L'Histoire de ses Voyages est peu intéressante pour le commun des Lecteurs, parce qu'il parcourut peu de pays, & que la découverte des Livres rares, soit imprimés, soit manuscrits, fut son principal objet.
On doit savoir gré à ce Naturaliste, de s’être chargé d’un ministere obscur dans l’idée du commun des Lecteurs, qui cependant suppose des connoissances propres à lui attirer l’estime des Savans.
Cette Histoire n’est cependant pas dépourvue de recherches, de méthode, de netteté ; qualités peu suffisantes pour attacher le commun des Lecteurs, & encore moins ceux qui ne goûtent les faits, qu’autant qu’ils sont présentés vivement & avec un coloris propre à les faire valoir.
Il s’est attaché, dans le style, à la maniere de Bourdaloue ; &, sans avoir, comme son modele, cette profondeur & cette plénitude de raisonnemens qui le rendent original, il a quelquefois plus de chaleur & des traits d’élévation propres à ranimer l’attention de l’Auditeur ou du Lecteur.
De pareils Livres ne devroient jamais trouver des Lecteurs & encore moins des Traducteurs, & cependant, à la honte des Lettres & des mœurs, celui-ci a trouvé les uns & les autres.
Son Essai sur l’Infanterie Françoise est intéressant pour toute sorte de Lecteurs, par la maniere dont il a traité son sujet, & joint au mérite d’un style simple & correct, celui de la méthode & de la précision.
Sa Dissertation, intitulée le Comédien, quoique sur un sujet peu intéressant pour le commun des Lecteurs, a eu la plus grande vogue, & est encore très-estimée aujourd’hui.
Puis, à la fin, que tout le monde obtienne ce qu’il désire ; que la constance inébranlable des héros soit récompensée ; que tout se termine par des noces et des chansons ; que le lecteur puisse, comme dans un conte de fées, conclure par la formule consacrée : « Ils furent heureux et eurent beaucoup d’enfants. » Voilà comment, dans la seconde moitié du xviiie siècle on fait un roman pastoral, et, si vous en doutiez, relisez l’œuvre de ce sentimental capitaine de dragons qui s’est appelé M. de Florian, C’est les yeux fixés sur son Estelle que je viens de décrire ce monde enchanté. […] L’État impersonnel prend la place du monarque ; des institutions permanentes, comme nos diverses Académies, distribuent des prix qui ne sont pas toujours des faveurs ou des aumônes déguisées ; enfin et surtout l’écrivain s’habitue à tirer un profit régulier de ce qu’il publie ; lecteurs, spectateurs, auditeurs lui apportent chacun leur tribut modeste qui, multiplié par dizaines et centaines de mille, dépasse les largesses les plus princières. […] Les titulaires des charges lucratives que l’Eglise laisse s’égarer sur la tête de mondains plus recommandés que recommandables croient devoir, tout au moins sur la fin de leur vie, rimer une paraphrase des psaumes, et de là ces milliers de vers dévots qui ont trop souvent l’air d’avoir été composés pour la pénitence des lecteurs autant que des auteurs. […] C’est qu’ils ont alors des lecteurs dans toutes les villes de France et d’Europe. […] Jules Verne peut voyager, comme ses héros, dans un yacht à lui que lui ont payé ses lecteurs.