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405. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Henri Cantel »

Toutes les inspirations ne peuvent pas être égales à ses yeux, elles ne peuvent pas faire équation entre elles ; le dire, le soutenir, ce serait dire, ce serait soutenir que le travail des facultés humaines et sa puissance font tout le poète (ce qui n’est pas), et que la substance sur laquelle le poète accomplit son merveilleux travail n’est rien ou peu de chose, — quelque chose de grossier ou d’inerte, quelque argile. […] Si nous ne l’avons pas démontré, c’est qu’on ne démontre pas plus la vie que le mouvement, et que le christianisme est toute la vie moderne, — que nous le sentions tous plus ou moins dans nos têtes et dans nos poitrines, — et qu’il est impossible, même à ceux-là qui le maudissent, de vivre deux secondes avec profondeur et puissance hors de l’étreinte de ce christianisme, notre vainqueur et notre maître à tous !

406. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Jules Janin » pp. 159-171

Cette faculté que je tiens à signaler aujourd’hui, cette faculté qui vient de se produire en cette Fin d’un Monde et du Neveu de Rameau avec un si incroyable éclat et tant de puissance, M.  […] Janin, une autre supériorité moins impersonnelle et moins fatale, qui venait non plus seulement des circonstances, mais du genre de talent de l’auteur et de la puissance d’imagination qu’il avait !

407. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Théophile Gautier. » pp. 295-308

Il n’a ni la conception profonde et variée des caractères, ni l’intuition des situations, ni la puissance de la passion et de la vie. […] Balzac eut l’incroyable puissance de se planter sur les épaules la tête de Rabelais, et même d’un Rabelais supérieur à Rabelais de toute la force de l’idéalité et du pathétique, que l’auteur du Pantagruel n’avait pas !

408. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Edgar Poe » pp. 339-351

Edgar Poe, le poète et le conteur américain, est à nos yeux le Bohême accompli, le Bohême élevé à sa plus haute puissance. […] III Était-ce donc la peine d’avoir tant de facultés en puissance ?

409. (1773) Essai sur les éloges « Morceaux retranchés à la censure dans l’Essai sur les éloges. »

Le cardinal lui-même est à Lyon pendant qu’on y instruit le procès ; on lui rend compte de tout ; chaque jour il fait venir les juges, et de tout le poids de sa puissance sollicite le meurtre. […] On assure que le même homme fit demander au pape, sous le nom du roi, un bref pour faire mourir qui il voudrait dans les prisons, sans charge de conscience et sans forme de procès ; comme s’il y avait une puissance qui pût affranchir des lois de la nature et de l’humanité ; comme si un bref pouvait autoriser des assassinats.

410. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. de Rémusat (passé et présent, mélanges) »

La prohibition ne servait, en effet, que l’ordre établi, dont on commençait à se soucier très-peu ; la liberté plaisait à la bonne compagnie, la première puissance de cette époque. […] C’est ainsi que, remarquant la puissance actuelle de la presse, il la confisqua au profit de son empire, et la contraignit à devenir complice de son système de déception ; mais cet abus même indique qu’en cela, comme en tout, il comprit son siècle ; et la preuve qu’il le comprit, c’est qu’il ne chercha pas moins à le corrompre qu’à le comprimer. […] Ce n’est pas pour la forme, c’est en conscience que cet esprit d’élite fait appel au vœu des majorités, qu’il leur accorde non-seulement une puissance de fait, mais comme une faculté de justesse. […] La tâche des publicistes en devient plus facile ; il ne s’agit plus pour eux de deviner, mais d’entendre ; ils ne provoquent plus, ils répondent. » Il fallait être doué à la fois d’une grande puissance de discernement et d’abstraction pour voir ainsi à la fin de 1819. […] Il est curieux de suivre tout ce dont est capable un grand esprit piqué au jeu, et de voir, en désespoir de cause, la philosophie se faisant drame, la critique, à ce degré de puissance, devenue créatrice.

411. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion dynamique »

Seule cette confiance peut devenir puissance, et soulever les montagnes. […] Mais ils n’ont fait qu’y passer : se ramassant sur eux-mêmes pour se tendre dans un tout nouvel effort, ils ont rompu une digue ; un immense courant de vie les a ressaisis ; de leur vitalité accrue s’est dégagée une énergie, une audace, une puissance de conception et de réalisation extraordinaires. […] À un Dieu qui tranchait sans doute sur tous les autres par sa justice en même temps que par sa puissance, mais dont la puissance s’exerçait en faveur de son peuple et dont la justice concernait avant tout ses sujets, succéda un Dieu d’amour, et qui aimait l’humanité entière. […] Il peut n’être pas musicien, mais il est généralement écrivain ; et l’analyse de son propre état d’âme, quand il compose, l’aidera à comprendre comment l’amour où les mystiques voient l’essence même de la divinité peut être, en même temps qu’une personne, une puissance de création. […] Il est évident qu’ils entendent par là une énergie sans bornes assignables, une puissance de créer et d’aimer qui passe toute imagination.

412. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » p. 257

Parmi les choses senties avec esprit & exprimées avec élégance, qu’on rencontre dans son Oraison funebre Henriette d’Angleterre, on peut citer ce morceau, où, parlant des Princes, il dit : « Qu’ils s’imaginent avoir un ascendant de raison, comme de puissance ; qu’ils mettent leurs opinions au même rang que leurs personnes, & qu’ils sont bien aises, quand on a l’honneur de disputer avec eux, qu’on se souvienne qu’ils commandent à des Légions ».

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