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957. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Poésies complètes de Théodore de Banville » pp. 69-85

Personne n’a converti les romantiques ; en gens d’esprit et de talent, ils se sont convertis tout seuls. […] Je ne prétends garantir ni adopter toutes les applications qu’il a faites de son talent ; mais il est un procédé, un art général, non seulement une main-d’œuvre, mais un feu sincère qui se fait reconnaître dans tout l’ensemble et qui m’inspire de l’estime. […] Et c’est ainsi qu’au déclin d’une école et quand dès longtemps on a pu la croire finissante, quand de ce côté la prairie des muses semble tout entière fauchée et moissonnée, des talents inégaux, mais distingués et vaillants, trouvent encore moyen d’en tirer des regains heureux et de produire quelques pièces presque parfaites qui iraient s’ajouter à tant d’autres dans la corbeille, si un jour on s’avisait de la dresser, — dans la couronne, si l’on s’avisait de la tresser —, d’une anthologie française de ce siècle.

958. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « HOMÈRE. (L’Iliade, traduite par M. Eugène Bareste, et illustrée par M.e Lemud.) —  premier article .  » pp. 326-341

Elle se disperse, elle court toutes les voies, et, moins ornée souvent qu’encombrée des talents nombreux qu’elle possède, elle en est à chercher encore son ordonnance et son unité. Il y a plus : ces talents eux-mêmes qui l’honorent, arrivés à une certaine élévation, subissent chacun cette espèce de vent de dispersion qui circule ; ils versent d’un côté ou d’autre ; ils manquent à la loi de leur propre développement et à leur unité particulière. […] Mais en création poétique, en imagination élevée, en talent de conception et d’expression, qu’est-ce à dire ?

959. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « I. Leçon d’ouverture du Cours d’éloquence française »

Ce qu’il avait d’esprit, de goût, de talent, perçait, filtrait à travers les pages de son gros volume : il ne semblait appliqué qu’à le dérober, à le masquer, à en détourner l’attention. […] Donc, tout en rendant hommage à la science et au talent du candidat, la Faculté ne put s’empêcher de protester contre l’énormité du volume « qui paraît, dit le rapport, quelque peu disproportionné avec l’importance et la nature du sujet ». […] Il a donné quelques exemples supérieurs de critique inductive, purgée d’a priori et de fantaisie, où toute l’intelligence, le goût, l’esprit, le talent, se subordonnent aux faits et ne s’appliquent qu’à mettre en valeur strictement le contenu des documents.

960. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Banville, Théodore de (1823-1891) »

Non pas qu’en prenant ce petit livre pour prétexte de quelques considérations générales, je veuille dire qu’il n’a que la valeur d’un prétexte : jamais le talent de l’auteur des Cariatides et des Stalactites n’a été ni plus complet, ni plus puissant ; jamais ce but qu’il a constamment poursuivi, de la correction dans la forme, et surtout de la correction dans l’imprévu, n’a été mieux atteint. Jamais les difficultés, cherchées et multipliées à plaisir d’artiste, de la prosodie et du rythme n’ont été mieux déguisées par la simplicité mélodique du sentiment ; et jamais la banalité du sentiment éternel n’a été mieux relevée par la recherche, la complication adroite de l’art… Aujourd’hui, M. de Banville, après avoir publié deux livres de poésies remarquables, et répandu dans les journaux, dans les revues, de nombreuses pages d’une prose savante, correcte, pleine de nombre et de mouvement, est encore considéré par bien des gens comme un jeune écrivain dont le talent promet. […] Émile Faguet À propos du Baiser : Malgré tout le talent de M. de Banville et malgré toute la considération qui s’attache à son nom, on ne l’aurait pas écouté bien longtemps, et il le sait parfaitement.

961. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre II » pp. 12-29

Bientôt aussi le talent de converser devînt le but d’une émulation vive et générale : on en vint plus tard à mettre par écrit les conversations des sociétés particulières, on les livra à l’impression : on envoya ses conversations à ses amis et à ses connaissances13. […] Ce fut l’ode de Malherbe sur la mort de Henri IV, qui éveilla le talent de La Fontaine ; et qui n’a entendu citer ces vers sur la mort de mademoiselle du Périer, Elle était de ce monde où les plus belles choses                Ont le pire destin ; Et rose, elle a vécu ce que vivent les roses,                L’espace d’un matin ? […] Il semble craindre à la suite d’avoir été injuste en bornant le talent du second au genre pastoral.

962. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 15, le pouvoir de l’air sur le corps humain prouvé par le caractere des nations » pp. 252-276

Un talent particulier aux françois et dont toute l’Europe les loüe comme d’un talent qui leur est propre spécialement, c’est une industrie merveilleuse pour imiter facilement et bien les inventions des étrangers. Cesar donne ce talent aux gaulois, qu’il appelle, genus summae…etc. .

963. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Introduction. Du bas-bleuisme contemporain »

Dernièrement, n’avons-nous pas vu une femme d’un talent secondaire, décorée, comme un homme, reconnu grand artiste, ne l’est souvent pas ? […] Quand on les a montrés et racontés, il ne reste plus à demander si ces faits engendrés par les causes que nous avons dites, sont bons ou mauvais en eux-mêmes ; légitimes ou illégitimes, le développement naturel des choses humaines ou une de ces distorsions que l’homme, avec son libre arbitre, peut leur imprimer… En d’autres termes, le bas-bleuisme, — si on entend par là et on ne peut entendre par là que l’égalité entre l’homme et la femme qui a le droit de s’attester au même titre que l’homme et dans des œuvres semblables à celles de l’homme, — le bas-bleuisme est-il une vérité ou un mensonge, un cri du talent opprimé ou une prétention de la vanité ; une illusion et un désordre ? […] Mais quand elles ont le plus de talent, les facultés mâles leur manquent aussi radicalement que l’organisme d’Hercule à la Vénus de Milo, et pour le critique, c’est aussi clair que l’histoire naturelle.

964. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le comte Gaston de Raousset-Boulbon »

De la Madelène a de la facilité dans le talent. […] Il fallait une époque comme la nôtre, un temps amoureux fou des mots, pour songer à introduire dans l’auréole sanglante du vainqueur d’Hermosillo et du condamné de Guaymas l’auréole, si pâle à côté, d’un talent littéraire réel, mais qui ne trouva sa sincérité et sa plénitude que dans les lettres où l’observateur politique, l’homme d’intuition et d’exécution, le lutteur contre la difficulté, dominent tout ! […] Il y est fulminant de talent, d’expression, — cent fois plus écrivain, dans sa spontanéité fougueuse, que ceux qui font métier, marchandise de littérature.

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