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1441. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Œuvres complètes de Molière »

Soulié doit donner, lui aussi, une édition de Molière), d’un biographe curieux et consciencieux qui se dit : « On a bien peu de choses authentiques sur les premiers temps de Molière ; on a tiré des registres de l’état civil tout ce qu’on pouvait espérer d’y rencontrer en fait d’actes de naissance, de mariage ou de décès. […] Toute la troupe de l’Illustre Théâtre, assemblée le 13 août au jeu de paume de la Croix-Noire au port Saint-Paul, s’engagea solidairement « envers honorable homme Léonard Aubry, » à le garantir et indemniser de la somme par lui avancée, « d’autant plus, est-il relaté dans l’acte, que ce qu’en a fait ledit sieur Aubry n’a été qu’à leur pure requête et pour leur faire plaisir, et pour tirer hors des prisons du Grand-Châtelet ledit Poquelin.

1442. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Oeuvres inédites de la Rochefoucauld publiées d’après les manuscrits et précédées de l’histoire de sa vie, par M. Édouard de Barthélémy. »

Un père me disait un jour, en voyant son fils pâlir dès l’âge de douze ans sur les vieux livres, non pour les lire et en tirer des pensées, mais pour en admirer les vignettes, les fermoirs, les reliures (et le fils est devenu depuis un bibliophile féroce) : « Au moins il a un noble goût. » Un galant marquis, âme ardente, qui avait connu toutes les passions, chasse, amour, cavalcades effrénées, et qui finissait par les livres, répondait à quelqu’un qui s’en étonnait : « Après tout, c’est encore moins ruineux que les femmes, les chevaux et les chiens. » Ainsi il peut être utile en même temps qu’il est honorable à un jeune homme de s’adonner aux curiosités des livres, et c’est rassurant pour les siens de le voir commencer par là ; mais alors pourquoi ne pas s’en tenir au simple goût d’amateur ? […] Cousin que la publication de ce Mémoire soit un événement pour l’histoire littéraire : pourquoi cet éternel besoin de surfaire sa marchandise et de tirer de son côté la couverture ?

1443. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. (suite) »

» il tira de dessous les jambes d’un électeur éligible le petit tabouret pour s’asseoir. […] Si elle s’avance jusqu’à la passion, c’est pour n’en tirer que l’amertume ; elle se plaît à voir dans l’amour lui-même avec ses félicités « une couronne d’épines. » Michel épuise avec elle toutes les nuances de l’affectueux et du tendre : « Que n’êtes-vous, Marie, une pauvre fille habitant quelque mansarde !

1444. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Le mariage du duc Pompée : par M. le comte d’Alton-Shée »

Herman, aussi faible que possible, s’en est tiré avec plus de bonheur que d’honneur, grâce à la seule énergie de Pompéa et à cette fierté de passion qui ne veut rien à demi. […] Elle est toute trouvée : « L’ambition, a dit un autre moraliste des plus consommés, Senac de Meilhan, est une passion dangereuse et vaine, mais ce serait un malheur pour la plupart des hommes que d’en être totalement dénués ; elle sert à occuper l’esprit, à préserver de l’ennui qui naît de la satiété ; elle s’oppose dans la jeunesse à l’abus des plaisirs qui entraînerait trop vivement, elle les remplace en partie dans la vieillesse, et sert à entretenir dans l’esprit une activité qui fait sentir l’existence et ranime nos facultés. » Qu’Herman donc, s’il veut rester fidèle à sa femme, au moins dans l’essentiel (car je néglige tout ce qui ne tire pas à conséquence), devienne ambitieux ; il le faut à tout prix, et ce n’est que de ce jour-là que sa conversion me paraîtra assurée.

1445. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite) »

C’est le joyeux forestier en révolte et le roi des braconniers Robin Hood, le vaillant compère, qui n’est jamais plus en gaieté, ni plus d’humeur à jouer de l’épée ou du bâton que quand le taillis est brillant et que l’herbe est haute : « Robin Hood, c’est le héros national ; saxon d’abord et armé en guerre contre les gens de loi, « contre les évêques et archevêques » ;… généreux de plus, et donnant à un pauvre chevalier ruiné des habits, un cheval et de l’argent pour racheter sa terre engagée à un abbé rapace ; compatissant d’ailleurs et bon envers le pauvre monde, recommandant à ses gens de ne pas faire de mal aux yeomen ni aux laboureurs ; mais par-dessus tout hasardeux, hardi, fier, allant tirer de l’arc sous les yeux du shérif et à sa barbe, et prompt, aux coups, soit pour les embourser, soit pour les rendre. » Partout, d’un bout à l’autre, dans tout ce livre de M.  […] Il se porte à l’auteur qu’il lit, directement, avec toute sa vigueur d’esprit, et y puise une impression nette et ferme, de première main, de première vue (facie ad faciem) ; il en tire une conclusion qui jaillit de source, qui bouillonne et déborde.

1446. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite et fin.) »

J’en indiquerai quelques-unes qu’il faudrait citer dans l’original : « De même que chez les poètes un vrai génie n’est jamais que rare, de même le vrai goût est rarement le lot des critiques ; les uns et les autres également ne tirent que du Ciel leur lumière, les uns nés pour juger comme les autres pour produire. » « Quelques-uns ont d’abord passé pour beaux esprits, ensuite pour poètes ; puis, ils se sont faits critiques, et ils se sont montrés tout uniment des sots sous toutes les formes !  […] — Picard, l’aimable auteur comique, à l’article de la mort, visité à Tivoli où il était par un spirituel docteur de ses amis, et celui-ci lui disant pour lui faire illusion : « Allons, vous vous en tirerez ; nous mangerons encore ensemble des côtelettes d’agneau aux pointes d’asperges », Picard répondit ces deux mots à peine articulés : « Deux primeurs ! 

1447. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Encore une fois, mettons-nous à la place de ces premiers éditeurs : il n’est pas un seul d’entre nous qui, chargé au lendemain de la mort d’un ami célèbre de mettre en ordre ses papiers et d’en tirer la matière d’une publication réclamée et opportune, ne prenne garde, n’hésite plus d’une fois en vue même d’une mémoire respectée, ne conçoive des scrupules et n’estime quelques retranchements nécessaires, provisoirement du moins. […] Mais ne voyez-vous pas que c’est aux dépens de la société, qui a intérêt à ce que, devant ses contemporains comme devant la postérité, chacun soit jugé selon ses œuvres, estimé à son prix, et qui peut tirer un immense profit de la sincérité de l’expérience dont on lui a transmis les résultats ?

1448. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Exploration du Sahara. Les Touareg du Nord, par M. Henri Duveyrier. »

On dirait qu’ils craignent de ne pas avoir assez d’air à respirer ou assez d’espace pour se mouvoir, s’ils interposent quelque obstacle entre eux et l’immensité du ciel et de la terre. » Les marchands de Ghadamès commercent surtout avec le Soudan ; ils en tirent l’ivoire. […] Au milieu de toutes les merveilles qui ont captivé son attention, il a choisi, pour les reporter dans son pays, les choses les plus utiles : une collection de médicaments, un choix de livres arabes sur la religion, le droit, l’histoire et la littérature, un assortiment d’outils de professions les plus ordinaires, et spécialement des instruments agricoles, des pelles et des pioches pour creuser des puits, et des poulies pour en tirer l’eau.

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