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2006. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVI » pp. 413-441

Dans la même année, il montra dans Titus la vertu triomphant d’une passion désordonnée ; c’était encourager le roi à la vertu par son propre exemple et rappeler à l’adorateur de madame de Montespan, le sacrifice qu’il avait pu faire de Marie de Mancini. […] S’il faut absolument adapter un nom propre au portrait peut-être idéal de cette précieuse, pourquoi ne prendrait-on pas celui de mademoiselle de Scudéry ?

2007. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VI. Pour clientèle catholique »

J’avoue que le pamphlétaire m’est un compagnon moins précieux : il se laisse aller à trop de lyrisme excrémentiel ; trop volontiers il inflige aux condamnés de sa conscience le supplice du pal et, avec une insistance barbarement joyeuse, il nous montre que les culs qu’il va transpercer ne sont pas propres. […] Celui qui semblait pouvoir être le noble pamphlétaire de sa propre conscience est devenu bassement le pamphlétaire d’un parti.

2008. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XIII »

Comme une Vénus anatomique qui ouvrirait sa poitrine de sa propre main, elle lui montre vide l’endroit de son cœur, et, à sa place, le rouage unique et presque fatal qui la fait mouvoir. […] Elle se fera juge de sa propre cause, puisque toute justice lui est refusée.

2009. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Des lectures publiques du soir, de ce qu’elles sont et de ce qu’elles pourraient être. » pp. 275-293

On avait eu tant d’horreur et de dégoût des clubs, que la prévention d’abord a pu s’étendre, par une association injuste, sur ce qui y ressemblait le moins, et qui était bien plutôt propre à en guérir. […] On ne peut tout lire, sans doute, de chaque auteur ; il n’est besoin que d’en lire assez pour bien marquer le sens de sa manière et donner, à l’auditeur qui sort de là, l’envie d’en savoir plus en recourant à l’original : mais il faut, à la rigueur, lui en avoir déjà offert et servi un assez ample choix, pour que, même sans aller s’informer au-delà, il en garde un souvenir propre, et qu’il attache à chaque nom connu une idée précisé.

2010. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Droz. » pp. 165-184

Droz sur l’application de la morale à la politique, et sur l’économie politique elle-même conçue au point de vue philanthropique, je ne ferai plus qu’une remarque, qui répond à une objection que j’ai souvent entendu adresser à ces sortes d’ouvrages : les hommes d’action, les hommes du métier, sont en général tentés de les considérer comme inutiles, et comme n’étant propres à persuader que ceux qui sont déjà convaincus. […] Dans ses autres écrits, et quand il créait en partie ses sujets, il abondait trop dans son propre sens, s’il est permis de le dire ; il avait de l’onction, mais l’ironie d’un Socrate ou d’un Franklin, il ne l’avait pas.

2011. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Étienne, ou une émeute littéraire sous l’Empire. » pp. 474-493

Étienne, en écorchant ainsi le nom de Conaxa dont il faisait Onaxa, marquait assez qu’il n’avait nulle connaissance de cette ancienne pièce, ou du moins du manuscrit ainsi intitulé, et il en provoquait hardiment la confrontation avec son propre ouvrage : « Si quelque héritier ou quelque ami du jésuite voulait même le faire imprimer, disait-il, je lui indique l’adresse de Le Normant et Barba, chez lesquels va paraître ma quatrième édition. » Dans une préface qu’il se décida à joindre à cette quatrième édition mise en vente à quelques jours de là, il entrait dans quelques explications, et racontait qu’un de ses amis, M.  […] Ces caractères, qui étaient bien dans la coupe du jour et qui sont soutenus jusqu’au bout ; le ressort de la crainte de l’opinion opposé à celui de l’avarice pure ; d’heureuses descriptions, jetées en passant, des dîners du grand ton : Ceux qui dînent chez moi ne sont pas mes amis ; une peinture légère des faillites à la mode, qui ne ruinent que les créanciers, et après lesquelles le banquier, s’élançant dans un brillant équipage, dit nonchalamment : Je vais m’ensevelir au château de ma femme ; l’intervention bien ménagée de deux femmes, l’une, fille du vieillard, et l’autre, sa petite-fille ; l’habile arrangement et le balancement des scènes ; d’excellents vers comiques, semés sur un fond de dialogue clair, facile et toujours coulant, voilà des mérites qui justifient pleinement le succès et qui mettent hors de doute le talent propre de l’auteur.

2012. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — III. Franklin à Passy. (Fin.) » pp. 167-185

En envoyant ce portrait à ses amis d’Amérique, il faisait remarquer, par manière d’excuse, ce caractère propre à la nation française, de pousser l’éloge à l’extrême, tellement que la louange ordinaire, toute simple, devient presque une censure, et que la louange extrême finit, à son tour, par devenir insignifiante. […] Celui qui crache contre le vent, crache à son propre visage.

2013. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « La Fontaine. » pp. 518-536

Il paraît que le même chanoine qui avait prêté à notre La Fontaine des livres de piété, le voyant peu propre à cette profession, l’aida à en sortir et lui fit épouser une de ses parentes. […] Un des caractères propres, en effet, du talent de La Fontaine, c’est de receler d’instinct toutes les variétés et tous les tons, mais de ne les produire que si quelque chose au-dehors l’excite et l’avertit.

2014. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre II : Philosophie politique de Tocqueville »

Quelle existence propre peuvent garder ces molécules indiscernables dans cet océan infini ? […] Nous ne devons pas tendre à nous rendre semblables à nos pères, mais nous efforcer d’atteindre l’espèce de grandeur qui nous est propre. » Un de ses amis les plus intimes, M. de Corcelles, avait paru comprendre son livre dans un sens trop défavorable à la démocratie.

2015. (1912) L’art de lire « Chapitre III. Les livres de sentiment »

Les auteurs qui ont ce goût nous diront volontiers que ce sont les plus intéressants des livres, puisqu’ils apprennent quelque chose ; ceux que vous pouvez contrôler par vos observations propres ne valent pas la peine d’être écrits, puisque vous pourriez presque les faire et que par conséquent il vous est peu utile de les lire ; les nôtres sont des livres d’observation et les livres d’observation par excellence, puisqu’ils sont d’observation inédite et qu’ils étendent le domaine de l’observation. […] — En une certaine mesure au contraire, parce que c’était la façon dont, généralement, les auteurs classiques nous étaient montrés, qui nous les faisait prendre en horreur ; parce que Virgile et Horace ne pouvaient rester dans nos souvenirs qu’accompagnés de l’idée d’ennui ; et parce que, laissés de côté par les professeurs d’à présent, ils se présenteront aux écoliers dans toute leur beauté propre, avec leur charme inaltéré et, si j’ose ainsi parler, sans encrassement.

2016. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Fervaques et Bachaumont(1) » pp. 219-245

Comme le sculpteur qui adorait son propre ouvrage, ils sont fascinés par le leur. […] Ce sont les mémoires de tout un monde, mais de tout un monde réfléchi dans un homme qui nous en renvoie l’image, en la teignant de ses propres sensations.

2017. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — La banqueroute du préraphaélisme »

Une impression de platitude, d’artifice et de froideur se dégageait de cet ensemble d’œuvres propres et fades, sans originalité, sans fantaisie, sans accent. […] Par réaliste, j’entends, dans un sens large, celui qui, ne méprisant aucun fragment, aucun aspect de la nature, en respectant la vie réelle des choses, de la communion même de ce monde extérieur avec son être propre, fait jaillir une expression vivante.

2018. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIV : De la méthode (Suite) »

Si vous rencontrez un intestin propre à digérer seulement de la chair et de la chair récente, l’animal a des mâchoires construites pour dévorer une proie, des griffes pour la saisir et la déchirer, des dents pour la couper et la diviser, un système d’organes moteurs pour la saisir et l’atteindre, des sens capables de l’apercevoir de loin, l’instinct de se cacher, de tendre des pièges, et le goût de la chair. […] Faites varier un organe ; si le pied est enveloppé de corne, propre à soutenir, impropre à saisir, l’animal a le goût de l’herbe, des dents molaires à couronne plate, un canal alimentaire très-long, un estomac ample ou multiple.

2019. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Lettre sur l’orthographe » pp. 427-431

On dira encore à une femme : Soyez élégante ; mais comment lui dire : Soyez propre ?

2020. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Rêves et réalités, par Mme M. B. (Blanchecotte), ouvrière et poète. » pp. 327-332

C’est ainsi (autant que je l’imagine), que sa propre douleur trop morne et trop tristement monotone s’est transformée et colorée comme à travers un prisme en une variété de douleurs poétiques passionnées et touchantes.

2021. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LVIII » pp. 220-226

C'est le propre de tout ce qui se prolonge en ce pays de France. — Cette loi, au reste, ne pourra être discutée cette année à la Chambre des députés et tout porte à croire qu’elle y sera modifiée.

2022. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires du marquis d’Argenson, ministre sous Louis XV »

Ce qui le caractérise homme profondément original, c’est son bon sens ; il en fait preuve à chaque ligne dans ces feuilles naïves qu’il écrivait au jour le jour, pour son usage propre ou tout au plus pour celui de sa famille ; l’un des premiers apôtres du sens commun, il le proclame entre toutes les qualités la seule essentielle et suffisante à un ministre.

2023. (1874) Premiers lundis. Tome I « Fenimore Cooper : Le Corsaire Rouge »

Cooper est allé se perfectionnant de jour en jour ; il a mieux connu son talent, à force de le mettre à l’œuvre ; sa manière, d‘abord timide et douteuse, est devenue plus ferme, plus large, plus originale ; il a osé avoir ses qualités et ses défauts propres ; en un mot, sans jamais cesser d’appartenir à la famille du romancier écossais, il a suivi sa route à part, et le colon s’est émancipé.

2024. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Discours prononcé à la distribution des prix du lycée d’orléans. » pp. 223-229

Mais, avec tout cela, il est évident que son don propre ne fut pas le génie des lettres ni le génie de la guerre, mais le génie du cœur.

2025. (1887) Discours et conférences « Appendice à la précédente conférence »

Ne pas détruire les religions, les traiter même avec bienveillance, comme des manifestations libres de la nature humaine, mais ne pas les garantir, surtout ne pas les défendre contre leurs propres fidèles qui tendent à se séparer d’elles, voilà le devoir de la société civile.

2026. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXIV » pp. 251-258

Et tandis que les mauvaises mœurs et le langage grossier constataient leur impuissance contre la société polie, celle-ci prenait sur elles un invincible ascendant ; elle le prenait sans discussion, sans dispute, uniquement par la force de son exemple, par la séduction propre à son langage spirituel, élégant et gracieux ; peut-être aussi par un effet naturel du progrès des lumières, et de l’affinage des esprits dans l’exercice continu de la conversation, dont la société de Rambouillet avait eu le mérite de fournir le premier modèle.

2027. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 181-190

Le Philosophe, en se trompant, ressemble à ces Voyageurs, qui, sans être parvenus au but qu’ils s’étoient proposé, ont découvert sur la route, des pays riches & féconds, propres à faciliter ensuite les recherches des autres Voyageurs.

2028. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre septième. Les sentiments attachés aux idées. Leurs rapports avec l’appétition et la motion »

Et, comme la jouissance, ainsi intellectualisée, peut pleinement jouir d’elle-même, jouir de sa propre conscience, elle prend un caractère pleinement esthétique.

2029. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Dédicace, préface et poème liminaire de « La Légende des siècles » (1859) — Préface (1859) »

Comme dans une mosaïque, chaque pierre a sa couleur et sa forme propre ; l’ensemble donne une figure.

2030. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 3, que le merite principal des poëmes et des tableaux consiste à imiter les objets qui auroient excité en nous des passions réelles. Les passions que ces imitations font naître en nous ne sont que superficielles » pp. 25-33

Les premiers inventeurs du bain n’ont pas songé qu’il fût un remede propre à guerir de certains maux, ils ne s’en sont servis que comme d’un rafraîchissement agréable durant la chaleur, lequel on a découvert depuis être utile pour rendre la santé dans certaines maladies : de même les premiers poëtes et les premiers peintres n’ont songé peut-être qu’à flater nos sens et notre imagination, et c’est en travaillant pour cela qu’ils ont trouvé le moïen d’exciter dans notre coeur des passions artificielles.

2031. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 34, du motif qui fait lire les poësies : que l’on ne cherche pas l’instruction comme dans d’autres livres » pp. 288-295

Je veux dire qu’elles surprennent et qu’elles ébloüissent l’imagination, mais qu’elles n’y peignent pas distinctement des images propres à nous interesser.

2032. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre V. Première partie. Les idées anciennes devenues inintelligibles » pp. 106-113

La Providence, qui lui a donné la magistrature des civilisations modernes, tantôt suscite Charles Martel pour écraser d’un seul coup les formidables armées des Sarrasins au milieu même de leurs immenses triomphes ; tantôt met dans les mains d’une jeune vierge l’étendard des lis, pour faire sacrer à Reims le fils de nos rois ; tantôt convoque à Paris tous les souverains de l’Europe, pour assister à la restauration de la monarchie conservatrice de leurs propres droits.

2033. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Émile Augier »

Le travail d’Augier sur ces deux grands types, transportés dans le petit cadre de sa comédie, ressemble à la petite industrie qui réduit les plus belles statues et les plus beaux bustes des musées en figurines propres à orner la canne ou le parapluie bourgeois.

2034. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Camille Jordan, et Madame de Staël »

Girondins, hommes de 89 et royalistes, nobles, bourgeois, marchands et hommes du port, tous à la fin se trouvèrent refoulés dans un seul et même sentiment d’indignation, confondus dans un seul et même parti qui s’insurgeait contre des tyrans extravagants et cruels, s’érigeant de leur propre autorité en comité de salut public. […] Dans leur double récit, quantité de noms propres se rencontraient, et, à vrai dire, l’Épître était à leur adresse. […] J’aime qu’on soit enthousiaste de la distinction de l’esprit ; mais Boswell l’est un peu trop, car on peut s’en moquer, et c’est ce qui nuit à l’enthousiasme, surtout en France. — Je suis misérable d’âme et de santé ; mais le plus beau vers de Voltaire n’est-il pas : Tout mortel est chargé de sa propre douleur ? […] Il fut lent, selon sa propre expression, à « s’ébranler du sein d’une longue retraite qu’embellissaient pour lui toutes les affections domestiques. » Ce ne fut qu’après l’ordonnance du 5 septembre qu’il fit sa rentrée dans la carrière politique, en 1816. […] Voilà mes propres paroles ; j’en atteste tous mes collègues.

2035. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLe entretien. L’homme de lettres »

Souvent il avait reproché au général son indifférence pour le jeune Français ; mais ces reproches n’avaient fait que blesser plus profondément l’orgueil d’un homme pour qui rien n’était évident que son propre mérite. […] L’impératrice de Russie, éclairée sur ses propres intérêts, protégera un établissement qui doit mettre dans ses mains les richesses de l’Inde et le commerce du monde. […] Elle était adroite, propre et très-fidèle. […] Paul, dans l’espoir que quelque chasseur pourrait l’entendre, cria alors de toute sa force: « Venez, venez au secours de Virginie. » Mais les seuls échos de la forêt répondirent à sa voix, et répétèrent à plusieurs reprises: Virginie… Virginie… Paul descendit alors de l’arbre, accablé de fatigue et de chagrin: il chercha les moyens de passer la nuit dans ce lieu ; mais il n’y avait ni fontaine, ni palmiste, ni même de branches de bois sec propres à allumer du feu. […] Il s’exprima en peu de mots, mais avec indignation, contre sa tante dénaturée ; et s’approchant de Paul, il lui dit tout ce qu’il crut propre à le consoler. « Je désirais, lui dit-il, votre bonheur et celui de votre famille: Dieu m’en est témoin.

2036. (1880) Goethe et Diderot « Diderot »

Ils ont publié Diderot parce que c’est Diderot et que Diderot est un gros personnage, enflé comme une bulle de savon par la Critique moderne, et même à l’état du ballon pour l’énormité… La Critique moderne, la Critique romantique, a placé Diderot à une hauteur où son propre siècle — le siècle de l’Encyclopédie pourtant ! […] Vaut-il la peine d’être rangé fastueusement sur les rayons d’une bibliothèque, souvent pour y rester comme une momie, relié en veau ou dans sa propre peau ? […] Athées à tout, au fond ; — athées jusqu’à leur propre philosophie ! […] Et, ne vous y trompez pas, — nous prenons la mesure de l’homme, — ce ne fut pas seulement son temps qui empêcha Diderot d’être un grand romancier, ce fut aussi sa propre nature, ce fut le manque de génie, — le manque du génie qu’il eût fallu pour être un romancier. […] Vœux atroces, — pudeur, préjugé, — inceste, chose indifférente, — déisme et matière organisée d’elle-même, — ce sont les propres expressions de Villemain, qui n’est pas catholique comme moi.

2037. (1902) Propos littéraires. Première série

Une continuation de sa propre vie, sa vie pensée et exprimée par d’autres. […] Je m’empresse, si l’on y tient, d’ajouter que ce n’est pas histoire d’adultère propre à en donner le goût. […] Ce défaut, je le relève parce que c’est le défaut propre de M.  […] Worms à son propre système, ou du moins au système qu’il aime. […] Les farceurs diront là quelque chose de vrai avec la grossièreté qui leur est propre, mais, à les bien prendre, c’est exact, et dit par M. 

2038. (1898) La poésie lyrique en France au XIXe siècle

Il nous reste à nous demander comment Lamartine, par une disposition spéciale de son esprit, a pu imprimer à certains sentiments un caractère qui lui est propre : il nous reste à nous demander quel est, chez Lamartine, le tour d’esprit qui lui appartient à lui et à aucun autre. […] Puis, nous passerons en revue ces différents thèmes poétiques, et enfin, nous nous demanderons comment Victor Hugo les a mis en œuvre, par conséquent, quelle est la forme particulière, quelle est la sonorité propre de son âme, ce qui fait que sa poésie, comme pour Lamartine, est à lui et non pas à un autre. […] Voyons donc ce qui vient de la tournure même de l’esprit de Victor Hugo, ce qui est le caractère propre de son imagination. […] Ce qui lui appartient en propre, ce qu’il représente, c’est ceci : une tentative pour donner à la France une poésie philosophique, pour allier ces deux choses : la poésie, d’une part et la philosophie, d’autre part. […] C’est un peintre, et vous savez que, d’habitude, sa propre pratique on l’érige en théorie ; avec ses qualités à soi on fait des maximes.

2039. (1924) Souvenirs de la vie littéraire. Nouvelle édition augmentée d’une préface-réponse

On ne peut pas dire que Moréas fût de ses propres vers lecteur infatigable. […] » Il n’admettait l’éloge des autres qu’avec des réserves rassurantes pour sa propre gloire. […] Faguet aurait écrit uniquement pour s’échapper à lui-même, pour n’être pas dévoré par son propre néant. […] On voyait qu’il n’était pas lui-même insensible au son de sa propre parole. […] N’a-t-il pas parcouru la France en lisant ses propres vers ?

2040. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXVI » pp. 256-263

Mais depuis qu’on connaît les siens propres, il n’y a plus moyen de se faire illusion.

2041. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXVII » pp. 306-312

Il a fait comme un homme qui, voyant un violent incendie dans la maison voisine, a l’énergie et la présence d’esprit de sauver sa propre maison séparée par un simple mur mitoyen, et qui a de plus le courage d’aller au secours des maisons d’en face elles-mêmes menacées.

2042. (1874) Premiers lundis. Tome II « Étienne Jay. Réception à l’Académie française. »

Dans la situation toute secondaire où est descendue l’Académie française et d’où il est difficile qu’elle se relève, n’ayant ni action directe, ni but propre, elle paraît décidée à se recruter en grande partie parmi les hommes politiques, comme autrefois elle faisait parmi les grands seigneurs, et elle aura raison, pourvu que, de temps à autre, elle ne dédaigne pas d’ouvrir ses invalides à quelque littérateur pur et simple qui aura la témérité de se mettre sur les rangs.

2043. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre V. Du jeu, de l’avarice, de l’ivresse, etc. »

Quel but que soi pour sa propre vie !

2044. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Des avantages attachés à la profession de révolutionnaire. » pp. 200-207

Et c’est pourquoi, non seulement certains hommes ne sont éloquents que parce qu’ils sont révolutionnaires ; mais on en cite qui, peut-être à leur insu, ne sont devenus révolutionnaires que parce qu’ils étaient nés éloquents ; qui, partis du criticisme un peu timide du centre gauche, ne se sont arrêtés que là où ils trouvaient l’emploi total de leur éloquence magnifique, violente et vague, et qui, menés par leur langue, dupes de leur propre séduction, ont sans doute fini par croire qu’ils remplissaient une mission, quand ils ne faisaient qu’accomplir une fonction naturelle et fatale.

2045. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Delavigne, Casimir (1793-1843) »

L’homme de talent est propre, bien rasé, charmant, accessible à tous ; il prend chaque jour la mesure du public et lui fait des habits à sa taille ; tandis que le poète forge de gigantesques armures que les Titans seuls peuvent revêtir.

2046. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « La réforme prosodique » pp. 120-128

Théodore de Banville avait bien écrit : Elle filait — pensivement — la blanche laine, mais, effrayé de sa propre audace, il n’eut plus de sommeil jusqu’à ce qu’il eût trouve ce correctif : Elle filait d’un doigt — pensif la blanche laine, qui rétablit la paix de sa conscience troublée.

2047. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Odes et Ballades » (1822-1853) — Préface de 1826 »

À cette occasion, mais en laissant absolument de côté ses propres ouvrages, si imparfaits et si incomplets, il hasardera quelques réflexions.

2048. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre cinquième. »

Voici une fable où La Fontaine retrouve ses pinceaux et sa poésie, ce mélange de tours et cette variété de style qui est propre.

2049. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre X. Suite du Prêtre. — La Sibylle. — Joad. — Parallèle de Virgile et de Racine. »

Ils ne s’assurent point en leurs propres mérites, Mais en ton nom, sur eux invoqué tant de fois, En tes serments jurés au plus saint de leurs rois, En ce temple où tu fais ta demeure sacrée, Et qui doit du soleil égaler la durée.

2050. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 17, quand ont fini les représentations somptueuses des anciens. De l’excellence de leurs chants » pp. 296-308

Ce sac plus cruel dans toutes ses circonstances que les précedens, et qui fut la cause qu’on vit des femmes patriciennes mandier à la porte de leurs propres maisons, dont les barbares s’étoient rendus les maîtres, est la véritable époque de l’anéantissement presque total des lettres et des arts, que du moins on cultivoit toujours, quoique ce fut sans beaucoup de fruit.

2051. (1892) Impressions de théâtre. Sixième série

Et je ne pouvais pourtant pas faire mon propre malheur. […] Ô incertitude d’un cœur vraiment dévoué à ses propres intérêts ! […] Puis il semble que le mal universel vous absout d’avance, à vos propres yeux, de tout ce que vous pourrez vous permettre. […] Elisabeth est la propre sœur d’Yves Lemell ; elle a épousé Kadik pendant l’absence de son frère. […] Pour exciter sa jalousie, elle se travestit en cavalier et râcle de la guitare sous son propre balcon.

2052. (1905) Propos de théâtre. Deuxième série

Ce qu’il fallait trouver, c’était le style propre, le style précisément adapté à ce genre de poème. […] Il faut donc une tragédie « qui leur soit propre », qui soit faite pour eux, parce que « c’est la seule leçon qu’ils daignent recevoir. » Mais « pour le peuple », il faut une tragédie « qui lui soit propre » aussi, une tragédie faite pour lui, une tragédie populaire. […] Degouy n’y était plus soutenu par Diderot, qui l’a lâché, et, réduit à ses propres forces, il ne s’en est pas tiré très brillamment. […] Vous êtes propre à tout. […] À cela près, mon fils, vous êtes propre à tout.

2053. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Joseph de Maistre »

Cette puissance, cette capacité de mémoire, quand elle ne fait pas obstruction et qu’elle obéit simplement à la volonté, est le propre de toutes les fortes têtes, de tous les grands esprits. […] Et je me rappelle ma propre surprise à moi-même lorsque, interrogeant un poète illustre sur M. de Maistre qu’il avait fort connu, il m’en parla d’abord comme d’un conteur presque facétieux et de belle humeur. […] et si nos conjectures sont plausibles, si elles ont pour elles l’analogie, si elles s’appuient sur des idées universelles, si surtout elles sont consolantes et propres à nous rendre meilleurs, que leur manque-t-il ? […] Si M. de Maistre a compris d’emblée, à ce degré de justesse, la Révolution française, c’est, nous l’avons assez montré, qu’il l’avait vue de près et sentie à fond par sa propre expérience douloureuse. […] Mais la face encore si incandescente de l’Europe et le sol qui tremblait sur bien des points n’étaient pas propres à donner du calme à ce noble esprit excité ; ses illuminations sombres ne faisaient que gagner en avançant : il avait de ces tristesses de Moïse et de tous les sublimes mortels qui ont trop vu.

2054. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxiiie entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff »

Tourgueneff ; mais il aurait une idée encore fort incomplète du peuple russe ; car, dans presque toutes ces études, l’auteur ne s’est attaché à présenter son sujet que par les côtés qui lui sont les plus propres à éveiller notre sympathie. […] À la ville comme à la campagne sa maison est tenue avec un soin extrême : l’influence qu’il exerce à cet égard sur ses gens est si grande, que les cochers même la subissent ; non-seulement ils entretiennent avec soin les harnais et nettoient leurs propres vêtements, mais ils se débarbouillent. […] Mais ce qui vous surprendra sans doute, c’est qu’elle fit des progrès étonnants ; ma femme la prit tout bonnement en adoration et daigna enfin l’attacher de préférence à toute autre, remarquez-le bien, … à sa propre personne. […] Un être humain ne doit jamais manquer à sa propre dignité ; convenez-en ! […] Quelquefois un de tes anciens amis de Moscou venait te voir en passant, et lorsqu’il lui arrivait de te réciter une pièce de vers empruntée à un des nouveaux recueils du jour, ou même une de ses propres compositions, tu l’écoutais dans un recueillement extatique.

2055. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « L’abbé Fléchier » pp. 383-416

Aujourd’hui que tout ce grand feu est apaisé, et qu’un esprit conciliant a prévalu, les Mémoires de Fléchier reparaissent dans les circonstances les plus propres à en faire goûter l’agrément sans qu’il doive s’y mêler aucun fiel ni aucune amertume. […] Voyons Fléchier tel qu’il était, apprenons à le goûter dans les qualités qui lui sont propres et qui lui assurent un rang durable comme écrivain et comme narrateur ; ne craignons pas de nous le représenter dans sa première fleur d’imagination et d’âme, dans sa première forme de jeune homme, d’abbé honnête homme et encore mondain ; et bientôt sans trop de complaisance, sans presque avoir à retrancher, nous arriverons insensiblement à celui qui n’avait eu en effet qu’à se continuer lui-même, et à se laisser mûrir pour devenir l’orateur accompli si digne de célébrer Montausier et Turenne, et l’évêque régulier, pacifique, exemplaire, édifiant. […] On y lit : Monsieur, Je reçus votre lettre et le poème latin qui l’accompagnait avec beaucoup de pudeur, ne pouvant sans rougir voir que vous le soumettez à mon jugement, lequel je ne puis exercer sans témérité sur d’autres ouvrages que sur les miens propres ; et je vous avoue que soit par cette raison, soit par le peu de loisir que me laissent mes occupations, je fus tenté de m’excuser du travail que vous exigiez de moi, et que le seul nom de M. 

2056. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 321-384

Mais il n’y avait pas de crainte ; car les trois quarts des fruits rapportent bien, bon ou mal an, pour eux soixante sacs de belles châtaignes : ils auraient ruiné leur propre domaine en l’abattant. […] On nous laissait encore le troupeau composé de cinq brebis, de trois chèvres avec leurs chevreaux et du chien que vous voyez là sur ses trois pattes, et qui a l’air d’écouter sa propre histoire dans la nôtre. […] Il ne savait rien de ce qui s’était passé depuis trois mois, qu’il n’était ni monté ni descendu par le sentier des Zampognari, ni des visites du capitaine des sbires, ni du procès de Nicolas del Calamayo, ni du partage du domaine revendiqué par les héritiers des Bardi, ni de la revente de leurs droits au sbire, ni des poursuites de cet homme puissant pour épouser, par ruse ou par violence, la belle enfant qui l’avait, par malheur, ébloui comme un soleil levant dans les yeux d’une taupe ; ni de tous nos champs confisqués avec leurs riches promesses de récoltes, ne nous laissant que le quart des châtaignes, les cinq brebis et les chevreaux pour subsistance ; ni enfin de l’abomination qu’on venait de nous faire, avec une si infernale malice, en tuant notre vigne sur notre propre mur, comme on aurait tué notre chien sur les pieds de l’aveugle pour le faire trébucher dans le précipice !

2057. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre I. Les chansons de geste »

Même, tandis que leur histoire, sur cette terre de Gaule qui leur appartenait, faisait germer de nouveaux chants, les anciens, avec ce dédain de la chronologie qui est le propre des temps épiques et des légendes populaires, continuaient d’évoluer, et se chargeaient de faits récents ou se rajeunissaient pour s’y adapter. […] De génération en génération, comme de province en province, la haine et la guerre s’étendront, faisant ruisseler le sang, jetant cadavre sur cadavre : depuis le vieil Hardré, depuis Bègue et Garin, fils de Hervis, jusqu’aux petits-enfants de Hervis et de Hardré, qu’une paix plâtrée fait naître d’un funeste mariage en mêlant le sang des deux familles, et qui périront sous les coups les uns de leur oncle maternel et les autres de leur propre père. […] On dit plus tard, mais rarement en français propre, une geste tout court pour un poème épique.

2058. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Mme Desbordes-Valmore » pp. 01-46

Il devait venir au théâtre Feydeau ; il était « homme du monde » et il était « poète. » Ami de Chateaubriand, et auteur de Cantates sacrées, imbu, sans doute par snobisme, de ce christianisme vague que nous avons vu revenir à la mode ces années-ci, il devait donner aisément dans un pathos idéaliste, propre à séduire la sentimentale comédienne. […] Ce qui l’empêche de mourir de ses propres souffrances, c’est qu’elle souffre et palpite et vit continuellement des souffrances des autres. […] N’est-ce pas le propre esprit révolutionnaire des évangiles, candide, tout formé d’amour et totalement dénué de « prudence » humaine ?

2059. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Additions et appendice. — Treize lettres inédites de Bernardin de Saint-Pierre. (Article Bernardin de Saint-Pierre, p. 420.) » pp. 515-539

Le patriarche Randon s’enfilera de sa propre allumette79. […] Enfin, ayant été forcé de chercher de l’eau dans mon propre puits86, Dieu m’a fait la grâce d’y en trouver. […] Je vous prie donc, monsieur et ancien ami, de rejeter entièrement sur ma mauvaise fortune le long délai que j’ai apporté à m’acquitter envers vous ; car j’ai éprouvé une suite d’événements si fâcheux, ou par les amis où j’avais mis ma confiance, ou par mes propres parents, que je puis dire que les fondements de mon âme en ont été ébranlés 87.

2060. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Gustave Flaubert »

Le romancier qui n’a trouvé, après Madame Bovary, que cette perruque carthaginoise de Salammbô, est un homme absolument dénué d’invention et d’observation impersonnelle, propre, tout au plus, à des recollages archaïques. […] Il s’enfile sur son propre titre, et on comprend alors ce titre d’Éducation sentimentale, auquel, jusque-là, on n’avait absolument rien compris. […] Le mot malpropre est pour lui souvent le mot propre.

2061. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — I. » pp. 234-253

. ; mais quels que soient les bâtiments, « j’exclus, dit-il, tous ceux qui ont une façade bourgeoise, sans mouvement dans le toit ou la bâtisse, sans milieu, sans saillant sur les ailes, ou en plâtre avec un air vulgaire ; et je recommande encore le beau ou le simple, le magnifique ou le joli, et toujours le propre, le piquant et le distingué. » Pourquoi dit-on jardins anglais, plutôt que jardins chinois, plutôt que jardins naturels ? […] Si vous n’êtes pas riche vous aurez tout ce qu’il vous faut, avec une maison à un étage, simple, propre, un toit caché, un enduit de couleur, quelques bas-reliefs en plâtre, ou un encadrement rustique, un ruisseau large et rapide, s’échappant d’un vrai rocher, un pont tremblant comme celui d’Aline, quelques bancs, peut-être une table de pierre ; une cabane de berger, salon ambulant, monté sur quatre roues ; quelques pins, fiers sans orgueil, quelques peupliers d’Italie, élevés, sans faste, lestes et obligeants ; un saule pleureur, un arbre de Judée, un acacia, un platane, trois plates-bandes de fleurs jetées au hasard, des marguerites sur une partie de votre pelouse, un petit champ de coquelicots et de bluets… Je supprime ici le chapitre des allégories, inscriptions, hiéroglyphes, dont il ne veut pas qu’on abuse, mais que toutefois il accorde, tribut payé au goût du temps : Avec tout cela, dit-il, et un haha 36 environnant et ignoré, qui fait jouir des coteaux, des plaines, des bois, des prairies, des villages et des vieux châteaux des environs, je surpasserais et Kent et Le Nôtre, et, avec vingt mille francs pour tout l’ouvrage et deux cents francs d’entretien, je détournerais de dix lieues tous les voyageurs.

2062. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — I. » pp. 262-280

Le propre de Bourdaloue, c’est qu’il rassasie. […] Là comme toujours, il enseigne ouvertement et sans détour : « Écoutez-moi, et ne perdez rien d’une instruction si édifiante. » Car le propre de Bourdaloue (tant il est sûr de sa modestie et tant il s’oublie lui-même) est de se confondre totalement avec son ministère de prédicateur et d’apôtre ; il ne laisse rien aux délicatesses du siècle : « Écoutez-moi. — Suivez-moi. — Appliquez-vous

2063. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) «  Œuvres de Chapelle et de Bachaumont  » pp. 36-55

Or, Bernier, homme de sens, qui a beaucoup vu, et qui, en vertu même d’un sage scepticisme, est devenu plus ouvert à des doctrines supérieures, croit devoir avertir son ami et camarade, qui, en passant par le cabaret, est resté plus qu’il ne croit dans l’école ; le voyant prêt à vouloir s’enfoncer dans une philosophie abstruse et prétendre à expliquer physiquement la nature des choses et celle même de l’âme, il lui rappelle que c’est là une présomption et une vanité d’esprit fort ; mais si cette explication directe est impossible, et si connaître en cette manière son propre principe n’est pas accordé à l’homme dans cet état mortel, néanmoins, ajoute-t-il en terminant, nous devons prendre une plus haute idée de nous-mêmes et ne faire pas notre âme de si basse étoffe que ces grands philosophes, trop corporels en ce point ; nous devons croire pour certain que nous sommes infiniment plus nobles et plus parfaits qu’ils ne veulent, et soutenir hardiment que, si bien nous ne pouvons pas savoir au vrai ce que nous sommes, du moins savons-nous très bien et très assurément ce que nous ne sommes pas ; que nous ne sommes pas ainsi entièrement de la boue et de la fange, comme ils prétendent. — Adieu. […] Nous fuyions vent arrière sous la misaine… Voilà bien, avec la précision de plus qui est propre aux modernes (quand ils s’en mêlent), voilà bien dans ses grands traits la vraie tempête telle qu’elle a été peinte plus d’une fois par Virgile, et surtout par Homère, lorsque Ulysse sentait son vaisseau se disjoindre sous la colère de Neptune et le naufrage prêt à l’ensevelir.

2064. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « De la poésie de la nature. De la poésie du foyer et de la famille » pp. 121-138

William Cowper est loin d’être parfait sans doute, et il a, lui aussi, ses excès, ses défauts ; il a ses parties pénibles et austères à côté de ses peintures les plus neuves et les plus riantes ; il semble déchiffrer parfois, en contemplant la nature, ce que d’autres après lui y liront avec plus d’ampleur et de facilité : mais ce qu’il possède incontestablement, sans parler de son style réel et hardi dans sa simplicité, c’est le fond même de la poésie qui lui est propre ; il en occupe toutes les sources pures émanées d’Éden, et il pratique tous les sentiers qui peuvent y ramener. […] Vous, Tircis, Alexis (ou quel que soit le nom qui puisse le moins offenser une flamme si belle), bien que les sages conseils de l’ami le plus sincère sonnent rudement à des oreilles si délicates, et qu’un amant soit, de toutes les créatures sauvages ou apprivoisées, celle qui endure le moins un contrôle, même le plus doux ; souffrez cependant qu’un poète (la poésie désarme les animaux les plus féroces par ses charmes magiques), souffrez qu’un poète ose, par ses conseils, troubler votre rêverie, et qu’à son tour il vous courtise et vous conquière pour votre propre bien.

2065. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Une Réception Académique en 1694, d’après Dangeau (tome V) » pp. 333-350

L’orateur ne montrait pas seulement la maison d’Autriche abaissée et réduite aux abois, mais encore les éléments soumis et assujettis par ce génie supérieur des quatre éléments, toutefois, un seul était pris au propre, l’eau de la mer retenue par la digue de La Rochelle ; les autres éléments ne figuraient qu’à l’état métaphorique : c’était le feu de la rébellion éteint avec celui de l’hérésie ; c’était l’air devenu plus serein, et la terre étonnée de tant de prodiges. […] L’éclat d’une maison qui a donné par ses alliances augustes tant de princes à la France, tant de saints à l’Église, tant de souverains à de grands pays, semble encore au-dessous de la gloire d’avoir acquis un si rare mérite par votre propre application.

2066. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le baron de Besenval » pp. 492-510

[NdA] Un biographe qui aurait du loisir ne ferait pas mal de vérifier ce qu’on rapporte des services diplomatiques du père de Besenval, de même que de relever, s’il est possible, ses propres états de service à lui-même dans le militaire. […] [NdA] Stendhal (Beyle) qui avait plus d’une raison pour goûter Besenval et qui le cite souvent à l’appui de ses propres vues sur la société, a dit de lui : « J’aime ses mémoires ; il a la première qualité d’un historien, pas assez d’esprit pour inventer des circonstances qui changent la nature des faits ; et la seconde, qui est d’écrire sur des temps qui intéressent encore.

2067. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — I » pp. 249-267

Quoi qu’il en soit de ces légères erreurs et de ces séductions dont les plus méfiants ne savent pas toujours se garantir, quiconque a la noble ambition de se distinguer et de percer à son tour trouve là, durant ces années recluses, tout le loisir de méditer sa propre force, ses éléments d’invention ou d’arrangement, ses formes de jugement et de compréhension, de combiner fortement son entrée en campagne et sa conquête. […] Le ton propre à chaque sujet s’observerait jusque dans ces parties extrêmes, où, de l’admiration au point de départ, on serait allé graduellement jusqu’à une demi-contradiction.

2068. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Le journal de Casaubon » pp. 385-404

Force m’est bien, écrira de là Casaubon à de Thou, de renoncer une fois pour toutes à tout ce que j’avais élaboré jusqu’à ce jour pour l’utilité des amis des lettres, à ces chers travaux auxquels le monde me croit un peu propre, et par lesquels j’ai mérité votre estime à vous-même, très illustre et très docte président ; il faut bien qu’ici je m’applique avant tout à satisfaire à la volonté du maître : et comme son esprit royal est tout entier aux controverses théologiques du jour, il y a nécessité que nous qui lui appartenons et sommes de sa suite nous entrions dans les mêmes études, dans les mêmes inquiétudes que lui. […] Ô souverain maître du monde, tu m’as donné, il est vrai, la volonté de diriger ma vie selon tes préceptes ; mais, au moment où je cherche ton propre vouloir, quelquefois je me sens incertain entre les variétés merveilleuses des opinions des hommes.

2069. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Montaigne en voyage »

Il ne ressemblait pas à ceux qui portent partout avec eux les lunettes de leur village ; il prenait celles de chaque endroit où il passait, sauf à n’en croire en définitive que ses propres yeux. […] Voici, de tout le Journal, la page, selon moi, la plus caractéristique et la plus propre à nous faire juger de l’humeur excitée et charmante du voyageur excellent : « Je crois à la vérité, nous dit son secrétaire, que, s’il eût été seul avec les siens, il fût allé plutôt à Cracovie ou vers la Grèce par terre, que de prendre le tour vers l’Italie ; mais le plaisir qu’il prenait à visiter les pays inconnus, lequel il trouvait si doux que d’en oublier la faiblesse de son âge et de sa santé, il ne le pouvait imprimer à nul de la troupe, chacun ne demandant que la retraite, tandis que lui, il avait accoutumé de dire qu’après avoir passé une nuit inquiète, quand au matin il venait à se souvenir qu’il avait à voir ou une ville ou une nouvelle contrée, il se levait avec désir et allégresse.

2070. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Œuvres complètes de Molière »

 » Et voilà notre homme enfermé, dévorant tout ce grimoire sans en rien passer, car il s’agit d’un seul nom propre qui peut vous mettre sur la voie ; et si, après une journée tout entière employée à cette chasse d’un nouveau genre, l’érudit sort tout poudreux, plus couvert de toiles d’araignée que Gabriel Naudé à Rome au sortir de chez les bouquinistes, mais tenant en main l’acte qu’il désirait, qu’il avait flairé et dénoncé à l’avance, quelle joie, quel triomphe ! […] Moland nous dépeint au sortir de là, le Molière âgé de trente-six ans, rompu au métier, maître enfin de son art et avec la pleine conscience de son génie, est bien celui que nous connaissons et que tout Paris va applaudir : « Si l’apprentissage était rude, nous dit le judicieux critique, il était aussi merveilleusement propre à former l’auteur comique.

2071. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni (suite et fin.) »

La géométrie est pour Gavarni une étude chère qu’il a approfondie, qu’il a poussée fort loin et qu’il a conduite par certaines considérations qui lui sont propres jusqu’aux limites de la découverte (ce n’est pas à nous d’en juger). […] Le propre des séries de Gavarni est de vous mettre en train et de vous donner des idées dans le même sens.

2072. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite) »

La conquête de l’Angleterre par les Normands (1066) est la dernière en date des grandes invasions territoriales qui ont précédé partout le Moyen-Age, et le Moyen-Age était déjà commencé partout ailleurs quand elle eut lieu ; la langue, et partant la littérature anglaise qui en devait sortir, se trouva ainsi en retard sur les autres littératures du continent, particulièrement sur la française : elle s’inspira, elle s’imprégna d’abord de celle-ci, et elle n’acquit qu’avec le temps son juste tempérament, sa saveur propre. […] Il pourra étonner les Anglais eux-mêmes par cette vivacité d’impression qui se confie résolument en sa propre lecture.

2073. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

J’ai connu personnellement cette femme dont la mort héroïque a expié l’égarement ; dont l’âme ardente et la tête ambitieuse eussent mérité un cloître ou une principauté ; dont l’esprit fin et turbulent était aussi propre à diriger des intrigues qu’incapable d’écrire avec fidélité les scènes d’horreur où elle n’avait pas craint de jouer un rôle. » Ce jugement est sévère, et je ne le donne qu’à raison de l’autorité que j’accorde aux paroles de Mallet du Pan. […] Des délicatesses d’ailleurs, propres à elle seule, les rachètent bientôt.

2074. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite.) »

C’est ainsi qu’on se perd, qu’on s’annule quand on est roi, et qu’avec toute la droiture intérieure on démoralise sa propre action. […] Cette négociation avec Mirabeau échoue, on peut le dire, par la faute de Louis XVI toujours timide, toujours empêché par des scrupules de conscience qui lui cachaient les incertitudes de sa propre volonté.

2075. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Saint-Simon considéré comme historien de Louis XIV, par M. A. Chéruel »

C’est véritablement de ce qu’il a vu et observé par lui-même et de ses propres yeux qu’on doit lui demander un compte plus sévère. […] Étant peu militaire et peu propre à discerner le côté supérieur de ce petit-fils d’Henri IV, son coup d’œil d’homme de guerre, sa décision, sa vigueur, une fois l’action engagée, il s’est attaché à le peindre sous ses pires côtés les plus apparents, dans toute la laideur ou la splendeur de ses débordements et de son cynisme : il y est magnifique d’images, d’expressions, mais c’est incomplet.

2076. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par le chevalier d’Arneth »

Si vous voulez, vous pouvez ajouter, pour rendre la chose plus énergique : « L’impératrice, ma mère, m’a expressément défendu de me charger d’aucune recommandation. » N’ayez point de honte de demander conseil à tout le monde et ne faites rien de votre propre tête… » Et en ce qui est des correspondances que peut entretenir la dauphine et des précautions à y apporter, les conseils ne sont pas moins sages, pleins de réserve et de restrictions. […] Sans la flatter, on peut lui garantir qu’elle gagnerait souvent à suivre son propre jugement ; la méfiance de soi-même, vertu si rare à son âge, est portée chez elle à l’excès ; combien de fois j’en ai gémi !

2077. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. »

L’avocat Barbier, vrai bourgeois, qui oubliait ce qu’il avait dit auparavant dans son propre Journal, faisait la leçon aux badauds ses compatriotes, et se la faisait à lui-même en ces termes : « (Juillet 1744.) […] Les Mémoires de Rochambeau (2 vol. in-8°) ont été publics en 1809 par Luce de Lancival ; mais ce professeur de rhétorique n’a pas mis une seule note à l’édition, n’a éclairci le texte sur aucun point et ne s’est inquiété en rien de le purger des inexactitudes, en ce qui est des noms propres, des titres attribués aux personnes, etc.

2078. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « JASMIN. » pp. 64-86

Là où nous rencontrons un contemporain imprévu qui, pour être tout à fait du peuple, n’en est que plus poëte selon son cœur, et selon notre propre génie français, ne disons pas : C’est différent ; sachons le reconnaître sans pruderie et l’honorer. […] Et le vieux Te Deum des humbles mariages semblait descendre des nues, quand tout d’un coup une grande troupe de jeunes filles au teint frais, propres comme l’œil, chacune avec son fringant, viennent sur le bord du rocher entonner le même air, et là, semblables, tant elles sont voisines du ciel, à des anges riants qu’un Dieu aimable envoie pour faire leurs gambades et nous apporter l’allégresse, elles prennent leur élan, et bientôt, dévalant par la route étroite de la côte rapide, elles vont en zigzag vers Saint-Amant, et les volages, par les sentiers, comme des folles vont en criant : Les chemins devraient fleurir, Tant belle épousée va sortir, etc.

2079. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « THÉOPHILE GAUTIER (Les Grotesques.) » pp. 119-143

Théophile Gautier a un sentiment très-vif d’une certaine espèce de poésie pittoresque et matérielle ; quand il n’en fait pas pour son propre compte, il excelle à la décrire et à la mettre en saillie là où il la rencontre, il la refait bien souvent et l’achève tout en la racontant ; c’est ce qui lui est arrivé plus d’une fois à propos de ces rimeurs dont il nous rend les ébauches. […] Gautier, qui souvent aurait eu peu à faire pour compléter de la sorte ses propres aperçus, pour donner du moins un fond solide à ses jeux brillants et capricieux, s’en est trop peu soucié d’ordinaire.

2080. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DISCOURS DE RÉCEPTION A L’ACADÉMIE FRANÇAISE, Prononcé le 27 février 1845, en venant prendre séance à la place de M. Casimir Delavigne. » pp. 169-192

Un prince56 qui savait demander à la cause publique les sujets de ses propres choix, le dédommageait par son intérêt, j’allais oser dire par son amitié, d’une destitution odieuse. […] Casimir Delavigne n’avait pas la tournure de caractère propre à lutter ainsi contre un public qui l’avait tout d’abord favorisé.

2081. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN FACTUM contre ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 301-324

Eh bien, André Chénier n’en est, lui, à aucun degré ; car, en étudiant beaucoup et en ayant une connaissance plus que suffisante de l’antiquité, il n’a pas su dans ses imitations observer la mesure ni maintenir sa propre originalité. […] Il n’a pas oublié non plus les bourgeons du sublime palmier d’Aratus qui embrasse les cieux…, et le frais serpolet de Théodoridas dont on couronne les amphores…, et beaucoup d’autres rejetons nés d’hier, parmi lesquels il a semé aussi çà et là les premières violettes matinales de sa propre muse.

2082. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre II. Les privilèges. »

Propriétaire des hommes, il l’est encore, du moins à plusieurs égards et en plusieurs provinces. « Dans la Champagne propre, dans le Sénonais, la Marche, le Bourbonnais, le Nivernais, la Bourgogne, la Franche-Comté, il n’y a point ou très peu de terres où il ne reste des marques de l’ancienne servitude… On y trouve encore quantité de serfs personnels ou constitués tels par leurs reconnaissances ou par celles de leurs auteurs44. » Là, l’homme est serf tantôt par le fait de sa naissance, tantôt par le fait de la terre. […] Ce chef d’État, propriétaire des hommes et du sol, était jadis un cultivateur résidant sur sa métairie propre au milieu d’autres métairies sujettes, et, à ce titre, il se réservait des avantages d’exploitation dont il a conservé plusieurs.

2083. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 193-236

Les gros chiens du couvent, qui sont bons, sont enchaînés le jour et rôdent la nuit pour nous protéger ; on le nettoiera, on le garnira d’un lit et d’une paille propre et fraîche, on y mettra une porte, et vous pourrez vous y retirer tous les soirs, pourvu que vous soyez rentrée avant l’Ave Maria, et que vous n’en sortiez qu’après l’Ave Maria du matin ; j’aurai soin que la sœur portière vous y porte tous les jours la soupe des galériens malades, et tous les soirs un pain blanc avec les haricots à l’huile et les olives de leur souper. […] CCLXXV J’entrai avec eux dans leurs cabanes ; tout y était propre, vivant, joyeux, même le petit chien à trois pattes qui me reconnut et me fit fête, parce qu’il se souvenait de m’avoir vu le soir du retour de son jeune maître.

2084. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre II. Littérature dramatique — Chapitre I. Le théâtre avant le quinzième siècle »

ne serait-ce pas que dans l’une la longue tradition de la pastourelle fournissait au poète de quoi étoffer ses personnages, et dans l’autre il avait tout à créer, tout à marquer de traits tirés de son invention propre ? […] Imaginez-vous une sorte de revue où défilent sous leur nom, avec leur caractère, en propre personne ou par directe désignation, dix ou vingt bourgeois connus de la ville, où le poète, à côté de son père et de ses voisins, s’introduit, contant son mariage, comment il s’est défroqué pour épouser la belle qui l’a si délicieusement ravi et si vite lassé, comment il veut se démarier, et s’en aller à Paris étudier : écoutez ces propos salés et mordants de compères en belle humeur, qui en disent de dures sur les femmes, et voyez dans un brouhaha de « kermesse », selon le mot si juste de M. 

2085. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Alphonse Daudet, l’Immortel. »

tout simplement parce qu’elle assure ceux qu’elle choisit de leur propre mérite, qu’elle le garantit solennellement, que parfois même elle l’apprend au public qui l’ignorait ; parce qu’elle donne de la considération, de l’importance, des galons, un chapeau, une épée. […] le saligaud, nous a-t-il assez raclés, épluchés, sarclés… Il y en avait qui résistaient au fer et à la bêche, mais le vieux s’acharnait des outils et des ongles, arrivait à nous faire tous propres et plats comme un banc d’école.

2086. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IV. Précieuses et pédantes »

Et Paul Adam est capable d’une idée personnelle à peu près comme Zola était propre à l’invention d’un piston ou d’une soupape. […] Petite fille qui joue avec ses poupées et qui leur donne sa propre nature, Paule, Mauricette ou Henriette range gentiment les idoles et leur prête des phrases jolies.

2087. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Campagnes d’Égypte et de Syrie, mémoires dictés par Napoléon. (2 vol. in-8º avec Atlas. — 1847.) » pp. 179-198

Le propre des conversations de Napoléon, comme de celles de Pascal, était de se graver bon gré mal gré dans les esprits qui l’écoutaient, de nous arriver reconnaissables même à travers les témoins les plus ordinaires, et l’on est tout surpris, quand on les retrouve rapportées quelque part, de l’éclat soudain qu’elles jettent sur les pages insignifiantes d’à côté. […] Aujourd’hui que l’action est plus éloignée, et que la parole reste, celle-ci se montre avec ses qualités propres, et en même temps le souvenir de l’action y projette un reflet et comme un rayon.

2088. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le Livre des rois, par le poète persan Firdousi, publié et traduit par M. Jules Mohl. (3 vol. in-folio.) » pp. 332-350

Mais, en passant dans le monde oriental où tout nous est étranger, il est difficile de se prêter à ces traditions merveilleuses, gigantesques, qui ne nous concernent plus à aucun degré, et l’on est embarrassé, à travers ces flots de couleur nouvelle, de faire la part de ce qui revient en propre au talent du poète. […] Il voit son fils assis à un festin : il l’admire, il le compare, pour la force et la beauté, à sa propre race ; on dirait, à un moment, que le sang au-dedans va parler et lui crier : C’est lui !

2089. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Confessions de J.-J. Rousseau. (Bibliothèque Charpentier.) » pp. 78-97

Depuis Jean-Jacques, c’est dans la forme de langage établie et créée par lui que nos plus grands écrivains ont jeté leurs propres innovations et qu’ils ont tenté de renchérir. […] « Il n’y a point d’écrivain, a-t-on dit judicieusement, plus propre à rendre le pauvre superbe. » Malgré tout, en le considérant ici, nous lâcherons de ne pas trop nous ressentir nous-même de cette disposition comme personnelle qui porte de bons esprits à lui en vouloir dans les circonstances pénibles que nous traversons.

2090. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « De la poésie et des poètes en 1852. » pp. 380-400

Le fin mot de ce garçon honnête et fier, c’est qu’il veut, si la veuve lui fait un sort, avoir du moins de quoi payer ses propres habits de noce. […] Le jour où il plaira à Dieu et à la nature de produire un talent complet doué de cette puissance d’action et de sympathie, il trouvera pour ses créations un rythme, des images, un style propre aux tons les plus divers, en un mot des éléments tout préparés.

2091. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — I. » pp. 401-420

D’ailleurs, la personne du monde la plus propre à l’intrigue, et qui y avait passé sa vie à Rome par son goût ; beaucoup d’ambition, mais de ces ambitions vastes, fort au-dessus de son sexe et de l’ambition ordinaire des hommes, et un désir pareil d’être et de gouverner. […] Les gens comme nous doivent s’élever au-dessus des démêlés particuliers, et se conduire par rapport à leurs propres intérêts et à ceux de leurs sujets, qui sont toujours les mêmes.

2092. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — II. (Suite et fin.) » pp. 421-440

Mme des Ursins, toujours en train et en goût de représentation actuelle et de puissance, rêvera, pour sa retraite dernière, une position de souveraine dans un petit État indépendant où elle puisse, à ses heures de loisir, gouverner une bonne fois en son propre nom et se déployer en plein soleil : car ce fut là son pot-au-lait final et son vrai château en Espagne. […] Mme de Maintenon, en lisant cette version de son propre récit, avait raison de dire à Mme des Ursins : Je voudrais que la relation que je vous ai faite de notre joie sur la bataille d’Almanza fût aussi vive que l’idée que vous vous êtes faites de ce qui se passa dans mon cabinet ; vous l’avez mieux compris de Madrid que je ne l’ai vu, et vous en faites une peinture que je ne pourrai m’empêcher de lire aux personnes qui y ont pris part.

2093. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

Ce chef-d’œuvre de satire est celle qu’il adresse à son Esprit, sujet favori encore, toujours le même, rimes, métier d’auteur, portrait de sa propre verve ; il s’y peint tout entier avec plus de développement que jamais, avec un feu qui grave merveilleusement sa figure, et qui fait de lui dans l’avenir le type vivant du critique. […] Prenons les choses littéraires telles qu’elles nous sont venues aujourd’hui, dans leur morcellement et leur confusion ; isolés et faibles que nous sommes, acceptons-les avec tout leur poids, avec les fautes de tous, en y comprenant nos propres fautes aussi et nos écarts dans le passé.

2094. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Saint François de Sales. Son portrait littéraire au tome Ier de l’Histoire de la littérature française à l’étranger par M. Sayous. 1853. » pp. 266-286

On était en 1608, vers la fin de ce règne de Henri IV, alors dans toute sa plénitude et sa gloire, mais qui, après des troubles et des déchirements si profonds, avait eu le temps à peine de produire sa littérature propre. […] Voici une retraite toute propre à bien servir Dieu et son Église avec notre plume : savez-vous, notre père prieur ?

2095. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — II. (Fin.) » pp. 476-495

Telle était sa disposition sincère après sa première conquête, après ce premier beau morceau d’histoire ; il aspirait à en rester là, et, l’épisode terminé, à rentrer dans ses propres voies, c’est-à-dire une bonne administration, une libre et gaie philosophie, l’amitié et les beaux-arts. […] Fouqué, à chaque présent dont il sent l’intention, est attendri ; il ne sait comment reconnaître cette amitié qui, depuis plus de trente ans, le cherche et l’honore, mais qui se multiplie surtout depuis que lui n’est plus bon à rien et n’est plus propre à y répondre que par ses sentiments : « Ce qui vous distingue, Sire, des autres princes, c’est que vous faites tant de bien à un homme qui ne peut, par le moindre service, vous en témoigner sa reconnaissance. » Quand il le voit étonné d’être l’objet de tant de soins, Frédéric le rassure simplement et par des mots naturels, puisés dans la meilleure et commune humanité : « Vous vous étonnez que je vous aime : vous devriez plutôt vous étonner si je n’aimais pas un officier de réputation, honnête homme, et de plus mon ancien ami. » Quoique Frédéric n’ait que cinquante-quatre ans lorsque Fouqué en a soixante-huit, il se fait exprès vieillard comme lui ; très brisé lui-même par les fatigues, il se suppose du même âge que son vieux compagnon : J’attends ici tranquillement dans mon trou le retour du printemps (9 février 1766) ; cette saison-ci n’est pas faite pour notre âge.

2096. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre III. L’art et la science »

C’est ce qui explique pourquoi le perfectionnement est propre à la science, et n’est point propre à l’art.

2097. (1911) Jugements de valeur et jugements de réalité

Tout comme la vie intellectuelle, la vie morale a son esthétique qui lui est propre. […] L’idéal est son domaine propre.

2098. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une préface abandonnée » pp. 31-76

De quels sourires, de quelles ironies brûlantes il marquait à l’épaule, avant de les livrer aux flammes, ces effrontés qui étalent leur propre cœur en montre dans une ode ou dans une élégie ; ces innovateurs sacrilèges, échappés de la tradition, qui, au lieu d’écrire : « Voilà ce qu’éprouve Pierre ou Jacques » écrivent : « Voilà ce que j’éprouve moi-même !  […] Il est de ces écrivains pour qui l’observation n’est que la réflexion directe de leur propre cœur.

2099. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Macaulay »

Quant à Clive et Hastings, les faits y sont et y roulent, exagérés comme le théâtre indien sur lequel ils se produisent avec la grandeur qui leur est propre, mais nous ne voyons ni se bomber ni se creuser ces deux individualités énormes, Clive et Hastings, que l’on peut montrer de deux manières : par le relief ou par l’intaille, selon qu’on est un artiste ou un penseur ! […] Notre admiration pour les grandes et quelquefois charmantes qualités du critique de la Revue d’Édimbourg se changeait en colère, parce qu’il ne restait pas toujours dans le jour seyant à son talent, parce qu’il semblait faire défection à ses propres facultés en faisant défection à la littérature, et qu’il troublait, en introduisant la politique dans son œuvre, le jugement qu’on devait en porter.

2100. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « J. de Maistre » pp. 81-108

et qui déchira les entrailles de l’Europe après se les être déchirées à elle-même de ses propres mains, ni les conséquences de ce Protestantisme pulvérisateur qu’il détestait, et qui fait lever maintenant des atomes de poussière là où il y avait autrefois du ciment, n’arrachèrent à Joseph de Maistre, tout le temps qu’il vécut, sa foi profonde en une unité supérieure, qui, tôt ou tard, devait se reconstituer. […] » Tel est l’accent de Joseph de Maistre, en ses œuvres, quand il y parle pour le propre compte de sa pensée.

2101. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Jean Richepin »

Ils ne seraient pas leurs propres échos. […] Je dis que la Critique — la Critique littéraire, bien entendu, et non la Critique morale, qui n’a que faire ici, — peut prendre ce livre et l’écailler comme on écaille un poisson, et le racler du fil de son couteau et en retrancher, couche par couche, tout ce qui déshonore littérairement une telle œuvre, c’est-à-dire le gongorisme effréné, l’atroce mauvais goût, les bassesses ignobles et malheureusement volontaires d’expression, l’haleine des pires bouches, enfin tous les défauts dont l’auteur a fait comme à plaisir d’immondes vices, il restera et on trouvera, sous tout cela et malgré tout cela, un énorme noyau de poésie, résistant et indestructible, qui brillera de sa propre lueur dans l’histoire littéraire d’un siècle qui a des poètes comme Hugo, Vigny, Musset, Baudelaire et Lamartine, le plus grand de tous !

2102. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iii »

Tels quels, vingt-cinq mille prêtres sont un puissant levain d’idées dans une atmosphère si propre à la fermentation religieuse.‌ […] Je voudrais mourir en martyr pour mon propre salut et pour celui de la France entière. » (Semaine Religieuse, Nantes, 6 juin 1915.)‌

2103. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Sur Adolphe de Benjamin Constant » pp. 432-438

Mais de plus indiscrets ont voulu chercher plus avant ; et comme le héros du livre, Adolphe, est évidemment le portrait de Benjamin Constant lui-même, que celui-ci a bien eu l’éducation et la jeunesse qu’il donne à son personnage, qu’il a bien eu un père comme celui-là, d’apparence froide et sans confiance avec son fils, qu’il a bien réellement connu, dès son entrée dans le monde, une femme âgée, philosophe, telle qu’il nous la montre (Mme de Charrière), on a voulu le suivre plus loin et trouver, dans les tristes vicissitudes de la passion décrite, des traces et des preuves d’une de ses propres passions et de la plus orageuse.

2104. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « I » pp. 1-8

Eh bien, en lui appliquant sa propre mesure, un mauvais Génie, un Darvand (ce serait moi), dirait ce que j’ai dit plus ou moins.

2105. (1874) Premiers lundis. Tome II « Deux préfaces »

Depuis que les morceaux, recueillis dans le premier volume de cet ouvrage23, ont paru en 1832, l’auteur s’est trouvé insensiblement engagé à en composer dans le même genre un plus grand nombre qu’il n’avait projeté d’abord, et il n’a pas tardé à concevoir la réunion de ces divers Portraits ou articles critiques comme pouvant former une galerie un peu irrégulière, assez complète toutefois, et propre à donner une idée animée de la poésie et de la littérature contemporaine.

2106. (1874) Premiers lundis. Tome II « H. de Balzac. Études de mœurs au xixe  siècle. — La Femme supérieure, La Maison Nucingen, La Torpille. »

On avait mis dans un beau bassin propre de Versailles des poissons qui bientôt y mouraient : « Ils sont comme moi, disait-elle, ils regrettent leur bourbe » ; ce que M. de Balzac paraphrase ainsi : « Ils regrettent leurs vases obscures. » Eh bien, il a dans son expression, là même où l’on ne peut le contredire par une autorité historique, beaucoup de ces sortes d’impropriétés : ce style, sans cesse remué, s’alanguit et s’étire.

2107. (1875) Premiers lundis. Tome III « Le roi Jérôme »

Il faudrait savoir et se donner et se doubler en quelque sorte, élever son cœur en même temps qu’anéantir sa volonté propre, comprendre d’un seul coup d’œil toutes les destinées futures qui intervertissent l’ordre antérieur et s’y résigner en grandissant.

2108. (1875) Premiers lundis. Tome III «  La Diana  »

Mais quelques-uns, cela est trop vrai pourtant, se sont accoutumés à croire que ce dont ils ont la garde est à eux ; ils se proposent toujours d’en faire pour leur propre compte une publication qui ne vient jamais ; vrais eunuques du sérail, Ne faisant rien, nuisant à qui veut faire.

2109. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIX. De la littérature pendant le siècle de Louis XIV » pp. 379-388

Il faut, pour bien écrire, des habitudes autant que des réflexions ; et si les idées naissent dans la solitude, les formes propres à ces idées, les images dont on se sert pour les rendre sensibles, appartiennent presque toujours aux souvenirs de l’éducation, et de la société avec laquelle on a vécu.

2110. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre XI. De l’ignorance de la langue. — Nécessité d’étendre le vocabulaire dont on dispose. — Constructions insolites et néologismes »

En recherchant les termes les plus justes qui répondent aux mots étrangers et aux idées des écrivains, on pénètre plus avant dans le sens des mots français, on en mesure mieux l’énergie et la vertu, et l’on en fait provision en même temps pour le jour où l’on devra exprimer ses propres pensées.

2111. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les snobs » pp. 95-102

Tout critique est, plus ou moins, sa propre dupe, la dupe de ses théories et de ses idées générales, qui faussent à son insu ses jugements particuliers.

2112. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Pour encourager les riches. » pp. 168-175

Et, soit dit en passant, il est remarquable que de telles révélations, et sur des choses d’un ordre si privé, puissent être faites par les journaux, et que celle-là en particulier, si propre à étonner les pauvres et à les induire en de mauvais sentiments, nous ait été apportée par une gazette dont l’emploi ordinaire est de défendre ce qui nous reste du vieil ordre social et, spécialement, l’aristocratie du nom et celle de l’argent et leurs conjonctions si intéressantes… Une fortune de cent quatre-vingts millions, si elle n’a pas été mal acquise, n’a pu être acquise pourtant que par la spéculation, qui est une forme du jeu et qui, étant la recherche du gain sans travail, est, aux yeux d’un chrétien, sur la limite extrême des choses permises.

2113. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Heredia, José Maria de (1842-1905) »

Il a publié lentement des sonnets sonores, enfin recueillis dans les Trophées, qui, par la fermeté du dessin, l’éclat des tons et la puissance du modèle, suggèrent un plaisir esthétique rival de celui qui est propre aux arts plastiques, et qui donnent souvent par l’accord de l’idée et de la forme le sentiment même de la perfection.

2114. (1911) La valeur de la science « Introduction »

La morale et la science ont leurs domaines propres qui se touchent mais ne se pénètrent pas.

2115. (1882) Qu’est-ce qu’une nation ? « I »

La seconde circonstance fut, de la part des conquérants, l’oubli de leur propre langue.

2116. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre II : Termes abstraits »

Nos idées d’étendue et de mouvement dérivent, sans aucun doute, de l’action de notre propre corps.

2117. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXX » pp. 330-337

Il avait augmenté de son propre mouvement sa pension, et l’avait portée de 2 000 à 6 000 livres.

2118. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 124-134

Ce n’est pas que la Poésie ne puisse & ne doive accorder son langage avec celui de la raison ; mais la gêne du raisonnement & des preuves énerve son activité, & fait avorter les traits de lumiere & de sentiment, propres à frapper & à convaincre plus vivement que toutes les pensées, les sentences, ou les démonstrations géométriques.

2119. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VI, première guerre médique »

On déchiffrerait peut-être aujourd’hui, sur l’inscription de Behistoun, le nom de Miltiade, à la suite de ceux des rebelles mèdes que Darius se vante d’avoir mutilés de sa propre main : — « Phraorte fut pris et amené devant moi, je lui coupai le nez, les oreilles, la langue.

2120. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Démosthéne, et Eschine. » pp. 42-52

On lit encore avec plaisir, dans toutes les langues de l’Europe, son discours pour la défense de Ctésiphon, ou plutôt pour la sienne propre.

2121. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Ronsard, et Saint-Gelais. » pp. 120-129

Aussitôt que Ronsard fut rempli de la lecture des anciens auteurs, il se mit à pindariser, selon sa propre expression ; c’est-à-dire, qu’il voulut imiter Pindare.

2122. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Voiture, et Benserade. » pp. 197-207

Des antithèses, des pointes, quelques pensées brillantes, des applications & des allusions plus forcées qu’heureuses, un ton continuel de fadeur & de galanterie, le stile le plus enjoué, le plus fleuri, le plus ingénieux, mais le moins naturel ; un stile propre à mettre en réputation un auteur de son vivant, & qui bientôt après le fait oublier.

2123. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Addisson, et Pope. » pp. 17-27

Ils se servirent de tous les mauvais poëtes d’Angleterre, comme autant de trompettes propres à publier les taches qu’ils croyoient appercevoir dans un ouvrage qu’ils ne trouvoient que trop beau.

2124. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Avertissement » pp. -

Non seulement toutes les époques ne sont pas marquées des mêmes caractères, mais il y en a dont le caractère propre est d’en manquer.

2125. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre quatrième. »

D’abord ajustement n’est pas le mot propre.

2126. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XVI »

Cela signifie, en propres termes, qu’on trouve d’abord des images quand on a du talent ou du génie, ce qui est, je crois, faire la part assez belle à la spontanéité et à l’inspiration. « On les découvre, déclarons-nous ensuite, par inspiration ou à tête reposée », autrement dit par l’effort, la réflexion et le travail ajoutés au talent naturel.

2127. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Léon Feugère ; Ambroise-Firmin Didot »

Quand un écrivain comme Ambroise-Firmin Didot, qui pouvait mettre dans un écrit la plénitude et l’agrément sans lesquels toute l’érudition de la terre ne vaut pas une pincée de cendres de papyrus, ne produit, en réalité, qu’une œuvre d’érudition, maniable seulement aux savants et aux esprits spéciaux, tant elle est hérissée de citations et de textes, il court grand risque d’être traité, malgré le mérite de ses renseignements, comme le porc-épic de sa propre science… On n’y touchera pas !

2128. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le voltairianisme contemporain »

Sans le voltairianisme et la libre pensée, peut-être même les plus badauds parmi les admirateurs à fond de train du Roi Voltaire ne s’abuseraient pas complètement sur le compte de ce caméléon moral, âme desséchée, jalouse de gloire, qui cracha sur la figure de quiconque le suivit ou le précéda, et qui se serait pris en exécration s’il se fût rencontré sur son propre chemin lui-même ; lâche pour tout braver, brave au milieu des lâches, grand dans les petites questions, petit dans les grandes ; qui réduisit tout à rien pour être quelque chose, et qui grimpa, comme un écureuil, jusqu’à la gloire, en passant par tous les degrés du mépris !

2129. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Jean-Jacques Rousseau »

D’abord, voici la grande portée des philosophes purs, des faiseurs de sociétés comme leur propre père, la portée pesante des Saint-Simon, des Charles Fourier, des Cabet, des Proudhon, des Pierre Leroux.

2130. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paria Korigan » pp. 341-349

II D’autres qu’elle, du reste, avaient, dans ces tout derniers temps, essayé de cette espèce de littérature de terroir, qui est moins et plus que de la littérature, et qui donne l’accent le plus spontané et le plus intime, tout à la fois, des sentiments et des mœurs d’un pays, traduits dans son propre patois, s’il est assez heureux pour en avoir un encore !

2131. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Préface » pp. -

Le Génie, comme le Char de triomphe sur lequel la Poésie, cette dupe de ses propres images, s’obstine si bêtement à le faire monter, soulève, en passant, la poussière des imitateurs.

2132. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Léon Cladel »

Ce livre éblouissant n’est pas un livre fait avec les combinaisons propres à tout livre, mais un tableau pris du pied des choses, presque contondant de relief, presque poignardant de couleur.

2133. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « Introduction »

Affranchissement de l’individu, retour aux voies de nature, acheminement de l’humanité vers sa propre conscience, telles sont les grandes lignes du nouveau devenir.

2134. (1915) La philosophie française « II »

En se composant ensemble, ils donnent à cette philosophie sa physionomie propre.

2135. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre II. Quelques traditions sur Pindare. »

La faveur qu’il trouvait chez ces princes, la conserva-t-il au même degré dans les villes libres de la Grèce et parmi ses propres concitoyens ?

2136. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

Mais, comme il est vrai qu’on ne combat bien les gens qu’avec leurs propres armes et quand on a déjà un peu couché sous leur tente, j’avancerai de la nouvelle symboliste de M.  […] Ses romans sont des galeries de portraits, où chacun a une vie propre, un costume, une attitude, un fonds moral à soi. […] Ils réfléchissent sur tout, déduisent et induisent, et il est visible qu’ils songent à satisfaire leur propre curiosité plus qu’à exciter la nôtre. […] Nos pères souffraient de la métaphore ; nous souffrons du mot propre. […] C’est le triomphe de l’individualisme, — un vilain mot, sans doute, mais le seul propre à caractériser cette fin de siècle turbulente et confuse, et dont l’avenir déconcerte toute prévision.

2137. (1893) Alfred de Musset

Ses grands amis du Cénacle lui faisaient réciter ses vers, le conseillaient, et il va sans dire qu’ils le poussaient dans leur propre voie. […] Personne, autour d’eux, ne faisait cette réflexion, qu’en diminuant l’autre, on amoindrissait d’autant son propre héros. […] Musset n’avait pas encore pris conscience de lui-même et de son génie propre. […] On « n’est pas habitué, dit-il, aux pièces naturelles, et à cette fantaisie si semblable à la vérité même, qui est le propre de M.  […] Cette jeunesse dissolue adore chez Musset l’expression de ses propres vices ; dans ses vers elle ne trouve rien de plus beau que certaines poussées de verve où il donne comme un forcené.

2138. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

Mais il avait le génie qui révèle à cette pensée populaire sa propre grandeur, qu’elle ne savait pas. […] Il n’avait pas beaucoup mieux traité sa propre famille. […] Nous tâcherons de fixer votre intérêt sur quelques points généraux, au lieu de le disperser sur des noms propres, maintenant oubliés. […] Si la Provence fût demeurée indépendante, c’était un peuple du Midi de plus, avec son nom, sa langue, ses arts, son génie propre. […] Vous y trouverez la preuve de cette prédominance de la poésie provençale, qui venait vaincre l’Italie jusque sur son propre territoire.

2139. (1894) La bataille littéraire. Septième série (1893) pp. -307

c’est du propre ; et, en définitive, tu te trompes : il n’y a rien d’aussi rat que les gens du monde. […] C’est une assemblée de soleils et de planètes où tout brille d’un éclat propre ou emprunté. […] Sa propre situation lui était à peine apparue. […] Un autre enfant fut enterré vif par son beau-frère, sous les yeux de sa propre sœur et de toute la peuplade en marche. […] Vous vous fatigueriés la tête et vous seriez moins propre au travail.

2140. (1925) Portraits et souvenirs

  Le gage le plus réel que Gérard de Nerval donna au romantisme, ce fut le drame de sa propre mort. […] Il ne dédaignait nullement de mêler à ses inspirations propres des emprunts faits à ses devanciers de l’Antiquité et de la Renaissance ou même aux poètes de son temps. […] Dans ce cas, combien les heures de classe ne lui doivent-elles pas paraître employées à ses dépens, des heures perdues, pour tout dire, et infructueuses au point de vue de son développement propre ! […] Pour les uns, le spectacle de la vie, quelles que soient les complications qu’ils y perçoivent, est régulier et naturel, et l’explication qu’ils proposent de l’existence repose sur une expérience traditionnelle à laquelle s’adjoint la leur propre. […] Lucien Corpechot de cet homme admirable et singulier, dont le nom même semble dire combien il fut l’expression profonde d’un sentiment qui nous est propre.

2141. (1863) Histoire de la vie et des ouvrages de Molière pp. -252

On verra aussi qu’il regardait ce sujet de La Thébaïde comme tout à fait propre à la tragédie, puisque ce fut lui qui plus tard le donna à traiter au jeune Racine. […] Et pensez-vous d’ailleurs qu’un misanthrope comme moi, capricieux, si vous voulez, soit propre auprès d’un grand ? […] Presque tout ce qui lui appartient en propre dans ces deux productions, comme tout ce qu’il a emprunté à ses devanciers, est dans le goût des théâtres latin, espagnol et italien. […] Si nous envisageons d’abord les ridicules de leur extérieur grotesque, rien de plus propre à être traduit sur la scène. […] Il accuse Molière d’avoir épousé sa propre fille : mais Montfleury n’est point écouté à la cour. » Quoi !

2142. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome III pp. -

Ils se laissèrent entraîner à la véhémence de ses déclamations, & le couronnèrent malgré leurs propres intérêts. […] Il tient tout de son génie & de son propre fond, ses belles compositions, son grand goût de dessein, son coloris en chanteur, son pinceau si tendre & si moëlleux(*). […] Cet homme, qui avoit combattu si longtemps & avec tant de succès pour le capuchon & pour la barbe, a la bassesse de vouloir anéantir l’un & l’autre, & travaille à détruire son propre ouvrage. […] De peur qu’on ne le soupçonnât d’avoir été engagé à cette démarche par ses confrères, il eut grand soin d’avertir qu’il l’avoit faite de son propre mouvement. […] Ils voyoient, dans la destruction de Port-royal, leur propre sureté, leur crédit établi, leur réputation moins compromise, leurs livres moins exposés à des comparaisons désavantageuses, & le nombre de leurs élèves accru.

2143. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre I. Principe des mœurs sous l’Ancien Régime. »

Lorsqu’il s’agit de former une maison à Madame Royale, âgée d’un mois, « la reine, écrit l’ambassadeur d’Autriche, veut supprimer une mollesse nuisible, une affluence inutile de gens de service, et tout usage propre à faire naître des sentiments d’orgueil. […] Lui aussi, il a joué un rôle ; tous ses pas et tous ses gestes ont été réglés d’avance ; il a dû compasser sa physionomie et sa voix, ne jamais quitter l’air digne et affable, distribuer avec réserve ses regards et ses signes de tête, ne rien dire ou ne parler que de chasse, éteindre sa propre pensée s’il en a une. […] Pendant le carnaval de 1777, la reine, outre ses propres fêtes, a les bals du Palais-Royal et les bals masqués de l’Opéra ; un peu plus tard, chez la comtesse Diane de Polignac, j’en trouve un autre où elle assiste avec toute la famille royale, sauf Mesdames, et qui dure depuis onze heures et demie du soir jusqu’à onze heures du matin. […] Commandants, lieutenants généraux, partout les envoyés du centre sont conduits de même, par les mœurs, par les convenances et par leur propre désœuvrement, à tenir salon ; ils apportent avec eux les élégances et l’hospitalité de Versailles.

2144. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

Quand vint la Révolution, j’avais fait du chemin, et j’étais à mon tour devenu capitaine d’un petit bâtiment marchand assez propre, ayant écumé la mer pendant quinze ans. […] Or, durant quatorze années que j’ai vécu dans l’armée, ce n’est qu’en elle, et surtout dans les rangs dédaignés et pauvres de l’infanterie, que j’ai retrouvé ces hommes de caractère antique, poussant le sentiment du devoir jusqu’à ses dernières conséquences, n’ayant ni remords de l’obéissance ni honte de la pauvreté, simples de mœurs et de langage, fiers de la gloire du pays, et insouciants de la leur propre, s’enfermant avec plaisir dans leur obscurité, et partageant avec les malheureux le pain noir qu’ils payent de leur sang. […] Il la soigna malade jusqu’à la veille de sa propre mort. […] Il attendit patiemment sa propre fin, qui ne pouvait tarder beaucoup.

2145. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « L’abbé de Bernis. » pp. 1-22

Le digne fondateur a sur ce sujet de belles et nobles paroles qui décèlent, sous cette monarchie de Louis XV, un cœur de citoyen ; j’en veux citer quelques-unes, ne fût-ce que pour moraliser ce sujet de Bernis, dont les débuts sont un peu amollissants : Ce que vous me dites, monsieur, écrit Duverney à Bernis, de l’opinion de l’étranger sur cet établissement n’est guère propre à modérer mon impatience ; j’en ai toujours beaucoup dans les choses qui contribuent à la gloire de notre maître et au bien de la nation… Les objections ne m’ont jamais rebuté. […] Or, c’est à Venise qu’il fait son apprentissage, au moins pour les dehors, car les affaires y sont à peu près nulles : « Comme cette ambassade, remarque-t-il, est plus de parade que de nécessité, on a cru quelquefois que tout le monde y était propre, et que le premier venu y serait assez bon : en quoi on s’est grandement trompé. » Et il définit à merveille les qualités essentielles pour faire respecter dans un poste de ce genre le représentant du roi.

2146. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — I. » pp. 134-154

Quand Tallemant des Réaux, par exemple, s’appuyant du manuscrit d’un ancien secrétaire de Du Plessis-Mornay, c’est-à-dire d’un témoignage ennemi, s’amuse à nous conter que tous les soirs, à l’Arsenal, jusqu’à la mort de Henri IV, Sully, déjà arrivé à la cinquantaine, continuait d’aimer si fort la danse « qu’il dansait tout seul avec je ne sais quel bonnet extravagant en tête, qu’il avait d’ordinaire quand il était dans son cabinet », une telle anecdote, qui n’a aucun rapport prochain ni éloigné avec les actes publics de Sully et qui ne saurait être contrôlée, est indigne d’être recueillie par un historien et n’est propre (fût-elle exacte à quelque degré) qu’à déjouer et à dérouter le jugement général, bien loin d’y rien apporter de nouveau. […] Sully, dans son château, se fait donc raconter et ramentevoir par ses quatre secrétaires les choses qu’il sait mieux qu’eux et qu’il leur a racontées ou laissé lire ; fidèle, même dans la familiarité, à son goût de hauteur et d’appareil, il se fait renvoyer ses souvenirs sous forme cérémonieuse, obséquieuse, et, pour ainsi dire, à quatre encensoirs ; il assiste sous le dais et prête l’oreille avec complaisance à ses propres échos.

2147. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — I. » pp. 301-321

Mais le propre du Français n’est-il pas de ne jamais donner de démission absolue et de recommencer toujours ? […] Quand il ne fait que se prendre corps à corps aux adversaires du moment, à ceux qui parlent de Shakespeare sans le connaître, de Sophocle et d’Euripide sans les avoir étudiés, d’Homère pour l’avoir lu en français, et dont toute l’indignation classique aboutit surtout à défendre leurs propres œuvres et les pièces qu’ils font jouer, il a raison, dix fois raison.

2148. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — I. » pp. 413-433

Un feu d’enthousiasme qu’ont trop peu ressenti les poètes de nos jours, et que nous avons trop confondu dans nos propres inspirations avec les saillies de la fantaisie, animait alors ces âmes patriotiques et fermes, ces hommes de devoir. […] Mais le grand homme, dont le propre est de connaître les hommes mieux souvent qu’ils ne se connaissent eux-mêmes, a distingué en lui, sous l’enveloppe modeste, une capacité supérieure qu’il ne craint pas de forcer et d’élever tout entière jusqu’à lui.

2149. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — I. » pp. 473-493

Dacier depuis son mariage, il entra plus ou moins de Mme Dacier ; elle lui était supérieure, et, par une ignorance qui était chez elle une vertu plutôt qu’une grâce, elle ne s’en apercevait pas : « Dans leurs productions d’esprit, disait Boileau, c’est Mme Dacier qui est le père. » Elle se dégagea pourtant et se remit à suivre, en traduisant, ses propres choix et ses instincts. […] J’ai distingué des passages propres à causer l’émotion la plus vive, s’ils m’eussent été présentés avec la magie du vers, ainsi qu’ils doivent l’être dans l’original.

2150. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Le président Hénault. Ses Mémoires écrits par lui-même, recueillis et mis en ordre par son arrière-neveu M. le baron de Vigan. » pp. 215-235

Dès l’abord je remarque que les noms propres sont défigurés étrangement. […] Je laisse les noms propres, et j’en viens à des fautes d’un autre genre dont il est besoin d’être averti.

2151. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — I » pp. 432-453

Elle n’eut rien, quant aux mœurs, de ce qu’on est convenu d’attribuer en propre au xviiie  siècle, et M. de Meilhan qui s’y connaissait, dans le portrait presque enthousiaste qu’il a tracé d’elle sous le nom d’Arsène, a pu dire en toute vérité : La jeunesse d’Arsène n’a point été troublée par les passions ; c’est dans le temps des erreurs et de la dissipation qu’elle a cultivé son esprit et exercé son courage par les privations et sa patience par les contrariétés. […] [NdA] Il n’aurait tenu qu’à lui d’avoir ces observations ; il était père, il n’avait qu’à élever ses propres enfants.

2152. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres, publiées par M. de Falloux. »

En fait de sentiments, dépensées portant sur les affections et les passions humaines, j’ai parcouru un cercle immense et creusé jusqu’aux antipodes ; je suis vraiment docteur en cette loi-là… C’est dans l’enceinte de mon propre cœur que j’ai appris à connaître celui des autres, et la seule connaissance de moi-même m’a donné la clef de ces énigmes innombrables qu’on appelle les hommes. » Elle se flatte et s’exagère sans doute un peu cette connaissance universelle, cette clef, ce passe-partout qu’elle croit tenir et qui l’a conduite, en définitive, à la possession d’un monde très-distingué, mais restreint. […] Quelques grands athlètes y viennent de temps en temps se mesurer dans des duels ingénieux : ils entrent dans la lice, ils brillent, on écoute, on applaudit, et bientôt chacun des habitués reprend, le fil de ses propres réflexions dans des à parte suivis et qui, après les airs de bravoure, composent un fond de bourdonnements plus doux.

2153. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Merlin de Thionville et la Chartreuse du Val-Saint-Pierre. »

C’est un des caractères de Merlin, on l’a remarqué, de n’avoir jamais cédé qu’au mouvement de sa propre passion, de s’être arrêté là où elle s’arrêtait, sans jamais servir d’instrument à celle des autres. Athlète de la Convention en Thermidor, et l’un de ses énergiques libérateurs, mais plus propre à la période ascendante qu’au décours et au déclin d’une révolution, il s’efface et disparaît à mesure que la Révolution elle-même se perd dans les intrigues, comme le Rhin dans les sables.

2154. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. De Pontmartin. Causeries littéraires, causeries du samedi, les semaines littéraires, etc. »

Tout cela est dit en termes d’une fausse élégance, avec des tons demi-poétiques, des inversions d’adjectifs, « les délétères parfums, les monotones draperies… » Il ne lui reste plus, les autres mis ainsi de côté, qu’à inaugurer sa propre critique, à lui, la seule salutaire et la seule féconde, la seule propre à réconcilier l’art avec la religion, le monde et les honnêtes gens : « Telles sont, dit-il, après avoir posé quelques points, les questions que je veux effleurer ici, comme on plante un jalon à l’entrée d’une route. » Effleurer une question, de même qu’on plante un jalon, c’est drôle ; il n’y a guère de rapport naturel entre effleurer et planter ; qui fait l’un ne fait pas l’autre, et fait même le contraire de l’autre.

2155. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers. »

Un historien de la société anglaise au xviiie  siècle, pour être un peu complet, ne pourrait éviter de parler d’elle, et la meilleure partie des pièces et témoignages qui la concernent, et qui mettent hors de doute son propre mérite à elle-même, nous vient du dehors. […] Elle pouvait toujours se dire cependant, pour s’excuser à ses propres yeux, que si le prince de Conti était veuf, était libre, elle, elle ne l’était pas, et que, si elle l’avait été, leur liaison aurait pris bientôt un autre tour et un nom plus respectable.

2156. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

Le peuple n’a au gouvernement que la part qu’il doit avoir, c’est-à-dire dont il est susceptible, et, quoiqu’on prétende qu’il est acheté aux élections, son choix tombe sur des personnes qui ne voudraient pas se déshonorer en soutenant une mauvaise cause, nuisible à la nation et contraire à leurs propres intérêts. […] Les dix années qu’elle passa avec son ami furent tout entières consacrées par elle à adoucir son amertume, à favoriser ses goûts, à y entrer autant qu’elle le pouvait, soit qu’il voulût jouer la tragédie, — ses propres tragédies, — à domicile (ce qu’il fit d’abord avec le feu et l’acharnement qu’il mettait à toute chose), soit qu’il lui plût de s’enfermer et de tirer le verrou pour travailler comme un forçat, versifier jour et nuit ou étudier le grec à mort : c’étaient les seules diversions assez fortes pour l’absorber et pour l’aider, tant bien que mal, à endurer les invasions intermittentes de la Toscane par les armées républicaines.

2157. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance »

N’aimer en littérature qu’à s’occuper du présent et du livre du jour, c’est aimer la mode, c’est suivre et courir le succès, ce n’est pas aimer les Lettres elles-mêmes, dont le propre est la perpétuité, la mémoire et la variété dans le souvenir. […] Il faudra donc que ce quelqu’un-là ait la double attention d’ouvrir les yeux sur ses propres défauts pour les réprimer, et de les tenir strictement fermés sur ceux de sa compagne.

2158. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite.) »

Les portraits que trace Malouet dans un de ses premiers chapitres, et qui forment comme sa galerie des États généraux, n’approchent certes pas, même de bien loin, de ceux qu’un Retz a tracés dans sa galerie de la Fronde, et un Saint-Simon dans ses tableaux de la Régence ; mais les principaux traits sont fort justes, fort ressemblants, et le mot propre du caractère de chacun est souvent donné. […] Voici ses propres paroles : « A Lausanne, je rencontrai l’abbé Raynal, mais il ne me laissa aucune admiration, soit de ses talents, soit de son caractère.

2159. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — Note »

C’est trop vif, trop sincère, trop plein surtout de noms propres, pour pouvoir être donné en entier. […] Consulté par elle sur les personnes et leur caractère, et me tenant un peu trop sans doute à mon propre point de vue, je lui conseillais de se faire des amis distingués, sérieux, et à force de m’écarter du genre camarade, je ne prenais pas garde que j’allais donner dans le doctrinaire.

2160. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIIIe entretien. Chateaubriand, (suite) »

S’il devient moins propre à la société, sa sensibilité se développe aussi davantage. […] Fontanes avait quitté Londres avant M. de Chateaubriand ; il avait reçu à Paris l’auteur de l’Essai ; il l’avait introduit auprès de ses propres amis : M. 

2161. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jules de Glouvet »

l’humanité vieillie, dégoûtée des agitations stériles, excédée de sa propre civilisation, déserter les villes, revenir à la vie naturelle et employer à en bien jouir toutes les ressources d’esprit, toute la délicatesse et la sensibilité acquises par d’innombrables siècles de culture. […] » et en même temps on jouit de sa propre bonté.

2162. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Victor Duruy » pp. 67-94

, fierté des gloires militaires de la Révolution et de l’Empire, rêve d’une France libre, glorieuse et honorée parmi les hommes », cela composait une sorte de religion civique, commune alors à un très grand nombre de Français, et faite de très antiques bons sentiments, mais qui, naturellement, revêtaient les formes accidentelles propres à cette époque : on n’était pas clérical dans la maison ; on était de ces Parisiens qui, à l’endroit des « capucinades » officielles de la Restauration, retrouvaient les propos de la Satire Ménippée ; et, le samedi soir, on se réunissait entre amis, sous la tonnelle, pour chanter les premières chansons de Béranger. […] L’épopée de son oncle, l’étrangeté merveilleuse de sa propre aventure, lui étaient une sorte d’opium, d’autant mieux qu’il avait été extraordinairement servi par les circonstances, qu’on avait beaucoup agi pour lui et qu’il avait passé d’une extrémité de fortune à l’autre sans être proprement un homme d’action.

2163. (1890) L’avenir de la science « XIII »

Les auteurs de monographies ne peuvent raisonnablement espérer de voir leurs travaux vivre dans leur propre forme ; les résultats qu’ils ont mis en circulation subiront de nombreuses transformations, une digestion, si j’ose le dire, et une assimilation intimes. […] Ceux qui refont ces histoires les uns après les autres ne font que copier les mêmes erreurs et les aggravent en y joignant leurs propres conjectures.

2164. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XII »

Au moment où le public va protester contre une idée trop bizarre, contre une théorie trop aventurée, il entend sa propre objection qui lui revient de la scène, comme par un écho éclatant d’esprit. […] C’était donc un experimentum in anima vili qu’elle voulait faire, sur la personne de ce pauvre diable, en l’accouplant à une femme qu’elle juge indigne de son propre fils ?

2165. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Œuvres de Barnave, publiées par M. Bérenger (de la Drôme). (4 volumes.) » pp. 22-43

En présence de ces grandes et touchantes infortunes, Pétion ne semble occupé que d’une chose, du respect de sa propre vertu, du dessein qu’il suppose à tout le monde de la surprendre et de la corrompre, du soin qu’il a de la préserver et de la faire valoir. […] Il démêle et fait vivement ressortir les fautes suprêmes de cette grande Assemblée, de même qu’il a dévoilé, chemin faisant, les siennes propres.

2166. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame de La Tour-Franqueville et Jean-Jacques Rousseau. » pp. 63-84

Pour montrer, avant tout, ce qu’était Mme de La Tour, cette Julie qui se croyait en droit d’être comparée à Julie d’Étanges, et pour prouver qu’elle n’en était pas trop indigne, je ne puis faire rien de mieux que de citer son propre portrait, envoyé par elle à Rousseau, un jour que celui-ci, dans une de ses rares boutades de galanterie, lui avait demandé comment elle s’habillait, afin de pouvoir se fixer l’imagination, disait-il, et se faire quelque idée d’elle. […] S’il a été son propre bourreau et s’il s’est beaucoup troublé lui-même, il a encore plus troublé le monde.

2167. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de lord Chesterfield à son fils. Édition revue par M. Amédée Renée. (1842.) » pp. 226-246

Il fait les honneurs de sa propre personne pour l’enhardir et pour mieux l’attirer jusqu’à lui. […] Mais cette libre et forte disposition de la pensée aux ordres de la volonté, n’est le propre que des grands ou des très bons esprits.

2168. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Le duc de Lauzun. » pp. 287-308

L’ancienne société a abusé ; elle a été punie et détruite, et cette punition, cette ruine se justifie aujourd’hui même avec éclat par les aveux successifs qui sortent de son propre sein. […] La princesse de Poix la comparait à une héroïne de roman anglais, avec d’autant plus de raison que les goûts de Mme de Lauzun avaient devancé l’anglomanie qui commençait à poindre : la langue anglaise lui était familière comme la sienne propre, la littérature de ce pays faisait ses délices. » (Vie de la princesse de Poix, par la vicomtesse de Noailles, 1855, ouvrage tiré à un petit nombre d’exemplaires, p. 19 et 33.)

2169. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Jasmin. (Troisième volume de ses Poésies.) (1851.) » pp. 309-329

Il faut en venir à le citer, à le traduire de manière à faire apprécier de tous quelques-unes de ses qualités propres. […] Mais, de souvenir en souvenir, Jasmin s’aperçoit, dans son propre clos, de plus d’une haie épaisse qu’enfant il a trouée, de plus d’un pommier qu’il a ébranché, de plus d’une vieille treille où on lui a fait la courte-échelle pour atteindre le fin muscat, et il se promet, à son tour, de ne pas être plus dur aux autres qu’on ne l’a été pour lui : Que voulez-vous ?

2170. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Notice historique sur M. Raynouard, par M. Walckenaer. » pp. 1-22

« Je suis un philosophe, disait-il (et quand je cite ses paroles, figurez-vous-les toujours relevées et comme redoublées par l’accent) ; un philosophe n’a besoin que de la besace et du manteau ; mais encore faut-il que la besace soit pleine et que le manteau soit propre. » Dès qu’il eut acquis ce nécessaire, il revint à Paris sous le Consulat, et, cette fois, bien résolu à ne plus lâcher pied. […] Le propre de la langue rustique, vulgaire, populaire, est de se pratiquer sans s’écrire.

2171. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — II. (Suite et fin.) » pp. 341-361

Dans cette formation du parti libéral où il entrait alors tant d’éléments divers, Courier reste ce qu’il était de tout temps, le plus antibonapartiste possible, ennemi des grands gouvernants, se faisant l’avocat du paysan, l’homme de la commune, prêchant l’économie, parlant contre la manie des places, voulant de gouvernement le moins possible, faisant des sorties contre la Cour et les gens de cour toutes les fois qu’il y a lieu, méconnaissant ce qu’il y a eu de grand, d’utile, de nécessaire dans l’établissement des Louis XIV, des Richelieu, des grands directeurs de nations, disant en propres termes, pour son dernier mot et son idéal : « La nation enfin ferait marcher le gouvernement comme un cocher qu’on paie, et qui doit nous mener, non où il veut, ni comme il veut, mais où nous prétendons aller, et par le chemin qui nous convient » ; disant encore, et cette fois plus sensément : Il y a chez nous une classe moins élevée (que les courtisans), quoique mieux élevée, qui ne meurt pour personne, et qui, sans dévouement, fait tout ce qui se fait ; bâtit, cultive, fabrique autant qu’il est permis ; lit, médite, calcule, invente, perfectionne les arts, sait tout ce qu’on sait à présent, et sait aussi se battre, si se battre est une science. […] Le meurtre de Courier exécuté par son propre garde Frémont, assisté, encouragé et peut-être contraint par deux ou trois autres domestiques ou charretiers de Courier, par deux surtout, lesquels avaient plus d’intérêt à sa mort que le garde, avait eu un témoin innocent et resté inconnu.

2172. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le cardinal de Richelieu. Ses Lettres, instructions et papiers d’État. Publiés dans la Collection des documents historiques, par M. Avenel. — Premier volume, 1853. — I. » pp. 224-245

Richelieu d’ordinaire écrivait peu de sa propre main, il dictait ; mais, dans cette sorte de transmission, il ne laissait jamais le secrétaire aller à sa guise, il était présent toujours. […] J’aime à opposer ces paroles de Richelieu, dignes d’une grande âme, à ce qu’il offrira plus tard de cruel et d’impitoyable dans sa propre conduite, et par où il a excédé, à certains jours, les nécessités mêmes de la plus austère politique.

2173. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — I. » pp. 287-307

Quand la réputation des auteurs est établie, il est aisé d’en parler convenablement, on n’a qu’à se régler sur l’opinion commune ; mais à leurs débuts, au moment où ils s’essayent et où ils s’ignorent en partie eux-mêmes, et à mesure qu’ils se développent, les juger avec tact, avec précision, ne pas s’exagérer leur portée, prédire leur essor ou deviner leurs limites, leur faire les objections sensées à travers la vogue, c’est là le propre du critique né pour l’être. […] Il a un tour de plaisanterie qui lui est propre et qui ne sied qu’à lui… Il aime la solitude, et il est aisé de voir que le goût pour la société ne lui est point naturel : c’est un goût acquis par l’éducation et par l’habitude… Ce je ne sais quoi de solitaire et de renfermé, joint à beaucoup de paresse, rend quelquefois en public son opinion équivoque ; il ne prononce jamais contre son sentiment, mais il le laisse douteux.

2174. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Arnault, de l’Institut. » pp. 496-517

Arnault est assez piquant lorsqu’il parle de Monsieur, et il nous le définit bien dans sa nature et sa portée d’esprit littéraire ; pourtant il abuse un peu du droit que lui donne la proscription dont l’honora plus tard son ancien maître, lorsqu’il dit d’un ton cavalier : « Monsieur, à tout prendre, était un garçon d’esprit, mais il le prouvait moins par des mots qui lui fussent propres que par l’emploi qu’il faisait des mots d’autrui. » Est-ce de ma part une excessive délicatesse ? […] Arnault ne ressemblent pas à d’autres ; il les conçoit à sa manière et en invente les sujets ; il ne songe point à imiter La Fontaine, il songe à se satisfaire et à rendre d’une manière vive un résultat de son observation propre ; il obéit à son tour d’esprit, à son jet d’expression, et on ne peut s’étonner si, comme lui-même l’avoue, « l’apologue a pris peut-être sous sa plume un caractère épigrammatique ».

2175. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Émile Zola » pp. 70-104

En cette façon d’écrire aisée, maniable et large, propre à tout dire et appliquée par M.  […] De lugubres incidents, propres à faire douter de la justice sociale, la torture de Lalie par son père, l’arrestation de Martineau mourant, sont racontés avec complaisance.

2176. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Innocent III et ses contemporains »

Le traducteur Saint-Chéron, ancien rédacteur de l’Univers religieux, n’exprime pas d’idée qui lui soit propre. […] Nous n’avons pas non plus un tel fétichisme pour nos propres opinions qu’un homme, par cela seul qu’il les partage, nous paraisse, comme à Saint-Chéron, un historien sans égal.

2177. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [Rapport sur les primes à donner aux ouvrages dramatiques.] » pp. 518-522

La littérature dramatique a été prise au dépourvu ; on lui demande presque le contraire de ce qu’on était accoutumé à désirer d’elle depuis longtemps ; on lui demande des émotions vives, profondes et passionnées, mais pures s’il est possible, et, dans tous les cas, salutaires et fortifiantes ; on lui demande, au milieu de toutes les libertés d’inspiration auxquelles le talent a droit et qui lui sont reconnues, de songer à sa propre influence sur les mœurs publiques et sur les âmes, de se souvenir un peu, en un mot, et sans devenir pour cela trop sévère, de tout ce qui est à guérir parmi nous et à réparer.

2178. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXIX » pp. 117-125

On se souvient encore et l’on raconte que, dans son zèle pour la christianisation au moins apparente et officielle de l’Université, Cousin avait, il y a quelques années, rédigé, — oui, rédigé de sa propre et belle plume un catéchisme : cet édifiant catéchisme était achevé, imprimé déjà et allait se lancer dans tous les rayons de la sphère universitaire, quand on s’est aperçu tout d’un coup avec effroi qu’on n’y avait oublié que d’y parler d’une chose, d’une seule petite chose assez essentielle chez les catholiques : quoi donc ?

2179. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « [Addenda] »

Mais on s’explique maintenant très bien qu’il y ait de si jolies choses, et propres à être citées, dans cette première partie de la Correspondance ; les gentillesses sur la Du Barry ; le mot attribué à Marie-Antoinette, « Française jusqu’au bout des ongles », qui répond si bien à l’accusation d’être Autrichienne : les croquis du comte de Provence, du comte d’Artois, qui ne sont que les portraits connus, un peu rajeunis, de ces personnages ; tout cela a été assez artistement contrefait pour séduire à première vue.

2180. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « APPENDICE. — M. DE VIGNY, page 67. » pp. -542

Cinq-Mars manqua à sa mission ; favori officiel, il voulut bientôt l’être pour son propre compte.

2181. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la Révolution française. Ve et VIe volumes. »

Sans doute c’eût été le propre d’une grande perspicacité de comprendre dès lors que l’affreux système dans lequel on entrait à l’aveugle aboutissait au salut de la France, et de voir dans cette Montagne, plus sanglante que la Roche tarpéienne ou les gémonies, le Capitole de la patrie en danger.

2182. (1874) Premiers lundis. Tome I « Madame de Maintenon et la Princesse des Ursins — II »

Il est curieux de la voir, dans cette correspondance, protester à tout propos contre l’idée qu’on pouvait avoir de son crédit : « Je ne suis qu’une particulière assez peu importante ; je ne sais pas les affaires, on ne veut point que je m’en mêle, et je ne veux point m’en mêler. » Tantôt elle se compare avec pruderie à une ingénue de quinze ans : « Je suis un peu comme Agnès, je crois ce qu’on me dit, et ne creuse pas davantage. » Tantôt elle se vieillit avec une complaisance qui fait sourire : « Si vous me voyiez, madame, vous conviendriez, que je fais bien de me cacher : je ne vois presque plus ; j’entends encore plus mal ; on ne m’entend plus, parce que ma prononciation s’en est allée avec mes dents, la mémoire commence à s’égarer ; je ne me souviens plus des noms propres, je confonds tous les temps, et nos malheurs joints à mon âge me font pleurer comme toutes les vieilles que vous avez vues. » Sans croire tout à fait à ce renoncement absolu au monde, on est pourtant forcé de reconnaître qu’il y a dans ce langage de madame de Maintenon plus de manie que d’hypocrisie, et qu’à force de se faire, en paroles, insignifiante et inactive, elle l’était sur la fin réellement devenue.

2183. (1874) Premiers lundis. Tome I « Deux révolutions — I. De la France en 1789 et de la France en 1830 »

Ce qui nous fâche et nous étonne, c’est que des jeunes hommes qui semblaient pleins d’âme et d’avenir, d’une intelligence étendue et exercée, plus propre sans doute à spéculer qu’à agir, s’étant imaginé de tout temps qu’ils auraient, dans une révolution, à jouer le rôle de Girondins, se figurent probablement que l’heure est venue, et, par une étrange illusion, s’arrêtent, non pas devant des échafauds à dresser (nous n’en sommes pas là encore, et on abolira peut-être la peine de mort en attendant), mais devant les conséquences à tirer de leurs idées politiques.

2184. (1874) Premiers lundis. Tome I « Vie, poésies et pensées de Joseph Delorme. Deuxième édition. »

Quant à ce pauvre Joseph, il ne verra rien de tout cela ; il n’était pas de force d’ailleurs à traverser ces diverses crises ; il s’était trop amolli dans ses propres larmes.

2185. (1874) Premiers lundis. Tome II « E. Lerminier. Lettres philosophiques adressées à un Berlinois »

Dans les six dernières années de la Restauration, après l’épuisement des générations aux prises dès 1815, après la mauvaise réussite des tentatives violentes de la jeunesse et le triomphe indéfini d’un pouvoir hypocrite et corrupteur, il s’était formé, à la fois par désespoir du présent et par besoin d’espérance lointaine à l’horizon, une école de philosophie politique qui avait entrepris la réforme et l’émancipation du pays au moyen des idées ; c’est-à-dire en répandant toutes sortes de connaissances, d’études et de théories propres à féconder l’avenir.

2186. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIV. De la plaisanterie anglaise » pp. 296-306

Dans les comédies anglaises, on trouve rarement des caractères vraiment anglais : la dignité d’un peuple libre s’oppose peut-être chez les Anglais, comme chez les Romains, à ce qu’ils laissent représenter leurs propres mœurs sur le théâtre.

2187. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Préface »

Elle a tout dit sur son propre compte, sauf ce qu’elle supposait banal et familier aux contemporains, sauf ce qui lui semblait technique, ennuyeux et mesquin, sauf ce qui concernait la province, la bourgeoisie, le paysan, l’ouvrier, l’administration et le ménage.

2188. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Introduction. Origines de la littérature française — 1. Éléments et développement de la langue. »

Les dialectes frères du français fuient peu à peu délaissés, et, ne servant plus à la littérature, descendirent au rang de patois, tellement avilis et dégradés, que souvent on les a pris pour du français corrompu : leur déchéance fut très insuffisamment compensée par la cession qu’ils firent au français d’un certain nombre de formes qui leur étaient propres.

2189. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « L’exposition Bodinier »

  Ainsi les comédiens n’ont point, si je puis ainsi dire, d’immortalité propre, quand d’aventure ils en ont une.

2190. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mallarmé, Stéphane (1842-1898) »

Maurice Le Blond Quant à la forme poétique dont il usa pour parfaire de beaux poèmes comme Apparition, les Fleurs ou ce fragment d’Hérodiade que jamais il n’eut l’audace et la foi d’achever, ce serait une grossière erreur de croire qu’elle lui appartient en propre.

2191. (1890) L’avenir de la science « VII »

Soyons donc vrais, au nom de Dieu, vrais comme Thalès quand, de sa propre initiative et par besoin intime, il se mit à spéculer sur la nature ; vrais comme Socrate, vrais comme Jésus, vrais comme saint Paul, vrais comme tous ces grands hommes que l’idéal a possédés et entraînés après lui !

2192. (1890) L’avenir de la science « XX »

La Grèce tirait des poèmes, des temples, des statues de son intime spontanéité, pour épuiser sa propre fécondité et satisfaire à un besoin de la nature humaine.

2193. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XII. Ambassade de Jean prisonnier vers Jésus  Mort de Jean  Rapports de son école avec celle de Jésus. »

» Jésus, qui dès lors n’hésitait plus guère sur son propre rôle de messie, leur énuméra les œuvres qui devaient caractériser la venue du royaume de Dieu, la guérison des malades, la bonne nouvelle du salut prochain annoncée aux pauvres.

2194. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 39-51

C’est pourquoi nous avertirons M. de la Harpe de s’attacher plus qu’il n’a fait à renforcer & égayer son style, à enrichir & à déniaiser son érudition, à aiguiser & à dégauchir son discernement ; d’être plus adroit, lorsqu’il voudra louer ses propres Ouvrages ; de ne pas se trahir, en affectant pour les autres le mépris qu’on a tort, sans doute, d’avoir pour lui ; enfin, de ne pas confondre, pour son repos, le langage d’une juste censure, avec celui de la jalousie.

2195. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 372-383

C’est à la Religion, c’est à votre propre cœur à vous instruire sur tout ce qui tient aux vérités morales.

2196. (1898) Inutilité de la calomnie (La Plume) pp. 625-627

Afin de suppléer à un génie propre, ils empruntent celui de quelque écrivain et la parodie qu’ils en font demeure la plus fâcheuse du monde.

2197. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1851 » pp. 1-9

, Gerdès, hanté par l’idée qu’on pouvait interpréter un chapitre politique du livre comme une allusion à l’événement du jour, tout plein, au fond, de méfiance pour ce titre bizarre, incompréhensible, cabalistique, et qui lui semblait cacher un rappel dissimulé du 18 Brumaire, Gerdès, qui manquait d’héroïsme, avait, de son propre mouvement, jeté le paquet d’affiches au feu.

2198. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Seconde Partie. De l’Éloquence. — Éloquence du barreau. » pp. 193-204

Point d’entassement, point de figures, point de pathos, point d’émotion empruntée, disoit-il ; ou, si l’on y a recours, c’est se rendre indigne de sa profession, c’est gâter sa propre cause & supposer les juges malhonnêtes gens.

2199. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre VI. Conclusions » pp. 232-240

Et ainsi, attentifs à ne rien mutiler de ce qui vit autour de nous et qui peut servir à notre vie propre, nous pourrons atteindre à une compréhension plus large et plus personnelle des choses, comme à un art plus plastique, plus directement modelé sur la nature vivante ; et après tant de courses vagabondes hors des frontières, tant d’excursions dans tous les domaines défendus, y compris ceux de la chimère et de la folie, nous pourrons enfin nous rasseoir chez nous et inaugurer un mouvement qui sera vraiment un retour à la tradition française comme à la réalité humaine. » C’est sur ces mots que nous voudrions finir.

2200. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « A Monsieur Naigeon » pp. 9-14

Peut-être eussiez-vous désiré, pour me servir ici de vos propres termes, « que, me livrant à toute la chaleur de mon âme, et à toute la fougue de mon imagination, je vous montrasse Sénèque, comme autrefois je vous avais montré Richardson » : mais, pour cela, au lieu de plusieurs mois, il fallait ne m’accorder qu’un jour.

2201. (1761) Salon de 1761 « Récapitulation » pp. 165-170

Sur la droite, un garde-manger bien propre avec ce qu’on a coutume d’y renfermer, faisant partie du fond.

2202. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 24, objection contre la solidité des jugemens du public, et réponse à cette objection » pp. 354-365

La philosophie qui enseigne à juger des choses par les principes qui leur sont propres, enseigne en même-temps que pour connoître le mérite et l’excellence d’un poëme, il faut examiner s’il plaît, et à quel point il plaît et il attache ceux qui le lisent.

2203. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XV »

Raymond était fort content de sa providence, car il en avait une à lui, à laquelle il croyait en bon fils et sur laquelle il comptait pour arranger toutes choses au détriment des autres plutôt qu’au sien propre », etc.‌

2204. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Alaux. La Religion progressive » pp. 391-400

ce n’est point avec un esprit naturellement et exclusivement propre à l’analysent des doctrines philosophiques sans nouveauté et auxquelles on a deux cents fois répondu, qu’on peut faire sortir de sa tête une synthèse de la force d’une religion, progressive ou non progressive.

2205. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Léon Bloy »

Mais il a pensé sur ce sujet, en son propre et privé nom, avec une profondeur et une énergie nouvelles.

2206. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — III »

On veut y voir, pour l’ordinaire, un drame de la conscience, une de ces tragédies intérieures qui mirent, certain soir, le pauvre Jouffroy dans un état si propre à la composition littéraire.

2207. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre III. Trois espèces de jurisprudences, d’autorités, de raisons ; corollaires relatifs à la politique et au droit des Romains » pp. 299-308

La jurisprudence divine et l’héroïque propres aux âges de barbarie, s’attachent au certain ; la jurisprudence humaine qui caractérise les âges civilisés, ne se règle que sur le vrai.

2208. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre II. Comment les nations parcourent de nouveau la carrière qu’elles ont fournie, conformément à la nature éternelle des fiefs. Que l’ancien droit politique des romains se renouvela dans le droit féodal. (Retour de l’âge héroïque.) » pp. 362-370

. — Les cens seigneuriaux n’étaient pas sans analogie avec le cens institué par Servius Tullius, puisqu’en vertu de cette dernière institution les plébéiens furent longtemps assujettis à servir les nobles dans la guerre à leurs propres dépens, comme dans les temps modernes les vassaux appelés angarii et perangarii. — Les précaires du moyen âge étaient encore renouvelés de l’antiquité.

2209. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE LONGUEVILLE » pp. 322-357

La Rochefoucauld, qui eut plus que personne qualité pour la juger, nous a dit déjà, et je répète ici ce passage trop essentiel au portrait de Mme de Longueville pour ne pas être rappelé : « Cette princesse avoit tous les avantages de l’esprit et de la beauté en si haut point et avec tant d’agrément, qu’il sembloit que la nature avoit pris plaisir de former en sa personne un ouvrage parfait et achevé ; mais ces belles qualités étoient moins brillantes, à cause d’une tache qui ne s’est jamais vue en une personne de ce mérite, qui est que, bien loin de donner la loi à ceux qui avoient une particulière adoration pour elle, elle se transformoit si fort dans leurs sentiments, qu’elle ne reconnoissoit plus les siens propres. » La Rochefoucauld ne put d’abord se plaindre de ce défaut, puisqu’il lui dut de la conduire. […] Son caractère manquait donc tout à fait de consistance, de volonté propre. […] J’y surprends surtout d’incroyables témoignages de cet esprit, avant tout délié et fin, qui n’a plus à creuser que son propre labyrinthe172.

2210. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXIXe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe (2e partie) » pp. 161-232

Ils se disputaient à l’envi le patronage des hommes éminents propres à illustrer leur nom et leur règne dans l’avenir. […] Le prince lui avait préparé une charmante maison, retraite silencieuse et poétique propre à l’entretien du philosophe avec ses idées et du poète avec ses rêves. […] Son caractère était éminemment propre à rallier l’Allemagne intellectuelle autour de lui.

2211. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIVe entretien. Madame de Staël. Suite »

Si chacun de nous veut examiner attentivement la trame de sa propre vie, il y verra deux tissus parfaitement distincts : l’un, qui semble en entier soumis aux causes et aux effets surnaturels ; l’autre, dont la tendance tout à fait mystérieuse, ne se comprend qu’avec le temps. […] L’amélioration de notre propre cour nous révèle l’intention bienfaisante qui nous a soumis à la peine ; car les prospérités de la terre auraient même quelque chose de redoutable, si elles tombaient sur nous après que nous serions coupables de grandes fautes : on se croirait alors abandonné par la main de celui qui nous livrait au bonheur ici-bas comme à notre seul avenir. […] Elle a fait home aux hommes de leur servitude ; elle a protesté contre la tyrannie ; elle a entretenu ou rallumé dans les âmes le feu presque éteint de la liberté monarchique, représentative ou républicaine ; elle a détesté à haute voix, quand tout se taisait ou applaudissait, le joug soldatesque, le pire de tous, parce qu’il est de fer, et qu’il ne se brise pas même, comme le joug populaire, par ses propres excès ; elle a donné du moins de la dignité au gémissement de l’Europe ; elle a été vaincue, mais elle n’a pas consenti à sa défaite, elle n’a pas loué l’oppression, elle n’a pas chanté l’esclavage, elle n’a pas vendu ou donné un seul mot de ses lèvres, une seule ligne de sa main à celui qui possédait l’univers pour doter ses adulateurs ou pour exiler ses incrédules ; elle a édifié et consolé l’esprit humain ; elle a relevé le diapason trop bas des âmes ; elle a trouvé dans la sienne, elle a communiqué à ceux qui étaient dignes de la lire, un certain accent antique peu entendu jusqu’à elle, dans notre littérature monarchique et efféminée, accent qui ne se définit pas avec précision, mais qui se compose de la sourde indignation de Tacite, de l’angoisse des lettres de Cicéron, du murmure anonyme du Cirque quand Antoine présente la pourpre à César, du reproche de Brutus aux dieux quand il doute de leur providence après la défaite de la cause juste, du gémissement de Caton quand il se perce de son épée pour ne pas voir l’avilissement du genre humain !

2212. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre II. Attardés et égarés »

Par là, la vie mondaine, échappant au formalisme frivole, eut un caractère profondément intellectuel ; les salons furent comme des marchés d’idées, où les échanges ne languissaient pas, et la fonction propre de l’homme du monde fut la conversation. […] Les pointes sont proprement des jeux de mots, qui consistent à prendre un mot tour à tour ou simultanément dans deux acceptions différentes, comme le propre et le figuré, etc. […] Lapointe consiste à prendre feux à la fois au figuré comme régime de brûlé, et au propre comme antécédent du relatif.

2213. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Proudhon » pp. 29-79

C’est, en propre terme, un athée. […] Pour lui, cet homme, qui voit la Révolution au kaléidoscope, lequel lui renvoie la Révolte, Satan et sa propre individualité ; pour lui, cet homme, trombe de toutes les folies personnifiées, la question — et la question philosophique ! […] Proudhon peut être son propre scholiaste à lui-même.

2214. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Victor Hugo. Les Contemplations. — La Légende des siècles. »

L’Archaïsme, qui était un système pauvre et faux, et qui devint en Ronsard une véritable monstruosité de manière, le perdit misérablement, et la même chose, le système, le parti pris, la pénurie de cerveau qui fait que le système ne se modifie pas, qu’il est identiquement le même en 1856 qu’en 1830, l’adoration de sa manière, parce que c’est l’adoration de sa propre personnalité, perdront également M.  […]         Parle : es-tu ton propre géant ? […] Victor Hugo n’a qu’une langue, et il est sa tour de Babel à lui seul, périssant et croulé dans sa propre confusion.

2215. (1891) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Première série

La liberté devenait, selon les caractères, la forme la plus pure de l’orgueil ou la plus basse de la vanité, une manière de stoïcisme énergique et s’enivrant de sa propre énergie, confiance en soi pour le bien qui est un des plus beaux et nobles mobiles que l’homme puisse avoir, — ou une conviction niaise que chacun de nous n’a besoin que de lui pour se conduire et devenir très grand. […] C’est avec cette intempérance de dialectique et cette intrépide confiance aux principes qu’on a une fois cru découvrir, qu’on arrive très vite aux égarements du « sens propre » et au respect superstitieux de son « opinion particulière ».  […] Comme tout le monde, Bonald se figure toute l’humanité sur son propre modèle, et comme il a fait le ferme propos de penser toujours la même chose, il est sûr que le genre humain a eu et aura perpétuellement la même pensée. […] Jamais enfance ne fut moins solitaire, moins instinctive et intérieure, moins propre à former un artiste, et, en effet, elle ne le fut point.  […] Magistrature indépendante, clergé vivant d’une vie propre, grande noblesse formant corps, royauté formant tradition, ce n’était pas une constitution, il est vrai ; mais c’étaient des éléments constitutionnels très précieux, qui, purgés de leurs abus, rectifiés et ramenés prudemment à leurs vraies fonctions nationales, pouvaient faire un organisme pondéré, souple et infiniment vigoureux.

2216. (1864) Histoire anecdotique de l’ancien théâtre en France. Tome I pp. 3-343

Ainsi, il n’est pas rare de trouver dans ses chœurs, des stances dignes de l’ode ; dans les scènes familières, des traits propres à l’épître. […] Il montre à la France ses malheurs dans ceux de Rome succombant sous les blessures que lui font ses propres enfants. […] Il n’y avait pas de jour qu’il ne se bâtit plus souvent pour les autres que pour son propre compte. […] Ils sont propres à donner une idée du faire tragique de Benserade. […] Son style est ferme, élevé, nourri, pompeux même, propre, en un mot, à exprimer les passions violentes.

2217. (1895) Hommes et livres

Le mérite propre de Sainte-Beuve est ici hors de cause. […] Or c’est à quoi Montchrétien, qui du reste, n’est pas médiocre, est éminemment propre, et je veux profiter de l’occasion qu’il m’offre de remettre en lumière une période trop souvent négligée de notre histoire littéraire. […] Elle trouva enfin sa forme propre, après de longues indécisions et des tâtonnements successifs, par l’établissement des règles. […] Il délaye ; il se répète ; il démarque les inventions des autres et les siennes propres. […] Il ne manque au tableau que le soldat et le prêtre, du moins dans leur caractère propre et essentiel.

2218. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

Ces récits nous montrent des peintures fidèles, exécutées vivement, des caractères au naturel, un pathétique vrai où la passion parle toujours son propre langage. […] J’ai lu autrefois avec plaisir les propres Nouvelles de cet auteur. […] Ils ne s’assemblaient point pour délibérer et voter des lois, mais chacun, sans se soucier de son voisin, gouvernait sa propre famille. […] Elles la commentent avec tact et à propos, et savent garder leur propre caractère artistique sans se faire indiscrètes. […] Ils croyaient tirer ainsi chacun du côté de son propre tempérament et ils n’étaient peut-être pas si éloignés de s’entendre.

2219. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le cardinal de Bernis. (Fin.) » pp. 44-66

Aussi, à la mort du pontife, comme les passions irritées cherchaient à se venger sur ses restes, et que le catafalque placé dans l’église de Saint-Pierre, pendant la neuvaine des obsèques, n’était point en sûreté, Bernis, fidèle à l’amitié et au respect envers l’illustre mort, entretint à ses propres frais une garde qui, jour et nuit, veilla autour de ce catafalque pour en préserver les inscriptions et empêcher tout scandale. […] La conduite de Bernis dans quelques affaires délicates telles que le procès du cardinal de Rohan, où il fallut se prononcer entre sa propre cour et celle de Rome, quelques négociations de confiance et de famille dont il fut chargé, telles qu’une tentative de rapprochement entre le roi d’Espagne Charles III et son fils Ferdinand, roi des Deux-Siciles, et le voyage qu’il fut autorisé de faire à Naples dans cette vue, ne purent qu’accroître son autorité paisible et l’idée qu’on s’était formée de sa sagesse9.

2220. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — II. (Fin.) » pp. 109-130

Par dédain pour les qualités tempérées qui suffisent aux conditions d’une société vieillie, il disait : « Mêlez un peu d’orgueil qui empêche d’oublier ce qu’on se doit, de sensibilité qui empêche d’oublier ce qu’on doit aux autres, et vous ferez de la vertu dans les temps modernes. » Mais pour les anciens, tout en sachant en quoi nous les surpassons, il les montre bien supérieurs en énergie, en déploiement de facultés de tout genre : forcés par la forme de leur gouvernement de s’occuper de la chose publique d’en remplir presque indifféremment tous les emplois de paix et de guerre, de s’y rendre propres et de s’y tenir prêts à tout instant, de parler devant des multitudes vives, spirituelles, mobiles et passionnées : Quelle devait être, dit-il, l’explosion des talents animés, stimulés par d’aussi puissants motifs ! […] On est tenté de croire que M. de Meilhan a songé à lui dans ce portrait d’Aladin qui nous représente assez bien son propre idéal et ce qu’il aurait voulu être dans la jeunesse : Aladin était éloquent, passionné pour la liberté ; il était épris de la gloire et sentait qu’on ne pouvait s’élever dans une cour qu’en rampant, et que l’assiduité tenait lieu de mérite.

2221. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — II » pp. 454-475

Ce qui est assez particulier, c’est que ce comte de Saint-Alban, dessiné de la sorte, nous est donné de son propre aveu comme ayant été à l’origine, et presque dès le collège, un libéral sans préjugés et un ambitieux de la belle gloire, de celle qui s’acquérait dans les luttes de la parole publique et de l’antique forum ; ce serait un grand citoyen manqué, un Chatam venu trop tard ou trop tôt, désœuvré dans le pays de Mme de Pompadour, et qui, voyant le noble but impossible, en aurait dédaigné de moindres, et se serait jeté, de dégoui et de pitié, dans les délices : Les plaisirs sont la seule ressource de l’homme ardent et passionné dont l’ambition est contrariée ! […] Il lui fait l’effet d’être plus jeune qu’il ne l’était, et M. de Meilhan passa longtemps dans le monde pour être plus jeune que son âge : elle le plaint et elle compatit à le voir ainsi désabusé comme un vieillard, et il semble qu’en mettant son propre désenchantement en commun avec le sien, elle ait quelque désir de le consoler : « Vous êtes destiné, monsieur, lui disait-elle au début, à passer une vie douloureuse : vous voyez le jeu des machines, et alors plus de bonheur.

2222. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire du règne de Henri IV, par M. Poirson » pp. 210-230

Mais il était souvent mal servi par les siens propres ; il ne s’en aperçut que trop au siège de Paris, au siège de Rouen. […] On croirait lire une idylle ; il en faut rabattre sans doute ce qui est de l’exagération propre à chacun quand on se met à revoir flotter à l’horizon du passé cet âge d’or des jeunes saisons : il en restera toujours un sentiment bien vrai et d’une couleur non feinte.

2223. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La femme au XVIIIe siècle, par MM. Edmond et Jules de Goncourt. » pp. 2-30

Le marquis d’Argenson a noté le fait dans ses Mémoires, avec la crudité qui lui est propre : « 20 novembre 1750. — La nouvelle duchesse de Luxembourg a résolu de tenir une bonne maison cet hiver à Paris, et pour cela il faut des beaux esprits. […] Grâce à elle et malgré les souvenirs de licencieuse jeunesse qui se rattachaient à son nom, qui se chantonnaient encore à voix basse à la cantonade, qui ne nuisaient en rien cependant à sa considération dernière, et qui peut-être, auprès de générations très-gâtées, y aidaient plutôt (car on la savait d’une expérience suprême), grâce donc à la maréchale de Luxembourg, l’ancienne société, l’ancien salon français resta jusqu’à la fin marqué d’un caractère propre et unique pour l’excellence du ton.

2224. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Œuvres de Louise Labé, la Belle Cordière. »

tu es trop mère pour parler convenablement dans ta propre cause. » — Vénus choisit Apollon, « encore que l’on ait semé par le monde, dit-elle, que la maison d’Apollon et la mienne ne s’accordaient guère bien. » Diane, en effet, et les Muses sont les vierges par excellence. […] Et avec tout cela, l’habit propre comme la feuille autour du fruit. » Est-elle assez galante et poétique, cette manière de dire ?

2225. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier. »

Je ne puis cependant m’empêcher, dans ce personnage de d’Albert qui est son René à lui, de noter ce touchant passage de la confession à son ami d’enfance Silvio, lorsque, déplorant la forme de corruption précoce et profondément tranquille, qui lui est survenue et qui lui est propre, il lui rappelle avec une sorte de vivacité attendrie le court éclair de leur pure et commune adolescence : « Te souviens-tu de cette petite île plantée de peupliers, à cet endroit où la rivière forme un bras ? […] Il a en lui l’orgueil et les ambitions d’un Dieu : tantôt il voudrait faire rentrer dans sa propre nature et absorber en soi, sentir soi tout ce qu’il désire, et il se demande par moments si le monde n’est pas une ombre et si rien de ce qui n’est, pas lui existe ; tantôt il n’aspire, au contraire, qu’à sortir et à s’échapper de lui-même, à traverser les autres existences, à les revêtir et à les user par une suite d’incessantes métamorphoses.

2226. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Joséphine de Saxe dauphine de France. (Suite et fin.) »

Cette princesse a réussi ici on ne peut mieux ; elle est adorée de tout le monde, et la reine l’aime comme son propre enfant ; le roi en est enchanté, et M. le dauphin l’aime avec passion. […] Le roi cependant aimait sa belle-fille ; il l’aimait « autant et plus peut-être que ses propres enfants » ; il l’appelait familièrement de son petit nom de Pépa ; à ses premières couches, il se montra le père le plus affectueux et le plus tendre : « Le roi lui a constamment tenu la main pendant le travail, et l’on peut dire qu’elle est accouchée entre ses bras ; aussi en suait-il à grosses gouttes. » Mais que de difficultés et d’intrigues dans cette Cour partagée et divisée : la reine, Mesdames, Mme de Pompadour, et alentour, et au-dessous, des tourbillons d’ambitions sans nombre, tous se jalousant, se haïssant, et cherchant à s’emparer de cette puissance nouvelle qui entrait en scène !

2227. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le Général Franceschi-Delonne : Souvenirs militaires, par le général baron de Saint-Joseph. »

Lord Wellington, retrouvant peu de temps après Franceschi prisonnier, lui rendait justice en ces propres termes : « Monsieur le général, dans cette retraite, j’ai été plus content de vous que de mon général de cavalerie ; vous n’aviez que 600 chevaux, lui en avait 1,500, il avait du canon, et je le soutenais avec une division d’infanterie ; mais vos manœuvres ont été si habiles, vos mouvements si prompts, vos charges exécutées avec tant d’assurance, que moi-même je vous ai toujours soupçonné d’avoir de l’infanterie derrière vous et de me tendre un piège, ce qui m’a fait constamment agir avec mes masses. » Ici tout s’arrête. […] Le propre du général Franceschi était d’inspirer des affections vraies et durables.

2228. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. » p. 232

Bien des passages, et qui ne seraient pas les moins piquants pour la curiosité, dans les lettres de Mme Valmore à elle, ne sont pas à donner de quelque temps, à cause des noms propres et de l’entière confidence sur les personnes ; mais on en détacherait, dans les parties de sentiment, des notes ravissantes dont je mettrai quelques-unes ici, un peu pêle-mêle, et sans trop avoir égard à l’ordre des dates. […] … Espérons… » Sur quoi Mme Valmore, se mettant à son unisson, s’efforçait de relever son courage, d’évertuer sa vieillesse, de l’attendrir par l’aveu des misères communes, de l’égayer par des images simples, qui rappellent les beaux jours et les joies de l’enfance : « (9 novembre 1854)… La dame qui m’aide souvent à trouver l’argent d’emprunt pour passer mon mois, à la condition de le rendre à la fin de ce mois même, n’a pu venir encore à mon secours, à travers la pluie et toutes les difficultés de sa propre vie.

2229. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [II] »

Convaincu par l’étude du système de guerre de l’Empereur et de son caractère que la victoire lui faisait quelquefois outrepasser les bornes de la prudence, je m’avisai de croire qu’une dissertation fondée sur ses propres principes le dissuaderait mieux qu’une autre, et je me décidai à rédiger un mémoire pour lui démontrer que le rétablissement de la Pologne, sans le concours d’une des trois puissances qui l’avaient partagée, était un rêve. […] Je ne dis rien en mon propre et privé nom ; je borne mon soin à compiler de mon mieux.

2230. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [I] »

Pour complément de la collection, un volume à part contiendra : une Étude générale sur la Pléiade française, indiquant « son origine, son but, ses espérances et la part légitime qui lui appartient dans la constitution de notre langue et dans le développement de notre littérature » ; de plus un Glossaire, renfermant « l’explication de tous les termes qui ne figurent pas dans les dictionnaires actuels ou qui ne s’y trouvent que dans des acceptions différentes de celles dans lesquelles les poètes les ont employés ; les mots bizarres, forgés par la Pléiade, et qui n’ont eu qu’une existence éphémère ; enfin (et c’est là une partie fort délicate) les mots, nouveaux alors, qui ont été si vite et si généralement adoptés, et qui se sont si complètement incorporés à notre langue, qu’on serait tenté de croire qu’ils remontent à son origine. » Un Index des noms propres historiques et géographiques s’y joindra également. […] Il accorde que la négligence de nos ancêtres, ayant plus à cœur le bien faire que le bien dire, a laissé le français rude et sec, si pauvre et si nu, qu’il a présentement besoin « des ornements et, s’il faut ainsi parler, des plumes d’autrui. » Il ignore notre langue romane française du xiiie  siècle, de laquelle Rivarol, par un instinct remarquable, disait : « Il faut qu’une langue s’agite jusqu’à ce qu’elle se repose dans son propre génie, et ce principe explique un fait assez extraordinaire, c’est qu’aux xiiie et xive  siècles la langue française était plus près d’une certaine perfection qu’elle ne le fut au xvie . » Combien cette langue du xiiie siècle, et presque européenne alors, avait perdu de terrain au commencement du xvie , on le voit par les termes mêmes de la tentative de Du Bellay ; il importe, pour apprécier équitablement cette tentative, qui fut celle de tous les jeunes esprits doctes et généreux d’alors, de se mettre au point de vue de cette génération même qui entra sur la scène vers 1550 et de ne pas lui demander plus ni autre chose que ce qu’elle pouvait raisonnablement.

2231. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SCRIBE (Le Verre d’eau.) » pp. 118-145

Trop peu compétent pour mon compte en matière si éparse et si mobile, je ne ferai que courir, relevant quelques points à peine et en hâte d’arriver à son dernier succès, mais heureux au moins si j’ai montré que le propre de la critique est de n’être point prude, qu’elle aime et va querir partout les choses de l’esprit, qu’elle tient à honneur de s’en informer et d’en jouir. […] Ces petites pièces servent à merveille d’accompagnement, de chatouillement et de conseil même aux gens de nos jours dans leurs propres petites passions.

2232. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LES JOURNAUX CHEZ LES ROMAINS PAR M. JOSEPH-VICTOR LE CLERC. » pp. 442-469

Cet Esprit des Journaux était une espèce de journal (disons-le sans injure) voleur et compilateur, qui prenait leurs bons articles aux divers journaux français, qui en traduisait à son tour des principaux journaux anglais et allemands, et qui en donnait aussi quelques-uns de son cru, de sa rédaction propre. […] L’incomplet est le propre de l’homme ; il laisse tout monument voisin de la ruine.

2233. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « HISTOIRE DE LA ROYAUTÉ considérée DANS SES ORIGINES JUSQU’AU XIe SIÈCLE PAR M. LE COMTE A. DE SAINT-PRIEST. 1842. » pp. 1-30

Invoquer de tels noms, comme presque les seuls compétents, pour trancher ou fixer de près des questions si compliquées et si ardues, c’est assez déclarer ma propre insuffisance à moi-même, et aussi mon peu de prétention. […] L’auteur fait ainsi beau jeu aux contradicteurs, en leur offrant son point de vue sous l’aspect le plus propre à être un point de mire.

2234. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Le comte de Ségur »

Nous défendons à tous confiseurs, pâtissiers, Marchands de beurre ainsi qu’à tous les épiciers, De rien envelopper jamais dans cet ouvrage, Quoiqu’à vrai dire il soit tout propre à cet usage ; Ou bien paieront dix fois ce qu’alors il vaudra, Modique châtiment qui nul ne ruinera. […] La Politique de tous les Cabinets de l’Europe sous Louis XV et sous Louis XVI, contenant les écrits de Favier et la correspondance secrète du comte de Broglie, avait déjà paru en 93 ; mais M. de Ségur en donna une édition plus complète, accompagnée de notes et de toutes sortes d’additions qui en font un ouvrage nouveau où il mit ainsi son propre cachet.

2235. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Madame de Krüdner et ce qu’en aurait dit Saint-Évremond. Vie de madame de Krüdner, par M. Charles Eynard »

Jouir de son cœur, aimer et faire du bonheur des autres le sien propre, voilà sa vie. » Quoique M. de Krüdner fût un homme de mérite, sa jeune femme lui prêtait assurément dans ce portrait flatté ; toute leur relation peut se résumer en deux mots : elle était romanesque, et il était positif. […] Oui, mon amie, le Ciel a voulu que ces idées, que cette morale plus pure se répandissent en France, où ces idées sont moins connues… » En écrivant ainsi, elle avait déjà oublié ses propres ressorts humains, et elle rendait grâce de tout à Dieu.

2236. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIe Entretien. Chateaubriand »

Il regardait la gloire avec assurance, en homme qui en connaissait le prix et qui savait qu’on la regarderait bientôt sur son propre front. […] Il part, s’égare dans les bois, est pris par un parti de Muscogulges et de Siminoles ; il confesse hardiment, et avec la bravade propre aux Sauvages, son origine et sa nation : « Je m’appelle Chactas, fils d’Outalissi, fils de Miscou, qui ont enlevé plus de cent chevelures aux héros muscogulges. » Le chef ennemi Simaghan lui dit : « Chactas, fils d’Outalissi, fils de Miscou, réjouis-toi ; tu seras brûlé au grand village. » « Tout prisonnier que j’étais, je ne pouvais, durant les premiers jours, m’empêcher d’admirer mes ennemis.

2237. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre II. Clément Marot »

Rares étaient encore les ressources : Érasme, Budé furent eux-mêmes leurs propres maîtres : αὐτομαθἡς τε χαὶ ὀψιμαθήϛ, dit celui-ci, « j’ai appris tout seul, et tard ». […] Ce Béda était un enragé Picard, que Bayle appelle « le plus grand clabaudeur » de son temps : préchant, écrivant, dénonçant, calomniant, injuriant, déchaîné aujourd’hui contre Érasme, demain contre Le Fèvre d’Étaples, un autre jour contre Louis de Berquin, qu’il fit enfin brûler, il ne laissa point de répit aux libres esprits, jusqu’à ce que ses fureurs, atteignant la propre sœur du roi, le firent enfermer au Mont-Saint-Michel, où il mourut.

2238. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre IV. Le patriarche de Ferney »

Calas, à Toulouse, est roué comme assassin de son fils, qui s’est pendu : des juges catholiques ont cru sans preuve que ce calviniste avait mieux aimé tuer son propre enfant que de le laisser convertir. […] Il méprisait les hommes en masse, le peuple, et il a eu des phrases révoltantes sur ce bétail humain que les propriétaires, les rois, doivent engraisser dans leur propre intérêt : il n’estimait pas l’humanité capable de faire elle-même son bien ; il ne croyait qu’aux réformes venues d’en haut, et le despote bienfaisant était son idéal.

2239. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre V. Le roman »

Docilement, patiemment, il s’applique à la copier pour la rendre en son propre et singulier caractère. […] Or tant par l’une que par l’autre de ces deux œuvres, ils indiquaient trois caractères du naturalisme : d’abord l’usage du document, de la note prise au vol dans les rencontres de la vie ; traduisons : la substitution du reportage à la psychologie ; en second lieu, la superstition ou la prétention scientifique, la fréquentation de la clinique, l’étude de l’hystérie ici, là de la maladie de cœur, donc la substitution de la pathologie à la psychologie ; enfin, dans Germinie Lacerteux, le principe si contestable que les faits vulgaires et les milieux populaires sont le propre domaine de l’art réaliste, qu’il y a plus de réalité dans l’œuvre quand il y a plus de grossièreté dans la matière.

2240. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre III. La notion d’espace. »

Autre remarque : je viens de dire que c’est à notre propre corps que nous rapportons naturellement les objets extérieurs ; que nous transportons pour ainsi dire partout avec nous un système d’axes auxquels nous rapportons tous les points de l’espace, et que ce système d’axes est comme invariablement lié à notre corps. […] Les mouvements que nous imprimons à nos membres ont pour effet de faire varier les impressions produites sur nos sens par les objets extérieurs ; d’autres causes peuvent également les faire varier ; mais nous sommes amenés à distinguer les changements produits par nos propres mouvements et nous les discernons facilement pour deux raisons : 1° parce qu’ils sont volontaires ; 2° parce qu’ils sont accompagnés de sensations musculaires.

2241. (1900) Poètes d’aujourd’hui et poésie de demain (Mercure de France) pp. 321-350

Le critique ou, plus abstraitement, la Critique, a, en effet, des façons qui lui sont propres. […] Ne constituent-ils pas une sorte de réalité idéale où 1 humanité aime à se représenter à ses propres yeux ?

2242. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XI. La littérature et la vie mondaine » pp. 273-292

La crainte du mot propre, qui était le mot ordinaire, menait à des périphrases singulières. […] Il est jaloux de préserver de toute atteinte sa dignité personnelle ; il tient à l’estime des autres presque autant qu’à la sienne propre, et il est toujours prêt à tirer l’épée qu’il a au côté pour défendre sa considération menacée.

2243. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVII et dernier » pp. 442-475

Elle devait être féconde en jouissances nouvelles cette amitié vive qui, par une conversation animée, sans chicane et sans contrainte, multipliait sans cesse et variait à l’infini ses épanchements vers l’objet aimé, les lui offrait toujours avec intérêt et toujours à propos, provoquait les siens, lui communiquait une vie nouvelle, une existence inconnue, créait en lui un autre homme, avec des facultés jusque-là ignorées de lui-même, l’introduisait dans ce pays nouveau dont parle madame de Sévigné, où avec d’autres yeux il voyait d’autres choses et d’autres hommes, l’introduisait dans son propre cœur où il n’était jamais descendu, l’apprenait à s’étudier et à se connaître, lui donnait une conscience pénétrée du besoin de sa propre estime, une conscience qui lui rendit bon témoignage de lui et de son amie.

2244. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VII »

M. de Sainte-Agathe opère, non pas pour son propre compte, mais pour celui du baron Adhémar de Valtravers, cousin de Catherine, un bon jeune homme formé, discipliné, éduqué — il le croit du moins — ad majorem gloriam de sa compagnie. […] Tel que vous le voyez, il a combattu des peuplades, tué des tigres, étranglé des nègres de ses propres mains.

2245. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Chansons de Béranger. (Édition nouvelle.) » pp. 286-308

Moi (ajoutait-il en souriant et en faisant allusion à sa propre impatience de publicité), si j’avais fait une seule de ces octaves-là, je l’aurais déjà mise partout ; mais lui, il ne veut pas être remis en question : c’est plus prudent peut-être et plus sage. […] On frise à tout moment le mot vif, le mot propre, et on s’arrête à temps.

2246. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Mme de Caylus et de ce qu’on appelle Urbanité. » pp. 56-77

Le roi convertissait alors, bon gré, mal gré, les Huguenots de son royaume, et Mme de Maintenon, à son exemple, s’était mise en devoir de convertir sa propre famille. […] Un jour, Mme de Caylus lui envoie une petite quenouille ; car Mme de Maintenonaimait à filer de ses propres mains, toute demi-reine qu’elle était : c’était une montre de simplicité et de modestie ajoutée à toutes les autres.

2247. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La duchesse du Maine. » pp. 206-228

» La Bruyère présageait et voyait déjà quelque chose de ce changement profond qui a éclaté depuis, quand il disait : Pendant que les grands négligent de rien connaître, je ne dis pas seulement aux intérêts des princes et aux affaires publiques, mais à leurs propres affaires ; qu’ils ignorent l’économie et la science d’un père de famille, et qu’ils se louent eux-mêmes de cette ignorance…, des citoyens s’instruisent du dedans et du dehors d’un royaume, étudient le gouvernement, deviennent fins et politiques, savent le fort et le faible de tout un État, songent à se mieux placer, se placent, s’élèvent, deviennent puissants, soulagent le prince d’une partie des soins publics. […] M. le Duc (de Bourbon), propre frère de la duchesse du Maine, prit dans un temps un très grand goût pour elle ; ces sortes de goûts n’étaient pas rares dans la famille des Condé.

2248. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame de La Vallière. » pp. 451-473

Les portraits gravés, les portraits peints eux-mêmes, ne donneraient pas aujourd’hui une juste idée de ce genre de charme qui lui était propre. […] Ma sœur, ajouta-t-il en se tournant vers la nouvelle religieuse, parmi les choses que j’ai à vous dire, vous saurez bien démêler ce qui vous est propre.

2249. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « L’abbé Maury. Essai sur l’éloquence de la chaire. (Collection Lefèvre.) » pp. 263-286

À cette date de 1787, l’abbé Maury, qui avait passé la quarantaine, doué d’un talent actif et robuste, d’une faculté puissante, propre à tout, et d’une grande force d’application, en cherchait l’emploi du côté de la politique, qui commençait à agiter tous les esprits. […] Ce que j’en veux seulement conclure, c’est que cette nature impétueuse et improvisatrice s’était gâtée alors en abondant sans mesure dans son propre sens, et qu’elle ne perdait en aucun sujet cette habitude de parler à tout propos et quand même, de prendre les choses grosso modo et de s’en tenir aux à-peu-près, sauf à revêtir le tout d’une draperie oratoire ; et il n’y avait plus même ombre de draperie quand il causait familièrement.

2250. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires de Marmontel. » pp. 515-538

Une autre distraction de Marmontel vers ce moment (car il en avait beaucoup) fut pour une autre jeune et jolie actrice, Mlle Verrière, qui avait été aussi au maréchal de Saxe : elle en avait eu une fille, depuis reconnue, Aurore de Saxe, qui n’est autre, je le crois bien, que la propre grand-mère de Mme Sand. […] En jugeant les hommes de lettres et les philosophes de son temps, il les dépouille de cette aigreur et de ce fanatisme dont ils étaient loin d’être exempts sur certains sujets ; il leur prête un peu de sa douceur et de sa propre bonhomie : Ô mes enfants !

2251. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre premier. Existence de la volonté »

La « représentation », comme telle, exprime surtout les relations de l’être vivant avec les autres objets, conséquemment le reflet de ces objets en lui ; la volition, le désir, le plaisir et la peine, en ce qu’ils ont de constitutif, expriment la nature même et le développement propre de l’être vivant. […] Bastian avec Leibnitz, un simple « miroir du monde » ; il mêle sa propre nature à celle des choses, il les informe et souvent les déforme, d’abord selon ses plaisirs ou ses peines, puis selon ses appétitions.

2252. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Henri Heine »

Ils ont pénétré l’âme de toute une race ; ils ont des airs propres, des auditoires nombreux, et vivent dans la mémoire d’une multitude, demeurés ce que toute poésie était à l’origine, une déclamation mélodique et nationale. […] De même que les inclinations de Heine étaient variables, de même et plus fortement encore, ses émotions propres étaient instables, changeantes au point de se transformer en sentiments contraires si facilement que l’âme du poète finissait par alterner et comme par vibrer entre deux états opposés.

2253. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre II. Shakespeare — Son œuvre. Les points culminants »

Shakespeare — Son œuvre Les points culminants I Le propre des génies du premier ordre, c’est de produire chacun un exemplaire de l’homme. […] Nous parlions tout à l’heure de la réalité singulière propre aux créations des poètes.

2254. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XII] »

Le fer libérateur, qui perceroit mon sein, Déjà frappe mes yeux et frémit sous ma main, …………………………………………………… Et puis mon cœur s’écoute et s’ouvre à la faiblesse, Mes parents, mes amis ; l’avenir, ma jeunesse, Mes écrits imparfaits ; car à ses propres yeux. […] Nous apprenons de Moïse que ce grand et sage architecte, diligent contemplateur de son propre ouvrage, à mesure qu’il bâtissait ce bel édifice du monde, en admirait toutes les parties215 : Vidit Deus lucem quod esset bona : « Dieu vit que la lumière était bonne » : qu’en ayant composé le tout, parce qu’en effet la beauté de l’architecture paraît dans le tout, et dans l’assemblage plus encore que dans les parties détachées, il avait encore enchéri et l’avait trouvé parfaitement beau216.

2255. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Loutherbourg » pp. 258-274

Partout où cette musique se fait entendre, elle est d’un charme si puissant qu’elle entraîne et le musicien qui compose, au sacrifice du terme propre, et l’homme sensible qui écoute, à l’oubli de ce sacrifice. […] Fuyez, mes amis, fuyez… est-ce que les habitants des campagnes, au milieu des occupations qui leur sont propres, n’ont pas leurs peines, leurs plaisirs, leurs passions : l’amour, la jalousie, l’ambition ; leurs fléaux, la grêle qui détruit leurs moissons et qui les désole, l’impôt qui déménage et vend leurs ustensiles ; la corvée qui dispose de leurs bestiaux et les emmène ; l’indigence et la loi qui les conduisent dans les prisons ?

2256. (1860) Ceci n’est pas un livre « Hors barrières » pp. 241-298

Impuissant à conquérir, par ses propres forces, même une célébrité départementale, Minoret voulait pourtant donner la pâtée à son amour-propre qui criait la faim. […] Jouvin ; 3º je l’ai vu, de mes propres yeux vu, rédigeant sa revue théâtrale, dans les bureaux du Figaro.

2257. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Philarète Chasles » pp. 147-177

Il n’a trouvé, enfin, en Galilée, qu’un pauvre caractère, qui n’avait rien de ce qui fait le grand homme quoiqu’il fût un formidable mathématicien, un de ces êtres infirmes qu’on punit maternellement, comme un vieil enfant plein de génie, mais aussi d’obstination et de désobéissance, en lui donnant pour noir cachot un palais Italien, au centre d’une belle terre italienne de douze arpents sur laquelle il pouvait promener ses soixante-quinze ans et ses gouttes, en y ajoutant pour geôliers son ami, l’archevêque de Sienne, et ses propres filles, à lui, Galilée, ses filles qu’il adorait, deux religieuses qui lui parlaient de Dieu, ce dont il avait très probablement grand besoin. […] L’attendrissement est donc, en y regardant bien, la seule chose qui appartienne en propre à Philarète Chasles dans sa Psychologie sociale… Certes !

2258. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Sainte-Beuve. Les Poésies de Joseph Delorme, Les Consolations, les Pensées d’août. »

Sainte-Beuve, alors poète et observateur, et inspiré pour son propre compte, n’imitait pas Chateaubriand ! […] Mais les Pensées d’août attestent plus vivement que jamais cette influence mortelle a toute vie propre et à toute personnalité.

2259. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVIII. Des obstacles qui avaient retardé l’éloquence parmi nous ; de sa renaissance, de sa marche et de ses progrès. »

L’homme qui est né avec de la vigueur n’étant plus arrêté par des conventions, marche où le sentiment de sa vigueur l’entraîne ; l’esprit, dans sa marche fière, ose se porter de tous les côtés, ose fixer tous les objets ; l’énergie de l’âme passe aux idées, et il se forme un ensemble d’esprit et de caractère propre à concevoir et à produire un jour de grandes choses ; celui même qui par sa nature est incapable d’avoir un mouvement, s’attache à ceux qui ont une activité dominante et propre à entraîner : alors sa faiblesse même, jointe à une force étrangère, s’élève et devient partie de la force générale.

2260. (1894) La vie et les livres. Première série pp. -348

Optat Viple, inspecteur d’académie en retraite, très grand, très sec, avec un crâne pointu et des lunettes, si tranquille et si correct, qu’on ne soupçonnerait jamais qu’en 1815 il tua de sa propre main un officier autrichien qui avait insulté son père. […] Lorsqu’ils ont cessé de parler pour leur propre compte, ils prient sournoisement leurs personnages de se faire, les uns aux autres, des conférences d’histoire, et, par cette innocente malice, nous voilà obligés d’apprendre plus que nous ne voudrions. […] Voici une retraite toute propre à bien servir Dieu et son Église avec notre plume !  […] Les plus obtus d’entre nous compriment qu’il aurait mieux fait de venir plus tôt à la manœuvre et de remplir son propre devoir, au lieu de nous retenir au-delà des heures réglementaires. […] Il eût voulu (ce sont ses propres expressions) jeter la sonde dans ce terreau fumant, pullulant de germes.

2261. (1878) Nos gens de lettres : leur caractère et leurs œuvres pp. -316

On ne peut dire que le drame succède à l’analyse, qu’il s’en détache, qu’il ait une existence propre ; c’est, pour ainsi dire, l’analyse même qui est dramatique. […] Il a surpris le secret du maître, il s’est à ce point assimilé ses procédés dramatiques, qu’il semble les devoir moins à l’étude qu’à son propre instinct. […] Il ne déshonorera pas cette femme, parce qu’il l’aime et que ce serait déshonorer son propre amour. […] Mais Clindor, cavalier bien fait et de physionomie agréable, et qui, d’ailleurs, n’est pas une bête, songe à aimer Isabelle directement, pour son propre compte : ce qui ne déplaît point à la fille. […] Car, si ces artistes restent grands, c’est pour avoir été les échos sincères de leur individualité propre, en même temps que de l’époque et du pays où ils vécurent.

2262. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Post-scriptum sur Alfred de Vigny. (Se rapporte à l’article précédent, pages 398-451.) »

J’ai besoin de le répéter, parce que je viens de le relire : vous avez vraiment créé une critique haute qui vous appartient en propre, et votre manière de passer de l’homme à l’œuvre et de chercher dans ses entrailles le germe de ses productions est une source intarissable d’aperçus nouveaux et de vues profondes. » On peut rabattre tout ce qu’on voudra de l’éloge, mais M. de Vigny admettait évidemment cette méthode critique en 1829.

2263. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres mises en ordre par M. J. Sabbatier. (Tome II, 1844.) » pp. 144-153

Mais il n’eut de la jeunesse rien de ce qui lui appartient surtout en propre, rien de ce qui rafraîchit et renouvelle.

2264. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Mignet : Histoire de la Révolution française, depuis 1789 jusqu’en 1814. 3e édition. »

Un mérite propre à M. 

2265. (1874) Premiers lundis. Tome I « Madame de Maintenon et la Princesse des Ursins — I »

Louis XIV, qui n’aimait pas les apparences de l’intrigue, bien qu’à cette heure sa propre cour en fût infestée, rappela madame des Ursins en France ; mais, la voyant de plus près, il l’apprécia mieux.

2266. (1874) Premiers lundis. Tome I « Tacite »

L’historien vous parle une langue si rapide, si forte, si poignante, qu’il vous enlève, vous tire à lui, vous force de penser avec lui en cette langue qui lui est propre, et, fût-on un latiniste assez vulgaire, pourvu qu’on comprenne, se fait comprendre face à face, sans trucheman, sans aucune de ces traductions sous-entendues que Cicéron en ses longs développements laisse à son lecteur tout le temps de faire.

2267. (1874) Premiers lundis. Tome I « A. de Lamartine : Harmonies poétiques et religieuses — I »

Elle était avant nous, elle survit aux âges ; Elle n’est point à l’homme, et ses propres nuages Ne l’obscurciront pas.

2268. (1874) Premiers lundis. Tome II « Adam Mickiewicz. Le Livre des pèlerins polonais. »

En se servant des propres paroles de M. 

2269. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre VII. Éducation de la sensibilité »

Vous vous proposerez surtout de reconnaître votre tempérament propre et vos aptitudes spéciales.

2270. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Paul Bourget, Études et portraits. »

je me suis, sans doute, figuré depuis que j’avais fait le plus adorable voyage, et je le raconte quelquefois en coupant mon récit de cris d’admiration ou de plaisir : mais, quand je rentre en moi-même et que je tâche d’être sincère, je sens très bien que, ce coin du Sahara, c’est à travers le livre de Fromentin que je le revois, non à travers mes propres souvenirs ; je sens que ce voyage n’a rien ajouté à la vision que j’apportais avec moi, et que mes yeux ont, sans le savoir, conformé la réalité à cette vision.

2271. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre IX. L’avenir de la Physique mathématique. »

Il ne faudrait pas en conclure que la science ne peut faire qu’un travail de Pénélope, qu’elle ne peut élever que des constructions éphémères qu’elle est bientôt forcée de démolir de fond en comble de ses propres mains.

2272. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Le lyrisme français au lendemain de la guerre de 1870 » pp. 1-13

Le monde a pu croire un instant à sa propre agonie.

2273. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préface des « Feuilles d’automne » (1831) »

Hâtons-nous de déclarer ici, car il en est peut-être temps, que dans tout ce que l’auteur de ce livre vient de dire pour expliquer l’opportunité d’un volume de véritable poésie qui apparaîtrait dans un moment où il y a tant de prose dans les esprits, et à cause de cette prose même, il est très loin d’avoir voulu faire la moindre allusion à son propre ouvrage.

2274. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Aristophane, et Socrate. » pp. 20-32

On y voyoit Socrate enflé de vaine gloire, chantant ses propres louanges ; répétant sans cesse qu’il étoit initié dans tous les secrets de la nature ; qu’il étoit envoyé des cieux pour éclairer la terre ; que la jeunesse vînt à lui pour s’instruire ; qu’il avoit une méthode à laquelle étoient attachées la gloire & la félicité des générations à venir.

2275. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre I. Les travaux contemporains »

Néanmoins les philosophes ont précisément la faiblesse d’aimer les questions qui sont encore à l’état de nébuleuses ; ils aiment ces problèmes où il y a du pour et du contre, comme donnant plus à faire à l’activité propre de l’esprit ; je soupçonne même qu’on les contrarierait, si des démonstrations irrésistibles les privaient du plaisir de la controverse et de la dispute.

2276. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre V. Le mouvement régionaliste. Les jeunes en province » pp. 221-231

Sans distinction d’esthétique et de pensée politique, tous ces jeunes hommes sont mus par un même amour envers leur pays, par un même désir de donner une vie propre à leur province.

2277. (1879) Balzac, sa méthode de travail

Balzac plaidant pour son propre compte dans le mémoire ayant trait au Lys dans la vallée, Balzac prétendant soustraire la tête de Peytel au bourreau, est un avocat de talent sans doute ; mais il fatigue et n’atteint pas le but qu’il se propose.

2278. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XV. Des ouvrages sur les différentes parties de la Philosophie. » pp. 333-345

MOnsieur Formei ayant assez bien traité les matieres qui sont l’objet de ce Chapitre, nous emprunterons ce qu’il en dit, en y ajoutant nos propres réfléxions.

2279. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Satire contre le luxe, à la manière de Perse » pp. 122-126

Pourquoi des enfants aimeraient-ils, respecteraient-ils pendant leur vie, pleureraient-ils quand ils sont morts, des pères, des parents, des frères, des proches, des amis qui ont tout fait pour leur bien-être propre, rien pour le leur ?

2280. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 40, si le pouvoir de la peinture sur les hommes est plus grand que le pouvoir de la poësie » pp. 393-405

On peut s’en rapporter aux lumieres et à l’expérience des hommes dont la subsistance dépend des aumônes de leurs concitoïens, sur les voïes les plus propres, sur les moïens les plus efficaces d’attendrir le coeur humain.

2281. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 16, objection tirée du caractere des romains et des hollandois, réponse à l’objection » pp. 277-289

On a donc raison d’accuser le climat de la disette de génies et d’esprits propres à certaines choses, qui se fait remarquer chez certaines nations.

2282. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 23, que la voïe de discussion n’est pas aussi bonne pour connoître le mérite des poëmes et des tableaux, que celle du sentiment » pp. 341-353

Quand on en croit son premier mouvement, on juge de la portée des sens des autres, par la portée de ses propres sens.

2283. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 1, idée generale de la musique des anciens et des arts musicaux subordonnez à cette science » pp. 6-19

L’art rithmique donnoit des regles pour assujettir à une mesure certaine tous les mouvemens du corps et de la voix, de maniere qu’on pût en battre les temps, et les battre du mouvement convenable et propre au sujet.

2284. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Edmond About » pp. 63-72

se scandaliser lui paraîtrait pédant et lourd, et le genre qu’il affecte pendant tout le cours de son livre en serait, à ses propres yeux, compromis.

2285. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Μ. Jules Levallois » pp. 191-201

Jules Levallois, l’homme de la critique militante, n’entend pas ainsi les ermites, et sous sa robe d’ermite, à lui, il a gardé encore une main très prête et très propre au combat.

2286. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Leopardi »

Un poète peut être Satan pour son propre compte.

2287. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Belmontet »

Parce qu’il n’a jamais eu, lui, — et son livre l’atteste, — que des inspirations sociales ; parce que l’Empire l’a créé poète en le touchant de son rayon de feu et qu’il ne se détache jamais de la gloire ou des malheurs de l’Empire en se repliant sur lui-même, il nie l’inspiration la plus profonde de l’humanité, son inspiration éternelle, qui va de Job jusqu’à lord Byron… Franchement, n’est-ce pas abuser de sa propre préoccupation personnelle ?

2288. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXV. De Paul Jove, et de ses éloges. »

Les rois de France, poussés et par leur propre inquiétude et par celle de leur nation, avaient la fureur de conquérir Naples et Milan.

2289. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre IX. »

Tantôt c’était une méditation sur les chagrins et la brièveté de la vie, tantôt une tradition de la Fable, racontée avec cette douceur émue que le poëte portait dans ses propres souvenirs de regrets et ses consolations d’amitié.

2290. (1837) Lettres sur les écrivains français pp. -167

(Il arrive souvent à mon compatriote de me dire qu’il me fera entendre de ces Messieurs, comme on dit d’un instrument ; cela se rapporte, dans son idée, à ce qu’il sait de l’esprit et de l’originalité qui leur est propre ; dans d’autres cas il me dit simplement qu’il me les fera voir.) […] Ainsi, rien n’empêche un propre à rien, qui veut se donner des gants d’auteur, d’aller trouver M.  […] Puis, moyennant 500 fr. le volume, de publier ce livre avec son propre nom pour se faire gloire. […] Ainsi il vivait autrefois à Paris de la façon la plus bizarre ; il logeait dans une immense salle, propre à faire un atelier de peintre, et y nourrissait une collection d’oiseaux pour laquelle il se ruinait. […] Aussi le secrétaire est-il aujourd’hui un écrivain fort distingué qu’on ne nomme pas, et Mme de Craon a-t-elle essayé de voler de ses propres ailes.

2291. (1908) Promenades philosophiques. Deuxième série

Aucune n’est plus propre à faire admettre, sans qu’il soit besoin de longues explications, la loi de constance intellectuelle. […] Il donne un exemple, en effet, dans un autre passage de ses manuscrits, où il revient sur la même idée : « Dans l’univers, tout s’efforce de se conserver en son mode propre. […] Je ne sais rien de plus effrayant pour la raison religieuse, rien de plus troublant pour la logique chrétienne que la démonstration, qu’il refit cent fois, de sa propre divinité. […] Le mot de Bonald veut dire que le surnaturel est le domaine propre de l’homme et le naturel le domaine du reste du monde. […] Aucun n’est plus propre à donner une idée de ce qu’est ou de ce que pourrait être la télépathie, ou communication des pensées à distance.

2292. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Deuxième série

On en vient même, plus qu’en aucun temps peut-être, à se défier de sa pensée propre quand on l’aperçoit chez les autres. […] Le sens propre, quand il s’exalte, en arrive toujours là, et il arrive rarement qu’il ne s’exalte pas. […] C’est substituer à la loi de justice sa volonté propre, son caprice. […] De tous les philosophes-historiens, tout autant que Bossuet, mais avec sa manière propre, Quinet est certainement celui qui, le plus, se place aussi près que possible de Dieu comme centre. […] A mesure que le travail physiologique est plus divisé dans un être, l’être est plus parfait, comme on dit, et, disons simplement, est plus propre à l’acte et possède une plus grande sphère d’action.

2293. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Elle a sa figure propre, elle a son esprit particulier, qu’il est difficile de reconnaître. […] Les femmes ne cherchent jamais dans un roman que leur propre secret et celui de leurs rivales. […] M. de Barante entendit ces paroles comme l’écho de sa propre pensée. […] L’édition de 1889 établit qu’il lui appartient en propre ? […] Il fut, selon sa propre expression, « le scribe intègre et pieux ».

2294. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre III. Molière »

Mais il ne faut pas s’arrêter à considérer chaque type, isolément, dans sa vérité propre. […] Montfleury père fait une requête au roi, où il accuse Molière d’avoir épousé sa propre fille (1663’). […] Notez, en outre les raisonneurs, qui sont chargés de parler au nom du bon sens, c-à-d. des idées propres à l’auteur.

2295. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Edmond et Jules de Goncourt »

Ils sont sortis de là tout préparés à sentir et à rendre le pittoresque propre à notre époque. […] Ce qui leur est propre (et je songe surtout aux descriptions de Manette et de Madame Gervaisais), c’est le tourment de tout sentir et de tout rendre sensible, c’est l’effort un peu maladif. […] Ce goût malsain s’explique si l’on considère que ce qui nous attache à un grand artiste, c’est ce qu’il a de particulier, ce sont ses qualités propres et vraiment originales, c’est-à-dire précisément celles qui, développées à outrance et sans contrepoids, deviendront des défauts aux yeux des critiques non prévenus et des esprits amis de la mesure ; mais les initiés ne s’en apercevront point, ou bien, comme ces défauts ne font qu’accentuer la marque personnelle par où ils ont été séduits, s’ils les sentent, ils les aimeront comme des qualités de plus en plus singulières.

2296. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Introduction, où l’on traite principalement des sources de cette histoire. »

Un nom propre écrit en tête de ces sortes d’ouvrages ne dit pas grand’chose. […] Comment, à côté d’un plan général de la vie de Jésus, qui paraît bien plus satisfaisant et plus exact que celui des synoptiques, ces passages singuliers où l’on sent un intérêt dogmatique propre au rédacteur, des idées fort étrangères à Jésus, et parfois des indices qui mettent en garde contre la bonne foi du narrateur ? […] En revanche, le style des discours prêtés à Jésus par le quatrième évangile offre la plus complète analogie avec celui des épîtres de saint Jean ; on voit qu’en écrivant les discours, l’auteur suivait, non ses souvenirs, mais le mouvement assez monotone de sa propre pensée.

2297. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 14 mars 1885. »

Naïf comme ces pâtres de Norvège qui se plaisaient jadis à entendre autour de la flamme du pin résineux le récit des Scaldes inspirés, il laisse aux histoires primitives leur charme d’enfance ingénue ; mais, penseur et critique, il sait, sans nuire à sa propre émotion ni à celle des autres, montrer la loi nécessaire des événements dans la suite en apparence désordonnée des circonstances, et il contraint l’humanité vieillie à s’aimer, à se haïr, à se plaindre, à se reconnaître en un mot, dans les contes qui l’ont bercée. […] Beckmesser est fustigé à coups de scolastique, roué par sa propre chanson. […] Il est à peine besoin de le dire, ce qui dans l’œuvre de Wagner relève de l’art est la création propre et exclusive du maître.

2298. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 novembre 1885. »

Et comme celle-ci, formée d’éléments originairement semblables, les associe en les différenciant et les subordonnant, l’esthétique de Wagner substitue à des ensembles relativement homogènes, la musique, la poésie, la mimique, le spectacle purs, une œuvre plus hétérogène, dans laquelle les traits propres de ces trois arts, bien qu’harmonieusement fondus, multiplient les parties, étendent et compliquent l’émotion produite. […] Les mots Wala et Wille (volonté) sont étymologiquement identiques ; c’est avec les puissances élémentaires de son propre être que Wotan prend conseil. […] Ici est la limite ; pour apprendre plus, il faut, de nouveau, descendre dans les profondeurs du Moi. « En vérité, dit Schopenhauer, cette puissance cachée, qui conduit même les événements extérieurs, ne peut avoir sa racine que dans notre propre âme, mystérieuse ; car l’alpha et l’oméga de tout ce qui est réside en nous-mêmes. »   3° Hans von Wolzocen : L’Idéalisation du théâtre. — XII.

2299. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mars 1886. »

Le théâtre allemand est un théâtre qui a ses aspirations, son mouvement propre, sa mise en scène qui résulte de son essence et de ses croyances, tout autres que celles du théâtre français, anglais, japonais, italien, espagnol, etc. […] Tu me rappelles ces femmes fanatiques qui croient travailler à leur propre salut en forçant leur mari à manger du hareng et des pommes de terre le vendredi. […] Et beaucoup le font uniquement parce qu’ils savent ce que vaut l’œuvre et quel tort irréparable elle causerait à leurs propres productions : ceux-là sont de bons calculateurs, voilà tout.

2300. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre X : De la succession géologique des êtres organisés »

Néanmoins, si l’on embrasse une longue série d’âges à venir, il ne saurait être douteux que toutes nos formations marines les plus récentes, c’est-à-dire les terrains Pliocènes supérieurs et Pléistocènes, ainsi que les couches complétement modernes d’Europe, des deux Amériques et de l’Australie, pourront être, avec raison, considérées comme simultanées, dans le sens géologique du mot, par ce fait qu’elles contiendront des débris fossiles plus ou moins alliés, et qu’elles n’offriront aucune des formes propres aux dépôts inférieurs plus anciens. […] Lorsqu’on voit par exemple que les mammifères, les reptiles ou les poissons les plus anciennement connus, appartiennent évidemment chacun à leur propre classe, bien que quelques-unes de ces anciennes formes soient en quelque chose moins distinctes les unes des autres que les membres typiques des mêmes groupes ne le sont aujourd’hui, il serait inutile de chercher des animaux réunissant les caractères embryogéniques communs à tous les vertébrés, jusqu’à ce que des formations de beaucoup antérieures aux terrains siluriens les plus inférieurs ne soient découvertes ; or une pareille découverte me semble, comme je l’ai déjà dit, fort peu probable. […] Nul ne saurait prétendre non plus que ce soit en vertu d’une loi immuable que l’Australie a produit principalement et exclusivement des Marsupiaux, ou que l’Amérique de Sud a seule produit des Édentés et quelques autres types qui lui sont propres ; car nous savons qu’anciennement l’Europe a été peuplée de nombreux Marsupiaux, et j’ai déjà montré dans d’autres ouvrages que la distribution des mammifères terrestres a été très différente de ce qu’elle est aujourd’hui.

2301. (1890) La bataille littéraire. Troisième série (1883-1886) pp. 1-343

D’autres souvenirs lui revenaient, ceux de sa propre vie : Rosalie, Gilberte, les amères désillusions de son cœur. […] Demeurer sur le soupçon qui l’assassinait à cette heure, il ne le pouvait pas, ni moralement sans perdre sa propre estime, — ni physiquement, cela lui faisait trop de mal. […] Sans contrevenir à ses propres lois et sans faire de miracles, ne peut-il agir sur la pensée et sur la volonté de celui qui l’implore ? […] Littré ; les libres penseurs et les disciples de la foi l’ont accommodé chacun à la satisfaction de sa propre opinion, sans se préoccuper de savoir ce qu’il était réellement. […] Vous êtes ici chez ma propre mère.

2302. (1891) La bataille littéraire. Quatrième série (1887-1888) pp. 1-398

— Et de fait, ajoutait Daudet en rappelant cet entretien, leur propre bruit grise tous les vrais Méridionaux. […] il sait comment… Et c’est du propre ! […] Et elle vivait, dans la banlieue propre et claire de la petite ville, sans désirs, sans rêves, sereine. […] Elle avait, avec une douceur presque pas triste, renoncé à son propre bonheur pour faire le bonheur des autres. […] Ces mauvaises mœurs parisiennes, la corruption, l’adultère et la débauche, dont on nous charge si complaisamment, nous appartiennent-elles donc en propre, et en avons-nous le monopole ?

2303. (1900) La vie et les livres. Cinquième série pp. 1-352

Mais presque aussitôt il est destitué par ses propres soldats. […] Le 31 mars 1848, Blanqui fut accusé de trahison par son propre parti. […] France est bien Français par cette obstination à médire de sa propre race ! […] , pourrait reprendre pour son propre compte la réponse brève et triomphante du chanoine de Chimay. […] Ses conceptions se rattachent aux méditations des autres ou à ses propres rêveries par un écheveau de liens subtils.

2304. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome I

Dans chaque science, le point de vue propre à cette science doit prévaloir et subordonner les autres. […] On connaît encore d’autres réactifs empiriques propres à déceler la présence du sucre et basés sur des réactions analogues. […] Toutefois l’artère hépatique contribue à la nutrition propre du foie. […] Ce système musculaire est également propre aux veines hépatiques. […] On a supposé dans certaines théories qu’il se détruisait en produisant la chaleur destinée à entretenir la température propre de l’animal.

2305. (1888) Études sur le XIXe siècle

Puis-je vous demander si vous parlez par ouï-dire ou de votre propre expérience ?” […] Fatigues, peines, privations, qu’est-ce que cela, quand on combat pour la sainte cause de son propre pays et de l’humanité ?  […] Il avait l’enthousiasme et la foi, et, confiant en sa propre force, en celle du droit, en celle du peuple, il ne comprenait pas qu’on pût chercher son salut ailleurs qu’en soi-même. […] Verga raisonne sur ces propres ouvrages et sur la théorie du roman. […] » Cela va si loin que, quelquefois, effrayé de l’ardeur de ses propres enthousiasmes, l’écrivain doute de lui-même, en appelle au témoignage de ses amis, regrette, par exemple, que M. 

2306. (1891) Enquête sur l’évolution littéraire

Marcel Prévost, jeune homme industrieux qui économise son propre tabac en refumant les vieux bouts de cigarettes qu’a laissé traîner George Sand. […] Un esprit fortement constitué vaut par lui-même et force l’attention du public par sa vertu propre. […] L’heure était passée des théories esthétiques ; j’en profitai pour arracher quelques noms propres à Mæterlinck. […] Rosny, par suite de cette dispersion, se contenta de parler pour son propre compte. […] Mais alors, c’est que leur vers n’aura plus sa musique propre.

2307. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIIIe entretien. Cicéron (2e partie) » pp. 161-256

Si mes esclaves me redoutaient comme tes concitoyens te redoutent, s’ils me voyaient du même œil dont tout le monde te voit ici, j’abandonnerais ma propre maison ; et tu balances à abandonner ta patrie, à fuir dans quelque désert, à cacher dans quelque solitude éloignée cette vie coupable réservée aux supplices ! […] « Heureux encore une fois Crassus, qui n’a point vu son proche parent Publius, citoyen du plus grand courage, mourir de sa propre main ; la statue de Vesta teinte du sang de son collègue, le grand pontife Scévola, ni l’affreuse destinée de ces deux jeunes gens qui s’étaient attachés à lui : Cotta, qu’il avait laissé florissant, peu de jours après, déchu de ses prétentions au tribunat par la cabale de ses ennemis, et bientôt obligé de se bannir de Rome ; Sulpicius, en butte au même parti, Sulpicius, qui croissait pour la gloire de l’éloquence romaine, attaquant témérairement ceux avec qui on l’avait vu le plus lié, périr d’une mort sanglante, victime de son imprudence et perdu pour la république ! […] Cette occupation sied parfaitement à mon âge ; elle est plus que toute autre chose en harmonie avec ce que je puis avoir fait de louable dans ma vie publique ; rien de plus utile pour l’instruction de mon pays. » Après cette introduction, les amis s’asseyent pour écouter Cicéron, qui commence ainsi : XVIII « Socrate me paraît être le premier, et tout le monde en tombe d’accord, qui rappela la philosophie des nuages et des mystères pour l’appliquer à la conduite morale des hommes et lui donner pour objet les vertus ou les vices ; il pensait qu’il n’appartient pas à l’homme d’expliquer les choses occultes et qu’alors même que nous pourrions nous élever jusqu’à cette connaissance, elle ne nous servirait de rien pour bien vivre. » Il définit ensuite la philosophie pratique de Socrate et la philosophie spéculative de Platon, et il parsème son analyse de ses propres axiomes philosophiques à lui-même. […] Bossuet lui-même n’était pas homme public à la mesure de Cicéron ; plus libre que l’orateur romain comme orateur, il n’avait à lutter ni contre les tumultes du sénat, ni contre les démagogues, ni contre la tyrannie de César, ni contre les assassins d’Antoine ; il n’avait qu’à servir un roi, à ménager en pontife habile le prince et sa conscience, à mourir sur les escaliers de Versailles en sollicitant pour un indigne neveu la continuation des faveurs d’Église conquises par son propre génie de théologien et d’écrivain.

2308. (1894) Critique de combat

Non, mais sa propre femme, poussée par la jalousie et plus encore par l’indignation de voir un prince trahir la royauté. […] Celle-ci renvoie l’épître à son amie, en l’agrémentant de commentaires sur ses propres aventures. […] Il me permettra bien de lui emprunter l’épigraphe de son propre livre : Amicus Plato, sed magis amica veritas. […] On extraira des derniers ouvrages de l’élu les passages les plus propres à faire l’éducation de la jeunesse. […] En pareil cas, on exagère volontiers pour mieux réfuter son adversaire ; on laisse dans l’ombre la moitié de sa propre pensée.

2309. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXVIII » pp. 266-276

Sainte-Beuve fait allusion ici à son propre cours de Lausanne sur Port-Royal.

2310. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Poésies d’André Chénier »

En résumé, sa préoccupation constante est d’enrichir la langue française de ses propres richesses. » — On ne saurait mieux voir ni mieux dire.

2311. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « La poésie »

Paul Albert, le premier qui nous permette de lire ce qui se professait hier encore dans une salle de la Sorbonne, est le plus propre aussi à donner l’idée de cet enseignement judicieux et vivant, proportionné à son but et de tout point irréprochable.

2312. (1874) Premiers lundis. Tome I « Ferdinand Denis »

Effacez-vous plutôt du tableau que vous offrez ; jetez-y en votre place des personnages naturels qui parlent et agissent en leur propre et libre allure ; n’intervenez pas entre eux et nous ; faites comme Walter Scott et Cooper ; disparaissez pour mieux peindre.

2313. (1874) Premiers lundis. Tome II « Doctrine de Saint-Simon »

Ce qui peut y être considéré comme le propre d’Eugène, c’est la forme qu’il leur a donnée et qui nous représente fidèlement la tournure particulière de son esprit ; quelque chose de complexe, d’un peu obscur à la surface, et qui rayonne par le fond ; une clarté profonde, sans beaucoup de transparence ; une pensée solidaire qui se manifeste sur plus d’un point à la fois, et se déroule avec une plénitude imposante dans sa qualité fondamentale ; un arbre d’une puissante végétation intérieure, qui n’a nul souci de l’écorce ; une allure simple, grave, un peu enveloppée, faisant beaucoup de chemin sans affecter beaucoup de mouvement ; souvent de ces mots brefs et compréhensifs, de ces formules d’apôtre qui gravent une pensée pour toute une religion.

2314. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Poésie — I. Hymnes sacrées par Édouard Turquety. »

Turquety a cherché à se créer un rôle propre parmi les poètes modernes ; retiré dans sa Bretagne, il a consulté les graves et habituelles préoccupations d’une vie monotone que les seuls rayons mystiques éclairaient parfois.

2315. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre IV. La fin de l’âge classique — Chapitre I. Querelle des Anciens et des Modernes »

Mais Boileau ne battait Perrault qu’avec les propres armes de Perrault.

2316. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Grosclaude. »

Il y a peut-être du vertige et quelque chose de l’attrait d’un crime à simuler ainsi, dans sa propre intelligence, les effets d’un tremblement de terre… Enfin, que vous dirai-je ?

2317. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vigny, Alfred de (1797-1863) »

Il se fait leur avocat devant le grand juge, et la fierté de ses accents lui vient de ce qu’il parle au nom de l’humanité tout entière, dont les plaies saignent à son propre cœur.

2318. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XII. Lo Ipocrito et Le Tartuffe » pp. 209-224

Récompenser les fatigues d’autrui est le propre des gens de bien.

2319. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Jules Laforgue » pp. 36-47

Pour la rendre, Musset avait dressé l’image du pélican qui nourrit ses petits de sa propre chair.

2320. (1898) Le vers libre (préface de L’Archipel en fleurs) pp. 7-20

. — Dans ce cas, tu es perdu : tu deviendras l’amuseur du Prêtre et du Mage, du Roi et de la Reine, du Capitaine des Gardes et du Trésorier, du Grand Juge et du Propriétaire… c’est-à-dire la chose du Menteur et du Niais, du Soudard et du Voleur, du Prévaricateur et du Satisfait « Si par ta propre Volonté — car tu possèdes la volonté — tu échappes à la cave et à l’Éducation, tu te réfugieras dans le monde des poètes.

2321. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XI » pp. 89-99

Les dix-huit noms propres qui s’étaient associés aux noms de ces fleurs étaient les plus célèbres du temps ; la peinture et la calligraphie, qui fixaient sur le vélin les fleurs y les vers, le nom des auteurs, étaient des chefs-d’œuvre.

2322. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre III. Paradis perdu. »

On ne peint bien que son propre cœur, en l’attribuant à un autre ; et la meilleure partie du génie se compose de souvenirs.

2323. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre II. Qu’il y a trois styles principaux dans l’Écriture. »

Il entre dans son récit à la manière des anciens historiens ; vous croyez entendre Hérodote : « 1º Comme plusieurs ont entrepris d’écrire l’histoire des choses qui se sont accomplies parmi nous ; » 2º Suivant le rapport que nous en ont fait ceux qui dès le commencement les ont vues de leurs propres yeux, et qui ont été les ministres de la parole ; » 3º J’ai cru que je devais aussi, très excellent Théophile, après avoir été exactement informé de toutes ces choses, depuis leur commencement, vous en écrire par ordre toute l’histoire. » Notre ignorance est telle aujourd’hui, qu’il y a peut-être des gens de lettres qui seront étonnés d’apprendre que saint Luc est un très grand écrivain, dont l’Évangile respire le génie de l’antiquité grecque et hébraïque.

2324. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Mes petites idées sur la couleur » pp. 19-25

Ils ont pourtant un technique propre et limité.

2325. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Philippe II »

… Nous le sommes déjà, — et par leurs propres mains !

2326. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Alexandre Dumas fils » pp. 281-291

Est-ce que Dumas fils, qui rumine ces drôlesses-là un peu trop à la fin, ne les a pas usées pour son propre compte à la scène dans La Dame aux camélias, dans Le Demi-Monde et partout !

2327. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Meurice » pp. 231-241

Quand, sorti de chez sa maîtresse pour rentrer chez sa femme, il y trouve des enfants qui, tout à l’heure, par le fait du roman, vont le mettre au supplice (sa fille en voulant épouser le fils d’un ennemi politique, son fils en jugeant et en réprouvant sa conduite quand il accepte le ministère), ce père, qui aurait pu être sublime dans ce déchirement de Laocoon, dévoré non plus par des serpents, mais par ses propres enfants, a perdu le bénéfice et l’auguste caractère de la paternité, et tous les sophismes de l’auteur n’ont pas le pouvoir de les restituer à cette paternité souillée.

2328. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Avant-propos de la septième édition »

La critique kantienne, sur ce point au moins, n’aurait pas été nécessaire, l’esprit humain, dans cette direction au moins, n’aurait pas été amené à limiter sa propre portée, la métaphysique n’eût pas été sacrifiée à la physique, si l’on eût pris le parti de laisser la matière à mi-chemin entre le point où la poussait Descartes et celui où la tirait Berkeley, c’est-à-dire, en somme, là où le sens commun la voit.

2329. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre II. Des éloges religieux, ou des hymnes. »

Le ton de leurs hymnes est imposant ; mais l’initié, en parlant à Dieu, semblait ne s’occuper que de ses propres besoins ; il oubliait que des êtres faibles, en louant leur père commun, ne doivent pas se séparer du reste de la famille, et implorer des bienfaits qui ne soient que pour eux.

2330. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIV. Panégyrique de Trajan, par Pline le jeune. »

« Quand on est dans la première place du monde, on ne peut plus s’élever qu’en abaissant sa propre grandeur39.

2331. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XVII. De l’éloquence au temps de Dioclétien. Des orateurs des Gaules. Panégyriques en l’honneur de Maximien et de Constance Chlore. »

On le loue de sa piété céleste, et de ce qu’il a bien voulu se rendre aux instances de la patrie ; « Empereur éternel, tu n’as pu résister aux larmes de cette mère auguste. » Après cela on le compare au soleil, qui, en remontant sur son char, et de ses propres mains le guidant dans les cieux, a réparé les désordres du monde, embrasé par l’ignorance de Phaëton.

2332. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XVIII. Siècle de Constantin. Panégyrique de ce prince. »

C’est bien le moins, quand on fait la guerre pour se disputer un trône, de combattre soi-même, et de se mêler, dans sa propre cause, à ceux qui veulent bien combattre et mourir pour elle.

2333. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre V. Du gouvernement de la famille, ou économie, dans les âges poétiques » pp. 174-185

Ensuite durent venir les fiefs roturiers réels, pour lesquels les vassaux durent être les premiers prædes ou mancipes obligés sur biens immeubles ; le nom de mancipes resta propre à ceux qui étaient ainsi obligés envers le trésor public.

2334. (1927) André Gide pp. 8-126

L’art ne lui apparaît pas comme une fin, ni son œuvre comme un être qui, une fois détaché de lui, doive avoir une vie propre, durer et se perpétuer. […] D’où son acrimonie, bien qu’il ait affecté (et peut-être même sincèrement professé jusque là) un désintéressement qui agaçait Julius comme une critique indirecte de son propre arrivisme. » Qui me dira, s’écrie Anthime, si Fleurissoire, en arrivant au Paradis, n’y découvre pas tout de même que son Bon Dieu non plus n’est pas le vrai ?  […] Il vend aussi les éditions originales de ses propres ouvrages : quarante ou cinquante numéros au catalogue ! Ce délicat n’est-il pas quelquefois, en effet, son pire ennemi et son propre bourreau ? […] Pour les vivants, on devait naturellement croire à la brouille, et en voyant Gide vendre ses propres ouvrages, on a conclu qu’il était brouillé avec lui-même.

2335. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre V. La philosophie. Stuart Mill. »

Voilà l’idée de la logique, et il est clair qu’elle a, au même titre que les autres sciences, sa matière réelle, son domaine distinct, son importance visible, sa méthode propre et son avenir certain. […] Je cite les propres paroles de Mill ; elles sont si nettes, qu’il faut se donner le plaisir de les méditer. […] —  Pas davantage. —  Vous pensez qu’il y a une faculté autre que l’expérience et la raison propre à découvrir les causes ? […] Voilà la nature de toute vraie définition ; elle ne se contente pas d’expliquer un nom, elle n’est pas un simple signalement ; elle n’indique pas simplement une propriété distinctive, elle ne se borne pas à coller sur l’objet une étiquette propre à le faire reconnaître entre tous. […] Selon les logiciens classificateurs, on atteint cet être en logeant l’objet dans son groupe, et l’on définit cette notion en nommant le genre voisin et la différence propre.

2336. (1928) Les droits de l’écrivain dans la société contemporaine

Au fond, les jurisconsultes sont bien forcés de reconnaître, avec une espèce de mauvaise humeur, que le contenu d’une correspondance est, au moins en partie, la propriété de celui qui l’a écrite, que la pensée d’un homme lui appartient en propre, que la lettre n’est, somme toute, qu’une espèce de dépôt. […] Craintes bien vaines, ajoutait ce critique de sa propre profession, car, contrairement aux médecins qui passent dix ans de leur vie à apprendre la médecine et qui la savent, il n’y a pas un avocat qui connaisse le droit suffisamment pour ne pas consulter sans cesse ses livres. […] Familles inopportunes et étouffantes, qui laissez le poète se débattre dans la misère, mais qui réapparaissez soudain lorsqu’il est très malade, plutôt pour lui reprocher sa dissipation, pour l’accuser d’être responsable de sa propre maladie, que pour le soigner ; vous avez disparu tout au long de sa vie, mais on vous retrouve plus tard : vous êtes toujours, là, bien présentes, lorsque le poète n’est plus, pour le faire souffrir encore une fois, non plus dans sa chair, mais dans sa pensée. […] Paul Valéry45 dit notamment : « Je vois tous les jours des amis fort anciens qui ont fait vendre ce que je leur avais écrit en confiance et certains ne pas même retenir les billets et les missives qui concernaient leur propre vie et ses vicissitudes intimes. […] (Malheureusement, je ne me rappelle plus les noms propres, et la mort de Pomairols, qui me les avait dits, m’ôte l’espoir de les retrouver.)

2337. (1864) Le positivisme anglais. Étude sur Stuart Mill

Voilà l’idée de la logique, et il est clair qu’elle a, au même titre que les autres sciences, sa matière réelle, son domaine distinct, son importance visible, sa méthode propre et son avenir certain. […] Je cite les propres paroles de Mill ; elles sont si nettes, qu’il faut vous donner le plaisir de les méditer. […] — Pas davantage. — Vous pensez qu’il y a une faculté autre que l’expérience et la raison propre à découvrir les causes ? […] Voilà la nature de toute vraie définition ; elle ne se contente pas d’expliquer un nom, elle n’est pas un simple signalement ; elle n’indique pas simplement une propriété distinctive, elle ne se borne pas à coller sur l’objet une étiquette propre à le faire reconnaître entre tous. […] Selon les logiciens classificateurs, on atteint cet être en logeant l’objet dans son groupe, et l’on définit cette notion en nommant le genre voisin et la différence propre.

2338. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff » pp. 237-315

Son nez couvert et large prolonge la largeur du front ; sa bouche, où la fermeté s’unit à la grâce, a la cordialité d’une nature ouverte qui sourit quelquefois à sa propre pensée. […] On voyagerait dans tous les villages de l’empire, qu’on s’y reconnaîtrait comme dans son propre pays. […] L’ameublement de cette pièce n’était pas brillant, mais propre. […] Elle avait le caractère timide, d’une morne indifférence en ce qui tenait à sa propre personne, mais craintif envers les autres. […] — Se marier, répondit le cordonnier en souriant, est une chose fort agréable pour l’homme, et pour mon propre compte, je suis prêt avec le plus grand plaisir à prendre une épouse.

2339. (1889) La bataille littéraire. Première série (1875-1878) pp. -312

Il élevait même, en ce moment, un enfant de sang royal, le propre fils du roi de Dahomey. […] — Comme il fait propre ici ! […] — Mais alors, pourquoi est-ce si propre chez les autres ? […] » Le caporal, sans attendre l’ordre, lui appliqua son propre revolver sur la tête en lui disant : « Crie vive l’armée ! […] Il n’avait jamais invoqué que la force il mourut justement frappé par sa propre divinité.

2340. (1890) La bataille littéraire. Deuxième série (1879-1882) (3e éd.) pp. 1-303

Ça sera du propre. […] Une salle propre, inondée de soleil avec des traînes de tapis qui amortissent le brait des pas. […] sa propre fortune, la réussite de sa propre ambition, la pitance de son propre appétit. […] C’est le propre des grandes assemblées humaines de pouvoir être momentanément séduites par un mot, par un geste, par un cri. […] Tous les membres de cette famille de Mirabeau ont été des personnages d’une rare originalité, très propres à faire ressortir les contrastes du siècle qui a précédé la Révolution.

2341. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Saint-Arnaud. Ses lettres publiées par sa famille, et autres lettres inédites » pp. 412-452

La condition naturelle de l’armée d’Afrique, résultant des points de vue et des intérêts qui étaient propres à ses chefs, était donc de vivre dans une espèce d’opposition ministérielle permanente ; de se plaindre du peu d’égard qu’on avait à Paris pour les propositions des généraux en chef et gouverneurs, et de ne pas approuver la politique générale, avant tout conciliante et accommodante, qui présidait aux relations avec les autres puissances : « Quelle marche prend le ministère ! […] » Puis, à d’autres jours, la patience manque ; un mauvais vent du désert se remet à souffler ; à force de guerroyer et de courir, de mener de razzia en razzia sa colonne infernale, de s’ingénier (périlleux problème) à soumettre les Arabes par les Arabes, de vouloir créer et fonder par tout le pays de petits forts de sûreté où les chefs amis, les agas et les caïds puissent se maintenir et se défendre au besoin, et brider les tribus rebelles ; à force d’être sur pied nuit et jour, et de se ronger au gîte quand on y est retenu, à force de se passionner pour tout, on se consume, on s’use avec une rapidité effrayante : « Je veux trop bien faire et trop de choses, et je prends tout trop à cœur ; c’est le propre des âmes généreuses, mais ces âmes-là ne vivent pas longtemps ; elles s’usent trop vite, et je le sens, mais il n’est plus temps de se changer. » Quelques visites de France apportent des diversions dans cette vie locale si dévorante. […] Au moment enfin de prendre la mer (29 août), énumérant encore une fois les incertitudes, les difficultés de tout genre qu’il ne se dissimulait pas, et sur le point précis où opérer le débarquementad, et sur la manière d’aborder Sébastopol et le côté par où mordre à « ce dur morceau », et son autre souci, presque aussi grave, du bon accord à maintenir entre des alliés d’habitudes et de génies si différents, le maréchal concluait ainsi et livrait le fond de son âme au sein de l’intimité : N’est-ce pas bien lourd tout cela, mon cher Franconnière, pour un pauvre homme qui lutte contre ses propres souffrances, qui les domine pour d’autres luttes plus importantes et plus nobles, qui heurte sa tête, sans l’amollir, contre des obstacles sans nombre que la prudence humaine ne peut ni prévoir ni empêcher ?

2342. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DE LA MÉDÉE D’APOLLONIUS. » pp. 359-406

Si l’on a le loisir pourtant d’examiner de plus près et d’entrer dans le golfe même, si l’on s’approche, pour le mieux étudier, de ce qu’on admire, si l’on compare avec les monuments les plus connus et les mieux situés ceux qu’ils nous masquaient trop aisément, les œuvres plus reculées et de moindre renom dont les dernières venues ont profité jusqu’à les faire oublier, et dont il semble qu’elles dispensent, mille réflexions naissent ; les dernières œuvres qui se trouvent pour nous autres Modernes les premières en vue, et qui restent les plus apparentes, n’y perdent pas toujours dans notre esprit ; mais on le comprend mieux dans leur formation et leur mérite propre. […] Elle-même l’ignore et lutte contre ses propres sentiments. […] Mais en général on a recouvert l’antique mal, lorsqu’il se présente, d’expressions plus vagues et plus flatteuses, en même temps que, dans une foule de cas de simple galanterie, on a détourné par abus les expressions physiques de leur sens propre : on s’est mis à brûler et à mourir par métaphore.

2343. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE LA FAYETTE » pp. 249-287

Au moyen âge et même au seizième siècle, une phrase de latin copiée ou citée faisait autant partie de l’amour-propre de l’auteur qu’une pensée propre. […] Huet est assez formel à ce sujet dans ses Origines de Caën ; il l’est plus encore dans son Commentaire latin sur lui-même : « Des gens mal informés, y dit-il, ont pris pour une injure que j’aurois voulu causer à la renommée de Segrais ce que j’ai écrit dans les Origines de Caën ; mais je puis attester le fait sur la foi de mes propres yeux et d’après nombre de lettres de Mme de La Fayette elle-même ; car elle m’envoyoit chaque partie de cet ouvrage successivement, au fur et à mesure de la composition, et me les faisoit lire et revoir. » Enfin Mme de La Fayette disait souvent à Huet, qui avait mis en tête de Zayde son traité de l’Origine des Romans : « Savez-vous que nous avons marié nos enfants ensemble ?  […] Il leur semble qu’on leur paroît cent ans dès qu’on est plus vieille qu’eux, et ils sont tout propres à s’étonner qu’il soit encore question des gens ; et de plus il croiroit plus aisément ce qu’on lui diroit de M. de La Rochefoucauld que d’un autre.

2344. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIe entretien. Littérature latine. Horace (1re partie) » pp. 337-410

Le souvenir de son propre esclavage même et de sa condition d’affranchi lui faisait sentir plus qu’à un autre la passion de la supériorité sociale. […] Rien ne survit du temps que ce qui n’est pas du temps, c’est-à-dire la beauté propre au genre de poésie qu’on possède : les allusions sont la fausse monnaie de la gloire, l’avenir ne la reçoit pas. […] Voltaire, à quatre-vingt-trois ans, adressa à l’ombre d’Horace une de ses plus juvéniles épîtres ; il ne manqua à ces vers que l’accompagnement du murmure des Cascatelles de Tivoli, qui mouillaient de leur écume les tablettes du poète latin quand il écrivait d’une main si légère ses propres épîtres badines à Mécène.

2345. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CIXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (1re partie) » pp. 5-79

Je prie ceux qui par hasard parcourront ces lignes de regarder ce que je dis à ce sujet comme un effet de ma reconnaissance pour le maître auquel je rapporte le peu que je sais, et non comme une louange de ma propre personne. […] « Les Cardinaux se rassemblèrent en congrégation générale : ils étaient assistés en premier lieu par tous les concurrents, et d’une façon particulière par celui qui étayait sa candidature sur ses propres mérites et sur les bons offices du cardinal qui le favorisait tant. […] N’étant pas très bien convaincus, — comme cela arrive ordinairement dans les choses qui nous sont personnelles, — de l’impossibilité de réussir, et honteux pour la plupart de céder la place à un candidat qu’ils se croyaient inférieur de beaucoup, à cause de son âge, des emplois qu’il avait remplis, de ses amitiés ou d’autres circonstances qui lui étaient propres, ils témoignèrent une assez vive répugnance à lui accorder leur voix.

2346. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Gustave Flaubert. Étude analytique » pp. 2-68

Le vocabulaire de Salammbô, de l’Éducation sentimentale, de la Tentation de saint Antoine est dénué de synonymes et, par suite, de répétitions ; il abonde en série de mots analogues propres à noter précisément toutes les nuances d’une idée, à l’analyser en l’exprimant. Flaubert connaît les termes techniques des matières dont il traite ; dans Salammbô et la Tentation, les langues anciennes, de l’hébreu au latin, aident à désigner en paroles propres les objets et les êtres. […] D’autres enfin, et ce sont les plus artistes des artistes, réussissent par des miracles d’adresse à exprimer une énorme portion de réalité, des idées absolument adventices et variées, en une langue toujours la même et qui joint une beauté propre au rendu de la vérité ; les de Goncourt et M. 

2347. (1868) Curiosités esthétiques « I. Salon de 1845 » pp. 1-76

Que l’auteur songe aux clameurs qui accueillirent le Dante et Virgile, et qu’il persévère dans sa propre voie ; bien des railleries malheureuses tomberont encore sur cette œuvre, mais elle restera dans la mémoire de quiconque a de l’œil et du sentiment ; puisse son succès aller toujours croissant, car il doit y avoir succès. […] — n’a pas pu triompher de sa propre peinture. […] Corot est tout aussi fort cette année que les précédentes ; — mais l’œil du public a été tellement accoutumé aux morceaux luisants, propres et industrieusement astiqués, qu’on lui fait toujours le même reproche.

2348. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — II. (Suite.) » pp. 346-370

Les formes de Roederer, sa personne, au premier aspect, n’étaient pourtant pas propres à corriger ces préventions ou ces inimitiés si faciles à naître et à s’entretenir en temps de révolution. […] Il a discuté les opinions opposées à la sienne, discuté la sienne propre, et ces conversations ont été de véritables Conseils d’État. — Il ne peut avoir devant lui des hommes publics sans être homme d’État, et tout devient pour lui Conseil d’État. 

2349. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — III » pp. 455-479

Dans l’intervalle, elle reprenait peu à peu confiance dans sa force morale, et croyance dans sa propre éternité. […] C’eût été le moment sans doute pour un gouvernement d’une autre nature de songer à tirer parti de ses propres ressources et de redemander à un sol fertile ses richesses trop oubliées.

2350. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Appendice. Discours sur les prix de vertu »

Il a, nous écrit-on dans un premier résumé, il a reconstruit l’école des filles de Bournois, sa première paroisse ; construit, fondé et doté une école de filles à Villars-lez-Blamont, son pays natal ; créé à Blamont un pensionnat, un orphelinat et un ouvroir destinés aux filles du canton ; il a construit une église catholique à Villars-lez-Blamont où il n’y avait d’abord qu’un bâtiment commun pour les protestants et les catholiques ; il a reconstruit l’église de Laviron, sa propre paroisse ; il a fait élever et instruire à ses frais sept enfants orphelins appartenant à des familles pauvres, etc. […] Le propre de la société moderne est de comprendre et de maintenir le plus possible le sérieux et l’égalité dans toutes les choses honorables et bonnes.

2351. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville (suite et fin.) »

Je suis l’homme du monde le moins propre à remonter avec quelque avantage contre le courant de mon esprit et de mon goût ; et je tombe bien au-dessous du médiocre, du moment où je ne trouve pas un plaisir passionné à ce que je fais. […] Ici il n’y a pas de quoi s’offenser : c’est l’auteur même qui parle, qui se démontre, et la dissection ne porte que sur les procédés de l’intelligence ; ce que l’auteur ajoute sur sa disposition morale est digne de ce qui précède, et résume nettement sa profession de foi politique : « J’ai l’orgueil de croire que je suis plus propre que personne à apporter dans un pareil sujet une grande liberté d’esprit, et à y parler sans passion et sans réticence des hommes et des choses : car, quant aux hommes, quoiqu’ils aient vécu de notre temps, je suis sûr de n’avoir à leur égard ni amour ni haine ; et quant aux formes des choses qu’on nomme des constitutions, des lois, des dynasties, des classes, elles n’ont point, pour ainsi dire, je ne dirai pas de valeur, mais d’existence à mes yeux, indépendamment des effets qu’elles produisent.

2352. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Béranger en 1832 »

Il fut long avant de céder à son propre désir. […] Rien de plus mûri, de plus délicat, que la variété de ses jugements littéraires, tous individuels et de sa propre façon : c’est un rusé ignorant à la manière de Montaigne.

2353. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SUE (Jean Cavalier). » pp. 87-117

Lorsque Dieu forma le cœur et les entrailles de l’homme, il mit premièrement la bonté, comme propre caractère de la nature divine, et pour être comme la marque de cette main bienfaisante dont nous sortons. […] Sue n’a pas voulu les remplacer, pour ainsi dire, dans la lumière qui seule les complète, ni entrer dans cet esprit général et régnant qui a été comme la longue ivresse et l’enchantement propre de l’époque de Louis XIV ; il y fallait entrer pourtant à quelque degré, sinon pour le partager, du moins pour le juger, et pour y voir personnes et choses dans leur vraie proportion.

2354. (1875) Premiers lundis. Tome III «  À propos, des. Bibliothèques populaires  »

Il a aggravé la dénonciation des pétitionnaires par son commentaire propre : des noms honorables ou glorieux, confondus avec d’autres, y encourent une réprobation entière et sommaire, une véritable flétrissure publique, sans discussion. […] Le propre et l’honneur de l’Empire est de maintenir la balance égale et de ne verser d’aucun côté.

2355. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre premier. Mécanisme général de la connaissance — Chapitre premier. De l’illusion » pp. 3-31

Outre ces opérations qui nous sont communes avec les animaux, il en est d’autres qui nous sont propres. […] Voir toute la thèse de Paul Bert, Sur la vitalité propre des tissus animaux.

2356. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre III. Montaigne »

Il aimait un logis commode et propre, et se plaisait dans sa librairie, entre ses mille volumes, lisant, marchant, rêvant, dictant, seul surtout, délicieusement seul : femmes, enfants, toutes les fâcheuses servitudes de la vie, étant arrêtés au seuil du sanctuaire. […] Je remarque que toutes ces choses dont il doute et nous fait douter, sont justement celles pour lesquelles les hommes se cassent la tête, au propre comme au figuré.

2357. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre I. Les mondains : La Rochefoucauld, Retz, Madame de Sévigné »

Ensuite nous regarderons, dans Boileau, les grandes théories d’art qui nous expliquent les créations de l’éloquence et de la poésie classiques, dans ce qu’elles ont de propre à l’égard de l’œuvre des autres siècles, et dans ce qu’elles ont entre elles de commun. […] Parmi les courtisans et gentilshommes dont on a des lettres, deux nous arrêteront comme des types largement représentatifs : Bussy et Saint-Evremond, deux hommes d’esprit dont l’esprit a causé le naufrage, et qui ont vieilli sans emploi, en exil, l’un au fond de la Bourgogne, l’autre en Angleterre : Bussy355, vaniteux et tempérament brutal, esprit fin, souple et sec, sans fantaisie et sans flamme, d’un goût sûr plutôt que large, d’un style net et propre en perfection, railleur, flegmatique et dangereux ; Saint-Evremond356, spirituel et négligé, jouissant de sa nature avec un complet abandon, libertin de mœurs et de croyance, d’un goût original, à la fois Louis XIII et Régence sans rien de Louis XIV, laissant aller son style et dépouillant la préciosité par haine de l’effort et de la prétention.

2358. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. Le théâtre romantique »

Hugo ne s’est pas lassé de répéter ce type qui n’était même pas une expression sincère de sa propre personnalité : le laquais Ruy Blas, le bandit Hernani, l’aventurier Gennaro, le chevalier Otbert, le proscrit Rodolfo, ne sont que des variantes, les deux premières originales, les autres assez décolorées de Didier. […] Nulle préoccupation étrangère au drame sentimental de sa propre existence ne vient modifier ou compliquer son théâtre.

2359. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Ferdinand Fabre  »

C’est que ni leur éducation ni leurs préoccupations habituelles ne sont bien propres à leur faire connaître le train du monde ; puis, leur confiance en Dieu est absolue, et elle ne peut être absolue que si elle est folle, si elle trouve le miracle chose naturelle  Une dernière marque enfin, c’est que cette charité sans bornes est pourtant une charité catholique, pour qui les hommes sont frères moins par une communauté de destinée et une solidarité d’intérêt que parce qu’ils ont été rachetés tous par le Christ ; et cette charité n’a point pour véritable but le soulagement de la souffrance, mais elle poursuit, par le bien qu’elle fait aux corps, la conversion des âmes. […] Ferdinand Fabre a su placer l’abbé Célestin dans les conditions les plus propres à mettre au jour et à montrer sous toutes ses faces cette délicieuse naïveté ecclésiastique.

2360. (1890) L’avenir de la science « XVIII »

Faudra-t-il donc que je cultive mes terres de mes propres mains ? […] Ce qui est horrible c’est que l’individu, de son droit propre et pour sa jouissance personnelle, enchaîne son semblable pour jouir de son travail.

2361. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre X. La littérature et la vie de famille » pp. 251-271

., Mais on dirait qu’à cette maternité revêche il a voulu opposer son propre idéal et travailler ainsi pour sa part à la transformation des mœurs. […] Rousseau, qui fut si dur pour ses propres enfants, qui les abandonna à la charité publique, a fait entrer l’enfant dans notre littérature.

2362. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame de Pompadour. Mémoires de Mme Du Hausset, sa femme de chambre. (Collection Didot.) » pp. 486-511

Rien n’est plus propre à le faire connaître au moral, à cette date, que huit lettres de Mme de Tencin au duc de Richelieu et un fragment de mémoires de la duchesse de Brancas. […] Mon impression pourtant, celle qui résulte aujourd’hui d’une simple vue à cette distance, c’est que les choses pouvaient tourner plus mal, et que Mme de Pompadour, aidée de M. de Choiseul, moyennant la conclusion du Pacte de famille, recouvrit encore de quelque prestige ses propres fautes et l’humiliation de la monarchie et de la France.

2363. (1913) La Fontaine « III. Éducation de son esprit. Sa philosophie  Sa morale. »

J’appelle morale quoi que ce soit qui fait que l’homme préfère — préfère quelquefois ou préfère souvent — l’intérêt d’autrui à son propre intérêt. […] Vous savez qu’il y a, au Mogol, des Follets qui font office de valets, qui tiennent la maison propre, qui ont soin du ménage et quelquefois du jardinage.

2364. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IX. Eugénie de Guérin »

Mais comme, à toute époque, le cercle formé par ces deux genres d’intelligences n’est jamais excessivement étendu, et comme, chaque jour, il tend à se rétrécir davantage dans notre société bourgeoise, occupée de grosses choses et se complaisant dans sa propre vulgarité, l’effet de la publication, risquée par la Revue des Deux-Mondes, n’alla pas plus loin. […] « Quand les hommes de génie, a dit un poëte allemand contemporain, ne souffrent pas pour l’humanité, ils souffrent pour leur propre grandeur, pour leur horreur du vulgaire et leur grande manière d’être. » Il était donc tout simple que Guérin souffrit.

2365. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — La solidarité des élites »

Je ne le ferai qu’avec crainte, pénétré du sentiment de ma propre impuissance à redire ce que fut cet homme. […] Elle obéit certes (et dans ce cas l’ordre est aisé à accomplir, il est rempli presque machinalement) ; mais croyez-vous qu’elle adhère intimement et réellement à l’ordre donné d’une voix brève, sans commentaire, qu’elle ressente personnellement la nécessité et l’intérêt de l’acte accompli, qu’elle le vive pour ainsi dire comme s’il émanait de sa propre personne ?

2366. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Résumé et conclusion »

Et quand cette distance devient nulle, c’est-à-dire quand le corps à percevoir est notre propre corps, c’est une action réelle, et non plus virtuelle, que la perception dessine. […] Ils existent plutôt virtuellement, de cette existence qui est propre aux choses de l’esprit.

2367. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre premier. »

Pourquoi, parmi tant de souvenirs de l’Iliade repris et entraînés dans les flots du poëte thébain, n’a-t-il pas cité, du moins en preuve de l’unité d’Homère, un des plus beaux témoignages qui aient été jamais rendus par le génie à sa propre puissance, pour flétrir l’injustice et faire durer la gloire ? « Vous savez la force meurtrière d’Ajax2, et comment, à une heure avancée de la nuit, se perçant de son propre glaive, il mit un reproche éternel sur tous les enfants des Hellènes venus il Troie ; mais Homère l’a honoré parmi les hommes ; et, en relevant toute la vertu d’Ajax, il a ordonné, de par le rameau de feuillage, au reste du monde, de se plaire toujours à ses chants inspirés ; car, si quelqu’un dit quelque chose en beaux vers, cette parole, une fois proférée, chemine toujours vivante ; et sur la terre et à travers les mers le rayon de la gloire a marché, sans s’éteindre jamais ! 

2368. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre III. »

Dégénérés de leur ancien génie et de leurs propres lois, ils aimèrent, en apprenant la langue et les sciences des Grecs, à y reconnaître la trace d’eux-mêmes et l’altération continue de leur ancienne histoire. […] M. de Maistre, seul de nos jours, est allé plus loin dans cette conjecture, en prenant les mots μοῦσα φιλόσοφος pour le nom propre du philosophe Moïse, et en rapportant aux livres saints des Hébreux ce que Platon disait de sa Muse.

2369. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Note »

Quant au paragraphe qui suit ces trois portraits, et où vous auriez, m’a-t-on dit, trouvé quelque trait offensant, une lecture un peu moins prévenue vous aurait fait voir qu’il ne s’agissait plus des trois portraits précédents, mais de traits nouveaux s’adressant à d’autres caractères qui ne sont qu’à peine indiqués, et auxquels on ne pourrait, à moins d’être bien devin, rattacher aucun nom propre.

2370. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Oberman, édition nouvelle, 1833 »

J’en appelle à vous tous, qui l’avez déterré solitairement, depuis ces trente années, dans la poussière où il gisait, qui l’avez conquis comme votre bien, qui l’avez souvent visité comme une source, à vous seuls connue, où vous vous abreuviez de vos propres douleurs, hommes sensibles et enthousiastes, ou méconnus et ulcérés !

2371. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « PENSÉES » pp. 456-468

La tache de notre propre cœur est comme le miroir du mal en nous : plus elle s’étend, et plus le miroir devient complet.

2372. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la Révolution française — II. La Convention après le 1er prairal. — Le commencement du Directoire. »

Mais la réaction qui continuait les enhardit ; voyant les jacobins poursuivis, immolés sans relâche et sans pitié, ils se hasardèrent à relever leur vrai drapeau et à combattre pour leur propre compte.

2373. (1874) Premiers lundis. Tome II « Henri Heine. De la France. »

Sainte-Beuve ait confondu, dans ses propres souvenirs, avec cet article du National qu’on vient de lire.

2374. (1875) Premiers lundis. Tome III « Profession de foi »

L’idée de liberté, ainsi adoptée dans sa plénitude rejoignait si bien l’autre idée première d’association pacifique et d’unité intellectuelle à établir entre tous les peuples ; elle y ramenait si directement en faisant tomber les douanes de diverse nature qui s’opposaient à la communication libre des nations les unes avec les autres ; le moyen, en un mot, semblait si bien adapté au but, et le but tellement ressortir du moyen, qu’un homme dont toute la vie avait été consacrée à produire cette association et cette unité, Saint-Simon, frappé vivement de l’aspect du journal et de sa tendance définitive, crut un moment qu’il y avait peu à faire pour élever et consacrer l’idée du Globe à sa propre conception.

2375. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre IV. La comédie »

La moitié du rôle de la femme, une détraquée honnête, mais surtout les trois rôles d’hommes qui sont de vivantes expressions de la veulerie contemporaine, chacun avec sa physionomie propre, font de la pièce une des excellentes études de mœurs que nous ayons.

2376. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XI. Trois bons médanistes : Henry Céard, Joris-Karl Huysmans, Lucien Descaves » pp. 145-156

Et en même temps, ses propres sens sont si éduqués que de simples visions, goûts, parfums, etc., l’affectent comme nous feraient des émotions abstraites.

2377. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les petites revues » pp. 48-62

Les nouveaux venus, trop fiers pour acheter à coups de bassesses et de servilisme la place qu’on leur refusait, trop pressés d’agir pour se mettre à la file et attendre que la vieillesse ou la mort leur eût ménagé des vides, résolurent de marcher au combat avec leurs propres armes, créées de toutes pièces.

2378. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les poètes maudits » pp. 101-114

Mais, en dépit de la rigoureuse unité que le volume emprunte de son titre, il reste acquis que chaque trinité, conçue individuelle, existe en soi et détient sa propre signification.

2379. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIV. Rapports de Jésus avec les païens et les samaritains. »

Mais il faut se rappeler que les disciples, dont l’esprit étroit ne se prêtait pas à cette haute indifférence pour la qualité de fils d’Abraham, ont bien pu faire fléchir dans le sens de leurs propres idées les instructions de leur maître.

2380. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre III. Soubrettes et bonnes à tout faire »

» Willy, élève de Stanislas qui oublie ses condisciples vieillis pour Claudine « petit pâtre bouclé » et qui, devant l’objectif du photographe, ne boucle plus la boucle d’un p’tit jeune homme que si c’est Polaire qui offre ses grâces postérieures ; Willy qui ne sut jamais voir aux yeux d’autrui que ses propres vices, m’accusera, j’espère, d’avoir cédé à une nostalgie perverse : je viens de relire deux de ces volumes de contes où Mendès, fameux par ses imitations, se laisse saisir lui-même, fuyant et onduleux seulement comme une amuseuse qui s’amuse.

2381. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — L’orthographe, et la prononciation. » pp. 110-124

Cette difficulté extrême d’articuler le son propre de chaque voyelle, de connoître toute la variété des accens de cette langue, de saisir certains sifflemens de syllabes finales, fait que l’Anglois ne se prononce bien qu’avec beaucoup de peine & d’usage.

2382. (1856) Cours familier de littérature. I « IIe entretien » pp. 81-97

Un cours libre de littérature doit relever et non ravaler à ses propres yeux l’âme humaine.

2383. (1912) L’art de lire « Chapitre VI. Les écrivains obscurs »

Ceux-ci ont précisément besoin de textes obscurs pour y évoluer à l’aise et, pour ainsi parler, de textes creux pour y verser leur pensée propre.

2384. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les Philippiques de la Grange-Chancel »

Marionnette d’une coterie d’abord, il le devint de sa propre vanité, et il se crut, par le bruit et l’éclat, un météore et un tonnerre, mais son éclair était, comme au théâtre, du phosphore, et son tonnerre, des feuilles de fer blanc !

2385. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Rome et la Judée »

C’est lui gâté, affaibli, méconnaissable… D’ordinaire, on est le clair de lune de quelqu’un, quand on est un clair de lune, mais Champagny est son propre clair de lune à lui-même, — et encore est-ce un clair de lune qui n’est pas très clair !

2386. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Louis Nicolardot » pp. 217-228

le Journal de Louis XVI, de la propre main de Louis XVI !

2387. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Tourgueneff »

Il y a plus : quand il écrit pour son propre compte, c’est un esprit froid, dont le style est pâle et manque de relief.

2388. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Dante »

leur propre expression à eux-mêmes avant d’être celle de leur temps, selon l’infatuation de celui-ci.

2389. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Swift »

Exemple de plus de ce manque de respect si fréquent envers son propre génie qu’on paye de plus que de son sang, car on le paye avec son immortalité.

2390. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lessing »

Lessing savait bien ce que Voltaire ne savait qu’à peu près ou mal… Linguiste immense, fort dans les langues anciennes, dont Voltaire avait seulement éraflé le dictionnaire, Lessing lisait dans leur propre langue tous les théâtres de l’Europe moderne, et encore par là il tenait Voltaire, ce menteur et ce pickpocket de Voltaire, qui aurait si bien escroqué la gloire d’autrui, si on l’eût laissé faire.

2391. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « I. Saint Thomas d’Aquin »

Mais enfin le tout de sa petite culture est fort propre.

2392. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Le Conte de l’Isle. Poëmes antiques. »

Dans un temps où la langue serait forte, la Critique punirait peut-être le poète de cette impiété et de cette profanation, mais nous ne sommes plus au temps du grand Corneille où l’on disait Brute et Cassie, et où ce qui doit changer le moins, même les noms propres, devenaient français sous les plumes fières… À présent nous n’avons plus, il est vrai, cette insolence d’orgueil, et ce n’est pas seulement à l’expression étrangère que nous allons tendre des mains mendiantes, c’est à l’inspiration elle-même !

2393. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Gères. Le Roitelet, verselets. »

Le don d’en renvoyer l’harmonie, qui serait la personnalité d’un autre, ne constitue pas la sienne, et c’est la sienne propre que nous devons signaler.

2394. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Ranc » pp. 243-254

On ne le discuta point, on ne l’entrava point, on ne le nia point, et tout de suite il fut classé comme écrivain ; et, sans avoir beaucoup écrit, accepté sur le pied de sa valeur propre.

2395. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Deltuf » pp. 203-214

Que si, au contraire, ce titre d’Aventures parisiennes donné à un livre d’observation d’intérieur, de coin du feu, de sentiment raffiné, est une ironie détournée contre cette société devenue si uniformément plate à force de civilisation, et dans laquelle chacun de nous n’a plus d’autres aventures à courir que dans les deux pouces cachés de son propre cœur, elle est vraiment trop détournée, cette ironie ; c’est là une intention qui ne sera pas aperçue, et l’auteur aura manqué son trait, comme le joueur au billard manque la bille pour avoir voulu la prendre trop fin.

2396. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre IV. Trois espèces de jugements. — Corollaire relatif au duel et aux représailles. — Trois périodes dans l’histoire des mœurs et de la jurisprudence » pp. 309-320

Dans l’état qu’on appelle état de nature, et qui fut celui des familles, les pères de familles ne pouvant recourir à la protection des lois qui n’existaient point encore, en appelaient aux dieux des torts qu’ils souffraient, implorabant deorum fidem ; tel fut le premier sens, le sens propre de cette expression.

2397. (1923) Au service de la déesse

Un optimiste anglais a dit, en propres termes : « J’affirme que, présentement, et à toute heure du jour et de la nuit, tous les hommes sont parfaitement heureux. » Ce n’est pas l’opinion générale. […] Reste à savoir si le triomphe du darwinisme, sorti de son domaine propre et qui envahit toute la pensée humaine, est légitime. […] nous allons en voir de propres. […] Ce qui me fâche est que l’auteur de Chérie, pour écrire ainsi, prétende se ranger sous l’autorité de Joubert, lequel engageait Chateaubriand à « chanter son propre ramage ». […] Ces fileuses à main étaient de vieilles femmes en bonnet blanc, qui suçaient du sucre candi pour pouvoir mouiller leur index droit à une salive sirupeuse propre à bien coller le fil.

2398. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre II. Les couples de caractères généraux et les propositions générales » pp. 297-385

Nos inconnues entraînent par leur présence la présence du caractère, et, à son endroit, elles sont influentes : reconnaissons-les à ce signe propre, et, pour cela, écartons d’abord les particularités qui ne le portent pas. […] Je citerai les propres paroles de sir John Herschel et de Stuart Mill96. […] En effet, laissons là l’expérience, fermons les yeux, et renfermons-nous dans l’enceinte de notre propre esprit ; examinons les termes qui constituent nos propositions ; tâchons de savoir ce que nous entendons par les mots de grandeur et d’égalité, et voyons quelles constructions mentales nous faisons, lorsque nous fabriquons l’idée d’une grandeur égale à une autre. — Ici, il faut distinguer entre les grandeurs artificielles où les unités sont naturelles, et les grandeurs naturelles où les unités sont artificielles. […] Nous admettons ainsi pour A deux mouvements simultanés et différents, l’un qui lui est commun avec tous les autres points de la droite AB, l’autre qui lui est propre. — Remarquez que nous ne savons pas si les choses se passent ainsi dans la nature. […] Par la deuxième, il est admis que le mobile situé en A se transporte de A en B, aussi en une seconde, sans que l’ascension de AB altère en rien sa propre translation.

2399. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviiie entretien. Littérature germanique. Les Nibelungen »

Mais que de qualités il sut tirer de son propre fond ! […] Sîfrit la portait dans son cœur ; elle était pour lui comme sa propre chair. […] Elle croyait qu’il l’avait vaincue par sa propre force ; mais non : c’était un homme plus fort qui l’avait abattue. […] « Une nuit, elle reposait à côté du roi ; il la tenait dans ses bras, suivant sa coutume, car il aimait tendrement la noble femme, et elle lui était comme sa propre chair. […] « — Ta volonté est ma joie, dit alors le roi ; non, jamais, mes propres parents ne m’ont causé un tel plaisir et ils se disposèrent à partir. » Lamartine.

2400. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome II

La salive parotidienne a, comme nous le verrons, des caractères physiques propres à jouer un rôle spécial dans la mastication des aliments qu’elle est surtout destinée à imbiber. […] Nous dirons même que des essais semblables, qui sont, du reste, applicables à certains phénomènes physiologiques, ne sont ici propres qu’à donner des idées fausses des sécrétions salivaires. […] Pour expliquer cette réaction acide, on a supposé qu’il existe dans la bouche deux espèces de sécrétions : 1° une sécrétion propre à la membrane muqueuse de la bouche et ordinairement acide ; 2° la sécrétion salivaire normalement alcaline. […] Cette différence dans le lieu de la modification et de l’absorption de la graisse ayant été constatée sur des chiens et sur des lapins, il était naturel d’en chercher la cause dans quelque disposition propre à l’intestin de ces animaux. […] C’est un chien de berger ; il doit bien résister et se trouve dans les conditions les plus propres à nous assurer un suc pancréatique de bonne qualité (fig. 27).

2401. (1774) Correspondance générale

Il la trouve convaincue de trahison par une lettre écrite de sa propre main, abandonnée de son père, condamnée à mourir, et conduite au supplice. […] On m’a dit, car je n’y étais pas, que la pièce s’était soutenue de ses propres ailes et que le poëte avait enlevé les suffrages en dépit de l’acteur. […] Elle ne tarda pas à avoir en propre un petit pécule, des nippes, des meubles, des effets de toute espèce : elle emprunta, elle prêta de l’argent. […] Pourquoi ne venez-vous pas voir ces choses de vos propres yeux ? […] Cette manière de penser est bien propre à intéresser en sa faveur Mme Necker, que je supplie d’agréer mon respect.

2402. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre I. Les personnages »

Si le roi daigne parler à un courtisan, c’est avec une condescendance hautaine ; encore n’est-ce que par hasard, « quand il a bien dîné. » Toutefois, lorsqu’on déroge ainsi à l’étiquette, on sent le besoin de s’excuser à ses propres yeux. […] 44 Ses prévôts y seraient pour régler la cérémonie et pour ranger l’assistance. » Car il faut que tout, même les choses mortuaires, soient en bel ordre, et dans une telle cour, une douleur non compassée messiérait. « Jugez si chacun s’y trouva. » Le prince sanglota et les courtisans se mouchèrent, chacun avec son geste propre, « en son patois », chacun tâchant de prendre la note du monarque. […] Le rat est maintenant « son cher ami. » Il l’a seul « choyé » entre tous ceux de son espèce, et « à bon droit » ; il l’a chéri « d’une amour singulière », il l’a aimé « comme ses propres yeux. » Je n’en ai pas regret, et j’en rends grâce aux dieux. […] 101 Son défaut propre est de se perdre en maximes générales.

2403. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome xviii » pp. 84-92

Les militaires, fatigués eux-mêmes de donner le spectacle de leur propre sang versé à flots, n’étaient pas les moins pressés d’assister à ces luttes, et de s’y mêler.

2404. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Virgile et Constantin le Grand par M. J.-P. Rossignol. »

Rossignol, que depuis la majestueuse épopée jusqu’à la vive épigramme aiguisée en un simple distique, chaque poëme eut son style et son harmonie, ses mots, ses locutions, son dialecte propre, son rhythme particulier ; et quoique la limite qui séparait deux genres fût quelquefois légère et peu sensible, il n’en fallait pas moins la respecter, sous peine d’encourir l’anathème d’un goût difficile et ombrageux. » L’auteur donne ici de piquants exemples tirés de la métrique des anciens ; le déplacement d’un seul pied suffisait pour changer tout à fait le caractère et l’effet d’un chant.

2405. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Pensées »

— L’imagination pour moi n’a jamais été qu’au service de ma sensibilité propre.

2406. (1874) Premiers lundis. Tome I « J. Fiévée : Causes et conséquences des événements du mois de Juillet 1830 »

Il faut au contraire la concevoir dans toute son étendue, et se dire avec franchise : « Tout mouvement qui affermit l’ordre social par ses propres forces met à découvert la faiblesse des pouvoirs.

2407. (1874) Premiers lundis. Tome II « Des jugements sur notre littérature contemporaine à l’étranger. »

De loin, et d’une langue à l’autre, on n’y regarde pas de si près ; on ne va qu’au gros du roman, ce qui contribue à faire, en propres termes, un jugement fort grossier, comme j’ai remarqué déjà qu’on le disait fort poliment sous Louis XIV.

2408. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — George Sand. Cosima. »

… oui, … j’aurais pu m’éloigner alors, me supprimer… » C’est là l’idée du moins, sinon les propres paroles, une idée de sacrifice, comme dans Jacques, et comme il est très possible qu’un mari tel qu’Alvise la conçoive.

2409. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVI. De l’éloquence et de la philosophie des Anglais » pp. 324-337

Mais il est cependant certain que pour qu’un auteur soit éloquent, il faut qu’il exprime ses propres sentiments ; ce n’est pas son intérêt, mais son émotion ; ce n’est pas son amour-propre, mais son caractère, qui doivent animer ses écrits ; et faire abstraction en écrivant de ce qu’on éprouve soi-même, ce serait aussi faire abstraction de ce qu’éprouve le lecteur.

2410. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Conclusion » pp. 355-370

Je l’avoué, non comme un philosophe qui pose orgueilleusement des bornes à la science humaine,, mais en homme de bonne foi qui pense que la science humaine peut résoudre au moins la question de la critique littéraire, qui confesse sa propre ignorance sans y condamner l’univers, et qui ne demande pas mieux que d’être instruit.

2411. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre II. Distinction des principaux courants (1535-1550) — Chapitre II. Jean Calvin »

Calvin179 doit sans doute à sa ville natale, à sa propre famille les premiers germes de son indépendance religieuse ; il semble qu’Olivetan surtout l’ait détaché de cette église catholique, qui lui portait dès la première jeunesse ses dignités et ses revenus.

2412. (1894) Propos de littérature « Chapitre Ier » pp. 11-22

Mais son propre rythme le guide ; et, d’avoir un instant placé son terme dans la Vie, il devine enfin l’ampleur de la Vie, il voit la Vie et la voit éternelle en ses principes d’activité et d’amour. « Crée donc en la vie, tu créeras en l’éternité, et aime, aime la vie qui continuera ton œuvre ».

2413. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre II. La commedia dell’arte » pp. 10-30

Il nous paraît bien représenter le type dans son caractère général : il a dans son vêtement l’ampleur que Pierrot a conservée jusqu’à nos jours ; il porte le sabre de bois qui resta propre à Arlequin ; il est coiffé du chapeau souple, susceptible de revêtir les formes les plus étranges, rendu célèbre notamment par le fameux pitre Tabarin.

2414. (1890) L’avenir de la science « IX »

Une philo-sophie qui croit pouvoir tout tirer de son propre sein, c’est-à-dire de l’étude de l’âme et de considérations purement abstraites, doit nécessairement mépriser l’érudition et la regarder comme préjudiciable aux progrès de la raison.

2415. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre III. L’analyse externe d’une œuvre littéraire » pp. 48-55

Les opérations que nous venons d’indiquer s’appliquent aussi bien aux vers qu’à la prose ; mais il est évident que les vers prêtent à des remarques nouvelles et qui leur sont propres.

2416. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Odes et Ballades » (1822-1853) — Préface de 1824 »

Avant d’examiner en quoi cette littérature est propre à notre siècle, on demande en quoi elle peut avoir mérité ou encouru une désignation exceptionnelle.

2417. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Abailard, et saint Bernard. » pp. 79-94

On lui manda cette triste nouvelle dans les termes les plus propres à soutenir une épouse désolée, & les plus honorables à la mémoire d’un tel époux.

2418. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Fontenelle, et le père Baltus. » pp. 2-16

Peut-être cet académicien célèbre, d’un esprit si juste, si délicat, si profond, si enchanteur & qui s’étendoit à tout, n’eut-il pas mieux fait, s’il eut écrit lui-même pour sa propre défense.

2419. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Seconde Partie. De l’Éloquence. — Éloquence en général. » pp. 177-192

Ce monarque, qu’on a dit avoir été dédommagé de la qualité de roi, par l’amour qu’il a pour les arts & les lettres, manda ces propres mots à ce rhéteur : Des hommes tels que vous marchent à côté des souverains.

2420. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre huitième. »

Voici un Apologue d’un ton propre à bannir le sérieux du précédent.

2421. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre III. Mme Sophie Gay »

Elle écrivit ces feuilletons charmants du vicomte de Launay, chef-d’œuvre de la légèreté féminine, qui est pour le dix-neuvième siècle ce que les lettres de Mme de Sévigné sont pour le dix-septième, mais Mme Sophie Gay n’eut pas un pareil bonheur… Mme Sophie Gay, qui a fait une montagne de romans que je ne conseillerai à, personne de gravir, et dans lesquels je retrouve, ensemble ou tour à tour, les influences, déteintes ou mélangées, de Picard, de Droz, de Sénancourt, et surtout de Mme de Genlis, non pour la raison, que Mme de Genlis avait, mais pour l’agrément, que Mme de Genlis n’avait pas, Mme Sophie Gay a, comme sa fille, voulu une fois faire son livre de femme, — un livre dans lequel la prétention virile et l’imitation des littérateurs de son temps qui avaient eu du succès, — ces deux choses qui constituent le bas-bleuisme, — pouvaient n’être absolument pour rien, et ce livre, dont le titre frappe au milieu des autres titres de ses œuvres (la Physiologie du Ridicule), prouve au contraire combien chez Mme Gay, le bas-bleu avait rongé la femme, et combien elle était peu propre à traiter un sujet qui demandait plus qu’aucun autre les qualités naturelles à la femme, c’est-à-dire de la grâce sincère et, à force de finesse de la profondeur.

2422. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Pélisson et d’Olivet »

Livet n’est ni un historien, ni un critique, ni même un annotateur en son propre et privé nom.

2423. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Jacques Demogeot » pp. 273-285

Demogeot a mis… ou n’a pas mis de lui-même et de ses propres opinions dans le fragment d’histoire qu’il vient de publier, l’agrément d’un pareil morceau de littérature historique est surtout dans les citations, et ces citations y sont faites avec beaucoup de discernement et de choix.

2424. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution d’Angleterre »

Le magnifique passage sur le grand comte de Clarendon peut s’appliquer tout entier à l’homme éminent qui l’a écrit, en pensant peut-être à sa propre destinée.

2425. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Laïs de Corinthe et Ninon de Lenclos » pp. 123-135

Debay n’est point un moraliste, et, comme on ne se fait pas, à soi-même, ses propres facultés, nous n’avons pas plus à l’en blâmer qu’à l’en absoudre ; mais nous avons cherché vainement dans son livre le sentiment moral dont personne n’est dispensé.

2426. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Francis Wey » pp. 229-241

Originalité solitaire qu’il faut compter à Wey, parce qu’il ne la tient que de la nature propre de son esprit.

2427. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIV. Vaublanc. Mémoires et Souvenirs » pp. 311-322

De toutes les fautes des pouvoirs d’alors égarés, pas une ne lui échappe ; et même celles de son propre parti n’ont jamais eu de juge plus sévère et plus franc.

2428. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Crétineau-Joly » pp. 367-380

Les pires pamphlets, les plus sanglants, les plus terribles, ne sont pas ceux-là qu’écrivent les historiens, auraient-ils la plume de Tacite, mais bien ceux qu’écrivent avec leurs propres actes, dans l’Histoire, les hommes d’État coupables et les mauvais gouvernements !

2429. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Μ. Eugène Hatin » pp. 1-14

Nous ne lui rappellerons pas que l’Histoire est une muse chaste, — ce serait trop, — mais une muse… propre.

2430. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « L’abbé Galiani »

II Ce léger d’esprit, qui se pliait avec la souplesse du chat de Bergame aux choses les plus antipathiques aux esprits légers, était propre à tout, — aussi bien aux sciences qu’à la littérature, — et c’est par la science qu’il commença sa célébrité.

2431. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « IV. Saisset »

Saisset, mais le doux, le rationnel, le tolérant, que les prêtres des temps futurs souffrent auprès d’eux, en attendant leur propre ordination définitive.

2432. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VI. Jules Simon »

Jules Simon, dont il est plus particulièrement question ici, d’ancien anecdotier philosophique, s’est fait moraliste pour son propre compte et presque théologien !

2433. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Chastel, Doisy, Mézières »

On la vit donc, timide, circonspecte, inconséquente, comme tout ce qui n’a pas en soi la fortitude des convictions profondes, cette lumière du cœur qui naît dans la lumière de l’esprit comme le phénix dans ses propres cendres, donner le prix à l’aveuglette de son scepticisme ou de sa philosophie myope, et en cela méconnaître ouvertement l’autorité de l’histoire à laquelle elle avait d’abord fait appel !

2434. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Barthélemy Saint-Hilaire »

Roués retors, à l’âme de Scapin, qui ne voyaient dans toute l’histoire que grands comédiens et petits farceurs, Machiavels qui s’enfilaient sur leurs propres finesses quand ils auraient pu, dans l’état obscur où se trouvait alors l’histoire de l’Islamisme, s’attester la simplicité primitive de Mahomet, de ce beau berger comme David et Moïse, qui rêva quarante ans au désert avant d’entendre la voix de la Vocation s’élever dans son âme, comme un écho de la voix de Dieu, cette simplicité eût été pour eux une chose fermée, qui serait restée strictement fermée à leurs regards, à leurs lunettes et à leurs lorgnons !

2435. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Armand Hayem »

Malheureusement, Hayem l’a énervé de métaphysique… C’est la métaphysique, et la plus mauvaise des métaphysiques, — la métaphysique moderne, qui donne l’égalité des choses apprises à la pensée et au style des hommes qui ont une valeur propre et qui devraient rester personnels, — c’est cette métaphysique générale qui noie tout, inféconde même quand elle a la prétention d’être positive, qui est le défaut capital du livre.

2436. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Henri Murger. Œuvres complètes. »

Alfred de Musset, qui, avant d’être cette perle fine d’originalité, enfin trouvée, d’Alfred de Musset, imita aussi pour son propre compte et beaucoup trop, fut à lord Byron ce qu’est un brillant aide de camp à son général ; mais M. 

2437. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Feuillet de Gonches »

Un homme que Feuillet connaît extrêmement et même qu’il connaît trop, car à le trop connaître et à trop l’aimer, cet enchanteur, on perd de sa propre originalité comme Feuillet a perdu de la sienne, La Fontaine, est souvent un traducteur de l’Antiquité ou de l’Italie, un repétrisseur de fables connues et de contes vulgaires.

2438. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre XI. De la géographie poétique » pp. 239-241

Les noms d’Hercule, d’Évandre et d’Énée passèrent donc de la Grèce dans le Latium, par l’effet de quatre causes que nous trouverons dans les mœurs et le caractère des nations : 1º les peuples encore barbares sont attachés aux coutumes de leur pays, mais à mesure qu’ils commencent à se civiliser, ils prennent du goût pour les façons de parler des étrangers, comme pour leurs marchandises et leurs manières ; c’est ce qui explique pourquoi les Latins changèrent leur Dius Fidius pour l’Hercule des Grecs, et leur jurement national Medius Fidius pour Mehercule, Mecastor, Edepol. 2º La vanité des nations, nous l’avons souvent répété, les porte à se donner l’illustration d’une origine étrangère, surtout lorsque les traditions de leurs âges barbares semblent favoriser cette croyance ; ainsi, au moyen âge, Jean Villani nous raconte que Fiesole fut fondé par Atlas, et qu’un roi troyen du nom de Priam régna en Germanie ; ainsi les Latins méconnurent sans peine leur véritable fondateur, pour lui substituer Hercule, fondateur de la société chez les Grecs, et changèrent le caractère de leurs bergers-poètes pour celui de l’Arcadien Évandre. 3º Lorsque les nations remarquent des choses étrangères, qu’elles ne peuvent bien expliquer avec des mots de leur langue, elles ont nécessairement recours aux mots des langues étrangères. 4º Enfin, les premiers peuples, incapables d’abstraire d’un sujet les qualités qui lui sont propres, nomment les sujets pour désigner les qualités, c’est ce que prouvent d’une manière certaine plusieurs expressions de la langue latine.

2439. (1903) Propos de théâtre. Première série

C’est le propre même du poète. […] C’est le propre de l’éloquence, disait Isocrate, de faire grandes les choses petites. […] On vient de lui dire que Pyrrhus a oublié toute animosité de Grec contre Troyen, qu’il ne se souvient plus ni d’Achille ni de ses propres exploits. […] Il était comme pris entre sa poétique propre et ses goûts de lettré. […] Le Temple a dans le drame son histoire, et comme une vie propre.

2440. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Littré. »

Il n’est jamais plus satisfait que quand il peut revêtir sa propre pensée de l’expression de quelque ancien sage ; et, par exemple, il tire à lui et détourne ici à son objet, en l’accommodant quelque peu, ce beau mot du philosophe Charron traitant de Dieu même : « Le plus expédient est que l’âme s’élève par-dessus tout comme en un vide vague et infini, avec un silence profond et chaste et une admiration toute pleine de craintive humilité. […] Plus on pénètre le sens des écrits d’Hippocrate, et plus l’on s’identifie avec le fond et la forme de ses pensées, plus aussi on comprend l’affinité qu’il a avec les grands esprits ses contemporains, et plus l’on est persuadé qu’il porte comme eux la vive empreinte du génie grec. » Et plus loin, je détache, avec le regret de l’abréger, une belle et bien bonne page encore : « Celse a vanté la probité scientifique d’Hippocrate dans une phrase brillante qui est gravée dans tous les souvenirs : (« Hippocrate, a-t-il dit, a témoigné qu’il s’était trompé dans un cas de fracture du crâne, et il a fait cet aveu avec la candeur propre aux grands hommes, aux riches qui ont pleine conscience du grand fonds qu’ils portent en eux »)… C’est le même sentiment de probité qui lui inspire la plus vive répugnance pour tout ce qui sent le charlatanisme… La haine qu’Hippocrate ressentait et exprimait à l’égard des charlatans est très comparable à la haine qui animait Socrate, son contemporain, contre les sophistes. […] Littré a cru qu’il était lié, attaché à lui par une obligation plus forte, plus étroite, par une de ces obligations qui constituent la relation du disciple au maître ; et, le croyant ainsi, il l’a déclaré, professé et maintenu en toute rencontre, au risque de compliquer sa vie et sa propre action à lui-même, au risque de se nuire dans l’opinion de quelques-uns.

2441. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Théocrite »

Lui qui a si ingénieusement et si justement comparé la suite des âges et des siècles à la vie d’un seul homme, lequel, existant depuis le commencement du monde jusqu’à présent, aurait eu son enfance, sa jeunesse, sa maturité, comment n’a-t-il pas reconnu que cet âge de jeunesse qu’il rejetait dans le passé était en effet le plus propre à un certain épanouissement naturel et riant, dont l’à-propos ne se retrouve plus ? […] Fontenelle a beau définir la maturité actuelle du monde une virilité sans vieillesse, et dans laquelle l’homme sera toujours également capable des choses auxquelles sa jeunesse était propre, il est bien clair que cette capacité s’applique peu aux sentiments, et que rien de tout ce qu’il y a de solide ou de raffiné dans l’homme moderne ne saurait lui rendre une certaine fleur. […] Or écoute, « puisque tu es ami des Muses. » Et après avoir touché légèrement son propre amour pour une certaine Myrto, il en vient à célébrer celui de son ami, le poëte Aratus, passion indigne et cruelle dont il le voudrait voir délivré.

2442. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier. — Correspondance de Chateaubriand (3e partie) » pp. 161-240

Le reproche n’était pas fondé ; son esprit, qui ne songeait qu’à l’attrait, n’était propre ni à l’intrigue ni à l’empire. […] « Après vingt-cinq ans », lui écrivait le jeune Hugo qui s’éblouissait alors de sa propre splendeur, « après vingt-cinq ans, il ne reste que les grandes choses et les grands hommes : Napoléon et Chateaubriand. […] Je vais aller voir un pinson de ma connaissance qui chante quelquefois dans les vignes qui dominent mon toit. » Quel sentiment des tristesses de la nature à un âge qui ordinairement a bien assez de ses propres tristesses, et comme il associe tout au souvenir de son amie !

2443. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (2e partie) » pp. 1-80

L’enfantillage de m’en aller de porte en porte déposer des exemplaires bien reliés de mes premiers travaux pour me concilier des suffrages m’occupa plusieurs jours, et me rendit passablement ridicule à mes propres yeux comme à ceux des autres. […] Est-ce donc la même chose de faire résonner pour ses propres oreilles les nobles et mélodieuses cordes de la harpe, encore que personne ne vous écoute, ou de souffler dans une vile cornemuse, quand toute une multitude d’auditeurs aux longues oreilles devrait vous étourdir de ses acclamations solennelles ?  […] Il fallait finir une fois, finir de mon propre mouvement et sans y être forcé.

2444. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxve entretien. Histoire d’un conscrit de 1813. Par Erckmann Chatrian »

C’est de son propre cœur qu’on tire les larmes. […] — Mais c’est de l’argent, fit Catherine en se retournant et me regardant pour savoir. » Alors je dis : « Est-ce que vous croyez, tante Grédel, que je serais capable de donner une montre en cuivre argenté à celle que j’aime plus que ma propre vie ? […] Mes pieds me faisaient encore un peu mal, mais ce n’était rien en comparaison des autres jours ; quand j’eus mis des bas propres, il me sembla renaître, j’étais solide sur mes jambes, et je me dis en moi-même : « Joseph, si cela continue, tu deviendras un gaillard ; il n’y a que le premier jour qui coûte. » Je m’habillai dans ces heureuses dispositions.

2445. (1890) L’avenir de la science « XVII » p. 357

Mais c’est le propre de la foi d’espérer contre l’espérance, et il n’est rien après tout que le passé ne nous autorise à attendre de l’avenir de l’humanité. […] Il faut partir de ce principe que l’homme ne naît pas actuellement bon, mais avec la puissance de devenir bon, pas plus qu’il ne naît savant, mais avec la puissance de devenir savant, qu’il ne s’agit que de développer les germes de vertu qui sont en lui, que l’homme ne se porte pas au mal par son propre choix, mais par besoin, par de fatales circonstances, et surtout faute de culture morale. […] Le principe représentatif a été bon à soutenir contre les vieux despotismes personnels où le souverain croyait commander de son droit propre, ce qui est bien plus absurde encore.

2446. (1885) La légende de Victor Hugo pp. 1-58

Le roi encensé, il allonge son coup de pied à « cette révolution, qui se plongeait dans tous les crimes et rampait sous tous les maîtres », il insulte Buonaparte, se pâme à la lecture de la proclamation à l’armée du Comte d’Artois, lieutenant-général du royaume, envoyé à Lyon pour arrêter la marche de Napoléon, et il la commente ainsi : « Plus le langage était noble et délicat, moins il était propre à faire impression sur des esprits qui ne semblaient accessibles, qu’à celui de la séduction. […] Ce sont là les propres paroles de Victor Hugo, narrant le sac de sa maison par les pillards de juin. […] Il ne remarque pas qu’il grandit cet individu, au lieu de le rapetisser, en lui attribuant une force d’initiative propre, telle qu’elle serait sans exemple dans l’histoire du monde. » Mais en magnifiant, sans s’en douter, Napoléon le Petit en Napoléon le Grand, en empilant sur sa tête les crimes de la classe bourgeoise, Hugo disculpe les républicains bourgeois qui préparèrent l’empire et innocente les institutions sociales qui créent l´antagonisme des classes, fomentent la guerre civile, nécessitent les coups de force contre les socialistes et permettent les coups d’État contre la bourgeoisie parlementaire.

2447. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre III. De la survivance des images. La mémoire et l’esprit »

Le propre du temps est de s’écouler ; le temps déjà écoulé est le passé, et nous appelons présent l’instant où il s’écoule. […] Vivre dans le présent tout pur, répondre à une excitation par une réaction immédiate qui la prolonge, est le propre d’un animal inférieur : l’homme qui procède ainsi est un impulsif. […] La conception parfaite des genres est sans doute le propre de la pensée humaine ; elle exige un effort de réflexion, par lequel nous effaçons d’une représentation les particularités de temps et de lieu.

2448. (1894) La bataille littéraire. Cinquième série (1889-1890) pp. 1-349

Bien que fort de son droit, se trouvant dans des conditions à être absous par un tribunal, ce mari s’est fait son propre juge et ne s’est pas acquitté. […] C’est, en même temps qu’une fable intéressante, le cadre à ces réflexions si piquantes et si variées qui étaient le propre d’Alphonse Karr. […] et par la liberté j’entends la liberté des autres autant que ma propre liberté, mais ma propre liberté autant que celles des autres. […] Avant de chercher son propre bonheur, n’aurait-elle pas du assurer celui de l’être qu’elle chérissait le plus au monde ? […] Car dire, c’est encore parler sans doute (jamais ça ne doit être chanter) ; mais c’est donner aux phases et aux mots essentiels leur valeur propre, ici passer en effleurant, là, au contraire, peser d’une inflexion de voix ; c’est distribuer les plans et les reliefs, les lumières et les ombres.

2449. (1923) Nouvelles études et autres figures

Les noms propres surtout n’ont jamais eu pour un poète une aussi grande vertu d’incantation. […] Il est le seul poète que cette audace n’ait point desservi, car les Moïse et les Dalila de Vigny, purs symboles, n’ont de biblique que les noms propres. […] Il cherche de plus en plus, selon ses propres termes, la vérité en dehors de l’exactitude et la ressemblance en dehors de la copie conforme. […] Il assiste à sa propre vie comme à un spectacle donné par un autre. […] Jusqu’en 1870, en dépit d’infiltrations germaniques, il avait gardé « un souci de dignité individuelle et un idéal de justice généreuse qui lui étaient propres ».

2450. (1895) La comédie littéraire. Notes et impressions de littérature pp. 3-379

Nadaud avait toutes les qualités et tous les défauts propres à séduire les classes moyennes. […] Et voilà pourquoi les poètes éprouvent tant de difficultés à sortir du domaine qui leur est propre. […] la jeune veuve attribue ces lettres au meilleur ami de Daniel, et se prendra l’adorer… De sorte que ce malheureux Daniel, qui croyait plaider pour son propre compte, se trouve avoir gagné la cause d’autrui. […] Mais celui-ci se prend à son propre piège. […] Seulement, il ne reculait pas devant le mot propre, — ou malpropre, comme on voudra.

2451. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite et fin). »

Mes principes religieux me rendraient plus propre à une solitude des déserts de la Thébaïde qu’à toute autre condition. […] Je n’aurai qu’une physionomie, celle d’un bonhomme et d’un auteur tragique qui n’était pas propre à autre chose.

2452. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre III »

Non seulement il y a des précédents, et en cela le gouvernement ne fera que suivre son propre exemple ; mais telle est sa règle quotidienne, puisqu’il ne vit qu’au jour le jour, à force d’expédients et de délais, creusant un trou pour en boucher un autre, et ne se sauvant de la faillite que par la patience forcée qu’il impose à ses créanciers. […] Le marquis de Mirabeau, apprenant que son fils veut être son propre avocat, ne se console qu’en voyant d’autres, et de plus grands, faire pis encore570. « Quoique ayant de la peine à avaler l’idée que le petit-fils de notre grand-père, tel que nous l’avons vu passer sur le Cours, toute la foule, petits et grands, ôtant de loin le chapeau, va maintenant figurer à la barre de l’avant-cour, disputant la pratique aux aboyeurs de chicane, je me suis dit ensuite que Louis XIV serait un peu plus étonné s’il voyait la femme de son arrière-successeur, en habit de paysanne et en tablier, sans suite, sans pages ni personne, courant le palais et les terrasses, demander au premier polisson en frac de lui donner la main que celui-ci lui prête seulement jusqu’au bas de l’escalier. » — En effet, le nivellement des façons et des dehors ne fait que manifester le nivellement des esprits et des âmes.

2453. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre premier. Mécanisme général de la connaissance — Chapitre II. De la rectification » pp. 33-65

Elle est trop usée, émoussée ; elle n’a plus les angles rentrants et sortants, les extrémités spéciales et propres qui l’emboîtaient derrière ou devant tel autre souvenir distinct. […] Quelque chose vous passe devant les yeux ; c’est alors qu’il faut se jeter dessus, avidement ». — Ma propre expérience s’accorde avec ces remarques.

2454. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXVIIe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (3e partie) » pp. 5-56

Il marche à la tyrannie chez lui-même en allant porter sa propre tyrannie dans le monde ; bientôt il ne saura plus où retrouver le principe de l’autorité des gouvernements légitimes, c’est-à-dire naturels, de la société politique, trop vieux et trop irrespectueux pour le gouvernement patriarcal, trop égalitaire pour le gouvernement des castes, trop sceptique pour le gouvernement théocratique, trop ardent en nouveautés pour le gouvernement des coutumes et des dynasties, trop agité pour le gouvernement constitutionnel et l’équilibre des pouvoirs, trop turbulent pour le gouvernement des républiques, et trop impie envers ses propres droits pour les défendre soit contre l’oppression d’en haut, soit contre l’oppression d’en bas.

2455. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIVe entretien. Mélanges »

Soyez bien persuadé que pas une ligne n’en paraîtra avant d’avoir subi les retouches que ma conscience et vos conseils jugeront propres à enlever à ce livre les dangers qui vous ont frappé. […] Au lieu d’appeler le peuple à la colère et la vengeance contre une partie de lui-même, qui sont les riches et les heureux du siècle, vous le porterez à respecter dans les uns ce qui sera un jour leur propre sort ; vous montrerez à ces riches et à ces heureux du siècle la nécessité de pourvoir par bonne volonté au bien-être physique et moral de toutes les classes.

2456. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre IV. Racine »

Il est d’une autre génération, d’un autre goût ; et dès son début, dès Timocrate, on sent en lui l’authentique et propre esprit de Quinault. […] Assiégeant la princesse qu’il aime, il vient la servir contre ses propres troupes : haï sous son nom, adoré sous son pseudonyme, il dirige l’attaque et la défense.

2457. (1911) Enquête sur la question du latin (Les Marges)

Donnez aux provinces leurs libertés entières, faites-en des états fédérés dans l’État, et vous verrez aussitôt surgir une France nouvelle débarrassée à tout jamais des parasites qui la rongent, une France consciente d’elle-même, de sa valeur propre, des différentes faces de son génie, dans laquelle tous les éléments qui la composent auront la même fierté, et non ce lâche désir, cette attitude de chien battu qu’ils prennent en face de Paris, en face de la centralisation la plus monstrueuse que l’on ait jamais vue. […] Et le jour où le problème serait ainsi résolu, chaque peuple n’étant plus obligé d’apprendre les langues commerciales, se contenterait de sa langue propre comme langue usuelle — en y ajoutant le français comme langue de culture et d’art.

2458. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mendès, Catulle (1841-1909) »

Lorsque, de leur propre poids, les Mères ennemies seront tombées au fond de l’oubli, le Docteur Blanc surnagera. […] L’auteur du Rapport sur le mouvement poétique français , ayant cru devoir, au cours de son travail, se borner à de rares mentions de ses propres ouvrages, il a paru nécessaire de reproduire ici un assez grand nombre des appréciations dont son œuvre a été l’objet.

2459. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre septième. »

Il attaque son propre parti ; il signale les intrigues de Mayenne contre son neveu le duc de Guise, sa politique qui tend toute à sa conservation. […] De là, l’illusion de quelques personnes de notre temps, auxquelles il paraît que le xviie  siècle en a moins su que le xvie sur ce grand sujet, et qu’il y a plus d’idées au temps de Montaigne qu’au temps de Bossuet ; véritable illusion d’optique, si cela peut se dire, dont la cause est une certaine disposition d’esprit propre à notre siècle, et qui lui est commune avec le xvie  siècle.

2460. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Michelet » pp. 167-205

Peintre avant tout (quand il l’était), homme de vulgarisation pittoresque, Michelet n’est qu’un impotent métaphysique qui n’a pas une idée en propre, une initiative qui lui appartienne. […] Michelet, qui a la haute habitude historique pourtant, s’obstine à vouloir faire une histoire qui remplacera Dieu par la légende révolutionnaire, et des fêtes dramatiques comme à Athènes, et dans lesquelles on verra les Eschyle et les Sophocle de l’avenir jouer dans leurs propres drames, inspirés par les héroïsmes de l’avenir !

2461. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Du docteur Pusey et de son influence en Angleterre »

En vertu de l’énergie de son esprit, il a accompli pour son propre compte le mouvement que le parti qu’il a dirigé accomplira un jour pour le sien. […] L’anglo-catholicisme n’est pas une opinion nouvelle, une forme religieuse vivant de son énergie propre : c’est une opinion ancienne infectée d’erreur, mais qui tend à se purifier et à se compléter chaque jour.

2462. (1897) Un peintre écrivain : Fromentin pp. 1-37

Il dit du peintre Van Orley : « Vous trouvez en lui du gothique et du florentin… ici la pâte lourde et cartonneuse, la couleur terne et l’ennui de pâlir sur des méthodes étrangères ; là des bonheurs de palette, et la violence, les surfaces miroitantes, l’éclat vitrifié propres aux praticiens sortis des ateliers de Bruges. » Quelles images neuves, et quelle langue nouvelle aussi, combien forte ! […] Les vues hardies sur la fin propre de l’art, sur le rôle du peintre, sur sa formation, sur la science des couleurs et leur emploi, abondent aussi bien que les mots pittoresques, dans les Maîtres d’autrefois.

2463. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre IV. Conclusions » pp. 183-231

Or, si nous écartons, comme il faut le faire, les groupements artificiels, dus à la conquête brutale (l’empire d’Alexandre, l’empire romain, celui de Napoléon), et si nous constatons qu’il y a des groupes disparus par leurs propres discordes, nous voyons que l’importance des groupes de contiguïté s’en va chronologiquement du plus étroit au plus vaste, de la famille à la tribu, de la tribu à la commune, de la commune à la province, de la province à la nation ; il y a agrégation progressive ; les groupes anciens, tout en subsistant, se subordonnent nécessairement au groupe nouveau, de sorte que, arrivés aujourd’hui à l’étape nationale, nous entrevoyons déjà, par l’union de quelques États, une marche lente vers l’humanité. […] Il faut que les hommes de son temps, résumé de tous les hommes disparus, le remplissent en quelque sorte de leurs idées, de leurs sentiments, de leurs joies, de leurs angoisses ; il faut qu’il porte en lui, comme un héritage sacré, le cœur inquiet de l’humanité, Mais pour donner une forme à ce monde toujours changeant, il faut qu’il le passe au creuset de sa propre douleur.

2464. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Appendice — Mémoires du comte d’Alton-Shée »

Il voulut, comme il disait et faisait toujours en pareil cas, amorcer la suite : il ajouta encore trois lignes de sa propre main, mais il n’eut pas la force de continuer.

2465. (1874) Premiers lundis. Tome II « Alexis de Tocqueville. De la démocratie en Amérique. »

Il n’est pas un des chapitres de ce livre qui n’atteste un des meilleurs et des plus fermes esprits, un des plus propres à l’observation politique, dans cette carrière où l’on compte si peu de pas éclatants et solides depuis l’incomparable monument de Montesquieu.

2466. (1875) Premiers lundis. Tome III « Instructions sur les recherches littéraires concernant le Moyen Âge »

., de tels noms sont bien propres à rehausser la découverte, possible encore, qu’on ferait de quelqu’un de leurs écrits.

2467. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre IV. Des femmes qui cultivent les lettres » pp. 463-479

Tout est dit alors ; on l’abandonne à ses propres forces, on la laisse se débattre avec la douleur.

2468. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre III. Éducation de Jésus. »

L’idiome propre de Jésus était le dialecte syriaque mêlé d’hébreu qu’on parlait alors en Palestine 128.

2469. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XX. Opposition contre Jésus. »

Il n’est disputeur que quand il argumente contre les pharisiens, l’adversaire le forçant, comme cela arrive presque toujours, à prendre son propre ton 936.

2470. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre neuvième. »

Chacun tourne en réalités, Autant qu’il peut ses propres songes.

2471. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 22, que le public juge bien des poëmes et des tableaux en general. Du sentiment que nous avons pour connoître le mérite de ces ouvrages » pp. 323-340

Tous les hommes doivent donc être en possession de donner leur propre suffrage, quand il s’agit de décider si les poëmes ou les tableaux font l’effet qu’ils doivent faire.

2472. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre VIII. Suite du chapitre précédent. De la parole traditionnelle. De la parole écrite. De la lettre. Magistrature de la pensée dans ces trois âges de l’esprit humain » pp. 179-193

Lorsque Pythagore avait deux doctrines, ce n’était point qu’il voulût en celer une, mais il voulait y amener graduellement ses disciples ; ou plutôt il avait appris, dans les initiations, que nul n’est propre à recevoir la vérité, si elle n’est pas déjà en lui.

2473. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre II. Mme Le Normand »

Il est le Bénédictin de sa propre pesanteur, qui se débat laborieusement pour dire quelque chose et être léger, et qui recommence infatigablement le débat.

2474. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VIII. Mme Edgar Quinet »

Un jour, avec l’emphase propre aux Quinet, mari et femme, ce bon ménage en tout, même en amphigouri, elle dit : « Mon mari vient d’écrire, sous les obus, sa Victoire morale » (c’est un article de journal), comme si on écrivait autrement que sous les obus dans ce temps-là, quand on écrivait à Paris !

2475. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXIII. Henry Gréville »

L’Expiation de Saveli vaut beaucoup mieux, sans doute, par certains détails russes qui n’appartiennent pas en propre à l’auteur, et par l’idée même, qui en est le fond ; mais l’exécution en est si pauvre et d’une telle simplicité sans couleur, que cette exécution n’est jamais, un instant, à la hauteur de l’idée qui l’a inspirée.

2476. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les Kœnigsmark »

Philippe de Kœnigsmark est le moins grand acteur de sa propre vie.

2477. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Joseph de Maistre »

— du Joseph de Maistre irréprochable, qui, dégagé de tout alliage, sonne l’or pur de son propre esprit !

2478. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Quitard »

Pour moi, ils sont les produits les plus authentiques et quelquefois les plus éclatants de l’originalité et de la supériorité humaines, — qu’elles aient gardé leurs noms propres ou les aient perdus dans les hasards bêtes de la gloire.

2479. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Taine » pp. 231-243

Taine, que le critique ajoute à son âme naturelle et nationale cinq à six âmes artificielles ou acquises, et que sa sympathie flexible… (rappelez-vous le fameux vers d’Auguste Barbier, qui ne le disait pas de la Critique) : Ouvrant à tout venant et sa jambe et son cœur, l’introduise en des sentiments éteints ou étrangers… « Le meilleur fruit de la Critique — dit encore l’auteur du Carlyle — est de nous déprendre de nous-mêmes, de nous contraindre à faire la part du milieu où nous sommes plongés, de nous enseigner à démêler les objets eux-mêmes à travers les apparences passagères dont notre caractère et notre siècle ne manquent jamais de les revêtir… » Telles sont les propres paroles de M. 

2480. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Ch. de Barthélémy » pp. 359-372

Il a cité l’ingénieuse Lettre sur Saadi à M. de Voltaire, qui raconte à Voltaire, sous le nom de Saadi, sa propre histoire ; et enfin le jugement sur Voltaire, qui n’a pas bougé depuis qu’il fut écrit, et que les admirateurs de Voltaire lui-même sont obligés d’accepter comme le dernier mot sur un homme qui, à force d’esprit, s’est fait prendre frauduleusement pour un génie.

2481. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Maintenon » pp. 27-40

Les idées et les sentiments de ce siècle, si splendidement civilisé, se réfléchissaient et se raffinaient en ces jeunes personnes chez qui l’éducation s’ajoutait à la race, de même que les choses les plus grandes qui nous environnent peuvent se réfléchir dans une des facettes de la pierre précieuse qu’on porte au doigt, tout en s’y opalisant des propres couleurs de la pierre.

2482. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « A. Grenier » pp. 263-276

Cette originalité dans la forme, cherchée et réfléchie, n’appartient pas en propre à Grenier, et modestement il l’avoue.

2483. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « A. Dumas. La Question du Divorce » pp. 377-390

Alexandre Dumas n’a pas ajouté un seul aperçu qui lui appartienne en propre… Une femme, dans un de ses romans (Delphine), madame de Staël, a discuté le pour et le contre de la question du divorce plus éloquemment que M. 

2484. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Mgr Rudesindo Salvado »

Eh bien, le gouvernement d’Angleterre — ce gouvernement qui est tout ce que nous venons d’énumérer — a senti, pour la première fois, — depuis qu’il sème des colonies, c’est-à-dire de la graine de société sur les continents qu’il découvre, — l’insuffisance de sa propre action sur la terre d’Australie et la force très suffisante de quelques prêtres, qui n’ont pour toute ressource que la consigne de Rome et leur crucifix sur le cœur !

2485. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Charles De Rémusat »

Mais le navet n’est guères propre à faire autre chose que des émollients culinaires.

2486. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « La Bible Illustrée. Par Gustave Doré »

. ; et surtout, ce qui est plus que tout cela dans le propre génie de Doré, les grandes mêlées, les foules écrasées ou défaites : le Passage de la mer Rouge, par exemple ; l’armée des Amorrhêens détruite par une grêle de pierres, quoique (grand défaut !)

2487. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Docteur Favrot »

mais les coutumes des peuples et les inventions, en fait de tombes, decette Humanité qui ne sait comment s’adorer et s’éterniser dans ses propres débris, ne sont pas aussi variées qu’on pourrait le croire.

2488. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Charles Baudelaire. Les Fleurs du mal. »

Sa Muse est allée les chercher dans son propre cœur entr’ouvert, et elle les a tirés à la lumière d’une main aussi impitoyablement acharnée que celle du Romain qui tirait hors de lui ses entrailles.

2489. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Milton »

Il mit de sa propre main des Pélion et des Ossa de toutes sortes sur son vrai génie ; il les y entassa ; il les y accumula.

2490. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Ferdinand Fabre »

L’auteur du Tigrane a dû vivre parmi les prêtres à quelque époque que ce soit de sa vie, car il en parle tous les langages comme s’il les avait appris, et il en exprime les faiblesses — plus ou moins honteuses — comme s’il les avait vues de ses propres yeux… Assurément, il a le mépris intelligent du clergé français assez médiocre dans sa masse flottante, ne croyant, là comme ailleurs, qu’à l’individualité et qu’à l’exception ; mais pourtant il ne hait point le prêtre comme un autre observateur et un autre artiste, Stendhal, qui fut aussi toute sa vie magnétisé par le sublime type du prêtre, la seule grande poésie, avec le soldat, qui soit restée à notre misérable temps.

2491. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Catulle Mendès »

Quelque Narcisse qu’on puisse être, et quelque plaisir orgueilleux qu’on prenne à se regarder dans les autres, devenus des miroirs flatteurs, on finit par se fatiguer et par s’inquiéter d’une répercussion si complète et si fidèle de son moi… On est moins soi-même à ses propres yeux.

2492. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Jules Janin » pp. 159-171

On peut être l’Origène de son propre nez, en le coupant ; mais l’angle facial, ce squelette du visage, on le porte forcément toujours devant son cerveau, et pour le faire céder il faudrait écraser le cerveau même !

2493. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Les Mémoires d’une femme de chambre » pp. 309-321

Or cette question n’est point, comme on pourrait le croire, le pamphlet, l’ignoble pamphlet sous forme romanesque que j’ai laissé là, de dégoût, mais le roman lui-même, le genre de roman introduit en ces Mémoires, et qui n’est pas, il faut le dire, beaucoup plus propre que le pamphlet !

2494. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre xi‌ »

Nos soldats ont eu dans le sacrifice et dans la douleur une attitude mentale propre, selon qu’ils étaient animés par telle ou telle croyance, mais chez tous, en dépit de cette coloration que leur donnaient des doctrines contraires, les traits étaient pareils, au point qu’on eût pu les superposer : c’étaient les traits éternels de la France.‌

2495. (1773) Essai sur les éloges « Morceaux retranchés à la censure dans l’Essai sur les éloges. »

Il ne sera pas mis non plus parmi ces grands hommes d’état nés pour être conquérants et législateurs, puissants par leur génie, grands par leur propre force, qui ont créé leur siècle et leur nation, sans rien devoir ni à leur nation ni à leur siècle : cette classe des souverains n’est guère plus nombreuse que la première ; mais il en est une troisième qui a droit aussi à la renommée : ce sont ceux qui, placés par la nature dans une époque où leur nation était capable de grandes choses, ont su profiter des circonstances sans les faire naître ; ceux qui avec des défauts ont déployé néanmoins un esprit ferme et toute la vigueur du gouvernement, qui, suppléant par le caractère au génie, ont su rassembler autour d’eux les forces de leur siècle et les diriger, ce qui est une autre espèce de génie pour les rois ; ceux qui, désirant d’être utiles, mais prenant l’éclat pour la grandeur, et quelquefois la gloire d’un seul pour l’utilité de tous, ont cependant donné un grand mouvement aux choses et aux hommes, et laissé après eux une trace forte et profonde.

2496. (1899) La parade littéraire (articles de La Plume, 1898-1899) pp. 300-117

Francis Jammes, et je tiens, de ma propre autorité, moi qui n’accepte pas l’esthétique de l’auteur d’Un jour, à déclarer ici même que M.  […] L’idée de la poésie affaiblie, épuisée et mélodique, qui est le propre de M.  […] Pourquoi M. de Bouhélier s’occupe-t-il tant de ma « stérile » génération, puisqu’elle gît, selon ses propres termes, « dans l’obscurité la plus profonde » ? […] Il n’est pas un seul de ces écrivains qui, au souvenir de ses propres débuts, ne tienne à faciliter ceux des jeunes apprentis de lettres. […] Dans la nature, transformée en Éden sous l’influence de leur propre bonheur, ils recommenceront avec candeur les antiques exploits d’Ève et d’Adam.

2497. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre II. La perception extérieure et l’éducation des sens » pp. 123-196

Ils ont donc une autre carte qui fait le même office, et comme, avec la vue qu’ils n’ont pas, nous avons toutes les sensations qu’ils ont, il faut bien que, outre la carte visuelle qui nous est propre, nous en possédions une seconde toute différente qui nous est commune avec eux. — Celle-ci a pour éléments les sensations musculaires et tactiles. […] Par conséquent, toutes les fois qu’une pareille sensation se produira, j’imaginerai sa position et son siège. — Il n’en est pas ainsi de l’atlas visuel, et il faut chercher comment les sensations de l’œil, qui, toutes seules, ne semblent propres qu’à nous renseigner sur les couleurs, peuvent, par surcroît, nous faire connaître la distance, l’étendue et la position. […] D’après son propre témoignage, ce fut seulement au bout de quelque temps, et après des promenades au dehors, qu’il se convainquit que ce qui lui avait d’abord paru un volet de diverses couleurs était en réalité un ensemble de choses toutes différentes ; et de même pour beaucoup d’autres objets. […] Seulement il ne faut pas que la conversation contienne beaucoup de noms propres qui lui soient inconnus ; car le mouvement visible des lèvres lui fait deviner les consonnes et non les voyelles.

2498. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre II. Des tragédies grecques » pp. 95-112

Cet enthousiasme de liberté qui caractérise les Romains, il ne paraît pas que les Grecs l’éprouvassent avec la même énergie : ils avaient eu beaucoup moins d’efforts à faire pour conquérir leur liberté ; ils n’avaient point expulsé du trône, comme les Romains, une race de rois cruels, propre à leur inspirer l’horreur de tout ce qui pouvait en rappeler le souvenir.

2499. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre IX et dernier. Conclusion » pp. 586-601

Il doit diriger les lumières par le raisonnement, soumettre le raisonnement à l’humanité, et rassembler dans un même foyer tout ce que la nature a de forces utiles, de bons sentiments, de facultés efficaces, pour combiner ensemble tous les pouvoirs de l’âme, au lieu de réduire l’esprit à combattre contre son propre développement, d’enchaîner une passion non par une vertu, mais par une passion contraire, et d’opposer le mal au mal, tandis que le sentiment de la moralité peut tout réunir.

2500. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre IV »

Les affidés mettaient, au moment du scrutin, des billets tout écrits dans la main des votants, et leur avaient fait trouver, à leur arrivée aux auberges, tous les écrits et avis propres à exalter leurs têtes et à déterminer leur choix pour des gens du palais. » — « Dans la sénéchaussée de Lectoure, une quantité de paroisses et de communautés n’ont point été assignées ni averties pour envoyer leurs cahiers et leurs députés à l’assemblée de la sénéchaussée.

2501. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre IV. La langue française au xviie  »

Le propre ici de la préciosité consiste à ne concevoir d’autre supériorité dans l’usage des mots que de détourner ou de compliquer l’expression : ce qui suppose la subtilité de l’esprit et chez celui qui parle et chez celui qui écoute.

2502. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XV. Les jeunes maîtres du roman : Paul Hervieu, Alfred Capus, Jules Renard » pp. 181-195

Les coins des Sourires pincés, les papillotes de ses Coquecigrues, les éclairs de sa Lanterne sourde, autant de petites pages à relire jusqu’à la mémoire par cœur sans altération du plaisir, puisqu’il n’y a pas là rire émoussable ou surprise de suite éventée, puis aussi qu’il ne fatigue point par les bavardages et les délayages où s’embourbent les vieux comiques, sous prétexte de récit « bon enfant », puis enfin qu’il surveille son style jusqu’à une maîtrise spéciale, menue et propre, excellente à dire ce qu’il veut sans plus.

2503. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XXIV. Conférence sur la conférence » pp. 291-305

Mais ces excellents sujets propres à susciter des articles ingénieux du Mercure de France ou du Mémorial diplomatique ou du Paris-Vélo, que gagneraient-ils être exposés de vive voix ?

2504. (1890) L’avenir de la science « VI »

Ce scrupule a été poussé si loin qu’on a vu des critiques de l’esprit le plus distingué rendre à dessein leur expression incomplète, plutôt que d’employer le mot de l’école, alors qu’il était le mot propre.

2505. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIII » pp. 109-125

C’était un homme de cour ambitieux de grandes places et de grandes occasions de paraître ou de servir ; au reste, fort dépensier, et propre à faire un magnifique seigneur ; aussi opposé par son brillant et par sa jeunesse, à la préciosité, que le duc de Montausier, par la rigidité de son esprit et de son caractère.

2506. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — Les traductions. » pp. 125-144

« La prose, dit-il, ne sçauroit représenter qu’imparfaitement les graces de la poësie ; c’est-à-dire qu’elle ne peut en réprésenter le rythme & la cadence : mais, à cela près, elle peut en représenter parfaitement toutes les graces, en retracer toutes les images & en rendre même toute l’harmonie, par une autre sorte d’harmonie qui lui est propre & qui vaut bien, dans son genre, celle dos vers. » Il soutient que le traducteur en vers & le traducteur en prose font sujets aux mêmes loix ; qu’ils sont aussi astreints à la fidélité l’un que l’autre ; qu’il est aussi ridicule de voir l’un se donner l’essor & perdre de vue son original, que de voir l’autre ramper servilement & ne faire de sa traduction qu’une glose ennuyeuse & littérale.

2507. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VIII »

on nous montre le poing. « Non, affirme-t-on en propres termes, quoi qu’en pense notre critique, les œuvres banales n’ont pas de succès. » Il faut ignorer bien des choses ou être plus distrait que Ménalque, pour mettre en doute une vérité si authentique, qui est tout simplement un fait d’histoire.

2508. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIV. L’auteur de Robert Emmet »

Il est certain que si elle eût moins su, elle aurait moins cité, qu’elle eût été obligée de penser par elle-même, ne tirer un livre de sa propre tête… et, si elle n’avait pu, de se taire.

2509. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVII. Le Retour du Christ. Appel aux femmes ! »

par la fenêtre, mais ils l’ont avalée ; et si elle leur fait mal, c’est qu’ils l’avaient empoisonnée avec leurs propres champignons.

2510. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Louis XIV. Quinze ans de règne »

L’auteur y a concentré heureusement, dans l’intérêt de la vérité historique, agrandie par son propre effort, à lui, et par sa recherche, les deux livres modernes qui ont versé le plus de jour sur les hommes et les faits d’une époque qu’il retrace à sa manière, je veux dire les Mémoires de Mignet sur la succession d’Espagne, et les Mémoires militaires du général Pelet, aussi intéressants que les premiers, mais moins connus.

2511. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Paix et la Trêve de Dieu »

En vertu d’un de ces despotismes grotesques de la bêtise qui sait s’imposer, le mépris mérité par des écrivains aussi inférieurs et aussi plats que les Anquetil et les Dulaure, par exemple, n’empêche nullement leur influence de s’exercer, même sur des esprits moins bas qu’eux ; et c’est ainsi que nous ignorons, tous ou presque tous, notre propre histoire.

2512. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Si j’avais une fille à marier ! » pp. 215-228

philosophe, mais n’ayant pas une philosophie ordonnée et conséquente qui lui soit propre, pas plus qu’écrivain il n’a un talent littéraire tranché et pur, quoiqu’il en ait un, — mais non assez essuyé de ces fumées philosophiques qui en ternissent la couleur quelquefois charmante.

2513. (1880) Goethe et Diderot « Introduction »

Le propre de l’engouement c’est de passer vite ; car, s’il durait, on étoufferait.

2514. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVII. Mémoires du duc de Luynes, publiés par MM. Dussieux et Soulier » pp. 355-368

., et à mettre péniblement, en faisant d’effroyables efforts de mémoire, des noms propres et des dates à toutes ces pauvres notions.

2515. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Th. Carlyle » pp. 243-258

Il est un de ses propres Lilliputiens devant notre grand homme de France.

2516. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Eugène Pelletan » pp. 203-217

Ce livre, qui joue la pensée et qui met des idées générales sous des noms propres, est divisé en quatre parties : le Pape, l’Antipape, l’Empereur et le Citoyen, correspondant à quatre hommes célèbres qui les expriment : de Maistre, Lamennais, Béranger et Lamartine.

2517. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Balzac »

Ce Gaulois et ce Rabelaisien, qui a écrit les Contes drolatiques avec la gaieté de Rabelais, le Titan-Satyre, et qui y a mêlé les choses les plus inconnues à Rabelais, — l’attendrissement et la mélancolie, — était romanesque pour son propre compte, dans la plus noble acception de ce mot charmant : romanesque !

2518. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Alexis de Tocqueville »

C’est toujours ce talent de rapporteur, clair et sans éclat, sur une question mise à l’étude, caractère propre du livre de la Démocratie en Amérique, qui ne fut jamais plus que cela.

2519. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Benjamin Constant »

L’espèce de fatuité qu’on attribuait à l’auteur d’Adolphe, qui, disait-on, avait dans ce roman écrit sa propre histoire et peint la fatigue d’une liaison qui justifiait le mot fameux des Liaisons dangereuses : « on s’ennuie de tout, mon ange », ne tient plus devant le ton de ces lettres écrites par le plus maltraité des hommes qui aiment, — par le plus patito des patiti qui aient jamais existé !

2520. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « G.-A. Lawrence »

Croirait-on, en effet, si le roman de Guy Livingstone ne l’attestait à toutes ses pages, que le vigoureux byronien dont nous venons d’indiquer les parentés intellectuelles avec l’immortel auteur du Don Juan et du Childe Harold, n’a pas eu assez de sa propre personnalité ou même d’indépendance pour s’affranchir du joug qui pèse sur tant d’esprits anglais, je veux parler de cet horrible pédantisme des Universités anglaises, auprès duquel le pédantisme de la nôtre est presque d’une élégance légère, et qui nous gâte jusqu’au génie d’hommes aussi éloquents que le furent Burke et le grand Chatham !

2521. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VII. Vera »

Mais franchement, nous autres chrétiens, qui faisons notre philosophie avec nos Révélations et l’histoire, pouvons-nous tenir grand compte à Hegel et à sa doctrine de cette religion qu’il fait, lui, avec sa propre philosophie ?

2522. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XII. MM. Doublet et Taine »

Il l’est envers Dieu et envers les hommes, — n’admettant que lui-même et sa propre plaisanterie.

2523. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XX. M. de Montalembert »

Légendes, peintures, réfutations, miracles racontés de manière à couper l’insolent sifflet des rieurs, aperçus, domination petite ou grande de l’histoire de quelque côté que ce soit, rien n’appartient en propre et en premier à M. de Montalembert, si ce n’est ce qui appartient toujours à tout homme dans tout livre, — le style qu’il y met.

2524. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXVIII. M. Flourens »

Il est perpétuel de talent, en son propre nom, ce qui vaut bien mieux !

2525. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Athanase Renard. Les Philosophes et la Philosophie » pp. 431-446

» Il faut bien le reconnaître, malgré la tradition badaude des Écoles, malgré les phrases des pédants, dupes de celles qu’ils écrivent, malgré la popularité facile des idées abjectes, qui réussissent toujours, au fond, ce sont de pauvres hommes intellectuels dans l’ordre philosophique que Bacon, — grand de loin, petit quand on s’approche, — Locke, Condillac, Destutt de Tracy, Laromiguière, Cabanis lui-même et Broussais, — tombé de son propre matérialisme à lui dans le matérialisme fantoche de Gall et de ses bosses !

2526. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Victor Cousin »

Destiné à l’enseignement de la philosophie, vivant dès sa jeunesse dans l’accointance des philosophes et dans la préoccupation de leurs études et de leurs influences, il crut, parce qu’il entendait et sentait vivement leurs écrits, que lui aussi aurait le pouvoir d’éjaculer, comme eux, quelque système avec lequel la pensée humaine aurait à se colleter plus tard ; mais, pendant toute sa vie, il put apprendre à ses dépens que la faculté de jouer plus ou moins habilement avec des idées qui ne vous appartiennent pas n’est pas du tout la vraie fécondité philosophique, qui n’a, elle, que deux manières de produire : — par sa propre force, si l’on appartient à la grande race androgyne des génies originaux, — ou en s’accouplant à des systèmes qui ont assez de vie pour en donner à la pensée qui n’en a pas, si l’on n’appartient pas à cette robuste race des génies originaux et solitaires.

2527. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Guizot »

Après s’être condamnées à tant d’épreuves et de souffrances mutuelles, ces deux Églises ont appris, par leur propre expérience, qu’elles ne peuvent se détruire l’une l’autre, et qu’il est dans leur destinée de vivre ensemble sur la face du globe… » Ainsi, selon Guizot, le Christianisme est une chose, et le catholicisme et le protestantisme deux autres choses, sorties de celle-là ; il y a égalité de deux Églises.

2528. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Ernest Hello »

Le pauvre Baudelaire, qu’on faisait souffrir alors jusque dans sa propre originalité, mais qui n’en restait pas moins imperturbablement sûr de la gloire future de son auteur, souscrivit à tout, en frémissant, pour faire passer en France son ballot de génie, n’importe sous quel nom, et il passa sous le nom d’Histoires extraordinaires.

2529. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Marquis Eudes de M*** »

Catholique pour son propre compte, ayant accepté par conséquent le dogme et la tradition catholiques sur la question des influences surnaturelles et l’existence des bons et des mauvais esprits, il a voulu faire pour d’autres que pour lui même la preuve d’un fait auquel il croit, lui, mais que les autres auxquels il s’adresse repoussent et nient.

2530. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Maurice de Guérin »

Les Études de Bernardin avaient été le vase vivant dans lequel il avait commencé de boire le lait des tendresses humaines pour la Nature… Mais, comme l’enfant grandi, qui a essuyé sa ronde bouche rose du lait maternel et qui n’a plus là que son propre souffle à lui, sa virginale haleine, Guérin ne fut plus que Guérin, et il ne resta pas dans les flots de sa chevelure ambroisienne, livrée à tous les vents de ses paysages, une seule des fleurs tombées de ce lilas de Bernardin sous lequel il s’était une minute assis.

2531. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Mme Desbordes-Valmore. Poésies inédites. »

Tout cela pèse trop à leur main, même quand leur force est centuplée par le génie qui leur est propre et qui, pour la force, leur a souvent versé la fièvre, — le terrible génie de l’amour !

2532. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Mme de Girardin. Œuvres complètes, — Les Poésies. »

Ainsi, à ses propres yeux et aux yeux encharmés des hommes de son temps, elle était la réalité dont Mme de Staël avait fait le rêve, et elle était davantage encore, elle était les deux rêves à la fois de Mme de Staël, car elle avait le génie de Corinne et la beauté de Lucile Edgermond.

2533. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Jules Sandeau » pp. 77-90

Il est le Pantin de son propre récit, et ce sont les faits qui le mènent, à tel point que la Critique, qui sait observer et conclure, se demande si les faits du roman sont des inventions sorties de sa tête ou qu’on y a fait entrer en les lui racontant.

2534. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « G.-A. Lawrence » pp. 353-366

Croirait-on, en effet, si le roman de Guy Livingstone ne l’attestait à toutes ses pages, que le vigoureux byronien dont nous venons d’indiquer les parentés intellectuelles avec l’immortel auteur du Don Juan et du Childe-Harold n’a pas eu assez de sa propre personnalité ou même d’indépendance pour s’affranchir du joug qui pèse sur tant d’esprits anglais, je veux parler de cet horrible pédantisme des Universités anglaises, auprès duquel le pédantisme de la nôtre est presque d’une élégance légère, et qui nous gâte jusqu’au génie d’hommes aussi éloquents que le furent Burke et le grand Chatham !

2535. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Gogol. » pp. 367-380

Rien n’entre mieux dans le cœur des hommes que leur propre image qu’on leur rapporte, car jamais ils ne pourront croire que les réfléchir, ce ne soit pas les admirer !

2536. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iv »

De quoi se compose leur trésor propre au service de la patrie ?‌

2537. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXIV. Siècles de barbarie. Renaissance des lettres. Éloges composés en latin moderne, dans le seizième et le dix-septième siècles. »

Elle eut la fermeté d’un moment, qui conçoit et fait de grands sacrifices, et n’eut pas cette fermeté plus rare qui soutient l’âme par sa propre force, quand elle n’est plus animée par les regards et par l’effort même que demande tout ce qui est difficile.

2538. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXV. Avenir de la poésie lyrique. »

Ces belles contrées entre le Danube et la côte d’Asie seront laissées aux races chrétiennes ; Sainte-Sophie sera redevenue chrétienne ; cette ville de Constantinople, cette entrée orientale de l’Europe lâchement livrée aux Turcs il y a quatre siècles, conquise de leurs mains par droit de massacre, restée désormais sous leur joug par droit de stupidité, d’après ce titre d’être la nation la plus propre à posséder inutilement un grand empire, sera rendue à la fédération chrétienne d’Europe.

2539. (1905) Promenades philosophiques. Première série

On pourrait, il est vrai, du point de vue idéaliste, supposer que les sens sont une création de l’individu, un accroissement de sa vie propre, et qu’il différencie, de sa propre initiative, son impression cinématique. […] Ce serait donc une propriété de la matière vivante organisée de se fabriquer des sens et de diversifier par ce moyen sa propre vie. […] La science, cependant, ne peut s’accommoder de ce nihilisme plus propre aux méditations d’un bouddhiste fervent qu’aux travaux biologiques. […] Si même ceux qui détiennent les plus beaux plans de réforme n’osent les appliquer dans leurs propres ouvrages, c’est qu’ils sentent bien que leurs innovations se heurteraient à l’hostilité générale. […] Il veut, et c’est une idée excellente, que l’on francise hardiment tous les noms propres « de quelque langue que ce soit ».

2540. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (2e partie) » pp. 409-488

« “En tout, le paysage du domaine de Virgile était doux, d’une douceur un peu pâle et stagnante, de peu de caractère, peu propre à exciter de sublimes émotions ou à suggérer de vives images ; mais le poète avait vécu de bonne heure au milieu des grandes scènes du Vésuve ; et, même alors, s’il étendait ses courses un peu au-delà des limites de son domaine, il pouvait visiter, d’un côté, le cours grandiose du rapide et majestueux Éridan, ce roi des fleuves, et, de l’autre côté, la Bénaque, qui présente par moments l’image de l’Océan agité. […] « Notons la nuance, mais n’y insistons pas trop et n’exagérons rien ; n’y mettons pas trop de cette vapeur que Virgile a négligé de nous décrire ; car il n’est que Virgile pour être son propre paysagiste et son peintre, et, dans la première des descriptions précédentes (je parle de celle de l’auteur anglais), on a pu le reconnaître, ce n’est, après tout, que la prose du paysage décrit par Virgile lui-même en ces vers harmonieux de la première églogue : Fortunate senex, hic inter flumina nota… « Que tous ceux, et ils sont encore nombreux, qui savent par cœur ces vers ravissants, se les redisent. […] Nous ne serions plus propres à l’animer ou à le contenir, comme à d’autres époques de notre vie.

2541. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXXXIXe entretien. Littérature germanique. Les Nibelungen »

Il transporta à l’autre rive mille nobles chevaliers, ainsi que ses propres guerriers. […] Je veux être mon propre camérier ! […] Il y a assez à dire sur votre propre compte à vous. » Le seigneur Dietrîch parla: « Il ne convient pas à des héros de s’adresser ainsi des injures, comme font les vieilles femmes.

2542. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Figurines »

Parole admirable, digne de Sainte-Beuve ou de Renan, et qui semble la propre devise du dilettantisme, ou même de la philosophie. […] Et l’on sait enfin que, chez l’artiste, la passion s’amortit toujours un peu par la conscience qu’il en prend, et parce que ses propres sentiments lui deviennent « matière d’art ». […] Dans ses dernières années, sa sympathie était évidente pour des doctrines dont la sienne était la négation radicale, et pour les vertus mêmes que sa philosophie était le plus propre à décourager.

2543. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 avril 1885. »

., qu’ils soient en scène, qu’ils parlent ou que seulement on parle d’eux, l’orchestre joue la mélodie qui lui est propre… L’action est simple, presque enfantine ; ce n’est en quelque sorte qu’un prétexte à mélodies… Le quatrième tableau est d’une beauté exceptionnelle, tout à fait à l’emporte pièce… Le Figaro (même signature) constate dans les numéros suivants, avec des félicitations, le succès des Maîtres Chanteurs. […] Par suite, l’influence de l’auteur de la sublime Passion et de tant d’autres immortels chefs-d’œuvre sera toute puissante, car en eux se trouvera résumé l’esprit propre de la nation dans toute son essence. […] Pour André Cœuroy (Wagner et l’esprit romantique, Paris : Gallimard, 1965, p. 254) qui cite Dujardin, il ne fit que se contenter « de développer dans le style qui lui était propre l’analyse de l’Ouverture de Tannhäuser insérée dans le programme que l’ouvreuse lui avait remis » et rien n’est plus étranger à la pensée de Wagner que ce texte qu’il qualifie d’une « des excroissances les plus curieuses de la littérature wagnérienne ».

2544. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. VILLEMAIN. » pp. 358-396

C’est là l’incomparable talent, le génie propre de M. […]  » Il a l’acumen plutôt que le lenitas ou le vis, ce qui, suivant Cicéron, rend surtout propre à enseigner.

2545. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIe entretien. Trois heureuses journées littéraires » pp. 161-221

Il était bon, spirituel, lettré, tendre jusqu’au dévouement pour ceux qu’il aimait, courageux contre l’iniquité, laborieux comme la charité filiale qui gagne le pain d’autrui avec plus d’assiduité que son propre pain. […] Laprade récita d’abord froidement, puis en s’animant peu à peu aux sons de sa propre voix, l’élégie sylvestre sur la mort d’un chêne : Quand l’homme te frappa de sa lâche cognée, Ô roi qu’hier le mont portait avec orgueil, Mon âme, au premier coup, retentit indignée, Et dans la forêt sainte il se fit un grand deuil.

2546. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXIXe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin (2e partie) » pp. 321-384

Que les saints ont raison de mourir avant l’heure, de faire leurs propres obsèques en se retirant du monde ! […] Voilà le mal de voir et de vivre, c’est de laisser toutes les plus jolies choses derrière. » XXXII La pensée de l’état de son frère devenu sa propre pensée la suit toujours.

2547. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIVe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Il la perdit un an avant sa propre mort. […] Quelques esprits secs, jaloux, et chicaneurs avec leurs propres sensations, essayèrent de rire et de nier ; mais les larmes prévalurent, et elles écrivirent le nom de Chateaubriand en traits de splendeur et de feu dans tous les cœurs jeunes.

2548. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

Évidemment, la science ne pouvait exercer une telle séduction que sur des gens très ignorants, car c’est le propre du savoir humain lorsqu’il est raisonnable, de voir les limites de son maigre royaume ; mais pour cette génération française de la fin de l’Empire, la science était une fatalité tangible, une divinité souverainement bienfaisante, qu’il suffisait de toucher pour être sauvé. […] Il y a dix, vingt, trente esprits par le monde que Nietzsche peut rendre heureux, qui trouveront en lui encouragement pour leurs propres pensées, et une consolation de leur solitude spirituelle.

2549. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre I. Le broyeur de lin  (1876) »

Avec cela, le voir tous les jours, plusieurs fois par jour, lui, beau, jeune, toujours occupé de fonctions majestueuses, officiant avec dignité au milieu d’un peuple incliné, ministre, juge et directeur de sa propre âme ! […] L’hallucination allait si loin que ces draps, ces serviettes, elle les marquait aux initiales du vicaire ; souvent même les initiales du vicaire et les siennes propres se mêlaient.

2550. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VI »

Pour le dire en passant, la belle action du colonel gagnerait beaucoup à s’accomplir entièrement à ses propres frais. […] Ah de ma propre main, Je dois, pour te venger… — Jette-toi dans mon sein !

2551. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre X »

Pour commencer et comme il voit que l’officier prend au sérieux ce monde dérisoire peint à la détrempe, il le renfonce dans le troisième dessous, d’un coup de sifflet, comme un machiniste ; il arrache les masques, il dit les noms propres, il s’informe du mari de la veille et de l’amant du lendemain, il lave bruyamment le linge sale de ce lazaret, il pétrifie dans le sel de sa plaisanterie ces femmes de Loth — moins Loth, pourtant ! […] » Elle a raison ; donc l’honnête Olivier se déclare, de son propre aveu, un personnage équivoque qui couvre sa rancune d’un masque d’honneur, et qui ne pourrait se tirer à son avantage d’un examen de conscience sérieusement passé.

2552. (1913) La Fontaine « VI. Ses petits poèmes  son théâtre. »

» Se reprenant un peu, car il hésitait sur ses propres paradoxes, il disait : « Il n’y a pas un poème de La Fontaine qui ne contienne au moins de très beaux vers. » Je lui répondis : « Mais pourtant, pour ce qui est du Quinquina, je crois qu’il serait difficile d’y trouver de beaux vers   Je vous assure, me répondit-il, qu’il y a de très beaux vers dans le poème du Quinquina. » Je me promis, dès ce moment, de relire ce poème, et, dès que j’eus quitté Moréas, je pris mon La Fontaine et m’adressai directement au poème du Quinquina. […] Naguère en m’arrêtant il m’a traité de maître, Le long temps et l’habit me l’ont fait méconnaître : Autant qu’il était propre, aujourd’hui négligé, Je l’ai trouvé d’abord tout triste et tout changé, « Est-ce vous ? 

2553. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Ernest Feydeau » pp. 106-143

Assez intelligent, à ce qu’il semble, pour dépasser, comme les moins grands d’entre nous, les doctrines méprisées présentement du Contrat social, il n’est pas fait pour retourner tête basse à cette doctrine de marcassin et de glands tombés, qu’on appelle le naturalisme, pour appeler d’un nom propre des choses qui ne le sont pas. […] Sainte-Beuve a cité comme une invention piquante et réussie, outre que ce sermon est trop long et fait trop attendre l’effet qu’il amène et que l’on soupçonne, — la déclaration de Clara à Catherine, dans l’église même, que le dominicain qui tonne là-haut contre les vices est son père, — ce sermon, plus littéraire que sacerdotal, n’est pas une invention qui appartienne en propre à M. 

2554. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre VI. L’espace-temps à quatre dimensions »

Lors donc que, dans ce qui va suivre, nous nous servirons de notre Espace à trois dimensions, réellement perçu, pour donner un corps aux représentations d’un mathématicien assujetti à un univers plat, — représentations pour lui concevables mais non pas imaginables, — cela ne voudra pas dire qu’il existe ou puisse exister un Espace à quatre dimensions capable à son tour de réaliser en forme concrète nos propres conceptions mathématiques quand elles transcendent notre monde à trois dimensions. […] Ils ont parlé de leur Espace-Temps en prenant pour accordés les deux points suivants : 1° Toutes les répartitions qu’on y peut faire en espace et en temps doivent être mises au même rang (il est vrai que ces répartitions ne pourront être faites, dans l’hypothèse de la Relativité, que selon une loi spéciale, sur laquelle nous reviendrons tout à l’heure) ; 2° notre expérience d’événements successifs ne fait qu’illuminer un à un les points d’une ligne donnée tout d’un coup. — Ils semblent n’avoir pas tenu compte de ce que l’expression mathématique du temps, lui communiquant nécessairement en effet les caractères de l’espace et exigeant que la quatrième dimension, quelles que soient ses qualités propres, ait d’abord celles des trois autres, péchera par défaut et par excès tout à la fois, comme nous venons de le montrer.

2555. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Alfred de Musset » pp. 364-375

» Ce n’est pas un artiste que Lorenzo, il veut être, lui, un homme d’action, un grand citoyen : il s’est proposé un héroïque dessein, il s’est dit de délivrer Florence, sa patrie, de l’ignoble et débauché tyran Alexandre de Médicis son propre cousin ; et pour y réussir, qu’imagine-t-il ?

2556. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie militaire du général comte Friant, par le comte Friant, son fils » pp. 56-68

Ceux qui ont servi sous le général Friant, questionnés sur ses mérites et qualités, nous ont donné de lui une idée que le colonel Michel, un d’entre eux, a résumée heureusement dans ce vivant portrait : Le général Friant, par son bon naturel, son excellent cœur, ses sentiments généreux, l’humanité qui le dominait, aimait ses soldats, les soignait comme ses propres enfants, vivant de leur vie, se mêlant avec eux, tout en conservant sa dignité ; il en était chéri et estimé au point que pas un d’eux n’eût balancé à sacrifier sa vie pour sauver celui qu’ils appelaient : Notre bon, notre brave père. — (Tombant mortellement blessé près de lui à la Moskowa, un voltigeur lui disait : « Mon général, voilà quatorze ans que je suis sous vos ordres ; votre main, et je meurs content

2557. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — I » pp. 219-230

En décrivant cet état moral à la fois ému et apaisé, ce sentiment de délicieuse convalescence, et en osant ainsi proposer son âme pour exemple en réponse aux questions de son amie, il ne fait, dit-il, que lui rendre le fruit de ses soins et lui montrer son propre ouvrage.

2558. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « À M. le directeur gérant du Moniteur » pp. 345-355

Feydeau l’idée, la situation et le talent, j’avais fait des réserves suffisantes ; mais, me souvenant de nos propres débuts, déjà si lointains, et des accusations, au moins exagérées, dont nous-même fûmes autrefois l’objet de la part d’adversaires prévenus, je ne saurais admettre que le meilleur moyen d’encourager ou de redresser un talent qui se produit soit de lui lancer d’abord un écritoire à la tête ou de le lapider.

2559. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Waterloo, par M. Thiers »

le mot propre !

2560. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Dübner »

Apparemment que l’éditeur de Cicéron estimait beaucoup plus sa propre rhétorique que sa recension du texte cicéronien.

2561. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Appendice — II. Sur la traduction de Lucrèce, par M. de Pongerville »

M. de Pongerville nous l’affirme en propres termes ; il consacre sa préface à démontrer cette vérité ; et, comme M. de Pongerville a passé dix ans à traduire en vers ce poète, quatre ans à retoucher et à revoir sa traduction ; comme il s’occupe en ce moment de retraduire en prose cette traduction en vers, et qu’un volume en a déjà été publié dans la collection Panckoucke, il n’y a pas moyen de récuser un homme aussi compétent sur Lucrèce ; on ne peut que s’incliner et croire.

2562. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Paroles d'un croyant »

Celle-ci est toujours correcte, propre, énergique, quelquefois un peu crue ; il y manque un certain éclat nouveau, et, si j’ose ainsi parler, une sorte de flagrance.

2563. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, romans (1832) »

Les romans ne sont pas l’œuvre propre de la première jeunesse.

2564. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « JULES LEFÈVRE. Confidences, poésies, 1833. » pp. 249-261

Il avait fait ce vers, traduit, je crois, de l’anglais, et qui exprimait bien sa propre nature : La rose a des poisons qu’on finit par trouver !

2565. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres publiées par M. J. Sabbatier. Tome Ier, 1845. » pp. 154-168

Il ressentait profondément l’humiliation de la France, il s’accoutuma à y rapporter et à y mêler la sienne propre, et, comme le monde littéraire lui échappait, il se dit que ce changement devait tenir à une perversion complète des sentiments de tous.

2566. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. Victor Vousin. Cours de l’histoire de la philosophie moderne, 5 vol. ix-18. »

L’inspiration première de l’éclectisme est en effet bien d’accord avec les instincts naturels et le génie propre de M. 

2567. (1874) Premiers lundis. Tome I « Walter Scott : Vie de Napoléon Bonaparte — I »

« Quelques écrivains du premier ordre, Montesquieu lui-même, se sont délassés de leurs profondes recherches sur l’origine des gouvernements, et de leurs abstractions  philosophiques, par des contes impudiques, propres à enflammer les passions. » Serait-ce le piquant badinage des Lettres persanes !

2568. (1874) Premiers lundis. Tome II « Thomas Jefferson. Mélanges politiques et philosophiques extraits de ses Mémoires et de sa correspondance, avec une introduction par M. Conseil. — I »

Une comptabilité compliquée, force emprunts, de gros traitements, de lourds impôts, de perfides poursuites contre la presse sous prétexte de sédition, d’inhospitalières mesures contre les proscrits et les réfugiés de l’Europe, toutes les questions douteuses et indéterminées constamment résolues dans le sens d’un pouvoir central envahisseur ; tels étaient les points essentiels de ce programme monarchique, que l’intérêt populaire trouve partout à combattre, et que la République semblait avoir dérobé par avance à la quasi-légitimité, Voici une lettre de Jefferson, datée de 1796, et qui exprime trop exactement notre propre situation de 1833, pour que nous ne la transcrivions pas en entier : « L’aspect de notre pays est étonnamment changé depuis que vous nous avez quittés.

2569. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

Quoiqu’on ait dit que le type du Giaour et du Corsaire avait été suggéré à Byron par Trelawney lui-même, j’ai peine à croire que ces types profonds ne préexistassent pas dans l’âme du poëte, et qu’ils ne surgissent point immédiatement de l’orage de ses propres pensées.

2570. (1875) Premiers lundis. Tome III « M. Troplong : De la chute de la République romaine »

On trouve bien çà et là dans les auteurs quelques pensées philosophiques, quelques réflexions morales propres à guider le lecteur dans la recherche des causes qui amenèrent la chute de la République ; mais ce ne sont que des aperçus partiels, des données incomplètes, des systèmes vagues et quelquefois superficiels.

2571. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre II. Définition. — Énumération. — Description »

Le sentiment n’existe pas à côté de l’intelligence et de la volonté ; mais il donne en quelque sorte aux idées et aux actes leur couleur propre.

2572. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre II. Le lyrisme bourgeois »

L’incessante fermentation de cette population immense et hétérogène, barons hantant la cour du roi, bourgeois dévots et caustiques, écoliers batailleurs et disputeurs, prompts de la langue et de la main, et tout ce qui s’y remuait d’idées et de passions dans le conflit des esprits et des intérêts, étaient éminemment propres à susciter une poésie sinon très haute, du moins très vivante : le poète, cette fois, ne manqua pas.

2573. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre I. Vue générale du seizième siècle »

Dans ce cadre charmant, elle posait l’idéal de l’homme complet : le corps souple, robuste, gracieux, amené à la perfection de sa force et de sa forme, non plus instrument vil et méprisé, mais valant par soi, ayant droit à l’entière réalisation de ses fins propres et particulières, droit d’être et de jouir le plus possible ; l’âme parfaite aussi en son développement, enrichie de tous les modes d’existence qu’il lui est donné de posséder, s’épanouissant avec aisance dans sa triple puissance d’agir, de comprendre et de sentir.

2574. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre VII. La littérature française et les étrangers »

Notre xviiie  siècle s’est servi et autorisé de l’Angleterre, mais pour abonder en son propre sens, et réaliser ses intimes aspirations.

2575. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « José-Maria de Heredia.. »

Parmi les sonnets de ce premier groupe il en est un bien curieux et bien significatif, où se trahit d’une façon singulière le tour d’imagination propre à M. de Heredia.

2576. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens I) MM. Albert Wolff et Émile Blavet »

Si ce n’est pas la propre croyance ( ?)

2577. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Baudelaire, Œuvres posthumes et Correspondances inédites, précédées d’une étude biographique, par Eugène Crépet. »

Et vous trouverez dans tout le livre de ces vers qui appartiennent en propre à Baudelaire, des vers qu’on n’avait pas faits avant lui, vers singuliers, « troublants », charmants, mystérieux, douloureux… Ce qui a fait tort à Baudelaire, ce sont ses imitateurs, dont la plupart sont intolérables.

2578. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Ernest Renan, le Prêtre de Némi. »

Ce sont justement ceux qui ne conforment leur conduite qu’à leur intérêt propre et tout au plus à l’intérêt de la petite collection d’hommes dont ils font partie, ce sont eux  les Métius et les Liberalis d’aujourd’hui  qui sont des hommes de peu de foi.

2579. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XI. Il Convitato di pietra (le Convié de pierre) » pp. 191-208

Il nous suffit de montrer où elle en arriva sur le théâtre italien, par une conséquence toute naturelle du jeu comique propre à ce théâtre.

2580. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre IX. Les disciples de Jésus. »

La circonstance rapportée dans Jean, XIX, 25-27, semble supposer qu’à aucune époque de la vie publique de Jésus, ses propres frères ne se rapprochèrent de lui.

2581. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVIII. Caractère essentiel de l’œuvre de Jésus. »

On sent à chaque ligne un discours d’une beauté divine fixé par des rédacteurs qui ne le comprennent pas, et qui substituent leurs propres idées à celles qu’ils ne saisissent qu’à demi.

2582. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre III, naissance du théâtre »

La grande lyre dorique, pure et grave, socle harmonieux de la parole, interlocutrice respectueuse du chant qu’elle se gardait de couvrir, haïssait la flûte turbulente, aussi propre à faire extravaguer la joie que le deuil, dont les cris aigus emportaient comme un vent d’orage la voix du chanteur.

2583. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre septième. Les altérations et transformations de la conscience et de la volonté — Chapitre premier. L’ubiquité de la conscience et l’apparente inconscience »

Pourtant la vie propre des parties se manifeste encore, même chez les animaux supérieurs : le cœur enlevé à un éléphant peut continuer assez longtemps de battre ; l’homme décapité dont on blesse la poitrine peut, dans certaines conditions, faire avec le bras un mouvement de défense et porter la main à l’endroit menacé, — mouvement accompagné sans doute de vagues sensations douloureuses dans la moelle épinière.

2584. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre II. Le dix-neuvième siècle »

Mais ce mot, 93 littéraire, avait cela de relativement exact qu’il indiquait, confusément mais réellement, l’origine du mouvement littéraire propre à notre époque, tout en essayant de le déshonorer.

2585. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — L’abbé d’Aubignac, avec Ménage, Pierre Corneille, Mademoiselle de Scudéri et Richelet. » pp. 217-236

La protection déclarée d’un grand ministre, & son propre mérite, procurèrent à l’abbé d’Aubignac l’entrée des meilleures maisons de Paris.

2586. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — M. de Voltaire, et M. de Maupertuis. » pp. 73-93

Le roi de Prusse, impatient d’avoir son oracle à sa cour, lui manda ces propres mots, après la mort de l’immortelle Emilie : « J’ai respecté une amitié de quinze ans avec madame du Châtelet ; mais actuellement je suis une de vos plus anciennes connoissances. » On prétend que, lorsqu’il le sçut en chemin pour la Prusse, il s’écria, je le tiens .

2587. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre IV. La folie et les lésions du cerveau »

Chacun sort de l’autre par la puissance propre de l’âme, et en vertu des lois d’association ou de répulsion qui président au développement des phénomènes moraux.

2588. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre VII. Le langage et le cerveau »

Baillarger, une femme qui ne peut nommer aucun des objets les plus usuels ; elle ne peut même dire son propre nom… Elle a conscience de son état et s’en afflige… Cependant elle prononce une foule de mots incohérents, en les accompagnant de gestes très expressifs qui prouvent que derrière cette incohérence il y a des idées bien déterminées qu’elle veut exprimer61. » M. 

2589. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre II. Mademoiselle Mars a été toute la comédie de son temps » pp. 93-102

Par exemple, je me rappelle ces propres paroles de deux demoiselles errantes qui se promenaient sur le boulevard de Gand, à dix heures du soir : — “Tiens, disait l’une, Polyte nous rapportera des fleurs, la Taglioni danse ce soir !”

2590. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Deshays » pp. 208-217

De là la palette particulière, un faire, un technique propre à chaque peintre.

2591. (1860) Ceci n’est pas un livre « Mosaïque » pp. 147-175

Arrivé à la mienne, se redressant de toute sa taille  : —  Tel que vous me voyez, messieurs, di t-il, je suis le propre fils d’É mile Marco Saint-Hilaire.

2592. (1824) Notice sur la vie et les écrits de Chamfort pp. -

Cependant, comme c’était sous le masque du patriotisme et au nom de la liberté, qu’à cette époque déplorable on persécutait les patriotes et qu’on établissait la tyrannie, Chamfort était assez difficile à atteindre : depuis le commencement de la révolution, il marchait sur la même ligne, et en quelque sorte aux premiers rangs de la phalange républicaine ; nul n’avait supporté, avec plus de courage, et ses propres pertes, et les crises violentes qui avaient agité le corps politique, et cette espèce de réforme, ou si l’on veut ce commencement de dégradation sociale, qui, rangeant l’esprit parmi les objets de luxe, privait nécessairement l’amour-propre d’une partie de ses jouissances.

2593. (1818) Essai sur les institutions sociales « Addition au chapitre X de l’Essai sur les Institutions sociales » pp. 364-381

Je me servirai de ses propres expressions ; seulement je les condenserai un peu, pour qu’elles tiennent moins de place.

2594. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XV. Mme la Mise de Blocqueville »

Mme la Mise de Blocqueville16 I D’habitude, je ne vais pas volontiers, de ma propre impulsion, aux livres des femmes… Je suis si profondément convaincu de l’impossibilité absolue où elles sont de toucher à un grand nombre de sujets, qu’il faut, de deux choses l’une, pour que ma critique s’en occupe : qu’elles aient, à tort ou à raison, leur place, comme les pauvres enfants de Pascal, au soleil de la littérature, ou l’un de ces mérites qui tranchent tout et classent haut… Mme la marquise de Blocqueville, l’auteur des Soirées de la villa des Jasmins, est-elle dans cette alternative ?

2595. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXIV. Mme Claire de Chandeneux »

Je l’ai vu réduit à lui-même, à sa propre essence, sans quoi que ce soit qui pût faire illusion sur son bleu !

2596. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La Chine »

Il y a déjà quelques années, on publia sur la Chine et sur les Chinois un petit livre, avec des dessins lithographies à deux teintes par Cicéri (je crois), et dont l’auteur était un artiste, un monsieur Auguste Borget, qui, au lieu de voyager à Paris dans les grammaires chinoises, avait pris le parti d’aller voir chez eux les Chinois, assis sur leurs propres tapis, et de leur demander, sans trop de cérémonie, une tasse de thé… Balzac, notre grand romancier, qui aimait la Chine comme un roman à écrire, rendit compte de cet ouvrage dans un journal, — une des lucioles du temps à présent éteinte.

2597. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Le Sahara algérien et le Grand Désert »

et qui tend à tourner toutes choses au profit de notre indivisibilité ; car, même les républiques qui devaient nous perdre ne nous ont pas perdus, par une inconséquence qui est le fond même et l’essence du génie français et qui a bien prouvé, à l’éternelle confusion des endoctrineurs de sophismes, que le tempérament des peuples, quand il n’est pas entièrement ruiné par leurs excès, peut les sauver de ce qu’il y a de plus mortel en eux, — du propre venin de leurs idées !

2598. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les civilisations »

Il dit quelque part, dans un langage que n’ont pas connu et qui ferait pâmer de rire Molière et Rabelais : « Le type céphalique propre aux Hellènes du Nord était brachycéphale ; c’est le résultat des races blanches avec les races jaunes.

2599. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « L’idolâtrie au théâtre »

Elle était spirituelle pour son propre compte, elle ne l’est plus qu’à la manière des singes ou des perroquets.

2600. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le comte du Verger de Saint-Thomas »

Avant de légiférer pour son propre compte et en son privé nom, il nous a donné, en abrégé, l’histoire du duel en France, et cette histoire démontre, à toute page, l’inanité des législations quand il s’agit de changer et de modifier des mœurs toujours victorieuses d’elles… L’esprit moderne, dont la manie est de croire aux constitutions, qui sont les créations de son orgueil et que le vent de cette girouette a bientôt emporté, l’esprit moderne, qui méprise si outrageusement et si sottement le passé, apprend ici, une fois de plus, que tout dans l’histoire ne se fait pas de main d’homme, et que les coutumes ne s’arrachent pas du fond des peuples comme une touffe de gazon du sol… Saint-Thomas, dont le bon sens (heureusement pour lui) ne me fait point l’effet d’être dévoré par l’esprit moderne, semble l’avoir compris.

2601. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le colonel Ardant du Picq »

Comme tous les hommes d’idées, et que leurs idées mènent ou entraînent, le colonel Ardant du Picq ne verse jamais dans l’utopie, ce mal ordinaire des penseurs enivrés de leurs propres pensées.

2602. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Rigault » pp. 169-183

Âme petite, talent petit, mais talent propre, nettoyé, cultivé… Nec sordidus auctor !

2603. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Joubert » pp. 185-199

Il n’était qu’un lettré et un critique pour son propre compte, — et c’est pourquoi on le met ici.

2604. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Guizot » pp. 201-215

En histoire, Emerson ne veut pas voir l’homme, du moins dans sa hauteur native et sa propre solidité.

2605. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « L’Angleterre depuis l’avènement de Jacques II »

… Ou bien, par un de ces empêchements qui, pour la Critique, restent toujours un peu des mystères, son talent, jusque-là si éclatant et si large, aurait-il trouvé en lui-même ses propres causes d’appauvrissement ?

2606. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Jacques Cœur et Charles VII »

Ces interprétations de grands esprits qui nous font penser dans le sens de leur propre pensée, ces espèces de torsions imprimées à la réalité toute droite sous la main artiste qui sait la ployer et la reployer à son gré autour d’une idée, étouffent toujours un peu l’histoire et la meurtrissent.

2607. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Histoire des Pyrénées »

Car tout fait important a été déjà exprimé une fois, comme toute idée pensée déjà, — a dit Goethe, — et pour leur redonner cours dans le monde, il faut reproduire l’un et repenser l’autre, sous la forme la plus propre à la personnalité qu’on a.

2608. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Le roi René »

Il ne fut besoin pour l’éclipser que des femmes de sa propre maison.

2609. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « IV. M. Henri Martin. Histoire de France » pp. 97-110

Henri Martin, si druidant qu’il soit, n’a pas été assez hardi pour affronter son propre ridicule en promenant des Druides à travers les temps modernes, quoique pourtant Fénelon, Voltaire, Rousseau, Montesquieu, etc., soient au fond aussi des druides, mais des druides de robe courte comme nous avons des jésuites de robe courte, — d’anciens druides déguisés !

2610. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. H. Wallon » pp. 51-66

De son propre mouvement, M. 

2611. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Le comte de Gobineau » pp. 67-82

Il y a, dans l’Histoire, de terribles personnalités troubles, que le devoir de l’Historien est de clarifier… — Or, — puisqu’il s’agit d’eux dans le cadre du livre de Gobineau, — Alexandre VI, César et Lucrèce Borgia, sont de ces personnalités troubles par elles-mêmes ou troublées, par les autres, et que l’auteur de La Renaissance a replacées dans l’accent juste de leur propre voix.

2612. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Nicolas Gogol »

Rien n’entre mieux dans le cœur des hommes que leur propre image qu’on leur rapporte ; car jamais ils ne pourront croire que les réfléchir, ce ne soit pas les admirer !

2613. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXI. Philosophie positive »

Lui qui a écrit, selon M. de Blignières, ou du moins qui a professé qu’une science n’était jamais que l’étude propre d’une classe de phénomènes dont l’analogie a été saisie, prétend cependant, partout, que l’observation est seule scientifique et décompose l’art d’observer en trois modes irréductibles « l’observation pure, — l’expérimentation, — et la comparaison », ce qui est exclusif de toute analogie, comme preuve, et fait de la méthode soi-disant nouvelle de M. 

2614. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Lacordaire. Conférences de Notre-Dame de Paris » pp. 313-328

C’est le propre des peuples qui tombent, de l’éprouver.

2615. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Dargaud »

À côté de la niaiserie du bon sens pipé et de l’invention d’une bourgeoise sagesse, à côté de cette religion naturelle qui est, au fond, si on creuse bien, toute leur doctrine, ils dressent de grands mots qui font rêver les imaginations sans guide et ils pataugent dans l’Infini… Nous ne savons personne plus digne de pitié que ces espèces de philosophes qui n’ont pas même une philosophie complète pour remplacer une religion qu’ils n’ont plus, — qui prennent les ondoyantes et capricieuses lueurs de leur propre sentimentalité pour la ferme lumière de la conscience et vivent en paix avec eux-mêmes.

2616. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Agrippa d’Aubigné »

dans l’Hécatombe à Diane, en ces cent sonnets qui se suivent sous le titre de Printemps, lequel semble vouloir leur donner l’unité d’un poème, savez-vous combien j’en ai compté dignes d’être repêchés au fil du torrent qui les emporte et mis à l’écart et gardés comme les épaves d’un génie écumant, mais qui s’est noyé dans sa propre écume ?

2617. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Xavier Aubryet et Albéric Second » pp. 255-270

Le roman d’Albéric Second est l’histoire d’un amour né dans les circonstances les plus inattendues et les moins propres, semble-t-il, à faire naître l’amour dans une âme… Il faut être, en effet, un écrivain très sûr et très maître de soi pour avoir osé la circonstance, et l’état mental et physique, et l’immonde costume dans lequel, dès les premières pages de son livre, l’auteur fait apparaître son héros, attaqué de folie, fuyant son cabanon, se présentant, effaré, aux yeux de tout Paris, en plein théâtre Italien, dans la loge de la comtesse Alice.

2618. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Edmond About » pp. 91-105

Edmond About n’avaient que leur propre valeur intrinsèque, la Critique en dirait deux mots à peine : ce serait tout et ce serait assez.

2619. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Paul Féval » pp. 145-158

Féval, à la double nature, aristocratique et artiste, pour cet homme d’esprit qui échappe à tout par le don précieux de l’ironie et n’est dupe de rien, pas même peut-être de ses propres inventions, ne voilà-t-il pas une belle position et une belle gloire que d’être le Dennery du roman et de trôner comme roi d’un genre dans lequel M. 

2620. (1868) Curiosités esthétiques « VIII. Quelques caricaturistes étrangers » pp. 421-436

Au total, c’est un artiste français, c’est Callot qui, par la concentration d’esprit et la fermeté de volonté propres à notre pays, a donné à ce genre de comique sa plus belle expression.

2621. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVI. Des éloges académiques ; des éloges des savants, par M. de Fontenelle, et de quelques autres. »

Comme ils ont un caractère qui leur est propre, et que leur auteur n’a voulu imiter ni Fontenelle ni personne, ils méritent d’être distingués ici comme ils l’ont été par le public.

2622. (1907) Propos de théâtre. Quatrième série

Confier son propre nom au vaisseau qui porte la fortune d’Hugo aux âges futurs ne serait pas du tout une maladresse. […] » Avec la gaîté propre à cet âge charmant. […] Je l’ai trompé avec son propre neveu, Oscar, à Garches, où nous avions loué un petit appartement à l’hôtel des Deux-Cocottes. […] La preuve, c’est qu’ils permettent à peine qu’on parle d’eux, sinon pour les louer ; et n’est-ce pas le propre de la tyrannie ?  […] Dans un petit rôle de collégien qui se dégourdit, M. de Lorcey, c’est-à-dire, m’assure-t-on, le propre fils de M. 

2623. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Lamartine »

Puis, il se fait recevoir membre de l’Académie de Saône-et-Loire (je vous rappelle que ces choses se passent longtemps avant les chemins de fer et quand les provinces avaient, plus qu’aujourd’hui, leur vie propre). […] Puis, beaucoup sont inconscientes : la preuve, c’est qu’il voulut publier ce Manuscrit de sa mère, où il devait pourtant savoir que ses propres Confidences étaient à chaque instant démenties ou redressées. […] Il suffit, pour s’en persuader, de consulter la propre correspondance de Lamartine, comme ont fait MM.  […] Personne n’est seulement capable d’écrire avec vérité sa propre histoire. […] Même dans les Odes je trouve, outre cette fluidité de diction qui est propre à Lamartine, une largeur de mouvement et comme une ampleur de geste qui ne se rencontraient guère dans J.

2624. (1881) Le naturalisme au théatre

Un homme en chair et en os, avec son originalité propre, détonnerait d’une façon criarde au milieu d’une époque légendaire. […] Un salon complètement meublé, avec la vie qui l’échauffe et lui donne une existence propre, pourquoi faire ? […] J’ai senti en lui un homme, un être vivant empli de mes propres passions. […] Je néglige les attaques qu’il dirige contre mes propres œuvres ; c’est là un massacre enfantin, auquel je m’habitue, et dont je souris. […] Voilà qui n’est pas propre ; mais la passion du sectaire est, à la rigueur, une excuse.

2625. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre III. La critique et l’histoire. Macaulay. »

L’objet des mathématiques n’est pas la satisfaction d’une curiosité oisive, mais l’invention de machines propres à alléger le travail de l’homme, à augmenter sa puissance à dompter la nature, à rendre la vie plus sûre, plus commode et plus heureuse. […] Les Anglais, hommes positifs et pratiques, excellents pour la politique, l’administration, la guerre et l’action, ne sont pas plus propres que les anciens Romains aux abstractions de la dialectique subtile et des systèmes grandioses ; et Cicéron jadis s’excusait aussi, lorsqu’il tentait d’exposer à son auditoire de sénateurs et d’hommes publics les profondes et audacieuses déductions des stoïciens. […] En le lisant, on se trouve dans son naturel ; on sent qu’on est fait pour comprendre ; on se sait mauvais gré d’avoir pris si longtemps le demi-jour pour le jour ; on se réjouit de voir sortir et jaillir à flots cette clarté surabondante ; le style exact, les antithèses d’idées, les constructions symétriques, les paragraphes opposés avec art, les résumés énergiques, la suite régulière des pensées, les comparaisons fréquentes, la belle ordonnance de l’ensemble, il n’est pas une idée ni une phrase de ses écrits où n’éclatent le talent et le besoin d’expliquer, qui sont le propre de l’orateur. […] Mais comme usuriers, changeurs, procureurs retors, aucune classe d’êtres ne peut supporter avec eux la comparaison1371… » Ce sont ces hommes et ces affaires qui allaient fournir à Burke la plus ample et la plus éclatante matière d’éloquence, et lorsque Macaulay décrit le talent propre du grand orateur, c’est le sien par contre-coup qu’il décrit.

2626. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre premier. La Formation de l’Idéal classique (1498-1610) » pp. 40-106

Et il faut tenir compte encore de la qualité propre du génie italien. […] De même encore, dans l’Heptaméron, — qui est bien d’ailleurs l’une des lectures les moins divertissantes que l’on sache, — c’est son expérience personnelle de la vie, et des hommes, ce sont même quelquefois ses propres aventures que Marguerite met en anecdotes. […] Il vient de lire ses Tusculanes, et une phrase ou un mot de Cicéron l’ont frappé ; il se souvient à ce propos d’avoir lu quelque chose de semblable dans les Lettres à Lucilius, de Sénèque ; il s’y reporte ; et le voilà contrôlant Cicéron par Sénèque, et tous les deux par sa propre expérience qui tantôt confirme la leur et qui tantôt la contredit. […] Jacquinet : Les Prédicateurs du xviie  siècle avant Bossuet ; et Freppel, Bossuet et l’éloquence sacrée au xviie  siècle]. — Comparaison du Sermon pour la fête de l’Assomption, 1602, avec ceux de Bossuet sur le même sujet. — Utilité de ce genre de comparaisons, et qu’il n’y a pas de plus sûr moyen de caractériser les divers orateurs de la chaire. — Autre comparaison du Sermon pour la veille des Roys avec celui de Fénelon sur le même sujet. — Le Traité de la prédication, et la rhétorique de François de Sales. — « Le souverain artifice est de ne pas avoir d’artifice ». — Si François de Sales a toujours été lui-même fidèle à sa propre recommandation ?

2627. (1884) La légende du Parnasse contemporain

La vanité inhérente à la profession de rimeur suffit à prouver qu’ils n’ont pas été leurs propres parrains. […] Étant hardis et hasardeux et un peu frivoles, comme s’il n’est pas coupable de l’être dans les fraîches années de la vie, cela leur plaît de retrouver chez moi, avec quelque désordre, leurs propres hardiesses, leur amour des hasards, et leurs rêves légers. […] Et, comme j’étais en effet convaincu que mon logis n’avait rien qui portât à la joie et pouvait même en effet conseiller la pendaison, je me sentis, ma fois, fort irrité contre cet inconnu qui se permettait d’entrer si brusquement dans mes propres idées. […] Surtout, ne concluez pas de mes paroles que Leconte de Lisle ait jamais été un de ces génies exclusifs, désireux de créer des poètes à leur image et n’aimant dans leurs fils littéraires que leur propre ressemblance ! […] L’auteur de Kaïn est peut-être, de tous les inventeurs de ce temps, celui dont l’âme s’ouvre le plus largement à l’intelligence des vocations et des œuvres le plus opposées à sa propre nature.

2628. (1890) Le massacre des amazones pp. 2-265

Et Cécile Cassot, ingénieuse philosophe, conclut de ses propres incohérences qu’« il y a une destinée » qui « à un moment donné », fait « entendre sa voix à celui qu’elle veut perdre ou protéger ». […] Ne vous désintéressez pas de votre propre joie. » Il faut « vivre dans une atmosphère de joie ». […] Et ses mains de femme, propres aux petits travaux délicats, se sont souvent efforcées à nouer ces grosses gerbes difficiles, faites de fleurs et d’épines, qu’on appelle des romans historiques. […] cette haine du mot propre qui nous vint des précieuses, ces bas-bleus de la conversation, et qui affadit deux siècles de notre littérature ! […] Mais la femme dira mieux que nous les émotions de l’enfant, et ses propres émotions, et aussi ce qu’il y a de commun à son cœur et au nôtre.

2629. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE VIGNY (Servitude et Grandeur militaires.) » pp. 52-90

J’ai besoin de le répéter, parce que je viens de le relire : vous avez vraiment créé une critique haute qui vous appartient en propre, et votre manière de passer de l’homme à l’œuvre et de chercher dans ses entrailles le germe de ses productions est une source intarissable d’aperçus nouveaux et de vues profondes. […] « 3 novembre 1835. » J’aurais mieux aimé qu’au lieu de s’enfermer dans des réticences et de les confier au papier pour lui seul, De Vigny me fit part de son désaccord avec moi à son propre sujet et me mît à même de le discuter.

2630. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (4e partie) » pp. 429-500

Je suis persuadé que la beauté du plumage et du chant, comme toutes leurs autres qualités spécifiques, leur sont dévolues pour leur propre plaisir et pour leur avantage. […] Mais, dans son action, il est non-seulement double, il est innombrable, il est infini, il est libre parce qu’il est à lui-même sa propre loi ; il n’a de limites que lui-même.

2631. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXVIIIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 65-128

Je ne répondis rien en apprenant que le jugement serait rendu le jour même où j’entrais en service près de Hyeronimo, dans sa propre prison. […] C’est moi, c’est ta sœur, c’est mon père et ma tante, c’est tout ce qui t’aime entré avec moi dans ton sépulcre pour t’arracher à la mort au prix de leur propre vie, s’il le faut, ou du moins pour mourir avec toi si tu meurs.

2632. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXIXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 129-192

Le bon Dieu fera le reste ; nous saurons par lui des nouvelles de nos pauvres parents ; je me ferai connaître de lui avec confiance, il ne me trahira pas de peur de t’enlever ta dernière consolation jusqu’à l’heure suprême ; nous lui ferons transmettre nos propres messages à la cabane, il empêchera ta mère et mon père de désespérer, et, si nous devons mourir, soit l’un ou l’autre, soit tous les deux, il les soutiendra dans leur misère et dans leurs larmes. […] CCXXXII Mais quand ce message muet eut été ainsi échangé entre nous, je ne pus contenir toute ma joie en moi-même, je saisis toute joyeuse la zampogne suspendue au dossier de mon lit ; sans y chercher aucun air de suite, je lui fis rendre en désordre toutes les notes éparses et bondissantes qui répondaient, comme un écho ivre, à l’ivresse désordonnée de ma propre joie : cela ressemblait à ces hymnes éclatantes que l’orgue de San Stefano jette, parfois, les jours de grande fête, à travers l’encens du chœur, et qui sont comme le Te Deum de l’amour !

2633. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIIe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

« Qu’il ne prouve pas, qu’il enchante ; qu’il file la soie de son sein, qu’il pétrisse son miel, qu’il chante son propre ramage, il a son arbre ; qu’a-t-il besoin de citations et de ressources étrangères ?  […] Qui ne se trouve quelquefois accablé du fardeau de sa propre corruption, et incapable de rien faire de grand, de noble, de juste ?

2634. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre I. Le quatorzième siècle (1328-1420) »

La portée d’une œuvre comme celle de Bercheure est incalculable : Tite-Live apparaissant en français, c’est la révélation de l’antiquité authentique sans fables, du moins sans autres fables que celles dont son propre génie l’a parée : c’est la confusion de tous les « romans de Rome la grant », et, à plus ou moins bref délai, la substitution du héros au chevalier dans l’idéal des intelligences cultivées. […] La politique propre d’Oresme tient en ce seul mot : le roi serviteur de l’État ; et cela suffit à prouver, en dépit de tous les contresens qu’il a pu faire dans ses traductions, que pour l’essentiel il a bien lu Aristote.

2635. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « M. Paul Verlaine et les poètes « symbolistes » & « décadents ». »

Aimer Dieu, c’est aimer l’âme humaine agrandie avec la joie de l’agrandir toujours et de mesurer notre propre valeur à cet accroissement — et aussi avec l’angoisse de voir cette création de notre pensée s’évanouir dans le mystère et nous échapper. […] Ces vers impairs, formés de deux groupes de syllabes qui soutiennent entre eux des rapports de nombre nécessairement un peu compliqués (3 et 6 ou 4 et 5 ; 4 et 7 ou 5 et 6 ; 5 et 8), ont leur cadence propre, qui peut plaire à l’oreille tout en l’inquiétant.

2636. (1912) Enquête sur le théâtre et le livre (Les Marges)

On n’a pas perdu le goût des livres ; les romanciers ont perdu, par leur propre faute, des raffinés que décourageaient définitivement des œuvres sans art et sans métier. […] Le snobisme peut faire admettre, par un public servile, prétentieux et abêti, des œuvres littéraires dépourvues de vie et de vérité, des œuvres plastiques propres à révolter le bon sens et le goût.

2637. (1890) L’avenir de la science « XXIII »

Dieu étant l’idéal de chacun, il en convient que chacun le façonne à sa manière et sur son propre modèle. […] Étrange non-sens, car, les formules n’ayant de valeur que par le sens qu’elles renferment, il n’avance à rien de dire : « Je me repose sur le pape ; il sait, lui, ce qu’il faut croire, et je crois comme lui. » On s’imagine que la foi est comme un talisman qui sauve par sa vertu propre ; qu’on sera sauvé si l’on croit telle proposition inintelligible, sans s’embarrasser de la comprendre ; on ne sent pas que ces choses ne valent que par le bien qu’elles font à l’âme, par leur application personnelle au croyant.

2638. (1857) Articles justificatifs pour Charles Baudelaire, auteur des « Fleurs du mal » pp. 1-33

Sa Muse est allée les chercher dans son propre cœur entrouvert, et elle les a tirés à la lumière d’une main aussi impitoyablement acharnée que celle du Romain qui tirait hors de lui ses entrailles. […] De sorte qu’à force d’exprimer ses propres sentiments avec le langage des maîtres, on arrive à penser à leurs frais et finalement à ne plus penser du tout.

2639. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Taine » pp. 305-350

… Leur valeur comme historiens, qui devaient faire avant tout l’Histoire de France et de la Révolution française, a été considérablement diminuée pour avoir dédaigné de regarder dans le fond de cette France qui avait pourtant sa vie propre, comme Paris la sienne… Pour leur peine, ils peuvent s’appliquer maintenant le mot effroyablement prophétique de Blücher : « La France mourra du cancer de Paris » ; car leurs histoires, aussi, en meurent ! […] Il l’a étudié et décrit comme il eût étudié et décrit le système organique de quelque monstrueux cétacé, dans une histoire générale des poissons… Il l’a étudié et décrit, sur ses propres témoignages à lui-même, dans un livre construit avec des milliers de citations et où presque chaque phrase en est une, ce qui fait la plus puissante des nomenclatures, et il a montré, dans le principe de sa vie et dans toutes les manifestations de son action, ce genre de monstre qui a constitué le jacobin dans la bête humaine, à un certain moment de l’histoire de France et de l’humanité, Ce livre incompatible, plus haut que les partis, et qui n’a été écrit pour être agréable à personne, mais pour la vérité, est un peu lourd, on doit le reconnaître, et pour le lire il faut quelque chose de la volonté ferme qu’il a fallu pour l’écrire ; mais cette lourdeur tient à sa force même.

2640. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Crétineau-Joly »

Cette raison supérieure n’est rien moins que l’instruction du pouvoir, que sa propre expérience par l’histoire. […] Une nuit, n’en pouvant plus, succombant sous la fascination de sa propre parole invoquée sans cesse contre lui, Clément XIV signait au crayon, sur une fenêtre du Quirinal, le bref Dominus ac Redemptor noster, qui supprimait l’Institut de Saint-Ignace.

2641. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Alphonse Daudet »

Journaliste, fou des journaux qui l’ont perdu, en ne le rendant propre à rien qu’à faire des journaux, il les ramasse partout sans y voir, les sent, trouve qu’ils sentent bon, lèche leur encre et maudit sa femme qui ne veut pas les lui lire, — une catin bégueule, — parce qu’elle y trouve des inconvenances. […] N’a-t-on pas mis des noms propres jusque sous les Caractères du brave La Bruyère ?

2642. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — I » pp. 93-106

M. de Tocqueville parlait bien et très bien, quoi qu’il en dise ; il lui manquait, pour être décidément un orateur, la force des organes, les moyens d’action, et aussi, selon sa juste expression, il écoutait ses idées, plus qu’il ne les versait ; il avait un geste familier par lequel il s’adressait à lui-même et à son propre front plutôt encore qu’à ses auditeurs : il regardait son idée.

2643. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, Les Chants du crépuscule (1835) »

J’avoue qu’en relisant dans ce volume plusieurs des pièces politiques déjà imprimées, et en lisant pour la première fois certaines pièces politiques et sociales plus nouvelles, j’ai été singulièrement frappé, après le premier éblouissement, de tout ce qu’il y avait chez le poëte de propos délibéré, de thème voulu, de besoin d’assortir le siècle à sa donnée poétique particulière, ou, si l’on veut, d’assortir sa propre poésie à une tournure d’idées de plus en plus ordinaire au siècle.

2644. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET (La Confession d’un Enfant du siècle.) » pp. 202-217

Or, voir une chose en se souvenant d’une autre, soutenir, au sein de sa pensée, des rapports multiples et presque contraires en les dominant, c’est l’opposé du taureau ardent, c’est le propre du jugement humain par excellence ; et, dans l’exécution des œuvres, c’est la gloire de l’art.

2645. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Lettres de Rancé abbé et réformateur de la Trappe recueillies et publiées par M. Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont-Ferrand. »

La république des lettres ne s’étend point dans des lieux où elle sait qu’elle n’a que des ennemis, occupés sans cesse à désapprendre ou à oublier ce que la curiosité leur avoit fait rechercher, pour renfermer toute leur application et leur étude dans le seul livre de Jésus-Christ. » Chaque fois que l’incorrigible Nicaise recommence, Rancé réitère cette profession d’oubli : « Tous les livres dont vous me parlez ne viennent point jusqu’à nous, parce qu’on les regarde comme perdus et comme jetés dans un puits d’où il ne doit rien revenir. » Le bon abbé Nicaise ne se décourage point pourtant ; à défaut des ouvrages d’autrui, il enverra les siens propres, et il espère apprendre du moins ce qu’on en pense.

2646. (1874) Premiers lundis. Tome II « Mémoires de Casanova de Seingalt. Écrits par lui-même. »

Pour qu’il fût plus aisé à Bettine de tenir le jeune Casanova propre, on avait coupé à celui-ci ses cheveux noirs, et on l’avait affublé d’une perruque blonde.

2647. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre III. L’écrivain »

Quand Grandville, pour illustrer La Fontaine, a mis sous nos yeux les bêtes en habits d’hommes, il a tout gâté ; il n’a fait qu’entasser un carnaval vulgaire, propre à faire rire des provinciaux et des épiciers.

2648. (1858) Cours familier de littérature. V « Préambule de l’année 1858. À mes lecteurs » pp. 5-29

Est-ce que ce Cours familier de Littérature, ouvrage essentiellement neutre et étranger aux querelles du temps, ne laisse pas scrupuleusement en dehors toutes ces questions inviolables de conscience et toutes ces questions irritantes de partis qui ne sont propres qu’à distraire, hors de propos, la jeunesse de l’étude des belles œuvres de l’esprit humain ?

2649. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre V. Indices et germes d’un art nouveau — Chapitre II. Signes de la prochaine transformation »

Nous avons vu avec Diderot, avec Rousseau, les thèmes lyriques se constituer : les caractères propres du romantisme, l’infini des aspirations et des lamentations, le goût des larmes, des ruines, de la tristesse et de la mort, la recherche des contrastes touchants ou terribles, tout cela apparaît entre Rousseau et Volney607.

2650. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Baudelaire, Charles (1821-1867) »

Georges Rodenbach Il semble que Baudelaire ait prévu son propre cas quand il écrivit : « Les nations sont comme les familles : elles n’ont de grands hommes que malgré elles ».

2651. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VII. Maurice Barrès et Paul Adam » pp. 72-89

En effet, la confusion première de Cavanon était de mêler son propre plaisir et une organisation d’autrui.

2652. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre IV. Cause immédiate d’une œuvre littéraire. L’auteur. Moyens de le connaître » pp. 57-67

Il existe une maladie propre au biographe : c’est de s’imaginer qu’il a inventé son héros et, partant, d’avoir pour lui un amour paternel, mieux encore, la tendresse aveugle et verbeuse d’une mère qui ne tarit pas sur les moindres faits et gestes, sur les plus insignifiants propos du cher enfant.

2653. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « De la question des théâtres et du Théâtre-Français en particulier. » pp. 35-48

Un public n’est jamais composé de sots, mais de gens de bon sens, prudents, hésitants, dispersés, qui ont besoin le plus souvent qu’on les rallie, qu’on leur dégage à eux-mêmes leur propre avis et qu’on leur indique nettement ce qu’ils pensent.

2654. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Évolution de la critique »

C’est entre ces trois sciences, l’esthétique, la psychologie et la sociologie, qu’il convient de fixer provisoirement le ressort propre de la critique scientifique.

2655. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces diverses — Préface du « Rhin » (1842) »

Dans ces excursions silencieuses, il emporte deux vieux livres, ou, si on lui permet de citer sa propre expression, il emmène deux vieux amis, Virgile et Tacite ; Virgile, c’est-à-dire toute la poésie qui sort de la nature ; Tacite, c’est-à-dire toute la pensée qui sort de l’histoire.

2656. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre V. Les âmes »

Ces hautes âmes, momentanément propres à la terre, n’ont-elles pas vu autre chose ?

2657. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 15, le pouvoir de l’air sur le corps humain prouvé par le caractere des nations » pp. 252-276

Un talent particulier aux françois et dont toute l’Europe les loüe comme d’un talent qui leur est propre spécialement, c’est une industrie merveilleuse pour imiter facilement et bien les inventions des étrangers.

2658. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre IV : Règles relatives à la constitution des types sociaux »

Pour le philosophe, au contraire, tous ces groupements particuliers, que l’on appelle les tribus, les cités, les nations, ne sont que des combinaisons contingentes et provisoires sans réalité propre.

2659. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXII. La comtesse Guiccioli »

la cause de ce déchet d’un livre médiocre, sur un homme de génie, par l’être qui devait trouver, pour en parler, des accents de génie dans le fond de son propre cœur, — oui, la cause de ce triste phénomène d’un livre, écrit et pensé comme l’eût écrit et l’eût pensé le premier bas-bleu venu, c’est uniquement le bas-bleuisme.

2660. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’empire russe depuis le congrès de vienne »

L’empire russe depuis le congrès de vienne5 I Quoique l’influence des circonstances politiques meure au seuil des ouvrages de critique purement littéraire, il n’est pas moins vrai qu un livre sur la Russie publié à cette heure doit attirer vivement l’attention… En effet, solitairement et pour son propre compte, la Russie, ce colosse de neige, sort enfin de l’énigmatique immobilité qu’elle a gardée pendant quarante ans vis-à-vis de l’Europe, et qui était peut-être tout le secret de la fascination qu’elle exerçait sur les esprits.

2661. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Léon XIII et le Vatican »

Ils ne voient pas qu’en frappant l’Église, c’est eux qu’ils frappent, et que ce parricide est leur propre suicide, à eux !

2662. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Fustel de Coulanges » pp. 15-32

Si les Germains, en se culbutant les uns sur les autres, entrèrent dans l’Empire, ils n’y restèrent point par leur propre force, ce qui est le fait et le caractère de toute conquête.

2663. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Le comte de Gasparin » pp. 100-116

Je comprends qu’on soit le disciple d’un homme, mais le disciple de plusieurs sociétés n’est pas aussi aisé à admettre, et quand il ajoute, pour être plus clair et pour n’arriver qu’à être plus vague : « de la partie de ce siècle sur laquelle les Apôtres eux-mêmes ont exercé leur direction », je ne comprends plus du tout, ou plutôt je comprends que le protestant Gasparin n’est que le disciple de lui-même, et que sa foi religieuse ne relève que de sa critique, de la partie du siècle dont il se dit le disciple, et de sa propre interprétation… La personnalité protestante du comte de Gasparin est si large, si forte et si absorbante, qu’il n’admet que celle de Dieu vis-à-vis de la sienne.

2664. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « IX. L’abbé Mitraud »

Ils ne sont pas si bêtes que d’être sceptiques sur leur propre compte !

2665. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Le père Augustin Theiner »

On a de moins les passions et les défaillances propres à toute action humaine, l’aveuglement et le tremblement de l’action même.

2666. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « L’Abbé Prévost et Alexandre Dumas fils » pp. 287-303

Quand Desgrieux tire sa maîtresse de l’hôpital, il la déguise et lui donne sa propre culotte, et il s’en passe, lui !

2667. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Marie Desylles » pp. 323-339

J’avais la prétention d’apprendre au monde, qui n’écoute jamais que ses propres instincts, la publication inespérée des lettres de la dernière princesse de Condé, la sœur du duc d’Enghien… Et je n’appris rien à personne.

2668. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Gustave Flaubert » pp. 61-75

L’intérêt qu’on prend à sa lecture est l’intérêt d’une curiosité poignante et bientôt satisfaite ; mais le charme qui fait revenir au souvenir du livre par la rêverie, le charme qui est le propre de l’art, même dans ses compositions les plus terribles, l’homme de talent qui a écrit Madame Bovary n’en a point la sorcellerie suprême.

2669. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre X. Des Romains ; de leurs éloges, du temps de la république ; de Cicéron. »

Je vous félicite donc, ô vous braves guerriers pendant la vie, ombres sacrées après la mort, je vous félicite de ce que votre valeur ne pourra être mise en oubli, ni par votre siècle, ni par la postérité, puisque le sénat et le peuple vous dressent, pour ainsi dire, de leurs propres mains, un monument immortel ; jamais un tel honneur n’a été rendu à aucune armée, et plût aux dieux que nous pussions faire davantage !

2670. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome I pp. 1-402

C’est à Molière que Béranger a emprunté l’habitude de préférer en toute occasion l’expression propre, l’expression directe, les gens scrupuleux diraient l’expression crue, à la périphrase, à l’expression détournée. […] Or, dans ce genre de hardiesse, dans cette passion pour le mot propre, dans cette haine de la réticence, dans ce dédain pour la pruderie, quel homme s’est jamais montré plus constant que Molière ? […] C’est le peuple, c’est son propre cœur qu’il a interrogé avant de prendre la parole. […] D’après son propre témoignage, ces réminiscences ne sont pas d’ailleurs complètement involontaires. […] Candide est parmi nous le seul livre qui ait quelquefois suggéré au poète anglais de cruelles railleries ; mais ce qui fait l’excellence du poème appartient en propre à Byron et n’appartient qu’à lui.

2671. (1906) Propos de théâtre. Troisième série

Seulement, ont-ils eu un théâtre à eux, un théâtre propre, un théâtre national ? […] Et par conséquent « inutile » est excellemment le mot propre. […] Et alors, plus il y a de vie dans le héros d’une pièce et plus il se produit dans cette pièce de faits propres à faire vivre au héros sa vie avec intensité, plus aussi l’œuvre est dramatique : c’est ce qui fait de la tragédie de Britannicus un drame excellent. […] Elles vivent d’une vie propre qui n’a plus rien à voir, à un moment donné, ni avec les causes efficientes ni avec les causes finales. […] Car le propre de ces passions-là, c’est d’être absorbantes et exclusives et de vouloir posséder tout entier l’objet aimé, sans que celui-ci fasse la plus petite réserve, retienne à son usage quoi que ce soit de lui-même.

2672. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre IV. Addison. »

Il a formé son art en n’étudiant que les monuments de l’urbanité latine ; il a pris le goût des élégances et de finesses, des réussites et des artifices de style ; il est devenu attentif sur soi, correct, capable de savoir et de perfectionner sa propre langue. […] Addison rejette avec dédain la grosse joie physique, le plaisir brutal du bruit et du mouvement907. « Est-il possible », dit-il en parlant des farces et des assauts de grimaces, « que la nature humaine se réjouisse de sa honte, prenne plaisir à voir sa propre figure tournée en ridicule et travestie en des formes qui excitent l’horreur et l’aversion ? […] Elle était enfermée dans une sorte de substance cornée taillée en une infinité de petites facettes ou miroirs, lesquels étaient imperceptibles à l’œil nu ; de telle sorte que l’âme, s’il y en avait une là, avait dû passer tout son temps à contempler ses propres beautés.

2673. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (1re partie) » pp. 313-408

Son intelligence avide, faute d’aliment extérieur, s’attaquait à elle-même, et vivait de sa propre substance comme le malheureux affamé qui se dévore. […] — Ainsi parlait Milton ; et ma voix plus sévère, Par degrés élevant son accent jusqu’au sien, Après lui murmurait : « Oui, la France est ma mère,        Et le poète est citoyen. » « Tout ce discours de Milton révèle assez quelle fièvre patriotique fermentait au cœur de Joseph, et combien les souffrances du pays ajoutèrent aux siennes propres, tant que la cause publique fut en danger. […] Mais indiquer ce but supérieur et divin de l’amitié, c’est assez reconnaître que sa loi suprême est d’y tendre sans cesse, et qu’au lieu de se méprendre à ses propres douceurs, au lieu de s’endormir en de vaines et molles complaisances, elle doit cheminer, jour et nuit, comme un guide céleste, entre les deux compagnons qui vont aux mêmes lieux.

2674. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

La cheminée en pierre, dont le foyer toujours propre atteste qu’il ne s’y fait de feu que dans les grandes occasions, est ornée de deux vases pleins de fleurs artificielles, vieillies et encagées, qui accompagnent une pendule en marbre bleuâtre du plus mauvais goût. […] Un jour vous saurez que l’on est bien plus heureux de leur bonheur que du sien propre. […] Rousseau, Chateaubriand dans Atala ou René, et, de nos jours, Mme Sand, se livrent, sous la forme de roman, au lyrisme le plus transcendant de leur génie, et, pour flatter tantôt l’aristocratie, tantôt la religion, tantôt la démocratie du temps, chantent depuis les licencieuses amours de la Nouvelle Héloïse ou depuis les ridicules systèmes d’éducation de l’Émile, éminemment propre à former un peuple de marquis, jusqu’aux rêveries grotesques et féroces d’un socialisme et d’un communisme qui nient la nature, et qui prétendent refaire le monde mieux que le Créateur.

2675. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Mais lorsque, pour son propre compte, il n’a plus fallu entrer dans des bonshommes connus mais être son bonhomme à soi-même, quand il a fallu sortir quelque chose du fond de soi et le planter dans l’âme d’autrui comme une flèche de feu, quand il a fallu être lyrique enfin, élégiaque, épique, grandiose, idéal en son propre nom, Gœthe est toujours demeuré court, et, qu’on me passe l’insolence de l’expression ! […] Il n’était guères propre qu’à quêter dans tous les buissons de la science, comme le chien de chasse qui évente le gibier… Espèce de lévrier scientifique, qui a fait lever deux ou trois lièvres.

2676. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

que je vais être heureux cet automne, avec du linge blanc, une voiture et un habit sec et propre !  […] « Je relis ma lettre après souper, madame, et je suis honteux de toutes les fautes de style et de français ; mais souvenez-vous que je n’écris pas sur un bureau bien propre et bien vert, pour ou auprès d’une jolie femme ou d’une femme autrefois jolie118, mais en courant, non pas la poste, mais les grands chemins, en faisant cinquante-deux milles, comme aujourd’hui, sur un malheureux cheval, avec un mal de tête effroyable, et n’ayant autour de moi que des êtres étranges et étrangers, qui sont pis que des amis et presque que des parents… » C’est assez de ce début ; on en a plus qu’il n’en faut pour savoir le ton ; Benjamin Constant continue de ce train railleur durant bien des pages, durant quinze grandes feuilles in-folio. […] L’idée que vous me donnez de prendre occasion d’esquisser mes propres idées me paraît excellente. […] Sa condition à Brunswick ne fait que le rejeter plus avant dans le mépris des grands et des cours, mais elle n’est guère propre à lui rendre cette estime sérieuse et ce respect de l’humanité qui est pourtant le fond de toute politique généreuse et libérale. […] Je suis las d’être égoïste, de persifler mes propres sentiments, de me persuader à moi-même que je n’ai plus ni l’amour du bien ni la haine du mal.

2677. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre IV. Shakspeare. » pp. 164-280

Allons, capitaine, —  il faut que nous soyons propres, bien propres, mon capitaine223… —  Venez ici sire page. —  Regardez-moi avec vos yeux bleus. […] Cette manière d’exhorter sa fille au mariage est propre à Shakspeare et au seizième siècle. […] je ne pourrai jamais — plier ma langue à cette allure. « Regardez, monsieur, mes blessures, —  je les ai gagnées au service de mon pays, lorsque — certains quidams de vos confrères hurlaient de peur, et se sauvaient — du son de nos propres tambours269. » Les tribuns n’ont pas de peine à arrêter l’élection d’un candidat qui sollicite de ce ton. […] Il se trouve injuste quand il voit « ces pauvres innocents tachetés, citoyens nés de cette cité déserte, poursuivis sur leurs propres domaines, et leurs hanches rondes ensanglantées par les flèches304. » Rien de plus doux que ce mélange de compassion tendre, de philosophie rêveuse, de tristesse délicate, de plaintes poétiques et de chansons pastorales.

2678. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugo, Victor (1802-1885) »

Je n’en sache pas un dont la pensée lui soit propre ; je n’en sache pas un où il ait crié le premier, du haut du mât de misaine : Italie ! […] Il se devait à sa propre religion ; il était comme un dieu qui serait en même temps son prêtre à lui-même.

2679. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre II, grandeur et décadence de Bacchus. »

Né dans une coupe, comme il convenait à sa destinée, il personnifia la libation des sacrifices mêlée au feu — Agni — qu’elle alimente, ne faisant plus qu’un avec lui, allant porter au ciel, dans un tourbillon d’étincelles, les prières de l’homme et sa propre essence que boiront les dieux. […] Les mythologues disent que, dans la fureur de l’ivresse, il lui arrivait quelquefois de tuer ses propres Ménades : ainsi fit-il dans la bacchanale tragique décrite par Tacite, — Messaline, lasse des prostitutions faciles, dégoûtée des adultères impunis, rêve une énormité rare, un attentat inconnu.

2680. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre II. La poésie lyrique » pp. 81-134

Car je suis l’exilé de ma cité : le seuil Des palais de mon rêve à mon terrestre orgueil          Jeta le dernier anathème ; Je suis l’Aveugle-Roi de mon propre Destin, Le quêteur de l’énigme humaine, le lointain          Et sombre ancêtre de moi-même. […] “Il doit tout savoir, et plus encore, s’écrie le bon Banville, car sans une science profonde, solide et universelle, c’est en vain qu’il chercherait le mot propre et la justesse de l’expression !” 

2681. (1920) Action, n° 3, avril 1920, Extraits

L’homme qui se croit un coq est pour son propre sentiment aussi simple que le coq. Tel autre qui se croit être du verre est pour son propre sentiment un objet aussi fragile que le verre.

2682. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’impératrice Catherine II. Écrits par elle-même, (suite.) »

Ce malheureux homme, au milieu de ses extravagances, avait un vague instinct et un pressentiment de la destinée funeste qu’il se tramait de ses propres mains : il répétait souvent, parlant à la grande-duchesse elle-même, quand elle essayait encore de le ramener à l’idée du rôle qu’il aurait à remplir, « qu’il sentait qu’il n’était pas né pour la Russie, que ni lui ne convenait aux Russes, ni les Russes à lui, et qu’il était persuadé qu’il périrait en Russie. » Les Anciens avaient personnifié l’imprudence et l’aveuglement des hommes sous la figure d’une déesse aussi terrible que Némésis, aussi inévitable que la Destinée elle-même : Atè, c’était son nom.

2683. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Bossuet. Œuvres complètes publiées d’après les imprimés et les manuscrits originaux, par M. Lachat »

Dans toutes ces études que Bossuet embrassa dès son jeune âge, au lieu de tout accorder comme font les panégyristes, je crois qu’il est bon de mesurer d’abord l’étendue et les limites, la capacité qui lui est propre et les bornes qu’elle s’était imposées à elle-même.

2684. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

À son arrivée dans ce monde sulpicien, il lui semblait, au contraire, se retrouver de nouveau dans son milieu de Bretagne ; entouré d’hommes graves, paisibles, de maîtres instruits (l’abbé Gosselin), quelques-uns profonds et très originaux (l’abbé Pinault, par exemple), il commença à développer lui-même sa propre originalité : « L’éducation ecclésiastique, a-t-il dit, qui a de graves inconvénients quand il s’agit de former le citoyen et l’homme pratique, a d’excellents effets pour réveiller et développer l’originalité de l’esprit.

2685. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Frochot, Préfet de la Seine, histoire administrative, par M. Louis Passy. »

Le maître ne voulait que me faire tomber d’une main, et de l’autre main, suivant sa propre expression, me relever plus ou moins ; mais il a appelé pour cela trop de monde.

2686. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LA REVUE EN 1845. » pp. 257-274

Choisir son critique de sa propre main, entendez-vous bien ?

2687. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « HOMÈRE. (L’Iliade, traduite par M. Eugène Bareste, et illustrée par M.e Lemud.) —  second article  » pp. 342-358

On sait qu’Aristarque a quelquefois changé, qu’il a sans doute plutôt adouci ; qu’en cet endroit, par exemple, où Phœnix s’adressant à Achille dans l’espoir de le fléchir se reporte vers sa propre jeunesse et raconte comment lui-même il a failli un jour devenir parricide, le critique avait cru devoir retrancher cette parole terrible, pour ne pas faire tache à ce caractère vénérable qu’il craignait de voir profaner.

2688. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre premier. De la première époque de la littérature des Grecs » pp. 71-94

Les faits, les caractères, les superstitions, les coutumes des temps héroïques étaient singulièrement propres aux images poétiques.

2689. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VIII. De l’éloquence » pp. 563-585

Mais, de nos jours, tant d’hommes craignaient de se livrer à la morale, de peur de la trouver accusatrice de leur propre vie !

2690. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre VII. Induction et déduction. — Diverses causes des faux raisonnements »

Il ne faut pas, dans un raisonnement, se fonder, à moins d’une nécessité absolue, sur les décisions paradoxales du sens propre, mais sur les croyances générales du sens commun, quand même on aurait des raisons de douter ou de nier sur ce qu’il affirme.

2691. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre II. La critique »

Puis — comme, pour obtenir le grossissement des faits sans lequels l’observation, partant l’explication auraient été impossibles, Taine recueillait les cas anormaux, singuliers, extrêmes, somnambulisme, hypnotisme, hallucination, aliénation mentale, — nos littérateurs ont estimé que le propre objet du roman sérieux était le moi détraqué, jamais le moi normal, et qu’il n’y avait point de psychologie sans névrose.

2692. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gautier, Théophile (1811-1872) »

Pour parler dignement de l’outil qui sert si bien cette passion du Beau, je veux dire de son style, il ne faudrait jouir de ressources pareilles, de cette connaissance de la langue qui n’est jamais en défaut, de ce magnifique dictionnaire dont les feuillets, remués par un souffle divin, s’ouvrent toujours juste pour laisser jaillir le mot propre, le mot unique, enfin de ce sentiment de l’ordre qui met chaque trait et chaque touche à sa place naturelle et n’omet aucune nuance.

2693. (1766) Le bonheur des gens de lettres : discours [graphies originales] « Le Bonheur des gens de lettres. — Premiere partie. » pp. 12-34

Ne nous étonnons pas si le génie est singuliérement ami de la liberté, il a en horreur le despotisme, il redoute ses caprices & ses absurdités ; il lui faut des objets qui puissent nourrir & fortifier sa propre élevation ; voilà pourquoi il a fleuri sous le Ciel pur de la Grece, & qu’il a fui ces Etats où un seul homme est tout, & où par conséquent tout le reste est vil(b).

2694. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre premier. La critique et la vie littéraire » pp. 1-18

Mais l’autre avait tort aussi bien, et ses propres articles le condamnaient : sans doute la vie littéraire n’était pour lui qu’un prétexte à causeries d’histoire et mœurs, mais tout de même lui advenait-il de parler des livres et, bon gré mal gré, de les juger, soit de leur assigner non leur valeur absolue (ce qui n’a pas de sens), mais celle qu’ils prenaient à ses yeux.

2695. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Bossuet, et Fénélon. » pp. 265-289

La lecture en parut édifiante, & propre à une dévotion tendre.

2696. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — I. La Poësie en elle-même. » pp. 234-256

Ils maintiennent la poësie assez riche de son propre fonds, assez abondante par elle-même pour fournir à l’imagination, à l’enthousiasme, à ce feu rapide & divin qui décèle le génie.

2697. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre VI. Les localisations cérébrales »

On aurait donc dû se dispenser de ces arguments, qui, outre leur faiblesse intrinsèque, ont un grand inconvénient : c’est que si à un jour donné la science venait à démontrer la doctrine des localisations (ce qui n’a rien d’impossible), le spiritualisme se trouverait battu par ses propres armes.

2698. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre II. Des livres de géographie. » pp. 5-31

La destinée de l’homme est d’être trompé sur ce qu’il ne voit pas de ses propres yeux.

2699. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Jules Janin » pp. 137-154

Nous chargeons le cercueil qui l’emporte d’une masse de fleurs qui ne se flétriront pas, car ce sont des fleurs de rhétorique, — des fleurs en papier, — et l’homme est si dupe de ses propres simagrées qu’on met à cela une espèce de générosité sentimentale.

2700. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XV. M. Dargaud » pp. 323-339

Puisque la réimpression entraîne pour la Critique l’obligation de rejuger son propre jugement, nous rappellerons que nous aussi nous nous inscrivîmes en faux contre les affirmations religieuses et beaucoup de déductions politiques du livre de M. 

2701. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame Récamier »

Lorsque Saint-Simon ou Dangeau, ou Madame de Motteville, ou n’importe quel faiseur de Mémoires, écrivent les souvenirs de leur vie, ils se révèlent eux-mêmes, de cela seul qu’ils écrivent en leur propre nom.

2702. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre V. Les figures de lumière »

Nous venons de montrer comment le théoricien de la Relativité évoque, à côté de la vision qu’il a de son propre système, toutes les représentations attribuables à tous les physiciens qui apercevraient ce système en mouvement avec toutes les vitesses possibles.

2703. (1915) La philosophie française « I »

C’est l’œuvre d’un physiologiste de génie qui s’interroge sur la méthode qu’il a suivie, et qui tire de sa propre expérience des règles générales d’expérimentation et de découverte.

2704. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre premier : M. Laromiguière »

On a dit que le propre de l’esprit français est d’éclaircir, de développer, de publier les vérités générales ; que les faits découverts en Angleterre et les théories inventées en Allemagne ont besoin de passer par nos livres pour recevoir en Europe le droit de cité ; que nos écrivains seuls savent réduire la science en notions populaires, conduire les esprits pas à pas et sans qu’ils s’en doutent vers un but lointain, aplanir le chemin, supprimer l’ennui et l’effort, et changer le laborieux voyage en une promenade de plaisir.

2705. (1936) Réflexions sur la littérature « 1. Une thèse sur le symbolisme » pp. 7-17

Il semble ainsi que le vers rythmique de Viélé-Griffin, le mètre plus ou moins détendu de Régnier et de Jammes, trouvent leur élément propre dans une forme poétique que l’on ne peut concevoir autrement que parlée.

2706. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XX. De Libanius, et de tous les autres orateurs qui ont fait l’éloge de Julien. Jugement sur ce prince. »

« Ô toi, dit l’orateur, élève et disciple de ces êtres qui occupent le milieu entre la Divinité et l’homme ; toi dont la tombe n’occupe qu’une petite portion de terre, mais qui par ta gloire remplis le monde ; toi qui en commençant ta carrière, as surpassé tous les grands hommes qui ne sont pas Romains, qui en la finissant, as surpassé ceux même de Rome ; toi que les pères regrettent plus que leurs propres enfants, et que les enfants regrettent plus que leurs pères ; toi qui as exécuté de grandes choses, mais qui devais en exécuter encore de plus grandes ; toi qui foulais aux pieds tous les genres de voluptés, excepté celles qui naissent du charme inexprimable de la philosophie, protecteur et ami des dieux de l’empire ; ô prince !

2707. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre premier. Table chronologique, ou préparation des matières. que doit mettre en œuvre la science nouvelle » pp. 5-23

Il était fort jeune, pendant la vieillesse d’Hérodote qui eût pu être son père ; or, il dit que, jusqu’au temps de son père, les Grecs ne surent rien de leurs propres antiquités .

2708. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VI. »

Après les élans et les aveux de son propre cœur, ses amours, ses jalousies, elle eut pour sujet de ses vers la louange des dieux, les fêtes de famille de la Grèce, les épithalames, les chants funèbres.

2709. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

On peut dire que de ses propres mains il s’est enseveli sous les roses. […] C’est volontairement que la victime désignée doit se vouer à la mort ; c’est de sa propre main qu’elle doit la subir. […] Il en est qui lui prêtent l’ironie du prophète Osée, épousant une prostituée et affichant l’adultère pour effrayer Israël par l’allégorie de sa propre honte. […] Il ne connaissait pas ses propres États. […] La Mort ne vient plus du dehors attaquer et renverser l’homme, elle naît avec lui, elle surgit de sa propre essence.

2710. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

Il est presque toujours en guerre avec ses propres fils, qui veulent lui prendre sa place, ses métaux précieux, ses buffles, ses chameaux, ses femmes. […] En faisant de l’Arche sa voisine et presque sa vassale, le fils d’Isaï faisait, de sa propre fonction, une sorte de lieutenance de Iahveh. […] Cet écrivain, qui a façonné à son usage une langue si neuve, si exacte, si opulente, s’est appliqué à dépouiller des liasses de textes ingrats ; et souvent, dans sa belle sincérité d’historien et de philosophe, il a mieux aimé interrompre sa propre démonstration, pour céder la place à des témoins dont le parler gauche et rude lui semblait capable, par sa naïveté même, de nous donner la sensation de la vérité. […] Les adversaires du jardinier Pyrrhon disaient que ce grand sceptique ne pouvait, sans être pris au piège, défendre sa propre doctrine, puisqu’en affirmant qu’il faut douter de tout, il cessait, par là même, de douter. […] Il y a, dans ce tableau de maître, des traits saisissants : l’adultère, s’attardant aux cloîtres où passa, si blanche et si légère, la robe du bienheureux Angelico ; la volupté, cédant à de furtifs caprices dans la propre cellule de saint Antonin ; cette saveur de pieux sacrilège répandue sur la description d’un pèlerinage à la Terre de Beauté.

2711. (1914) En lisant Molière. L’homme et son temps, l’écrivain et son œuvre pp. 1-315

Ce visage si propre à donner de l’amour, Pour qui mille beautés soupirent nuit et jour ; Bref, en tout et partout, ma personne charmante N’est donc pas un morceau dont vous soyez contente ? […] Or c’est là précisément, en tant qu’intelligence, le génie propre de Molière. […] , vivre de sa propre vie et selon son propre goût et qui, de plus, ne laisse pas de vouloir obliger les autres à vivre comme lui et à avoir le même caractère que lui. […] L’Avare ressemble par plus d’un trait à ces comédies du xviiie  siècle où le personnage principal n’est qu’un vice à qui l’on a donné un nom propre et qui le sont qu’une illustration un peu sèche d’un traité les passions. […] Elle est déjà la Marquise de la Pluralité des mondes de Fontenelle, cette marquise qui, par parenthèse, était la propre fille de Mme de la Sablière.

2712. (1894) La bataille littéraire. Sixième série (1891-1892) pp. 1-368

Seul, Hugues Vareilh était capable d’aimer Charles comme son propre fils. […] » Le voisin, ayant lui-même mal contenu son rire et sa surprise, en communique rapidement l’a son propre voisin. […] Le Père préfet vint nous annoncer la fatale nouvelle à l’étude du soir, parmi le silence des tombes, avec des gestes, des attitudes et des commentaires propres à nous faire frémir jusqu’en la moelle de nos os. […] Jamais sujet plus scabreux n’a été traité avec plus de tact, et c’est ici l’occasion de constater une fois de plus que tout peut se dire et s’écrire, et que c’est le propre de l’art vrai de rester toujours chaste et de purifier tout ce qu’il touche. […] Je ne poursuis plus Vitu dans ses pérégrinations, mais je suis bien convaincu qu’il a dû retrouver Arsène Houssaye, replantant des clous avec bonheur dans ses propres murs.

2713. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIVe entretien. Alfred de Vigny (1re partie) » pp. 225-319

C’est la charge de ceux qui n’en ont pas d’autres que leur propre respectabilité, respectabilité célèbre, qui, lorsqu’elle se multiplie de père en fils dans une famille, finit par former un surnom de la race. » Or c’était précisément, comme celui de gentilhomme par excellence, le seul titre ambitionné par M. de Vigny, le type de sa vie, le signe distinctif de son caractère, l’aristocratie de sa nature, le rôle innomé de sa vie. […] L’excellent esprit de M. de Vigny était de sa nature propre à comprendre cette vérité. […] Mais les uns sont enivrés de leurs propres œuvres, les autres sont dédaigneux et veulent dans l’enfant la perfection de l’homme, la plupart sont distraits et indifférents, tous sont impuissants à faire le bien.

2714. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

Le roi, qui se trouva gai et de bonne humeur, leur dit en souriant: « Allez le punir. » Ces gens, emportés de fureur, n’entendirent point raillerie ; ils coururent à son logis, et l’ayant rencontré comme il en sortait à cheval avec un laquais seulement, ils le renversèrent par terre, ils lui déchirèrent ses habits, et ils exécutèrent en un instant l’ordre du roi avec la rage qu’on peut s’imaginer en des gens irrités comme ils l’étaient: car c’est ainsi que souvent, en Perse, chacun venge de ses propres mains les torts qu’on lui a faits dès que la justice l’ordonne ou le permet. […] À côté, il y a deux autres salles plus petites, qu’on appelle salles des gardes, parce qu’elles ont été faites pour un corps de garde ; mais la personne du souverain est si sacrée en Perse, qu’on néglige cette garde ; de sorte qu’il n’y a jamais là personne durant le jour, et ceux qu’on y met en faction la nuit y dorment dans leurs lits comme dans leur propre maison, sans fermer non plus le grand portail, par où chacun entre et sort comme il veut, sans qu’on crie: Qui va là ? […] Ils voyaient tous qu’il parlait contre ses propres intérêts, et que ce ne pouvait être que le zèle pour la justice et pour le bien de l’État, le désir de contenter les peuples et la fidélité qu’il devait à son défunt maître qui le faisaient agir.

2715. (1898) Émile Zola devant les jeunes (articles de La Plume) pp. 106-203

Comme ces belles patriciennes de la décadence romaine, qui, pour l’assouvissement de leur fine chair, de cette blanche argile vivante habituée, cependant, à des caresses plus délicates, recherchaient avec furie la brutale étreinte des Barbares, nous nous sommes abandonnés dans les bras du géant ; nous acceptâmes d’être terrassés, d’être meurtris par les rudes sonorités de l’Or du Rhin, jusqu’au jour où nous avons compris que c’étaient nos propres défaites que célébraient toutes ces sonneries et tous ces tonnerres, que c’était le triomphe grandissant d’une autre race. […] Oui, vous êtes la fleur insolente et abominable de cette Bourgeoisie qui, au travers des empires, des monarchies et des républiques, mène le peuple avec des mots quand, ignorant et aveugle, il est sage, avec du plomb quand, instruit et clairvoyant, il bouge ; cette Bourgeoisie qui a assassiné les princesses légitimes, Liberté, Fraternité, Justice, pour mettre à leur place et saluer de leurs noms sacrés on ne sait plus quelles immondes courtisanes, vieilles et fardées… oui, nous la démasquons en vous, cette Bourgeoisie exécrée, et elle s’offre ainsi à nos yeux avec une de ses caractéristiques les plus importantes, sa volonté d’ignorer la souffrance humaine hors de ses accidents particuliers, et ses pratiques égoïstes de charité individuelle inspirées par la crainte de la révolution ou de l’enfer, par le désir du paradis ou d’un siège à la Chambre, de popularité ou de gloire, par besoin d’excuse pour certaines faiblesses devant sa propre conscience ; elle s’offre à nous avec sa terreur de la justice absolue, de l’égalité absolue, proclamées il y a dix-huit cents ans par le Christ, il y a plus de cent ans par la France, et aujourd’hui dans le monde entier par tout ce qui a un cerveau et un cœur, justice et égalité qui ne seront d’ailleurs une loi sociale universellement acceptée que le jour où, les frontières disparues, les possédants n’auront plus l’excuse de la Patrie à défendre pour entretenir des armées qui ruinent les peuples et qui, aux jours où ils se lèvent pour sauvegarder leurs libertés menacées, les massacrent. […] Tandis qu’un héros d’anciennes légendes, un demi-dieu antique, étant imaginaires, créés seulement par la piété du souvenir ou des croyants, recréés par notre propre effort intellectuel, peuvent mieux, étant artificiels, incarner un peu de nous, tressaillir du reflet de la vie dont nous les animons.

2716. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « PARNY. » pp. 423-470

Si l’on avait pris sur-le-champ cette détermination, j’aurais sollicité, au nom des Muses, qui n’ont pas le privilége de pouvoir vivre sans pain, un recoin obscur dans votre propre bureau. […] Désiré Laverdant) qui s’est sérieusement occupé de Madagascar, et qui a pris la peine de recueillir quelques chansons malegaches authentiques, nous confirme d’ailleurs dans notre doute, et nous assure que les Chansons madecasses de Parny sont tout à fait impossibles : « Il a inventé, nous dit-on, les nuances de sentiment, les caractères qu’il prête à cet état de société, et jusqu’aux noms propres ; c’est du Parny enfin, du sauvage très-agréablement embelli. » La comparaison de quelques pièces du vrai cru avec celles de Parny, et les considérations piquantes que pourrait suggérer ce rapprochement, nous mèneraient ici trop loin ; nous espérons en tirer matière un jour à un petit chapitre supplémentaire.

2717. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Théâtre » pp. 83-168

Tout à coup, une actrice, connue par le cynisme de son esprit, interrompit les doléances littéraires par cette apostrophe : « Vous êtes jeunes, vous autres, mais le théâtre au fond, mes enfants, c’est l’absinthe du mauvais lieu. » Et ladite actrice avait toujours l’habitude d’appeler les sales choses par leurs noms propres. […] Puis sur les planches je ne trouve pas le champ à de profondes et intimes études des mœurs, je n’y rencontre que le terrain propre à de jolis croquetons parisiens, à de spirituels et courants crayonnages à la Meilhac-Halévy ; mais, pour une recherche un peu aiguë, pour une dissection poussée à l’extrême, pour la récréation de vrais et d’illogiques vivants, je ne vois que le roman ; et j’avancerais même que si par hasard le même sujet d’analyse sérieuse était traité à la fois par un romancier et un auteur dramatique, — l’auteur dramatique fût-il supérieur au romancier, le premier aurait l’avantage et le devrait peut-être aux facilités, aux commodités, aux aises du livre.

2718. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

La Décade philosophique (10 pluviôse an VII), après avoir constaté l’engouement pour les romans anglais, ajoutait, « nous pouvons affirmer que nous possédons en original et de notre propre cru des horreurs dont les plus difficiles peuvent se contenter, que nous ne manquons pas de personnages atroces, atrocement crayonnés, que nous avons des esprits corps, c’est-à-dire des fantômes qui n’en sont pas, heureuse invention par laquelle s’est éminemment distinguée mistress Radcliffe, que nous sommes riches en descriptions du soleil et de la lune, en sites romantiques, en événements romanesques, enfin que nous ne sommes pas moins experts que nos maîtres dans la science des longueurs et l’art de multiplier les volumes… On a réussi à naturaliser le spleen, on a essayé d’imiter l’humour ; mais il faut qu’il soit plus facile de faire du Radcliffe que du Sterne, je ne saurais du moins proclamer nos succès en ce genre, je dois me borner à dire que jusqu’ici on l’a seulement innocemment tenté ». […] La manière de vivre de chaque classe imprime aux sentiments et aux passions humaines une forme propre.

2719. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Geoffroy de Villehardouin. — II. (Fin.) » pp. 398-412

Quènes de Béthune, l’ami de Villehardouin, propre à mille emplois, à celui d’ambassadeur comme à celui d’ingénieur et de constructeur de navires, ou de défenseur de Constantinople, avait commerce avec les Muses ; il savait ce que c’était que le siège de Troie, et, dans une de ses chansons, il se moque très satiriquement d’une beauté surannée qu’il compare à cette ville antique et célèbre.

2720. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — I. » pp. 131-146

Philippe II, en envoyant des secours et en intervenant dans la Ligue par son or et par ses capitaines, le faisait-il pour la cause commune ou pour son profit direct, et pour prendre le trône de France soit en son propre nom, soit en celui de l’infante ?

2721. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal de Dangeau. tomes III, IV et V » pp. 316-332

Son emploi étant donné un peu pour la forme et par complaisance au jeune M. de Barbezieux, le roi, qui se fait comme son tuteur et son garant, s’applique plus que jamais au travail ; il devient son propre ministre à lui-même : Vendredi 31 août (1691), à Marly. — Le roi se promena tout le matin dans ses jardins ; il travailla beaucoup l’après-dînée, comme il fait présentement tous les jours.

2722. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Fanny. Étude, par M. Ernest Feydeau » pp. 163-178

Le psychologue est resté en chemin, et, parti du dedans, il n’a pas rejoint le monde du dehors, ce qui est le domaine propre et le règne de nos cinq sens de nature.

2723. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — I » pp. 146-160

Ce qui ne veut pas dire au moins, en prenant pour vrai le signe inverse, qu’il suffit de ne douter de rien et de se croire propre à tout, pour être en réalité capable de tout.

2724. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — III » pp. 174-189

« Heureusement, nous dit Fouché (dans les mémoires publiés sous son nom et qui, dans cette partie du moins, offrent un cachet frappant d’authencité), heureusement il fut remplacé par le brave, modeste et loyal Joubert, bien propre à tout calmer et à tout réparer. » J’ai toujours peur, je l’avoue, toutes les fois que je vois un homme si habile et si fin donner tant d’éloges à un si honnête homme, et je me demande involontairement : « Que lui veut-il ?

2725. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Les Contes de Perrault »

Très inférieur par cet endroit à Boileau et superficiel de goût sur un point, bien mieux que son antagoniste, d’ailleurs, il comprenait que les Modernes ont aussi leur poésie, leur source d’inspiration propre, qu’ils l’ont dans le christianisme plutôt que dans ces vieilles images rapiécées de Mars, de Bellone au front d’airain, du Temps qui s’enfuit une horloge à la main, etc. ; mais, victorieux en théorie, il reperdait à l’instant tout l’avantage dès qu’il prétendait mettre en avant comme preuve son poëme de Saint Paulin.

2726. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Mémoire de Foucault. Intendant sous Louis XIV »

Colbert m’écrivit, de son propre mouvement, que le roi trouverait bon que j’exemptasse de logement la terre de Négrepelisse, qui était la seule que possédât M. de Turenne, qui avait bien mérité cette distinction.

2727. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Lettres d’Eugénie de Guérin, publiées par M. Trébutien. »

Matthew Arnold m’a contredit en toute bonne grâce et courtoisie47, et il a relevé ce qui est le propre de certaines expressions du frère et en quoi elles diffèrent de celles de la sœur qui a bien moins d’audace.

2728. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La civilisation et la démocratie française. Deux conférences par M. Ch. Duveyrier »

Cela l’eût conduit, en effet, à des discussions épineuses et peut-être brûlantes, à des évaluations de salaires, à la recherche d’une répartition plus égale dans les bénéfices sociaux ; il n’a pas serré la question de ce côté-là, du côté arithmétique et toujours redoutable, par où un Proudhon n’aurait certes pas manqué de la prendre et, en propres termes, de l’empoigner.

2729. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine »

Il voudrait bien qu’on le crut propre à rendre service, mais il n’a ni la volonté ni le pouvoir de le faire ; c’est encore beaucoup pour lui que de se soutenir.

2730. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite.) »

Les mêmes considérations d’incompatibilité qui l’avaient retenu pour sa propre réception l’empêchaient de présider à la réception des autres.

2731. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand »

Il n’est pas moins vrai que le jeune abbé malgré lui, fier et délicat comme il était, dut ressentir avec amertume l’injustice des siens : quoique d’un rang si distingué, il entrait dans le monde sous l’impression d’un passe-droit cruel dont il eut à dévorer l’affront ; il se dit tout bas qu’il saurait se venger du sort et fixer hautement sa place, armé de cette force qu’il portait en lui-même, et qui déjà devenait à cette heure la première des puissances, — l’esprit si la théologie avait pu être en passant une bonne école de dialectique, il faut convenir encore que cette nécessité où il se vit aussitôt de remplir des fonctions sacrées, sans être plus croyant que l’abbé de Gondi ; que cette longue habitude imposée durant les belles années de la jeunesse d’exercer un ministère révéré et de célébrer les divins mystères avec l’âme la moins ecclésiastique qui fût jamais, était la plus propre à rompre cette âme à l’une ou l’autre de ces deux choses également funestes, l’hypocrisie ou le scandale.

2732. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. BRIZEUX (Les Ternaires, livre lyrique.) » pp. 256-275

Mais une certaine réflexion idéale qui est propre à M.

2733. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Préface » pp. 1-22

L’office propre des lobes est cette répétition.

2734. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre IV. Poésie lyrique »

L’amant à genoux, humble, dévot, ardent, reçoit la vie ou la mort de sa dame : il désire l’honneur et le bien de sa dame plus que sa vie propre : il a assez de bonheur, s’il aime : il est joyeux de souffrir, et accroît son mérite en souffrant.

2735. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre II. Le mouvement romantique »

Avec un grand fracas de formules hautaines, et de métaphores ambitieuses, à travers de prodigieuses ignorances et des audaces inouïes d’affirmation arbitraire, faisant défiler magnifiquement tous les âges, et se grisant de la couleur ou du son des noms propres, Hugo posait l’antithèse du beau et du laid, du sublime et du grotesque ; et, en les opposant, il les unissait dans l’art.

2736. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens III) Henri Rochefort »

Cette raillerie jouit d’elle-même et de sa propre virtuosité.

2737. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre X. La commedia dell’arte en France pendant la jeunesse de Molière » pp. 160-190

Arrivé en présence de Sa Majesté, il jetait son manteau par terre, et il chantait une chanson bien propre à mettre ses partenaires en émoi.

2738. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre III. Grands poètes : Verlaine et Mallarmé, Heredia et Leconte de Lisle » pp. 27-48

Malgré la curiosité des vers en noms propres En tête, les grands dieux : Hor, Knoum, Ptah, Neith, Hator ……………………………………………………………… Le blason de Hizen ou de Tokungawa, les sonnets orientaux sont très loin de tous les autres.

2739. (1890) L’avenir de la science « XII »

Elle laisse au vieil a priori le chimérique honneur de ne chercher qu’en lui-même son point d’appui ; elle se fait gloire de n’être que l’écho des faits et de ne mêler en rien son invention propre dans ses découvertes.

2740. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre II. L’analyse interne d’une œuvre littéraire » pp. 32-46

Emprunte-t-il à la tradition ses vieilles croyances ou crée-t-il, en s’aidant de la science la plus récente, des êtres inconnus nés de sa propre imagination ?

2741. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 janvier 1887. »

Il a poussé à leurs extrêmes limites la science du développement, l’art d’exposer un motif, de le présenter sous des aspects nouveaux, et, usant de toutes les ressources polyphoniques, de le combiner à l’infini, soit avec ses propres imitations, soit avec des thèmes différents.

2742. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

L’année suivante n’amènera pas encore le dénouement de ce drame, mais y jettera des incidents propres à en ranimer l’intérêt.

2743. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Raphaël, pages de la vingtième année, par M. de Lamartine. » pp. 63-78

Ces pages, qui n’ont servi encore à aucune autre génération précédente, et qui semblent avoir été faites chaque matin tout exprès pour nous, nous deviennent aussitôt comme propres et intimes.

2744. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Poésies nouvelles de M. Alfred de Musset. (Bibliothèque Charpentier, 1850.) » pp. 294-310

Je suis certain que, doué comme il l’était d’une force originale et d’un génie propre, même en débutant plus simplement et sans viser tant à se singulariser, il fût bientôt arrivé à se distinguer manifestement des poètes dont il repoussait le voisinage, et dont le caractère sentimental et mélancolique, solennel et grave, était si différent du sien.

2745. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie-Antoinette. (Notice du comte de La Marck.) » pp. 330-346

Du milieu de ses propres dangers, elle est tout occupée, dans sa bonté, de ceux des autres, et elle se montre attentive à ne compromettre personne inutilement dans sa cause.

2746. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le cardinal de Retz. (Mémoires, édition Champollion.) » pp. 238-254

Chaque soir, l’hôtel de Chevreuse, ou quelque autre distraction clandestine, le consolait de ses propres ennuis du jour et de la perte de l’État.

2747. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Saint Anselme, par M. de Rémusat. » pp. 362-377

Rempli au-dedans de la lumière pénétrante de la sagesse, il savait, dit-on, si sûrement discerner les mœurs des personnes de tout sexe et de tout âge, que, lorsqu’il en discourait ensuite, il semblait, en l’écoutant, qu’on se sentait révéler les secrets de son propre cœur.

2748. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre troisième. L’idée-force du moi et son influence »

Il tendra ainsi à répéter sa propre image dans une perspective sans fin, ouverte derrière lui, sorte de percée triomphante de la vie à travers toutes les causes de destruction qu’elle a surmontées.

2749. (1876) Du patriotisme littéraire pp. 1-25

Nous nous demanderons alors si cette facilité de créer des mots, cette profusion de termes qui sont le propre de l’allemand ne se trouvent pas acquises au détriment de la clarté, de la netteté chez nous traditionnelles.

2750. (1899) Psychologie des titres (article de la Revue des Revues) pp. 595-606

Toute religion, étant de la catégorie de l’idéal et du mystérieux, affectionne les mots et les tournures de langage propres à frapper l’imagination.

2751. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre III. Contre-épreuve fournie par l’examen de la littérature italienne » pp. 155-182

Privée de vie nationale, elle n’a pas vécu toutes les étapes de l’évolution normale ; elle a connu les brutalités des conquérants, mais non point les relativités nécessaires de sa propre réalité, puisque pendant des siècles elle n’a pas eu de réalité à elle.

2752. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIV. »

Il mettait à rendre le génie du poëte, non seulement tout son art, mais sa propre douleur.

2753. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XVI. »

 » L’adulateur moderne qui renouvelait ce souvenir pour l’inexorable cardinal, ajoutait : « Aux paroles de ces hommes obscurs, proférées sans contrainte et sans flatterie, César fut si touché que, par comparaison, il comptait pour peu les plus honorifiques décrets du sénat, les noms inscrits des nations subjuguées, les trophées qu’on lui élevait et ses propres triomphes. » On le croira sans peine : le pouvoir d’Octave était fondé sur la réalité de la dictature et l’apparence de la démocratie.

2754. (1923) Critique et conférences (Œuvres posthumes II)

Il serait des plus facile, à quelqu’un qui croirait que cela en valût la peine, de retracer les pentes d’habitude devenues le lit profond ou non, clair ou bourbeux, où s’écoulent mon style et ma manière actuels, notamment l’un peu déjà libre versification, enjambements et rejets dépendant plus généralement des deux césures avoisinantes, fréquentes allitérations, quelque chose comme de l’assonance souvent dans le corps du vers, rimes plutôt rares que riches, le mot propre évité des fois à dessein ou presque… En même temps la pensée triste et voulue telle, ou crue voulue telle. […] Barbey d’Aurevilly, assez riche pourtant de son propre fonds, doit considérer comme une trouvaille inappréciable, puisqu’il les exhibe « cailloux qu’il tient !  […] Auguste Vacquerie (notes et souvenirs inédits) J’ai connu Auguste Vacquerie à l’occasion des Poèmes Saturniens, des Fêtes Galantes et de la Bonne Chanson, que j’avais tenu à lui remettre en mains propres. […] Edouard Lockroy, alors à ses débuts en politique, que le maître éduquait pour les choses parlementaires à venir, selon sa propre expression, « comme une matrone renseigne une nouvelle épousée », ne l’ai-je pas entendu dire de sa grosse voix sourde et fatiguée : « Je n’aime pas Gambetta.

2755. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre troisième. Les sensations — Chapitre II. Les sensations totales de la vue, de l’odorat, du goût, du toucher et leurs éléments » pp. 189-236

Il est clair que chacun des trois types de sensation a des conditions propres qui, étant abolies ou conservées isolément, entraînent son abolition isolée ou sa conservation isolée. […] Tout ce que nous savons, c’est qu’il y a une telle action et, partant, une telle sensation ; car, quel que soit l’excitant, le nerf tactile et les centres auxquels il aboutit fonctionnent toujours de même et d’une façon qui leur est propre ; leur rhythme d’action est spécial et ne change pas ; la preuve en est que ce rhythme provoque toujours en nous la même sorte de sensations, et que cette sorte de sensations n’est provoquée que par lui.

2756. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVI. La littérature et l’éducation publique. Les académies, les cénacles. » pp. 407-442

Mais ce n’était certes pas un système propre à former des écrivains, à leur apprendre la sobriété, l’art de composer un ouvrage, de choisir leurs mots, de surveiller l’expression de leurs idées. […] La mode et les engouements qu’elle suscite, la contagion de l’exemple, le désir d’associer sa fortune à celle d’écrivains déjà connus déterminent beaucoup de débutants à professer des théories contraires à leur propre talent et partant à composer des œuvres forcément médiocres.

2757. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 mai 1885. »

Nous avons vu qu’il nous fallait renoncer à toute rencontre d’une conception théorique propre à Beethoven, et qui eût pu contribuer à nous rendre plus claire cette imagination de son effort artistique ; en revanche, nous pouvons, et nous devons exclusivement, considérer la force virile de son caractère, indiquer, ainsi, l’influence de cette force sur le développement du génie intime du Maître. […] On n’a pas oublié cette appréciation qu’il a faite de l’auteur de Don Juan : « Une musique de table, c’est-à-dire une musique qui, entre les agréables mélodies qu’elle fait entendre par intervalles, offre encore un bruit propre à exciter la conversation23 ».

2758. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juin 1885. »

La force revécue de ce charme, à lui propre, il l’exerce, à présent, (Andante 5/4) sous une forme adorablement douce ; il y retrouve, ravi, le signe divin de l’Innocence intérieure, et il poursuit, sans cesse, cette mélodie, avec des variations toujours nouvelles et inouïes, laissant tomber sur elle, sans arrêt, les rayons de l’Eternelle Lumière. […] Nous avons vu, précisément, que la musique a pour objet cette révélation de l’Idée même du monde : or, il en résulte que le musicien créateur doit considérer tout ce que cette idée contient ; et c’est ainsi qu’il exprime, non sa propre opinion sur le monde, mais le monde lui-même, dans lequel alternent la douleur et la joie, le bien et le mal.

2759. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « III. M. Michelet » pp. 47-96

Certes non, il n’est pas vrai de dire que Richelieu propose, sous peine de mort, l’énigme de sa propre pensée à l’histoire. […] Michelet, lequel, de son propre aveu, ne reconnaît d’autre Dieu que la Révolution et que sa justice !

2760. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire littéraire de la France. Ouvrage commencé par les Bénédictins et continué par des membres de l’Institut. (Tome XII, 1853.) » pp. 273-290

Comme singularité, sachons d’abord que Renart est un nom propre, comme qui dirait Tartuffe ou Patelin, ou Villon.

2761. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le Roman de Renart. Histoire littéraire de la France, t. XXII. (Fin.) » pp. 308-324

Un autre vaisseau, le vaisseau du bien, construit par le roi Noble, et offrant le symbole de toutes les vertus et qualités, tient la mer et lutte contre celui de Renart ; mais le traître regagne toujours ses avantages par la ruse ; il amène le roi à une fausse paix et signale par là son triomphe : le roi consent, pour s’en retourner chez lui, à monter sur le navire de Renart, et il s’y trouve mieux que dans le sien propre.

2762. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Nouveaux voyages en zigzag, par Töpffer. (1853.) » pp. 413-430

Cette seconde région, qui est propre à la Suisse, est plus sobre, plus austère, plus difficile ; elle est souvent dénudée ; la végétation variée de la région inférieure y expire ; mais les sapins, les mélèzes, à son milieu, envahissent les pentes, revêtent les ravins, bordent les torrents ; la chaumière n’y est plus riante et richement assise comme dans le bas, elle y est conquise sur la sécheresse des terrains et la roideur des pentes : ce n’est plus le charme agreste, c’est le règne sauvage qui a sa beauté.

2763. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — II. (Fin.) » pp. 364-380

On est toujours puni par où l’on a péché : cette délicatesse de nuances qu’il portait dans toute son observation, il en payait la façon en détail dans sa propre sensibilité nerveuse et maladive.

2764. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres de François Arago. Tome I, 1854. » pp. 1-18

On le considéra comme un espion qui, du haut de sa station nocturne, faisait des signaux à l’ennemi ; il fut, un jour, si bien poursuivi et traqué, que, pour sa propre sûreté, il courut à toutes jambes se mettre en prison.

2765. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — I. » pp. 91-108

Un homme doué d’une médiocre intelligence, qui a quelque mémoire et de l’application, peut acquérir une grande réputation, surtout s’il a une physionomie imposante ou spirituelle… Mais il faut distinguer pour l’élévation du génie l’homme d’État d’avec l’homme propre aux affaires.

2766. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — III. (Fin.) » pp. 162-179

Le point était habilement choisi par l’Espagne, si elle avait voulu rompre décidément en rendant odieux le roi de France allié des Hollandais, et en le présentant comme opposé aux intérêts et aux droits de sa propre religion : mais il n’entrait point en cela une si profonde politique, et bientôt, lorsque le président Jeannin eut introduit dans l’assemblée des États-Généraux (27 août 1608) sa proposition d’une trêve à longues années au lieu d’une paix, on vit (tant les mots sont puissants sur les hommes !)

2767. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal du marquis de Dangeau — I » pp. 1-17

On se demande d’abord comment il a l’idée de noter de pareilles choses, des minuties telles que celles qu’il enregistre : Monseigneur prit médecine et me donna deux petits tableaux de sa propre main, etc. — Le roi alla tirer dans son parc ; Mme la Dauphine se fit saigner et garda le lit tout le jour.

2768. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — II » pp. 76-92

Mais ce n’est pas plus leur sentiment que le mien propre qui m’oblige à rendre ce témoignage à son mériteg.

2769. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Eugénie de Guérin, Reliquiae, publié par Jules Barbey d’Aurevilly et G.-S. Trébutien, Caen, imprimerie de Hardel, 1855, 1 vol. in-18, imprimé à petit nombre ; ne se vend pas. » pp. 331-247

Guérin, sous forme de centaure, a fait là son René et raconté sa propre histoire, sa source réelle d’impressions, en la projetant dans les horizons fabuleux.

2770. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — II » pp. 231-245

Et sur la terre même, d’où vient la succession, la régularité des saisons ; et dans les végétaux, dans les corps organisés, cet ensemble de lois mystérieuses et manifestes qui y président et qui constituent la vie ; et ces mouvements d’un ordre supérieur et singulier, cette activité spontanée des animaux ; et nos propres sensations à nous, et ce pouvoir de penser, de vouloir et d’agir que je sens en moi ?

2771. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire de mon temps. Par M. Guizot. »

Ses Mémoires n’apprendront que peu de chose aux hommes de son temps qui ont vécu à côté de lui ; ils sont très propres à instruire ceux qui sont venus depuis et qui viendront par la suite ; et c’est en vue de ces derniers que l’auteur semble les avoir composés.

2772. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Sainte-Hélène, par M. Thiers »

Mais aucun monarque et souverain ne s’était rencontré encore dans la situation extraordinaire de Napoléon, à la fois abdiquant et captif, — prisonnier sans avoir été pris et en quelque sorte de son propre choix, pour s’être allé asseoir au foyer de la nation son implacable ennemie ; détenu non dans une prison, mais sur le rocher le plus perdu de l’Océan ; non par la vengeance d’un seul adversaire, mais par la terreur de l’Europe entière conjurée ; et désormais élevé (seule élévation dernière qui lui manquât) à l’état de victime ; — ayant abdiqué pour la seconde fois et toujours forcément sans doute,, mais enfin de cœur comme de fait, et résigné ; ne nourrissant plus aucun espoir de retour, mais conservant jusqu’à la fin toute la sérénité de son coup d’œil, toute sa plénitude d’intelligence politique ; sevré de presque toute information actuelle, et se reportant avec d’autant plus d’impétuosité et d’ardeur aux grands événements récents ou passés, à l’histoire d’hier ou à l’histoire des siècles ; perçant de plus dans l’avenir et plongeant sur les horizons lointains avec la haute impartialité du conquérant apaisé, avec la vue épurée du civilisateur.

2773. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Les Saints Évangiles, traduction par Le Maistre de Saci. Paris, Imprimerie Impériale, 1862 »

Sont-ce simplement des pauvres dans le sens propre, de vrais pauvres de biens, comme le dit saint Luc ?

2774. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

De son côté Salammbô, excitée par son propre désir de revoir Mâtho et cédant aux suggestions du vieux prêtre eunuque à imagination libertine, Schahabarim, qui d’ailleurs, à moitié sceptique, à moitié croyant, n’est pas fâché de mettre à l’épreuve la puissance de sa déesse, se résout à aller jusque dans le camp des Barbares chercher le voile.

2775. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Feuillet s’est surpassé ; il s’est vraiment piqué d’honneur dans la peinture de ce personnage hostile, de cet avocat du diable, de cet adversaire à mort de toutes ses propres théories : on peut dire que, par la bouche de Carnioli, il semble s’être insurgé contre lui-même.

2776. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La Grèce en 1863 par M. A. Grenier. »

Il se regardait, selon sa magnanime expression, « comme une des nombreuses vagues avant-courrières qui doivent se briser et mourir sur le rivage avant que la marée soit haute. » Dans son ambition modeste et mâle, il n’ambitionnait que « la fosse du soldat », Le premier et le plus glorieux des philhellènes, il se montra, dans le court espace de temps qu’il lui fut donné de vivre encore et d’être à l’œuvre, homme d’action et homme pratique, d’une générosité judicieuse, propre à l’organisation et au commandement.

2777. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier. »

Saint-René Taillandier, où l’auteur réagit en quelque sorte contre son propre sujet et tire sur ses troupes, me paraît sortir tout à fait du ton qui sied à ces biographies aimables.

2778. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite.) »

C’est une très-ingénieuse idée, assurément, que celle qui préside à la seconde partie du livre et que cette détermination que prend le bachelier Samson Carrasco, de concert avec le curé et le barbier, d’entrer dans la folie de Don Quichotte pour en mieux triompher ensuite et pour le battre sur son propre terrain.

2779. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre. »

Armand Lefebvre avait cette forme d’esprit exigeante ; il était un peu comme Tocqueville, et, sans avoir comme lui le style qui grave, il avait la pensée qui pénètre et qui creuse ; il pesait longtemps avant de conclure, il concentrait plus qu’il ne déployait ; et, dans la conversation même, si mes souvenirs sont bien fidèles, son œil pétillant et vif, son sourire fin, laissaient deviner plus encore que sa parole n’en disait ; son geste fréquent, moins décisif que consultatif, et qui semblait s’adresser à sa propre pensée, exprimait cette habitude de réflexion et comme de dialogue intérieur.

2780. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite.) »

Il avait passé ce temps de proscription à Rennes, dans sa propre maison.

2781. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite et fin.) »

Les Noëls dijonnais et bizontins sont connus ; mais, à part ces productions d’une saveur et d’un sel propre au pays, on n’aurait à citer que des lambeaux disparates.

2782. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. EDGAR QUINET.— Napoléon, poëme. — » pp. 307-326

Antiquaire par son érudition allemande, poëte et philosophe par ses vues profondes et intimes sur l’histoire de l’humanité, familier avec les idées des Niebühr et des Gœrres, épris de l’imagination pittoresque de l’auteur de l’Itinéraire, il aborde la Grèce et l’interroge par tous les points, sur son antiquité, sur ses races, sur la nature de ses ruines, sur les vicissitudes de ses États, sur ses formes de végétation éternelle ; il saisit, il entend, il compose tous ces objets épars ; il les enchaîne et les anime dans un récit vivant, fidèle, expressif, philosophique ou lyrique par moments, selon qu’il s’élève aux plus hautes considérations de l’histoire des peuples, ou selon qu’il retombe sur lui-même et sur ses propres émotions ; c’est une œuvre d’art que ce récit de voyage : le sens historique et le sens des lieux y respirent et s’y aident d’un l’autre ; l’harmonie y règne ; le souffle du dieu Pan y domine ; l’interprétation du passé, depuis les époques cyclopéennes et homériques jusqu’à la féodalité latine, y est d’un merveilleux sentiment, et elle pénètre de toutes parts dans l’âme du lecteur, sinon toujours par voie claire et directe, du moins à la longue par mille sensations réelles et continues, comme il arriverait à la vue des ruines mêmes et sous l’influence du génie des lieux.

2783. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « APPENDICE. — CASIMIR DELAVIGNE, page 192. » pp. 470-486

Nous les lui adressons sincèrement dans l’intérêt de l’art, dans le sien propre, et par conséquent dans le nôtre aussi, à nous tous jeunes gens qui nous sommes associés plus d’une fois à ses succès avec orgueil et avec amour.

2784. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre III. Inconvénients de la vie de salon. »

Enfermés dans leurs châteaux et leurs hôtels, ils n’y voient que les gens de leur monde, ils n’entendent que l’écho de leurs propres idées, ils n’imaginent rien au-delà ; deux cents personnes leur semblent le public  D’ailleurs, dans un salon, les vérités désagréables ne sont point admises, surtout quand elles sont personnelles, et une chimère y devient un dogme parce qu’elle y devient une convention.

2785. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre III. La personne humaine et l’individu physiologique » pp. 337-356

. — Au point de vue de la perception extérieure, elles ont toutes pour condition l’intégrité et le renouvellement du système nerveux dont elles sont l’action propre, et les êtres plus ou moins étroitement associés qu’elles constituent, quels qu’ils soient au point de vue de la conscience, de quelque nom que l’illusion métaphysique ou littéraire les habille, sont assujettis à la même condition.

2786. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre III. Poésie érudite et artistique (depuis 1550) — Chapitre II. Les tempéraments »

Nous remarquons ainsi les témérités de Baïf, qui forge des comparatifs et des superlatifs à la manière latine, qui tente des vers métriques sur le patron des vers latins : ainsi le génie propre de la langue, le caractère original de la versification française sont méconnus.

2787. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre 2. La littérature militante »

Cet homme inébranlable au milieu des factions, qui ne cherchait pas le nom de bonhomme, sachant être ferme à ses propres risques, et que les grands soucis ne détournaient pas des petits devoirs, eut ie culte et la passion des lettres : il se consola de sa disgrâce en faisant des vers latins.

2788. (1914) Enquête : L’Académie française (Les Marges)

Carmen Sylva, lauréate (on ne le sait pas assez), de même que sa périmée demoiselle d’honneur, intitulée de son propre chef « princesse » Hélène Vacarescu.

2789. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVI. Les derniers temps de la comédie italienne en France » pp. 311-338

Mais pour des comédiens français, la nature les fait en dormant : elle les forme de la même pâte que les perroquets, qui ne disent que ce qu’on leur apprend par cœur : au lieu qu’un Italien tire tout de son propre fonds, n’emprunte l’esprit de personne pour parler ; semblables à ces rossignols éloquents, qui varient leurs ramages suivant leurs différents caprices.

2790. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre IX. Inquiets et mystiques » pp. 111-135

Si je cherche ce mot, c’est par crainte de trop desservir l’auteur, en formulant moi-même sa propre pensée.

2791. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre V. Premiers aphorismes de Jésus. — Ses idées d’un Dieu Père et d’une religion pure  Premiers disciples. »

Souvent des âmes très grandes et très désintéressées présentent, associé à beaucoup d’élévation, ce caractère de perpétuelle attention à elles-mêmes et d’extrême susceptibilité personnelle, qui en général est le propre des femmes 215.

2792. (1785) De la vie et des poëmes de Dante pp. 19-42

Quoique le génie n’attende pas des époques pour éclore, supposons cependant que, dans un siècle effrayé par tant de catastrophes, et dans le pays même théâtre de tant de discordes, il se rencontre un homme de génie, qui, s’élevant au milieu des orages, parvienne au gouvernement de sa patrie ; qu’ensuite, exilé par des citoyens ingrats, il soit réduit à traîner une vie errante, et à mendier les secours de quelques petits souverains : il est évident que les malheurs de son siècle et ses propres infortunes feront sur lui des impressions profondes, et le disposeront à des conceptions mélancoliques ou terribles.

2793. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mme de Graffigny, ou Voltaire à Cirey. » pp. 208-225

Pour faire le plus charmant et le plus vrai portrait de Voltaire, il suffirait d’extraire avec choix quelques-unes de ses propres paroles ; Voltaire n’est pas homme à se contraindre, même en ce qui le juge, ni à retenir longtemps ses pensées : Ne me dites point que je travaille trop, écrivait-il vers ces années de Cirey : ces travaux sont bien peu de chose pour un homme qui n’a point d’autre occupation.

2794. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Madame la duchesse d’Angoulême. » pp. 85-102

Mais au moins je me tenais propre ; j’avais du savon et de l’eau ; je balayais la chambre tous les jours ; j’avais fini à neuf heures que les gardes entraient pour m’apporter à déjeuner.

2795. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — III. (Suite et fin.) » pp. 47-63

Mais ici la méfiance, déjà propre à cette jeune nature, se marqua à l’instant ; sa physionomie se ferma : « Mais je ne connais personne à Paris », répondit-il ; — et après une pause d’un instant : « Je n’y connais plus que la colonne de la place Vendôme. » Puis s’apercevant qu’il avait interprété trop profondément une parole toute simple, et pour corriger l’effet de cette brusque réponse, il envoya le surlendemain à M. de La Rue, qui montait en voiture, un petit billet où étaient tracés ces seuls mots : « Quand vous reverrez la Colonne, présentez-lui mes respects. » Au maréchal Marmont, comme à toutes les personnes avec qui il parlait de la France, le jeune prince exprimait l’idée qu’il ne devait, dans aucun cas, jouer un rôle d’aventure ni servir de sujet et de prétexte à des expériences politiques ; il rendait cette juste pensée avec une dignité et une hauteur déjà souveraines : « Le fils de Napoléon, disait-il, doit avoir trop de grandeur pour servir d’instrument, et, dans des événements de cette nature, je ne veux pas être une avant-garde, mais une réserve, c’est-à-dire arriver comme secours, en rappelant de grands souvenirs. » Dans une conversation avec le maréchal, et dont les sujets avaient été variés, il en vint à traiter une question abstraite ou plutôt de morale, et comparant l’homme d’honneur à l’homme de conscience, il donnait décidément la préférence à ce dernier, « parce que, disait-il, c’est toujours le mieux et le plus utile qu’il désire atteindre, tandis que l’autre peut être l’instrument aveugle d’un méchant ou d’un insensé ».

2796. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Ducis. » pp. 456-473

 » — Je m’arrête dans ma citation, car, dans le reste du discours que Ducis prête à sa mère, ou qu’il poursuit en son propre nom, il est question du « service des Muses » et du « fantôme de la gloire ».

2797. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Observations générales, sur, l’art dramatique. » pp. 39-63

Une des beautés de l’art dramatique, c’est de disposer tellement la pièce, que les principaux personnages soient eux-mêmes les agents de leur propre malheur.

2798. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Paragraphe sur la composition ou j’espère que j’en parlerai » pp. 54-69

Il a beau s’embarrasser, pâlir, balbutier, il faut qu’il souscrive à sa propre sentence.

2799. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Du Rameau » pp. 288-298

On sent qu’il n’est pas d’un portraitiste, il n’est pas léché, propre et neuf comme ceux de ces messieurs ; mais il y a plus de verve ; il est plus ragoûtant, plus pittoresque, mieux torché. à l’égard de la ressemblance, on l’assure parfaite.

2800. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une croisade universitaire » pp. 107-146

À quoi servirait-il d’être cousins, si l’on ne pouvait, de temps en temps, se dire la vérité sur son propre compte, quitte à la défigurer quand il s’agit des autres ?

2801. (1912) L’art de lire « Chapitre IV. Les pièces de théâtre »

On n’a pas compris ou point voulu comprendre, qu’au premier acte Chrysalde est en effet, l’homme raisonnable, et qui ne parle que raison, et qu’au quatrième, il est un bourgeois raillard qui, pour taquiner Arnolphe et le mettre en ébullition, soutient devant lui le paradoxe le plus propre à l’exaspérer.

2802. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXII. »

Elle produisit peu : car cette inspiration intérieure, qui n’est pas l’écho du monde, qui ne s’anime et ne se nourrit qu’à sa propre flamme, s’éveille plus tard et dure moins longtemps.

2803. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIIe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin » pp. 225-319

On reconnaissait à un papier encore propre sur les murs, à quelques meubles élégants et aux rideaux du vaste lit à colonnes, les réparations que le maître de la maison avait fait faire à l’époque de son mariage pour y recevoir sa charmante femme ; hélas ! […] Née d’elle-même, elle grandit à la hauteur d’elle-même et elle devint insensiblement, comme nous allons la voir, une femme phénoménale, qui ne se mesurait plus qu’à sa propre taille, et sous l’œil de son père, et sous la mesure de Dieu.

2804. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIe entretien. Balzac et ses œuvres (1re partie) » pp. 273-352

De 1833 à 1848, c’est sa moisson ; retiré tantôt dans une solitude anonyme de Paris ou des environs, affectant quelquefois un certain luxe pour imiter Walter Scott, et doubler ainsi à l’œil le prix de ses propres œuvres, il se bâtit à Ville-d’Avray une maison en apparence idéale, qui s’écroule bientôt après comme un rêve. […] Louis XVI tombe sous ses fureurs ; les Girondins périssent pour avoir voulu la modérer ; Vergniaud, Marat, Danton, Camille Desmoulins, Robespierre lui-même, sont dévorés par le régime qu’ils ont créé ; la Convention est décimée par sa propre nature ; le Directoire exécutif tente vainement ses coups d’État contre le gouvernement parlementaire, Bonaparte le renverse du vent de son épée ; il renverse lui-même Bonaparte en 1814.

2805. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gabrielle d’Estrées. Portraits des personnages français les plus illustres du XVIe siècle, recueil publié avec notices par M. Niel. » pp. 394-412

Sire, lui répond-il, que vous plaît-il d’entendre partant d’affirmatives et de négatives, desquelles je ne saurais conclure autre chose, sinon que vous désirez bien être marié, mais que vous ne trouvez point de femmes en terre qui vous soient propres ?

2806. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Maucroix, l’ami de La Fontaine. Ses Œuvres diverses publiées par M. Louis Paris. » pp. 217-234

Mais c’est à Reims, sa dernière et véritable patrie, c’est au benoît préau qu’il en revient toujours, à la jolie maison qu’il se fait arranger et qu’on lui prépare (« Car j’aime la jeunesse, dit-il, aussi bien en maison qu’en autre chose ») ; c’est à son jardin, à ces allées qu’il y veut « toujours propres, toujours nettes et sablées comme celles de Versailles pour le moins » ; c’est à tout cela que va de lui-même son désir et son vœu : « La contrainte n’est pas mon fait, je n’aime que la liberté ; je ne l’ai pas haïe jusques ici, je l’aimerai à l’avenir encore davantage. » Il le redit de mille agréables façons : Somme toute, notre cher, les honneurs sont beaux, mais la liberté est admirable.

2807. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — II » pp. 71-89

Rocquancourt, quelques phrases de Montluc citées comme preuve de son aversion pour les armes à feu, tandis qu’au contraire, aucun capitaine avant lui ne s’en était aussi bien servi, et que, à en juger par ses propres paroles, il faisait grand cas de l’arquebuserie12.

2808. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — I » pp. 351-368

Ce joli lieu de Marans, qui nous a été dépeint tout à l’heure comme un séjour enchanté et tout propre à la félicité des amants, est devenu le théâtre de la guerre.

2809. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — II » pp. 369-387

De nos jours, en 1814, la Restauration des Bourbons n’était pas propre à diminuer cette manière sentimentale et paterne de présenter le bon Henri.

2810. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — I » pp. 20-38

Félix Clément est quelquefois exclusif, et il abonde dans son propre sens : mais si l’on peut contester quelques-unes de ses assertions, il faut rendre hommage à l’idée essentielle de son livre, et le louer de la manière exacte dont il l’a mise en œuvre.

2811. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — II » pp. 39-56

Je vous demande donc, mon très cher père, si l’on conserve dans Saint-Victor la même mortification intérieure et extérieure, telle qu’elle était dans son origine… Je vous demande encore si les frères de Saint-Victor, c’est ainsi qu’on les appelait, allaient à la campagne chez leurs amis, chez leurs parents, passer des trois semaines entières et des mois entiers ; s’ils allaient par la ville rendre des visites ; s’il en recevaient de toutes personnes et de tout sexe ; s’ils changeaient d’habits, s’ils en prenaient de plus propres et de plus mondains quand ils sortaient pour se montrer en public ; s’ils affectaient de ces airs libres et dégagés, pour ne pas dire licencieux, qui sont si contraires à la tristesse sainte de la modestie religieuse ; s’ils parlaient indifféremment et sans scrupule dans les lieux réguliers ; s’ils s’entretenaient de contes, d’affaires, d’histoires du monde, de plaisanteries, de nouvelles, qui sont choses qui doivent être entièrement bannies des cloîtres.

2812. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric-le-Grand Correspondance avec le prince Henri — I » pp. 356-374

Plus d’une des objections, au reste, qu’on lui adresse de loin, lui fut faite aussi de près, et, ce qui est remarquable, par des membres de sa propre famille.

2813. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Œuvres complètes d’Hyppolyte Rigault avec notice de M. Saint-Marc Girardin. »

Dans le second discours, prononcé à Louis-le-Grand, s’inquiétant moins des attaques du dehors, il disait agréablement et en famille bien des vérités à la jeunesse : non pas qu’il fut décidé à louer le passé en tout aux dépens du présent : « Cette élégie sur la décadence perpétuelle du genre humain est d’ancienne date, disait-il ; elle a probablement précédé l’Iliade, et j’affirmerais volontiers que l’aïeul de Nestor lui a reproché plus d’une fois de n’être, en comparaison du vieux temps, qu’un parfait mauvais sujet. » Mais, tout en se gardant des banalités du lieu commun, il opposait, dans un parallèle ingénieux, l’éducation sévère ef terrible d’autrefois à celle d’aujourd’hui, si molle et si propre à faire de petits sybarites ; l’élève choyé de Louis-le-Grand était mis en présence de l’écolier si souvent fouetté et si affamé de Montaigu : « Et cependant, dans ces séjours terrifiés, on voyait accourir en foule une jeunesse prête à tout souffrir, la faim, le froid et les coups, pour avoir, le droit d’étudier.

2814. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Une monarchie en décadence, déboires de la cour d’Espagne sous le règne de Charles II, Par le marquis de Villars »

L’État ne pouvait faire face à ses engagements, et l’Électeur de Brandebourg, à qui l’on refusait le payement d’une dette, dut retirer de Madrid son envoyé, et se payer de ses propres mains en faisant saisir un vaisseau espagnol chargé de marchandises, en vue d’Ostende.

2815. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poëme des champs par M. Calemard de Lafayette. »

Lacaussade aime à s’inspirer des poètes étrangers (Burns, Cowper, Shelley) ; il ne les traduit pas, il les imite ; il greffe son propre sentiment sur une de leurs pensées.

2816. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. Suite et fin. » pp. 73-95

Imaginez une armée de 40 mille hommes, entassée dans une sorte d’hippodrome formé par la montagne, la double entrée de la gorge barrée par des rochers qu’on y a fait rouler, ou par une herse inexpugnable, et là, dans cet immense cul-de-basse-fosse, sur ce radeau de la Méduse en terre ferme, ces 40 mille hommes dévorant les animaux, les mulets, et, après neuf jours de souffrance, en venant à manger leurs propres morts.

2817. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Histoire de la Restauration par M. Louis de Viel-Castel. Tomes IV et V. »

Une jeune fille seule, âgée de dix-sept ans, et qui avait elle-même son père compromis et dans les prisons, mais exaltée et enhardie plutôt qu’intimidée par son propre malheur, fut pour eux l’ange des heures funèbres.

2818. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite) »

En fréquentant le monde, j’aurais la douleur de sentir empirer mes idées sur le genre humain, et n’ayant pas la force de devenir méchant ni le courage d’être meilleur, je serais comme les damnés que l’impuissance du mal et le désespoir du bien tourmentent également. » On ne saurait mieux décrire sa misère, ni mieux analyser son propre martyre.

2819. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis du Belloy (suite et fin.) »

Je ne puis pousser plus loin ces analyses sans m’oublier tout à fait, et sans oublier aussi que j’aurais, si la place m’était accordée ; à prendre plus souvent M. de Belloy à partie et à lui dire, sur sa propre traduction : « Ceci est bien, ceci est heureux et élégant ; mais, à côté, ne trouvez-vous pas… ? 

2820. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vie de Jésus, par M. Ernest Renan »

Renan s’en soit tiré à la satisfaction de tous les lecteurs, ni peut-être à la sienne propre, avec sa théorie des « sincérités graduées » et des « malentendus féconds » ; mais il a mis du moins à cette transition, et pour la sauver, tout l’art et toute la ténuité, toute la subtilité d’explication dont un esprit aussi distingué est capable.

2821. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Œuvres de M. P. Lebrun, de l’Académie française. »

Lebrun, tout cela est sensible à la simple lecture ; mais ce que je prétends, c’est que ce n’est nullement par un procédé d’imitation ou par un goût de fusion qu’il nous offre de tels produits de son talent, car il est, il a été poète, sincèrement poète, de son cru et pour son propre compte ; il en porte la marque, le signe au cœur et au front : il a la verve.

2822. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Méditations sur l’essence de la religion chrétienne, par M. Guizot. »

Guizot triomphe et dégage le dogme de la création de toutes les difficultés et les obscurités dont on voudrait l’environner : ce premier miracle lui paraît plus simple, plus clair que tant d’essais d’explications encore confuses et incompréhensibles ; il l’élève au-dessus de toute attaque, dit-il, à sa hauteur propre et isolée ; il le voit jaillir comme une cime rayonnante du sein des vapeurs mêmes et des nuages bibliques, et il en fait le sommet culminant de sa théologie et de sa foi.

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