Il y a, je le sais, une génération d’égoïstes, qui a grandi à l’ombre d’une longue paix, génération sceptique, née sous les influences de Mercure, sans croyance ni amour, laquelle, au premier coup d’œil, a l’air de mener le monde.
Amfortas : Tandis que je rêvais à la splendeur de la Promise, dans une ombre de nuit je me suis comme éperdu ; alors j’ai vu un corps, un corps soupçonné de mes songes ; des chairs, des seins, des peaux mollement tressaillantes, un ventre alliciteur des lèvres, et des parfums où se baigner eût été l’exultation ; son visage était grave et riait d’appels aux joies ; elle était folle et manifeste ; ses mamelles se dévoilaient… Et pour avoir touché le sexe d’une advenue aux jours d’erreur, j’aurai les souvenances et les cogitations et des navrances, pendant que se traînera la vérité de mon amour.
Il s’est vu avec la parfaite connaissance de son état, mourir d’une phtisie due à l’alcoolisme, dans une agonie qui a duré six semaines, où il a montré pour la mort, arrivant à petits pas, l’indifférence d’un homme, regardant sur un mur ensoleillé, l’ombre manger lentement la lumière.
Ombres de rêves !
Mais il n’est pas l’ombre d’une preuve en faveur de cette supposition.
C’est l’application du mot de Bacon : « Les hommes ont peur de la mort comme les enfants ont peur de l’ombre. » Cette peur des sens soulevés prend mille formes dans les Histoires de Poe ; mais soit qu’elle se traduise et se spécifie par l’horreur qu’il a d’être enterré vivant, ou par le désir immense de tomber, ou par quelque autre hallucination du même genre, c’est toujours la même peur nerveuse du matérialiste halluciné.
En un sens, Pâris ne tint en effet qu’une ombre. […] À Stendhal nous devons le bienfait d’une conception de vie poétique et romanesque, en toute aisance et clairvoyance, sans ombre de fadeur ni de lourdise. […] Mais pas l’ombre de résurrection dans tout cela, et Katiucha est bien moralement ressuscitée. […] Qu’est-ce que cette « ombre qui précède notre présence réelle, hante cette dimension (la quatrième), bien que nous nous en doutions à peine et que nous ignorions jusqu’à quel point elle intervient, sous d’autres noms, notamment sous le nom d’idéal, dans nos pensées… » ? J’ai d’abord cru qu’il s’agissait de notre ombre projetée sur la muraille ou sur le sol.
Nos petits auteurs essaient de se mettre à l’ombre derrière ces colosses. […] Et moi, je suis une ombre ; je suis l’ombre qui toujours passe, je suis le pleur qui toujours coule, je suis la mort qui toujours agonise, je suis le rien qui toujours doute de son doute, et le néant qui toujours se renie… « Tu m’as brisé, ma vie était dans mon calice ; tu l’as vidé trop tôt. » L’Éternité : « Non, c’était l’heure… Les temps sont épuisés… » Le Christ : « Tout est fini : mets-moi dans le sépulcre de mon père21. » Il est bien parlé dans cet étrange épilogue d’une renaissance de l’être divin, d’un rajeunissement qu’il trouvera dans le tombeau ; et l’auteur semble faire allusion à je ne sais quelle transformation de l’idée religieuse (p. 541). […] L’univers n’est que le rêve de Dieu ; ce Dieu lui-même n’est qu’une ombre qui passe et qui s’efface, une apparition d’un jour, un fantôme qui s’éteint pour renaître, et qu’à l’heure marquée l’Éternité emporte dans les plis de son manteau. […] Le suicide, voilà l’abîme au bord duquel errent comme de pâles ombres, les meilleurs de ceux en qui le doute a peu à peu éteint la vie morale.