La préoccupation du maître était déjà tournée sur le personnage, et il m’a dit une fois que le sujet l’avait bien des fois tenté, sans qu’il eût jamais eu occasion d’écrire sur lui : « Mais il y a, ajoutait-il, un portrait à faire. » La lettre qu’on va lire, antérieure de près de deux ans à la publication des articles qui ont paru dans le Temps, me semble être le fruit et le résumé d’une opinion qui n’a pas changé : « Ce 9 février 1867.
Coolus a été de ne pas développer davantage ce Gorgeron et en faire le personnage principal de la pièce.
Sa fortune croissante, l’appareil dont elle s’environnait, soulevaient l’envie, et l’humeur du personnage ne la désarmait pas. […] Ces grands noms que vont répétant les échos futurs, une fois livrés au tourbillon des âges, ne sont bientôt plus, si l’on n’y prend garde et si l’histoire authentique ne s’y oppose pas, que des espèces de bouts-rimés que chacun tire à soi, remplit à son gré, et sous lesquels on met un sens, des idées, des intentions que le plus souvent le personnage n’a jamais eus. […] Daru a dit : « Je ne sais si cette manière de présenter les faits est prescrite par les convenances d’un éloge académique, mais il n’en est pas-moins certain que Sully chercha à tirer de ses charges le plus d’argent qu’il put ; ce sont ses expressions. » Et j’ajouterai : C’étaient les mœurs du temps, desquelles le personnage et le caractère de Sully ne sauraient se séparer.
Tout ceci n’est qu’une invention du fabricateur pour se donner prétexte de mettre sa marquise de Créqui en relation avec quantité de personnages du xviie siècle qui continuaient de vivre au commencement du xixe . […] Elle dit quelque part, à propos des scènes du monde et des spectacles plus ou moins agités auxquels elle assistait : « Il y a trois personnages qui raisonnent bien différemment : l’homme du monde, le philosophe et le chrétien : le premier croit que ceci dure ; le second, que c’est quelque chose, mais qui passe ; et le chrétien le voit comme quelque chose déjà passé. […] [NdA] Sur cet étrange et très énigmatique personnage qui s’intitulait et qu’on appelait le comte de Courchamps, on me donne les renseignements que voici et qui, j’ai lieu de le croire, doivent fort s’approcher de l’exacte vérité.
Le prince de Conti, qui sut l’apprécier et se l’attacher par une affection solide et mutuelle, était un personnage non moins distingué lui-même par son esprit que par sa naissance et par son rang. […] Je vais mettre à la suite, faute de portraits de la main d’un grand peintre, quelques esquisses faites pour donner une juste idée du personnage éminent qui passa, en quelque sorte, à côté de l’histoire sans y entrer. […] Jal qui a eu la patience de compulser tous les registres de la ville, de Paris, et qui y a gagné d’être mieux informé que personne sur ces points de naissance, de mort ou de mariage, pour tous les personnages dont la vie appartient et se rattache par quelque acte authentique à la capitale.
Lettres inédites de Michel de Montaigne et de quelques autres personnages du XVIe siècle Publiées par M. […] La superstition historique et biographique s’attache aux moindres lettres et billets des personnages célèbres, aux signatures, aux reliques insignifiantes. […] Il ne devenait un autre personnage que pour un temps et un passage assez courts.
Elle a à s’expliquer avec sa mère, elle a à se défendre de certains bruits qui courent, et son besoin d’apologie la mène à dire sur ces deux personnages le fond de sa pensée et de ses sentiments. […] Il avait certainement de l’esprit, mais un esprit calculé, apprêté, et de très-courte haleine. — Marie-Antoinette continue de nous éclairer sur les manèges et les tortuosité de l’auguste personnage ; elle et Louis XVI savaient à quoi s’en tenir sur ces secrets de famille qu’on nous révèle aujourd’hui : « Je n’ai jamais oublié ce que ma chère maman me dit sur le caractère piémontais ; il va très bien à Monsieur, et, à cet égard, il ne s’est point mésallié. […] Sur ce point seul ne suivez ni l’exemple ni les conseils de la famille ; c’est à vous à donner le ton à Versailles ; vous avez parfaitement réussi ; Dieu vous a comblée de tant de grâces, de tant de douceur et de docilité, que tout le monde doit vous aimer : c’est, un don de Dieu, il faut le conserver, ne point vous en glorifier, mais le conserver soigneusement pour votre propre bonheur, et pour celui de tous ceux qui vous appartiennent. (1er novembre 1770.) » Une des recommandations continuelles de Marie-Thérèse à sa fille et qui reviennent sans cesse et jusqu’à satiété, c’est, après celles qui regardent la santé et la vocation à être mère, de se garder des coteries, des apartés, des sociétés privées où le sans-façon domine, de ne jamais oublier qu’on est un personnage en vue, exposé sur un théâtre, ayant un rôle à remplir ; de ne se relâcher en rien, de se surveiller soi-même en tout, dans les petites choses comme dans les grandes ; de mépriser le qu’en dira-t-on, mais aussi de ne point prêter à de justes reproches.
Brunet, qui sut distinguer sous le masque des personnages tout ce qu’il contenait de curieux et d’historique. […] Elle ne se marque guère qu’en un point : c’est un tuteur fictif, le tuteur de Mme d’Épinay, qui est censé raconter l’histoire de sa pupille, mais qui ne fait le plus souvent que lui céder la parole à elle-même, ainsi qu’aux autres personnages, dont il cite et insère au long les lettres, journaux ou conversations. […] On trouverait de semblables conseils dans un bien vieux poème français, le Roman de la Rose ; c’est une vieille aussi, qui développe à l’un des personnages allégoriques du roman les préceptes de cette exécrable morale tout intéressée.
Ce sont des morceaux agréables et piquants, publiés la plupart dans des revues et concernant des personnages qui se rattachent plus ou moins à l’époque traitée par l’historien : Sully, Henri IV, l’ancien Balzac, Bussy-Rabutin, etc. ; il y manque deux morceaux très neufs sur Molière, insérés depuis dans la Revue des deux mondes (juillet 1847 et janvier 1848). […] L’idée lui était venue d’écrire un roman, Le Gil Blas révolutionnaire ; mais il n’avait rien de cette imagination qui crée les personnages ou qui anime les détails. […] Bazin, plus large et plus naturelle, très curieuse de recherches, et laissant dans l’esprit du lecteur une idée plus nette des choses et des personnages.
Il se dit à lui-même comme il fait dire sensément à l’un de ses personnages : « Jules sait fort bien occuper son temps ; il a de la fortune, des talents : que ferait-il d’un emploi ? […] J’adore les proverbes, dit un des personnages de M. […] Leclercq, cette finesse si fréquente a le mérite d’être rapide, légère, naturelle ; elle échappe et sort à ses personnages comme une naïveté.
Avant d’en venir à être ce personnage presque respectable de la fin, Ninon avait eu une ou deux autres époques antérieures sur lesquelles je ne ferai que courir. […] Avant le terme convenu, elle s’exécuta sur le tout, se piquant d’être, en cela, plus exacte même que Marc-Aurèle, empereur et philosophe, mais qui ne payait point d’avance ses créanciers : Cela hausse un peu le courage, répondait-elle à Saint-Évremond ; et, quand vous y aurez bien pensé, vous verrez qu’il ne faut pas railler avec un banquier sans reproche… Je vous ai mandé que mes agréments étaient changés en qualités solides et sérieuses, et vous savez qu’il n’est pas permis de badiner avec un personnage. C’était juste le moment où Ninon, cessant d’être la Ninon de la Fronde, de la régence et de sa première légèreté, devenait Mlle de Lenclos et passait au personnage qu’elle a de plus en plus perfectionné et soutenu jusqu’à la fin de sa vie.
Ceci devait mourir dans le même lieu qui l’a fait naître ; mais ceux qui vivent dans une société ont des devoirs à remplir ; nous devons compte à la nôtre de nos moindres amusements. » Il semble même qu’en terminant ce mémoire, Montesquieu s’attache trop à diminuer le mérite de l’observateur, lequel a souvent besoin de toute sa subtilité d’esprit et de son invention ingénieuse pour amener le fait sous son regard : Il ne faut pas avoir beaucoup d’esprit, disait Montesquieu, pour avoir vu le Panthéon, le Colisée, des Pyramides ; il n’en faut pas davantage pour voir un ciron dans le microscope ou une étoile par le moyen des grandes lunettes ; et c’est en cela que la physique est si admirable : grands génies, esprits étroits, gens médiocres, tout y joue son personnage. […] Usbek, le personnage principal, a un sérail à Ispahan, et il le laisse en partant à la garde du grand eunuque noir, auquel il rappelle de temps en temps ses recommandations sévères. […] Ce qui nous plaît et ce que nous cherchons dans ces lettres, c’est Montesquieu lui-même se partageant légèrement entre ses divers personnages, et jugeant sous un masque transparent les mœurs, les idées et toute la société de sa jeunesse.
Mais comme il paraissait en plus d’un endroit du récit que le cardinal de Richelieu parlait en son nom et à la première personne, on imagina de supposer que Mézeray dans sa jeunesse, par reconnaissance pour les bienfaits du cardinal, avait voulu, cette fois, prendre son personnage et se masquer sous son nom, et l’on se flattait d’expliquer par ce déguisement toutes les circonstances disparates de l’ouvrage. […] Il les a distribuées par ordre chronologique ; il y a joint les notes et éclaircissements qu’on peut désirer, une introduction historique où il envisage le caractère et le rôle du personnage, et une préface où il rend compte du procédé matériel de l’écrivain. […] Cette mission lui convenait fort ; mais les propositions de la reine qui lui vinrent par le maréchal d’Ancre l’emportèrent : « Outre qu’il ne m’était pas honnêtement permis, dit-il, de délibérer en cette occasion, où la volonté d’une puissance supérieure me paraissait absolue, j’avoue qu’il y a peu de jeunes gens qui puissent refuser l’éclat d’une charge qui promet faveur et emploi tout ensemble. » En entrant au Conseil, il y devient du premier jour le personnage important ; il a, comme nous dirions, le portefeuille de la Guerre et celui des Affaires étrangères, de plus, la préséance sur ses collègues comme évêque ; et tout cela à trente et un ans.
Comment s’en accommoderont les gens de parti pris, ceux dont le siège est fait d’avance, et qui ne veulent absolument d’autre personnage que celui qu’ils ont vu sous le jour bleu du salon de Mme Récamier ? […] Et il me prend, à cette occasion, l’idée d’exposer une fois pour toutes quelques-uns des principes, quelques-unes des habitudes de méthode qui me dirigent dans cette étude, déjà si ancienne, que je fais des personnages littéraires.
Depuis un an environ que les journaux répètent de mois en mois la fastueuse annonce, chacun se demande avec défiance quels documents officiels, quels personnages instruits, Walter Scott a consultés, quelles communications particulières il a reçues. […] aux hommes de lettres ; et les personnages titrés, en les admettant à leur intimité, n’en demeuraient pas moins persuadés que ces hommes n’étaient point formés comme eux des éléments choisis de la terre (from porcelain clay of earth).
Ces instants charmants ne se rencontrent ni au moment d’un changement de scène, ni au moment précis où le poète fait sauter douze ou quinze jours au spectateur, ni au moment où le poète est obligé de placer un long récit dans la bouche d’un de ses personnages, uniquement pour informer le spectateur d’un fait antérieur, et dont la connaissance lui est nécessaire, ni au moment où arrivent trois ou quatre vers admirables, et remarquables comme vers. […] Jamais on ne trouvera ces moments d’illusion parfaite, ni à l’instant où un meurtre est commis sur la scène, ni quand des gardes viennent arrêter un personnage pour le conduire en prison.
Il est vrai qu’il faut les supposer habillés comme les personnages de Masaccio au Carmine de Florence, et que la sibylle Carmenta porte la robe des Vertus de François d’Assise dans le tableau de Sano di Pietro. […] Car jusqu’à présent les personnages où l’on était autorisé à croire qu’il s’était incarné étaient toujours un composé d’Antistius et de Métius.
Parmi les personnages qui précèdent, tous ceux dont on sait quelque chose avaient commencé par être pêcheurs. […] Il faut supposer, quelque bizarre que cela puisse paraître, que ces deus noms ont été portés par le même personnage.
Le critique opère sur un écrivain pour connaître ses ouvrages comme le romancier opère sur un personnage pour connaître ses actes. […] C’est là le danger, la pente inévitable. « Contredis-moi un peu afin que nous ayons l’air d’être deux », disait un personnage historique à son confident.
Ces peintures donnerent sans doute aux Romans de Scuderi, un degré d’intérêt qui s’est affoibli, à mesure que les personnages qu’il peignoit ont disparu de dessus la scène. […] Les autres personnages écrivent presque tous comme elle, & l’on sent trop que c’est le même homme qui les fait parler.
. — Pour le moment, Joseph est fort occupé à tresser une couronne de fleurs sauvages pour amuser le petit Jésus : ce détail familier, avec de tels personnages, n’est-ce pas là une idée touchante et hardie ? […] Puisque ce n’est pas à l’aide des personnages eux-mêmes, comment et par quoi arrivera-t-il à produire cette impression ?
Que penser donc d’une société si affolée de théâtre qu’elle se fait théâtre elle-même, et, lasse de son personnage vrai, entre dans des rôles qu’elle répète ? […] Nous ne passons pas notre temps à foudroyer des tourterelles ; seulement il nous est impossible d’admettre, et nous vous défions de la supposer, l’innocence ou la moralité de ces comédies de société où le comédien est mandé pour apprendre le rôle à monsieur, et la comédienne pour l’apprendre à madame et à mademoiselle, et où, dans le laisser-aller de la coulisse, les professeurs peuvent faire échange de fonction et intervertir leur personnage avec la souplesse de leur art et les habitudes de leur état !
Mignet et Pichot publient, nous savons à n’en pouvoir plus douter maintenant que l’impérial Cénobite, transformé par d’autres histoires en horloger et en moine, garda son ancien personnage et n’étouffa pas son regard, son action et sa volonté politique, sous la cagoule du pénitent. […] Sans doute, la chronique est encore une forme intéressante de l’histoire, mais Charles-Quint, comme tous les personnages qui font question dans les Annales du monde, échappe à la chronique par la profondeur de son caractère ; et quelque dévoué que l’on soit à ramasser les épingles que l’histoire laisse parfois tomber, il y a mieux pourtant que ce travail de bésicles et de flambeau par terre, quand il s’agit d’un homme qu’il faut regarder en plein visage pour le pénétrer.
Des scènes historiques qui ne sont que de l’imagerie historique, des découpures de personnages avec la petite couleur locale appropriée, ne valent pas la plus médiocre narration ou le plus médiocre jugement d’un historien quelconque ; car une narration et un jugement sont, après tout, des choses viriles, et des scènes historiques qui ne sont pas des chefs-d’œuvre ne sont que de la puérilité. […] Quand l’auteur de La Renaissance fait parler un de ces personnages dont on ne voit que l’action morte dans les autres histoires, il le fait positivement renaître, et son livre mérite d’être appelé Renaissance deux fois.
Tous ses personnages sont des comparses, — des poncifs, — n’ayant pas plus de vie réelle que des abstractions ou des costumes. […] « Il fait froid, approchez-vous du feu », redit-on quatre à cinq fois, dans les mêmes termes, à chaque entrée d’un nouveau personnage.
Or, ces faits et ces épisodes sont nombreux ; c’est la lutte engagée par Espérit contre tous les obstacles, qui amène devant le regard les événements et les personnages. Doué de facultés très-dramatiques, sachant s’effacer, cette chose difficile, car l’esprit est égoïste comme le cœur, et ne procédant nullement à la manière des romanciers contemporains, qui entassent les descriptions, les paysages et les portraits, dans une ivresse de plastique qui est une maladie littéraire du temps, M. de La Madelène ne fait guères de portraits qu’en quelques traits, quand il en fait, et chez lui, c’est l’action et le dialogue qui peignent le personnage, le dialogue surtout, que M. de La Madelène a élevé à un rare degré de perfection.
Ils reconnaissaient les personnages, citaient les noms véritables, en regard des noms fictifs, et, comme il arrive en pareil cas, chacun en citait de différents. […] L’on vit un sourire, un peu méprisant, errer sur les lèvres de ces illustres personnages. […] Chaque personnage, même celui qui passe, a une vie intense. […] … Il y a parmi les personnages du livre une étrange figure et qui m’enchante par l’ironie de son symbolisme. Ce personnage est Ragu.
Dans La Belle au bois dormant, le poète récrit en fort jolis vers le vieux conte féerique allégorisant sous ces personnages de fiction naïve l’amour et la vie dans leur beauté simple.
Un vieux Prêtre énergumene, déclamant contre sa Religion, & renversant, par frénésie, des Autels qu’il avoit servis toute sa vie ; de longues tirades contre tous les Cultes ; de fréquentes oraisons à la Divinité ; des personnages tous Déïstes, venant, chacun à leur tour, exhaler leur dépit contre le Sacerdoce & la Religion ; des allusions prétendues ingénieuses, & qui n’ont décélé que de l’audace ou des puérilités ; toutes ces heureuses combinaisons ont été crues propres à répandre dans les esprits ce que le Monde philosophique appelle des lumieres.
Pourvu qu’on choisisse bien son sujet, qu’on en regle ingénieusement l’economie, qu’on distribue ses personnages avec choix, que les situations forment des tableaux, pourvu que la fable soit susceptible d’incidens extraordinaires, de divertissemens délicatement variés & tirés du fond même de l’intrigue, de décorations pompeuses ou agréables, on sera toujours sûr de remplir l’objet de cette partie de nos spectacles, & de la sauver des dégoûts d’une ennuyeuse monotonie.
Si l’on veut savoir comment on pensoit de son temps sur cet étrange personnage, on peut en juger par cette Lettre d’un certain Jean Angeodanus, où l’on ne trouvera pas la politesse du style, mais une peinture assez fidele d’un Athée.
Toutes les figures allégoriques sont d’un côté ; et tous les personnages réels de l’autre.
Ce n’est pas lui, c’est certainement ce seigneur à large panse qui est si magnifiquement vêtu et qui a la contenance si avantageuse, qui arrête les premiers regards et qu’il faut regarder comme le principal personnage du tableau.
Je vais essayer de vous signaler les personnages les plus éminents de ces aréopages du monde. […] Mais je n’ai pu les retenir ; du reste, je verrai j’espère ces personnages après la grippe. […] Or, comme la majeure partie des romanciers sont devenus journalistes, je devais retrouver là quelques personnages qui m’avaient manqué au foyer de l’Opéra. […] Mérimée qui avait écrit une longue nouvelle sur ce personnage. […] en indiquant quels personnages on y désire, et si ces personnages doivent être blonds ou châtains).
On s’accorde à voir dans le personnage d’Alceste le duc de Montausier ; dans Oronte, bel esprit qui fait de mauvais vers, le duc de Saint-Aignan, que madame de Sévigné appelait le paladin par éminence, et qui était le grand ami de madame de Scudéry.
Le christianisme rehausse nécessairement l’éclat des peintures historiques, en détachant, pour ainsi dire, les personnages de la toile, et faisant trancher les couleurs vives des passions sur un fond calme et doux.
Laissez-moi ; il pose très bien maintenant, et, si vous dites un mot, il s’en ira. » Il est clair que Blake imputait à Richard III ses théories et ses rêves ; son personnage était un écho qui lui renvoyait sa propre pensée. — Une folle jouait incessamment à pair impair avec un personnage absent qu’elle croyait le préfet de police ; avant de jouer, elle regardait toujours les pièces de monnaie qu’elle mettait dans sa main et savait ainsi leur nombre ; partant, le préfet devinait toujours mal et ne manquait jamais de perdre ; plus tard, elle négligea son examen préalable ; alors le préfet tantôt perdait et tantôt gagnait. — Il est clair que, dans la première période, elle fabriquait elle-même, sans s’en douter, l’erreur qu’elle prêtait au préfet. Le point de départ de ces illusions n’est pas difficile à démêler ; on le trouve dans le procédé d’esprit de l’écrivain dramatique, du conteur, de toute imagination vive ; au milieu d’un monologue mental, une apostrophe, une réponse jaillit ; une sorte de personnage intérieur surgit et nous parle à la deuxième personne : « Rentre en toi-même, Octave, et cesse de te plaindre. » — Maintenant, supposez que ces apostrophes, ces réponses, tout en demeurant mentales, soient tout à fait imprévues et involontaires ; cela arrive souvent. […] Là aussi, le point du départ de l’erreur est dans un procédé d’esprit bien connu, celui du romancier ou de l’auteur qui se met à la place de ses personnages, épouse leurs passions, éprouve leurs émotions. — Nulle part on ne voit si nettement l’opération que dans l’hypnotisme ; l’attention du patient, limitée et concentrée, ne porte alors que sur une suite d’idées ; celle-ci se déroule seule ; toutes les autres sont engourdies et, pour un temps, incapables de renaître ; partant, les souvenirs ordinaires manquent et n’exercent plus de répression ; l’illusion qui, dans l’auteur et le romancier, se trouve défaite à chaque instant, n’est plus enrayée et poursuit son cours75. […] Au contraire, si, durant la période convenable du sommeil hypnotique, on leur suggérait le nom d’un roi, non seulement ils étaient poussés à dire que c’était le leur, mais ils sentaient et agissaient d’une manière qui témoignait de leur conviction qu’ils étaient rois. » Au lieu d’être passager, cet état peut être fixe ; il est fréquent dans les hospices, et on le rencontre souvent dans les époques d’exaltation religieuse. — Un quartier-maître dans l’armée de Cromwell, James Naylor, se crut Dieu le Père, fut adoré par plusieurs femmes enthousiastes, jugé par le Parlement et mis au pilori. — Dans les asiles, on trouve des fous qui se croient Napoléon, ou la Vierge Marie, ou le Messie, ou tel autre personnage.
III Et pourquoi tenez-vous tant, nous dira-t-on, à ce que madame Récamier laisse une trace personnelle au milieu de ces innombrables événements et de ces innombrables personnages qui ont rempli de Mémoires plus historiques la première moitié de ce dix-neuvième siècle, le siècle de la France ? Madame Récamier ne fut ni un événement, ni un personnage, ni un grand fait, ni une grande idée, ni même un grand talent, ni surtout une grande puissance, dans cette foule de choses et d’individualités qui encombrent l’histoire de ces soixante ans. […] Ces noms et ces personnages imprimaient à ma mère une physionomie de curiosité satisfaite qui donnait une illumination à ses traits. […] Je n’ose prononcer, mais je crois que l’inspiration du lyrique est supérieure à la combinaison du machiniste qui fait jouer sur la scène ces marionnettes humaines qu’on appelle des personnages dramatiques ; seulement, quand ces personnages parlent comme les font parler les grands poètes dramatiques, le génie est égal et l’emploi est différent.
Pourquoi ses personnages parlent-ils en vers ? […] Je crois qu’un poète dramatique peut se proposer de donner à ses personnages les paroles, l’accent, les gestes et toutes les franchises naturelles de la réalité. […] Ce que notre Allemand voudrait, c’est une gaieté comique, « inoffensive et douce421 », s’exerçant sur des situations, des personnages purement poétiques et fantastiques. […] C’est un dangereux personnage ; il y en a qui ne vont point sans leurs mains ; mais l’on peut dire de lui qu’il ne va pas sans ses yeux, ni sans ses oreilles. » Ce contemplateur était triste. […] De même le peuple en général, et les chefs des anciennes familles royales de la Grèce n’ont jamais pensé ni parlé comme les personnages d’Eschyle ; ils ont encore moins approché de la beauté de ceux de Sophocle.
Henry Monnier est pour lui la toile blanche sur laquelle il peint son personnage. […] Il semble qu’on les ait rencontrés dans l’existence comme des personnages réels, que vous leur avez parlé et qu’ils vous ont répondu. […] Ce sont des personnages monstrueux, composés des éléments les plus hybrides. […] C’est un personnage du livre qui parle. […] Il cherchait des noms pour baptiser ses personnages.
On a fait, il est vrai, sur le personnage d’Abraham Adams, les mêmes critiques que sur celui de Don Quichotte. […] Le personnage de M. […] Deux personnages seulement rappellent la vigueur et la précision de l’auteur de Tom Jones, le colonel Bath et le docteur Harrison. […] Tous les personnages de cette fête respirent le bonheur et la gaîté, mais un bonheur grave, une gaîté pieuse. […] Louise, sœur aînée de Valentine, est un personnage très vrai, dont chacun de nous peut retrouver le type dans la société.
Bourget s’égaie austèrement : il n’oublie pas un instant que la naïveté de son personnage indique la gravité de son mal. […] Maurice Maindron n’a pas laissé de prendre parti dans les luttes auxquelles participent ses personnages. […] Pierre Louÿs, on se sent écrasé par ce qu’ont d’excessif et de surhumain les travaux de ses personnages. […] Henry Bordeaux a su pourtant faire agir et aimer ses personnages d’accord avec les beaux paysages méditerranéens qu’il a choisis. […] Ce n’est pas jouer sur les mots de dire que les personnages de M.
Artiste, il a traité le document du jour avec un soin tout particulier, éclairant les faits, posant les personnages en quelques traits d’une rapidité sûre, fixant les notes significatives des milieux.
Il me serait impossible de vous raconter en détail les multiples aventures qui se déroulent en ce livre, de vous présenter tous les personnages que M.
On y respire un parfum de sympathie et je ne sais quoi de doux, de simple, de pur qui ne se sent pas dans les biographies des personnages illustres.
Le dialogue est juste & concis, le comique des personnages est tiré de la pensée, quelquefois de la situation, & ne consiste point dans des jeux de mots ou de froides saillies, ressources ordinaires des Auteurs médiocres.
J’aime assez dans un tableau un personnage qui parle au spectateur sans sortir du sujet.
Il ne faut pas insister, car nous pourrions croire que les jeunes dévots du symbolisme ignorent jusqu’à la Vita Nuova et ce personnage de Béatrice, dont les frêles et pures épaules restent pourtant droites sous le complexe faix des symboles dont le poète l’accable. […] Le Voyage d’un nommé Chrétien (The Pilgrim’s Progress), de Bunyan, le Voyage spirituel, de l’espagnol Palafox, le Palais de l’Amour divin, d’un inconnu, ne sont pas œuvres totalement méprisables, mais les choses y sont vraiment trop expliquées et les personnages y portent des noms vraiment trop évidents. […] Ses personnages sont créés avec des parcelles de son âme, élevées, ainsi que selon un mystère, à l’état d’âmes authentiques et totales. Si c’est un dialogue, il fera proférer à tel personnage des philosophies bien au-dessus de sa normale intelligence des choses. […] Jadis et encore au temps de Charles-Quint, il n’y avait pas de fêtes publiques sans théories de belles filles nues ; on craignait si peu le nu que les femmes adultères étaient promenées nues par les villes ; il est hors de doute que, dans les mystères, tels rôles, Adam et Ève, étaient tenus par des personnages abstraits du maillot, luxe hideux.
Il préfère à tout ce qui est plan et projet conçu dans le cabinet les idées fortuites nées à l’occasion, notées, prises sur le fait dans la vie du monde ; mais ces idées que lui suggère l’observation de chaque jour, il faut voir comme il les traduit dans son langage, même quand il les prête aux autres ou qu’il les met dans la bouche de ses personnages. […] Cette double scène de toilette quittée et reprise est une scène de comédie toute faite, avec le jeu devant le miroir ; il n’y manque que l’actrice : car tout personnage de Marivaux semble toujours être en vue d’un acteur ou d’une actrice qui le doit compléter et qu’on dirait qu’il attend. […] C’est le propre encore de chaque personnage de Marivaux d’être ainsi doublé d’un second lui-même qui le regarde et qui l’analyse : J’étais alors assise, dit-elle, la tête penchée, laissant aller mes bras qui retombaient sur moi, et si absorbée dans mes pensées, que j’en oubliais en quel lieu je me trouvais.
La dignité qu’on lui a attribuée, la grande estime, le personnage qu’elle joue en tout cela, la revanche en l’autre monde des dommages reçus en celui-ci (ce sont des encouragements à croire). […] On a là au vrai le jugement d’un ami impartial et clairvoyant sur Voltaire homme et écrivain, à cette époque déjà si avancée de sa carrière, mais avant qu’il fût devenu cette espèce de personnage amplifié de la légende philosophique et le patriarche de Ferney. […] D’Argenson ose être lui-même sans peur du ridicule et parler à sa guise sans rien de cette « petite circonspection » qui en France, dit-il, « étête » tous nos personnages.
Un personnage politique n’est pas exempt de passions assurément ; il peut les avoir toutes, et rester un grand homme d’État. […] Aucun, parmi les hommes célèbres de l’Opposition d’alors, ne donnait plus l’idée d’un personnage usé. […] Cependant, à deux pas de là, dans une nuance d’abord assez peu comprise du parti de l’Opposition, en dehors du libéralisme proprement dit, grandissait chaque jour une figure hautaine, altière, dédaigneuse et grave, un étrange et imposant personnage, s’appuyant à des convictions, presque à des dogmes en politique, et qui, sans se donner aucune peine pour cela, allait gagnant dans le pays en autorité et en prépondérance, — Royer-Collard.
Ceux qui ont vu et connu le personnage savent s’il est bien vrai qu’il fût amant de l’idéal à ce point, et si c’était en effet à l’étude austère et à la sobre contemplation des chef-d’œuvres qu’il employait ses heures solitaires ! […] Il est traité cependant comme un personnage de l’armée ; on lui donne deux bataillons pour escorte : « Voilà comme je suis organisé pour mon voyage : six mules pour porter mon bagage, mes tentes, etc. ; deux chevaux pour moi et Charles mon domestique, quatre chasseurs et un brigadier comme ordonnances, et huit cents hommes d’escorte. […] Tu vois que je suis traité en véritable personnage ; ce n’est pas que ça me touche, mais je te donne ces détails pour que tu sois sans inquiétude ; car tant de précautions sont même inutiles, la correspondance se faisant journellement avec huit hommes seulement.
Ampère un personnage littéraire très-caractérisé, un maître très à part en critique, et, pour ainsi dire, une méthode en action. […] Et ce n’est pas un pur accident et chez un seul personnage ; toute la forme de mauvais goût autour de lui reproduit, comme dans un pendant, les bizarreries courantes d’Ausone à Sidoine. […] Ampère, dans lesquels il a su ressaisir la vie même des idées et des personnages qu’il exprime, Ausone, saint Paulin, Rutilius, la confession de l’autre Paulin, petit-fils d’Ausone, Sidoine Apollinaire, toutes pages à la fois graves et charmantes, qui suffiraient à caractériser dans la critique française cette manière sobre, délicate, profonde et sûre !
Ce que décidément j’aimais dans Mme de Krüdner, c’est l’auteur et le personnage de Valérie, la femme du monde qui souffre, qui cherche quelque chose de meilleur, qui aura un jour sa conversion, sa pénitence, sa folie mystique ; qui ne l’a pas encore, ou qui n’en a que des lueurs ; qui n’a renoncé ni au désir de plaire ; ni aux élégances, ni à la grâce, dernière magie de la beauté ; qui se contredit peut-être, qui essaie de concilier l’inconciliable, mais qui trouve dans cette impossibilité même une nuance rapide et charmante dont son talent se décore. […] Ai-je donc eu raison de dire que le trop de connaissance du dedans me gâtait désormais le personnage de Valérie, et que l’idéal y périssait ? […] Malgré tout, c’est chez lui désormais, et nulle part ailleurs, qu’il faut apprendre à connaître la vie religieuse de Mme de Krüdner ; journaux manuscrits, correspondance intime, entretiens de vive voix avec les principaux personnages survivants, il a tout recherché et rassemblé avec zèle, et, dans la riche matière qu’il déroule à nos yeux, on ne pourrait se plaindre, par endroits, que du trop d’abondance.
Tous ses personnages sont si patiemment étudiés, qu’en faisant saillir tous les détails de leur individualité, il dégage les traits profonds qui en font des types puissants et compréhensifs. […] Mais surtout il a eu le don de la causerie philosophique : il excelle à faire dialoguer sur les questions actuelles de sociologie ou de science des personnages légèrement caractérisés et spirituellement excentriques915. […] la Bête, 1887, et la Vocation du comte Ghislain, 1888 (le personnage humoristique d’Eusèbe Furette).
Peut-être que tel illustre personnage disposant, à force d’argent, de la publicité du Figaro ou de quelque autre journal à grand tirage, affectera de suspecter la valeur des opinions émises par la Revue Wagnérienne… S’il y a pour de l’orgueil à revendiquer l’importance de la Revue Wagnérienne, ce péché d’orgueil, je l’admets ; et, dans cette première et (je l’espère) unique occasion, je demande la permission de réclamer tous les droits que je crois dûs à la Revue. […] Et ils me parlaient, ces personnages familiers, en des sons qui me grisaient comme le doux parfum des tilleuls fleurissants. […] Bianchini, représentant les costumes des personnages.
Le Diable boiteux, pour le titre, le cadre et les personnages, est pris de l’espagnol ; mais Lesage ramena le tout au point de vue de Paris ; il savait notre mesure ; il mania son original à son gré, avec aisance, avec à-propos ; il y sema les allusions à notre usage ; il fondit ce qu’il gardait et ce qu’il ajoutait dans un amusant tableau de mœurs, qui parut à la fois neuf et facile, imprévu et reconnaissable. […] L’auteur de Gil Blas le savait bien : son personnage, pour rester un type naturel et moyen, avait donc besoin de n’être à aucun degré monté au ton d’un stoïcien ni d’un héros. […] On y trouve un aperçu des goûts littéraires de l’auteur, quand il nous montre son personnage dans la bibliothèque de son château de Lirias (un château en Espagne), prenant surtout plaisir aux livres de morale enjouée, et choisissant pour ses auteurs favoris Horace, Lucien, Érasme.
Dans ses Mémoires, où l’homme d’esprit, l’homme de tenue et de bon ton a recouvert les fautes du personnage politique, il est convenu lui-même de quelques-uns de ces torts : « La Fayette, dit-il, eut des torts avec Mirabeau, dont l’immoralité le choquait ; quelque plaisir qu’il trouvât à sa conversation, et malgré beaucoup d’admiration pour de sublimes talents, il ne pouvait s’empêcher de lui témoigner une mésestime qui le blessait. » Il est bon que ceux qui mettent la main aux affaires publiques et aux choses qui concernent le salut des peuples le sachent bien, les hommes en face de qui ils se rencontrent, et qui souvent sont le plus faits pour être pris en considération, ne sont pas précisément des vierges, et il n’est pas de plus grande étroitesse d’esprit que de l’être soi-même à leur égard plus qu’il ne convient. […] M. de Bacourt, chargé, par la dernière volonté du prince d’Arenberg, du soin délicat de cette publication, s’en est acquitté en esprit élevé et simple, qui comprend, explique, ordonne toute chose, qui met en lumière de tout point le précieux dépôt dont il est chargé, et qui a la modestie de s’effacer devant les personnages principaux dont il éclaire et fait valoir les figures. Les trois principaux personnages en jeu sont la reine, Mirabeau et le comte de La Marck lui-même, ce dernier bien digne d’être associé aux deux autres par son jugement excellent, sa finesse et sa fermeté d’observation, sa connaissance des hommes et des choses, par son dévouement au malheur d’une reine et à l’amitié d’un grand homme, et qui justifie pleinement aujourd’hui aux yeux de la postérité ce qu’il écrivait un jour à Mirabeau : « Dieu ne m’a mis sur la terre que pour aimer et surveiller votre gloire. » Rien, en effet, de plus honorable pour la réputation politique de Mirabeau que le contenu de ces diverses notes et l’esprit général qui les anime.
Lui-même ou les personnages qu’il met en scène parlent volontiers de nature ; ils ont volontiers les yeux humides (« moi qui pleure facilement », dit-il), ils se jettent avec effusion dans les bras les uns des autres, ils arrosent leurs embrassements de larmes. […] Le sixième livre de ses Mémoires, qui nous fait parcourir en détail les différents cercles du xviiie siècle et qui nous en montre un à un tous les principaux personnages, est historiquement des plus curieux à consulter pour l’histoire des mœurs et de la société française. […] Marmontel, dans les livres suivants, continue d’exposer les faits avec lucidité et de peindre les personnages politiques avec intelligence et mouvement ; mais ce n’est plus le père qui parle à ses enfants, c’est l’historiographe de France qui remplit sa charge et ses derniers devoirs envers Louis XVI.
Dans ce voyage de Russie, toutefois, il trouva moyen encore de rendre sa position fausse en se faisant appeler le Chevalier de Saint-Pierre et en se donnant des armoiries de sa façon : bien souvent, quand il était présenté à quelque personnage de marque, on lui demandait s’il appartenait à la noble famille de Saint-Pierre qui était alors très en vue à Versailles ; il était obligé de répondre non, et il en souffrait. […] Le peintre ému se reconnaît pourtant dès les premières lignes ; les descriptions ne sont pas sèches ; le paysage n’est là que pour se mettre en rapport avec les personnages vivants : « Un paysage, dit-il, est le fond du tableau de la vie humaine. » Avant de s’embarquer à Lorient, et sans avoir encore quitté le port, en s’y promenant et en nous y montrant le marché aux poissons avec tout ce qui s’y remue de fraîche marée, l’auteur nous rend une petite toile hollandaise ; en nous peignant avec vérité le retour des pêcheurs par un gros temps, il y mêle le côté sensible dont il abusera : « C’est donc parmi les gens de peine que l’on trouve encore quelques vertus. » On reconnaît le petit couplet philosophique qui commence, mais il ne le prolonge pas trop, et cela ne va pas encore jusqu’au sermon56. […] Les pages que Bernardin a écrites sur lui sont peut-être ce qui donne la plus simple et la plus naturelle idée du personnage et de son caractère : car, à force d’écrire sur Rousseau, on finit, ce me semble, par l’alambiquer terriblement et le mettre à la torture.
Et le Grec Athanasiadis est pris par Zola, pour un personnage crayonné d’après nature. […] Enfin, vers quatre heures, l’entraînement obtenu, et des idées, et des images, et la vision des personnages, — et de la copie presque coulante jusqu’au dîner, jusqu’à sept heures. […] … Ce sera un des plus compliqués que j’aie encore faits… il y a soixante-dix personnages. » En disant cela, il brandit un affreux petit volume stéréotypé, qui se trouve être un Paul et Virginie, qu’il a emporté pour lire en voiture.
De là ce problème : — Sous quelles conditions un personnage est-il sympathique et a-t-il droit en quelque sorte d’entrer en société avec tous ? […] L’art, qui cherche en définitive à nous faire sympathiser avec les individus qu’il nous représente, s’adresse ainsi aux côtés sociaux de notre être ; il doit donc aussi nous représenter ses personnages par leurs côtés sociaux. » Le héros en littérature est avant tout un être social : « soit qu’il défende, soit même qu’il attaque la société, c’est par ses points de contact avec elle qu’il nous intéresse le plus. » Guyau montre que les grands types créés par les auteurs dramatiques ou les romanciers de premier ordre, et qu’il appelle « les grandes individualités de la cité de l’art », sont à la fois profondément réels et cependant symboliques : Hamlet, Alceste, Faust, Werther, Balthazar Claëtz. […] Zola n’est-il pas allé jusqu’à prétendre que le personnage sympathique était une invention des idéalistes qui ne se rencontre presque jamais dans la vie ?
C’est par des raisonnements analogues que le roman moderne, éliminant de l’esprit l’empire des facultés supérieures, et des groupes l’ascendant des hommes d’élite, pose en principe l’inutilité de l’effort volontaire et choisit ses personnages parmi les êtres moralement et intellectuellement dégénérés. […] Qui ne mesure, à l’énoncé seul de ce caractère de vérité, la supériorité des figures humaines montrées ainsi, sur les meilleurs dessins de personnages fictifs, dans les romans et dans les drames ? […] L’histoire ne nous fournit sur les mobiles, sur les paroles des personnages qu’elle raconte, que des indications incertaines, fondées sur des relations de témoins toujours inexacts, incomplets, altérant inconsciemment ou non la vérité, et rendant mystérieuses et brouillées les plus grandes figures du passé.
J’aime mieux une bataille tirée de l’histoire qu’une bataille d’imagination ; il y a dans la première des personnages principaux que je connais et que je cherche. […] L’autre y sème des personnages et des incidents de toute espèce, et ces personnages et ces incidens, quoique vrais, ne sont pas la nature commune des champs.
Voyez agir — ou plutôt non agir — et se mouvoir ce fantastique personnage qui, mis en présence de n’importe quel aspect de notre monde, semble être tombé subitement d’une planète en décomposition. […] En un mot ce lamentable personnage contient en lui, à doses différentes, des éléments d’involontaire bouffonnerie et de tragique faiblesse qui en font l’une des plus singulières floraisons de la multicolore humanité. […] En renonçant à m’attaquer à la doctrine tellement surnaturelle du moderne « vierge et martyr », je me demande ce qu’il faut le plus admirer, du courage de celui qui écrivit un livre semblable au sien, ou de l’inépuisable sympathie de ceux qui eurent la constance de prendre pour autre chose que ce qu’elle est au fond, cette amusante comédie dont l’auteur est le seul personnage, et à laquelle il voudrait nous voir participer.
Ses personnages masculins sont bien étranges. […] Elles prêtent à leurs personnages cette demi-surdité créatrice d’amusants quiproquos. […] Les autres personnages n’ont pas le droit d’entendre. […] Elle n’a que deux personnages. […] Je ne parle que des personnages féminins, à demi vivants dans un air irrespirable.
Mais dans quelles exagérations cet esprit si juste et si fin ne s’est-il pas laissé entraîner par le désir de mettre en relief ses personnages ? […] Le savant, l’inspiré, le législateur primitif confondent et mêlent leurs personnages divers dans la même inspiration, dans la même action. […] En réalité, le personnage politique dans Béranger est beaucoup moins considérable qu’on n’a voulu le faire. […] Deux personnages invisibles, abstraits, remplissent de leurs strophes alternées les premières veilles. […] La discussion peut porter sur le degré d’intérêt ou d’émotion que l’auteur a su donner au développement de son sujet, sur le degré de passion et de vie dont il a doué ses personnages.
Tout à coup l’indignation de l’auteur se projette d’une manière stentorienne par la bouche d’un des personnages, qui fait justice immédiate de ces divertissements de rapins.
de Voltaire, le sujet de leur Mérope sous des personnages différens.
S'il avoit eu soin d'unir la morale à la force comique ; de suivre les regles indispensables de la Comédie, destinée par son institution à instruire & à corriger ; de donner aux travers qu'il expose, les couleurs qui en font sentir & détester la difformité ; de punir sur la Scene les Personnages vicieux qu'il y introduit ; en un mot, de travailler à rendre les hommes meilleurs, autant qu'il s'appliquoit à les amuser : il est certain qu'il auroit droit de prétendre à une gloire plus brillante & plus solide que celle dont il est en possession.
Sans la presque certitude qu’on voulait en faire une contrefaçon en Belgique, et que cette contrefaçon, comme la plupart de celles que répandent en Allemagne et qu’introduisent en France les contrefacteurs belges, serait grossie d’additions et d’interpolations auxquelles je n’aurais point eu de part, je ne me serais jamais occupé de cette anecdote, écrite dans l’unique pensée de convaincre deux ou trois amis, réunis à la campagne, de la possibilité de donner une sorte d’intérêt à un roman dont les personnages se réduiraient à deux, et dont la situation serait toujours la même.
S’il y a des statues, par exemple, dans un tableau ; vous ne prendrez jamais ces statues pour des personnages vivants.
Elle avait trop vu, pour son compte, et touché de trop longue main les ressorts, pour n’en être pas froissée ; elle en causait confidemment, depuis des années déjà, avec le personnage le plus revenu246. […] La nature n’a pas cette unité, et parce que la vie de la cour et la pratique de ses intrigues auront émoussé les facultés sensibles de tel personnage, il ne faut pas conclure pourtant qu’elles soient entièrement détruites. » — Un jour, après un dîné d’apparat chez ce ministre, la conversation se soutient avec un remarquable intérêt : « Chose assez étrange (dit l’un des personnages du roman), grâce à la liberté d’esprit dont le ministre donnait l’exemple à tous, ses conviés diplomatiques n’avaient point l’air de s’étudier à ne prononcer que des paroles qui n’eussent aucun sens. […] Il suffit de savoir résister à l’entraînement qui l’accompagne, car il y a bien aussi quelque sorte d’ivresse dans les plaisirs de l’esprit. » — La machination tramée par le ministre, et qui manque de briser l’existence des personnages qui lui restent le plus chers, ne fait que retarder de peu sa chute.
Elle lui donne une impression sui generis. « Je la saisis comme le musicien saisit dans son ensemble un accord », dit un des personnages consultés. […] L’écrivain qui fait un roman, l’auteur dramatique qui crée des personnages et des situations, le musicien qui compose une symphonie et le poète qui compose une ode, tous ont d’abord dans l’esprit quelque chose de simple et d’abstrait, je veux dire d’incorporel. […] C’est, pour le romancier ou le dramaturge, une thèse à développer en événements, un sentiment, individuel ou social, à matérialiser en personnages vivants. […] Et, de même, les personnages créés par le romancier et le poète réagissent sur l’idée ou le sentiment qu’ils sont destinés à exprimer.
Il était encore à Hartwell quand M. de Talleyrand lui envoyait un personnage de l’ancienne Cour, celui-là même qui avait répondu à Louis XVI le jour de la prise de la Bastille : « Ce n’est pas une révolte, sire, c’est une révolution. » Ce personnage (M. de La Rochefoucauld-Liancourt) envoyé à Louis XVIII pour s’entretenir avec lui de la situation et l’éclairer de vive voix sur les difficultés, ne parvient pas à être reçu par le roi qui avait contre lui un ancien grief personnel ; il n’est reçu que par le favori (M. de Blacas) et revient sans avoir pu être admis.
Ces pages sont vraies en ce sens qu’elles rendent des scènes qui ont pu se passer entre deux personnages pareils78, et qu’elles trahissent la confusion des pensées qui ont pu s’agiter dans leur cerveau ; mais l’art qui choisit, qui dispose, qui cherche un sommet et un fondement à ce qu’il retrace, avait-il affaire de s’engager dans cette région variable d’accidents et de caprices, où rien n’aboutit ? […] Il est clair qu’on ne laisse aucun des personnages ayant pied sur un sol stable ; on n’a, en fermant le livre, la clef finale de la destinée d’aucun.
Quant aux personnages spirituels, aventureux, pleins de ressources et de souplesse, que ces derniers penchants tout extérieurs emportent sans contre-poids à travers la vie, rien n’est plus rare que de les voir unir la moralité et la véracité rigoureuse à une curiosité si courante et si dissipée. […] Gil Blas et Figaro sont les admirables types de ce personnage qui vit d’action plutôt que de conviction.
Chercherons-nous maintenant quel a été le caractère principal du tempérament chez les personnages marquants de cette période ? […] » Regardons de près d’autres personnages fameux alors.
Entre M. de Bonald et M. de Chateaubriand, ces deux termes extrêmes de l’école royaliste, se placent Joseph de Maistre et M. de Montlosier, personnages aussi originaux l’un que l’autre, l’un grand écrivain et penseur supérieur, l’autre publiciste incorrect, mais éloquent et vigoureux, tous deux énergiques et fiers, pleins d’honneur et de courage, de vraie souche aristocratique, et qui en d’autres temps auraient pu sauver leur caste, si elle eût produit beaucoup d’hommes semblables à eux. […] Tels sont les principaux personnages de l’école royaliste de la Restauration, tous remarquables à plus d’un titre.
La ville n’est plus un assemblage d’édifices, c’est une femme, ou plutôt un personnage mystérieux, car son sexe n’est pas désigné. […] Un auteur moderne n’eût pas manqué de le faire se jeter de préférence au cou du frère le plus coupable, afin que son héros fût un vrai personnage de tragédie.