On se rappelle le mot de Hégel mourant : « Je croyais qu’il m’était resté un disciple qui me comprenait, et je n’ai plus que moi ! […] Il resta plusieurs années en Italie, où, paraît-il, il ne caressa pas que des abstractions… Cependant, malgré une jeunesse qui ressembla plus par les mœurs à celle d’un poète comme Byron qu’à celle d’un philosophe qui devait proclamer un jour la beauté de la continence et la nécessité de l’ascétisme, la métaphysique le tenait. […] Comme il n’était pas encore le futur bouddhiste détaché assez de son moi pour ne pas craindre le choléra, il détala comme s’il eût eu les quatre pieds d’un lièvre, quand cette maladie parut à Berlin, et il se retira à Francfort-sur-le-Mein, où il resta vingt-neuf ans, comme Kant à Kœnigsberg, mais moins tranquille.
Après le discours éteint, fumant, évaporé, le livre, qui condense la vie de la parole et qui la force à reparaître et à rester là pour qu’on la juge ; le livre, qui affronte la pensée solitaire, glacée, difficile ! […] Elles resteront comme une des illustrations de la littérature catholique au xixe siècle, et, si j’osais employer un mot qui rendit juste ma pensée, comme une occasion perpétuelle de conversion pour les âmes qui n’ont pas la foi. […] Il en a eu un autre, qui passera comme les idées politiques par lesquelles on pourrait l’expliquer, mais l’empire qu’il tient de sa connaissance du cœur de l’homme ne passera point ; il restera son vrai mérite et sa vraie gloire.
Caro pourrait bien arriver à temps pour enfin terminer un débat sans bout dont tout le monde est las, et dont il restera, je le crains, à l’esprit français, — cet esprit qui d’ordinaire traverse les questions comme une balle, — un immense appesantissement ! […] La plus grande, je l’ai dit, c’est d’y être resté exclusivement philosophe, et par là d’avoir évité le mot bête et belge de la Haine : « C’est un clérical ! […] C’est surtout avec Renan, bien plus qu’avec Taine, qui est le Démocrite de l’athéisme, et Vacherot, qui en est le Zénon, gens très nets et qui dispenseraient volontiers Caro de politesse, que Caro s’est livré à ces tours de force d’amabilité dont je ne parle tant que parce qu’ils donnent un caractère nouveau et presque plaisant à un livre grave, et que ce caractère restera à ce livre sans l’amoindrir.
Il est resté, toute sa vie, un lamartinien. […] Achille du Clésieux, qui n’est pas seulement religieux, mais catholique, est resté ferme dans sa croyance et dans la vérité, malgré les orages de son âme et les entraînements d’une imagination qui est toujours un danger… Quand on vient de lire le poème d’Armelle, il est impossible de ne pas penser au poème de Jocelyn ; Jocelyn, ce chef-d’œuvre, dont le héros seul fait tache souvent dans la splendide lumière du poème, tandis que le héros d’Armelle fait toujours lumière dans le sien ! […] Du Clésieux, dans son poème, est resté jusqu’à la dernière page et jusqu’à son dernier vers dans la beauté du sentiment chrétien le plus pur, et cette beauté s’ajoute à celle de l’émotion humaine qui fait palpiter tout son poème, comme un cœur vivant… IV Rien de plus simple que ce roman en vers qui pourrait bien être une histoire, et cette simplicité est si grande que la donnée du poème peut se raconter en deux mots… Le héros du livre, qui n’est pas nommé dans le poème, l’amant d’Armelle, est un Childe Harold de ce temps où toute âme un peu haute est plus ou moins Childe Harold, et n’a pas besoin d’aller au fond de toutes les coupes que nous tend le monde pour s’en détourner et revenir à la solitude, — et pour s’essuyer, comme un enfant à la robe de sa mère, de ses souillures et de ses dégoûts, à la Nature.
Resté seul, il met le feu à du bois goudronné, et se couche heureux sur le pont. […] Cas de conscience, querelles de ménage, légers dissentiments domestiques, voilà les ressources qui restent à cet esprit d’indépendance absolue. […] Les Anglais n’en sont pas moins restés ce qu’étaient leurs pères, et ils n’ont fait que développer de mieux en mieux leurs qualités et leurs instincts. […] Aussi s’explique-t-on aisément que ce petit livre soit resté un livre de dévotion populaire dans le pays de Galles. […] Shandy, le caporal Trim, le docteur Slop, l’âne de Lyon et celui de Nampont restent dans le souvenir aussi obstinément que les héros les plus renommés du drame et du roman.
La seconde restera par son premier majestueux volume et par plusieurs épisodes. […] De cette œuvre colossale que restera-t-il ? […] Mais un tel orgueil devait rester jusqu’à la fin indomptable. […] Il est convaincu que l’homme n’est pas fait pour rester en place. […] Leurs yeux restent fixés sur le but entrevu, poursuivi et manqué.
Je dirai pourtant, puisqu’il le faut, quelle impression m’est restée des Feuilles d’automne. […] Pauvre grand écrivain de petites choses, ils l’auraient mis dans le pilon, ils l’auraient broyé, s’ils avaient pu, pour tirer de sa poussière toutes les paillettes d’or qui y seraient restées. […] » Dites-moi ce qui est resté de ces théories. […] À d’autres époques, un livre est moitié l’ouvrage du temps ; aujourd’hui, le livre et l’auteur restent tous les deux isolés ; le siècle n’aide pas, ne rend pas ; il est tout passif, il reçoit. […] Victor Hugo a fait quelques ouvrages qui resteront.
Il avait bien compté, ai-je dit, faire la guerre d’Espagne ; mais il eut l’ennui de rester en sentinelle sur la frontière. […] Il se demanda d’abord ce qu’il aurait fait en ces journées critiques et sanglantes de juillet 1830, s’il était resté dans cette garde royale où il comptait tant d’amis. […] Lui, il était resté sous le coup d’un triomphe unique ; il y avait mis son signet et avait fermé le livre, ne le rouvrant plus jamais qu’à la même place et se donnant mille prétextes pour ne pas continuer et récidiver. […] Jeune, il avait vécu dans l’intimité de Fontanes, de Joubert, de Chateaubriand ; il était resté des plus délicats en matière littéraire, et même chatouilleux, si l’on peut dire. […] Mais la pièce, selon moi, la plus belle du recueil, et au moins égale, je le crois, à n’importe lequel de ses anciens poèmes, c’est la Colère de Samson, écrite en 1839 et restée inédite jusqu’ici.