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1395. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XVIII. Siècle de Constantin. Panégyrique de ce prince. »

Son goût pour les sciences multiplia encore ses panégyriques ; car c’est une espèce de séduction à laquelle les philosophes même ne résistent pas.

1396. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « L’obligation morale »

Plus il s’élève dans l’échelle des généralisations, plus il incline, bon gré mal gré, à doter les lois de ce caractère impératif : il faut vraiment lutter contre soi-même pour se représenter les principes de la mécanique autrement qu’inscrits de toute éternité sur des tables transcendantes que la science moderne serait allée chercher sur un autre Sinaï. […] Qu’une émotion neuve soit a l’origine des grandes créations de l’art, de la science et de la civilisation en général, cela ne nous paraît pas douteux. […] Socrate va plus loin encore ; de la vertu même il fait une science ; il identifie la pratique du bien avec la connaissance qu’on en possède ; il prépare ainsi la doctrine qui absorbera la vie morale dans l’exercice rationnel de la pensée. […] Nous parlons de l’intelligence pure, se renfermant en elle-même et jugeant que l’objet de la vie est ce que les anciens appelaient « science » ou contemplation. […] Mais du fait que la science doit respecter la logique des choses et la logique en général si elle veut aboutir dans ses recherches, de ce que tel est l’intérêt du savant en tant que savant, on ne peut conclure à l’obligation pour nous de mettre toujours de la logique dans notre conduite, comme si tel était l’intérêt de l’homme en général ou même du savant en tant qu’homme.

1397. (1923) Critique et conférences (Œuvres posthumes II)

l’âge mûr a, peut avoir ses revanches et l’art aussi, sur les enfantillages de la jeunesse, ses nobles revanches, traiter des objets plus et mieux en rapport, religion, patrie, et la science, et soi-même bien considéré sous toutes formes, ce que j’appellerai de l’élégie sérieuse, en haine de ce mot, psychologie. […] Barbey d’Aurevilly : qu’il est dans la plus merveilleuse erreur, ou que c’est un adroit compère cachant sous le chatoiement d’un verbiage coloré une science problématique (ceci n’a trait qu’au botaniste). […] et lut tout d’une traite les quelque chose comme deux mille vers de ce poème si verveux : « Un âne descendait au grand trot la Science : Kant dit : Quel est ton nom — Mon nom est patience ». […] Cette science mêlée à celle de notre littérature classique, dont Racine est le pur prototype, produisit, n’en doutons pas, dès cette époque le Génie du Christianisme, qui fit révolution ! […] Ils ont la science, un peu à l’aventure, car ils sont jeunes, ils ont la musique, — du moins la plupart des quatre qui forment le groupe.

1398. (1883) Le roman naturaliste

L’hérédité a ses lois comme la pesanteur. » Voilà qui va fort bien : mais la science démontre, ou à peu près, les lois de la pesanteur ; elle en est encore à supposer celles de l’hérédité. […] Comme si, cependant, l’art et la science n’étaient pas dans l’histoire l’éternelle et vivante contradiction l’un de l’autre ! […] Alphonse Daudet, la science de la psychologie. […] Et la question revient plus souvent qu’on ne croit, en matière d’art comme de science. […] et qu’à propos des Rougon-Macquart ou des Quenu-Gradelle, on ne met pas les gens en demeure de choisir entre le système de la prénotion physique et celui de la science moyenne ou conditionnée ?

1399. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. —  première partie  » pp. 126-268

. — Sa science précoce. — Fauriel en 1800. — Relations avec Fouché, — avec Mme de Staël, — avec Benjamin Constant, — avec Charles Villers, — avec Cabanis, — avec Tracy. — La Parthénéïde de Baggesen. — Vers de Manzoni à ce sujet. — Nombreux travaux de Fauriel et leur unité : Fauriel historien. […] Même avant les deux Schlegel, avant Guillaume de Humboldt, ou du moins en même temps qu’eux, il eut l’honneur d’influer sur ce grand et libre esprit, de l’assister de sa science, et de lui faire pressentir quelques-unes des directions où, une fois lancé, son talent plein d’âme devait ouvrir des sillons si lumineux. […] Chaque fois qu’il revenait, après des années, à son grand ouvrage, c’était à Fauriel bien vite qu’il s’adressait, pour se remettre au courant de la science et apprendre de lui ce qui, dans l’intervalle, avait paru tant en Allemagne qu’en Angleterre sur l’Inde et sur Bouddha. […] Manzoni pouvait craindre pour cette science de son cher historien du stoïcisme qu’elle ne fût un obstacle à ce qui est surtout révélé aux petits et aux simples. […] La révolution de 1830 produisit enfin Fauriel, et ses amis, en arrivant au pouvoir, songèrent aussitôt à mettre sa science, trop longtemps réservée, en communication directe avec le public.

1400. (1927) Des romantiques à nous

Reynaud, dont la science et la doctrine font très utilement et abondamment penser. […] Jacques Boulenger nous proposera-t-il comme un modèle de stabilité sous ce rapport l’écrivain qui a commencé par l’optimisme inouï de l’Avenir de la Science, pour finir par le pessimisme presque nihiliste des merveilleux Drames philosophiques ? […] Il étend son empire jusqu’à la critique, la science, la philosophie, elles-mêmes, qu’on veut non éclairantes, mais, a tout prix, émouvantes. […] Elle consiste à se replacer en idée dans une époque où la science était beaucoup moins encombrée de faits, où chaque partie de l’humanité ne connaissait qu’elle-même et une courte portion de l’histoire, où des nations beaucoup moins peuplées se prêtaient plus facilement à la formation d’une aristocratie ou oligarchie permanente et héréditaire, où le monde en un mot était moins grand et moins tumultueux. […] Mais si ce qu’ils ornent ainsi était la naïveté et l’ingénuité pure, ils le gâteraient en y mêlant leur science ; on ne fond pas ensemble deux natures contradictoires.

1401. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome II pp. 1-419

On aimerait à voir sa pensée s’exprimer dans une langue moins savante, ou du moins à voir la science qu’il possède se produire avec moins d’ostentation. […] Il montra de bonne heure une avidité remarquable pour toutes les parties de la science humaine. […] L’auteur n’eût-il pas rendu d’autre service à la science, sa place serait encore marquée au premier rang. […] Ainsi, comme savant, il a obtenu et devait obtenir des louanges unanimes ; mais l’histoire ne se réduit pas à la science. […] Michelet une action singulière, qui tient plus de l’éblouissement que de la vraie science.

1402. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIIe entretien. Littérature américaine. Une page unique d’histoire naturelle, par Audubon (1re partie) » pp. 81-159

Il est vrai que cette ébauche de littérature ne s’est rencontrée que dans une partie de la science utile, l’histoire naturelle ; ici même le pays a prévalu sur l’homme. […] Voici comment il analyse cet instinct d’observation solitaire, ce dévouement à une innocente étude, cette abnégation de tous les soins matériels, cette force intellectuelle d’un homme qui, sans maître, fait toute son éducation d’histoire naturelle au fond des bois, et complète seul une branche de la science, branche importante que l’on désespérait de compléter jamais. […] Il me présentait la science sous un point de vue coloré et plein d’intérêt, au lieu de la réduire à je ne sais quelle analyse anatomique et morte, qui fait de la nature un squelette.

1403. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VI »

L’Allemand musicien — s’il n’est ni Bach ni Beethoven ni Schumann — est un bon ouvrier : de la science, de l’habileté, l’amour du métier, du courage et beaucoup d’honnêteté, beaucoup de soin à la besogne. En France, les musiciens manquent de conscience et de science, mais sont brillants, agréables, flatteurs ; ils amusent. […] Et voilà donc qu’ayant achevé la Babel de sa Gœtterdæmmerung, né à cette solide vieillesse qui n’est que la maturité des esprits géniaux, il avait passé la série entière des liminatoires épreuves ; car, si la création d’une œuvre d’ensemble est folie à tout jeune artiste, quelque grandiose soit-il, si le devoir à tout jeune artiste est de travailler en des études sensationnelles très restreintes, et si tout artiste, même expérimenté de science et de méditation, doit terriblement redouter toute institution générale, c’est pourtant le droit aux maîtres d’essayer à l’heure de la vieillesse, comme leur dernier et suprême monument, cette création gigantesque, une synthèse sensationnelle ; et Richard Wagner, debout en 1876 dans son Bayreuth inauguré, pouvait tenter l’œuvre synthétique de la sensation humaine qui fut le Parsifal.

1404. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Charles Dickens »

Les mobiles de la conduite des personnages sont encore purement fantastiques ; c’est tantôt une bonté stupide, tantôt la méchanceté pure, tantôt une rapacité ou un désintéressement également extrêmes, au contraire, les grands intérêts passionnels ou spirituels humains, l’amour, ce pivot de presque toutes nos œuvres d’imagination, l’ambition, la soif de science, de gloire, de pouvoir, de jouissance, ne jouent aucun rôle presque dans ces singuliers livres. […] Son œuvre n’est pas consacrée à susciter les profondes émotions induites de science et de sympathie que cause le spectacle de quelque grande âme humaine mise à nu. […] Les sentiments que Dickens a exprimés dans ses livres ne comprennent pas de sentiments intellectuels, de sentiments systématisés ; il ne s’est pas enthousiasmé pour quelque conception définie, pour la science par exemple, pour la grandeur de la passion, pour le progrès, pour la haine de la civilisation.

1405. (1856) Cours familier de littérature. I « IVe entretien. [Philosophie et littérature de l’Inde primitive (suite)]. I » pp. 241-320

Dans toutes les langues, l’homme a parlé et écrit en prose des choses nécessaires à la vie physique ou sociale : domesticité, agriculture, politique, éloquence, histoire, sciences naturelles, économie publique, correspondance épistolaire, conversation, mémoires, polémique, voyages, théories philosophiques, affaires publiques, affaires privées, tout ce qui est purement du domaine de la raison ou de l’utilité a été dévolu sans délibération à la prose. […] Mais que serait-ce si nous parcourions la gamme entière de l’âme humaine depuis l’enfance jusqu’à la caducité, depuis l’ignorance jusqu’à la science, depuis l’indifférence jusqu’à la passion, pour y décerner d’un coup d’œil ce qui est du domaine de la poésie de ce qui est du domaine de la prose ? […] Notre procédé, à cet égard, ne sera pas celui de la science systématique et arbitraire qui divise par genres ; il sera celui de la nature, qui procède par succession de temps et qui divise par époques.

1406. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIIe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset » pp. 409-488

Les sens usés au service d’une intelligence immortelle, qui tombent comme l’écorce vermoulue de l’arbre, pour laisser cette intelligence, dégagée de la matière, prendre plus librement les larges proportions de son immatérialité ; les cheveux blancs, ce symbole d’hiver après tant d’étés traversés sans regret sous les cheveux bruns ; les rides, sillons des années, pleines de mystères, de souvenirs, d’expérience, sentiers creusés sur le front par les innombrables impressions qui ont labouré le visage humain ; le front élargi qui contient en science tout ce que les fronts plus jeunes contiennent en illusions ; les tempes creusées par la tension forte de l’organe de la pensée sous les doigts du temps ; les yeux caves, les paupières lourdes qui se referment sur un monde de souvenirs ; les lèvres plissées par la longue habitude de dédaigner ce qui passionne le monde, ou de plaindre avec indulgence ce qui le trompe ; le rire à jamais envolé avec les légèretés et les malignités de la vie qui l’excitent sur les bouches neuves ; les sourires de mélancolie, de bonté ou de tendre pitié qui le remplacent ; le fond de tristesse sereine, mais inconsolée, que les hommes qui ont perdu beaucoup de compagnons sur la longue route rapportent de tant de sépultures et de tant de deuils ; la résignation, cette prière désintéressée qui ne porte au ciel ni espérance, ni désirs, ni vœux, mais qui glorifie dans la douleur une volonté supérieure à notre volonté subalterne, sang de la victime qui monte en fumée et qui plaît au ciel ; la mort prochaine qui jette déjà la gravité et la sainteté de son ombre sur l’espérance immortelle, cette seconde espérance qui se lève déjà derrière les sommets ténébreux de la vie sur tant de jours éteints, comme une pleine lune sur la montagne au commencement d’une claire nuit ; enfin, la seconde vie dont cette première existence accomplie est le gage et qu’on croit voir déjà transpercer à travers la pâleur morbide d’un visage qui n’est plus éclairé que par en haut : voilà la beauté de vieillir, voilà les beautés des trois âges de l’homme ! […] Si on met les noms propres, tous éclatants au moins de jeunesse, sur chacune de ces innombrables catégories d’esprits alors en sève ou en fleur, si on y ajoute, dans l’ordre des sciences exactes (où le génie consiste à se passer d’imagination,) La Place, qui sondait le firmament avec le calcul ; Cuvier, qui sondait le noyau de la terre et qui lui demandait son âge par ses ossements ; Arago, qui rédigeait en langue vulgaire les annales occultes de la science ; Humboldt, qui décrivait déjà l’architecture cosmogonique de l’univers, et tant d’autres leurs rivaux, leurs égaux peut-être, qui négligèrent d’inscrire leurs noms sur leurs découvertes ; si on rend à tout cela le souffle, la vie, le mouvement, le tourbillonnement de la grande mêlée religieuse, politique, philosophique, littéraire, classique, romantique de la restauration, on aura une faible idée de cette renaissance, de cet accès de seconde jeunesse, de cette énergie de sève et de fécondité de l’esprit français à cette date.

1407. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — II. (Fin.) » pp. 110-133

Il vaudrait mieux qu’ils étudiassent la science des anciens dans Hippocrate, Galien et Fernel… Toujours l’érudition et l’autorité plutôt que l’expérience21. […] En général, Gui Patin est à l’égard des femmes dans les principes du bonhomme Chrysale chez Molière : il les exclut de la science et des hauts entretiens.

1408. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « De la tradition en littérature et dans quel sens il la faut entendre. Leçon d’ouverture à l’École normale » pp. 356-382

alors l’équilibre entre les talents et le milieu, entre les esprits et le régime social, se trouverait rétabli ; on se retrouverait à l’unisson ; la lutte, la maladie morale cesseraient, et la littérature d’elle-même redeviendrait classique par les grandes lignes et par le fond (c’est l’essentiel) ; — non pas qu’on aurait plus de talent, plus de science, mais on aurait plus d’ordre, d’harmonie, de proportion, un noble but, et des moyens plus simples et plus de courage pour y arriver. […] Les critiques mêmes de profession, pour peu qu’ils fussent élégants, ne s’informaient pas assez à l’avance de tout ce qui pouvait donner à leur jugement des garanties d’exactitude parfaite et de vérité ; on en sait plus qu’eux aujourd’hui sur bien des points dans les sujets où ils ont passé ; on a sous la main toutes les ressources désirables ; sans parler de la biographie, la bibliographie, cette branche toute nouvelle, d’abord réputée ingrate, cette science des livres dont on a dit « qu’elle dispense trop souvent de les lire », et que nos purs littérateurs laissaient autrefois aux critiques de Hollande, est devenue parisienne et à la mode, presque agréable et certainement facile, et le moindre débutant, pour peu qu’il veuille s’y appliquer deux ou trois matinées, n’est pas embarrassé de savoir tout ce qui concerne le matériel des livres et le personnel de l’auteur dont il s’occupe pour le moment.

1409. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres de Virgile »

Est-il donc vrai qu’en enseignant les éléments on se soit ainsi laissé si fort arriérer par rapport à la science ? […] Je ne vois pas que ce sens, qui est assez fin, soit mal placé dans la bouche d’un vieillard un peu troubadour et maître, à sa manière, dans la gaie science.

1410. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Vie de Rancé »

Un esprit merveilleux, brillant, en train de toute science et de toute diversion, cherchant jusqu’au miel des poëtes ; une parole éloquente et suave, un cœur généreux et magnifique, une âme ardente, impatiente, immodérée, épuisant la fatigue sans jamais trouver le repos, que rien ne pouvait combler, ressaisie d’une mélancolie infinie au sein des succès et des plaisirs ; que revenait obséder par accès l’idée de la mort, l’image de l’éternité, et qui, à un certain moment, rejetant ce qui n’était plus qu’incomplet pour elle, l’immolant au pied de la Croix, entra, comme dit son biographe, dans la haine passionnée de la vie. […] « Comme il avait étudié les sciences occultes, il essaya les moyens en usage pour faire revenir les morts.

1411. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. VINET. » pp. 1-32

Nulle part surtout, plus qu’au pays de Vaud, on n’avait la science de nos classiques : on y savait Boileau et le reste par cœur. […] Sa science de langue, de synonymie et de cœur, va souvent à l’éloquence d’onction ou de pensée, mais ne s’envole pas volontiers aux grandes choses d’imagination.

1412. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « L’abbé Prévost »

Il y touche cet état moral de son âme en traits ingénus et suaves qui marquent assez qu’il n’est pas guéri : « Je connois la foiblesse de mon cœur, et je sens de quelle importance il est pour son repos de ne point m’appliquer à des sciences stériles qui le laisseraient dans la sécheresse et dans la langueur ; il faut, si je veux être heureux dans la religion, que je conserve dans toute sa force l’impression de grâce qui m’y a amené ; il faut que je veille sans cesse à éloigner tout ce qui pourroit l’affoiblir. […] Le Pour et Contre, « ouvrage périodique d’un goût nouveau, dans lequel on s’explique librement sur ce qui peut intéresser la curiosité du public en matière de sciences, d’arts, de livres, etc., etc., sans prendre aucun parti et sans offenser personne », demeura consciencieusement fidèle à son titre.

1413. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Du génie critique et de Bayle »

Il se sentit toujours peu porté aux mathématiques ; ce fut la seule science qu’il n’aborda pas et ne désira pas posséder. […] Newton, dit-il, a été aussi vertueux qu’il a été grand philosophe : tels sont pour la plupart ceux qui sont bien pénétrés de l’amour des sciences, qui n’en font point un indigne métier, et qui ne les font point servir aux misérables fureurs de l’esprit de parti.

1414. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis »

Leur architecture dite cyclopéenne, où la main de l’homme conserve dans ses ouvrages l’empreinte monumentale et divine de la force des temps et de la rusticité de la nature, l’élégance dorienne de leurs ruines de temples, le dessin inexpliqué de leurs vases, plus grecs que la Grèce elle-même, et aussi naïfs que l’âge primitif de l’homme, tout cela atteste qu’une science inconnue de l’humanité civilisée a coulé aux bords de l’Arno des rochers de la Toscane. […] Là, Alberti commença l’entretien en remarquant qu’on peut regarder comme jouissant d’un bonheur solide et réel ceux qui, après avoir perfectionné leur esprit par l’étude, peuvent se soustraire de temps en temps au fardeau des affaires publiques et à la sollicitude des intérêts privés, et, dans quelque retraite solitaire, se livrer sans contrainte à la contemplation de l’immense variété d’objets que présentent la nature et le monde moral. « Mais si c’est une occupation convenable aux hommes qui cultivent les sciences, elle est encore plus nécessaire pour vous, continua Alberti en s’adressant à Laurent et à Julien ; pour vous, que les infirmités toujours croissantes de votre père mettront probablement bientôt dans le cas de prendre la direction des affaires de la république.

1415. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre III. Montaigne »

Pendant que les passions politiques et religieuses tournaient la poésie, l’éloquence, la science même et la philosophie en armes envenimées au service des partis, un homme anticipait la paix future, et offrait à ses concitoyens trop forcenés encore pour le suivre l’image de l’état moral où la force des choses devait finir par les amener eux-mêmes. […] Il fuit trop la peine pour son élève : il n’en fera qu’un charmant garçon, qui ne saura rien solidement, qui ne saura même pas apprendre ni vouloir apprendre, un amateur ayant dégusté la mousse de la science, un causeur aimable de salon.

1416. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre I. Les mondains : La Rochefoucauld, Retz, Madame de Sévigné »

Il convient de faire une place au roi354, qui dans ses Mémoires et dans ses Lettres, se montre à son avantage, avec son sens droit et ferme, son application soutenue aux affaires, sa science délicate du commandement : une intelligence solide et moyenne, sans hauteur philosophique, sans puissance poétique, beaucoup de sérieux, de dignité, de simplicité, une exquise mesure de ton et une exacte justesse de langage, voilà les qualités par lesquelles Louis XIV a pesé sur la littérature, et salutairement pesé. […] Mais n’eussent-ils pas écrit de lettres, il n’en faudrait pas moins indiquer ici qu’ils vécurent et travaillèrent : car leur œuvre, étrangère à la littérature, et même souvent à la langue française, a préparé le merveilleux développement de la critique, de l’histoire, de l’archéologie, de toutes ces sciences où la littérature de notre siècle a trouvé quelques-uns de ses plus certains chefs-d’œuvre.

1417. (1895) La musique et les lettres pp. 1-84

La plupart séjournent, respectant la clause de ne vivre mariés à l’intérieur de monastères de science. […] Le malheur, dans l’espèce, que la science s’en mêle ; ou qu’on l’y mêle.

1418. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Appendice »

… J’ai été tellement effrayé de cette perspective, que je fus quelque temps décidé à m’agréger à la classe des sciences ; mais ce serait alors plus que jamais qu’il faudrait me spécialiser ; car enfin, dans leur littérature, ils admettent bien encore une sorte d’universalité. […] Non, non ; je me rapprocherai le plus possible de ce centre qui est philosophie, théologie, science, littérature, etc., qui est Dieu, suivant moi.

1419. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1859 » pp. 265-300

Cette collection, je l’aurais livrée à l’admiration des bourgeois, et après avoir joui de leur stupide épatement, sur l’étiquette et le grand prix de l’objet, je me serais livré à un éreintement épileptique, composé avec du fiel, de la science et du goût. […] En somme, l’escrime, la science la plus problématique du monde — après la politique.

1420. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — La solidarité des élites »

Il veut des corps vigoureux et souples, des cerveaux nourris de science réelle, des natures puissantes et libres, transfigurées, comme il le dit lui-même, « dans cette lumière héroïque que le bonhomme Luther a nommée noblement la Joie ».‌ […] Et cette Solidarité des Élites n’est que l’image, la lointaine projection d’une solidarité à laquelle l’homme le plus humble de la rue, l’homme le plus fruste des champs prendra sa part aussi bien que l’homme de science ou le politique.

1421. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

Les feuilletonistes ont, presque tous, un sens exact du mouvement dramatique ; une science de l’horrible et du terrifiant ; une adresse à démêler les écheveaux ; une habileté à laisser pour morts, sur le champ de bataille de l’action, des héros qui ressuscitent pour de longues destinées ; un doigté dans l’usage du point de suspension ; une fidélité au type honorable des bonnes mères, des petites ouvrières laborieuses et des amours éternelles, qui ne sont pas des qualités si méprisables qu’on le croit. […] Et moi j’admirais comment ces primitifs, si loin de nos sciences et de nos discours, avaient le sentiment de la beauté de leur âpre pays.

1422. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre premier. »

Boeck l’a essayé de nos jours ; mais aussi, on doit l’avouer, ils ne les entendaient pas avec la même sagacité, la même précision de sens hellénistique ; ils savaient le grec plus bonnement, plus naïvement : leur science n’avait pas autant pénétré dans la société grecque et n’en connaissait pas aussi bien tous les usages et toutes les formés ; et, d’autre part, leur goût s’alarmait de ces formes étrangères. […] Car ce poëte, ce musicien, est un sage, un disciple immédiat de l’école philosophique la plus pure avant Socrate et Platon, de cette école pythagoricienne qui, mêlant l’ardeur ascétique à la science, inspira les premiers martyrs de la vérité morale et forma plus tard le héros le plus honnête homme de l’antiquité, Épaminondas, élève du chanteur Olympiodore et du philosophe Lysis, en même temps que le plus agile coureur de la lice thébaine8, Épaminondas, grand homme, sans les vices trop fréquents des héros antiques et les défauts ordinaires des hommes.

1423. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre VI. Du raisonnement. — Nécessité de remonter aux questions générales. — Raisonnement par analogie. — Exemple. — Argument personnel »

Je ne sais toutefois s’il n’en est pas des fables comme de l’épopée : l’invention n’en appartient pas aux siècles polis, aux époques de réflexion et de science.

1424. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre I. Influence de la Révolution sur la littérature »

Je crois, en effet, qu’un des caractères généraux de la littérature qui s’est développée en ce siècle, orientée tantôt vers la science et tantôt vers l’art, c’est d’être une littérature d’hommes, faite surtout par et pour des hommes.

1425. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XI. Trois bons médanistes : Henry Céard, Joris-Karl Huysmans, Lucien Descaves » pp. 145-156

Gardant de sa traversée parmi les sciences naturelles la défiance du médecin qui démêle l’instinct brutal sous le sentiment hypocrite, Céard fut naturellement séduit par les écrivains d’analyse.

1426. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre onzième. »

Si j’apprenais l’hébreu, les sciences, l’histoire !

1427. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre V. Harmonies de la religion chrétienne avec les scènes de la nature et les passions du cœur humain. — Chapitre II. Harmonies physiques. — Suite des Monuments religieux ; Couvents maronites, coptes, etc. »

S’il n’en était ainsi, l’homme, en s’éloignant toujours de son origine, serait devenu une sorte de monstre ; mais, par une loi de la Providence, plus il se civilise, plus il se rapproche de son premier état : il advient que la science au plus haut degré est l’ignorance, et que les arts parfaits sont la nature.

1428. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 5, des études et des progrès des peintres et des poëtes » pp. 44-57

Ne désabusez pas si-tôt un jeune artisan, trop prévenu sur la consideration que son art mérite, et laissez-lui croire du moins durant les premieres années de son travail, que les hommes illustres dans les arts et dans les sciences, tiennent encore aujourdhui le même rang dans le monde qu’ils y tenoient autrefois en Grece.

1429. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 5, explication de plusieurs endroits du sixiéme chapitre de la poëtique d’Aristote. Du chant des vers latins ou du carmen » pp. 84-102

Or ce n’étoit point la musique metrique ni la musique rithmique qui enseignoit la science des accords.

1430. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 9, de la difference qui étoit entre la déclamation des tragedies et la déclamation des comedies. Des compositeurs de déclamation, reflexions concernant l’art de l’écrire en notes » pp. 136-153

Sur tout la déclamation des cantiques ou monologues qui s’executoit d’une façon très-singuliere, et que nous expliquerons, n’étoit jamais mise en musique par le poëte, mais par des hommes consommez dans la science des arts musicaux, et qui faisoient leur profession de faire representer les pieces dramatiques composées par d’autres.

1431. (1912) L’art de lire « Chapitre VI. Les écrivains obscurs »

Ils sont dans un état d’âme très connu, celui des amateurs de sciences occultes.

1432. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Rome et la Judée »

Ceci n’est plus, comme les Césars, artiste et inspiré, aussi piquant de science que de forme.

1433. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Dante »

On mit même au service de cette idée folle une érudition épouvantable ; car la science est toujours de force à dévorer l’absurde, et tout savant est un père Hardouin possible, qui n’attend que l’occasion pour naître.

1434. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « V. Saint-René Taillandier »

Telles sont la philosophie et l’histoire de cet optimiste faux chrétien qui croit, dit-il, à la Providence divine, comme il croit à la destinée, comme il croit à ce dix-neuvième siècle, qui a réveillé l’infini, comme à la science, comme à tout, et qui a le mysticisme de toutes ces sornettes contemporaines, lesquelles formeront un jour une logomachie à faire pouffer de rire nos descendants !

1435. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « J.-J. Ampère ; A. Regnault ; Édouard Salvador »

Il était depuis longtemps connu par des écrits d’un talent tempéré, mêlé dans un dosage savoureux d’imagination et de science.

1436. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Conclusion »

La conscience garde la faculté de mépriser ce que la science explique.

1437. (1858) Du roman et du théâtre contemporains et de leur influence sur les mœurs (2e éd.)

. — À ce compte, pourquoi ne pas rendre public aussi ce musée Dupuytren, où la science a rassemblé les effrayantes images des plaies les plus hideuses de l’humanité ? […] Maintenant, c’était la philosophie qu’il voulait asseoir sur des bases nouvelles ; c’était la religion qu’il aspirait à réformer ; c’était la science sociale qu’il prêchait dans la rue. […] Il nous serait facile de suivre, dans dix autres romans du même écrivain, la trace visible de ce matérialisme plus ou moins amalgamé de poésie, de science ou de religion. […] Les phénomènes moraux ne sont que des phénomènes magnétiques ; le christianisme est la science même du magnétisme ; Swedenborg et Mesmer continuent Jésus-Christ. […] Toi, tu as puisé aux sources de la sagesse, tu as acquis la science du philosophe en gardant le cœur de l’honnête homme.

1438. (1891) La bataille littéraire. Quatrième série (1887-1888) pp. 1-398

De la science découlent bien des idées nouvelles ; ce n’est plus la science expérimentale (atavisme, hérédité, etc.) avec ses phénomènes morbides, qui a servi à Émile Zola, c’est la science des docteurs Charcot, Luys, avec l’hypnotisme, la suggestion, les phénomènes du cerveau, de l’esprit, de la pensée. […] Je ne nie pas la science, mais je veux la borner à l’observation exacte et précise des choses. […] Mais, si un roman est une œuvre de science et d’art s’adressant à l’humanité tout entière, au-dessus du moment et du code social, visant à un absolu de vérité, j’ai raison. […] La science est, hélas ! […] Sans doute, il est matériellement malade, sa science médicale le guérira.

1439. (1913) Le mouvement littéraire belge d’expression française depuis 1880 pp. 6-333

Picard ne pense pas que la science du Droit consiste seulement à étudier les lois dans les livres. […] Les Essais sur l’art contemporain, La Renaissance septentrionale et les premiers maîtres des Flandres, les livres consacrés à Jordaens et Van Dyck font admirer sa science comme la sûreté de son instinct. […] L’impulsion donnée, d’autres suivirent : Godefroid Kurth, avec peut-être moins de science rigoureuse, mais plus de lyrisme, écrivit une Histoire de la civilisation moderne. […] Paris, Librairie générale des sciences, arts et lettres, 1911. […] Paris, Lafite et Cie, 1911. — Édénie (théâtre), Paris, Librairie générale des sciences, arts et lettres, 1912.

1440. (1930) Physiologie de la critique pp. 7-243

En matière de critique du passé, il faut surtout de la science, une science digérée et judicieuse, capable de situer et d’apprécier les écrivains à leur place historique et dans leur ordre littéraire. […] Il régentait le plus sur ce qu’il connaissait le moins : littérature contemporaine, étrangère, philosophie, science (en faillite), politique, et rien ne pouvait moins réussir à Paris, où l’esprit critique se moqua du critique. […] Son tort a été d’en confondre le mouvement avec une évolution calquée sur une évolution naturelle, dont une science mal apprise lui fournissait les éléments arbitraires et sommaires ; et surtout d’avoir cru que cette théorie devait servir à fournir des consultations, dont la critique pouvait faire bénéficier utilement les auteurs présents. […] Il eût sans doute parlé en ces termes : « Mon ami, à qui, toi qui ignores une science, parleras-tu de cette science mieux que ceux qui la connaissent ? […] La critique a d’abord été cela en Grèce ; une science du doute.

1441. (1856) Articles du Figaro (1855-1856) pp. 2-6

. — Cette absence complète de style, ou plutôt, ce style éminemment original à force d’être barbare, est-il racheté, chez l’auteur des Bourgeois de Molinchart, par la science de la composition ? […] Elle tournait le dos à la science ou se faisait remorquer par elle ; elle marchera à ses côtés. […] Maxime Du Camp fait plus spécialement de la poésie l’auxiliaire de la science. […] Les révolutions sociales le touchent plus que les révolutions de la science ; il se préoccupe de la santé morale de son siècle plutôt que de son état intellectuel. […] Seulement, au lieu d’animer la matière à l’aide de fictions riantes, elle lui souffle l’âme même de la science.

1442. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

En art, en science, en politique, le mouvement est sensible ; chaque travailleur a un but ; l’un veut le beau, l’autre le bien, et tous, quelquefois sans s’en douter, marchent vers la vérité. […] Science, art, philosophie, tout cela n’est que description ; aussi le réalisme est-il la plus juste compréhension de ce qui est qu’on en exprime par la plus juste description. […] Vous prétendez que nous dénigrons et persiflons, et vous faites concorder cela avec la science, le sérieux, le rassis et le manque d’esprit, qui sont nos caractères distinctifs, selon vous ! […] L’enfant se joue, brise et méprise ; son bonheur est de défaire, et la science enfant est de même, elle n’étudie pas sans tuer. […] Peu de talent, aucune science, l’esprit cancanier et du brio, du brio en masse.

1443. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1866 » pp. 3-95

Le moindre travail de catalographie de notre temps lui est cent fois supérieur par la science et la recherche. […] Car cette jeunesse de Taine et de sa génération n’a point eu de jeunesse, elle a grandi dans une espèce de macération, en compagnie du travail, de la science, de l’analyse, au milieu de débauches de lectures, et ne pensant qu’à s’armer pour la conquête de la société ! […] Il mange distraitement, et sans pain, un peu de ces pois et de cette salade, posés sur la table de noyer sans nappe, au milieu de ses papiers et de ses bouquins de science, un rien reculés de son assiette. […] * * * — Les pensées de Chamfort : c’est comme la condensation de la science du monde ; l’élixir amer de l’expérience.

1444. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers, Tome xix. (L’île d’Elbe, — L’acte additionnel. — Le champ de mai.) » pp. 275-284

J’ai lu ces livres dont les uns étaient composés avec l’esprit le plus chatoyant et le plus malicieux, dont les autres étaient le produit d’une science concentrée et morose.

1445. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Les poëtes français. Recueil des chefs-d’œuvre de la poésie française »

Cinq ou six chasseurs s’en reviennent un soir d’automne, après une journée de bonne chasse, et se rencontrent : l’un est fermier, l’autre marguillier, l’autre maire, un quatrième magister, se piquant de science et même d’astronomie.

1446. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Lélia (1833) »

Les couleurs, la science, l’harmonie, affluent, se combinent et ne font jamais faute ; mais je préférerais encore une expression plus voisine du sentiment, fût-elle incomplète par endroits.

1447. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Pensées »

XXX Si l’on va au-delà des jeux éphémères de la littérature actuelle, qui encombrent le devant de la scène et qui gênent la vue, il y a en ce temps-ci un grand et puissant mouvement dans tous les sens, dans toutes les sciences.

1448. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — I »

« La science moderne, en fouillant cette terre, a découvert les restes informes de races d’hommes, d’espèces informes aussi, immenses ; … d’autres mondes, d’autres globes existent, auprès desquels celui-ci n’est rien… Les royaumes se succèdent et se détruisent ; une civilisation est remplacée par une civilisation.

1449. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rostand, Edmond (1868-1918) »

Rostand nous avait révélé sa science parfaite du solécisme ; dans le fameux sonnet à Mme Sarah Bernhardt, qu’il détailla avec un art consommé de comédien, et qui fit le tour du monde, le sonnet de : Reine de l’attitude et princesse du geste, nous trouvions cet absolu barbarisme : En écoutant ta voix, nous devenons incestes.

1450. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’Âge héroïque du Symbolisme » pp. 5-17

Il y a ceux qui ne mettent pas tout leur espoir dans la Science.

1451. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre III. L’analyse externe d’une œuvre littéraire » pp. 48-55

La science a ainsi deux façons de procéder qui se suivent, s’enchaînent régulièrement et se complètent l’une l’autre.

1452. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Préface. de. la premiere édition. » pp. 1-22

  Nous ne parlerons point des Auteurs qui n’ont cultivé que les Sciences : l’Ouvrage eût été trop volumineux ; d’ailleurs nous n’aimons à parler que de ce que nous entendons.

1453. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Odes et Ballades » (1822-1853) — Préface de 1824 »

On a rassemblé ci-dessus quelques exemples pareils entre eux de ce faux goût, empruntés à la fois aux écrivains les plus opposés, à ceux que les scholastiques appellent classiques et à ceux qu’ils qualifient de romantiques ; on espère par là faire voir que si Calderon a pu pécher par excès d’ignorance, Boileau a pu faillir aussi par excès de science ; et que si, lorsqu’on étudie les écrits de ce dernier, on doit suivre religieusement les règles imposées au langage par le critique, il faut en même temps se garder scrupuleusement d’adopter les fausses couleurs employées quelquefois par le poëte.

1454. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Fontenelle, et le père Baltus. » pp. 2-16

On y trouve un écrivain dont les grands talens doivent faire oublier ses Lettres du chevalier d’Her… ses comédies peu théâtrales, son Apologie des tourbillons de Descartes & les Essais informes qu’il a faits dans les genres de Lucien & de Théocrite ; plus heureux dans ceux de Quinault & de Bacon, & surtout dans la géométrie ; faisant aimer les sciences les plus abstraites ; réunissant la subtilité du raisonnement à un stile qui lui est particulier & qui a fait beaucoup de mauvais imitateurs ; ayant plus d’esprit que de génie, & plus de délicatesse que d’invention ; placé sous deux règnes pour mériter l’estime de deux siècles, & par la variété de ses connoissances, & par la singularité de son ame toujours paisible, modérée, égale, inaccessible aux mouvemens inquiets ou violens, qui rendent les autres hommes malheureux ; fait, en un mot, pour les agrémens & les délices de la société, mais non pour être l’exemple des belles ames, des cœurs sensibles & reconnoissans.

1455. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — De la langue Françoise. » pp. 159-174

Celles que M. l’évêque du Puy, écrivain qui, à l’exemple de Bossuet & de Fénélon, joint à l’amour des sciences le goût de la littérature, donne dans son Essai critique sur l’état présent de la république des lettres, méritent de l’attention.

1456. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 9, des obstacles qui retardent le progrès des jeunes artisans » pp. 93-109

S’il vient en des temps malheureux, sans Auguste et sans Mécene, ses productions ne seront ni fréquentes, ni de si longue haleine que s’il étoit né dans un siecle plus fortuné pour les arts et pour les sciences.

1457. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Lenient » pp. 287-299

Et il va tout à l’heure nous le professer dans sa manifestation la plus profonde, la plus compliquée, la plus fébrile : le rire aux mille faces de cette époque merveilleusement confuse et puissante, ce rire du Moyen Âge, diabolique comme la science ou ingénu comme l’innocence… Lequel des deux, puisque le procès n’est pas vidé ?

1458. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Francis Wey » pp. 229-241

Comme les rats de La Fontaine : Qui, les livres rongeants, Se font savants jusques aux dents, Wey est bien savant jusque-là, mais il les montre toujours dans un sourire très franc, ces dents saines que la science n’a pas gâtées et sur lesquelles le Pédantisme n’a jamais allongé son insupportable moue et fait son museau de dignité.

1459. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Léopold Ranke » pp. 1-14

Les retracer fidèlement, mais sous l’impression de ce coup porté à l’esprit, qui doit toujours le féconder, semble une chose aisée ; et cela l’est si peu, néanmoins, que, depuis Hérodote jusqu’à nos jours, on trouve bien sur son chemin quelques bons romans historiques et quelques essais (good historical romances and good historical essays), mais, dans toute la rigueur du mot, pas une irréprochable histoire. » Et, pour mieux creuser sa pensée, le critique anglais ajoutait : « Dans les sciences, il est des œuvres qu’on peut appeler parfaites.

1460. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Μ. Eugène Hatin » pp. 1-14

Il avait fondé, comme médecin, une maison des pauvres, qu’il soignait gratis, espèce de Petit manteau bleu de la science dans un temps qui produisait Vincent de Paul.

1461. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIV. M. Auguste Martin »

La Chine, nonobstant, est de tous les pays du globe celui-là où la Philosophie et la Science, et par conséquent la Morale, leur fille stérile, ont le plus piétiné ces débris de flambeaux renversés.

1462. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Barthélemy Saint-Hilaire »

Et cependant voici un écrivain impersonnel comme la Raison et comme la Science, que je lis comme si j’avais affaire à une forte ou à une ardente personnalité !

1463. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Émile Augier, Louis Bouilhet, Reboul »

Venu l’un des derniers de cette école plastique dont Gautier est le chef puissamment correct et presque radieux, Bouilhet n’a vu la société romaine que par ses côtés matériels d’art compliqué et de corruption colossale : aussi a-t-il reproduit avec la science d’un antiquaire l’inventaire éclatant ou immonde de cette société au temps des empereurs, et s’est-il perdu dans cette abominable immensité.

1464. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Pécontal. Volberg, poème. — Légendes et Ballades. »

Depuis, dans l’infini mon âme se promène, Vingt fois j’ai fait le tour de la science humaine !

1465. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Charles Didier » pp. 215-226

Après Balzac, qu’il faudra citer ici bien longtemps et pour tant de choses, après Balzac, qui, lui aussi, a fait entrer, et Dieu sait avec quelle habileté, quel tact, quelle soudaineté préparée, quelle science de composition supérieure, des récits, des romans entiers dans des conversations, il n’est plus permis de s’en tenir à des rubriques aussi lâchées, à des artifices de mise en scène aussi élémentaires et aussi usés que les rubriques et les artifices de M. 

1466. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXV. Des éloges des gens de lettres et des savants. De quelques auteurs du seizième siècle qui en ont écrit parmi nous. »

Des savants dans les langues, tels qu’Adrien Turnèbe, un des critiques les plus éclairés de son siècle, Guillaume Budé, qu’Érasme nommait le prodige de la France, et dont il eut la faiblesse ou l’orgueil d’être jaloux, qui passait pour écrire en grec à Paris comme on eût écrit à Athènes, et qui, malgré ce tort ou ce mérite, fut ambassadeur, maître des requêtes et prévôt des marchands ; Longueil, aussi éloquent en latin que les Bembe et les Sadolet, et mort à trente-deux ans, comme un voyageur tranquille qui annonce son départ à ses amis ; Robert et Henri Étienne, qui ne se bornaient pas, dans leur commerce, à trafiquer des pensées des hommes, mais qui instruisaient eux-mêmes leur siècle ; Muret exilé de France, et comblé d’honneurs en Italie ; Jules Scaliger, qui, descendu d’une famille de souverain, exerça la médecine, embrassa toutes les sciences, fut naturaliste, physicien, poète et orateur, et soutint plusieurs démêlés avec ce célèbre Cardan, tour à tour philosophe hardi et superstitieux imbécile ; Joseph Scaliger sort fils, qui fut distingué de son père, comme l’érudition l’est du génie ; et ce Ramus, condamne par arrêt du parlement, parce qu’il avait le courage et l’esprit de ne pas penser comme Aristote, et assassiné à la Saint-Barthélemi, parce qu’il était célèbre, et que ses ennemis ou ses rivaux ne l’étaient pas.

1467. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre VII. Dernières preuves à l’appui de nos principes sur la marche des sociétés » pp. 342-354

Si la Providence n’eût ainsi conduit les choses humaines, on n’aurait pas eu la moindre idée ni de science ni de vertu.

1468. (1888) Études sur le XIXe siècle

Ce dernier, esprit réfléchi, sérieux, qui aimait à faire le tour des questions, travaillait à compléter son instruction première en lisant de nombreux ouvrages d’histoire et même de science, Rossetti ne s’intéressait guère à l’histoire que parce qu’elle touche à la poésie, et dédaignait la science : « Que m’importe, disait-il, si c’est la terre qui tourne autour du soleil ou le soleil autour de la terre !  […] Une telle tendance n’est d’ailleurs pas exclusive à la musique : la poésie aussi, dans ses tâtonnements de l’heure actuelle, semble cherchera se débarrasser d’une indépendance qui la gêne : avec Théophile Gautier et les parnassiens, elle vise à la peinture ; à la science avec Sully-Prudhomme ; à la musique avec MM.  […] Du reste, la littérature, les arts, les sciences morales, auxquelles ils parurent un moment s’adonner avec ardeur, n’étaient guère pour eux que des dérivatifs ils demeuraient tendus vers la politique, occupant comme ils pouvaient leurs facultés et leurs forces, mais guettant le moindre symptôme de réveil national pour se jeter dans la mêlée. […] Du reste, il avait peu de goût pour la carrière militaire qu’il poursuivait sans ardeur, en employant ses loisirs à d’autres études auxquelles il se jugeait mieux approprié, les sciences administratives, l’économie politique ; et, quand des dangers de guerre qui l’avaient retenu encore quelque temps furent écartés, il quitta l’armée. […] Ses idées de jeunesse n’ont rien d’excessif : il manquait d’imagination, comme il se plaît à le reconnaître : « Chez moi, la folle du logis est une vieille paresseuse que j’ai beau exciter, elle ne se met jamais en mouvement. » Cette qualité négative le poussait aux sciences d’application et aux questions pratiques.

1469. (1911) Nos directions

Par leur sérieux, par leur méthode, par leur exactitude rigoureuse, par leur avenir et leurs espérances, tous deux se rapprochent de la Science. » Et M.  […] L’essor spontané et soudain des sciences expérimentales n’eût point suffi à susciter cette hérésie. […] Et l’on vit, la science aidant, d’aussi divers esprits que les Goncourt, Zola, Bourget, adopter, pratiquer, prêcher, sous divers noms, une doctrine unique. […] qu’y gagna la Science ? […] La vivante, vitale synthèse indiquée si sommairement par le poète, le musicien la tenta et l’obtint, non seulement à force d’instinct, mais dans l’instinct, à force de science, d’art et de « mesure ».

1470. (1929) Dialogues critiques

Pierre C’est une belle science. […] Ses livres sont bourrés de science qui démontre au moins qu’il ne la condamne pas tout entière. […] Pour la science et la philosophie, l’abstention leur suffit.

1471. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Troisième partie de Goethe. — Schiller » pp. 313-392

La science des langues orientales, dans lesquelles les Allemands ont été nos précurseurs et nos maîtres, développe de plus en plus chez nous cet attrait vers l’Orient ; que sera-ce quand nos communications qui s’ouvrent seulement avec la Chine, cette école lettrée de quatre cents millions d’hommes, nous auront initiés dans la philosophie et dans la littérature de ce mystérieux sanctuaire du dernier Orient ? […] Les fils dépaysés reconnaîtront leurs ancêtres ; les philosophies, dépouillées des vêtements divers qui les déguisent, s’embrasseront au grand jour de la science dans l’unité des langues, témoignage de l’unité des idées. […] L’homme est sorti par l’ignorance d’un état plus parfait qu’on a appelé un Éden, il y rentrera par la science.

1472. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIIe entretien. Cicéron » pp. 81-159

Il étudiait en même temps la philosophie sous les maîtres grecs de cette science, qui les contient toutes. […] Il ouvrait ainsi son âme par tous les pores à la science, à la sagesse, à l’inspiration, à l’éloquence. […] Tous répondaient qu’ils ne l’avaient pas vu, et lui donnaient ainsi le temps de fuir, quand un lâche adolescent, disciple chéri de Cicéron, fils d’un affranchi de son frère, cultivé par lui comme un fils dans la science et dans les lettres, et nommé Philologus, indiqua du geste aux soldats l’allée du jardin par laquelle son patron et son second père descendait vers la mer.

1473. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXIXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (1re partie) » pp. 241-314

Son tempérament moral était composé, par moitiés égales, de réflexion froide pour les choses et d’enthousiasme ardent pour les lettres, les arts et même pour les sciences. […] Toujours il s’est occupé de travaux, de recherches sur l’art et sur les sciences. Le duc venait souvent le voir le soir, et ils restaient à causer sciences jusqu’à une heure avancée de la nuit ; et souvent le temps me durait et je me demandais si le duc ne partirait pas.

1474. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XV. La littérature et les arts » pp. 364-405

La littérature et les arts Les Muses étaient sœurs dans la mythologie antique et les peintres se plaisaient à les représenter fraternellement unies ; ils plaçaient côte à côte et la main dans la main celle qui présidait à la science et celle dont relevait l’histoire, celle qu’invoquaient les poètes lyriques et celle qui était la divine patronne de la dansé. Mais on pourrait dire que parmi ces sœurs immortelles quelques-unes sont plus étroitement liées ensemble que les autres, ou, pour parler en style plus moderne, que, s’il y a, par exemple, cousinage entre les lettres et les sciences, il existe une parenté plus rapprochée entre les lettres et les arts. […] Ce fut au lendemain d’une époque où la musique avait suscité des admirations et des querelles ardentes ; ce fut aussi dans un temps où les âmes, troublées et désorientées, se plongeaient à s’y perdre dans la pénombre des sciences occultes et dans la grisante atmosphère du mysticisme ; ce fut enfin à un moment où le culte de l’art pour l’art rendait les écrivains plus sensibles au vêtement de l’idée qu’à l’idée même, plus attentifs à l’extérieur de la phrase qu’à son contenu.

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