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1138. (1894) La bataille littéraire. Sixième série (1891-1892) pp. 1-368

Le lecteur ne s’inquiète pas toujours de cette sincérité, trouvant parfois qu’un fait supposé lui prouve autant que dix qui sont arrivés. […] Léon Daudet a excité la curiosité de la critique, Hærès, le second, va appeler et je voudrais dire retenir sur lui l’attention des lecteurs sérieux. […] Pour que l’esprit ne se perde pas dans l’infini vertigineux où le génie puissant du poète l’emporte, un guide lui est nécessaire, et c’est seulement muni du plan de l’œuvre que j’engage le lecteur à y pénétrer. […] J’en doute, car le bouquin ne sera pas divertissant, et il faudra que le lecteur ait un fier tempérament pour subir 400 pages (au moins) d’une pareille architecture. […] Nous avons l’espoir que le lecteur, après avoir lu le chapitre consacré à la Révolution de Juillet, sera édifié, et reconnaîtra que le duc d’Orléans, à cette époque, n’avait le choix qu’entre l’exil ou le trône.

1139. (1922) Le stupide XIXe siècle, exposé des insanités meurtrières qui se sont abattues sur la France depuis 130 ans, 1789-1919

Leur seul mérite véritable fut de n’exiger aucune autre attention, chez le lecteur, que l’attente, la curiosité bestiale de ce qui va arriver. […] Chez les uns, comme chez les autres, c’est le gaufrier, et une sorte de procédé de fabrication, qui fatigue jusqu’à l’exaspération le lecteur tant soit peu averti. […] Mais imaginez quelle somme d’idées fausses le malheureux lecteur, qui croit d’avance à ce qu’il lit (c’est le cas de tous les primaires), peut puiser dans les œuvres d’Hugo, de Flaubert et de Zola ! […] Il faisait aisément croire aux Polonius de son temps (académiciens, naturalistes, simples lecteurs) que le nuage était un chameau, une belette, ou réciproquement. […] Ce lecteur ne s’en aperçoit pas.

1140. (1895) Hommes et livres

Claretie, qui a été à bonne école, y a pris d’excellentes habitudes de précision et d’exactitude : qu’il y apprenne encore, en préparant par l’érudition les « dessous » de sa critique, à remplir toujours les yeux et l’esprit du lecteur de l’intérêt des idées. […] Claretie sera définitif, et qu’on sera dispensé à l’avenir, quand on s’occupera de Gil Blas, d’étaler d’abord aux yeux du lecteur le fatras et les sottises qui composent aux trois quarts le dossier de l’affaire22. […] Cela me rappelle les romans d’éducation à l’usage de la jeunesse, où le héros prend l’une après l’autre toutes les mauvaises habitudes dont on veut purger le lecteur, toutes les qualités qu’on y veut greffer. […] Homme de transition, il tient un peu du passé ; le trait est encore parfois un peu phrasé, un peu tiré de loin, préparé et comme voituré par des car et des donc, et toute sorte de particules et liaisons oratoires, un peu souligné aussi et démontré, comme si le lecteur encore naïf avait besoin d’avertissement et de commentaire. […] Je n’imaginerais rien de mieux, s’il s’agissait de chefs-d’œuvre dont la beauté serait intacte et l’intérêt vivant : il ne faudrait que les approcher du lecteur et les laisser agir.

1141. (1895) Nos maîtres : études et portraits littéraires pp. -360

Le lecteur comme l’auteur verra tout, les choses et les âmes, à travers cette âme unique et précise dont il vivra la vie. […] Le lecteur n’aura la complète joie de l’art que s’il refait complètement l’œuvre de l’artiste. […] Il n’a point admis que les signes importaient peu, que la bonne volonté des lecteurs suppléait aux insuffisances de la matière. […] Mais les lecteurs de son livre ne se plaindront pas de cet excès de longueur : car jamais encore auparavant il n’était arrivé à M.  […] Mais je craindrais de scandaliser mes lecteurs en insistant plus à fond sur l’inutilité de la critique.

1142. (1856) Le réalisme : discussions esthétiques pp. 3-105

Comme il importe peu au lecteur de savoir de quel côté penchent nos sympathies, nous nous bornons à l’exposition des principes et des faits. […] Ils passent leur vie à donner des coups d’épée ; ils sont tués au second volume ; ils reparaissent au troisième, ils ne meurent jamais, ils font des actions inouïes, et les lecteurs de cabinet de lecture les croient, s’enthousiasment pour ces ferrailleurs. […] Certes, je ne pense à établir aucune sorte de comparaison entre MM. de Balzac, Hugo et Sue ; cependant ces trois romanciers ont cette rare et belle faculté, par des moyens tout différents, de savoir fixer, comme à coups de marteau, une figure dans le cerveau de leurs lecteurs. […] Si incomplet que soit le présent essai, il m’a semblé qu’il pourrait servir à indiquer aux quelques lecteurs du métier à qui je le destine, le cadre d’un grand travail à faire sur les mêmes données, et qui, abordé par une plume plus habile que la mienne, ne serait peut-être pas sans intérêt. […] Par curiosité, je prie le lecteur de relire le manifeste de monsieur Courbet.

1143. (1907) Le romantisme français. Essai sur la révolution dans les sentiments et dans les idées au XIXe siècle

» murmuré par le poète, sinon par le lecteur. […] La prise violente et irrésistible qu’elle donne sur l’âme et même les nerfs du lecteur les entraînait à une sorte de surenchère. […] Les grands effets sur la sensibilité et l’imagination du lecteur, où les classiques n’atteignent que par une progression honnête et savante de la pensée, par une accumulation de traits justes s’achevant dans une conclusion forte et saisissante, furent recherchés et obtenus indépendamment de la valeur du fond.

1144. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite et fin). »

Un jour qu’un lecteur s’étonnait, devant un célèbre auteur de romans et de drames, que ceux qui répandent des choses si touchantes dans leurs écrits parussent souvent en mettre si peu dans leur vie : « Qu’y a-t-il d’étonnant à cela ? […]   ***   J’ai reçu, il y a quelques années, par les soins d’un lecteur bienveillant, des extraits d’un Journal personnel, écrit en 1800 et 1801 par un jeune homme, alors élève de l’École polytechnique, et qui, plus tard, devint professeur et secrétaire de la Faculté des sciences de Caen, M. 

1145. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. (Suite et fin.) »

De leur union résulte cette perfection du bien dire qu’il a en idée, vers laquelle il tend sans cesse, et où il voudrait conduire ses lecteurs. […] Abordant ainsi le sujet à son corps défendant, c’était chose curieuse, pour un lecteur déjà poli, de l’entendre considérer les mots finement, discourir de la pureté des dictions, se demander d’où pouvait procéder, en fait de paroles, cette grande aversion contre celles qui ne sont pas dans le commerce ordinaire, dans l’usage, et en chercher la raison jusque dans les Topiques d’Aristote.

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