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361. (1880) Goethe et Diderot « Diderot »

Avant d’être le carme… qu’il ne fut pas, il avait déjà voulu être jésuite et il avait même porté le cilice. […] Diderot, pas plus que Rousseau, ne ressemblait à Voltaire, si ce n’est par la haine qu’ils portaient tous trois au catholicisme. […] Le roman, pour eux, n’était qu’un véhicule commode pour porter leurs idées plus loin, pour les faire entrer plus avant dans les esprits et dans les cœurs. […] Mais il a porté plus loin qu’aucun autre l’emphase et la jonglerie philosophiques. […] toutes les pièces de Diderot pourraient bien porter ce nom-là.

362. (1865) Introduction à l’étude de la médecine expérimentale

Ce qui peut se résumer en disant que dans l’expérience il faut porter un jugement par comparaison de deux faits, l’un normal, l’autre anormal. […] Elle est l’expression du doute philosophique porté aussi loin que possible. […] Ces moyens sont les poisons que nous pouvons introduire dans la circulation et qui vont porter leur action spécifique sur tel ou tel élément histologique. […] Il nous suffira de nommer ici les conditions physico-chimiques principales du milieu intérieur sur lesquelles l’expérimentateur doit porter son attention. […] La médecine est née du besoin, a dit Baglivi, c’est-à-dire que, dès qu’il a existé un malade, on lui a porté secours et l’on a cherché à le guérir.

363. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIIe entretien. Littérature latine. Horace (2e partie) » pp. 411-480

« Pourmoi, dit-il après avoir parlé de toute l’opulence qu’il ne désire pas, les olives de mon verger, la chicorée, les mauves légères suffisent à mes repas, fils de Latone ; mes vœux se bornent à jouir en paix du peu que je possède, à me bien porter, à conserver mon âme tout entière, à ne pas traîner une misérable vieillesse, et à jouer encore jusqu’à la mort avec la lyre !  […] La terre elle-même frémit des monstres qu’elle a portés, etc., etc. » Qui ne reconnaît dans cette allusion aux conseils de douceur donnés à César par les Muses les conseils de clémence qu’Horace lui-même donnait à Auguste en faveur des vaincus de la république ? […] … Tantôt il fait grimper en les enlaçant aux rameaux les jeunes pousses de la vigne, et, retranchant avec sa serpette les pampres gourmands, il épargne et il greffe ceux qui doivent porter les grappes ; tantôt sur les flancs d’un vallon fermé il regarde avec complaisance ses troupeaux qui le parcourent en le remplissant de leurs mugissements ; tantôt il pétrit le miel de ses ruches dans ses amphores purifiées avec soin ; et, quand l’automne fécond commence à élever au-dessus des champs sa tête couronnée de fruits mûrs, quelle joie pour lui de récolter ces poires greffées de sa main, et ces grappes de raisin teintes de leur pourpre, pour vous en porter en hommage les prémices, ô vous, dieu des jardins, et toi, dieu des forêts qui veilles sur la borne des héritages ! […] Le bon sens exquis jouant avec la sagesse est le caractère de cette épître, la plus belle de toutes les poésies qui portent ce nom. […] « Le monde, dit-il, n’eut jamais d’âme plus candide. » À Capoue ils retrouvent leurs mules, qui portaient les bagages ; là ils quittent la route de Naples pour s’engouffrer dans les gorges de l’Apulie.

364. (1856) Cours familier de littérature. II « XIe entretien. Job lu dans le désert » pp. 329-408

… Jamais bouche mortelle ne porta au Créateur un défi si audacieux de répondre ; jamais homme, peut-être, après Job, ne sentit l’ingratitude et l’horreur de ce don forcé de la vie plus que moi ! […] Le principe de destruction que vous portez en vous, comme le fruit porte le ver, ou comme le temps porte la mort, ou comme le commencement porte la fin, commence à vous disputer, pied à pied, avec douleur, cette petite pincée de matière organisée, ce petit point d’espace, et ce petit éclair de durée que la nature a donnés à une âme, assez grande pour contenir des éternités, et assez vivante pour user des mondes. […] De ce jour vous portez en vous, dans vos rêves, dans vos ambitions, dans vos plans, dans vos joies, dans vos amours, dans vos vertus même (si vous avez des vertus), je ne sais quel pressentiment de la brièveté et de l’inanité de toute chose et de vous-même, qui s’appelle mélancolie, dégoût de vivre, et qui n’est que l’ombre portée de la mort sur la vie. […] Vous déposez votre cœur tout entier, comme un fardeau qui pèse à porter, dans le sein d’une épouse jeune et adorée qui ne doit vous le rendre qu’à la tombe, la mort la cueille dans vos bras, sous vos baisers, et le fossoyeur ensevelit sans le voir deux cœurs dans un seul cercueil ! […] Quand Moïse au désert pensait pour Israël, À ceux qui portaient Dieu, de Memphis en Judée, L’Arche ne pesait pas… car Dieu n’est qu’une idée !

365. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre V. Des orateurs anciens et Modernes. » pp. 223-293

Ctésiphon ayant décerné à Démosthènes une couronne pour récompense de ses services, Eschine, rival & ennemi de l’Orateur, s’éleva contre ce décret, accusa celui qui l’avoit porté, & attaqua personnellement Démosthènes. […] Il porta la force du raisonnement dans l’art de prêcher, comme Corneille l’avoit porté dans l’art dramatique. […] La justesse, l’élégance, la pureté de langage, caractérisent les Sermons de l’Abbé Anselme ; mais on y souhaiteroit plus de cette chaleur & de cette force qui est nécessaire pour porter la vérité & la terreur jusqu’au fond de l’ame. […] Cochin parlant sans avoir écrit, portoit les mouvemens à un degré de force & de chaleur, où peut-être n’auroit-il pu les porter en écrivant.” […] Il compose d’abord un Factum en faveur d’une femme mariée qui disputoit un enfant à une fille, & ce Mémoire ayant été bien reçu du public, on fut, dit-il, endiablé à me croire habile homme, & on me porta des procès de tous côtés.

366. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre III. Le comique de caractère »

Donc, dès que notre attention se portera sur le geste et non pas sur l’acte, nous serons dans la comédie. […] La raison en est qu’on a confondu deux choses très différentes : la généralité des objets et celle des jugements que nous portons sur eux. […] Mais, par là même, l’observation prendra un caractère de généralité qu’elle ne peut pas avoir quand on la fait porter sur soi. […] L’un de nous deux portait un signe particulier, un énorme grain de beauté au revers de la main gauche ; et celui-là, c’était moi. […] Il n’atteindrait pas son but s’il portait la marque de la sympathie et de la bonté.

367. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. de Fontanes »

La famille Fontanes, autrefois établie dans les Cévennes (comté d’Alais), y avait possédé le fief d’Apennès ou des Apennès, dont le nom lui était resté (Fontanes des Apennés)  : un village y portait aussi le nom de Fontanes. […] S’il ne montrait d’ordinaire que de la sensibilité dans le talent, il portait de la passion dans le goût. […] Fontanes servit la pièce en sa place ; le coup porta. […] Dans l’ode au Pêcheur, un trait touchant et délicat sur lequel je reviens, c’est le faible don que le poëte déçu donne à son pauvre semblable, plus déçu que lui : cette obole doit leur porter bonheur à tous deux. […] Quand je portais les yeux sur Paris, j’étais effrayé des périls où je m’exposerais en m’y montrant.

368. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

L’arrêt est porté. […] Au milieu se dressait une estrade qui portait la table royale et le lit où Attila était étendu. […] Roi du peuple contre les grands, il portait la livrée et le chapeau plébéien. […] Les femmes dont les maris étaient en voyage, portaient une ceinture de cuir ou de corde. […] » — Pas de borne où déposer son fardeau, pas de Cyrénéen pour le porter à sa place.

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