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614. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Amédée Pommier »

Il en avait pris noblement son parti, mais ce qui était noble à lui, ce ne le serait pas, à moi, de l’oublier. […] Il aimait mieux, par exemple, exhumer ce mort trente-six fois mort et trente-six fois ridicule d’Abbé de Marolles, que de parler de ce robuste vivant qui s’appelait Amédée Pommier, et qui ne tendit jamais sa noble main à l’aumône d’un article.

615. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Jules Sandeau » pp. 77-90

On l’a loué, et je le loue aussi, d’avoir passé sa vie dans la noble préoccupation du travail, dans le chaste recueillement de l’étude, et de n’avoir jamais demandé qu’à la littérature cette tasse de lait qui manque à tant de soifs, et qui, pour lui, Dieu merci ! […] Les plus nobles de tous les sentiments qui aient jamais agité le cœur des hommes.

616. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

Et je ne parle pas du noble et glorieux paysage des Champs-Elysées, le soir, quand le ciel est d’or derrière l’Arc de Triomphe. […] Mais je la trouvais tout à fait noble et imposante. […] Mais vos nobles artifices ne vous empêchent pas d’être profondément sincère. […] La noble candeur de Mounet-Sully est célèbre. […] Il y a vraiment trop longtemps, ma cousine, que nous n’avons joué au noble jeu des citations.

617. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (2e partie). Littérature de l’Allemagne. » pp. 289-364

Ce n’est pas assez de dire que l’Allemagne a perdu un grand écrivain qui savait adapter toutes les nuances du plus noble style aux sentiments les plus délicats ; qu’est-ce que la forme à côté de tant de pénétration, d’esprit, de noblesse d’âme, de sagesse et d’expérience ! […] L’examen de ce problème marquera, si je puis m’exprimer ainsi, d’un intérêt plus noble, de cet intérêt supérieur qui s’attache à l’humanité, le but final de mon ouvrage. […] Sans doute il est des familles de peuples plus susceptibles de culture, plus civilisées, plus éclairées ; mais il n’en est pas de plus nobles que les autres. […] Pour embrasser l’ensemble de la nature, il ne faut pas s’en tenir aux phénomènes du dehors ; il faut faire entrevoir du moins quelques-unes de ces analogies mystérieuses et de ces harmonies morales qui rattachent l’homme au monde extérieur ; montrer comment la nature, en se reflétant dans l’homme, a été tantôt enveloppée d’un voile symbolique qui laissait entrevoir de gracieuses images, tantôt a fait éclore en lui le noble germe des arts. […] Il faut chercher la source de ces sentiments dans les profondeurs d’un grand et noble caractère.

618. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre III. Molière »

Dimanche, le marchand, créancier né des gentilshommes, et né pour être payé en monnaie de singe ; Madame Jourdain, toute proche du peuple, par son bon sens, sa tète chaude, sa parole bruyante, et sa bonté foncière ; Chrysale, la ganache bourgeoise, épais et matériel, tout occupé de son pot, père et mari sans dignité et sans autorité ; Jourdain, Arnolphe, les bourgeois vaniteux, qui jouent au gentilhomme, prennent des noms de terre, ou frayent avec des nobles dont la compagnie leur coûte cher ; Madelon. […] Voici enfin la noblesse de Paris et de la cour : le noble ruiné, qui se fait escroc, Dorante ; les petits-maîtres, jolis et ridicules, les marquis : Oronte, le grand seigneur qui fait des vers ; Arsinoé, la prude ; Célimène, la coquette féroce et exquise : Clitandre, Alceste, Philinte, Eliante, les vrais honnêtes gens. […] Et pour don Juan, le grand seigneur méchant homme, athée avec conviction, par principe rationaliste, si l’on veut lui trouver des originaux vraiment ressemblants, mieux que les libertins de la Fronde, les roués de la Régence ou les nobles protecteurs de la philosophie, les Richelieu et les Choiseul nous en fournissent. […] Ces bourgeois et ces nobles sont des vaniteux, des orgueilleux, des sots, des habiles, des méchants, des égoïstes, ou au contraire des cœurs droits, de solides esprits. […] Il contribua — bien malgré lui — à enfoncer dans les esprits une idée fausse, née d’une étude superficielle de son théâtre : l’idée d’une comédie de caractères, sans tableaux de mœurs, au comique noble et contenu, et qui serait la forme supérieure de la comédie.

619. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre quatrième »

L’homme qu’il étudie, qu’il cherche en lui et dans le témoignage de l’humanité, c’est, selon ses propres paroles, cet être si grand, qui n’est produit que pour l’infinité ; qui, à l’égard du néant, est tout ; le plus prodigieux objet de la nature ; capable de connaître le bien ; grand, puisqu’il connaît sa misère ; plus noble que l’univers qui l’écraserait, parce qu’il connaîtrait qui l’écrase. […] Le doute de Montaigne, comme la croyance philosophique de Descartes, veulent la réunion des biens de fortune et de santé dans le même homme, avec assez de raison pour ne les point compromettre, et pour en honorer la possession par quelque noble occupation de l’esprit. […] La violence de ses efforts, ses angoisses, ses doutes qui l’épuisent sans le vaincre, parce qu’il sait que, pour l’objet qu’il poursuit, hors de la religion il n’y a qu’impuissance et désespoir, et qu’il faut croire ou mourir ; l’audace même de cette entreprise, qui le mène à rechercher si cette lutte de dix-sept siècles, entre la foi et la raison, ne vient pas de ce que la raison n’a pas été assez haute, ou la foi assez raisonnée, et si la foi n’est pas la perfection même de la raison ; qui donc connaît un emploi plus noble des facultés humaines ? […] Noble exemple, dans ce monde où tant d’habiles gens, qui n’ont rien à donner, invitent néanmoins les autres à les aimer, afin de les avoir plus sous la main pour le service de leur fortune ! […] Le mot d’Arnauld à Pascal, « Vous qui êtes curieux », éclaire une époque de cette noble vie, et nous fait voir quelle était, à l’heure où parlait Arnauld, la direction d’esprit de Pascal.

620. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

« Timide et contraint devant son père, il ne rencontrait l’aise et le contentement qu’auprès de sa sœur Amélie. » La gêne et la lésine, les hôtes inévitables des familles nobles, chargées d’enfants, ruinées et humiliées par le luxe des parvenus bourgeois, aigrirent son caractère dès l’enfance. […] Leurs intérêts les portaient à la révolution, qui émancipait la classe cadette de la nation et qui ouvrait aux cadets des familles nobles la carrière des honneurs, autrefois fermée. […] Les prêtres, qui sortaient des trous où ils s’étaient terrés, soufflaient la haine et la vengeance ; les nobles rentraient arrogants, ils menaçaient de châtier les coupables, de reprendre leurs biens, de détruire ces insolentes et iniques fortunes, que Rivarol appelait de « terribles objections contre la Providence ». […] Elle range dans la catégorie des écrits misérables « Candide et les ouvrages de ce genre qui se jouent par une philosophie moqueuse de l’importance attachée aux intérêts les plus nobles de la vie9 ». […] Tant que la Bourgeoisie eut à redouter un retour agressif de l’aristocratie, les romantiques, emboîtant le pas aux historiens libéraux, ont fouillé le Moyen-Âge pour rapporter de sombres repoussoirs aux délices du temps présent ; mais dès que le Prolétariat, constitué en classe, devint l’ennemi, ils délaissèrent les romans historiques et les horreurs de l’époque féodale pour s’occuper des événements du jour : Zola, le lendemain des épouvantables massacres de la Semaine sanglante, afin d’épargner à la conscience bourgeoise le moindre remords, dépeignit, dans l’Assommoir, la classe ouvrière sous les traits les plus repoussants tandis que les George Ohnet décrivaient avec une servile complaisance l’âme généreuse et noble des maîtres de forges. — Les rapins de 1830 poursuivaient le bourgeois de leurs impitoyables railleries ; mais ayant compris, avec l’âge, que l’argent est un porte-respect, ils se sont domestiqués et ne travaillent que pour mériter l’approbation du bourgeois, qui achète leurs tableaux20.

621. (1856) Cours familier de littérature. I « Ve entretien. [Le poème et drame de Sacountala] » pp. 321-398

disait le père, elle est la racine de tous les maux ; la vie n’est qu’une puissante faculté de douleur… Je t’ai dit autrefois, ô noble prêtresse, mon épouse, ces mots dont tu te souviens : Fuyons vers le lieu où la paix habite ! […] » — Le char vole. « Voyez », dit l’écuyer à son tour au prince, « comme ces nobles coursiers, depuis que les rênes ne retiennent plus leur élan, portent avec grâce en avant leurs fumants poitrails ; la poussière qu’ils élèvent, sans que le fouet les touche, fuit en tourbillons derrière eux ; leurs aigrettes, tout à l’heure agitées sur leurs têtes, semblent maintenant immobiles par la résistance de l’air qu’ils fendent ; ils dressent avec énergie leurs oreilles veinées et nerveuses ; non, ils ne courent pas, ils glissent sur la plaine émaillée de fleurs. » — « J’atteins si vite les objets que je viens à peine d’apercevoir dans le lointain, répond le prince, et je les dépasse si rapidement, que rien n’est loin, rien n’est près de moi. » XVI Le char vole. — Près d’atteindre une gazelle qui s’est levée au bruit, un cri d’effroi s’élève de derrière un rideau d’arbres : « Épargnez la gazelle !  […] Pouvait-on moins attendre d’un noble descendant de Pourou, d’un monarque aussi accompli ? […] Seigneur, la douce familiarité qui règne dans votre conversation m’enhardit à vous faire quelques questions : Pourrions-nous savoir de quelle noble famille vous faites l’ornement ; quelle contrée est actuellement dans le deuil, à cause de votre absence ; et quel motif, vous, dont toutes les manières annoncent une délicatesse exquise, a pu vous déterminer à entreprendre un voyage pénible, pour visiter cette forêt consacrée aux plus rudes austérités ? […] Dissipe-la aussitôt par le plus noble effort.

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