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299. (1899) La parade littéraire (articles de La Plume, 1898-1899) pp. 300-117

Tribune libre de Maurice Le Blond (numéro du 15 juillet 1898) Carolles (Manche), le 6 juillet 1898. […] Libre à M.  […] -S. — Je ne répondrai pas aux injures sans littérature, dont ont voulu m’accabler certains auteurs dans la « Tribune libre » du dernier numéro de la Plume. […] Tribune libre de M.  […] Comme elle est pleine de courtoisie, elle décevra sans doute les fidèles lecteurs de la Tribune Libre.

300. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIIe entretien. Vie du Tasse (3e partie) » pp. 129-224

Je me regarderais maintenant comme trop heureux si je pouvais seulement, sans crainte du poison, étancher à satiété la soif qui me consume, et, comme l’homme de la condition la plus vulgaire, passer mes jours en paix, mais libre, dans quelque pauvre chaumière de paysan ! […] … Car, ou dans le tronc, ou dans le rameau, l’oiseau vient s’abriter et construire son nid, et la bête féroce choisit sa tanière ; la nature les guide et leur offre les eaux pures, douces, rafraîchissantes, le pré, la colline, la montagne ; respirant l’air salubre et vital, le ciel libre et la lumière qui les enveloppe, les réchauffe, les ravive… « Ah ! […] Le Tasse, après avoir résidé quelques semaines libre à Ferrare, dans la maison de l’ambassadeur des Médicis Serassi, pour s’occuper de recueillir sa fortune et ses manuscrits, partit le 15 juillet 1586 de Ferrare, sans avoir vu une dernière fois Alphonse. […] Mais, après quelques mois de séjour dans cet Éden de poésie, il commença, selon son usage, à se lasser du repos, à soupçonner qu’il n’était pas libre, à quitter Mantoue, à se plaindre de ce que les égards dont on l’avait environné à son arrivée n’avaient plus le même caractère de vivacité et de chaleur, et à parler d’aller à Loretto pour y implorer un nouveau prodige de la Vierge. […] Le Tasse ébaucha en 1594 un autre poème de la Création, en vers libres et non rimés.

301. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIIe entretien. Littérature américaine. Une page unique d’histoire naturelle, par Audubon (1re partie) » pp. 81-159

Le premier jour, en 1833, où je fus admis dans la Société des amis des noirs, société de vertueux et honnêtes citoyens, je demandai la parole et je démontrai aisément le vice radical de nos réclamations : « Vous voulez, dis-je le premier à mes collègues, une transformation du travail forcé en travail libre ? […] VIII Voilà ce que les Américains si opulents du Nord auraient dû dire aux Américains du Sud : « Émancipez vos esclaves, graduellement, prudemment ; nous allons nous cotiser tous pour former l’indemnité nécessaire aux États dépossédés pour payer le travail libre !  […] Mais nous disons : L’Europe a le droit, et nous ajoutons le devoir, de ne pas leur livrer la race latine, l’Amérique espagnole, la moitié qui reste encore libre et indépendante de cette magnifique partie du globe, plus de la moitié du ciel, de la terre et des populations du Nouveau-Monde ! […] Pendant que les gens de lettres, race vaniteuse et parlière, entraient dans cette arène de la conversation où ils se disputaient le prix de l’épigramme et le laurier du pédantisme, l’homme dont je veux parler restait debout, le front haut, l’œil libre et fier, silencieux, modeste, écoutant d’un air quelquefois dédaigneux, et non caustique, les prouesses esthétiques dont le tumulte semblait l’étonner. […] Je m’approchai tout près de la rive sans faire de bruit, mis à mon hameçon un ver de terre dont la plus grande partie était laissée libre pour qu’il pût se tortiller tout à son aise, et jetai ma ligne dans l’eau, de façon qu’en passant par-dessus le bord, l’appât vînt se placer au fond.

302. (1890) L’avenir de la science « III » pp. 129-135

Pour les hommes primitifs, au contraire, le miracle était parfaitement naturel et surgissait à chaque pas, ou plutôt il n’y avait ni lois ni nature pour ces âmes naïves, voyant partout action immédiate d’agents libres. […] Le jet d’eau laissé libre s’élève en ligne droite ; gêné, comprimé, il biaise, il gauchit. De même l’esprit laissé libre s’exerce normalement ; comprimé, il subtilise. […] C’est ce que Hegel entendait dire, quand il avance que chaque penseur est libre de créer le monde à sa manière. […] Ceux qui font reposer la connaissance humaine et le devoir et le gouvernement sur la nature humaine ont l’air de se priver d’un tel fondement ; car le libre examen, c’est la dissidence, c’est la variété de vues.

303. (1840) Kant et sa philosophie. Revue des Deux Mondes

Pendant cette première époque, le Nord est païen, guerrier, libre et poétique ; cette première forme de la civilisation germanique commence à s’altérer avec la conquête. […] Le caractère de cette nouvelle période de l’histoire de l’Allemagne est d’être profondément chrétienne et à la fois monarchique et libre. […] Ainsi, d’un côté foi vraie dans le peuple, et liberté par conséquent, puisque le peuple croyait d’une croyance aussi libre que l’amour qui en était le principe ; d’autre part, ferme autorité dans le gouvernement, parce que cette autorité se fondait sur le libre assentiment des peuples et sur de nobles croyances. […] Remarquons d’abord que la métaphysique n’est point une étude arbitraire, née d’un caprice de l’orgueil, et à laquelle il nous soit libre de renoncer. […] La colombe légère, lorsqu’elle traverse d’un libre vol l’air dont elle sent la résistance, pourrait croire qu’elle volerait encore bien mieux dans le vide ; ainsi Platon oublie le monde sensible, parce que ce monde impose à la raison des bornes étroites, et se hasarde par-delà, sur les ailes des idées, dans l’espace vide de l’entendement pur.

304. (1875) Premiers lundis. Tome III « Les poètes français »

Ce n’est point ici dans le jardin régulier de Le Nôtre qu’on se promène, ce n’est pas non plus dans un jardin dit anglais ; ne prenons point hors de chez nous nos images : c’est dans le jardin français de nos pères, dans le libre et riant enclos du Roman de la Rose, avec ses détours sinueux, ses doubles haies et ses labyrinthes. […] C’est pourtant au xiii e siècle seulement, ce siècle de génie, de véritable et universelle invention, m’il convient, ne l’oublions pas, de rapporter les plus jolies branches et rapsodies de cette libre épopée satirique, celles qui ont encore naïveté et grâce dans l’ironie, une sorte de candeur, et en qui ne percent pas trop outrageusement l’allégorie et la satire tout intentionnelle qui sera l’esprit du Renart final. […] Traducteurs libres et imitateurs des Anciens (car ce fut leur principale fonction), ils n’ont pas été surpassés dans quelques parties de cette œuvre ; ils avaient trempé la langue poétique, en avaient coloré la diction, en avaient assoupli la marche, relevé le ton et multiplié les développements. […] Sachons pourtant qu’en parlant si plaisamment de Malherbe et en traçant le portrait du poète-grammairien auquel il oppose celui d’un libre et naïf génie, c’est-à-dire le sien propre, Régnier jugeait bien plus son adversaire d’après ses propos que sur ses écrits et ses œuvres mêmes. […] Ce sont deux théories, deux tempéraments en présence : d’une part, la théorie de la veine libre et du premier jet, du laisser-aller, de la verve pure et simple quand elle vient et comme elle vient (Régnier ou Alfred de Musset) ; et d’autre part, celle de la verve contenue, élaborée, resserrée et fortifiée par l’art (Malherbe ou André Chénier).

305. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIV » pp. 126-174

L’espace qui restait libre de chaque côté du lit, jusqu’au mur de côté, s’appelait la ruelle, quelle qu’en fût la largeur. […] Elles ne font point corps, elles ne font point agrégation ; mais elles sont une société libre, ou, comme le dit Somaise, un état libre dont le gouvernement n’est pas monarchique . […] Remarquez au reste, comme preuve de la force ajoutée par la diphtongue oi aux mots foi, roi, foi, qu’elle exige une plus forte émission de la voix que lé, ré, fé, qu’elle oblige à desserrer les dents et les lèvres pour s’ouvrir un passage plus libre et comme pour donner aux paroles plus de solennité. […] Enfin, ayant déjà mis sur le théâtre plusieurs ouvrages où le langage et les actions étaient aussi libres que dans la société dont le théâtre est l’image, il avait pu se croire personnellement intéressé à faire tomber des usages nouveaux qui étaient sa condamnation, et pouvaient ruiner son théâtre et la considération acquise par son talent.

306. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure  »

Mais c’est Bayle surtout, c’est son admiration, sa prédilection pour ce libre et vaste esprit qui constitue, à proprement parler, l’originalité de Mathieu Marais à nos yeux, et qui lui fait son rôle dans l’histoire littéraire. […] Un abbé Le Clerc, de Lyon, un prêtre sulpicien, avait été scandalisé, non sans quelque raison et motif, des réflexions de Bayle en matière de religion et de son penchant aux libres propos (turpiloquium) ; ce premier scrupule l’avait conduit à faire des ouvrages de Bayle toute une critique étendue et minutieuse. […] Les objections de Bayle sont disséminées ; on est libre avec lui, comme avec Montaigne, de ne pas les ramasser et, selon l’heureuse expression de Marais, de ne pas « mettre en corps cette armée-là. » Bayle fait la part des nécessités de la société, des infirmités des hommes, et de ce qu’il faut accorder aux impressions machinales qu’excitent les passions. […] Aux pages 387 et 388 du premier volume, Gabrielle d’Estrées est non seulement nommée, mais présentée comme agissant sur les intérêts politiques par la passion qu’elle a inspirée au roi, et laissant par sa mort le champ libre au divorce et au second mariage de ce prince.

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