Des lettres ainsi refaites et retouchées laissent toujours à désirer quelque chose, je le sais bien ; elles n’ont pas la même autorité biographique que des lettres toutes naïves, écrites au courant de la plume, oubliées au fond d’un tiroir et retrouvées au moment où l’on y pense le moins : mais Courier, homme de style et de forme, n’a guère dû faire de changements à ses épîtres que pour les perfectionner par le tour ; ses retouches et ses repentirs, comme disent les peintres, n’ont pas dû porter sur les opinions et les sentiments qu’il y exprime, et le travail qu’il y met, le léger poli qu’il y ajoute n’est qu’un cachet de plus. […] Dans la Conversation chez la comtesse d’Albany, à Naples (2 mars 1812), il agite cette question de savoir s’il y a un art de la guerre, s’il y a besoin de l’apprendre pour y réussir, s’il ne suffit pas qu’il y ait une bataille pour qu’il y ait toujours un grand général, puisqu’il faut bien qu’il y ait un vainqueur ; et il met dans la bouche du peintre Fabre sa propre opinion toute défavorable aux guerriers, tout à l’avantage des artistes, gens de lettres et poètes. […] S’il avait voulu dire simplement qu’il y a bien du hasard à la guerre, que les réputations y sont souvent surfaites ou usurpées, que l’exécution des plans les mieux combinés dépend de mille accidents et de mille instruments qui peuvent les déjouer et les trahir, et que, dans l’art individuel du peintre et du poète, avec toutes les difficultés qui s’y mêlent, il n’entre point de telles chances, il n’y aurait qu’à lui donner raison, et il n’aurait rien dit de bien neuf. […] Quand on a fait la part du rhéteur et du prêtre d’Apollon en lui, il reste une bien plus large part encore, ce me semble, au collecteur attentif et consciencieux des moindres traditions sur les grands hommes, au peintre abondant et curieux de la nature humaine. […] » Il y a des moments pourtant où, voyant tant de choses réelles et mémorables se faire alentour, l’artiste en lui s’éveille et se dit : Je suis peintre aussi !
Mais, avec un peu d’attention, on finit par se reconnaître, comme dans un bal de Cour, au milieu de ce raout de beautés anglaises les plus fines et les plus aristocratiques du monde, et dont le peintre a rendu avec distinction les moindres délicatesses. J’ai sous les yeux la magnifique édition exécutée à Londres en 1792, avec les nombreux portraits gravés ; je vois défiler ces beautés diverses, l’escadron des filles d’honneur de la duchesse d’York et de la reine ; je relis le texte en regard, et je trouve que c’est encore l’écrivain avec sa plume qui est le plus peintre : Cette dame, dit-il d’une Mme de Wetenhall, était ce qu’on appelle proprement une beauté tout anglaise ; pétrie de lis et de roses, de neige et de lait quant aux couleurs ; faite de cire à l’égard des bras et des mains, de la gorge et des pieds ; mais tout cela sans âme et sans air. […] Hamilton n’est pas le Van Dyck de cette cour ; il n’a pas cette gravité du grand peintre royal ; mais il est un peintre à part avec son pinceau doué de mollesse, de finesse et de malice.
Il parle de nos peintres en homme qui a manié, sinon le pinceau, du moins la clef de l’art, et qui a pénétré par une autre porte dans le même sanctuaire. A propos de la Ronde de nuit à Constantinople, de Decamps, on avait reproché au peintre d’avoir forcé et chargé la nature. […] Heine, semblent être des portraits ; mais le peintre n’a point copié la nature avec le scrupule de beaucoup de ses confrères, ni rendu les traits avec une minutie diplomatique.
Il n’eut jamais d’autres fonctions ; mais depuis, chargé de correspondance pour certains journaux, il revit l’Espagne, il visita l’Angleterre ; il savait à merveille ces deux pays, parlait leur langue dans toutes les propriétés de l’idiome, chérissait leurs portes, leurs peintres : il était intéressant à entendre là-dessus. […] Auguste Préault sur cette sympathique figure de poète, et que n’eût point rejeté l’auteur des Portraits contemporains et des Premiers Lundis. c’est qu’il y a eu un très beau portrait, genre Titien, de Fontaney par le peintre Louis Boulanger.
Ô que nos peintres ont peu d’esprit ! […] Je n’ai remarqué ni l’Hebé du même peintre, ni la Musique, ni ses autres tableaux.
Beaulieu (Le peintre), VI, 231. […] Boulanger (Le peintre), IX, 50. […] Gros (Le peintre), IV, 86. […] Gudin (Le peintre), IV, 88. […] Guérin (Le peintre), IX, 137.
A Rome je ne vois à y ranger que Plaute, Plaute mal apprécié encore1, peintre profond et divers, directeur de troupe, acteur et auteur, comme Shakspeare et comme Molière, dont il faut le compter pour un des plus légitimes ancêtres. […] Vauvenargues, qui est de l’avis de Fénelon sur la poésie de Molière, trouve ce poëme du Val-de-Grâce peu satisfaisant et préfère en général, comme peintre, La Bruyère au grand comique : prédilection de critique moraliste pour le modèle du genre. Vous êtes peintre à l’huile, M. de Vauvenargues ! […] La Bruyère et les peintres critiques font des portraits, patiemment, ingénieusement, ils collationnent les observations, et, en face d’un ou de plusieurs modèles, ils reportent sans cesse sur leur toile un détail à côté d’un autre. […] Molière, en son Épître à Mignard, a dit du dessin des physionomies et des visages : Et c’est là qu’un grand peintre, avec pleine largesse, D’une féconde idée étale la richesse, Faisant briller partout de la diversité Et ne tombant jamais dans un air répété ; Mais un peintre commun trouve une peine extrême A sortir dans ses airs de l’amour de soi-même.
Les Productions qu’elle fait naître ont le mérite du Peintre qui imite la nature. […] Les peintres sont asservis à leurs yeux. […] Un peintre comme Holbein imaginera la Danse macabre. […] Mais un peintre d’à présent fera deux marquises et un abbé sur un escalier, et il aura fait le seizième siècle ! […] un peintre expose un matin vingt grands dessins avec cette enseigne : « Ici l’on pense !