/ 1955
346. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre x »

On dirait que tous les pauvres de toutes les rues et de toutes les routes, que tous les misérables se sont formés en cortège ; mais leur moral est si beau que nous avons toujours envie de les acclamer…‌ … Je fais mon apprentissage de sergent. […] Une minute encore ; jamais nous n’aurons de ces jeunes morts trop d’esquisses, recueillons de celui-ci huit lignes rapides, un portrait moral, que je demande qu’à l’étranger on retienne comme le portrait type du jeune Français. […] Malgré cela, le moral est excellent…‌ Je commande un peloton, c’est-à-dire deux sections : la mienne et celle de l’adjudant blessé par un obus. […] Il me faut sans relâche contempler les grandes idées pour lesquelles je dois combattre, comparer le prix d’une personnalité mesquine et impure à celui des principes moraux qui sont la gloire de notre race humaine. » (Le Semeur d’août 1915.) — Le jeune volontaire Paul Guieysse (tombé depuis au champ d’honneur) confie à l’ami qui l’accompagne au bureau de recrutement : « J’aime tellement la vie que si je n’avais pas une foi entière dans l’immortalité de l’âme, j’hésiterais peut-être à m’engager » (lettre communiquée). — Michel Penet, âgé de dix-neuf ans, chasseur au 8e bataillon de chasseurs à pied, raconte :‌ J’aurais voulu que vous assistiez, comme moi, aux demandes de départ.

347. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — II » pp. 76-92

Il aime à suivre dans les portions de Ronsard qu’on lit le moins, et qui ont peu prêté jusqu’ici aux extraits, dans les discours, les hymnes, les poèmes moraux, des preuves de cette disposition altière et généreuse qui appartenait proprement au tour d’esprit et au talent du poète. […] Gandar son admiration pour une des pièces morales de Ronsard, intitulée : De l’équité des vieux Gaulois. […] Blanchemain, orné de portrait, armoiries, fac-similé d’écriture, se termine par quelques lettres et pièces en prose, notamment deux discours moraux qui ont dû être composés par Ronsard pour la petite académie du Louvre présidée par Henri III.

348. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — III » pp. 476-491

Quant à l’effet moral que lui fait le manège de l’homme vu de près et son inquiétude de succès, il faut l’entendre elle-même : J’ai vu la correspondance de Voltaire (dans l’édition de Kehl, qui paraissait alors), et comme je lis moralistement, elle me fait beaucoup de plaisir. […] que de respect pour la foi jurée dans les rapports les moins moraux ! […] Je sais bien que justement c’est un reproche, et un reproche fondé à faire à cette aimable société, que ce manque d’aplomb moral qui laissait un vague dangereux à la vertu ; mais n’était-ce pas là l’esprit général du siècle, et n’est-ce pas là la source de tous les maux qui ont ensanglanté notre pays après l’avoir bouleversé ?

349. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire de la littérature française à l’étranger pendant le xviiie  siècle, par M. A. Sayous » pp. 130-145

Nous apprenons tout d’abord qu’un notable changement s’opéra, au commencement du xviiie  siècle, dans l’atmosphère théologique de Genève ; il y eut une détente, et le climat moral s’adoucit. […] Si nous revenons à Genève, le baromètre intellectuel et moral y dut éprouver de grandes variations et perturbations, on le conçoit, de la présence dans le voisinage de ces deux météores du xviiie  siècle, Voltaire et Rousseau, du passage orageux de l’un et du séjour prolongé de l’autre. […] [NdA] Mémoires de Marmontel. — Voir aussi, dans les Contes moraux, celui qui a pour titre Le Petit Voyage, et où l’esprit de Mairan est présenté dans sa nuance et dans tout son jour.

350. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poème des champs, par M. Calemard de Lafayette (suite et fin) »

Le poème est divisé en huit livres ; il ne faut pas y chercher une composition bien exacte et bien méthodique : tel livre pourrait aussi bien et presque indifféremment précéder ou suivre l’autre ; c’est une suite de tableaux, de petits cadres, avec des effusions de sentiment et même des digressions morales. […] Il abonde en préceptes moraux et pratiques. […] Les conseils moraux y reviennent toujours, et dans le même sens de l’intérêt bien compris : s’acquérir une bonne renommée parmi les hommes, car la renommée est aussi une déesse, — nous dirions une puissance.

351. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Etienne-Jean Delécluze »

Il n’a ni élévation de style, ni gravité de ton, ni noblesse ou élégance de formes, ni rien de ce dont il parle sans cesse en des termes qui jurent souvent avec le fond ; mais il a dans quelques parties une vérité naïve, un peu gauche, un peu distraite ou inexpérimentée, la sincérité non pas du pinceau (il n’a pas de pinceau), mais du crayon, de la plume ; il a le croquis véridique pour les choses, qu’il sait et qu’il a vues en son bon temps et de ses bons yeux ; il copie honnêtement, simplement, et un sentiment moral, touchant ou élevé, comme on le verra, peut sortir quelquefois de cette suite de détails minutieux dont pas un ne tranche ni ne brille. […] Ici le moral est en jeu, et la délicatesse, la noblesse des sentiments suggère ou supplée celle des manières. […] Le sentiment moral ici approche du talent.

352. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

Quand on veut tout montrer au physique, il faudrait aussi tout justifier au moral. […] Les ennuis du général gaulois durant ce siège insipide de Tunis, son dégoût de cette armée de nègres imbéciles qu’il commande, son regret de n’avoir pas déserté aux Romains avec ses compagnons en Sicile, son découragement moral et physique et son mal du pays, nous sont rendus également avec des couleurs et une harmonie fort savantes. […] Mais pourquoi supposer que la perte du voile et son effet sur le moral des Mercenaires, de ce ramas de bandits et de vieux routiers mécréants, sont pour quelque chose dans cette défaite ?

353. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Gisors (1732-1758) : Étude historique, par M. Camille Rousset. »

Il y avait de quoi ramener les cœurs les plus durs à des sentiments de pitié et de sympathie ; décidément, il y avait rachat : les tortures morales et physiques du prisonnier, les épreuves et les mérites de sa famille avaient dépassé et couvraient les fautes. […] Cette histoire d’un jeune colonel, fils du ministre de la guerre, est devenue sous sa plume l’histoire même de l’armée ; on en a toute une peinture fidèle pour le matériel comme pour le moral, à la date de 1757-1758. […] À cette occasion, son père composa pour lui une Instruction détaillée que de bons juges considèrent comme un chef-d’œuvre en son genre et qui contient tous les préceptes militaires et moraux capables de former un parfait colonel.

/ 1955