La Comédie Française, elle-même, avait écarté Rostand à ses débuts pour la même raison qui la faisait délaisser de plus en plus nos vieux tragiques qui ont le tort, à ses yeux, de ne pas « faire recette ». […] Loubet dont les yeux rieurs et la barbe fleurie reflètent, à qui le contemple avec complaisance, la bonhomie de Henri IV, le populaire instituteur de la « poule au pot ».
» Willy, élève de Stanislas qui oublie ses condisciples vieillis pour Claudine « petit pâtre bouclé » et qui, devant l’objectif du photographe, ne boucle plus la boucle d’un p’tit jeune homme que si c’est Polaire qui offre ses grâces postérieures ; Willy qui ne sut jamais voir aux yeux d’autrui que ses propres vices, m’accusera, j’espère, d’avoir cédé à une nostalgie perverse : je viens de relire deux de ces volumes de contes où Mendès, fameux par ses imitations, se laisse saisir lui-même, fuyant et onduleux seulement comme une amuseuse qui s’amuse. […] Qu’on dise tout le mal qu’on voudra de l’École avec un grand E : il est certain que les fantômes qui sortent de ce monument savent prendre partout leur bien, je veux dire ce qu’il faut pour, devant des yeux naïfs, se matérialiser.
Se moquant également de l’usage reçu, de l’inutilité & des inconvéniens d’une trop grande innovation, & de l’habitude des yeux qu’un pareil changement blesse, il ne s’est embarrassé que d’établir ses idées singulières, de réaliser ses rêves sur le néographisme, de mettre un accord parfait entre l’orthographe, & la prononciation. […] Il n’est pas douteux qu’il ne faille marquer aux yeux les différences que l’on ne peut faire sentir à l’oreille.
L’homme parlant a pu dire à l’homme comprenant : Convenons entre nous que tel signe signifiera aux yeux ou à l’esprit telle chose ou telle idée, et qu’en lisant ce signe sur le sable, sur la pierre, sur le papyrus, sur l’écorce, sur le vélin, sur le papier, nous croirons entendre tel son, voir telle image, concevoir telle idée. […] Un cours libre de littérature doit relever et non ravaler à ses propres yeux l’âme humaine.
Croyez-vous que, quand vous auriez assemblé quelques-uns de ces soldats autour de la cuirasse brisée de Pélopidas, les yeux attachés sur elle, cela n’aurait pas parlé davantage ? […] Il n’y avait pas là un seul homme qui songeât à la perte que fesait la patrie, et qui parût tourner ses yeux, ses bras, ses regrets vers elle ?
Sans saisir les principes generaux, il se contente de copier ce qu’il a dessous les yeux. […] Si les peintres et les poëtes ont le malheur de faire leur apprentissage sous les yeux du public, il ne faut pas du moins que le public mette en ligne de compte les fautes qu’il leur a vû faire, lorsqu’il les définit après qu’ils sont devenus de grands artisans.
C’était un homme probe et cultivé, de naissance médiocre, mais de mœurs élevées, placé par la fortune de son génie en dehors de toutes les prétentions et de toutes les passions de son temps, ayant le pied, — un pied digne du talon rouge, — et l’œil, — un œil capable de tout embrasser, — dans les deux sociétés qu’on nommait alors la cour et la ville, et que sa vocation était d’observer et de reproduire.
Il a copié fidèlement et intégralement le Journal de Louis XVI, et il l’a planté sous les yeux du public dans toute son authenticité, étonné lui-même de n’avoir pas été devancé par quelqu’un dans cette besogne si facile ; car bien des gens étaient passés par là ! […] Pour les uns, Louis XVI, aux gros yeux de bœuf, au front fuyant, à la lourde encolure, n’a guères plus que la stupidité de la victime, destinée, dès le début de son règne, à être l’hécatombe de la royauté.
IV Mais, encore une fois, si cette biographie d’un homme qui a droit, sinon à la statue en pied de l’histoire au moins à la médaille de la biographie, si tout ce travail sur François Suleau est très élevé de renseignement, de vue et d’accent, et si l’écrivain qui l’a publié y a montré des aptitudes et des facilités vers l’histoire, grave ou tragique, telle qu’elle est le plus généralement conçue et réalisée par MΜ. les historiens ordinaires, je ne m’en opiniâtre pas moins à croire, ainsi que je l’ai dit au commencement de ce chapitre, que le vrai génie spécial de l’auteur Ombres et vieux murs, que son originalité la plus vive, serait, son genre d’esprit donné, la mise en scène ou en saillie de l’élément comique ou ravalant qui ne manque pas dans l’histoire, et qu’il saurait fort bien en dégager, ainsi que l’attestent les excellentes variétés historiques qu’il nous a mises sous les yeux, titres réveillants en tête : La Lanterne, Le Rhum et la Guillotine, Le Lendemain du massacre, etc., tous épisodes ou mosaïques d’anecdotes dont il faut juger par soi-même en les lisant et dont l’analyse, d’ailleurs, ne donnerait qu’une très imparfaite idée. […] Comme l’histoire est en bas aussi bien qu’en haut et qu’elle est un informé immense que personne n’a le droit de circonscrire sous aucun prétexte que ce soit, appliquée à toutes les époques, même à celles qui paraissent le plus correctes à l’œil nu, cette manière d’étudier et d’écrire l’histoire serait d’un intérêt très vif ; car l’homme le plus ferré de prétentions est souvent bâti sur le grotesque comme sur pilotis !
I Je viens de lire ces deux volumes, y cherchant… ce qui n’y est pas, et j’en sors, comme on sort de la mer, avec des gouttes d’eau salée dans les yeux ; car c’est une mer de mots que ces deux volumes : des mots, des mots, des mots ! […] Intellectuellement orateur, mais empêtré dans un corps qui ne l’était pas, — car le corps, c’est la moitié de l’orateur, — sagace comme le bel œil noir, un peu couvert, de son portrait, le dit, mais lourd, épais et gauche de tournure et de mains, comme le dit son portrait encore, cet indigéré de discours accumulés au fond de sa pensée et qui ne passaient pas assez vite dans ses organes pour qu’il les dardât de la tribune à ses adversaires, il les expectorait dans ses pamphlets, et Dieu sait avec quelle abondance, quelle facilité, quel jet de salive !
Est-ce parce qu’elle avait de son vivant les yeux de Junon, qui sont des yeux de vache dans Homère, qu’elle dit qu’elle pleure, à chaque instant, comme un veau, quand elle ne pleure pas comme un âne, qui est sa manière de pleurer lorsqu’elle lit le Jocelyn de Lamartine ?
Quand le génie de l’invention s’éteint, le génie de l’histoire s’éveille, et c’est ce génie de l’histoire qui devra, dans un temps donné, ramener avec respect les yeux des philosophes officiels sur les idées et les systèmes honorés le plus longtemps de leur mépris. […] Avec son style naturellement sans couleur, ce style blanc et doux que l’abstraction a blanchi encore, il n’a fait aucun mal aux yeux des hommes à conserves qui avaient à le juger, et ils ont tous apprécié infiniment cette flanelle… Certainement, pour manquer le prix, il fallait s’y prendre de toute autre manière.
Il semble avoir un œil qui grossit l’infiniment presque rien et un œil qui réduit à presque rien l’infiniment grand.
Ce progrès, évident à toute Critique attentive et profonde, ne consiste pas seulement dans cette ciselure de l’expression qui frappe facilement tous les yeux, même les faibles, et qui a introduit dans toutes les appréciations de la Critique contemporaine cette idée commune, qui a l’ubiquité des idées communes : M. […] Quelques-uns peuvent se ressentir de l’ancienne inspiration, trop ardemment matérielle, du poète, et, comme cette merveilleuse pièce du Contralto, effrayante de difficulté, avoir un risqué terrible et faire baisser les yeux à la Rêverie troublée, mais ce ne sera qu’un frisson qui passe.
Si son nom nous était jamais passé sous les yeux dans ce tourbillon de journaux, de revues et de livres dont la pauvre Critique a quelquefois la berlue, il était bien passé. […] Par l’aube éternelle guidée, Entrevoyant d’autres beautés, L’âme, au sort commun décidée, S’acclimate aux vives clartés Et se fait à la grande idée, Voit la terre avec d’autres yeux, Se prépare au voyage étrange, Laisse à tout d’intimes adieux, S’observe, s’écoute, se range, Se tourne souvent vers les cieux ; Se concentre dans elle-même Laissant déborder par moments Dans l’amitié de ceux qu’elle aime Les précurseurs épanchements De la fin prochaine et suprême !
Son volume n’est pas une promenade, le lorgnon dans l’œil, et avec le caban de Chateaubriand sur de la poésie rhumatismale ; ce sont les tablettes animées et fidèles d’un antiquaire et d’un lettré qui ne se concentre pas dans les lettres, mais qui voit (pourquoi est-ce de si loin ?) […] À ses yeux, c’est un de ces points où toute la vie d’une nation reflue, quand l’activité nationale, fatiguée de chercher en vain la sève qui lui manque, s’efforce de se répandre au dehors et d’atteindre des puissances nouvelles.
Nous suivons Socrate de l’œil ; nous ne perdons pas un de ses mouvements, pas un de ses discours ; nous le voyons quand on lui amène ses deux enfants, quand il donne ses derniers ordres pour sa maison, quand il fait éloigner les femmes ; quand ses amis mesurent avec effroi la course du soleil, qui bientôt va se cacher derrière les montagnes, et quand la coupe fatale arrive, et lorsqu’avant de la prendre, il fait sa prière au ciel pour demander un heureux voyage, et l’instant où il boit, et les cris de ses amis dans ce moment, et la douceur tranquille avec laquelle il leur reproche leur faiblesse, et sa promenade en attendant la mort, et le moment où il se couche sur son lit dès qu’il sent ses jambes s’appesantir, et la mort qui monte et le glace par degrés, et l’esclave qui lui touche les pieds que déjà il ne sent plus, et sa dernière parole, et son dernier, et son éternel silence au milieu de ses amis qui restent seuls. […] Juges qui condamnez les hommes, vous pouvez immoler un sage et flétrir un instant l’homme que la calomnie poursuit, le glaive est dans vos mains ; vous frappez, mais l’œil inévitable du temps vous observe et vous juge.
On voit combien ce nom et le souvenir d’une ancienne grandeur en imposaient encore : « L’orateur, dit-il, craint de faire entendre devant les héritiers de l’éloquence romaine, ce langage inculte et sauvage d’au-delà des Alpes, et son œil effrayé croit voir dans le sénat les Cicéron, les Hortensius et les Caton assis auprès de leur postérité pour l’entendre. » Il y a trop d’occasions où il faut prendre la modestie au mot, et convenir de bonne foi avec elle qu’elle a raison ; mais ici il y aurait de l’injustice : l’orateur vaut mieux qu’il ne dit ; s’il n’a point cet agrément que donnent le goût et la pureté du style, il a souvent de l’imagination et de la force, espèce de mérite qui, ce semble, aurait dû être moins rare dans un temps où le choc des peuples, les intérêts de l’empire et le mouvement de l’univers, qui s’agitait pour prendre une face nouvelle, offraient un grand spectacle et paraissaient devoir donner du ressort à l’éloquence : la sienne, en général, ne manque ni de précision, ni de rapidité. […] L’orateur parle avec éloquence de tous les maux que nos ancêtres ont soufferts sous ce tyran ; il peint les brigandages et les rapines, les riches citoyens proscrits, leurs maisons pillées, leurs biens vendus, l’or et les pierreries arrachées aux femmes ; les vieillards survivant à leur fortune ; les enfants mis à l’enchère avec l’héritage de leurs pères ; le meurtre employé comme les formes de justice, pour s’enrichir ; l’homme riche invoquant l’indigence, pour échapper au bourreau ; la fuite, la désolation ; les villes devenues désertes et les déserts peuplés ; le palais impérial, où l’on portait de toutes parts les trésors des exilés et le fruit du carnage ; mille mains occupées jour et nuit à compter de l’argent, à entasser des métaux, à mutiler des vases ; l’or teint de sang, posé dans les balances, sous les yeux du tyran ; l’avarice insatiable engloutissant tout, sans jamais rendre, et ces richesses immenses perdues pour le ravisseur même qui, dans son économie sombre et sauvage, ne savait ni en user, ni en abuser ; au milieu de tant de maux, l’affreuse nécessité de paraître encore se réjouir ; le délateur errant, pour calomnier les regards et les visages, le citoyen qui de riche est devenu pauvre, n’osant paraître triste, parce que la vie lui restait encore, et le frère, dont on avait assassiné le frère, n’osant sortir en habit de deuil, parce qu’il avait un fils.
Mais bientôt l’élévation morale reparaît dans le vœu du chrétien, pour que le nouveau jour qui lui est accordé passe irréprochable, que la langue n’y fasse pas de mensonge, que la main, que les yeux n’y pèchent pas. […] Recueillie dans le sein du bienheureux patriarche, sera-t-elle, comme Lazare, entourée de fleurs, sous les yeux du riche consumé par les flammes ?
L’importance bruyante du personnage attire aujourd’hui tous les yeux ; mais quand on a fait en somme plus de bruit que de bien, il n’en reste pas grand chose. […] Plus paresseux au fond que vraiment curieux, il ne veut apprendre que ce qu’il sait, entendre que la musique qui chante dans sa mémoire, voir que ce que ses yeux ont cent fois rencontré. […] Il faut nous jeter dans la mêlée, veiller, courir, avoir l’œil à tout, ne point manquer le coche et saisir au vol l’occasion. […] Max Nordau appelait « l’idiot belge »42, est devenu, aux yeux des jeunes gens, une manière de Shakespeare. […] Songez à l’obsession d’une ligne, d’un mot qui, tous les jours, vient frapper nos yeux !
Des larmes humectèrent ses yeux et l’amie pleura. […] Or, voilà justement l’essence du tragique : l’insolubilité des conflits qu’il évoque à nos yeux. […] Supprimez la musique de ses drames, ceux-ci resteraient-ils ce qu’ils sont à nos yeux ? […] La première chose que nous offre son art est une loupe ; on regarde au travers, on ne se fie plus à ses yeux. […] Qui sait quel serait l’effet qu’il ferait aux yeux d’un juge supérieur de goût ?
La prose et les vers réalistes, qui font sur les yeux l’effet prolongé de la couleur rouge, passent sur les lèvres comme des cailloux. […] À l’aide de ce modèle tout intérieur, de cet idéal, l’artiste corrige à chaque instant ce qu’il a sous les yeux, au lieu de le calquer servilement. […] Le modèle que l’art humain a sous les yeux est invariable, comme l’invisible, comme l’idéal, dont ce modèle n’est lui-même qu’une copie. […] Aux yeux des peuples enfants, cette forme était Dieu lui-même. […] La musique a la prétention tantôt de parler aux yeux, tantôt de s’adresser à la raison.
COIGNET, c’est à ce volume-ci qu’il attacherait son nom ; c’est ici qu’il lui dirait quelle place exceptionnelle elle tenait à ses yeux parmi les femmes qui écrivent.
Si, trop haut s’élevant, il adore un visage Adorable par force à quiconque a des yeux. […] Ton front n’est point cruel, ton œil n’est point perfide. […] À la vérité, ce qui faisait à ses yeux la force de sa Politique est ce qui en fait aujourd’hui la faiblesse pour nous. […] … N’importe le motif, mais, à ses yeux, les opinions communes ont contre elles, en principe et par définition, toutes les chances d’être les plus fausses. […] Il cherche et il trouve sous nos yeux, à nos pieds, des faits d’une ressemblance parfaite avec ces phénomènes célestes que des millions de demi-diamètres de la terre séparent d’elle.
Je vis le point d’or qui court dans ses yeux se fixer. […] Une toile futuriste invite l’œil à la cinématographier, comme une toile impressionniste invite l’œil à la recomposer avec des taches ; mais l’œil, si j’ose dire, n’en fait qu’à sa tête : s’il est jusqu’ici (je parle du mien) consentant aux invites de l’impressionniste, il ne veut rien savoir devant celles du futuriste, et il a beau tourner sa manivelle, le cinéma ne marche pas. […] Giraudoux cristalliseront toujours autour de sensibilités enfantines et féminines, et lui qui, durant la guerre fut, à ce que disent les autres, un fameux homme, un poilu vraiment et beaucoup là, n’écrira que pour tenir sous des yeux neufs de lycéen des visages fins, lumineux, pleins de deux yeux ouverts où se font., des voyages infinis. […] Mais pour les yeux de l’âme comme pour les yeux du corps la lumière existe en fonction de l’ombre, en fonction des ténèbres. […] Dès que la morte a fermé les yeux, il s’empare avec plus d’autorité des deux vivants.
Sans doute la nature se moque effrontément de nous en faisant briller à nos yeux dans notre postérité le mirage d’une éternelle survivance ; mais il faut bien que la nature dupe l’humanité pour la faire collaborer à ses fins. […] Mettez sous les yeux du plus savant docteur en physique, mais qui n’est qu’un savant docteur, une pomme qui tombe, elle ne sera pour lui qu’une pomme qui tombe. […] Il se connaît lui-même aussitôt qu’il existe, il n’a pas besoin d’un maître pour lui ouvrir les yeux et diriger ses premiers pas. […] Seuls ils gardent à ses yeux toute la responsabilité de leur œuvre. […] À toutes les époques, on l’aurait vu regarder derrière lui, étant né avec des yeux tournés vers le passé et la moqueuse nature lui ayant fait enfourcher à rebours son pauvre Pégase, qu’il tient par la queue.
Encore les libretti d’opéra n’ont-ils pas de disparates ; ils évitent tout ce qui pourrait choquer l’imagination ou les yeux ; ils sont faits pour des gens de goût qui fuient toute laideur et toute lourdeur. […] Tout d’un coup, au milieu des bâillements qu’excitaient ces épîtres, les yeux s’arrêtent. […] Il vient la face empourprée, les yeux riants ; que les hautbois résonnent ! […] Tout à coup les sons de la lyre s’enflent ; ils s’enflent plus haut ; ils grondent comme un tonnerre ; le roi assoupi se redresse égaré, les yeux fixes. « Vengeance ! […] et ces étincelles qui jaillissent de leurs yeux !
Jacques des Gachons Lorsque ce trouvère quitta sa viole, douce à vêtir les rêves de précises couleurs, il oublia toute naïveté, et ses yeux virent le monde, hier dédaigné pour les envols paradisiaques.
La jeune fille a perdu sa finesse et sa grâce ; elle a un œil poché, et cette guirlande qui l’encadre l’alourdit.
On sait que le Maréchal Ferrant & le Maître en Droit ont eu quelques succès ; foible avantage aux yeux du vrai talent, qui dédaigne de telles Productions, ou qui les éleve au dessus de leur petite sphere, quand il se mêle de les traiter.
Rien de cela, mais à la place, une coiffure de tête élégante, un ajustement recherché, toute l’afféterie d’une femme du monde à sa toilette, et des yeux pleins de volupté, pour ne rien dire de plus.
Les yeux sont durs, mais peut-être ressemblent-ils.
Si ce que je rapporte n’était d’une notoriété publique en Perse, je ne l’aurais jamais pu croire, parce que les sérails sont des lieux si sacrés pour les Persans, particulièrement celui du roi, que c’est une impudence punissable de tourner seulement les yeux vers la porte. […] Aussitôt, des gardes apostés se jetèrent sur les proscrits, et, à coups de hache, les mirent en pièces sur les beaux tapis d’or et de soie dont la salle était couverte, aux yeux du prince et de toute la cour. […] La jeune noblesse et tous ceux qui n’ont pas droit de séance sont debout au bas du placitre avec la musique ; et les officiers servants sont debout dans le jardin, à quelques pas du placitre, sous les yeux du roi. […] Ces pavillons sont de différente construction et figure ; mais ils sont presque tous d’égale grandeur et tous peints et dorés fort matériellement, ce qui offre aux yeux l’aspect le plus éclatant et le plus agréable. […] Mais, lorsqu’il vit que tous ceux de l’assemblée lui déféraient (car en effet cet honneur, à cause de sa dignité, lui appartenait), et qu’applaudissant à son discours, et levant les yeux au ciel, ils ne faisaient que répéter le Bism allah’ (Bismîllah), Ainsi soit-il !
Ni ses yeux, ni ses oreilles, ni son intelligence, ne percevront jamais le monde divin du Beau. […] Aucun, s’il n’est frappé de démence, ne peut nier la lumière que ses yeux ont une fois contemplée. […] Le regard qu’il jette sur la nature est large et profond ; son œil saisit le détail infini et l’ensemble des formes, des couleurs, des jeux d’ombre et de lumière. […] L’œil du poète plonge en des cercles infernaux encore inexplorés, et ce qu’il y voit et ce qu’il y entend ne rappelle en aucune façon les romances à la mode. […] Aussi, le grand Poète saisit-il d’un œil infaillible le détail infini et l’ensemble des formes, des jeux d’ombre et de lumière.
Ses dieux ont besoin d’un nuage pour se dérober aux yeux. […] C’est l’existence de la troisième unité, l’unité d’action, la seule admise de tous parce qu’elle résulte d’un fait : l’œil ni l’esprit humain ne sauraient saisir plus d’un ensemble à la fois. […] Œdipe, couvert du sang qui dégoutte encore du reste de ses yeux qu’il vient d’arracher, se plaint des dieux et des hommes. […] L’histoire à ses yeux est de mauvais ton et de mauvais goût. […] On consentira, pour se rendre compte d’un ouvrage, à se placer au point de vue de l’auteur, à regarder le sujet avec ses yeux.
Nous ne faisons pas un pas dans la rue sans nous refuser le sol où nos pieds s’appuient, les maisons qui passent sous notre regard, le but que notre œil aperçoit devant lui. […] Parmi les objets matériels que je possède, la plupart me sont simplement, utiles : j’en fais usage sans songer à leur origine ; quelques-uns sont « des souvenirs » ; chaque fois qu’ils frappent mes yeux, je les reconnais. […] Venez, fuyez l’aspect de ce climat sauvage, Qui ne parle à vos yeux que d’un triste esclavage. […] C’est le contexte précis de la citation de Egger : « Mme de Rênal ne pouvait fermer l’œil. […] Elle ne pouvait distraire sa pensée du bonheur de sentir Julien couvrir sa main de baisers enflammés. […] A nos yeux, l’existence de la parole intérieure n’est qu’une explication partielle de ces locutions ; nous avons négligé les exemples où l’autre cause paraît la principale.
Horace Valbel Parmi ses chansons les plus connues, je citerai : Les Joyeux Fêtards, la Cause philanthropique, Lamentations d’un patineur, Nos concierges, Soireux, Repos à la mer, et au nombre de ses chansons d’actualité, toutes marquées au bon coin de l’ironie que, d’ailleurs, sa physionomie, son œil rieur et narquois indiquent à première vue… À un volume : Chansons rosses.
La main touchait une surface plane, et l’œil toujours séduit voyait un relief ; en sorte qu’on aurait pu demander au philosophe de ces deux sens dont les témoignages se contredisaient, lequel était un menteur.
Delmare, se montrèrent de prime abord comme d’attachantes nouveautés qui réalisaient nos propres réminiscences, et que plus d’un profil entrevu, plus d’une aventure ébauchée, les situations qu’on rêve, celles qu’on regrette ou qu’on déplore, se ranimèrent pour nous et se composèrent à nos yeux dans un émouvant tableau, autour d’une romanesque, mais non pas imaginaire créature, alors on s’est laissé aller à aimer le livre, à en dévorer les pages, à en pardonner les imperfections, même les étranges invraisemblances vers la fin, et à le conseiller aux autres sur la foi de son impérieuse émotion : « Avez-vous lu Indiana ? […] Que de sourires enchanteurs, que de larmes faciles et hypocrites, dont celui qui les prodigue est dupe jusqu’à un certain point, et qui cachent à tous les yeux, même aux siens, un fonds hideux de personnalisme !
qu’une pensée d’elle venait droit au poëte, et je répétai encore, en effleurant cette fois son doux œil bleu : « Non ! […] Je dirai tout : oui, un baiser me plairait, un baiser plein de tendresse ; mais surtout la voir, la contempler, rafraîchir mes yeux, ma pensée, en les reposant sur ce jeune front, en laissant courir devant moi cette âme naïve ; parer cette belle enfant d’ornements simples où sa beauté se rehausserait encore, la promener les matins de printemps sous de frais ombrages et jouir de son jeune essor ; la voir heureuse : voilà ce qui me plairait surtout et ce qu’au fond mon cœur demande.
Il y a, à la vérité, un signe où elle reconnaît les grands hommes, et il n’est peut-être pas bien exact de dire que tous les objets soient égaux devant l’indifférence de sa curiosité ; Molière est mille fois plus intéressant à ses yeux que Cyrano de Bergerac, Pradon ou Boursault : « Plus un poète est parfait, dit-elle, plus il est national ; plus il pénètre dans son art, plus il a pénétré dans le génie de son siècle et de sa race ; la hauteur de l’arbre indique la profondeur des racines465. » Quoi qu’il en soit, l’école historique, je dis l’école historique idéale, à la considérer dans l’unité et la pureté de sa doctrine, annule la critique littéraire au sens où le langage a toujours entendu le mot de critique, puisqu’elle ne juge pas, ne blâme ni ne loue. […] Mais peut-être que tout à l’heure la musique de Haydn ou de Beethoven remplira vos yeux de larmes d’admiration, et me passera par-dessus la tête.
C’est l’année où, tandis que Th. de Banville jette en suprême adieu Les Occidentales et Rimes dorées, Verlaine donne Bonheur ; Stéphane Mallarmé, Pages ; Henri de Régnier, Épisodes, Sites et Sonnets ; Jean Moréas, le Pèlerin passionné ; Maurice du Plessys ; la Dédicace à Apollodore ; Laurent Tailhade, Vitraux et le Pays du Muffle ; Rodenbach, le Règne du Silence ; Stuart Merrill, Les Fastes ; Gustave Kahn, Chansons d’amant ; Emmanuel Signoret, le Livre de l’Amitié ; René Ghil, le Vœu de Vivre ; Louis Dumur, Lassitudes ; Gabriel Vicaire, À la Bonne Franquette ; Ajalbert, Femmes et Paysages ; Ernest Raynaud, Les Cornes du Faune 3, et si je ne devais m’en tenir aux poètes, je mentionnerais que c’est l’année où Maurice Barrès donne Sous l’œil des barbares et Trois stations de psychothérapie ; Léon Bloy, la Chevalière de la mort ; Huysmans, Là-Bas ; Péladan, l’Androgyne ; Rachilde, La Sanglante ironie ; Albert Autier, Vieux… 1891 ! […] » Il est vrai qu’il ajoutait : « Je n’ai jamais rien lu d’eux », ce qui pouvait passer pour une excuse aux yeux des profanes, ignorant que le philosophe contemplait toutes nos agitations du haut de Sirius.
L’œil clair et doux de ces âmes simples contemplait l’univers en sa source idéale ; le monde dévoilait peut-être son secret à la conscience divinement lucide de ces enfants heureux, à qui la pureté de leur cœur mérita un jour de voir Dieu. […] Et du fond de l’enfer, pendant qu’il était dans les tourments, il leva les yeux, et vit de loin Abraham, et Lazare dans son sein.
Il n’est pas besoin d’un œil bien exercé pour saisir la différence qui sépare la période harmonieuse et vigoureuse de Jean-Jacques du babil sémillant et coquet de Marivaux. […] L’oreille aura son tour après les yeux et le toucher.
Ses yeux furent remplis de larmes. […] A peine eut-il fermé les yeux à la lumière, que le premier soin du zélé confident de tous ses secrets fut de ménager à la tendre Héloïse le coup qu’elle alloit ressentir.
à cette loi diplomatique des convenances, plus importante, à ses yeux de diplomate, que la vérité. […] Elles ont vu, comme tout le monde, ce qui maintenant crève les yeux à tout le monde, et ce qui les lui crevait déjà de leur temps, c’est-à-dire la bataille, exaspérée partout, de la Révolution contre ce qui reste de monarchies !
Je viens de lire cette longue méditation cartésienne, faite les yeux fermés et les mains jointes avec les airs de recueillement d’un philosophe en oraison, dans l’in-pace de la conscience, dans le silence profond de la petite Trappe psychologique que tout philosophe porte en soi, pour y faire des retraites édifiantes de temps en temps et s’y nettoyer l’entendement, et, je l’avoue, je n’y ai rien trouvé qui m’éclairât d’un jour inconnu et fécond la personnalité divine que nous autres catholiques nous savons éclairer du jour surnaturel de la foi. […] » Avouez que c’est là une puissante manière de fortifier aux yeux des hommes la personnalité de Dieu !
Les premiers vers du recueil que nous avons sous les yeux sont adressés à Ponsard, et cela devait être, la sympathie n’étant jamais que l’amour du soi que l’on reconnaît chez les autres : Jeune homme fortuné de qui la muse antique N’a pas de corps secret ni de voile pudique, Dis-moi près de quel bois, au bord de quel ruisseau, Tu la surpris, baignant ses pieds polis dans l’eau, Et lorsqu’elle fuyait, confuse d’être nue, Par quels discours charmants elle fut retenue ! […] A nos yeux, dès qu’un homme édite ses œuvres de jeunesse, c’est qu’apparemment il les croit dignes de sa maturité, et c’est que le temps ne l’a pas rendu plus grand qu’elles.
La main a été plus sûre, l’œil plus lucide. […] Michel-Ange est assez puissant pour tenir sous son pied l’opinion publique comme son glorieux patron tient le diable sous sa sandale d’or, mais la vue du sublime affranchit l’esprit et lui donne le courage de rejeter l’oppression de la plus colossale célébrité et par d’autres grandeurs, la mieux justifiée… Et cependant le poème de Moïse, qui me fait écrire de telles choses, en mon âme et conscience, n’est, à mes yeux, que le second en mérite des Poèmes de M. de Vigny.
Trop attiré par les jeux de la scène, Il soupira pour les yeux de Climène, Comme un Tircis en veste de l’ami- Housset ! […] que de fois, œil morne et front blêmi, Il cherche auprès de la claire fontaine, Sous quel buisson l’Amour s’est endormi !
Je veux fortifier et réchauffer cette pensée d’un poète, qui, s’il a bu, je le crains bien, a bu surtout des larmes… de ces larmes qui restent longtemps aux yeux sans en tomber, qui coulent enfin et qu’on dévore. […] Jusqu’ici ce n’est que du comique ; seulement c’est du comique avec des nuances délicieuses d’humour contenue : mais voici le vrai Châtillon, voici la Bonté qui met les larmes aux yeux à l’Ironie : Du moins, je ne perds pas courage.
Lord Byron ne se prit à rire de ce rire dans lequel tremblent les larmes qu’on renfonce et qui vous retombent des yeux dans le cœur, que dans Beppo, l’un de ses derniers ouvrages, et dans le Don Juan, son chef-d’œuvre inachevé, plus grand que toutes les choses qui aient jamais été finies ! […] C’est un fils de Rabelais et de Luther, qui, les larmes aux yeux, marie la bouffonnerie de ces deux immenses bouffons à une sentimentalité aussi grande que celle de Lamartine.
Je m’imagine que dans ce moment, le père devait approcher de son fils, et lui dire : « Tu vois dans quel pays tu es né, et comme on y honore tout ce qui est grand ; et toi aussi, mérite un jour que ton pays t’honore. » Ainsi, chez les Grecs, de quelque côté qu’on jetât les yeux, on trouvait partout des monuments de la gloire ; les rues, les temples, les galeries, les portiques, tout donnait des leçons aux citoyens. […] D’abord on frappait les yeux par un appareil imposant et auguste ; car chez tous les peuples, la première éloquence est celle qui parle aux sens.
Que deviendront ces jeunes amants, sitôt et si complétement épris, et qui, pour nous, semblent n’avoir eu d’autre existence que d’aimer, d’autre destination que de faire passer devant nos yeux les ravissantes images de l’amour et de l’innocence ? […] Macbeth en fut informé, « car les rois, dit la chronique, ont des yeux aussi perçants que le lynx et des oreilles aussi longues que Midas », et Macbeth tenait chez tous les nobles de son royaume des espions à ses gages. […] Ses yeux et ceux de Juliette Cappelletto se rencontrèrent bientôt, et, frappés également d’admiration, ils ne cessèrent plus de se regarder. […] C’est un trait de l’art de Shakspeare pour nous faire assister à toutes les parties de l’événement ; il nous transporte toujours là où il frappe ses coups les plus décisifs, tandis que loin de nos yeux l’action poursuit son cours, et se contente de nous retrouver toujours au but. […] Le roi attendri, jeta le poignard, embrassa son fils les larmes aux yeux, lui avoua ses soupçons, et déclara en même temps qu’ils étaient effacés.
Les stances tombent avec mollesse et harmonie ; son style est imagé et facile ; sa muse se drape d’armements qui peuvent éblouir les yeux, mais la cambrure n’y est pas.
Il leur met dans les yeux de la vie, de la transparence, et l’humide et le gras et le nageant qui y est.
L’orthodoxie d’une œuvre n’est point pour la recommander à mes yeux, car je ne saurais m’inquiéter que de sa valeur littéraire.
On ne la propose pas comme un modele de style ; on ne peut en regarder l’Auteur que comme ceux qui découvrent les mines, en laissant aux autres le soin d’épurer les métaux qu’on en tire, & de les mettre en valeur ; ce qui aura toujours un grand mérite aux yeux des justes appréciateurs de ce genre d’utilité.
La faute en est aux Dieux, Qui la firent si belle, Et non pas à mes yeux.
Je n’en saurais que dire, il est placé trop haut pour mes yeux.
C’est donc un portrait chargé qu’on va lire ; tout à l’heure chacun sera en mesure de le rectifier, en ayant sous les yeux les pages mêmes de la Correspondance, avant que l’humeur de Rousseau ait eu le temps d’aigrir et de gâter ses plus innocents souvenirs : « Cette liaison commença, dit-il, par être orageuse, comme toutes celles que je faisais malgré moi ; il n’y régna même jamais un vrai calme : le tour d’esprit de Mme de Verdelin était par trop antipathique avec le mien. […] Les lettres de Mme de Verdelin qui sont maintenant sous nos yeux nous donnent d’elle une plus juste idée. […] m’a-t-il dit, je voudrais la lui entendre lire. » Ses yeux sont devenus humides, et mes larmes coulaient. » Elle vient de parler de ses forces qui sont à peine revenues : c’est qu’elle avait été malade deux mois durant. […] Ce qui m’a confirmé dans mon sentiment, c’est son empressement à revenir du moment qu’il a cru pouvoir écouter son penchant sans crime ; et cette démarche dont votre délicatesse me paraît offensée est, à mes yeux, une preuve de la sienne, qui doit lui mériter toute votre estime, de quelque manière que vous envisagiez d’ailleurs son retour. […] Dans sa jeunesse, il avait servi avec distinction dans le régiment d’Auvergne et dans le régiment de Verdelin, et avait perdu un œil d’un coup d’épée.
Le mystère de la première origine du peuple chinois n’en est pas moins impénétrable à l’œil purement humain. […] Ceux qui seront curieux de s’en convaincre n’ont qu’à jeter les yeux sur les notes qu’on a mises à la tête de chaque King dans la grande édition du palais ; ils verront avec surprise qu’on n’a jamais poussé si loin les recherches et la critique pour aucun livre profane. […] Les yeux, dont on entrevoit le globe proéminent sous la transparence des paupières minces, sont presque entièrement fermés dans le demi-jour de la méditation qui se recueille ; ce demi-jour, qui en découle cependant sur la physionomie, est lumineux et serein comme une aurore ou comme un crépuscule de l’âme. […] Sa physionomie révèle la plus haute intelligence, ses yeux sont comme des sources de clarté, sa bouche est comme celle des dragons qui soufflent le feu, sa taille est de six pieds sept pouces ; il a les bras longs et le dos voûté ; son corps est un peu courbé, ses paroles ne tendent qu’à inspirer la vertu. […] Mais comme le ciel et les esprits des ancêtres ne sont pas visibles aux yeux du corps, il chercha dans le firmament des emblèmes pour les figurer et les représenter. » Après avoir satisfait ainsi à leurs devoirs envers le ciel, auquel, comme au principe vivifiant et universel de toute existence, ils étaient redevables de leur propre vie, ils se tournent vers ceux qui, par la génération et la paternité, leur ont transmis successivement cette vie.
La duchesse avait été remarquablement belle ; en dépit d’une maigreur qui donnait à sa personne un faux air d’apparition, elle conservait des traces d’une régularité fine et noble, des yeux magnifiques et pleins de feu. […] Ce nom nous rappelle à nous-même un souvenir bien fugitif, mais bien ineffaçable des yeux. Les yeux ont leur mémoire : ce sont les images. […] XIV Une allusion transparente à l’effet produit sur ses yeux par la beauté de madame Dodwell et par sa ressemblance avec Juliette dans sa jeunesse interrompt une de ces lettres. […] Madame Récamier avait été toute sa vie une grande enchanteresse des yeux et des cœurs ; à cette époque elle fut un grand diplomate, le Talleyrand des femmes, dominant au fond toutes les opinions par une supériorité d’esprit qui ne donnait à chacune de ces opinions que sa valeur, les respectant toutes, n’en partageant aucune que dans la juste mesure de raison qu’elle contenait, et marchant libre, fière et souriante, entre tous les partis, comme une déesse de la Paix qui fait de son salon une terre neutre où l’on ne se rencontre que désarmé.
Cette affreuse clairvoyance ne nous enrichit pas : elle risque de nous appauvrir aux yeux de l’étranger, et, ce qui est plus grave, à nos propres yeux. […] Ces échecs nous les voyons parce qu’ils s’accomplissent sous nos yeux, tandis que des siècles reculés nous ne voyons que des réussites parfaites. […] Nous avons pour lui les yeux que l’on a pour une maison natale : tout nous y semble beau. […] Gaston Rageot Le xixe siècle a le mérite, aux yeux des uns, le tort, aux yeux des autres, d’avoir été un siècle d’affranchissement intellectuel : de là, en effet, une assez déconcertante contrariété, à savoir l’ordre scientifique et le désordre sentimental. […] Divoire) ; Nous avons pour lui les yeux que l’on a pour uni maison natale ; tout nous y semble beau (Pierre Lièvre) ; l’histoire ne présente aucune floraison plus riche, aucune recherche plus ardente (Camille Mauclair).
Il y a là, comme pour Silvia, un cas de mésalliance : La mère d’Araminte, bourgeoise entichée des grandes alliances, veut faire chasser Dorante, parce qu’il a le double tort de n’être pas l’intendant de son choix et d’oser lever les yeux sur sa fille. […] Piron semble avoir écrit la Métromanie devant quelque image de Molière, les yeux fixés sur le visage du contemplateur, lui demandant le secret de créer un caractère. […] De tous les personnages qui passent sous nos yeux, nous ne sommes tout à fait ni celui-ci ni celui-là. […] Bons ou méchants, tous sont nés dans ce paisible manoir d’Harleville où Collin avait été élevé par une tendre aïeule, sous les yeux d’un père qui lui a suggéré l’Optimiste, et où plus tard, possesseur à son tour du toit paternel, il abritait, après le 31 mai 1792, Andrieux fugitif et menacé. […] Fabre la reprend, et développe la création de Molière, les yeux fixés sur le modèle.
« Il a grandi sous mon œil tutélaire » (127)53. […] Wilder écrit : « S’il s’arrêtait sur moi, tout à coup radouci, l’œil du vieillard semblait se voiler d’une larme » (45)63. C’est sur « tout à coup radouci » que les modulations commencent ; le passage tourmenté se joue sous les mots « l’œil du vieillard semblait », et c’est sur les mots « se voiler d’une larme » que la musique se calme et retombe dans l’accord parfait de la tonique ! […] Traduction approximativement littérale : « En moi seule l’œil (de Wotan) éveilla un doux désirant chagrin, des larmes et de la consolation ensemble. »[NdA] 63. On voit que c’est précisément le contraire de ce que dit Wagner, puisque ce sont les yeux de Sieglinde, seuls, qui se voilent de larmes !
Il y a quelques années que, passant à Dijon, je fis visite à l’un de ces hommes savants et modestes comme la province en renfermait beaucoup autrefois et comme il y en a quelques-uns encore : cet homme de mérite, qui s’était de tout temps occupé d’histoire, et qui avait publié lui-même des Annales estimées24, avait les in-folio de Mézeray ouverts sur sa table, et, me voyant y jeter les yeux, il me dit : « En province nous avons encore le temps de lire. […] Il faut avoir sous les yeux la première édition de l’Histoire de France de Mézeray pour s’en expliquer le succès. […] Il l’offrit accommodée au goût et, pour ainsi dire, aux yeux du monde de son temps.
que d’yeux à éviter ! […] Il semble, en plusieurs de ses sermons, y avoir songé et y avoir répondu : qu’on lise dans cette pensée le sermon Sur l’injustice du monde envers les gens de bien et celui surtout Sur la médisance : Les traits de la médisance, dit-il, ne sont jamais plus vifs, plus brillants, plus applaudis dans le monde que lorsqu’ils portent sur les ministres des saints autels : le monde, si indulgent pour lui-même, semble n’avoir conservé de sévérité qu’à leur égard, et il a pour eux des yeux plus censeurs et une langue plus empoisonnée que pour le reste des hommes. […] Approchez des grands ; jetez les yeux vous-même sur une de ces personnes qui ont vieilli dans les passions, et que le long usage des plaisirs a rendues également inhabiles et au vice et à la vertu.
Au moment de partir, il écrivait naïvement à la maréchale de Schomberg ses raisons et ses excuses : Demeurer aux Incurables sans dévotion, lui disait-il, être à Paris sans voir le roi, porter une épée à mon côté sans aller à la guerre, passer ma vie avec des femmes sans être amoureux d’aucune, était une vie qui me rendait trop ridicule à mes yeux pour que je la pusse supporter plus longtemps. […] Lorsque le duc de Lorraine s’est porté du siège de Neuhaeusel qu’il est sur le point de prendre, au secours de Gran que les Turcs étaient près de forcer, on assiste à toute cette marche et à tous les accidents qui précédèrent la bataille ; la rapidité des Turcs, leur hardiesse à passer et repasser un ruisseau assez large et profond dont les bords sont escarpés, sous les yeux d’une armée ennemie de trente mille hommes, est bien rendue : « Il faut avouer que cette nation-là fait de belles diligences. » Pendant la bataille, les trois charges des Turcs, dont la première s’annonçait comme vive et dont la dernière est tout à fait molle, se dessinent aux yeux.
Non pas : j’ai sous les yeux la lettre de réponse de M. […] Dans l’épilogue qui termine le chant VIe et que je veux citer pour exemple du ton, l’auteur se représente comme ayant passé la nuit à méditer sur ces astres sans nombre et sur tout ce qu’ils soulèvent de mystères, jusqu’au moment où l’aube naissante les fait déjà pâlir et quand, à côté de lui, l’insecte s’éveille au premier rayon du soleil : Ainsi m’abandonnant à ces graves pensées, J’oubliais les clartés dans les Cieux effacées : Vénus avait pâli devant l’astre du jour Dont la terre en silence attendait le retour ; Avide explorateur durant la nuit obscure, J’assistais au réveil de toute la nature : L’horizon s’enflammait, le calice des fleurs Exhalait ses parfums, revêtait ses couleurs ; Deux insectes posés sur la coupe charmante S’enivraient de plaisir, et leur aile brillante Par ses doux battements renvoyait tous les feux De ce soleil nouveau qui se levait pour eux ; Et je disais : « Devant le Créateur des mondes « Rien n’est grand, n’est petit sous ces voûtes profondes, « Et dans cet univers, dans cette immensité « Où s’abîme l’esprit et l’œil épouvanté, « Des astres éternels à l’insecte éphémère « Tout n’est qu’attraction, feu, merveille, mystère. » Ce sont là des vers français qui me font l’effet de ce qu’étaient les bons vers latins du chancelier de L’Hôpital et de ces doctes hommes politiques du xvie siècle s’occupant, se délassant avec gravité encore, dans leur maison des champs, comme faisait M. […] Ceux qui l’ont connu me le dépeignent d’une taille qui n’était pas au-dessus de la moyenne, d’une physionomie agréable et forte, la tête brune, l’œil vif, le nez aquilin et noble, le teint assez coloré, le cou plein et puissant.
Virgile remercie modestement de l’honneur qu’on lui fait, et expose son plan et la marche qu’il faut suivre pour arriver au susdit Bon Goût ; il donne à l’avance la carte du pays environnant, en homme qui l’a beaucoup pratiqué : La principale difficulté, dit Virgile, est de sortir de ce labyrinthe que nous avons devant les yeux ; mais j’espère y réussir. […] Il est extrêmement rapide… Et voilà les ingéniosités quintessenciées et glaciales que Sénecé met dans la bouche de Virgile, en prétendant que rien ne ressemble plus au siècle d’Auguste que celui de Louis XIV ; c’est du Scudéry tout pur, c’est la carte du royaume de Tendre transportée dans la description du goût. — Et puis, quand on est embarqué sur le fleuve d’Imagination, l’arrivée à l’endroit nommé le Péage des critiques, la garde qu’y font les capitaines Scaliger, Vossius et autres, les « petits bateaux couverts qu’on appelle métaphores », et dont quelques-uns échappent à grand-peine à ces terribles douaniers ; et plus loin, quand on a pénétré dans le cabinet du Bon Goût, l’attitude et l’accoutrement baroque de ce bon seigneur qui m’a tout l’air d’être fort goutteux, appuyé d’un côté sur la Vérité et de l’autre sur la Raison, qui, tenant chacune un éventail, lui chassent de grosses mouches de devant les yeux (ces mouches sont les Préjugés) : les deux jeunes enfants qui sont à ses pieds, aux pieds du seigneur Bon Goût, et qui le tirent chacun tant qu’ils peuvent par un pan de son habit, l’un, un petit garçon toujours inquiet et remuant, nommé l’Usage : l’autre, une petite fille toujours fixe et assise, une vraie poupée nommée l’Habitude, que vous dirai-je de plus ? […] Ainsi, dans le duel de chant et d’harmonie entre Pan et Apollon déguisé en berger, lorsque Pan tout d’un coup s’émancipe à des insolences ironiques contre le sexe et qui font rougir les nymphes, Apollon a peine à ne pas éclater : Quel courroux enflamma l’œil qui perce en tout lieu !
Il est à croire qu’il aura observé de ses yeux quelque chose de semblable, ou du moins il a aimé à condenser dans ce tableau étroitement lié et à y reporter le résultat de ses observations diverses, sur un fonds général d’amertume et d’ironie. […] Rodolphe, un homme de trente-quatre ans, grossier mais frotté d’élégance, grand chasseur du sexe, et dont l’esprit est tourné de ce côté, s’est dit que Mme Bovary avait de bien beaux yeux et lui conviendrait fort. […] Au moment même où le père Rouault, arrivé tout exprès, vient d’enterrer sa fille, au milieu de sa douleur désespérée il a un mot de paysan, grotesque et sublime de naturel : chaque année il envoyait à Charles Bovary une dinde en souvenir de sa jambe remise ; en le quittant les larmes aux yeux, il lui dit pour dernier mot de sentiment : « N’ayez peur, vous recevrez toujours votre dinde. » Tout en me rendant bien compte du parti pris qui est la méthode même et qui constitue l’art poétique de l’auteur, un reproche que je fais à son livre, c’est que le bien est trop absent ; pas un personnage ne le représente.
Voilà déjà dix ans que la popularité de Béranger a commencé visiblement à décroître ; c’était encore de son vivant ; mais une popularité si haut montée ne pouvait décliner doucement et baisser petit à petit : il s’est bientôt déclaré, lui disparu, un entraînement en sens contraire ; et, comme, après une grande marée, on a eu sous les yeux un vaste reflux. […] Enfin, il faut bien le dire, le zèle des véritables amis restés les plus dévoués à sa mémoire n’a pas été prudent ni discret : à peine avait-il fermé les yeux qu’on a publié coup sur coup des souvenirs, des conversations de lui, des commérages de coin du feu, toute une série de petits livres à sa dévotion, toute une littérature Bèrangèrienne, visant à la légende. […] » La poésie sérieusement l’occupe : « Elle est pour moi maintenant une occupation douce, qui ne me nourrit point d’idées chimériques, mais qui n’en charme pas moins tous mes instants. » Cette poésie, comme il l’entendait, était pourtant alors à ses yeux très distincte encore de ses chansons ; il rêvait un succès par quelque poëme d’un genre élevé et régulier, tel que le lui avait conseillé Lucien Bonaparte, son protecteur, tel que la littérature impériale classique le prescrivait à tout jeune auteur qui briguait la palme.
Il est plus naturel d’admettre une faute d’impression, quand déjà il y en a plusieurs qui sautent aux yeux. […] Craufurd, et à moins que cet honorable ministre américain n’ait rêvé les yeux ouverts, qu’il recevait de Mme de Staël des lettres, que ces lettres avaient leur intention, étaient faites pour être montrées au ministre anglais ; et dans ce cas, je ne conçois pas ce qu’auraient pu être de pareilles communications, si elles n’avaient été dans le sens de la lettre même que nous venons de voir. […] Elle a besoin plus qu’un autre écrivain d’être lue avec des yeux amis, intelligents.
Il y a trente-trois ans environ de cela : les messieurs Bertin, très attentifs à tout ce qui se produisait et s’annonçait, même de hasardé et de contesté, avaient l’œil sur la jeune école dite romantique. […] Je m’apercevais bien qu’on nous observait, qu’on nous mesurait de l’œil, qu’on me tâtait en particulier ; mais qu’importe à cet âge ? […] Est-ce que Bossuet lui-même, qu’on ne récusera certes pas comme exprimant dans un haut exemple la moyenne des lumières du grand règne, avait profité de l’expérience produite sous ses yeux aux années de sa jeunesse, lorsque dans l’Oraison funèbre du prince de Condé il ne craignait pas de dire en une phrase magnifique et souvent citée : « Loin de nous les héros sans humanité !
Quant à Salammbô, à laquelle le lecteur à bout de sensations et d’abominations a moins que jamais le cœur de s’intéresser, dès longtemps fiancée à Narr’Havas, elle meurt en revoyant de ses yeux dans cet état horrible ce Mâtho, ce beau drôle de Lybien pour qui elle s’est sentie allumée dès le premier soir, et à qui elle s’est, de gaieté de cœur, abandonnée. […] Le paysage du livre est vrai, car l’auteur l’a vu de ses yeux et il est peintre ; les monuments et les édifices sont plus que douteux et incertains, car ils sont refaits en entier d’imagination, les vestiges insignifiants qu’on a cru récemment retrouver n’v pouvant aider en rien : mais ce qu’on peut affirmer plus à coup sûr encore et de toute la force de son bon sens, c’est que ce n’est pas ainsi qu’en aucun temps et en aucun lieu, les hommes se sont comportés et que les choses se sont passées. […] « Mais j’ai vu cela de mes yeux, me dira le voyageur ; j’ai même goûté de cette fameuse sauce verte dont il est question dans le festin des Mercenaires. » Laissons le voyageur, je parle à l’artiste.
Mais on voit quel rôle immense tenait et remplissait Rousseau à ses yeux, un rôle de révélateur et d’initiateur. […] Il explique lui-même, au reste, ses contradictions intérieures, les éléments divers et contraires qui s’agitent, qui se heurtent en lui, et desquels se compose son essence ; et voulant rassurer son ami, il se dépeint et se développe soudainement à nos yeux dans un magnifique portrait : « (5 février 1784). […] Nous la méconnaissons parce qu’elle est celle de la nature et que le chef-d’œuvre de la raison, comme du génie, n’est que de voir ce qui est sous nos yeux. » On croirait entendre un Montaigne chrétien.
ta présence, Après une si longue absence, Le rire aux yeux, me fait pleurer. […] Lebrun, est admirablement exprimée ; jugez-en plutôt : Descendez, parcourez ces longues galeries, Qui sous le Luxembourg et vers les Tuileries S’étendent, et des morts montrent de toutes parts, En long ordre, aux parois, les reliques dressées, Et des fronts sans pensées, Et des yeux sans regards. […] Et rend visible aux yeux une éternelle nuit ; Et d’instant en instant la goutte d’eau qui tombe De cette immense tombe Est seule tout le bruit.
Mais comment résister aussi au désir d’user de ce rocher si propice comme de son bien propre, pour y élever « l’inaccessible forteresse de Mont-Royal », de laquelle, dans un accès de verve à la Vauban et dans son ardeur de fortification, il disait comme eût fait un artiste, et en s’applaudissant de son idée : « Rien n’est plus beau que le poste que j’ai été visiter sur la Moselle, qui mettra les frontières du roi en telle sûreté, et les Électeurs de Cologne, Trêves, Mayence et le Palatin en telle dépendance, que cette frontière-ci sera meilleure et plus aisée à défendre que n’est celle de Flandre. » Une telle utilité justifiait à ses yeux bien des moyens. […] » Éternel problème où le droit de la force se dresse à nos yeux et nous apparaît régnant, dans le monde de l’histoire comme dans l’ordre de la nature ! […] On fit venir, l’année suivante, à Strasbourg, des Pères de l’Oratoire, dont était le célèbre Du Guet, pour tâter encore les consciences et sonder le terrain sur cette œuvre des conversions : elles ne prirent pas, — ni chez les Catholiques, ni chez les Protestants : « Les Catholiques, écrivait Du Guet (1682), sont soldats pour la plupart, occupés à la citadelle, aux forts, à autre chose qu’a leur conscience ; les hérétiques bourgeois sont sur leurs gardes, et le magistrat est un homme délicat qui a l’œil à tout, qui se plaint de tout, et qui fait de toutes choses une affaire d’État. » Strasbourg, en maintenant sa communion mi-partie et en sauvant quelques-unes de ses franchises municipales, fut vite assimilée et gagnée aux sentiments et aux destinées de sa patrie nouvelle.
On n’a droit à, ses yeux de se dire chrétien qu’à bon escient. […] Et pour les individus aujourd’hui, et sous nos yeux, journellement, que voyons-nous ? […] Pour la décrire, je voudrais posséder le burin d’un Albert Durer et rendre l’allégorie sensible aux yeux.
L’année 1745 était particulièrement fatale à ses yeux : le chancelier d’Aguesseau, cette année-là, avait fait rendre un édit par lequel le Clergé ne pouvait plus acquérir de biens-fonds. […] Rubichon pour y cantonner un roi de son choix : l’exemple de Milton qu’il allègue est à faire trembler ; on crève, dit-on, les yeux au rossignol pour qu’il chante mieux : il serait homme à vouloir son monarque aveugle pour le rendre plus réfléchi et plus perspicace. […] La tolérance n’est point l’indifférence à ses yeux, et elle en diffère essentiellement.