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610. (1870) La science et la conscience « Chapitre II : La psychologie expérimentale »

Tous les philosophes, depuis Aristote jusqu’à Hegel, ont remarqué la supériorité de la vue et de l’ouïe sur les autres sens, en observant que la vue et l’ouïe sont proprement les sens du beau. […] L’expérience démontre, ainsi que le remarquent Stuart Mill et Littré, qu’il règne une telle constance, un tel ordre dans la succession de certains phénomènes moraux, qu’il est possible d’en prévoir le retour, sinon avec l’absolue certitude qui s’attache aux prévisions de l’ordre scientifique, du moins avec une très-grande probabilité. […] « Il importe bien de remarquer ici que, dans le point de vue de l’observateur de la nature extérieure, la cause qui produit ou amène une série de faits analogues, ne peut jamais être donnée a priori, ni conçue en elle-même, encore moins imaginée dans le comment de la production des phénomènes qui s’y rattachent ; aussi la langue des sciences naturelles manque-t-elle toujours du terme propre qui signifie précisément l’activité productive, l’énergie essentielle de toute cause efficiente, manifestée actuellement par les phénomènes sensibles qu’elle produit, mais non constituée par eux, puisqu’elle est connue comme étant nécessairement avant, pendant et après ces phénomènes26. » Ainsi, comme le remarque ici judicieusement un philosophe : « Dans ce que nous appelons, par exemple, force d’attraction, d’affinité, ou même d’impulsion, la seule chose connue (c’est-à-dire représentée à l’imagination et aux sens), c’est l’effet opéré, savoir, le rapprochement des deux corps attirés et attirant.

611. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Notes et pensées » pp. 441-535

Villemain m’arrêta, et, selon sa préoccupation habituelle, me fit remarquer que de nos jours il manquerait bien des choses à Johnson pour être un grand critique. […] Ce libertin de Voltaire a remarqué que faire des idées pour celui qui pense, c’est un peu un plaisir pareil à celui de faire des enfants. […] Molé me faisait remarquer que si Thiers était distingué en conversation, il manquait d’élévation en écrivant, et que sitôt qu’il voulait y viser, il tombait dans le commun. […] Molé, on se mit à remarquer que, s’il avait la conversation distinguée, il devenait aisément commun dans sa parole publique et dans ses discours de tribune. […] J’abrège le raisonnement, et je me contenterai de faire remarquer que M. 

612. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre II. Les directions divergentes de l’évolution de la vie. Torpeur, intelligence, instinct. »

Nos habitudes individuelles et même sociales survivent assez longtemps aux circonstances pour lesquelles elles étaient faites, de sorte que les effets profonds d’une invention se font remarquer lorsque nous en avons déjà perdu de vue la nouveauté. […] On a bien souvent fait remarquer que la plupart des instincts sont le prolongement, ou mieux l’achèvement, du travail d’organisation lui-même. […] Mais il faut signaler ici une différence, trop peu remarquée, entre deux espèces d’inconscience, celle qui consiste en une conscience nulle et celle qui provient d’une conscience annulée. […] Mais comment ne pas remarquer que la science elle-même invite la philosophie à prendre les choses d’un autre biais ? […] Mais il faut remarquer que les choses se passeraient exactement de même si la conscience, au lieu d’être effet, était cause.

613. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Delille »

Les femmes ne remarquent jamais ce qu’elle est, et toujours ce qu’elle exprime ; elle est vraiment laide, mais bien plus curieuse, je dirais même intéressante. […] Villemain, en une de ses leçons, a remarqué qu’on se trouvait alors si bien dans le salon, qu’on mettait au plus la tête à la fenêtre pour voir la nature ; … et encore, c’était du côté du jardin. […] Il venait de réciter à Parseval-Grandmaison un morceau dont l’idée était empruntée de Bernardin de Saint-Pierre, ce que Parseval remarqua : « N’importe ! […] Un homme de goût, qui dans sa jeunesse put étudier de près ce que de loin on confond, me fait remarquer que chez Saint-Lambert, au milieu de la roideur et de la monotonie qui nous choquent aujourd’hui, on saisirait un amour des champs, un sentiment de la nature tout autrement vrai que chez Delille.

614. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XV. La littérature et les arts » pp. 364-405

Depuis lors, Taine127 a brillamment interprété des sonates de Beethoven, non sans faire remarquer avec justesse que la musique, évoquant, non des formes distinctes ni des idées précises, mais des états d’âme et des nuances de sentiment, laisse à l’interprétation une liberté des plus larges. […] Son union étroite avec elles est prouvée déjà par ce fait que beaucoup d’expressions leur sont communes : la chose est facile à remarquer dans le langage de la critique. […] Aussi est-il naturel que dans le développement de ces arts voisins qui font échange de vocabulaire se remarquent à chaque instant des coïncidences. […] Gœthe, à propos de son Faust, illustré par Delacroix138, disait à Eckermann, qui remarquait combien de tels dessins aident à l’intelligence complète d’un poème : « C’est certain : car l’imagination plus parfaite d’un artiste nous force à nous représenter les situations comme il se les est représentées à lui-même.

615. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VII »

Je ferai cependant encore remarquer que notre traducteur pousse la perversité jusqu’à dénaturer les simples indications scéniques, sans doute en voulant les embellir. […] Ernst de pouvoir faire remarquer la logique analogie qui s’établit entre le motif 42 et le motif de Parsifal qui peut lui être facilement superposé. […] Remarquer la parenté confuse du motif 49 et du motif 57, musicalement. […] Il est à remarquer que tous ces motifs sont purement adjectifs, c’est-à-dire caractérisent non le personnage, mais telle forme de sa manifestation dramatique ou symbolique.

616. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre onzième. La littérature des décadents et des déséquilibrés ; son caractère généralement insociable. Rôle moral et social de l’art. »

Remarquons d’ailleurs que la vengeance est une conséquence logique de la vanité blessée, et la disproportion du désir de vengeance qu’on remarque chez les criminels tient beaucoup à la disproportion de leur vanité. […] Mais il faut remarquer que, plus la civilisation avance, plus l’individualité se développe ; et ce développement peut devenir une cause de décadence si, en même temps que l’individualité se montre plus libre et plus riche, elle ne se subordonne pas elle-même volontairement à l’ensemble social. […] Il n’est pas de langue littéraire plus pauvre au fond que celle qui est ainsi composée d’expressions forcées ou simplement rares, parce que ces expressions se font remarquer et deviennent une répétition fatigante dès qu’on les voit revenir. « Laissez-moi vous donner, écrivait Sainte-Beuve à Baudelaire, un conseil qui surprendrait ceux qui ne vous connaissent pas : vous vous défiez trop de la passion, c’est chez vous une théorie. […] Il en résulte, comme l’ont remarqué les sociologistes, une tendance de l’art, surtout réaliste, à maintenir l’homme sous l’empire de ses « inclinations ataviques », plus ou moins grossières, haine, vengeance, colère, jalousie, envie, sensualité, etc.

617. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVIII. J.-M. Audin. Œuvres complètes : Vies de Luther, de Calvin, de Léon X, d’Henri VIII, etc. » pp. 369-425

Les moralistes n’ont pas assez remarqué l’action mystérieuse de l’Église sur les esprits qu’elle touche. […] Les journaux, les recueils périodiques, pullulèrent… Audin, du fond de cette arrière-boutique qui était un cabinet d’étude où veillait cette lampe de l’écrivain d’Athènes dont on sentait un peu l’huile dans ce qu’il écrivait, mais qui était parfumée, rédigeait et envoyait aux journaux royalistes du temps, et en particulier au Journal de Lyon, fondé par Ballanche, un grand nombre d’articles que les biographes, qui aiment à écouter tomber les feuilles que le vent emporte, disent avoir été remarqués. […] L’effet du livre d’Audin fut à peine remarqué dans la littérature contemporaine. […] M. de Bonald remarqua le livre, et il en pressentit l’avenir.

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