C’est que Le Quénoy répondit à un amateur éclairé qui le regardait travailler, et qui craignait qu’il ne gâtât son ouvrage pour le vouloir plus parfait : vous avez raison, vous qui ne voyez que la copie ; mais j’ai aussi raison, moi qui poursuis l’original qui est dans ma tête… ce qui est tout voisin de ce qu’on raconte de Phidias qui projettant un Jupiter, ne contemplait aucun objet naturel qui l’aurait placé au-dessous de son sujet ; il avait dans l’imagination quelque chose d’ultérieur à nature.
Au lieu de se placer au-dessus d’elles, comme les penseurs originaux, il pille les idées de son temps, et ce qu’il en flibuste ne méritait guères d’être flibusté.
Il y a du romanesque dans l’assiduité des grands philologues : leur passion n’est pas apaisée facilement ; et, quand les autres hommes auront fini par être de plus en plus pareils, ils seront les derniers originaux. […] Somme toute, il y avait bien des chances pour qu’un tel papyrus, antérieur aux bévues et aux péchés du grand nombre des copistes, offrît le texte le meilleur et, à peu de chose près, le texte original. […] Seillière est un philosophe ; il a un système, et très original, très étendu, qui embrasse le temps et l’espace. […] Il sera copieux et amer, je t’en réponds. » Un autre jour : « Je crois que l’idée [de mon travail] est originale… Comme j’espère cracher là-dedans le fiel qui m’étouffe, c’est-à-dire émettre quelques vérités, j’espère par ce moyen me purger et être ensuite plus olympien, qualité qui me manque absolument. » Un autre jour : « J’avale des pages imprimées et je prends des notes pour un bouquin où je tâcherai de vomir ma bile sur mes contemporains ; mais ce dégueulage me demandera plusieurs années. » Il écrit, au mois d’avril 1874, à George Sand : « Et vous voulez que je ne remarque pas la sottise humaine et que je me prive du plaisir de la peindre ! […] » Ses légers amis n’insisteront pas et garderont un fidèle souvenir à l’un des poètes les plus originaux et adroits de notre temps ; ils reliront, pour se consoler, dix volumes de lui, tout parfumés les uns de l’odeur des leurs fraîches, les autres de l’odeur des fleurs fanées, tout embaumés de rêverie et de littérature.
Jules Levallois, ce critique consciencieux et élevé, qui a de plus enrichi les volumes d’une Introduction d’une cinquantaine de pages, écrite d’un style ferme et pleine de vues étudiées et originales.
Beaucoup de noms s’y rencontrent, dont quelques-uns célèbres : — Varron d’Atace, le poêle didactique, né dans la Narbonnaise, auteur d’un poème sur la Navigation, et qui traduisit Apollonius de Rhodes ; — Cornelius Gallus, qui imita Euphorion, dont Virgile a immortalisé la passion en quelques vers, et qui n’a rien de commun avec le Pseudo-Gallus contemporain de Théodoric ; — l’historien Trogue-Pompée, que Justin a tué en l’abrégeant (on a sauvé l’Abrégé et laissé périr l’histoire originale).
Paul Est-ce si original !
Comme cette Encyclopédie n’est qu’une pure compilation, dans les premiers chapitres on cite les textes originaux des auteurs selon leur rang d’autorité, c’est-à-dire qu’on cite d’abord les King, grands et petits ; puis les livres de l’ancienne école de Confucius et des écrivains d’avant l’incendie des livres.
Goethe, avec cette impartialité éclectique qui est la force du génie original et qui prend son point d’appui en soi-même, méprisa ces vaines controverses et écrivit sous la seule inspiration de sa nature.