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163. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVI. La littérature et l’éducation publique. Les académies, les cénacles. » pp. 407-442

Dans un latin barbare, qui n’avait qu’une lointaine ressemblance avec la langue de Cicéron, on argumentait à perte d’haleine sur telle question oiseuse ou ridicule. […] Toutes les épreuves de la Faculté des Arts étaient orales et se faisaient d’ordinaire en latin. […] Le trait saillant en était la place d’honneur accordée aux classiques latins et grecs ; la Renaissance pénétrait triomphalement dans les collèges. […] Le latin perd du terrain. […] Le latin est trahi par ses meilleurs amis.

164. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre II. Les Normands. » pp. 72-164

Leurs trouvères, comme leurs chevaliers, prennent des deux mains chez les Gallois, chez les Francs, chez les Latins, et se lancent en Orient, en Occident, dans le large champ des aventures. […] Entrez dans une de ces abbayes, où viennent chanter les ménestrels, « où les clercs, après dîner et souper, lisent les poëmes, les chroniques des royaumes, les merveilles du monde101 », vous ne trouverez que vers latins ou français, prose française ou latine. […] Ils s’y attachent comme nos vieux érudits aux vers latins ; ils se francisent comme ceux-ci se latinisaient, de force, et avec une sorte de crainte, sachant bien qu’ils ne sont que des écoliers et des provinciaux. […] On sait que l’original où Wace a puisé pour sa vieille Histoire d’Angleterre est la compilation latine de Geoffroy de Monmouth. […] Latine.

165. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 390-393

Les beautés de la langue Latine étoient aussi familieres au P. […] Brun, [Laurent le] Jésuite, né à Nantes en 1607, mort à Paris en 1663 ; Poëte Latin qui a prétendu égaler les plus grands modeles, en n’imitant que les titres de leurs Ouvrages.

166. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — I. » pp. 88-109

Une fois produit, il travailla vigoureusement à se faire sa place, à concilier l’étude du cabinet avec la pratique : il était littérateur à la façon du xvie  siècle, parlant latin autant et plus volontiers que français ; c’est pour le latin qu’il garde ses élégances : quand il écrit dans sa langue maternelle, son style bigarré exprime à merveille le mélange de goût qui régnait dans les professions savantes durant la première moitié du xviie  siècle. […] Cela est assez vraisemblable, à en juger par la vivacité furibonde qu’il montre à ce sujet dans ses lettres : Si ce Gazetier (c’est ainsi qu’il l’appelle toujours) n’était soutenu de l’Éminence en tant que nebulo hebdomadarius (ces mots de polisson, de fripon à la semaine, reviennent sans cesse sous la plume de Gui Patin, il est vrai que c’est en latin qu’il les dit), nous lui ferions un procès criminel, au bout duquel il y aurait un tombereau, un bourreau, et tout au moins une amende honorable : mais il faut obéir au temps. […] Il fut précédé d’une plainte particulière de Renaudot contre Gui Patin, lequel l’avait traité dans quelque préface latine avec sa bonne grâce ordinaire (nebulo, blatero, toujours le fripon et le polisson). […] Mais, d’autre part, il veut que l’on continue de faire des ordonnances en latin, à grand appareil, ce qui est peu raisonnable et peu d’accord avec son idée de vulgarisation des choses utiles. […] Notre doyen a aussi harangué en latin, en présence du plus beau monde de Paris.

167. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre premier »

Nos guerres dans ce pays nous apportèrent, avec le mal de l’imitation, les livres grecs et latins qui devaient nous en guérir. […] Les plus savants se souvinrent aussi de l’origine latine de ce nom, et firent une perle de celle dont les poètes faisaient une fleur. […] Plus tard, et déjà dans l’âge viril, il rapprit le latin. […] Il dit plus loin qu’« en suivant et en contrefaisant la veine du noble poète Ovide, il a voulu faire sçavoir à ceux qui n’ont la langue latine, de quelle sorte Ovide escrivoit, et quelle différence peut estre entre les anciens et les modernes. » Où il ne croyait faire voir que des différences, sa traduction trahit l’infériorité des modernes à cette époque. […] Il ressemble à quelques égards à Marot, se mettant après trente ans aux études latines.

168. (1899) Esthétique de la langue française « Le cliché  »

Le vers français se fait par le procédé que les régents enseignent avec fruit pour le vers latin ; on a des principes ; on sait que « les épithètes sont destinées à rendre le discours plus énergique » et « qu’elles produisent un ornement sensible dans le style, pourvu qu’elles soient bien ménagées et qu’on en use avec discrétion, sans émousser le goût en les multipliant trop ». […] L’éducation, telle qu’elle est pratiquée depuis trois siècles sans modifications sérieuses, développe particulièrement le goût de la phrase toute faite ; et il importe peu qu’elle soit latine ou seulement française, puisque les auteurs français dont on « orne la mémoire » des enfants sont des succédanés des auteurs latins et leurs meilleurs traducteurs. […] Le latin fut un des meilleurs socs de rechange de cette charrue traditionnelle ; il a creusé un bon sillon dans les cerveaux et préparé une moisson baroque : la citation. La citation est latine, essentiellement. […] Oui, latet anguis in herba : tout cela en somme est traduit du latin.

169. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre X. Première partie. Théorie de la parole » pp. 268-299

On se rappellera ce que j’ai dit, que notre langue poétique, dans la prose, affectait l’imitation de la langue grecque, et que, dans la versification, elle affectait l’imitation de la langue latine. […] Cette littérature, nous l’avons imposée aux autres nations ; puis nous avons voulu introduire de force, dans notre langue des Trouvères, le grec et le latin. […] Dans les traités diplomatiques le français n’a jamais eu à lutter que contre le latin ; à présent cette langue est celle de tous les pays policés, de la bonne compagnie de tous les états de l’Europe. […] Le grec et le latin sont des dérivés. […] Cette imitation de poésie commence chez toutes les nations par des vers satiriques, comme chez les Grecs ; des vers saturniens ou fescennins ; comme chez les Latins ; des blasons, des sirventes, des fabliaux, comme chez nos Troubadours ou nos Trouvères.

170. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre IV Le Bovarysme des collectivités : sa forme imitative »

Sous l’influence de l’idéal hellénique et latin le génie du moyen âge fut contraint de biaiser, de se concevoir différent de soi-même. […] Elle n’y a pas toujours réussi et le dommage fut ici d’autant plus sensible que le génie franc, mêlé déjà au génie latin, représentait sous son aspect le plus original et avec son développement le plus haut la civilisation du moyen âge. […] Fondant les débris des idiomes barbares dans les formes latines, elles composent un dialecte qui est, à cette époque et à la suite de la conquête normande, la langue littéraire de la Grande-Bretagne aussi bien que de la France et d’une partie des pays germaniques.

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