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1230. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIe entretien. Boileau » pp. 241-326

Né comme lui et peu de temps après lui dans le même quartier de Paris et presque dans les mêmes conditions de famille, voici comment il en parle à près de quatre-vingts ans, dans un de ses plus gracieux accès de verve : Boileau, correct auteur de solides écrits, Zoïle de Quinault et flatteur de Louis, Mais oracle du goût dans cet art difficile Où s’égayait Horace, où travaillait Virgile, Dans la cour du Palais je naquis ton voisin ; De ton siècle éclatant mes yeux virent la fin : Siècle de grands talents bien plus que de lumière. […] plutôt, sans ce nom, dont la vive lumière Donne un lustre éclatant à leur veine grossière, Ils verraient leurs écrits, honte de l’univers, Pourrir dans la poussière à la merci des vers ! […] Berriat Saint-Prix a recueilli de nos jours et a mis à leur date et à leur vraie lumière chaque syllabe de cette vie poétique ou familière.

1231. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre III. Le roman » pp. 135-201

Mais j’écoutais déjà venir des clameurs confuses, et quand je pénétrai dans tes murs, je reçus en moi la lumière de ta beauté, ô ville radieuse et violente, intarissable source de naissances et de joies, femelle aux seins de soleil et d’amour, aux entrailles ivres et palpitantes et torturées de remous passionnées, ville au sexe de feu !  […] Le Zézère, la Sarabande ou les Sortilèges, font évoluer dans un décor de lumière des êtres heureux de vivre, même au fort des plus réelles souffrances sociales ou amoureuses. […]   Mlle Yvonne Vernon, auteur d’un émouvant, enthousiaste, lumineux et harmonieux recueil d’impressions (Terres de Lumière), a repris le roman provincial dans Claire Maret.

1232. (1926) L’esprit contre la raison

Les projections réelles de leurs œuvres, nul ne saurait en mesurer la force, la lumière, les progrèsbj. […] L’œil d’un Picasso, aigu à percer les nuages commodes, déchire les voiles des brouillards trop doux pour éclairer d’une lumière inexorable les mystères cachés derrière chaque objet, chaque forme, chaque couleur. […] La citation de Descartes fait, par le jeu de la métaphore filée, figure d’étape préhistorique de la pensée figée dans ses certitudes, source d’un positivisme au ras du sol que tout oppose à la lumière incertaine de l’inconnu.

1233. (1893) Alfred de Musset

Ces trois désastres ne lui attirèrent pas la moindre réprimande, parce qu’il s’en montra consterné. » Cette anecdote, qui semble d’abord puérile, jette une vive lumière sur les inégalités de caractère d’Alfred de Musset. […] Tandis qu’on le croyait endormi, en attendant que l’heure du maître arrivât, il restait parfois des heures entières le front posé sur l’angle du cadre ; les rayons de lumière, frappant sur les dorures, l’entouraient d’une sorte d’auréole où nageait son regard ébloui. […] Musset avait vu la lumière de la lune se glisser à travers des vitraux, et il est obligé de la personnifier pour rendre sa vive impression de quelque chose d’aérien et de matériel à la fois, qu’on aurait pu saisir, et qui se coulait cependant par des fenêtres fermées. […] Les héros du drame — on ne saurait trop le répéter — n’ont qu’à gagner à ce que la lumière se fasse. […] Les quartiers populaires, que de larges percées n’avaient pas encore ouverts à la lumière, enchevêtraient leurs rues étroites et tortueuses, favorables à l’émeute et aux guets-apens, autour des palais-forteresses des Strozzi et des Riccardi.

1234. (1932) Les idées politiques de la France

Et le Progrès, ce sont les progrès, ce sont essentiellement deux progrès : le progrès des lumières, pour parler comme le xviiie  siècle, et le progrès des conditions. […] Par le progrès des lumières, il faut entendre ceci : l’institution d’enseignement devenue autre chose que l’instruction élémentaire assurée par la loi Guizot, à savoir un instrument de propagande pour des idées et un moyen d’émanciper les esprits. […] Pareillement, il y a entre la droite et la gauche une césure extérieure, automatique, celle qui met à droite les intérêts, les noms à particule, les militaires, les curés, et à gauche la laïcité, l’esprit de la Révolution, le progrès, comme on dit, vers plus de lumière, de solidarité et de justice. […] L’affaire de l’Action française a mis en pleine lumière des cas de conscience tragiques. […] Le libéralisme a toujours été une doctrine de propriétaires, dont les lumières font ménage avec l’aisance, Mais, comme dit le Corbeau de Leconte de Lisle : Si vous n’aviez mangé de deux jours seulement on verrait ce que vaut votre raisonnement.

1235. (1891) Essais sur l’histoire de la littérature française pp. -384

Taine y a mêlées, consiste essentiellement à chercher l’histoire des transformations d’un peuple dans la série des types littéraires qu’il a créés : non pas, entendons-nous bien, des lumières qui éclairent son histoire, mais cette histoire même dans son expression la plus nette et la plus scientifique. […] Il se la figurait travaillant le soir auprès d’eux, sous la lumière de la lampe ; elle lui broderait des pantoufles ; elle s’occuperait du ménage ; elle emplirait la maison de sa gentillesse et de sa gaieté… » Que s’il s’agit de souvenirs plus tendres et de passions plus vives, M.  […] Le règne de Louis XIV, — et les Mémoires mêmes de Saint-Simon ont fourni moyen de mettre pour la première fois ce fait dans toute sa lumière, — le règne de Louis XIV avait été l’avènement de la bourgeoisie aux grandes charges civiles. […] Et pour cadre à ce tableau des Mille et Une Nuits, au-dessus de vous, le ciel divin de l’Afrique ; autour de vous, Alger la blanche, couchée sur sa colline, semblable à une odalisque qui se baigne dans la lumière ; à vos pieds, ravissante de grâce et de douceur, la mer, plus lumineuse, s’il se peut, que le ciel. […] Pour peu que vous erriez au cours de vos pensées, vous sentez en vous l’Européen se fondre en un Turc, sous la vive sensation de la lumière ; vous devenez homme de Mahomet avec délices.

1236. (1856) Le réalisme : discussions esthétiques pp. 3-105

On n’est vraiment artiste qu’à la condition de combiner ces divers éléments dans ses œuvres, tout en conservant le droit de les faire converger vers celui de ces éléments qui donne le ton à notre nature, ainsi que les rayons épars de la lumière se concentrent dans un verre grossissant. […] Puisse de ce choc d’idées jaillir un peu de lumière ! […] Supposons dix daguerréotypeurs réunis dans une campagne, et soumettant la nature à l’action de la lumière. […] Une sorte d’humour à la Charles Dickens et un sentiment du comique ou plutôt d’un certain comique que vous ne sauriez rencontrer autre part, ajoute un entrain particulier à ces peintures d’un ton cru, qui, loin de craindre la pleine lumière, la recherchent. […] L’art est comme l’amour, comme le vin, comme la lumière, comme le travail, comme la douleur, comme la mort, enfin comme toutes les grandes choses qui forment notre bagage, en se servant les unes aux autres de corollaires, l’art est un niveau rigoureux sous lequel nous devenons tous égaux.

1237. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite et fin). »

J’aime, comme vous, à voir la nature avec goût, avec amour, avec un œil pur et sensible ; et cet œil, qui est ma lumière et mon trésor, je le sens s’éteindre et m’échapper lorsque je mets le pied dans le monde. […] J’ai souvent marché seul dans la route à côté de M. de Saint-Pierre ; j’ai admiré avec lui la lune qui près de l’horizon nous envoyait une lumière rougeâtre à cause des vapeurs qui l’entouraient, et dont le reflet dans la Seine semblait une pyramide de feu élargie vers la base, et rétrécie vers le sommet… M. de Saint-Pierre nous exprimait durant la promenade son regret de n’avoir pas vingt ans de moins pour exécuter le voyage des Alpes avec nous… » « (10 pluviôse an IX, 30 janvier 1801).

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