/ 1708
282. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Michel Van Loo » pp. 66-70

Pourquoi le récit de ces actions nous saisissent-elles l’âme subitement, de la manière la plus forte et la moins réfléchie, et pourquoi laissons-nous apercevoir aux autres toute l’impression que nous en recevons ? […] Au récit d’une grande action notre âme s’embarrasse, notre cœur s’émeut, la voix nous manque, nos larmes coulent.

283. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XI. Mme Marie-Alexandre Dumas. Les Dauphines littéraires »

… Quant au talent, il est nul tout le temps qu’elle christianise, mais il y en a cependant dans le récit de l’adultère et du duel ; seulement un talent à la Dumas, sans esprit, tout de récit et de faits, et d’une personne qui a vécu dans une atmosphère où pendant trente ans et plus, on n’a parlé, arrangé, inventé que de ces choses-là.

284. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’insurrection normande en 1793 »

Quant au mouvement insurrectionnel dont Vaultier nous fait le récit en l’opposant au récit des Mémoires de Louvet et de Wimpfen, le général équivoque des forces armées du Calvados, il se borna, ce formidable mouvement, à la ridicule affaire de Brécourt, que des historiens à microscope, dès qu’il s’agit de la Révolution, ont exagérée.

285. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Histoire des ducs de Normandie avant la conquête de l’Angleterre »

Esprits raccourcis et passionnés, nous ne pensons, guères qu’à ce bout de toile historique dont nous sommes les tisserands d’un jour ou à ce qui peut directement s’y rattacher, et nous oublions trop que l’Histoire est particulièrement, dans sa notion pure et profonde, le récit des choses entièrement finies, des mondes entièrement disparus. […] II L’histoire des premiers ducs de Normandie est, en effet et avant tout, un récit dramatique, mouvementé, pittoresque, comme toutes les histoires où les peuples neufs apparaissent, et, hordes encore, s’essaient à devenir société.

286. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre III. La critique et l’histoire. Macaulay. »

C’est un procès que Macaulay instruit devant nous ; il y prend parti ; son récit est un réquisitoire, le plus entraînant, le plus âpre, le mieux raisonné qu’on ait écrit. […] Chez lui, les portraits se mêlent au récit. […] Explications, récits, dissertations, anecdotes, peintures, rapprochements, allusions aux événements modernes, tout se tient dans son livre. […] L’histoire des mœurs se trouve ainsi rattachée à l’histoire des événements ; les uns causent les autres, et la description explique le récit. […] L’animation, l’intérêt, la clarté, l’unité de son récit les étonnent.

287. (1857) Causeries du samedi. Deuxième série des Causeries littéraires pp. 1-402

Cette corde séraphique trempée dans l’ordure va reparaître dans quelques-uns de ses récits les plus célèbres et fera constamment partie intégrante de son talent. […] Dans Ursule Mirouët, un des meilleurs récits de l’auteur, tout le commencement est excellent. […] Gaberel, et elles donnent à ses récits, à ses révélations, à ses réticences, quelque chose de piquant et de charmant qu’on chercherait en vain sous une plume dévote comme la vôtre ou la mienne. […] C’est avec Constantin que commence le récit, l’ouvrage proprement dit, de M.  […] Est-ce là le seul enseignement qui ressorte des éloquents récits de M. 

288. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier »

En quittant chaque fois Besançon, Nodier y laissait un ami qu’il revoyait toujours ensuite avec bonheur, qu’il émerveillait de ses nouveaux récits, au cœur de qui il gravait comme sur l’écorce du hêtre les chiffres du moment, et que quarante années écoulées depuis lors n’ont pas arraché du même lieu. […] Pour savoir le Nodier d’alors, c’est bien moins le Nodier d’aujourd’hui, trop lassé de s’entendre, qu’il eût fallu interroger, que le témoin mémoratif et glorieux d’un tel ami, lorsque dans la belle promenade de Chamars, si pleine de souvenirs (avant que le Génie militaire eût gâté Chamars), il s’épanchait en abondants et naïfs récits, et faisait revivre sous les grands feuillages d’automne les confidences des printemps d’autrefois, désespoirs ardents, philtres mortels, consolations promptes, complots, terreurs crédules, fuites errantes, une fenêtre escaladée, les années légères. […] Les soirs même de dimanche, en cet Arsenal toujours gracieux et embelli, s’il s’oublie quelquefois, comme par mégarde, à causer et à rajeunir, si, debout à la cheminée, il s’engage en un attachant récit qui ne va plus cesser, à mesure que sa parole élégante et flexible se déroule, écoutez, assistez ! […] Ce qu’ils traduisent en chants ou en récits, il se ressouvient tout aussitôt de l’avoir pensé, de l’avoir rêvé. […] Séraphine, Amélie, la fleur de ces récits heureux, l’ont assez prouvé : qu’on y ajoute la première partie d’Inès, on aura le plus parfait et le dernier mot de sa manière.

289. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre I. Succès de cette philosophie en France. — Insuccès de la même philosophie en Angleterre. »

Car, dans toute question générale, il y a quelque notion capitale et simple de laquelle le reste dépend, celles d’unité, de mesure, de masse, de mouvement en mathématiques, celles d’organe, de fonction, de vie en physiologie, celles de sensation, de peine, de plaisir, de désir en psychologie, celles d’utilité, de contrat, de loi en politique et en morale, celles d’avances, de produit, de valeur, d’échange en économie politique, et de même dans les autres sciences, toutes notions tirées de l’expérience courante, d’où il suit qu’en faisant appel à l’expérience ordinaire, au moyen de quelques exemples familiers, avec des historiettes, des anecdotes, de petits récits qui peuvent être agréables, on peut reformer ces notions et les préciser. […] Car c’est là le trait le plus frappant de ce style, la rapidité prodigieuse, le défilé éblouissant et vertigineux de choses toujours nouvelles, idées, images, événements, paysages, récits, dialogues, petites peintures abréviatives, qui se suivent en courant comme dans une lanterne magique, presque aussitôt retirées que présentées par le magicien impatient qui en un clin d’œil fait le tour du monde, et qui, enchevêtrant coup sur coup l’histoire, la fable, la vérité, la fantaisie, le temps présent, le temps passé, encadre son œuvre tantôt dans une parade aussi saugrenue que celles de la foire, tantôt dans une féerie plus magnifique que toutes celles de l’Opéra. […] Voilà l’avantage de ces génies qui n’ont pas l’empire d’eux-mêmes : le discernement leur manque, mais ils ont l’inspiration ; parmi vingt œuvres fangeuses, informes ou malsaines, ils en font une qui est une création, bien mieux une créature, un être animé, viable par lui-même, auprès duquel les autres, fabriqués par les simples gens d’esprit, ne sont que des mannequins bien habillés  C’est pour cela que Diderot est un si grand conteur, un maître du dialogue, en ceci l’égal de Voltaire, et, par un talent tout opposé, croyant tout ce qu’il dit au moment où il le dit, s’oubliant lui-même, emporté par son propre récit, écoutant des voix intérieures, surpris par des répliques qui lui viennent à l’improviste, conduit comme sur un fleuve inconnu par le cours de l’action, par les sinuosités de l’entretien qui se développe en lui à son insu, soulevé par l’afflux des idées et par le sursaut du moment jusqu’aux images les plus inattendues, les plus burlesques ou les plus magnifiques, tantôt lyrique jusqu’à fournir une strophe presque entière à Musset480, tantôt bouffon et saugrenu avec des éclats qu’on n’avait point vus depuis Rabelais, toujours de bonne foi, toujours à la merci de son sujet, de son invention et de son émotion, le plus naturel des écrivains dans cet âge de littérature artificielle, pareil à un arbre étranger qui, transplanté dans un parterre de l’époque, se boursoufle et pourrit par une moitié de sa tige, mais dont cinq ou six branches, élancées en pleine lumière, surpassent tous les taillis du voisinage par la fraîcheur de leur sève et par la vigueur de leur jet. […] « Je rencontrais à Paris les d’Alembert, les Marmontel, les Bailly chez les duchesses ; c’était un immense avantage pour eux et pour elles… Quand un homme chez nous se met à faire des livres, on le considère comme renonçant également à la société des gens qui gouvernent et des gens qui rient… À la vanité littéraire près, la vie de vos d’Alembert et de vos Bailly était aussi gaie que celle de vos seigneurs. » (Stendhal, Rome, Naples et Florence, 377, récit du colonel Forsyth.) […] Le matelot dans le naufrage, Récit de Paquette. —  L’Ingénu , premiers chapitres.

/ 1708