Des groupes de jolies pêcheuses, trempant leurs jambes nues dans l’eau transparente, et se jetant, avec de joyeux rires, les gouttelettes de l’eau de leurs filets au visage, forment à chaque tournant sous vos yeux de vrais paysages du Poussin. […] XXII On est saisi tout à coup d’une certaine terreur inattendue en se voyant si près de ces cimes du haut Jura ; elles semblent former devant vous un rempart confus de hauteurs inaccessibles, à travers lesquelles il faut s’engager, sans apercevoir par quelle brèche ou par quelle poterne on pourra les aborder et les franchir. […] L’aspect de ces lignes harmonieuses dans le ciel d’Athènes, dont les profils et les contours forment ce qu’on appelle le beau dans l’architecture, — l’architecture, m’écriai-je, n’est qu’une géométrie animée : cette géométrie chante comme un poème ; ces lignes sont leur poésie ; la symétrie est l’équilibre des lignes.
Mais cette idée, il ne se l’est pas formée sur la seule foi de ces deux témoins ; elle est le résultat d’une vaste enquête préalable, qu’il n’avait pas à nous étaler. […] Cette marine formée en deux ans, etc… ; ce calme dans toutes les parties de l’empire, etc…, enfin l’administration, etc…. : voilà bien de quoi causer la surprise et l’admiration, etc…. » Est-ce que cela n’est pas glacial ? […] Le jeu changeant des mêmes causes Emeut les sens différemment Le pinceau des lis et des roses N’est formé que de mouvement ; Un frisson venu de l’abîme, Ardent et splendide à la fois, Avant d’y retourner anime Les blés, le sang, les fleurs, les bois.
La vérité, c’est que Goethe s’est formé entre la France et l’Allemagne, participant des deux, et recevant ainsi une double impulsion ; et c’est cette double impulsion qui a produit Werther. […] Au surplus, Goethe s’est peint lui-même, sous le rapport de ses croyances, dans un passage de ses Mémoires : « Lavater, dit-il, m’ayant à la fin pressé par ce rude dilemme : Il faut être chrétien ou athée, je lui déclarai que s’il ne voulait pas me laisser en paix dans ma croyance chrétienne telle que je me l’étais formée, je ne verrais pas beaucoup de difficulté à me décider pour ce qu’il appelait l’athéisme ; convaincu, d’ailleurs, comme je l’étais, que personne ne savait précisément quelle croyance méritait l’une ou l’autre qualification. » Malheureusement on ne sait trop non plus ce que c’est que la croyance chrétienne que Goethe s’était formée : c’était une espèce d’oreiller comme celui de Montaigne.
Il eût bien voulu aussi avoir un archevêque et former ainsi une province ecclésiastique à part. […] Il se forma naturellement une petite ville autour de l’évêché ; mais la ville laïque, n’ayant pas d’autre raison d’être que l’église, ne se développa guère. […] Des rues entières étaient formées des longs et hauts murs de ces demeures cloîtrées.
Ces grands conquérants de l’esprit forment les degrés par lesquels l’homme idéal de la famille Aryenne doit peu à peu s’élever à l’humanité idéale ; et chacun d’eux ajoute un son à la puissante harmonie des peuples. […] Or pour les spectateurs la compréhension de la musique est souvent rendue ou difficile ou tout à fait impossible, s’ils ne peuvent se faire une idée claire du drame qui tout d’abord s’offre à eux, s’ils ne comprennent pas les paroles par lesquelles les personnes du drame unissent dans leur sphère le cœur musical à la tête dramatique, pour former l’entier organisme artistique. […] Faisons donc au moins ce dont nous sommes capables, puisqu’un maître de l’art nous a donné la grande parole ; et rappelons-nous ces mots de ses écrits posthumes : « S’il se confirme que l’attention et l’espérance des nations » étrangères se tourne vers le déploiement de l’art allemand sur le terrain de la poésie et de la musique, nous pouvons admettre qu’elles tiennent avant tout à l’originalité et à la spécialité non troublée de ce déploiement ; puisque sans cela elles ne recevraient pas de nous de nouvelles impulsions, je crois que, à ce point de vue, il ne serait pas moins profitable à nos voisins qu’à nous-mêmes de voir former fidèlement par nous un vrai style germain. » Ce style germain, c’est l’œuvre d’art Aryenne.
Ils inventèrent des sons nouveaux : certaines notes, parleur réunion, formèrent d’autres notes ; à l’octave furent joints, chargés de significations spéciales, les accords de quarte et de quinte. […] Une administration s’est formée dans ce but ; les membres de cette administration (MM. […] Ensemble, les deux volumes forment le meuble indispensable de toute collection wagnérienne.
Car le romancier s’est formé sans nuire au poète et, si tous deux ont collaboré presque également aux Ailes brisées, le poète triomphe aux contes du Cabaret des larmes. […] « Le genêt rajeuni balançait ses branches fleuries semblables à des rayons qui lanceraient des parfums ; et le soleil avait tant de force qu’on entendait déjà au midi, dans le pré, chanter le grillon noir dont la carapace est sculptée de signes étranges… » Mais ils se sont égarés en quelque ancien chemin abandonné, creux comme un lit de torrent, et « où les racines des vieux chênes mettaient à la hauteur du front des passants le geste menaçant de leurs griffes tortueuses, de leurs serres noires ouvertes… » Arrivés, un peu effrayés, à la forêt, ils se sont enfoncés en quelqu’une de ces « cavernes glauques que formaient les trouées de verdure où s’entassait la fraîcheur ». […] Les Chansons Éternelles forment une ligne parabolique dont les deux côtés vont se perdre dans l’infini.
De plus, on peut former une gradation ascendante qui va des instincts les plus simples aux plus compliqués dans une même espèce, par exemple celle des hyménoptères déprédateurs, dont les instincts sont st merveilleux et d’une explication si embarrassante. […] — Nous ne sentons pas naître le désir, ajoute-t-on, nous le sentons seulement grandir en nous, au point même qu’il obscurcit parfois l’intelligence et nous enlève tout pouvoir d’agir. — C’est, répondrons-nous, que le désir proprement dit n’est pas l’action même de l’intelligence, qui le trouve déjà formé et croissant sans elle ; au contraire, la réaction de l’intelligence sur le désir a nécessairement conscience de soi et se voit elle-même à l’œuvre. […] Les comparaisons tirées de la chimie sont supérieures : si vous combinez l’oxygène et l’hydrogène pour former de l’eau, vous ne reconnaissez plus dans le résultat ni l’oxygène ni l’hydrogène ; toutes les propriétés ont changé, au moins en apparence165.
Ses censeurs se récrient au contraire sur les fausses idées que les poëtes se sont formées de la vertu, et sur les fables extravagantes qu’ils ont debitées des dieux. […] Voilà l’ode en possession de tout ; et l’on juge aisément de-là, que ce ne sont point les sujets qu’elle traite, qui forment son caractére particulier. […] Un génie médiocre, formé sur leurs exemples, peut tenir lieu du génie excellent qu’ils ont eu sans autre secours ; et enfin la perfection des ouvrages pourroit être de notre côté, que l’avantage du mérite personnel seroit encore du leur.
Ce mot est formé d’un mot grec, qui veut dire tenir le premier lieu : c’était, en effet, par là que s’ouvrait le drame. […] Un grand roi, réveillé par ses inquiétudes paternelles, voyant ses soldats endormis autour de lui, présente un tableau bien noble ; et les combats de son cœur forment une exposition bien touchante. […] Mais ce qui n’avait été qu’un ornement dans la tragédie, en étant devenu la partie principale, on regarde la totalité des épisodes comme ne devant former qu’un seul corps dont les parties soient dépendantes les unes des autres.
Les Encyclopédistes sont une secte de soi-disant philosophes, formée de nos jours ; ils se croient supérieurs à tout ce que l’antiquité a produit en ce genre. […] Ils diront, par exemple, que telles lois sont sagement établies en raison inverse du carré des distances ; que telle puissance, prête à former une alliance avec une autre, se sent attirer à elle par l’effet de l’attraction, et que bientôt les deux nations seront assimilées. […] Il savait distinguer l’esprit du génie ; il donnait à Quinault les sujets de ses opéras ; il dirigeait les peintures de Le Brun ; il soutenait Boileau, Racine et Molière contre leurs ennemis ; il encourageait les arts utiles contre les beaux-arts, et toujours en connaissance de cause ; il prêtait de l’argent à Van-Robais pour ses manufactures ; il avançait des millions à la compagnie des Indes, qu’il avait formée ; il donnait des pensions aux savants et aux braves officiers.
Mais ils se sont formés tous les deux à l’école de saint Augustin, et, par-delà saint Augustin, dans la lecture et la méditation de l’Évangile et de l’Ancien Testament. […] On pourra cependant ne pas se contenter de ces études fragmentaires, et vouloir en former un ensemble. […] On voit dans quel milieu, sous quelles influences littéraires, à quelle école s’est formé le talent de Le Sage. […] Les hommes alors se formaient au contact et par l’usage des hommes. […] Tout cela provoquait, éveillait, excitait, nourrissait, remplissait, formait l’esprit.
D’autre part les Champignons, qui occupent une place si considérable dans le monde végétal, s’alimentent comme des animaux : qu’ils soient ferments, saprophytes ou parasites, c’est à des substances organiques déjà formées qu’ils empruntent leur nourriture. […] Formées de molécules très complexes qui renferment, à l’état potentiel, une somme considérable d’énergie chimique, elles constituent des espèces d’explosifs, qui n’attendent qu’une étincelle pour mettre en liberté la force emmagasinée. […] Charriées par le sang artériel sous forme de glycose, ces substances se déposent, en effet, sous forme de glycogène, dans les diverses cellules qui forment les tissus. […] Chez les premiers, le corps est formé d’une série plus ou moins longue d’anneaux juxtaposés ; l’activité motrice se répartit alors entre un nombre variable, parfois considérable, d’appendices dont chacun a sa spécialité. […] C’est seulement en regardant la conscience courir à travers la matière, s’y perdre et s’y retrouver, se diviser et se reconstituer, que nous formerons une idée de l’opposition des deux termes entre eux, comme aussi, peut-être, de leur origine commune.
De cet océan de vie, où nous sommes immergés, nous aspirons sans cesse quelque chose, et nous sentons que notre être, ou du moins l’intelligence qui le guide, s’y est formé par une espèce de solidification locale. […] Bien plus, nous comparions l’intelligence à un noyau solide qui se serait formé par voie de condensation. […] Elles se forment donc sans doute sur le modèle des premières, et doivent emprunter leur force à ce que, sous la qualité, nous voyons confusément la grandeur transparaître. […] Je puis, n’importe où et n’importe quand, tracer les deux mêmes côtés comprenant le même angle ; il est évident que les nouveaux triangles ainsi formés pourront être superposés au premier, et que par conséquent le même troisième côté sera venu compléter le système. […] Les individus se juxtaposent en une société ; mais la société, à peine formée, voudrait fondre dans un organisme nouveau les individus juxtaposés, de manière à devenir elle-même un individu qui puisse, a son tour, faire partie intégrante d’une association nouvelle.
Rien, non plus, il faut le dire, ne contribue très fortement à ce qu’elles se forment. […] Il y va de notre puissance. » Et en effet ceux qui ont adopté cette règle ont formé l’aristocratie la plus puissante que le monde ait vue. […] Ceux qui ont pour passion maîtresse l’impatience de changer de lieu et de vagabonder, associeront cette passion même et formeront des hordes voyageuses ayant pour mission de parcourir le monde et de l’explorer. […] Les associations religieuses se sont formées en haine de l’individualisme et par besoin d’abnégation personnelle et de dévouement. […] Les autres disent : « Mon devoir est de me former une croyance.
. — Vous me dites que mes projets de retraite forment un grand contraste avec les vœux du public. […] Elle va clore cette correspondance qui n’a pas manqué un seul courrier, et qui doit former un volume entre vos mains. […] Ce fut alors, pour plaire à cet ami, qu’elle commença à former autour d’elle ce salon politique et lettré dont on voit la composition accidentelle dans les hommes célèbres convoqués à la lecture du Moïse dont j’ai parlé en commençant. […] Voilà pourtant, me dis-je à moi-même, ce seuil qu’ont foulé tous les jours, pendant tant d’années, les pas de tant de femmes charmantes, de tant d’hommes illustres, aimables ou lettrés, dont les noms, groupés par l’histoire, formeront bientôt la gloire intellectuelle des cinq règnes sous lesquels la France a saigné, pleuré, gémi, chanté, parlé, écrit, tantôt libre, tantôt esclave, mais toujours la France, l’écho précurseur de l’Europe, le réveille-matin du monde !
Il en avait recueilli une foule dans la bibliothèque particulière qu’il s’était formée à Athènes. […] « Les abeilles forment d’abord le gâteau de cire : ensuite elles y jettent la semence qui doit reproduire les essaims. […] Peut-être les hommes vivraient-ils en troupes comme quelques autres espèces d’animaux ; mais ils ne pourraient jamais avoir entre eux ces rapports et ces liens durables qui forment les peuples et les nations, avec les gouvernements plus ou moins parfaits qu’ils se donnent et qui subsistent des siècles. […] « Je viens de parcourir en quelques mots le cercle à peu près entier de la science morale, depuis la conscience individuelle, où éclate la loi qui régit l’âme humaine, jusqu’à ces grandes agglomérations d’individus qui forment les sociétés.
Si j’avais à former un jeune homme, je voudrais qu’il connût et étudiât nos quatre grands siècles, mais je crois que, tout bien pesé, je le mettrais de préférence à l’école du xviie et du xixe siècle. […] Louis Mandin Accueillons tout ce qu’il y a de bon et de vraiment vivant dans notre littérature, pour former la complexité de notre âme moderne ! […] Han Ryner Les cent années écoulées de 1800 à 1900 sont trop pleines et glorieuses pour ne pas former deux siècles au moins. […] « Si j’avais un jeune homme à former, nous déclare l’un d’eux, M.
Bourdaloue s’était formé à cette méthode en enseignant les sciences pendant dix-huit ans. […] Du premier ordre dans un genre où le premier ordre est formé de Pascal, de La Rochefoucauld, de La Bruyère, de Nicole, quand Nicole écrit le Traité des moyens de conserver la paix parmi les hommes, cela veut dire que Vauvenargues est leur égal ; c’est en dire trop. […] Les maximes sont de la personne ; elles forment comme une sagesse individuelle, accommodée à l’humeur, à la bonne et à la mauvaise santé, aux revers et aux succès ; les principes sont des règles à l’aide desquelles l’homme domine et conduit la personne. […] Il dit des grands : « La nature toute seule a environné leur âme d’une garde d’honneur et de gloire. » Et quelques lignes plus haut : « Un sang plus pur s’élève plus aisément ; il en doit moins coûter de vaincre les passions à ceux qui sont nés pour remporter des victoires. » Il dit de leurs craintes : « Exempts de maux réels, ils s’en forment même de chimériques, et la feuille que le vent agite est comme la montagne qui va crouler sur eux. » Et ailleurs : « Voici ce qu’on découvrait de certains héros vus de près.
Wagner était, aussi, savant ; mais il était en plus poète, et il nous dit que c’est « avec un ravissement de joie » qu’il s’aperçut de l’identité des légendes, que Tristan n’est qu’une légère variation, et qu’il pouvait écrire le drame de la mort par amour (« der Tod durch Liebesnoth »), sans quitter, à proprement parler, le cadre tracé par son Ring ; au contraire, que cela en formerait « un acte complémentaire » (VI, 479). […] C’est ce qui fait qu’il est si foncièrement différent des mythes germaniques, par exemple, et aussi de toutes ces légendes formées d’un amalgame de traditions teutonnes, arabes, pseudo-classiques, — qui sitôt formèrent la matière de toute la poésie européenne, soit orale, soit écrite. […] (III, 40) » Et autre part : « Unis, nous formerons le lien de la sainte Nécessité, et le baiser fraternel qui scellera ce lien sera l’Œuvre d’Art commune de l’Avenir : en elle nous serons un : « Divulgateurs et montreurs de la Nécessité, sachants de l’Inconscient, voulants de l’Involontaire, témoins de la Nature, — hommes heureux !
Il est triste de voir Wagner, l’ennemi acharné, irréconciliable, de nos théâtres, de nos concerts, de tout ce qui s’affuble chez nous du nom d’art, de le voir devenir aujourd’hui la proie précisément des directeurs de théâtre et de concerts ; et de voir que, grâce aux agissements de ces industriels, ce sont les habitués de leurs établissements qui forment aujourd’hui la grande majorité de ce qu’on se plaît à appeler des Wagnériens. […] Et ce Bayreuth, dans lequel l’influence personnelle de Wagner, que rien au monde ne saurait remplacer, vit encore dans la personne de sa veuve, — ce Bayreuth où se trouve réuni pour la haute direction des œuvres à représenter un ensemble d’hommes qui ont été formés par Wagner lui-même, qui connaissent ses intentions dans chaque détail, — ce Bayreuth ne vit que par le dévouement de ces quelques personnes, et dépend pour son existence des hasards de chaque année. […] La Lettre sur la musique ne peut aucunement remplacer les écrits qui forment la base de tout l’édifice wagnérien : Art et Révolution, l’Œuvre d’art de l’avenir et Opéra et drame, et elle ne peut remplacer pour la connaissance de l’évolution artistique du maître sa Communication a mes amis. — M. […] Lamoureux, j’ai eu le bonheur d’apercevoir des groupes que l’on m’a dit formés de l’élite de nos Wagnériens.
On ne conçoit pas comment un homme d’esprit, sans entendre un seul mot de grec, a pu former le projet de mettre l’Iliade en notre langue ; comment, dans l’idée de réduire ce poëme, d’en retrancher le gigantesque, le puérile & le superflu, il l’a rendu plus long & plus chargé d’inutilités ; comment, d’un corps plein d’embonpoint & de vie, il n’en a fait qu’un squelette aride & désagréable. […] Les deux traducteurs s’accablèrent mutuellement de reproches ; mais ces reproches tomboient moins sur ce que d’un excellent antique, ils s’en avoient fait une copie méconnoissable, que sur ce qu’ils avoient formé le dessein, l’un, de déifier Homère ; & l’autre, de lui ravir l’apothéose. […] Le Juvénal François, jeune alors, mais d’un goût fin, & d’un jugement formé, sentit allumer sa bile : il en vomit des torrens. […] On remarque ce persifflage, même au milieu des horreurs dont nos romans sont remplis ; au milieu des images terribles formées par les trahisons, par les enlevemens, les poisons, les poignards, les enterremens précipités, les résurrections & les phantômes ; ressources admirables pour un génie stérile.
Il s’était formé, de ses débris mêlés aux dialectes vulgaires des provinces romaines et de la Gaule méridionale, une langue usuelle, imparfaite, flottante, diverse, par laquelle on s’entendait tant bien que mal dans la conversation, mais sans pouvoir y graver ses pensées dans cette forme solide, convenue et uniforme, seule langue avec laquelle on puisse construire des monuments de style. […] Les ouvrages laissés par ce philosophe, sans repos et sans limites, formèrent les bibliothèques des monastères et des universités du temps. […] Le christianisme dut favoriser encore davantage l’intervention des choses surnaturelles dans la littérature qui se forma sous ses auspices. […] Du haut du temple céleste, au milieu des âmes justes qui vont et viennent par la voie lactée, Scipion écoute les sept notes de cette musique éternelle que forment les astres ; il contemple les espaces où ils roulent, et, quand enfin il aperçoit la terre si petite, et sur la terre le point obscur qui est l’empire romain, il a honte d’une puissance qui trouve si tôt ses limites, il aspire à une félicité que rien ne circonscrive.
Buffon, qui estimait Massillon le premier de nos prosateurs, semble l’avoir eu présent à la pensée lorsque, dans son Discours sur le style, il a dit : Pour bien écrire, il faut donc posséder pleinement son sujet ; il faut y réfléchir assez pour voir clairement l’ordre de ses pensées et en former une suite, une chaîne continue, dont chaque point représente une idée ; et, lorsqu’on aura pris la plume, il faudra la conduire successivement sur ce premier trait, sans lui permettre de s’en écarter, sans l’appuyer trop inégalement, sans lui donner d’autre mouvement que relui qui sera déterminé par l’espace qu’elle doit parcourir. […] Une telle nuance de regret exprimée en chaire par l’orateur sacré me semble indiquer déjà toute une transition vers un autre siècle : les Fénelon et les Massillon furent des premiers en effet à incliner de ce côté et à former des vœux pour une royauté plus populaire et plus familière.
pourquoi lui-même ne se chargerait-il pas de former ce recueil complet, en ne négligeant rien de ce qui pourrait l’enrichir et l’éclairer du côté de l’Allemagne, et en n’y ajoutant en fait de notes et d’érudition française que ce qui serait nécessaire ? […] La collection qu’elle avait formée était célèbre ; elle en avait confié la garde au savant Baudelot, qui avait toute l’érudition et la naïveté d’un antiquaire et dont elle s’amusait quelquefois.
Dans la première partie, il avait eu pour guide, comme il le dit lui-même en commençant, la chronique de Jean le Bel, chanoine de Saint-Lambert de Liège (je change à peine quelques mots dans ma citation pour qu’on puisse lire couramment) : On dit, et c’est vrai, que tout édifice est formé et maçonné une pierre après l’autre, et toutes grosses rivières sont faites et rassemblées de plusieurs ruisseaux et fontaines : de même les sciences sont extraites et compilées par plusieurs clercs et savants, et ce que l’un sait l’autre ne le sait pas : pourtant il n’est rien qui ne soit su de loin ou de près. […] Jules Quicherat a vu de lui à Arras un portrait dessiné, le seul authentique, et qu’il estime provenir de Belgique, et d’une collection formée par les ducs de Bourgogne ; il a bien voulu m’en montrer une esquisse fidèle qu’il en a prise.
Il formera deux volumes in-8º, 350 pages chacun. […] Dans un cours que je faisais à Liège il y a six ans et dont M. de Chateaubriand et ses amis formaient le sujet principal, je disais quelques-unes de ces choses ; sur ce point en particulier qui tient à la production du Génie du christianisme, je concluais en des termes qui ont encore leur application et que je ne pourrais qu’affaiblir en essayant de les varier : Je ne crois pas me tromper, disais-je à mes auditeurs, en assurant que nous avons eu une satisfaction véritable à lire cette lettre de Chateaubriand à Fontanes, qui nous l’a montré sous l’empire d’une haute exaltation sensible et religieuse, au moment où il concevait le Génie du christianisme.
Feuillet de Conches font déjà connaître et dont la publication plus entière deviendra possible avec les années, formera un livre qui se placera tout naturellement à côté du recueil des lettres du Poussin, celui de tous les peintres de qui Léopold Robert relevait le plus, et dont il écrivait à un ami : J’ai été enchanté de me rapprocher autant avec vous pour ce que vous me dites du Poussin. […] Il fut alors envoyé à Paris vers 1810, pour s’y former sous la direction d’un compatriote, Girardet ; il fréquentait en même temps l’atelier de David et suivait ses leçons.
Il est de grandes âmes en naissant, qui, sorties de belles et bonnes races longuement formées à la vertu, et qui, puisant dans cet héritage de famille une ingénuité généreuse, se portent tout d’abord vers le bien de leurs semblables avec tendresse, avec effusion et sacrifice. […] Si M. de La Rochefoucauld avait voulu former un jeune homme à qui il se serait intéressé, le jeune duc de Longueville, à son entrée dans le monde, par exemple, il aurait pu lui faire lire ces pages pleines de conseils et de recommandations adroites, fondées sur la connaissance parfaite des esprits.
Cependant il se formait à cette époque, et surtout chez les jésuites, toute une génération polie, assez mondaine, qui avait un pied dans la littérature du temps et un autre dans la littérature scolaire, et qui sut faire de la poésie latine une branche de côté, une plate-bande étroite, mais encore admise dans le riche parterre du grand règne. […] Du Périer, à sa manière, le rendait bien à Santeul, qu’il prétendait avoir formé, et dont il se repentait, disait-il : « Paenitet me fecisse hominem » Leurs querelles, leurs paris en présence de Ménage pris pour arbitre, faisaient alors d’amusantes histoires.
Toutefois, s’il entend former et préparer son frère Guillaume au rôle futur qui peut lui échoir, Frédéric ne veut en rien être contrarié par lui dans ses affaires ; il est impitoyablement jaloux de tout ce qui touche à la discipline de l’armée. […] Les connaisseurs y remarqueront aisément ce mélange heureux de prudence et de hardiesse si rare et si désiré, qui unit et rassemble le plus de perfections que la nature puisse accorder pour former un grand homme de guerre.
Considérez notre littérature depuis le Moyen-Age, rappelez-vous l’esprit et la licence des fabliaux, l’audace satirique et cynique du Roman de Renart, du Roman de la Rose dans sa seconde partie, la poésie si mêlée de cet enfant des ruisseaux de Paris, Villon, la farce friponne de Patelin, les gausseries de Louis XI, les saletés splendides de Rabelais, les aveux effrontément naïfs de Régnier ; écoutez dans le déshabillé Henri IV, ce roi si français (et vous aurez bientôt un Journal de médecin domestique, qui vous le rendra tout entier, ce diable à quatre, dans son libertinage habituel) ; lisez La Fontaine dans une moitié de son œuvre ; à tout cela je dis qu’il a fallu pour pendant et contrepoids, pour former au complet la langue, le génie et la littérature que nous savons, l’héroïsme trop tôt perdu de certains grands poëmes chevaleresques, Villehardouin, le premier historien épique, la veine et l’orgueil du sang français qui court et se transmet en vaillants récits de Roland à Du Guesclin, la grandeur de cœur qui a inspiré le Combat des Trente ; il a fallu bien plus tard que Malherbe contrebalançât par la noblesse et la fierté de ses odes sa propre gaudriole à lui-même et le grivois de ses propos journaliers, que Corneille nous apprît la magnanimité romaine et l’emphase espagnole et les naturalisât dans son siècle, que Bossuet nous donnât dans son œuvre épiscopale majestueuse, et pourtant si française, la contrepartie de La Fontaine ; et si nous descendons le fleuve au siècle suivant, le même parallélisme, le même antagonisme nécessaire s’y dessine dans toute la longueur de son cours : nous opposons, nous avons besoin d’opposer à Chaulieu Montesquieu, à Piron Buffon, à Voltaire Jean-Jacques ; si nous osions fouiller jusque dans la Terreur, nous aurions en face de Camille Desmoulins, qui badine et gambade jusque sous la lanterne et sous le couteau, Saint-Just, lui, qui ne rit jamais ; nous avons contre Béranger Lamartine et Royer-Collard, deux contre un ; et croyez que ce n’est pas trop, à tout instant, de tous ces contrepoids pour corriger en France et pour tempérer l’esprit gaulois dont tout le monde est si aisément complice ; sans quoi nous verserions, nous abonderions dans un seul sens, nous nous abandonnerions à cœur-joie, nous nous gaudirions ; nous serions, selon les temps et les moments, selon les degrés et les qualités des esprits (car il y a des degrés), nous serions tour à tour — et ne l’avons-nous pas été en effet ? […] Je me suis demandé quelquefois combien il fallait de défauts joints à un talent pour former un grand orateur : il semble que M.
… Lorsque Dieu forma le cœur et les entrailles de l’homme, il y mit premièrement la bonté comme le propre caractère de la nature divine… La bonté devait donc faire comme le fond de notre cœur… La grandeur qui vient par-dessus, loin d’affaiblir la bonté, n’est faite que pour l’aider, etc. » Mais c’est méconnaître outrageusement l’expérience que de déclarer ainsi que la bonté fait le fond de l’homme : l’homme n’est précisément ni bon ni méchant ; les uns ont reçu en naissant la bonté peut-être, mais les autres ont certainement autre chose au fond du cœur, et le grand Condé plus qu’un autre homme était une preuve de cette disposition primitive et nullement débonnaire. […] Or, cela dépasse le moraliste proprement dit qui voit l’homme tel qu’il est, tout formé, à l’état stationnaire, et le même en tout temps.
Renan qui, depuis des années, avait formé le dessein de donner une histoire critique des origines et des progrès du christianisme pendant les trois premiers siècles, crut devoir modifier un peu son plan de campagne : il pensa qu’il serait bon et opportun de détacher le premier volume et de le donner hardiment sous forme de récit, presque de cinquième Évangile ; il publia la Vie de Jésus, qui vient de mettre le feu aux poudres et de passionner le public. […] Renan ait formé le même vœu et conçu le même regret.
On déchirait une feuille faisant partie du journal, et cela devait former un livre. […] Après une description heureuse du Généralife qui n’est, en quelque sorte, que le pavillon champêtre de l’Alhambra, et dont le charme principal consiste dans les jardins et les eaux, il termine par une image vivante et d’une adoration toute sympathique : « Un canal, revêtu de marbre, occupe toute la longueur de Fenclos, et roule ses flots abondants et rapides sous une suite d’arcades de feuillage formées par des ifs contournés et taillés bizarrement.
Aussi, j’y ai souvent pensé : de même qu’autour d’un vaisseau menacé d’être pris par les glaces, on est occupé incessamment à briser le cercle rigide qui menace de l’emprisonner, de même chacun à chaque instant devrait être occupé à briser dans son esprit le moule qui est près de prendre et de se former. […] Par exemple, dans une odelette galante intitulée les Parisiennes : Jupin croyait, quand il nous eut pétris, Donner aux dieux leurs plus belles étrennes ; Il dut rougir quand l’Amour et les Ris Eurent formé les Parisiennes.
Il n’est pas douteux pourtant que, quoi que l’homme veuille faire, penser ou écrire (puisqu’il s’agit ici de littérature), il dépend d’une manière plus ou moins prochaine de la race dont il est issu et qui lui a donné son fonds de nature ; qu’il ne dépend pas moins du milieu de société et de civilisation où il s’est nourri et formé, et aussi du moment ou des circonstances et des événements fortuits qui surviennent journellement dans le cours de la vie. […] Il se juge lui-même admirablement et avec une modestie charmante, et je résumerai presque ses pensées autant que les miennes, en disant : D’une génération formée par la solitude, par les livres, par les sciences, il n’a pas reçu (comme nous autres plus faibles, mais plus croisés, plus mélangés), la tradition successive.
Je donnerai de ce Portrait peu connu les principaux endroits ; et le physique d’abord, — ayez soin seulement de le rajeunir un peu en idée pour voir Louis XV dans ce premier éclat de beauté dont chacun a été ébloui : « La figure de Louis XV était véritablement belle ; il avait les cheveux noirs et bien plantés, le front majestueux et serein ; ses yeux étaient grands, son nez bien formé ; sa bouche était petite et agréable ; il n’avait pas les dents belles, mais elles n’étaient pas assez mal pour défigurer son sourire, qui était charmant, Un air de grandeur très remarquable était empreint sur sa physionomie, qui était encore rehaussée par la manière dont il s’était fait l’habitude de porter sa tète. […] Son caractère moral en résulta et se forma en conséquence : l’observateur philosophe qui avait chevauché pendant tant d’années à ses côtés, en a démêlé et nous en fait suivre à merveille tous les tours, les déguisements et les replis : « Cet homme, toujours subjugué, était toujours tourmenté parla crainte de l’être ; cette disposition influa constamment sur la conduite qu’il eut avec ses ministres.
L’avènement de Louis-Philippe n’avait fait qu’infirmer ou amortir cette contradiction de jugements, et, grâce à la tolérance de ce régime mixte, sous ce gouvernement mi-parti, se recrutant à la fois des orateurs constitutionnels et des vieux généraux de l’Empire, il s’était formé une opinion de bon sens, mais où il entrait bien de l’amalgame. […] Il ne se laisse point éblouir par l’alliance de Tilsitt et par ce concert entre les deux colosses « qui n’était nullement une œuvre pacifique, mais bien au contraire la plus formidable combinaison de guerre qui ait jamais été conçue. » Il indique et dénonce dans le duché de Varsovie, formé dès lors (1807) et comme déposé au sein de l’alliance, un germe de dissensions futures.
Comme un bon nombre de ses collègues, il arrivait à cette assemblée déjà mûr et tout formé par l’ancien régime pour le nouveau. […] Ce qui est vrai, c’est qu’il y a profit et plaisir à suivre Malouet dans ce voyage d’exploration en Guyane, dans ses visites chez les principaux colons, à les écouter, comme il fit lui-même, exposant chacun leurs observations pratiques. leurs expériences variées et concordantes sur ce sol trompeur qui rendait si vite, mais qui s’épuisait si promptement ; à le suivre encore dans ses courses à travers les forêts, à noter, chemin faisant avec lui, de curieux phénomènes d’histoire naturelle concernant les fourmis, les serpents, les singes, et en général sur les mœurs des animaux, qui, n’étant gênés par rien dans ces vastes solitudes, y forment librement des groupes et y atteignent atout le mode relatif de sociabilité dont ils sont capables.
C’est alors, vers l’an de Rome 617, qu’un jeune homme d’une famille plébéienne, mais illustre, un élève formé de la main des philosophes grecs, Tibérius Sempronius Gracchus, « dont le caractère bon et humain n’avait pu être corrompu par l’orgueil exclusif de sa nation, » comme il traversait l’Étrurie pour aller servir en qualité de questeur dans l’armée qui s’assemblait contre Numance, fut frappé de l’aspect désolé de ce pays, célèbre autrefois par sa richesse ; il s’en demanda les causes, il songea aux grands remèdes : de là plus tard ses tentatives de tribun et sa catastrophe. […] Dans un récit destiné au public, on pourrait désirer que quelques-unes de ces pages fussent détachées du texte qu’elles ralentissent, et allassent former une note ou supplément.
Il convient d’apprécier d’une manière générale les progrès de cet esprit et de cette langue dans le long espace de temps qui s’est écoulé entre le xiie et le xvie siècle, c’est-à-dire entre l’époque où s’est formée la langue française et celle où elle va devenir la plus grande langue littéraire des temps modernes. […] Si d’ailleurs les progrès sont si lents, c’est que la nation elle-même est lente à se former.
De cette comparaison sortent deux remarques fécondes : l’une, que la nature vivante paraît, en général, beaucoup moins grande et moins forte dans le nouveau monde que dans l’ancien ; l’autre, que les animaux du nouveau monde, comparés à ceux de l’ancien, forment comme une nature collatérale, comme un second règne animal, qui correspond presque partout au premier. […] Discret sur les choses établies, respectant les croyances d’autrui, se contentant de conseiller aux hommes un meilleur emploi de leur santé, de leur argent et de leur vie, sévère pour les riches, parce que tous les exemples bons ou mauvais viennent d’eux, exhortant l’Europe à la paix, non pas en politique, mais en sage, il recommande à tous un genre de vie formé sur le modèle du sien, dans l’ordre, la dignité et le travail.
Je veux dire qu’elle les a amenés à s’exercer dans des conditions auxquelles ils ne s’étaient point formés et qu’ils ont alors hésité, tâtonné, ou pris résolument des voies dangereuses. […] Mais cet esprit social, mal formé et mal apprécié, a produit et a subi lui-même d’étranges déviations.
Aussi, ces œuvres que nous relisons sans cesse ne sont-elles pas seulement des documents historiques auxquels nous pouvons demander les secrets des siècles éteints : elles ont, pour ainsi dire, passé dans notre sang, elles ont servi chacune à nous former tels que nous sommes, nous les retrouvons en descendant au fond de nous-mêmes comme des levains auxquels nous devons peut-être nos meilleures aspirations. […] La Grèce avait tiré sa littérature et ses arts de ce sens spécial que les Grecs désignaient par le mot mélodieux d’eurythmie ; Rome avait construit sur le civisme sa robuste civilisation, si pauvre d’ailleurs en œuvres originales ; l’Europe du Moyen-Âge, ces États hétérogènes formés comme par hasard par des mélanges et des heurts de nations, cette Europe informe et désordonnée comme une chanson de geste, que la diplomatie de plusieurs siècles n’a pas encore réussi à partager équitablement, cette Europe marchait et travaillait pourtant sous l’impulsion d’un sentiment tout aussi grand que l’eurythmie et le civisme : la foi religieuse.
Entre les sociétés que j’ai citées comme formées de la composition de l’ancienne maison Rambouillet, je n’ai eu garde de citer ni l’hôtel de Nevers, ni l’hôtel de Bouillon, ni l’hôtel de Soissons, qui formèrent une coterie à part, incompatible avec les précieuses, encore plus avec la bonne compagnie, une coterie trop diffamée pour la cour même, et qui appartenait à la classe des sociétés dissolues de la capitale.
Malheureusement ses démonstrations anatomiques sont faites sur des mannequins bourrés de paille et, si on les applique à des êtres vivants, on s’aperçoit qu’elles forment — épines sèches et fleurs fanées — le plus banal fagot d’erreurs connues et de vérités triviales. […] Chacun des drames rencontrés dans la vie contribue à former le futur dramaturge ; chacun des personnages vus et entendus se transforme en l’esprit du jeune Shakspeare, s’harmonise et grandit jusqu’à l’intensité tragique.
L’auteur reconnaît très bien qu’on ne saurait réduire en art les moyens de former les grands hommes ; mais il croit qu’on pourrait porter très loin l’art de rendre les hommes bons. […] Sous l’Empire, il s’était formé autour du vénérable et cordial Ducis une petite société dont faisaient partie MM.
Dans l’Esprit des Lois, il y a en quelque sorte plusieurs ouvrages, dont chacun, pris à part, est un chef-d’œuvre, mais qui, réunis, forment un tout assez discordant, dont on discerne difficilement le centre et les limites. […] Aujourd’hui il a formé une école.
Pour assembler ces unités et leur donner la cohésion de façon qu’elles forment un vers il les faut apparenter. […] Elle doit former son tissu avec des comparaisons.
Qui peut remonter d’un coup d’œil la chaîne des opérations qui les ont formées ? […] Inutiles, condamnés, inconnus dans leur gorge, abaissés au-dessous de la joyeuse végétation des collines, ils n’en forment pas moins un monde ; et quand de vos bras étendus vous en mesurez quelqu’un, fût-ce le plus malade, vous trouvez que leurs florissants rivaux sont petits.
Vous trouverez qu’une fonction est un groupe de faits concourant à un effet unique, que la nature d’un être est le groupe des faits principaux et distinctifs qui le composent, qu’une loi est un couple formé de deux faits généraux, qu’unindividu est un système distinct de faits dépendants les uns des autres, que laperfection ou l’imperfection d’un être consiste dans la complexité ou la simplicité des faits qui le constituent. […] Comment s’est-elle formée ?
Ainsi tous les Arts se montrent d’abord sous une superficie brillante & parlent à la sensibilité de l’homme bien avant de former sa raison. […] Les Écrivains ont répandu des trésors véritables, en nous donnant des idées plus saines, plus douces ; en nous inspirant les vertus faciles & indulgentes qui forment & embellissent la société. […] Ils semblent former enfin l’esprit national(19). […] Il faut observer que les gens de lettres ne forment point un corps, & conséquemment n’ont point de jurisdiction les uns sur les autres. […] Le sujet qu’on examine est important, puisqu’il tient de si près à l’instruction publique & à l’art de former les mœurs.
On essaye de les déterminer, et chacun de ces éléments, une fois reconnu, vient former un trait de la définition que l’on donne du genre. […] Dans le Génie du christianisme, c’est encore le bon goût, le grand goût, le goût formé à l’aide des anciens — et des plus anciens, si l’on peut ainsi dire, parmi les modernes, — qui demeure juge de l’art. […] Je suis d’un avis précisément contraire ; et, l’assertion vous en paraîtra peut-être audacieuse, mais je ne considère pas que l’incapacité de former des idées générales soit un titre suffisant pour nier leur intérêt et leur efficacité. […] Et quand même on a tenté de saisir les résultats généraux, quand même on a voulu se former une idée complète du développement de l’humanité, c’est sur une base toute spéciale qu’on a élevé l’édifice. […] Nisard commence, vous le savez, par poser la définition de l’esprit français, et, de toute notre « histoire littéraire », il ne retient, pour en former l’« histoire de la littérature », que les œuvres et les hommes qu’il trouve effectivement conformes ou analogues à sa définition.
Former aux bonnes mœurs l’esprit de ses enfants. […] C’était tout simplement l’esprit religieux qui créait son organe, c’était une Église nouvelle qui se formait, au service du reste de la foi ancienne ; mais c’était une Église nouvelle qui se formait ; parce qu’il est de l’essence d’une Église, là où il y a un esprit religieux, d’être libre et de se sentir gênée dans les cadres et dans l’enrégimentation gouvernementale. […] A défaut de la corporation congréganiste, il se formerait un grand nombre de monopoles privés désireux de conduire la jeunesse à leur gré. […] Jusqu’à présent, au Reichstag, les catholiques alsaciens formaient groupe intransigeant et intangible. […] En deux années, qui, dans la pratique, seront réduites à vingt mois, un troisième sentiment n’a pas le temps de se former.
Les idées qui forment le fond même de notre civilisation actuelle n’étaient pas encore accréditées. […] Oui, dans le domaine moral, les qualités du modèle se combinent pour former celles de l’observateur. […] Dieu ne laissa pas à ce résidu épars le soin de former le type de ses rapports avec lui. […] Premièrement, Dieu veut se former un peuple, et ce peuple doit descendre d’Abraham. […] Même les pensées homogènes ne s’entraident pas, ne forment pas un tout, ne s’élèvent pas en voûte vers une pierre qui leur serve de clef.
Les quatorze ou quinze années du règne de Louis XVI, antérieures à la Révolution, seront toujours un sujet de méditation et d’étude pour ceux qui cherchent à se rendre compte de la manière dont les révolutions se forment, se préparent, et de ce qu’il faudrait faire pour les prévenir et les éviter.
Le « concert européen » — formé seulement des grosses puissances intéressées, et qui ne comprend ni la Suisse, ni la Belgique, ni la Hollande, ni le Danemark, ni la Suède et la Norvège — s’est mis à poursuivre un accord presque impossible et toujours fuyant : faux tribunal d’Amphictyons, où manquent à la fois les petits peuples libres — et le Pape.
Mais celle que je vous recommande est tout autre chose : elle est formée d’un sens très-vif du réel, qui n’est pas simple, et du possible, qui est limité, et de l’habitude de considérer les aspects divers et contraires des questions ; elle est le produit naturel de l’esprit critique.
Cela fait songer aux images grotesques que forment parfois les grands rochers… [L’Élite (1899).]
Il se formera des individualités distinguées (il y en aura peu d’aussi distinguées que le cheik Gemmal-Eddin) qui se sépareront de l’islam, comme nous nous séparons du catholicisme.
Ailleurs mille animaux divers paroissent épars ; ailleurs encore l’Eridan, ce Roi des fleuves, la double couronne, la lyre, & le vaisseau célebre, qui, voguant le premier sur les eaux, brava les tempêtes, ont formé chacun leur constellation.
La Métaphysique & la Morale forment, à la vérité, les premiers traits du Tableau de ses passions ; mais elles n’indiquent que les causes, au lieu que l’Histoire nous en découvre les effets, & par-là les différens ressorts.
Voilà un bon exemple et un mot agréable formé par l’heureuse ignorance d’un jardinier.
Quand d’autres volumes se seront joints à ceux-ci, de façon à rendre l’œuvre un peu moins incomplète, cette série d’empreintes, vaguement disposées dans un certain ordre chronologique, pourra former une sorte de galerie de la médaille humaine.
Il n’avoit eu ni le tems de se former le style, ni celui de peser les faits dans une balance exacte.
Il sera traité assez longuement de ce principe fondamental de sélection naturelle dans le quatrième chapitre ; et nous verrons comment cette sélection naturelle cause presque inévitablement de fréquentes extinctions d’espèces parmi les formés de vie moins parfaites, et conduit à ce que j’ai nommé la divergence des caractères.
Je serai même aussi peu surpris qu’un homme qui auroit pris son idée du mérite des anciens sur leurs ouvrages de physique, de botanique, de geographie et d’astronomie, parce que sa profession l’auroit obligé à faire sa principale étude de ces sciences, n’admire point l’étendue des connoissances des anciens, que je suis peu surpris de voir l’homme qui a formé son idée du mérite des anciens, sur leurs ouvrages d’histoire, d’éloquence et de poesie, rempli de véneration pour eux.
Aussi esquisserons-nous avec rapidité, une fois encore, les étapes où se forma cette merveilleuse sensibilité que la mort vient d’anéantir.
» Ils n’admettent pas que le corps social soit un composé d’organes distincts et spéciaux, tous également naturels et nécessaires, chacun d’eux adapté par sa structure particulière à un emploi défini et restreint, chacun d’eux spontanément produit, formé, entretenu, renouvelé et stimulé par l’initiative, par les affinités réciproques, par le libre jeu de ses cellules.
On est content d’observer les origines de ce généreux et puissant esprit, de découvrir quelles facultés ont nourri son talent, quelles recherches ont formé sa science, quelles opinions il s’est faites sur la philosophie, sur la religion, sur l’État, sur les lettres, ce qu’il était et ce qu’il est devenu, ce qu’il veut et ce qu’il croit. […] La science autrefois ne formait que des prétentions vaniteuses, et des conceptions chimériques, lorsqu’elle se tenait à l’écart, loin de la vie pratique, et se disait souveraine de l’homme. […] Il sait un nombre infini de détails de toute espèce ; il possède un très-grand nombre d’idées philosophiques et de tout ordre ; mais son érudition est d’aussi bon aloi que sa philosophie, et l’une et l’autre forment une monnaie digne d’avoir cours auprès de tous les esprits pensants. […] Ces beaux et solides esprits forment une famille naturelle, et les uns comme les autres ont pour trait principal l’habitude et le talent de passer des idées particulières aux idées générales, avec ordre et avec suite, comme on monte un escalier en posant le pied tour à tour sur chaque degré. […] At length circumstances compelled Charles to summon another parliament : another chance was given to our fathers, were they to throw it away as they had thrown away the former ?
Beaucoup plus que nous ne le voulons, beaucoup plus que nous ne le croyons, beaucoup plus que nous ne le disons tous formés par des habitudes scolaires, tous dressés par des disciplines scolaires, tous limités par des limitations et des commodités scolaires, nous croyons tous plus ou moins obscurément que l’humanité commence au monde moderne, que l’intelligence de l’humanité commence aux méthodes modernes ; heureux quand nous ne croyons pas, avec tous les laïques, avec tous les primaires, que la France commence exactement le premier janvier dix-sept cent quatre-vingt-neuf, à six heures du matin. […] « Me voici donc à l’aise, libre de rechercher toutes les causes qui ont pu former mon personnage et sa poésie » ;… Toutes les causes qui ont pu former son personnage et sa poésie, quelle prodigieuse audace métaphysique sous les modestes espèces d’un programme littéraire ; mais pour aujourd’hui passons. […] Peu de matière est maintenant organisée, et ce qui est organisé est faiblement organisé ; mais on peut admettre un âge où toute la matière soit organisée, où des milliers de soleils agglutinés ensemble serviraient à former un seul être, sentant, jouissant, absorbant par son gosier brûlant un fleuve de volupté qui s’épancherait hors de lui en un torrent de vie. […] Car vraiment si l’historien est si parfaitement, si complètement, si totalement renseigné sur les conditions mêmes qui forment et qui fabriquent le génie, et premièrement si nous accordons que ce soient des conditions extérieures saisissables, connaissables, connues, qui forment tout le génie, et non seulement le génie, mais à plus forte raison le talent, et les peuples, et les cultures, et les humanités, si vraiment on ne peut rien leur cacher, à ces historiens, qui ne voit qu’ils ont découvert, obtenu, qu’ils tiennent le secret du génie même, et de tout le reste, que dès lors ils peuvent en régler la production, la fabrication, qu’en définitive donc ils peuvent produire, fabriquer, ou tout au moins que sous leur gouvernement on peut produire, fabriquer le génie même, et tout le reste ; car dans l’ordre des sciences concrètes qui ne sont pas les sciences de l’histoire, dans les sciences physiques, chimiques, naturelles, connaître exactement, entièrement les conditions antérieures et extérieures, ambiantes, qui déterminent les phénomènes, c’est littéralement avoir en mains la production même des phénomènes ; pareillement en histoire, si nous connaissons exactement, entièrement les conditions physiques, chimiques, naturelles, sociales qui déterminent les peuples, les cultures, les talents, les génies, toutes les créations humaines, et les humanités mêmes, et si vraiment d’abord ces conditions extérieures, antérieures et ambiantes, déterminent rigoureusement les conditions humaines, et les créations humaines, si de telles causes déterminent rigoureusement de tels effets par une liaison causale rigoureusement déterminante, nous tenons vraiment le secret du génie même, du talent, des peuples et des cultures, le secret de toute humanité ; on me pardonnera de parler enfin un langage théologique ; la fréquentation de Renan, sinon de Taine, m’y conduit ; Renan, plus averti, plus philosophe, plus artiste, plus homme du monde, — et par conséquent plus respectueux de la divinité, — plus hellénique et ainsi plus averti que les dieux sont jaloux de leurs attributions, Renan plus renseigné n’avait guère usurpé que sur les attributions du Dieu tout connaissant ; Taine, plus rentré, plus têtu, plus docte, plus enfoncé, plus enfant aussi, étant plus professeur, surtout plus entier, usurpe aujourd’hui sur la création même ; il entreprend sur Dieu créateur.
Tout se passe entre une intelligence que Dieu a créée capable de recevoir et de former les idées, surtout par la parole, et les intelligences qui la lui transmettent comme elles l’ont elles-mêmes reçue. […] Si la parole n’est pas nécessaire pour former les idées, ceux qui ont suivi la formation successive des idées chez les enfants conviendront du moins qu’elle est bien utile dans ce travail intérieur. […] Une société formée d’éléments permanents, surtout s’ils ne sont pas exclusifs, est mieux organisée pour la durée, et l’histoire l’a prouvé souvent, elle est plus fortement constituée pour la lutte. […] L’idée qu’un philosophe s’est formée du fait de la perception est vraie, si elle représente exactement les éléments réels de ce fait ; fausse, si elle ne les représente pas exactement. […] On a vu se former, dans les derniers temps de l’empire, la troisième école qui, sous le nouveau gouvernement, va se dessiner d’une manière plus nette et plus tranchée.
Les trois termes de la conscience y forment une synthèse primitive plus ou moins confuse. […] Tout dans l’univers travaille à former la merveille du grand homme. Le voilà formé, il arrive sur la scène : qu’y fait-il ? […] Quand l’esprit d’un peuple a pénétré les différents éléments dont la vie de ce peuple se compose, qu’il les a formés et constitués, il passe outre, et marche à la conquête. […] C’est aussi sous cette rude discipline que se sont formés les trois grands historiens de la philosophie, Brucker, Tiedemann et Tennemann.
Benjamin Constant et madame de Charrière96 Rien de plus intéressant que de pouvoir saisir les personnages célèbres avant leur gloire, au moment où ils se forment, où ils sont déjà formés et où ils n’ont point éclaté encore ; rien de plus instructif que de contempler à nu l’homme avant le personnage, de découvrir les fibres secrètes et premières, de les voir s’essayer sans but et d’instinct, d’étudier le caractère même dans sa nature, à la veille du rôle. […] Quant au style, il est ce qu’il peut, il n’est pas formé encore, mais l’esprit va son train tout au travers. […] de Charrière pour se former l’esprit et le cœur , en parlait avec dégoût, s’en moquait à son ordinaire, et ne les lisait pas moins avidement. […] Rien ne me fera oublier combien j’ai été heureux près de vous ; je ne formerai jamais d’habitude qui vous rende moins chère, et jamais occupation quelconque ne me tiendra lieu de vous. […] Quand le canton de Vaud fut formé, il ne crut pas d’abord à la durée de cette création démocratique.
Il n’en reste pas moins vrai que les mains de femmes ont pour former un jeune homme des délicatesses que les autres n’ont pas. […] Voilà comment se forment, grâce à toutes sortes d’influences, grâce à des lectures faites en tous sens, voilà comment se forment, chez Lamartine, les éléments et comme la matière de la poésie. […] Désormais, chez Lamartine, le poète est formé. […] Vous allez voir comment cet optimisme lui a permis de renouveler les sentiments et les idées qui forment les thèmes essentiels de la poésie lyrique. […] Il s’est formé une légende sous nos yeux et en plein xixe siècle.
À ce point de vue, il est curieux de consulter le Journal, pour rechercher d’où leurs livres sont nés et comment ils se sont formés. […] Telle est la complexité des éléments qui forment la vie d’une époque, que chacun y peut découvrir ce qu’il veut et trouver ce qu’il y cherche. […] Ensuite le milieu. — Le milieu général, formé par l’ensemble des circonstances historiques : le cadre étant fourni par la période du second Empire. — Le milieu spécial, formé par les habitudes de profession de chacun des personnages. […] Daudet, et qui passe auprès de plus d’un juge pour être son chef-d’œuvre, on trouve la plupart des thèmes qu’il a maintes fois repris, et des personnages qui forment sa clientèle la plus ordinaire. […] Ce qu’il a étudié, c’est la façon dont tous ces mondes se mêlent pour en former un autre très différent et très spécial et qui est le monde parisien.
La religion de René, qui n’est que dans l’imagination et qui ne régénère pas le cœur, ressemble fort aussi à celle qui a régné dans le premier tiers de ce siècle ; on en était aux regrets du passé et à ne plus le maudire ; on n’avait plus pourtant la force ou la faiblesse de croire, on aspirait à un avenir incertain dont on ne se formait pas l’idée, et l’on se berçait ainsi, avec soupirs et gémissements, sur un nuage de sentiments contradictoires qui ne donnaient aucun fonds à la vie, aucun point d’appui à l’action.
La conception du monde et de la vie que se sont formée, il y a trois ou quatre mille ans, les solitaires des bords du Gange, voilà que beaucoup d’entre nous y sont revenus et qu’elle convient parfaitement à l’état de nos âmes.
Allais et Willy formaient le coin des ironistes que complétaient Léo Trézenik, normand finaud sous son pseudonyme breton, et le flamand narquois, Georges Rail, directeurs de Lutèce.