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1883. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Cromwell » (1827) »

De là tous ces fantômes créés par la philosophie ancienne. […] Jusqu’alors, et qu’on nous pardonne d’exposer un résultat que de lui-même le lecteur a déjà dû tirer de ce qui a été dit plus haut, jusqu’alors, agissant en cela comme le polythéisme et la philosophie antique, la muse purement épique des anciens n’avait étudié la nature que sous une seule face, rejetant sans pitié de l’art presque tout ce qui, dans le monde soumis à son imitation, ne se rapportait pas à un certain type du beau.

1884. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre I. De la sélection des images, pour la représentation. Le rôle du corps »

Il nous a paru que la philosophie devait adopter ici l’attitude du sens commun, en la corrigeant toutefois sur un point. ; La mémoire, pratiquement inséparable de la perception, intercale le passé dans le présent, contracte aussi dans une intuition unique des moments multiples de la durée, et ainsi, par sa double opération, est cause qu’en fait nous percevons la matière en nous, alors qu’en droit nous la percevons en elle. […] Si la mémoire est ce qui communique surtout à la perception son caractère subjectif, c’est, disions-nous, à en éliminer l’apport que devra viser d’abord la philosophie de la matière.

1885. (1903) Articles de la Revue bleue (1903) pp. 175-627

Songeons surtout qu’aucun poète peut-être jusqu’ici en France, pas même Victor Hugo qui n’a rien retenu du darwinisme ni de l’évolutionnisme, pas même Vigny qui ne fut qu’un pessimiste idéaliste, j’ajoute : pas même Leconte de Lisle qui n’a revécu la philosophie de l’histoire qu’en pur positiviste, n’ont ressenti avec une intensité définitive l’abîme qui sépare l’homme moderne de l’homme antique, et ne semblent avoir eu la sensation du mystère nouveau qu’est devenu l’homme pour l’homme lui-même. […] Bergson dirige les plus consciencieux esprits de la jeune génération vers des méthodes philosophiques nouvelles : il recommande de dépasser le pur concept, et de chercher à atteindre le réel par l’intuition, et de même qu’une refonte des concepts sera nécessaire en philosophie, de même une transformation de la poétique sera nécessaire en poésie.

1886. (1873) Molière, sa vie et ses œuvres pp. 1-196

Rohaut étala à Molière toutes les maximes d’une saine philosophie, pour lui faire entendre qu’il avait tort de s’abandonner à ses déplaisirs. — Eh ! […] Thiers, ou mieux, pour secouer l’anémie intellectuelle qui nous mine, c’est à Molière, c’est-à-dire à la vérité dans l’idée, à la vigueur dans la philosophie, à la franchise dans la langue qu’il faut revenir, et revenir en hâte. […] La dévotion est si raisonnable dans la bouche de Cléante qu’elle me fait renoncer à toute ma philosophie ; et les faux dévots sont si bien dépeints, que la honte de la peinture les fera renoncer à l’hypocrisie. […] Eudore Soulié a réunis, et qui nous font connaître la bibliothèque de Molière, cette bibliothèque petite mais choisie, où, chose étrange, Plaute, Rabelais, les bouffons italiens ne figurent pas, mais où l’on rencontre la Bible, Plutarque, des grecs et des latins, Balzac, Montaigne, un traité de philosophie, des livres d’histoire et des voyages.

1887. (1863) Histoire de la vie et des ouvrages de Molière pp. -252

Ce n’est pas Rohault qu’il avait en vue en composant le rôle du maître de philosophie. […] Luillier, père de Chapelle, détermina Gassendi, son ami, à se charger de lui enseigner la philosophie. […] Gassendi leur enseigna la philosophie d’Épicure, « qui, bien qu’aussi fausse que les autres, a dit Voltaire, avait du moins plus de méthode et plus de vraisemblance que celle de l’école, et n’en avait pas la barbarie ». […] À peine arrivé dans cette ville, le prince y reçut la nouvelle de la mort d’un de ses serviteurs les plus dévoués, de Sarrasin, secrétaire de ses commandements, perte qu’il supporta avec une grande philosophie, à en croire l’abbé de Cosnac. […] Mais j’eus le chagrin de voir qu’une personne sans grande beauté, qui doit le peu d’esprit qu’on lui trouve à l’éducation que je lui ai donnée, détruisit en un instant toute ma philosophie.

1888. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

En le parcourant, on est étonné du nombre prodigieux d’auteurs arabes nés en Espagne, et de la foule d’ouvrages sur la philosophie, la poésie, l’éloquence, les arts industriels, l’agriculture, qui dorment ensevelis dans la bibliothèque de l’Escurial, et qui furent autrefois présentés aux rois de Grenade et de Cordoue. […] L’esprit de l’homme, on le dit en philosophie, on l’éprouve en littérature, n’invente rien d’une manière absolue, même quand il combine les fables les plus chimériques. […] Quant à la croisade des Albigeois, qu’elle ait été jugée par les victimes, nous le concevons ; que la souffrance leur ait donné la philosophie, rien de plus naturel.

1889. (1927) Approximations. Deuxième série

Robert de Billy dans le numéro de La Nouvelle Revue française fq) nous apprend qu’étudiant il s’était plongé dans la philosophie de Platon ; et bien que ses jours fiévreux fussent remplis d’aventures amoureuses et de succès mondains ; bien que jusqu’à la lie il s’abreuvât à la coupe enchanteresse de la vie, tout ce qu’il sentait et tout ce qu’il voyait ne semble qu’avoir confirmé chez le précoce jeune homme la leçon que déjà de Platon il avait reçue, à savoir que la signification véritable de la vie, jamais on ne la trouve dans l’expérience immédiate ; qu’il existe une autre réalité qui ne peut être appréhendée que par l’esprit, et pour ainsi dire créée par l’intellect, une réalité plus profonde et plus ultime, face à face avec laquelle la vie n’est plus éprouvée comme contingente, médiocre, périssable, où les vicissitudes tombent, où la brièveté apparaît une illusion. […] , ou bien du vice selon lui congénital à la philosophie elle-même en tant qu’activité spécifique149, À la trace de Dieu contient des trésors, et qui n’ont rien de « réservé », accessibles au contraire à tous ; mais je ne suis ici que le porteur d’une bonne nouvelle.

1890. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. (Suite et fin.) »

D’abord il semble que la matière, non-seulement n’est pas fort importante, mais qu’elle est tout à fait inutile et indigne d’un homme de votre âge, de votre condition, et, ce qui est plus considérable, de votre vertu et de votre esprit… » Et Godeau, faisant l’agréable, continue sur ce ton pendant une douzaine de pages, comme s’il avait pris à tâche de résumer toutes les objections des La Mothe-Le-Vayer et autres, et de rassembler tout ce qu’on avait pu adresser de critiques justes ou injustes à Vaugelas sur le peu de raison et de philosophie de sa méthode, sur le peu de solidité et de gravité de son livre ; puis, tout à la fin de la douzième ou treizième page, tournant court tout à coup et comme pirouettant sur le talon, il ajoute : « Mais, Monsieur, c’est assez me jouer et parler contre mes sentiments.

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