusieurs autres ; il a fait de celui-là une espèce de type auquel il a rapporté les autres. […] Et pour tout dire, quand même l’Empire, au lieu de succomber sous l’effort de ses ennemis et d’être en proie à une longue invasion, eût continué à exister ou se fût dissous par la seule réaction des éléments contenus en son propre sein, le latin ne s’en serait pas moins transformé en langues romanes avec tous les caractères qu’elles possèdent.

2352. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVe entretien » pp. 317-396

Il n’a pas fallu faire une seule brochure pour le prouver. » « Les lettrés de la dynastie des Han, dit Tchin-tsée, ont écrit plus de trente mille caractères pour expliquer les deux premiers mots du Chou-king. […] Par là un empereur, sans être savant, jouit de tout l’éclat que la science et l’érudition peuvent répandre sur l’administration publique, n’est pas exposé à prendre une répétition pour un coup de génie, ne court pas le danger de se méprendre dans ce qu’il avance, et parle toujours avec une dignité imposante dans tous les actes publics. » VIII « Des lettrés, renommés par leur science des annales de l’empire et par la fermeté de leur caractère, tiennent registre secret des actes du gouvernement dans le palais même du prince. […] Dans cette salle de l’intérieur du palais, qui est nommée salle des purifications, il y a un tableau dont l’inscription porte ces quatre caractères : véritable grandeur, brillante gloire.

2353. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLe entretien. Littérature villageoise. Apparition d’un poème épique en Provence » pp. 233-312

Le ciel azuré du Midi est coupé crûment par ces rochers ; ce firmament a ces tristesses splendides qui sont le caractère de la Sabine ou des Abruzzes. […] Le poète trace rapidement en traits proverbiaux du pays le portrait du beau villageois ambulant et son caractère. […] Raymond refuse sa fille au vannier, à table, dans une scène de caractère digne de la plus haute comédie ; scène où le pathétique se mêle au comique, dans un entretien qu’avouerait Molière.

2354. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Troisième partie de Goethe. — Schiller » pp. 313-392

Cette fraternité complète, entre deux gloires dont l’une pouvait offusquer ou éclipser l’autre, est, après l’amitié de Virgile et d’Horace, un des plus beaux exemples de cette supériorité de caractères préférable mille fois à la supériorité de l’esprit. […] La sérénité de son esprit, la noble gravité de sa parole, la profondeur de ses connaissances historiques et la chaleur tempérée de son enthousiasme nous ont donné une idée du caractère de Goethe, son ami. […] Le caractère éminemment pensif de cette race germanique lui donne le temps de mûrir ses idées ; elle est lente comme les siècles et patiente comme le temps ; jamais cette race pensive et même rêveuse n’a été assimilée aux idées et aux langues de ces races grecques et latines comme l’Italie, l’Espagne, le Portugal et nous, qui dérivons d’Athènes ou de Rome ; l’Allemagne dérive de l’Inde et du Gange ; elle parle une langue consommée, savante, circonlocutoire, mais d’une construction et d’une richesse qui la rendent propre à exprimer toutes les images et toutes les idéalités de la poésie ou de la métaphysique.

2355. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIIe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin » pp. 225-319

La confidence est le sceau de la vérité : et que l’on confie à Dieu, à soi-même, à quelque amitié obscure, sans penser qu’aucun regard, aucune oreille interposée n’en dérobera rien pour le redire au monde, a un caractère d’intimité et de sincérité qui en centuple le prix. […] D’un caractère tendre, d’une humeur très douce, d’une abnégation complète en ce qui ne concernait que lui, il s’était consacré exclusivement, par devoir et par affection, à l’éducation de ses chers enfants. […] Mademoiselle de Guérin avait vingt-huit ans ; elle n’était pas jolie, selon le vulgaire, bien que les yeux, où se reflète le génie, la bouche, où s’épanouit la bonté, le contour harmonieux et délicat du visage, qui encadre le caractère, les cheveux, grâce de la figure, la taille svelte et souple, qui fait ressortir les formes du corps, la vivacité de la démarche, qui transporte la personne avec la rapidité de la pensée, fissent de cet ensemble un aspect très agréable, plus que suffisant au bonheur d’un époux.

2356. (1922) Enquête : Le XIXe siècle est-il un grand siècle ? (Les Marges)

Au reste, du point de vue strictement national où se placent inconsciemment tant de bons esprits, il est vrai que d’autres siècles, notamment le xviie , offrent un caractère spécifiquement français, tandis que le xixe présente un caractère proprement humain. […] Pour mon sentiment personnel, la littérature française du xixe  siècle me paraît triste et amère ; c’est le caractère de ce siècle en France, les Français ont cessé de sentir la joie, au contraire de la génération de la Révolution.

2357. (1890) L’avenir de la science « XVII » p. 357

Mais je mets en fait qu’il n’y en a pas encore eu un seul de la sorte, et peut-être même ce caractère est-il en dehors des conditions de l’humanité. […] Le caractère des révolutionnaires est très complexe, et les explications trop simples qu’on en donne sont arguées de fausseté par leur simplicité même. […] Nous n’avons pas plus raison les uns que les autres ; vous êtes plus nombreux, nous sommes plus forts, essayons. » C’est qu’un tel milieu n’est pas normal pour l’humanité ; c’est que la raison seule, c’est-à-dire le dogme établi, donne le droit de s’imposer, c’est que le nombre est en effet un caractère tout aussi superficiel que la force ; c’est que rien ne peut s’établir que sur la base de la raison.

2358. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « IX »

. — Le thème principal de la Chevauchée des Walküres, par exemple, et la mélodie que le jeune Siegfried joue sur son cor sont de cette époque (Tappert), quoique les drames dans lesquels ils apparaissent maintenant pour la première fois et dans lesquels ils acquièrent leur caractère particulier et leur signification poétique n’existassent point à ce moment. — Des lettres de 1849 et 18 50 nous montrent Wagner impatient de se mettre à la partition de sa Mort de Siegfried, dont, dit-il, « la musique lui démange les doigts ». — De suite après avoir écrit son Jeune Siegfried, en 1851, il se mit à la musique, et nul doute que de nombreuses parties du premier acte et du second de notre Siegfried sont, pour la déclamation et pour le dessin mélodique général ; de cette année. […] Schuré (je parle du second volume), un certain caractère de précision analytique. […] Jullien trace de Wagner, de sa vie, de son caractère, l’énoncé qu’il fait ce ses théories, l’analyse qu’il donne de ses œuvres, les jugements qu’il porte à chaque moment… tout est faux, archi-faux !

2359. (1909) De la poésie scientifique

Moréas paraphrasait ainsi : « L’idée ne doit point se laisser voir privée des analogies extérieures : car le caractère essentiel de l’art Symbolique consiste à ne jamais aller jusqu’à la conception de l’idée en soi. » C’était redire que l’idée devait demeurer en valeur d’image. […] Ainsi que tout fragment soit semblable aux éclats du miroir brisé, qui reflètent encore l’unique étendue du ciel. « Il est un sens universel en tout caractère », a dit Goethe C’est là le sens universel de la « Poésie scientifique », telle qu’elle se présente, comme de principe impersonnel, en point de départ des orientations les plus personnelles et le plus lointainement évoluantes pour les poètes persuadés que la Poésie doive devenir l’émotion suprême de la connaissance et de la conscience humaines. […] Oui, d’énergie lente et comme en dessous des pensées qui s’en pénètrent comme en sub-conscience, quelque chose est venu  pour qu’après tous ses avatars, Brunetière ait dit ceci, si résumant : «  S’il y a une tendance qui s’affirme de notre temps, c’est celle de comprendre que l’homme n’est pas la mesure de toutes choses, mais qu’au contraire il n’est rien qu’un point sur la planète, qui n’est elle-même qu’un point dans l’espace34… » Brièvement parmi les principaux poètes de non-commune valeur et de caractère, notoires où trop nouveaux-venus encore, depuis une dizaine d’années, nous avons noté, de leurs œuvres et leurs dires, en notre Avant-propos, ceux qui s’orientent pleinement ou partiellement ou de tendance seulement, selon les principes de la Poésie scientifique35.

2360. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1857 » pp. 163-222

7 avril Nous dînons chez Broggi, à côté d’un petit vieillard à cheveux blancs, qui est un des grands, des purs, des beaux caractères de ce siècle, asservi à l’argent. […] Un homme admirable, après tout, ce Paul de Kock, pour avoir appris au public la révolution des légendes Pitt et Cobourg, pour avoir immortalisé poncivement tous ces types consacrés qui traînent dans les mémoires idiotes, toutes ces vieilles connaissances du préjugé populaire, tous ces personnages du drame salé de gros rires et de larmes bêtes : l’émigré hautain, le jeune républicain sentimental, platonique et honnête, la femme, adultère déesse de la liberté, le portier dénonciateur dont le caractère moral est une queue de renard à son bonnet… Oh ! […] 23 août Murger nous dit l’oraison funèbre de Planche par Buloz : « J’aimerais autant avoir perdu 20 000 francs. » La vérité est que le vieux Buloz versa de vraies larmes sur son ami, qui a pu avoir l’horreur de l’eau, mais qui a été un caractère noble et désintéressé.

2361. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1868 » pp. 185-249

des caractères ! […] Au milieu du fatras d’une publication de spéculation, il y a d’admirables tableaux, des renseignements sans prix sur la formation d’une imagination d’écrivain, des portraits de caractères saisissants, des scènes merveilleusement dites, comme la mort xviiie  siècle de sa grand-mère et son héroïsme douillet, comme la mort si parisienne de sa mère : des scènes, qui arrachent l’admiration et quelquefois les larmes. […] 24 décembre Nous avons plaisir à retrouver Flaubert, et dans notre trio d’ours et de solitaires ensauvagés, nous soulageons nos mépris, nos indignations, sur tous les abaissements présents, les misères des caractères, la déchéance et la domesticité des lettrés, nos camarades.

2362. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1869 » pp. 253-317

Car cela, à quoi nous avons donné la netteté et le caractère, ne serait jamais sorti du savant, frappé du style et de l’osé de notre plume, — car il aurait eu, devant le papier, les timidités baveuses et les corrections un peu intimidées, qu’il nous a envoyées, en marge de nos épreuves. […] — Nous nous rendons bien compte aujourd’hui que dans un caractère, dans un type, dans un personnage de roman, il faut un alliage de faux pour le faire accepter de la sympathie du public. […] C’est ainsi qu’on trouvera fort bien traités, des gens qui ont été féroces pour nous, et qu’on trouvera des laudateurs, auxquels nous ne trouvions pas de talent ou dont nous avions lieu de mépriser le caractère, — littéralement exécutés.

2363. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre IX : Insuffisance des documents géologiques »

J’ai eu moi-même de la difficulté, en considérant deux espèces quelconques, à ne pas me représenter leur souche commune comme présentant des caractères exactement intermédiaires entre l’une et l’autre ; et cependant une telle supposition serait complétement erronée. […] Mais il ne faut pas oublier non plus que A peut avoir été le progéniteur de B et de C, et cependant n’être pas exactement intermédiaire entre eux dans tous ses caractères. […] Quelques-uns des fossiles siluriens les plus anciens, tels que le Nautile, la Lingule, etc., ne diffèrent que très peu des espèces vivantes ; et, d’après ma théorie, on ne saurait supposer que ces anciennes espèces aient été les ancêtres de toutes les espèces des ordres auxquels elles appartiennent, car elles ne présentent nullement des caractères intermédiaires entre les diverses formes qui ont depuis représenté ces ordres.

2364. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

Le caractère de Géfosse est fouillé jusqu’aux replis, et les hésitations, le trouble, la lutte et la chute finale de sa maîtresse sont déduits avec une logique supérieure9. […] Sa misanthropie est d’un caractère à part. […] L’Idée, à son tour, ne doit point se laisser voir privée des somptueuses simarres des analogies extérieures ; car le caractère essentiel de l’art symbolique consiste à lie jamais aller jusqu’à la conception de l’Idée en soi… ». […] Ils n’admettent pas que l’écrivain puisse pétrir à son gré la réalité, inventer des caractères, interpréter la nature et l’embellir. […] Entre leurs mains, le roman revêt un caractère purement psychologique ; l’analyse y remplace l’invention ; l’observation patiente des milieux y tient lieu des belles imaginations.

2365. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

Mais celle-ci a un caractère de gentillesse et d’élégance, quelque chose d’hospitalier, de joyeux et, si vous voulez, de très agréablement forain. […] Si vous croyez, par exemple, que l’on connaît Renan, que l’on se fait une idée juste de sa personne et de son caractère ? […] L’aîné, de caractère sérieux, voudra être comédien comme vous. […] Sa présence officielle suffit à altérer profondément le caractère des spectacles auxquels il assiste. […] C’est là un de ces petits traits qui vous renseignent sur un caractère aussi bien que de grandes actions.

2366. (1873) Molière, sa vie et ses œuvres pp. 1-196

Ce sont ces séjours en province, l’étude qu’il faisait des mœurs, des traditions, des caractères et même du langage, des patois de la province, qui permirent à Molière de mettre au théâtre des types si divers de provinciaux, gentilshommes prétentieux comme M. de Sotenville, ou gens de peu, comme l’huissier Loyal de Tartuffe ou les paysannes de Pourceaugnac. […] Ces fantoches italiens, si originaux, d’un caractère et d’une personnalité si nettement tranchés, devaient bien vite séduire un homme né, comme Molière, avec le génie dramatique : ils sont le mouvement et la vie mêmes, la bouffonnerie incarnée. […] Il se moquait d’Arnolphe et riait de Sganarelle, et que de traits, pour les peindre, il empruntait à son propre caractère ! […] Clotaire, ami d’Anselme, et épris d’Isabelle, nous représenterait Baron, ce petit Baron que Molière avait adopté et qu’il aimait comme un fils : Quoique depuis six ans que, voyageant tous deux, D’une forte amitié nous serrâmes les nœuds, Il m’ait toujours traité comme son propre père… On reconnaît, çà et là, plus d’un trait du caractère de Molière. […] L’édition complète, un des hommes les plus remarquables de ce temps, au double point de vue de la science et du caractère, M. 

2367. (1929) La société des grands esprits

Le petit port d’Itéa paraît pauvre, et la plaine de Phocide, bornée par les montagnes, n’est pas d’un caractère joyeux. […] Émile Bourguet indique avec une lumineuse précision le caractère de ce sanctuaire antique, qui n’a pas d’analogue dans la vie moderne. […] Certains les apprécient pour leur caractère de religiosité mystique, qu’ils trouvent seul vraiment chrétien, et qu’ils opposent au paganisme des basiliques italiennes. […] Sa condition lui permit heureusement l’indépendance que réclamait son caractère. […] Fernand Gregh qui, faisant son examen de conscience, ne croie que son caractère se rapproche plutôt de Pascal.

2368. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

D’où lui vient cette idée au caractère impératif qui n’est réalisée nulle part et dont il désire invinciblement la réalisation ? […] Mais ces caractères dont l’absence empêche M.  […] Zola sait bien que l’artiste, pour transporter ses modèles dans le roman ou sur la scène, est forcé de choisir, de ne retenir de la réalité que les traits expressifs et de les ordonner de manière à faire ressortir le caractère dominant soit d’un milieu, soit d’un personnage. […] L’un saisit des personnages réels, et presque toujours singuliers, puis cherche une action qui les relie tous entre eux et qui soit en même temps le développement naturel du caractère ou des passions des principaux acteurs. […] et les caractères dominants de ses longs récits, ne sont-ce pas précisément ceux de l’épopée ?

2369. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance. »

À propos de la Correspondance de Mme Du Deffand avec Horace Walpole, qui paraissait alors pour la première fois (1812), et que Sismondi lisait avec sa mère, il écrivait à Mme d’Albany, en faisant d’elle à l’auteur un rapprochement qui s’offrait de lui-même, et que nous n’aurions pas manqué de faire également : « En lisant ces lettres, permettez-moi de vous le dire, nous pensions souvent à vous ; le parfait naturel de son style, la vivacité de toutes ses impressions, l’originalité de son esprit nous faisaient comparer ; mais ce qui lui manquait surtout, c’était le caractère… Quelle dévorante activité l’ennui avait en elle ! […] Mais Jessie fait ce que font toutes les femmes, et bien des hommes aussi : elle commence par mettre dans sa religion tout ce qu’il y a de mieux dans une belle âme comme la sienne ; puis elle croit que c’est le caractère de la religion en général, et que toutes les religions y participent.

2370. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre III »

Dimanche, entre M. de Sotenville lui-même et George Dandin, l’intervalle était immense : habits, logis, mœurs, caractère, point d’honneur, idées, langage, tout différait. […] Dans tout usage du régime établi, dans toute mesure de l’administration, « dans les règlements de police, dans les édits sur les finances, dans les autorités graduelles sur lesquelles reposaient l’ordre et la tranquillité publiques, il n’y avait rien où l’on ne trouvât un caractère de tyrannie… Il s’agissait du mur d’enceinte et des barrières de Paris qu’on dénonçait comme un enclos de bêtes fauves, trop injurieux pour des hommes ». — « J’ai vu, dit l’un des orateurs, j’ai vu à la barrière Saint-Victor, sur l’un des piliers en sculpture, le croiriez-vous ?

2371. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXVIIe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (3e partie) » pp. 5-56

Les formes de ce gouvernement sont aussi diverses que les âges des peuples, les lieux, les temps, les caractères de ces groupes humains formés en nations. […] Or voici tout le mystère : Il y avait à Genève une de ces familles cosmopolites qui apportent, partout où elles vivent, un caractère et une physionomie multiples, saillants, originaux comme l’empreinte des différentes contrées où ces familles ont eu leurs haltes et leur origine.

2372. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVe entretien. Chateaubriand, (suite) »

Or, comme l’enfer et le paradis sont essentiellement compris, comme les deux pôles du monde extérieur, dans le poëme épique dont l’universalité est le caractère, le poëme épique fut anéanti ; on ne put remplacer les merveilles réelles que par les chimères que l’homme de talent chercha à faire croire aux peuples, c’est-à-dire le merveilleux de Dieu par le merveilleux des hommes, et ce merveilleux de caprice n’était plus que merveilleux de fantaisie ; il n’avait plus de sanction que la poésie de l’imagination et plus de vérité que la vraisemblance. […] La dernière comparaison entre cette prose accomplie et cette poésie imparfaite, mais naturelle, donne un caractère à part à l’égarement de Velléda : « Jamais, seigneurs, je n’ai éprouvé une douleur pareille.

2373. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mendès, Catulle (1841-1909) »

Catulle Mendès est un artiste merveilleux ; il possède la science du mot élevé et juste et sait toujours maintenir son inspiration à la hauteur où il la place ; il a trouvé, surtout dans les Poèmes épiques, des vers superbes et qui s’imposent à la mémoire, de ces vers qui semblent écrits dans le texte en caractères plus gros, tellement l’œil s’arrête sur eux, attiré par la forme des mots, leur arrangement, tout ce qui fait le dessin d’un beau vers avant que la musique en soit intelligible. […] Catulle Mendès vaut moins par l’intérêt du poème, par l’étude psychologique des sentiments et des caractères que par un grand sens du pittoresque et en même temps par un emportement extraordinaire de passion physique.

2374. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre VI. Premiers pas hors de Saint-Sulpice  (1882) »

Berthelot me fit connaître son père, un de ces caractères de médecins accomplis comme Paris sait les produire. […] Mais c’est surtout par le caractère que je suis resté essentiellement l’élève de mes anciens maîtres.

2375. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 août 1885. »

De même encore, Hegel et Wagner sont tous deux extrêmement préoccupés de l’action de l’art dramatique sur le public : le premier, dans le parallèle qu’il établit entre la poésie dramatique chez les anciens et chez les modernes, a marqué, dans le drame ancien « le caractère général éleve du but que poursuivent les personnages » en opposition avec la passion personnelle qui « fait l’objet principal » du drame moderne ; ailleurs, il assigne à l’art, une mission nationale. […] Mallarmé est critique envers la recherche wagnérienne de l’oeuvre totale, il dénonce le caractère redondant de la musique qui commente le drame plutôt qu’elle en saisit l’essence.

2376. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 janvier 1886. »

Mais cette négation ne revêt pas le caractère affirmatif d’une profonde conviction ; elle est ce que Wagner nommait le « pessimisme absolu », (X, 326), celui « qui se contente de constater la nullité du monde ». […] Déjà les partitions de Lulli et des compositeurs contemporains témoignent du déplacement du chant ; la mélodie a passé aux violons et aux flûtes, on prend donc la peine de la transcrire ; les parties intermédiaires continuent à être négligées, et la basse chiffrée, acceptant la seconde place, prend le caractère déterminé d’un accompagnement.

2377. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIX. M. Cousin » pp. 427-462

Mais c’est le caractère de l’égarement actuel de M.  […] but chimérique portant dommage à ses amis, amours des brouillons, de Buckingham, « le paladin sans génie », de Charles IV, « l’aventurier » de Chalais, « l’étourdi assez fou pour s’engager contre Richelieu sur la foi du duc d’Orléans », de Châteauneuf, « impatient du second rang sans être capable du premier », emploi et trafic de sa personne au profit de sa politique, et de sa politique au profit de la passion du jour, qu’est-ce que le cardinal de Retz a dit de plus déshonorant pour l’esprit et le caractère ?

2378. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre II. L’âme et le corps »

Mais, à côté de ces mouvements qui sont provoqués mécaniquement par une cause extérieure, il en est d’autres qui semblent venir du dedans et qui tranchent sur les précédents par leur caractère imprévu : on les appelle « volontaires ». […] Et elle crée aussi du nouveau à l’intérieur d’elle-même, puisque l’action volontaire réagit sur celui qui la veut, modifie dans une certaine mesure le caractère de la personne dont elle émane, et accomplit, par une espèce de miracle, cette création de soi par soi qui a tout l’air d’être l’objet même de la vie humaine.

2379. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Appendice — Mémoires du comte d’Alton-Shée »

Le caractère de l’auteur lui-même s’y dessine dès les premières pages.

2380. (1874) Premiers lundis. Tome I « Victor Hugo : Odes et ballades — II »

Comme conseil de style, on n’a qu’à renvoyer à l’auteur ses propres paroles : « Un écrivain qui a quelque souci de la postérité, dit-il dans sa remarquable préface, cherchera sans cesse à purifier sa diction, sans effacer toutefois le caractère particulier par lequel son expression révèle l’originalité de son esprit ; le néologisme n’est d’ailleurs qu’une triste ressource pour l’impuissance.

2381. (1875) Premiers lundis. Tome III « Instructions sur les recherches littéraires concernant le Moyen Âge »

Il ne faudrait pas être détourné dans ces sortes de recherches par le caractère anonyme des manuscrits, car des indications intrinsèques ou indirectes peuvent conduire à déterminer sûrement l’auteur.

2382. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XVIII. Gentils conteurs » pp. 218-231

Maeterlinck utilise sa facilité de terrorisation à illustrer les positions sinon les caractères de ses personnages.

2383. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre IX. L’antinomie politique » pp. 193-207

C’est entre eux un commerce de concessions et de bons offices, un esprit de corps et une camaraderie qui exigent beaucoup de souplesse et d’intrigue, mais nulle originalité de pensée ou de caractère.

2384. (1890) L’avenir de la science « Sommaire »

Caractère subjectif des religions ; de là leur intérêt psychologique ; l’homme s’y met plus que dans la science : l’humanité est là tout entière.

2385. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIX. Progression croissante d’enthousiasme et d’exaltation. »

» Deux anecdotes, du genre de celles qu’il ne faut pas accepter comme historiques, mais qui se proposent de rendre un trait de caractère en l’exagérant, peignaient bien ce défi jeté à la nature.

2386. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXII. Machinations des ennemis de Jésus. »

On ne sait rien de son caractère.

2387. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXII » pp. 222-236

Voltaire l’indique à l’année C’est plus de deux ans trop tard, « Dès l’an 1669, dit-il, madame de La Vallière s’aperçut que madame de Montespan prenait de l’ascendant sur le roi. » Si la liaison du roi avec madame de Montespan n’avait commencé qu’en cette année, deux événements principaux de la période que nous parcourons, perdraient leur caractère et leur importance, savoir : la maladie dont est morte madame de Montausier, et la représentation de l’Amphitryon de Molière.

2388. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXIII » pp. 237-250

Madame de Sévigné en était l’âme : elle était aussi fréquemment chez le duc de La Rochefoucauld et dans une étroite liaison avec madame de La Fayette, Le comte de Brancas réunissait aussi du monde aimable chez lui, malgré cette infirmité de distractions continuelles dont madame de Sévigné cite des exemples fort divertissants, et dont La Bruyère a rassemblé une étonnante collection sous le nom de Menalgue dans ses Caractères.

2389. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre II. Le Bovarysme comme fait de conscience son moyen : la notion »

Tel est le caractère de la formule bovaryque : elle n’est pas la conclusion d’un raisonnement, elle est l’expression d’un mode de vision et peut devenir aussi une méthode de vision.

2390. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre neuvième. »

Les deux animaux qui sont les acteurs de la pièce, y sont peints dans leur vrai caractère.

2391. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VII »

Pour écrire une scène, un paysage, un caractère, une description, il faut, avons-nous dit, peindre d’après nature, c’est-à-dire, autant qu’on le peut, copier sur place, s’inspirer d’un modèle ; en d’autres termes, il faut faire de l’observation directe.

2392. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre VIII. Suite du chapitre précédent. De la parole traditionnelle. De la parole écrite. De la lettre. Magistrature de la pensée dans ces trois âges de l’esprit humain » pp. 179-193

Magistrature de la pensée dans ces trois âges de l’esprit humain Dans l’ordre naturel des idées, ce chapitre ainsi que le précédent devraient se trouver après celui où je me propose de développer la théorie de la parole ; mais il faut que j’intervertisse cet ordre naturel des idées, pour me soumettre à un plan non moins impérieux, qui consiste à mettre de suite tout ce qui peut amener à comprendre le caractère de l’âge actuel.

2393. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VIII. Mme Edgar Quinet »

Il ne ressemble pas à tous les autres, et même il est marqué d’un caractère si particulier, — si peu ordinaire aux bas-bleus, — que le lecteur et moi, — malgré la tristesse du sujet qu’elle traite, — nous aurons peut-être de l’agrément à nous entretenir aujourd’hui de Mme Quinet.

2394. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXIII. Henry Gréville »

Mais on y chercherait en vain l’unité rayonnante, la science de la composition, les passions et leurs déchirements, la profondeur des analyses, l’originalité dans les descriptions, les événements et les caractères, tout ce qu’on exigerait dans des romans écrits par des hommes.

2395. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les Kœnigsmark »

… Est-ce un roman, construit avec des faits récemment découverts en Allemagne et en Angleterre, et avec des caractères curieux à étudier et retrouvés, comme on retrouve des cadavres, dans les oubliettes de l’Histoire ?

2396. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La diplomatie au xviie  siècle »

Les autres négociations qui suivirent, comme, par exemple, le mariage de Louis XIV et le traité des Pyrénées, quoique plus heureuses et plus brillantes, n’eurent pas, non plus, en ce qui concerne Lionne, le caractère d’action et de domination personnelle qui rapporte à un homme cette espèce de gloire qui est la vraie gloire, et qu’on ne partage avec personne… Lionne a toujours partagé avec quelqu’un… J’ai dit les facultés qu’il avait ; mais les résultats auxquels il arriva par elles ne furent jamais en équation avec ces facultés.

2397. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Taine » pp. 231-243

Taine, que le critique ajoute à son âme naturelle et nationale cinq à six âmes artificielles ou acquises, et que sa sympathie flexible… (rappelez-vous le fameux vers d’Auguste Barbier, qui ne le disait pas de la Critique) : Ouvrant à tout venant et sa jambe et son cœur, l’introduise en des sentiments éteints ou étrangers… « Le meilleur fruit de la Critique — dit encore l’auteur du Carlyle — est de nous déprendre de nous-mêmes, de nous contraindre à faire la part du milieu où nous sommes plongés, de nous enseigner à démêler les objets eux-mêmes à travers les apparences passagères dont notre caractère et notre siècle ne manquent jamais de les revêtir… » Telles sont les propres paroles de M. 

2398. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Jules Girard » pp. 327-340

Cette sévérité qui simplifie est le caractère principal de son œuvre tout entière.

2399. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Le comte de Fersen et la cour de France »

Il allait toujours à travers tout, à travers les bassesses des politiques et des caractères, brassant cette boue, et l’odieux Léopold, le lâche Caïn de sa sœur qui n’eut même pas l’affreux courage de son fratricide, et l’orgueil stupide de Breteuil, et la haine hypocrite de Kaunitz contre la France, et enfin les lenteurs calculées des Brid’oisons de la Diplomatie, qui prirent même Gustave III dans la glu de leur formalisme.

2400. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Lettres d’une mère à son fils » pp. 157-170

Quand madame d’Alonville, qui a de l’esprit et qui aime à faufiler de la tapisserie de caractères, nous a parlé de la bienveillance, de l’égoïsme, de l’orgueil, de la vanité, du devoir d’être de son temps, de la grâce d’être jeune, de l’avantage d’être timide (quand on a vingt ans), de la susceptibilité, du loisir contraire à l’ordre de la nature, de l’esprit de conversation, de la réprobation de l’épigramme, des horreurs du jeu, de la Bourse (enfin !)

2401. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Vauvenargues » pp. 185-198

Un homme de la fin du même siècle qui n’a exprimé aussi de sa pensée que quelques gouttes, mais autrement puissantes, d’un citron autrement pénétrant et parfois autrement mortelles que celles que Vauvenargues fit tomber de la sienne, Chamfort, si au-dessus de Vauvenargues par tout excepté par le caractère, n’est pas un moraliste non plus, quoiqu’il en ait révélé les profondes aptitudes.

2402. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVI. M. E. Forgues. Correspondance de Nelson, chez Charpentier » pp. 341-353

ce mot affreux, antilittéraire, antimilitaire, anti-marin, anti-savant, anti-toutes choses, et qui est le caractère cherché et voulu des livres actuels pour qu’ils fassent fortune, — et je dis fortune, au point de vue commercial de l’écoulement.

2403. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame Du Deffand »

Cette intimité eut trop le caractère égoïste et corrompu du xviiie  siècle.

2404. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Nelson »

ce mot affreux, antilittéraire, antimilitaire, anti-marin, anti-savant, anti-toutes choses, et qui est le caractère cherché et voulu des livres actuels pour qu’ils fassent fortune, — et je dis fortune au point de vue commercial de l’écoulement.

2405. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XV. Vauvenargues »

Un homme de la fin du même siècle, qui n’a exprimé aussi de sa pensée que quelques gouttes, mais autrement puissantes, d’un citron, autrement pénétrant, et parfois autrement mortelles que celles que Vauvenargues fit tomber de la sienne, Chamfort, si au-dessus de Vauvenargues par tout, excepté par le caractère, n’est pas un moraliste non plus, quoiqu’il en ait révélé les profondes aptitudes.

2406. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Caro. Le Pessimisme au XIXe siècle » pp. 297-311

Caro a certainement le sentiment des monstrueux sophismes et des monstrueux ridicules dont il s’est avisé de nous tracer l’histoire, mais il l’a dans la proportion de son âme et avec le caractère de son esprit.

2407. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Mgr Rudesindo Salvado »

Caractère physiologique de la race, croyances religieuses, lois, coutumes, mœurs domestiques, ornements et parures, ustensiles et armes, chasses, constructions, maladies, boglias (médecins), funérailles, tout, jusqu’à un lexique très bien fait de la langue de ces tribus sauvages, Mgr Salvado n’a rien oublié de ce qu’il a été à portée de bien voir et de recueillir.

2408. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « La Bible Illustrée. Par Gustave Doré »

Je n’ai voulu et je ne peux que déterminer le caractère général du travail qu’il a entrepris et mené à fin avec une rapidité napoléonienne.

2409. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Gérard Du Boulan »

On se rappelle toutes les interprétations historiques qu’on a essayé de donner des types du Gargantua et du Pantagruel de Rabelais, et celles des Caractères de La Bruyère, dans lesquels on n’avait voulu voir qu’une galerie de portraits.

2410. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Charles Baudelaire. Les Fleurs du mal. »

Le caractère de la poésie des Fleurs du mal, à l’exception de quelques rares morceaux que le désespoir a fini par glacer, c’est le trouble, c’est la furie, c’est le regard convulsé et non pas le regard, sombrement clair et limpide, du Visionnaire de Florence.

2411. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Milton »

— bien des tempêtes et jusqu’à des souffles peuvent altérer, affaiblir, emporter et faire entièrement disparaître cette originalité, le plus profond et le plus frappant caractère du génie Mais l’originalité de Milton était de celles-là que rien ne pouvait entamer.

2412. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Edgar Poe » pp. 339-351

Tel est le double caractère du talent, de l’homme et de l’œuvre que la traduction française, qui est très-bien faite, nous a mis à même de juger : la peur et ses transes, la curiosité et ses soifs, la peur et la curiosité du surnaturel dont on doute, et, pour l’expliquer, toutes les folies d’une époque et d’un pays matérialiste qui effraye autant qu’il attire.

2413. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « L’Abbé *** »

Franchement, je ne sais trop comment m’y prendre pour vous parler convenablement d’un livre dont le caractère est la platitude, — une platitude comme je n’en ai jamais vu, — une platitude ineffable, qui ne ressort ni de la critique sérieuse ni même de la plaisanterie, et dans lequel, si par hasard le Diable y était pour quelque chose, je le tiendrais, lui qu’on a toujours regardé comme une personne d’esprit, pour complètement déshonoré !

2414. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre xi‌ »

Ils se souviendront toujours du caractère exact de l’union sacrée durant la guerre ; ils ne laisseront jamais dire qu’elle ait été la simple excitation ou l’expédient d’un peuple surpris par le péril.‌

2415. (1889) Impressions de théâtre. Troisième série

De caractères : car, après tout, Figaro en est un, et aussi peut-être le comte Almaviva et à coup sûr Chérubin est un « type ». […] Car elle offre tous les caractères des légendes populaires. […] Cet espionnage direct rabaisse peut-être « à vos yeux le caractère de la princesse ? […] Cela ne laisse pas de faire un caractère assez curieux. — Le petit de Fondette aussi est « possédé », c’est même sa seule profession. […] Certes, les hommes éminents qui l’ont écrite n’avaient pas dessein de rabaisser la dignité du caractère sacerdotal ; ils prétendaient bien plutôt la relever.

2416. (1920) Action, n° 2, mars 1920

Les musiciens Allemands ont tant donné, dans leurs œuvres, à la rhétorique des poètes, qu’ils ont fini par en oublier la musique et en altérer le caractère sensible. […] Le caractère fait l’unité. […] Par une gageure où n’entre, certes, aucune vanité, et qui vient, plutôt, du plaisir d’une recherche nouvelle, Max Jacob, s’est efforcé de découvrir la formule de son talent, lequel a, précisément, pour caractère, de se dérober à toute formule. […] Cette « collection de caractères », pour reprendre les mots de « l’avis » publié par Jacob en tête de l’ouvrage, est publiée en 1920 aux Éditions de la Sirène.

2417. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — [Introduction] » pp. 132-142

Cette épreuve a eu presque le caractère d’une solennité, et l’éclat en a retenti au dehors.

2418. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « quelque temps après avoir parlé de casanova, et en abordant le livre des « pèlerins polonais » de mickiewicz. » pp. 512-524

Gautier quelques heureuses innovations métriques, par exemple l’importation de la terza rima, de ce rhythme de la Divine Comédie qui n’avait pas reparu dans notre poésie depuis le xvie  siècle, et qui a droit d’y figurer par son caractère gravement approprié, surtout quand il s’agit de sujets toscans. — Tout à côté, on peut admirer à la loupe une fine miniature chinoise sur porcelaine de Japon.

2419. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Appendice à l’article sur Joseph de Maistre »

Deplace, avec toute la délicatesse dont il est capable, un coupon dans le prix qui lui est dû  : « Si j’y voyais le moindre danger, certainement, monsieur, je ne m’aviserais pas de manquer à un mérite aussi distingué que le vôtre, et à un caractère dont je fais tant de cas, en vous faisant une proposition déplacée ; mais, je vous le répète, vous êtes au pied de la lettre co-propriétaire de l’ouvrage, et en cette qualité vous devez être co-partageant du prix…. » M. 

2420. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre I. Malherbe »

Progrès et caractère de Malherbe Voilà le progrès de Malherbe, qui aboutit à la création du style dont la première génération des classiques du xviie  siècle usera.

2421. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Richepin, Jean (1849-1926) »

Richepin a dû, ce jour-là, prendre le mot théâtre dans une de ses vieilles acceptions, — théâtre de l’Europe…, théâtre des curiosités de… Cette réserve faite (elle est sans importance), toutes ces saynètes, qui se jouent elles-mêmes dans un cerveau de littérateur, cette indignation contre le bourgeois non artiste qui soulevait déjà le poète de la Chanson des gueux … C’est cette haine qui inspire les saynètes où Polichinelle triomphe de Pierrot, dans cette gamme de la concurrence vitale qui s’appelle la peinture des portraits, en démontrant la supériorité du miroir où l’on se voit, de ses yeux prévenus, sur la tenace recherche technique et le souci de pittoresque et de caractère qu’un peintre peut posséder.

2422. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXV. Mort de Jésus. »

Peut-être même la hauteur extrême du caractère de Jésus ne rend-elle pas un tel attendrissement personnel vraisemblable, au moment où, uniquement préoccupé de son œuvre, il n’existait plus que pour l’humanité 1184.

2423. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — Les traductions. » pp. 125-144

On desire de connoître, d’après lui, Tacite, cet historien qui a si bien peint l’ame fausse, impérieuse, dissimulée & cruelle de Tibère, exécrable imposteur, modèle de Cromwel pour les grandes qualités & les grands vices ; cet historien, qui a si bien nuancé le caractère des Romains, qui veut prouver que tout, dans le sénat & chez Tibère, se faisoit par une combinaison de crimes ; cet historien dans qui l’on remarque un esprit d’ordre & de suite, des réflexions & des vues profondes & lumineuses, un talent merveilleux pour faire des tableaux.

2424. (1757) Réflexions sur le goût

il en est au contraire le plus ferme appui, puisque cet esprit consiste à remonter en tout aux vrais principes, à reconnaître que chaque art a sa nature propre, chaque situation de l’âme son caractère, chaque chose son coloris ; en un mot à ne point confondre les limites de chaque genre.

2425. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Ch.-L. Livet »

Les grands hommes qui donnèrent à la langue de Louis XIV, je ne dis pas son caractère définitif, — car une langue ne finit jamais que quand on ne la parle plus, — mais les chefs-d’œuvre qui l’assirent et la posèrent dans sa majesté, sont sortis des grands écrivains du xvie  siècle, qui en a de si grands, et non pas des précieuses, ces bréhaignes, qui ont tué des poètes, mais qui n’en ont jamais fait un.

2426. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Louis XIV. Quinze ans de règne »

Les jugements qu’on y trouve, ces jugements qui doivent couronner tous les faits quand l’historien sait penser sur ce qu’il raconte, manquent généralement du grand caractère qui, toujours dans la vérité, et quelquefois, hélas !

2427. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Sixte-Quint et Henri IV »

Si on en lave son caractère, on en tache son génie, et c’est en lui tout l’homme d’État qu’il faut accuser.

2428. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Femme au XVIIIe siècle » pp. 309-323

Ils ne sont pas des moralistes exprimant largement, comme La Bruyère, toute une époque dans des Caractères, — étude humaine et grandiose !

2429. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Th. Carlyle » pp. 243-258

Mais la goutte du génie de Rabelais, qu’il a naturellement et qu’il n’imite point, le sauve de tout cela et reste le meilleur et le plus profond caractère de son talent.

2430. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Xavier Eyma » pp. 351-366

» C’est cette admiration pour l’Amérique, tempérée par un scepticisme dû à la nature un peu molle de l’esprit de l’auteur, qui donne au livre de Xavier Eyma ce caractère incertain et chancelant, lequel est, pour les esprits amoureux de netteté, la chose la plus antipathique.

2431. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Alexis de Tocqueville »

C’est toujours ce talent de rapporteur, clair et sans éclat, sur une question mise à l’étude, caractère propre du livre de la Démocratie en Amérique, qui ne fut jamais plus que cela.

2432. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Hoffmann »

Il n’a point changé le caractère de ce qu’il a trouvé, et voilà l’intérêt du livre.

2433. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Byron »

Excepté dans Beppo, et dans quelques situations risquées de Juan, mais sauvées encore à force d’art (il venait delire les conteurs italiens et le caméléon qui est dans tout poète réfléchit une minute cette couleur), Byron, l’immoral Byron, comme on dit, avait l’imagination la plus chaste, et c’est là aussi un caractère charmant auquel on pense trop peu, de ce génie sans égal.

2434. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XX. M. de Montalembert »

devant Dieu par la foi, par l’abnégation, par l’œuvre collective, ils ont comme l’identité de la même vertu, de la même sagesse, de la même sainteté, et on pourrait tous les prendre les uns pour les autres, si Dieu n’avait pas donné à quelques-uns d’entre eux la différence qui compte devant l’Histoire, la différence ou d’un de ces caractères ou d’un de ces génies qui, en attendant l’égalité du Ciel, font la gloire et l’originalité parmi nous !

2435. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « MM. Delondre et Caro. Feuchtersleben et ses critiques. — L’Hygiène de l’âme » pp. 329-343

Et pourtant, malgré tous ces motifs de sécurité, je ne trouve pas le caractère germanique à ce livre de l’Hygiène de l’âme, à ce petit traité, gros comme rien et clair comme un verre d’eau, dont le succès, en France, ne m’étonnerait pas, — car, en France, on aime tant la clarté, qu’on aime même celle des verres vides ! 

2436. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Guizot »

Joinville a été l’Évangéliste de saint Louis, et son livre charmant est marqué du caractère le plus divin que puisse avoir le livre d’un homme sur un homme.

2437. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Ernest Hello »

Les Deux étrangers ont justement ce caractère mystérieux et solennellement alarmant qu’Edgar Poe, le magnétique démoniaque, communique à son lecteur avec tant de puissance, quoique le malheureux ne crût probablement pas à cet abîme de toute terreur : le démon !

2438. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Jules de Gères »

Dans l’introduction de son nouveau volume, écrite avec la distinction qui est le caractère de cette plume toujours à cent pieds de la chose ou de l’expression vulgaire, Gères ne nous raconte rien, mais nous laisse cependant entrevoir qu’il a passé par la douleur suprême que madame de Staël appelle « le mal de l’irréparable  ».

2439. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Soulary. Sonnets humouristiques. »

Je sais, comme vous, que dans toute poésie, quelle qu’en soit la forme ou l’étendue, il y a une lutte secrète entre l’infini du sentiment qui circule et le fini de la langue dans laquelle cet infini se renferme sans se limiter, mais ici, cette lutte, qui est le caractère glorieux et infirme de toute poésie, a lieu sur un bien plus petit espace, ce qui augmente le danger et constitue un bien plus difficile idéal.

2440. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Armand Pommier » pp. 267-279

On ne peut pas dire précisément qu’il ait créé le roman physiologique, mais il lui donna le grand caractère que son génie donnait à tout, et par son exemple il imprima plus profondément la marque de cette influence du temps, à laquelle nul ne peut se soustraire sans s’appauvrir, à tous les romans qui suivirent les siens.

2441. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXV. Avenir de la poésie lyrique. »

Telle fut la grandeur, le caractère original de ces hymnes que la foi chrétienne, que la pitié, que l’espérance prodiguaient au milieu des misères du monde romain expirant ; telle était cette source de ferveur pure et sublime, cette Aréthuse chrétienne qui ne cessait point d’épandre quelques filets limpides sous les flots de la barbarie.

2442. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre I. La Renaissance païenne. » pp. 239-403

Transplanté dans des races et dans des climats différents, ce paganisme reçoit de chaque race et de chaque climat des traits distincts et un caractère propre. […] —  Son caractère anglais et personnel. —  Ses poëmes sérieux et mélancoliques. —  Sa conception de l’amour intime. […] Robert Burton. —  Sa vie et son caractère. —  Confusion et énormité de son érudition. —  Son sujet, l’Anatomie de la mélancolie. —  Divisions scolastiques. —  Mélange des sciences morales et médicales. […] Il est devant la nature comme un artiste, un écrivain en présence d’un visage vivant, notant chaque trait, chaque mouvement de physionomie pour parvenir à deviner les passions et le caractère intérieur, corrigeant et défaisant sans cesse ses interprétations, tout agité par l’idée des forces invisibles qui opèrent sous l’enveloppe visible. […] Le sentiment de la puissance et de la prospérité humaine a fourni à la Renaissance son premier ressort, son modèle idéal, sa matière poétique, son caractère propre, et maintenant il lui fournit son expression définitive, sa doctrine scientifique et son objet final.

2443. (1730) Des Tropes ou des Diférens sens dans lesquels on peut prendre un même mot dans une même langue. Traité des tropes pp. 1-286

Au lieu du nom de l’éfet, on se sert souvent du nom de la cause instrumentale qui sert à le produire : ainsi pour dire, que quelqu’un écrit bien, c’est-à-dire, qu’il forme bien les caractères de l’écriture, on dit qu’il a une belle main. La plume est aussi une cause instrumentale de l’ecriture, et par conséquent de la composition ; ainsi plume se dit par métonymie de la manière de former les caractères de l’écriture et de la manière de composer. […] Par la même raison l’on done le nom de clé en termes de musique à certaines marques ou caractères que l’on met au comencement des lignes de musique : ces marques font conoitre le nom que l’on doit doner aux notes ; elles donent, pour ainsi dire, l’entrée du chant. […] Enfin chaque espèce de trope a son caractère propre qui le distingue d’un autre, come il a été facile de le remarquer par les observations qui ont été faites sur chaque trope en particulier. […] Ce que nous ne saurions rendre en françois en conservant le même tour, un seul fourbe, une seule de leurs fourberies, vous fera conoitre le caractère de tous les grecs.

2444. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

A mesure que ses requêtes et placets vont se multipliant, Corneille, solliciteur, prend un caractère de plus en plus triste. […] Il disait naïvement : « Il n’y a rien à reprendre au caractère de Phèdre, puisque, par ce caractère, le poète nous donne cette grande leçon que, lorsque, en punition des fautes précédentes, Dieu nous abandonne à nous-mêmes et à la perversité de notre cœur, il n’est point d’excès où nous ne puissions nous porter, même en les détestant. » Le malheur, c’est que nous ne voyons pas du tout « en punition de quelles fautes précédentes » Phèdre est entraînée au péché ; nous voyons seulement qu’elle y est entraînée, quoi qu’elle fasse. […] Mais, en outre, le caractère de Louis XI me paraît un des plus complexes et des plus profonds qu’on ait mis à la scène. […] Et qu’avons-nous besoin d’être informés par le menu de la politique et du caractère de la vieille reine qui tue l’enfant Tintagiles ? […] Le drame n’est pas assez développé, ni les caractères et les sentiments des personnages, pour que nous en soyons sérieusement émus.

2445. (1890) La bataille littéraire. Deuxième série (1879-1882) (3e éd.) pp. 1-303

» S’il faut en croire quelques récits du temps, l’enfance du Dauphin ne faisait guère prévoir la douceur que devait prendre son caractère. […] Quant aux caractères, ils manquent absolument de noblesse, et les principaux sont des créations de fantaisie dont aucun ne se soutient jusqu’au bout, tel qu’il est d’abord posé. […] Cela ne changeait rien ni dans les caractères, ni dans les sentiments, ni dans les faits. […] On connaît maintenant la femme qui donna le jour à Mirabeau ; on sait à quelle guerre domestique le tribun fut mêlé, on pourrait dire dès son enfance, et sous quelles influences se formèrent son caractère et son esprit. […] Le véritable caractère national allemand, c’est la lourdeur ; elle éclate dans leur démarche, dans leur manière d’être et d’agir, leur langue, leurs récits, leurs discours, leurs écrits, dans leur façon de comprendre et de penser, mais tout spécialement dans leur style.

2446. (1894) La bataille littéraire. Sixième série (1891-1892) pp. 1-368

Les caractères des quelques personnages qui passent dans cette courte étude sont sobrement et nettement tracés ; je signalerai celui de la mère Maréchal, une faubourienne, tante de l’employé, qui vient au secours du ménage, alors que sa nièce entre en agonie. […] Tout est là pour un directeur, savoir donner au public ce qui lui plaît, lui donner du meilleur s’il le peut, mais sans avoir l’air de changer ses habitudes, plus qui ne changerait la disposition ou le caractère de l’affiche d’une pièce à succès. […] Le dernier trait est charmant et laisse bien au personnage le caractère que lui a donné l’évangile de la Passion. […] Nous en détachons ce passage qui contient une appréciation très juste du caractère de cet homme qui résuma en lui tant de hautes qualités et dont la perte enleva à l’Empereur son conseiller le plus dévoué et le plus indépendant. […] Francis Chevassu ne craint pas de forcer certains traits, d’en exagérer le caractère, non pas jusqu’à la caricature, mais de façon à bien exprimer l’impression reçue.

2447. (1923) L’art du théâtre pp. 5-212

Le dramaturge est prisonnier des contingences du théâtre et de la société ; le caractère de son art est essentiellement social. […] À la fois mystique et sanglant, si différent que soit son caractère original de celui de nos vieux mystères, il est bâti sur les mêmes principes, inséparable de sa terre et de sa foi. […] À cheval sur la cour et sur la ville, il garde par ses farces et même par ses comédies de caractère le contact avec le grand nombre : il prend sa servante à témoin. […] Côté poésie et littérature, spécialement côté Hugo, la réforme prendra un caractère théorique. […] une prise encore molle, timide, gênée par des conventions, — permettra à Émile Augier d’établir quelques caractères.

2448. (1864) Cours familier de littérature. XVII « Ce entretien. Benvenuto Cellini (2e partie) » pp. 233-311

Ce n’est point la vanité qui m’arrache ces tristes réflexions ; je les fais pour rendre grâce à Dieu, dont la puissante protection ne m’a jamais manqué, parce que je l’ai toujours imploré au milieu de mes angoisses. » Ce mélange de scélératesse et de dévotion sincère donne à ce temps un caractère de pittoresque moral qui n’éclate jamais mieux que dans ce naïf scélérat. […] Son bouillant caractère faillit encore lui coûter la vie. […] XIV Les principaux caractères de sa vie, écrits par lui-même tels que nous venons de vous les raconter, furent la naïveté souvent un peu féroce de ses sentiments et de ses actes.

2449. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIVe entretien. Épopée. Homère. — L’Odyssée » pp. 445-524

Les avenues de cerisiers, les buis séculaires, ces ifs du Nord, ce velours des murs d’enceinte, les larges parterres, les immenses jardins, les pièces d’eau dormante dans leurs bassins de roseaux et de marbre, les fontaines bouillonnantes par la gueule des dauphins moussus sous le hêtre colossal, les longs méandres de charmilles taillées en murailles arrondies en berceaux, les gradins de gazon fuyant en perspective pour conduire le regard jusqu’au cœur des bois, enfin les forêts épaisses et silencieuses qui entourent la demeure, tout donnait au château de mon oncle un caractère de mélancolique grandeur et de sauvage majesté. […] C’est peut-être ce caractère claustral qui avait, à son insu, porté mon oncle à préférer ce séjour à toute autre habitation moins sévère dans le partage des biens de la maison. […] On lui répond, il réplique ; tous les caractères différents des orateurs honnêtes ou pervers se dessinent dans cette assemblée.

2450. (1753) Essai sur la société des gens de lettres et des grands

On a beau se flatter que les étrangers sont une espèce de postérité vivante dont le suffrage impartial en imposera à des compatriotes aveugles ou de mauvaise foi ; on ne pense pas que plus on se rapproche des étrangers, plus ils perdent ce caractère de postérité, pour lequel la distance des lieux est du moins nécessaire, au défaut de la distance des temps. […] Je ne puis me dispenser de rapporter à cette occasion une anecdote bien propre à faire connaître le caractère et l’injustice des hommes dont je parle. […] Ils communiquent à l’âme un avilissement qui dégrade insensiblement les idées, et dont les écrits se ressentent à la longue : car le style prend la teinture du caractère.

2451. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Féval » pp. 107-174

. — Dans Le Drame de la jeunesse, où il reprit l’idée d’Aimée (l’influence des livres et du théâtre sur la pensée et la moralité modernes, l’altération du naturel par les réminiscences littéraires, la pose, la comédie éternelle jouée entre nous et Dieu, et qui nous empêche d’avoir l’originalité même de nos vices et de nos douleurs), il poussa au comble du suraigu cette ironie15 qui est le caractère de son esprit et le symptôme de sa force, et qui pourrait faire de Paul Féval, s’il la développait dans des sujets de cœur, un romancier d’un comique amer de la plus poignante originalité. […] Plus nous irons, d’ailleurs, plus ce cancer de Paris qui ronge tout de la personnalité de la France ira s’agrandissant, plus ceux-là qui se tiendront sains et à l’écart dans l’autochtonie de leur province garderont dans leur talent de personnalité et de caractère. […] XXI Cependant, malgré cette position d’historien qu’il vient de prendre et qu’il pourrait garder, je crois bien que l’auteur des Merveilles du Mont Saint-Michel reviendra au roman, la vocation de toute sa vie, ardemment et continuellement obéie, par conséquent devenue maintenant presque une destinée… Seulement, en revenant au roman, il lui donnera un caractère nouveau qui l’élèvera bien au-dessus de tous ceux qu’il ait jamais écrits.

2452. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Jocelyn (1836) »

Le caractère propre de l’idylle consiste à représenter l’homme dans un état de calme champêtre, d’innocence et de simplicité, où il jouisse librement de tout le bonheur naturel. […] (Des articles bien différents de caractère ont été écrits sur Jocelyn.

2453. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. VILLEMAIN. » pp. 358-396

Villemain en 1812 par celui de Montaigne, présente ce genre de qualités et de formes, à un moindre degré pourtant que ses Éloges de La Bruyère et de Montaigne, morceaux approfondis et d’un grave caractère. […] Bien que la facilité d’exécution soit un des caractères de ses pages les plus achevées, la négligence forcée, et l’audace agressive, et le diagnostic décisif et souvent scabreux de la polémique politique ou de la critique littéraire courante, ne sont pas son fait.

2454. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LOUISE LABÉ. » pp. 1-38

Si elle dut en partie ce rôle d’exception au caractère tout intime et passionné de ses vers, elle ne le dut pas moins à la position littéraire qu’occupait alors en France la cité lyonnaise. […] Cette célébrité même et le caractère passionné de ses poésies furent cause qu’après sa mort il se forma insensiblement sur elle une légende qui, accueillie et propagée sans beaucoup d’examen par des critiques d’ordinaire plus circonspects, par Antoine Du Verdier et Bayle, recouvrit bientôt le vrai et finit par rendre l’intéressante figure tout à fait méconnaissable.

2455. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Jouffroy »

Dans une génération où chacun presque possède à un haut degré la facilité de saisir et de comprendre ce qui s’offre, son caractère distinctif, à lui par-dessus tous, est encore la compréhension, l’intelligence. […] Dubois, bien que venue à l’occasion de l’autre, était évidemment l’idée active, saillante et nécessaire ; aussi imprima-t-il au Globe le caractère de sa propre physionomie.

2456. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre IV. Services généraux que doivent les privilégiés. »

« Subdélégués, officiers d’élections, directeurs, receveurs et contrôleurs des vingtièmes, commissaires et collecteurs des tailles, officiers des gabelles, voituriers-buralistes, huissiers, piqueurs des corvées, commis aux aides, au contrôle, aux droits réservés, tous ces hommes de l’impôt, chacun selon son caractère, assujettissent à leur petite autorité et enveloppent de leur science fiscale des contribuables ignorants et inhabiles à reconnaître si on les trompe128. » Une centralisation grossière, sans contrôle, sans publicité, sans uniformité, installe sur tout le territoire une armée de petits pachas qui décident comme juges les contestations qu’ils ont comme parties, règnent par délégation, et, pour autoriser leurs grappillages ou leurs insolences, ont toujours à la bouche le nom du roi, qui est obligé de les laisser faire. — En effet, par sa complication, son irrégularité et sa grandeur, la machine échappe à ses prises. […] Déjà avant l’écroulement final, la France est dissoute, et elle est dissoute parce que les privilégiés ont oublié leur caractères d’hommes publics.

2457. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIIe entretien » pp. 223-287

La pensée a besoin de méditation pour mûrir ; le caractère a besoin de force pour résister : où est la réflexion, où est le caractère, dans une tête qui ne peut s’appuyer sur la main ?

2458. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (1re partie) » pp. 305-364

IV J’ai toujours aimé Victor Hugo, et je crois qu’il m’a toujours aimé lui-même, malgré quelques sérieuses divergences de doctrines, de caractère, d’opinions fugitives, comme tout ce qui est humain dans l’homme ; mais, par le côté divin de notre nature, nous nous sommes aimés quand même et nous nous aimerons jusqu’à la fin sincèrement, sans jalousie, malgré l’absurde rivalité que les hommes à esprit court de notre temps se sont plu à supposer entre nous. […] Le souvenir de toutes ces férocités de caractère poursuit le lecteur à travers le livre ; malgré tous les actes de vertu gratuits et toutes les philanthropies transcendantes de ce galérien philanthrope, on ne voit pas comment tant de raison est survenue dans cet ignorant, tant de délicatesse dans cette brute, tant de notions raffinées de perfection dans ce forçat qui commence par le larcin, qui marche vers le vol, qui se laisse tenter par l’assassinat, et qui finit par accuser tout le monde !

2459. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (3e partie) » pp. 161-219

Le Saint-Père fut ensuite transféré à Savone, où il est encore captif. » On voit que la vertu qui rend le caractère inflexible ne dessèche pas le cœur. […] La tolérance la plus large était plus que sa loi, c’était son instinct, son caractère.

2460. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 décembre 1886. »

A propos des Anregungen fur Kunst, Leben und Wissenschaft de Richard Pohl, il s’écrie : « En exaltant les dernières œuvres de Beethoven, aberrations d’un génie qui s’éteint et les monstrueuses combinaisons de Tannhaeuser et de Lohengrin, monuments d’impuissance à » créer dans le domaine de la noble et belle musique, les rédacteurs des Anregungen ont contribué à faire naître le doute et l’anarchie actuelle d’opinions, qui font descendre aujourd’hui » la nation allemande de la position élevée où l’avaient placée les Bach, Haendel, Gluck, Haydn, le divin Mozart et Beethoven dans sa belle époque. » Cet exemple édifiant suffit à faire apprécier le caractère spécial d’un genre de critique dont notre pays n’était pas seul, d’ailleurs, à montrer les effets. […] Introduction : caractères généraux.

2461. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IX. Le trottoir du Boul’ Mich’ »

Le sort lui refusa les rôles éclatants et, comme il n’était pas un caractère, il se réfugia, à demi-satisfait, dans les consolations douces. […] Bergeret, philosophe ingénieusement superficiel et romancier impuissant à créer un caractère, le font songer, ébloui, à « du Montaigne… dans du Balzac ».

2462. (1904) En méthode à l’œuvre

. — Il est un sens universel dans tout caractère, a dit Goethe. […] Instruments percutants les Basses, Alto-viole et Violons   Ainsi, si le caractère originel de la parole avait pu n’être pas dénaturé, par, dès primitivement, le naturel instinct de contracter, en moindre attention et pour plus de rapidité de la vie de relation, — et, aux époques de l’Écriture, par l’emploi de plus en plus étendu en signes de mémoire visuelle, des idéogrammes de plus en plus dédaigneux de leurs phonétismes correspondants et que venaient ensuite asservir de mutilations ou d’augments d’empiriques règles de grammaire qui ne se doutent plus, maintenant, du sens primordial des langues : ainsi, le langage eût pu demeurer en organisme intégral, sous la double valeur phonétique et idéographique.

2463. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Romans et nouvelles » pp. 3-80

Et chez cette femme, une énergie de caractère, une force de volonté, un art du mystère auxquels rien ne peut être comparé. […] voilà… Nous avons commencé, nous, par la canaille, parce que la femme et l’homme du peuple, plus rapprochés de la nature et de la sauvagerie, sont des créatures simples et peu compliquées, tandis que le Parisien et la Parisienne de la société, ces civilisés excessifs, dont l’originalité tranchée est faite toute de nuances, toute de demi-teintes, toute de ces riens insaisissables, pareils aux riens coquets et neutres avec lesquels se façonne le caractère d’une toilette distinguée de femme, demandent des années pour qu’on les perce, pour qu’on les sache, pour qu’on les attrape, — et le romancier du plus grand génie, croyez-le bien, ne les devinera jamais, ces gens de salon, avec les racontars d’amis qui vont pour lui à la découverte dans le monde.

2464. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — La déformation  »

Il y a des exemples du contraire : craindre vient de temere ; carquois était jadis tarquois venu du grec de Byzance, [mot en caractères grecs] (turc, turkash). […] On ne peut vraiment lui concéder que exaucer vienne de exaudire ; bal, pompe et marmot du grec [mots en caractères grecs].

2465. (1913) La Fontaine « VI. Ses petits poèmes  son théâtre. »

De Philémon et Baucis je ne vous dirai presque rien aujourd’hui, parce que ce que ce poème contient de plus beau, de plus brillant et de plus charmant, j’ai eu l’occasion de vous le lire lorsque je vous ai décrit le caractère de La Fontaine et lorsque je vous ai parlé du goût de La Fontaine pour la médiocrité et de la manière exquise dont il s’est exprimé sur ce goût et sur cette chose. […] Quelle tragédie de ce temps-là avait ce caractère de trivialité mêlée à la pompe, de comique et de burlesque mêlés au sublime ?

2466. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Villemain » pp. 1-41

Pour nous, qui le coudoyons aujourd’hui dans la littérature, nous pouvons prendre sa hauteur de talent et en déterminer le caractère. […] Ce janséniste de France, qui, en Angleterre, aurait été à une autre époque un puritain, était presque, de gravité et de dignité, une figure anglaise… Royer-Collard, espèce de tory solitaire sous un régime de Constitution nouvelle, n’ayant d’ambition que pour ses idées, avec un talent dans lequel il y avait de la conscience et du caractère et une parole de plus de profondeur que d’éclat, était trop au-dessus de de Serres et de Dupin, avec lesquels Villemain l’a mis, pour pouvoir leur être comparé.

2467. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vii »

En produisant devant le public une voix qui s’adressait avec une parfaite confiance au cercle étroit de la famille, je risque de défigurer le caractère vrai de. […] Les voici, ces lignes, ce couplet à panache où palpite la même illusion qui, dans ces journées fiévreuses d’août 1914 masquait aux jeunes saint-cyriens le vrai caractère et l’horreur de la guerre commençante :‌ Fussiez-vous du sang des héros, s’écrie le prince de Ligne, fussiez-vous du sang des dieux, si la gloire ne vous délire pas continuellement, ne vous rangez pas sous les étendards.‌

2468. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre VI. L’espace-temps à quatre dimensions »

. — Caractère tout particulier de cette conception dans la théorie de la Relativité. — Confusion spéciale où l’on risque ici de tomber. — Le réel et le virtuel. — Ce que représente effectivement l’amalgame Espace-Temps. […] Ils ont parlé de leur Espace-Temps en prenant pour accordés les deux points suivants : 1° Toutes les répartitions qu’on y peut faire en espace et en temps doivent être mises au même rang (il est vrai que ces répartitions ne pourront être faites, dans l’hypothèse de la Relativité, que selon une loi spéciale, sur laquelle nous reviendrons tout à l’heure) ; 2° notre expérience d’événements successifs ne fait qu’illuminer un à un les points d’une ligne donnée tout d’un coup. — Ils semblent n’avoir pas tenu compte de ce que l’expression mathématique du temps, lui communiquant nécessairement en effet les caractères de l’espace et exigeant que la quatrième dimension, quelles que soient ses qualités propres, ait d’abord celles des trois autres, péchera par défaut et par excès tout à la fois, comme nous venons de le montrer.

2469. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — I » pp. 219-230

Il considère cette société antérieure et postérieure à l’individu ; il la voit subsistante, nécessaire, harmonieuse, agissant en mille façons et par toutes sortes d’influences inappréciables, plus mère encore que marâtre, ne retirant à l’homme primitif du côté des forces physiques que pour rendre davantage par le moral à l’homme actuel, et imposant dès lors à quiconque naît dans son sein des devoirs, des obligations qui ne sont point proprement de particulier à particulier, mais qui prennent un caractère commun et général : Car les individus, dit-il, à qui je dois la vie, et ceux qui m’ont fourni le nécessaire, et ceux qui ont cultivé mon âme, et ceux qui m’ont communiqué leurs talents, peuvent n’être plus ; mais les lois qui protégèrent mon enfance ne meurent point ; les bonnes mœurs dont j’ai reçu l’heureuse habitude, les secours que j’ai trouvés prêts au besoin, la liberté civile dont j’ai joui, tous les biens que j’ai acquis, tous les plaisirs que j’ai goûtés, je les dois à cette police universelle qui dirige les soins publics à l’avantage de tous les hommes, qui prévoyait mes besoins avant ma naissance, et qui fera respecter mes cendres après ma mort.

2470. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « À M. le directeur gérant du Moniteur » pp. 345-355

Le caractère des personnages principaux est fortement tracé, éclairé en plein tout d’abord, et soutenu jusqu’au bout ; le comte de Goyck, et surtout son vieux père impénitent et goutteux, sont d’une vérité à faire peur.

2471. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Dübner »

Dès lors l’initiative de son dévouement prenait un caractère fébrile et dégénérait presque en persécution.

2472. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Béranger, 1833. Chansons nouvelles et dernières »

Une disposition invincible à narguer et à chansonner les gens de loi, les gens d’église, les puissants, le beau sexe et les maris, devint un des traits persistants du caractère national.

2473. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, Les Feuilles d'automne, (1831) »

Victor Hugo, au contraire, le tempérament naturel a un caractère précis à la fois et visionnaire, raisonneur et plastique, hébraïque et panthéiste, qui peut l’induire en des voies de plus en plus éloignées de celles du doux Pasteur.

2474. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres publiées par M. J. Sabbatier. Tome Ier, 1845. » pp. 154-168

Victorin était une âme noble, un caractère élevé, et il ne se rendait pas compte de tous ces calculs ; son amour-propre les faisait en lui à son insu.

2475. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. Vitet à l’Académie française. »

La nature et son impulsion primitive sont beaucoup, j’admettrai même qu’elles sont tout en commençant ; mais l’usage qu’on en fait et le ménagement de la vie deviennent plus importants à mesure qu’on avance vers la maturité, et, dans ce second âge, le caractère définitif du talent, sa forme dernière se ressent profondément de l’arriéré qu’on porte avec soi et qui pèse, même quand on s’en aperçoit peu.

2476. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. Victor Vousin. Cours de l’histoire de la philosophie moderne, 5 vol. ix-18. »

Ce talent individuel, avec son caractère, devient le fait auquel je m’attache à travers la généralité des choses qu’il embrasse, et où certainement il se réfléchit.

2477. (1874) Premiers lundis. Tome I « Alexandre Duval de l’Académie Française : Charles II, ou le Labyrinthe de Woodstock »

On a osé comprendre que dans le genre secondaire de la comédie-vaudeville, il y avait de nos jours plus de vérité piquante et de nouveauté qu’en de froides et ennuyeuses comédies de caractères ou qu’en des compositions trivialement sentimentales et romanesques ; on a osé le dire d’abord à l’oreille, puis haut, et en conséquence on n’a pas cru déroger en laissant la rue de Richelieu pour le boulevard.

2478. (1874) Premiers lundis. Tome II « Thomas Jefferson. Mélanges politiques et philosophiques extraits de ses Mémoires et de sa correspondance, avec une introduction par M. Conseil. — I »

Nous sommes de celle-ci, de la République constitutionnelle, et non de la République démocratique, etc. » Et les distinctions abonderaient à l’appui : pour les inculquer dans la pratique, il ne s’agirait que de trouver un John Adams, quelque patriote illustre dont le caractère se fût lassé ; il n’en manquerait pas ; on en ferait un d’ailleurs, un, n’importe lequel, bien gouvernemental, un Casimir Perier, ou plutôt, comme la frénésie de tribune ne serait plus de mise, un M. 

2479. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

Mais c’est un spectacle trop grandiose et trop rare en ce temps-ci pour ne pas l’admirer et s’incliner d’abord devant, dût-on argumenter et analyser ensuite, que cette trempe de caractère poétique, cette vaillance presque fabuleuse dans l’art qui, depuis tantôt douze ans, combat, construit et conquiert.

2480. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre III. Les dieux »

Ils réfléchissent son caractère et portent l’empreinte de son esprit.

2481. (1895) Histoire de la littérature française « Avant-propos »

Mais pour représenter le caractère des écrits et la physionomie des écrivains, je me suis interdit de résumer les jugements des maîtres que j’admire, de Taine et de Sainte-Beuve, comme de M. 

2482. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre VII. La littérature française et les étrangers »

La littérature du temps de la reine Anne, avec Addison, Pope, Dryden, est gagnée aux idées d’ordre, de méthode, de raison, d’imitation fidèle et correcte de la nature, qui sont les caractères sensibles de nos œuvres classiques.

2483. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Ernest Renan, le Prêtre de Némi. »

Et, en effet, cette foi est la plus fixe et la plus solide, étant délimitée par des dogmes ; et elle prend, ou peut s’en faut, chez les fidèles, tous les caractères de la certitude, étant enfoncée dans leur cœur par l’éducation et y étant maintenue par la terreur.

2484. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre V. Le théâtre des Gelosi (suite) » pp. 81-102

Cette troupe demeura à Paris pendant trois années : long espace de temps, car les troupes italiennes avaient le caractère essentiellement ambulatoire.

2485. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XI. Il Convitato di pietra (le Convié de pierre) » pp. 191-208

Les masques ne pouvaient manquer d’y altérer étrangement le caractère poétique et mystique que lui avait conservé le moine espagnol qui la traduisit le premier à la scène.

2486. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Son caractère, son habit, une imagination abondante, n’avaient pu le défendre de la contagion.

2487. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre V. L’Analyse et la Physique. »

Ils admirent la délicate harmonie des nombres et des formes ; ils s’émerveillent quand une découverte nouvelle leur ouvre une perspective inattendue ; et la joie qu’ils éprouvent ainsi n’a-t-elle pas le caractère esthétique, bien que les sens n’y prennent aucune part ?

2488. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VII. Développement des idées de Jésus sur le Royaume de Dieu. »

Une série de paraboles, souvent obscures, était destinée à exprimer les surprises de cet avènement soudain, ses apparentes injustices, son caractère inévitable et définitif 350.

2489. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XI. Le royaume de Dieu conçu comme l’événement des pauvres. »

La troupe élue offrait en effet un caractère fort mêlé et dont les rigoristes devaient être très surpris.

2490. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre V. Chanteuses de salons et de cafés-concerts »

Mais Sully-Prudhomme est timide d’esprit presque autant que de caractère.

2491. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VIII. Quelques étrangères »

Voici comment elle nous définit Lucie Altimare, « l’aventureuse », la plus significative de ses héroïnes : « Au fond, un cœur froid et aride, sans une palpitation d’enthousiasme ; au-dehors une imagination trompeuse qui grandissait toute sensation, qui augmentait toute impression… Au fond, un manque absolu de sentiment ; au-dehors, des rêveries sur les nobles utopies humanitaires, des aspirations flottantes vers un idéal incertain. » Et on nous fait connaître longuement « l’artifice de sa personne, un artifice si naturel, si absolu, si complet, qu’il la trompait elle-même, en lui donnant une fausse sincérité ; en devenant son véritable caractère, son tempérament, son sang, ses nerfs ; en la persuadant de sa propre bonté, de sa propre vertu, de sa propre supériorité ».

2492. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre III, naissance du théâtre »

Mais les grands Attiques protestèrent toujours contre ce serpent sonore dont le sifflement fascinait. « — Préférons, disait Platon, Apollon l’inventeur de la lyre à Marsyas l’inventeur de la flûte, c’est-à-dire un Dieu à un Satyre. » — Aristote condamne la flûte « parce que, loin de tempérer le caractère, elle l’excite à l’emportement, et que ses sons troublent la raison. » — « Que les Béotiens, s’écriait AIcibiade, soufflent dans les flûtes et les hautbois, puisqu’ils ne savent point parler.

2493. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1852 » pp. 13-28

* * * — Dans l’hypertrophie du cœur, la figure, après la mort, prend le caractère extatique.

2494. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre II. Le dix-neuvième siècle »

Stimuler, presser, gronder, réveiller, suggérer, inspirer, c’est cette fonction, remplie de toutes parts par les écrivains, qui imprime à la littérature de ce siècle un si haut caractère de puissance et d’originalité.

2495. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — M. de Voltaire, et M. de Maupertuis. » pp. 73-93

Lorsqu’ils étoient en France, on voyoit bien que leur caractère ne se convenoit pas.

2496. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre IV. La folie et les lésions du cerveau »

Et en effet, il n’est pas un seul caractère du rêve qui ne se rencontre dans la folie, et réciproquement : même incohérence dans les idées, mêmes associations fausses, mêmes raisonnements justes sur des principes faux, rapidité extrême des sensations et des idées, exagération des sensations, transformations d’une sensation interne en objet externe, etc.

2497. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre VII. Le langage et le cerveau »

Trousseau essaye d’expliquer ce fait en disant que ce malade a conservé la mémoire de l’acte et qu’il a perdu celle du signe ; mais l’acte lui-même est un signe, et ce malade ne l’emploie pas au hasard, il s’en sert parfaitement et correctement pour exprimer sa pensée, ce qui est le caractère essentiel du signe.

2498. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — I. La métaphysique spiritualiste au xixe  siècle — Chapitre III : Le présent et l’avenir du spiritualisme »

Pour reprendre sa marche ascendante, il faut qu’elle ose, il faut qu’elle travaille à s’enrichir et à se compléter, il faut qu’elle s’assimile ce qu’il y a de bon dans les écoles adverses, il faut qu’elle ne craigne pas trop une certaine division dans son propre sein, car la diversité des points de vue semble être un des caractères essentiels de l’esprit philosophique ; il faut enfin qu’elle prépare des matériaux à la reconstruction d’une philosophie nouvelle.

2499. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre septième. »

C’était le caractère de La Fontaine ; et c’est ce qui a rendu sa satire moins amère que celle de tant d’autres satiriques, qui ont pour les fous plus de colère que de pitié.

2500. (1860) Ceci n’est pas un livre « Mosaïque » pp. 147-175

* *  * Je suivais dernièrement le convoi d’un compositeur sexagénaire, mort en alignant des caractères d’imprimerie, sur le dernier feuilleton des Drames de Paris.

2501. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre III. Besoin d’institutions nouvelles » pp. 67-85

Cependant le véritable caractère d’une loi est d’être immuable, et non pas d’être transitoire ; d’être d’une application générale, et non point de ne recevoir que des applications particulières, locales et catégoriques.

2502. (1818) Essai sur les institutions sociales « Addition au chapitre X de l’Essai sur les Institutions sociales » pp. 364-381

J’avais signalé, toujours dans cet ordre d’idées, un phénomène que je croyais être le caractère métaphysique, le signe le plus énergique de l’époque actuelle, de l’âge où nous sommes de l’esprit humain.

2503. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre premier. Mme de Staël »

Elle n’a ni la distinction patricienne de celle qui écrivit Delphine, ni le sentiment virginalement poétique qui créa Lucile Edgermond, ni la grâce, la grâce aérienne qui est partout dans Mme de Staël et qui, dans le génie des femmes, est encore le meilleur caractère du génie !

2504. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVIII. Souvenirs d’une Cosaque »

Je ne reconnais plus la fille de la race d’Ivan le Terrible, — cette fille qui s’annonçait si bien, — qui (dit-elle) aurait tué un jour, aussi simplement qu’on avale un verre d’eau, un de ses frères, si on n’avait pas oublié les pistolets des fontes de la selle, — parce qu’en sautant une rivière, il avait pu voir qu’elle avait eu peur… Quelle débâcle de caractère quand il s’agit d’un livre !

2505. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXI. Mme André Léo »

Elle doit avoir cette espèce de caractère qui est de la volonté continue… Elle la prouvé, du reste.

2506. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXIV. Mme Claire de Chandeneux »

Rien de ces romans n’est dans la passion sincère, dans la vérité du caractère et des mœurs.

2507. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La Chine »

Sera-ce le Chinois, le Chinois, le plus faible de tous les peuples, qui se multiplie par la polygamie et se consomme par l’infanticide ; dont les troupes innombrables n’ont pu résister, même avec de l’artillerie, à quelques hordes armées de flèches ; qui, même avec l’imprimerie et quatre-vingt mille caractères, n’a pas su encore se faire une langue que l’étranger puisse apprendre ; qui, avec quelques connaissances de nos arts et la vue habituelle de notre industrie, n’a pas fait un pas hors du cercle étroit d’une routine de plusieurs mille ans… peuple endormi dans l’ombre de la mort, cupide, vil, corrompu, et d’un esprit si tardif qu’un célèbre missionnaire écrivait qu’un Chinois n’était pas capable de suivre dans un mois ce qu’un Français pourrait lui dire dans une heure.

2508. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Guizot » pp. 201-215

» Le cœur de Shakespeare, son caractère, ses actes, les milieux qui ont joué sur sa pensée ou qui l’ont pénétrée, enfin tout ce qui est le secret même de son génie en en faisant l’originalité, tout cela a manqué jusqu’ici, et tellement même qu’on a fini par dire, — dogmatiquement et comme si c’était la dispense de toute découverte : « Shakespeare est le seul biographe de Shakespeare ! 

2509. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Grèce antique »

La force parvenant à produire l’harmonie et les effets de la beauté, tel est le caractère de la Grèce antique dans les individus et dans les peuples.

2510. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « L’Angleterre depuis l’avènement de Jacques II »

Aucun historien ne s’est donné plus de peine pour dépouiller Jacques de tout ce qui peut grandir ou préserver un homme dans son esprit et dans son caractère.

2511. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Jacques Cœur et Charles VII »

Les leveurs d’empreinte qui viendront après nous et qui voudront prendre le plâtre de cette grande Morte du xixe  siècle, de cette époque qui aura vécu dans la turbulence et dans l’inquiétude, trouveront sur son front deux caractères ineffaçables, à travers lesquels il sera toujours aisé de la reconnaître : — l’individualisme dans la vie morale, et, dans la vie intellectuelle, la fureur de généraliser.

2512. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Histoire des Pyrénées »

« Le plateau pyrénéen, — dit-il dans son introduction, — ce plateau, dressé entre la France et l’Espagne, comme l’immense squelette d’un cétacé qui aurait échoué entre deux mers, a renfermé, depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos jours, tous les caractères, tous les éléments qui ont le droit d’inspirer ou d’obtenir une histoire.

2513. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes d’Amérique » pp. 95-110

Et s’ils le souffrent, ils sont donc devenus d’un bien excellent caractère ?

2514. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Montmorency » pp. 199-214

Renée a supérieurement raconté cette mort, dont il a senti la grandeur et dont il a fait admirablement ressortir le caractère.

2515. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Sévigné » pp. 243-257

L’esprit (disait ce docteur en cette chose) a pour essentiel caractère de surprendre, d’étonner, de remuer, de déranger, de faire coup de pistolet, lumière, bruit et trouée dans les cerveaux environnants !

2516. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes et la société au temps d’Auguste » pp. 293-307

Et c’est là précisément le caractère de son talent : il a de la vie, et même de la jeunesse, malgré les années, les expériences, les fatigues et les frottements contre les choses d’Allemagne !

2517. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Michelet » pp. 259-274

L’homme, puissant d’un talent qui touchait au génie, faisait un si grand mal alors que la Critique n’avait pas à s’attendrir sur son compte et ne pouvait songer à autre chose qu’à frapper implacablement sur les erreurs ou les songes de ce corrupteur de l’Histoire ; car le mensonge fut souvent le caractère de ses erreurs.

2518. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Crétineau-Joly » pp. 247-262

Son poinçon est une plume, émoussée par l’usage et par cette méticulosité qui est le caractère de beaucoup de prêtres, dans ce triste temps où tous ceux qui sont le plus faits pour se mettre au-dessus de l’opinion se mettent le plus au-dessous.

2519. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame de Sabran et le chevalier de Boufflers »

III Et, en effet, le caractère de cet inguérissable amour de la comtesse de Sabran pour le chevalier de Boufflers exprimé dans ces Lettres, est, ne vous y trompez pas !

2520. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « III. Donoso Cortès »

Chargés de vérité et pour ainsi parler, pavoisés de couleurs d’un grand talent, dont le caractère est l’éclat, ces trois volumes, comme le vaisseau que montait l’aïeul de Cortès pour aller à la conquête d’un monde, s’en vont à la conquête des âmes, qui sont aussi des mondes et peut-être plus difficiles à conquérir… Quelle que soit leur destinée, c’est un service rendu à l’Église que d’avoir pensé à les traduire et à les publier dans cette langue française qui n’est pas seulement, comme on l’a dit, la langue de la diplomatie et de la philosophie, mais qui est plus qu’une autre la langue de la propagation et de la foi.

2521. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVIII. Lacordaire »

Cette vie de Sainte, qui pouvait avoir le grand caractère ferme, austère, et surnaturellement édifiant des hagiographies, dignes de ce nom, n’a point cet effroyable et ennuyeux inconvénient.

2522. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXX. Saint Anselme de Cantorbéry »

Parler des hommes et des choses d’une époque, avec cette politesse qui est l’uniforme des hommes d’État, et un uniforme qui ne cache pas une bravoure, avec ce respect des faits accomplis qui est le caractère de l’école dont M. de Rémusat est sorti, n’est pas plus comprendre cette époque que toucher un objet avec l’extrémité des doigts n’est le saisir et le soulever !

2523. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXXI. Sainte Térèse »

Voilà, en effet, le caractère des œuvres de Sainte Térèse.

2524. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Th. Ribot. La Philosophie de Schopenhauer » pp. 281-296

C’est le caractère propre de la métaphysique de triompher des coups qu’elle se porte quand elle retourne contre elle son dard de scorpion.

2525. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Funck Brentano. Les Sophistes grecs et les Sophistes contemporains » pp. 401-416

Funck Brentano l’a écrite, cette histoire, à grand traits, peut-être trop rapides (il fallait s’appesantir) dans le commencement de son livre, et il a déterminé avec beaucoup de pénétration et de relief les caractères de cette sophistique… Eh bien, disons-le-lui !

2526. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Dargaud »

Auprès de ce chaste et mortel épisode du premier amour, raconté par Dargaud de manière à faire trouver une dernière larme aux yeux qui en ont le plus versé, nous aurions eu des scènes d’un autre caractère, moins troublantes peut-être, mais aussi touchantes, à coup sûr.

2527. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Gratry »

Et n’est-ce pas le plus frappant caractère de ce nouveau traité de la Connaissance de Dieu, que d’avoir creusé dans l’être et de n’y avoir vu jamais que ce qu’il y a dans la croyance universelle du monde, dans le sens traditionnel du genre humain, affermi et illuminé par la Révélation chrétienne, sans que la philosophie y puisse trouver un iota de plus !

2528. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Achille du Clésieux »

Chose rare, et qu’il faut savoir apprécier ce qu’elle vaut, l’émotion que le poète ressent et qu’il donne, cette émotion, contenue et continue, qui est le caractère de son poème, ne cesse pas une minute, dans ce récit en vers de plus de trois cents pages.

2529. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Edgar Quinet. L’Enchanteur Merlin »

Quel est, dans le parcours de ces vingt-quatre chants qui ne chantent pas, le caractère ou la passion qu’il ait marquée de sa griffe de flamme créatrice et qui doive augmenter, d’une seule personnalité immortelle, le Décaméron de personnalités idéales, dues aux grands poètes de tous les temps ?

2530. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Agrippa d’Aubigné »

Il était, par le caractère, une espèce de Balfour de Burleigh, — mais qui n’aurait jamais assassiné d’archevêque de Saint-André, — un Balfour de Burleigh d’une bonté inconnue au farouche Balfour, chevaleresque plutôt, au lieu d’être farouche !

2531. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Madame Ackermann »

Caractère contradictoire de tout ce qui est vraiment diabolique ici-bas : la sécurité de l’athéisme absolu et la souffrance, l’incompréhensible souffrance qu’il inflige à une âme !

2532. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Hector de Saint-Maur »

Elle n’était dans aucune tradition connue, dans aucun accent appréciable, sinon dans le sien… Elle avait le grand caractère virginal et divin de la Poésie dans sa pure beauté absolue.

2533. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Raymond Brucker » pp. 27-41

L’individualité de l’auteur s’y révélant bien moins que dans la publication d’un ouvrage, jusque-là inédit, les réimpressions sont des espèces de renseignements sur l’esprit public que le libraire suit toujours plus qu’il ne le précède… Mais quand, de plus, elles sont une rénovation de l’œuvre déjà publiée, quand l’auteur y apparaît derrière le libraire, quand, riche du bénéfice des années, l’écrivain change le caractère d’un livre qu’il juge et condamne, du haut des acquisitions de sa pensée, les réimpressions prennent alors une importance que la Critique est obligée de signaler.

2534. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Paul Féval » pp. 145-158

Dans Aimée, où il essaya de faire autre chose que de l’aventure, dans Le Drame de la Jeunesse, plus réussi, et où il révéla ce qu’il pourrait être, s’il voulait énergiquement remonter vers les hautes et profondes régions du roman ; dans Le Drame de la Jeunesse, où il reprit l’idée d’Aimée — l’influence des livres et du théâtre sur la pensée et la moralité modernes, l’altération du naturel par les réminiscences littéraires, la pose, la comédie éternelle jouée entre nous et Dieu, et qui nous empêche d’avoir l’originalité même de nos vices et de nos douleurs, — il poussa au comble du suraigu cette ironie15 qui est le caractère de son esprit et le symptôme de sa force, et qui pourrait faire de M. 

2535. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Prosper Mérimée. » pp. 323-336

… A ce compte-là, s’il fallait l’admettre, l’art du roman ne serait plus que la puissance « de bâtir un Alhambra sur une pointe d’aiguille », et l’art dramatique, composé autrefois de caractères, de passion et d’esprit — le plus que l’on pouvait en mettre, et on n’en mettait jamais assez !

2536. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XVI. Des sophistes grecs ; du genre de leur éloquence et de leurs éloges ; panégyriques depuis Trajan jusqu’à Dioclétien. »

Qu’on pense au genre d’éloquence qui devait naître d’une telle situation, et du caractère d’un peuple qui, extrême dans l’esclavage comme dans la liberté, mettait la même impétuosité à flatter ses maîtres ou ses tyrans, qu’elle en aurait mis autrefois à les combattre.

2537. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre IV. »

Tel est le caractère de l’hymne homérique à la Terre, à cette déité matérielle que, sous le beau ciel de l’Inde, célébraient les poëtes, et qu’ils montrent dans leurs vers féconde et inépuisable, ruisselante de fleuves et pavée de montagnes .

2538. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

Le poète n’a pas cru devoir ajouter, fût-ce en tout petits caractères : « d’après Euripide » ; et cette omission m’étonne un peu. […] L’intérêt de la tragédie est dans le développement des caractères et des passions ; l’intérêt du mélodrame est dans les combinaisons extraordinaires d’événements. […] Émile Augier n’a pas manqué de donner à Giboyer ce trait de caractère et de profession. […] Et ainsi le caractère de sa paternité est en étroit accord avec le reste de son personnage. […] Cette déviation du sujet (l’aventure de Lanspessade se substituant presque à celle de Rennequin) et cette déviation du caractère de Lanspessade lui-même, s’aggravent d’une composition souvent un peu embrouillée.

2539. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [1] Rapport pp. -218

C’est la prodigieuse faculté de Molière, de concentrer dans un personnage toutes les généralités que son caractère évoque, sans que sa particularité, vraisemblable, fréquente, étroite s’il le faut, nous en paraisse singularisée ou élargie. […] — ce drame, dis-je, a le défaut grave de surprendre, d’inquiéter, plutôt que d’émouvoir profondément ; et j’en crois démêler la cause dans le fait-exprès trop visible, dans l’arbitraire et non dans le nécessaire coup sur coup des situations que l’auteur, dirait-on, ne conçut pas en l’initiale genèse de son œuvre, mais invente au fur et à mesure du développement qu’il lui donne ; en réalité, elles n’éclatent pas de la rencontre des caractères tels qu’ils furent d’abord indiqués, ni du heurt des passions logiques en ces caractères, ni du propos primitif de la fable : au contraire, soudainement voulues et non antérieurement inévitables, elles obligent les caractères, les passions, à des modifications, sinon à des changes radicaux, et la fable à des détours, pour qu’elles puissent se continuer. […] Notez bien que ce n’est pas du tout la multiplicité, fut-elle contradictoire, des états d’âme, comme on dit aujourd’hui, que je réprouve en ce personnage ; moins que personne je tiens aux caractères dramatiques « tout d’une pièce », et il n’y a rien de plus nombreux, je le pense, que l’unité d’une âme. […] J’accorde qu’il est, plutôt qu’un caractère humain, un paradoxe moral. […] Jean Moréas : « Le caractère essentiel de l’art symbolique consiste à ne jamais aller jusqu’à la conception de l’idée en soi. » Ici apparaît la différence.

2540. (1903) La pensée et le mouvant

Donc il isole le caractère qui l’intéresse, il va droit à une propriété commune ; en d’autres termes il classe, et par conséquent abstrait et généralise. […] Notre première conférence portera donc moins sur le changement lui-même que sur les caractères généraux d’une philosophie qui s’attacherait à l’intuition du changement. […] Ce serait méconnaître la nature singulière de la durée, en même temps que le caractère essentiellement actif de l’intuition métaphysique. […] Et plus ils croyaient au caractère symbolique de la science, plus ils le réalisaient et l’accentuaient. […] Il fallait compter, disait-on, avec le caractère capricieux de la vie.

2541. (1929) Amiel ou la part du rêve

Il garde aujourd’hui encore un large public féminin, ayant eu, comme lui-même le reconnaît, beaucoup du caractère de ces vieilles demoiselles dont il cultivait chèrement l’amitié. […] Comme la profonde luxure est celle des continents, la grande avarice celle des Harpagon obligés par leur état à dépenser, la paresse ne prend ce caractère de passion que chez les gens occupés, comme le sera toujours Amiel. […] Mais ces récriminations grondeuses, ce caractère « avenaire » sont des composants nécessaires de l’esprit civique genevois. […] Il y a une sorte de félicité religieuse à retremper la force et le courage de nobles caractères. […] Rousseau, dans Héloïse, a voulu donner à sa compatriote genevoise le caractère prêcheur.

2542. (1881) Le roman expérimental

Ce caractère conquérant de la science, il l’admettait jusque dans le domaine des sciences de l’humanité. […] Il suffira que j’indique les caractères constitutifs de ce roman. […] Je passe à un autre caractère du roman naturaliste. […] La recette est connue ; il faut un dénouement et on retourne un caractère, à la suite d’une scène à effet. […] J’insiste particulièrement sur les caractères de l’esprit littéraire.

2543. (1841) Discours aux philosophes. De la situation actuelle de l’esprit humain pp. 6-57

Parcourez les douze siècles de l’histoire de l’Europe depuis le moment où l’Église Chrétienne sortit des décombres de l’Empire Romain envahi par les Barbares, jusqu’au moment où la Philosophie posa ses hardis problèmes, vous reconnaîtrez d’une manière indubitable un caractère commun à toute cette époque. […] Ainsi se forment de fragiles caractères, pleins de trouble et d’incohérence, ou de stériles et ingrates natures, n’ayant d’autre règle que l’égoïsme. […] Un des grands traits de l’Évangile, un des grands caractères de son auteur, et auquel l’Humanité a instinctivement reconnu en Jésus un inspiré de la vérité divine, c’est la justification de cette loi de la femme. […] Certes, ce ne sont ni les poètes, qui ont tant répété sur toutes les variations ce cri de douleur : Mon âme est triste jusqu’à la mort ; ni les philosophes, que tant de scepticisme accable ; ni les politiques, que tant de perplexité dévore ; ni les moralistes, qui ne savent quelle base donner à la morale ; ni les philanthropes, qui voient tous leurs efforts vains comme la fumée que le vent disperse ; ni enfin aucun de ceux qui ont réfléchi attentivement sur le caractère de notre époque.

2544. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1863 » pp. 77-169

25 mars À dîner chez Gisette, où chaque femme se met à confesser son caractère. […] — Ces dames seront-elles en costumes de caractère ? […] Les maisons publiques n’ont plus leur caractère de gros numéros ; avec leurs carreaux dépolis et éclairés, elles ont l’air de bar de New-York. […] » 17 décembre En regardant ces yeux, où les pupilles contractées sont dans une clarté verte comme des têtes d’épingles noires, ces yeux étranges et profonds et aigus et fascinants, ces yeux qu’on pourrait comparer avec leur cernure à des émeraudes montées dans de la fièvre, je pensais au danger qu’il y aurait à rencontrer trop souvent cette femme : danger, fait tout entier de l’immatérialité de la personne, du caractère surnaturel de ses yeux, de cet émaciement de ses traits d’une finesse presque psychique, de ce quelque chose de supra-humain qu’aurait une femme de Poe, qui serait une Parisienne.

2545. (1890) Journal des Goncourt. Tome IV (1870-1871) « Année 1871 » pp. 180-366

Un sinistre caractère, que le caractère de ce boulevard désert, avec ses boutiques fermées, avec les grandes ombres immobiles de ses kiosques et de ses arbres, avec son silence de mort, coupé de temps en temps par une sourde et fracassante détonation… Quelqu’un croit apercevoir, avec une lorgnette de spectacle, le drapeau tricolore flottant sur Montmartre. […] Je n’aurais jamais pu croire que huit mois d’absence, du centre du chic enlevassent ainsi à des individus le caractère, la marque, dite indélébile, du parisianisme. […] Quelqu’un parle des nationalités, déplore cette invention qui sort la guerre de son caractère courtois, de son caractère de duel entre les souverains. […] Attraper un peu, dans mon roman de la prostitution, un peu du caractère macabre qu’ont les crayons de Guys et de Rops. […] Parce que c’est dans le bas, que dans l’effacement d’une civilisation, se conserve le caractère des choses, des personnes, de la langue, de tout, et qu’un peintre a mille fois plus de chance de faire une œuvre ayant du style, d’une fille crottée de la rue Saint-Honoré que d’une lorette de Bréda.

2546. (1893) Alfred de Musset

Ces trois désastres ne lui attirèrent pas la moindre réprimande, parce qu’il s’en montra consterné. » Cette anecdote, qui semble d’abord puérile, jette une vive lumière sur les inégalités de caractère d’Alfred de Musset. […] Mais les caractères ne se tiennent pas ; par exemple, la Camargo « contredit à chaque instant la nature de son âme italienne par des formes de langage abstrait, par des exclamations métaphysiques, par des images et des comparaisons tout à fait en dehors du monde matériel et moral de l’Italie ». […] Ses graves défauts de caractère, ses torts dès le début, y sont peints avec une sorte de fureur. […] Si j’ai quelquefois souffert de la différence de nos caractères et surtout de nos âges, j’ai eu encore plus souvent lieu de m’applaudir des autres rapports qui nous attachaient l’un à l’autre. […] D’aucun côté — cette remarque est essentielle pour la connaissance de leurs caractères, — d’aucun côté il n’y a trace, au début de la rupture, de l’abîme de rancune et d’irritation que les mauvais services de leur entourage allaient creuser entre eux, et à leurs dépens.

2547. (1898) Ceux qu’on lit : 1896 pp. 3-361

Son caractère ne se dément jamais, son patriotisme et son dévouement à l’Empereur sont inébranlables. […] C’est qu’on aurait mal compris son caractère. […] Nous ne sommes plus au grand siècle où l’on cherchait dans toutes les productions du génie cette fermeté et cette sobriété de caractère qui étaient l’expression de la raison parfaite. […] Lavedan, malgré ses qualités de romancier, est un homme de théâtre, comme il l’a, d’ailleurs, plus que suffisamment prouvé : de là, ce don particulier de pouvoir résumer en quelques mots tout un caractère. […] J’y trouve celle-ci qui fait tout à fait honneur au caractère de l’Empereur.

2548. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LEBRUN (Reprise de Marie Stuart.) » pp. 146-189

C’est un caractère d’âge mûr, beau à la réflexion, mais qui en a besoin pour se justifier, et qui n’offre rien de ces dehors émouvants où se prend la foule au premier abord. […] Dans la pièce française on ne voit pas ces objets, et ils ne sont pas nommés ; la nourrice Anna redemande un peu vaguement à Paulet Ces lettres, ces écrits, ces secrets caractères, De ses longs déplaisirs tristes dépositaires.

2549. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « MÉLEAGRE. » pp. 407-444

qu’en allant au fond de l’art et de la poésie grecque, on arrive à je ne sais quel mélange de laideur et de beauté, et qu’on rejoigne le caractère sauvage, souvent rude et, en tous cas, plus compliqué, de la poésie du Nord, de la poésie shakspearienne ! […] Il est arrivé ainsi, au grand regret et déplaisir déjà de Fénelon en son temps, que la langue française poétique s’est vue graduellement appauvrir, dessécher et gêner à l’excès, qu’elle n’a jamais osé procéder que suivant la méthode la plus scrupuleuse et la plus uniforme de la grammaire 118, que tout ce qui est droit, licence et gaieté concédée aux autres poésies, a été interdit à la nôtre, et qu’on n’a fait presque nul usage, en cette voie, des conformités naturelles premières qu’on se trouvait avoir par un singulier bonheur avec la plus belle et la plus riche des langues, conformités que, deux siècles et demi après Henri Estienne, Joseph de Maistre retrouvait, proclamait hautement à son tour119, et qui tiennent en bien des points à la conformité même du caractère et du génie social des deux nations.

2550. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « M. Paul Verlaine et les poètes « symbolistes » & « décadents ». »

Mais ce livre offre déjà certains caractères originaux. […] C’est-à-dire qu’il mêle des rythmes d’un caractère non seulement différent, mais opposé.

2551. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, le 8 décembre 1885. »

Wagner se montre expérimentateur et j’eusse désiré justifier expérimentalement ce titre qu’il s’est maintes fois donné, mais le caractère de cette Revue ne me permettait pas de relever la magistrale empreinte qui caractérisera plus tard Wagner dans l’art fossile de notre temps, j’entends son socialisme naturaliste61. […] Il appartient à Luther, et peut être le caractère qu’il emprunte aux trois notes mi-sî-ré, l’a-t-il recommandé à Wagner.

2552. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIV » pp. 126-174

. — Leur caractère général. — Écrits relatifs aux précieuses. — L’abbé d’Aubignac, l’abbé de Pure, Somaise, Molière. […] Ils corrigent les vers médiocres, et font à ces dames des réputations d’esprit. » « Une précieuse », dit-il ailleurs, « doit avoir l’adresse de donner du prix à ses sentiments, de la réputation à ses ouvrages, d’assurer approbation à ses railleries, force à ses sévérités. » Les auteurs soudoyés étaient les ilotes de la république ; aussi se rencontrait-il des précieuses de mauvais caractère qui, oubliant la politique du corps, se donnaient habituellement le plaisir de mettre les auteurs et les beaux-esprits de ce genre à la gêne, et de mortifier leur vanité ; et elles se vantaient de cette habitude : mais leur sévérité, dit de Pure, était combattue par d’autres précieuses.

2553. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XVII, l’Orestie. — les Euménides. »

. — Caractère mythique d’Apollon. — Transformation de sa divinité solaire. — Médecin des corps et des âmes. — Dieu des pardons et des expiations. […] Le caractère des Euménides n’est pas moins changé que leur forme.

2554. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Première partie. De la parole et de la société » pp. 194-242

Selon quelques archéologues les mots ont eu, dans les langues primitives, une énergie par eux-mêmes, et indépendamment d’un sens convenu : d’autres archéologues sont allés plus loin encore, car ils sont allés jusqu’à attribuer à la parole écrite, aux caractères, une partie des prérogatives de la langue parlée. […] Remarquons ici en passant, à l’occasion des accents qui donnent la vie aux langues et qui sont un trait caractéristique de la physionomie des différents peuples, remarquons, dis-je, que la langue française, dépouillée d’accents plus qu’aucune autre langue, en est plus propre à remplir les fonctions de langue universelle, dont Dieu lui a imprimé le caractère.

2555. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Alphonse Daudet »

Vols, escroqueries, concubinage, prostitution du sentiment maternel, avilissement des caractères, vanités bêtes ou méchantes, c’est à lasser le dégoût lui-même, si on veut l’inspirer, et à impatienter l’âme la plus ferme et la plus tranquille. […] N’a-t-on pas mis des noms propres jusque sous les Caractères du brave La Bruyère ?

2556. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Poésies complètes de Théodore de Banville » pp. 69-85

Jay s’échauffât contre les romantiques, et que son repos en souffrît : ces haines vigoureuses n’entraient pas dans son caractère, il souriait et ne s’indignait pas.

2557. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — II » pp. 161-173

Je ne loge que chez des comtes, des marquis qui nous appellent des héros et qui nous trouvent encore le caractère aimable des Français.

2558. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Étude sur la vie et les écrits de l’abbé de Saint-Pierre, par M. Édouard Goumy. L’abbé de Saint-Pierre, sa vie et ses œuvres, par M. de Molinari. — II » pp. 261-274

Après avoir marqué le caractère singulier de la bienfaisance constamment prêchée et pratiquée par l’abbé, qui n’était point celle d’un cœur sensible et tendre, mais qui procédait avec méthode au nom d’une raison sincère et convaincue : « Il avait aimé pourtant, ajoute-t-il : c’est un tribut que l’on doit payer une fois à la folie ou à la nature ; mais quoique cette folie n’eût point porté d’atteinte à sa raison universelle, sa raison particulière en avait tellement souffert, qu’il fut obligé d’aller dans sa province réparer, durant quelques années, les brèches que ses erreurs avaient faites à sa fortune. » On n’en sait pas plus long sur les fredaines de l’abbé de Saint-Pierre, et sans Rousseau on n’en aurait rien soupçonné.

2559. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « M. Viguier »

L’étude désintéressée et sans terme, voilà proprement son caractère et sa devise.

2560. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Lettres de Rancé abbé et réformateur de la Trappe recueillies et publiées par M. Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont-Ferrand. »

Ce dernier caractère se retrouve partout dans la correspondance de Rancé ; même lorsqu’il prend la plume, je l’ai dit, il va sans cesse au but, il coupe court aux phrases.

2561. (1874) Premiers lundis. Tome II « Mémoires de Casanova de Seingalt. Écrits par lui-même. »

De toutes les beautés dont Casanova nous entretient dans ces premiers volumes, celle qui est reine évidemment, celle qui lui a laissé la plus profonde empreinte, et pour laquelle il démentirait le plus volontiers sa définition un peu outrageuse de l’amour que, ce n’est qu’une curiosité plus ou moins vive, jointe au penchant que la nature a mis en nous de veiller à la conservation de l’espèce ; cette femme mystérieuse, appelée Henriette, qu’il rencontre la première fois en habit d’officier, et qui se trouve être une noble personne française, ne diffère pas notablement, par le caractère, de dona Lucrezia, ni de tous ces cœurs d’amantes voluptueux, passionnés, non jaloux et capables de séparation.

2562. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre III. L’écrivain »

Un petit mot de son éclair fuyant leur dévoile tout un tableau ou tout un caractère ; une clarté prolongée et forte émousserait leur regard.

2563. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « I. Leçon d’ouverture du Cours d’éloquence française »

Il prit la méthode, plus dure et plus lente, qui recueille tous les documents utiles pour illuminer des écrits, en déterminer le caractère, limiter et contrôler la réaction subjective du goût à leur contact.

2564. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « II  L’esprit scientifique et la méthode de l’histoire littéraire »

On en pénètre mieux le caractère, on en suit plus exactement le dessin, à mesure que les documents sont rassemblés en plus grand nombre et critiqués plus sévèrement, à mesure que l’on élargit et que l’on assure mieux les bases sur lesquelles portent les généralisations.

2565. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Banville, Théodore de (1823-1891) »

Ces Idylles prussiennes, sur lesquelles je veux particulièrement insister, ne sont pas seulement les plus belles poésies du volume, mais elles portent avec elles un caractère de nouveauté si peu attendu et si étonnant, qu’en vérité on peut tout croire de la puissance d’un poète qui, après trente ans de la vie poétique de la plus stricte unité, apparaît poète tout à coup dans un tout autre ordre de sentiments et d’idées, — et poète, comme certainement jusque-là il ne l’avait jamais été !

2566. (1890) L’avenir de la science « Préface »

La plante ne vaut que comme produisant des fleurs, des fruits, des tubercules nutritifs, un arôme, qui ne sont rien comme masses, si on les compare à la masse de la plante, mais qui offrent, bien plus que les feuilles, les branches, le tronc, le caractère de la finalité.

2567. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIII. Premières tentatives sur Jérusalem. »

Les constructions hérodiennes le disputent aux plus achevées de l’antiquité par leur caractère grandiose la perfection de l’exécution, la beauté des matériaux 596.

2568. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre II » pp. 12-29

Tel fut le caractère des familles de Vivonne et d’Angennes.

2569. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Cours de littérature dramatique, par M. Saint-Marc Girardin. (2 vol.) Essais de littérature et de morale, par le même. (2 vol.) » pp. 7-19

C’est ainsi que, prenant un à un les différents sentiments, les différentes passions qui peuvent servir de ressorts au drame, il nous en fait l’histoire chez les Grecs, chez les Latins, chez les modernes, avant et après le christianisme : « Chaque sentiment, dit-il, a son histoire, et cette histoire est curieuse, parce qu’elle est, pour ainsi dire, un abrégé de l’histoire de l’humanité. » M. de Chateaubriand avait, le premier chez nous, donné l’exemple de cette forme de critique ; dans son Génie du Christianisme, qui est si loin d’être un bon ouvrage, mais qui a ouvert tant de vues, il choisit les sentiments principaux du cœur humain, les caractères de père, de mère, d’époux et d’épouse, et il en suit l’expression chez les anciens et chez les modernes, en s’attachant à démontrer la qualité morale supérieure que le christianisme y a introduite, et qui doit profiter, selon lui, à la poésie.

2570. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « De la question des théâtres et du Théâtre-Français en particulier. » pp. 35-48

Un autre aurait pu dire également : « Voilà mon drame qui passe. » Une chose entre autres qui m’a frappé dans ces événements si étonnants, et dont je ne prétends point d’ailleurs diminuer la portée, c’est, à travers tout, un caractère d’imitation, et d’imitation littéraire.

2571. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Montalembert orateur. » pp. 79-91

C’est ce caractère moral qui, répandu sur toute une vie, contribue beaucoup à l’autorité dès la jeunesse.

2572. (1904) La foi nouvelle du poète et sa doctrine. L’intégralisme (manifeste de la Revue bleue) pp. 83-87

Aussi, nous garderons-nous bien d’aggraver la situation en insistant à notre tour sur des questions de détail qui, aux yeux du lecteur ennuyé, se présentent avec tous les caractères de la chinoiserie.

2573. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Police générale d’une Université et police, particulière d’un collège. » pp. 521-532

On examinera s’il sait bien lire, si son caractère d’écriture est bon, s’il sait orthographier passablement, s’il connaît les chiffres de l’arithmétique et s’il n’ignore pas les premiers principes de sa religion.

2574. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « IX »

Qu’à cela ne tienne, « Chateaubriand n’est pas un exemple, c’est un caractère : il est unique. » Et M. de Gourmont ajoute : « Et uniques sont également les autres modèles que M. 

2575. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXII. La comtesse Guiccioli »

Le caractère de ce singulier génie, c’est d’être profond et mobile tout à la fois, — quelque chose comme un arc-en-ciel sur un gouffre… Or ce n’est pas le gouffre à sonder qui est difficile.

2576. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’empire russe depuis le congrès de vienne »

Caméléons qui prennent toutes les teintes, ayant dans l’esprit ces mouvements charmants du singe que Joubert discerne si bien dans l’esprit de Voltaire, ils sont, en raison de tout cela, de redoutables diplomates, mais, sans caractère comme tous ceux qui font beaucoup de personnages, ils n’ont à eux ni leur élégance, ni leurs mœurs, ni leur littérature, ni leurs vices.

2577. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. de Lacretelle » pp. 341-357

Il n’y avait peut-être, au commencement du siècle, que Le Génie du Christianisme qui se fût emparé de l’admiration publique avec cette puissance, mais le succès du Génie du Christianisme avait un autre caractère et une autre explication que celui des Méditations.

2578. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Sainte Térèse » pp. 53-71

Voilà, en effet, le caractère des œuvres de sainte Térèse.

2579. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VIII. M. de Chalambert. Histoire de la Ligue sous le règne de Henri III et de Henri IV, ou Quinze ans de l’histoire de France » pp. 195-211

Voilà pourquoi il s’est efforcé, dans cette introduction, de signaler les caractères trop oubliés quand il s’agit de bien juger le xvie  siècle, de cette monarchie fille aînée de l’Église et de l’hérésie, qui en brisait l’unité séculaire.

2580. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Fustel de Coulanges » pp. 15-32

Si les Germains, en se culbutant les uns sur les autres, entrèrent dans l’Empire, ils n’y restèrent point par leur propre force, ce qui est le fait et le caractère de toute conquête.

2581. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Goethe »

« Transition du caractère de Goethe, — dit M. 

2582. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VIII. Du mysticisme et de Saint-Martin »

Lui, dont les yeux sont fins et sûrs, n’a-t-il pas senti que, s’il les avait fixés profondément sur ce qui n’est pas seulement une distinction nominale, faite par la haute sagesse gouvernementale de l’Église, il n’aurait pu s’empêcher de voir, se détachant du fond commun des idées et des phénomènes imputés au Mysticisme, pris dans son acception la plus générale et la plus confuse, un autre mysticisme, ayant ses caractères très déterminés ; l’éclatante réalité, enfin, qui contient la vérité intégrale que la Religion seule met sous les mains de nos esprits, mais dont la Philosophie les détourne ?

2583. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « IX. L’abbé Mitraud »

Le caractère de son ouvrage est un vague immense sur toutes choses.

2584. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Le père Augustin Theiner »

Aux causes politiques de cette révolution, fille de tant de fautes séculaires, la philosophie, qui s’était développée depuis Luther, avait ajouté les causes morales, et, l’on ne saurait trop le répéter, c’est à l’influence épouvantable de ces causes morales, qui donnèrent à la Révolution ce caractère appelé satanique par un grand écrivain, que les jésuites auraient pu s’opposer avec le plus d’ascendant.

2585. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Monselet »

Telle est la donnée que Monselet a cru faire accepter à l’Imagination moderne, cette grande dégoûtée, mais, au demeurant, la meilleure fille du monde ; tel est le pivot sur lequel il s’amuse à faire tourner, et quelquefois avec beaucoup de souplesse de grâce, les divers épisodes d’une composition qui est au roman ce que la comédie à tiroirs est à la comédie de caractère.

2586. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Théodore de Banville »

Un poète individuel fonde une école parce que le succès ou l’admiration déduit une poétique de ses œuvres, parce que le chêne n’est pas responsable, après tout, des glands qui tombent autour de lui et qui poussent comme ils peuvent dans les mille hasards du terrain où s’enfoncent ses racines ; mais si un poète individuel fonde une école malgré lui, ou s’il accepte cet orgueilleux et dangereux titre de chef d’école, il s’y énerve, y expose et finit par y perdre l’originalité de son inspiration et le meilleur caractère de son génie.

2587. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Marie Desylles » pp. 323-339

Mais les lettres de Réa Delcroix ont, elles, ce caractère qu’il est impossible de ne pas les croire torrentueusement sorties du cœur pour tomber sans ratures sur le papier, salamandres vivantes dans un style qui est une flamme !

2588. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Gustave Flaubert » pp. 61-75

La Madame Bovary du roman manque du sentiment maternel, et c’est un des caractères de son type.

2589. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre V. Comment finissent les comédiennes » pp. 216-393

Même, son autre confrère, Hemippus, lui a dérobé un de ses plus plaisants caractères, et cette belle pensée… un vrai proverbe : Que les Athéniens étaient plus heureux que sages ! […] Ainsi cette comédie de Boissy a subi le sort de toute comédie qui n’est pas la comédie de caractère. […] Le mépris de La Bruyère pour Baron perce en plusieurs passages de cette vaste et vivante comédie : Les Caractères de ce siècle. […] Le Misanthrope, Tartuffe, Les Femmes savantes, L’Avare, Don Juan, les grands vices, les grands ridicules, les caractères hardis, Molière les avait épuisés, tout d’un coup. […] Savez-vous, je vous prie, un plus ignoble caractère, et ne faut-il pas que d’Ancourt ait appelé à son aide tout l’esprit qu’il avait en partage, pour nous faire accepter de pareilles hontes ?

2590. (1896) La vie et les livres. Troisième série pp. 1-336

La Bruyère considéra ses Caractères comme un simple appendice à une paraphrase de Théophraste. […] À quel trait de caractère correspond telle ou telle forme de chapeau ? […] Comme on sent, dans ce loyal effort où le crayon s’écache et où le pinceau quelquefois gicle, le souci de fixer fortement le trait qui en vaut la peine, le caractère qui est vraiment significatif ! […] Je sais bien ce qu’on peut répondre : un moraliste est presque toujours obligé de choisir des caractères nettement tranchés, de noter ce qui tire l’œil, de s’élever jusqu’au symbole. […] Les traits essentiels de notre caractère ethnique nous apparaissent avec un relief qui s’impose désormais à notre mémoire.

2591. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

De tous les caractères de ce génie si complexe et si riche, si fécond en aspects imprévus, si prompt aux évolutions hardies, ce qui a frappé le plus l’esprit du public, c’est une perpétuelle et souriante gaieté. […] Froidement, avec la patience du savant qui catalogue les caractères d’un objet, afin de le classer dans une espèce, une variété et un genre, Taine se mit à étudier et à décrire le cortège mouvant d’hommes et de choses qui passaient sous ses yeux. […] Les nobles processions de la statuaire grecque évoquaient en lui le souvenir des religions gaies, l’image des cités harmonieuses où la perfection du corps était regardée comme un des caractères de la divinité. […] De la structure psychologique dépendent étroitement les caractères de l’œuvre. […] En revanche, il a copieusement répliqué à ceux qui ont blâmé la subjectivité de ses pensées, sa complaisance à regarder l’intérieur de son moi, son manque de critérium et surtout le « caractère impressionniste » de sa critique.

2592. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

À travers ces variations, cette évolution sur les mêmes rythmes, toujours ce caractère fondamental du prédicateur sociologique, religieux ou historien ; ce caractère principal dans la forme, du développement, ce qui le constitue rhéteur, et des plus doués. […] Il serait bon de reconnaître dans les œuvres d’intellect, complètes ou partielles, ce caractère d’intelligence qu’elles ont ; l’allégation que tel pourrait faire, qu’il n’était encore que comateux lorsque florissait Sue, suffit à expliquer son aire mais non à légitimer son parallèle. […] Chez Dostoiewski, plus souffrant, moins équilibré, et plus attentif aux souffrances et au choc des souffrances sur les individus qu’aux destinations qu’elles leur préparent, plus enclin à dramatiser, les choses prennent souvent ce caractère un peu outré, qu’on trouve dans la Femme d’un autre, etc. […] De même pour la moralité de la poésie, c’est le caractère didactique et prêcheur de la morale courante et philosophique que Poe lui interdit, car qui dit vérité dit moralité, le bien pour l’individu comme pour l’espèce consistant simplement à mettre de la logique et de l’accord entre sa destination perpétuelle et les phases momentanées de sa vie. […] Ces caractères marquent une série d’œuvres diverses, soit, parmi tant, l’Amour suprême, la Maison du bonheur, Véra, le Phantasme de M. 

2593. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIe entretien. Épopée. Homère. — L’Iliade » pp. 65-160

Les bataillons, comparés aux nombreuses bandes d’oies sauvages, de grues, de cygnes au cou allongé, qui volent en se jouant sur les rives du Caystre (fleuve des environs de Smyrne, où j’ai planté moi-même un jour ma tente), se répandent dans la plaine arrosée où coule le Scamandre, fleuve tari d’Ilion. » Une revue des chefs, des soldats et des peuples, dénombrés et dénommés par la muse au poète, revue semée d’anecdotes nationales et qui donne à toutes les peuplades de la Grèce leur caractère et leur gloire propre, termine magnifiquement ce chant. […] Aucun poète dramatique n’a mieux gravé, mieux varié et mieux conservé tous les caractères. […] Voulez-vous connaître l’origine, le costume, le caractère, la géographie, les mœurs des nations qui peuplaient alors les confins de l’Asie et de l’Europe : le poète vous les montre du doigt, vous les décrit et vous les raconte, peuplade par peuplade, et pour ainsi dire homme par homme, dans cette double revue passée sous vos yeux dans la plaine de Troie !

2594. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion dynamique »

Il y a pourtant une différence entre les deux cas, et, si l’on en tient compte, on verra s’atténuer, en matière de religion, l’opposition entre le « statique » et le « dynamique » sur laquelle nous venons d’insister pour mieux marquer les caractères de l’un et de l’autre. […] On pourrait même se demander si ces enseignements abstraits ne sont pas à l’origine du mysticisme, et si celui-ci a jamais fait autre chose que repasser sur la lettre du dogme pour le tracer cette fois en caractères de feu. […] On construit a priori une certaine représentation, on convient de dire que c’est l’idée de Dieu ; on en déduit alors les caractères que le monde devrait présenter, et si le monde ne les présente pas, on en conclut que Dieu est inexistant.

2595. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1889 » pp. 3-111

On cause du discours de Renan à l’Académie, et comme je me laisse aller à avouer toute la révolte de la franchise de mon esprit et de mon caractère, à propos du tortillage contradictoire de sa pensée, du oui et du non, que contient chacune de ses phrases parlée ou écrite, Mme Daudet, en une de ses charmantes ingénuités qu’elle a parfois, laisse tomber, comme si elle se parlait à elle-même : « Oui vraiment, il n’a pas le sentiment de l’affirmation !  […] » Puis cette foule de voyous, magnifiquement effrayants sous leurs blouses, dans le moderne de leurs vêtements, en leurs travestissements de pêcheurs de Masaniello, ayant perdu tout caractère, ayant l’air d’une mascarade historique de chienlits de la Révolution. […] Un ciel mauve, où les lueurs des illuminations mettent, comme le reflet d’un immense incendie, — le bruissement de pas faisant l’effet de l’écoulement de grandes eaux ; — une foule toute noire, de ce noir un peu papier brûlé, un peu roux, qui est le caractère des foules modernes, — une espèce d’ivresse sur la figure des femmes, dont beaucoup font queue à la porte des water-closet, la vessie émotionnée ; — la place de la Concorde, une apothéose de lumière blanche, au milieu de laquelle l’obélisque apparaît avec la couleur rosée d’un sorbet au Champagne ; — la tour Eiffel faisant l’effet d’un phare, laissé sur la terre par une génération disparue, — une génération de dix coudées. […] C’est maintenant de la peinture opaque, de la peinture mate, de la peinture plâtreuse, de la peinture ayant tous les caractères de la peinture à la colle.

2596. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre II, grandeur et décadence de Bacchus. »

. — Caractère rural de son premier type. […] Par la culture universelle de la vigne, eu Afrique, en Asie, en Thrace, Bacchus avait des frères ou des proches parents de caractère barbare et de tournure orientale qui tentaient parfois de le supplanter, et que les Grecs eux-mêmes acceptaient ou prenaient pour lui.

2597. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

Elle nous éclaire d’avance sur le caractère de l’auteur et nous révèle le vice secret de l’œuvre. […] C’est ce qu’il a fait dans le poème de La Justice, le plus récent et le plus considérable de ses ouvrages, et dont lui-même a déterminé l’intention, expliqué le titre, marqué le caractère en quelques mots que nous devons recueillir.

2598. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Appendice aux articles sur Roederer. (Voir page 393.) » pp. 533-543

C’est un petit épisode qui a un caractère parfait d’originalité, et qui montre, comme si l’on y était, le genre d’esprit et de vie d’un héros.

2599. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Variétés littéraires, morales et historiques, par M. S. de Sacy, de l’Académie française. » pp. 179-194

c’est là précisément le caractère de M. de Sacy, sa marque propre et distincte entre nous tous.

2600. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mélanges de critique religieuse, par M. Edmond Scherer » pp. 53-66

Le caractère scolastique essentiel à la pensée de De Maistre est parfaitement mis à nu et démontré.

2601. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Parny poète élégiaque. » pp. 285-300

Un tel poème, qui n’aurait pas eu d’inconvénient lu entre incrédules, aux derniers soupers du grand Frédéric, et qui aurait fait sourire de spirituels mécréants, prit un tout autre caractère en tombant dans le public : il fit du mal ; il alla blesser des consciences tendres, des croyances respectables, et desquelles la société avait encore à vivre.

2602. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « La Réforme sociale en France déduite de l’observation comparée des peuples européens, par M. Le Play, Conseiller d’État. »

Dans tout état de société, — qu’il s’agisse de la Russie méridionale et des paysans agriculteurs, chez qui la religion n’empêche sans doute ni l’intempérance, ni la ruse, ni la fraude, ni bien des vices, mais à qui elle inspire un pieux et absolu respect dans les rapports des fils aux parents, « une résignation stoïque dans les souffrances physiques et morales, et, en présence de la mort, une assurance, une sérénité qui a parfois un véritable caractère de grandeur » ; — qu’il s’agisse, tout au contraire, des peuples et des régimes les plus avancés, tels que l’Angleterre, chez qui les hautes classes et les lords peuvent être dissolus à leur aise, mais que gouverne réellement et que maintient avec fermeté, en présence des masses chartistes, l’immense classe bourgeoise ou rurale moyenne, tout imprégnée de la Bible et de la forte moralité qui en découle ; — partout l’élément religieux, sous une forme ou sous une autre, lui a paru essentiel à la durée et à la stabilité des sociétés.

2603. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LA REVUE EN 1845. » pp. 257-274

Dans ces premières années de tâtonnements, le corps de doctrines critiques n’était pas encore formé ni dégagé ; la Revue avait plutôt le caractère d’un magazine.

2604. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — II »

Mais qui vous a dit, ô vous qui désespérez si légèrement du moyen le plus commode et le plus sûr ; qui vous a dit que ces révélations antérieures, vraies selon les époques, progressives comme le genre humain qu’elles ont élevé et transformé, ne doivent pas toutes se retrouver et aboutir en une révélation définitive, également inspirée, quoique d’un caractère différent d’inspiration, et qui, leur rendant à chacune leur vrai sens, saura absoudre et glorifier Dieu, apaiser et réjouir l’humanité ?

2605. (1875) Premiers lundis. Tome III « Sur le sénatus-consulte »

si vous tenez tant à mettre des contradictions en présence, je suis homme à vous proposer, moi aussi, mon amendement, et cet amendement, je le formule en ces termes : « Les ministres ne dépendent que de l’empereur, mais ils gardent en présence de l’empereur leur entière indépendance de jugement, de caractère et de langage. » Que si, encore une fois, on tient tant à faire antithèse et à mettre des contradictions aux prises, je propose celle-là.

2606. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre I. Origine des privilèges. »

À cet instant, le bienfaiteur, le sauveur est l’homme qui sait se battre et défendre les autres, et tel est effectivement le caractère de la nouvelle classe qui s’établit.

2607. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre III. Poésie érudite et artistique (depuis 1550) — Chapitre I. Les théories de la Pléiade »

Nous apercevons déjà un caractère de cette révolution littéraire : la volonté y a autant de part que la spontanéité.

2608. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Barbey d’Aurevilly. »

Cette croyance, si triomphalement affichée, à l’action du diable et à son ingérence dans les affaires humaines, peut paraître piquante, surtout quand on se rappelle le caractère si peu chrétien du catholicisme de M. d’Aurevilly.

2609. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « « L’amour » selon Michelet » pp. 47-66

Son livre est empreint d’une volupté très précise et très vive, mais d’une volupté d’un caractère religieux et même dévot.

2610. (1766) Le bonheur des gens de lettres : discours [graphies originales] « Le Bonheur des gens de lettres. — Premiere partie. » pp. 12-34

Il fixe alors cette vaste étendue du Ciel, cette immense Nature, qui, fiere dans toutes ses productions n’a point fait d’esclaves, elle n’a point bâti de murs, elle n’a point forgé de chaînes ; cet oiseau qui sur une aîle hardie, franchit l’espace, cet animal des bois qui erre sans guide au gré de son instinct, l’ouragan qui passe, tout parle éloquemment à son cœur, & il apperçoit au milieu de l’Univers la liberté, & il s’écrie : c’est à toi que j’adresse mes vœux, ame des nobles travaux, mere des vertus & des talens ; toi qui formes les ames vigoureuses, les esprits élevés & lumineux ; toi qui ne faisant point d’opprimé, ne fais point d’oppresseur ; toi dont la main sacrée grave dans le cœur de l’homme le caractère primitif de la Justice ; c’est à toi que je voue mes jours, conduis mes pas & ma langue ; je le sens, tu éleveras ma pensée, tu la rendras digne de l’Univers.

2611. (1863) Molière et la comédie italienne « Textes et documents » pp. 353-376

Ce qu’on a dit relativement à La Fausse Prude reçoit quelque vraisemblance du caractère fort impertinent dont Angelo Costantini (Mezzetin) a donné plus d’une preuve.

2612. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre V. L’antinomie esthétique » pp. 109-129

. — Le caractère antisocial de l’art décadent est encore plus fortement marqué.

2613. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre I. L’intuition et la logique en Mathématiques. »

Ce n’est pas cela que je veux dire ; en devenant rigoureuse, la Science mathématique prend un caractère artificiel qui frappera tout le monde ; elle oublie ses origines historiques ; on voit comment les questions peuvent se résoudre, on ne voit plus comment et pourquoi elles se posent.

2614. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIII. Dernière semaine de Jésus. »

Le premier et le dernier de ces sept jours avaient un caractère particulier de solennité.

2615. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XV, l’Orestie. — les Choéphores. »

. — Caractère du choeur des Choéphores. — La prière d’Électre. — Le frère et la soeur.

2616. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XI »

Admire qui voudra ce caractère métallique qui roule dans la vie, comme sur une voie ferrée, sans qu’aucune chose morale puisse le faire dérailler de sa ligne droite ; je ne le trouve, pour ma part, pas plus vrai qu’il n’est sympathique.

2617. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface du « Roi s’amuse » (1832) »

C’est un écrivain ainsi placé que, si son talent peut être contesté de tous, son caractère ne l’est de personne.

2618. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Bossuet, et Fénélon. » pp. 265-289

Un rapport d’humeur, une sympathie invincible, un je ne sçais quoi de romanesque dans le caractère de l’un & de l’autre, les lia bientôt étroitement.

2619. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — I. La métaphysique spiritualiste au xixe  siècle — Chapitre II : Partie critique du spiritualisme »

Le langage sans doute est un intermédiaire ; la sympathie et l’amour sont des liens, une multitude de consciences peuvent vibrer à l’unisson, comme il arrive dans l’enthousiasme et dans l’énergie des passions populaires ; enfin il y a entre tous les hommes un lien intime et secret, une essence commune, et, comme on l’a dit, une solidarité qu’il ne faut pas oublier ; mais, si intime que soit ce lien, il ne va pas, il ne peut aller jusqu’à effacer la limite qui sépare radicalement les esprits, à savoir ce caractère essentiel d’être présent à soi-même, ce qui implique que l’on ne peut être en autrui comme l’on est en soi.

2620. (1854) Préface à Antoine Furetière, Le Roman bourgeois pp. 5-22

Là est évidemment la clé du caractère de Furetière et l’explication de ses infortunes.

2621. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXVI. La sœur Emmerich »

Pour ceux donc qui lurent la traduction que M. l’abbé Cazalès en donna, il y a quelques années, et qui en furent émus, cette émotion de la première lecture sera certainement ravivée dans toute sa profondeur à la seconde ; mais les récits nouveaux qu’on nous donné, quoique très curieux souvent, très beaux toujours et partout marqués du caractère particulier et distinctif de ce que j’ai osé appeler le talent de la sainte Mystique, n’ajouteront rien à cette émotion ravivée et à la connaissance qu’on avait déjà de ce talent, qui, ne le fût-il pas d’une autre manière, par l’intensité seule de sa touche, serait encore surnaturel !

2622. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Jules Janin » pp. 137-154

Cet homme de sourire et de rire épanoui, de rondeur, de bonhomie, d’enfance de caractère, de pleine main, cet aimable et gai garçon n’eut jamais un seul grain de fatuité dans sa personne.

2623. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Eugène Fromentin ; Maxime du Camp »

C’est à ne rien comprendre à la consistance du caractère, et aussi — ce qui, du moins, est comique au milieu de tant de tristesse, — c’est à ne rien comprendre non plus à l’étonnante fascination exercée par cette vieille momie d’Académie sur les esprits qui semblent les plus vivants… « Agenouille-toi là-dessus, vieille ducaille ! 

2624. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre V. Les figures de lumière »

Évidemment non, car si l’égalité des lignes de lumière O₁B₁, et O₁″B₁, nous avertit que les moments O″₁ et B₁ sont bien contemporains, si donc O₁″B₁, conserve bien le caractère d’une ligne d’espace rigide, si par conséquent O″₁B₁, représente bien l’un des bras de l’appareil, au contraire l’inégalité des lignes de lumière O₁A₁, et O₁′A₁, nous montre que les deux moments O₁″ et A₁, sont successifs.

2625. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

Ceux qui parlent ainsi ne connaissent ni Vitellius ni César, non plus que le caractère de la force dont ils parlent. […] III Caractère et moralité du livre de M.  […] Il a donné à la sculpture moderne un caractère sérieux et monumental, pour lequel la sculpture moderne n’avait guère de penchant, tant elle était encore éprise des déesses païennes et des amours de la mythologie antique. […] Pour savoir les caractères de ce siècle, elle était mieux posée que Molière, mieux que La Bruyère. — Elle était mieux posée que l’usurier lui-même, cet avide et infâme moraliste qui, lui aussi, peut dire sa mésaventure à quiconque ose pénétrer dans son antre. […] Il pouvait être le premier dans le parti des gens d’affaires : il est resté à la tête des rêveurs ; d’ailleurs, son caractère s’accordait à merveille avec cette position qu’il s’était faite.

2626. (1891) La bataille littéraire. Quatrième série (1887-1888) pp. 1-398

Léon Hennique écrit : Un caractère, roman spirite, sorte d’apologie de la croyance aux esprits, très curieuse et très convaincue. […] Il était habillé comme pour sortir, mais le caractère altéré de sa physionomie témoignait de l’intensité de la crise qu’il avait subie et qui pesait encore sur tout son être. […] répliqua-t-il, rendu soudain à l’orgueil naturel de son caractère par la férocité de ma réponse, ose-le donc ! […] Le candidat, un ancien officier, rencontre un de ses soldats d’autrefois vendant un journal contenant des calomnies horribles sur son caractère. […] Si encore c’était au profit d’une silhouette, d’un caractère !

2627. (1895) Les mercredis d’un critique, 1894 pp. 3-382

Un dénouement doit toujours être la résultante mathématique, fatale, des circonstances, des passions, des caractères présentés et développés dans le courant de l’action. […] Il n’y a d’ailleurs pas que ces deux personnages dans ce livre qui ressemble singulièrement à une comédie, et qui a fourni à l’auteur l’étude de caractères très variés. […] J’ai la conviction que Luther porte, de concert avec le Danemark, la responsabilité de l’abaissement de notre bien-aimée Norvège. » Les idées aristocratiques ne sont pas défendues avec moins de véhémence contre les tendances démocratiques : « Car la distinction des caractères est le signe même de la vie, comme la confusion des caractères est le signe même de la mort. […] « La démocratie est une tendance vers cette abolition des caractères. L’aristocratie, au contraire, ayant pour base la distinction des caractères, est l’expression directe de la vie.

2628. (1912) Réflexions sur quelques poètes pp. 6-302

La contusion prit à la fin un caractère suspect, et le poète fut sur le point d’avoir la jambe coupée par les chirurgiens. […] Je me suis dit quelquefois qu’il y a bien dans du Bellay du caractère renfermé de Racine. […] L’affabilité, la douceur, la constance en amitié formaient le principal du caractère de Desportes. […] Mais pour le caractère général, le style de Rotrou est en avance, j’ose dire, sur celui de Corneille. […] D’un caractère âpre et pointilleux, Lebrun faisait preuve d’une sorte de vertu guindée.

2629. (1904) Le collier des jours. Souvenirs de ma vie

Ces premières lignes, écrites sur la page blanche de la vie, m’apparaissent comme tracées en caractères plus gros, plus espacés, au-dessus des lignes, qui, par la suite, de plus en plus se serrent et s’enchevêtrent. […] … Quel caractère ! […] Grand-père, très apitoyé, adoucissait beaucoup son caractère ; il restait près de moi et me racontait des histoires, un peu trop sérieuses et qui ne m’amusaient pas beaucoup. […] Sauf du côté de la chapelle, dans la partie qui contenait les classes, rien ne paraissait ancien et rien n’avait de caractère. […] En somme, dépouillée de son costume original, elle n’avait rien de très particulier dans l’aspect, mais son caractère était singulier ; sa manière de parler, ses gestes, tout me rappelait à chaque instant son origine et ce qu’elle contenait d’inconnu.

2630. (1899) Arabesques pp. 1-223

Le lecteur bénévole préférerait peut-être un écrit qui ne revête pas un caractère de polémique sur des faits exclusivement personnels. […] Tendances nouvelles Le caractère dominant d’une époque de transition comme la nôtre, c’est l’inquiétude des esprits. […] Or quels sont les caractères constants de cette œuvre ? […] Il affirma que l’homme, doué d’une pensée robuste, devait la vivre selon un maximum d’énergie et, par conséquent, vouloir, sans souci des préjugés tenus pour principes fondamentaux par le grand nombre, ce que son caractère et son tempérament lui imposent Ayant aboli, en lui, tout sentiment d’obéissance à une religion, à une morale ou à un maître pour n’écouter que ses seuls instincts, l’homme s’efforcera de s’élever au-dessus de lui-même en se créant une image de beauté dont les éléments seront pris dans la vie actuelle, mais dont l’ensemble devra la surpasser. […] Un Préambule Notre époque a pour caractère essentiel l’amour du mensonge.

2631. (1929) Critique et conférences (Œuvres posthumes III)

Dès lors, une forte et combien douce amitié nous unit étroitement, car nos caractères sympathisaient singulièrement. […] D’aspect sérieux, comme dans ce bout apaisé, sauf les soirs de Bullier, de la viâ sacra, la maison présente un caractère de strict confortable suffisamment engageant. […] Le caractère extrêmement susceptible de celui que pleurent les lettres françaises en fut-il la cause, ou bien quelque très inconsciente, en tout cas, inconséquence du tout jeune homme que j’étais ? […] — le fatras de préjugés amassés par l’esprit encyclopédique sur l’origine de notre civilisation ; qu’il dégage enfin, — et je crois bien qu’il est le premier, — le véritable caractère de la Renaissance. […] J’aime ces services qui sont si simples et auxquels participe toute l’assistance, bien qu’ ils gardent un caractère cérémonieux.

2632. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (3e partie) » pp. 5-79

À Balzac, ce romancier de caractère qui surprend sous sa loupe puissante les gestes et les dialogues des infiniment petits comme des infiniment grands, qui noue des milliers d’intrigues en une seule intrigue, qui les dénoue par un fil qui se casse dans son tissu, et qui serait cent fois plus comique que Molière s’il avait ce que vous avez, le style ! […] se dit-il, mot sublime de caractère, répondu dans sa conscience par un mot plus sublime encore : Dieu !

2633. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIe entretien. Molière et Shakespeare »

D’ailleurs ce Duncan est né d’un caractère si doux, il a rempli sa tâche de roi d’une manière si irréprochable, que ses vertus, comme des anges à la voix de trompette, s’élèveront contre la damnable atrocité du crime de sa destruction ; et la pitié, semblable à un pauvre petit nouveau-né tout nu, fendant les tourbillons, ou portée comme un chérubin au ciel sur les invisibles courriers de l’air, frappera si vivement tous les yeux de l’horreur de cette action que leurs larmes en éteindront le souffle du vent. […] Molière, qui ne ressemble à rien dans l’antiquité comique, rend en vers plaisants et merveilleux les plus facétieux détails des caractères humains ; il n’a point d’égal, comme il n’eut point de modèle.

2634. (1890) L’avenir de la science « X » pp. 225-238

Mais ces différences ne nuisent pas plus aux inductions générales que les variétés de caractère chez les individus n’entravent la marche des psychologues. […] Celui qui l’a fait si doctement vous répondra : « Analyser les œuvres de la pensée humaine, en assignant à chacune son caractère essentiel, découvrir les analogies qui les rapprochent les unes des autres et chercher la raison de ces analogies dans la nature même de l’intelligence, qui, sans rien perdre de son unité indivisible, se multiplie par les productions si variées de la science et de l’art, tel est le problème que le génie des philosophes de tous les temps s’est attaché à résoudre depuis le jour où la Grèce a donné à l’homme les deux puissants leviers de l’analyse et de l’observation 106. » L’érudition ne vaut que par là.

2635. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mars 1886. »

Ecraser le génie sous prétexte qu’il n’était pas chez Wagner doublé d’un grand caractère, c’est une besogne ingrate : peut-être bien, en allant au fond des choses, tomberons-nous d’accord sur un point, à savoir que la ville réputée la plus intelligente du monde, et que la nation réputée la plus chevaleresque du globe se compromettent singulièrement aux yeux de l’Europe attentive en se montrant si cruelles pour la mémoire d’un grand compositeur qui a fait craquer toutes les musiques, même la musique française, et qui, qu’on le veuille ou non, a sa place marquée dans notre admiration d’artiste. […] Si elle est réellement belle, je saurai l’admirer et rendre justice au génie de l’auteur, tout en méprisant son caractère, Je n’ai pas besoin, pour arriver à cet éclectisme, que l’on me commente éloquemment la fameuse maxime : « L’art ne connaît point de patrie. » J’ai l’esprit plus terre à terre.

2636. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — I » pp. 56-70

Lorsque les Commentaires de Montluc furent imprimés pour la première fois quinze ans après sa mort, en 1592, l’éditeur les fit précéder d’une dédicace « À la noblesse de Gascogne » qui est en des termes dignes de son objet : Messieurs, comme il se voit de certaines contrées qui produisent aucuns fruits en abondance, lesquels viennent rarement ailleurs, il semble aussi que votre Gascogne porte ordinairement un nombre infini de grands et valeureux capitaines, comme un fruit qui lui est propre et naturel ; et que les autres provinces, en comparaison d’elle, en demeurent comme stériles… C’est votre Gascogne, messieurs, qui est un magasin de soldats, la pépinière des armées, la fleur et le choix de la plus belliqueuse noblesse de la terre, et l’essaim de tant de braves guerriers… Sans faire tort aux autres provinces et sans accepter ces injurieuses préférences de l’une à l’autre, il est un caractère constant et qui frappe dans les talents comme dans les courages de cette généreuse contrée, et l’on ne saurait oublier, en lisant Montluc, que cette patrie de Montesquieu et de Montaigne, comme aussi de tant d’orateurs fameux, fut celle encore, en une époque chère à la nôtre, de ces autres miracles de bravoure, Lannes et Murat.

2637. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Les Chants modernes, par M. Maxime du Camp. Paris, Michel Lévy, in-8°, avec cette épigraphe. « Ni regret du passé, ni peur de l’avenir. » » pp. 3-19

Parmi les cinq écrivains qu’il rassemble si singulièrement, et dont il fait les hommes forts de sa race (ce qui ne saurait se soutenir de deux d’entre eux, à qui ce caractère de force convient médiocrement), il en est qui n’ont pas obtenu du premier coup cette admiration religieuse et ce grand silence, en supposant qu’on les leur ait jamais accordés.

2638. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Fanny. Étude, par M. Ernest Feydeau » pp. 163-178

Serait-ce parce qu’il y a dans l’espérance quelque chose de douteux, et que, lorsqu’elle se retire de la carrière de l’homme, cette carrière prend un caractère plus sévère, mais plus positif ?

2639. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Campagnes de la Révolution Française. Dans les Pyrénées-Orientales (1793-1795) »

Il avait sous lui près de lui, un autre général à physionomie singulière, à caractère original, et qui fut plus heureux : c’était Dagobert de Fontenille, natif du diocèse de Coutances, noble de condition comme de Flers, mais enthousiaste, mais animé du génie de la guerre, vu de trop loin et imparfaitement connu jusqu’ici, et qui prend dans la suite des récits de M. 

2640. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite et fin.) »

Je le sais bien, il y a beaucoup de gens à qui je suis comme une épine dans l’œil ; ils aimeraient bien être débarrassés de moi, et comme on ne peut plus maintenant attaquer mon talent, on s’en prend à mon caractère.

2641. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. » pp. 31-51

La nature humaine n’est peut-être pas toute plate, basse ou perfide ; il y a de l’honnêteté, de l’élévation, de la tendresse ou du charme en de certains caractères : pourquoi ne pas s’arranger pour en rencontrer quelques-uns, — ne fût-ce qu’un seul, — au milieu des inévitables bêtises, des méchancetés ou des ridicules ?

2642. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte. »

qu’il fallait donc à ce Cervantes âgé pour lors de cinquante-huit ans, touchant au soir de la vie, et dont nous venons d’indiquer, bien légèrement encore, les opiniâtres infortunes, qu’il lui fallait d’imagination puissante et flexible, de ressort de caractère, de bonne humeur toujours prête et inaltérable, d’expérience variée, amassée de toutes parts naïvement et sans calcul, richement diversifiée et abondante, pour savoir ainsi instruire en se jouant et railler sans amertume !

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