(NdE)] par contre, (Pathologie de l’esprit) tout en admettant le caractère vésanique de certains talents, se refuse à croire que des hommes tels que Shakespeare et Gœthe aient eu rien de maladif. […] Le talent serait une surexcitation partielle et morbide ou générale et normale, mais faible, des fonctions psychiques ; le génie une surexcitation générale extrême, avec maintien d’un équilibre parfait.
Huysmans a marqué dans une certaine direction la frontière avancée de son talent, qui se trouve embrasser certaines régions lointaines apparemment extérieures. […] Huysmans, par son dernier livre surtout, a donné plus que des promesses de talent ; on peut légitimement compter, sans illusion amicale, que ses travaux aideront à maintenir et à exalter l’excellence actuelle de notre école littéraire.
Personne ne s’est formalisé de cette prétention. « L’entrepreneur » n’a exigé aucun serment maçonnique de ma part, et l’on ne m’a point fait jurer sur les mânes de Basile d’exterminer la probité et le talent, partout où je les rencontrerais : ce qui n’a pas laissé de me surprendre un peu, après ce que vous m’aviez dit, toi et l’ami Jacques : il est vrai (je viens de l’apprendre) qu’on avait refusé trois ou quatre manuscrits de Jacques pour insuffisance d’orthographe. […] Les gens qu’on y voit n’ont rien volé à personne — pas même leur talent.
Et les premières sont celles qui sont supérieures au talent des acteurs et que, par conséquent, les acteurs déparent et dégradent : tous les grands chefs-d’œuvre classiques sont dans cette classe. […] Et les troisièmes sont celles, si nombreuses, qui sont au-dessous du talent des acteurs et que les acteurs relèvent.
Sans cela, et si le livre excite l’homme à la révolte, je ne vois plus dans l’œuvre écrite qu’un désordre, que toutes les raisons d’art ne sauraient excuser, car l’art ne peut être antisocial, antihumain ; il doit être un agent de progrès, et une force pour soulever les âmes ; ou bien il n’est qu’un danger qui grandit avec le talent de l’écrivain. […] Il ne pourra s’empêcher de remarquer que le talent de composition a été inégalement réparti, non seulement entre les hommes, mais entre les nations ; que le roman d’un Français est composé autrement que celui d’un Russe, d’un Anglais, d’un Allemand.
La filiation de cette poésie jusqu’à nos temps les plus modernes, la tradition tour à tour naïve ou raffinée qu’ont exploitée dans l’Europe du Nord tant de talents célèbres, les nouvelles créations ou du moins les nouvelles théories sorties de cette libre étude, ont trouvé d’habiles interprètes et d’habiles critiques. […] Il n’en demeure pas moins un des rares talents, une des âmes poétiques du dix-huitième siècle.
. — Le convive de Lafontaine, félicitant Adolphe sur son talent, lui disait en riant qu’on n’eût fait mieux, si on eût fait aussi bien, dans les cuisines impériales […] Les admirations vivement senties entraînent quelquefois les esprits les mieux doués et les talents les plus individuels à l’imitation des œuvres qui répondent plus particulièrement à leurs sympathies : mais dans ces cas, la copie devient alors une façon de glorifier le modèle. […] Car, en réalité, l’homme célèbre peut accepter ce servilisme ; mais, comme son caudataire ne possède aucun talent et aucune dignité, il professera bien souvent pour lui le sentiment, qui est précisément le revers de l’estime. […] Cette piété, un peu exclusive envers le passé, ne l’empêcha point quelquefois de prêter l’appui de son talent à des œuvres modernes. […] Les commencements de cette seconde période du talent de M.
Une réflexion toutefois qu’on ne pouvait s’empêcher de faire en assistant aujourd’hui à cette fête de l’esprit, c’est que si pareil intérêt est excité par une réunion académique, si des hommes qui autrefois se sont combattus dans l’arène parlementaire, et qui n’ont certes pas été exempts d’injustices les uns envers les autres, étaient assis là sur le même banc, tout prêts à écouter et à applaudir une parole élevée, à jouir d’un noble talent ; si bien des préventions, des colères ont complètement disparu, et si les esprits, délivrés des craintes et comme désintéressés de leurs propres passions, s’étaient donné là rendez-vous dans un concours d’admiration et de bienveillance, on le devait à quelqu’un et à quelque chose.
Mais il avait une véritable énergie, des portions généreuses, un talent qui allait s’épurant avec les années : ç'a été le plus brillant et le plus ferme des disciples directs de Voltaire.
Paul Huet n’était pas seulement un pinceau et un talent, c’était une intelligence.
Mais si sa matière n’est peut-être pas intacte, du moins n’est-elle pas encore si rebattue ; et ces fiertés me plaisent quand elles sont soutenues, comme ici, par un vrai talent.
Molière vint : le talent du poète comique suppose une vive sympathie avec le sentiment général des ridicules, sans exclure, sans doute, l’appréciation du fond des choses, mais aussi sans y disposer.
Ils ne font pas servir le talent de la fiction pour nous peindre la situation d’un homme qui souffre avec constance la perte d’un fils unique.
A une époque où les renommées littéraires se font et s’entretiennent par d’habiles réclames, où nous voyons avec tristesse des hommes que leur talent seul suffirait à rendre glorieux, pris de la rage de s’exhiber en public, eux, leur famille et leurs animaux domestiques, — c’était un spectacle salutaire que celui de ce philosophe sans cesse occupé à dérober aux regards des marchands de publicité sa vie de labeur et d’étude. » Voilà qui est parfaitement dit ; je me hâte d’y souscrire, pour reprendre bien vite le droit de présenter quelques objections.
Ainsi on ne disait mot du général, et on prononçait dans le sénat un panégyrique en l’honneur du prince ; mais si par hasard l’empereur sortait de Rome en temps de guerre, pour peu qu’il lui arrivât, comme à Domitien, ou de voir de loin les tentes des armées, ou de fuir seulement l’espace de deux ou trois lieues en pays ennemi, alors il n’y avait plus assez de voix pour célébrer son courage et ses victoires ; à plus forte raison, quand l’empereur était un grand homme, et qu’à la tête des légions il faisait respecter par ses talents la grandeur de l’empire.
En poésie, l’art est inutile sans la nature : la poétique, la critique, peuvent faire des esprits cultivés, mais non pas leur donner de la grandeur ; la délicatesse est un talent pour les petites choses, et la grandeur d’esprit les dédaigne naturellement.
Jean Richepin est le lion du jour, je lui sacrifierai donc des gens de talent réel aussi, comme M. […] Et malgré cela, le talent perce partout, et l’on sent que ce coup de pistolet une fois tiré, celui qui a cherché le bruit pourra faire plus lisable. […] Avec cela, un malheureux cœur plein de pitié, d’où est sorti le meilleur de son talent. […] Par là s’explique tout un côté de ses œuvres, où l’on aperçoit la cruauté du talent et le besoin de faire souffrir. […] Jamais, quelque talent qu’il ait, M.
Et comme la nature était vulgaire, était grossière, était cynique en lui, son naturel, comme je le disais, s’il est le principe de son talent, en est aussi la tare. […] C’est ici, si vous le voulez, que commence la quatrième époque du talent de Sainte-Beuve, et qu’avec ses Causeries du Lundi, maître de son talent et de sa méthode, il aborde enfin ce qu’il a lui-même plusieurs fois appelé l’histoire naturelle des esprits. […] Je prends un autre exemple de cette spécialité unique du talent. […] C’est qu’il n’y a rien, je le répète, de plus imprévu que le talent, et il ne serait pas le talent, s’il n’était imprévu, s’il n’était un seul entre plusieurs, un seul entre tous. […] Grâce à son talent d’écrivain, c’est M.
Et lorsque le talent d’autrui est en question, c’est si bon d’en rabattre ! […] Rien ne donne l’idée du talent de M. […] — au talent pictural d’Ivan Tourguénef lui-même. […] Leur influence souveraine épure et subtilise, à un incroyable degré, son talent d’ouvrier en vers, déjà si varié, si net, si fin, si assoupli, si fertile en métamorphoses. […] Ce serait un travail ingrat que d’expliquer la décadence du talent de Verlaine après s’être efforcé d’en mesurer la grandeur.
Or, il n’y a point d’éloquence sans religion… Votre talent n’est qu’à demi développé ; la philosophie l’étouffe. […] Il a compris toutes les beautés de tous les temps et de tous les mondes, et invité tous les talents à y puiser. […] Mais précisément c’est le don de Lamartine de peindre des états de sentiment sans saillie violente ni relief dur, avec le talent de rendre sensibles les brouillards, les régions brumeuses et noyées de l’âme. […] — Oui, madame II y a du génie, du talent, de la facilité… » — Cette malice de Musset33 renferme une très grande vérité. […] C’est un poète qui s’est peu soucié d’être versificateur, et comme un génie qui a dédaigné d’avoir du talent.
I « Après une soirée passée avec Addison, dit Steele, j’ai souvent réfléchi que j’avais eu le plaisir de causer avec un proche parent de Térence ou de Catulle, qui avait tout leur esprit et tout leur naturel, et par-dessus eux une invention et un agrément893 plus exquis et plus délicieux qu’on ne vit jamais en personne. » Et Pope, rival d’Addison, et rival aigri, ajoutait : « Sa conversation a quelque chose de plus charmant que tout ce que j’ai jamais vu en aucun homme. » Ces mots expriment tout le talent d’Addison ; ses écrits sont des causeries, chefs-d’œuvre de l’urbanité et de la raison anglaises ; presque tous les détails de son caractère et de sa vie ont contribué à nourrir cette urbanité et cette raison. […] Les haines des partis l’épargnent ; dans la défaite universelle des whigs, il est réélu au Parlement ; dans la guerre furieuse des whigs et des tories, whigs et tories s’assemblent pour applaudir sa tragédie de Caton ; les plus cruels pamphlétaires le respectent ; son honnêteté, son talent, semblent élevés d’un commun accord au-dessus des contestations. […] Ce sont là les sources de son talent ; y en a-t-il de plus pures et de plus belles ? […] Il employait tout son talent et tous ses écrits à nous donner le sentiment de ce que nous valons et de ce que nous devons être. […] C’est qu’il offrait aux Anglais la peinture de la raison anglaise ; le talent et la doctrine se trouvaient conformes aux besoins du siècle et du pays.
Riche de plus de soixante mille livres de rente, et ne dépensant pas douze cents francs pour lui, le bonheur de Goriot était de satisfaire les fantaisies de ses filles : les plus excellents maîtres furent chargés de les douer des talents qui signalent une bonne éducation ; elles eurent une demoiselle de compagnie ; heureusement pour elles, ce fut une femme d’esprit et de goût ; elles allaient à cheval, elles avaient voiture, elles vivaient comme auraient vécu les maîtresses d’un vieux seigneur riche ; il leur suffisait d’exprimer les plus coûteux désirs pour voir leur père s’empressant de les combler ; il ne demandait qu’une caresse en retour de ses offrandes. […] Ce livre, qui commence avec un inimitable talent, finit comme un mauvais mélodrame. […] « À quel talent nourri de larmes devrons-nous un jour la plus émouvante élégie, la peinture des tourments subis en silence par les âmes dont les racines tendres encore ne rencontrent que de durs cailloux dans le sol domestique, dont les premières floraisons sont déchirées par des mains haineuses, dont les fleurs sont atteintes par la gelée au moment où elles s’ouvrent ? […] XIV Quant à son talent, il est incomparable. […] XV Balzac naquit, et, doué par la nature d’un talent immense et d’un esprit juste, il secoua ces haillons de la pensée dont on avait voulu faire un costume national, il rentra dans la voie droite de l’abbé Prévost, et n’aspira qu’à un seul titre, celui d’historiographe de la nature et de la société.
Maintenant, c’est l’anecdote, une anecdote de morale en action, imaginée par des imbéciles et traduite par des acteurs sans talent ou d’un talent tout mécanique. […] C’est exact, les petites revues ayant toujours, plutôt que les grandes, besoin de copie, outre qu’elles mettent leur amour-propre à révéler les nouveaux talents. […] Après cet exorde et quoique la chose ne soit malheureusement pas sans un certain talent à la Zola, un talent salement naturaliste, je m’abstiendrai d’en dévoiler le titre et le nom de l’auteur.
Le talent de M. […] Qu’il me soit permis de commencer par la fin l’analyse de ce livre, un des plus beaux que le poète ait écrits dans toute la force, dans toute la plénitude de son talent. […] Il ne faut que du génie ou du talent pour cela et la France en a trouvé dans ses réserves toutes les fois que l’art a été menacé. […] Il le rencontra dans une femme dont l’Italie admirait les talents, les vertus et la beauté. […] Heureusement que tout cela passe, et que les gens de talent regardent passer et continuent leur chemin.
Ponsard non plus, par exemple, et lui, non pour son débraillé pourtant scandaleux, mais à cause de son manque absolu de talent. […] Du talent des artistes dramatiques, si désintéressés, eux, d’ailleurs, qu’en dire, sinon qu’il fut parfait, et combien de remerciements je leur adresse m’est impossible à dire. […] m’écriai-je, quel talent ! […] Bien entendu le talent est à part de ma bien inoffensive sentence et je m’incline, mais je déplore. […] Qu’est-ce que cela d’ailleurs peut faire au génie et au talent ?
Il aime à y parler des littérateurs célèbres qu’il a connus, et ce qu’il dit lui-même de la mélancolie du piquant chevalier de Boufflers dans l’émigration, et de la triste fin du brillant Rivarol, porte l’empreinte d’un talent littéraire facile et pur.
La pensée, identifiée avec les formes anciennes, n’existait qu’en elles, et ne se produisait que par elles ; les épanchements de l’amitié, les inspirations du talent, tout ce qui naît spontanément en nous, en naissait revêtu.
Quoi qu’il en soit, tout le livre de madame Belloc est une estimable protestation du talent contre cette politique, et un titre nouveau qui honore les dames françaises.
Dupin a rendu d’abord à l’Académie et à tout l’Institut cette justice que c’était une pairie non héréditaire, une pairie du savoir et du talent, où nul choix du pouvoir, nulle intervention étrangère ne vous portait, et où chaque membre arrivait par le seul et libre suffrage de ses égaux.
Il en est quelques-uns, morts jeunes, qui n’ont pas eu le temps de mûrir, et dont tous les écrits le laissent apercevoir : mais un certain charme de fraîcheur et de naïveté y compense les défauts, qui sont imputables à l’âge plutôt qu’au talent de l’homme.
Francis Jammes, dont j’ai déjà loué le talent de prosateur.
Vous aurez du talent, quand il n’y en aura plus ; de la gaieté, quand on médira d’elle ; vous aimerez la gloire, l’honneur, le bien, le beau, quand il sera convenu que ce sont là de pures vanités.
Pour ne parler que de la littérature, c’est un curieux spectacle bien digne de pitié ou de raillerie que celui des conclusions contradictoires où peuvent aboutir des écrivains de talent et de bonne foi traitant de la même époque.
A une heureuse habitude de réfléchir, il joignoit le talent de donner à ses idées une tournure saisissante, & d’embellir, par la vivacité du style, le fruit de ses profondes méditations.
Après avoir commencé par être leurs protecteurs & chérir en eux le talent, ils se déclarent leurs ennemis les plus redoutables.
On ne peut guère supposer que des hommes aussi sensibles que les anciens eussent manqué d’yeux pour voir la nature, et de talent pour la peindre, si quelque cause puissante ne les avait aveuglés.
Je voulais essayer mon talent, encore douteux pour moi-même, dans une grande œuvre en prose ; l’histoire me paraissait et me paraît encore la première des tragédies, le plus difficile des drames, le chef-d’œuvre de l’intelligence humaine, la poésie du vrai. […] Mirabeau lui-même, s’il eût encore vécu, n’aurait pu siéger dans le conseil de la Révolution épuré de tous ses talents. […] X Un écrivain qui frappe juste, mais qui frappe souvent trop fort, à cause de la vigueur même de son talent, M. de Cassagnac, vient d’écrire à son tour un livre sur les Girondins.
C’est méconnaître un peu naïvement l’amour-propre des poètes : à la façon dont Gilles parle de lui-même, nul talent ne devait l’inquiéter. […] De tempéraments très divers, et de talents très inégaux, tous ces nouveaux amis du satirique sont des gens que la littérature à la mode, emphatique ou précieuse, romanesque ou burlesque, ne satisfait plus. […] Le monde, le vrai inonde le recherchait ; on était curieux de le voir, de l’entendre lire ses œuvres : d’autant qu’il avait un vrai talent de lecteur, et doublait la beauté de ses vers par la justesse de la diction.
Mais arrêtons-nous, et n’anticipons pas sur l’analyse du caractère et des talents de ce littérateur universel ; nous lui consacrerons l’année prochaine deux ou trois de ces entretiens, juste et sévère quelquefois contre le philosophe, implacable contre le cynique, dédaigneux souvent du poète, enthousiaste toujours pour le grand monétisateur de l’esprit humain. […] Les fondateurs de l’Académie ont de plus, en formant ce faisceau de génie, de talent, d’illustration, condensés dans un même nom et dans un même corps, donné à la France un grand sentiment de sa valeur littéraire, et donné à l’Europe un grand respect des lettres françaises. […] Tous ces grands talents s’élurent pour ainsi dire d’acclamation.
En tout cas, malgré le talent qui s’y révèle, les livres que nous allons examiner ne paraissent pas promettre l’advenue de ce peu vraisemblable phénix. […] Ils ont du talent mais ils s’ennuient trop. […] La littérature belge nous a donné, depuis quelques années, outre ces écrivains de grand talent : MM. […] Pierre Louÿs fut en but [sic], quoique ayant du talent, à l’admiration du père La Patrie. […] Si l’on n’a pas son génie, on se lamente avec quelque talent et avec une grande sincérité comme M.
Peut-être ses erreurs m’ont-elles servi à ne pas mériter le même blâme ; elles m’ont indiqué l’écueil que son talent n’avait point aperçu. […] On se débat contre les talents, on flétrit les jouissances qu’ils donnent, on tue l’inspiration, on se rend incapable de la sentir. […] Étudions donc les nobles auteurs qui ont consumé leur existence à éterniser par leurs talents les mémorables exemples religieux, politiques, et militaires. […] Le scrupule spécieux qu’on veut encore me faire, c’est d’attaquer notre littérateur dans la même chaire où ses talents lui acquirent des succès. […] Celui qu’il osa publier clandestinement, dans un âge plus mûr, atteste un talent mieux expérimenté, talent dont on regrette qu’il ait perverti l’usage, en violant à la fois les bienséances, la pudeur, et le patriotisme.
Mme de Staël a eu le malheur, un jour, de faire de son talent un plus funeste usage. […] Sa physionomie répondait à son caractère et à son talent. […] Si l’on vous disait : il est un jeune homme, heureusement doué par la nature et formé par l’éducation ; il a ce qu’on appelle du talent, etc., etc. […] Mais précipiter l’homme dans un abîme et vouloir l’en tirer sans point d’appui, c’est une entreprise vaine et dont tout le talent qu’on y met ne peut dissimuler l’inanité. […] Longtemps on a ignoré que Gavarni eût un autre talent que celui de crayonner les passions, les ridicules ou les vices de son temps.
Seulement, il n’avait pas beaucoup de talent, de ce talent particulier qui empêche une chose bien faite de vieillir, de se rider, de se faner et qui lui met un lustre éternel. […] Le tout était de remployer avec talent. […] Faites un article sur le talent de Mlle Volnais. […] Les talents vainqueurs régnaient encore et les talents nouveaux naissaient. […] Elle fait honneur, tout compte fait, au talent de Casimir Bonjour.
… En disant cela, je fondis en larmes… » IV L’illustre vieillard consola et raffermit son disciple ; il lui dit que cette sécheresse momentanée d’imagination dont il s’affligeait n’était que le progrès de son esprit, qui, en lui faisant mieux voir jusqu’où il pouvait monter, le décourageait à tort, par le sentiment de la distance qu’il y avait entre son talent d’aujourd’hui et son idéal futur. « Sentir sa maladie, ajouta-t-il, c’est déjà le premier pas vers la guérison ; persévérez et renoncez au barreau, où l’on ne s’adonne qu’à l’art de vendre des paroles ou plutôt des mensonges. » On s’étonne de ce mépris pour le barreau dans un jeune homme dont Cicéron était l’oracle et l’idole. […] Il était facile à vivre, gai dans la conversation, grave dans la pensée, tendre pour ses parents, fidèle et sûr pour ses amis, affable et libéral pour tous malgré le beau nom qu’il portait et les talents d’esprit qui le distinguaient. […] Ces Mécènes ecclésiastiques ou laïques rivalisaient alors, en Italie, de patronage pour les grands talents susceptibles de servir leur propre gloire ; le palais du cardinal Colonna était la cour du génie italien. Le chef de cette illustre maison, Étienne Colonna, vint, à son tour, visiter ses frères et ses neveux à Avignon ; il y goûta avec passion le talent de Pétrarque.
On rougit de la logique, de la parole et du talent en voyant employer la logique, la parole et le talent à professer de tels suicides. […] Vous vous répondrez : C’est le gouvernement unanime, c’est-à-dire celui qui gouverne au profit du peuple tout entier, qui ne fait point acception de classes, de castes, de privilégiés de la naissance ou du sang, mais qui ne reconnaît dans tous les citoyens que le privilège mobile et accessible à tous de l’éducation, du talent, de la vertu, des services rendus ou à rendre à la communauté. […] Il conservait encore à soixante-dix ans le goût et le talent des vers.
Le talent du peintre de mœurs abondait dans ces pages, mais la convenance et la piété manquaient ; nous souffrions profondément à ces lectures d’entendre ridiculiser le trône, la table et le foyer, par celui qui avait été appelé pour en relever la sainteté et la considération devant l’Europe. […] — Voilà ce seuil que Chateaubriand, vieilli et infirme de corps, mais valide d’esprit et devenu tendre de cœur, foula deux fois par jour pendant trente années de sa vie ; ce seuil qu’abordèrent tour à tour Victor Hugo, d’autant plus respectueux pour les gloires éteintes qu’il se sentait plus confiant dans sa renommée future ; Béranger, qui souriait trop malignement des aristocraties sociales, mais qui s’inclinait plus bas qu’aucun autre devant les aristocraties de Dieu, la vertu, les talents, la beauté ; Mathieu de Montmorency, le prince de Léon, le duc de Doudeauville, Sosthène de La Rochefoucauld, son fils ; Camille Jordan, leur ami ; M. de Genoude, une de leurs plumes apportant dans ces salons les piétés actives de leur foi ; Lamennais, dévoré de la fièvre intermittente des idées contradictoires, mais sincères, dans lesquelles il vécut et il mourut, du oui et du non, sans cesse en lutte sur ses lèvres ; M. de Frayssinous, prêtre politique, ennemi de tous les excès et prêchant la modération dans ses vérités, pour que sa foi ne scandalisât jamais la raison ; madame Switchine, maîtresse d’un salon religieux tout voisin de ce salon profane, amie de madame Récamier, élève du comte de Maistre, femme virile, mais douce, dont la bonté tempérait l’orthodoxie, dont l’agrément attique amollissait les controverses, et qui pardonnait de croire autrement qu’elle, pourvu qu’on fût par l’amour au diapason de ses vertus ; l’empereur Alexandre de Russie, vainqueur demandant pardon de son triomphe à Paris, comme le premier Alexandre demandait pardon à Athènes ou à Thèbes ; la reine Hortense, jouet de fortunes contraires, favorite d’un premier Bonaparte, mère alors bien imprévue d’un second ; la reine détrônée de Naples, Caroline Murat, descendue d’un trône, luttant de grâce avec madame Récamier dans son salon ; la marquise de Lagrange, amie de cette reine, quoique ornement d’une autre cour, écrivant dans l’intimité, comme la duchesse de Duras, des Nouvelles, ces poèmes féminins qui ne cherchent leur publicité que dans le cœur ; madame Desbordes-Valmore, femme saphique et pindarique, trempant sa plume dans ses larmes et célébrée par Béranger, le poète du rire amer ; madame Tastu, aux beaux yeux maintenant aveugles, auxquels il ne reste que la voix de mère qui fut son inspiration ; madame Delphine de Girardin, ne disputant d’esprit qu’avec sa mère et de poésie avec tout le siècle, hélas ! […] Ce mot sur la mort de madame de Duras est bien appliqué à une des femmes les plus capables de comprendre le génie parce qu’elle avait de beaux talents, et la plus digne d’être regrettée parce qu’elle avait un cœur plus grand encore que le talent.
Mais les détails de ce simple roman sont vrais comme l’histoire et mille fois plus vrais que les histoires de l’Empire, dont des hommes de grand talent flattent la gloire pour grandir leur héros. […] Dieu sait si j’ai tort ou raison dans mon opinion ; mais en tout cas, elle est le plus sincère hommage à ce duo de talent des fils qui les grandit par leurs pères. […] Il faut, pour les écrire, autant de talent qu’il faut de génie naturel pour les concevoir. Le naturel n’est-il pas le chef-d’œuvre du talent ?
On a beau lui crier que peut-être tout notre talent n’existe qu’à la condition de cet état nerveux, il va toujours, il veut qu’on réagisse contre ces états d’avachissement et de paresse, qui lui semblent le signe des siècles descendant la pente d’une civilisation, et toujours protestant, il voit la guérison du spleen, le salut et la rénovation des sociétés décadentes, dans l’imitation puérile des mœurs anglaises, dans cette vie de civisme, dans cette adaptation du patriotisme et du pédestrianisme britanniques. — « Oui, lui crie quelqu’un, l’alliance du talent et de la garde nationale. » L’on rit et l’on part. […] Il n’a jamais dit de mal que des gens dont il n’estimait pas le talent… » * * * Juin Notre oncle de Courmont nous raconte aujourd’hui son enfance. […] Le génie est le talent d’un homme mort.
.), nous, qui avons toutes les haines de purs lettrés pour ce gouvernement, ennemi et envieux des lettres, et nous qui n’avons, dans cette pétaudière d’un Empire ramolli, d’autre amitié que l’amitié de la princesse, et encore une amitié en dispute et en lutte sur toute idée et toute chose, c’est nous, dont on veut tuer près du public le talent avec la calomnie du mot « courtisans », et d’où cela part-il ? […] * * * — Personne n’a encore caractérisé notre talent de romanciers. […] » * * * — Nous, nous pour qui le travail a été la jouissance de toute notre vie, nous nous sentons physiquement incapables de travailler, et cela au moment, où nous sommes arrivés à l’entier développement de notre talent, et où nous sommes pleins de grandes choses, que nous avons le désespoir de ne pouvoir exécuter. […] C’est ainsi qu’on trouvera fort bien traités, des gens qui ont été féroces pour nous, et qu’on trouvera des laudateurs, auxquels nous ne trouvions pas de talent ou dont nous avions lieu de mépriser le caractère, — littéralement exécutés.
D’abord ça été, sur toutes les figures, une tristesse apitoyée, puis, longtemps contenue par le respect pour la personne et le talent de Flaubert, la déception des spectateurs a pris sa vengeance, dans une sorte de chûtement gouailleur, dans une moquerie sourieuse de tout le pathétique de la chose. […] Un dîner de gens de talent qui s’estiment, et que nous voudrions faire mensuel, les hivers suivants. […] Sa gloire, quoiqu’il ait eu, à un moment, un certain talent, sa gloire sera celle d’un agréable et loquace causeur. […] Aujourd’hui, à propos de Mme de Sévigné, ce brutal de Charles Blanc s’emporte à froid, et proclame que la femme contemporaine de Vauban, et qui a médit des paysans dans un alinéa de ses lettres, ne peut pas avoir de talent.
Hugo vendait au roi et à ses ministres son talent lyrique, comme l’ingénieur et le chimiste louent aux capitalistes leurs connaissances mathématiques et chimiques, il détaillait sa marchandise intellectuelle en strophes et en odes, comme l’épicier et le mercier débitent leur cotonnade au mètre et leur huile en flacons. […] Ses talents d’étalagiste littéraire n’eurent pas suffi pour lui assurer cette admiration de confiance, si universelle ; ses actes, plus encore que ses écrits, lui valurent la haute estime de la bourgeoisie. […] Il se signait dévotement devant la formule sacramentelle du romantisme : l’art pour l’art ; mais, ainsi que tous bourgeois ne songeant qu’à faire fortune, il consacrait son talent à flatter les goûts du public qui paie, et selon les circonstances il chantait la royauté ou la république, proclamait la liberté ou approuvait le bâillonnement de la presse ; et quand il était besoin d’éveiller l’attention publique il tirait des coups de pistolets : — le beau, c’est le laid est le plus bruyant de ses pétards. […] Hugo a un talent dans le genre de celui de Young, l’auteur des Night Thoughts, il est toujours exagéré à froid… L’on ne peut nier au surplus, qu’il sache bien faire des vers français, malheureusement il est somnifère. » Correspondance inédite de Stendhal.
Leurs mépris n’ont touché que les décadents du classicisme, petits talents médiocres dont les œuvres hybrides se distinguaient d’ailleurs malaisément de celles du premier Cénacle. […] Une des pires erreurs accréditées par les romantiques, ç’a été de voir dans le respect de la tradition l’indice d’un esprit timide et d’un talent sans vigueur. […] Malgré tout son talent de styliste, il n’a rien pu tirer de sujets factices comme Avatar, Jettatura, Arria Marcella, Mademoiselle de Maupin. […] Pour le bâtir, les soldats ont donné leurs bras ; pour le décorer, les marchands ont apporté leur or, et les artistes, leurs talents ; pour l’égayer, l’aristocratie a prodigué son esprit et ses grâces.
Il avait remarqué dans l’histoire du monde un peuple célèbre, dont les institutions avaient quelque chose de singulier ; il a pensé que l’étude de l’histoire et des institutions de ce peuple pouvait faire naître quelques réflexions utiles ; mais, en rendant justice au savoir, au talent de plusieurs des historiens nationaux, il n’a point trouvé chez eux cette indépendance qui est la première qualité de l’historien. […] Je l’ai dit, il remplissait avec bonheur ces fonctions qui souvent sont des charges pour d’autres : il était rapporteur avec talent comme avec plaisir.
Je me croyais peu nécessaire aux États généraux ; sans facilité pour parler et timide à l’excès, il était facile de trouver dans un autre et le même zèle et la même droiture, et plus de talents. […] Mais combien il est vrai qu’il connaissait peu les hommes et qu’il n’avait pas le talent de démêler, de saisir avec rapidité ceux qui cachaient des trames et des arrière-pensées suspectes !
Il y avait dans Santeul plusieurs hommes, nous a dit l’excellent peintre de Théodas, — ou plutôt il y avait un grand talent possédé par un enfant. […] Pellisson qui, depuis qu’il s’était converti, avait beaucoup de zèle, et qui de plus avait titre et qualité spéciale d’économe de Cluny, engagea un jour Santeul à mieux employer son talent, et à faire des chants religieux, des hymnes qui lui seraient une occupation également lucrative et plus décente, plus digne d’un religieux : « Laissez là, lui disait-il, tous ces artifices menteurs des muses et d’Apollon ; c’est assez donner à Phébus et aux muses ; ces sortes de jeux ne siéent qu’à la jeunesse, et, pour n’être que des jeux, on y trouve aussi quelque gloire.
Les jeunes princes s’unirent, ils s’accoutumèrent à rester liés et un peu ligués entre eux, à le révérer, à le craindre, et le prince Henri, le plus distingué des trois par l’esprit et par les talents, ne put s’empêcher de l’envier. […] Le prince Henri était très supérieur au précédent par les qualités de l’esprit, par la grâce en société et par les talents à la guerre : peu s’en faut même, si l’on en juge par certaines histoires et par des panégyriques de rhéteurs, qu’on ne le mette au niveau presque du grand Frédéric, et qu’on n’établisse entre eux une espèce de parallèle par contraste, une rivalité.
A tout moment, de belles paroles, des paroles élevées, pénétrantes, en même temps que suaves, lui échappent, et l’on s’étonne que l’on puisse avoir tant de talent, tant de ressorts dans l’âme (car il n’est pas si monotone qu’on l’a dit) avec si peu de bon sens pratique. […] Guizot, a tracé de lui, au tome III de ses Mémoires, un portrait supérieur, éloquent, ressemblant, généreux d’intention jusque dans sa sévérité, admirable de talent, pour tout dire.
Je me suis demandé quelquefois combien il fallait de défauts joints à un talent pour former un grand orateur : il semble que M. […] Ces deux talents, ces deux intelligences diversement aristocratiques, d’une hauteur à l’autre, se sont saluées.
Ce n’est plus cette liturgie dramatique du chœur et du sanctuaire où éclate en hymnes si richement rimées et comme en rosacés magnifiques le talent et le bel esprit d’un saint Bernard ; c’est déjà le régal et l’émotion de la foule. […] Non qu’il fût impossible qu’un poëte de talent et de génie naquît vers le xve siècle et, moins gêné alors par les données et les règles de la tradition sacrée, ne marquât de son cachet une œuvre qui fût par quelque coin originale et d’un mérite encore appréciable aujourd’hui.
Il peut y avoir dans un ouvrage de l’habileté, des parties passables et même assez bonnes, qui font dire : Ce n’est pas trop mal, des situations touchantes, des dialogues assez vifs et assez naturels, d’heureuses reparties et d’heureuses rencontres, des hasards ou des commencements de talent plus, ou moins de main d’œuvre et de métier (la plupart de nos mélodrames actuels ont de tout cela), sans qu’il y ait véritablement beauté. […] Mais ce que je nie, même après le plaidoyer de MM. les frères Paris, c’est que l’art ait passé par là, par le travail de l’auteur : il n’y a là dedans qu’un talent de faiseur, une certaine habileté incontestable, et tout à fait comparable à celle d’un de nos dramaturges du boulevard, entendus et rompus au métier.
Il est inouï le talent qu’ont les ministres d’ici pour noyer les affaires dans un déluge de mots ! […] On formait toutes les années des camps dans les provinces, où les troupes étaient exercées par des commissaires-inspecteurs instruits et formés aux grandes manœuvres de la guerre ; l’impératrice se rendit elle-même à différentes reprises dans les camps de Prague et d’Olmütz, pour animer les troupes par sa présence et par ses libéralités- : elle savait faire valoir mieux qu’aucun prince ces distinctions flatteuses dont leurs serviteurs font tant de cas ; elle récompensait les officiers qui lui étaient recommandés par ses généraux, et elle excitait partout l’émulation, les talents et le désir de lui plaire.
Mérimée, dans ce nouveau cadre de l’histoire critique, ne s’est pas interdit son parfait talent de raconter204. […] Une réflexion consolante ressort toutefois : c’est donc ainsi que le talent vrai peut encore, par les retours imprévus, atteindre à quelques accents des Anciens.
En vérité, bien que La Fontaine n’ait pas cessé d’essayer et de cultiver à ses moments de loisir son talent, depuis le jour où l’ode de Malherbe le lui révéla, j’aime beaucoup mieux croire à sa paresse, à son sommeil, à ses distractions, à tout ce qu’on voudra de naïf et d’oublieux en lui, qu’admettre cet ennuyeux noviciat auquel il se serait condamné. […] Abandonné dans ses mœurs, perdu de fortune, n’ayant plus ni feu, ni lieu, ce fut pour lui et pour son talent une inestimable ressource que de se trouver maintenu, sous les auspices d’une femme aimable, au sein d’une société spirituelle et de bon goût, avec toutes les douceurs de l’aisance.
Une des plus inattendues et originales applications de ce talent est celle que nous présente M. […] Je ne suis pas sûr, après toutes les critiques des gens du métier, que la même science, sans aucun soutien de talent littéraire, n’eût pas obtenu davantage leur estime.
Alexandre Dumas n’est pas contestable ; mais, tout en appréciant ce qu’il apporte de talent, de pénétration, de sagacité, nette et mordante, dans ces pénibles études, on peut trouver qu’il les pousse au degré où elles réclameraient le huis clos. […] La talent n’est pas en cause ; rarement l’auteur a montré une dextérité plus précise, un esprit plus net et plus acéré.
Pour rendre ces simples cours intéressants, pour savoir être à la fois clair et agréable sur de tels sujets, en s’adressant à des auditeurs qui ne sont pas de tout jeunes esprits, mais des adultes déjà faits et plus exigeants, ce ne serait pas trop d’un talent capable d’emplois en apparence très supérieurs et qui ne le sont point. […] On n’oublierait pas, à côté des gens de talent sortis du peuple, ceux qui y sont restés, qui, tout en ayant un génie et un don, n’ont pas cessé de pratiquer un métier.
Il avait le cœur haut, comme le lui disait La Fare, et, dans le talent, Le don d’imaginer avec facilité. […] La vieillesse, qui affaiblit d’ordinaire les talents, servit plutôt celui de Chaulieu.
Dans cet immense Digeste de la nature, dans cette Encyclopédie en trente-sept livres, le rédacteur et collecteur paraît remarquable avant tout et maître, en ce qu’un large souffle de talent et de grandeur y circule, en ce que la vigueur de sa plume ne faiblit nulle part, et ne se lasse pas d’exprimer tant de détails souvent fastidieux. […] À chaque pas, et même à ne voir les choses qu’en profane, on rencontrerait des portraits pleins de vie et de talent (celui du Coq, du Rossignol, par exemple, au livre des Oiseaux) ; à chaque pas on trouve aussi des anecdotes plus ou moins authentiques, mais piquantes, et qui toutes, même dans leurs erreurs, jettent un grand jour sur les habitudes, les manières de voir et les superstitions de l’Antiquité.
Tous les grands acteurs qui avaient jusque-là joué les premiers rôles ayant été ou massacrés ou mis en fuite et dépopularisés, « la Convention, dit-il, et ses partis se trouvent dépourvus de gens à talents et à caractère, ou possédant un degré même médiocre de capacité administrative. […] Tous les mobiles leur sont bons, excepté les talents.
La première phrase de ce discours est difficile et délicate à traduire ; Cicéron y dit : « S’il y a en moi quelque talent (et je sens combien ce talent est peu de chose, quod sentio quam sit exiguum), si j’ai quelque habitude de la parole… c’est à Archias que je le dois. » On assure que Patru mit quatre ans avant de se fixer sur la traduction qu’il donnait de cette première phrase ; il y revint encore dans la seconde édition, qui ne parut que trente-deux ans après la première ; et, dans les deux cas, il manqua le point essentiel, le Sentio quam sit exiguum, ce correctif que Cicéron apporte aussitôt à son propre éloge.
Portalis avait, pour ainsi dire, une mémoire d’aveugle : Je fus nommé secrétaire (du Conseil des Anciens) lorsque mon ami Portalis fut appelé à la présidence, a dit le général Mathieu Dumas, et j’eus de fréquentes occasions d’admirer son beau talent et sa prodigieuse mémoire. […] Deux mois après, Portalis eut la permission de rentrer dans sa patrie, et il devint presque aussitôt l’un des conseillers de l’homme qui, à cette première heure, prenait à tâche de s’entourer de tous les talents éprouvés et de toutes les lumières70.
Il y a une trentaine d’années, une école littéraire pleine d’imagination et de talent, mais dont on connaît les désordres et les écarts, répandit dans le public sur la nature et l’essence du génie, sur ses privilèges, ses attributs, ses conditions extérieures, une théorie qui scandalisa singulièrement les esprits paisibles et sensés. […] Il est juste de reconnaître que le savant champion de la thèse paradoxale que nous venons de discuter a su la défendre avec beaucoup de verve et de talent.
Les démocraties peuvent être inférieures aux aristocraties pour les grands talents et les œuvres supérieures ; mais tout le monde y est plus ou moins instruit, plus ou moins éclairé. […] Un écrivain démocrate d’un rare talent, M.
Ce n’est pas la peur du mot propre qui lui fait décrire ce qu’il faudrait nommer, c’est la raideur de sa poétique et la médiocrité de son talent ; il n’est imprécis que par impuissance et il n’est très mauvais que quand il est imprécis. […] Pour être un écrivain, il suffit d’avoir le talent naturel de son métier, d’exercer ce métier avec persévérance, de s’instruire un peu plus chaque matin et de vivre toutes les sensations humaines. […] Féré, qui philosophe volontiers et pas sans talent, « sur l’utilité privée et publique, sur l’utilité dans le milieu actuel qui est la morale actuelle ». […] Pour se la procurer, il ne faut ni argent, comme dans le commerce ; ni étude, ni talent, comme il était d’usage dans les anciennes sociétés littéraires ; à cette heure, vous n’avez besoin que d’adresse : de l’adresse et encore de l’adresse. […] Cependant le poète (rime, allitération) subit de pareilles associations, mais il doit avoir le talent de les rendre logiques, ce qui n’a guère lieu dans le rêve pur et simple.
Une condition pénible, accablante, tient bien réellement à la gêne une intelligence qui souffre, un talent qui veut prendre l’essor.
Mais avec du talent, de la conscience, une connaissance solide de la langue, on se tire avec honneur de la difficulté.
Maurice Barrès J’aime beaucoup Moréas et je fais grand cas de son talent ; c’est un artiste qui joint aux préoccupations du symbole le plus grand souci de la forme de la langue qu’il voudrait renouveler et, en cela, il prolonge les parnassiens.
Autrefois, une douzaine de personnes dont quelques-unes pouvaient avoir du talent, et avec qui les autres marchaient bien d’accord rédigeaient ensemble un journal, sur une grande table, où chacun avait sa place marquée.
Pour donner à la fois une idée du Poëme & du talent de l’Interprete, nous croyons devoir mettre sous les yeux du Lecteur le morceau où sont décrits les douze signes du Zodiaque.
On prépare pour l’Exposition une grande carte des récifs et des profondeurs des côtes de France ; ce titre donnerait une bien médiocre idée des talents de l’auteur ; aussi a-t-il dénommé sa carte lithologico-isboathométrique.
Cette œuvre, non de talent, mais de conscience et de liberté, a été généreusement protégée contre bien des inimitiés par le public, parce que le public est toujours, aussi lui, consciencieux et libre.
Quand il voit chaque soir ce peuple si intelligent et si avancé qui a fait de Paris la cité centrale du progrès, s’entasser en foule devant un rideau que sa pensée, à lui chétif poète, va soulever le moment d’après, il sent combien il est peu de chose, lui, devant tant d’attente et de curiosité ; il sent que si son talent n’est rien, il faut que sa probité soit tout ; il s’interroge avec sévérité et recueillement sur la portée philosophique de son œuvre ; car il se sait responsable, et il ne veut pas que cette foule puisse lui demander compte un jour de ce qu’il lui aura enseigné.
Et c’est surtout dans ces articles dangereux, qu’il fait briller le plus sa dialectique & le talent de développer.
Par parenthèse, j’oserai blâmer cette clémence, car, en frappant sur un talent faux et perverti, on raffermit l’opinion publique, ce tonneau plein de vilaines choses qu’il est toujours bon de recercler !
Si la Fontaine avait vécu davantage dans la bonne compagnie, elle lui aurait conseillé d’exercer son talent sur des objets plus dignes d’elle que des pies margots et des hérons au long cou328. […] La prison où nous sommes libres, c’est l’esprit de notre temps, le génie de notre nation, le talent personnel que chacun de nous tient de sa nature et de son éducation. […] Des critiques sont heureux de nous dire que le vice, la vertu, le génie, le talent sont de simples produits comme le vitriol et le sucre. […] Faire vivre, c’est là son talent. […] « Si Boileau avait vécu alors (à l’époque où la satire vi vit le jour) dans la bonne compagnie, elle lui aurait conseillé d’exercer son talent sur des objets plus dignes d’elle que des chats, des rats et des souris. » Ibid.
Adam a beaucoup de talent. […] Mais cela n’empêche point qu’il y ait bien du talent dans cette agonie en un volume. […] Cette sorte de renaissance d’un joli talent nous fait un singulier plaisir. […] Pour peu qu’avec cela il ait du talent… Or il en a. […] Il était déjà plein de talent.
Cette pensée, il l’a poursuivie avec une persévérance et une habileté qui prouvera aux plus incrédules toute la souplesse de son talent. […] Plusieurs de ces leçons révèlent un remarquable talent d’analyse ; mais ce talent ne s’applique pas avec le même empressement à tous les éléments d’une époque donnée, ou plutôt il prend plaisir à circonscrire le champ de ses études, en déterminant a priori les éléments qu’il se propose d’interroger. […] Y a-t-il une comparaison possible entre le talent oratoire de M. […] Le talent de M. de Vigny se distingue surtout par la grâce, la délicatesse, et semble convenir expressément à la plainte. […] La thèse contraire à celle que je soutiens a été défendue plusieurs fois avec un talent remarquable ; mais l’élégance et la vigueur du plaidoyer n’ont pas altéré ma conviction.
Nous respectons beaucoup trop le talent de M. […] Le talent qui n’a pourtant pas d’autre exutoire immédiat que ce cloaque du chantage et de la réclame est forcé de le traverser à la nage et s’y enlise neuf fois sur dix. […] Le fameux critique des Lundis ne se recommandait pas précisément par la beauté du caractère, et quant au talent, nous verrons ce que la postérité de demain en décidera. […] Émile Goudeau qui écrit ici, à côté de moi et dont j’aime le talent, a jugé que le temps était enfin venu de se déshonorer quelque peu. […] Il les déshonore à fond et il a tellement cela dans le cœur qu’il déniche parfois le plus remarquable talent d’expression.
Cousin laissent subsister tous les éloges qui sont dus à son merveilleux esprit et à son grand talent ; mais on est affranchi désormais envers lui d’une admiration par trop respectueuse.
Soumet, mort ces jours derniers, appartenait par son talent et par ses succès à une école qu’on est encore accoutumé d’appeler l’école moderne.
On a remarqué souvent que rien n’est plus malaisé au théâtre que de montrer le parfait contentement : les scènes de désir contrarié, de passion désespérée, abondent, et les talents médiocres y réussissent sans trop de peine.
Le talent de Paul Fort est une manière de sentir autant qu’une manière de dire.
Cet ouvrage fit dans l’art dramatique une révolution dont Molière a eu l’honneur, parce que ce fut son talent qui la signala avec éclat. « Avant Mélite, dit Corneille dans sa préface, on n’avait jamais vu que la comédie fit rire sans personnages ridicules, tels que les valets bouffons, les parasites, les capitans, les docteurs, etc.
Ce que vous en retirerez conservera bien peut-être quelque apparence d’esprit, de talent, de génie, mais ce sera pétrifié.
Puisque Virgile et Racine reviennent si souvent dans notre critique, tâchons de nous faire une idée juste de leur talent et de leur génie.
Leur talent est trop grand : il couvre tout. […] C’est un poète plein de promesses, d’un talent déjà docte et rare. […] La fermeté du cœur lui tient lieu de science et de talent. […] Elle lui coûte cher : il l’a payée de tout son talent. […] Quand il ne force pas son talent, M.
C’eût été tant pis pour lui — qui n’a fait nulle part preuve de plus de talent, — mais c’eût été tant mieux pour l’histoire de la littérature ! […] Dans l’histoire de toutes les langues, l’histoire de la littérature commence avec l’histoire de l’art d’écrire, et c’est celle des victoires du talent sur l’érudition. […] Mais la vraie dupe, c’est le talent, que l’on confond avec ses apparences ; le talent, qu’il n’est point si facile de reconnaître parmi les contrefaçons qu’on en fait ; le talent, qui ne s’impose enfin sans le secours de la critique que dans la mesure où il flatte les goûts, les modes, et les manies du jour, c’est-à-dire, en bon français, dans la mesure où il est le plus éphémère et le plus contestable. […] Coppée, qui est académicien, voit-il donc dans cette confusion du visage et du masque, du talent et de son contraire ? […] Et, au fait, quand on n’a pas de génie, n’est-ce point surtout alors qu’il faut avoir du talent, du métier, et de la main ?
Ceci bien posé, certains artistes ont le très rare et précieux talent d’émouvoir. […] Son talent, paysage bizarre, est un reflet du Parthénon dans le Rhin. […] Dans ce groupement unique de génies et de talents divers chacun gardait sa personnalité et la déterminait davantage. […] C’est que le talent de notre auteur a de singuliers caprices. […] Il y a sous ce vêtement burlesque assez de talent pour animer quinze pessimistes tous jaloux les uns des autres.
De la culture classique il n’a retenu que ce beau talent d’écrire, mis au service de quels appétits ! […] J’attribue ce retard, irréparable aujourd’hui, d’abord à cette secousse de la guerre qui, durant la période où son talent allait s’épanouir, l’a détournée des aventures et des émotions fictives. […] La première est celle du succès de vogue dont s’accompagne toute apparition d’un talent nouveau, quand il n’est pas, — ainsi Baudelaire, ainsi Stendhal, — iniquement méconnu. […] On dit d’eux qu’ils sont « démodés », expression d’une vulgarité attristante qui assimile le talent littéraire à la coupe des robes ou à la forme des chapeaux. […] Ils restent les chefs de la pensée française, précisément par cette maîtrise de leurs propres dons, par ce contrôle exercé sur leur talent, et pour ne s’être jamais permis l’outrance de leurs facultés.
De ce haut état où le portait la méditation religieuse, comment consentir à descendre dans le détail de la vie, à s’intéresser aux passions de l’homme, à ses misères, à ses grandeurs, à ses talents, au génie, à la beauté, à la jeunesse, à la gloire ? […] Massillon le qualifie d’homme de toutes les sciences et de tous les talents 120. […] Gonzague, des utiles talents de le Tellier, et de cette fortune qui ressemble un peu au légitime avancement d’un fonctionnaire exact et capable. […] Orthodoxe dans la doctrine, Bossuet ne le fut pas moins dans la méthode ; il eut pour lui, avec la gloire du bon exemple, la supériorité du talent. […] Tantôt l’énormité de ses erreurs le révolte ; tantôt les prodigieuses ressources de ce talent lui tirent des paroles d’admiration, qui ne sont pas de vaines atténuations du tort qu’il entend bien lui faire par ses réponses.
Admirablement placés pour juger le talent ou le métier d’un auteur, elles ne le sont nullement pour reconnaître à ses traits extraordinaires la présence du génie. […] Nous savons, bien que nous sommes des forces, mais comment utiliser nos talents ? […] Car je tiens à le dire ici, quoique le talent de Zola soit reconnu de tout le monde, de rares savants, seulement quelques docteurs ont su pénétrer le sens de son œuvre, et personne, même ceux qui se dirent ses disciples, n’en ont compris toute la pureté. […] Guy de Maupassant avec la fugue lyrique et le large talent d’Émile Zola, un auteur d’historiettes plaisantes avec le grand poète épique de la vie contemporaine. […] Nous vous dirons très nettement ce que nous pensons, sans égards pour un talent qui s’est abaissé à une pareille besogne, sans indulgence même pour une erreur qui, excusable au début peut-être, est devenue criminelle par l’acharnement mis à la soutenir, sans pitié pour l’homme qui ne veut pas confesser avoir fait fausse route et qui ose se déclarer tout prêt, si on ne l’acquitte, à marcher de l’avant, dût-il déchaîner sur le pays les pires catastrophes.
Louis XIV ne créa pas les talents ; il leur ouvrit la carrière et il les régla. […] Tout en était abaissé, vertu et talents, forcés d’être séditieux pour ne pas plier sous le premier ministre, ou de s’avilir pour ne lui pas faire ombrage ; tout, jusqu’à la condition de courtisan, devenue la domesticité du premier ministre. […] Par une convenance admirable, les talents parurent appropriés aux différents âges et aux besoins de conscience de Louis XIV. […] Après Bossuet, parut, comme à propos, pour accommoder la parole chrétienne à l’attention plus forte du roi entrant dans l’âge viril, un prédicateur doué du talent de raisonnement et d’analyse au même degré que Bossuet possédait le talent de peindre.
Taine proclame que tous les hommes de talent sont des produits de leurs milieux. […] Alors je me mets à crier et à m’emporter plus fort que lui, avec tout le soulèvement des nerfs que je commence à éprouver pour cet homme de talent, mais sans opinion à lui, et toujours l’humble serviteur d’une opinion consacrée, et dont la voix baisse et dont la colère prend des tons pleurards, quand il rencontre un caractère qui montre les dents. […] » 24 décembre Accrochés ce soir à la taverne de Lucas par Paul Baudry, il nous emmène à son atelier qui est de l’autre côté de la rue, et nous fait voir une de ces grandes machines pour l’Opéra, où, en dépit de beaucoup de talent, il me fait l’effet de Goltzius cherchant Michel-Ange. […] Hors le moderne qu’ils méprisent, les plus vrais talents, tels que Baudry, sont toujours amenés à refaire ce que de plus forts qu’eux ont déjà peint. […] On ne sent chez ce peinture de talent, ni service ni cuisine, et, ce soir, traîne encore, non enlevé, le mince os d’une côtelette sur une assiette, reste du déjeuner.
Quoique nous ne puissions suivre qu’obscurément l’histoire des peuples aryens depuis leur patrie commune jusqu’à leurs patries définitives, nous pouvons affirmer cependant que la profonde différence qui se montre entre les races germaniques d’une part et les races helléniques et latines de l’autre, provient en grande partie de la différence des contrées où elles se sont établies, les unes dans les pays froids et humides, au fond d’âpres forêts marécageuses ou sur les bords d’un océan sauvage, enfermées dans les sensations mélancoliques ou violentes, inclinées vers l’ivrognerie et la grosse nourriture, tournées vers la vie militante et carnassière ; les autres au contraire au milieu des plus beaux paysages, au bord d’une mer éclatante et riante, invitées à la navigation et au commerce, exemptes des besoins grossiers de l’estomac, dirigées dès l’abord vers les habitudes sociales, vers l’organisation politique, vers les sentiments et les facultés qui développent l’art de parler, le talent de jouir, l’invention des sciences, des lettres et des arts. — Tantôt les circonstances politiques ont travaillé, comme dans les deux civilisations italiennes : la première tournée tout entière vers l’action, la conquête, le gouvernement et la législation, par la situation primitive d’une cité de refuge, d’un emporium de frontière, et d’une aristocratie armée qui, important et enrégimentant sous elle les étrangers et les vaincus, mettait debout deux corps hostiles l’un en face de l’autre, et ne trouvait de débouché à ses embarras intérieurs et à ses instincts rapaces que dans la guerre systématique ; la seconde exclue de l’unité et de la grande ambition politique par la permanence de sa forme municipale, par la situation cosmopolite de son pape et par l’intervention militaire des nations voisines, reportée tout entière, sur la pente de son magnifique et harmonieux génie, vers le culte de la volupté et de la beauté. — Tantôt enfin les conditions sociales ont imprimé leur marque, comme il y a dix-huit siècles par le christianisme, et vingt-cinq siècles par le bouddhisme, lorsque autour de la Méditerranée comme dans l’Hindoustan, les suites extrêmes de la conquête et de l’organisation aryenne amenèrent l’oppression intolérable, l’écrasement de l’individu, le désespoir complet, la malédiction jetée sur le monde, avec le développement de la métaphysique et du rêve, et que l’homme dans ce cachot de misères, sentant son cœur se fondre, conçut l’abnégation, la charité, l’amour tendre, la douceur, l’humilité, la fraternité humaine, là-bas dans l’idée du néant universel, ici sous la paternité de Dieu. — Que l’on regarde autour de soi les instincts régulateurs et les facultés implantées dans une race, bref le tour d’esprit d’après lequel aujourd’hui elle pense et elle agit ; on y découvrira le plus souvent l’œuvre de quelqu’une de ces situations prolongées, de ces circonstances enveloppantes, de ces persistantes et gigantesques pressions exercées sur un amas d’hommes qui, un à un, et tous ensemble, de génération en génération, n’ont pas cessé d’être ployés et façonnés par leur effort : en Espagne, une croisade de huit siècles contre les Musulmans, prolongée encore au-delà et jusqu’à l’épuisement de la nation par l’expulsion des Maures, par la spoliation des juifs, par l’établissement de l’inquisition, par les guerres catholiques ; en Angleterre, un établissement politique de huit siècles qui maintient l’homme debout et respectueux, dans l’indépendance et l’obéissance, et l’accoutume à lutter en corps sous l’autorité de la loi ; en France, une organisation latine qui, imposée d’abord à des barbares dociles, puis brisée dans la démolition universelle, se reforme d’elle-même sous la conspiration latente de l’instinct national, se développe sous des rois héréditaires, et finit par une sorte de république égalitaire, centralisée, administrative, sous des dynasties exposées à des révolutions. […] Il y a donc au centre de chacun de ces trois groupes un élément commun, la conception du monde et de son principe, et s’ils diffèrent entre eux, c’est que chacun combine avec l’élément commun, un élément distinct : ici la puissance d’abstraire, là la faculté de personnifier et de croire, là enfin le talent de personnifier sans croire. […] Un seul homme, Stendhal, par une tournure d’esprit et d’éducation singulière, l’a entrepris, et encore aujourd’hui la plupart des lecteurs trouvent ses livres paradoxaux et obscurs ; son talent et ses idées étaient prématurés ; on n’a pas compris ses admirables divinations, ses mots profonds jetés en passant, la justesse étonnante de ses notations et de sa logique ; on n’a pas vu que sous des apparences de causeur et d’homme du monde, il expliquait les plus compliqués des mécanismes internes, qu’il mettait le doigt sur les grands ressorts, qu’il importait dans l’histoire du cœur les procédés scientifiques, l’art de chiffrer, de décomposer et de déduire, que le premier il marquait les causes fondamentales, j’entends les nationalités, les climats et les tempéraments ; bref, qu’il traitait des sentiments comme on doit en traiter, c’est-à-dire en naturaliste et en physicien, en faisant des classifications et en pesant des forces.
Tous les citoyens sont admissibles à toutes les fonctions, sans aucune autre distinction que celle des vertus et des talents. […] On honora ce groupe de républicains pour ses intentions, on l’admira pour ses talents, on le plaignit pour ses malheurs, on le regretta à cause de ses successeurs, et parce que ses chefs en tombant ouvrirent une longue marche à l’échafaud. […] Je dois presque tout à un homme de cœur et de talent, son voisin, M. de la Sicotière, qui a fait, d’après nature et d’après les traditions encore vivantes, le portrait de son immortelle compatriote.
Meyer lui-même refuse le talent, a eu le bon esprit d’être modeste : il n’a pas cherché à étouffer iti à embellir la rude légende du xe siècle. […] A vrai dire, on ne saurait nier que quelques-uns aient eu du talent. […] Mais le talent est rare : et pour quelques heureuses trouvailles, qu’on peut porter au compte des remanieurs, la somme de leurs méfaits est prodigieuse.
Vers ce temps, comme s’il sentait qu’il doit commencer à se réconcilier avec l’idiome natal et à se diriger vers le but où l’appelle son secret talent, il se remet à lire les auteurs anglais, et surtout les plus récents, ceux qui, ayant écrit depuis la révolution de 1688, unissent à la pureté du langage un esprit de raison et d’indépendance, Swift, Addison ; puis, lorsqu’il en vient aux historiens, il est beau d’entendre avec quelle révérence il parle de Robertson et de Hume auxquels on l’adjoindra un jour : La parfaite composition, le nerveux langage, les habiles périodes du docteur Robertson m’enflammaient jusqu’à me donner l’ambitieuse espérance que je pourrais un jour marcher sur ses traces : la tranquille philosophie, les inimitables beautés négligées de son ami et rival, me forçaient souvent de fermer le volume avec une sensation mêlée de plaisir exquis et de désespoir. […] En se faisant imprimer il avait surtout cédé au désir de son père ; comme il y avait alors quelques ouvertures pour la paix et qu’il eût désiré entrer dans la diplomatie, il s’était laissé persuader que cette preuve publique de son talent aiderait les démarches de ses amis.
Et dans le même ouvrage, à un autre endroit, parlant des gens à la mode et montrant l’inconvénient de cette prétention pour les diverses conditions du magistrat, du militaire, il ajoutait : « L’homme de lettres, qui, par des ouvrages travaillés, aurait pu instruire son siècle et faire passer son nom à la postérité, néglige ses talents et les perd, faute de les cultiver : il aurait été compté parmi les hommes illustres, il reste un homme d’esprit de société. » Ces deux passages rapprochés renferment toute la destinée de Duclos comme homme d’esprit et comme écrivain. […] En tout, c’est Duclos vu dans un beau jour, dans la netteté de son bon sens et avant dîner ; c’est bien l’homme qui avait le droit de dire de lui-même, en faisant assez bon marché de ses ouvrages : « Mon talent à moi, c’est l’esprit. » 57.
J’ai tâché, dans ce que j’ai dit aujourd’hui à son sujet, de prouver que ce grave et puissant prédicateur, dont il ne faut pas faire un talent triste et une parole terne, avait, en effet, la finesse, la pénétration, l’à-propos et la science de l’occasion, autant que les plus fortes armes de la démonstration oratoire, et qu’à travers ce qu’il semblait ignorer et ce qu’il aimait mieux ne pas voir pour marcher comme à l’aveugle et plus hardiment, il avait l’œil très ouvert et très clairvoyant sur les hommes et les choses qui l’entouraient. — Il resterait à citer et à discuter un portrait de Bourdaloue tracé par Fénelon dans ses Dialogues sur l’éloquence, portrait où la diversité et presque l’antipathie des natures se fait sentir, et où Fénelon exprime déjà sur ce talent trop réglé et trop uni à son gré quelques-uns des dégoûts modernes : mais il s’y juge peut-être lui-même encore plus que Bourdaloue, et c’est en parlant de Fénelon qu’il y aurait à y revenir un jour.
C’est ainsi encore que sur lui, sur sa propre race, sur les qualités et les défauts des siens, de son frère, de sa femme (passe encore), mais aussi de sa fille, de son fils, sur le plus ou moins de sensibilité de celui-ci, sur son absence d’imagination, ses bornes d’esprit et de talent, et son « raccourcissement de génie », il dit et écrit tout ce qu’il a observé, tout ce qu’il pense ou qu’il conjecture, sauf à être lu de quelques-uns des intéressés et notamment de son fils même, après sa mort. […] Ils se plaignaient, entre autres choses, de ce que mon père menait avec lui à l’auditoire (à l’audience) un grand chien à collier, à peu près comme était le mien, mort depuis peu et nommé Calot… Et il continue sur ce ton, en passant aux commencements de la fortune et de l’élévation de son père, due tout entière à son mérite et à ses talents dès qu’ils furent connus.
Elle le protégeait en toute rencontre ; quand l’âge de l’étude vint pour lui, elle l’y excita en lui faisant honte de négliger ses talents ; elle était sa confidente la plus chère avant qu’il connût le mal : c’était son bon génie. […] Et toute cette familiarité du « vieux frère » (comme il s’appelle) se relève d’une constante admiration pour cette sœur qu’il estime évidemment supérieure à lui par les talents et la beauté de l’intelligence, par le génie, il articule le mot : « S’il y a un être créé digne d’avoir une âme immortelle, c’est vous, sans contredit ; s’il y a un argument capable de me faire pencher vers cette opinion, c’est votre génie64. » Il est prodigue envers elle d’attentions, de petits présents ; il entre dans ses peines, il tremble pour sa vie ; il nous la fait voir avec « un je ne sais quoi de gracieux, un air de dignité tempérée par l’affabilité », que les mémoires de la margrave ne nous indiqueraient pas ; il nous intéresse, en un mot, par l’affection respectueuse qu’elle lui inspire, à cette frêle créature d’élite, à « ce corps si faible et cette santé délicate à laquelle est jointe une si belle âme ».
Un véritable citoyen servira sa patrie de son mieux par son esprit et par ses talents, mais n’ira pas écrire sur le pacte social pour nous faire suspecter la légitimité des gouvernements et nous accabler du poids des chaînes que nous n’avions pas encore senties. […] Elle s’en plaignit au grand-papa, c’est-à-dire au premier ministre, pour qu’on châtiât Fréron : de quoi Horace Walpole, dès qu’il le sut, se montra très contrarié : « Nous aimons tant la liberté de l’imprimerie, disait-il, que j’aimerais mieux en être maltraité que de la supprimer. » Fréron n’avait fait, d’ailleurs, que rapporter un ouvrage traduit de l’anglais, et il n’y avait de reproche à lui faire que d’avoir reproduit cette traduction : « Dans l’exacte justice, disait M. de Choiseul, c’est le censeur qui a tort et non pas Fréron ; ils seront cependant corrigés l’un et l’autre. » Mme de Choiseul avait été mise en mouvement pour cette affaire, mais elle sent vite qu’il faut se mêler le moins possible de toutes ces tracasseries où assez d’autres se complaisent : Ne nous fourrons pas, ma chère enfant, dans les querelles littéraires ; si nous nous en sommes mêlées, c’était pour en tirer notre ami, et non pour y entrer : elles ne sont bonnes qu’à déprécier les talents, mettre au jour les ridicules.
Mlle Eugénie de Guérin, et, depuis sa mort, les autres membres de la famille, ont tenu à établir la distinction qui est à faire entre la foi de Maurice de Guérin et toutes les apparences contraires qui semblent résulter du fond même de son talent. […] Mais la mort est une chose, et le talent en est une autre.
L’apparition de pareils talents et de pareils caractères sera peut-être le principal avantage que des temps malheureux auront procuré à la postérité. […] Je dis imitation, car avec son talent d’écrire Mme Roland n’est pas originale.
Un principe bien simple me dirige dans ces reprises d’études déjà faites tant de fois par des écrivains de talent, et qu’il peut sembler inutile de recommencer. […] Sa Majesté s’attend que vous satisferez au premier, en leur donnant vous-même, sans vous en rapporter à personne, les susdits cinq écus, et en interrogeant si bien ceux qui se diront déserteurs de Mons, que vous ne soyez pas pris pour dupe, et ne donniez pas d’argent à ceux qui n’en viendront pas… Je ne vous dis point que Sa Majesté ne confierait point son argent à un autre que vous, étant fort persuadée que vous l’administrerez de manière qu’elle aura tout sujet de s’en louer : je lui en répondrais bien, s’il en était besoin… » Ainsi sa sagesse, son égalité d’humeur et son ménagement des hommes (dans ses rapports avec M. de Quincy), sa probité et son intégrité dans le maniement et l’emploi rigoureux des fonds, étaient reconnus autant que ses talents militaires ; il avait l’entière confiance du ministre et du maître.
Dès la préface du premier volume, Perrault prenait position comme un homme du monde engagé contre des pédants et des cuistres : il se représente bataillant contre « un certain peuple tumultueux de savants qui, entêtés de l’antiquité, n’estiment que le talent d’entendre bien les vieux auteurs ». […] Prises en elles-mêmes, à leur place et à leur date dans la polémique, les Réflexions sur Longin prouvent une fois de plus combien Boileau est incapable de composer un ouvrage lié et suivi, de saisir franchement et fortement un sujet, et d’en faire une exposition directe et méthodique : son manque de souffle et de talent oratoire, ici encore, le trahit.
Je n’ai pas assez entendu le Père Monsabré pour définir son talent avec une entière sécurité. […] V J’ai entendu d’autres prédicateurs du carême, mais en courant et avec trop peu de suite pour avoir un sentiment bien arrêté soit sur le talent de chacun, soit sur l’état actuel de l’éloquence sacrée.
Tout cela nous apparaîtra à mesure que nous parcourrons ses ingénieuses études et nous permettra sans doute de définir son talent. […] L’amour, l’intelligence, le talent, l’esprit même, tout cela non seulement peut se passer du monde, mais a toujours vécu hors de lui, loin de lui, sauf par accident.
Les poètes de cour, les rivaux et ennemis littéraires de Ferdousi prétendirent que le succès de son ouvrage tenait à l’intérêt des sujets bien plutôt qu’au talent de l’auteur. […] Mais, en passant dans le monde oriental où tout nous est étranger, il est difficile de se prêter à ces traditions merveilleuses, gigantesques, qui ne nous concernent plus à aucun degré, et l’on est embarrassé, à travers ces flots de couleur nouvelle, de faire la part de ce qui revient en propre au talent du poète.
Quoique Les Confessions n’aient paru qu’après la mort de Rousseau et quand déjà son influence était pleinement régnante, c’est là qu’il nous est plus commode aujourd’hui de l’étudier avec tous les mérites, les prestiges et les défauts de son talent. […] L’idée d’écrire des Confessions semble si naturelle à Rousseau, et si conforme à son humeur comme à son talent, qu’on ne croirait pas qu’il y ait eu besoin de la lui suggérer.
Sitôt qu’il est placé auprès de Monseigneur, c’est-à-dire auprès de l’héritier présomptif et de celui qui, selon toute apparence, sera roi un jour, d’Antin s’exerce à l’assiduité : il est sage par tempérament et peu livré aux emportements de la jeunesse d’alors, ce qui lui laisse tout son temps pour remplir ses devoirs et pour faire sa cour, « à quoi, dit-il, on me trouvait beaucoup de talent ». […] Le fait est que d’Antin, connu et apprécié pour des talents militaires distingués, n’était point un foudre de guerre.
Il y a dans la littérature le domaine de l’imagination, les talents poétiques proprement dits, qui ont en eux un don de création et de génie ; ceux-là ne se suscitent point à volonté : Dieu et la nature y pourvoient ; il faut les laisser naître. […] Nous touchons là au genre de talent et aussi à ce qui sera le défaut général de l’abbé Barthélemy dans Anacharsis : un peu trop d’assaisonnement dans l’érudition, et un affaiblissement élégant de l’Antiquité par les grâces mondaines.
Le style est le côté faible du talent d’Henry Murger. […] L’auteur déclare qu’il professe une opinion tout opposée sur le talent de M.
Indépendamment de l’intérêt de la recherche qu’on aime à faire des premiers produits d’un talent quelconque, le dernier volume de Joseph de Maistre mérite d’être lu pour lui-même. […] Elle avait des pages frappantes et charmantes, signées de leur talent même, et qui disaient le nom de Joseph de Maistre sans le prononcer.
Jouffroy n’a mieux montré son genre de talent, l’invention circonspecte et féconde, la floraison innombrable d’idées ramifiées et entre-croisées qui s’épanouissent en tremblant, prêtes à se replier et à se fermer au moindre orage. […] Avec un grand talent de psychologue, un zèle admirable, des précautions passionnées, de belles découvertes partielles, vous étiez homme.
SAINTE-BEUVE CHRONIQUEUR Un écrivain de conscience et de talent, M.
Cet Adolphe Dumas n’est pas sans feu ni sans talent ; mais pas un grain de goût.
Ainsi on peut expliquer qu’il n’ait rien eu encore à opposer de comparable, comme talent et science, aux chefs principaux de l’Université, aux Guizot, Cousin, Villemain.
Aussi, dès qu’il se borne à peindre l’art et les artistes dans ce moyen âge, où il y avait du moins harmonie et stabilité pour les âmes, quelque chose de calme, de doré et de solennel succède aux délirantes émotions qu’il tirait des désordres du présent ; depuis l’atelier de maître Martin le tonnelier, qui est un artiste, jusqu’à la cour du digne landgrave de Thuringe, où se réunissent autour de la jeune comtesse Mathilde, luth et harpe en main, les sept grands maîtres du chant, partout dans cet ordre établi, on sent que le talent n’est plus égaré au hasard, et que l’œuvre de chacun s’accomplit paisiblement ; s’il y a lutte encore par instants dans l’âme de l’artiste, le bon et pieux génie finit du moins par triompher, et celui qui a reçu un don en naissant ne demeure pas inévitablement en proie au tumulte de son cœur.
J’admire et je vénère le talent d’un illustre poète, je crois aux grandes qualités de son cœur ; mais le cœur humain est là aussi, et je me risquerai à dire qu’une pièce de théâtre qui lui fera motiver au crayon un si chaleureux bravo, sera celle qui n’inquiétera jamais sa gloire.
Il y a tant de maux sur la terre, cependant, qu’il semblerait que tout ce qui arrive dans le monde, doit être une jouissance pour l’envie ; mais elle est si difficile en malheurs, que s’il reste de la considération à côté des revers, un sentiment à travers mille infortunes, une qualité parmi des torts ; si le souvenir de la prospérité relève dans la misère, l’envieux souffre et déteste encore : il démêle, pour haïr, des avantages inconnus à celui qui les possède ; il faudrait, pour qu’il cessât de s’agiter, qu’il crut tout ce qui existe inférieur à sa fortune, à ses talents, à son bonheur même ; et il a la conscience, au contraire, que nul tourment ne peut égaler l’impression aride et desséchante, que sa passion dominatrice produit sur lui.
À leur tête, le roi, qui a fait la France en se dévouant à elle comme à sa chose propre, finit par user d’elle comme de sa chose propre ; l’argent public est son argent de poche, et des passions, des vanités, des faiblesses personnelles, des habitudes de luxe, des préoccupations de famille, des intrigues de maîtresse, des caprices d’épouse gouvernent un État de vingt-six millions d’hommes avec un arbitraire, une incurie, une prodigalité, une maladresse, un manque de suite qu’on excuserait à peine dans la conduite d’un domaine privé Roi et privilégiés, ils n’excellent qu’en un point, le savoir-vivre, le bon goût, le bon ton, le talent de représenter et de recevoir, le don de causer avec grâce, finesse et gaieté, l’art de transformer la vie en une fête ingénieuse et brillante, comme si le monde était un salon d’oisifs délicats où il suffit d’être spirituel et aimable, tandis qu’il est un cirque où il faut être fort pour combattre, et un laboratoire où il faut travailler pour être utile Par cette habitude, cette perfection et cet ascendant de la conversation polie, ils ont imprimé à l’esprit français la forme classique, qui, combinée avec le nouvel acquis scientifique, produit la philosophie du dix-huitième siècle, le discrédit de la tradition, la prétention de refondre toutes les institutions humaines d’après la raison seule, l’application des méthodes mathématiques à la politique et à la morale, le catéchisme des droits de l’homme, et tous les dogmes anarchiques et despotiques du Contrat social Une fois que la chimère est née, ils la recueillent chez eux comme un passe-temps de salon ; ils jouent avec le monstre tout petit, encore innocent, enrubanné comme un mouton d’églogue ; ils n’imaginent pas qu’il puisse jamais devenir une bête enragée et formidable ; ils le nourrissent, ils le flattent, puis, de leur hôtel, ils le laissent descendre dans la rue Là, chez une bourgeoisie que le gouvernement indispose en compromettant sa fortune, que les privilèges heurtent en comprimant ses ambitions, que l’inégalité blesse en froissant son amour-propre, la théorie révolutionnaire prend des accroissements rapides, une âpreté soudaine, et, au bout de quelques années, se trouve la maîtresse incontestée de l’opinion À ce moment et sur son appel, surgit un autre colosse, un monstre aux millions de têtes, une brute effarouchée et aveugle, tout un peuple pressuré, exaspéré et subitement déchaîné contre le gouvernement dont les exactions le dépouillent, contre les privilégiés dont les droits l’affament, sans que, dans ces campagnes désertées par leurs patrons naturels, il se rencontre une autorité survivante, sans que, dans ces provinces pliées à la centralisation mécanique, il reste un groupe indépendant, sans que, dans cette société désagrégée par le despotisme, il puisse se former des centres d’initiative et de résistance, sans que, dans cette haute classe désarmée par son humanité même, il se trouve un politique exempt d’illusion et capable d’action, sans que tant de bonnes volontés et de belles intelligences puissent se défendre contre les deux ennemis de toute liberté et de tout ordre, contre la contagion du rêve démocratique qui trouble les meilleures têtes et contre les irruptions de la brutalité populacière qui pervertit les meilleures lois.
Eux qui ne savent rien, qui n’ont même, le plus souvent, aucune connaissance historique de la langue (et il y paraît à la barbarie de leur syntaxe et aux impropriétés de leur vocabulaire), ils ont des mépris imbéciles et entêtés pour les plus beaux génies et pour les plus incontestables talents, dès qu’ils ont reconnu ces dons abominables : le bon sens, une vision lucide des choses et l’aisance à la traduire.
De son talent de poète il a voulu faire une arme justicière, traduisant en une œuvre dialoguée et dramatique sa vision de la régénération sociale.
Silvestre des gaîtés hebdomadaires et bien surprenantes… Quand on ne tiendrait aucun compte du talent qui éclate dans ses poésies lyriques, M.
J’admirais beaucoup ces vers un peu maigres, mais d’une correction des plus plaisantes en cette période de jeunes poètes lâchés, lamartiniens sans génie, hugolâtres sans talents, mussetistes, qui n’avaient du maître que l’envers de sa paresse divine.
L’élite des courtisans se compose d’hommes puissants, au moins indépendants ou par leur fortune, ou par leur rang, ou par l’éminence de leurs talents, même par l’éminence de leurs vertus, l’élévation de leur caractère, et la grandeur de leurs desseins.
Celle des conquérans lui paroissoit moins juste & moins flatteuse que celle de règner sur ses concitoyens par le talent de la parole.
Ils ne voulurent point lui céder la préséance en fait de talent.
L’un n’a qu’un talent bien décidé, & l’autre les réunit tous, la lyre & le compas, le cothurne & le brodequin, la trompette héroïque & la plume de Clio.
L’auteur d’un poëme en quatre chants sur la musique, où l’on trouve beaucoup d’esprit et de talent, prétend que lorsque le genre humain commença, vers le seiziéme siecle, à sortir de la barbarie et à cultiver les beaux arts, les italiens furent les premiers musiciens, et que la societé des nations profita de leur lumiere pour perfectionner cet art.
On n’a pas voulu donner à celui qui étoit né avec le génie de l’architecture, la conduite d’un bâtiment où son talent pût se déploïer.
N’est il pas même permis de croire que c’est au talent de faire usage des instrumens de guerre, lequel nous possedons superieurement aux autres nations, qu’est dûë en partie la reputation de la milice romaine.
Il n’a pas compris qu’à part même le talent de l’exécution il ratait une apothéose.
Le talent réfléchit la vie, et il nous en renvoie toujours l’ignominie ou la noblesse.
La Critique, qui regarde, scrute et analyse, est vaincue par ces sensitives de talent qui se rétracteraient ou tomberaient en poussière sous sa pointe.
Ce genre de roman était passé de mode dès mon enfance, et je n’avais pas assez de talent pour le ressusciter. […] Ce défaut se retrouve jusque dans la prononciation, et c’est ce qui explique l’opposition anglaise contre le talent dramatique de miss Smithson : le public de Londres ne peut lui pardonner son accent. […] Une pareille ostentation de talent me semble impardonnable. […] Or, cette double impression est un triomphe irrécusable pour le talent pittoresque du poète. […] Mais le perfectionnement artificiel de son talent vaudra-t-il ses hardiesses ignorantes ?
Beaucoup d’entre nous acceptent sans réfléchir l’injuste arrêt de Schlegel, qui considérait le talent de Molière tout au plus suffisant pour la farce. […] » Je m’imaginerais d’ailleurs Molière jouant avec plus de talent le maigre chevalier de la Manche que le gros Sancho, rieur et satisfait. […] Elles valaient cependant d’être recueillies, ne fut-ce que pour inspirer à toute âme l’horreur et le dédain de ces calomnies qui, devant l’avenir, ne souillent jamais que ceux qui ont osé s’en faire une arme contre le talent ou la probité. […] Actrice d’un talent rare, elle jouait Agnès de L’École des femmes d’une façon admirable et les applaudissements ne tarissaient pas . […] * Voir ce que nous avons dit du talent d’imitation de Molière au chapitre intitulé Molière comédien.
Il y a quelque chose de plus précieux pour le Moniteur et de plus utile, qu’il doit acquérir et conserver avec plus de soin que le talent et le concours de M. […] Reconnaissons que nul axiome ne pose a priori de limites au génie ou au talent. […] Je n’ai voulu ni discuter des talents, ni peindre des caractères. […] Quel compte rendra cet intendant qui a enfoui le talent de son Seigneur, ce berger qui a sacrifié les brebis pour réconcilier les chiens avec les loups ? […] D’ailleurs, parmi nos jeunes contemporains, nombreux sont ceux qui, sans s’élever encore aux sommets, ont donné déjà des preuves certaines de talent.
Tout en ne leur ménageant pas le tumulte, elle savait aussi s’enthousiasmer des professeurs qui avaient du zèle et du talent. […] Quand Montchrétien fait des tragédies, c’est un talent qu’il développe, non une carrière où il entre. […] qu’en revanche on n’y trouve pas une phrase qui dénote le goût ou le talent de l’observation psychologique ? […] Car tout le monde ne peut pas, comme Boileau, vivre de ses renies ; il faut donc vivre de son talent. […] En revanche, il peint des intérieurs, des mobiliers avec le talent d’un Hollandais.
Le talent pour la chaire servit moins le père Soanen, que la direction. […] Les gens à talent lui en imposoient. […] Ils ne faisoient usage de leur talent, que pour les maladies extérieures. […] Quelques-uns prirent pour du talent le ton & la confiance du moine. […] Ils jugèrent qu’il n’avoit qu’un talent médiocre.
Ils sont nombreux, ils sont puissants ; et, sans compter qu’ils tiennent alors presque tous les journaux, en attendant qu’ils remplissent les Académies reconstituées et réorganisées, ils ne manquent ni de mérite ni de talent. […] et si leurs débuts, — qui sont contemporains du livre de l’Allemagne, ou même antérieurs au Génie du christianisme, — ont passé presque inaperçus, leur talent, nourri dans la solitude et mûri dans l’obscurité, n’en éclate maintenant qu’avec plus de retentissement. […] Il fait un pas de plus, et, s’avisant qu’en littérature ou en art les distinctions des genres et la hiérarchie des talents ne sont peut-être pas « ce qu’un vain peuple pense », il en discerne la raison permanente et la première origine dans la diversité des « familles d’esprits ». […] Il apparaîtra manifestement alors qu’à eux trois, Littré, Taine et Renan, quelque différence de talent qu’il y ait entre eux, — et on peut bien dire que cet honnête homme de Littré n’en a pas eu du tout, — ils ont constitué la critique naturaliste, ou plutôt, et mieux encore, leur critique a donné au « naturalisme » cette cohésion, cette consistance, et cette solidité doctrinales qui avaient toujours fait défaut au romantisme. […] Mais, en attendant, c’est de quoi les contemporains leur ont d’abord été reconnaissants ; et le talent d’écrire qu’on admirait en eux a fait la fortune de leurs doctrines esthétiques.
Fox n’a laissé que du talent, la faveur aveugle de son pays ; la postérité juge les hommes d’État par leurs actes et non par leurs discours. […] Thiers ; la naissance, le caractère, l’opinion, le talent de M. […] Et pendant que cet historien sans style, selon vous, expose, décrit, raconte avec ce prestige de curiosité toujours excitée et toujours satisfaite, qui est la magie de ce talent, qui est plus que le talent, car il le fait oublier par le lecteur, sentez-vous qu’il manque quelque chose à l’historien ?
Je lui fis part de mes avis ; il y ajouta les siens, il me dit ensuite qu’il allait passer quinze ou vingt jours à Saint-Germain ; que je lui fisse, pendant ce temps-là, un dessin, le plus beau que je pourrais imaginer, pour orner ce château, qui était ce qui lui plaisait le plus dans son royaume ; qu’il me priait d’y employer toute mon imagination et mon talent. […] Comme le bruit courait depuis longtemps que ce vieux château était habité par un esprit, que je n’avais cependant jamais vu ni entendu, et que cette fille qui était couchée dans cette tête la faisait remuer de temps en temps, le sot peuple disait que l’esprit s’était déjà emparé de cette grande figure, et qu’il lui faisait mouvoir les yeux et la bouche, comme si elle voulait parler ; les uns en étaient effrayés, et les autres plus malins s’efforçaient de le leur faire croire, quoiqu’ils ne sussent pas qu’il y avait dans cette tête un véritable esprit. » VIII Le roi cependant, à la sollicitation de Mme d’Étampes, lui reprocha de perdre son temps et son talent à faire pour d’autres des vases, des salières, des têtes, des portes, et de négliger les grands ouvrages qu’il lui avait commandés. […] Quand ils eurent fini leurs longs discours, je leur répondis que j’étais au service d’un prince plus amateur des talents que tout autre, et dans le sein de ma patrie, qui était celle des beaux-arts ; que si l’intérêt me faisait agir, je n’avais qu’à rester auprès du grand roi François, qui me donnait un traitement de mille écus d’or, sans compter la facture de mes ouvrages ; de sorte que, tous les ans, il m’en revenait plus de quatre mille ; que cependant j’avais renoncé à cet état magnifique, et laissé en France le fruit de quatre ans de travail. […] Je lui dis ensuite : Mon glorieux maître, vrai rémunérateur des talents et de ceux qui les professent, je vous demande un congé de huit jours, pour un pèlerinage que je veux faire, afin de remercier Dieu, qui m’a prêté son secours, et m’a donné assez de force pour venir à bout de ma statue.
C’était certainement, en effet, le plus étonnant spectacle que la Providence ait jamais offert aux hommes sur un point presque imperceptible du globe, que d’avoir non pas donné à un petit peuple une telle réunion de vertus, de talents et de génies dans ces grands hommes, mais que d’avoir donné à ces grands hommes, dans Athènes, quatre cents ans avant Jésus-Christ, un peuple capable de les discuter et de les admirer. […] « Aussi, ajoute-t-il, nulle autre mort ne rendit Alexandre plus odieux aux Grecs, parce qu’il fit périr au milieu des tourments, et sans l’avoir entendu, un homme très recommandable par ses vertus et ses talents, qui l’avait rappelé à la vie lorsqu’après le meurtre de Clitus il persistait à vouloir se tuer. […] Le seul parti que naturellement tous les citoyens semblent devoir adopter, est de se soumettre de leur plein gré à ce grand homme, et de le prendre pour roi durant sa vie entière. » XXIV Il conclut ici que la royauté ne peut être reconnue à moins que l’individu couronné ne soit évidemment supérieur en talent et en vertu à tous les autres. […] Je ne parle pas d’un quatrième qu’on appelle la noblesse ; car il n’est qu’une conséquence de deux autres, et la noblesse n’est qu’une ancienneté de richesse et de talent.
Au sommet de la hiérarchie dans laquelle il était entré, brillaient comme le prix du talent et de l’activité, aussi bien que comme le privilège de la naissance, l’épiscopat et la Chambre des lords. […] Et comme les institutions libres ont ce beau privilège, que l’art de persuader en est l’âme et que, même corrompues, elles ne peuvent se passer du talent, son amitié et sa haine ne pouvaient être indifférentes à personne et, dans cette arène où luttaient les plus heureux génies de l’Angleterre, la nature l’avait jeté tout armé. […] On ne peut lire sans émotion ce court Essai sur la destinée des gens d’église37, où il montre, avec tant d’esprit et tant d’amertume, le succès assuré de la médiocrité servile et universellement bienveillante de Corusodes et l’abaissement d’Eugenio, opprimé par son talent. […] La jalousie du Parlement d’Irlande, qui n’avait pas été consulté, la défiance naturelle des populations pour toute monnaie nouvelle et surtout pour une monnaie venant d’Angleterre, offraient les éléments d’une résistance que le talent pouvait rendre insurmontable.
Or, ils ont trouvé les partitions de Wagner ; étant musiciens, ils ont été frappés par l’habileté des développements symphoniques, la puissance de l’instrumentation, la richesse harmonique, cet extraordinaire et génial talent de facture, le métier, qu’ils ont vu tout seul… Donc ils ont pris à Wagner ses procédés de développement, d’instrumentation, ses harmonies, les imitant, à leur façon. […] On reconnaît là tout ensemble le zèle, le talent et l’autorité du chef d’orchestre, qui a présidé aux répétitions de l’œuvre : j’ai nommé M. […] Enoncer cette affirmation, c’est prophétiser à coup sûr, mais nous sommes heureux de pouvoir dire notre certitude au jeune et savant musicien qui, depuis plusieurs années déjà, n’a cessé de combattre le bon combat avec tant de zèle, de succès et de talent. […] Jourdain fait un Walther trop immobile et Mme Caron n’a pu s’élever jusqu’à la conception du rôle d’Eva pour lequel la nature particulière de son talent n’a pas les affinités de race.
Il n’y a que les choses qui appartiennent au talent relatif, discutable, faillible, avec ses nuances, ses finesses, ses rétorsions, ses complications, — savantes, si on veut, mais qui ne sont pas, après tout, la grande et incontestable force ; — il n’y a que ces choses qui soient vraiment d’une interprétation difficile et qui aient besoin de l’habileté profonde et exercée d’un traducteur. […] À côté d’Hamlet, de Richard III, d’Othello, de Macbeth, traduits en ces six volumes, auxquels l’imagination et la curiosité vont d’abord et qui sont le plus beau bleu du ciel de Shakespeare, il s’y trouve des pièces de théâtre moins radieuses, qui suffiraient cependant à la gloire d’un homme qui ne serait pas Shakespeare, et avec les difficultés desquelles François Hugo s’est noblement colleté… Le mérite du traducteur, qui est un mérite volontaire, continu, modeste, courageux, une vertu encore plus qu’un talent, a été le sien, et pourquoi ne pas le dire ? […] Pichot et Guizot, il n’y avait peut-être qu’après 1830 qu’on pouvait traduire Shakespeare dans une langue renouvelée, qui ne fût ni celle de Racine, ni celle de Voltaire, ni celle de ce pauvre Ducis, qui, avec un talent bien voisin du génie, n’avait pu rompre cette toile d’araignée de la vieille expression classique et y était mort étouffé. […] » Non seulement Hazlitt ne s’est pas rappelé le vieux lieu commun sur l’éternelle jeunesse des poètes, mais il a oublié bien plus : il a oublié que les poètes n’ont jamais plus de jeunesse et de puissance dans le talent que quand ils n’ont plus ce qu’ils chantent, que ce soit la force de la vie, l’amour, la beauté ou la lumière ; qu’ils aient les yeux crevés ou le cœur percé de la flèche de l’irréparable, — de la flèche qu’on n’en retire plus !
Ce qu’on peut dire au point de vue du talent, c’est que tous ces retards, ces contrariétés qui barrèrent si longuement sa carrière, furent utiles à Malherbe : elles l’empêchèrent de se classer décidément comme poète avant l’heure voulue, et de débuter trop en public dans un temps où il aurait encore porté des restes de couleur de l’école poétique finissante. […] Il s’attacha à lui, prit ses conseils, ne réussit jamais à le satisfaire entièrement, car il avait bien des ignorances involontaires et des nonchalances, mais il réussit une ou deux fois par ses accès de talent à lui donner, honneur insigne !
Elle avait toujours eu un grand goût pour élever les enfants, pour les enseigner, les reprendre, les morigéner : c’était un de ses talents particuliers et prononcés : « J’ai grande impatience, écrivait-elle à Mme de Brinon, la première directrice de ces écolières, de voir mes petites filles et de me trouver dans leur étable… J’en reviens toujours plus affolée. » De Rueil, l’institution fut transférée à Noisy, où elle continua de croître : Mme de Maintenon y consacrait tous les moments qu’elle pouvait dérober à la Cour. […] Elle demande partout aux Dames qu’elle a formées le talent de la récréation autant que celui de la classe : « Rendez vos récréations gaies et libres ; on y viendra. » Louis XIV, à Saint-Cyr, apparaît plein de charme, de noblesse toujours, et parfois d’une certaine bonhomie qu’il n’eut que là.
Ce dernier, au milieu de ses folâtreries, ne laissait pas sans doute de se préparer à la carrière de travaux positifs où ses talents rencontrèrent bientôt leur utile et illustre emploi. […] Cowper, en causant avec ce jeune homme, rencontra avec une joie inexprimable une âme nourrie des plus vives notions du christianisme, tel qu’il le concevait lui-même ; il fut introduit bientôt dans la famille, et dès lors une amitié s’engagea qui décida de toute la vie, et, l’on peut dire, de toutes les facultés et des talents du poète.
Et puis cette nature discrète et décente de Fénelon, qui était le goût suprême, devait être choquée de bien des outrecuidances de Villars, lui reconnaît cependant de l’ouverture d’esprit, de la facilité à comprendre, « avec une sorte de talent pour parler noblement ; quand sa vivacité ne le mène pas trop loin » ; et il ajoute « qu’il fait beaucoup plus de fautes en paroles qu’en actions ». […] Au lieu de rien demander après de tels services rendus, il n’avait qu’à s’abstenir, à se renfermer dans le sentiment de sa juste gloire ; mais alors il eût été un autre ; et il était surtout un talent, un beau zèle et une fortune.
Marolles, appliquant à toute espèce de sujets le nouveau talent qu’il s’était découvert, lâcha donc les rimes par milliers, et de plus il en savait exactement le chiffre : il calculait que, d’une part, l’ensemble de ses traductions en vers des poètes profanes (sans parler d’une géographie sacrée, d’une description de Paris, etc., etc.) formait un total de 133124 vers, et que, d’autre part, ses traductions poétiques des livres sacrés, des grands et des petits prophètes, etc., etc., allaient à plus de 40000 vers : « Si quelqu’un sans besoin (c’est-à-dire apparemment, sans y être forcé) en peut mettre autant en ligne de compte, je serais bien trompé », ajoutait-il ; et il nous assure qu’il s’y est agréablement diverti. […] Au point de vue de la description des caractères et de l’observation naturelle des talents, l’étude de Marolles a sa moralité particulière : il nous apprend à ne mépriser personne.
M. le Cardinal (et je pense de même) a une politique plus bourgeoise qui va à la bonne économie, à l’ordre, à la tranquillité ; reste le choix ingénieux des moyens pour ce bonheur, l’activité et la fermeté pour y aller, et malheureusement les hommes n’ont pas tout ; mais, dans ce déficit, on aura toujours raison de préférer les qualités du cœur à celles de l’esprit, et la vertu aux talents, pourvu que la disette des talents n’aille pas à l’imbécillité.
Paul-Louis Courier, qui n’était pas bon, et dont l’âcreté d’humeur est aussi avérée que le talent, se promenant un jour dans les bois de Véretz avec M. […] Je ne parle point de ses talents pour la guerre… » Tout en disant qu’il n’en parlera point, l’agréable président sait très-bien rappeler ici la victoire de Coni, remportée par le prince de Conti à son début (1744), presque au même âge, dit-il, où le grand Condé, frère de son bisaïeul, battait les ennemis à Rocroi.
Je ne donne point cela précisément comme un agrément ni comme une grâce, mais c’était au moins de l’intelligence et un talent. […] Mme de Boufflers avait marié, dès 1768, son fils (bientôt colonel du régiment de Conti) à Mlle Des Alleurs, fille de l’ambassadeur à Constantinople et qui y était née elle-même : celle-ci, pour se distinguer des autres Boufflers, s’appelait la comtesse Amélie, et était célèbre par son talent sur la harpe ; on donnait de petits concerts autour du prince malade.
Un juge impartial, le chancelier d’Aguesseau, a heureusement défini son principe de conduite, et a tracé de lui, à cette occasion, le beau portrait dont voici les points principaux : « François de Harlay, prélat d’un génie élevé et pacifique, auquel il n’aurait rien manqué s’il avait su autant édifier l’Église qu’il était capable de lui faire honneur par ses talents et de la conduire par sa prudence, se conduisait lui-même avec tant d’habileté qu’il réussissait presque toujours également à contenir la vivacité de ceux qu’on appelait Jansénistes, et à éluder, au moins en grande partie, les coups des Jésuites. […] Le triomphe si bien ménagé de M. de Harlay en cette circonstance achève de nous le montrer dans tout son beau, j’allais dire dans tout son plein ; et, après tant de témoignages déjà produits, je ne saurais mieux le définir encore qu’avec les excellentes paroles de d’Olivet, qui cette fois (chose unique dans sa vie de grammairien et d’écrivain correct) a eu un ou deux traits de pinceau : « Personne ne reçut de la nature un plus merveilleux talent pour l’éloquence.
Son talent toutefois s’annonçait d’abord avec un certain éclat et présageait un artiste d’un vrai mérite, capable à son tour et digne peut-être du laurier. […] elle s’en garda bien, elle resta digne, fidèle au nom dont elle soutenait l’honneur par ses talents et par sa haute raison : elle eût près d’elle, dans les dernières années de sa maturité et jusque dans son extrême vieillesse, un ami constant, fidèle et sur, un autre Fabre, Fauriel.
La Cour est en désordre, et le peuple en alarmes… » Corneille a dû faire ici à son auteur des changements du tout au tout, qui ne choquaient nullement un public ignorant de l’histoire d’Espagne, mais qui nous montrent bien les contraintes étranges auxquelles il était assujetti et sa gêne rigoureuse, en même temps que ses prodigieuses et ingénieuses ressources de talent. […] Il y a de ces lendemains cruels par lesquels on fait expier à un beau talent son premier succès. — Béranger a fait un bien mauvais vers, mais qui dit une chose juste : « De tout laurier un poison est l’essence. » Les auteurs piqués, les rivaux éclipsés, les Scudéry, les Mairet, — le grand Cardinal (ô douleur !)
Ses vertus mêmes bridaient son talent. […] Le tempérament des hommes est quasi ineffaçable : celui de M. le maréchal de Catinat, fier l’épée à la main, est pétri de précaution et de tous les talents qui tendent à l’épargne.
Elle aimait tout de lui, disait-elle dans des vers passionnés : J’aime tout dans celui qui règne sur mon cœur… Elle aimait son talent, ce qu’elle appelait son génie, ses défauts même, son air vaurien ou lutin, et jusqu’à ses infidélités et ses inconstances : comment n’aurait-elle pas aimé sa manière correcte et digne ? […] Constant est de même ; il n’est pas sûr d’avoir du talent.
On a affaire ici à un talent impérieux, égoïste comme tous les talents d’instinct, à une vocation prononcée, qui demande avant tout le jour et l’occasion, le champ et l’espace.
Quant au talent, il était au moins aussi grand, et la logique, plus libre, était plus conséquente. […] Il était homme d’honneur, de talent et de vertu, mais non homme de lutte.
Plusieurs d’entre eux attirent par le talent ; mais, on ne peut s’empêcher de le remarquer, leur méthode et celle des œuvres suggestives diffèrent entre elles comme une plaisanterie fortement appuyée diffère de l’allusion qui indique tout sans rien nommer et déjà se détourne en créant des sourires. […] Mais le talent de M. de Régnier n’apparaît pas toujours avec cette tendance, sans doute inconsciente, et l’auteur des Poèmes anciens est bien certainement symboliste.
Il eût tenu pour déplacé tout souci de plaire ; les séductions les plus légitimes du talent, il se les interdisait ; à dessein, il laissait son style un peu négligé. […] Nous ne patronnons pas les doctrines ; nous discernons le talent.
On s’est moqué des génies incompris ; mais on a pu dire aussi26 : « Le génie, c’est le talent d’un homme mort ». […] Il en est de certains talents comme de certains vins : ils ne se prêtent pas à l’exportation.
L’expérience, le crédit, la renommée, le talent, toutes les clefs des portes fermées ne s’enlèvent qu’après des luttes, livrées à nu, contre mille obstacles. […] Elle ne rêve pour lui ni le génie ni la gloire — les chances en sont trop vagues et trop hasardeuses — mais un riche mariage, une position acquise moins par le talent que par le savoir-faire.
Il y a un certain degré de talent dans le peintre, qui peut sans doute donner à celui-ci la tentation de créer ou d’achever quelquefois son objet. […] Thiers, dans la plénitude de son talent d’écrivain, ne se laisse point détourner du but, et trouve moyen de poursuivre régulièrement son œuvre.
On sait sa jolie définition de la politique : « La politique, même dans les gouvernements représentatifs, est ce qu’on ne dit pas. » Il a parfaitement jugé Robespierre et ce prétendu talent de parole qu’on lui a accordé de nos jours ; ce sont de ces découvertes qui ne coûtent rien à l’esprit de système. […] [NdA] Comme il m’est arrivé de parler bien des fois des mêmes hommes et que c’est par suite de ce commerce réitéré que je me hasarde ainsi à les juger en définitive, j’indiquerai encore quelques lignes de moi sur la nature de talent et d’esprit de M.
Ce talent diplomatique lui fut encore utile, même plus tard ; mais quant aux voies de fait et aux actes tels que ceux qu’il exerça sur M. […] En pays étranger, il a l’œil à tout ; dans sa curiosité de s’instruire, il a remarqué à la fois la bizarrerie des mœurs, le naturel des peuples, le talent et la portée d’esprit des gouvernants, le fort et le faible de chaque branche d’administration ; et, tout en faisant rire dans ses relations pleines de vivacité et de saillies, il instruit l’homme d’État ou même l’homme de guerre qui l’interroge.
Il n’est pas besoin d’être spécial pour distinguer la nature du talent de Marmont dans les parties savantes de la guerre ou de l’administration militaire. […] Tout en le secondant de ses talents, il juge de près ce général en chef, « homme médiocre et incapable », qui refuse une victoire offerte pour ne pas changer son plan, et qui, victorieux, ne sait pas profiter de ses succès.
Lui, il arrive à Paris, après des études toutes littéraires, ayant lu Rousseau et Bernardin, épris de la nature, ayant fait son tour de Suisse et de Savoie, assez poète par l’esprit et par la sensibilité, sinon par le talent ; il penche naturellement du côté de la monarchie et de Louis XVI, mais avec bien du mélange. […] Michaud poète, j’ajouterai cette remarque que je dois à un critique moraliste de ma connaissance : « Il y a des hommes qui n’ont pas assez de poésie pour l’exprimer par le talent et pour en faire preuve dans leur jeunesse : et pourtant cette poésie n’est pas entièrement perdue pour eux.
Les deux Introductions qu’il a placées à la tête de son volume de Saint-Simon portent la marque de son talent, à lui, — talent très vivant et très personnel.
Je vais essayer de donner des exemples choisis de comique absolu et significatif, et de caractériser brièvement l’esprit comique propre à quelques nations principalement artistes, avant d’arriver à la partie où je veux discuter et analyser plus longuement le talent des hommes qui en ont fait leur étude et leur existence. […] Aussi, avec le talent spécial des acteurs anglais pour l’hyperbole, toutes ces monstrueuses farces prenaient-elles une réalité singulièrement saisissante.
C’est là que, spectacle majestueux, desservi par tous les talents à la fois, spectacle pathétique, répondant à toutes les passions du cœur et épuisant toutes les misères de la vie, et aussi spectacle rare, extraordinaire, elle appelait, à quelques grands jours seulement, un effort de génie toujours nouveau, et, dans le peuple, une ardeur d’admiration que la satiété n’émoussait pas. […] C’était, nous l’avons dit, cette satire effrénée d’Archiloque, ce dithyrambe de la haine, qui souvent portait une sorte d’enthousiasme dans les passions mauvaises, l’orgueil, la convoitise, l’envie ; pouvoir odieux, mais plus faible que la liberté, le talent et la vertu réunis.
Cuvier, se levant aussitôt, a répondu que l’Académie n’avait jamais fait autre chose que d’accueillir tous les génies, toutes les illustrations, et il a énuméré à l’appui nos grands écrivains académiciens, depuis Racine jusqu’à Buffon, en omettant, je ne sais pourquoi, Molière, Diderot et Jean-Jacques ; il a prétendu qu’aucun novateur de vrai talent, aucun nova leur raisonnable n’avait été exclu de l’Académie et qu’en nommant M. de Lamartine, c’était précisément l’alliance du goût et du génie, la juste mesure de la nouveautés de la correction qu’on avait voulu reconnaître et couronner.
Les coups qu’il a portés, non pas au talent éminent de ces hommes, mais à l’influence prolongée, à l’importance absolue de leurs doctrines, n’ont pas été perdus pour beaucoup d’esprits et ont hâté le désabusement de plusieurs, en même temps que la vieille admiration des autres s’en est émue.
Et dans la critique littéraire, quand on a comparé ses auteurs aux aigles, aux lions, aux papillons, aux abeilles, aux prairies émaillées de fleurs, aux montagnes abruptes, aux clairs ruisseaux, aux torrents furieux, quelle idée a-t-on donné aux lecteurs de leur talent et de leurs œuvres ?
Mais, pour faire goûter son œuvre sévère et impartiale, Buffon eut besoin d’un talent d’écrivain de premier ordre.
Un critique de beaucoup de talent me soutenait dernièrement que ma philosophie m’obligeait à être toujours éploré.
On le pressoit de mettre en usage son talent pour la médisance, & de faire, au milieu des repas, des contes sur ses confrères les auteurs.
Deux amis de l’Arioste, grands latinistes, l’exhortoient à se livrer à la poësie Latine, pour laquelle ils lui voyoient beaucoup de talent.
Guéret condamnoit surtout le talent d’émouvoir les passions : il ne vouloit pas qu’on en fit usage au barreau.
Nous voyons de plus qu’un excellent musicien qui aurait un trop mauvais instrument à sa disposition ne pourrait donner qu’une idée très imparfaite de son talent.
La belle chose que j’aurais produite, si le talent de l’avocat eût répondu à la grandeur de la cause !
Un des plus grands partisans du raisonnement severe que nous aïons eu, le pere Mallebranche, a écrit contre la contagion des imaginations fortes, dont le charme pour nous séduire consiste dans leur fécondité en images, et dans le talent qu’elles ont de peindre vivement les objets.
Comme l’imagination a plûtôt acquis ses forces que le jugement ne peut avoir acquis les siennes, les peintres, les poëtes, les musiciens et ceux dont le talent consiste principalement dans l’invention, ne sont pas si long-temps à se former.
Ce n’est pas le talent, en effet, qui manque à M.
Ainsi partout l’intérêt public a dicté les éloges ; chaque nation a loué ce qui était utile à ses besoins ou à ses plaisirs ; on a loué la piraterie chez les Scandinaves, le brigandage chez les Huns, le fanatisme chez les Arabes, les vertus douces et les talents chez les peuples civilisés, la chasse ou la pêche chez les sauvages, la navigation chez les habitants des îles ; mais il y a une qualité qui partout a toujours été également louée, c’est celle qui a créé toutes les révolutions, qui bouleverse tout, qui assujettit tout, qui soutient les lois et qui les combat, qui fonde les empires et qui les détruit, à qui tout est soumis dans la nature, et devant qui l’univers et les panégyristes seront éternellement prosternés : la force.
Je puis dire sans crainte que malgré les efforts de beaucoup d’apôtres dévoués et de grand talent, l’idée Wagnérienne n’est toujours qu’à demi comprise par le public anglais et même par les musiciens anglais. […] Depuis l’arrivée de Haendel, ce malheureux pays a été en tout ce qui concerne la musique, sous la domination de l’étranger ; nos compositeurs ont oublié qu’un style national puisse être restitué et ils employent tout leur talent à imiter, plus ou moins directement, celui-ci Gounod, celui-là Wagner, cet autre Brahms, tel autre Mendelssohn, chacun en prenant bien soin d’assaisonner tous leurs efforts d’une forte sauce Handelienne. […] Un pays qui contient des maîtres comme Villiers, Stanford, Cowen, Mackenzie et quantité d’autres, n’a pas à craindre des comparaisons avec aucune autre nation dans tout ce qui se rapporte à la science et au talent naturel.
Ils mettent surtout la victoire de leur côté, parce que Racine, à la fin de sa vie, reconnut ses erreurs, crut avoir manqué l’objet du théâtre, & qu’après avoir embrasé la scène de tant de feux, il tourna son talent à des sujets plus chastes & plus nobles. […] Le talent d’acteur & d’auteur de comédie lui paroît celui d’un homme abominable. […] Rousseau, ne trouve à cela rien d’extraordinaire : ils ont voulu honorer, dans une actrice, non le métier, mais le talent.
Ce talent consiste d’abord dans la vue exacte et entière des objets absents. […] Il se tenait et marchait un peu courbé, avec un faux air plus humble que modeste, et rasait toujours les murailles pour se faire faire place avec plus de bruit, et n’avançait qu’à force de révérences respectueuses, et comme honteuses, à droite et à gauche à Versailles. » Voilà une des raisons qui rendent aujourd’hui Saint-Simon si populaire ; il décrit l’extérieur, comme Walter Scott, Balzac et tous les romanciers contemporains, lesquels sont volontiers antiquaires, commissaires-priseurs et marchandes à la toilette ; son talent et notre goût se rencontrent ; les révolutions de l’esprit nous ont portés jusqu’à lui. — Il voit aussi distinctement le moral que le physique, et il le peint parce qu’il le distingue. […] Un jour, impatienté, il dit de deux évêques : « Ces deux animaux mitrés. » Quand la Choin entra en faveur, « M. de Luxembourg, qui avait le nez fin, l’écuma », et pour Clermont, son amant, « il se fit honneur de le ramasser. » Ailleurs, il « s’espace » sur Dangeau, « singe du roi, chamarré de ridicules, avec une fadeur naturelle, entée sur la bassesse du courtisan, et recrépie de l’orgueil du seigneur postiche. » Un peu plus haut, il s’agit de Monaco, « souveraineté d’une roche, de laquelle on peut pour ainsi dire cracher hors de ses étroites limites. » Ces familiarités annoncent l’artiste qui se moque de tout quand il faut peindre, et fait litière des bienséances sous son talent.
Il s’en faut qu’elles aient toutes la même valeur, mais toutes portent la marque du maître ; la fermeté, la brièveté forte de l’expression, et cette sobriété puissante qui est le premier caractère du talent de M. de Maupassant. […] J’ai vu, certain soir, sur un grand théâtre, une dame de beaucoup de talent et tout à fait respectable qui, habillée en reine et récitant des vers, voulait se faire passer pour la sœur d’Hélène et des célestes Gémeaux. […] Tobie et son guide céleste parviennent heureusement à Ragès et reçoivent de Gabelus les dix talents d’argent. […] Non, il n’est pas digne du talent de M. […] Cependant il a beaucoup de talent.
Qu’ils réfléchissent au parti qu’a su tirer le talent de Virgile des minutieuses circonstances qui occasionnèrent l’établissement des petites peuplades d’où la puissance romaine devait sortir. […] « C’est dans les plus petits détails qu’on reconnaît souvent le mieux le grand talent de Virgile. […] L’Arioste s’est montré par là le plus ingénieux à lier les incidences au fonds principal, et son talent excelle en cette partie. […] L’emprunt du Tasse est le même, le talent de le mettre en valeur n’est pas moins grand que chez l’Arioste, et l’art de le déguiser, en se l’appropriant, y ajoute un sceau d’originalité. […] Du combat de ces deux habiles poètes ont jailli toutes les clartés qu’il nous faut répandre sur le talent de la diction.
Un ouvrage semblable ne pouvait être que le produit d’un talent très mûr, que de longues études auraient mis au courant de toutes les branches du savoir humain, et dont l’ardente curiosité aurait remué tous les problèmes. […] Paul Bourget n’est pas doué de cet instinct vierge qui protège l’intégrité de l’être, le préserve des sollicitations ambiantes et lui permet d’atteindre sûrement la pleine stature du talent. […] Il reçut alors de la vie ses premières impressions, celles qui décident souvent du choix de la carrière et de la direction du talent. […] Il est la condition du talent, si du moins le talent consiste à tout reproduire pour avoir tout réfléchi. […] Il faudrait, pour en triompher, plus que du travail et plus que du talent, il faudrait cette vigueur de jeunesse et cette impulsion souveraine que les grandes espérances donnent aux grandes âmes.
Les lettres ont commencé le plus souvent leur fortune, & ils sont ingrats envers les lettres ; leur avancement est un secret reproche qui leur dit ce qu’ils voudroient se déguiser à eux-mêmes, qu’ils n’avoient que le talent de faire fortune. […] Les Peuples policés appellent goût ce qu’ils imaginent être la perfection de leurs Arts ; & les individus, ce qui forme la limite réelle de leur talent. […] On peut affirmer que la probité est encore plus essentielle que l’esprit & le talent, parce que ce n’est que de l’âme que sortent ces traits profonds qui peignent l’Humanité sous le jour de sa gloire & de sa grandeur. […] Si tu es bon, ta récompense est dans l’exercice de ton talent ; si tu ne l’es pas, tes succès ne feront que t’aigrir. […] Que le lecteur le médite avec réflexion ; qu’il compare les Drames de ce Souverain génie avec nos meilleures Tragédies-Françoise, il appercevra combien ce servile esprit d’imitation a égaré le talent ; & si, après cette lecture & cette comparaison, il n’est pas de notre avis nous lui dirons : Quid prodest gregis illius sementia ?
Il y joignit ces talents corporels qui développent l’énergie de l’âme et du corps ; il devint bientôt un habitué des salles d’armes, le lion de l’escrime et l’agneau des fils de l’homme. […] Sa taille souple, sa tournure martiale et sa physionomie intelligente et douce le faisaient remarquer autant que son talent ; il avait l’aplomb du gladiateur antique, mais aucune forfanterie dans son attitude. […] Il dirigeait sa troupe ; il refusa, par amour pour la Béjart, l’emploi de secrétaire que lui offrait le prince, frappé de son talent. […] » Ces parents saisirent ce conseil, plus par envie de se défaire de l’enfant, pour dissiper plus aisément le reste de son bien, que dans la vue de faire valoir le talent qu’il avait apporté en naissant. […] Il resta pénétré du sentiment de son ingratitude entre une amie qu’il avait trahie et une jeune épouse qui devait le trahir ; mais son talent le consolait toujours.
Parmi tous ces auteurs d’« épopées » au xviie siècle, plus d’un talent sans doute fut étouffé par la forme ; mais l’hypothèse est de celles dont la preuve est malaisée. […] Quoi qu’il en soit, cette forme spéciale fut l’idéal de tous les théoriciens du xviie siècle ; voulue ostensiblement par Richelieu, elle eut la faveur de la société lettrée, fut cultivée par une quantité de poètes de talent qui y mirent tout leur art, et quel est le résultat de cet effort immense ? […] Évidemment Daudet cherche encore sa voie et s’est d’abord trompé ; seule L’Arlésienne demeure au répertoire, grâce à la musique de Bizet. — Le lyrisme et le romanesque fantaisiste seront longtemps encore chez Daudet des défauts, défauts charmants dès qu’ils ne compromettent plus l’harmonie de l’ensemble ; dans une période nouvelle nous assistons à l’évolution décisive et triomphale du talent épique ; ce sont les Lettres à un absent (1870-1871), Tartarin de Tarascon (1872), les Contes du lundi (1873), Fromont jeune et Risler aîné (1874), Jack (1876), Le Nabab (1877), Les Rois en exil (1879), Numa Roumestan (1881), L’Évangéliste (1883), Sapho (1884), Tartarin sur les Alpes (1885), L’Immortel (1888), Port-Tarascon (1890). […] La suprématie du théâtre s’affirme par le nombre des œuvres, par l’adhésion des talents les plus vigoureux, par le goût du spectacle, par le cabotinage, par la réclame (dont Chantecler n’est qu’un exemple), et surtout par la passion de la thèse25. […] Henri Guy vient de consacrer à Gringore, je note ces mots : « si Gringore a jamais montré quelque talent, c’est lorsqu’il a écrit pour la scène » (Histoire de la poésie française au xvie siècle, Champion, 1910, p. 283).
Bien que depuis un siècle Paris ne ménageât pas ses caresses au talent, un succès comparable à celui des écrits et du personnage de Jean-Jacques Rousseau ne s’y était jamais vu. […] Qu’avec ce talent elle fût, comme il le dit, simple, et même stupide, voilà qui prête aux méditations des philosophes. […] En occupant son époque de ce système, Rousseau ne l’occupait, donc que de Rousseau, Aussi la foudroyante célébrité que Paris lui fit, un beau matin, comprenait-elle plus de caprice pour un individu étrange que d’intérêt pour les idées et le talent. […] Les parts eussent pu demeurer égales sans la maudite inégalité des talents et des activités. […] Si cependant René prête une tragique auréole et un charme au personnage qu’Adolphe nous montre assez pitoyable, il y a là plus que supériorité de talent, il y a supériorité de richesses intérieures.
Maurice Barrès a fait mieux que de prévoir l’objection, il l’a résolue, par le prestige de son talent. […] Même si l’on ne souscrit pas à toutes ses conclusions, son lumineux talent d’exposition rend d’inestimables services. […] Vigny avait du génie, et même du talent (mais déjà moins) et pas du tout de facilité. […] Mais le lyrisme est le trait essentiel du talent de M. […] » La souplesse du talent de M.
C’était là, il faut le dire, une gymnastique bien peu digne de son talent. […] Sainte-Beuve avait de grands modèles qu’il connaît bien, d’immortels devanciers qu’il révère ; Chateaubriand, Goethe, Benjamin Constant lui auraient appris comment on compose un roman d’analyse, comment on met son talent au service de quelque ingénieuse abstraction, au lieu de dresser minutieusement la carte coloriée de tous les écueils où peut échouer, dans une ville corrompue, l’innocence d’un jeune homme ! […] Sainte-Beuve le talent que d’autres ont admiré dans son ouvrage. […] Runjet-Sing, le fameux roi de Lahore et de Cachemyr, est, heureusement pour lui, un roi très éveillé ; et il ne faut rien moins que son activité, son génie entreprenant, et les talents militaires de quelques-uns de nos compatriotes qui ont discipliné ses armées, pour maintenir dans l’ordre tant de populations si diverses, et donner une apparence d’unité à cette confusion. […] Cette fois, l’auteur a beau prodiguer toutes les ressources de son admirable talent, toutes les richesses de son style, pour couvrir le vice du sujet, le sujet faisait faute ; rien n’a pu le sauver.
La présomption que l’homme est porté à avoir de ses talents et de son esprit faisait croire à plusieurs jeunes gens qu’ils joueraient un rôle éclatant ; mais la Révolution, en mettant en quelque sorte l’homme à nu, faisait évanouir promptement cette illusion qu’il était aisé de se faire à l’homme de cour, à celui du grand monde, qui se flattait d’obtenir dans l’Assemblée les mêmes succès que dans la société. […] Le président de Longueil, en ces endroits, devient tout à fait le président de Montesquieu, même pour le bonheur de l’image et le trait du talent.
je vois le moment où tout cela vous sera compté à plus grand honneur que si vous aviez mieux conduit votre talent et mis en œuvre tout votre généreux esprit ; et nos neveux diront en vous lisant : « Tant pis pour nous, là où nous ne saisissons pas ! […] À le voir et à l’étudier de près, son originalité bien réelle était-elle autre part que dans son talent ?
Un peu de miroitement (car ils ont trop de talent de style, et ils ont fait trop de progrès dans leur manière pour qu’on ne leur touche pas quelque chose de leurs défauts), un peu trop de scintillement, dis-je, et de cliquetis est l’inconvénient de cette quantité de mots et de traits rapportés de toutes parts et rapprochés. […] Comme Mme du Deffand, Mme de Boufflers avait le talent ou la manie des couplets satiriques, alors en vogue ; elle lardait son monde à merveille : on le lui rendait bien.
Il mérite vraiment qu’on le distingue, qu’on lui recompose sa physionomie, et qu’avec les petites pièces qu’il a laissées, au nombre de cent environ, on se forme une idée un peu nette de sa destinée, de sa vie et de son talent. […] Évidemment Léonidas était connu pour son talent de versificateur, et on venait lui demander, lui commander des dédicaces dans tout son quartier.
Corneille n’exécutera jamais mieux plus tard ; il n’est pas éducable et progressif comme Racine, qui le fut indéfiniment et jusqu’à l’entière perfection, Racine fera de son talent tout ce qu’il voudra ; il aura tous les talents à la réflexion et à loisir : Corneille a tout d’inspiration ; ce qu’il n’a pas d’emblée, il le manque.
Mais Du Bellay ne pouvait deviner une science de linguistique qui ne datera que du xixe siècle, et il est peut-être bon que la force humaine, la faculté d’initiative de chacun s’exagère sa vertu et son pouvoir pour arriver et atteindre à tout son effet, à tout son talent. […] En plaçant très haut la palme et le prix du poème, Du Bellay n’a garde de vouloir décourager et refroidir les talents vrais, mais de portée moindre.
Il renonce assez volontiers à la prétention littéraire de juger les œuvres, de caractériser le talent, et s’en tient d’ordinaire là-dessus aux conclusions que le temps et le goût ont consacrées. […] L’effet que produisit sur le poëte ce déchaînement de la critique fut tel qu’on peut le conclure d’après le caractère de son talent et de son esprit.
L’alliance offensive et défensive de tous les gens de lettres, la société en commandite de tous les talents, idéal que certaines gens poursuivent, ne me paraîtrait pas même un immense progrès, ni précisément le triomphe de la saine critique. […] c’est La Fontaine. » « Le talent de J.
Mais on est heureux lorsqu’à travers cette variété d’emplois et de talents on arrive de tous les côtés, on revient par tous les chemins au moraliste et à l’homme, à une physionomie distincte et vivante qu’on reconnaît d’abord et qui sourit. […] Mémoires tirés des papiers d’un Homme d’État, t. 1, p. 180-194. — Un adversaire et sans aucun doute un ennemi personnel du comte de Ségur, Senac de Meilhan, a écrit, à ce sujet, cette page peu connue : « … La présomption que l’homme est porté à avoir de ses talents et de son esprit faisait croire à plusieurs jeunes gens qu’ils joueraient (en 1789) un rôle éclatent ; mais la Révolution, en mettant en quelque sorte l’homme à nu, faisait évanouir promptement cette illusion, qu’il était aisé de se faire à l’homme de cour, à celui du grand monde, qui se flattait d’obtenir dans l’Assemblée les mêmes succès que dans la société.
Il n’a pas les talents de son devancier : mais c’est un charmant esprit, franc, ouvert, primesautier, un esprit de la famille de La Fontaine et de Montaigne. […] Le voilà, avec ces vertus qui, en ce temps-là même, et jusque chez les infidèles, le firent plus fort que tous les talents et toutes les victoires : la piété d’un moine, le courage d’un soldat, mais surtout l’abnégation, la perpétuelle immolation du « moi », la charité fervente et la justice sévère.
Son caractère et son talent. […] Dans celle-ci se relient et tous les mouvements, toutes les tendances de la Renaissance française, dont elle est à ce moment la plus complète expression : plus complète sans nul doute que Marot qui la surpasse en talent littéraire.
La matière de sa poésie est petite, le champ de son talent est étroit : mais la perfection de sa forme le fait grand, et donne une rare valeur à son œuvre. […] puisqu’aussi bien l’une était un éloge : c’est quand Pradon lui donne le talent de peindre « en vers frappants » la réalité vulgaire ; — et l’autre exprimait bien ce qu’il était et voulait être : c’est quand tous, successivement, lui reprochaient de n’être qu’un bourgeois, et de n’entendre rien au sublime des ruelles.
» ― En dépit de ces oppositions, les écrivains ont continué et continueront avec raison à dire leur mot sur des problèmes qui nous concernent tous comme citoyens et comme hommes et à croire que le talent ne perd rien à servir la cause de la civilisation ; et selon leurs opinions, leurs tempéraments, le milieu où ils vivent, retenant ou poussant en avant la société dont ils font partie, ils ne cesseront d’entrecroiser d’une façon étroite l’histoire de la littérature et celle du droit. […] Mais en même temps que la verve des écrivains est invitée à se renfermer dans des limites plus restreintes, elle est stimulée par la possibilité d’atteindre, au moyen du journal même, un public plus vaste, de monnayer leur talent à la journée, d’obtenir une rémunération immédiate et plus forte.
La Fontaine, avec sa grâce nonchalante, sa naïveté malicieuse, son talent de composer de vivants tableaux, a besoin que Molière se porte garant de son mérite. […] Elle fausserait la vérité, si elle ne savait établir dans sa reproduction du passé une hiérarchie de talents et d’œuvres correspondant à ce que fut la réalité vivante.
entre l’art d’amuser et celui d’intéresser ; entre le frivole avantage de montrer de l’esprit, et le talent d’en donner ! […] Les maréchaux qui les avaient commandées jouissaient, à la cour et dans la capitale, des fruits glorieux de leur valeur et de leurs talents.
» Cela dit, le talent l’emporte : ce n’est pas l’intérêt de l’action, souvent fausse ou vide, qu’il faut chercher dans le drame de M. […] J’ai tout dit, car on doit la vérité à un homme du talent de M.
Le talent poétique que montra Huet, il dut l’avoir hérité de lui. […] Enfant, Huet se livrait avec ardeur et avec verve à la poésie latine, qui ne semblait pas du tout alors une récréation futile ni même un simple exercice de transition ; on y voyait un digne emploi définitif du talent.
avec une vive et amoureuse douleur de ses infidélités passées, et avec tout le respect et le religieux tremblement que mérite votre souveraine majesté. » De talent, d’imagination proprement dite, il ne saurait en être convenablement question, en appréciant un écrit de cette simplicité. […] C’est ainsi que parlait et pensait sur lui-même, avec une simplicité touchante, ce grand évêque, l’oracle de son siècle et le plus élevé des hommes par le talent.
Quand on veut pourtant bien apprécier les qualités propres du talent de Beaumarchais, et ses limites du côté de la poésie et de l’idéal, il convient de lire, après ces scènes de la comtesse et de Chérubin, celles du premier chant du Don Juan de Byron, où ce jeune Don Juan à l’état de Chérubin engage sa première aventure avec l’amie de sa mère et la femme de Don Alfonso, avec Doña Julia. […] Après cette aventure de Saint-Lazare et cet échec qui signala la fin de sa Folle Journée, Beaumarchais, âgé de cinquante-trois ans, eut encore des moments de célébrité et de bruit ; mais la blessure demeura ; son crédit entre désormais dans sa période de décours, son talent aussi baisse et décline, ou du moins se remet à aller au hasard.
Ce n’est point seulement l’aversion que j’ai pour la polémique, qui m’en tiendrait éloigné, c’est l’idée très haute que je me suis formée des talents et des vertus qu’il faut pour l’enseignement de la jeunesse. […] Les Histoires de Rollin ont été dans le temps un service et un bienfait du même genre ; à mesure qu’il les composait, l’auteur découvrait en lui et déployait aux yeux de tous un véritable talent d’ampleur, de développement et de récit, qui s’est soutenu jusqu’à la fin, et qui a charmé le public durant bien des années.
C’est au moral et au talent de l’écrivain que nous nous attachons. […] Necker, de donner une mission particulière en Corse à un membre des Communes qui en était digne par ses talents ; cet arrangement se fit pendant le cours d’une maladie qui me retint chez moi : j’en témoignai mes regrets aux ministres, et je professai les mêmes sentiments en présence de Sa Majesté le premier jour de mon retour au Conseil.
Le talent qui se trouve au début dans quelques pages des Ruines se ressent de cette disposition fondamentale ; il y a du nombre, une certaine emphase grandiose, mais nulle légèreté et nul éclat, aucun regard de la muse. […] Parlant des auteurs de mémoires personnels, il a un morceau très vif contre Jean-Jacques Rousseau et Les Confessions, qu’il estime un livre dangereux et funeste : S’il existait, s’écrie-t-il, un livre où un homme regardé comme vertueux, et presque érigé en patron de secte, se fût peint comme très malheureux ; si cet homme, confessant sa vie, citait de lui un grand nombre de traits d’avilissement, d’infidélité, d’ingratitude ; s’il nous donnait de lui l’idée d’un caractère chagrin, orgueilleux, jaloux ; si, non content de révéler ses fautes qui lui appartiennent, il révélait celles d’autrui qui ne lui appartiennent pas ; si cet homme, doué d’ailleurs de talent comme orateur et comme écrivain, avait acquis une autorité comme philosophe ; s’il n’avait usé de l’un et de l’autre que pour prêcher l’ignorance et ramener l’homme à l’état de brute, et si une secte renouvelée d’Omar ou du Vieux de la Montagne se fût saisie de son nom pour appuyer son nouveau Coran et jeter un manteau de vertu sur la personne du crime, peut-être serait-il difficile, dans cette trop véridique histoire, de trouver un coin d’utilité… Volney, en parlant de la sorte, obéissait à ses premières impressions contre Rousseau, prises dans le monde de d’Holbach ; il parlait aussi avec la conviction d’un homme qui venait de voir l’abus que des fanatiques avaient fait du nom et des doctrines de Rousseau pendant la Révolution, et tout récemment pendant la Terreur.
Shakespeare — Son génie I « Shakespeare, dit Forbes, n’a ni le talent tragique ni le talent comique.
C’est que former son talent compte aujourd’hui pour peu de chose ; c’est un génie qu’il faut être d’emblée, et le préjugé court qu’un génie est nécessairement un esprit indompté, tumultueux, semblable aux éléments déchaînés, de préférence un peu fou… « Ce que je regrette aujourd’hui, c’est qu’aucune voix ne soit assez forte ou assez autorisée pour rétablir un peu d’ordre dans la confusion générale, remettre la littérature à sa place, et dans la littérature, apprendre, sans pédanterie et avec le ton persuasif d’une belle foi d’artiste, à discerner la beauté propre à chaque genre. » De cette confusion, la responsabilité se répand de Victor Hugo à M. […] Xavier de Ricard (Le Fédéralisme, 1875), Auguste Fourès, Péladan, Maurice Barrès, Charles Maurras, Amouretti, Jean Carrère, avec des talents inégaux sans doute s’étaient fait les champions de cette thèse.
La tête en est charmante, d’un caractère particulier et d’une expression rare ; c’est l’ingénuité des champs fondue avec la verve du talent. […] Au contraire l’habillement des orientaux, des asiatiques, des grecs, des romains dévelope le talent du peintre habile et augmente celui du peintre médiocre. à la place de cette figure de tartare qui est à la droite dans le tableau de la bonne aventure, et qui est si richement, si noblement vêtue, imaginez un de nos cent-suisses, et vous sentirez tout le plat, tout le ridicule de ce dernier personnage.
Malheureusement je crains que ce romancier nouveau manque un peu d’haleine et que son talent soit plutôt celui d’un grand nouvelliste que d’un romancier dans toute l’acception du mot. […] Edmond de Goncourt a prouvé une fois, de plus son immense talent d’analyste que ne rebute aucun sujet. […] Ce qu’il fallait de recueillement, de soin, de légèreté de main, de talent naturel et d’étude sérieuse pour exécuter ces chefs-d’œuvre est vraiment prodigieux. […] C’est là que se développe la moralité du roman et que le talent de M. […] Une nouvelle édition de l’Insecte vient de paraître chez Hachette ; elle est illustrée de 150 gravures de Giacomelli, un dessinateur de grand talent.
. — Talent élevé de M.
Cette légère réserve faite, je ne sais rien de mieux raconté. » M. le comte de Circourt enfin, cet homme de haute conscience et de forte littérature, dans une lettre qu’il m’écrivait le 24 avril 1864, reconnaissait la vérité du Portrait et s’exprimait en ces termes par lesquels je terminerai et qui me couvrent suffisamment : « Les grands côtés du talent de M. de Vigny sont mis par vous en relief d’une manière tout à la fois large et fine ; et malgré la sévérité de quelques-unes de vos appréciations, je n’ai rien à souhaiter de mieux pour la mémoire de M. de Vigny, si ce n’est que la postérité s’en tienne sur lui à votre jugement, ce que j’espère ; j’apprends que ses vrais (et par conséquent rares) amis sont tout à fait de ce sentiment. » 79.
Nous recommandons plus particulièrement à ceux que la pensée politique préoccupe, et qui aiment à voir le talent des artistes s’en faire l’auxiliaire et l’organe, cette troisième partie où sous le nom de Salvator, le génie mécontent, sinistre et découragé, est repris, remontré par l’homme du peuple en ces termes magnanimes : Du peuple il faut toujours, poëte, qu’on espère, Car le peuple, après tout, c’est de la bonne terre, La terre de haut prix, la terre de labour ; C’est ce sillon doré qui fume au point du jour, Et qui, empli do séve et fort de toute chose, Enfante incessamment et jamais ne repose.
Ce que lui suggéraient les circonstances lui était de plus commandé par la nature de son talent.
Mais, dès son retour, ayant mission formelle pour agir, elle répond de ses œuvres, et, dans les déterminations qu’elle fait prendre, donne la vraie mesure de ses intentions et de ses talents.
Victor Hugo, et elle est doublement à remarquer, comme admirable d’abord, et en ce qu’elle prouve une certaine confusion de limites dans les talents naturels des deux poètes.
Mais on sent combien il est profitable pour l’accélération des esprits que de telles questions de philosophie politique se traitent dans un recueil accrédité, avec développement, avec science, amour du bien, et un talent d’expression qui y répand lumière et chaleur.
Si l’imprimerie avait existé, les lumières et l’opinion publique acquérant chaque jour plus de force, le caractère des Romains se serait conservé, et avec lui la nation et la république ; on n’aurait pas vu disparaître de la terre ce peuple qui aimait la liberté sans insubordination, et la gloire sans jalousie ; ce peuple qui, loin d’exiger qu’on se dégradât pour lui plaire, s’était élevé lui-même jusqu’à la juste appréciation des vertus et des talents pour les honorer par son estime ; ce peuple dont l’admiration était dirigée par les lumières, et que les lumières cependant n’ont jamais blasé sur l’admiration.
La popularité de son Plutarque ne prouve pas seulement son talent, mais révèle aussi qu’il avait choisi un des auteurs les mieux adaptés au besoin de ses lecteurs.
Pourquoi gâte-t-il, au moins pour nous, ce qu’il a d’érudition et de talent, en se servant de cette vague façon d’écrire qui tient de la prose et des vers sans en être ni l’un ni l’autre, contrairement à l’affirmation de M.
Vous êtes la pépinière du talent de l’avenir.
Tout solitaire qu’il est, il s’associe du fond du coeur à la foule qui aime et salue ces beaux talents, honneur de la reprise actuelle de Marion de Lorme, MM.
Un de ces pères, qui l’avoit vu dans cette ville sur les bancs, disoit que Bayle se faisoit un amusement d’embarrasser ses maîtres, & qu’il avoit beaucoup de talent pour la dialectique.
Ils surpassent tous les autres peuples dans le talent de policer les villes et dans le gouvernement municipal.
Le livre de Gabrielle d’Estrées, écrit avec le sang-froid de l’homme d’État encore plus que de l’historien, se distingue par une simplicité d’expression ravissante en Capefigue, qui d’ordinaire aime à fringuer et à faire briller la paillette chère au siècle qu’il a tant aimé Pour tout dire d’un mot, c’est un livre où la rectitude des idées a créé, seule, un talent sur lequel nous ne comptions plus.
Très apprécié de Guéroult, qui aima le talent comme les gens qui en ont, Jules Levallois fit régulièrement des articles ; mais le critique militant devint un jour un irrégulier et ce n’était pas étonnant : il se produisit en lui un grand changement, ou du moins une modification profonde… Il devenait ermite, et, au lieu de chercher les petites bêtes dans les œuvres littéraires où il y en a souvent beaucoup, il chercha dans les bois et il étudia les fourmis.
Est-ce de l’observation, du piquant, du talent au moins ?
Il serait d’ailleurs injuste (quoique cette injustice ne soit que trop commune) de vouloir donner à son art les limites de son talent.
Plus tard, il traduisit, avec un délicieux talent d’érudit, l’Histoire de Jean de Paris, roi de France. […] — du moins son talent de sculpteur en est-il animé. […] Il est vrai que plusieurs seraient alors, ou peu s’en faut, perdus : leur simple talent ne suffit pas. […] Lorsque apparut son talent, on lui offrit ceci ou cela : il refusait obstinément. […] C’est ici que doit se marquer le talent de l’historien.
Ce n’était pas précisément un triste Jupiter, car il avait tout de même bien du talent, mais c’était un Jupiter triste. […] Il est maintenant en pleine possession de talent : il a conquis sur le public une grande autorité ; il ne risquerait rien à se livrer davantage. […] Mlle Favart a beaucoup de détracteurs, qui ne goûtent point son talent. […] Mlle Fix a du talent, de la bonne volonté : elle avait étudié son rôle avec goût. […] Cette jeune et aimable comédienne perd, à une interprétation fausse, infiniment d’esprit, de talent et de grâce.
Plein de talent d’ailleurs, et d’autant plus à plaindre. […] Plusieurs seront de l’avis de Taine lorsqu’il dit : « Aucune sorte de talent ne pénètre le lecteur d’impressions plus vives et plus contraires. […] Maurice Magre a beaucoup de talent. […] Il a du talent, mais un talent hétéroclite : costume de gala d’un pavillon-jaune. […] J’ai lu des romans et des vers faits à Paris par des hommes de talent.
Il emploie tout son talent à la rappeler à nos contemporains qui l’oublient volontiers. […] On retient les portraits des avocats, celui surtout de l’illustre Torson du Foudray, grand cœur, grave talent, et qui perd toutes les « nobles causes », qu’il plaide, d’ailleurs éloquemment et d’une belle voix de basse, « pour l’honneur ». […] Tellier, dans l’association, a apporté son talent et sa conscience ; Geneviève l’activité et l’esprit d’entreprise. […] Pourquoi la privait-on de le suivre et de le voir parmi les faveurs dues à son talent ? […] Frédéric Plessis un talent paisible et pur et qui se connaît lui-même.
Pour nous, à mesure que nous lisions les pages les plus heureuses de l’auteur genevois, il nous semblait retrouver, au sortir d’une vie étouffée, quelque chose de l’air vif et frais des montagnes ; une douce et saine saveur nous revenait au goût, en jouissant des fruits d’un talent naturel que n’ont atteint ni l’industrie ni la vanité. […] Töpffer, comme le nom l’indique, sont d’origine allemande, et on pourra, si l’on veut, en retrouver quelque trace dans le talent naïf et affectueux de leur fils. […] C’est une manière de transformation civilisée des anciennes invasions barbares : il y a aussi, selon le plus ou moins de talent, les simples pillards et les conquérants.
Car en même temps que les idées, les événements ont poursuivi leur cours ; les inclinations nationales ont fait leur œuvre dans la société comme dans les lettres, et les instincts anglais ont transformé la constitution et la politique, en même temps que les talents et les esprits. […] Deux puissances la dirigent, l’une européenne, l’autre anglaise ; d’un côté ce talent d’analyse oratoire et ces habitudes de dignité littéraire qui sont propres à l’âge classique, de l’autre ce goût pour l’application et cette énergie de l’observation précise qui sont propres à l’esprit national. De là cette excellence et cette originalité de la satire politique, du discours parlementaire, de l’essai solide, du roman moral, et de tous les genres qui exigent un bon sens attentif, un bon style correct, et le talent de conseiller, de convaincre ou de blesser autrui.
V Reportons-nous au temps où Horace, à vingt-quatre ans, revient de l’armée de Brutus à Rome, et, ne voulant pas servir Octave comme un transfuge, consume sa vie et son talent dans le commerce des jeunes débauchés et des belles courtisanes, ces femmes de lettres et de plaisir de son temps, femmes dont les Olympia dans la Rome papale et les Ninon de l’Enclos dans le Paris de Louis XIV rappelaient sans doute l’équivoque existence. […] L’incurie politique, l’impiété religieuse, l’amour léger, la plaisanterie badine, la licence, la grâce, la poésie, la table, étaient les délices et les célébrités des deux époques ; il y avait plus de talent dans cette société du Temple de Rome, plus de débauche dans celle de Paris ; Horace et Virgile naissaient dans la première, Voltaire dans la seconde ; d’Horace à La Fare, de Virgile à Voltaire, on peut mesurer la distance, mais dans les mœurs et dans les plaisirs parfaite analogie. […] Il faut s’en consoler : nous ne perdons que des égratignures de plume et des dialogues étincelants de verve en les passant sous silence ; allons vite aux épîtres, où l’âme d’Horace se retrouve, plus encore que dans les odes, avec son talent.
De temps en temps, il entre lui-même dans les coins obscurs de la salle et il boit l’avant-goût du talent dans la coupe du pauvre. […] Il n’y a rien de commun entre les deux talents, pas plus qu’entre les deux peuples. […] C’est alors que la conformité du goût et du talent nous unit plus intimement, que j’allai plus souvent m’asseoir à leur vie de famille, et qu’ils vinrent eux-mêmes habiter plus fréquemment ces deux asiles de Saint-Point et Monceaux que la suite des événements politiques me laissait encore libres pour moi et pour mes amis.
L’artiste n’est pas impeccable : aux impuissances naturelles de son talent, Musset ajouta les dédains de son dandysme. […] Son progrès consistera à abonder dans le sens de son talent et à dépouiller la sentimentalité romantique. […] Dans tout ce qu’a fait Gautier, se retrouve le talent qui fait sa personnalité.
Ils étaient tous les trois, dans des mesures diverses et pour des causes différentes, ennemis du despotisme militaire qui avait succédé à l’anarchie de la Révolution, et qui pesait alors sur les esprits plus encore que sur les institutions : mon père, par attachement chevaleresque aux rois de sa jeunesse, pour lesquels il avait versé son sang et joué sa tête ; M. de Vaudran, par amertume d’une situation élevée conquise par ses talents, perdue dans l’écroulement général des choses ; l’abbé Dumont, par ardeur pour la liberté dont il avait déploré les excès dans sa première jeunesse, mais dont il s’indignait maintenant de voir la respiration même étouffée en lui et autour de lui. […] J’aurais voulu que la vie publique mêlât le talent littéraire à tout ; rien ne me paraissait réellement beau, dans les champs de bataille, dans les vicissitudes des empires, dans les congrès des cours, dans les discussions des tribunes, que ce qui méritait d’être ou magnifiquement dit, ou magnifiquement raconté par le génie des littérateurs. […] Dire ne suffisait pas, selon moi ; il fallait bien dire, et le talent faisait partie de la vérité.
Il a jeté comme un voile d’or la « poésie », qu’il tirait de son imagination et de son talent, sur la « vérité » qui n’était pas toujours belle. […] Un jeune homme de beaucoup de talent. […] La fatigue lui fait perdre un peu de la corpulence qu’il devait aux talents culinaires de Christiane : cela n’est point un mal. […] Il possède le talent d’attirer les hommes, et de se les attacher par de grandes et de petites attentions ; mais il sait toujours garder lui-même toute sa liberté. […] Toutefois, ayant sur leurs adversaires la supériorité du talent — car parmi ceux qu’ils avaient visés les meilleurs ne répondirent pas — ils purent se consoler par le mépris.
Il ne connut qu’alors son talent, & le genre dans lequel il devoit écrire. […] Le premier est encore moins connu par son talent, qui le fait mettre à la tête des peintres, que par la gloire qu’il avoit d’être le seul qui eût le droit de peindre Alexandre. […] Il concluoit que c’étoit une raison de plus pour confier l’instruction de la jeunesse à ces hommes à talent. […] Il fut renfermé deux ans & demi à la Bastille : mais il sçut s’occuper utilement dans ce lieu si redouté des gens de lettres, & qui a fait sortir le talent de plusieurs. […] A son talent près pour la direction, l’abbé de Saint-Cyran étoit un homme assez ordinaire.
Cependant, il n’y a pas de succès sans talent ; et, quelque frivole que fût le tour d’esprit d’alors, un public formé par le théâtre de Corneille ne pouvait pas battre des mains à des pièces où tout « aurait été fait exprès en dépit du bon sens. » Éon nombre d’esprits sains pensaient de l’Astrate ce qu’en disait Boursault3 : Que les vers en sont forts, et que tout m’en a plu ! […] Mais, au lieu de cette force d’invention de Corneille, qui éclate jusque dans le mauvais emploi qu’il en fait, la faiblesse d’un talent naissant, une langue débile et incertaine, ajoutent au froid de l’imitation, dans les deux pièces de Racine. […] Il suffisait du talent de Quinault, pour écrire cette tirade. […] Que penserait Racine, lui qui ne se souciait que de l’invention, de tous ces éloges qu’on fait de son talent d’écrire ?
B. de Fouquières est venu ajouter à ce qu’on savait déjà d’André Chénier, c’est l’appréciation bien nette et plus entière de son talent et de son œuvre.
On s’accordait à reconnaître dans Armand Paulin (et les maîtres de l’art, qui furent presque tous ses amis, ne me démentiront pas) un diagnostic prompt, fin et sûr, un tact médical qui est le premier talent du praticien.
Deux hommes, distingués par leurs talents, et appelés à une carrière illustre, veulent se communiquer leurs desseins, ils souhaitent de s’éclairer ensemble ; s’ils trouvent du charme dans ces conversations où l’esprit goûte aussi les plaisirs de l’intimité, où la pensée se montre à l’instant même de sa naissance, quel abandon d’amour-propre il faut supposer pour croire qu’en se confiant, on ne se mesure jamais !
., etc… Beaucoup d’écrivains d’un réel talent commettent aujourd’hui des fautes de ce genre.
Bourget : « Il n’a jamais eu plus de talent. » Il est admirable comme les reporters sont, tout coup, devenus connaisseurs.
Il n’est pas mieux fondé, lorsqu’il refuse à Lafontaine le talent de l’invention.
Par cette heureuse facilité d’animer tout ce qu’il dit, par l’heureux talent de parler intimement au cœur, de l’attendrir, de lui faire éprouver, par des charmes aussi doux que puissans, tous les mouvemens des passions, il s’est rendu maître de la Scène tragique, en maniant, avec une supériorité sans égale, le plus intéressant de ses ressorts, la pitié.
Il est grand par sa poésie, grand par son talent de dialecticien et grand par sa science des nations, mais il est plus beau et plus pur mille fois parce qu’il a compris ce qu’attend le monde.
Il est donc constant que la note des opera n’enseigne pas tout, et qu’elle laisse encore beaucoup de choses à faire et que l’acteur fait suivant qu’il est capable de les executer. à plus forte raison peut-on conclure que les compositeurs de déclamation n’ensevelissoient pas le talent des bons acteurs.
En tout genre de talents, le menu peuple est aujourd’hui très nombreux ; et malheureusement on ne peut pas dire des beaux-arts comme des États, que c’est le peuple qui en fait la force.
Il faut ajouter, pour compléter cette liste de vingt-deux, Marchenna, Girey-Dupré et Riouffe, qui n’étaient pas députés, — et Fauchet, l’évèque intrus du Calvados, le seul homme de talent réel, une espèce de Diderot évêque qui aurait eu la foi, et à qui la foi et le sacrement de l’ordre sans doute valurent plus tard le repentir.
Quoiqu’il n’ait pas le talent et l’autorité de ses maîtres, cependant ses maîtres le réclament.
Il sent bien que ses talents sont peu de chose, surtout si on les compare à ceux de tant de célèbres orateurs : « Mais dans un combat, dit-il, au milieu du son des clairons et des trompettes, on mêle aussi quelquefois le son de la flûte. » Après ce début il entre en matière.
Un autre martyr du même temps, un autre témoin des règnes de Claude et de Néron, Sénèque, dans la variété de ses ambitions et de ses talents, n’eut-il pas quelque lueur de poésie lyrique ?
Que Victor Hugo ait du talent, Veuillot ne dit pas non. […] Génie ou talent gaspillé, dira-t-on, ce n’est rien ? […] Faute de talent ? […] On admet généralement que le talent du critique et le talent du romancier sont à peu près incompatibles. […] Il a étudié le talent de nos peintres et de nos sculpteurs les plus adroits.
Que l’on n’aille pas croire, d’ailleurs, que dégénérescence est synonyme de manque de talent. […] Le vrai talent est toujours personnel. […] Le côté patriotique du romantisme fut d’ailleurs seulement accentué par les talents les plus sains de cette tendance. […] Les jeunes talents, ici aussi, levèrent l’étendard de la révolte contre les tendances esthétiques et philosophiques régnantes. […] L’administration ferme les yeux et lui accorde le vivre et le couvert par égard pour son talent poétique.
Je connus là, dans ce monde de l’Avenir, l’abbé Gerbet, l’abbé Lacordaire, non célèbre encore, mais déjà brillant de talent, et M. de Montalembert. […] Je ne suis pas de ceux qui méconnaissent en rien les hautes qualités d’esprit, l’élévation de talent et le quasi-génie de M. […] Il y a là des témoignages contemporains qui seraient curieux à recueillir, quoiqu’ils n’ajoutent rien à ce qu’on sait depuis, mais ils pourraient être une preuve de plus à l’appui de la vérité. — On s’est toujours piqué d’exactitude et de véracité de père en fils, et on les trouvait sans les chercher, par netteté et rectitude d’esprit. — Je relève en marge du Vieux Cordelier ce portrait entre autres de Camille : « Desmoulins avait un extérieur désagréable, la prononciation pénible, l’organe dur, nul talent oratoire ; mais il écrivait avec facilité et était doué d’une gaieté originale qui le rendait très-propre à manier l’arme de la plaisanterie. » — N’est-ce pas un type du pamphlétaire comme on se le figure ?
L’érudition recevrait la vie par la main du talent. […] Le style en est aussi défectueux et aussi vulgaire que les circonstances en sont altérées et décolorées ; l’âme et le talent ont failli à la fois à l’écrivain dans ces pages. […] XVII Le spectacle de la lâcheté de l’Europe indignée, mais muette, après cet attentat au droit des gens, à l’humanité et à l’innocence, est reproduit avec beaucoup plus de talent par M.
L’orateur philosophe sentait grandir sa pensée, son talent et son courage, en abordant le plus grand objet de la pensée, la Divinité. […] Cicéron ne fut pas dans ce beau livre le Platon, mais le Montesquieu romain ; autant au-dessus de Montesquieu que le génie est au-dessus du talent, et que l’éloquence est au-dessus de la sagacité. […] Les ouvrages de Cicéron retrouvés consoleraient le monde de la perte de tous les autres livres ; c’est l’encyclopédie de l’âme, de la pensée et du talent.
Car le duc de Guise était un des plus grands personnages de son temps, avec des talents supérieurs auxquels il ne manqua que d’oser pour commencer dès lors la quatrième dynastie. […] Je n’ai plus qu’à redire ce qu’on peut du moins pressentir : à savoir que le régime démocratique, une fois établi, consolidé, organisé, sera, comme les autres, et probablement plus que les autres, parce que la sélection du talent s’opérera sur un beaucoup plus grand nombre de cerveaux, paré et couronné d’une littérature qui exprimera de façon supérieure l’équilibre retrouvé par la société. […] On peut se demander si l’accumulation des talents dans un espace trop étroit n’en a pas étouffé plus d’un en germe.
Mais vous, mon ami, convenez qu’à la manière dont je juge un artiste que j’aime, que j’estime et qui montre vraiment un grand talent même dans ce morceau, on peut compter sur mon impartialité. […] Ce morceau n’est pas fait pour arrêter le commun des spectateurs ; il faut à l’œil vulgaire quelque chose de plus fort et de plus ressenti ; ceci n’arrête que l’homme sensible au vrai talent, et l’esclave d’Horace mériterait les étrivières, lorsqu’il dit à son maître : vel cum pausiaca torpes, etc. […] Monsieur Robert, votre talent est assez rare, pour que vous y ajoutiez la perfection des figures ; et quand vous les saurez dessiner facilement, savez-vous ce qui en résultera ?
C’est ce talent de juger et de discerner les hommes qu’il croyait avoir et qu’il avait à un très remarquable degré, qui l’a conduit à dire de lui une chose singulière dont Voltaire s’est, moqué, et dont l’expression ne saurait en effet, raisonnablement, échapper à la raillerie. Récapitulant tous les talents et toutes les facultés qu’il reconnaît ne posséder que d’une manière secondaire et inférieure à ce qu’il avait vu chez d’autres, il ajoute que pour l’esprit de connaissance et de discernement, il croit que peu de personnes l’ont plus que lui : Et cela, conclut-il, m’a fait penser bien des fois fort extravagamment que, de toutes les charges qui sont dans un royaume, celle de roi serait celle dont je serais le plus capable ; car l’esprit de connaissance et de discernement est juste celui qui convient aux rois : ils n’ont qu’à savoir bien choisir ; et, donnant à un chacun l’emploi qui lui convient, ils se servent de toutes ces sortes d’esprits que Dieu a distribués aux hommes, sans qu’il soit nécessaire qu’ils les aient.
Les méchants propos de Versailles ne sont plus que des propos, et même en y faisant toute la part possible, en accordant un peu de vérité dans beaucoup de mensonge, les lignes et les traits essentiels de l’habile et hardi capitaine, ses belles parties de talent n’en sont pas entamées ; la gloire de Villars subsiste. […] Dès qu’on parle de Catinat, il y a à prendre garde : si le xviiie siècle, en le célébrant et en cherchant à préconiser en lui un de ses précurseurs, une des victimes du grand roi, a raisonné un peu à l’aveugle de ses talents militaires et les a exaltés académiquement, il ne faut pas tomber dans l’excès contraire ni trancher au détriment d’un homme qui eut ses jours brillants, dont l’expérience et la science étaient grandes, et dont le caractère moral soutenu, élevé, est devenu l’un des beaux exemplaires de la nature humaine.
Damas-Hinard une édition critique et une traduction française, est tout autre chose que la Chronique : c’est une œuvre de talent, une œuvre suivie et soutenue, naïve et forte, souvent admirable de détail ; on sent un poète dans le jongleur et le chanteur. […] Après l’épopée et les fragments épiques, la tragédie est possible : c’est au talent à l’en tirer et à la construire.
Vous savez quel goût j’ai pour les grands événements, et combien je suis las de notre petit pot-au-feu démocratique et bourgeois. » Lorsque ensuite, après s’être avancé, on recule, et que la nation se croit, à tort ou à raison, profondément humiliée et déchue du rang qu’elle tenait en Europe ; lorsqu’elle commence à en vouloir au Gouvernement de son choix et au prince qu’elle accuse personnellement de lui avoir créé cette situation indigne d’elle, Tocqueville est des premiers à sentir que le péril de l’avenir est là, non ailleurs, et tout le talent de parole dont fait œuvre le ministère de M. […] Thiers a reproduite, au contraire, avec tant de complaisance et de talent.
Il est rare, quand un homme possède un talent supérieur évident, qu’on n’en profite pas pour lui en dénier un autre ; cela est de la nature humaine et de tous les temps. […] L’autorité croissante de son talent et de ses écrits le mirent à sa place et hors de pair.
J’aime à croire que cette sorte de découragement et de dépit ajouta, chez quelques-uns, à l’incomplet du talent et contribua au chétif emploi qu’ils en tirent ; c’est du moins une excuse. […] Si quelqu’un mérita, par son talent, de prétendre à plus et d’oser mieux, c’est certainement Hesnault ; c’est lui aussi qui, de tout ce groupe, paraît avoir le mieux compris la position fausse où l’esprit, le goût libertins, allaient se trouver sous Louis XIV, par-devant Despréaux le censeur, et en regard du décorum grandissant.
Toute la littérature classique porte l’empreinte de ce talent ; il n’y a pas de genre où il ne pénètre et n’introduise les qualités d’un bon discours Il domine dans les genres qui, par eux-mêmes, ne sont qu’à demi littéraires, mais qui, grâce à lui, le deviennent, et il transforme en belles œuvres d’art des écrits que leur matière semblait reléguer parmi les livres de science, parmi les instruments d’action, parmi les documents d’histoire, traités philosophiques, exposés de doctrine, sermons, polémique, dissertations et démonstrations, dictionnaires mêmes, depuis Descartes jusqu’à Condillac, depuis Bossuet jusqu’à Buffon et Voltaire, depuis Pascal jusqu’à Rousseau et Beaumarchais, bref la prose presque tout entière, même les dépêches officielles et la correspondance diplomatique, même les correspondances intimes, et, depuis Mme de Sévigné jusqu’à Mme du Deffand, tant de lettres parfaites échappées à la plume de femmes qui n’y songeaient pas Il domine dans les genres qui, par eux-mêmes, sont littéraires, mais qui reçoivent de lui un tour oratoire. […] L’imagination sympathique, par laquelle l’écrivain se transporte dans autrui et reproduit en lui-même un système d’habitudes et de passions contraires aux siennes, est le talent qui manque le plus au dix-huitième siècle.
De beaux habits, des manières libérales, des talents d’agrément sont choses également requises ; l’amour est un sentiment aristocratique. […] Ce talent éclate dans les peintures de la frileuse Vieillesse et de la Pauvreté honteuse, mieux encore dans celle de la doucereuse Papelardie.
Mais ces Condé avaient tous quelque chose de supérieur dans l’esprit ; ils avaient de vastes connaissances, un goût exquis ; ils aimaient le talent sous toutes ses formes. […] Voilà la plaie incurable de La Bruyère, la source secrète de son chagrin, de sa misanthropie, de ses colères contre les grands qui ne préviennent pas le talent, contre la société qui ne fait pas de place au mérite personnel.
Je ne serais pas surpris qu’elle sût de nouveau imposer son autorité : il suffira de quelques critiques décidés, possédant, avec de l’instinct et du talent, du caractère. […] Aux qualités que l’on demande à un critique, instinct littéraire et talent, M.
Cependant, par une fatalité des plus décourageantes, on a vu l’Ecrivain qui a montré le plus de zele pour les principes du goût, des mœurs & de la Religion, le plus de talent & de confiance à les défendre contre les attentats de la nouvelle Philosophie ; on l’a vu, dis-je, toute sa vie en proie aux persécutions & le martyr de sa fermeté. […] Le même Philosophe dit formellement, que tout Ecrivain de génie est Magistrat né de sa patrie, & que son droit est son talent.
J’ai tout dit, et je n’ai point parlé du talent. […] La Princesse de Bagdad Le drame de grand talent et de haute excentricité qui a pour titre la Princesse de Bagdad est, par endroits, une véritable attaque au public.
Ce qui me frappe, c’est la raison et l’énergie : l’idée du talent ne vient qu’après. […] C’est à cette Société des Jacobins qu’il pensait encore, quand il disait : « Aux talents et à la capacité près, ils ressemblent à la Société des Jésuites. » Il fait sentir la distinction profonde qu’il y a entre le vrai peuple, dont, suivant lui, la bourgeoisie laborieuse est le noyau, et ces sociétés, « où un infiniment petit nombre de Français paraissent un grand nombre, parce qu’ils sont réunis et qu’ils crient : Quelques centaines d’oisifs réunis dans un jardin ou dans un spectacle, ou quelques troupes de bandits qui pillent des boutiques, sont effrontément appelés le Peuple ; et les plus insolents despotes n’ont jamais reçu des courtisans les plus avides un encens plus vil et plus fastidieux que l’adulation impure dont deux ou trois mille usurpateurs de la souveraineté nationale sont enivrés chaque jour par les écrivains et les orateurs de ces sociétés qui agitent la France.
* * * — Ce qu’il y a à craindre pour l’homme de lettres, ce n’est point le foudroiement, la mort complète de sa cervelle : c’est la douce imbécillité, l’insensible ramollissement de son talent. […] Samedi 1er novembre Vierge un dessinateur du plus grand talent, l’unique illustrateur de l’heure présente, mais en ce moment sur la pente de l’ombre chinoise.
Je ne crois pas qu’on puisse renfermer plus de choses en moins de mots ; et ce n’est pas d’ordinaire le talent de nos poètes latins modernes les plus vantés. Heureusement pour notre littérature, M. de Voltaire a fait de ce talent un meilleur usage, que de l’emprisonner dans une langue étrangère ; il a mieux aimé être le modèle des poètes français de notre siècle, et le rival de ceux du précédent, que l’imitateur équivoque de Lucrèce et de Virgile.
Il fut donc enthousiaste de La Motte, et crut réellement que cet esprit très éclairé était un talent supérieur et un génie.
Mais voilà, par malheur, que vous n’avez du poëte que l’admirable talent de poésie, du reste exact, calculant vos termes et vous tenant parole à vous-même.
Il semble qu’une loi fatale asservisse les talents des diverses littératures aux mêmes phases.
Dans le même moment un autre critique très spirituel, parlant de Racine, avançait que le vrai, le spécial et principal talent de ce poëte était pour le comique, témoin les Plaideurs, et que Racine, en abordant la tragédie, avait fait fausse route.
Si vous dites, pour citer une théorie qui jouit aujourd’hui d’une faveur incroyable, non seulement parmi les pauvres sols tout éplorés qu’Alfred de Musset traîne à ses talons, mais auprès des esprits les plus graves de notre époque, si vous dites que le vrai poète doit être une espèce de don Juan fatal, victime prédestinée de cet insatiable besoin d’aimer qu’on appelle le génie, et semblable au pélican qui donne à ses petits son propre cœur en pâture, s’il vous plaît de répéter cette déclamation, nous vous laisserons faire, et, quand vous aurez fini, nous vous rappellerons simplement l’admirable possession de soi d’un Cervantes et surtout d’un Shakespeare, qui dans la force de l’âge et du talent, cesse tout à coup d’écrire et se met à cultiver son jardin, comme Candide, après avoir eu la tête traversée par un effroyable torrent d’idées et d’images, dont quelques flots auraient suffi pour faire perdre l’équilibre à la plus ferme de nos cervelles.
Il lui suffit, pour nier le talent de Villars, que sa noblesse soit courte et douteuse ; pour verser l’outrage sur Vendôme, que son origine royale soit illégitime.
Dumas atteste la souplesse toujours jeune de son talent : il est, cette fois, tout à fait purgé de Scribe ; il semble que, sous certains souffles venus de loin, sa dureté ait fondu.
J’entendais dire qu’il avait du talent, mais je n’éprouvais pas le besoin d’y aller voir.
En face de cette liste de poètes d’art libre, voyons, en passant, la liste des jeunes parnassiens et quand nous aurons mentionné les beaux talents de MM.
Assurément des faits de cette espèce ont plus de portée dans la vie d’un peuple que la mort d’un prince, voire même qu’une bataille gagnée ou perdue ; mais ils sont cachés, et l’historien n’a pas trop de toute sa perspicacité pour les découvrir ni de tout son talent pour les mettre en lumière.
Tant qu’on lit, on est furieux contre l’auteur qui gâte une pensée supérieure à son talent.
Ces Lettres, qui forment deux volumes in-12, & dont on vient de donner la sixieme édition, annoncent un Littérateur d’autant plus estimable, qu’il réunit à la sagesse des principes & à la solidité du raisonnement, le mérite d’une érudition très-étendue, & le talent de la mettre en œuvre sans prétention.
Quelque honorable que ce fait soit au talent, un auteur grave le contredit.
D’un autre côté, les grandes vertus et les grands talents appartiennent au monde : ainsi on ne doit plus que plaindre cette ostentation malheureuse de sept villes de la Grèce qui se disputèrent la naissance d’Homère, au lieu de s’être disputé le soin de nourrir le merveilleux vieillard.
Ici, le sarcasme dont nous avons parlé, cet implacable comique qui peut être d’un si grand effet en histoire, est bien plus sur les lèvres du héros que sous la plume de l’historien, malgré la sympathie intellectuelle avec laquelle l’historien a montré cette gaieté poignante, Euménide qui rit tout en fouaillant son homme, et qui fut la plus grande force du talent de Suleau.
Il y avait au Moyen Âge les troubadours et les trouvères ; il y avait les moines, les moines qui étaient, à eux seuls, la civilisation, l’intelligence et le talent du monde.
Il a pour tout talent l’uniformité dans l’ironie, et pour toute ressource, dans sa lutte contre une société qu’il haïssait, la forme littéraire la plus hypocrite, l’ironie n’étant jamais que cela.
Il ressemblait à cet Allemand fabuleux qui héritait des talents et des facultés de tous ceux qu’il tuait en duel, et qui finit de cette manière par avoir toutes les qualités imaginables.
C’est un philosophe qui chasse de race, un philosophe de père en fils, dont le père eut autrefois aussi son prix d’académie, et qui a voulu continuer cette gloire paternelle… Certes, ce n’est pas avec de telles préoccupations que l’on peut dépasser par la fierté ou la soudaineté de l’aperçu, par l’indépendance, par un style vivant et anti-officiel, les conditions du programme de l’Académie, cet établissement de haute bienfaisance littéraire qui n’existe que pour mettre en lumière les talents qui, tout seuls, ne s’y mettraient pas.
Il était depuis longtemps connu par des écrits d’un talent tempéré, mêlé dans un dosage savoureux d’imagination et de science.
Gratien, qui eut de la faiblesse et du zèle, qui posséda peut-être le courage militaire, mais à qui le courage d’esprit et les talents manquèrent, que les écrivains d’un parti ont comparé aux meilleurs princes, que ceux du parti contraire ont comparé à Néron ; Gratien, dont le plus grand mérite peut-être est d’avoir, élevé Théodose à l’empire, et qui, après un règne de huit ans, mourut à vingt-quatre, vaincu à Paris et assassiné à Lyon, eut aussi ses panégyristes.
Né dans la province de Tarragone vers l’an 348 de notre ère, tour-à-tour avocat, juge, préfet, puis appelé par ses talents à Rome et à la cour de Théodose, Prudence, dans sa vie toute laïque, ne pouvait atteindre à l’autorité et à la gloire des grands évêques dont s’honorait alors l’Église.
Avec cela et un peu de talent on va très loin. […] Ajoutez que (je crois) il se connaissait très peu en hommes et que le sens psychologique, premier talent de l’homme d’État, lui faisait défaut. […] Houssaye a bien du talent. […] Le Bon, avec un véritable talent et sans aucune prétention au talent, mais avec un véritable talent, qui est fait de clarté, de fermeté et de sûreté de style, d’exposition tranquille et froide, d’ordonnance simple et juste, met en très belle et très pure lumière. […] D’où vient que, alors qu’on est le plus entraîné par le talent de l’analyste, on reste en défiance à l’égard de l’homme ?
La fantaisie est l’épreuve la plus périlleuse du talent ; les plus habiles s’y fourvoient comme des écoliers, parce que leur tête est seule de la partie. […] Le talent, le génie même chez les femmes sont unis d’un lien si indissoluble à leur personnalité de femmes — à la fois dans ce que celle-ci a de plus individuel et dans ce qu’elle a de plus atavique — que leurs héroïnes l’emportent toujours sur leurs héros en beauté, en profondeur et en signification : seule, jusqu’ici George Eliot échappe à cette loi. […] Par sa nature même, le talent des Goncourt les désignait pour devenir de ce jeu du sort des victimes qu’ils auraient qualifiées d’« exquises ». […] Non point par le talent, du moins au sens habituel du terme : il est toujours là, ce talent, mais à la manière de quelque hôte courtois, si bien acclimaté qu’on l’oublie. […] D’autres écrivains, et parfois de grand talent, cherchent à établir un plain-pied avec ces conditions nouvelles en les incorporant pour ainsi dire à l’expression elle-même.
Ainsi la finesse de leur talent témoigne de leur vertu militaire ; leur élégance d’écrivains a une grâce d’héroïsme. […] Glesener, dans ses trois romans, a montré les ressources d’un talent très varié, d’un talent réfléchi, volontaire, et qui hésite encore à choisir son genre, voire ses doctrines. […] Combien sont morts, de ceux qui la cultivaient et qui, de leur talent, favorisaient sa belle venue ! […] Mais le talent du conteur y est souvent délicieux. […] Assez de contrainte aussi pour qu’on dût avoir du talent, plutôt que de s’abandonner à une exubérance inattentive.
Un Pétrarque anglais : ce mot sur Surrey est le plus juste, d’autant plus juste qu’il exprime son talent aussi bien que son âme. […] On se dit qu’après tout Cowley a peut-être du talent, et on trouve qu’en effet il en a un, talent nouveau, inconnu aux vieux maîtres, qui indique une autre culture, qui exige d’autres mœurs et qui annonce un nouveau monde. […] — En Italie. — En Angleterre. — Comment le règne du naturalisme développe l’exercice de la raison naturelle. — Érudits, historiens, rhétoriciens, compilateurs, politiques, antiquaires, philosophes, théologiens. — Abondance des talents et rareté des beaux livres. — Surabondance, recherche, pédanterie du style […] Ceux-ci n’ont pas l’esprit d’analyse qui est l’art de suivre pas à pas l’ordre naturel des idées, ni l’esprit de conversation qui est le talent de ne jamais ennuyer ou choquer autrui. […] Il y a là un vrai talent.
La plûpart de ceux qui ont excellé dans quelque genre, y ont été entrainez par abondance de talent et de goût ; ils en ont atteint la perfection par instinct, je veux dire par un jugement confus et presque de simple sentiment, plûtôt que par des réflexions précises et aprofondies. […] Dès qu’il le fait, on peut dire qu’il prend qualité lui-même, qu’il se donne pour homme de talent, et qu’il demande au public qu’il ait à le reconnoître pour tel. […] C’est proprement la pierre de touche du talent nécessaire. […] Je me pique d’être un peu stoïcien là-dessus ; mais je ne condamnerois pas dans les autres plus de sensibilité que je n’en ai ; et je ne serois pas surpris que des esprits un peu fiers négligeassent un talent dévoüé par la mode au premier plaisant qui voudroit en rire. […] Voici enfin un dernier fruit de l’usage que je voudrois établir ; c’est de multiplier le nombre des auteurs dramatiques, en les dispensant d’un talent que bien des gens d’esprit n’ont pas.
Vaulabelle a bien moins de talent que M. […] Mais il n’est pas plus possible de nier la sincérité de sa pensée que la force de son talent. […] Au théâtre comme à la guerre, le talent ne suffit pas ; il faut encore avoir pour soi la fortune. […] Au reste, il se trompe : je lui trouve beaucoup de talent. […] L’intention est claire, et le talent de M.
Il eut du talent, certes, mais pas celui qu’il aurait voulu avoir. […] Rudyard Kipling qu’on trouverait l’exacte mesure de son talent. […] On n’a pas assez remarqué le double talent de Saint-Simon pour l’éloge et la satire. […] Il va, vient, avec verve, adresse et talent. […] Ce ne fut plus une tentative isolée d’esprits mécontents du passé, ce fut la réunion, pour l’œuvre commune, des talents les plus divers.
. — En quoi elle a servi son talent. — Il est le peintre de la seconde société féodale. […] À quoi peut aboutir le talent, même le génie, quand de lui-même il se met dans de pareilles entraves ? […] Amours et moralités, c’est-à-dire mignardise et abstractions, tel est le goût du temps228 ; pareillement, au temps de Lebrun, d’Esménard, à l’extrême fin de notre littérature, on composait les recueils avec des poëmes didactiques et des bouquets à Chloris. — Pour le moine Lydgate, il a quelque talent, quelque imagination, surtout dans les descriptions riches ; c’est le dernier éclat des littératures qui s’éteignent ; on entasse l’or, on incruste les pierres précieuses, on tourmente et on multiplie les ornements, dans les habits, comme dans les bâtiments, comme dans le style229. […] Dans cette peinture, il a de l’émotion et du talent.
C’est dans cette nouvelle que le talent descriptif dont nous avons parlé plus haut est surtout frappant : M. […] Après avoir parcouru les pièces que je viens d’indiquer, le lecteur ne saurait se refuser sans doute à reconnaître le talent de M. […] On doit encore à l’auteur quelques autres nouvelles et plusieurs pièces de théâtre qui ont été accueillies avec faveur ; mais les Récits d’un Chasseur sont toujours le plus beau fleuron de sa couronne littéraire, et jusqu’à présent, je le répète, aucun écrivain n’a dépeint le paysan russe avec plus de talent et de vérité. […] Qui avait une confiance aveugle dans les mérites de ses amis, exaltait leurs talents et prenait leur défense avec le plus d’ardeur ?
Il est bien entendu que la rigueur de ce jugement n’atteint pas quelques hommes d’un talent réel qui, dans un sentiment très large de la nature, ont su revêtir leur pensée de formes sérieuses et justement estimées. […] La nature de ce rare talent le circonscrit dans une sphère chastement lumineuse et hantée par une élite spirituelle très restreinte, non de disciples, mais d’admirateurs persuadés. […] Ces dernières compositions révèlent, dans leur ensemble, un affaiblissement notable, une décoloration marquée de ce beau talent, si pur et si élevé ; mais on y rencontre deux poèmes superbes, les plus saisissants qui soient tombés d’une âme noble et généreuse, secrètement blessée de l’inévitable impopularité qui s’attache, en France, à toute aristocratie intellectuelle. […] L’unique cause des chutes fréquentes de ce très remarquable talent, et qui n’en reste pas moins hors ligne, réside tout entière dans la préoccupation inféconde, générale, toujours aisément satisfaite, de l’enseignement moral.
Sully Prudhomme a obéi à une pensée généreuse en instituant une rente qui permettra chaque année à un jeune poète, ayant plus de talent que de fortune, d’éditer son premier volume de vers. […] Maurice Magre, qui semblait promettre plus qu’il n’a jusqu’ici tenu, avait débuté par une œuvre de valeur : La Chanson des Hommes 4 ; — dans de jeunes revues5, des poètes de talent comme Édouard Guerber, Cubélier de Beynac, Han Ryner, Adolphe Boschot et quelques autres, s’efforcent évidemment vers une conception d’art nouvelle : ils cherchent… Mais peut-on dire qu’ils aient complètement trouvé ? […] Mais valait-il mieux ne rien tenter en faveur du talent trahi par la fortune ? […] certes, ce n’est pas par des raisonnements que nous donnerons du génie ni même du talent à ceux qui n’en ont pas, mais on pourrait du moins empêcher peut-être ceux qui en ont de le gaspiller parmi des chinoiseries et des futilités.
Cet homme de talent, modeste, lui aussi, autant que distingué, est connu au théâtre par de jolis actes en vers.
Si ce siècle est l’époque où les raisonnements ont le plus ébranlé la possibilité d’une croyance implicite, c’est dans ce temps aussi que les plus grands exemples de la puissance de la religion ont existé ; on a sans cesse présent à sa pensée, ces victimes innocentes qui, sous un régime de sang, périssaient, entraînant après elles ce qu’elles avaient de plus cher ; jeunesse, beauté, vertus, talents, une puissance plus arbitraire que le destin, et non moins irrévocable, précipitait tout dans le tombeau.
Mais on s’apercevra que, si la matière est banale, elle exige un talent d’autant plus rare pour la relever, et l’on enviera la plume d’un Sainte-Beuve ou d’un Vitet.
Presque personne n’eut l’élémentaire bonne foi de reconnaître que son talent est beaucoup moins simple que ne l’ont déclaré des critiques ineptes ou malveillants.
» Incident piquant si l’on songe que le Symbolisme est déjà en route pour s’installer triomphalement au foyer de Heredia et plus piquant encore s’il était permis de supposer que la belle ennemie éphémère des symbolistes ne fût autre que la future Madame Henri de Régnier, elle-même écrivain de grand talent et qui s’est fait une place enviée dans les lettres sous le nom de Gérard d’Houville.
Aussi, comme le dit Horace, c’est aux grecs que les muses ont fait present de l’esprit et du talent de la parole, pour les recompenser de s’être attachez à leur faire la cour et d’avoir été désinteressez sur tout, hors sur les loüanges.
Le plus brillant par le talent des deux, — celui-là qui n’avait pas été, comme l’autre, dans sa vie publique, qu’un diplomate, — l’orateur tout-puissant et l’écrivain, s’adressait, quand il mourut, le mot d’Hamlet : « Va dans un couvent !
L’écrivain avait été sacrifié au pédant, le talent à la platitude.
Malheureusement, nous devons le dire, le talent de la mise en œuvre n’est pas au niveau de l’impartialité de la pensée.
Un homme plus savant sur la Grèce que Debay, malgré son séjour dans le Péloponèse, et dont le talent a pour caractère distinctif une sagacité redoutable, Prosper Mérimée, a regretté quelque part, avec le sentiment d’une curiosité indigente et trompée, cette absence de mémoires, qui nous enlève d’un seul coup la moitié du monde grec sans espoir de la retrouver, et précisément la moitié dans laquelle se produisaient, en se variant, l’influence et l’action des courtisanes.
rien d’étonnant, sans nul doute, à cette magie de l’émotion, qui a donné tout à coup à MM. de Goncourt le sérieux dont leur talent manquait.
rien d’étonnant, sans nul doute, à cette magie de l’émotion, qui a donné tout à coup à MM. de Goncourt le sérieux dont leur talent manquait.
Prescott, l’Augustin Thierry américain, sinon par le talent, au moins par la cécité.
Il ne s’agit pas ici, bien entendu, des talents du gymnaste intellectuel que l’on appelle un philosophe, ni même de la dorure de bec de la Gloire, qui répète parfois et crie des noms, comme les perroquets, sans rien y comprendre, mais il s’agit des hommes qui représentent pour les avoir réellement exprimées le petit nombre de vérités nécessaires à la vie et à l’honneur de l’esprit humain.
Il fallut tout le talent de Cicéron pour empêcher Sextus Ebutius de garder la terre de Cecina, parce qu’il manquait une lettre à la formule.
Quand je dis que j’aurais désiré trouver un tel portrait idéal, je ne suis pas juste, car il y est, bien qu’un peu trop dispersé ; les chapitres xiii et xiv de l’Introduction, qui ont pour titre : Exposé sommaire de la doctrine médicale d’Hippocrate ; Remarques sur le caractère médical et le style d’Hippocrate ; ces chapitres ne sont autre chose que la description exacte, précise, définitive, de la forme de science et du genre de talent de l’Homère médical. […] À le voir passer si souvent tout près de l’éclat en l’évitant, et si en garde contre toute magie, même celle du langage, on ne peut s’empêcher de faire la comparaison de lui à tant d’autres, qui ont du talent, mais aussi la montre et l’emphase du talent.
Quand on commence, comme les Bénédictins, à Pythéas, le navigateur grec de Marseille, antérieur de 400 ans environ à Jésus-Christ, qui se dirigea au Nord à la recherche de la mystérieuse Thulé, et qui racontait tant de choses et si merveilleuses, qu’il passa en son temps pour menteur, comme Marco Polo dans le sien, et qu’on lui appliquait déjà le proverbe : A beau mentir, qui vient de loin ; quand on s’arrête à montrer les premiers établissements des Romains dans le midi de la Gaule, qu’on énumère les nombreux rhéteurs et grammairiens latins que produisit cette contrée, dès lors si prompte au beau langage : qu’on n’omet ni Marc-Antoine Gniphon, qui tint école à Rome, l’un des maîtres de César, et qui eut Cicéron pour auditeur ; — ni Valère Caton, le grammairien et le poète, que les Romains, novices encore à l’harmonie, avaient surnommé la Sirène latine, pour son talent de lire les poètes et de les former, qui faisait lui-même d’assez beaux vers, assez énergiques et touchants (il avait été dépossédé de son champ par les vétérans, cela l’inspira), et qu’a imité Virgile ; — quand on est heureux de rencontrer sur son chemin le grand comédien honnête homme Roscius, sous prétexte qu’il naquit dans la Narbonnaise ; — quand on embrasse ce cadre et qu’on tient à le remplir en détail, on écrit tout simplement un livre intéressant qui comprend une riche province de la culture latine, une province entièrement romaine depuis César. […] Quelles que soient les erreurs auxquelles son système l’a en traîné, l’œuvre de Raynouard n’en est pas moins celle d’un homme d’un éminent talent, si l'on ne veut pas lui concéder le génie. » Nous n’avons rien à ajouter après de tels suffrages. […] Les différences ne sont pas des solécismes ; l’analogie a été non faussée, mais étendue, et entre le latin et le roman, il ne faut admettre qu’un néologisme qui devint de jour en jour plus indispensable32. » Il y a au fond, et derrière ce système, tout un système philosophique de la perfectibilité de l’esprit humain, qui le domine et qui l’enhardit. — Mais même de ces systèmes excessifs, quand ils sont maniés et appliqués par des hommes de talent et de forte étude, il reste toujours de certains points acquis et de profitables dépouilles, comme de ces conquêtes poussées trop loin et dont on est forcé de rendre une partie, mais dont on garde quelque chose.
Cet homme n’est le second de personne ; il est le premier des naïfs, et la naïveté dans le sublime est le plus naturel des génies, car c’est le génie qui s’ignore, l’innocence baptismale du talent. […] C’est lui alors qui sera grand, car il n’y a de grand dans le talent que l’émotion. […] Je pourrais donner beaucoup plus de développement à ces idées ; mais, pour abréger, j’arrêterai seulement votre pensée sur un phénomène remarquable : c’est que nulle nation n’a le talent d’en gouverner une autre.
S’il est vrai que Louis XIV n’eût pas goûté la liberté de l’histoire, du moins a-t-il prouvé qu’il ne haïssait pas le talent d’en chercher les sources ; témoin Mabillon, qu’il envoyait en Allemagne et en Italie pour y recueillir des documents sur l’histoire de France ; témoin Montfaucon, qui allait plus tard aux frais du roi glaner sur les traces de Mabillon ; témoin enfin du Cange, dont Louis XIV pensionnait les enfants en récompense des travaux de leur illustre père. […] Mézerai, Saint-Réal, Vertot, sont des hommes habiles, à qui n’ont manqué ni le savoir, ni une certaine imagination, ni l’intelligence des conditions de l’histoire, ni le talent d’écrire ; ils ont fait des livres à recommencer et sont partis avant l’heure. […] Sans compter que Voltaire s’est plus d’une fois trompé à la qualité des plats, par exemple, quand son sens voluptueux préfère le Tasse à Homère, et qu’il se soulève devant « la mesquinerie des draperies dans Raphaël. » D’Alembert, à son tour, du droit que s’était arrogé l’esprit philosophique d’analyser tous nos plaisirs, décidait vers le même temps que le goût est proprement « le talent de démêler dans les ouvrages de l’art ce qui doit plaire aux âmes sensibles et ce qui doit les blesser », comme si nous ne savions pas bien que les âmes sensibles d’alors ne sont que les auteurs et les lecteurs de l’Encyclopédie !
Nos analyses ont porté sur six écrivains de race et de talent divers. […] Dans ce conflit de sentiments, appliqué à plaire à une catégorie d’êtres qu’il méprise et qu’il redoute, contraint dans ce but de plier à ses vues et de gagner à son talent des éditeurs, des directeurs de journaux, des critiques et des échotiers, l’artiste, l’idéaliste de tout à l’heure est forcé à plus d’expédients, de ruses, de compromissions, d’activité et de souplesse que n’en prodigue le plus déluré commis-voyageur. […] Il est surtout à citer parmi les congénères de Poe par ses étranges et passionnantes et effrayantes musiques, où son talent se hausse presque au génie, où alternent les lourdes magnificences du chant grégorien, les dissonances dignes, subites et comme livides de la démence, l’essor navré et lourd de larmes d’un chant d’exténuée tristesse, écrasée sans cesse et rompue par le sévère retour des fermâtes sacerdotales.
Je ne lus ces vers qu’à mes deux amis, Aymon de V… et Louis de V… Ils se récrièrent sur mon prétendu talent ; ils copièrent mon chef-d’œuvre pour le montrer à leurs parents ; mais nous nous gardâmes bien de le laisser voir à nos maîtres, car on nous interdisait avec raison de composer des vers français avant d’avoir des idées ou des sentiments à exprimer dans cette langue. […] Il était entré tard, et après une vie répandue, dans l’ordre ; il avait voulu recueillir la maturité de sa vie et utiliser à l’instruction littéraire de la jeunesse ses talents et ses goûts, goûts et talents d’un lettré accompli.
Or, dans le domaine des lettres, qu’adviendra-t-il du génie, qu’adviendra-t-il du talent, qu’adviendra-t-il de la poésie, du style, de l’analyse des caractères, de l’originalité des situations, de tout ce qui constitue la littérature en un mot, dès quelle acceptera, comme mobile de ses actes, l’assentiment et les acclamations des foules ? […] À propos de Baudelaire et des frères de Goncourt, nous nous arrêterons sur cette horreur et ce dégoût de la nature ou des phénomènes naturels qui les ont tous hantés à des degrés divers et qui éclaircissent bien des points obscurs de leur talent et de leurs ouvrages. […] Son talent fait de mysticisme et d’obscénité n’accroîtra pas dans l’avenir le nombre de ses admirateurs, et il paraîtra bien petit à côté de maîtres comme Victor Hugo, Lamartine, Musset et… Pierre Dupont. […] En dehors des entraves qu’elles avaient mises au développement de leur talent, et dont ils se sont peu rendu compte, ils en avaient pourtant souffert. […] La foule obscure des disciples infimes, assez complètement dépourvus de talent et de force propre pour suivre, avec une soumission aveugle, les réglementations qu’on leur offrait toutes prêtes et qui les dispensaient d’un effort original.
Parmi les auteurs de romans dont la réputation s’est faite en raison du progrès constant de leur talent, il convient de noter que M. […] Catulle Mendès a l’habitude de s’étendre avec un peu trop de complaisance, il faut dire que la Femme-Enfant est un livre composé de morceaux pleins de charme, de vérité et de talent. […] On voit rien qu’à ces vers que Corbière était loin d’être sans talent. […] Toutes les qualités d’observation parisienne qui sont la caractéristique du talent de l’auteur de la Famille Cardinal se retrouvent dans ces récits simplement écrits et qui en disent souvent plus long qu’ils n’ont l’air d’y prétendre. […] Francis Chevassu parmi les écrivains de talent du jour qui ne font pas fi de l’esprit, et pour cause.
Il ne faut pas demander à Suétone le talent de Tacite, au marquis de Dangeau l’esprit de madame de Sévigné, l’exactitude et le sang-froid de Mézerai à M. le duc de Saint-Simon ; il ne faut pas demander au Feuilleton les dates, les titres, les anecdotes des frères Parfait. […] « Celui-là qui, dans la société, a le malheureux talent de plaire à tout le monde, n’a rien qui lui appartienne et qui le distingue des autres hommes. […] A. le duc de Parme étonné, lui aussi, d’un si grand talent, ne pardonnait à Mégani qu’il exempte de son exil. […] Vous verrez, que de progrès en progrès, nous attendrons, pour bien juger le talent de nos grands coloristes, de M. […] Elles sont jeunes, elles sont belles, elles ont du sang italien dans les veines ; elles se montrent avec des talents, un esprit, un abandon et mille agréments qui les font adorer.
Je n’aime guère moins le talent de Joachim du Bellay. […] Mais si l’on prend la peine — que l’on a rarement prise — de distinguer les époques de son talent, on ne tarde pas à s’apercevoir qu’il fallut bien qu’il cédât aussi lui. […] Tant il est vrai qu’à lui tout seul, le talent ne saurait suffire, et que les genres remploient à leurs fins, bien plus qu’il ne les fait, lui, servir ou concourir aux siennes ! […] tant de talent et tant d’acrimonie ! […] Siècle de grands talents bien plus que de lumières !
Rien de lui n’était connu jusque-là ; l’Essai sur les Révolutions, publié en Angleterre, n’avait nullement pénétré en France ; quelques articles du Mercure et les promesses de M. de Fontanes présageaient depuis plusieurs mois aux personnes attentives un talent nouveau, quand le Génie du Christianisme remplit l’horizon de ses subites clartés. […] Mais dans les pages dont nous parlons, cette veine heureuse circule et joue au naturel ; elle fertilise dans le talent de M. de Chateaubriand des portions encore inconnues.
Mais, pour les grandes qualités qui font vivre les écrits, pour les beautés qu’on ne recommence pas, elles y sont rares comme les hasards de la veine chez les écrivains qui n’ont que du talent. […] Aux écrivains de talent, le mérite de pressentir ce progrès ou de pousser cette conquête.
Quelles que soient les différences profondes de talent et de principes de ces deux historiens, ils n’en représentent pas moins, l’un et l’autre, ce que nous méprisons le plus, l’individualisme dans l’histoire, c’est-à-dire l’historien sans mandat supérieur, sans charge publique, sans fonction ! […] la petite monnaie de son ancien talent d’historien, c’est toujours, ou à peu près, la même manière de tirer de sa poche la bonbonnière où elle est peinte sur ivoire, cette coqueluche de roi, avec tous les détails de sa toilette biographique, et de vous dire, la perle d’une larme à l’œil : « Elle était bien charmante, et ils l’ont bien calomniée !
Mais, quelque talent que les auteurs y aient mis, est-il possible de ne pas être frappé de ce qu’il y a d’incomplet et d’inachevé dans la plupart de ces peintures ? […] J’en connais une, réputée parmi ses compagnes pour son merveilleux talent d’invention.
Dès lors il n’y a plus d’événements dans ces deux vies séparées et voisines, mais seulement des incidents grossis par la passion qui en souffre, et par le talent du romancier qui les analyse jusqu’en leurs dernières conséquences. […] Il est écrit à la veille de la mort de Fromentin, et il fait beaucoup plus que nous montrer un talent fortifié par douze années de méditation et d’étude : il nous révèle la véritable voie de l’auteur ; il nous apprend que celui qu’on savait être déjà un peintre délicat, un voyageur intéressant, un romancier pénétrant et émouvant, était avant tout un critique d’art original et novateur.
Virgile aura vainement déployé toutes les richesses du talent & du génie dans son Enéide ; il faut en écarter l’épisode de Didon, & même l’amour un peu froid de Lavinie. […] Cet heureux ensemble a ses difficultés sans doute, & il n’appartient qu’au talent réel de les vaincre.
Le talent se mettait au service de certaines idées religieuses ou philosophiques qui avaient besoin d’en combattre et d’en détruire d’autres.
Envoyés, en 1831, aux États-Unis avec mission d’observer le régime pénitentiaire, MM. de Tocqueville et de Beaumont s’acquittèrent avec conscience et talent de ce travail intéressant de législation criminelle ; de nombreux documents de statistique et un bon livre sur le Système pénitentiaire aux États-Unis, attestèrent au gouvernement et au public les résultats de leur observation.
Coppée a fait représenter hier à l’Odéon plus de talent que dans cette comédie en cinq actes que je pourrais vous citer, si je ne craignais pas de chagriner l’auteur… Le Passant n’est pas une de ces pièces que l’on raconte ; c’est un poème auquel l’analyse ferait perdre la saveur et la grâce, une pure œuvre d’art que je vous engage à aller voir et que vous applaudirez certainement ; cela dure vingt minutes, vingt-cinq minutes au plus, et tout, depuis le premier vers jusqu’au dernier, vous charmera, je vous le jure… Enfin, voilà un début heureux au théâtre ; si M.
ne laissait passer, sans un éclatant tribut de son zèle et de son talent, aucune occasion de divertir et de flatter le roi, et qui enfin avait cela de particulier, qu’amant malheureux, mari trompé, il était poète sans pitié pour les victimes d’un désordre qui faisait son tourment.
Celui-ci fit voir, dans une ode, que les difficultés de la versification disparoissent devant ceux qui sont nés poëtes ; & que, bien loin d’être nuisibles au talent, elles contribuent à le faire sortir, & deviennent la source de mille beautés : De la contrainte rigoureuse, Où l’esprit semble resserré, Il acquiert cette force heureuse Qui l’élève au plus haut dégré.
Cependant La Fontaine se relève quelquefois et se montre avec tout son talent, soit dans des fables entières, soit dans des morceaux plus ou moins considérables.
Au résumé, il y a dans la Chanson de Roland pas plus de talent que dans bien des chansons de geste.
Otez la fausse manière qui gâte son esprit, Blaze de Bury aurait du talent, et dans ce cas il nous eût donné un petit chef-d’œuvre, car c’est vraiment de la matière à chef-d’œuvre que le sujet qu’il a choisi.
Quel que soit le talent dont elles peuvent briller, ces espèces d’Études historiques nées à propos d’une question contemporaine, filles de l’occasion politique, ne valent pas pour la durée le moindre livre d’histoire.
Heureusement pour Rivarol, le mot que cite Quitard ne prouve qu’une chose, assez triste du reste : c’est que le talent le plus héroïquement et le plus fièrement spirituel put se laisser enfiler par une idée vulgaire, comme un grand homme par un goujat ; mais il ne détruit nullement cette certitude : que ce qu’on appelle le bon sens des peuples et des siècles, c’est l’intelligence des grands hommes — ignorés ou connus — qui ont fait tradition et rencontré leur écho.
Le talent réel de l’auteur assurera davantage cette portée que nous redoutons.
Il n’est ni l’écrivain pittoresque, ni l’écrivain moraliste, ni l’écrivain judicieusement profond qu’il faudrait pour constituer la triplicité de talent qui est de rigueur quand on ose toucher à l’Histoire.
Il était dans la destinée de madame de Maintenon d’avoir contre elle les deux plus fortes influences qui pussent agir sur la tête d’un pays comme la France : la Philosophie du xviiie siècle, et, au xviie , la magie du Talent le plus atroce à ses ennemis qui ait peut-être jamais existé !
Hyacinthe Corne a du talent littéraire.
Le talent compassé de Southey ne s’est jamais oublié jusqu’au génie, cette indécence !
Grâce à cette circonstance individuelle, la publication de ces lettres n’aura pas l’effet que la Philosophie pouvait en attendre si un plus habile les avait traduites et interprétées avec un talent plus profond.
Le ton de ce monde qui énerverait le talent, l’âme et la plus forte pensée, ce ton qu’à son époque on appelait le bel air, était odieux à son esprit comme un ennemi personnel : « Je ne le peux souffrir », écrit-elle.
Le talent compassé de Southey ne s’est jamais oublié jusqu’au génie, cette indécence !
Traduit par un homme de grand talent avec la piété d’un Fidèle, avec le soin que mettaient les moines copieurs du Moyen Âge à transcrire leurs plus précieux manuscrits, le vaste livre de Valmiki restera comme un renseignement très curieux et infaillible de l’état cérébral d’un peuple dont jusqu’ici on a forcé les proportions.
Grâce à cette circonstance individuelle, la publication de ces lettres n’aura pas l’effet que la Philosophie pouvait en attendre, si un plus habile les avait traduites et interprétées avec un talent plus profond.
Saint-Évremond, qui ne valait pas mieux que Fontenelle par la moralité réfléchie ou par la moralité instinctive, mais qui lui était très supérieur par le talent, Saint-Évremond était plus hardi, mais il était en Angleterre, — cet asile contre la France toujours.
… Je me le suis demandé plus haut, si cela aurait été meilleur pour sa gloire, en supposant que cet infortuné ait un jour son atome de gloire, de vivre que de mourir ; si, en vivant, il aurait mis un jour au service de quelque grande conception le talent de style contracté, affiné, acéré et passé au feu de toutes les douleurs, un jour ressenties ?
Soit qu’il lui échappe quelque ardente prière dans une note émue, ou qu’il révèle la sagacité renseignée de l’érudit dans un rapprochement ou une explication, on aime à retrouver l’individualité de l’homme qui a conçu le plan de cet ouvrage, tout ensemble utile et modeste, à le voir se rappeler de temps en temps avec talent et convenance au milieu des graves fragments qu’il groupe et coordonne.
Ni poème inédit de Goethe ou de Byron, ni drame perdu et retrouvé de Calderon ou de Shakespeare, ni roman, ni histoire, ciselés par les maîtres de l’observation et de l’analyse, ni chefs-d’œuvre quelconques, ne sauraient, selon nous, lutter en intérêt et en importance avec ce modeste livre écrit par un moine, traduit par un prêtre, et dans lequel se joue un souffle qui n’est ni le talent ni le génie de l’homme, et qu’il faut bien appeler la force de Dieu pour y comprendre quelque chose !
Et voilà comment les sottises des hommes de talent ne tombent jamais par terre et peuvent toujours germer dans les têtes qui viennent après eux !
Il allait toucher à son midi de talent en 1830, en ce fervent et bouillonnant 1830 qui entraînait tout, poussait tout à la rescousse de la littérature.
Son talent se porte bien ; seulement, je lui trouve un peu de sécheresse.
L’humour est le genre de talent qui peut amuser des Germains, des hommes du Nord ; il convient à leur esprit comme la bière et l’eau-de-vie à leur palais. […] Entre autres choses, ce talent contient le goût des contrastes. […] Ce catéchisme cynique, jeté au milieu de déclamations furibondes, donne, je crois, la note dominante de cet esprit étrange : c’est cette tension forcenée qui fait son talent ; c’est elle qui produit et explique ses images et ses disparates, son rire et ses fureurs. […] Quand ils dépassent la simple analyse, tout leur talent consiste à plaider éloquemment des thèses ; parmi les contemporains de Carlyle, Macaulay est le modèle le plus achevé de ce genre d’esprit. — Les autres, après avoir fouillé violemment et confusément dans les détails du groupe, s’élancent d’un saut brusque dans l’idée mère. […] Un écrit, quel qu’il soit, ne fait que manifester une âme ; si cette âme est sérieuse, si elle est intimement et habituellement ébranlée par les graves pensées qui doivent préoccuper une âme, si elle aime le bien, si elle est dévouée, si elle s’attache de tous ses efforts, sans arrière-pensée d’intérêt ou d’amour-propre, à publier la vérité qui la frappe, elle a touché le but : nous n’avons que faire du talent ; nous n’avons pas besoin d’être flattés par de belles formes ; notre unique objet est de nous trouver face à face avec le sublime ; toute la destinée de l’homme est de sentir l’héroïsme ; la poésie et les arts n’ont pas d’autre emploi ni d’autre mérite.
Il vient à Paris, de bonne heure, non point, comme les talents vigoureux, avec le dessein d’être ceci ou cela, mais avec la volonté d’être quelque chose. […] Il compte faire son chemin par ses talents, sans léser personne. […] Il quitte, reprend, et quitte encore les plus chers objets de son étude ; il a comme de l’inconstance dans le talent. — Faut-il dire encore qu’un certain degré d’originalité lui manque, ou plutôt, car ici il y a lieu à de grandes réserves, qu’il ne sait pas bien se rendre compte de sa vraie originalité, et une fois qu’il l’a trouvée, s’y bien tenir ? […] Il impatiente par une inégalité de talent qui semble une inégalité d’humeur. […] Tels Marmontel, Laharpe, à cent degrés plus haut tel Voltaire. — Seulement Voltaire, outre ce talent ou plutôt cette souplesse à transformer sa critique en exemples agréables, qu’il prend et donne pour des modèles, a un talent original, et peut-être deux.
avec cela l’on peut fronder la société la plus redoutable du côté l’esprit ; avec cela l’on a le talent de parler sans rien dire, du matin au soir. […] Ils ont le talent de communiquer leur gaieté, jusqu’aux arbres mêmes, disoit Pierre-le-Grand. […] D’ailleurs, il n’est pas difficile de voir que les journalistes encouragent le talent, & que pour peu qu’ils trouvent quelque chose de bon dans l’ouvrage d’un jeune homme, ils le font valoir. […] Voltaire étoit trop friand d’éloges, pour qu’il n’eût pas fait des idylles & des chansons, lui sur-tout, qui affectoit le titre d’homme universel, s’il eût eu le talent de bien les travailler. […] Le voilà ce petit homme qui a dit qu’il vouloit être auteur, & qui l’est devenu, sans autre talent que sa volonté.
Aussi, qui voudra faire désormais son chemin dans le monde, faudra-t-il qu’avant tout il ait pour lui les femmes, le talent de leur plaire, de les intéresser à sa fortune ou à sa réputation. […] Il faut d’ailleurs avouer que, dans cette admiration des salons comme dans cette quasi collaboration du pouvoir à l’entreprise, les adversaires de l’Encyclopédie ont leur grande part de responsabilité, pour la maladresse de leurs attaques, pour la faiblesse de leur polémique, et pour leur absence entière de talent. […] Mais ce que l’on voyait très bien, c’est qu’aucune de ces critiques, sérieuse ou plaisante, n’atteignait le fond des choses, n’en approchait seulement de loin ; et non moins fiers de l’inutilité des efforts de leurs adversaires que de leurs propres talents, la réputation des Encyclopédistes et la fortune de l’Encyclopédie s’accroissaient, se fortifiaient, et se consolidaient par ces efforts mêmes. […] Combien d’ailleurs la qualité de son âme est supérieure à la qualité d’âme de Rousseau ; — si son talent demeure inférieur. — Éloquence de Vauvenargues. — Accent mélancolique de quelques-unes de ses pensées. — Finesse de son goût littéraire. […] — et aussi qu’avec des parties de talent, il en a eu de sottise ?
Elle accueillait chaque louange avec étonnement, avec reconnaissance ; je n’ai jamais vu de talent aussi vrai qui ressemblât davantage à l’humilité même.
Certes il lui convenait mieux qu’à personne, à lui qui avait si bien prouvé les immenses services de la Montagne, de saluer d’un regret et d’une larme les hommes de ce parti, qui, à la fleur de l’âge et du talent, étrangers aux crimes et aux faveurs de la dictature, et coupables seulement d’exaltation républicaine, étaient proscrits au nom de la modération comme des brigands, et mouraient comme des martyrs en désespérant de la liberté.
Il n’est pas aisé d’y réussir : on voit des hommes de talent, au théâtre, présenter des personnages qui sont à tour de de rôle de plates photographies et des types abstraits, qui tantôt parlent le verbiage insignifiant de leur condition dans le monde, et tantôt proclament la théorie profonde de l’auteur sur leur caractère.
Il n’est pas le dernier écrivain dont on ne connaît que les plaisanteries, dont on ignore à peu près le talent profond et grave, sinon triste.
Tout de même ai-je redouté que, dépourvu cette fois de l’autorité triple de l’âge, du torse et du talent, le joueur de parallèle ne parût d’une impertinence un peu vive, et, m’humiliant, j’ai reconnu qu’il fallait, pour risquer de si joyeux paradoxes, une réputation plus avérée de robuste bon sens.
Une société où la distinction personnelle a peu de prix, où le talent et l’esprit n’ont aucune valeur officielle, où la haute fonction n’ennoblit pas, où la politique devient l’emploi des déclassés et des gens de troisième ordre, où les récompenses de la vie vont de préférence à l’intrigue, à la vulgarité, au charlatanisme qui cultive l’art de la réclame, à la rouerie qui serre habilement les contours du Code pénal, une telle société, dis-je, ne saurait nous plaire.
Ses lettres au comte de Bussy-Rabutin la placent entre les talents épistolaires ; elle avait des amis d’un rang et d’un mérite très distingués.
Tout ce que le talent, inspiré par la haine, par la vengeance & par la débauche, peut enfanter de monstrueux, se trouve réuni dans les Couplets.
Ce qu’on appelle la science de la composition est une servante, pour user de cette expression, que le génie du musicien doit tenir à ses gages, ainsi que le génie du poëte y doit tenir le talent de rimer.
., la naissance et la nature des génies et des talents nous est inconnue ; nous savons seulement qu’aucune des hypothèses que l’on a émises sur ces lois ne rend compte de tous les faits.
Si Ernest Moret n’avait aucun talent, nous ne ferions pas ces questions.
Idée vulgaire et fausse que Thierry a traînée toute sa vie à la queue de son beau talent, et qu’il en aurait détachée pour la fouler à ses pieds s’il avait vécu davantage.
Soulié et Dussieux n’ont prouvé nulle part qu’ils ont le talent qui regimbe contre l’obscurité… Enfin, ce n’est même pas non plus au profit de M.
Mais, quoi qu’il en puisse être, c’est un livre d’un talent très mâle et qui ne sent nullement son débutant.
Elle lui dit qu’il n’était plus Benjamin Constant, qu’il se dissolvait, qu’il tombait par morceaux, qu’il était changé à faire peur, qu’il perdait son talent, qu’il n’avait plus d’esprit, qu’il devenait bête et idiot, lui, le Voltaire du temps !
Quand le talent a le front si large, est-ce qu’il est possible de le cacher ?
La Critique n’attend pas si nonchalamment les livres qui, pour elle, sont une vraie fortune, quand un peu de talent les distingue, et elle court au-devant pour leur faire accueil.
Il est arrivé au talent d’Alfred de Vigny ce qui arrive à certains visages, qui s’idéalisent en maigrissant.
Le travail précipité du journalisme ne va pas à son talent. […] N’est-il pas heureux de montrer beaucoup d’esprit et de talent à établir une thèse quelque peu artificielle ? […] Il faut l’en féliciter d’autant plus que son talent y a gagné encore, ce qui semblait malaisé. […] Il fallait tout le talent de M. […] Il sera soutenu, en outre, par le talent d’artistes incomparables.
Il était réservé à Pascal d’en finir avec cet appareil, et de fonder la prose purement française, en mettant le talent ou le génie du côté du jansénisme, dans ses Lettres provinciales. […] Mais ils se rendaient bien compte que, dans une société tout aristocratique, ni leur talent, ni leur génie n’auraient suffi pour leur permettre d’accomplir librement leur œuvre ; pour les imposer à la considération de leurs adversaires ; pour triompher des résistances des coteries et de l’opinion. […] Ce Jean-Baptiste est le modèle ou le type du faux homme de talent. […] Mais il faudrait pour cela que le seul homme d’un réel talent qui témoigne de cette influence, — c’est le romancier Le Sage, — ne fût pas aussi le seul à s’être moqué de cette nouvelle préciosité. […] En revanche, et pour les mêmes raisons, — que Bourdaloue demeure en français le vrai maître du développement oratoire ; — si nul mieux que lui n’a su poser, diviser et ordonner un sujet ; — le traiter selon sa constitution ; — et n’y rien ajouter d’extérieur ou de superflu. — Cette entière sincérité ne fait pas moins d’honneur à son caractère qu’à son talent — ou plutôt son talent et son caractère ne font qu’un. — Témoignages que lui ont rendus ses contemporains [Cf.
On dirait que l’excès de littérature paralyse les plus robustes talents, tarit au fond des âmes les mieux douées toutes les sources de la sympathie humaine. […] La plupart des hommes de talent qui ont écrit, en France, depuis la guerre de 1870, ont déçu notre attente. […] Paul Bourget des dangers que courait son talent et qui ont un instant alarmé ses amis. […] Bourget est arrivé à la gloire et à l’Académie sans autre secours que le mérite de ses livres, et par la seule vertu de son talent. […] Jean Bertheroy, malgré tout son talent, a certainement pâti de cette lassitude, dont il n’est pas responsable.
Il m’amenait avec lui. » Plus tard, il aura parfaitement raison de nous montrer dans Talleyrand un incomparable coquin de belle tenue ; mais en outre il lui niera presque tout talent diplomatique. […] Nous sommes trop sensibles à la gloire pour ne pas admirer ce lord Wellington, qui retrace d’une manière si frappante les vertus et les talents de notre Turenne. » (Diable !) […] (On le voit bien aujourd’hui : une restauration monarchique serait obligée d’utiliser tout ce qui a servi la République avec talent.) […] La France pourra les rappeler quand leurs talents, lassés d’être inutiles, seront sincèrement convertis à la religion et à la légitimité. […] qu’un jeune gentilhomme breton ait navigué, qu’il ait émigré, qu’il ait, pendant la Révolution, connu des jours de détresse… Il est assez naturel qu’ayant un grand talent, il ait écrit des livres qui ont eu du succès, et que, après la Restauration, il ait occupé quelques grandes places.
Ces Essais en langue russe lui donnèrent la révélation de son talent. […] VI Il y a beaucoup de talent dans notre pays ; le génie y est rare comme partout ailleurs. J’entends par génie, le caractère transcendant du talent, cette physionomie de l’esprit qui vous frappe au premier coup d’œil dans un homme de lettre, ou dans un homme politique, soit par la nouveauté inattendue, soit par la force de l’acte, de la pensée et du style, et qui vous fait dire : Voilà un homme de génie. […] Mais il est jeune ; et le monde, qu’il voit maintenant d’un point de vue plus général, lui fournira peut-être des conceptions idéales, égales à son splendide talent. […] Son talent, neuf, original et délicat, quoique précis, répand sur ses descriptions et sur ses récits des formes et des couleurs qu’aucun artifice de composition n’aurait pu inventer.
Mais la considération consiste pour les uns dans l’ascendant que donnent le pouvoir et la fortune, et pour les autres dans le respect qu’inspirent le talent et la vertu. […] Le génie et le talent peuvent produire de grands effets sur cette terre, mais dès que leur action a pour but l’ambition personnelle de celui qui les possède, ils ne constituent plus la nature divine dans l’homme. […] L’éloquence et l’inspiration du talent raniment ce qui existait souvent dans le cœur des individus les plus obscurs, et ce qu’étouffaient en eux l’apathie ou les intérêts vulgaires.
« L’onction et la sérénité d’une vie sainte et courageuse, la douce gravité du quaker, la profondeur de sa prudence, la chaleur passionnée de ses sympathies et de ses prières, tout ce qu’il y a de sacré et de puissant dans son intervention paternelle, a été parfaitement exprimé par le talent savant et expérimenté de M. […] Avec une haute intelligence il a fait comprendre la fierté de Chatterton dans sa lutte perpétuelle, opposée à la candeur juvénile de son caractère ; la profondeur de ses douleurs et de ses travaux, en contraste avec la douceur paisible de ses penchants ; son accablement, chaque fois que le rocher qu’il roule retombe sur lui pour l’écraser ; sa dernière indignation et sa résolution subite de mourir, et par-dessus tous ces traits, exprimés avec un talent souple, fort et plein d’avenir, l’élévation de sa joie lorsque enfin il a délivré son âme et la sent libre de retourner dans sa véritable patrie. […] Elle est poétique dans tous les détails de ce rôle qu’elle caresse avec amour, et dans son ensemble qu’elle paraît avoir composé avec prédilection, montrant enfin sur la scène française le talent le plus accompli dont le théâtre se puisse enorgueillir.
Avec le talent il a, au plus haut point, le savoir-faire. […] C’est d’une de celles-là, mêlée, sous son crêpe de deuil, aux divertissements de quelque villégiature aristocratique, qu’une méchante langue dit un jour : « Oui, c’est bien ainsi que ce pauvre un tel aurait voulu être pleuré. » Il y a celles qui étaient au moins égales, par l’esprit et le talent, au mari qu’elles pleurent, et qui, tant qu’il vécut, se sont tues, se sont cachées, ont suivi ses succès, du fond de leur retraite volontaire, comme des mères indulgentes. […] Il y a les frères veufs, dont le mort avait du talent, et qui en ont aussi peut-être, mais qui, pouvant tranquillement jouir d’une gloire indivise, ont voulu, par leurs productions personnelles, nous mettre à même de dégager de l’œuvre commune l’apport du défunt.
et, quand les amateurs ont du talent, ne valent-ils pas mieux, avec leur inexpérience des « trucs » de trétaux, que les habiles que « cela ennuie ? […] Je ne connais point d’autre poète, en notre littérature française d’aujourd’hui, et j’ai vainement cherché hors de France un musicien des mots23 Les nouveaux poètes anglais ne diffèrent des anciens, de Byron et de Swinburne, que parce qu’ils ont un moindre talent. […] Paul Verlaine, un poêle parnassien de grand talent, a montré dans Jadis et Naguere, parmi maints poèmes médiocres, dans une inanité totale d’idées ou de plans, quelques musiques charmantes, languides et mièvres, et d’une tristesse souriante.
Il les considérait comme des truchements et, jusqu’à un certain point, des apologistes de sa politique auprès des jeunes générations dont ils étaient les princes par le talent. […] Je ne puis cependant élaguer entièrement toute la partie anecdotique qui y foisonne, et qui vient comme autant de pièces à l’appui de tout ce qu’on sait et de ce qu’on a dit de la vénalité, de l’esprit d’à-propos, de l’amabilité, de la grâce, de tous les talents et vices de M. de Talleyrand.
L’érudition de Maurice Sève et de Pontus de Thiard, leur quintessence platonique et scientifique, ne laisse rien à désirer aux obscurités premières de Ronsard et de ses amis, et ils n’ont pas l’avantage de se dégager par moments, comme ceux-ci, avec netteté, avec un jet de talent proportionné à l’effort ; ils ne se débrouillent jamais. […] Lyon offrait, à cette époque, une réunion de personnes du sexe très-remarquables par les talents en tous genres, et, à ne consulter que les poésies de Marot, on y trouve célébrées les deux sœurs Sybille et Claudine Sève, parentes de Maurice, la savante Jeanne Gaillarde, toutes plumes dorées, comme il dit, et les sœurs Perréal, qui étaient peintres.
Il y a eu dans le roman des talents très-remarquables, qui n’ont eu que des succès viagers, et dont les productions exaltées d’abord se sont évanouies à quelques années de là. […] On sut d’ailleurs un gré médiocre à Mme de Krüdner, dans le monde allemand poétique, d’avoir déserté sa langue pour la nôtre, et Goëthe a lui-même exprimé quelque part le regret qu’une femme de ce talent eût passé à la France.
C’est ainsi que je connus son nom, son talent et sa personne, et qu’à première vue je devins, à son insu, son ami. […] On murmure à voix basse que la beauté, le talent, la célébrité d’une femme d’exception, qui cache son nom comme il convient aux femmes de porter un voile dans la foule, ou aux Clorindes de revêtir une armure d’homme en combattant ; on murmure, disons-nous, que l’attrait d’esprit, le nom voilé, les éclats de célébrité de cette personne, ont fasciné d’un éblouissement désintéressé les yeux et l’âme de ce Platon de la solitude ; que, semblable à ces chevaliers dont la race et le sang coulent dans ses veines, il a senti le besoin de porter dans le cloître ou dans les combats une dame de ses pensées, et qu’il lui a voué ce qu’on appelle un culte, un servage, une foi chevaleresque, épurée de tout, hors de la joie de se dévouer !
Il écrit : « Quand on borne son talent à une accumulation de petits faits, on devrait être au moins réservé dans ses conclusions et sobre dans ses théories. » C’est dire, dans la même phrase, que M. Taine « borne » son talent à cette accumulation, et qu’il ne l’y borne pas.
Nul doute que des germes de talents ou de génies réels n’aient été étouffés du seul fait que le hasard les avait placés loin du soleil, — et que, d’autre part, voici cinq cents ans et moins, il y avait entre les bords de Loire ou de Seine et ceux de la Garonne ou du Rhône encore plus de distance que depuis la crise des transports. […] Il est arrivé au peuple d’oc ce qui serait arrivé à la France tout entière si nous avions été écrasés par les Allemands voici un peu plus d’un lustre : la langue teutonne nous eut été imposée, nous nous serions accoutumés plus ou moins vite à cette contrainte vitale pour des vaincus, mais il est sûr que, de bien longtemps, les poètes d’origine française n’auraient pu rivaliser de talent, de science, — et de gloire, — avec leurs confrères strictement germains.
« Illustre, généreuse et héroïque ame, dit Rabelais parlant de sa mort, tout parfait et nécessaire chevalier à la gloire et protection de la France, que les cieuxrepetoient comme à eux deu par propriété naturelle. » L’amour des lettres et les talents se transmettaient alors du père au fils, comme un héritage, le plus souvent augmenté et amélioré par le fils. […] Ces doutes seraient à sa louange, et c’est ce qui m’y fait croire ; car, quoique rien n’annonçât encore le retour qui allait suivre cette fortune et que Malherbe n’eût pas encore taillé la plume qui devait biffer tout son recueil, Ronsard avait prouvé par plus d’une pièce, et par quelques écrits en prose, qu’il avait assez de talent pour n’être pas toujours content de lui.
— Compositeur lui-même, Fétis ne vit chez l’auteur du Tannhauser qu’un incommensurable orgueil sans l’ombre d’un talent. […] Un autre écrivain belge d’esprit et de talent, M.
, je n’estime pas beaucoup meilleur le volume, mais je le regarde, ainsi que Mme Sand m’a appris à le considérer, comme un intéressant embryon de nos romans de plus tard, comme un premier livre, contenant très curieusement en germe, les qualités et les défauts de notre talent, lors de sa complète formation, — en un mot, comme une curiosité littéraire, qui peut être l’amusement et l’instruction de quelques-uns. […] Zola, et peut-être moi-même, avons apportée dans le peinture du bas de la société, sera reprise par un écrivain de talent, et employée à la reproduction des hommes et des femmes du monde, dans des milieux d’éducation et de distinction, — ce jour-là seulement, le classicisme et sa queue seront tués.
Et il avait ce talent, dit Spuller, de faire avaler cette politique à la fois papaline et libre penseuse de l’Empereur, et son discours faisait dire à des malandrins comme moi : « Non, il n’est pas changé, il est toujours avec nous », et faisait dire en même temps au parti impérialiste catholique : « Billault, il défend les grands principes moraux ! […] Le ciel de Paris avec ses bleus délavés, la pierre grise des maisons, l’affiche en ses coloriages, tirant l’œil dans le camaïeu général, c’est merveilleux ; et dans ce tableau encore les figures ont le format qu’il faut au talent du peintre napolitain, le format de grandes taches spirituelles.
Sa manière n’a rien de petit ni de léché, ni qui sente le faire de la femme ; on croirait plutôt avoir devant soi les productions d’un jeune homme de talent qui s’exerce avec largeur et se développe.
Il considère cette société antérieure et postérieure à l’individu ; il la voit subsistante, nécessaire, harmonieuse, agissant en mille façons et par toutes sortes d’influences inappréciables, plus mère encore que marâtre, ne retirant à l’homme primitif du côté des forces physiques que pour rendre davantage par le moral à l’homme actuel, et imposant dès lors à quiconque naît dans son sein des devoirs, des obligations qui ne sont point proprement de particulier à particulier, mais qui prennent un caractère commun et général : Car les individus, dit-il, à qui je dois la vie, et ceux qui m’ont fourni le nécessaire, et ceux qui ont cultivé mon âme, et ceux qui m’ont communiqué leurs talents, peuvent n’être plus ; mais les lois qui protégèrent mon enfance ne meurent point ; les bonnes mœurs dont j’ai reçu l’heureuse habitude, les secours que j’ai trouvés prêts au besoin, la liberté civile dont j’ai joui, tous les biens que j’ai acquis, tous les plaisirs que j’ai goûtés, je les dois à cette police universelle qui dirige les soins publics à l’avantage de tous les hommes, qui prévoyait mes besoins avant ma naissance, et qui fera respecter mes cendres après ma mort.
Un jeune écrivain, qui s’est occupé avec talent de ces guerres des Cévennes, M.
La grande masse de nos citoyens cependant demeure fidèle à ses principes républicains : tout ce qui est intéressé à la culture des terres est républicain ; il en est de même d’un grand nombre d’hommes de talent.
Borel, parce qu’il a assez de talent pour mériter qu’on le soit avec lui, et parce qu’il l’est en vérité trop peu, lui et quelques-uns de ses amis, avec le public.
Si des gens d’un talent incontestable, tels que MM.
N’est-ce pas une puissance étrange que ce talent qui nous les rend sensibles, qui les relie entre eux, qui, en dépit du siècle, amenant les dieux et les animaux dans la cité poétique, rassemble tous les êtres de la nature et la nature elle-même en une comédie universelle, les transforme et les proportionne suivant une idée maîtresse et pour un seul dessein ?
Quand on ne tiendrait aucun compte du talent qui éclate dans ses poésies lyriques, M.
Survient Lesbino que le capitaine consent à prendre pour page, après lui avoir fait quelques questions bouffonnes sur sa bravoure et sur ses talents militaires.
Le malheur voulut que bientôt le naturalisme subit l’empire d’un talent vigoureux, mais étroit, brutal, grossier, sans goût, et ignorant de la mesure, qui est tout l’art.
Et je n’arrive pas à donner une idée de ces prestigieuses aventures, plus grandes que nature où s’est complu le pur talent d’Élémir Bourges, et que tachent à peine, en fin de roman, de superflus dialogues d’un scepticisme facile.
. — Les acteurs… ils jouent tous la même chose… moi, je ne parle que des actrices… Encore, quand ils sont bien laids, comme Ligier, on peut dire qu’ils ont du talent… mais, sans cela jamais leur nom ne se trouve sous ma plume… Voyez-vous, le théâtre, il faut que ça soit deux et deux font quatre, et qu’il y ait des rôles de femmes… c’est ce qui fait le succès de Mazères….
Coquelin a révélé la forme nouvelle d’un talent apte décidément à toutes les métamorphoses, M.
Après avoir analysé l’œuvre littéraire en tant que produit du tempérament personnel de l’auteur (prédispositions héréditaires, genre de talent, etc.), et du milieu où ce tempérament s’est développé (époque, classe sociale, circonstances particulières de la vie), il reste toujours à considérer l’œuvre en elle-même, à évaluer approximativement la quantité de vie qui est en elle38.
Du reste, le public et la presse, cette voix du public, lui ont généreusement tenu compte, non du talent, mais de l’intention.
Il dut voir qu’il n’étoit pas plus initié dans le grand art d’exciter fortement les passions, que ne l’est, dans les secrets de l’architecture, un manœuvre servile & sans talent.
Maupertuis refusa de les admettre & lui suscita des ennemis, entre autres l’auteur du qu’En dira-t-on, des Mémoires de madame de Maintenon, & de quelques autres ouvrages, qui annoncent moins le talent que l’audace & le mépris des bienséances.
La mémoire des mots consiste à apprendre facilement par cœur, et à retenir plus ou moins longtemps ce qu’on a appris ; le sens du langage est le talent de la philologie, l’habileté à apprendre et à comprendre les langues.
Elle, cependant — tant elle a poussé loin l’admirable et inépuisable coquetterie de son talent — elle redouble de grâce, d’esprit, de vivacité, de jeunesse ; elle accable ses amis et ses ennemis de toutes ses qualités charmantes ; elle ranime d’un souffle puissant les vieux chefs-d’œuvre qui vont disparaître avec elle !
Rousseau est le type de cette sorte de découragement moral ; et, pendant bien des années, tous les jeunes gens doués de quelque talent auraient pu écrire la plupart des pages des Confessions, celles surtout qui sont d’une lecture si douloureuse dans les Rêveries du promeneur solitaire.
Il y a même de très grands écrivains, de très grands artistes, qui emploient leur talent et leur art à fausser l’histoire et à faire d’elle la servante ou d’un système ou d’un parti ; par cela seul se déshonorant de ce qu’ils l’ont déshonorée… Michelet est de ceux-là, par exemple, et la critique peut pleurer sur lui, parce qu’elle sait tout ce qu’en le perdant la vérité y a perdu.
il n’a pas manqué d’hommes de génie et de talent pour la soutenir.
Le hasard seul d’une trouvaille de bibliothèque, le bonheur de quelque carton à renseignements découvert, a pu lui faire mettre la main précisément sur ce sujet d’étude, si éloigné des préoccupations de ce temps, et travaillé, du reste, je le reconnais, avec une conscience qui devrait être du talent, pour sa peine, mais qui malheureusement ne l’est pas toujours… L’auteur de cette récente histoire du roi René l’a proprement nettoyée de tous les récits légendaires qui l’obstruaient, car la Légende s’était enroulée comme une liane autour de ce vieux chêne qu’elle avait fini par cacher.
N’est-ce que le caprice du talent, tenté par un sujet d’une beauté infiniment difficile pour une plume de ce temps ?
Dans une époque qui pousse cet amour des faits jusqu’à préférer les plus petits aux plus gros, uniquement parce qu’ils sont les plus petits, — qui a mis je ne dis pas l’Histoire, mais l’historiette à la place de tout, qui dernièrement, en ses journaux, pour se dispenser d’avoir du talent, a inventé la Chronique, cette chose amusante, la chronique, chère au dilettantisme littéraire de messieurs les portiers, — n’est-il pas tout simple qu’Alexandre de Humboldt, le chroniqueur de la science du xixe siècle, l’arpenteur du globe qui montre les mesures qu’il a prises, le voyageur qui a lu des voyages et qui en a fait, produise sur nous tous l’effet d’un Moïse, — d’un Moïse assez bon pour nous, qui ne descend pas de l’Horeb avec les Tables de la Loi, mais du Chimboraço avec un album dans sa poche !
Dans une époque qui pousse cet amour des faits jusqu’à préférer les plus petits aux plus gros, uniquement parce qu’ils sont les plus petits, — qui a mis je ne dis pas l’histoire, mais l’historiette à la place de tout, — qui dernièrement, en ses journaux, pour se dispenser d’avoir du talent, a inventé la Chronique, cette chose amusante ; la chronique, chère au dilettantisme littéraire de messieurs les portiers, n’est-il pas tout simple qu’Alexandre de Humboldt, le chroniqueur de la science du dix-neuvième siècle, l’arpenteur du globe, qui montre les mesures qu’il a prises, le voyageur, qui a lu des voyages et qui en a fait, produise sur nous tous l’effet d’un Moïse, — d’un Moïse, assez bon pour nous, qui ne descend pas de l’Horeb avec les Tables de la Loi, mais du Chimboraço, avec un album dans sa poche !
Vera s’est dévoué et l’a traduit en français avec un grand talent ; eh bien, il a été accusé par un autre traducteur, — un traducteur russe de ce grand homme, à ce qu’il paraît intraduisible, — de l’avoir singulièrement défiguré et très peu compris.
Excepté l’adorable madame de Gasparin, cette protestante si digne d’être catholique à force de tendresse et de poésie dans la pensée, je ne vois là que des médiocrités pour lesquelles le ferme spiritualiste que ne cesse d’être Caro dans toute l’étendue de son volume est beaucoup trop bon, quand il s’agit de la juste appréciation du talent.
C’est par le détail surtout que brille le genre de talent d’Arsène Houssaye.
L’idée imposante d’un vieillard qui célèbre un grand homme, ces cheveux blancs, cette voix affaiblie, ce retour sur le passé, ce coup d’œil ferme et triste sur l’avenir, les idées de vertus et de talents, après les idées de grandeur et de gloire ; enfin la mort de l’orateur jetée par lui-même dans le lointain, et comme aperçue par les spectateurs, tout cela forme dans l’âme un sentiment profond qui a quelque chose de doux, d’élevé, de mélancolique et de tendre.
Rivollet a un beau talent de versificateur et presque de poète. […] Le Braz sort aussi nettement cette vérité que les dramatistes bretons ont du talent, que celle-ci qu’ils ne sont pas créateurs. […] Du reste, les Femmes savantes, à la Comédie française, sont jouées avec talent, mais avec des contresens. […] Ce n’est aucunement là à mes yeux ni l’intérêt profond, ni le sujet de la pièce : matière bonne, sans doute, pour quelque dramatiste moderne, bonne pour un talent moyen, et bonne même, si l’on veut, pour un écrivain de génie ; mais non pas, je crois, suffisante pour un génie comme celui de Molière. […] Malgré le plus brillant talent du monde, il vécut dans une pauvreté perpétuelle et il « ne fut rien ». — Qu’importe ?
On sait qu’aujourd’hui les hommes de talent sont fort bien accueillis dans le monde quand ils sont célèbres. […] Enfin, il a un talent si puissant, une telle sûreté de main, une si belle audace ; qu’il faut bien le laisser dire et le laisser faire. […] On prétendait qu’il avait dit que Shakespeare n’avait aucun talent. […] Quant à son talent naturel de sculpteur, il étonnait ses amis, bien avant qu’elle signât avec M. […] Je lui parlai tout de suite des poètes, je lui nommai tel ou tel de ceux dont le talent certain n’est connu que des délicats et dont le nom sert de mot de passe aux initiés.
Beaucoup d’hommes ont concouru à ma délivrance : le Directoire qui ordonna de nous réclamer ; les Directeurs et les ministres qui recommandèrent cet ordre ; le collègue plénipotentiaire qui s’en occupa ; certes, autant que lui, tant d’autres qui nous servirent de leur autorité, de leur talent, de leur dévouement ; il n’en est point à qui j’aie témoigné avec autant d’éclat et d’abandon une reconnaissance sans bornes, sans autres bornes du moins que mes devoirs envers la liberté et la patrie. […] Quand je dis belles, on entend bien qu’il ne peut être question de talent littéraire ; mais l’habitude du bon langage se retrouve naturellement sous cette plume simple ; les récits, les réflexions abondent en manières de dire heureuses, modérées, et qui portent. […] Il déploya beaucoup de talent, des vues étendues, et l’on jugea pendant quelque temps de son patriotisme par ses « Succès. » — En ce temps de grandes phrases, je me sens de plus en plus touché de ce qui n’est que bien dit. […] Quoiqu’il eût le talent et l’art d’écrire, c’était, vers la fin, Des Renaudes qui lui faisait ses rares discours.
Je connais pourtant un sculpteur d’un grand talent qui avait voulu sortir de la cuve où se débattent les grecs et les fantaisistes. […] Le mot appartient à Schiller ; la doctrine s’est formée parce qu’on a reconnu, par la comparaison des talents, que les écrivains qui avaient peint sincèrement leur époque étaient supérieurs aux autres comme artistes, comme exécutants, avaient une intelligence et un sentiment plus profonds. […] Les théâtres font de belles recettes ; on a même, depuis quelque temps, trouvé moyen d’augmenter le nombre des gens privilégiés qui gagnent notre argent avec les talents réunis des costumiers, des maîtres de ballet, des musiciens, des décorateurs, des machinistes, des acteurs et même des auteurs. […] En faisant le contraire de ce que vous avez fait, en mettant les qualités hors nature au rang secondaire, vous auriez fait, madame, un excellent article sur Cooper, et vous auriez donné cours à des vérités de jugement bonnes pour tout le monde et qui, grâce à votre talent, auraient acquis la popularité si nécessaire à toute vérité. […] Un second article signé par un jeune critique qui ne manque pas de talent, M.
On pleure, sur ce jeune cadavre de talent, l’enterrement de la France. […] Mon frère ne revivra pas par ce talent de coloriste, dont j’entends le De Profundis , dans une sonnerie de clairon et un roulement de tambour. […] Il me montrait tous les avocats de deux sous, tous les avocats sans cause, tous les avocats sans talent et sans honorabilité, aidés, poussés par Crémieux, dans la curée des places de la haute administration. […] Et, il faut le dire cependant, dans la bande d’Assi, c’est l’homme qui a le plus de talent et le moins de méchanceté. […] Il nous montre tout cela, bonifacement, en patoisant un hollande-français, où perce parfois l’amertume d’un grand talent, d’un très grand talent, qui demande 3 000 francs pour vivre par an, et ne les a pas toujours gagnés, même dans les années où il voyait vendre un Bonington, 80 000 francs.
Sa biographie de Rousseau, où il prend sa défense contre la coterie Grimm, est une œuvre patiente et sérieuse, et il avait d’autre part le goût et le talent des vers plaisants. […] Néanmoins, malgré Les Marrons du feu, qui « révoltent » et « dégoûtent » l’auteur de l’article, malgré Mardoche, qui a l’air écrit par un « fou », les Contes d’Espagne et d’Italie annoncent « un talent original et vrai ». […] « Les Contes d’Espagne et d’Italie, a dit Sainte-Beuve, posaient… une sorte d’énigme sur la nature, les limites et la destinée de ce talent. » Énigme dont l’obscurité s’accroissait par le plus étrange pêle-mêle d’enfantillages de collégien8, et de vers de haut vol, de ceux que le génie trouve et que le talent ne fabrique jamais, quelque peine qu’il y prenne. […] A la place de celui-là, je veux donc vous prier de m’amener Dumas, en l’art de qui j’ai trouvé de l’âme, abstraction faite du talent… » Quelque temps après, Alfred de Musset et George Sand se rencontrèrent à un dîner offert par La Revue des Deux Mondes. […] Il lui reprochait aussi de se vanter trop souvent au public de l’avantage de mal rimer : (Les vers) « de Musset (« Après une lecture »), avec tout leur esprit, ont une sorte de prétention et de fatuité dont son talent pourrait se passer.
Delà, avec cent fois moins de talent qu’un Saint-Simon, une sûreté, une certitude, une plénitude de sens, un manque merveilleux d’imagination, qui sont des qualités supérieures d’historien. […] À la vérité, le talent se moque des règles et la poésie se moque de la poétique, et dans ce genre, faux par définition, Marot aurait pu montrer du talent. […] Ce n’est point là la manière de Rabelais, ni le talent où il fût propre. […] Précisément l’art propre du conteur sans rien qui le soutienne et l’appuie, l’art du conteur en soi, le talent de bien conter n’importe quoi. […] Mais il n’en souffrait point et même en ce genre d’ouvrages, trouvait le moyen de montrer, par digressions, un très grand talent.
Un fait est certain, c’est qu’un homme intelligent, bien équilibré de corps et d’esprit, instruit, laborieux, peut fort bien n’avoir aucun talent littéraire, tandis qu’un autre homme, d’une intelligence capricante, quasi ignorant, paresseux, déséquilibré de santé physique et morale, produira des œuvres magnifiques, pures, d’une belle logique, d’une noble harmonie. Un autre fait est également certain, c’est qu’il ne suffit pas d’être déséquilibré pour avoir du talent ou du génie. […] Et cependant, troisième fait encore bien certain, presque tous les hommes de génie ou ie grand talent sont, en quelque mesure, en état de déséquilibre. […] Cela n’empêche pas que l’on ne puisse, en de tels traités, aphoristiques ou méthodiques, logiques ou décousus, faire preuve de talent, d’ingéniosité, de philosophie. […] La morale est un talent de société.
Son caractère n’inspire aucune estime ; son talent même perd de son charme. […] Henri Heine n’a point cru ; voilà le secret de sa vie si cruellement brisée, de son talent profané ou perdu. […] Combien de talents ont avorté ! […] Le talent d’observation de M. […] Mais ce talent se montre d’une façon plus continue dans la troisième partie du roman.
Et c’est ce talent qu’on retrouve dans l’histoire de Marius. […] C’est la seule qui m’ait paru donner de Pater un portrait vivant, la seule encore où j’aie trouvé une juste appréciation de son talent. […] Je dois vous avouer que tout cela est assez petit, prosaïque, vide et sans talent. […] Et c’est au profit de ce côté gracieux de son talent que nous a paru se diriger l’évolution présente du dramaturge norvégien. […] Je ne dis pas qu’ils y seraient devenus moins intelligents, ni que leur talent s’y serait amoindri.
Partout, dans les suites, refaçons et contrefaçons de Renart 96, dans les Fabliaux, dans tous les genres de poésie narrative, avec l’ordure croit la violence : l’âpreté des haines tient lieu de talent. […] Né dans une contrée où s’était éveillé de bonne heure le goût des vastes compositions historiques, il a fait une œuvre toute flamande encore à d’autres égards : le génie de cette Flandre opulente, matérielle, sensuelle, pays des cortèges somptueux et bizarres, des tapisseries immenses et splendides, de l’éclatante et grasse peinture, où, sous les ducs de Bourgogne, la féodalité mourante étala ses plus riches et plus étourdissantes mascarades, ce génie est bien le même qui s’exprime dans le talent de Jean Froissart, l’incomparable imagier.
La littérature suit sa courbe descendante, à peine de loin en loin relevée par l’accident heureux de quelque talent individuel. […] Est-ce invention verbale, toute-puissante illusion du talent littéraire ?
Parler d’une pièce, la juger, si pauvre qu’elle soit, c’est encore ardu ; d’où la prépondérance prise par les acteurs, les actrices, leur vie privée et celle des auteurs bien plus accessibles à chacun que leur talent ou leurs défauts. […] Le théâtre est à l’art littéraire ce que la peinture des décors grossièrement brossés est à l’art des tableaux qui réclame impérieusement de ceux qui s’y adonnent du talent, de la technique, du goût et de l’originalité.
Vielé-Griffin est de la race des conteurs, mais il ajoute à leurs talents connus d’élégance et de clarté un sens plus profond de la vie, de plus intimes paroles issues d’un être qui a vu et compris, et un souci nouveau de suggérer. […] Cette manière de versifier, quand elle ne conduit pas à une sensualité vaine permet évidemment à l’instinct de s’épanouir en claires fleurs ; elle peut s’accorder souvent avec le talent et ils l’ont prouvé ; mais si elle favorise la naissance de mille compositions légères et charmantes, elle ne recèle pas assez de force vive pour s’ordonner en une œuvre décisive et grande.
La Force s’étant excusé, d’Aubigné fit alors un de ces discours dont il aime à se ressouvenir, et où il résume avec énergie et talent tout l’esprit d’une situation et d’une crise : Sire, vous avez plus de besoin de conseil que de consolation ; ce que vous ferez dans une heure donnera bon ou mauvais branle à tout le reste de votre vie, et vous fera roi ou rien.
Mlle Pascal avait un certain talent, ou du moins une grande facilité pour les vers : la mère Agnès, plus rigide qu’à elle n’appartient, lui écrit : « Vous devez haïr ce génie, et les autres qui sont peut-être cause que le monde vous retient ; car il veut recueillir ce qu’il a semé » ; et elle lui cite en exemple sainte Lutgarde, « qui refusa le don que Dieu lui avait fait d’entendre le psautier ».
[NdA] C’est l’éloge que lui donne pour cette action Bonaparte, dans son rapport du 15 avril au Directoire : « Déjà l’intrépide général de brigade Joubert, grenadier par le courage et bon général par ses connaissances et ses talents militaires, avait passé avec sept hommes dans les retranchements de l’ennemi ; mais, frappé à la tête, il fut renversé par terre, etc. » 27.
Qu’on ne s’attende ici à rien de brillant, à rien de flatteur ni même d’agréable, à rien de ce que le talent, ce grand enchanteur, va évoquer à distance et deviner ou créer plutôt que de s’en passer.
Trois mois se passèrent dans une félicité sans mélange, chaque jour révélant un surcroît de perfection et un talent imprévu dans cette personne rare, dont il ignora jusqu’à là fin l’histoire antérieure et le secret.
Nous l’adressâmes à un homme de cœur et de talent ; cet homme fut aussitôt associé, pour ce crime d’amitié, aux injures qu’on nous réservait.
Le talent littéraire lui a manqué : homme de lutte, protestant zélé, fougueux adversaire de la scolastique, d’Aristote et de la routine universitaire, humaniste, grammairien, mathématicien, philosophe, il faut bien que le don essentiel lui ait manqué, pour que ses enthousiasmes, ses colères, ses périls ne lui aient pas arraché quelques pages capables de lui assurer une place dans la littérature de son siècle, entre Paré et Palissy.
Nous nous sommes trop imaginé que de l’a priori et de la logique, fouettés avec du talent, faisaient de l’histoire.
« Elles participent, disait-il, à tous les honneurs de la société civile ; elles sont encouragées par les égards qu’on a pour leur talent ; et leur profession n’ayant rien que de brillant, elles tâchent de ne point se rendre méprisables. » En ce qui concerne Isabelle Andreini, l’héroïne de tant d’aventures cavalières, il y a parmi ses contemporains unanimité pour célébrer sa vertu.
Toutefois, quand il s’agit d’un talent si robuste, d’une voix aussi sincère, il sied d’être prudent dans ses réserves.
On connaît le mot de Joubert : « Le talent de Racine est dans son œuvre ; il n’y est pas lui-même. » Admettons que ce soit une boutade, excessive comme le sont souvent les boutades ; il n’en est pas moins vrai que l’homme tout entier n’est jamais dans ses discours et ses écrits, et que parfois l’homme réel n’y est qu’à demi.
Les Huysmans, les Rosny, avec tout leur talent ne firent que prolonger la carrière du roman expérimental.
Ici Sainte-Beuve revient à son ambiguïté du début, et dit tout d’une haleine : « Chaque ouvrage d’un auteur, vu, examiné de la sorte, à son point, après qu’on l’a replacé dans son cadre, et entouré de toutes les circonstances qui font vu naître, acquiert tout son sens, son sens historique, son sens littéraire… Être en histoire littéraire et en critique, un disciple de Bacon, me paraît le besoin du temps et une excellente condition première pour juger et goûter ensuite avec plus de sûreté. » Sainte-Beuve développe plus loin l’idée exprimée dans ce second membre de phrase, et conseille, pour apprécier un auteur, de le comparer à ses antagonistes et à ses disciples, de distinguer les diverses manières de son talent, de déterminer ses opinions sur certains sujets d’ordre général, enfin de résumer sa nature morale dans une formule exacte et concise.
Un jour, dans le trop bel été de 1829, un critique aujourd’hui oublié, à tort, car il n’était pas sans quelque talent, M.
Son hégémonie a resplendi sur les âges jusqu’aux époques récentes, où les progrès de la science et de la civilisation l’ayant submergée, elle est devenue, sous son aspect le plus décent, un petit talent de société, un agrément de five o’clock, un passe-temps de demoiselles, et sous son aspect grotesque, un exploit pompeux de minus habens.
» Elle dit : et comme, lorsque le violent zéphyr amène une pluie tiède du côté de l’occident, les laboureurs préparent le froment et l’orge, et font des corbeilles de jonc très proprement entrelacées, car ils prévoient que cette ondée va amollir la glèbe, et la rendre propre à recevoir les dons précieux de Cérès, ainsi les paroles de Ruth, comme une pluie féconde, attendrirent le cœur de Noëmi. » Autant que nos faibles talents nous ont permis d’imiter Homère, voilà peut-être l’ombre du style de cet immortel génie.
J’entends par un sujet inepte celui qui n’a ni bonne volonté ni talent.
Descamp eût mon talent chétif en littérature, il désolerait l’académie, sans en excepter le bon Chardin.
Mais si la critique ne peut rien pour les lettres, en revanche elle leur enlève des talents qui peut-être leur feraient quelque honneur.
De là l’espèce de violence qu’ils mettent dans leurs attaques, et le dédain qu’ils ont pour les archéophiles, dédain souverainement injuste ; car les partisans des idées anciennes sont loin de manquer de lumières et de talents, et surtout ils sont loin de manquer de sincérité : leur conscience, pour la plupart, est placée si haut qu’il est impossible de l’atteindre.
Très distingué par le talent parmi les journalistes de la jeune génération, il est certainement un des plus compétents en ce qui touche aux choses religieuses.
Travail serré comme un faisceau entre ces deux dates et dont nous aimons à louer les excellentes intentions et sur bien des points la justesse, le talent, la valeur réfléchie ; travail utile, mais non décisif et définitif, sur cette grande, chose controversée : la Ligue, et par conséquent, malgré ses mérites, insuffisant.
Fustel de Coulanges, ce robuste, nous frappe deux ou trois livres avec cette force qu’il a montrée dans son premier, il faudra bien que la Critique et l’opinion littéraire s’occupent de ce premier livre, où une méthode nouvelle et un talent neuf se révèlent.
De plus, l’homme du livre ne voit que son sujet ; — l’homme de la Conférence ne voit guères que son public, ce qui n’est une garantie ni de talent, ni d’indépendance.
Voilà pourquoi il faut être implacable pour ces tentateurs d’une perfection impossible, et quand ils ont, comme Saint-Martin les avait, les séductions de la pureté dans le talent et dans la vie, il faut l’être pour leur génie, et même jusque pour leurs vertus.
Rogue même avec Michelet dont il est, je l’ai dit, pourtant le regain, il n’en a pas le talent, certes !
Nous avons eu cette fameuse préface qui semble, aux trembleurs devant le talent de Dumas, le dernier mot de toute critique possible sur ce livre, irrévocablement immortalisé, et qui semble dire aux trembleurs : Si on s’y frotte, on s’y piquera !
Ce paysan d’Arpinum, qui parvint sept fois à la première place du monde, n’était pas sans doute un modèle de vertus pour Cicéron ; mais un Romain devait louer en lui les talents et les victoires, et un républicain pouvait louer ce caractère altier qui osa braver tous les grands de Rome, qui leur reprochait avec audace leur corruption et leur mollesse, qui se vantait de son obscurité, comme les grands se vantaient de leurs aïeux ; qui, dans un siècle poli, consentait à passer pour ignorant, et avouait qu’il n’avait appris qu’à combattre et à vaincre ; qui opposait ses triomphes en Afrique, et les quatre cent mille Teutons ou Cimbres qu’il avait exterminés en Italie ou dans les Gaules, aux tables, aux cuisiniers et au faste des patriciens dans Rome ; il faut observer d’ailleurs que cet éloge fut composé avant les guerres civiles de Marius, et Cicéron était alors dans l’âge où l’énergie du caractère est ce qui frappe le plus, et où l’on mesure les hommes plus par les grands effets, que par les grands motifs.
Ce serait grande sottise et présomption de mépriser ce talent-là ou de le croire facile. […] Et comme cette espèce, si on la prend dans son ensemble, s’est lamentablement transformée (je laisse ici la question de talent) ! […] J’imagine qu’un artiste en mouvements oratoires aurait ici une belle occasion d’exercer son talent. […] Il y en a aussi dont le talent est un composé très riche, un équilibre heureux de qualités contraires ; et ceux-là, il n’est pas non plus très aisé de les définir avec précision. […] Je regrette seulement, pour lui, que son œuvre lui ait fait des admirateurs un peu mêlés et que beaucoup de sots l’apprécient pour tout autre chose que pour son grand talent.
Molière, qui jouait quelquefois des rôles tragiques, dans les pièces de Corneille par exemple, voulut faire l’épreuve du talent d’auteur tragique qu’il pouvait avoir. […] Les hommes de génie devraient avoir la générosité de laisser faire à d’autres les ouvrages où ils ne mettent que du talent. […] C’est là le trait de talent, de très grand talent et qui met le Médecin malgré lui au premier rang des comédies où les médecins sont raillée et à un très haut degré dans le théâtre tout entier de Molière. […] Malgré tout le talent de Molière, George Dandin est bien un peu un sproposito ou, si l’on veut, il y a quelque chose de cela. […] Le talent de L’auteur comique ou satirique est de démêler dans les mœurs de son temps ce qui aux yeux des hommes de son temps paraît naturel par l’habitude qu’ils en ont et qui paraîtra invraisemblable jusqu’à l’extravagance aux générations suivantes.
Il y avait aussi des irréguliers et des libertins ; mais ils étaient, et quelquefois avec leur talent merveilleux, à leur place d’irréguliers et de libertins. […] Ce terme grammatical offense nos littérateurs les plus hardis, ceux qui font à leur génie le sacrifice de leur talent. […] Cette infirmité, dont l’auteur de la Bovary a cruellement souffert, n’atteignit pas son talent, qui est sain. […] L’ordonnance du livre est une réussite excellente ; et le talent de composer ne peut être mené à plus de perfection. […] Que de talents sont dévoués à eux-mêmes et ne valent pas tout ce dévouement !
Tout citoyen romain était orateur dans la mesure de son esprit et de son talent ; la grande loi, la loi suprême, la loi de la place publique, c’était la parole. […] Voyez comment, dans ses dialogues sur l’Orateur, il apprécie dignement le grand art qu’il se propose d’enseigner : « J’avance, dit-il, que je ne connais rien de plus beau que de pouvoir, par le talent de la parole, fixer l’attention des hommes rassemblés, charmer les esprits, gouverner les volontés, les pousser ou les retenir à son gré. Ce talent a toujours fleuri, a toujours dominé chez les peuples libres, et surtout dans les États paisibles.
Croirait-on, à les voir couverts de cheveux blancs, de croix d’honneur, de lunettes d’or, de toges et d’habits brodés, fiers, bien nourris, maîtres de cette société qu’ils grugent… croirait-on que leurs calculs sont dérangés, que leur sommeil est troublé par le bruit du fouet dont ils ont eux-mêmes armé un pauvre petit diable sans nom, sans fortune et sans talent ! […] V Il fut un des grands catholiques de ce temps ; le plus grand peut-être, si l’on considère la puissance et l’ardente et amoureuse combativité de son talent ; le plus original, si l’on fait attention à l’absolue pureté de son catholicisme, rare et neuf par cette pureté même et cette simplicité. […] Veuillot céda souvent à la tentation de pardonner beaucoup au talent.
C’est aussi bête que cela ; et c’est pour cette raison que l’Affranchie a finalement déconcerté la foule, en dépit du talent de l’auteur, qui n’a pas diminué ; en dépit du rôle adorable de Juliette, sœur de la petite Alice Doré de Sapho, mais moins « brebis » ; en dépit du five o’clock de perruches du deuxième acte, et des mots charmants, et des mots profonds, et de la psychologie pénétrante et souple, et de la grâce partout répandue. […] Heureusement, je crois qu’elle va épouser ce solennel pasteur Mikils, qui n’est qu’un bon nigaud, mais qu’elle a la naïveté de prendre pour un grand homme, à qui elle prêtera tous les talents et toutes les vertus, et avec qui elle sera probablement heureuse, parce que son bonheur est en elle. » Mais l’ingénu pasteur Mikils s’est laissé prendre aux coquetteries effrontées de Norah la cadette, et il l’a choisie, justement parce qu’il ne devait pas la choisir. […] Mais, au reste, je constate avec équité que, plus le « milieu » est bas, et mieux Mme Réjane y déploie son immense talent.
Il s’anime à toutes les antithèses que son talent trouverait dans le bouquin. […] Vous êtes chez un critique en mansarde, un homme d’un grand talent. […] C’est dire, que dans cette négation absolue de la musique, prendre cette grosse blague injurieuse, pour le vrai jugement de l’illustre écrivain sur le talent de M.
Il fallait le talent pastoral de M. […] Pour prouver la flexibilité de son talent, M. […] D’année en année, il révélait une face nouvelle de son talent, et en même temps un nouvel ordre d’idées. […] Il ne s’agit pas cependant de torturer un vivant, de décourager un jeune homme, d’éteindre un talent naissant, de tuer un avenir, de ternir une aurore. […] Tous les reproches qu’on peut lui faire n’altèrent pas l’incontestable originalité de son talent.
— Transformation du talent et du style de Byron. — Peinture de la beauté et du bonheur sensible. — Haydée. […] Le vice devrait être un peu plus modeste, et il faut une impudence presque aussi grande que les talents du noble lord pour demander gravement qu’on le plaigne de l’ennui et du dégoût qu’il a gagnés dans la compagnie de ses compagnons de table et de ses maîtresses. […] Les seuls d’entre eux qui valent quelque chose, Crabbe, Campbell, Roger, imitent le style de Pope ; quelques autres ont du talent, mais, à tout prendre, les nouveaux venus ont perverti la littérature ; ils ne savent plus leur langue ; leurs expressions ne sont que des à-peu-près, au-dessous ou au-dessus du ton, forcées ou plates. […] Trop fort et partant effréné, voilà le mot qui à son endroit revient toujours : trop fort contre autrui et contre lui-même, et tellement effréné qu’après avoir employé sa vie à braver le monde et sa poésie à peindre la révolte, il ne trouve l’achèvement de son talent et le contentement de son cœur que dans un poëme armé contre toutes les conventions humaines et contre toutes les conventions poétiques.
II Cependant l’immense talent et l’immense succès des essais littéraires de Tourgueneff lui inspiraient la pensée de développer ce talent en romans plus humains, plus vastes et plus complets d’une seule pièce. […] Il avait beaucoup écrit, mais jamais il n’avait eu la joie de voir aucune de ses œuvres publiée : il ne savait pas s’y prendre ; il n’avait pas le talent de faire à propos une courbette ou une démarche nécessaire. […] Elle eut peur d’écrire, mais son messager, un paysan petit et sec, qui avait le talent de faire ses soixante verstes à pied par jour, fut chargé de dire à Ivan Pétrovitch de ne pas trop s’affliger, qu’elle espérait, avec l’aide de Dieu, convertir la colère de son mari en clémence ; qu’elle aurait préféré une autre belle-fille, mais que telle n’avait sûrement pas été la volonté divine, et qu’elle envoyait à Malanïa Serguéiewna sa bénédiction maternelle.
De nos jours, sa modestie, sa gaucherie, son manque de talent comme orateur et comme écrivain l’eussent arrêté dès les premiers pas. […] Les bons élèves d’un lycée de Paris sont supérieurs aux jeunes Allemands pour le talent d’écrire, l’art de la rédaction ; ils sont mieux préparés à être avocats on journalistes ; mais ils ne savent pas assez de choses. […] Chez nous, les dons brillants, le talent, l’esprit, le génie sont seuls estimes ; en Allemagne, ces dons sont rares, peut-être parce qu’ils ne sont pas fort prisés ; les bons écrivains y sont peu nombreux ; le journalisme, la tribune politique n’ont pas l’éclat qu’ils ont chez nous ; mais la force de tête, l’instruction, la solidité du jugement sont bien plus répandues, et constituent une moyenne de culture intellectuelle supérieure à tout ce qu’on avait pu obtenir jusqu’ici d’une nation. […] Former par les universités une tête de société rationaliste, régnant par la science, fière de cette science et peu disposée à laisser périr son privilège au profit d’une foule ignorante ; mettre (qu’on me permette, cette forme paradoxale d’exprimer ma pensée ) le pédantisme en honneur, combattre ainsi l’influence trop grande des femmes, des gens du monde, des Revues, qui absorbent tant de force vives ou ne leur offrent qu’une application superficielle ; donner plus à la spécialité, à la science, à ce que les Allemands appellent le Fach, moins à la littérature, au talent d’écrire et de parler ; compléter ce faite solide de l’édifice social par une cour et une capitale brillantes, d’où l’éclat d’un esprit aristocratique n’exclut pas la solidité et la forte culture de la raison ; en même temps, élever le peuple, raviver ’ses facultés un peu affaiblies, lui inspirer, avec l’aide d’un bon clergé dévoue à la patrie, l’acceptation d’une société supérieure, le respect de la science et de la vertu, l’esprit de sacrifice et de dévouement ; voilà ce qui serait l’idéal ; il sera beau du moins de chercher à en approcher.
Ça ne fait rien, quel malheur, que cette mort d’une moitié de lui-même, et bien certainement de quelque chose de son talent, qui allait faire un si beau, un si original, un si espagnol, Don Quichotte. […] Rodolphe Lothar, qui me propose, avant que je trouve à faire représenter La Faustin à Paris, de la faire jouer à Vienne, par une actrice ayant un grand talent. […] Mais là, pétrir de la glaise ne lui semblait pas, avec les idées de son enfance, l’œuvre d’un vrai sculpteur, d’un sculpteur frappant, à tour de bras, sur de la matière dure ; et il entrait dans un atelier de médailliste, où se creusaient des coins, où l’on incisait le métal : vivant alors de travaux commencés pour des camarades, de bronzes de poignées de commodes, pour un réparateur de vieux meubles, et venant à l’atelier d’une manière intermittente, et travaillant sans goût. « Car, s’écrie-t-il, en levant la tête de sa terre, il n’y a que sept ou huit ans, que l’amour du travail m’est venu… et seulement, quand j’ai été encouragé par des gens, dont j’estimais au plus haut degré le talent… quand j’ai été encouragé par Rodin. » Et maintenant, c’est un rude et acharné travailleur, s’appliquant, dans les loisirs que lui laissent ses médaillons, à faire de l’objet de la vie usuelle, un objet d’art, ayant à l’exposition du Champ-de-Mars, de cette année, des corbeilles à miettes, des brosses, des bougeoirs, des jetons, des cartons pour estampes, des couvertures gaufrées de catalogues, des programmes du Théâtre-Libre. […] Il la peint, comme une actrice d’une terrible indépendance théâtrale, ne s’appliquant, que dans les actes qui parlent à son talent, et dans les autres qui ne lui plaisent pas, mangeant du raisin, ou se livrant à des distractions quelconques.
Que la critique doit être écrite avec zèle, et par des hommes de talent Dans cette suite d’études sur Molière, ou dont Molière est le prétexte, je trouve, à cinq ans, à dix ans, à quinze ans de distance l’un de l’autre, trois chapitres à propos de Don Juan ; — c’est en vain que je me donne à moi-même d’excellentes et irrésistibles raisons pour ne pas publier, tout à la fois, ces trois chapitres, il s’élève dans mon esprit et dans ma passion littéraire plusieurs bons motifs qui me poussent à reproduire, en leur ensemble, ces trois chapitres, écrits à des époques si diverses, et parmi des événements si différents. […] Le public qui sait lire et qui aime les choses bien faites, s’inquiète assez peu de l’opinion que professe un journal, il s’inquiète, avant tout, du talent qu’on y déploie ; il prend son plaisir aux saines paroles, aux passages éloquents, aux gaietés, aux colères, à l’accent de l’écrivain ; ainsi le journal est bien plus, chez nous, le besoin des esprits que l’intermédiaire obligé de toutes sortes d’affaires dont Paris s’inquiète assez peu, et dont la province ne s’inquiète pas le moins du monde. […] On se lasse de tout en ce bas monde : l’homme se lasse du pain frais, le savant de l’étude, l’enfant de la bouillie ; le roi même se lasse de son trône : il n’y a que l’Argent qui nous trouve insatiables. — Tu possèdes treize talents, tu en veux seize ! […] un homme de talent viendrait aujourd’hui qui arrangerait, de bonne sorte, les divertissements du Bourgeois gentilhomme ; il apporterait plus de grâce dans la danse, plus de variété dans le chant ; il trouverait une cérémonie un peu moins grotesque, un Mupti plus gai, même il pousserait l’audace jusqu’à nous délivrer du baragouin : Se ti sabir Ti respondir ! […] Vous verrez par la comparaison de ces compositions anglaise et française que le sens commun ne peut être suppléé ni par le talent, ni par l’invention.
M. de Fénelon dit encore (nous voulons tout citer, ne fût-ce que pour contrebalancer quelque peu notre admiration profonde pour le génie et le talent de Molière) : — « En pensant bien, il parle mal. […] À lui seul, Molière accomplissait le travail de ces sept hommes, et il l’a accompli, toute sa vie, pendant que, chez nous, les sept hommes en question, en leur supposant tout le zèle et tout le talent imaginables, n’en peuvent plus, et demandent grâce au bout de dix ans de ce rude métier. […] Certes elle ne songea pas à prolonger, comme si elle eût été un talent inspiré, cette lutte abominable du comédien contre le public. […] Restons, chacun dans notre naturel, ne forçons point notre talent. […] Les gens qui se vantent d’écrire sans peine, et qui se félicitent de ce style naturel, ne voient pas qu’il n’y a guère de quoi se vanter, comme on dit, et que ce beau style si peu coûteux, leur arrive de ce qu’ils ignorent absolument les rares et difficiles conditions de l’art et du talent ; ils sont naturellement et très naturellement absurdes, vulgaires, plats, ennuyeux et ennuyés.
Les paroles sont devenues des actions, et tous les cœurs sensibles vantent avec transport un mémoire que l’humanité anime et qui paraît plein de talent, parce qu’il est plein d’âme ». […] Nous préférions un mot d’éloge de d’Alembert, de Diderot, à la faveur la plus signalée d’un prince… Il était impossible de passer la soirée chez d’Alembert, d’aller à l’hôtel de La Rochefoucauld chez les amis de Turgot, d’assister au déjeuner de l’abbé Raynal, d’être admis dans la société et la famille de M. de Malesherbes, enfin d’approcher de la reine la plus aimable et du roi le plus vertueux, sans croire que nous entrions dans une sorte d’âge d’or dont les siècles précédents ne nous donnaient aucune idée… Nous étions éblouis par le prisme des idées et des doctrines nouvelles, rayonnants d’espérance, brûlants d’ardeur pour toutes les gloires, d’enthousiasme pour tous les talents et bercés des rêves séduisants d’une philosophie qui voulait assurer le bonheur du genre humain.
Elle interrompt le récit, elle glace le cœur, et elle n’amuse pas l’esprit : temps et talent perdus dans les espaces imaginaires. […] Nous eûmes, sans nous être entendus, et à la différence près du talent, la même pensée née du même temps : faire descendre la poésie des nuages, et l’introduire comme un hôte de tous les jours et de toutes les conditions au foyer domestique de famille, chez le savant comme chez l’ignorant, chez le riche comme chez le pauvre ; changer en pain quotidien de toutes les âmes pensantes ou aimantes cette ambroisie poétique jusque-là réservée aux dieux de ce monde.
XIV Le gouvernement des Bourbons avait M. de Marcellus le père à récompenser ; il fut heureux, à peu près à l’époque où il me recruta moi-même pour sa diplomatie future, d’enrichir ses cadres d’un nom, d’une jeunesse et d’un talent qui promettaient un ministre à sa cause. […] M. de Marcellus venait alors d’épouser, à Paris, une femme d’une naissance éminente, d’un esprit héréditaire, d’une beauté remarquée dans son siècle, mademoiselle de Forbin, fille du comte de Forbin, directeur des musées, homme dont les agréments de figure, les succès de salon ou de cour sous deux règnes, l’esprit épigrammatique, et les talents en peinture et dans les lettres, faisaient un ornement de l’époque impériale, dépaysé dans le royalisme de la Restauration.
Edmond Texier ; il a beaucoup de talent pour attendrir les hommes charitables. […] Priez donc le bon Dieu pour lui et pour ses jolies demoiselles, qu’il lui conserve son talent dont il fait un si bon usage.
Dans le roman, il paraît bien que Sorel a été un bourgeois de sens ferme, à qui par malheur le talent a manqué pour faire une grande œuvre. […] En 1573, il s’attacha au roi de Navarre, et plut à Charles IX par son talent poétique.
Ne calomnions pas même les écrivains faux, jusqu’à dire que, pouvant prétendre à la gloire de la vérité exprimée dans un beau langage, ils ont mieux aimé la notoriété qui s’attache aux scandales du talent. […] L’histoire des lettres offre plus d’un exemple d’une école littéraire dont le maître a été un homme de talent, faisant illusion par quelque défaut séduisant, que ses disciples imitaient en plagiaires.
Une fois qu’il y fut engagé, il lui devint impossible de revenir sur ses pas, et dans la force de l’âge et du talent, l’auteur d’œuvres sublimes ne put retrouver sa propre tradition. […] On peut avec du talent traiter heureusement une situation ; c’est un bonheur échu à bon nombre d’auteurs du second ordre.
. — Un talent infini dans cette plaquette, un talent qui s’apparente à celui des faiseurs de Tannkabi japonaises, Ces poèmes unissent en si peu de mots, tant de sensations que la phrase hésite à se reconnaître elle-même dans les quelques lignes que porte le papier.
Macdonald a un défaut, c’est un peu d’orgueil ; mais c’est un brave homme qui a du talent.
— Le style, non pas étranger, mais un peu vieux, en est encore plus gaulois que français : « Du reste, mon parti était pris, et je regardais mon renvoi ou non-renvoi d’un œil très-philosophique ; je ne me serais trouvée, dans telle situation qu’il aurait plu à la Providence de me placer, jamais sans ces ressources que l’esprit et le talent donnent à chacun selon ses facultés naturelles, et je me sentais le courage de monter ou descendre, sans que par là mon cœur et mon âme en ressentissent de l’élévation ou ostentation, ou, en sens contraire, ni rabaissement, ni humiliation.
On nous apprend à aimer le beau, l’agréable, à avoir de la gentillesse en vers latins, en compositions latines et françaises, à priser avant tout le style, le talent, l’esprit frappé en médailles, en beaux mots, ou jaillissant en traits vifs, la passion s’épanchant du cœur en accents brûlants ou se retraçant en de nobles peintures ; et l’on veut qu’au sortir de ce régime excitant, après des succès flatteurs pour l’amour-propre et qui nous ont mis en vue entre tous nos condisciples, après nous être longtemps nourris de la fleur des choses, nous allions, du jour au lendemain, renoncer à ces charmants exercices et nous confiner à des titres de Code, à des dossiers, à des discussions d’intérêt ou d’affaires, ou nous livrer à de longues études anatomiques, à l’autopsie cadavérique ou à l’autopsie physiologique (comme l’appelle l’illustre Claude Bernard) !
Mais il y aurait surtout à insister sur ce premier ordre de comparaisons si spéciales et si neuves, tout à fait imprévues, de celles qu’on ne copie guère et qui qualifient, à proprement parler, l’originalité d’un style et d’un talent.
Je ne le considère que par rapport à ses talents.
Jouffroy, reprenant dans une dernière leçon l’opinion qu’il avait émise sur l’avenir de l’humanité, l’a de nouveau exposée et développée avec une admirable largeur de talent.
une leçon pour devoir prêter plus d’attention à ce genre de mérite, de talent si cher de tout temps à la France, et pour se soucier davantage de la valeur des hommes ?
Il trouve le loisir de lancer en passant des traits contre les nobles « mangeurs de gens », contre les « volereaux » qui font les voleurs, contre les seigneurs « qui ont belle tête, mais point de cervelle », ou « qui n’ont que l’habit pour tout talent. » S’il porte quelquefois l’habit d’un valet, il n’en a point l’âme ; cette livrée n’a revêtu en lui que l’homme extérieur, le maladroit que ses amis prêchaient et menaient, le sujet fidèle, l’humble bourgeois qu’assujettissaient les convenances.
Ce n’est pas un mince talent pour un critique d’art.
Mais je dois, avant de me tourner vers lui, nommer deux hommes de grand talent, qui sont en dehors du courant principal des idées littéraires, et que pourtant l’on ne saurait oublier.
Si quelqu’une a fait parler d’elle, il feint de croire que c’est seulement pour ses talents d’écrivain.
Sainte-Beuve Son premier voyage en Espagne qui est de 1840, et qui fut, dans sa vie d’artiste, un événement, lui avait fourni des notes nouvelles, d’un ton riche et âpre, bien d’accord avec tout un côté de son talent ; il y avait saisi l’occasion de retremper, de refrapper à neuf ses images et ses symboles ; il n’était plus en peine désormais de savoir à quoi appliquer toutes les couleurs de sa palette.
Le talent, incapable de donner un suffisant relief aux sujets universels, s’en tient loin, afin de se signaler par l’originalité des nuances.
Nous pouvons donner une idée du talent poétique d’Aurelia.
Quant à l’intolérance proprement esthétique, elle ne se rencontre guère que dans les écoles artistiques et littéraires, les chapelles, les cénacles qui décernent aux artistes amis ou dissidents des brevets de talent ou de sottise.
Mais son talent particulier était d’attraper le ridicule et les discours des gens, et de les contrefaire en leur présence sans qu’ils s’en aperçussent.
Le maréchal, « doué de ce talent d’homme de guerre qui apprend à tirer parti des moindres circonstances », remarqua dans la plaine une ligne de glace et la fit casser pour voir le sens du courant, pensant bien que ce devait être un ruisseau qui allait au Dniepr.
C’est un écrivain ainsi placé que, si son talent peut être contesté de tous, son caractère ne l’est de personne.
Même chez l’homme, certains talents très circonscrits et très déterminés pourraient encore s’expliquer dans cette hypothèse, et l’on reviendrait ainsi par un chemin détourné à une doctrine qui ne serait pas très éloignée de celle de Gall.
S’il en est ainsi, l’idéologie est notre philosophie classique ; elle a la même portée et les mêmes limites que notre talent littéraire ; elle est la théorie dont notre littérature fut la pratique ; elle en fait partie puisqu’elle la couronne, et l’on peindrait en abrégé son dernier défenseur, en disant qu’avec les grâces aimables, la politesse exquise et la malice délicate de l’ancienne société française, il conserva la vraie méthode de l’esprit français.
La vérité d’un portrait ne dépend pas de l’exactitude entière de chacun des traits que le peintre dessine, mais plutôt d’une espèce de sympathie qui s’éveille entre son modèle et lui ; de la convenance qu’il découvre entre l’expression d’un visage et la nature de son propre talent. […] Car ce que sans doute on ne saurait admettre, c’est qu’en ce siècle — « de grands talents bien plus que de lumières », ainsi qu’un jour Voltaire l’appellera, mais qui n’en est pas moins le siècle des Bossuet et des Bourdaloue, des Molière et des Racine — les idées de Descartes soient tombées dans l’indifférence. […] Le talent, qui sait tout ce qu’il fait, qui peut en rendre compte, ne le peut et ne le sait que comme incapable d’étendre son regard au-delà des horizons dès son temps ou des bornes actuelles de son expérience ; mais le génie, lui, c’est vraiment le pouvoir d’anticiper sur l’avenir ; et d’âge en âge, ses créations ne changent pas pour cela, comme on le dit quelquefois, de nature ou de sens, mais il faut les comparer à ces lois dont la formule féconde enveloppe jusqu’aux phénomènes qu’elles n’ont pas prévus.
Les erreurs que commettent les grands écrivains dans la force de l’âge et du talent sont parfois séduisantes et sont toujours instructives. […] Ancey a du talent et que sa comédie n’est pas un instant ennuyeuse ? […] Mais dans sa dissection du talent de Regnard, il a oublié une chose qui, en effet, échappe à l’analyse. […] Rzewuski et de son talent et de son succès. […] Céard un fier sujet d’étude, et que, pour ne l’avoir manqué qu’à moitié, il fallait déjà bien du talent.
La vérité est que son talent offre une remarquable synthèse des deux visions, un parfait équilibre d’attitudes contraires. […] Dans l’impossibilité où je suis de condenser en une définition le talent d’Henri de Régnier, force m’a été de procéder par circonvolutions et travaux d’approche. […] Certains se délecteront à contempler la seconde face de ce beau talent. […] Au moins devrait-elle reconnaître son erreur, lorsque les années sont venues fortifier un talent qui produit avec entêtement et qui se grandit à mesure. […] J’entends bien tenir compte comme il convient de cette sensibilité musicale, pour la révélation du talent de notre artiste.
Clément Vautel refuse tout talent à Baudelaire et à Stendhal, ou que d’autres s’extasient devant le génie de M. […] On connaît l’hostilité professionnelle des purs érudits contre le talent. […] Ce Duranty ne manquait pas de talent comme romancier, et M. […] La précision des termes ne serait peut-être point, d’ailleurs, la marque principale de son beau talent, même si elle ne lui était pas souvent interdite par sa doctrine. […] Charles Andler a tort de trouver un talent « rayonnant » mais une théorie peu admissible dans le gros livre de M.
Tout cela fait qu’il nous offre le phénomène, non pas seulement du génie sans le talent, ce qui est assez commun et ce qui se conçoit, mais encore le phénomène presque inouï, et bien difficile à expliquer, de la poésie sans le style. » (« Le génie sans le talent. » Ne démontrerait-on pas aussi bien que Scribe a eu dans son métier tout le talent qu’on voudra sans l’ombre de génie ? […] Et, de même, ce fut peut-être à l’amitié de Flaubert que Bouilhet dut de garder toujours, si je puis dire, son âme fort au-dessus de son talent. […] 1e Ce qu’ils nous montrent — Un homme de lettres, Charles Demailly, beau garçon, qui a quelque fortune et du talent, devient amoureux d’une ingénue du Gymnase, Marthe Mance, jolie, l’air « comme il faut », et qui a déjà une petite réputation de comédienne. […] Cette profonde honnêteté s’accompagne de beaucoup de talent. […] J’avoue, au surplus, qu’il y a des auteurs qui retardent avec beaucoup de talent et d’esprit.
Je ne cite que ses principaux travaux ; mais cela suffit pour que nous accueillions la nouvelle thèse de ce grand arabisant avec toute l’attention que sa méthode et son talent exigent. […] Je ne vois guère d’écrivain qui ait fait un plus bel et un plus juste emploi de son talent ni qui ait pris plus habilement des sûretés contre l’oubli. […] Tout le talent du monde ne peut empêcher que, si divers qu’on les suppose, les spectacles de la nature, où l’homme ne joue qu’un rôle intermittent de comparse, ne nous lassent et ne s’affaiblissent ou ne se brouillent dans notre mémoire. […] Des œuvres semblables ne sont possibles que dans un pays qui a derrière lui un long passé de civilisation ; et ce n’est que dans un air saturé d’intelligence que le talent, qui se recueille, peut atteindre à un art aussi parfait. […] Dès cette époque commençait son admirable intimité que la mort seule devait interrompre, avec une mère dont la droiture, l’intelligence virile, la culture exceptionnelle, la tendresse, eurent tant d’action sur son caractère et son talent.
C’est cet art exquis, joint au labeur consciencieux et à l’incomparable talent des comédiens, qui fait de la Comédie-Française la première école dramatique et théâtrale de l’Europe, c’est-à-dire du monde entier. […] C’est en général le talent et l’argent qui, bien plus que la naissance, assurent une haute position sociale. […] On voit en quels sens divers le talent d’un comédien peut toujours progresser par l’observation ; c’est un art qui n’est jamais immobile, mais qui se renouvelle constamment et qui, dans son évolution, suit les évolutions des idées humaines. […] Le réel des pièces modernes disloque le talent des comédiens ; et quelques-uns gardent à perpétuité une souplesse d’acrobate. […] Nous n’y reviendrons pas ; mais il nous reste à dire un mot de son influence sur le talent des comédiens et de son importance au point de vue du métier dramatique.
Nul art, nul talent naturel pour décrire une à une et avec ordre les diverses parties d’un événement ou d’un objet. […] Ils ont beau être brutaux, épais, bridés par des superstitions enfantines, capables, comme le roi Knut, d’acheter pour cent talents d’or le bras de saint Augustin ; ils ont l’idée de Dieu. […] C’est que tout le talent d’une âme inculte gît dans la force et dans la sincérité de ses sensations.
La moitié du talent, ici, est dans une bonne mémoire. […] Aussi j’estime plus ces beignets que tout le reste ; et pour les faire aussi bons, je soutiens qu’il faut mille fois plus de talent que pour lisser et filer cinquante aunes de toile. […] — Attends, dit Fritz, je vais te jouer quelque chose de gai pour te réjouir. » Il était heureux de montrer son talent à Sûzel, et commença la Reine de Prusse.
Quelle foule d’accessoires heureux à recueillir pour ton talent ! […] Tout ce que je vous ai dit de la manière et du talent de Vernet, entendez-le des quatre premiers tableaux que je vous ai décrits comme des sites naturels. […] Ce Vernet, ce terrible Vernet, joint la plus grande modestie au plus grand talent.
À coup sûr, un peu plus d’union, de modération, de bon sens, un plus vif sentiment de la nécessité du respect et de la discipline nous vaudrait mieux que notre talent d’amuseurs. Mais enfin ce talent est-il si méprisable ? […] Elle avait surtout un talent extraordinaire pour les exorcismes. […] Quand vous commencerez à avoir du talent, vous entrerez à la Comédie-Française, qui est le premier théâtre de l’État. […] Ils viennent du Midi, d’un Midi âpre et rude, qui n’a rien de commun avec celui de Tartarin : c’est pour cela qu’avec tout son talent Jean-Paul a si mal joué Numa.
IV Au second volume, une scène d’enfant, ce privilège du talent de l’écrivain, est dessinée avec amour. […] L’objection reste dans sa force et surtout dans sa séduction par le talent du raisonnement.
« Pour l’instant les cygnes nageaient, ce qui est leur talent principal, et ils étaient superbes. […] En résumé, les Misérables sont un sublime talent, une honnête intention, et un livre très dangereux de deux manières : Non seulement parce qu’il fait trop craindre aux heureux, mais parce qu’il fait trop espérer aux malheureux.
Alexandre de Humboldt ; Un Allemand, un Prussien, un homme d’une prodigieuse instruction, un voyageur en Amérique et en Europe, un écrivain, non pas de premier ordre, car sans âme il n’y a pas d’écrivain, mais un homme d’un talent froid et suffisant à se faire lire ; un homme, de plus, qui, par son industrieuse habileté dans le monde, par ses amitiés intéressées avec tous les savants étrangers, et par l’art de les flatter tous, est parvenu à les coïntéresser à sa gloire par la leur, et à se faire ainsi une immense réputation sur parole : réputation scientifique, spéciale, occulte, mathématique, sur des sujets inconnus du vulgaire ; réputation que tout le monde aime mieux croire qu’examiner ; gloire en chiffres, qui se compose d’une innombrable quantité de mesures géométriques, barométriques, thermométriques, astronomiques, de hauteurs, de niveau, d’équations, de faits, qui font la charpente de la science, et dont on se débarrasse comme de cintres importuns quand on a construit ses ponts sur le vide d’une étoile à l’autre ; espèce de voyageur gratuit, non pour le commerce, mais pour la science, au profit des savants pauvres et sédentaires à qui il ne demandait pour tout salaire que de le citer. […] Comme compensation, et sans compter les descriptions, peut-être même un peu trop fréquentes, de grottes, de sources et de clairs de lune, ce poète, qui possédait à un si haut degré le talent de peindre, nous a laissé un récit singulièrement exact et intéressant, même pour la géologie, d’une éruption volcanique près de Méthone, entre Épidaure et Trézène.
L’inégalité des talents ne se faisait point sentir, là où la supériorité n’était que la plus grosse part de la tâche commune. […] Quelle place y a-t-il là pour le talent de la personne ?
Je ne comprenais que vaguement, déjà cependant j’entrevoyais que la beauté est un don tellement supérieur, que le talent, le génie, la vertu même, ne sont rien auprès d’elle, en sorte que la femme vraiment belle a le droit de tout dédaigner, puisqu’elle rassemble, non dans une œuvre hors d’elle, mais dans sa personne même, comme en un vase myrrhin, tout ce que le génie esquisse péniblement en traits faibles, au moyen d’une fatigante réflexion. […] Le moindre acte de vertu, le moindre grain de talent, me paraissent infiniment supérieurs à toutes les richesses, à tous les succès du monde.
On y venge sa politique, sa morale, sa littérature, sa réputation, son talent, son sexe. » La Nouvelle Héloïse, un modèle copié par tous, fourmille de dissertations morales, de traités politiques, de controverses religieuses, de questions littéraires et autres. […] Mais, démontrer que l’écrivain de talent reproduit son époque n’est pas conclure, avec Victor Hugo, que « les époques sont faites à l’image des poètes14 ».
Et comme exemple mémorable, à côté de Quènes de Béthune chansonnier du Nord et trouvère, je citais encore Raimbaut de Vaqueiras, le plus distingué des troubadours d’alors par l’originalité et le talent, un chevalier de fortune, qui était de l’expédition et attaché au marquis de Montferrat.
Ce que voulait Montluc, c’était de s’illustrer par une belle, par une incomparable défense, dont il fût à tout jamais parlé ; et comme il l’a dit du marquis de Marignan : « Il servait son maître, et moi le mien ; il m’attaquait pour son honneur, et je soutenais le mien ; il voulait acquérir de la réputation, et moi aussi. » Entre le marquis de Marignan et lui, c’était donc un pur duel d’honneur, et il s’agissait d’y engager les Siennois, qui jouaient un plus gros jeu, et de s’en faire assister jusqu’à l’extrémité moyennant toute sorte de talent et d’art ; en les séduisant, en les rassurant tour à tour, et surtout en évitant, peuple élégant et vif, de les heurter par la violence ; c’eût été feu contre feu.
On était arrivé cependant, en examinant bien les divers écrits de Vauvenargues, à n’y pas voir seulement un jeune homme plein de nobles et généreux sentiments, de pensées honorables à l’humanité, doué d’un talent d’expression singulièrement pur, et d’une sorte d’ingénuité élevée de langage, — le meilleur des bons sujets et le modèle des fils de famille ; ce premier Vauvenargues qui se dessine, en effet, dans quelques réflexions et maximes souvent citées de lui, ce premier Vauvenargues que chaque âme honnête porte en soi à l’origine avant le contact de l’expérience et la flétrissure des choses, était dépassé de beaucoup et se compliquait évidemment d’un autre en bien des points de ses ouvrages.
Ce furent des curieux de tout temps que les de Luynes ; non que je veuille remonter, pour retrouver en lui ce trait caractéristique, au chef même de leur race, à l’auteur de leur illustration historique, et insister sur les talents ornithologiques par lesquels il gagna, dit-on, la faveur de Louis XIII.
Il y a certainement du talent proprement dit dans ce crescendo final qui arrive jusqu’au cri et au déchirement.
Le Roi, abbé de Haute-Fontaine, personnage estimable, généreux de nature et d’humeur libérale, de plus d’ambition peut-être que de talent, d’un mérite réel toutefois, et qui est fort connu dans l’histoire ecclésiastique du XVe siècle.
Chaque grade sera marqué par le développement d’un talent, et, allant ainsi de succès en succès, il réunira cet ensemble de suffrages qui appellent un homme à toutes les grandes places qui vaquent.
. — Deux points surtout sont importants : l’un est la prépondérance du roman intérieur, suggéré ou spontané, qui se déroule dans le patient sans répression possible et avec le même ascendant qu’auraient des perceptions vraies ; l’autre est l’abolition isolée ou l’exaltation isolée d’un sens ou d’une faculté (sensation de la douleur, du son, sens tactile et musculaire, appréciation de la durée, talent de discourir, d’écrire en vers, de dessiner, et parfois divinations de diverses sortes dont nous ne pouvons encore fixer la limite).
Ses premiers livres qui marquent la période la moins subjective de son talent, arrêtent de temps à autre par des essais de profondeurs nuancées : La nuit est lourde et s’alanguit de désirs vagues, Il pâlit au zénith des éclairs violets… ou, de-ci de-là, par une vision éclatante : Les pourpres du brasier sanglant où s’effondra Le Dôme d’or rougi s’éteignent une à une.
Heredia a surpris le génie de l’Hellas, comme nul ne l’avait fait depuis Chénier, qu’il dépasse, il ne faut pas avoir peur de le dire, par le « talent ».
Pourquoi, si quelque vrai talent essaie de ranimer en elle l’inspiration qui jadis y attirait les artistes comme dans leur cité naturelle et natale, toute la catholicité officielle le repousse-t-elle, bruyamment si c’est M.
Celui-ci peut se relever par lui-même, par ses talents, ses titres, ses richesses.
Pas un talent, pas une vertu, pas une distinction qu’elle n’aimât à connaître, à convier, à obliger, à mettre en lumière, à mettre surtout en rapport et en harmonie autour d’elle, à marquer au cœur d’un petit signe qui était sien.
Ce qu’il y avoit d’affreux dans Saint-Pavin & dans Linière, c’est qu’ils employoient moins leur talent à rimer des bagatelles avec succès, qu’à blasphêmer contre la divinité.
Telle science obtient tout à coup la faveur publique : on s’en occupe avec enthousiasme et ferveur, le public s’y met de moitié avec les savants, et sa sympathie est une sorte de collaboration ; mais bientôt il se refroidit et il se lasse : de nouveaux objets l’attirent, de nouveaux talents sollicitent son attention, et il va porter ailleurs le bruyant tribut de son admiration superficielle.
Lui-même, poète d’un rare talent aussi bien qu’éminent critique, il ne hasardait pas une assertion téméraire.
Je souhaite que les moralistes politiques qui nous viendront au prochain siècle aient tout le talent de ceux du siècle qui finit nt plus de bonheur à fonder quelque chose. […] Tous ces gens-là sont marqués de deux défauts que Stendhal ne pardonne point, dont le premier est d’avoir ou d’affecter des sentiments religieux, et le second, très probablement, est d’avoir du talent et du succès. […] Si Stendhal ne reconnaît pas la même qualité dans Racine, c’est d’abord parce que Racine est Français, ensuite parce que Racine est en possession de l’admiration générale, deux choses que Stendhal pardonne difficilement ; enfin, parce que Racine, sans parler de son génie, a trop de talent pour Stendhal. Racine, sans qu’on puisse dire qu’il dissimule la profondeur de S3s observations, du moins met son talent d’auteur dramatique à ne pas l’afficher, à ne pas l’accuser violemment, d’où vient que, surtout quand on ne veut pas la voir, il se rencontre qu’on ne la voit point. […] Cela peut se soutenir, et les longues considérations de Proudhon sur les méfaits du mysticisme prouvent que cela peut se soutenir avec talent.
Les quelques pièces qu’on rassemblées les anthologies nous permettent de juger de la maîtrise parfaite de son talent où il semble que l’art de Heredia s’est marié à celui de Henri de Régnier, en une simplicité d’un goût toujours sûr. […] Mais je voudrais montrer encore un autre aspect du talent de Gérard d’Houville, ce don qu’elle possède d’évoquer les images les plus belles du paganisme, en les vivifiant de la sève de sa sensibilité féminine. […] Dans un autre poème encore : Jardin d’Italie, Laurent Évrard a mis toute la concision artistique de son talent. […] …………… On se rendra compte par ces quelques citations de la qualité du talent de Laurent Évrard.
Des descriptions Homere a toujours passé pour un grand peintre : et en effet, il y a plusieurs morceaux dans ses ouvrages, qui ne font pas beaucoup rabattre des louanges qu’on lui a prodiguées sur ce talent. […] La comparaison est juste, mais je ne crois pas qu’elle soit de la passion ; outre qu’Achille ne cherche pas à orner son discours, et que ce n’est pas même son talent, son dépit ne lui devoit pas présenter ces fleurs, dont il sied bien au poëte de parer sa narration, mais qui sont interdites aux personnages, à moins qu’on ne les donne pour orateurs. […] Les poëtes fiers de leur talent, s’imaginent que la prose ne peut atteindre à l’expression et aux images poëtiques ; et les prosateurs dédaignant un talent qu’ils n’ont pas, se persuadent que les vers sont incompatibles avec la fidélité qu’un traducteur doit à son original.
Il est remarquable que l’homme de talent ait eu sur l’homme de génie une influence incomparablement plus grande que l’homme de génie sur l’homme de talent. […] Il écrit d’Égypte à Bouilhet : « Ce qui nous manque à tous, ce n’est pas le style, ni cette flexibilité de l’archet et des doigts désignée sous le nom de talent. […] Les articles d’Homais, dans le Fanal, sont des chefs-d’œuvre d’observation et de style à côté des réflexions mazadoises : « Ce n’est pas, il faut bien le remarquer, que Madame Bovary soit un ouvrage où il n’y a (sic) point de talent ; seulement, dans ce talent, il y a jusqu’ici plus d’imitation et de recherche que d’originalité. […] Je dis le sens de l’histoire, qui appartient au talent, et non le sens de l’archéologie, qui relève du métier. […] Cette dette se confondait dans l’esprit du peuple avec les trois mille deux cents talents euboïques exigés par Lutatius ; et ils étaient, comme Rome, un ennemi pour Carthage.
Le talent est incontestable. […] Il a fallu tout le talent de Sarah pour faire écouter la Femme de Claude. […] Il possède, à un degré éminent, le talent de « conter » ; il a quelque chose de la tranquillité et de la lucidité d’Alain Lesage. […] Marcel Prévost a beaucoup de talent, et qu’on lui en trouverait plus encore s’il avait moins de succès. […] Coquelin (j’entends sa personne artistique), de ce que je sais de son talent, de ses aptitudes et même de ses désirs secrets.
Des talents vigoureux vont d’une ferme allure vers la vérité et vers la beauté. […] Les grands talents s’amusent rarement aux manifestes, aux annonces, aux réclames, et commencent, presque toujours, par aller à l’école. […] Pourquoi consacre-t-il son temps, son talent, sa peine à renouer des ficelles de polichinelles cassés ? […] Reposez-vous par avance dans la paix que rien ne trouble. » Bref, jamais le talent de M. […] Le talent de M.
Les suiveurs de Zola, avec tout leur talent, ne firent que prolonger la carrière du roman expérimental. […] Rien que la splendide « littérature » d’un esprit desséché qui prend le masque de la foi pour dissimuler sa défaite, et qui s’imagine créer encore, parce qu’il garde en main le métier le plus sûr et le talent le plus prestigieux. […] le génie n’a besoin d’exemple ni de lois… Racine nous offre le spectacle d’une entreprise plus humaine, de la plus haute entreprise qu’ait menée à son terme un poète doué d’un court génie, par la force seule de son talent. […] Il me faudrait étudier son vers, son rythme, ce talent suprême de mise en œuvre objective que l’on retrouve dans la forme encore : ah ! […] Avant la virtuosité, avant le talent même, M.
Oh, la grande place à prendre pour un jeune lettré, spirituel, méchant avec talent, qui intitulerait un article, paraissant toutes les semaines : La critique de la critique, et ferait ressortir les trop fortes âneries de ces messieurs ! […] Un vieux bonhomme, à l’accent tudesque, s’approcha de lui, et lui dit : « Jeune homme, vous aurez du talent, mais défiez-vous des salons ! […] Et il interrompait son refrain et ses bandes, pour jeter à ses internes : “À ce qu’il paraît, cette Mannigue a un grand talent”, — et comme les internes riaient de l’estropiement du nom de l’actrice : “Pardon, Messieurs, faisait-il, moi, vous savez, moi je ne vais pas au théâtre !
Linguet * jeune Ecrivain qui a reçu de la nature le talent de l’éloquence : talent qu’il a transporté par-tout jusques dans l’histoire. […] Cet abrégé est agréable par l’art de l’écrivain à répandre quelques fleurs sans affectation, par son talent à esquisser légérement les traits qui caractérisent les principaux personnages, par son exactitude à saisir tout ce qui peut faire connoître le génie, les mœurs & les usages des peuples, ainsi que les productions & les singularités des divers climats.
Par quel talent rend-elle la maison inhabitable ? […] D’où vient ce double talent ?
Son talent avait grandi sous ses larmes. […] Innocent I, au lieu d’honorer dans Pétrarque le génie littéraire, ne voyait pas, dit-on, ses talents sans un soupçon de sorcellerie.
Balzac et ses œuvres (2e partie) I Les trois caractères dominants du talent de Balzac sont la vérité, le pathétique et la moralité. […] Je sais qu’à ce mot, un cri de scandale et de sacrilège va s’élever de toute la France ; mais, sans rien enlever à l’auteur du Misanthrope de ce que la perfection de son vers ajoute à l’originalité de son talent, et en le proclamant, comme tout le monde, l’incomparable et l’inimitable, mon enthousiasme pour le grand comique du siècle de Louis XIV ne me rendra jamais injuste ni ingrat envers un autre homme inférieur en diction, égal, si ce n’est supérieur, en conception, incomparable aussi en fécondité : Balzac !
Leur talent très divers et très goûté, mais presque exclusivement en Europe, ne fait point partie de l’intellectualité américaine des États-Unis. […] C’est plaisir de rencontrer un tel homme dans ces assemblées loquaces et scientifiques, où tous les talents et toutes les prétentions coalisés aboutissent à un ennui mortel !
Cette description, savante et précise dans ses moindres détails, semble d’abord n’avoir d’autre but qu’elle-même ; vous la croiriez faite uniquement pour montrer le talent du peintre, qui, certainement, s’y oublie. […] Cette hypothèse matérialiste n’a-t-elle point été prise, très froidement comme thème à vers français de la même manière que Richepin, quand il était à l’Ecole normale, exerçait son talent sur les matières à vers latins ?
À talent égal, le son que rend l’émotion du bien et du beau est mille fois plus intime et plus sonore que le son tiré des passions légères ou mauvaises de l’homme ; plus il y a de Dieu dans une poésie, plus il y a de poésie, car la poésie suprême c’est Dieu. […] XVI Nous savons bien, nous le répétons encore, qu’en dehors de cette supériorité ou de cette infériorité relative des genres dans la poésie, il y a la supériorité ou l’infériorité des poètes, qui dément souvent cette classification par la souveraine exception du talent ; que tel poète épique, comme Homère, par exemple, est égal ou supérieur à tel poète lyrique, comme Orphée ; que tel poète dramatique, comme Shakespeare, par exemple, dépasse tous les poètes épiques des temps modernes, et contient, dans son océan personnel de facultés poétiques, l’hymne, l’ode, le récit, le drame, la tragédie, la comédie, l’élégie, tout ce qui vibre, tout ce qui pense, tout ce qui chante, tout ce qui agit, tout ce qui pleure, tout ce qui rit dans le cœur de l’homme aux prises avec la nature.
Ma fortune et peut-être mon talent dépendent d’un moment d’attention que vous accorderez ou que vous refuserez à mon œuvre. […] Voilà ce qui nous distingue et ce qui distingue la France de ceux qui se sont appelés hier les romantiques, et qui s’appellent aujourd’hui les réalistes ; deux hérésies pleines de talents égarés, mais qui, en rentrant dans la vérité, feront faire de nouvelles conquêtes à la religion du goût et des lettres.
Son talent n’est qu’un accident, comme celui de Villon ; et non seulement ce n’est pas de lui que procéderont nos historiens classiques, mais c’est à peine si l’on peut voir en lui le précurseur de ces auteurs de Mémoires qui vont bientôt devenir si nombreux dans l’histoire de notre littérature. […] L’Épopée romanesque. — S’il faut chercher l’origine de l’épopée romanesque dans une transformation des mœurs ; — et, à ce propos, de l’opposition de l’Épopée courtoise et de l’Épopée nationale. — Que la véritable origine de l’épopée romanesque est dans la différenciation des éléments de l’épopée nationale ; — dont l’élément authentique est devenu de l’histoire ; — et l’élément merveilleux, symbolique et mythique est devenu le roman d’aventures. — Sources des romans de la Table-Ronde. — L’Historia Regum Britanniæ, de Geoffroi de Monmouth, 1135, et sa Vita Merlini. — La Geste des Bretons ou Roman de Brut, de Wace [traduction en vers de Geoffroi de Monmouth], 1145. — Constitution du Cycle d’Arthur. — Les lais de Marie de France. — Le Tristan de Béroul. — Autres contes « anglo-normands ». — Rattachement des aventures de Tristan, et autres héros gallois, au cycle d’Arthur. — Crestien de Troyes s’empare de la matière de Bretagne ; — et c’est ici que, pour la première fois dans l’histoire de la littérature du Moyen Âge, on peut saisir l’influence du talent sur la transformation d’une littérature.
Loin de moi l’idée de rien conclure contre Bailly de cette diversité et de cette flexibilité de talent !
Aussi, avec bien plus de talent et de portée que beaucoup de ses confrères en journalisme, manque-t-il et manquera-t-il toujours d’autorité.
Il cherche par moments à mesurer le progrès de ce mal bizarre, qui entamait si avant sa raison sans altérer sensiblement son talent.
Michelet l’a faite sienne à force de volonté et de talent, qu’il l’a portée à un point où elle est unique, qu’il y est désormais passé maître ; et comme les conseils seraient parfaitement inutiles, j’accepte l’homme de savoir, d’imagination et de cœur pour ce qu’il est ; je le prends dans les étincelants et hasardeux produits qu’il nous donne ; je fais mon deuil de ce qui me choque, je rends justice et hommage à de merveilleux endroits et j’en profite.
Sa prudence et sa sagesse consistent donc plus à découvrir et à placer à propos la science et les talents qu’elle donne, qu’à les faire naître et à les multiplier.
Qui n’a lu ses admirables Précis des campagnes de Turenne, de Frédéric, de César, suivis d’observations détaillées, — tout l’art et la science de la guerre résumés en quelques pages concises, et ramenés à des principes fixes, supérieurs, qu’il n’appartient pourtant qu’au génie ou au talent de savoir, à des degrés divers, mettre en pratique et appliquer ?
On raconte que la poésie idyllique ou bucolique, comme on l’a entendue depuis, fut inventée en Sicile par un berger poète, Daphnis : c’est le beau bouvier Daphnis qui, chez Théocrite, remporte le prix du chant et gagne contre Ménalque la flûte à neuf tuyaux ; c’est lui qui chante ce ravissant couplet où se résume tout le thème, où respire toute la félicité et la douceur du genre : « Que ce ne soit point la terre de Pélops, que ce ne soient point des talents d’or que j’aie à cœur de posséder, ni, au jeu de la course, d’aller plus vite que les vents !
Certes, cet homme de haut talent et, jusqu’à un certain point, de génie, de noble aspect et « d’une figure avantageuse » (ainsi en parlent ceux qui l’ont vu et qui ne songeaient point à faire, comme aujourd’hui, des caricatures à tout propos) ; cet homme à l’âme ardente, élevée, d’un esprit libre, d’un caractère indépendant et fier, qui n’avait pu se plier à la vie de Turin, et qui n’hésita pas, en renonçant à son pays, à sacrifier les deux tiers de sa fortune pour se mieux dévouer à l’objet de son culte ; le poète qui, dans la Dédicace de Myrrha, s’étonnant d’avoir tant tardé à nommer publiquement celle qui l’inspire, lui disait : « Ma vie ne compte que depuis le jour qu’elle s’est enlacée à ta vie » ; un pareil homme méritait que la comtesse d’Albany, déçue et frappée dans sa destinée, crût elle-même s’honorer par un tel choix, et ne pas perdre, même aux yeux du monde, en échangeant royauté contre royauté.
Leur pensée n’était plus à la hauteur de leur talent.
Frédéric, dans une lettre à l’abbé de Prades, avait dit peu de jours après son arrivée à Berlin : « Écrivez en lettres d’or qu’il est arrivé ici un jeune seigneur français, rempli d’esprit, de bon sens et de politesse. » À son départ pour la Suède, c’était le prince Henri qui écrivait à M. de Gisors en manière d’adieu : « Unir à la jeunesse le caractère et les talents, c’est être né avec des qualités rares ; les perfectionner, les embellir et les rendre utiles, mérite l’admiration de tout le monde.
L’idée personnelle de gloire chez les souverains comme Louis XIV dénatura bientôt ce qu’il y avait eu de légitime et d’équitable dans la pensée d’un Richelieu : ce règne superbe eut pourtant l’honneur d’offrir l’exemple du plus beau talent et de la plus haute vertu militaire dans Turenne.
L’examen un peu approfondi du style de Racine nous ramènera involontairement aux mêmes conclusions sur la nature et la vocation de son talent.
L’imagination, les talents qui en dérivent ne raniment que les souvenirs ; mais c’est uniquement par la méthode métaphysique qu’on peut atteindre aux idées vraiment nouvelles.
N’ont que l’habit pour tous talents !
Ronsard : effort vers l’ode et l’épopée Par la force du talent, par la grandeur de l’effort, par l’éclat du succès, Ronsard est le maître de la poésie du xvie siècle.
Richelieu l’avait fait conseiller d’État et historiographe de France, sans peut-être se montrer disposé à utiliser les talents de Balzac dans les grands emplois auxquels celui-ci se serait estimé propre.
Aussi l’habitude de jouer chaque soir Hector ou Crispin avait rétréci le talent des comédiens, circonscrit leur horizon ; leur unique tâche étant de faire rire, Tartuffe fut joué comme valet, et, peu à peu, ce grand rôle ne fut plus qu’un sournois plaisant et cynique dont les charges et les paillardises égayaient le public.
Au cas particulier de M. de Wyzewa, il est sûr qu’il a fini d’aimer les lettres modernes le jour qu’il a cessé de se croire doué d’un talent révolutionnaire.
Ce dernier, Bernardin de Saint-Pierre, dont le talent chaste, idéal, volontiers rêveur et mélancolique, semble le moins d’accord avec l’esprit de Rabelais, l’a pourtant saisi à merveille par le côté sérieux que nous indiquons, et il a dit de lui dans une page mémorable et qui n’est pas toute chimérique, bien que trop simple de couleur et trop embellie : C’en était fait du bonheur des peuples, et même de la religion, lorsque deux hommes de lettres, Rabelais et Michel Cervantes, s’élevèrent, l’un en France, et l’autre en Espagne, et ébranlèrent à la fois le pouvoir monacal et celui de la chevalerie.
Le talent proprement dit, l’art d’écrire lui vient chemin faisant ; il dira à propos des sépulcres restés vides, qui furent construits près de Jérusalem par Hérode le Tétrarque : « Alors, comme à présent, il y avait des grandeurs passagères ; et des tombeaux promis et élevés ne recevaient pas les cendres qui devaient les occuper. » Mais c’est l’Égypte surtout qui est le but où tend le voyageur ; il y retrouve, en y mettant le pied, les souvenirs présents et les émotions héroïques de sa jeunesse.
À ce monde nouveau, pour l’intéresser, il faudra une littérature différente, plus solide et plus ferme à quelques égards, moins modelée sur l’ancienne, et qui, aux mains des gens de talent, aura elle-même son originalité.
Il n’aime le luxe en rien ; et, en fait de beaux-arts, le luxe, c’est la richesse et le talent même.
Il ne peut être question pour lui d’acquérir les talents qu’il convoite ; aussi, le sûr instinct qui le guide lui défend-il de tenter des essais où il échouerait et où se briserait le masque de sa supériorité.
Des poètes, en France et en Belgique, dédaignant la routine et les vaines flatteries, ont affirmé leur talent vers mon espoir auquel les portaient de latentes et plus ou moins pareilles tendances : disons M.
Parcourez les ouvrages des grands maîtres, et vous y remarquerez en cent endroits l’indigence de l’artiste à côté de son talent ; parmi quelques vérités de nature, une infinité de choses exécutées de routine.
Du Rameau Nous voilà arrivés à Du Rameau, qui certes n’est pas un artiste sans talent et sans espérance.
Je réponds que l’enthousiasme qui fait les peintres et les poëtes ne consiste pas dans l’invention des mysteres allegoriques, mais bien dans le talent d’enrichir ses compositions par tous les ornemens que la vrai-semblance du sujet peut permettre, ainsi qu’à donner de la vie à tous ses personnages par l’expression des passions.
Les hommes de talent qui emploient le don le plus élevé du Créateur à favoriser cet instinct antisocial, sont sûrs d’obtenir d’abord une très grande renommée, mais leur tombeau sera maudit.
Les nouveaux poètes anglais ne diffèrent des anciens, de Byron et de Keats, que parce qu’ils ont un moindre talent. […] À mesure que sont arrivés à la critique des talents plus nombreux et plus forts, le genre même de la critique s’est insensiblement transformé. […] Mais ces formes de critique n’ont de prix, à dire vrai, que par l’originalité et le talent des maîtres qui les ont pratiquées. […] Les méthodes les plus ingénieuses ne valent pas un beau style, ni ce précieux talent de composition et de mise au point qui, dès le début, a placé M. […] Ces précieuses qualités du talent de M.
Ils sont gais, tristes, spirituels, moroses, avares, libéraux, ardents, paresseux, et leur talent prend les couleurs de leur caractère. […] Aujourd’hui presque toute la peinture de genre dérive plus ou moins de Degas ; Forain, dont le talent est si âpre et si vert, lui doit énormément. […] La division du ton a servi son talent, cela est certain ; mais elle ne l’a pas créé. […] Le talent y ajouterait peu de chose. […] On peut acquérir une certaine apparence de talent littéraire, comme une femme peut, étant blafarde, se donner un teint factice.
Pourquoi, dans tous les Égyptiens de talent qu’il a étudiés de près, depuis le gouvernement de Mehemet-Ali, il a toujours remarqué chez eux, l’absence de l’esprit juste ! […] Une figure jeune, douce, plaisante avec une grande barbiche d’officier d’Afrique : le général distingué, tel que l’inventerait un roman sans talent ou une pièce du Gymnase. […] Il ajoute : « Vous avez créé des types, c’est une puissance que n’ont pas toujours les gens de très grand talent ! […] Du reste, l’ironie de son talent n’a jamais étalé un plus grandiose, un plus dédaigneux mépris pour les hommes et les choses du présent. […] Un convive dit que le général n’a aucun talent militaire, mais des côtés d’homme politique et d’orateur.
L’empereur Kien-long avait régné pendant une longue période de sa vie avec une vertu, un talent et un bonheur qui faisaient confondre son autorité avec celle de la Providence. […] s’écrie ici le savant traducteur, que les Montesquieu, les Burlamaqui, les Grotius baissent et se rapetissent quand on les compare à ce qui y est dit sur le prince du sang et les princes titrés, les hommes publics et les simples citoyens ; jusqu’où les grands doivent être soumis à l’empereur ; sur ces ministres et ces magistrats qui doivent s’exposer à tout pour ne pas tromper sa confiance ; sur le choix des dépositaires de l’autorité, la manière de les gouverner, de les veiller, de les élever ou abaisser, récompenser ou punir ; sur tout ce qui concerne les fortunes des particuliers, la division des terres, les impôts, les différentes récompenses des talents, des services, des vertus, et le juste châtiment de toute espèce de désordre, crime et délit !
M. de Lécluse s’est toujours oublié lui-même pour faire valoir les talents de ses rivaux. […] Son pinceau est une plume ; il parle, il chante autant qu’il dessine ; sa couleur a du son, sa toile est lyrique ; il parle trois langues en une : on l’entend peindre, on le sent décrire, on le voit penser…………………………………… XXXV L’enthousiasme qu’éprouvèrent l’Italie et la France à cette première grande page du génie de Léopold Robert lui donna l’élan et la confiance de son talent.
VIII Après les premières études faites sous l’œil de son père, le talent poétique se révéla dans le jeune adolescent par le premier amour, ce révélateur du beau dans tous les cœurs nés pour aimer. […] Quinet, nature allemande dans un talent français, a donné pour la première fois à la France la traduction, le sens et le commentaire.
Poète, philosophe, citoyen, magistrat, consul, administrateur de provinces, modérateur de la république, idole et victime du peuple, théologien, jurisconsulte, orateur suprême, honnête homme surtout, il eut de plus le rare bonheur d’employer tous ces dons divers, tantôt à l’amélioration, au délassement et aux délices de son âme dans la solitude, tantôt au perfectionnement des arts de la parole par l’étude, tantôt au maniement du peuple, tantôt aux affaires publiques de sa patrie, qui étaient alors les affaires de l’univers, et d’appliquer ainsi ses dons, ses talents, son courage et ses vertus au bien de son pays, de l’humanité, et au culte de la Divinité, à mesure qu’il perfectionnait ces dons pour lui-même ! […] Un nombreux et grave cortège de rhéteurs grecs, d’affranchis, de clients, de citoyens romains sauvés par ses talents, l’accompagnait quand il traversait la place pour monter aux rostres.
Athénée raconte que les dépenses occasionnées à Alexandre par cette enquête universelle ne s’élevèrent pas à moins de 800 talents. […] XI Si nous avions le talent, l’âge, le loisir et un pourvoyeur comme Alexandre, mettant des milliers d’hommes à notre disposition pour étudier partout les formes et les mœurs de tous les animaux dans l’univers connu, nous oserions entreprendre cette œuvre et chanter ainsi le cantique plus complet de la création, le spiritualisme de l’histoire naturelle.
Goethe reconnaissait toutefois à Chateaubriand un grand talent et une initiative rhétorico-poétique dont l’impulsion et l’empreinte se retrouvaient assez visibles chez les jeunes poètes venus depuis. […] Il a une conscience naïve de sa gloire qui ne peut déplaire parce qu’il est occupé de tous les autres talents, et si véritablement sensible à tout ce qui se fait de bon, partout et dans tous les genres.
Dans son curieux livre des Fais et bonnes Mœurs du sage roy Charles, elle en donne une belle définition « Celle-là est poësie dont la fin est vérité, et le prûcez (moyen) doctrine revestue en paroles d’ornements delitables, et par propres couleurs. » Une femme qui avait, au commencement du quinzième siècle, une si noble et si juste idée de la poésie, était compétente pour critiquer le Roman de la Rose : Chrisrtine, d’ailleurs, rendit hommage au talent de Jean de Meung, bien parlant disait-elle, et moult grand clerc soubtil. […] Des épithètes du même genre ne manquèrent ni au Champion des Dames de Martin Franc, ni aux Ballades de Philippe le Bon, duc de Bourgogne ni aux essais de comédie de Coquillart ; c’est un trait de l’histoire de notre poésie que les grandes admirations n’ont pas attendu les grands talents.
Jusqu’à ce jour tant désiré, nous ne continuerons pas moins, comme par le passé, à respecter son talent et à admirer son énergie, mais nous combattrons implacablement ses projets. […] Occupez-vous du drame par-dessus tout, ayez du talent, du génie et puis, « ne soyez d’aucune école, surtout pas de la mienne », comme a dit Wagner à un compositeur français.
Deux hommes ont le même talent de dessin, mais l’un a un génie naturel non cultivé, l’autre a acquis son habileté à force d’exercice : vous ne direz pas que tous les deux doivent leur talent à « l’expérience ».
Il est glorieux sans doute pour l’Italie comme pour l’Angleterre que les deux plus grands prosateurs français de ce siècle n’aient pas jugé au-dessous de leur talent de copier ces deux modèles étrangers et d’écrire leurs noms sur les piédestaux éternels de Milton et de Dante ; mais le système de traduction qu’ils ont adopté l’un et l’autre est, selon nous, un faux système, un jeu de plume plutôt qu’une fidélité de traducteur. […] Malgré le prodigieux effort de talent et de langue nécessaire pour traduire un poète en vers, M.
N’a-t-il pas donné en 1922 l’impulsion à la période pré-surréaliste dite des « sommeils hypnotiques », en relatant comment une dame D… a découvert ses talents de médium lors d’une séance d’expérience métapsychique alors à la mode ? […] Wilde est passé par là : Mettre le génie dans sa vie, le talent dans son œuvre.
Dans les jugements assez sévères et dédaigneux que nos historiens du dix-neuvième siècle ont aimé à porter de leurs devanciers, Mézeray a toujours obtenu une exception ; son talent, sa franchise, une certaine naïveté véridique l’ont préservé.
Le Régent n’a jamais été mieux peint que par sa mère ; elle nous le montre avec toutes ses facilités, ses curiosités en tous sens, ses talents, son génie propre, ses grâces, son indulgence pour tous, même pour ses ennemis ; elle dénonce ce seul défaut capital qui l’a perdu, cette débauche ardente et à heure fixe, où il s’abîmait et disparaissait tous les soirs jusqu’au matin : Tout conseil, toute remontrance à cet égard sont inutiles, disait-elle ; quand on lui parle, il répond : « Depuis six heures du matin jusqu’à la nuit, je suis assujetti à un travail prolongé et fatigant ; si je ne m’amusais pas un peu ensuite, je ne pourrais y tenir, je mourrais de mélancolie. » — Je prie Dieu bien sincèrement pour sa conversion, ajoute-t-elle ; il n’a pas d’autres défauts que ceux-là, mais ils sont grands.
Déjà vieux et hors de la carrière (et il ne mourut qu’à près de quatre-vingt-six ans), il disait avec un soupir, en rejetant ses regards sur le passé : Je m’en irai sans avoir déballé ma marchandise ; et comme on ne m’a jamais mis en œuvre, on ne saura point si j’étais propre à quelque chose ; je ne le saurai pas moi-même : je m’en doute pourtant, et, croyant me sentir des talents, il y a eu des temps dans ma vie où je me suis trouvé affligé en songeant qu’ils étaient perdus, et en les comparant avec ceux des personnes à qui je voyais occuper les premières places.
La Motte, qui croyait que l’esprit supplée au talent et qui s’était mis à faire des vers, avant tout raisonnables, dans tous les genres et sur tous les sujets, se dit que l’Iliade d’Homère était une matière qui s’offrait d’elle-même, et il eut l’idée de prendre pour canevas la traduction de Mme Dacier, en y changeant, corrigeant, retranchant tout ce qui lui paraîtrait convenable ; il voulait faire d’Homère quelque chose de bien.
Règle générale : pour les poètes et gens de lettres qui se retirent en province après un premier éclat (je parle toujours de la province telle qu’elle était alors, aujourd’hui j’admets que tout est changé), pour ces esprits et ces talents qui ne se renouvellent pas, qui se continuent seulement et qui vivent jusqu’à la fin sur le même fonds, il faut toujours en revenir, pour les bien connaître, à la date de leur floraison première.
Il intervient plus d’une fois dans son Histoire par des discours qu’il est censé tenir à son prince ; il aime cette partie oratoire et y excelle ; il la traite en homme de talent et en écrivain.
Le roi pourtant eut son avis, à lui, et démêla les qualités essentielles de son brave serviteur sous les défauts dont on le chargeait : « Le roi répondit qu’il avait toujours vu et connu que la colère et bizarrerie qui était en moi n’était sinon pour soutenir son service, lorsque je voyais qu’on le servait mal : or, jamais il n’avait ouï dire que j’eusse pris querelle avec personne pour mon particulier. » M. de Guise, favorable à Montluc, fit aussi cette remarque devant le roi, que le maréchal de Brissac se contredisait dans sa lettre, en déniant d’une part à Montluc l’ordre de talents nécessaires pour commander au nom du roi, et d’autre part en le louant si fort pour des qualités qui sont pourtant les principales en un homme de commandement, telles que d’être homme de grande police et de grande justice, et de savoir animer les soldats en toute entreprise : « Qui a jamais vu, ajoutait M. de Guise, qu’un homme doué de toutes ces bonnes parties n’eût avec lui de la colère ?
Tel est, le talent y aidant, le secret pour nous de sa puissance, de sa haute et religieuse beauté.
Il y en a eu en l’Antiquité, mais il ne s’en trouve presque plus. » Il dira de Scipion accusé et dédaignant de se défendre : « Il avait le cœur trop gros de nature pour se savoir être criminel, etc. » Que ces expressions soient à lui ou primitivement à Montaigne, il a le talent de les poursuivre et de les continuer ; il est homme à en trouver à son tour de pareilles, et qui ne déparent pas celles qu’il tient de l’original.
Le nom d’écrivains proprement dits continue d’appartenir à ceux qui de propos délibéré choisissent un sujet, s’y appliquent avec art, savent exprimer même ce qu’ils n’ont pas vu, ce qu’ils conçoivent seulement ou ce qu’ils étudient, se mettent à la place des autres et en revêtent le rôle, font de leur plume et de leur talent ce qu’ils veulent : heureux s’ils n’en veulent faire que ce qui est le mieux et s’ils ne perdent pas de vue ce beau mot digne des temps de Pope ou d’Horace : « Le chef-d’œuvre de la nature est de bien écrire. » Les autres, les hommes d’action, qui traitent de leurs affaires, ne sont écrivains que d’occasion et par nécessité ; ils écrivent comme ils peuvent et comme cela leur vient ; ils ont leurs bonnes fortunes.
Santeul avait, on le voit, au nombre de ses talents, celui de la mimique, et il excellait à ces légères scènes improvisées, qui faisaient de lui un véritable acteur de société.
La guerre générale qui se déclara en 1635 permit enfin d’employer au grand jour ses talents.
Voltaire, malgré ses merveilleux talents, n’avait point, osons le dire, ce qui est propre à conférer l’immortalité aux morts et à leur assurer une dernière et impérissable couronne.
Au reste, il est bien naturel qu’avec le talent qu’elle se sentait pour la politique, elle ait tout fait pour se procurer un théâtre où elle aurait lieu de le développer.
L’habitude de paraître content des autres, qui fait une partie essentielle de l’art de plaire, leur donnait le talent de se plaire à tout.
Pour rien au monde, quand je le pourrais, je ne voudrais enlever à l’humanité un dogme utile ou même une illusion consolante ; mais lorsqu’une doctrine prend la forme d’un jeu d’esprit ou d’un exercice de talent, il est bien permis de la discuter.
Ce n’est pas l’histoire politique de l’Espagne, c’est sa chronique intime, le journal de sa décadence, qu’il a voulu raconter ; et, en portant la splendeur habituelle de son expression sur ces rapetissements et ces misères, l’écrivain de talent les a éclairés et fixés dans la mémoire en traits ineffaçables.
Des formes nouvelles de talents se produisent chaque jour ; toutes les règles, d’après lesquelles on s’était accoutumé à juger les choses mêmes de l’esprit, sont déjouées ; l’étonnement est devenu une habitude ; nous marchons de monstres en monstres.
j’ai souvent ouvert, avec la meilleure volonté du monde, Corneille, Racine et Boileau, et je sens tout ce qu’ils ont de talent ; mais je ne puis en soutenir la lecture, et il me paraît évident qu’une partie des sentiments les plus profonds qu’éveille la poésie est restée lettre close pour ces auteurs56… » L’aveu est assez clair.
Ces hommes de talent et d’ambition qui, la plupart, depuis l’Assemblée législative avaient déjà tâté de la vie politique et étaient chaque jour en scène, avaient des engagements pris, des liaisons, des antipathies vives, des amis et des ennemis déclarés : lui, il arrivait sur le grand théâtre, à l’état abstrait, pour ainsi dire, neuf, pur du moins de toute prévention personnelle, et l’on peut dire qu’à cet égard il offrait table rase.
Soigneux d’échapper aux apparences trompeuses, il sait que le talent de la parole crée plus de choses encore qu’il n’en exprime.
Peut-être même la tolérance n’est-elle jamais plus utile que lorsqu’elle autorise un talent supérieur à propager l’erreur et le vice : l’amour du bien et le sentiment du salut public excitent alors les cœurs généreux à faire effort sur eux-mêmes et à s’élever à la même hauteur pour faire prévaloir la vérité et la vertu.
N’ai-je pas raison de dire qu’il y a eu concours sur ce beau nom, et que chaque talent est venu mettre son trait respectueux à l’expression dernière de cette figure bienfaisante ?
Savary, duc de Rovigo, entre autres paroles malheureuses, disait au fils de Mme de Staël, en 1810, en condamnant au pilon le livre de L’Allemagne : « L’État a besoin des talents de madame votre mère, il faut qu’elle se décide pour ou contre, comme au temps de la Ligue ; elle a tort de louer les Prussiens : on ferait plutôt du vin muscat avec du verjus que des hommes avec des Prussiens. » Le mot est authentique.
Chabanon était un créole spirituel et d’une jolie figure, qui unissait des études sérieuses à des talents d’agrément, helléniste et bon violon, lisant en grec Homère, que Suard n’avait jamais pu lire en entier, même en français ; homme de société et sensible, d’un tour romanesque, qui ressentit et inspira de vives tendresses et des sympathies délicates ; qui fut cher à d’Alembert et à Chamfort.
Son talent, il est vrai, ne réclamait pas d’ordinaire, dans la durée d’une même rêverie, plus d’une corde et plus d’un ton.
Et puis il est sorti déjà de la valetaille, il a eu un emploi, il est homme à talents, gazetier, poète, auteur sifflé, entrepreneur de tous métiers, pour le profit, et pour la joie d’agir ; l’auteur lui a soufflé sa fièvre, son audace, son esprit aventurier.
L’éloquence révolutionnaire L’éloquence révolutionnaire occupe un espace de dix années (1789-1799) : dans toutes les assemblées qui se succèdent, dans les États Généraux devenus bientôt Assemblée constituante (1789-1791), dans l’Assemblée législative (1791-1792), dans la Convention (1792-1795), partout, sauf dans les deux Conseils juxtaposés des Anciens et des Cinq-Cents (1795-1799), elle est représentée par de brillants et vigoureux talents.
I Des circonstances uniques ont contribué à former le talent de Pierre Loti.
Qu’elle est touchante cette humilité, cette attitude discrète, effacée de Jules Laforgue et qui ressort de la lecture de ses lettres, quand on songe surtout à la qualité de son talent !
Et c’est la vérité que les vers de jeunesse de Mallarmé témoignent d’un talent plein de confiance en lui-même mais importuné de sa disgrâce.
En un mot, on y retrouve tout le talent des précédentes études, tel qu’on a pu l’entrevoir à travers notre analyse.
Ainsi comprise, la critique a produit, en France surtout, toute une littérature, dans laquelle des écrivains plus ou moins remarquables ont pu faire briller leur talent : Théophile Gautier et de M. de Banville l’ont quelquefois prise pour prétexte à leur éblouissante fantaisie ; M.
Pour nous faire prendre patience, il découvre aujourd’hui que Veuillot — dont personne, certes, ne nie plus le talent volontaire et vigoureux — est « un homme de génie » et « le plus grand prosateur du xixe siècle ».
En tout la qualité dominante du talent de Tacite, ce composé de grave et d’auguste, y est éminemment applicable ; elle serait de trop dans le tableau de Louis XI.
Portalis faisait de cette affreuse époque de la veille un tableau vrai, avec des traits tirés de Tacite ; il ajoutait avec une observation fine qui n’était qu’à lui : On poursuivait les talents, on redoutait la science, on bannissait les arts ; la fortune, l’éducation, les qualités aimables, les manières douces, un tour heureux de physionomie, les grâces du corps, la culture de l’esprit, tous les dons de la nature, étaient autant de causes infaillibles de proscription… Par un genre d’hypocrisie inconnu jusqu’à nos jours, des hommes qui n’étaient pas vicieux se croyaient obligés de le paraître… On craignait même d’être soi ; on changeait de nom ; on se déguisait sous des costumes grossiers et dégoûtants ; chacun redoutait de se ressembler à lui-même.
Ce qu’il faut rappeler à l’honneur de la reine Marguerite, c’est son esprit, c’est son talent de bien dire, c’est ce qu’on lit à son sujet dans les Mémoires du cardinal de Richelieu : « Elle était le refuge des hommes de lettres, aimait à les entendre parler ; sa table en était toujours environnée, et elle apprit tant en leur conversation qu’elle parlait mieux que femme de son temps, et écrivit plus élégamment que la condition ordinaire de son sexe ne portait. » C’est par là, c’est par quelques pages exquises qui sont une date de la langue, qu’elle est entrée à son tour dans l’histoire littéraire, ce noble refuge de tant de naufrages, et qu’un rayon dernier et durable s’attache à son nom.
Il recevait toute la jeunesse des environs, et lui-même a ainsi défini son hospitalité pleine de facilité et de noblesse : Grand chère, vin délicieux, Belle maison, liberté tout entière ; Bals, concerts, enfin tout ce qui peut satisfaire Le goût, les oreilles, les yeux ; Ici, le moindre domestique A du talent pour la musique.
Nisard a cependant signalé la plus grande nouveauté du talent de Jean-Jacques Rousseau, à savoir l’amour de la nature ; mais peut-être n’en a-t-il pas assez fait ressortir l’importance.
Tout de même, ou à peu près tout de même, admirer, c’est avouer que l’on est ébloui, fasciné, étourdi par le talent, l’habileté, l’adresse, la rouerie d’un auteur.
Jouffroy disent qu’on ne vit jamais dans une chaire de philosophie deux talents si grands et si différents.
Vous détachez cette faculté égoïste et politique, et vous en déduisez aussitôt tous les caractères de la société et du gouvernement romain, l’art de combattre, de négocier et d’administrer, l’invincible amour de la patrie, le courage orgueilleux et froid, l’esprit de discipline, le projet soutenu et accompli de conquérir, garder et exploiter le monde, le respect de la loi, le talent de la résistance et de l’attaque légale, la mesure et l’obstination dans les luttes civiles ; partout la réflexion qui calcule et la volonté qui se maîtrise.
Munis des quatre règles de la morale et des quatre règles de la littérature, les professeurs ont examiné les talents, et ils les ont classés ; ils ont décerné des prix et des mentions honorables. […] Il n’y a pas à en douter, Pradon n’avait presque aucun talent, encore qu’assez adroit en son métier de constructeur dramatique. […] Cela n’est pas sérieux, car s’il est vrai que le génie et le talent sont souvent en rapport direct avec les cultures antérieures, il y a aussi de soudaines aptitudes que le milieu développe. […] La grâce alors c’est la force, c’est le talent, c’est le génie, c’est la beauté, l’esprit ou la belle humeur. […] Nourries de cette idée que le talent est une faveur de la divine providence, les familles chrétiennes attendent la venue de l’homme qui n’abusera pas, pour de vaines prouesses littéraires, des dons que Dieu lui aura départis, dans sa bonté.
Car vraiment si l’historien est si parfaitement, si complètement, si totalement renseigné sur les conditions mêmes qui forment et qui fabriquent le génie, et premièrement si nous accordons que ce soient des conditions extérieures saisissables, connaissables, connues, qui forment tout le génie, et non seulement le génie, mais à plus forte raison le talent, et les peuples, et les cultures, et les humanités, si vraiment on ne peut rien leur cacher, à ces historiens, qui ne voit qu’ils ont découvert, obtenu, qu’ils tiennent le secret du génie même, et de tout le reste, que dès lors ils peuvent en régler la production, la fabrication, qu’en définitive donc ils peuvent produire, fabriquer, ou tout au moins que sous leur gouvernement on peut produire, fabriquer le génie même, et tout le reste ; car dans l’ordre des sciences concrètes qui ne sont pas les sciences de l’histoire, dans les sciences physiques, chimiques, naturelles, connaître exactement, entièrement les conditions antérieures et extérieures, ambiantes, qui déterminent les phénomènes, c’est littéralement avoir en mains la production même des phénomènes ; pareillement en histoire, si nous connaissons exactement, entièrement les conditions physiques, chimiques, naturelles, sociales qui déterminent les peuples, les cultures, les talents, les génies, toutes les créations humaines, et les humanités mêmes, et si vraiment d’abord ces conditions extérieures, antérieures et ambiantes, déterminent rigoureusement les conditions humaines, et les créations humaines, si de telles causes déterminent rigoureusement de tels effets par une liaison causale rigoureusement déterminante, nous tenons vraiment le secret du génie même, du talent, des peuples et des cultures, le secret de toute humanité ; on me pardonnera de parler enfin un langage théologique ; la fréquentation de Renan, sinon de Taine, m’y conduit ; Renan, plus averti, plus philosophe, plus artiste, plus homme du monde, — et par conséquent plus respectueux de la divinité, — plus hellénique et ainsi plus averti que les dieux sont jaloux de leurs attributions, Renan plus renseigné n’avait guère usurpé que sur les attributions du Dieu tout connaissant ; Taine, plus rentré, plus têtu, plus docte, plus enfoncé, plus enfant aussi, étant plus professeur, surtout plus entier, usurpe aujourd’hui sur la création même ; il entreprend sur Dieu créateur.
C’est ainsi que l’enfance du talent ou du génie s’agite confusément, se disperse en apparence ou même se dissipe, mais une force intérieure ne le dirige pas moins, de traverse en traverse, à son but ; et son originalité s’enrichit de la contrariété même de ses expériences. […] Qu’il est fort de son ignorance ; — et, à cette occasion, d’une forme de vanité particulière aux « autodidactes ». — La dédicace des Discours admirables au seigneur de Pons. — L’œuvre de Palissy est le témoignage de l’état d’esprit d’un « povre artisan » de son temps. — C’est ce qui en fait la singularité, l’originalité et le naturel. — Talent du conteur [Les Ammonites de Marennes, éd. […] 2º Le Pamphlet ; — et qu’il n’en faut exagérer ni le mérite, qui est tout à fait secondaire, ni la hardiesse, ni les conséquences. — La Satire n’a point « donné la France à Henri IV », puisqu’elle a paru en 1594, et que la guerre civile n’a été pacifiée qu’en 1598 ; — il n’y a point de hardiesse : 1º à se mettre cinq pour écrire un livre, et nous savons assez que la division des risques est le principe même de l’assurance ; — il n’y en a pas non plus : 2º à garder l’anonyme ; — et 3º à avoir publié un pamphlet de cette nature neuf mois après la conversion, et trois mois après la rentrée d’Henri IV à Paris. — Toute la bravoure des auteurs ne consiste donc qu’à avoir royalement injurié des gens à terre et que d’ailleurs ils n’avaient pas eux-mêmes renversés. — Les auteurs de la Ménippée : Pierre le Roy, Gillot, Nicolas Rapin, Jean Passerat, Florent Crestien et Pierre Pithou : — et qu’ils n’ont pas fait preuve en se coalisant d’un talent qu’aucun d’eux ne possédait personnellement. — Il y a d’ailleurs dans quelques passages de la Satire une certaine verve de caricature ; — de satire même ; — et presque d’éloquence [Cf. la Harangue, souvent citée, du lieutenant civil Dreux d’Aubray]. — Mais on n’y trouve pas ombre d’élévation ni de noblesse ; — ce sont des bourgeois furieux d’être gênés dans leurs plaisirs ; — ce sont aussi de grands ennemis des Jésuites ; — et ils ont sans doute aimé leur patrie ; — mais la Satire Ménippée n’en est pas moins à rayer du nombre des « grands monuments de l’esprit français ».
Supposez le plus grand talent, — Chateaubriand, par exemple : — lorsqu’il manque de sincérité, lorsqu’il prend un rôle, avec quelque éclat qu’il le joue, il ne nous convainc pas, il ne nous touche pas : nous sentons, si vous me permettez l’expression, qu’il y a une paille dans son génie. […] De là des discordances, des notes fausses, que tout le prestige du talent ne réussit pas à couvrir. […] Les autres, au contraire, quel que soit leur mérite, ne veulent point qu’on les oublie ; ils veulent qu’on sache qu’ils sont là, qu’ils ont du talent ; qu’on s’en aperçoive à toute minute, à chaque phrase ; de sorte que parfois la trop grande couleur des expressions nous éblouit, ou bien le cliquetis des mots nous empêche d’entendre les idées. […] Il avait, sans compter, semé son talent dans une sorte d’improvisation continuelle ; ne se gênant point d’ailleurs pour prendre ses sujets un peu partout, comme on faisait en ce temps-là, et encore aujourd’hui, je crois. Or, en 1630, avait paru un recueil d’œuvres poétiques en latin, composées par un jésuite, homme de talent, Louis Cellot, Ludovicus Cellotius.
…………………… Monsieur, vous plairait-il D’essayer sur la mienne un talent si subtil ? […] Le talent des dramatistes du dix-septième siècle sera de faire exactement comme eux, mais en trouvant de quoi remplir les quatre premiers actes. […] Cette idée, que Francisque Sarcey avait trouvée dans ses cahiers de l’École normale, il l’avait si brillamment exposée et si souvent, avec tant de conviction et de persistance, et, du reste, de talent, qu’elle est devenue classique et se retrouve, à l’heure où nous sommes, dans tous les livres scolaires. […] Brunetière, on ne peut avoir qu’une opinion, d’abord sur son talent, et ensuite sur son caractère. […] Son talent d’homme d’État est fait d’une connaissance très pénétrante des hommes, de l’art de se taire, de l’art de faire parler, et de l’art de frapper fortement les imaginations ; et à ce talent contribue précisément, au lieu de le gêner, son âme de prophète et d’inspiré.
Il ne conteste pas « l’admirable talent d’écrivain » de Pascal, et tout le monde lui saura bon gré de cette concession. […] Auguste Molinier ne lui conteste point son talent d’écrivain. […] On oublie que ni nos grands hommes du xviie siècle n’ont rabaissé leur talent à ces honteux usages ; ni les Montesquieu, ni les Buffon, ni les Rousseau, ni les Diderot, ni les d’Alembert eux-mêmes au xviiie siècle. […] Car on n’explique pas le génie, mais on explique le talent, et, en l’expliquant, on montre en quoi, par où, comment le génie est inexplicable. […] Tout écrivain a calculé que son talent est une force, comme la fortune, comme la naissance, et une force dont il faut savoir se servir.
Il a fallu tous les efforts de l’érudition la plus ingénieuse et la plus patiente2 pour découvrir, dans un demi-chapitre de Pline, dans quelques mauvaises descriptions de Pausanias, dans quelques phrases isolées de Cicéron, Lucien, Quintilien, la chronologie des artistes, la filiation des écoles, le caractère des talents, le développement et les altérations graduelles de l’art. […] Ici le vice national achève de manifester le talent national. […] Il s’en est servi pour se développer harmonieusement, tout entier ; il a pu être à la fois poëte, philosophe, critique, magistrat, pontife, juge, citoyen, athlète, exercer ses membres, son esprit et son goût, réunir en lui-même vingt sortes de talents sans qu’aucun d’eux fit tort à l’autre, être soldat sans être automate, danseur et chanteur sans devenir figurant de théâtre, penseur et lettré sans se trouver homme de bibliothèque et de cabinet, décider des affaires publiques sans remettre son autorité à des représentants, fêter ses dieux sans s’enfermer dans les formules d’un dogme, sans se courber sous la tyrannie d’une toute-puissance surhumaine, sans s’absorber dans la contemplation d’un être vague et universel. […] Il juge des talents et applaudit aux coups bien portés.
Tous deux adressèrent un appel aux personnalités de grand renom et de grand talent, et firent de la presse et du public leurs complices. […] Le nom de ces derniers, l’opposition constante qu’ils avaient faite au Gouvernement impérial, leur talent, leur habileté, et l’autorité dont ils jouissaient, avaient excité au dernier point l’inquiétude ombrageuse de Napoléon III. […] Nous n’avons aucune espèce de lettre ou de document qui nous indique d’une manière quelconque que Favart se soit excusé auprès de Marmontel pour lui avoir pris son idée ; mais en revanche, ce que nous avons, c’est une lettre de Marmontel, qui demande pardon à Favart d’oser, lui indigne, traiter pour le théâtre la même idée que Favart n’a pas dédaigné d’embellir de son rare talent pour la scène. […] Supposez que Molière eût été seulement un homme de talent, d’un certain talent : il aurait fait contre les dévots une comédie de la même colère et de la même portée que celle que fit Palissot contre les philosophes ; supposez qu’il eût eu plus que du talent, du génie, mais un génie de portée ordinaire : eh bien, il eût fait en comédie contre les dévots, ce qu’a fait contre eux La Bruyère dans ses Caractères, qui ne vont pas au-delà de ce que La Bruyère pouvait avoir sous les yeux.
Brieux rappellerait un peu trop ce fâcheux Boursault ou ce pénible Destouches, s’il ne faisait songer beaucoup plus encore, par sa simplicité et par la spontanéité de son talent dramatique, à l’excellent tailleur de pierres Sedaine, auquel il ressemble, du reste, par l’absence de style. […] Quand je l’y aurai vue, j’achèverai, si je puis, cette définition éparse de son talent, et je tâcherai de conclure. […] Mais il y faut, en même temps, de la foi et de la force ; assez de candeur pour ne pas craindre d’être banal, et assez de talent pour ne l’être pas. […] Le talent de M. Brieux croît d’année en année, et ce talent me ravit, parce que ce n’est un talent ni d’humaniste, ni d’auteur mondain, et qu’il s’y trouve, à la fois, de l’ingénuité et de la pénétration, de la probité et de la malice, du réalisme et de l’idéologie, du bonhomme Richard et du Schopenhauer, de la maîtrise et un trouble, une incertitude extrêmement intéressante dans sa sincérité. — Et quel bon type, quel type de haute comédie vraiment, que M.
Tout au fond et sans tant de distinctions, les sophistes sont nés sophistes, c’est-à-dire nés ingénieux et peu scrupuleux, pleins de talents et sans conscience ; et ils se sont développés dans le sens de leur nature, plus ou moins cyniquement, tous s’enivrant et enivrant et éblouissant les autres de prestiges littéraires et ne tenant aucun compte de la morale ou n’y songeant point. […] Le tort des Sophistes, qui sont gens d’esprit et de talent, est de n’avoir aucun idéal, de tout rapporter au succès et de n’enseigner rien autre chose que des moyens de succès. […] Les Sophistes avec tout leur talent, tout leur savoir et toutes leurs prétentions, ne sont que des professeurs d’ambition cynique. […] Toute admiration accordée au talent, ce n’est pas là une très bonne disposition. […] Le talent de l’auteur sera de détourner le lecteur de la considération, de la préoccupation de cette idée-là.
La fortune de Rosny fut lente et laborieuse comme celle de son maître : ses grands talents et son esprit qui s’annonçaient de bonne heure se compliquaient de certaines obscurités, de certaines humeurs et bizarreries auxquelles on aurait pu se méprendre.
Une des choses qui me plaisent le plus dans Mézeray, à côté de l’agencement plein et facile de la narration, c’est le talent naturel et presque insensible avec lequel sont traités les caractères ; on les voit se développer successivement et sans parti pris selon les circonstances, avec tous leurs flux et reflux de passions ; Mézeray ne les fait jamais poser, il les laisse marcher et on les suit avec lui.
Et puis, quelles que soient, dans les deux cas, les inégalités de ressources, de talent, de prévision et de calcul, ce qui me frappe, c’est combien, malgré ces différences positives tout à l’avantage de l’entreprise moderne, la part de la fortune reste grande et souveraine, et combien, après avoir un peu plus ou un peu moins cédé au génie humain, elle ne recule que pour reprendre le dessus à quelque distance dans le résultat, et pour se ménager en quelque sorte la revanche de plus loin.
Ausone, dans sa Moselle, n’est qu’un descriptif appliqué et consciencieux, qui a du talent avec recherche.
Jamais, je l’espère bien, une telle négation du passé n’eût pu prendre et réussir absolument en France, dans cette France où le génie littéraire a sa patrie, où la tradition du talent a ses autels, où le sentiment de la beauté latine et de la grandeur romaine a passé si profondément dans notre veine nationale et dans nos propres origines.
S’il avait rêvé plus, si ses grands talents précoces lui avaient inspiré des désirs naturels d’élévation, et avaient fait tirer autour de lui, comme nous l’entrevoyons, d’ambitieux augures, tout manqua, et sa carrière fut en quelque sorte brisée par une première légèreté.
Et puis il y a le Béranger tout contraire et qu’on s’estfait en haine du premier : le faux bonhomme qui calculetout, qui ricane de tout, qui tire toujours à temps sonépingle du jeu ; un Béranger beaucoup trop malin, égoïstedans tout ce qu’il fait, dans tout ce qu’il donne ; à quil’on refuse à la fois bonté de cœur, distinction et franchise dans le talent.
Les préférences déclarent les mœurs et les talents.
Vaugelas semble dire comme un bon professeur à l’élève brillant qui a fini ses études : « Maintenant vous savez écrire ; il ne vous reste qu’à trouver de beaux et heureux sujets, des emplois originaux à votre talent.
Son personnage principal, le duc Pompée-Henri de Joyeuse, un lion à la mode, beau, aimable, doué de tous les talents, un ténor et un virtuose comme on en a connu, — comme un Mario ou un Belgiojoso, — arrivé à l’âge de quarante ans, cette extrême limite de la jeunesse, à bout de ressources et de désordres, tout à fait ruiné, est appelé en Allemagne par un ancien ami de sa famille, un ami de sa mère, le comte Herman qui, en mourant, l’adopte et lui laisse par testament son immense fortune, à la condition de prendre son nom et de séjourner en Allemagne au moins une année.
On se contentait d’avoir beaucoup de talent dans ses œuvres ; pour le reste, et dans le courant de la vie, on économisait les idées.
Conclusion générale : après avoir vu ces trois portraits de la reine, toute idée de fadeur a disparu ; ces hommes de talent lui ont rendu le plus grand des services auprès de la postérité.
Non, l’immortalité ne serait qu’une ombre sans l’activité… C’est la vie éternelle que nous voulons, et non la mort éternelle. » Nous apprécions certes, nous admirons même l’esprit ingénieux, inventif, le talent littéraire, la fertilité spéculative, qui ont fait trouver à M.
On n’aurait vu là qu’une preuve de talent, un exercice d’esprit, pas même une peccadille historique.
Son talent regarde deux siècles ; sa figure appartient à tous les deux ; il termine l’un : on dirait qu’il commence et introduit l’autre.
Ainsi se couronne une des vies les plus brillantes, les plus complètes, les plus décemment mélangées qu’on puisse imaginer, où concourent la Révolution et l’ancien régime, où la naissance, et l’esprit, et la générosité, forment un charme ; une vie de simplicité, de grand ton, de monde et d’ardeur sincère ; une vie passionnée et pure, avec une fin admirablement chrétienne, comme on en lit dans les histoires de femmes illustres au dix-septième siècle ; un harmonieux reflet des talents délicats, naturels, et des morts édifiantes de ce temps-là, mais avec un caractère nouveau qui tient aux orages de nos jours, et qui donne un prix singulier à tout l’ensemble.
La tête, c’est en latin un tesson de pot ; la gorge est un gouffre, et le talent, un poids.
Il y a là un talent d’écrivain trop complaisamment étalé pour que les attitudes rigides et le dessin sec de ces personnages de vitraux se fassent goûter.
De l’ail, leur pratique correspond à leur talent : ils traitent chaque sujet comme une succession de thèmes poétiques.
La comédie du xviiie siècle est supérieure à la tragédie : elle nous fournit deux talents éminents et singuliers, Marivaux et Beaumarchais ; et elle nous présente un grand fait, la naissance du drame.
Nous le renvoyons aux Trouilles, dans l’intérêt de son talent et peut-être, je suis affreusement sincère, pour notre plaisir.
Le sujet et jusqu’au titre de son dernier recueil sont un indice de son talent.
André Gide, esprit fin, délicat et ingénieux, qui aime le talent comme un homme poli aime la politesse, mais que le génie blesse comme une offense personnelle.
J’ai connu des gens de goût, mais d’un goût restreint et nourri à l’ombre du cabinet, qui, en jugeant Napoléon pour son talent de parole, en étaient restés sur cette première impression : Daunou, par exemple, écrivain d’un style pur, châtié et orné.
Entre ces deux femmes si éloignées et si distantes, quels sont les noms qui comptent véritablement, qui méritent de figurer en première ligne dans la série des femmes célèbres par leur talent d’écrivain ?
Ce petit traité, qui renferme des réflexions fermes et hautes, des remarques fines, et rendues dans un style net et vif, avec un vrai talent d’expression, a un défaut : il est sec et positif ; il a ce cachet de crudité qui déplaît tant au milieu des meilleures pages du xviiie siècle, et qui fait que la sagesse qu’on y prêche n’est pas la véritable sagesse.
Il est à noter que Frédéric, plume en main, tout en restant sévère, est moins sobre que César et même que Napoléon ; il ne s’interdit pas le talent proprement dit, surtout dans cette première histoire dont Gibbon a pu dire qu’elle est bien écrite.
On peut dire de lui que jamais un de ses talents, jamais une de ses passions ni même de ses manies, ne fit invasion dans un de ses devoirs.
Il y exprimait pourtant une idée très philosophique, c’est qu’il n’y a pas de raison pour que la nature ne crée pas aujourd’hui d’aussi grands hommes qu’autrefois, et qu’il y a place, dans sa fertilité inépuisable, à un éternel renouvellement des talents.
Louville, son rival et son ennemi, homme de talent et d’ardeur, mais de passion, nous la présente comme la plus méchante femme de la terre, bonne à chasser au plus tôt, « sordide et voleuse, que c’est merveille ».
Dans un portrait de Du Plessis-Mornay, voulant déplorer l’usage que ce célèbre protestant fit de ses talents contre l’Église, il dira qu’il eût été à souhaiter pour lui qu’il fût mort-né (Mornay) d’effet comme de nom, et que du ventre de sa mère il eût été porté à la sépulture.
Ne lui demandez rien de ces éclairs de talent et de passion qu’on rencontre chez sa jeune contemporaine Louise Labé, la Belle Cordière.
Il essaie sa plume à des descriptions où l’on retrouve l’écrivain de talent.
Il ne suffit pas d’avoir de bons sentiments, un cœur doux et d’aimer bien sa tendre amie, pour écrire de bons vers libres ; il faut aussi beaucoup de talent et même beaucoup de science.
Nous ne confondrons point le vif génie de Banville avec le pesant talent de Boileau ; ce sera la noblesse perpétuelle du maître de Florise, ses reproches à Hugo de n’avoir point brisé les barrières, ses dits, qu’on est encore timide quand on se croit le plus audacieux, l’hésitation, le doute sur lequel il conclut sa prosodie, sa vision que la rythmique romantique n’était pas éternelle.
Le talent du dessein donne de grandes facilitez pour réussir dans les expressions.
Les hommes sont inégaux en force physique comme en talents ; et cependant nous tendons à leur reconnaître à tous une égale valeur morale.
Les ouokolo (ou nyama) bambara sont plutôt farceurs que réellement malfaisants ; en général, ils semblent avoir un faible pour les tomates et ne les demandent pas au travail de la terre mais à leurs talents de filous.
Du reste, quel Français, ami des lettres et de la gloire de son pays, ne s’empresserait de reconnaître que, parmi nos jeunes écrivains, parmi ceux-là mêmes que l’indiscrétion d’autrui ou leur propre faiblesse a, si je puis parler ainsi, affublés d’un sobriquet étranger, il en est plusieurs qui ont donné des preuves du talent le plus élevé, le plus brillant et le plus varié ?
Or, je nie le bon sens dans ce livre ; je nie le talent relevé, consistant, formidable ; je nierais même le style, si on me poussait.
Notre professeur, un homme de grand talent, nous interrogea, fut très bon, très attentif ; mais je trouvais à toutes choses un air de solennité : je pressentais une révélation. […] Quelle souplesse du talent ! […] Mais la souplesse du talent n’est pas, en notre temps, la qualité la plus rare. […] Courbaud, du reste, a beaucoup de talent : et veuille la Sorbonne souffrir la futilité de cet éloge ! […] Il a fallu tout le talent du poète exquis pour dissimuler tant de pauvreté, voire tant de vulgarité.
Car, si leurs talents sont peut-être un peu inégaux, je leur dois à tous une reconnaissance égale. […] ce binocle intelligent, ce creuset de tout ce qui s’appelle génie, talent, esprit, gloire, fantaisie. […] … Vive le feuilleton, ce monocle intelligent, ce creuset de tout ce qui s’appelle génie, talent, esprit, gloire, fantaisie ! […] Sarcey, tout en rendant justice au talent des deux jeunes auteurs. […] (Car vous savez qu’une des grâces du talent de MM.
Les prédicateurs qui ne peuvent imiter ces grands modeles feroient mieux de les apprendre par coeur & de les débiter à leur auditoire (supposé encore qu’ils eussent ce talent si rare de la déclamation), que de précher dans un style languissant des choses aussi rebattues qu’utiles. […] Il exprime autre chose que jugement, génie, goût, talent, pénétration, étendue, grace, finesse ; & il doit tenir de tous ces mérites : on pourroit le définir, raison ingénieuse. […] c’est qu’homme d’esprit ne signifie pas esprit supérieur, talent marqué, & que bel-esprit le signifie. […] Le climat heureux, est celui que la nature favorise : ainsi sont les imaginations heureuses, ainsi est l’heureux génie, c’est-à-dire, le grand talent ; & qui peut se donner le génie ? […] C’est elle qui fait le charme de la conversation ; car elle présente sans cesse à l’esprit ce que les hommes aiment le mieux, des objets nouveaux ; elle peint vivement ce que les esprits froids dessinent à peine, elle emploie les circonstances les plus frappantes, elle allegue des exemples, & quand ce talent se montre avec la sobriété qui convient à tous les talens, il se concilie l’empire de la société.
Déplorable abondance des idées distinctes et faciles ; on l’a retrouvée au dix-septième siècle, dans le cailletage littéraire qui s’échangeait au-dessous des grands hommes ; c’est le défaut et le talent de la race. […] Le premier Anglais qui s’y essaye est un prêtre d’Ernely, Layamon110, encore empêtré dans le vieil idiome, qui tantôt parvient à rimer, tantôt n’y réussit pas, tout barbare et enfant, incapable de développer une idée suivie, et qui balbutie de petites phrases heurtées ou inachevées, à la façon des anciens Saxons ; après lui un moine, Robert de Gloucester111, et un chanoine, Robert de Brunne112, tous deux aussi insipides et aussi clairs que leurs modèles français ; en cela ils se sont francisés et ont pris le trait marquant de la race, c’est-à-dire l’habitude et le talent de raconter aisément, de voir les objets émouvants sans émotion profonde, d’écrire de la poésie prosaïque, de discourir et développer, de croire que des phrases terminées par des sons semblables sont de vrais vers. […] Personne n’a parlé si vite et si bien aux dames que les Français du continent, et ils n’ont point tout à fait oublié ce talent en s’établissant en Angleterre.
Pour leur compte, ils ne visaient pas au talent. […] Louis Racine, dans ses Mémoires, dira de son père : « Il avait eu, dans sa jeunesse, une passion démesurée de la gloire. » En ce temps-là, il était beaucoup plus facile qu’aujourd’hui, à un jeune homme de talent, de se faire rapidement connaître. […] Et, chose remarquable, on peut bien citer, au xviie siècle, des talents surfaits, mais, je crois, pas un talent méconnu. […] Il avait un « talent d’imitation » très remarquable, entendez le talent de contrefaire les gens. « Il amusa un jour le roi, dit Louis Racine, en contrefaisant devant lui tous les comédiens, y compris Molière. » Il était connu pour ce talent, et on l’invitait à dîner pour qu’il « fît des imitations », comme nous dirions aujourd’hui.
Est-ce à dire qu’il n’y ait pas eu, dans le courant de ce siècle xixe , des hommes perspicaces, des hommes de grand talent et des hommes de bonne volonté ? […] Mais les hommes de grand talent employèrent ce talent à des lamentations inutiles ou nuisibles (cas de Chateaubriand) ou à des prédictions et prédications insensées (cas de Hugo, le vaticinateur à rebours). […] Il n’entre nullement dans ma pensée de diminuer ici le talent ou le génie d’un Claude Bernard, d’un Darwin, d’un Charcot, d’un Pasteur. […] Aux époques fortes, où abondent les talents originaux, vigoureux et sages, ce sont les hommes qui mènent les idées, lesquelles composent l’ambiance. […] L’effondrement spirituel et intellectuel, qui ouvrait la Sorbonne à l’étranger, ouvrait le Palais de justice à la pire faiblesse et au pire désordre, en dépit de talents éclatants, mais dont les éclats blessaient le Droit.
noble hommage rendu à son talent ; malheureux s’il ne fait dire que cela ; car il a manqué son but. […] C’est avec ces faibles ressources et guidé par un instinct heureux qu’en moins de dix ans il monte par un progrès continu jusqu’à la perfection de son talent, et expire au moment où, sûr enfin de lui-même, il va produire de nouveaux et plus admirables chefs-d’œuvre. […] Il a consacré son talent à la France, il y a vécu, il y est mort, et, ce qui est décisif, sa manière est toute française. […] Puis viennent en foule les talents les plus divers, Mellan, Michel Lasne, Morin, Daret, Huret, Masson, Nanteuil, Drevet, Van Schupen, les Poilly, les Édelinck, les Audran. […] Voulez-vous un talent plus naturel, et ayant encore de la force et de l’élévation ?
En Angleterre, on compte le Coriolan de Jean Dennis, aujourd’hui presque oublié ; celui de Thomas Sheridan, imprimé à Londres en 1755 ; et surtout celui de Thomson, l’auteur des Saisons, dont le talent descriptif est le véritable titre au rang distingué qu’il occupe dans la littérature anglaise. […] Bénédick était un des rôles favoris de Garrick, qui y faisait admirer toute la souplesse de son talent. […] On attribuait d’ailleurs une partie de ces dérèglements à la méfiance jalouse de son père, qui, en le tenant écarté des affaires auxquelles il se portait avec une grande ardeur, en lui ôtant même l’occasion de faire éclater ses talents militaires, avait jeté cet esprit impétueux dans des voies de désordre où les mœurs du temps ne permettaient guère qu’on s’arrêtât sans avoir atteint les derniers excès. […] Quant à la partie des caractères, il s’en faut de beaucoup qu’elle réponde au talent ordinaire de Shakspeare ; on ne peut nier qu’il n’y ait du mérite dans la peinture de Henri, ce prince dont les sentiments pieux et la constante bonté parviennent presque toujours à nous intéresser malgré le ridicule de cette faiblesse et de cette pauvreté d’esprit qui touchent à l’imbécillité : le rôle de Marguerite est assez bien soutenu ; mais cet excès de fausseté envers son mari sort des bornes de la vraisemblance, et ce n’est pas Shakspeare, du moins dans son bon temps, qui eût donné, à deux criminels tels que Marguerite et Suffolk, des sentiments aussi tendres que ceux de leur dernière entrevue. […] C’est ce qu’on peut remarquer, par exemple, dans les regrets de Richard sur la mort de son père ; il serait difficile de les attribuer à d’autres qu’à Shakspeare, tant ils portent son empreinte ; mais il serait également difficile de les attribuer à ses meilleurs temps, et leur imperfection pourrait servir encore à prouver que les trois parties de Henri VI, telles que nous les avons aujourd’hui, nous offrent, non pas Shakspeare corrigé par lui-même dans la maturité de son talent, mais Shakspeare employant le premier essai de ses forces à corriger les ouvrages des autres.
Jourdain, qui fait de la prose sans le savoir, et Gustave Flaubert, il y a une différence quantitative, mais non pas qualitative ; de même entre le talent et le génie. […] La plupart semblent croire que, depuis Eschyle jusqu’à Ponsard, la tragédie soit une forme immuable et douée de certaines vertus (ou défauts) intrinsèques ; pour les uns elle est la forme suprême, la seule bonne, du théâtre sérieux ; pour les autres, elle est la prison où les talents s’étiolent.
Accablé par l’âge et les fatigues, usé par les chagrins domestiques, tourmenté de douleurs convulsives dans les cuisses et dans les jambes, en proie à un mal rongeur qui lui a déjà dévoré une partie considérable de la tête, il a renoncé entièrement aux études, et a envoyé au père Louis-Dominique, si recommandable par sa bonté et par son talent dans la poésie élégiaque, le manuscrit des notes sur la première édition de la Science nouvelle, avec l’inscription suivante : AU TIBULLE CHRÉTIEN AU PÈRE LOUIS DOMINIQUE JEAN BAPTISTE VICO POURSUIVI ET BATTU PAR LES ORAGES CONTINUELS D’UNE FORTUNE ENNEMIE ENVOIE CES DÉBRIS INFORTUNÉS DE LA SCIENCE NOUVELLE PUISSENT ILS TROUVER CHEZ LUI UN PORT UN LIEU DE REPOS [Après avoir rappelé les obstacles, les contradictions qu’il rencontra, il ajoute ce qui suit :] « Vico bénissait ces adversités qui le ramenaient à ses études. […] Mais quel que soit son talent, on peut dire que, dans ses Saggi politici, les idées de Vico ont autant perdu en originalité que gagné en clarté.
C’est pour n’être jamais surpris. » En résumé, dès sa première jeunesse, Rosny nous est présenté comme bon ménager, ayant toujours de l’argent de reste, et, en cas de besoin, portant de l’or en poche, même dans les batailles, quand les autres n’y songent pas ; sachant s’arranger en campagne, s’ingénier dans les sièges pour attaquer et faire brèche, adroit et actif à pourvoir à la défense de ses quartiers ; un militaire en un mot, non seulement très brave, mais distingué, instruit et précautionné, avec des talents particuliers d’artilleur, et, si je puis dire, des instincts d’arme savante.
On le voit, Joinville est peintre, au milieu de toutes ses inexpériences premières, il a un sentiment vif qui le sert souvent avec bonheur, et il montre, comme écrivain, de ravissants commencements de talent.
Orateur, homme de discussion et de persuasion autant que guerrier, il y a tout un côté bien important de son talent et de son rôle qui pour nous a disparu.
Lainé et son égal à l’entrée de la carrière, signalé comme lui à l’attention publique et aux honneurs du nouveau régime par le même acte de résistance au régime précédent, il sent bien vite quelle destinée différente ont faite à son ami ses talents d’orateur, et quelle disproportion de classement il en résulte entre eux dans l’opinion ; il en souffre, il s’abandonne tout bas au découragement et prend une part de moins en moins active aux discussions de la Chambre : J’en suis puni (écrivait-il à la fin de l’année 1814) par la perte de cette considération personnelle dont je jouissais il y a un an.
Son rôle principal à la Convention fut d’être envoyé aux armées ; son bonheur fut, en échappant aux cruelles mesures du dedans et aux luttes fratricides qui se réglaient à coups d’échafaud, d’être, pendant ce temps-là, à combattre l’ennemi du dehors, sur le Rhin, à Mayence, ou le royalisme en Vendée, et de montrer partout, avec un courage intrépide, le tact, le coup d’œil et les talents d’un homme de guerre improvisé.
Comprendre une situation, recueillir les influences éparses autour de lui et les diriger vers un point auquel il était de leur intérêt d’arriver, c’était là son talent particulier, Mais soutenir une lutte longue et prolongée, intimider et dominer les partis en lutte, cela dépassait la mesure de ses facultés, ou plutôt de son tempérament calme et froid31. » Il fut heureux d’échapper le plus tôt possible aux ennuis de sa situation à l’intérieur en prenant en main le jeu diplomatique et en allant représenter la France au congrès de Vienne.
Quand son esprit rentrait dans cette large sphère de discussion et qu’il échappait à ses misères intestines, il retrouvait vigueur, netteté, et une sérénité incontestable ; son talent facile se déployait.
Caliste, qui avait gardé ce nom pour avoir débuté au théâtre dans The fair Penitent, vendue par une mère cupide à un lord, était promptement revenue au repentir, et à une vie aussi relevée par les talents et la grâce qu’irréprochable par la décence.
À talent égal, le son que rend l’émotion du bien et du beau est mille fois plus intime et plus sonore que le son qu’ils tirent des passions légères ou mauvaises de l’homme ; plus il y a de Dieu dans une poésie, plus il y a de poésie, car la poésie suprême, c’est Dieu.
Les talents initiateurs de MM.
Sans parler d’Ibsen dont le génie étranger ne nous est sensible que par un effort quasiment archéologique, les talents initiateurs de MM.
Il faut maintenir toutefois « que l’époque des dissertations et des mémoires n’est pas encore venue pour l’Inde, ou plutôt qu’elle est déjà passée, et que les travaux des Colebrooke et des Wilson, des Schlegel et des Lassen, ont fermé pour longtemps la carrière qu’avait ouverte avec tant d’éclat le talent de Sir William Jones 118 ».
Il peut arriver alors que le premier né de ces ouvrages similaires ne soit pas le meilleur, qu’une idée trouvée et mal exploitée par un talent novice ou secondaire soit plus tard mise en valeur par un maître, Molière a profité chacun le sait de trouvailles pareilles.
Peu d’hommes, disait le grand Frédéric, connaissent les hommes aussi bien que Grimm, et on en trouverait moins encore qui possèdent au même degré que lui le talent de vivre avec les grands et de s’en faire aimer, sans compromettre jamais ni la franchise ni l’indépendance de leur caractère.
Un des membres de la Chambre, qui ne se distinguait par aucun autre talent supérieur, avait celui d’imiter et de contrefaire en perfection les orateurs auxquels il répondait.
Or, Montesquieu avait cet amour et ce ressort généreux en lui, et c’est par là, autant que par son talent, qu’il lui a été donné de faire un ouvrage admirable, un monument, tandis que Saint-Évremond n’a laissé qu’une ébauche supérieure.
Il lisait et écrivait continuellement pour Mme de Pompadour, qui usait de ses petits talents.
On trouverait pourtant chez Amyot, parlant en son nom, quelques pages d’une éloquence douce et de vieillard ; mais sa force, son talent est ailleurs : il n’a son génie propre que quand il est porté par un autre et quand il traduit ; il n’est original et tout à fait à l’aise que quand il vogue dans le plein courant de pensée de l’un de ses auteurs favoris.
Dans de très belles pages sur le caractère, les artifices et les talents du cardinal Mazarin, elle le représente, pendant un séjour qu’il fait à Paris (mai 1647), s’enfermant pour le travail et faisant attendre les plus grands du royaume dans son antichambre, sans qu’ils puissent pénétrer jusqu’à lui.
Le docte Foncemagne, qui s’applique à le réfuter par toutes sortes de bonnes et démonstratives raisons, n’oublia que d’y joindre l’éclat du style et du talent littéraire, chose si essentielle en France !
Mais lui, il n’est pas de cet avis : « Les facultés de l’esprit qui doivent former le génie de l’administrateur, pense-t-il, sont tellement étendues et diversifiées, qu’elles semblent pour ainsi dire hors de la domination de la langue. » En parcourant toutes les qualités qu’il jugeait nécessaire à l’administrateur des finances, il n’en négligeait aucune de celles qu’il croyait posséder lui-même, et il n’avait garde d’omettre « ce tact aussi fin que rapide ; ce talent de connaître les hommes, et de les distinguer par des nuances fugitives, plus subtiles que l’expression ; cet art de surprendre leur caractère lorsqu’ils parlent et lorsqu’ils écoutent… ».
Génération des talents nouveaux, noble groupe d’écrivains et de poètes, légion des jeunes, ô avenir vivant de mon pays !
Claires et fortes, avec tous les germes qui annoncent le grand talent, elles respirent la confiance d’un jeune intellectuel qui, parlant à sa famille, à des amis sûrs, à son ancien maître, M.
Car, sans doute, si l’on eût dépensé de ce côté la somme de travail, de talent et de génie qui a été consacrée aux sciences de la matière, la connaissance de l’esprit eût pu être poussée très loin ; mais quelque chose lui eût toujours manqué, qui est d’un prix inestimable et sans quoi le reste perd beaucoup de sa valeur . la précision, la rigueur, le souci de la preuve, l’habitude de distinguer entre ce qui est simplement possible ou probable et ce qui est certain.
Ici viennent à nous encore, comme des précurseurs du Dante, ou du moins comme des initiateurs de la langue qu’allait parler son génie, ces poëtes franciscains dont un rare talent de nos jours, un éloquent érudit, a retrouvé d’heureux échos.
Leurs bonnes grâces étaient le prix suprême ambitionné par la valeur et par le talent. […] On aurait peine à se figurer chez nous, où le sentiment de la beauté est le partage d’un si petit nombre de personnes, l’exquise sensibilité de la population florentine pour les arts, et son enthousiasme pour le talent. […] On a beaucoup trop dit que la paix fait fleurir les arts ; que les temps calmes, que les gouvernements réguliers favorisent l’éclosion des talents. […] L’émotion était instantanée ; l’intérêt pour les personnages, l’adoration pour les divinités représentées, se confondaient avec l’enthousiasme pour le talent qui les figurait aux yeux. […] Les suites de cette première confession publique sont pour Gœthe comme pour Dante, tout à la fois le soulagement du cœur qui s’est épanché et l’exaltation du talent qui s’est fait connaître.
Je ne veux certes pas dire par là que la probabilité des opinions dépende uniquement du talent de ceux qui les soutiennent : elle n’en dépend que dans une certaine mesure. […] Mais voici la différence, — et c’est peut-être une de ces différences qui mettent un abîme entre le talent et le génie, — Racine est simple et Marivaux ne l’est pas. […] Il n’attend pas, pour se mettre à l’œuvre, qu’une exception ait posé devant lui ; c’est assez de la société qui l’entoure, du petit monde où il vit et qu’il aime ; il a du talent, de la finesse et de la bonté : que faut-il davantage ? […] Et les plus sincères admirateurs de son talent aimaient mieux, comme Malesherbes, l’admirer de loin que de près. […] Malheureusement, les grands talents et les grands succès ne font pas le même effet sur toutes les âmes.
Pierre Clémenceau, sculpteur de grand talent, est un artiste du genre passionné, et un honnête homme du genre sérieux. […] C’est de la gloire et du talent d’un Daudet, d’un Zola, d’un Bourget ou d’un Maupassant qu’il vaudrait la peine d’être jaloux. […] Bergerat a beaucoup de talent, d’esprit et de crânerie, et, quand il se dit incompris et méconnu, on a peur d’être un sot. […] Paulus n’ait, pour talent, que sa voix, sa tête, son assurance et l’extravagance de sa mimique. […] C’est déjà une loterie que le talent, c’est une loterie que la célébrité.
Mais, naturellement, dans cette polémique, Rousseau rétorque mieux qu’il n’est rétorqué, parce qu’il a plus de talent. […] Rien de plus sincère, je dois le dire, que notre bienveillance pour sa personne et que notre estime pour ses talents. […] Il nous est arrivé à tous d’être particulièrement gentils pour un confrère de talent à qui nous savions un sale caractère.) […] Je me figure qu’ils se disaient simplement : — Voilà un homme bizarre, mais d’un beau talent. […] Il avait pour lui sa bizarrerie, sa réputation d’ours de génie, son étrange talent (et de tout temps les belles dames ont aimé avoir chez elles leur homme célèbre).
Le sonnet avait d’abord mis le talent littéraire au service d’un sentiment, mais la tendance intellectuelle prend sa revanche ensuite, reconquiert son œuvre et profite à son tour de l’influence de l’amour. […] La puissance du sentiment apparaît peut-être mieux quand le talent est moindre. […] « Je savais, dit Rousseau, pour expliquer son refus d’une place au Journal des Savants, que tout mon talent ne venait que d’une certaine chaleur d’âme sur les matières que j’avais à traiter, et qu’il n’y avait que l’amour du grand, du vrai, du beau qui pût animer mon génie. […] Un poète de talent qui est en même temps un observateur précis et un analyste lucide, M. […] Elle se retrouve chez nombre d’imbéciles et de gens très « terre à terre », et le reste du génie, c’est précisément une très forte raison, une logique supérieure, qui peut d’ailleurs rester très spécialisée, c’est-à-dire une aptitude à la synthèse mentale, instinctivement ou délibérément systématique, que l’on retrouverait aisément chez les hommes mêmes en qui l’alliance de la folie, ou des désordres psychiques en général avec le talent semble la moins douteuse, chez Jean-Jacques Rousseau, par exemple, ou chez Edgar Allan Poë.
Non que les chroniqueurs de notre époque me paraissent avoir beaucoup moins de talent que leurs devanciers. […] * * * Le talent de Jules Renard consiste avant tout dans la nouveauté de l’expression. […] Je ne parlerai pas du tout du talent littéraire de M. […] C’est que je l’ai écrit déjà, vous dis-je, et que je ne puis me répéter sans cesse, ne possédant pas le souple talent d’un Marcel Boulenger. […] Jamais pourtant l’esthétique du style par-dessus tout, du style, vêtement de l’idée plus important que l’idée elle-même, n’avait été appliquée de façon si résolue, et avec autant de talent.
Par dédain pour les qualités tempérées qui suffisent aux conditions d’une société vieillie, il disait : « Mêlez un peu d’orgueil qui empêche d’oublier ce qu’on se doit, de sensibilité qui empêche d’oublier ce qu’on doit aux autres, et vous ferez de la vertu dans les temps modernes. » Mais pour les anciens, tout en sachant en quoi nous les surpassons, il les montre bien supérieurs en énergie, en déploiement de facultés de tout genre : forcés par la forme de leur gouvernement de s’occuper de la chose publique d’en remplir presque indifféremment tous les emplois de paix et de guerre, de s’y rendre propres et de s’y tenir prêts à tout instant, de parler devant des multitudes vives, spirituelles, mobiles et passionnées : Quelle devait être, dit-il, l’explosion des talents animés, stimulés par d’aussi puissants motifs !
Je laisse ce qui n’est que singulier, et je m’en tiens au talent.
C’est ainsi que parlant plus tard du général de division Legrand sous lequel il a servi et dont il estime les sérieux talents, joints à la bienveillance pour ses inférieurs : « C’est avec vénération, dit-il, que je vais, lorsque je suis à Paris, visiter sa tombe au Panthéon.
J’admire toujours comme on rogne la part aux hommes de talent, comme on leur fait la portion congrue ; on semble pressé avec eux de conclure, on simplifie et l’on abrège : « Toi, tu n’as que de la facilité. — Toi, tu n’as pas d’élévation !
Que si les types connus et répétés vous ennuient, rien n’est épuisé ; l’imagination et l’observation sont deux sources ; ayez vos types tout neufs, ayez-les à vous, et, par votre talent, faites-les aussitôt vulgaires ; opérez le miracle du poète et dites-leur : Vivez et marchez !
Ce fut comme un enchaînement et une déduction logique que le talent exécuta dans l’art.
En rendant à Mme Champagneux le dépôt qu’elle lui avait confié, il lui exprima le vœu que ce monument authentique d’esprit, de talent et de courage, fût conservé un jour dans un établissement public, et on lui doit ainsi d’avoir suggéré l’idée première de ce legs assez récent qui a été fait à la Bibliothèque Impériale.
Mais l’auteur de la Chercheuse d’esprit n’avait jamais cherché qu’à vivre ; il était cynique ; et, quoiqu’il eût du talent, il dédaignait toute espèce de réputation : c’était fort commode à l’abbé de Voisenon, qui précisément, enchanté par Mme Favart, était parvenu à l’ensorceler au point de lui faire adopter quelques-unes de ses idées et tous ses scrupules, de manière que, lorsqu’on était devenu familier dans la maison, voici le plaisir que Mme Favart vous procurait.
Sainte-Beuve dicta un jour cette note : « Ce que c’est que de manquer de littérature, même lorsqu’on est un homme d’un grand talent !
En faisant ici la part de ce qu’il y a de spontané et d’évolutif dans ce progrès du talent, nous croyons qu’il nous est permis de noter une influence heureuse du dehors.
On y trouve tous les dialectes, depuis le pur picard jusqu’à je ne sais quel jargon italianisé, toutes les sortes de tons et d’esprits comme tous les degrés du talent.
Mais Du Ryer, Tristan, Rotrou ont vraiment du talent : il est à noter pourtant que toutes leurs meilleures pièces sont postérieures au Cid.
Celui-ci, avec « son beau visage fatigué et hautain », a tous les talents et compose des valses et des symphonies « d’un mérite tout à fait supérieur ».
Le plus ordinairement Marguerite n’a que le talent d’écrire d’un esprit bien doué, préparé par beaucoup de culture, mais auquel le génie a manqué.
Si vous ne vous résignez pas à dire des mensonges depuis l’ouverture de vos portes jusqu’à leur fermeture, ou si vous ne choisissez pas des commis qui aient le talent et l’audace d’en dire, vous crèverez de faim, etc., etc. »« Je défie tous les membres de la société bourgeoise, qu’ils soient riches ou pauvres, qu’ils soient capitalistes ou prolétaires, de raconter leur histoire économiques, leurs stratagèmes et leur tactique financière publiquement sans rougir » (p. 484).
Quelle que soit mon estime pour le talent de M.
Il a vu le lien étroit qu’il y a entre la vertu et le talent ; il a vu que la vertu est un genre charmant de littérature.
De même, dans leurs collèges ils enseignent à leurs élèves toutes les élégances, ils font jouer des tragédies, ils encouragent et cultivent le talent d’écrire en vers latins, parfois même en vers français ; ce sont d’habiles, professeurs de rhétorique.
Berlioz, meurt, honni : et tout à coup l’on s’aperçoit que c’est lui le victorieux ; Manet s’en va, dans la force de son talent, et, en réalité, c’est M.
Il le célèbre et il l’entretient ; il l’adore et il le dessert ; il lui sacrifie tout, son temps, sa renommée, son talent, qu’il dépense, pour le nourrir, en travaux vulgaires, tout, jusqu’à son amour pour Frédérique, une jeune et belle orpheline recueillie dans l’atelier fraternel, qu’il fiance lui-même à son ami, dès qu’il s’aperçoit qu’elle en est aimée.
En un mot, on ne connaît jamais mieux un esprit, un talent, un caractère ou un amour-propre, que quand on l’a vu quelque temps à ce jeu-là.
Il serait facile de trouver de plus grands exemples que Mme de Caylus, qui n’a écrit qu’à peine et par rencontre ; mais ces exemples prouveraient autre chose, quelque chose de plus que ce que j’ai en vue, et la délicatesse dont je voudrais donner l’idée s’y compliquerait en quelque sorte du talent même de l’écrivain.
Elle nous a rendu à merveille le talent de bien dire, qui était particulier à la duchesse du Maine, et qui tout d’abord attira son attention : Je la lui donnais tout entière et sans effort, a dit Mlle de Launay ; car personne n’a jamais parlé avec plus de justesse, de netteté et de rapidité, ni d’une manière plus noble et plus naturelle.
Au bien que j’en ai ouï dire, personne n’avait plus que lui les qualités éminentes et le talent de la guerre.
Il tenait du duc d’Orléans, futur régent, du marquis de La Fare, de Chaulieu et des habitués du Temple, du grand prieur de Vendôme chez qui, plus tard, Voltaire jeune le rencontrera au passage : il lui suffisait, en tout état de cause, de rester digne de ce qu’il appelait la société des honnêtes gens, mais ce mot commençait à devenir bien vague ; et Saint-Simon, plus sévère et qui pressait de plus près les choses, disait de lui : « C’était un cadet de fort bonne maison, avec beaucoup de talents pour la guerre, et beaucoup d’esprit fort orné de lecture, bien disant, éloquent, avec du tour et de la grâce, fort gueux, fort dépensier, extrêmement débauché (je supprime encore quelques autres qualifications) et fort pillard. » Ce qui s’entrevoit très bien dans le peu qu’on sait du rôle du chevalier de Bonneval dans ces guerres d’Italie, c’est qu’il n’était pas seulement né soldat, mais général : il avait des inspirations sur le terrain, des plans de campagne sous la tente, de ces manières de voir qui tirent un homme du pair, et le prince Eugène dans les rangs opposés l’avait remarqué avec estime.
Ici, il est permis de dire que, malgré les connaissances scientifiques très étendues du maréchal et ses talents d’exécution, il aurait eu besoin de quelque contrepoids et de quelque contrôle.
Au reste, comme talent, la pleine opposition va bien à Carrel ; l’opposition ambiguë le gênait et lui imprimait souvent une contrainte visible.
Cosnac reparut à la Cour, se distingua par son zèle et son talent à l’Assemblée du clergé de 1682, y fut un des premiers auxiliaires du très habile et très politique archevêque de Paris, Harlay de Champvallon, et dès lors Louis XIV compta sur lui en toute rencontre : « Il faut le garder pour un grand poste », disait-il à M. de Harlay.
Je suppose, pour ne pas être injuste, qu’on a présent à l’esprit Le Siècle de Louis XIV, l’Histoire de Charles XII, ce qu’il y a d’inspiration chevaleresque dans la tragédie de Tancrède, l’Épître à Horace, Les Tu et les Vous, Le Mondain, Les Systèmes, les jolies stances : Si vous voulez que j’aime encore… ; je suppose qu’on a relu, il n’y a pas longtemps, bon nombre de ces jugements littéraires exquis et naturels, rapides et définitifs, qui sont partout semés dans la correspondance de Voltaire et dans toutes ses œuvres, et, bien assuré alors qu’il ne saurait y avoir d’incertitude sur l’admiration si due au plus vif esprit et au plus merveilleux talent, je serai moins embarrassé à parler de l’homme et à le montrer dans ses misères.
Taine au rang d’un moyen d’enquête sociale et employée ainsi, avec une incontestable hauteur de talent et de science, à l’étude de tout le développement de l’Angleterre, elle nous paraît atteindre, par une série de vues nouvelles, à l’un des points culminants de toute la série des sciences de la vie, qui ne forment en définitive par leur but et leur union qu’une immense anthropologie.
Il est remarquable que la France a perdu, sur la fin du dernier siècle, trois beaux talents à leur aurore : Malfilâtre, Gilbert et André Chénier ; les deux premiers sont morts de misère, le troisième a péri sur l’échafaud.
Ce ne sont pas les morceaux de passion violente qui marquent dans l’acteur qui déclame le talent supérieur, ni le goût exquis dans le spectateur qui frappe des mains.
Les littérateurs prononcèrent avec unanimité qu’il n’avaient aucun talent ; nous osâmes, le peintre et moi, nous faire mépriser en traitant Le Feul chef-d’œuvre.
L’esprit philosophique de Voltaire a frappé de stérilité une composition déjà aride par elle-même ; car il ne faut pas qu’un homme de talent s’imagine qu’il puisse créer la poésie, s’il ne la trouve pas toute faite.
Aurait-on, pour la retracer et en ressusciter les personnages, le talent de tous les Tintoret et de tous les Velasquez de la terre, l’Histoire est plus pourtant qu’une galerie de tableaux menteurs et stupides.
De même, lorsqu’on décrète que tous les citoyens seront « également admissibles à toutes dignités places et emplois publics », on efface, — pour reprendre la formule de la Déclaration des Droits, — toute distinction autre que « celle de leurs vertus et de leurs talents » ; mais c’est précisément à seule fin de mettre cette distinction en relief qu’on veut effacer toutes les autres.