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36. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre premier. La sélection et la conservation des idées dans leur relation à l’appétit et au mouvement. »

Tout ce qui est organisé, tout ce qui a une structure naturelle, une forme vivante entraînant tel mouvement déterminé, tout cela serait, si l’on veut, une mémoire. Toute habitude, qui est une structure acquise par l’être vivant, serait encore une mémoire. […] En un mot, l’élément fondamental en germe dans toutes les cellules vivantes, c’est à nos yeux l’appétit, accompagné d’une émotion plus ou moins agréable ou pénible, concomitante de telle motion et provoquant telle réaction motrice. […] L’être vivant est, en réalité, une société d’êtres vivants et plus ou moins sentants, comme l’ont montré Schæffie, de Lilienfeld et Espinas. S’il en est ainsi, la conservation des images dans la mémoire doit être en partie le résultat do la coopération entre les cellules vivantes.

37. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre quatrième. Les émotions proprement dites. L’appétit comme origine des émotions et de leurs signes expressifs. »

L’être vivant ne vit pas d’abord pour penser : encore faut-il auparavant qu’il vive, primo vivere. […] L’expression de la peur, traduction du mental en mécanique chez un être vivant, aboutit à la retraduction du mécanique en mental par un autre être vivant qui la ressent à son tour : il existe donc ici comme un circuit social. […] Chaque organisme vivant est lui-même une société d’organismes plus élémentaires. […] L’organisme, en effet, est un composé d’organismes élémentaires, une société de cellules vivantes unies entre elles par des liens plus ou moins étroits. […] Comme un être vivant, elle tremble et s’affaisse sous un sifflement !

38. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VI : Difficultés de la théorie »

Parmi les vertébrés vivants, nous ne trouvons que fort peu de différence dans la structure de l’œil, bien que pourtant le poisson Amphioxus ait un œil extrêmement simple et sans cristallin. […] Ces faits que j’expose ici, beaucoup trop brièvement, montrent cependant combien il existe de degrés divers dans la structure des yeux de nos crustacés vivants ; et si l’on se rappelle combien le nombre des espèces vivantes est peu de chose par rapport au nombre des espèces éteintes, je ne puis trouver de difficulté réelle, je ne puis trouver surtout une difficulté plus grande qu’à l’égard de tout autre organe, à croire que la sélection naturelle a pu transformer un simple appareil, formé d’un nerf optique revêtu de pigment et recouvert d’une membrane transparente, en un instrument optique aussi parfait que puisse le posséder un représentant quelconque de la grande famille des articulés. […] Chez les êtres vivants, la variabilité produira les modifications légères de l’instrument naturel, la génération la multipliera ainsi modifiée presqu’à l’infini, et la sélection naturelle choisira avec une habileté infaillible chaque nouveau perfectionnement accompli. […] Mais la sélection naturelle peut produire et produit souvent des organes directement nuisibles à d’autres espèces, comme nous l’observons dans les crochets à venin de la Vipère et dans la tarière ou oviscapte de l’Ichneumon, qui lui permet d’introduire ses œufs dans le corps vivant d’autres insectes. […] C’est à ces types de transition entre les reptiles, les oiseaux et les mammifères que se rattache peut-être la souche originelle de l’Ornithorynque, ce collatéral éloigné de nos classes actuelles, descendant isolé d’autres types sans doute autrefois nombreux qui semblent préparer les Marsupiaux et qu’on a nommé avec raison un véritable fossile vivant.

39. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre III : Concurrence vitale »

Or, d’après cette supposition, au bout de cinq cents ans, il y aurait quinze millions d’Éléphants vivants descendus de la première paire. […] Mais ces épidémies elles-mêmes paraissent dues à des vers parasites, qui, par une cause quelconque, et par suite peut-être de la facilité plus grande avec laquelle ils peuvent se multiplier parmi des animaux vivant en foule plus pressée sur un même espace, se sont trouvés disproportionnellement favorisés : ici encore il y a donc une sorte de lutte entre les parasites et leur proie. […] Néanmoins, notre ignorance est si profonde, et notre présomption si haute, que nous nous émerveillons d’apprendre la destruction d’une espèce ; et parce que nous n’en voyons pas la cause, nous supposons des cataclysmes pour désoler le monde, ou inventons des lois sur la durée des formes vivantes. […] Quelle guerre d’insecte à insecte ; et des insectes, limaçons et autres animaux contre les oiseaux et bêtes de proie ; tous s’efforçant de multiplier, et tous se nourrissant les uns des autres, ou vivant des arbres, de leurs graines, de leurs jeunes plants, ou des autres plantes qui d’abord couvraient la terre et empêchaient par conséquent la croissance des arbres ! […] Tout ce qui nous est possible, c’est d’avoir constamment à l’esprit que tous les êtres vivants s’efforcent perpétuellement de se multiplier en raison géométrique ; mais que chacun d’eux, à certaines périodes de la vie, en certaines saisons de l’année, pendant le cours de chaque génération ou à intervalles périodiques, doit lutter contre de nombreuses causes de destruction.

40. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mai 1886. »

Un drame lu paraîtra, aux âmes délicates, plus vivant que le même drame joué, sur un théâtre, par des acteurs vivants. […] Plus tard David recréa la vivante face humaine ; et vinrent ces réalistes. […] Ce spectacle d’enfants parisiens nous donne une louable impression de réalité vivante. […] Mais il a préféré dédier ses grandes toiles à la création harmonieuse d’intimes et vivantes émotions. […] Point de musiques plus légères, plus spirituelles et plus vivantes, que ces fantaisies d’un délicieux artiste.

41. (1895) De l’idée de loi naturelle dans la science et la philosophie contemporaines pp. 5-143

Il y a donc, semble-t-il, dans l’être vivant une finalité interne. […] Pasteur déclare très énergiquement que le vivant ne naît jamais que du vivant. […] De ce principe résulte la gradation des êtres vivants. […] Le milieu sollicite l’être vivant et celui-ci s’adapte au milieu. […] L’être concret et vivant refuse de s’y enfermer.

42. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XI : Distribution géographique »

Nonobstant ce parallélisme des conditions physiques entre les deux continents, on constate les plus énormes différences dans leurs productions vivantes. […] Aucun géologue ne conteste les changements considérables de niveau qui ont eu lieu dans la période actuelle et dont les organismes vivants ont été contemporains. […] Les oiseaux vivants ne peuvent manquer non plus d’avoir une importante action dans la dissémination des graines. […] Ces migrations sont même d’autant plus probables que presque toutes les espèces alpines ont actuellement, ou ont eu autrefois des congénères vivants dans les plaines. […] Darwin elle-même, et ramènerait à supposer des créations et des destructions totales et périodiques des formes du monde vivant.

43. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIV : De la méthode (Suite) »

Croiriez-vous connaître le corps vivant ? […] Après avoir classé les parties et les opérations de ce corps vivant, et considéré quelque temps leurs rapports et leurs suites, je dégage un fait général, c’est-à-dire commun à toutes les parties du corps vivant, et à tous les moments de la vie : la nutrition ou réparation des organes. […] Si la décomposition est une cause, il y a un groupe d’opérations et d’organes institués et combinés de manière que le corps vivant puisse se décomposer. […] Le corps vivant est formé de substances très-complexes, ayant pour élément principal la protéine, matière très-peu stable et capable de se décomposer très-aisément. […] Ce type est essentiel, puisque, lorsqu’il est altéré, l’animal périt ou le régénère ; il est distinctif, puisque par contraste un corps non vivant peut varier indéfiniment dans sa grandeur et dans sa forme, sans pour cela se régénérer ou périr.

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