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32. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1870 » pp. 321-367

Je le regarde, je lui vois un air étrange, avec des larmes et de l’effroi dans les yeux. […] Au milieu de ces fleurs est une fleur de magnolia, dont il regardait grossir le bouton avec un certain plaisir curieux, et qui lui faisait rappeler le magnolia aimé de Chateaubriand, à la Vallée-aux-Loups. […] Je regarde les rideaux de son lit, les anciennes portières du salon de la rue Saint-Georges, dans le rose desquelles j’ai fait, il y a bien des années, un portrait-aquarelle du cher enfant. Je regarde le grand dessin de femme de Vanloo, provenant de la vente Boilly, qu’il vint acheter avec moi, la dernière fois que nous mîmes les pieds aux Commissaires-Priseurs. Je regarde la grande table à modèle, sur laquelle nous avons si longtemps travaillé ensemble, et qui est encore tachée de l’encre du livre sur Gavarni.

33. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (3e partie) » pp. 5-79

À le voir, il semblait occupé à regarder continuellement quelque chose de terrible. […] Il regardait l’argousin debout à quelques pas de lui ; l’argousin lui semblait un fantôme ; tout à coup le fantôme lui donnait un coup de bâton. […] Il la regarde, il la regarde frénétiquement. […] Ce que je fais en ce moment, Dieu, qui est là-haut, le regarde, et cela suffit. […] « Brevet eut comme une secousse de surprise et le regarda de la tête aux pieds d’un air effrayé.

34. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE CHARRIÈRE » pp. 411-457

Regardez plutôt ma cousine (qui se mariait), son air, sa robe, ses pensées ; car je vous demanderai compte de tout cela. […] Sa femme paraît le regarder comme un autre Adonis. […] Penses-y cependant : regarde autour de toi pour voir si quelque autre n’obtiendrait pas de toi un autre sentiment. […] Je l’ai regardée : elle l’a vu ; elle a rougi. […] En littérature, si l’on y regarde, c’est encore pis qu’ailleurs : l’esprit seul désormais y fait loi.

35. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre III. Montaigne »

Il avait l’esprit vif : dégagé des soucis pratiques et des affaires, il lut, il regarda les hommes, il se regarda lui-même, réfléchissant, conférant, ratiocinant, habile à extraire d’un fait une idée ; il fit ainsi la revue de toutes ses opinions, préjugés, croyances, connaissances, et ce faisant, il fit le tour des idées de son siècle. […] J’ai fait ce que j’ai voulu : tout le monde me reconnaîtra en mon livre, et mon livre en moi235. » Il se confesse au même lieu d’avoir « une condition singeresse et imitative », et de recevoir l’empreinte de tout ce qu’il regarde avec attention. […] On peut même soupçonner qu’il prend grand plaisir à l’enfler, et regarde au nombre plus qu’au choix : témoin ces amours d’un éléphant et d’une bouquetière en la ville d’Alexandrie, dont il nous fait part gravement, et je ne sais combien d’autres sottises, auxquelles il se donne l’air de croire. […] Montaigne s’est exercé soigneusement à regarder la mort, appelant Socrate et Sénèque, et Lucrèce à la rescousse. […] Il a fini par se dire que la méditation de la mort était une duperie, que la méditation de la vie était meilleure, et qu’au lieu de regarder toujours la mort, il valait mieux regarder la vie, comme incertaine en général, mais enfin comme présentement certaine.

36. (1898) XIII Idylles diaboliques pp. 1-243

Regarde plus loin. […] Maître Phantasm et Grymalkin se regardent. […] Regarde donc un peu dehors. — Mais as-tu jamais regardé la campagne ? […] La porte regarde vers l’Orient. […] Regarde autour de toi, — regarde !

37. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XXII. L’affichage moderne » pp. 283-287

L’affichage moderne L’affiche illustrée (œuvre imprimée, qu’il faut donc mentionner ici) dont les oisifs regardent la pose toute fraîche et toute humide, admirant comment le mauvais et mince et tortillé chiffon sorti de la blouse grise affecte vite sur le renforcement du mur une allure de tableau et sous la décharge du pinceau un bel air verni, l’affiche illustrée est au juste, à cette heure, une industrie charmante qu’on est en train de gâcher. […] À l’opposé, regardons de Walter Crane l’affiche du Champagne Hau. […] Or, sans hésitation je reconnais, et toute personne ayant regardé quelques estampes reconnaîtra, que de ces quatre œuvres celle de Lautrec et celle de Bradley sont d’un art très supérieur.

38. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Loutherbourg » pp. 224-226

Regardez comme ce long sillon de lumière éclaire cette verdure, se joue entre les brins de l’herbe, et semble leur donner de la transparence. […] Regardez bien celui-ci, et jugez à qui appartient le mérite des autres. […] comme je les mettrais sous mon habit si l’on ne me regardait pas !

39. (1904) Le collier des jours. Souvenirs de ma vie

Tant que j’imaginais secrètement, sans parler et sans agir, cela ne les regardait pas. […] Le cocher, descendu de son siège, se dissimulait à l’angle du mur pour regarder dans le fossé. […] Mon père, debout, regardait à travers son monocle. […] Vite, je regardai autour de moi. […] Je le regardais avec ces yeux écarquillés et fixes que j’avais devant toute chose nouvelle.

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