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266. (1861) Questions d’art et de morale pp. 1-449

Les arts particuliers, démembrés de cet art général, ont entre eux le même principe, le même but, les mêmes règles que lui. […] Les divers âges de l’humanité et de chaque nation sont signalés par le développement plus particulier de l’un des arts. […] La tragédie n’est, en Grèce, qu’une forme particulière de l’épopée appropriée au génie athénien. […] Les conditions particulières du site et du climat favorisent dans cette ville les rêveries vagues, mais grandioses. […] Il doit envisager toujours le sujet particulier qu’il a choisi sous son aspect le plus général, le plus rationnel, le plus idéal.

267. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1882 » pp. 174-231

Il me parle d’une rêvasserie particulière à cette époque, et à ce sujet il me conte cette petite histoire. […] Des meubles recouverts d’une imitation de velours, chargée de fleurs-rosaces, dont le relief pourpre se détache d’une trame d’or : une imitation très mal faite, et flétrie de cette flétrissure particulière au théâtre, et donnant à la laine, à la soie, au coton des ameublements, quelque chose de la pourriture que l’on voit dans les couronnes des cimetières. […] Zola a cette inquiétude agitée, qui est le caractère particulier de sa nervosité. […] Pas un mot de vérité vraie, des modernes de contes de fée, mais vus avec une optique toute particulière à l’homme : l’optique de l’hyperterrestre funambulesque. […] * * * — Ils sont très particuliers ces Italiens, très différents de nous.

268. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre VI. Autres preuves tirées de la manière dont chaque forme de la société se combine avec la précédente. — Réfutation de Bodin » pp. 334-341

. — Voici la formule éternelle dans laquelle l’a conçue la nature : lorsque les citoyens des démocraties ne considèrent plus que leurs intérêts particuliers, et que, pour atteindre ce but, ils tournent les forces nationales à la ruine de leur patrie, alors il s’élève un seul homme, comme Auguste chez les Romains, qui se rendant maître par la force des armes, prend pour lui tous les soins publics, et ne laisse aux sujets que le soin de leurs affaires particulières.

269. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre I. De la sélection des images, pour la représentation. Le rôle du corps »

J’étudie maintenant, sur des corps semblables au mien, la configuration de cette image particulière que j’appelle mon corps. […] — Que sont donc enfin ces mouvements, et quel rôle ces images particulières jouent-elles dans la représentation du tout ? […] Mais pourquoi ce rapport de l’organisme à des objets plus ou moins lointains prend-il la forme particulière d’une perception consciente ? […] Dans cette masse matérielle simplement possible on isolera l’objet particulier que j’appelle mon corps, et dans ce corps les centres perceptifs : on me montrera l’ébranlement arrivant d’un point quelconque de l’espace, se propageant le long des nerfs, gagnant les centres. […] De ces faits très particuliers on passe à ces deux lois très générales que des causes différentes, agissant sur le même nerf, excitent la même sensation, et que la même cause, agissant sur des nerfs différents, provoque des sensations différentes.

270. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE RÉMUSAT » pp. 458-491

Dans un cahier de souvenirs, dans un de ces albums alors plus rares qu’aujourd’hui et plus intimes, où on lit inscrits les noms des amis, et où l’on recherche de chacun d’eux, avec une curiosité mêlée de tristesse, quelques témoignages particuliers et déjà lointains, je saisis avec bonheur et je dérobe une page toute lumineuse signée du nom de Chateaubriand. […] « de chateaubriand. — 1813 »244. » Il serait bien solennel de se demander si Mme de Rémusat apporta quelque chose de particulier et de nouveau dans la conversation de son temps : elle dut pourtant viser à introduire le sérieux dans la société. […] Une inspiration particulière s’y mêle, on le sent, et en est comme la muse secrète. […] La religion, hors dans certains cas particuliers, veut une vie active. […] Par malheur, en 1815, pendant les Cent-Jours, quelques circonstances particulières, que sans doute elle s’exagéra, la poussèrent à craindre pour des papiers si pleins de choses et de noms : ce qui est véridique est presque toujours terrible.

271. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « De l’influence récente des littératures du nord »

Et il va sans dire aussi que je ne puis tenir compte des effets particuliers produits par Eliot et Sand sur des sensibilités particulières. […] C’est encore et surtout ce qu’on a appelé l’individualisme ; c’est la revendication des droits de la conscience individuelle contre les lois écrites, qui ne prévoient pas les cas particuliers, et contre les conventions sociales, souvent hypocrites et qui n’attachent de prix qu’aux apparences. […] la grande pitié qu’il peut y avoir, par tout ce qu’il sous-entend, dans le renoncement à l’expression des pitiés particulières ! […] Car, non seulement l’Éducation sentimentale est l’histoire de deux jeunes gens, très particuliers comme individus et très généraux comme types, puisqu’ils représentent, l’un, le jeune homme romantique, et l’autre, le jeune homme positiviste, et cela juste à l’heure où la période du positivisme va succéder chez nous à celle du romantisme ; et non seulement cette histoire se combine avec une étude des idées et des mœurs dans les dernières années du règne de Louis-Philippe : l’Éducation sentimentale est quelque chose de plus : l’histoire pittoresque et morale, sociale et politique, de la Révolution de 1848 ; elle nous dit, et avec profondeur, les barricades et les clubs, la rue et les salons, et elle nous montre cette chose extraordinaire : la confrontation effarée des bourgeois avec la Révolution, cette Révolution que leurs pères ont faite soixante ans auparavant, mais qu’ils croient terminée, puisqu’elle les a enrichis, qu’ils s’indignent de voir recommencer ou plutôt qu’ils ne reconnaissent plus quand c’est eux à leur tour qu’elle menace, et qu’ils renient alors avec épouvante et colère. […] Ce qui nous plaît, au bout du compte, dans les œuvres septentrionales, c’est l’accent, l’accent nouveau, particulier, d’idées, de sentiments, d’imaginations qui ne nous étaient point inconnus.

272. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre VI. L’effort intellectuel »

Même, dans le sentiment que nous avons de cet effort, la conscience d’un certain mouvement de représentations tout particulier n’entrerait-elle pas pour quelque chose ? […] Chacun d’eux emprunte une nuance de signification particulière à ce qui le précède et à ce qui le suit. […] On verra tout à l’heure à quelle condition particulière l’opération satisfait quand l’effort s’y joint. […] Il faut donc que le temps d’attente soit rempli d’une certaine manière, c’est-à-dire qu’une diversité toute particulière d’états s’y succèdent. […] Entre la nuance affective qui colore tout effort intellectuel et le jeu très particulier de représentations que l’analyse y découvre, quel est alors exactement le rapport ?

273. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — II. (Fin.) » pp. 281-300

Car La Bruyère, en parlant de Tréville d’une manière si serrée et si incisive, semble avoir quelque chose de particulier à venger sur lui : on dirait qu’il a appris que ce juge dégoûté des ouvrages de l’esprit a ouvert un jour une des premières éditions des Caractères et a jeté le livre après en avoir lu quelques pages, en disant : « N’est-ce que cela ?  […] On invente, on exagère, on empoisonne les choses, on ne les rapporte qu’à demi ; on fait valoir ses préjugés comme des vérités incontestables ; on débite cent faussetés ; on confond le général avec le particulier ; ce qu’un a mal dit, on le fait dire à tous, et ce que plusieurs ont bien dit, on ne le fait dire à personne : et tout cela, encore une fois, pour la gloire de Dieu. […] Mais il avait une trop haute idée de la parole chrétienne pour ne pas la préparer toujours à l’avance, sachant combien les termes en doivent être mesurés : il n’improvisait pas, il aimait mieux redire ses sermons, en y adaptant des portions nouvelles pour les circonstances particulières. […] Il y a dans ces pages une sorte d’essai sur l’amitié humaine considérée dans les amitiés prétendues solides, et dans les amitiés sensibles et prétendues innocentes, qui nous présente un Bourdaloue plus familier et tel qu’il pouvait être dans la direction particulière des âmes : on trouve dans ce qu’il dit de la dernière espèce d’amitié entre les personnes de différent sexe bien de l’observation et même de la délicatesse ; j’y renvoie ceux de mes lecteurs qu’un essai de Nicole n’ennuie pas.

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