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19. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre deuxième. La force d’association des idées »

D’abord, comment deux impressions, par exemple de la vue et de l’ouïe, éclair et tonnerre, se lient-elles dans le cerveau ? […] Quand deux impressions ont pour siège des portions contiguës et similaires du cerveau, sous quelle forme apparaîtront-elles à la conscience ? […] Les rencontres fortuites d’impressions ne produisent un lien durable que si elles aboutissent ainsi à une classification et viennent se ranger sous quelque loi déjà inscrite dans notre système nerveux. […] Au plus bas degré, le cerveau peut lier des impressions indépendamment de l’intelligence, sinon indépendamment d’une sourde sensibilité et appétition diffuse. […] Le cerveau ne connaissait guère que la contiguïté, dont la similarité d’impressions est une conséquence ; l’intelligence ne connaît guère que la similitude, dont la contiguïté est pour elle une simple espèce et une ébauche.

20. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre II : La psychologie »

L’impression que l’organisme reçoit de chaque objet devient de plus en plus hétérogène. […] D’ailleurs, pour que la correspondance soit possible entre l’être et son milieu, il est nécessaire qu’à mesure que l’organisme est exposé à des impressions plus nombreuses, ces impressions se coordonnent en lui, se centralisent et tendent constamment à l’unité. […] Il consiste à ressentir, à un faible degré, un mouvement, une sensation, une impression. […] Si, à la naissance, il n’existe rien qu’une réceptivité passive d’impressions, pourquoi un cheval ne pourrait-il pas recevoir la même éducation qu’un homme ? […] C’est l’impression de la résistance.

21. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Anatole France »

Quand je cherche à être sincère, à n’exprimer que ce que j’ai éprouvé réellement, je suis épouvanté de voir combien mes impressions s’accordent peu, sur de très grands écrivains, avec les jugements traditionnels, et j’hésite à dire toute ma pensée. […] Mais dogmatique ou non, la critique, quelles que soient ses prétentions, ne va jamais qu’à définir l’impression que fait sur nous, à un moment donné, telle oeuvre d’art où l’écrivain a lui-même noté l’impression qu’il recevait du monde à une certaine heure. […] Il eut cette impression que la vie est bien un songe et que Dieu, s’il fait à la fois le songe de tous et s’il le sait, doit se divertir prodigieusement. […] Mais cette science, qui est à la fois ironie et tendresse et qui agrandit tous les sentiments et toutes les impressions, est la science d’un vieux savant, d’un membre de l’Institut. […] Je ne sais pas d’écrivain en qui la réalité se reflète à travers une couche plus riche de science, de littérature, d’impressions et de méditations antérieures.

22. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre premier. De la première époque de la littérature des Grecs » pp. 71-94

Les beaux-arts ne sont pas perfectibles à l’infini ; aussi l’imagination, qui leur donna naissance, est-elle beaucoup plus brillante dans ses premières impressions que dans ses souvenirs même les plus heureux. […] En exprimant ce qu’on éprouve, on peut avoir un style poétique, recourir à des images pour fortifier des impressions ; mais la poésie proprement dite, c’est l’art de peindre par la parole tout ce qui frappe nos regards. […] La description du printemps, de l’orage, de la nuit, de la beauté, des combats, peut se varier dans ses détails ; mais la plus forte impression a dû être produite par le premier poète qui a su les peindre. […] Les anciens étaient animés par une imagination enthousiaste, dont la méditation n’avait point analysé les impressions. […] Ils devaient leur bon goût aux jouissances mêmes de la nature ; nos théories ne sont que l’analyse de leurs impressions.

23. (1864) Études sur Shakespeare

Les genres se distinguèrent spontanément, selon les principes auxquels ils se rattachaient, selon les impressions qu’ils aspiraient à produire. […] Les impressions de l’homme communiquées à l’homme, telle est en effet l’unique source des effets dramatiques. […] L’unité d’action, indispensable à l’unité d’impression, ne pouvait échapper à la vue de Shakespeare. […] Rien n’est étranger à l’impression que ce qui la détruit ; elle s’alimente et s’accroît de tout ce qui peut s’y confondre. […] De là résulte une impression fausse qui, plus d’une fois, a nui à l’effet des plus beaux ouvrages.

24. (1912) L’art de lire « Chapitre X. Relire »

A force de relire et toujours à peu près les mêmes textes, le professeur en arrive quelquefois à y retrouver toujours les mêmes impressions et, quand il y trouve toujours les mêmes impressions, il les retrouve un peu affaiblies ou comme émoussées. […] Je l’avais où il est ; mais je l’avais plus sensible et plus imaginatif. » L’impression devant un paysage ou devant un livre dépend de ce qui y est et de ce que l’on y met. […] On écrirait très bien une autobiographie avec les impressions comparées de ses lectures et qu’on pourrait intituler En relisant. […] Un médiocre roman oublié, et qu’on croit n’avoir pas lu, et que l’on reprend en mains vous donne une singulière impression quand on s’aperçoit qu’on l’a lu déjà. […] On le continue, parce qu’on ne s’en rappelle pas le dénouement et qu’on veut le connaître ; mais on est sûr que l’impression finalement ne sera pas agréable, et l’on s’en veut de céder à la curiosité, ce qui fait paraître le livre plus mauvais qu’il n’est réellement.

25. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Henri Cantel »

D’un autre côté, malgré sa jeunesse, l’auteur d’Impressions et Visions ne s’est pas donné à l’antiquité tout entier. […] L’auteur d’Impressions, au lieu de se plonger là où disparut Gœthe, a tâté l’eau, mais l’eau est implacable et elle l’a figé dans ses plis. […] Justement, à trois pièces de distance de cette Impression, le pauvre poète, avec cette nonchalance que ne connaissent point ceux qui se convertissent, retombe de ce ciel qui n’était pour lui que la plaine azurée. […] » Et cependant, malgré tout ce paganisme rapetissant et glaçant qui empêche le poète d’Impressions de s’élever et le fixe à la terre, — et même à la fange de la terre dont il est fou, quand elle est blanche et rose, — il y a dans son recueil un talent vrai, très cultivé déjà, et, sous la culture, devenu facile et ample. […] Impressions et Visions (Pays, 24 mai 1859).

26. (1870) La science et la conscience « Chapitre I : La physiologie »

Voulez-vous voir naître la sensation de l’impression sensitive ? […] Voulez-vous voir naître de cette même impression la réaction cérébrale que les psychologues appellent volonté ? […] Tout acte intellectuel n’est qu’une impression transmise au cerveau et convertie en idée par un travail des cellules cérébrales. L’impression est donc le véritable corps simple, l’élément primordial plus ou moins latent qui est au fond de nos idées. […] Comment confondre une impression, une action, un mouvement cérébral, avec un sentiment, une idée, une volition ?

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