— Votre roman… un roman… la France se fiche pas mal des romans aujourd’hui, mes gaillards ! — et par un geste qui lui était habituel, croisant sa redingote sur le ventre, comme on sangle un ceinturon, il prenait congé de nous, et allait porter la triomphante nouvelle du quartier Notre-Dame-de-Lorette au faubourg Saint-Germain, en tous les logis de sa connaissance encore mal éveillés.
Elles imaginèrent de représenter, dans cette apologie, une dame, le chief des dames, l’advocate de toutes les loyales dames du monde ; d’abord triste, abattue, ensévelie dans une douleur profonde ; ne cherchant que la retraite & les bois ; confuse de tout le mal qu’on a dit de son sexe : mais bientôt passant de cet état d’accablement à celui de la fureur & des menaces. […] Ils écrivirent qu’elles avoient mal pris le sens de son livre ; que le roman étoit une allégorie soutenue ; que, par cette rose, l’objet des vœux de l’amant, il falloit entendre la sagesse, ou l’état de grace, ou la sainte Vierge, ou bien l’éternelle béatitude.
Tout cela n’est ni mal entendu, ni mal ordonné.
Une tragedie, dont toutes les scenes prises en particulier seront belles mais mal cousuës ensemble, doit réussir plûtôt qu’une tragedie, dont les scenes bien liées entre elles seront froides. […] Le conseil d’un ami peut bien nous faire supprimer quelques figures impropres ou mal imaginées ; mais il ne peut nous inspirer le genie necessaire pour inventer celles dont il conviendroit de se servir.
Un homme qui invente mal, qui produit sans jugement, ne mérite pas le nom d’inventeur. […] Voilà pourquoi tant de gens, qui raisonnent si bien sur la guerre dans leur cabinet, la font si mal en campagne.
L’homme de génie invente beaucoup, quoiqu’il invente encore mal, et l’autre n’invente rien. […] Il parvient enfin à bien raisonner et à bien prendre son parti, à force de raisonner et de refléchir sur ce qui l’a trompé, lorsque les évenemens lui ont fait voir qu’il avoit mal conclu.
Ce n’est ni Malherbe, ni Guez de Balzac, ni Voiture, ni Boileau, ni Bossuet, ni Pascal, ni La Bruyère, ni Montesquieu, ni Buffon, ni Rousseau, ni Chateaubriand, ni Flaubert, ni même Racine, qui ne s’est pas mal trouvé de faire difficilement des vers faciles. […] Parmi ces derniers, il nomme Stendhal. « Il écrivait mal, dit-il, et il n’aurait rien gagné à essayer de s’amender.
» Et tout ce train de poste et de course vers quelque chose qu’on n’atteint jamais, leur donnera peut-être, intellectuellement toujours, à nos descendants, le mal de cœur que donnent certains véhicules, et aussi l’envie de s’asseoir dans quelque doctrine fixe et reposante et de n’en plus bouger ! « Tout le mal de la vie — disait Pascal — vient de ce que l’homme ne sait pas rester assis dans une chambre. » Eh bien, peut-être ils seront cet homme-là !