Mme Dacier ne souffrait pas que Pope, qui traduisait vers le même temps Homère en anglais, comparât l’Iliade à un vaste et fécond verger d’Ionie, ou, si l’on veut, à un parc anglais : Bien loin que l’Iliade soit un jardin brut, s’écriait-elle, c’est le jardin le plus régulier et le plus symétrisé qu’il y ait jamais eu. […] Elle lui opposait une autorité, selon elle, convaincante, celle du délicat et très dédaigneux Alcibiade, qui n’aimait rien que le neuf et qui ne pouvait souffrir d’entendre la même chose deux fois : Cependant cet homme, si ennemi des répétitions, disait-elle, aimait et estimait si fort Homère, qu’un jour, étant entré dans l’école d’un rhéteur, il lui demanda qu’il lui lût quelque partie d’Homère ; et le rhéteur lui ayant répondu qu’il n’avait rien de ce poète, Alcibiade lui donna un grand soufflet. […] Si l’on souffre que de faux principes leur gâtent l’esprit et le jugement, il n’y a plus de ressource.
Sa mort suffisait pour notre salut ; mais sa mort ne suffisait pas à ce merveilleux appétit qu’il avait de souffrir pour nous. […] Bossuet a dit quelque part dans un de ses sermons : « S’il n’était mieux séant à la dignité de cette chaire de supposer comme indubitables les maximes de l’Évangile que de les prouver par raisonnement, avec quelle facilité pourrais-je vous faire voir, etc. » Là où Bossuet eût souffert de s’abaisser et de s’astreindre à une trop longue preuve et à une argumentation suivie, Bourdaloue, qui n’avait pas les mêmes impatiences de génie, était sans doute un ouvrier apostolique plus efficace à la longue et plus approprié dans sa constance. […] Tu arrêtes cette eau d’un côté, elle pénètre de l’autre, elle bouillonne même par-dessous la terre… Après tout, Bossuet est un orateur ; si peu qu’il cherche son art, il en possède et en connaît toute la pratique comme un Démosthène ; ce beau morceau, qui a l’air d’être brusque et soudain, il sait bien qu’il est beau, il le garde et le met en réserve pour le répéter dans l’occasion. — On remarque aussi, jusque dans ses sermons de la grande époque, des expressions non pas surannées, mais d’une énergie propre et qui n’est pas de l’acception commune : « Notre siècle délicieux, qui ne peut souffrir la dureté de la croix » ; pour notre siècle ami des délices. — « C’est vouloir en quelque sorte déserter la Cour que de combattre l’ambition. » Déserter, c’est-à-dire dévaster, rendre déserte (solitudinem facere). — « Il y a cette différence entre la raison et les sens, que les sens font d’abord leur impression : leur opération est prompte, leur attaque brusque et surprenante. » Surprenante est pris ici au sens propre et physique, et non dans le sens plus réfléchi d’étonner et d’émerveiller.
Elle souffrit longtemps, nous dit Tallemant des Réaux en parlant de cette fin de vie de la marquise, il (Maucroix) souffrait assurément plus qu’elle : je n’ai jamais vu un homme si affligé, et, à cause de lui, je me suis réjoui de la mort de cette belle, parce qu’il était en un tel état que je ne savais ce qui en serait arrivé. […] Si votre fière maîtresse Fait voir un petit courroux, Profitez de sa faiblesse ; Elle souffre plus que vous.
Il avait fort souffert du premier accueil que les savants de profession avaient fait à ses idées ; et, même dans ses derniers jours, la blessure n’était pas encore guérie. […] Il évitait pourtant (à la différence de lord Byron encore) de braver le préjugé dont il avait à souffrir. […] Ce qu’il était permis de dire aux anciens Grecs ne nous semble plus, à nous, convenable, et ce qui plaisait aux énergiques contemporains de Shakspeare, l’Anglais de 1820 ne peut plus le tolérer, à tel point que dans ces derniers temps on a senti le besoin d’un « Shakspeare des familles. » Nous connaissons, sans sortir de chez nous, de ces pruderies et de ces arrangements-là, mais bien vite nous en rions ; — nous en souffrons aussi.
On a eu raison de louer le Cantique sur la mort de madame de Broglie ; j’y remarque pourtant des longueurs qui nuisent à l’effet, quelques mots discordants, et surtout un manque de décision dans le sentiment religieux avec lequel il eût fallu aborder cette admirable personne, d’une foi si précise, et dont l’âme présente doit, ce semble, moins que jamais souffrir rien d’évasif à ce sujet. […] Le public ami du poëte en a souffert amèrement. […] Il avait de tout temps ses défauts, ses inadvertances ; il faisait rimer ciel et soleil, il disait l’une après l’une ; on ne lui demandait qu’à peine de s’en corriger ; la grammaire souffrait plus que l’esprit ; il y avait encore une certaine mesure et comme une harmonie dans ses négligences.
Je voudrais jouir et souffrir de la terre entière, de la vie totale et, comme saint Antoine à la fin de sa tentation, embrasser le monde… Vous pouvez, si cela vous plaît, juger excessive l’impression que laissent en moi ces romans. […] Il a vaguement peur de ce jardin du Pacifique où l’humanité ne souffre pas. […] On me dira : « Tous ces romans de Loti sont bien négligemment composés. » Est-ce ma faute, si je n’en souffre point Ou bien : « Ne trouvez-vous point quelque bric-à-brac et quelque verroterie dans cet exotisme, trop de rêva-rêvas, de colliers de soumaré, de palétuviers, de cholas, de diguhelas ?
On ne prêche pas l’entraînement, on ne le prêche pas plus que la force : il est ou n’est pas… Il reconnaissait, à la date où il écrivait ces lignes, que l’heure était déjà passée, et il en souffrait. […] vous n’êtes pas engagé. » Il dut souffrir beaucoup dans les trois dernières années de sa vie. […] Si Carrel avait assisté aux événements de février 1848, il y aurait eu pour lui, on peut l’assurer, encore plus à souffrir qu’à s’enorgueillir dans le triomphe.
Dans les intervalles où je souffrais moins, je lisais Grandisson, et en combien de choses n’ai-je pas trouvé un juste rapport entre Grandisson et mon fils ! […] Il resta assez longtemps dans l’horlogerie, et sans en souffrir dans sa vanité. […] … » Il veut dire son modèle, en ce sens que les femmes savent beaucoup souffrir sans que leur nature en soit altérée. — Peignant la vieillesse de Pâris-Duverney assiégée de collatéraux avides, il en tirera argument contre le célibat et fera une allocution vertueuse et morale aux célibataires : « Amants du plaisir !