De la morale poétique, et de l’origine des vertus vulgaires qui résultèrent de l’institution de la religion et des mariages. Caractère farouche et religions sanguinaires des hommes de l’âge d’or. Ces religions furent cependant nécessaires.
Le Traité de la paix intérieure est tout à la fois un Ouvrage de Religion & de Belles-Lettres : de Religion, par les réflexions sages, les maximes solides, les principes lumineux, les sentimens pleins d’onction qu’il offre à son Lecteur : de Belles-Lettres, par la maniere dont il est écrit, c’est-à-dire, avec netteté, élégance & précision.
La théologie de Calvin repoussant le lourd appareil de la scolastique prend, pour la première fois181, une base d’argumentation dans la nature, dans les faits, dans l’expérience enfin : elle étudie l’homme, elle lui applique le dogme, elle tire de son état, de ses besoins la démonstration de la religion, qui rend compte de cet état, et répond à ces besoins. […] Pour régler la vie, comme pour saisir les rapports de l’homme à Dieu, de la nature à la religion, il a fallu que Calvin se fit psychologue et moraliste. […] Et n’est-ce pas lui enfin qui, avant Bossuet, prêchait le dogme plutôt que la morale, et faisait sa principale affaire de l’enseignement de la religion, persuadé que la bonne vie procéderait de la forte foi ? […] L’Institution de la religion chrestienne (Genève ?)
Dans ces Lettres où il cite souvent Pascal et où il prouve qu’il l’a bien pénétré, Rivarol se place à un point de vue d’épicuréisme élevé qu’il aura à modifier bientôt, quand la Révolution, en éclatant, lui aura démontré l’importance politique des religions. […] Il considère la parole comme « la physique expérimentale de l’esprit », et il en prend occasion d’analyser l’esprit, l’entendement, et tout l’être humain dans ses éléments constitutifs et dans ses idées principales ; il le compare avec les animaux et marque les différences essentielles de nature : puis il se livre, en finissant, à des considérations éloquentes sur Dieu, sur les passions, sur la religion, sur la supériorité sociale des croyances religieuses comparativement à la philosophie. […] Or, l’esprit est le côté partiel de l’homme ; le cœur est tout… Aussi la religion, même la plus mal conçue, est-elle infiniment plus favorable à l’ordre politique, et plus conforme à la nature humaine en général, que la philosophie, parce qu’elle ne dit pas à l’homme d’aimer Dieu de tout son esprit, mais de tout son cœur : elle nous prend par ce côté sensible et vaste qui est à peu près le même dans tous les individus, et non par le côté raisonneur, inégal et borné, qu’on appelle esprit. […] Et ceci encore : Que l’histoire vous rappelle que partout où il y a mélange de religion et de barbarie, c’est toujours la religion qui triomphe ; mais que partout où il y a mélange de barbarie et de philosophie, c’est la barbarie qui l’emporte… En un mot, la philosophie divise les hommes par les opinions, la religion les unit dans les mêmes principes ; il y a donc un contrat éternel entre la politique et la religion.
Ayant abjuré depuis son erreur entre les mains de Bossuet, il consacra sa plume à la défense de la Religion Catholique, & laissa plusieurs Ouvrages qu’on a recueillis en 3 vol. […] Un Auteur qui en avoit eu besoin autrefois, est plus croyable que personne sur les sentimens que la Religion, l’humanité & la politique prescrivent à l’égard des Disciples.
Tout en avouant la nécessité d’une religion, et en admirant le christianisme, j’en ai cependant méconnu plusieurs rapports. […] Le souvenir de mes égarements répandit sur ses derniers jours une grande amertume ; elle chargea, en mourant, une de mes sœurs (Mme de Farcy) de me rappeler à cette religion dans laquelle j’avais été élevé. […] Je vous avais mal cité le titre de l’ouvrage, le voici : Des beautés poétiques et morales de la religion chrétienne, et de sa supériorité sur tous les autres cultes de la terre. […] Il est le premier à nous l’avouer, et il y aurait mauvaise grâce à le trop presser là-dessus : Quand les semences de la religion, dit-il en un endroit de ses Mémoires, germèrent la première fois dans mon âme, je m’épanouissais comme une terre vierge qui, délivrée de ses ronces, porte sa première moisson. […] Le talent porté à ce degré a aussi sa religion, et qui ne saurait tromper.
Cela paraissait tout simple et au roi et aux courtisans, et à Dangeau qui enregistre ces succès avec une parfaite bonne foi, de telle sorte que lorsqu’il écrit dans son journal, à la date du 19 octobre de cette année 1685 : « Outre la cassation de l’Édit de Nantes de 1598, on casse l’édit de Nîmes de 1629, et tous les édits et déclarations donnés en faveur de ceux de la religion prétendue réformée ; ordre à tous les ministres de sortir du royaume dans quinze jours ; les enfants qui naîtront seront baptisés et élevés dans la religion catholique, etc., etc. » ; et que lorsqu’à la date du 22, il ajoute : « Ce jour-là on enregistra dans tout le royaume la cassation de l’Édit de Nantes, et l’on commença à raser tous les temples qui restaient » ; en prenant note de ces actes considérables, il semble ne faire que constater un fait accompli et que rendre compte d’une formalité dernière. […] Sa femme a été blessée d’un coup de fusil ; ce sont les paysans qui l’ont arrêté et qui faisaient la garde pour empêcher les gens de la religion qui veulent sortir du royaume… » — « Vendredi 25. — On mène du Bordage dans la citadelle de Lille, sa femme dans celle de Cambray, et Mlle de La Moussaye, sa belle-sœur, dans celle de Tournay. On fait revenir les enfants à Paris, et ils seront élevés dans notre religion. » — « Samedi 26. — Le roi monta en calèche au sortir de la messe, et alla avec les dames voir voler ses oiseaux. » Ce vol des oiseaux, disons-le en passant, était une grande affaire et un des plaisirs ordinaires du roi. […] s’écriait l’orateur sacré en terminant, c’est pour cela même que vous multiplierez les jours de cet auguste monarque, et que vous le conserverez, non seulement pour nous, mais pour vous-même ; car, avec une âme aussi grande, avec une religion aussi pure, une religion aussi éclairée, avec une autorité aussi absolue que la sienne, que ne fera-t-il pas pour vous, après ce que vous avez fait pour lui ; et par quels retours ne reconnaîtra-t-il pas les grâces immenses que vous avez versées et que vous versez encore tous les jours sur lui ?
Il accorde beaucoup à la piété, à la véritable, qu’il distingue soigneusement et en traits vigoureux d’avec la superstition ; puis il ajoute un avis nécessaire, dit-il, à celui qui prétend à la sagesse, qui est, d’une part, de ne point séparer la piété de la vraie prud’homie, et d’autre part, et encore moins, de ne les confondre et mêler ensemble : « Ce sont deux choses bien distinctes et qui ont leurs ressorts divers, que la piété et la probité, la religion et la prud’homie, la dévotion et la conscience : je les veux toutes deux jointes en celui que j’instruis ici… mais non pas confuses. » Le père Buffier, d’ailleurs très équitable envers Charron, a relevé ce passage en disant : « Une probité sans religion serait une probité sans rapport à la divinité et indépendante de la loi de Dieu. […] Charron ici, dans sa définition tant de la probité que de la religion, et du lien qui les unit, a été tout occupé d’éviter à son homme de bien la crainte des châtiments futurs pour unique principe d’action, et il a trop oublié la charité et l’amour. Toutefois, sa pensée et sa recommandation, pour être appréciées comme il faut, ne doivent point se séparer des temps où il écrivait : qu’on se reporte, en effet, à ce lendemain des guerres civiles et des fanatismes sanglants, à ces horreurs récentes exercées des deux parts au nom de la religion et d’une fausse piété, et l’on concevra tout le sens et l’application de cet endroit ; il redoute la confusion si facile à faire quand un zèle excessif s’en mêle ; il craint à bon escient et par expérience que l’on ne traite comme malhonnêtes gens et criminels tous ceux qui ne pensent point en matière de foi comme nous-mêmes, et il cherche, en émancipant moralement la probité, à bien établir qu’il y a des vertus respectables qui peuvent subsister à côté et indépendamment de la croyance. […] La seconde édition de La Sagesse ne parut donc qu’après sa mort, et comme l’auteur n’était plus là pour la surveiller et se défendre, il s’éleva des difficultés dans lesquelles intervinrent utilement le premier président Achille de Harlay et le président Jeannin : ce dernier, dont la religion n’était pas suspecte, fut chargé par le chancelier d’examiner cette seconde édition (1604), dans laquelle il fit de petits retranchements et introduisit quelques corrections, y jetant çà et là quelques parenthèses explicatives ; moyennant quoi il l’approuva hautement. […] Il était fils d’un minisire de Marans, qui est encore vivant ; il est de la religion de son père, (et) qui médite antre chose.