/ 1838
713. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Les nièces de Mazarin et son dernier petit-neveu le duc de Nivernais. Les Nièces de Mazarin, études de mœurs et de caractères au xviie  siècle, par Amédée Renée, 2e éd. revue et augmentée de documents inédits. Paris, Firmin Didot, 1856. » pp. 376-411

En général, lorsqu’on peut étudier les proches parents d’un grand personnage ou d’un homme distingué, soit ses père et mère et aïeux, soit ses frères et sœurs, soit ses enfants, on est plus à même de le bien connaître, car on connaît la souche et la race ; on peut mieux juger de ce qu’il a dû au fonds commun, à la trame commune, et de ce qu’il y a ajouté ou de ce qu’il en a développé. […] Leurs brillants esprits, quand elles se seront développées, se porteront à aimer, à favoriser par goût les plus naturels et les moins réglés des génies d’alors ; elles en seront les inspiratrices déclarées et les patronnes : la duchesse de Mazarin ne saurait se séparer de son philosophe Saint-Évremond, ni la duchesse de Bouillon de son conteur La Fontaine. […] Renée, je n’ai trouvé qu’une manière de m’acquitter envers l’auteur : c’est de me rejeter sur un coin qu’il n’a pas dû développer, sur le dernier des petits-neveux de Mazarin, l’ambassadeur et académicien duc de Nivernais, en qui s’était adouci, sans trop s’affaiblir, le sang des Mancini.

714. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Bernardin de Saint-Pierre »

Parmi les esquisses déjà neuves et vives, qui plus tard se développeront en tableau, je recommande un coucher de soleil58, dont on retrouve exactement dans les Études, au chapitre des Couleurs, les effets et les intentions, mais plus étendues, plus diversifiées : c’est la différence d’un léger pastel improvisé, et d’une peinture fine et attentive. […] Enfin, pour achever ce petit parallèle, indiquons d’admirables pages qui terminent le Ministère de l’Homme-Esprit (1803), et dans lesquelles le profond spiritualiste et théosophe développe ses propres jugements critiques sur les illustres littérateurs de son temps ; Bernardin de Saint-Pierre doit en emporter sa part avec La Harpe et l’auteur du Génie du Christianisme. […] Villemain, dans ses deux excellentes leçons sur Bernardin de Saint-Pierre, a trop bien développé cette ressemblance connue tant d’autres heureuses analogies, pour que nous n’y courions pas rapidement, de peur de trop longue rencontre.

715. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre troisième »

Par un de ces instincts que développe et fortifie en nous l’éducation, nous cherchons l’idéal de la tragédie au-dessus de nos têtes, dans les événements considérables qui affectent directement des personnes illustres. […] Des scènes moins développées auraient laissé trop à deviner au spectateur ; au théâtre, il importe que nous ayons peu à suppléer. […] A la différence du théâtre espagnol, où l’art du poète consiste à dérouter cette logique intérieure, qui de certaines causes conclut par pressentiment certains effets, et à amuser l’imagination de l’embarras même où il jette la raison, l’art du poète, dans le théâtre antique, est de développer cette logique, et de faire profiter la raison des plaisirs de l’imagination.

716. (1911) L’attitude du lyrisme contemporain pp. 5-466

Un poème, par contre, développe une pensée, non pas suivant un ordre syllogistique mais dynamique. […] Que chacun donc « exulte d’être soi » et développe en son cœur ce qui rend l’existence plus profonde, plus grave, plus digne d’être voulue. […] Les caractères se développent dans le sens de l’activité intérieure et font juste les gestes nécessaires que commandent les diverses attitudes de l’âme. […] Ce volume, je le compare à une sonate développée en trois parties avec, pour thème générateur, l’idée de vie. […] Symbole et allégorie sont également fondés sur l’analogie, et tous deux contiennent une image développée.

717. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre V. La Renaissance chrétienne. » pp. 282-410

Pour que la grande rénovation humaine qui soulève au seizième siècle toute l’Europe pût s’achever et durer, il fallait que, rencontrant une autre race, elle développât une autre culture, et que d’une conception plus saine de là vie elle fît sortir une meilleure forme de civilisation. […] Il faut que l’homme descende en son cœur, par-dessous l’obéissance littérale et la régularité juridique ; que du royaume de la loi il pénètre dans celui de la grâce ; que de la rectitude imposée, il passe à la générosité spontanée ; que par-dessous sa première nature, qui le portait vers l’égoïsme et les choses de la terre, une seconde nature se développe, qui le porte vers le sacrifice et les choses du ciel. […] Ils n’ont pas besoin, comme les Français, qu’on leur développe les idées, qu’on les explique en beau langage clair, qu’on les modère et qu’on les lie346. […] Tout est d’accord, le lieu, le chant, le texte, la cérémonie, pour mettre chaque homme, en personne et sans intermédiaire, en présence du Dieu juste, et pour former une poésie morale qui soutienne et développe le sens moral356. […] Les circonstances en lui développèrent le naturel ; son genre de vie aidait son genre d’esprit.

718. (1895) De l’idée de loi naturelle dans la science et la philosophie contemporaines pp. 5-143

A la Renaissance, se développe une conception toute différente. […] Cette philosophie put se développer déductivement, comme la mathématique elle-même, dont elle était le prolongement ; mais vint un moment où on la confronta avec les faits, et alors on la trouva insuffisante. […] Il n’explique pas pourquoi des organismes qui se trouvaient côte à côte se sont développés en des sens divers au lieu de suivre la même voie. […] En effet, la sensation qu’il pose comme primitive et fondamentale n’est pas une simple donnée indivisible et inerte ; elle est une faculté, et elle se développe grâce à l’activité qui lui est propre. […] Au temps où les sciences mathématiques étaient les plus développées, on voulait que cette forme fût mathématique.

719. (1772) Discours sur le progrès des lettres en France pp. 2-190

Plus les connoissances augmentent, plus les idées naissent en nombre, se développent, s’étendent, s’agrandissent, & plus les images qui les expriment, varient, s’animent & se multiplient. […]   Quels que soient les avantages de l’homme sur tous les autres Êtres de la nature, il a besoin que l’instruction développe les facultés de son ame, féconde son esprit, touche son cœur, fixe ses idées morales & physiques, lui démontre la nécessité d’obéir à la raison, lui apprenne à connoître la justice, à se la rendre à lui même & aux autres, en domptant ses passions & en évitant les actions nuisibles à la société : de-là naîtra l’amour de la sagesse, fondé sur le sentiment lumineux du vrai, du juste ; sentiment qui seul peut lui servir de guide pour marcher constamment dans le sentier de la vertu, & le détourner de la voie du vice. […] Elevé à Port-Royal, c’est l’éducation qu’il reçut dans cette savante retraite, qui développa ses talens ; c’est là qu’il puisa dans l’étude de l’Antiquité ce goût, cette élégance, cette pureté, cette correction qu’on admire dans ses ouvrages ; Euripide & Sophocle furent ses guides, & le formèrent. […] Les Harangues de Démosthène & de Cicéron pénétrent son ame, développent ses talens ; il vole à la tribune, & son éloquence, sans faux ornemens, sans éclat emprunté, coule délicieusement de ses lèvres, enchante, touche & persuade. […] Elle se faisoit un jeu de la lecture des meilleurs Auteurs de l’Antiquité Grecque & Latine ; elle s’en nourrissoit, & l’on voyoit avec plaisir l’esprit se développer, le jugement se former, le goût devenir pur & solide.

720. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre IV : Sélection naturelle »

Mais l’espace me manque pour développer ce sujet. […] D’autres individus ne portent que des fleurs femelles ; celles-ci ont un pistil complétement développé et quatre étamines avec des anthères recroquevillées qui ne sauraient produire un seul grain de pollen. […] Dans ce même groupe dominant, les sous-groupes les plus récents et les plus parfaitement adaptés, en divergeant de caractères pour s’approprier les places vacantes dans l’ordre de la nature, tendront constamment à supplanter et à détruire les sous-groupes les plus anciens et les moins développés ; tandis que de petits groupes épars et des sous-groupes inférieurs finiront par disparaître. […] Nul ne saurait le prévoir : car nous savons que des groupes nombreux, autrefois considérablement développés, sont aujourd’hui disparus. […] Mêmes doutes à l’égard des plantes, chez lesquelles on ne retrouve plus l’intelligence pour servir de mesure et de guide ; de sorte que certains botanistes donnent le rang supérieur aux plantes qui possèdent la série complète de leurs organes, c’est-à-dire des sépales, des pétales, des étamines et un pistil pleinement développés dans chaque fleur ; d’autres au contraire, avec plus de vérité probablement, considèrent comme plus élevées dans l’échelle organique les plantes chez lesquelles les organes sont le plus différenciés, le plus localisés pour des fonctions spéciales, et en général moins nombreux pour la même fonction.

721. (1855) Louis David, son école et son temps. Souvenirs pp. -447

Son père vit avec plaisir se développer chez son fils une disposition qui semblait devoir le diriger vers l’étude de l’architecture. […] Après eux venait Broc, Gascon qui ne manquait pas de dispositions, mais chez lequel des singularités de caractère avaient développé une vanité puérile. […] C’est un sujet bien senti, heureusement développé, et où le talent du peintre est encore fort remarquable après les grandes qualités du compositeur. […] Il annonça que ces deux frères, d’abord simples bergers, avaient montré de bonne heure un talent naturel qui s’était bientôt développé avec le plus grand éclat. […] Pendant sa détention au Luxembourg, après la journée du 1er prairial, et lorsque sa femme vint si généreusement partager sa captivité, il oublia toutes les grandes théories qu’il avait développées à la tribune.

722. (1895) Hommes et livres

Il s’est développé, épanoui, enrichi. […] Quand Montchrétien fait des tragédies, c’est un talent qu’il développe, non une carrière où il entre. […] Il développe bien des obscurités et rectifie bien des erreurs. […] Et la confiance de l’énergique princesse s’est donnée à cette énergie impérieuse qui se développait devant elle et pour elle. […] Taine a développées dans son livre de L’Intelligence ?

723. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome I pp. 1-402

Ce goût, je le sais bien, fût demeuré impuissant, s’il n’eût trouvé pour se développer, pour se fortifier, un ensemble de facultés heureuses. […] Geneviève, j’en conviens, est un modèle d’héroïsme et de dévouement ; mais son héroïsme, pour se montrer à nous dans toute sa splendeur, aurait besoin de se développer dans un épisode unique. […] Hugo désire obtenir la pairie pour développer de semblables motions, il fera très bien de renoncer à la législature. […] Je lui pardonne de grand cœur ce titre d’une simplicité affectée, en faveur des pensées qui s’y trouvent développées. […] B. n’est qu’une amplification verbeuse, sur un thème déjà développé par l’auteur dans les Chants du Crépuscule, et ce thème c’est le doute.

724. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Étienne de La Boétie. L’ami de Montaigne. » pp. 140-161

En dédiant les vers latins de La Boétie au chancelier de L’Hôpital, Montaigne développe cette même idée : il se console, dit-il, de voir tant de hasard présider au choix des hommes qui gouvernent les autres, et, là même où la chose publique est le mieux réglée, le discernement faire faute trop souvent sur ce point, en considérant qu’Étienne de La Boétie, « l’un des plus propres et nécessaires hommes aux premières charges de France, avait tout du long de sa vie croupi méprisé ès cendres de son foyer domestique ». […] Vauvenargues, ou l’homme d’action mutilé et étouffé, ce point de vue serait à développer et, je crois, ne serait qu’exact.

725. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Histoire de la Restauration par M. Louis de Viel-Castel. Tomes IV et V. (suite et fin) »

quelle que fût, au point de vue de la théorie parlementaire, la valeur spécieuse des arguments développés par M. de Villèle, devenu vers la fin de la session le meneur et le tacticien habile du parti, la sincérité et la raison n’étaient pas de son côté et ne résultaient pas de tous ses beaux raisonnements : que me fait la rectitude des formes, si elle ne sert qu’à couvrir et à protéger la tortuosité des intentions ! […] Sa longue et belle existence permit à toutes ses qualités, je l’ai dit, de se développer à leur avantage et à leur honneur ; il usa, à force de durer et de vivre, toutes les critiques dont il avait été l’objet, et celles qui étaient injustes, et celles qui n’étaient que transitoires.

726. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Don Carlos et Philippe II par M. Gachard Don Carlos et Philippe II par M. Charles de Mouy »

Il ne connaît pas de frein à sa volonté ; pourtant sa raison n’est pas assez développée pour lui faire discerner le bon du mauvais, le nuisible de l’avantageux, ce qui est convenable de ce qui peut ne pas l’être. » Et le 29 juin suivant, après l’avoir vu : « Le prince se porte maintenant assez bien. […] Gachard, instituant le contraste et l’antithèse, trace, de Philippe II, à cette occasion, un portrait développé, que j’appellerai admirable dans son impartialité.

727. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier. »

. — Le germe de corruption qui était en moi s’est développé bien vite… » La seconde édition des Poésies (1833), qui portait pour titre : Albertus ou l’Ame et le Péché, légende théologique, du nom de la pièce principale, et qui avait au frontispice une eau-forte de Célestin Nanteuil, marquait un pas de plus. […] La Comédie, de la Mort, qui parut en 1838, nous montre de plus en plus développée dans le poète à qui le préjugé n’accorde guère que la palme de la description, une pensée intime et amère d’ennui, de dégoût consommé, la réflexion désespérée et fixe d’un néant final universel.

728. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français et de la question des Anciens et des Modernes »

L’épigramme, pour eux, était une petite pièce qui ne passait guère huit ou dix vers, et qui allait rarement au-delà, d’ordinaire en vers hexamètres et pentamètres ; c’était une inscription3 soit tumulaire, soit triomphale, soit votive ou descriptive ; une peinture pastorale trop courte pour faire une idylle, une déclaration ou une plainte amoureuse trop peu développée pour faire une élégie. […] Mais c’est André Chénier surtout que cette épigramme-idylle nous rappelle ; il l’a traduite, ou plutôt imitée et développée dans des vers que tout jeune ami des Muses a gravés de bonne heure dans sa mémoire ; c’est devenu chez lui toute une élégie : MNAïS.

729. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [V] »

Mais surtout, moyennant ce tour, l’écrivain militaire en Jomini était satisfait et à l’aise, car il pouvait pleinement exposer et développer les grandes vues et les combinaisons savantes qui avaient en général présidé aux actions de guerre de ce règne entre tous mémorable. […] « Ses idées devaient se développer selon la tournure des événements : c’était à la fois l’homme le plus décidé et le plus indécis.

730. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. J. J. AMPÈRE. » pp. 358-386

Fauriel, soit enfin en son propre lieu, dans la chaire du Collége de France, d’appliquer à l’histoire littéraire moderne les résultats de ses instincts divers, de ses études variées, et il a fini par les concentrer exclusivement sur l’histoire de la littérature française, dont il publie une introduction développée et approfondie pour les temps qui précèdent le douzième siècle164 ; dans le moment actuel de son enseignement oral, il en est arrivé au seizième. […] Fauriel contribua plus qu’aucun à développer en M.

731. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre II. Clément Marot »

Il a consigné plus tard dans un colloque (ΊὙθυοφαΥία) ses souvenirs de Montaigu : l’ascétisme imbécile et inélégant, la nourriture sordide, l’écœurante malpropreté, les manières brutales ; et de telles rancunes exprimées après vingt ans attestent bien qu’avec l’étude des anciens se développe une conception absolument nouvelle de l’ordre général de la vie. […] Cette vie de cour essayée par Anne de Bretagne, splendidement développée par François Ier, cette perpétuelle conversation des hommes et des femmes les plus illustres dans les maisons du roi, rendaient impossibles la lourdeur, le pédantisme, la prolixité, la platitude d’autrefois.

732. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre V. Le roman »

Deux romanciers qui ont circonscrit leur observation, sont arrivés à rendre supérieurement certains milieux particuliers, avec les espèces morales qui s’y développent : M.  […] Sa carrière de marin lui a fourni le moyen de développer, d’achever son tempérament : elle l’a promené par le monde, à travers toutes les formes de la nature et de la vie ; elle a rendu plus aiguës ses perceptions et ses mélancolies.

733. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre IX. La littérature et le droit » pp. 231-249

Qu’une société est un organisme qui se développe comme un grand arbre ; qu’il est inutile et même dangereux d’intervenir dans cette croissance par des idées de réforme, capables de troubler cette évolution naturelle ; qu’il est sage de bannir tout principe abstrait et général de la conduite des affaires publiques ; qu’il suffit de régler au jour le jour les intérêts de la nation sans prétendre apporter dans les rapports des hommes entre eux une équité factice. […] Aussi, dans les époques où. la presse se développe sans entraves, le livre, pour ne pas être tout à fait vaincu dans une lutte inégale, doit se faire plus mince et moins coûteux.

734. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XI. La littérature et la vie mondaine » pp. 273-292

On cause, donc, et alors se développe l’art si français de la conversation. […] Ils enseignent à causer, mais ils accoutument à dire des riens ; ils développent le travers du commérage et là manie du bel esprit ; ils apprennent à préférer les bons mots au bon sens, la crème fouettée qui amuse le palais au mets substantiel qui nourrit l’estomac ; à force de redouter l’ennui, ils rendent les gens incapables de pénétrer tout ce qui réclame peine et attention.

735. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XII. La littérature et la religion » pp. 294-312

La littérature réformée n’est pas la même dans les moments et dans les pays où le protestantisme peut se développer à l’aise et dans ceux où il est réduit à lutter pour son existence. […] J’ai développé ces idées dans une étude intitulée : L’Influence de la Suisse romande sur la France (Recueil de l’Université de Lausanne, 1890).

736. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Chansons de Béranger. (Édition nouvelle.) » pp. 286-308

Le sujet étant un peu délicat, je ne m’appesantirai pas sur cette obscurité qui a pu entrer à demi dans l’intention de l’auteur, mais qui, j’en réponds, ne se développe qu’avec peine à l’esprit de plus d’un lecteur. […] L’étincelle sous laquelle son idée lui arrive, il la développe, il l’étend, il la divise, mais c’est ce qui reste de mieux après tout dans sa chanson.

737. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Broglie. » pp. 376-398

Elles en possèdent dans leur sein les plus considérables, elles les développent, elles les produisent sous des aspects nouveaux ; elles les modifient souvent et les manifestent toujours. […] le temps de ces exagérations est déjà passé pour les Français ; nous osons le prédire, il y a, dans le bon sens général, tel que les controverses qui s’agitent depuis quinze ou vingt ans l’ont développé et préparé, un obstacle invincible à ce que ces adorations individuelles gagnent jamais du terrain, et deviennent des opinions communes et des doctrines reçues.

738. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — II. (Lettres écrites du donjon de Vincennes.) » pp. 29-50

Dans une lettre à Sophie, où il lui développe les principes de la tolérance civile (car cette correspondance n’est qu’un déversoir à toutes les pensées et à toutes les études qui l’occupent aux divers moments), il se mettra tout à coup à s’écrier : « Voyez la Hollande, cette école et ce théâtre de tolérance !  […] Mais quand il parle du grand Rousseau et du grand Buffon, j’aime à l’écouter ; il est bien d’accord avec lui-même, et on sent qu’en les admirant comme il fait, il rend hommage à ce style ample, aisé, développé, lumineux, qui est fait pour atteindre et frapper l’universalité des hommes.

739. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Correspondance entre Mirabeau et le comte de La Marck (1789-1791), recueillie, mise en ordre et publiée par M. Ad. de Bacourt, ancien ambassadeur. » pp. 97-120

Il développa ses idées sur la situation à M. de La Marck et ses vues générales sur une direction possible : « Le sort de la France est décidé, s’écria Mirabeau ; les mots de liberté, d’impôts consentis par le peuple, ont retenti dans tout le royaume. […] Et il s’offre nettement, hardiment, à lui pour être son conseil habituel, son ami abandonné, « le dictateur enfin, permettez-moi l’expression, dit-il, du dictateur : — Car je devrais l’être, avec cette différence que celui-là doit toujours être tenu de développer et de démontrer, tandis que celui-ci n’est plus rien s’il permet au gouvernement la discussion, l’examen.

740. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — I. » pp. 414-435

Ce sont ces affections qui, lorsque notre état leur est contraire, nous inspirent des constances inébranlables et nous livrent, au milieu de la foule, des luttes perpétuelles et malheureuses contre les autres et contre nous-même : mais, lorsqu’elles viennent à se développer dans des circonstances heureuses, alors elles font éclore des arts inconnus et des talents extraordinaires. […] Dans ce premier essai de Bernardin, on saisit déjà le fond et les lignes principales de son talent : c’est moins développé, moins idéal, mais, en cela même aussi, plus réel par endroits et plus vrai en un sens que ce qu’il dira plus tard dans les Études et les Harmonies.

741. (1899) Esthétique de la langue française « Le cliché  »

Cette faculté singulière de penser par clichés est quelquefois développée à un degré prodigieux et sans doute pathologique . […] L’éducation, telle qu’elle est pratiquée depuis trois siècles sans modifications sérieuses, développe particulièrement le goût de la phrase toute faite ; et il importe peu qu’elle soit latine ou seulement française, puisque les auteurs français dont on « orne la mémoire » des enfants sont des succédanés des auteurs latins et leurs meilleurs traducteurs.

742. (1759) Réflexions sur l’élocution oratoire, et sur le style en général

Réflexions sur l’élocution oratoire, et sur le style en général Ces réflexions sont destinées à développer les principes qu’on a établis sur l’éloquence dans le discours précédent ; les éloges de justice et de devoir, auxquels on a été obligé dans ce discours, et les bornes qui lui étaient d’abord prescrites, n’ont pas permis d’y traiter avec l’étendue convenable cette matière importante. […] La brièveté ne consiste donc pas à omettre des idées nécessaires, mais à ranger chaque idée à sa place, et à la rendre par le terme convenable ; par ce moyen le style aura le double avantage d’être concis sans être fatigant, et développé sans être lâche.

743. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre IV. Le rêve »

Ou bien encore le rêve nous promenait en pleine mer ; à perte de vue, l’océan développait ses vagues grises couronnées d’une blanche écume. […] C’est cette conviction que développait votre rêve.

744. (1889) Les artistes littéraires : études sur le XIXe siècle

Un d’eux va même plus loin, et, dans un article assez long, il développe l’étonnante appréciation qui peut se résumer ainsi : « Les Fleurs du Mal ne sont qu’une élucubration malsaine ; et cependant, par nature, leur auteur était un poète aimable, comme Moschus, Catulle, Rémi Belleau. […] Leur moi ne persiste pas : et cela grâce à leur tempérament physiologique, qu’ils ont d’ailleurs toujours développé, au lieu de le combattre autant qu’il était en leur pouvoir ; grâce aussi à leur méthode de travail, à leur collaboration. […] Alexandre Dumas fils avait développé la même thèse, et, faisant allusion à Molière ou à Shakespeare peignant les tortures de la jalousie ou de l’amour, il avait dit : « Ces hommes-là n’ont même pas souffert, dans la vraie acception du mot. […] Leur contact. — s’il eut quelque effet sur l’adolescent, — n’aboutit sans doute qu’à développer cette aigreur hautaine et misanthropique, dont mille fragments plus tard accuseront la trace. […] Sans doute, ils sont captivants et étranges, d’aucuns même le sont avec une préméditation et un effort trop apparents ; mais, en définitive, abstraction faite de certaines nuances presque imperceptibles, pas une idée, pas un sentiment, pas une sensation qu’ils aient su développer ou peindre avec une manière entièrement inédite.

745. (1893) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Cinquième série

Un genre, pour se développer, a besoin de trouver son atmosphère morale, son climat intellectuel, dans la complicité des opinions ambiantes. […] Mais encore faut-il bien savoir que nos subtilités se développent à l’ombre, pour ainsi parler, de notre ancienne littérature, si c’est elle autrefois qui a fait la fortune de l’esprit français. […] Même, nous la formons d’autant moins aisément que l’humanité se développe davantage ; et il semble qu’elle ait quelque chose de plus enfantin encore qu’inconcevable. […] C’est alors, après avoir comme balayé le terrain de tous les obstacles où pouvait se heurter le dogme de la Providence, et alors seulement, qu’il l’a développé dans la troisième partie de son Discours. […] J’en vois aussi de tout à fait actuelles, et, naturellement, ce sont surtout celles-ci que je développerai dans les pages qui suivent.

746. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Note »

Il faudrait être prophète ; car ce sont les événements aussi qui contribueront à mettre en saillie et à développer cette dominante.

747. (1874) Premiers lundis. Tome II « Charles de Bernard. Le nœud Gordien. — Gerfaut. »

Qu’en conservant tout son esprit, il se garde seulement du brillanté ; qu’à côté de ses explications psychologico-physiologiques qu’il ne craint pas de pousser jusqu’à l’intussusception, et de ses bouts de tirades séraphiques et swedenborgistes, dont, sous sa moustache, il sourît tout bas, il ne développe pas tant par contraste quelques scènes, gaies sans doute, mais un peu burlesques, de la livrée : ainsi la querelle du cocher de mademoiselle de Corandeuil avec le menuisier Lambernier.

748. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVIII. Pourquoi la nation française était-elle la nation de l’Europe qui avait le plus de grâce, de goût et de gaieté » pp. 366-378

Cette crainte mettait souvent obstacle à l’originalité du talent, peut-être même pouvait-elle nuire, dans la carrière politique, à l’énergie des actions ; mais elle développait dans l’esprit des Français un genre de perspicacité singulièrement remarquable.

749. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre IV. De la bienfaisance. »

Toutes les passions, certainement, n’éloignent pas de la bonté ; il en est une surtout qui dispose le cœur à la pitié pour l’infortune ; mais ce n’est pas au milieu des orages qu’elle excite, que l’âme peut développer et sentir l’influence des vertus bienfaisantes.

750. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre II. La langue française au xvie siècle »

Parfois les deux syntaxes concourent au lieu de se contrarier, et le latinisme vient en aide à l’archaïsme dans l’omission fréquente des pronoms sujets, dans la suppression de la conjonction que devant le subjonctif, et surtout dans l’usage si développé alors de l’inversion.

751. (1897) La crise littéraire et le naturisme (article de La Plume) pp. 206-208

Ce sont de semblables idées, — absolument inédites jusque-là, — que M. de Bouhélier s’est plu à développer dans certains chapitres de son dernier ouvrage : L’Hiver en Méditation, et qui sont intitulés l’Émotion, le Pathétique Romanesque, le Destin.

752. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre IX. Beltrame » pp. 145-157

Il fit jouer à l’impromptu une pièce dont plus tard il se donna la peine de développer le dialogue ( ho preso questa fatica di spiegarlo ) et qu’il fit imprimer à Turin en 1629 et à Venise en 1630.

753. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVII. Conclusion » pp. 339-351

La différence est immense, sans contredit, entre les deux morceaux ; l’un est aussi embryonnaire que l’autre est admirablement développé ; mais la formule est la même.

754. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Le lyrisme français au lendemain de la guerre de 1870 » pp. 1-13

Ce n’est point par lettres qu’on peut développer toute sa manière de voir à cet égard.

755. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre premier. Prostitués »

Laisse mon embonpoint se développer dans l’inaction et mes bras blanchir à l’ombre : tu auras à ton cou un collier plus beau et plus doucement caressant.

756. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre IV Le Bovarysme des collectivités : sa forme imitative »

Une bonne part de l’invention romanesque dont la littérature italienne de la Renaissance a tiré profit est l’œuvre des conteurs français du moyen âge, et le thème des épopées, commun au pays de race franque, germanique et normande, s’est développé dans l’Ile de France, où se résume à cette époque, du ixe au xiie  siècle, l’effort original d’une mentalité humaine qui ne doit encore que peu de chose à la culture antique.

757. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préfaces de « Marion de Lorme » (1831-1873) »

Pour l’artiste qui étudie le public, et il faut l’étudier sans cesse, c’est un grand encouragement de sentir se développer chaque jour au fond des masses une intelligence de plus en plus sérieuse et profonde de ce qui convient à ce siècle, en littérature non moins qu’en politique.

758. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre V. Le mouvement régionaliste. Les jeunes en province » pp. 221-231

Charles Maurras devaient, quinze ans plus tard, entraîner dans le régionalisme toute une jeunesse inquiète, et qui, lasse du renanisme sceptique, cherchait un appui, se cherchait elle-même ses origines, ses racines, les moyens de se développer et de grandir.

759. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre premier. »

La Fontaine pour nous dédommager d’avoir fait une fable aussi mauvaise que l’est la précédente, lui fait succéder un apologue excellent, où il développe avec finesse et avec force le jeu de l’amour-propre de toutes les espèces d’animaux, c’est-à-dire de l’homme, dont l’espèce réunit tous les genres d’amour-propre.

760. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 23, que la voïe de discussion n’est pas aussi bonne pour connoître le mérite des poëmes et des tableaux, que celle du sentiment » pp. 341-353

Un médecin de vingt-cinq ans est aussi persuadé de la verité des raisonnemens physiques, qui prétendent développer la maniere dont le quinquina opere pour guérir les fievres intermittentes : qu’il le peut être de l’efficacité du remede.

761. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « IV »

C’est l’ensemble des idées et des images, en quelque sorte la tournure d’esprit d’un auteur qui finissent par être assimilés : et c’est la combinaison de ces éléments digérés qui développe l’originalité personnelle.

762. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre XI. Première partie. Conséquences de l’émancipation de la pensée dans la sphère des idées religieuses » pp. 315-325

Il faut bien savoir admirer tout ce qui peut développer dans l’homme des sentiments élevés, tout ce qui peut lui fournir l’occasion de beaux sacrifices ; mais il faut être juste aussi : et il n’est pas moins vrai que cette gloire, acquise en dernier lieu, au prix de tant de sang, n’a servi qu’aux vastes triomphes d’un aventurier.

763. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre VII. D’Isocrate et de ses éloges. »

Il en est d’un peuple qui entend parfaitement une langue, et de l’orateur qui lui parle, comme de deux amis qui ont passé leur vie ensemble, et qui conversent ; les lieux, les temps, les souvenirs attachent pour eux, à chaque mot, une foule d’idées dont une seule est exprimée, et dont les autres se développent rapidement dans l’âme sensible.

764. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXV. De Paul Jove, et de ses éloges. »

Partout les intérêts religieux se mêlaient aux intérêts politiques et les crimes aux grandes actions ; tel était l’esprit de ce temps ; et parmi ces dangers, ces espérances, ces craintes, il dut naître une foule d’âmes extraordinaires dans tous les rangs, qui se développèrent, pour ainsi dire, avec leur siècle, et qui en reçurent le mouvement, ou qui donnèrent le leur.

765. (1909) Nos femmes de lettres pp. -238

Mme de Noailles développe une fois de plus un thème où s’exerça avec surabondance le cruélisme d’annunzien. […] Beauté précise et mesurée de ces paysages qui se succèdent sans à coup, c’est presque avec la sage ordonnance de tableaux composés par un maître qu’ils développent sous nos yeux les lignes harmonieuses de leurs formes. […] Veut-elle par exemple développer les variations qu’enferme ce thème immortel : la douleur de vieillir, sans doute on n’y trouvera pas les contractions d’un poète à l’inspiration toute moderne, comme Mme Lucie Delarue-Mardrus, qui prend ses images à portée de sa main et n’a nul souci du rythme antique. […] Nous le voyons qui s’appuie sur un ensemble de garanties ou de forces qui ne se sont guère modifiées depuis que le monde se développe en sociétés organisées, et auxquelles il paraît bien, d’après de récentes expériences, que l’on aura du mal à trouver des suppléantes. […] Dans notre Préface au Journal d’Eugène Delacroix, nous avons développé l’idée qui n’est ici qu’indiquée.

766. (1886) Le roman russe pp. -351

Je ne veux point développer une analyse à laquelle j’aurai souvent occasion de revenir dans ce volume, à propos de chaque écrivain en particulier. […] À l’ombre de ces plantes exotiques, le peuple abandonné à lui-même végétait, se développait suivant les lois obscures de sa nature orientale. […] Leur triste héros, le scribe Diévouchkine, n’est qu’une épreuve plus développée et plus noire d’Akaky Akakiévitch, le type grotesque d’employé créé par Gogol. […] Quand on étudie le théâtre russe, il est facile de deviner pourquoi cette forme de l’art est bien moins développée que les autres. […] Aksakof et les coryphées de l’école slavophile développent aujourd’hui les mêmes thèmes avec plus d’exaltation encore ; personne en Russie ne les accuse de mysticisme.

767. (1902) Le critique mort jeune

On jurerait, après lecture de cet essai, que Proudhon a toujours pratiqué une infaillible méthode, possédé le plus facile des systèmes et développé harmonieusement au cours de sa vie une pensée toujours sûre d’elle-même. […] La culture du « Moi », l’étude de la personnalité et l’effort pour la développer l’ont conduit, d’analyse en analyse, à reconnaître que l’individu n’est rien sans la société qui le supporte et l’alimente. […] L’édition complète de ses œuvres, commencée il y a trois ans, et munie d’introductions, de notes et d’appendices précieux, fait voir avec quelle suite se sont développées chez M.  […] Il nous montre de jeunes intellectuels mettant leur culture à la disposition du peuple et au lieu de développer chez lui, comme ils se le proposent, le libre examen, aidant à former un fanatisme nouveau. […] Ils ont à répondre qu’ils cherchent seulement les conditions dans lesquelles peuvent se développer et fleurir la poésie et la passion, prospérer l’individu, et qu’ils ne trouvent pas ces conditions-là dans les idées de Jean-Jacques Rousseau.

768. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « PARNY. » pp. 423-470

il faut bien faire quelque chose de son talent, lorsqu’une fois on l’a développé ; il vous reste et vous sollicite, même après que la fraîcheur ou l’ardeur première du sentiment s’est dissipée ; car, tout poëte élégiaque l’a dû éprouver amèrement, ce n’est pas tant la vie qui est courte, c’est la jeunesse. […] Après cela, nous ne ferons aucune difficulté de reconnaître qu’il développe en cette carrière nouvelle plusieurs des qualités épiques, un art véritable de composition, des agréments de conteur, et qu’il y rencontre, dans le genre gracieux, bien des peintures fines et molles, telles qu’on peut les attendre de lui : l’épisode de Thaïs et Elinin a mérité d’être extrait du poëme dont il fait partie et de trouver place dans les Œuvres choisies, où, ainsi détaché, il peut paraître comme un malicieux fabliau. […] On le retrouvait déjà dans le petit poëme d’Isnel et Asléga qui parut d’abord en un chant (1802) et que l’auteur développa plus tard en quatre.

769. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre cinquième. De l’influence de certaines institutions sur le perfectionnement de l’esprit français et sur la langue. »

Mais le cardinal devenant pressant, il fallut céder à l’homme à qui tout cédait ; ils finirent par lui adresser une lettre où ils développaient le plan qu’il avait conçu. […] C’est principalement à ces deux ouvrages que Saint-Simon fait allusion, à l’endroit de ses Mémoires où, parlant de la dispersion de Port-Royal par l’influence des jésuites, il loue ces « saints solitaires illustres que l’étude et la pénitence avaient assemblée à Port-Royal, qui firent de si grands disciples, et à qui les chrétiens seront à jamais redevables de ces ouvrages fameux qui ont répandu une si vive et solide lumière pour discerner la vérité des apparences, le nécessaire de l’écorce, en faire toucher au doigt l’étendue si peu connue, si obscurcie, et d’ailleurs si déguisée ; pour développer le cœur de l’homme, régler ses mœurs…74 » Cet éloge comprend tout en quelques paroles, le mérite des personnes, celui de la communauté, les grands exemples qu’ils ont donnés, les traditions qu’ils ont laissées, ce qu’ils ont réglé, ce qu’ils ont inventé. Développer le cœur a été l’invention de Port-Royal, et la gloire en est d’autant plus pure, que ce n’est point par esprit de curiosité qu’ils y ont pénétré si avant, mais par l’ardeur du médecin qui veut atteindre le mal dans sa racine, et par la charité qui veut le guérir.

770. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Introduction, où l’on traite principalement des sources de cette histoire. »

On l’y verrait se développer lentement et soutenir une guerre presque permanente contre l’empire, lequel, arrivé à ce moment au plus haut degré de la perfection administrative et gouverné par des philosophes, combat dans la secte naissante une société secrète et théocratique, qui le nie obstinément et le mine sans cesse. […] Le livre a été, de la sorte, composé tout entier fort près des lieux mêmes où Jésus naquit et se développa. […] Le parsisme, l’hellénisme, le judaïsme auraient pu se combiner sous toutes les formes ; les doctrines de la résurrection et du Verbe auraient pu se développer durant des siècles sans produire ce fait fécond, unique, grandiose, qui s’appelle le christianisme.

771. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

René est en effet son œuvre capitale ; il est la poétique autobiographie d’une génération ; il contient en germe les qualités et les défauts que l’école romantique devait développer et exagérer ; il marque un moment critique dans la vie sociale et littéraire de notre siècle. […] Cette époque révolutionnaire a abordé tous les genres que la littérature romantique, naturaliste, réaliste, décadente, etc., devait tour à tour reprendre, développer et délaisser pour reprendre encore. […] La jalousie amoureuse que les romanciers et autres semblables psychologues, considèrent aussi inhérente à l’homme que la circulation du sang, n’est apparue dans l’humanité qu’avec la propriété collective familiale, pour se développer et s’exagérer avec la propriété privée : les femmes et les hommes des tribus communistes l’ignorent.

772. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre V. Le souvenir du présent et la fausse reconnaissance »

Kindberg a repris et développé cette idée d’une diminution de l’effort de synthèse 50. […] Et c’est pourquoi nous jugeons que le souvenir d’une perception ne saurait se créer avec cette perception ni se développer en même temps qu’elle. […] Mais plus la conscience se développe, plus elle éclaire l’opération de la mémoire et plus aussi elle laisse transparaître l’association par ressemblance, qui est le moyen, derrière l’association par contiguïté, qui est le but.

773. (1888) Impressions de théâtre. Première série

Son « dilettantisme » s’est développé en deux siècles comme s’est dégagée la « féminilité » de Pauline. […] Il eût certainement développé les rôles de la reine et de Claudius et leur eût donné plus de vérité et de vie. […] Dumas, développée et soutenue par un personnage qui n’est que le porte-voix de l’auteur. […] et comme tout cela s’enchaîne et se développe naturellement et aisément, jusqu’à la fuite | éperdue de la pauvre petite folle ! […] L’action pourrait se développer plus simplement et plus largement.

774. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

Celui qui découvre le germe n’est ordinairement pas celui qui le développe. […] Theuriet et Malot, ont développé au contraire des qualités de transition et de douceur. […] Or notre littérature s’est développée dans un sens précisément contraire à ses prévisions. […] Il ne s’est pas répété, il s’est agrandi ; il n’a pas recommencé, il s’est développé. […] C’est en s’abstenant d’écrire qu’on développe le talent d’écrire.

775. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. de Rémusat (passé et présent, mélanges) »

Sous ce régime d’une instruction forte qui laissait subsister l’élan naturel, il se développait sans contrainte ; tout en acquérant un solide fonds d’études, son esprit se tenait au-dessus et s’émancipait. […] » Poursuivant ses déductions, l’auteur s’appliquait à montrer que la liberté reconnue aux citoyens de communiquer entre eux et de prendre acte de leurs opinions (ce qui, dans un grand empire, ne peut se faire que par la presse) était le seul moyen de créer une pensée commune fondée sur un commun intérêt, de hâter la formation des masses, et, en dissipant les fantômes nés du conflit des souvenirs, d’éclairer la société entière sur son état réel, sur les forces qui avaient grandi et s’étaient développées chez elle en silence ; pour les faire tout aussitôt apparaître, il ne fallait qu’un gouvernement libre : la Restauration, disait-il vivement, a mis la France au grand jour. […] Les grandes intelligences avaient devant elles de longues carrières où se développer. […] Maintenant on comprend sans peine comment, en 1836, l’auteur, se retrouvant de loisir, médita d’aborder le vrai drame et d’y développer une sérieuse pensée philosophique.

776. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre I. Le Roman. Dickens. »

Car cette opinion publique est son opinion privée ; il ne la subit pas comme une contrainte extérieure, il la sent en lui comme une persuasion intime ; elle ne le gêne pas, elle le développe, et ne fait que lui répéter tout haut ce qu’il se dit tout bas. […] Il les a considérées comme des forces, et, jugeant que la force est belle, il les a soutenues de leurs causes, entourées de leurs circonstances, développées dans leurs effets, poussées à l’extrême, et agrandies jusqu’à en faire des monstres sublimes, plus systématiques et plus vrais que la vérité. […] Il développera les considérations les plus touchantes sur les bienfaits et sur les beautés de l’harmonie. […] Le hasard d’une position insulaire, la nécessité du commerce, la possession abondante des matériaux premiers de l’industrie ont développé les facultés pratiques et l’esprit positif.

777. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Discours prononcé à la société des visiteurs des pauvres. » pp. 230-304

C’est encore l’idée que, seul, un hasard heureux nous a préservés des nécessités qui oppriment les pauvres et qui parfois les réduisent à un abaissement moral que nous aurions peut-être subi comme eux si nous avions été à leur place, mais qui, d’autres fois, développent en eux des vertus dont nous n’aurions peut-être pas été capables. […] Il respecte votre liberté et vous excite même à en user : il développe en vous l’initiative, l’effort individuel, tout comme si vous étiez des Anglo-Saxons. […] C’est comme si le grand dramaturge, pour avoir, dans sa vie, trop imaginé de ces situations violentes, trop développé de ces tragiques conflits, n’avait plus eu, cette fois, le courage de faire l’effort qu’il faut pour se mettre à la place de ses personnages, pour se congestionner consciencieusement sur leur cas, pour se représenter leurs émotions et trouver des phrases qui les expriment avec quelque précision et quelque force. […] La donnée est donc fort simple, mais elle est développée avec une rare puissance verbale et une outrance étonnamment soutenue.

778. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre huitième »

L’histoire de la littérature française, à partir de 1660, n’offre plus ces générations de grands hommes recevant de leurs devanciers l’esprit français en héritage, et le transmettant à leurs successeurs développé et agrandi. […] Il se plaisait à développer cette logique des passions, par laquelle les actes sortent de la succession et du combat des pensées. […] Le manque d’exactitude dans le costume ne touche que les savants ; des caractères mal développés ou incomplets, des personnages qui ne diraient pas tout ce qu’ils doivent sentir, des passions à demi exprimées, des sentiments sans nuances, choqueraient, dans un parterre moderne, tout ce qui a du cœur et de la raison. […] » Je développai cette idée, faisant d’ailleurs les différences, adoucissant les traits de ces Agrippines, substituant des fils simplement faibles à des fila capables de faire assassiner leurs mères, et des mères simplement impérieuses à des épouses empoisonnant leurs maris.

779. (1902) Les poètes et leur poète. L’Ermitage pp. 81-146

Je choisis Franc-Nohain parce qu’il est à la fois et le plus grand poète du xixe  siècle et… mon gendre (Ai-je l’esprit de famille assez développé ? […] — La brièveté nécessaire, imposée aux réponses que vous sollicitez ne permet que la simple affirmation d’un sentiment personnel, qu’il n’est possible ni de développer ni de justifier. […] J’en compte un peu plus de trente (les nommer serait trop long) qui contribuèrent, du moins je l’imagine, à développer en moi un certain amour de la beauté et de l’harmonie. […] Il est la fleur éclatante ou pâle d’un arbre auquel il a fallu des années et des années pour croître et se développer.

780. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre III. De l’organisation des états de conscience. La liberté »

Ainsi, à la lumière des principes développés dans le chapitre précédent, nous verrons apparaître un moi dont l’activité ne saurait être comparée à celle d’aucune autre force. […] Spinoza disait que les modes de la pensée et les modes de l’étendue se correspondent, mais sans jamais s’influencer : ils développeraient, dans deux langues différentes, la même éternelle vérité. […] Il demeurera d’ailleurs entendu que ce sont là des représentations symboliques qu’en réalité il n’y a pas deux tendances, ni même deux directions, mais bien un moi qui vit et se développe par l’effet de ses hésitations mêmes, jusqu’à ce que l’action libre s’en détache à la manière d’un fruit trop mûr. […] Et l’on prouverait sans peine que, plus le progrès des explications mécaniques permet de développer cette conception de la causalité et d’alléger par conséquent l’atome du poids de ses propriétés sensibles, plus l’existence concrète des phénomènes de la nature tend à s’évanouir ainsi en fumée algébrique.

781. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « M. Denne-Baron. » pp. 380-388

Ce ciel, qui participe de l’Olympe par ses jardins lumineux, et des enfers antiques par ses champs d’asphodèle, n’est pas le vrai ciel du spiritualiste ni du chrétien ; il ne contient aucune véritable espérance, aucun motif de consolation, et la pièce À Daphné, conçue avec assez de fierté, développée avec assez de talent, manque pourtant de décision ; elle demeure comme suspendue entre André Chénier et Lamartine.

782. (1874) Premiers lundis. Tome I « Ferdinand Denis »

Il y a une singulière expression de mélancolie dans toute la personne de ce jeune guerrier à moitié sauvage, dont l’amour et la douleur ont développé l’âme.

783. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VIII. Du crime. »

La plus grande partie des idées métaphysiques que je viens d’essayer de développer, sont indiquées par les fables reçues sur le destin des grands criminels ; le tonneau des Danaïdes, Sisyphe, roulant sans cesse une pierre, et la remontant au haut de la même montagne, pour la rouler en bas de nouveau, sont l’image de ce besoin d’agir, même sans objet, qui force un criminel à l’action la plus pénible, dès qu’elle le soustrait à ce qu’il ne peut supporter, le repos.

784. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre III. De l’étude. »

Lorsque l’âme est dégagée de l’empire des passions, elle permet à l’homme une grande jouissance ; c’est l’étude, c’est l’exercice de la pensée, de cette faculté inexplicable dont l’examen suffirait à sa propre occupation, si au lieu de se développer successivement, elle nous était accordée tout à coup dans sa plénitude.

785. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Grosclaude. »

Figurez-vous un homme dont toutes les pensées, même les plus intimes et les plus personnelles, revêtiraient d’elles-mêmes les formes consacrées d’une élégance imbécile ; qui aurait volontairement créé et développé en lui cette infirmité et qui serait décidé à mourir sans avoir une fois, une seule fois, exprimé directement sa pensée… Ô prodige d’ironie !

786. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Marcel Prévost et Paul Margueritte »

Cependant les luttes mesquines de ces tristes années ont développé l’énergie d’André, lui ont donné le goût de l’action.

787. (1890) L’avenir de la science « XI »

Ce qu’il demande, c’est une influence intime et secrète, analogue à celle de l’électricité, qui, sans rien communiquer d’elle-même, développe sur les autres corps un état semblable ; ce qu’il blâme, c’est la tentative de ceux qui veulent trouver chez les modernes la matière suffisante d’une éducation esthétique et morale.

788. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre II. Recherche des vérités générales » pp. 113-119

J’ai développé la démonstration, dont je donne ici le squelette, dans une série de conférences faites à Genève, en décentre 1876 et en janvier 1877.

789. (1898) Le vers libre (préface de L’Archipel en fleurs) pp. 7-20

Et tel est le besoin d’aller en troupe, de s’enquérir des Systèmes et des Procédés que l’Éducation développa chez les poètes, qu’ils perdent ou dilapident le plus pur de leur être, qu’ils étouffent la voix innée en eux pour psalmodier à l’imitation d’un Maître.

790. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Samuel Bailey »

Chez les enfants, prétend-il, la vue est développée avant le toucher.

791. (1899) Le monde attend son évangile. À propos de « Fécondité » (La Plume) pp. 700-702

La beauté que confère l’amour fécond et fort, tous les hommes peuvent l’atteindre, elle est à leur portée, ils n’ont qu’à vivre, à croître, à grandir, à agir, à développer leur race.

792. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre sixième. »

Voilà ce qu’il fallait peut-être développer.

/ 1838