Et tremblant et ravi, l’on sort de la vulgaire salle où le miracle de cette essentielle musique s’est accompli, emportant avec soi, dans un nécessaire recueillement, l’indélébile souvenir de cette admirable ouverture de Tannhaeuser, de ce prodigieux et initial résumé de l’immense grandeur de ses trois babéliques actes. […] 1° La Religion se compose de mythes ou symboles, nécessaires parce que, toute religion étant la constatation de la fragilité de ce monde et avant pour fin d’en délivrer l’homme, elle a besoin du symbole mystique, du symbole miraculeux pour déterminer le peuple, inintelligent de cette fragilité, à poursuivre la tâche de sa libération. […] Saint-Saëns, à la fois une illusion et une impression ; et, wagnéristes, ennemis à la description musicale, nous trouvons ces descriptions du Maître nécessaires, autant que belles. […] Richard Wagner a deviné le rôle, nécessaire au théâtre, mais nullement essentiel à la musique, de la description.
Je ne répondrais pas même qu’à l’avènement de Louis XVIII ramenant la paix nécessaire et présentant la liberté future à la nation, un soupir involontaire d’humanité et de bonne espérance ne se soit échappé de la poitrine du poète citoyen. […] Ce prodige et cette bonne fortune se rencontrèrent, à l’heure où cela était nécessaire, dans Béranger. […] L’air populaire qui court les rues en sortant du Vaudeville, et que les bornes apprennent d’elles-mêmes à force de l’entendre répéter par les orgues ambulants, est un véhicule nécessaire pour porter la poésie narquoise ou politique de porte en porte, comme le facteur quotidien y porte une lettre, à cent mille adresses. L’air musical est nécessaire aussi pour graver le couplet dans la mémoire du peuple par l’obsession d’un écho qui redit un million de fois le même refrain.
Un tel Livre étoit nécessaire dans ce siécle, où le mérite des Poëtes Grecs étoit avili, ou ignoré. […] M. du Jardin, peu content de cette version, où il y a des retranchemens que les hommes vertueux jugeront nécessaires, en donna une nouvelle en 1742. en deux vol. […] Le traducteur tâche d’y expliquer les endroits les plus difficiles & les plus nécessaires, de la maniére à peu près qu’il en avoit entendu parler à du Fresnoy dans les conversations qu’il en avoit eues avec lui. […] Deux exils dans deux de ses Abbayes, lui donnerent ce loisir nécessaire pour les lettres.
C’est avant l’union nécessaire à la formation d’un nouvel être que l’élément sexuel, mâle ou femelle, semble généralement susceptible d’être affecté. […] Pourtant, lorsqu’un animal, après un nombre considérable de générations, atteignit enfin les profondeurs les plus obscures d’une habitation souterraine, on conçoit que l’inutilité et l’inactivité de son organe visuel en aient dû causer l’oblitération plus ou moins complète ; et que, dans le même temps, la sélection naturelle ait le plus souvent effectué d’autres changements dans sa structure, tels que, par exemple, un accroissement de longueur de ses antennes ou de ses palpes, comme une compensation nécessaire à sa croissante cécité. […] — L’organisation tout entière forme un tout dont les parties sont en relations mutuelles si étroites pendant leurs diverses phases de croissance et de développement, que, lorsque des variations légères affectent accidentellement un organe quelconque et s’accumulent par sélection naturelle, d’autres organes se modifient aussi peu à peu, par une conséquence nécessaire. […] Ainsi, selon moi, la sélection naturelle réussira toujours dans la longue suite des temps à réduire et à épargner tout organe, ou partie d’organe, qui aura cessé d’être nécessaire ou utile, sans que pour cela d’autres parties ou organes se développent en un degré correspondant, si ce développement est sans aucune utilité.
Ces quinze pas nécessaires à cet habile tireur, il a bien prouve qu’il les lui fallait, mais qu’à cette distance son coup d’œil était infaillible, quand journaliste à la veille — mais seulement à la veille — d’événements qui devaient amener un état de choses jugé si longtemps impossible, il voyait si clair le lendemain. […] Mais, pour cela, il est nécessaire de voir et d’atteindre à plus de quinze pas devant soi. […] Il n’a pas cru sérieusement le second Empire possible, parce qu’il n’avait pas vu le premier nécessaire. […] C’était un autoritaire par amour de l’ordre, absolument nécessaire aux sociétés humaines, et c’était un monarchiste qui n’ignorait pas que les dynasties ne représentent pas seulement leurs augustes personnes, mais la propriété héréditaire du pouvoir.
Maintenant, la distinction entre le clos et l’ouvert, nécessaire pour résoudre ou supprimer les problèmes théoriques, peut-elle nous servir pratiquement ? […] Mais il faut toujours se rappeler que la vie sociale était comprise dans le plan de structure de l’espèce humaine comme dans celui de l’abeille, qu’elle était nécessaire, que la nature n’a pas pu s’en remettre exclusivement à nos volontés libres, que dès lors elle a dû faire en sorte qu’un seul ou quelques-uns commandent, que les autres obéissent. […] Plus simplement : sans négliger le nécessaire, il a trop pensé au superflu. […] A elle de se demander ensuite si elle veut vivre seulement, ou fournir en outre l’effort nécessaire pour que s’accomplisse, jusque sur notre planète réfractaire, la fonction essentielle de l’univers, qui est une machine à faire des dieux.
Ce fut M. de Choiseul qui, sans être peut-être au-dessus de lui par la naissance, mais en y joignant de tout temps les façons et l’état d’un grand seigneur, sut gagner cette influence nécessaire, et la justifia en définitive par sa capacité. […] Un dictateur est nécessaire quand la république est en danger. » Et plus loin, tournant toujours dans le même cercle, il redit la même chose, un peu moins à la romaine : « Il faudrait un débrouilleur général.
L’établissement de l’École militaire vers le milieu du siècle suivant, et dont le principal honneur revient à Pâris-Duverney, fut le complément nécessaire de ces fondations monarchiques, et remplaça ce que les compagnies de cadets avaient d’insuffisant. […] Elle voulait que les Dames parlaient hardiment à leurs élèves de l’état de mariage, et leur montrassent le monde et ses conditions diverses telles qu’elles sont : « La plupart des religieuses, disait-elle, n’osent pas prononcer le nom de mariage ; saint Paul n’avait pas cette fausse délicatesse, car il en parle très ouvertement. » Et elle était la première à en parler comme d’un état honnête, nécessaire, hasardeux : Quand vos demoiselles auront passé par le mariage, elles verront qu’il n’y a pas de quoi rire.
Ne lui demandez pas de se soigner, de se relire : « Mes affaires et mes amis, dit-il, ont besoin de moi, et le peu de temps qu’on me laisse est mieux employé à composer qu’à m’appesantir sur des révisions de style… Si je me contraignais pour me rendre méthodique, je suis certain que je serais moins lu encore que je ne le serai dans toute la pompe de la négligence et des écarts2. » Dans la Théorie de l’impôt, qui est censée une suite à l’entretiens ou discours tenus et prêchés à Louis XIV par Fénelon, cet éloquent prélat parle le plus rébarbatif des langages ; il dira que « l’honneur, ce gage précieux dont le monarque est le principal et presque le seul promoteur, a comme toute autre chose, son acabit ou son aloi nécessaire ». […] Il lui rend, comme on dit, la monnaie de sa pièce, et le réfute gaiement par une série et comme un feu roulant de questions ad hominem : Je reçois, mon cher Vauvenargues, votre lettre du 22 du mois passé (septembre 1739) ; permettez à mon amitié de vous dire ce que je vous crois nécessaire : Que faites-vous à Verdun ?
Je travaille à inoculer les arts sur une tige étrangère et sauvage ; votre secours m’est nécessaire ; c’est à vous de savoir si l’emploi d’étendre et d’enraciner les sciences dans ces climats ne vous sera pas tout aussi glorieux que celui d’apprendre au genre humain de quelle forme était le continent qu’il cultive ? […] Votre secours m’est nécessaire.
Cela est très nécessaire pour la satisfaction de ceux qui ne savent pas la langue latine, et cela donne même du soulagement à ceux qui la savent, ne trouvant pas toujours les explications si prêtes. […] Le duc de Montausier, qui eut toujours des bontés pour lui, avait obtenu pour sa traduction d’Athénée le privilège nécessaire, mais ce privilège accordé et la traduction faite, pas un libraire ne s’en voulut charger : Enfin, s’écrie Marolles qui se décide à l’imprimer à ses frais (1680), enfin, pour ne pas frustrer la grâce du privilège obtenu par le généreux seigneur à qui cet ouvrage est dédié, j’ai osé entreprendre de faire cette édition pour vingt-cinq exemplaires seulement, laissant toutefois à l’imprimeur la liberté d’en prendre tel nombre qu’il voudra de copies pour lui, afin au moins que peu de personnes connaissent après moi que ce travail n’était peut-être pas si méchant qu’il dût demeurer éternellement enseveli dans les ténèbres de l’oubli.
Car Richelieu, rendons-lui à notre tour et après tant d’autres ce public hommage, avait en lui de cette flamme et de cette religion des lettres qu’eurent dans leur temps à un si haut degré les Périclès, les Auguste, les Mécènes ; il croyait que les vraiment belles et grandes choses ne seront cependant tenues pour telles à tout jamais, qu’autant qu’elles auront été consacrées par elles, et que le génie des lettres est l’ornement nécessaire et indirectement auxiliaire, la plus magnifique et la plus honorable décoration du génie de l’État. […] Il a un bon style et certainement aussi, en ces matières académiques, un bon esprit ; mais il abrège et dessèche tout plus qu’il n’était nécessaire.
Officier lui-même de la garde bourgeoise, et bientôt porté par les élections aux premières magistratures de sa ville natale, il fut envoyé à Paris en députation, afin de solliciter du gouvernement les fusils nécessaires à l’armement de la garde nationale. […] Les généraux et Merlin, en traitant un peu plus tôt qu’il n’était strictement nécessaire, cédèrent à des considérations fort admissibles alors, mais que nos lois actuelles interdisent aux commandants des villes assiégées.
« Ce que vous nommez défaut, Monsieur, je le regarde comme une qualité nécessaire et flatteuse à trouver dans les amis. […] Je conçois que votre générosité vous fasse dédaigner de recevoir le superflu, de quelque main qu’il vienne : il n’en est pas ainsi de ce qui est nécessaire pour vivre, et vous ne pouvez, sans m’offenser grièvement, me refuser de tacher de vous le procurer.
J’ai perdu mon bonheur, mon soutien, ma consolation dans ce monde horrible que je déteste déjà depuis dix ans, et que je ne supportais que parce que j’étais nécessaire à mon ami. […] Telle qu’elle était devenue et que l’expérience l’avait faite, c’était une personne toute pratique, sachant jouir des dédommagements à sa portée et consentir graduellement aux diminutions nécessaires.
Le manque du nécessaire absolu est une chose affreuse, parce que l’inquiétude du lendemain empoisonne le présent. » M*** avait raison, mais cela ne tranche pas la question. […] Ce n’est donc pas chose si aisée que d’associer le nécessaire et le bonheur : tout le monde n’entendra pas ceci.
Enfin, le travail des champs garde toujours une noblesse : il est si naturel, si nécessaire pour que l’humanité vive, qu’il en devient auguste ; c’est le travail antique, connu des patriarches et des rois. […] Mais peut-être n’est-il point nécessaire ou même est-il mauvais de tant aider à cette ascension : elle se fera d’elle-même, dans la mesure où il le faut.
. — Et c’est pourquoi il transforma les collèges classiques des petites villes en « collèges spéciaux », et surtout il constitua cet « enseignement moderne », si évidemment nécessaire dans notre démocratie, et dont on arrivera, espérons-le, à trouver la forme convenable. […] Il dit quelque part que les Grecs de la décadence « manquaient de ces fermes assises si nécessaires pour porter honorablement la vie ».
Les soucis esthétiques sont superflus ; ce métier ne touche pas à l’art : la conclusion négative est nécessaire, — si la raison du théâtre est de divertir, si, comme dit Barberou, ce qui est bien c’est ce qui amuse. […] Nous voyons au juste, maintenant, l’influence du milieu : il n’est pas une cause suffisante, il est un élément nécessaire.
Les soucis esthétiques sont superflus ; ce métier ne touche pas à l’art ; la conclusion négative est nécessaire, — si la raison du théâtre est de divertir, si, comme dit Barberou, ce qui est bien c’est ce qui amuse. […] Nous voyons au juste, maintenant, l’influence du milieu : il n’est pas une cause suffisante, il est un élément nécessaire.
Napoléon fut un de ces hommes ; mais chez lui, ce législateur qui aurait eu je ne sais quoi de sacré, ce sauveur assez puissant de tête et de bras pour ressaisir une société penchante au bord de l’abîme, et pour la rasseoir sur ses bases, n’avait pas à la fois le tempérament nécessaire pour l’y conserver. […] Législateur doublé d’un grand capitaine (ce qui était bien nécessaire alors), mais aussi compliqué d’un conquérant, il aimait avant tout son premier art, celui de la guerre ; il en aimait l’émotion, le risque et le jeu.
Il est cependant nécessaire que vous sachiez au vrai mes sentiments, et, s’il m’est permis de dire quelque chose de plus, que vous ne dédaigniez pas d’écouter mes très humbles remontrances, si vous ne voulez pas perdre monsieur votre fils. […] Je lui écrirai ce qu’il vous plaira ; je ne le verrai de ma vie, si vous le voulez ; j’irai même à la campagne, si vous le jugez nécessaire ; mais ne le menacez plus de l’envoyer au bout du monde.
Il ne la voulait que strictement nécessaire pour l’indépendance : mille écus de rentes, rien de plus. « Je suis un philosophe, disait-il (et quand je cite ses paroles, figurez-vous-les toujours relevées et comme redoublées par l’accent) ; un philosophe n’a besoin que de la besace et du manteau ; mais encore faut-il que la besace soit pleine et que le manteau soit propre. » Dès qu’il eut acquis ce nécessaire, il revint à Paris sous le Consulat, et, cette fois, bien résolu à ne plus lâcher pied.
Elle montre les gens de bien, par leur obstination à créer contre les impôts et ceux qui en abusent, venant en aide aux turbulents et leur prêtant main-forte comme il arrive si souvent : Les gens de bien, sans considérer que c’est un mal quelquefois nécessaire, et que tous les temps à cet égard ont été quasi égaux28, espéraient par le désordre quelque plus grand ordre ; et ce mot de réformation leur plaisait autant par un bon principe, qu’il était agréable à ceux qui souhaitaient le mal par l’excès de leur folie et de leur ambition. […] La première journée des Barricades se passe presque toute en plaisanteries contre elle : « Comme j’étais la moins vaillante de la compagnie, toute la honte de cette journée tomba sur moi. » Pour une personne de cet intérieur, elle comprend très bien du premier coup la nature de la révolte dans la ville, et ce désordre si vite et si bien ordonné : Les bourgeois, dit-elle, qui avaient pris les armes fort volontiers pour sauver la ville du pillage, n’étaient guère plus sages que le peuple, et demandaient Broussel d’aussi bon cœur que le crocheteur ; car, outre qu’ils étaient tous infectés de l’amour du bien public, qu’ils estimaient être le leur en particulier… ils étaient remplis de joie de penser qu’ils étaient nécessaires à quelque chose.
Louis XIV, religieux comme il est, croit qu’il est des lumières qui se proportionnent aux situations, et particulièrement à celle de roi : « Dieu qui vous a fait roi vous donnera les lumières qui vous sont nécessaires, tant que vous aurez de bonnes intentions. » Il croit qu’un souverain voit naturellement les objets qui se présentent, d’une manière plus parfaite que le commun des hommes. […] Comme il possède le secret, cette qualité royale nécessaire au succès autant qu’à la considération, et dont la seule absence rejette si loin tant d’hommes politiques : « car les grands parleurs, remarque-t-il, disent souvent de grandes badineries !
Le fameux Necker, qui était dans cette ville, brigua l’honneur d’être présenté au Premier consul de la République française : il s’entretint une heure avec lui, parla beaucoup du crédit public, de la moralité nécessaire à un ministre des Finances ; il laissa percer dans tout son discours le désir et l’espoir d’arriver à la direction des finances de la France, et il ne connaissait pas même de quelle manière on faisait le service avec des obligations du Trésor. […] Et c’est ici qu’il se trahit à ravir dans toute l’indécision naturelle de sa pensée : il propose à la fois deux plans parallèles, l’un de parfaite république, l’autre de monarchie exemplaire ; il construit tour à tour ces deux plans avec une grande habileté d’analyse, il les balance, et, les ayant pondérés de tout point, il dit à l’homme proclamé par lui nécessaire : « Prenez l’un de mes projets, ou prenez l’autre. » Puis, si on ne les prend pas, il se console par la vue de son propre idéal, et, comme tous les théoriciens satisfaits, il en appelle à l’avenir et au bon sens qui, tôt ou tard, selon lui42, est le « maître de la vie humaine ».
Toutes ses lettres, toutes ses confidences respirent ce noble et vertueux effort ; quelque carrière qu’il entreprenne, il n’est pas de ceux qui ne s’y portent qu’à demi ; c’est dans ces années véritablement qu’on peut dire qu’il a jeté les fondements de son âme : Pour ce qui me regarde, écrit-il (15 novembre 1737), j’étudie de toutes mes forces, je fais tout ce que je puis pour acquérir les connaissances qui me sont nécessaires pour m’acquitter dignement de toutes les choses qui peuvent devenir de mon ressort ; enfin, je travaille à me rendre meilleur, et à me remplir l’esprit de tout ce que l’Antiquité et les temps modernes nous fournissent de plus illustres exemples. […] Une circonstance piquante, c’est que le métaphysicien diplomate devient durant ce temps son agent d’affaire et de finances : M. de Suhm est chargé par Frédéric, à qui son père refuse le nécessaire, de négocier quelques emprunts d’argent auprès de l’impératrice Anne ou de son favori Biron, duc de Courlande.
Il est, qu’on me comprenne bien, la résultante nécessaire de sa double nature contradictoire, qui est infiniment grande relativement à l’homme, infiniment vile et basse relativement au Vrai et au Juste absolus. […] Il faut l’avouer, la prodigieuse bonne humeur poétique nécessaire au vrai grotesque se trouve rarement chez nous à une dose égale et continue.
« Il y a aux yeux de la raison une équation parfaite, absolue, nécessaire, entre l’idée de fin et l’idée de bien, équation qu’elle ne peut pas ne pas concevoir dès que le principe de finalité lui est apparu86. » Puisque la fin est le bien, la fin absolue de la création est le bien absolu ; or, ce bien nous apparaît comme sacré ou obligatoire. […] Mais d’autre part, en vertu de l’axiome que la fin absolue d’un être est appropriée à sa nature, et en vertu de cette observation que notre fin présente n’est pas appropriée à notre nature, il est nécessaire qu’à notre vie soient ajoutées une ou plusieurs vies, telles que nos penchants primitifs puissent y recevoir un contentement parfait.
Sa lettre à Villemain sur la liberté de l’enseignement commence en ces termes : « Vous n’aurez point de vacances cette année, monsieur le ministre, ni votre successeur l’année prochaine, s’il plaît à Dieu, car les catholiques ne veulent plus interrompre la guerre qu’ils livrent à l’enseignement de l’État… » Au nom d’un article de la Charte, au nom des serments d’août 1830, voici en fait ce que les catholiques, par l’organe de Veuillot, réclament : 1° Liberté pour tout citoyen d’ouvrir école ; 2° Liberté pour tout citoyen de fréquenter telle école que bon lui semblera, et d’y envoyer ses enfants ; 3° Formation d’un jury d’examen pour le baccalauréat, réunissant aux garanties nécessaires de science et de sévérité, les garanties non moins indispensables de moralité et d’impartialité, afin que devant ce jury, tout citoyen, sous le seul patronage de sa capacité et de son honneur, puisse demander le diplôme, quelle que soit l’école qu’il ait fréquentée, et quand même il n’en aurait fréquenté aucune.
Initié à la raison des choses, le lecteur n’aurait qu’à se laisser aller de toute sa conviction au récit, et à reposer son intelligence dans le spectacle à la fois varié et continu qui se produirait sous ses yeux par un développement nécessaire, et qu’il ne pourrait s’empêcher de voir ni de comprendre.
C’est moi qui ai désiré ardemment l’archevêché de Paris : quelles terribles affaires avons-nous contre un prélat (le cardinal de Noailles) qui, étant irréprochable dans ses mœurs, tolère le plus dangereux parti qui pût s’élever dans l’Église ; qui désole sa famille, et afflige sensiblement le roi dans un temps où sa conservation est si nécessaire. » Il faut le dire, cependant, cette vénération excessive pour la personne du vieux monarque n’est souvent qu’un devoir d’épouse qui honore madame de Maintenon ; il semble que ce soit le seul sentiment capable d’enlever cette âme froide à elle-même, et d’en tirer des accents de véritable émotion.
À vrai dire, ces termes précis, épineux à la scène, y sont peu nécessaires, suppléables souvent par le Geste, autre genre d’expression scientifique.
On dirait que, voulant être gais, ils ont cru nécessaire de s’éloigner le plus possible de ce qu’ils sont réellement, ou que, respectant profondément les sentiments qui faisaient le bonheur de leur vie domestique, ils n’ont pas permis qu’on les prodiguât sur leur théâtre.
Quand les parents aiment assez profondément leurs enfants pour vivre en eux, pour faire de leur avenir leur unique espérance, pour regarder leur propre vie comme finie, et prendre pour les intérêts de leurs enfants des affections personnelles, ce que je vais dire n’existe point ; mais lorsque les parents restent dans eux-mêmes, les enfants sont à leurs yeux des successeurs, presque des rivaux, des sujets devenus indépendants, des amis, dont on ne compte que ce qu’ils ne font pas, des obligés à qui on néglige de plaire, en se fiant sur leur reconnaissance, des associés d’eux à soi, plutôt que de soi à eux ; c’est une sorte d’union dans laquelle les parents, donnant une latitude infinie à l’idée de leurs droits, veulent que vous leur teniez compte de ce vague de puissance, dont ils n’usent pas après se l’être supposé ; enfin, la plupart ont le tort habituel de se fonder toujours sur le seul obstacle qui puisse exister à l’excès de tendresse qu’on aurait pour eux, leur autorité ; et de ne pas sentir, au contraire, que dans cette relation, comme dans toutes celles où il existe d’un côté une supériorité quelconque, c’est pour celui à qui l’avantage appartient, que la dépendance du sentiment est la plus nécessaire et la plus aimable.
Ce repos auquel la nature nous appelle, qui semble la destination immédiate de l’homme ; ce repos dont la jouissance paraît devoir précéder le besoin même de la société, et devenir plus nécessaire encore après qu’on a longtemps vécu au milieu d’elle ; ce repos est un tourment pour l’homme dominé par une grande passion.
Picard, qui n’aurait besoin que d’être écrite par Beaumarchais ou par Sheridan, pour être délicieuse, a donné au public la bonne habitude de s’apercevoir qu’il est des sujets charmants pour lesquels les changements de décorations sont absolument nécessaires.
Il faut pour cela que l’écrivain connaisse son lecteur autant qu’il s’en fait connaître, et juge d’avance l’effet que fera sur lui l’impropriété du terme, pour le contraindre à faire la correction nécessaire.
La conclusion de tout ceci, c’est qu’il faut se proposer de parler proprement et justement ; qu’il ne suffit pas même que les figures soient le produit spontané de l’esprit ; qu’il faut encore exercer sur ce que l’on écrit un contrôle sévère, et ne recevoir aucune métaphore, aucune figure d’aucune sorte, que lorsqu’on sent qu’elle est dans la circonstance l’expression propre, adéquate de la pensée, lorsqu’elle apparaît comme véritablement et rigoureusement nécessaire.
Une part de sa stérilité lui vient de cette sorte d’aristocratie anarchique qui, comme à Baudelaire, comme à Villiers de l’Isle-Adam, lui fit concevoir le dédain de certaines actions nécessaires.
l’amitié la plus solide & la plus éclairée pourroit-elle lui donner des conseils plus nécessaires & plus avantageux ?
Par la vertu de cette illusion, les hommes ressemblent à des sujets hypnotisés qui, ayant reçu pendant leur sommeil une suggestion, créent pour l’accomplir, sitôt que l’heure est venue, les circonstances et le décor qui leur sont nécessaires, modifiant et travestissant s’il, le faut le monde extérieur, et suscitant aussi dans leur âme toute nue germination de motifs, afin d’enraciner l’acte dans les régions profondes de leur volonté, de lui imprimer le sceau de leur personnalité coutumière.
Mais, à notre sens, un poëte complet, que le hasard ou sa volonté aurait mis à l’écart, du moins pour le temps qui lui serait nécessaire, et préservé, pendant ce temps, de tout contact immédiat avec les gouvernements et les partis, pourrait faire aussi, lui, une grande œuvre.
Il comprit combien une solide & élégante dialectique seroit plus convenable au barreau qu’une éloquence d’apparat ; combien on faciliteroit aux juges le moyen de voir clair dans une cause & d’opiner surement, si on préféroit, à l’adresse & aux faux raisonnemens de l’art, l’exposition simple des faits, les principes nécessaires pour décider les questions controversées, les conséquences qui en résultent, & enfin la discussion des difficultés.
De ces deux prémisses, la majeure a été cent fois réfutée ; c’est pourquoi nous n’avons pas cru nécessaire d’y insister.
Rappelez-vous toutes les études, toutes les connaissances nécessaires à un bon peintre, à un peintre né, et vous sentirez combien il est difficile d’être un bon juge, un juge né en peinture.
Ainsi les personnes qui ont acquis le sçavoir nécessaire pour connoître si l’ouvrage est bon ou mauvais sont les seules qui puissent en juger.
En attendant les miracles de son tombeau, nécessaires à la canonisation dont Rome, dit-on, s’occupe en ce moment, Wallon a posé le miracle, visible et tangible, des apparitions de l’héroïque Mystique qui a sauvé la France, et c’est ainsi qu’il aidera pour sa part à cette canonisation désirée… C’est, je crois, la première fois qu’un membre de l’Académie des Inscriptions ose, sur le sujet le plus contesté et le plus en proie aux fascinantes explications des imaginations hostiles, confirmer nettement la réalité du surnaturalisme dans l’Histoire, quand la tendance générale et presque universelle est de l’en chasser.
C’est d’elle qu’Ulpien dit qu’ elle n’est point connue naturellement à tous les hommes (comme l’équité naturelle), mais seulement à un petit nombre d’hommes qui ont appris par la pratique du gouvernement ce qui est nécessaire au maintien de la société .
On relèverait aisément dans les Contradictions, qu’on pourrait aussi bien intituler les Contrariétés, un certain nombre de jolies remarques sur les gens qui font les nécessaires, sur les personnes dénigrantes. […] Dès les premiers feuilletons du Publiciste, à la date de floréal an X, sous le titre de Pensées détachées, s’en trouvent quelques-unes du cachet le plus net, du tour le mieux creusé, — très-fines à la fois et très-étendues, très-piquantes et très-générales ; par exemple : « Un mot spirituel n’a de mérite pour nous que lorsqu’il nous présente une idée que nous n’avions pas conçue ; et un mot de sensibilité, lorsqu’il nous retrace un sentiment que nous avons éprouvé : c’est la différence d’une nouvelle connaissance à un ancien ami. » Et cette autre : « La gloire est le superflu de l’honneur ; et, comme toute autre espèce de superflu, celui-là s’acquiert souvent aux dépens du nécessaire. — L’honneur est moins sévère que la vertu ; la gloire est plus facile à contenter que l’honneur : c’est que, plus un homme nous éblouit par sa libéralité, moins nous songeons à demander s’il a payé ses dettes. » Elle entre à tout moment dans le vrai par le paradoxal, dans le sensé par le piquant, par la pointe pour ainsi dire ; il y a du Sénèque dans cette première allure de son esprit, du Sénèque avec bien moins d’imagination et de couleur, mais avec bien plus de sûreté au fond et de justesse : une sorte d’humeur y donne l’accent. […] Ce que j’appelle transaction n’était à ses yeux que la vérité même dans son ménagement humain nécessaire, mais sur sa base inébranlable.
Il s’approprie l’espace, par la place qu’il y occupe et dont on ne peut le priver qu’en le tuant ; il s’approprie le temps, par la durée plus ou moins prolongée qu’il lui emprunte ; il s’approprie la lumière, par le regard, qui fait entrer tout ce qui est visible dans son âme à travers ses yeux ; il s’approprie les bruits, les sons, les paroles, les significations des paroles, par l’oreille ; il s’approprie l’air nécessaire à sa poitrine, par la respiration ; il s’approprie les fruits et les aliments de la terre indispensables à sa conservation, par la main et par la bouche ; et, quelle que soit l’étendue de ses possessions ou de ses domaines, il ne peut s’approprier réellement et corporellement en effet que la partie de ces éléments ou de ces aliments nécessaires à ses cinq sens : le surplus, sous une forme ou sous une autre, retourne aux autres hommes, qui ont le même droit de vivre que lui. […] société sans ancêtres, société sans postérité, société sans propriété, société où la terre, qui a besoin elle-même de l’amour de son propriétaire pour être féconde, ne serait cultivée que par ordre des magistrats pour produire juste ce qui est nécessaire à la consommation du chiffre des hommes vivants, et dont les fruits mercenaires seraient distribués par rations égales à des râteliers du troupeau humain !
Il fallait que la Brie et le village de Faverolles, où il travaillait à quinze sous par jour pour nourrir neuf personnes, fussent bien dépourvus de toute humanité, pour qu’en frappant dans cette extrémité à la première porte venue où il y avait du pain noir ou blanc dans la huche, riche ou pauvre, même mendiant, ne lui prêtât pas un peu de son superflu ou de son nécessaire pour sauver la vie d’un soir à ces pauvres petits affamés. […] Hugo ; car, si la franchise est une vertu nécessaire, c’est envers Dieu et à cause de Dieu envers les hommes, et à cause de soi-même envers soi-même. […] Puis le besoin de venir en aide à mon pays, ce grand misérable, m’enlevait le loisir nécessaire à mon œuvre ; puis les calamités réelles de la misère relative m’atteignaient en me forçant à un travail de manœuvre arriéré pour que d’autres ne souffrissent pas par ma faute ; je fermais dans mon cœur la source de larmes sympathiques, et je travaillais saignant, comme je saigne encore, sous le fouet de la nécessité.
La comtesse de Scandiano était célèbre surtout par la beauté de ses lèvres autrichiennes ; cette circonstance est nécessaire à l’intelligence de ces vers : « Cette lèvre, colorée par les roses, s’avance légèrement humide et enflée comme par un artifice de l’amour lui-même, pour faire une insidieuse tentation au baiser. […] Il sera préalablement nécessaire cependant de constater qu’il a été réellement affligé de mélancolie, et que ces soupçons de malice et de prétendues persécutions qu’il a semés contre nous en Italie, n’ont pas d’autre origine que cette humeur mélancolique ; en preuve de ceci est cette accusation absurde qu’il nous a imputée d’avoir eu l’intention de le mettre à mort, quoique nous l’ayons toujours caressé et traité avec la plus extrême faveur ; il m’eût été bien facile d’exécuter ce sinistre projet, si j’avais eu jamais la démence de le concevoir. […] Comment la douce et tendre Léonora, devenue riche par l’héritage de sa mère, et confidente nécessaire de la fuite du Tasse, aurait-elle laissé son amant s’évader, sans habits et sans argent, de Bello Sguardo ?
On peut croire qu’elle fut vraiment, après l’excitation de la Renaissance, une forme nécessaire de l’esprit français : car, dès que l’apaisement des troubles civils et religieux donne le loisir et la sécurité, la littérature et la société se précipitent ensemble de ce côté. […] Il fut difficile aussi de parler à ce public de ce qui n’était pas lui : et par là la matière littéraire se restreignit encore ; l’homme, mais l’homme de la société, soumis aux rapports, aux lois, aux accidents sociaux, ayant affaire un peu a Dieu, beaucoup aux hommes, nullement à la nature, fut l’original nécessaire de tous les portraits. […] Les Voiture, les Malleville, les Sarrazin, les Godeau, les Saint-Amant, les Scudéry, les Scarron même lui opposent leur fantaisie : en eux se perpétue le lyrisme du siècle précédent, mais un lyrisme desséché, plus intellectuel que sensible on imaginatif ; leur art, très contraint dans son apparente liberté, n’est qu’un jeu d’esprit compliqué, dont la règle est de calculer toujours l’effet le moins attendu ou le moins nécessaire, pour le produire.
Quelques réflexions, qui n’ôteront rien à la gloire de Corneille, sont nécessaires sur ce point, soit pour justifier le goût de la nation, soit pour apprécier l’espèce d’autorité que voudraient tirer des défauts do Corneille certaines innovations téméraires dans le poème dramatique. […] Que d’artifices pour forcer l’intérêt, lequel naît sans effort, dans la tragédie de caractère, des rapports nécessaires qui lient les caractères aux situations ! […] Mais il n’y a pas d’exemple, dans un auteur sans génie, d’une pièce où le nœud soit formé des rapports nécessaires qui lient un caractère à une situation.
Dans la pensée de Descartes menant la raison en guerre contre l’autorité, il s’agit de l’autorité qui, par les lettres patentes de François Ier, condamnait Ramus pour crime de lèse-majesté contre Aristote ; qui, en 1624, bannissait de Paris, par arrêt du parlement, tous les professeurs convaincus d’irréligion aristotélique ; qui, jusqu’en 1671, menaçait de frapper de la même peine les gens suspects du même crime, et rendait nécessaire l’Arrêt burlesque de Boileau. […] A ses yeux Démosthènes « a la taille trop droite » ; il faut l’avoir « gracieuse. » Il ne dit que « le nécessaire » ; c’est trop peu. […] Cette précaution prise, on peut se donner le plaisir de les admirer, soit qu’ils appliquent à des réformes sensées les vérités spéculatives du siècle précédent, et que, dans un combat nécessaire contre les abus, ils se servent, au risque de les souiller de poussière, de ces belles armures de guerre enlevées du musée où elles pendaient oisives, soit qu’ils emploient la méthode et la langue du dix-septième siècle à exprimer des vérités nouvelles dans la science des sociétés humaines, ou des découvertes dans la science de la nature.
Elle fut plus moliniste qu’il n’était nécessaire de l’être, et n’évita pas ces mesquines vilénies qui sont comme la conséquence des idées arrêtées de l’orthodoxe et le rachat de ses vertus. […] Émery, prêtre instruit et gallican modéré, par la confiance absolue qu’il sut inspirer à Napoléon, obtint les autorisations nécessaires. […] Il fit peu de théologie ; on se contenta pour lui d’un minimum, et on l’appliqua tout d’abord aux cours de sciences, qui, dans le cadre des études ecclésiastiques, sont l’accompagnement nécessaire des deux années de philosophie.
Wagner est un génie qu’il est absolument nécessaire d’étudier, et nous devons tous savoir gré à M. […] J’y vois deux très grands services rendus aux compositeurs français : le premier, de ne plus les obliger à aller chercher en pays étranger des auditions nécessaires à leur éducation musicale : le second, d’ouvrir un débouché aux œuvres nouvelles de nos nationaux. […] Le président du Conseil a déclaré que, ne se croyant pas le droit d’interdire une représentation théâtrale tant qu’il n’y avait pas de troubles dans la salle, il avait pris toutes les mesures nécessaires pour assurer l’ordre dans la rue, en prévision de la seconde représentation de Lohengrin qui était fixée à ce soir, lorsque ce matin, M.
Est-ce là tout et aurons-nous dit le nécessaire, au moins, quand nous aurons repris avec quelque détail l’analyse de chacun des courants caractéristiques indiqués ici ? […] La défense de la religion catholique s’y rattache directement parce que l’auteur voit dans l’Église une force nécessaire à la vie active du pays. […] Mais si les détails du décor et de l’action sont réduits au strict nécessaire, si les scènes sont étrangement sobres de mouvement, les caractères des personnages y apparaissent fouillés par le scalpel d’un maître.
Au bout de quelques temps, il possédait tout le savoir et toute l’habileté nécessaires pour faire un excellent avocat. […] Son père, chargé d’une nombreuse famille, et d’ailleurs insouciant sur la conduite de ses affaires, ne lui fit pas parvenir à temps la somme nécessaire pour continuer ses études. […] Il n’aurait pas cru nécessaire, pour partager l’âme de son auditoire entre l’horreur et l’admiration, d’ajouter à cette donnée, assez riche par elle-même, un amour enthousiaste. […] La strophe, comme le chant et comme l’acte, n’est bien placée que là où elle est nécessaire : si elle peut être ailleurs, elle est inutile ou du moins est d’une utilité incomplète. […] Quand l’adultère se consomme, il est devenu nécessaire.
Toutes ces masses étaient nécessaires ; ne les vois-tu pas dans toutes les vieilles églises de ma ville ? […] S’il rencontre de jeunes lavandières, il songe aussitôt aux filles des rois qui remplissaient jadis elles-mêmes cette « fonction innocente et nécessaire ». […] Vous cherchez le nécessaire de la nature, mais sur une route si difficile que tout esprit moins fort que le vôtre se garderait bien de s’y aventurer. […] Dès la première contemplation des choses, vous auriez reçu en vous la forme du nécessaire, et, dès votre premier essai, le grand style se serait développé. […] Est-il nécessaire de souligner la hardiesse morale de ce thème ?
Il est nécessaire pour cela de bien lire et de tout lire, afin de savoir de quel côté vous entraîne votre goût d’assimilation. […] On a fait de l’amour une condition si exclusive du roman, qu’on est presque en droit de se demander s’il y est seulement nécessaire. […] Si l’amour n’est pas même nécessaire, pourquoi donc absorbe-t-il tout ? […] Il ne croyait pas non plus qu’il fut nécessaire de faire ses descriptions sur place. […] Flaubert est un prosateur de premier ordre que l’on peut placer après Chateaubriand et qu’il est absolument nécessaire de connaître à fond.
Mallarmé, il est nécessaire d’étudier la façon dont il s’intéresse à maints épisodes relevant de la sociologie et de l’esthétique générale. […] Il était nécessaire que quelqu’un protestât contre les charlataneries plus ou moins conscientes qui sont à la mode touchant M. […] Lorsque un organe autrefois nécessaire au développement d’une espèce lui devient inutile et par suite gênant, la fonction qui le produisit ne s’abolit pas brusquement chez tous. […] Sur la côte, la vigne lentement distille le vin de joie ; dans les prairies, les herbes croissent nécessaires aux bovins. […] Il est nécessaire qu’un poème nous expose nettement le sujet choisi par le poète sinon il y a équivoque, une glose devient nécessaire et cette glose même n’élucide souvent rien du tout.
S’il est impossible d’établir le rapport exact, nécessaire, de tel style à telle sensibilité, on peut cependant affirmer une étroite dépendance. […] L’homme a cette faculté de pouvoir changer, mais il ne peut changer spontanément : un ferment extérieur à la pâte est toujours nécessaire. […] Les échanges entre peuples sont aussi nécessaires à la revigoration de chaque peuple que le commerce social à l’exaltation de l’énergie individuelle. […] L’imitation des écrivains les uns par les autres, de ceux qui ne sont plus par ceux qui vont être, est un fait nécessaire et fort inutile à ériger en précepte. […] Comme on l’a déjà dit, il n’est pas nécessaire qu’un vers ait douze syllabes réelles, il faut qu’il paraisse les avoir.
Au premier abord cela rentre dans un cas assez ordinaire, l’opposition de deux générations, les autorités officielles représentant, comme cela est nécessaire, la génération plus ancienne. […] Mais il n’était pas nécessaire que ce livre d’analyse fût ce qu’est Dominique, un vrai roman. […] Amiel n’a pu en prendre qu’une conscience théorique, individuelle, inopérante, rien de cette réalité substantielle, de cette matière et de cette chair nécessaires pour former une critique bien vivante. […] J’en suis moi-même à me demander si la cristallisation de mes dogmes est nécessaire. […] Le grand nigaud, c’est la barrière nécessaire qui canalise le grand homme et la grande âme vers leur besogne propre.
Pour une coquetterie mentale, ou pour posséder des mots d’auteur, les voyez-vous abdiquer leur beauté et leur rôle nécessaire. […] Nous assistons à un mouvement naturel, nécessaire et fatal, destiné peut-être à bouleverser dans sa morphologie la surface terrestre, mais imposé par des lois cosmiques. […] Et elles constituent, pour ce poème, une ténébreuse et nécessaire apothéose. […] Ils sont garants de la santé publique, et ils sont nécessaires. […] Ainsi le poème est nécessaire et supérieur à la nature, puisqu’il s’affranchit des visions contingentes et triomphe de la mort.
Même dans la bourgeoisie, dans ces milieux un peu inférieurs qui n’ont pas toujours montré autant de sagacité et de prévoyance, la littérature est suspecte et discréditée comme le contraire de ce raisonnable et substantiel esprit de conduite nécessaire à qui veut prendre la vie du côté positif et productif. […] Seulement M. de Balzac avait tout juste les qualités nécessaires pour exceller à ne pas les peindre. […] Ils lui servent ordinairement de prétexte pour développer un trésor de connaissances supplémentaires qui jusqu’ici n’avaient pas paru bien nécessaires au talent d’un conteur. […] J’ai pris les mesures nécessaires pour empêcher cette indignité. […] Ceci nous remet en présence de Richelieu, le terrible prédécesseur de ce despotisme nécessaire.
Depuis près de deux siècles, aucun gouvernement, aucun système d’enseignement ne l’a retranché des études nécessaires. […] Les esprits médiocres, qui ne sont que les esclaves de la mode, s’y jetaient sans réserve, et vivaient de cette fumée ; les hommes de génie, tant le succès leur est nécessaire, l’auraient cherché dans le galant plutôt que de s’en passer. […] Il lui est arrivé de dire qu’un bon poète n’est pas plus nécessaire à la république qu’un bon joueur de flûte. […] Boileau n’entre pas dans cette métaphysique des genres : ce n’était ni dans son plan, ni propice aux développements poétiques, ni nécessaire à une époque où l’on avait foi aux grands exemples de l’esprit humain dans les lettres, comme à la tradition en matière de foi. […] Je suis sûr que les pensées empruntées n’y viennent ni dans leur ordre, ni par un enchaînement nécessaire ; et s’il arrive qu’elles soient exprimées heureusement, le bonheur de ce passage fait d’autant plus de tort au reste.
Que la condition nécessaire de l’évolution soit l’adaptation au milieu, nous ne le contestons aucunement. […] On sait que le végétal emprunte directement à l’air, à l’eau et à la terre les éléments nécessaires à l’entretien de la vie, en particulier le carbone et l’azote : il les prend sous leur forme minérale. […] Mais ni cette mobilité, ni ce choix, ni par conséquent cette conscience n’ont pour condition nécessaire la présence d’un système nerveux : celui-ci n’a fait que canaliser dans des sens déterminés, et porter à un plus haut degré d’intensité, une activité rudimentaire et vague, diffuse dans la masse de la substance organisée. […] Mais quelques éclaircissements sont d’abord nécessaires au sujet de la conscience en général. […] Mais il nous est avant tout nécessaire, pour la manipulation présente, de tenir l’objet réel auquel nous avons affaire, ou les éléments réels en lesquels nous l’avons résolu, pour provisoirement définitifs et de les traiter comme autant d’unités.
Mais lui-même il ne se rend pas assez compte de certaines choses lumineuses, éclatantes, de représentation ou de fantaisie, qui sont nécessaires chez nous. […] « Pour Roederer, disait-il, je lui crois trop d’activité dans l’esprit pour être un grand administrateur, et peut-être même pour être constant dans ses affections. » Le correctif et le complément nécessaire de ces Mémoires de Joseph seraient dans les Conversations inédites de Napoléon avec Roederer sur Joseph lui-même, conversations que j’ai eues sous les yeux.
À chaque époque il y a donc de nouvelles façons de penser possibles et nécessaires, et toutes ne sont pas épuisées, pas plus que les airs que la nature trouve à varier à l’infini dans le composé des physionomies et des visages. […] Marivaux, se mettant à écrire, ne se pique pas en général de faire un livre qui ressemble à d’autres livres ; il prétend n’observer que la nature, mais l’observer comme il l’entend, la distinguer autant qu’il lui est nécessaire, et la rendre dans toute la singularité de son propre coup d’œil.
Selon lui, elle n’était nullement nécessaire avant d’éclater, elle était évitable ; elle a été purement accidentelle, en ce sens que « le caractère de ceux qui ont eu part à l’ancien gouvernement (à commencer par le caractère du roi, ennemi de toute résistance) a été le seul principe de la totale subversion de ce gouvernement » ; mais ce caractère de quelques personnes étant donné, et la faiblesse de l’opposition qu’elle rencontrera étant admise au point de départ, M. de Meilhan est bien d’avis que la Révolution en devenait un effet presque nécessaire : « Sa marche, dit-il, a été déterminée et hâtée par cette faiblesse ; le défaut de résistance a rendu tout possible, et, semblable à un torrent qui ne trouve aucune digue, elle a tout dévasté. » Il ne croit donc pas que la Révolution soit directement sortie des écrits de Rousseau ni de ceux des encyclopédistes, comme on le répète souvent, ni qu’elle découle de causes aussi générales : Si l’on suit attentivement la marche de la Révolution, il sera facile de voir que les écrivains appelés philosophes ont pu la fortifier, mais ne l’ont pas déterminée ; parce qu’une maison a été bâtie avec les pierres d’une carrière voisine, serait-on fondé à dire qu’elle n’a été construite qu’en raison de ce voisinage ?
Je lui répondis que j’en avais bien écrit quelques-unes, mais que je manquais du calme nécessaire. […] Saint-René Taillandier a publié par articles, dans le Magasin de librairie, et doit donner en volumes dans la Bibliothèque-Charpentier cette Correspondance de Goethe et de Schiller, réduite à ce qui est jugé pour nous intéressant, et avec les suppressions estimées nécessaires.
Dès qu’il vit un régime régulier établi en France et dès le temps même du Directoire, il ne craignit pas d’engager tous ceux qui avaient espoir et moyen de se rapatrier, surtout les jeunes gens, à faire les démarches nécessaires ; à plus forte raison le leur conseillait-il dès les premiers jours du Consulat. […] Je lui dis que ces messieurs, qui voulaient quitter Londres, avaient été aussi étonnés que moi d’apprendre dans les bureaux que son consentement était nécessaire pour cela ; que je n’imaginais pas qu’il se chargeât d’une telle responsabilité vis-à-vis des Français expatriés et même vis-à-vis du Gouvernement anglais, et que j’espérais qu’il démentirait cette imputation, qui le compromettrait si le Parlement en avait connaissance.
Il était nécessaire pour cela que les critiques qui s’occupent des poètes du xvie siècle y arrivassent préparés par la connaissance des époques antérieures, par la pratique du moyen âge et par la science de l’antiquité. […] Tout cet attirail est nécessaire à la suite d’un corps d’armée si savant.
Et qu’on ne croie point que je veuille, en ce moment, avoir l’air de rien blâmer de ce qu’amène le cours ou le progrès du temps, comme on l’appelle ; je ne fais le procès à rien de ce qui est nécessaire et légitime : j’ai tenu seulement à bien rendre l’idée du classique français dans cette période paisible, où, la première effervescence du xvie siècle étant apaisée et calmée, une élite de gens de goût, vrais lettrés, jouissait comme d’une conquête acquise des dépouilles de l’Antiquité, en y mêlant le sentiment des beautés et qualités françaises, et sans ignorer ce qui s’y assortissait de meilleur et de plus agréable en Angleterre ou en Italie. […] Donc à de nouvelles choses, conclut-il, il est nécessaire d’imposer de nouveaux mots.
Mme de Pontivy, sans être exigeante, mais parce qu’elle était passionnée, trouvait nécessaire et simple que M. de Murçay se retranchât quelquefois certaines paroles, certains jugements, certaines relations même, qui pouvaient aliéner de lui l’esprit de sa tante, plus absolue en vieillissant, et rendre leur commerce moins facile. […] Ne croyez pas, mon bien cher ami, que je puisse ne plus vous aimer ; au fond et au-dessous vous êtes toujours l’être nécessaire à mon existence… Mais votre Hermione n’est plus qu’une bien triste Aricie.
S’il parle à son chat, c’est que son chat lui est un compagnon naturel et nécessaire, qui fait partie de son cabinet de travail, et c’est pour lui adresser des discours pleins de suc et de philosophie. […] Ils n’apparaissent que comme des démonstrations piquantes de l’instinct de conservation et de conquête, comme les premiers et innocents engagements de la lutte nécessaire pour la vie.
C’est cette ressemblance nécessaire des styles, dans la différence des sujets ou du génie particulier des grands écrivains, qui fait la beauté de notre littérature : c’est l’unité de la langue dans la diversité des écrits. […] « Il s’est dispensé, disait-il, du plus difficile dans l’art d’écrire, à savoir, les transitions112. » Il ne s’agit pas de tours d’adresse et comme de plans inclinés pour faire glisser commodément l’esprit d’une idée à l’autre, mais d’idées considérables et nécessaires, qui ont leur place marquée dans le discours et qui en forment la chaîne.
Verlaine fut l’illustration de ce principe nécessaire que tout poète doit se faire à lui-même sa poésie, en toute indépendance et toute sincérité. […] Au lieu d’imposer sa pensée, le poète, pour ainsi dire, la propose, la présente, l’offre, non pas directement et d’une façon positive, mais figurée et voilée, de manière qu’il soit nécessaire de la reconnaître et de la pénétrer.
En prenant comme nécessaire le grand fait de l’invasion des barbares et le critiquant a priori, on trouve qu’il eût pu se passer de deux manières. […] Nous traversons l’âge d’analyse, c’est-à-dire de vue partielle, âge durant lequel la diversité des esprits est nécessaire.
Prodigues de leur vie, qui pourtant est bien nécessaire au soutien de leur famille, ils ont arraché plus de vingt personnes à la mort. […] La vieille mulâtresse est toujours là ; elle a soixante-douze ans ; un cancer lui a rongé la moitié de la figure, et pourtant elle court encore les rues avec son panier d’ananas, cherchant à récolter la petite somme nécessaire au repas des délaissées dont elle est le seul soutien.