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471. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (2e partie) » pp. 315-400

Voyez comment il lui immole le Tasse : « Je suis loin de soutenir qu’une science modeste et saine nuise à l’observation ; au contraire, je répéterai le vieux mot : Nous n’avons vraiment d’yeux et d’oreilles que pour ce que nous connaissons. […] Oui, c’est vrai, je ne suis pas un ami de la plèbe révolutionnaire, qui cherche le pillage, le meurtre et l’incendie ; qui, sous la fausse enseigne du bien public, n’a vraiment devant les yeux que les buts les plus égoïstes et les plus vils. […] Mais ce maître, quand j’y pense vraiment, qu’a-t-il été tout ce temps, sinon un serviteur ? […] — Au contraire, dis-je, quand je suis si près de la nature que ses parfums viennent jusqu’à moi, et que cependant je ne peux vraiment me plonger en elle, alors l’impatience me saisit, et je suis comme un canard que l’on met près de l’eau en l’empêchant de s’y baigner. […] Quand sa crue s’arrêtera, ce sera un chêne élevé, fort, élancé, mais il n’aura pas entre sa tige et sa couronne les proportions nécessaires pour être vraiment beau. — Si au contraire un chêne pousse dans un lieu humide, marécageux, et si le sol est trop nourrissant, de bonne heure, s’il a assez d’espace, il poussera dans tous les sens beaucoup de branches et de rameaux ; mais ce qui manquera, ce seront des forces qui puissent l’arrêter et le retarder, aussi ce sera bientôt un arbre sans nœuds, sans ténacité, qui n’aura rien d’abrupte, et, vu de loin, il aura l’aspect débile du tilleul ; il n’aura pas de beauté, du moins la beauté du chêne. — S’il croît sur la pente d’une montagne, dans un terrain pauvre et pierreux, il aura cette fois trop de nœuds et de coudes, c’est la liberté du développement qui manquera ; il sera étiolé, sa crue s’arrêtera de bonne heure, et devant lui on ne dira jamais : « Là vit une force qui sait nous en imposer. » — J’ai pu voir de très beaux chênes, dis-je, il y a quelques années, lorsque de Gœttingue je fis quelques excursions dans la vallée du Weser.

472. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 avril 1885. »

C’est en ce traité que commence, vraiment, l’exposition dogmatique du système de Richard Wagner9. […] D’abord, il faut que la musique soit traitée sérieusement, que le nombre des jours de représentation, par exemple, soit réduit ; mais, surtout, il faut que ce théâtre soit vraiment national, résume toutes les forces de l’esprit commun et les fonde dans une complète unité artistique. […] Citons toute la première partie, judicieuse et excellente, qui complètera les articles publiés en cette Revue sur les Maîtres Chanteurs : Chaque année, le théâtre royal de la Monnaie nous convie à quelque nouveauté d’importance, et, cette fois, deux hommes de grand goût et d’initiative qui s’apprêtent à se retirer après une période de direction vraiment brillante, ont résolu, pour leur dernier coup d’éclat, de nous faire entendre un des plus célèbres ouvrages de Wagner. […] Nous serions vraiment en peine de signaler aux lecteurs de la Revue Wagnérienne un chapitre particulier du livre de M.  […] Soulacroix n’a pas moins bien fixé le type de Beckmesser, qui comptera dans sa carrière d’artiste comme un succès vraiment sérieux.

473. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre quatrième. L’idée du temps, sa genèse et son action »

De même, à en croire Spencer, tous nos états de conscience seraient « successifs » et la conscience n’apercevrait point vraiment de simultanéités : la conscience même serait une série dont les termes ne sont jamais présents que l’un après l’autre, un seul à la fois. […] En d’autres termes, il se surajoute en nous à tout processus intérieur un certain mode particulier de conscience qui n’est pas lui-même vraiment un état, mais un autre processus répétant et réfléchissant le premier. […] C’est du côté de l’avenir que notre activité est vraiment tournée, tandis que le passé est surtout un objet de vision passive. […] Bien n’est plus propre que la musique à nous faire comprendre la différence de ces diverses choses : qualité, intensité, nombre, succession et distinction, ainsi que leur indépendance de l’espace, car, en écoutant une symphonie, nous ne sommes plus vraiment dans l’étendue ; nous ne nous figurons ni lignes, ni cercles, ni « milieu sonore ». […] Le temps, d’ailleurs, est-il donc vraiment un objet, une réalité qu’on puisse intueri, contempler, une existence pure et supra-sensible qu’on verrait d’une vision pure et supra-sensible ?

474. (1884) La légende du Parnasse contemporain

Ils sont vraiment hautains, presque sublimes ; presque, seulement, ou pas toujours. […] — Vraiment ? […] Vraiment il y avait du spleen dans l’air. […] Vraiment c’était ainsi qu’il avait caché son jeu ! […] Quelqu’un lui dit : « Ton père n’était pas un honnête homme », et fournit des preuves. « Vraiment ? 

475. (1856) Réalisme, numéros 1-2 pp. 1-32

Si la sculpture est impuissante à aborder le moderne, qu’elle ferme boutique, car elle a vraiment cessé d’être amusante. […] J’ai vu fort près de moi, beaucoup de comédies, par exemple des comédies de gestes et de visages qui étaient vraiment « à peindre ». […] C’est niais, vraiment, cette manie d’injurier la critique. […] Mais vraiment pourquoi continuer à parler de ces hommes-là ? […] L’ambition de poète n’est vraiment pas saine.

476. (1873) Molière, sa vie et ses œuvres pp. 1-196

On a appliqué dans la muraille une plaque rappelant que ce fut là qu’il rendit le dernier soupir ; mais ce monument vraiment historique appartient toujours à des particuliers. […] Molière avait vraiment bien besoin de modèle ! […] On peut vraiment affirmer qu’en matière d’art il n’est point de génération spontanée. […] » On eût pu répondre à MM. de l’hôtel de Bourgogne que cela, vraiment, est déjà quelque chose. […] Celui-là est vraiment une page d’histoire et, pour la critique littéraire, il est, psychologiquement, d’une utilité évidente.

477. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Introduction, où l’on traite principalement des sources de cette histoire. »

Philon vivait, il est vrai, dans une tout autre province du judaïsme que Jésus ; mais, comme lui, il était très dégagé des petitesses qui régnaient à Jérusalem ; Philon est vraiment le frère aîné de Jésus. […] Comment enfin, à côté des vues les plus pures, les plus justes, les plus vraiment évangéliques, ces taches où l’on aime à voir des interpolations d’un ardent sectaire ? […] Cela ne veut pas dire qu’il n’y ait dans les discours de Jean d’admirables éclairs ; des traits qui viennent vraiment de Jésus 48. […] L’esprit de Jésus n’est pas là, et si le fils de Zébédée a vraiment tracé ces pages, il avait certes bien oublié en les écrivant le lac de Génésareth et les charmants entretiens qu’il avait entendus sur ses bords.

478. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Théâtre » pp. 83-168

Puis vraiment, n’y aurait-il pas de grosses ficelles dans l’agencement de la vie humaine, de la véritable, de celle que nous vivons ? […] vraiment, on me fait un crime de bien des choses, de choses que me donne en spectacle, tous les jours, la vie du monde. […] Et ce petit acte appelé par nous : Incroyables et Merveilleuses, c’était vraiment une jolie mise en scène du temps étudié par nous, au milieu du touchant épisode d’un divorce. […] Et vraiment Zola se rend-il bien compte de cette boîte à convention, de cette machine de carton qu’est le théâtre, de ce tréteau enfin, sur lequel l’avarice bouffe de l’Avare de Molière arrive au point juste d’optique, tandis que l’humaine avarice d’un père Grandet, cette avarice si bellement étudiée, je ne suis pas bien sûr qu’elle fasse là l’effet de l’autre.

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